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UNIVERSITE PARIS EST CRETEIL
FACULTE DE MEDECINE DE CRETEIL
***************
ANNEE 2011 N°
THESE
POUR LE DIPLOME D’ETAT
DE
DOCTEUR EN MEDECINE
Discipline : Médecine Générale
------------
Présenté et soutenu publiquement le :
à CRETEIL
Par BENENATI Sylvain
Né le 15/12/1980 à Narbonne
-------------
TITRE : Peut-on évaluer par des critères cliniques la nécessité de
radiographies standards en soins primaires dans la prise en charge des
traumatismes du coude ?
DIRECTEUR DE THESE : LE CONSERVATEUR DE LA
Dr Christian Fulleda BIBLIOTHEQUE UNIVERSITAIRE
Signature Cachet de la bibliothèque
du directeur de thèse universitaire
1
Remerciements
Au Dr Christian Fulleda, directeur de thèse efficace, et qui a su motiver les troupes
lorsqu’il s’est agit d’inclure des patients dans un service pourtant oh combien sollicité. Au
professeur Patrick Plaisance qui a accueilli en son service notre étude et a été constamment
de bon conseil,
Au Dr Jacques-Claude Cittée, mon tuteur au département de médecine générale de Créteil,
très bon conseil tout au long de mon internat - la maitrise de santé publique, c’était son idée -,
et toujours très disponible pour répondre à mes nombreux courriels,
Au Dr Xavier Demoucron, qui m’a formé à la pratique de la médecine générale,
Au Pr Patrick Plaisance, au Dr Claude Pouges et au Dr Nicolas Briole qui m’ont formé à la
médecine d’urgence.
Et enfin à ma famille, à Elsa ma compagne qui a supporté ma charge de travail
permanente, à Gabin, qui aura eu la politesse d’attendre au moins quelques heures que je
termine la rédaction de cette thèse avant de naître…
2
Table des matières
GLOSSAIRE 4
INTRODUCTION 5
PROBLEMATIQUE 5
OBJECTIFS 6
GENERALITES, RAPPELS 7
1. EPIDEMIOLOGIE 7
2. ANATOMIE 8
2.1. DESCRIPTION 8
2.2. FONCTION 9
3. LESIONS ET MECANISMES 10
3.1. CLASSIFICATION ET ANALYSE RADIO-CLINIQUE DES FRACTURES 10
3.2. PRISE EN CHARGE EN SOINS PRIMAIRES 14
3.3. PRONOSTIC FONCTIONNEL ET PLACE DE LA REEDUCATION 15
4. CRITERES CLINIQUES POUR LA PRISE EN CHARGE INITIALE 16
4.1. SCORES CLINIQUES PREDICTIFS : GENERALITES 16
4.2. EXEMPLE DES CRITERES D’OTTAWA POUR LA CHEVILLE 17
4.3. CAS PARTICULIER DES TRAUMATISMES DU COUDE 18
METHODES 21
1. OBJECTIFS DE L’ETUDE 21
2. NATURE DE L’ETUDE 21
3. LIEU DE L’ETUDE 21
4. CRITERES D’INCLUSION, ET DE NON INCLUSION 24
5. PERIODE D’ETUDE ET NOMBRE DE SUJETS NECESSAIRES 24
6. RECUEIL DE DONNEES 24
7. ANALYSE DES DONNEES 25
8. PRESENTATION DES RESULTATS 28
RESULTATS 29
1. INCLUSIONS 29
3
2. ECHANTILLON DE POPULATION 30
3. CIRCONSTANCES DU TRAUMATISME, MOTIF PRINCIPAL DE CONSULTATION 31
4. ETAT CLINIQUE 31
5. SUSPICION CLINIQUE ET PRESCRIPTION RADIOGRAPHIQUE 33
6. INTERPRETATION DES EXAMENS RADIOGRAPHIQUES 34
7. DIAGNOSTIC FINAL 35
DISCUSSION 39
1. FORCES ET LIMITES 39
2. PRINCIPAUX FAITS OBSERVES 41
3. IMPLICATIONS POUR LA PRATIQUE 43
4. PERSPECTIVES POUR LA RECHERCHE 43
5. VALIDATION EXTERNE 44
CONCLUSION 46
ANNEXE: FEUILLE DE RECUEIL DE DONNEES 48
BIBLIOGRAPHIE 49
4
Glossaire
EVA : Echelle visuelle analogique (ici, EVA douleur)
FN : Faux négatifs
FP : Faux positifs
FROM : Full Range of Motion, ou Degré de liberté complet sur un nombre d’items prédéfinis.
IAO : Infirmier(e) d’accueil et d’orientation
IC : Intervalle de confiance (par défaut précisé à 95%)
i.e. : id est, c’est-à-dire
RICE : Rest, Ice, Contention, Elevation / Repos, Glace, Contention, Elévation
RV- : Rapport de vraisemblance négatif
RV+ : Rapport de vraisemblance positif
SAU : Service d’accueil des urgences
VN : Vrais négatifs
VP : Vrais positifs
VPN : Valeur prédictive négative
VPP : Valeur prédictive positive
5
Introduction
Aux urgences comme en cabinet de médecine générale, la demande exprimée par le patient
se présentant pour traumatisme implique fréquemment une radiographie. Combien de fois
n’entendons nous pas, lors de l’anamnèse : « Je ne pense pas que ce soit grave docteur, mais
je suis venu quand même pour faire une radio, on ne sait jamais ». Mais admettons aussi que
cette demande rencontre souvent une réponse positive de la part du corps médical...
L’examen clinique et l’anamnèse doivent être évalués, afin de nous permettre de motiver
sereinement et objectivement la « non prescription » d’examens complémentaires, y compris
pour une articulation aussi complexe que celle du coude [10]. A ce même sujet, une thèse
d’exercice en médecine générale datant de 2004 [12] fournissait quelques données
concernant la prescription des radiographies du coude. Mais celles-ci étaient, de l’aveu même
de l’auteur, trop incomplètes. La nécessité d’études prospectives en ressortait.
Pour le non spécialiste confronté à la prise en charge de traumatismes mineurs, la question
concernant le risque manquer un diagnostic de fracture se pose toujours. C’est ainsi qu’une
étude épidémiologique new-yorkaise [13], cherchant à faire le point sur les fractures
manquées à l’examen radio clinique aux urgences, montrait entre autres choses que le coude
était une des localisations les plus difficiles sur le plan diagnostic. Les auteurs nous y
apprenaient également que la prévalence des traumatismes du coude pouvait se situer autour
de 2 à 3 % des consultations d’urgence. Outre le risque de sous-estimation de certains
diagnostics radiographiques, cette étude pouvait aussi remettre en question l’utilité de cet
examen : en effet, une fracture non documentée n’est pas forcément mal prise en charge.
Cependant, on peut soupçonner que la prescription d’examens complémentaires ait un
effet anxiolytique tant pour les patients que pour les médecins. La conséquence en est que la
prescription systématique de clichés standard face et profil semble être la règle (en pratique,
comme dans les recommandations [5]), alors même que des publications [2, 7, 9, 16]
indiquent que certains signes cliniques sont suffisamment corrélés à l’absence de lésion
osseuse.
Problématique:
Inspirés par l’élaboration de scores de prédictions cliniques en traumatologie tels que les
critères d’Ottawa, nous avons voulu créer un algorithme clinique afin d’optimiser la
prescription des radiographies du coude traumatisé pris en charge en soins primaires.
6
En absence de données préalables suffisantes pour connaitre à l’avance le nombre de
patients nécessaires, nous devions commencer par une phase d’étude exploratoire.
Une telle étude n’était pas envisageable en milieu ambulatoire (conditions multicentriques
forcément sur de faibles effectifs) un risque de voir le rythme des inclusions s’essouffler
rapidement. Le choix de réaliser cette étude dans un service d’accueil des urgences nous a
semblé préférable pour cette phase exploratoire.
Objectifs :
– Objectif principal : Développer un algorithme clinique afin d’optimiser la
prescription des radiographies de coude.
– Objectifs secondaires :
o Réaliser une étude épidémiologique des traumatismes du coude dans un
service d’urgences
o proposer à partir de nos données une conduite à tenir pour la prise en charge
diagnostique et thérapeutique non chirurgicale en médecine de ville pour des
patients traumatisés du coude.
7
Généralités, rappels
1. Epidémiologie
Les données épidémiologiques en traumatologie non vitale aux urgences comme en cabinet
de médecine générale sont quasi-inexistantes, en particulier en comparaison avec les données
sur les traumatismes de la main, de la cheville, et du genou.
Pour la médecine générale, une thèse de 2000, analyse les motifs de consultation chez 4
médecins généralistes parisiens (Paris intra-muros) et l’auteur annonce 3,18% de
consultations faisant suite à un accident [22]. Il nous est très difficile d’en extrapoler une
estimation de la part de traumatologie mineure dans l’exercice de la majorité des médecins
généralistes français, puisqu’il s’agit ici d’une étude chez 4 praticiens exerçant à Paris, ville
dans laquelle on retrouve vraisemblablement la plus importante concentration de services
d’urgences et d’orthopédie en France. Aux urgences, il est difficile de réaliser une
épidémiologie fiable de la traumatologie, compte tenu de données informatiques (codage
CIM-10) mal adaptées et surtout mal remplies dans les conditions actuelles d’activité.
Toutefois, il est possible de dresser un tableau global de cette épidémiologie.
Traumatismes mineurs
L’institut de veille sanitaire en France réalise périodiquement des études observationnelles
des accidents de la vie courante. [11]
Entre 1999 et 2001, 140 310 de ces accidents ont été répertoriés dans les services
d’urgences de 7 hôpitaux référents. 44% de ces accidents ont entrainé un retour à domicile
avec ou sans traitement. 45% ont fait l’objet d’un suivi ultérieur sans hospitalisation, et 11%
ont donné lieu à une hospitalisation. Dans 34% des cas, il s’agissait de traumatismes du
membre supérieur.
Traumatismes mineurs du membre supérieur
Dans cette même étude, on note parmi les traumatismes du membre supérieur : 24% de
fractures, 24% de plaie ouverte, 8% d’entorses, 32% de contusion simple.
Traumatismes du coude
Si l’on veut des données plus spécifiques aux traumatismes du coude, il faut remonter
8
jusqu’en 1984. Dans une étude épidémiologique nord-américaine [13], les auteurs
cherchaient à faire le point sur les fractures manquées à l’examen radio-clinique. Le coude y
était un des 3 sites anatomiques (avec le scaphoïde et le calcanéum) où les fractures étaient le
plus fréquemment manquées : ces 3 sites, pourtant peu fréquemment objets des
consultations, y comptent à eux seuls pour 38% de l’ensemble fractures manquées. et un des
3 sites pour lequel la valeur prédictive négative (VPN) de la radiographie était la plus élevée.
Dans cette étude observationnelle aux urgences, 2 à 3 % des consultations concernaient des
traumatismes du coude. On ne connaît pas la proportion de fractures dans cette étude.
2. Anatomie
2.1. Description
Le coude comprend l’extrémité distale de l’humérus et les extrémités proximales de l’ulna
et du radius. Il comprend les articulations huméro-ulnaire et radio-ulnaire proximale.
Extrémité inférieure de l’humérus
L’extrémité inférieure de l’humérus est décrite par ses éléments articulaires : le capitellum
en dehors et la trochlée en dedans, tous deux orientés en bas et en avant et supportés par deux
colonnes (médiale et latérale) constituant la palette humérale.
Tandis que la colonne médiale reste dans le plan frontal de la diaphyse, la colonne latérale
se soulève par rapport à ce plan pour déporter en moyenne de 30° en avant le plan de cette
palette humérale par rapport au plan frontal de la diaphyse humérale.
Artère humérale
L’artère humérale passe en avant de la fosse coronoïde (située en avant et au dessus de la
trochlée), en avant de la trochlée, et bifurque en artère radiale et ulnaire en avant de
l’articulation radio-ulnaire proximale. Il existe entre les portions osseuses sus décrites et
l’artère brachiale le muscle brachial, qui vient s’insérer sur la face antérieure du tiers inférieur
de l’humérus et l’apophyse coronoïde.
Eléments nerveux
Le nerf médian suit l’artère brachiale en avant des articulations du coude. Le nerf radial et
les nerfs cutanés médial et latéral circulent dans la loge antérieure du bras jusque dans l’avant
bras entre les muscles.
9
En cas de traumatisme avec fracture ou luxation, c’est surtout le nerf ulnaire qui est
exposé. Il dans la gouttière épitrochléo-olécranienne en dedans, en arrière et au contact de
l’épicondyle médial. Un déficit du territoire du nerf ulnaire pose l’indication chirurgicale en
urgence d’emblée.
Le nerf ulnaire peut-être testé en évaluant la sensibilité cutanée des faces antérieure et
postérieure des doigts 4 et 5, parfois jusqu’à la face latérale du doigt 3, avec l’éminence
hypothénarienne jusqu’à la face médiale du poignet et de l’avant bras. Le nerf ulnaire
permet la motricité en abduction et adduction des doigts ; une atteinte pourrait par exemple se
retrouver en cas d’impossibilité de croiser les doigts. Le signe « de Froment » permet de
mettre en évidence un déficit du nerf ulnaire (tirant une feuille tenue entre le pouce et
n’importe quel doigt, le patient doit compenser par une hyperflexion du pouce).
Les autres nerfs, médian et radial, ne sont que très rarement lésés en cas de lésion osseuse
traumatique du coude. Le médian, permet le grasping ( la flexion des 5 segments digitaux );
le nerf radial permet l’extension du coude, du poignet et de la main.
Extrémité proximale du radius et de l’ulna
L’extrémité proximale des deux os de l’avant bras est essentielle dans les mouvements
combinés de flexion-extension et de prono-supination.
L’extrémité supérieure du radius est décrite par la tête, de surface apicale concave
s’articulant avec le capitellum, et pourvu d’une colerette articulaire venant pivoter contre
l’incisure radiale articulaire de l’extrémité supérieure de l’ulna.
L’ulna se décompose à ce niveau en processus coronoïde et olécrane, la surface articulaire
en avant de cette dernière étant décrite comme une grande cavité sigmoïde qui vient glisser
autour de la trochlée.
La tête radiale est stabilisée contre l’ulna par le ligament annulaire, épais, s’insérant en
avant et en arrière de l’incisure radiale, et par le ligament carré qui s’insère en bas de
l’incisure radiale et au col radial.
2.2. Fonction
L’articulation du coude est donc complexe, fondamentale dans la plupart des activités de la
vie quotidienne en ce sens que le coude permet de positionner la main et le poignet dans
l’espace pour attraper les objets, manger, se coiffer, s’agripper...
10
Une étude réalisée en 1981 [18] sur la biomécanique du coude sain a été publiée par
Morrey et al. Grâce à un dispositif technique particulier, « l’électro-goniomètre triaxial », fixé
au bras et à l’avant bras des 33 sujets volontaires (15 hommes, 18 femmes), il a été mesuré les
degrés de flexion, extension, et prono-supination pendant des activités telles que manger avec
des couverts, ouvrir une porte, utiliser un téléphone, remplir un verre avec une carafe, ou
encore s’habiller, se coiffer, faire ses lacets. Toutes ces activités nécessitent des combinaisons
de flexion, extension, prono-supination pour des angles définis, sur des différentiels d’angles
définis. L’objectif d’une telle étude était de pouvoir optimiser les plâtres, les techniques
chirurgicales, les attelles orthopédiques.
3. Lésions et mécanismes
Les lésions traumatiques qui nous intéressent sont les fractures, les luxations, les entorses,
les contusions. L’enjeu pronostic de tels traumatismes est avant tout fonctionnel.
3.1. Classification et analyse radio-clinique des fractures
Fractures de l’extrémité inférieure de l’humérus
Nous distinguons habituellement [10] :
• Les fractures totales
• Les fractures parcellaires (c’est-à-dire lorsque au moins une des colonnes
précédemment décrites est intacte).
La classification reconnue par la société française de chirurgie orthopédique [20] permet
une analyse systématique des radiographies face et profil dans ce cadre :
1. Dans le cas des fractures dites “totales”, on distingue:
Fractures supra-condyliennes : les surfaces articulaires sont
épargnées par la fracture.
Fractures sus- et inter-condyliennes : fractures en « T », « V »,
« Y » par exemple ;
Fractures diaphyso-épiphysaires(c’est à dire pour lesquelles le trait
de fracture existe au dessus de l’insertion des muscles latéraux)
Fractures dia-columnaires
2. D’un autre côté, parmi les fractures parcellaires :
Si le trait est sagittal :
o Fracture de l’épicondyle ou de l’épitrochlée si le trait est
11
extra-articulaire,
o Fracture du condyle ou de la trochlée dans les autres cas.
Si le trait est frontal
o Fracture du capitellum,
o Fracture de la trochlée (de « Hahn- Steinthall »)
o Fracture dia-condylienne (de « Kocher »): le trait sépare
d’un bloc trochlée et capitellum dur reste de l’Humérus).
Les mécanismes de telles fractures chez l’adulte sont aussi bien indirects, notamment avec
l’ostéoporose, par chute avec le coude en extension ou semi-flexion, que directs. Le
traitement orthopédique seul ne s’envisage dans de telles fractures que dans le cas des
fractures parcellaires très peu déplacées.
En cas de traitement orthopédique, on réalise habituellement un plâtre brachio-palmaire
avec le coude en flexion à 90°, pour une durée de 30 à 45 jours, associée à une surveillance
radiographique hebdomadaire.
Fractures de l’extrémité proximale du radius
Concernant les fractures de l’extrémité proximale du radius, on distingue les fractures de
la tête radiale de celles, très rares, du col.
Les fractures de la tête radiale répondent à la classification de Mason (figure 1 d’après
Ennis O, Current Orthopaedics 2008 [10], [17]) :
• Le niveau I est une fracture peu déplacée (<2mm),
• Le niveau II est un trait simple avec déplacement d’au moins 2mm, accessible à
une ostéosynthèse,
• Le niveau III est une fracture comminutive non accessible à une ostéosynthèse,
• Et le niveau IV est une fracture de la tête radiale
associée à une luxation (IVa)
ou à une fracture de l’extrémité proximale de l’Ulna (IVb).
Dans ce cadre des clichés 3/4 supplémentaires peuvent être nécessaires. La palpation de
la tête radiale réveille une douleur, ce que l’on peut sensibiliser par la mobilisation.
12
Figure 1 – Classification de MASON des fractures de la tête radiale.
Fractures de l’extrémité proximale de l’Ulna
Enfin, les fractures de l’extrémité proximale de l’Ulna [10] sont celles qui nous
inquièteront particulièrement compte tenu du pronostic fonctionnel et de la déstabilisation
conséquente du coude. La classification cliniquement utile est celle de Morrey (Figure 2
pour l’olécrane, d’après Ennis O, Current Orthopaedics 2008 [10]).
Les traumatismes indirects donnent un trait oblique en bas et en arrière ; les traumatismes
directs donnent souvent un trait transversal sur l’olécrane.
• Pour l’apophyse coronoïde, garante de la stabilité antéro-postérieure du coude, la
classification de Morrey distingue : type I lorsqu’il s’agit d’une avulsion mineure
de l’extrémité de l’apophyse, type II lorsque la fracture déstabilise moins de 50%
de l’apophyse, et type III si plus de 50% de l’apophyse est concernée.
• Concernant les traits de fractures sur l’olécrane [10] :
o Le type I de Morrey correspond à un trait simple ou comminutif très peu
déplacé,
o Le type II correspond à un déplacement de plus de 2 mm avec
conservation des rapports articulaires du coude ;
o Le type III est :
13
Soit une fracture ulnaire associée à une luxation de la tête radiale
(fracture de Monteggia)
Soit une luxation trans-olécrânienne (c’est à dire une fracture-
luxation du coude).
Figure 2 – Classification de Morrey pour les fractures de l’olécrane
La triade terrible du coude
Ce type de fracture inclut :
• fracture de la coronoïde,
• fracture de la tête radiale,
14
• luxation du coude (la plupart du temps postérieure) avec des lésions
ligamentaires.
La clinique est évidente avec une impotence complète du coude et la nécessité d’une
chirurgie urgente. Un exemple en est donné sur la radiographie en figure 3, réalisée sur
un patient âgé de 30 ans qui s’était présenté aux urgences de l’hôpital Lariboisière
(Paris).
Figure 3 – Cliché incidence profil sur triade complexe
3.2. Prise en charge en soins primaires
Les signes de gravités à rechercher rapidement sont : d’éventuels dommages vasculo-
nerveux, une éventuelle fracture ouverte, ou bien un déplacement de la fracture, voire une
luxation associée.
En absence de signes de gravité, les fractures de l’avant bras et du coude peuvent très
efficacement être prises en charge par le médecin de famille [4].
Par exemple, les fractures de tête radiale Mason type I peuvent être traitées par le médecin
généraliste par une gouttière plâtrée durant 5 à 7 jours associée à prise en charge de
rééducation précoce [4,10] ; dans ce cas, un contrôle radiographique à 7 jours est utile voire
nécessaire pour rechercher un déplacement secondaire. Certains auteurs vont jusqu’à proposer
15
de ne pas immobiliser du tout de telles fractures [10], alors même que les fractures de la tête
radiales MASON I peuvent être facilement manquées à la radiographie[4].
Par ailleurs, certaines fractures de l’olécrâne [10,14] stables sans atteinte de l’appareil
extenseur sont traitées seulement orthopédiquement (plâtre brachio-palmaire 30 à 45 jours
avec contrôle radiographique hebdomadaire). En pratique la gouttière plâtrée est idéale, mais
des systèmes de contention semi-rigide sont également commercialisés dans le cas où un
médecin généraliste ne serait pas équipé pour réaliser des plâtres.
En dehors de ces deux exemples, qui constituent la majorité des cas de fractures, un avis
spécialisé s’imposera compte tenu du pronostic fonctionnel défavorable en absence de prise
en charge chirurgicale.
Il faut alors expliquer aux patients que si cette absence de prise en charge peut leur être
délétère, en revanche la bonne prise en charge peut quasiment toujours amener à un bon
pronostic. Par exemple, la triade terrible du coude est, dans les séries les plus récentes [6], de
bon pronostic sur les plans fonctionnel et algique, à plus de 5 ans de suivi, malgré une
chirurgie toujours complexe.
3.3. Pronostic fonctionnel et place de la rééducation
A distance d’un traumatisme du coude, la principale préoccupation est la récupération
d’une mobilité complète sans douleur récidivante, en évitant également les lésions nerveuses.
La définition de la place de la rééducation souffre d’un manque de données et d’études
prospectives [8]. Pourtant, en pratique, tout le monde s’accorde sur la nécessité d’une
rééducation la plus précoce possible comme déterminant d’une meilleure récupération. Cette
dernière se jugerait notamment sur l’extension du coude dans le cas des luxations, la capsule
articulaire étant la plus souvent touchée.
Les résultats les plus récents proviennent de petites séries telle que celle de Myden et al
[19]. Cette dernière série nous apprend, sur un effectif de 25 patients opérés, que la reprise
d’une mobilité complète continue de progresser à 1 an, et que l’absence de progression à 3
mois force à la reprise chirurgicale, le plus souvent par le biais d’une inflammation chronique
et d’une mauvaise cicatrisation de l’appareil ligamentaire et articulaire. Seuls 3 patients ont
nécessité une reprise chirurgicale et 2 patients n’ont pas totalement récupéré.
16
4. Critères cliniques pour la prise en charge initiale
4.1. Scores cliniques prédictifs : généralités
Aux urgences comme en cabinet, le clinicien est amené chaque jour à prendre une
multitude de décisions cliniques.
L’objectif des scores cliniques est d’aider à la décision et de « réduire la part d’incertitude
dans toute prise de décision en standardisant la prise de données et l’interprétation des
données cliniques » [23].
Il existe une méthodologie pour la construction et la validation de ces scores cliniques.
Celle-ci est largement décrite à travers les articles traitant des nombreux scores cliniques
publiés à ce jour. Or, comme le font remarquer Toll et al en 2008 dans le Journal of Clinical
Epidemiology [24], les articles qui apportent une validation externe et qui étudient l’impact de
ces scores sont beaucoup moins nombreux.
Pour mettre en place un score clinique, plusieurs principes ont pu être énumérés, en voici
les plus pertinents pour notre cas :
– Le diagnostic ou le résultat à prédire doit être bien défini pour pouvoir être évalué
– Les éléments cliniques prédictifs doivent être clairement définis au moment du
protocole, et doivent être standardisés pour pouvoir en faire l’analyse
– Les sujets doivent être sélectionnés sans biais, avec un minimum de restrictions à
l’inclusion
– L’analyse statistique doit être prévue au moment de la définition des variables à
collecter.
– Sensibilité, spécificité, valeur prédictive positive et négative doivent être évalués.
o Rappel :
Sensibilité et spécificité sont des données de validité intrinsèque.
• La sensibilité est la probabilité qu’un test soit positif si le patient
est atteint ; Sensibilité =VP/(VP+FN)
• La spécificité est la probabilité que le test soit négatif si le
patient est indemne. Spécificité = VN/(VN+FP).
Valeur prédictive positive, Valeur prédictive négative :
• VPP = VP/ (VP+FP), la probabilité que le patient soit atteint
quand le test est positif.
17
• VPN= VN/ (VN+FN), la probabilité que le patient soit indemne
quand le test est négatif.
– Une étude d’impact doit être réalisé, secondairement, pour validation externe.
4.2. Exemple des critères d’Ottawa pour la cheville
Un exemple, intéressant parce qu’il est internationalement reconnu et utilisé, est celui des
critères d’Ottawa pour les traumatismes du pieds et de la cheville.
Ce score ou ces “règles” ont été énoncées parce que ce type de traumatisme était (et est
toujours) un motif très courant de consultation : on estimait en 1999 aux Etats-Unis à 5 à 10
millions de traumatismes de cheville sur l’année [3].
Avant l’utilisation du score, les radiographies étaient demandées de manière routinière
alors que les fractures concernaient moins de 15% des patients. Et malgré coût unitaire faible
d’une radiographie, le coût annuel global de cet examen pour la cheville atteignait, pour les
systèmes de santé américain et canadien, 500 millions de dollars par an. Dans le même
temps, on pouvait estimer le coût annuel des traumatismes de cheville à 2 milliards de dollars
par an en Amérique du nord [3].
Sur une population de 750 patients en prospectif puis sur une cohorte de validation de 1485
patients, les règles d’Ottawa pour les traumatismes de cheville ont été énoncées puis évaluées.
Depuis ces études, il a été démontré une diminution de 27% des radiographies prescrite au
niveau de la cheville, et de 14% pour le pied [1]; les patients pouvaient passer en moyenne 36
minutes de moins grâce à ces règles. Le taux de prescription de radiographies passait ainsi de
83 à 61% [23].
Finalement, l’économie finale dégagée par l’implémentation des règles d’Ottawa a pu être
évaluée, dans les systèmes nord-américains, de 600 000 à plus de 3 millions de dollars US
par an pour 100 000 habitants [1].
L’équipe d’un service d’urgences recevant un peu plus de 76000 consultations par an avait
pu montrer une sensibilité de 94.6% pour une spécificité de 15.5% aux règles d’OTTAWA
pour la cheville, et une sensibilité à 93.1% pour une spécificité de 11.5% aux règles
d’OTTAWA pour la détection de fractures du médio-pied. En comparaison, cette même
équipe avait évalué les sensibilités du sens clinique de leurs médecins à 69% et 76 %
respectivement pour la cheville et le médio-pied.
18
Donc ce type de score peut avoir son utilité, en terme de coût, en terme clinique, en terme
de confort (diminution du temps passé aux urgences ou diminution du temps passé à aller
faire une radiographie si elle se révèle inutile dans certaines conditions) pour le patient et pour
le médecin qui décide de ne pas prescrire de radiographie avec une certitude diagnostique
accrue.
4.3. Cas particulier des traumatismes du coude
Dans le cas des traumatismes du coude, les données épidémiologiques sont parcellaires;
aussi la comparaison va être difficile dans un premier temps avec les traumatismes de la
cheville.
Ce dont nous sommes certains est que la prévalence sera moindre.
Et comme nous l’avons montré, le spectre de gravité (c’est à dire de type de traumatismes
mettant en jeu le pronostic fonctionnel en cas de mauvaise prise en charge) peut être large, de
la triade terrible ou de la luxation à la contusion simple.
En absence de données complètes sur le sujet, les plus récentes recommandations en
France émanant de radiologues datent de 2005 et se contentent, concernant le coude, de fixer
des critères qualités en termes de délai d’imagerie : moins de 4h pour un cliché Face et Profil
du coude, sans conditions précisées, et moins de 24h en cas de scanner du coude [4]. Les
critères de non prescription de clichés radiographiques ne sont évidemment pas précisés
puisque très peu évalués.
Des tentatives d’évaluation de critères cliniques isolés ont été réalisées pour prédire
l’absence de fracture.
En 2002, Docherty et al [9] ont évalué l’extension complète du coude comme facteur
prédictif négatif de fracture. Sur une cohorte de 114 patients, la radio y a été interprétée
systématiquement à l’aveugle par le radiologue pour analyse. Les patients inclus devaient
avoir 14 ans au moins (en pratique le plus jeune avait 16 ans) et consulter pour un
monotraumatisme de moins de 24 heures. L’antalgie donnée ou prise avant l’examen clinique
n’était pas précisée. La seule fracture manquée par le test d’extension était une fracture de la
tête radiale non déplacée. Plusieurs limitations sont à déplorer dans cette étude. Le parti pris
était d’emblée de n’évaluer que l’extension complète ; une régression logistique pour réaliser
un score clinique n’était pas envisagé ; l’inclusion dès 14 ans pouvait fausser quelque peu
l’étude avec une population pas tout à fait adulte. Par ailleurs l’étude était monocentrique, il
19
ne pouvait s’agir que d’une étude pilote. Dans cette étude, on dénombrait 6 fractures de
l’olécrane, 5 de la coronoïde, 17 fractures de la tête radiale, et 4 fractures de l’extrémité
inférieure de l’humérus. Dans ce travail de recherche on estimait à 97.3% (IC : 84.6 à 99.9%)
la sensibilité, et 69.4% (IC: 57.3 à 79.5%) la spécificité de la capacité d’extension complète
active pour prédire une lésion osseuse.
Une autre étude prospective sur l’extension complète [2] a été réalisée. Celle-ci,
multicentrique, a eu pour objectif de tester l’extension complète seule chez des adultes
comme chez des enfants. 2127 patients sur 21 mois (juillet 2004-avril 2006) ont été évalués,
mais finalement 1780 ont été inclus, dont 960 adultes. Ces adultes avaient entre 16 et 94 ans
(moyenne à 38 ans), étaient à 51% des hommes. 31 % des patients inclus étaient victimes de
fractures. Parmi les 313 adultes capables de réaliser le test d’extension active, 5 avaient des
fractures dont 2 ont nécessité une sanction chirurgicale. Parmi les adultes et les enfants, ce
sont 17 fractures au total qui ont été diagnostiquées, dont 14 d’emblée parce que la
radiographie avait été réalisée en violation avec le protocole. Pour autant une sensibilité
satisfaisante au test d’extension active complète a été trouvée pour les adulte, avec une
estimation de 96.3 à 99.5% pour le critère de jugement “fracture présente”, et de 95.2 à 98.6%
pour le critère “fracture et/ou hémarthrose à la radiographie”. Finalement, malgré un très
grand effectif, on peut toujours craindre des diagnostics manqués de fracture avec ce test
simple.
D’autres tests de mobilité tels la flexion, le test en passivité de la flexion/extension et le
test de la prono-supination n’ont pas été évalués; or on pourrait une améliorer la sensibilité et
la spécificité, afin d’obtenir une diminution supplémentaire du nombre de radiographies
prescrites à tort.
Une étude en conditions de médecine de ville a été tentée en 2007 [16] : la question posée
était de savoir si l’extension seule pouvait permettre de se passer de radiographie en soins
primaire en extra-hospitalier. Portant sur seulement 70 patients, cette étude en réalité n’a
malheureusement rien apporté de nouveau.
En revanche l’étude de Darracq et al de 2008 [7] tentait, dans un service d’urgences,
d’évaluer, de manière non standardisée, l’ensemble des mouvements (extension, flexion,
prono-supination) du coude traumatisé. Ces derniers ont été évalués en détaillant le caractère
actif ou passif de l’examen. Sur 407 patients inclus, 331 (81.3%) ont été radiographiés. Parmi
eux, 320 ont subi un traumatisme moins de 24h avant la consultation. Et il est gênant que la
proportion de patients de moins de 17 ans ne soit pas donnée. Pris individuellement, le signe
20
du déficit d’extension complète affiche une sensibilité autour de 92.4% (Spécificité autour de
64.1%), le déficit de flexion autour de 74.3% (Spécificité autour de 62.1%), le déficit en
prono-supination autour de 80% (spécificité autour de 51.8%). Par ailleurs l’évaluation
composite de l’ensemble de ces degrés de mobilité, lorsqu’ils sont déficitaires, permettrait
d’après les auteurs d’améliorer la sensibilité pour la détection de fractures vers 97.6% (entre
94 et 99%) avec une spécificité autour de 21%..
En conclusion nous le constatons, il y a bien un intérêt à évaluer les facteurs prédictifs de
radiographie non contributives dans les traumatismes du coude.
Une analyse des critères cliniques et anamnestiques des traumatismes du coude n’a pas
encore été réalisée de façon exhaustive; lorsque des tentatives d’évaluations de facteurs
prédictifs ont été publiées, c’était jusqu’à présent pour prédire une anomalie radiographique
type fracture, et non pour prédire l’incidence de la radiographie dans la prise en charge.
21
Méthodes
1. Objectifs de l’étude
Notre problématique de départ :
• A l’instar de scores de prédictions cliniques bien connus tels les critères
d’Ottawa, nous avons voulu créer un algorithme clinique afin d’optimiser la
prescription des radiographies du coude traumatisé pris en charge en soins
primaires.
• En absence de données préalables suffisantes pour connaitre à l’avance le nombre
de patients nécessaires, ce sera une étude exploratoire. Elle permettra de faire un
bilan épidémiologique des traumatismes de coude vus en soins primaires.
Objectifs de notre étude
Objectif principal : Développer, par l’analyse des éléments cliniques associés au
coude traumatisé, un algorithme clinique permettant d’optimiser la prescription des
radiographies standard de coude.
Objectif secondaire :
o Réaliser une étude épidémiologique des traumatismes du coude dans un
service d’urgences parisien
o proposer à partir de nos données une conduite à tenir pour la prise en charge
diagnostique et thérapeutique non chirurgicale en médecine de ville pour des
patients traumatisés du coude.
Pour répondre à nos objectifs, nous avons réalisé une étude observationnelle de la prise en
charge des traumatismes du coude aux urgences d’un hôpital parisien.
2. Nature de l’étude
Le mode d’étude exploratoire de cohorte observationnelle prospective a été choisi.
3. Lieu de l’étude
Nous avons choisi le Service d’Accueil et de Traitement des Urgences du CHU
Lariboisière faisant partie de l’Assistance Publique des Hôpitaux de Paris (APHP). Il est situé
dans le 10ème arrondissement de Paris. Il comprend différents services de médecine, de
chirurgie, deux réanimations et un Service d’Accueil des Urgences (SAU).
22
Le SAU Lariboisière remplit les conditions du Code de Santé Publique puisqu’il est
capable de :
– dispenser en hospitalisation complète des soins de courte durée ou concernant des
affections graves pendant leur phase aiguë en médecine, chirurgie, obstétrique, ou
psychiatrie ;
– et fait parti d’un établissement possédant un service de réanimation et des services de
médecine.
Missions du SAU
– Accueillir, sans sélection 24h/24, tous les jours de l’année, toute personne se
présentant en situation d’urgence y compris psychiatrique.
– Prendre en charge la personne, notamment en cas de détresse vitale.
Le SAU Lariboisière de par son activité est le premier SAU de l’APHP avec 65000 passages
par an (2005).
Organisation du SAU.
Le SAU est organisé en différents secteurs :
1. L’accueil avec en permanence 2 infirmières d’accueil et d’orientation (IAO) :
o Prise en charge initiale du patient avec recueil de différentes informations :
Motif d’arrivée, constantes vitales, un ECG est réalisé si nécessaire.
En fonction du motif de présentation et du degré d’urgence le
patient est orienté vers l’un des secteurs de soins du SAU.
o En cas de gravité patente ou de doute sur l’orientation, l’IAO peut prendre
avis auprès du médecin coordonnateur afin d’optimiser la prise en charge.
2. Le secteur médecine comprend 5 boxes de consultation :
• En journée (9h-18h) un médecin senior, un interne et un externe en
composent le personnel médical.
• De garde (18h-9h) le médecin senior est associé à un interne.
• Le personnel paramédical est composé d’une infirmière et d’un aide-
soignant 24h/24 avec un renfort possible d’une infirmière en fonction de
l’activité. A l’issu de sa consultation le patient peut soit retourner à
domicile, soit être admis dans l’un des services d’hospitalisation ou dans
23
l’Unité d’Hospitalisation de Courte Durée (UHCD).
3. L’ UHCD a une capacité de 13 lits d’hospitalisation : 8 brancards et 5 chambres.
• En journée un médecin senior, un interne, un externe, une infirmière et
2 aides soignants en composent l’équipe. En garde le médecin
coordonnateur est responsable de cette unité.
• Les patients nécessitant une surveillance y sont hospitalisés avant
réévaluation. L’orientation se fait alors soit en hospitalisation classique
soit par un retour au domicile.
4. La salle d’accueil des urgences vitales (SAUV) : il s’agit de l’unité de déchoquage
du service :
• Elle est composée de 6 boxes tous munis d’un scope, dont 2 « lourds »
munis chacun de tout le matériel nécessaire à la surveillance d’un malade
intubé.
• En journée y travaillent un interne et un externe sous la responsabilité du
médecin coordonnateur du service, en garde le médecin coordonnateur est
secondé par un interne. Deux IDE et un aide soignant y sont postés en
permanence. On y reçoit les patients en détresse vitale patente ou latente.
5. L’unité de traumatologie compte 4 boxes, dont 2 dédiées à la réalisation des
plâtres.
• L’équipe est composée, en journée d’un médecin senior, d’un interne et
d’un externe avec un second médecin senior en renfort l’après-midi, en
garde d’un médecin senior secondé par un externe. Une infirmière et un
aide soignant y sont positionnés en permanence
6. Une antenne de radiologie d’urgence jouxte le SAU permettant de pratiquer avec
une attente minimale les radiographies standard. Le SAU de l’hôpital Lariboisière
est un SAU catégorie A, il est apte a prendre en charge tous les patients quelque
soit le motif de consultation.
Organisation de l’étude
Les patients inclus le sont généralement dès l’accueil infirmier au box d’orientation où les
patients sont si possible déjà sensibilisés à cette participation ; cela peut permettre de
sensibiliser à leur tour les médecins affectés à l’unité de traumatologie qui font face le plus
souvent à de grands flux de patients. Par ailleurs des formulaires sont également disponibles
dans l’unité de traumatologie pour inclure les patients non repérés dès le box d’I.A.O.
24
La sensibilisation à ce protocole, ainsi que l’utilisation du formulaire de l’étude, ont été
exposés en réunion de recherche du service au début du mois de février 2010. Le médecin
référent de l’étude, un médecin référent était disponible pour toute question concernant le
protocole. Des présentations pour sensibiliser les équipes régulièrement étaient d’emblée
prévues, notamment compte tenu des changements de personnels dans le service (internes en
médecine générale dont la rotation était prévue début mai 2010, donc au milieu de l’étude).
4. Critères d’inclusion, et de non inclusion
Inclusion
Tous les patients âgés d’au moins 18 ans, se présentant avec parmi un de leurs motifs un
coude douloureux post-traumatique ou un coude avec impotence fonctionnelle post-
traumatique, pour lequel au moins un cliché radiographique du coude est jugé nécessaire par
le médecin investigateur.
Non inclusion
Aucun critère.
5. Période d’étude et nombre de sujets nécessaires
La phase exploratoire était prévue pour durer de 1 à 6 mois, les objectifs de nombre de
sujets attendus étant de 30 patients minimum dans chaque tranche « radiographie nécessaire »
versus « radiographie non nécessaire » (grossièrement « luxation ou fracture » versus «
contusion ou entorse »). Mais pour pouvoir affiner cet objectif minimaliste en fonction du
rythme d’inclusions et de l’incidence des lésions radiologiquement pertinentes, une analyse
intermédiaire dès l’objectif de 30 patients inclus devait être réalisée.
6. Recueil de données
Le feuillet de recueil des données de l’étude est joint en Annexe.
Nous voulons donc évaluer :
• Le motif principal de consultation du patient, son âge et son sexe ;
• Le mécanisme du traumatisme et ses circonstances,
• L’Echelle Visuelle Analogique (EVA) d’évaluation de la douleur à l’arrivée et si
possible au moment de l’examen clinique, antalgie préalablement prise.
25
• Le terrain, incluant notamment les antécédent orthopédiques ou rhumatologiques
du coude, et éventuellement le métier manuel (métier impliquant la possibilité de
microtraumatismes, de traumatismes des membres, et/ou métier impliquant une
impossibilité absolue d’être exercé avec un membre nécessitant une immobilisation
plâtrée ou souple) ;
• La description clinique complète, par variables binaires ;
o Palpation de l’ensemble des reliefs osseux, en notant l’éventuel
déclenchement d’une douleur exquise,
o Les pouls et le temps de recoloration capillaire en aval de la lésion,
o Recherche tout déficit sensitivo-moteur local et en aval (Confère sous-
section précédemment concernant l’anatomie descriptive et fonctionnelle).
o La mobilité en actif et passif, en extension complète et flexion complète, de
même qu’en prono-supination complète des deux coudes (examen
comparatif) dans la position qui sied le mieux au patient : le but est de
rechercher un déficit objectif, la douleur étant identifié comme un potentiel
facteur de surévaluation de la suspicion de fracture
• La cinétique évaluée par le médecin urgentiste, en ne retenant que 2 catégories :
haute (chute d’un 2 roue, chute de plus de 5 mètres, percussion par un véhicule par
exemple...) ou basse (agression, chute de sa hauteur...).
• Impression clinique de l’urgentiste, le diagnostic suspecté, les éléments recherchés
à la radiographie
• Lecture radiographique par le médecin urgentiste,
• Diagnostic final.
Le dossier médical imprimé et une copie des radiographies ont été conservés pour contrôle
des questionnaires et éventuelle analyse ultérieure de la qualité de la lecture des radiographies
par les urgentistes versus les radiologues.
7. Analyse des données
Sur le plan logistique
– les données ont été saisies sur un masque de saisie conçu sous Microsoft ACCESS®
2003,
– la base de données ayant secondairement été exportée sous Microsoft EXCEL® 2003.
– L’analyse statistique a été réalisée sous EPI-INFO®, le logiciel du CDC d’Atlanta ;
26
pour certains calculs (sensibilité, spécificité, VPP et VPN, RV+ et RV-, calculs
d’effectifs), les fonctionnalités StatCalc® et EPI-Data attenantes à EpiInfo® ont été
utilisées dans nos calculs à travers la variante libre de droits nommée OPEN-EPI®
Analyse univariée
Pour réaliser un choix des critères inclus dans notre détermination d’un score clinique par une
régression logistique, nous commençons par étudier les éléments cliniques un à un pour les
deux états résultants :
-0 : Contusion, entorse, plaie,… sans fracture ni luxation
-1 : Fracture ou luxation présente au diagnostic final.
La valeur p du tableau 6 (Cf Partie résultats) est issue d’un test de Chi2 (ou de Fisher exact ou
Yates selon la faiblesse des effectifs) bilatéral afin de déceler une différence significative
entre la population « Fracture ou luxation » et son complémentaire dans la population totale.
Régression logistique
Pour élaborer un score clinique, l’ensemble des critères cliniques et anamnestiques
observés doivent être analysés en régression logistique. Les coefficients extraits de la
régression peuvent ensuite servir de pondération pour chaque critère finalement retenu dans le
score [24] [26].
Avant de réaliser cette analyse, la première étape consiste à analyser la totalité des facteurs
cliniques mesurés par rapport à la variable résultante (ici « fracture ou luxation ») pour
extraire les facteurs les plus pertinents : c’est l’analyse univariée.
Pour la régression logistique, la règle du « 1 pour 10 » consiste à prévoir au moins 10
évènements des moins fréquents (pour la variable résultat) par facteur étudié [25]. Par
exemple, si nous obtenons 20% de fractures ou luxations et 5 critères cliniques prédictifs, il
faut obtenir au minimum 5X10=50 cas de fractures ou luxations, soient 250 patients inclus.
Compte tenu des objectifs de nombre d’inclusions pour cette phase exploratoire, nous nous
attendions à ne pas avoir la possibilité de réaliser cette analyse.
27
Analyse a posteriori d’éléments composites
En cours d’analyse, nous nous sommes rendu compte qu’une analyse univariée sur des
combinaisons d’éléments cliniques pertinents était une solution possible malgré la faiblesse
des effectifs.
Il s’agissait d’élaborer un test, permettant de trier les patients venant avec soit une luxation,
soit au moins une fracture nécessitant un traitement orthopédique strict ou chirurgical (les
fractures de tête radiale Masson I sont les seules pour lesquelles on peut se permettre de ne
pas réaliser de radiographie en urgence).
Deux tests nous ont semblés cliniquement pertinents à tester statistiquement afin de
détecter les lésions d’intérêt:
• Le Full Range of Motion (l’appellation anglo-saxonne fait écho au vocable
employé dans la littérature récente sur le sujet [7]) à 2 items : ce test est jugé
positif si le patient ne parvient pas à démontrer à l’examen la préservation d’une
extension et d’une flexion passive complète.
• Full Range of Motion 4 items : test positif si incapacité de reproduire
complètement au moins un item parmi : flexion complète, extension complète
(actif et passif), mouvement de prono-supination complet, prono-supination
indolore.
Dans les deux cas le test était réalisé par un examen comparatif bilatéral. La positivité du
test devait servir à motiver la prescription d’examen radiographique.
Pour un test diagnostic, ce qui compte est sa faculté de nous amener d’une probabilité pré-
test donnée (ici, la prévalence des fractures et luxations de coude réunie chez les patients se
présentant aux urgences) à une probabilité post-test telle que le test nous permette
sereinement de trancher entre faire une radio en urgence ou bien surseoir à la prescription de
radiographies.
En réalisant l’analyse a posteriori de ces deux test prédictifs, les critères jugés ont été:
• Sensibilité, Spécificité : Ce sont des données de validité intrinsèque.
• Valeur prédictive positive (VPP), Valeur prédictive négative (VPN): ce sont des
données de validité extrinsèque. Nous allons chercher, pour notre score ou test
prédictif idéal, à maximiser la VPN, c’est à dire la probabilité que le patient soit
indemne quand le test est négatif.
28
• Rapport de vraisemblance positif, Rapport de vraisemblance Négatif
o Les propriétés discriminantes d’un test sont évaluées de la manière
suivante [26]:
• Pouvoir discriminant important : RV+ >10, RV-<0.1
• Modéré : RV+ entre 5 et 10, RV- entre 0.1 et 0.2
• Faible : RV+ entre 1 et 5, RV- entre 0.2 et 1.
8. Présentation des résultats
Les résultats sont exprimés en moyenne (et écart-types) lorsqu’il s’agit de variables
continues; ils sont exprimés en pourcentage (avec l’effectif correspondant) pour les
variables qualitatives; les tests comparatifs le sont au seuil de significativité de 5%.
29
Résultats
1. Inclusions
Figure 4 – Evolution du nombre de Patients inclus au fil des mois d’étude.
L’étude s’est déroulée au SAU de l’hôpital Lariboisière du 16 février 2010 au 20 octobre
2010, soit une période de 8 mois environ.
Entre le 16/02 et le 16/10/2010, 41452 patients ont consulté sur le secteur SAU seul (c’est
à dire hors secteur urgence ORL, urgence Céphalées, et Policlinique), soit une moyenne de
171 consultations par jour.
Durant la même période, 14586 patients ont bénéficié d’au moins un acte radiographique.
13706 patients ont été orientés vers le secteur de traumatologie non vitale, soit une moyenne
journalière de 57 patients. Nous savons que sur cette même période, 138 patient sont sortis
avec le diagnostic « contusion du coude », 45 avec le diagnostic « Plaie ouverte du coude »,
13 avec le diagnostic « Luxation du coude », et 16 avec le diagnostic « Entorse et Foulure du
coude ». Pour des raisons techniques, il n’a pas été possible de décompter le nombre de
30
codages des fractures correspondant au coude.
Finalement : 71 patients ont été inclus dans l’étude. 4 patients ont été inclus à tort par non
respect de la consigne d’âge. 67 patients ont été analysés.
2. Echantillon de population
Ce sont des Hommes dans 54% des cas (36), et des Femmes dans 46% des cas (31), la
différence n’est pas significative.
L’âge moyen est de 38 ans (DS : 16), les patients inclus ayant entre 18 et 92 ans.
Il s’agit d’une population âgée de moins de 50 ans dans environ 84% des cas (n=56 sur les
67 au total).
Figure 5 – Répartition par tranche d’âge,
Les patients sont droitiers à 92% (n=57), le coude droit est atteint dans 28 cas.
Ils ont moins de 50 ans dans 84% des cas (n=56).
Ils exercent un métier manuel dans 47% des cas (n=28).
90% d’entre eux (n=60) déclarent n’avoir aucun antécédent de traumatisme du coude, et
seulement 2 des 7 autres patients ont déjà subi une intervention chirurgicale du coude dans le
passé.
31
3. Circonstances du traumatisme, motif principal de consultation
Les motifs sont très variés, on distingue :
• Les agressions et/ou blessures au cours de rixes : 11 cas (soient 15%).
• Les accidents dur la voie publique en 2 roues (scooter, vélo) : 5 cas (soient 7%)
• Les traumatismes divers et variés, souvent par chute (38 cas).
Accident domestique dans 12 cas, d’un accident du travail dans 4 cas, d’un accident de la
voie publique dans 10 cas.
CIRCONSTANCES : NOMBRE
(NTOTAL=67)
% IC95% (%)
Agressions/rixes 11 16 9-27
AVP 2 roues 5 8 3-16
AVP 10 16 3-27
Accident travail 4 6 2-14
Accident domestique 12 18 10-29
Chute 38 57 45-68
Traumatisme indirect / direct 22 / 6 79 61-91
Traumatisme faible / haute cinétique 49 / 10 83 72-91
Tableau 1– Circonstances du traumatisme
Les patients ont souvent du mal à se souvenir du mécanisme du traumatisme (39 cas).
Cependant lorsqu’ils s’en souviennent, ils déclarent un traumatisme indirect dans 22 cas, un
traumatisme direct dans 6 cas (Cf tableau 1).
Parmi les traumatismes indirects (n=22) : il semble que le coude était en extension dans 6,
et que le traumatisme indirect du coude soit consécutif à une réception sur la main dans 6 cas
seulement (Cf tableau 1).
Dans 49 cas, le traumatisme était considéré comme de faible cinétique par le médecin
investigateur, et de haute cinétique dans 10 cas (dans 8 cas le médecin ne se prononçait pas
sur cette notion).
4. Etat clinique
• Lorsqu’ils sont évalués par l’infirmier(e) d’accueil et d’orientation, 40 patients se
32
présentent avec une impotence fonctionnelle permanente du coude (27 parviennent à
mobiliser leur coude correctement malgré la douleur).
• L’EVA est utilisée et renseignée pour 57 patients (65 signalent une douleur à l’IAO)
avec un score strictement supérieur à 4/10 dans 35 cas, et strictement supérieure à 5/10
dans 24 cas.
• Au moment de l’examen clinique, seulement 5 patients (8%) avaient bénéficié d’une
antalgie préalable, que ce soit avant de venir ou bien au moment de la prise en charge
infirmière au box d’accueil et d’orientation.
Figure 6– Éléments cliniques diagnostiqués : nombre d’occurrences au total
33
ELEMENTS CLINIQUES EVALUES N
(ntotal=67)
% IC95%
Douleur prono-supination 44 65.7% 53,1-76,8%
Flexion complète passive conservée 42 62,7% 50-74,2%
Extension complète passive conservée 42 62,7% 50-74,2%
Flexion complète active conservée 37 55,2% 42,6-67,4%
Douleur palpation tête radiale 35 52,2% 39,7-64,6%
Extension complète active conservée 35 52,2% 39,7-64,6%
Œdème présent 27 40,3% 28,5-53%
Limitation de la prono-supination 23 34,3% 23,2-46,9%
Douleur palpation olécrane 22 32,8% 21,8-45,4%
Douleur palpation palette humérale 21 31,3% 20,6-43,8%
Trouble sensitif en distalité du coude 7 10,4% 4,3-20,3%
Douleur palpation épitrochlée 5 7,5% 2,5-16,6%
Douleur palpation épicondyle 3 4,5% 0,9-12,5%
Trouble sensitif local 2 3% 0,4-10,4%
Trouble vasculaire (lésion vasculaire) 0 - -
Tableau 2– Éléments cliniques diagnostiqués
5. Suspicion clinique et prescription radiographique
Le clinicien déclarait suspecter un diagnostic cliniquement dans 55 cas, et ne pas en
suspecter dans 8 cas.
En prescrivant un examen radiographique dans tous les cas, le clinicien déclarait
rechercher un arrachement osseux dans 2 cas, une fracture dans 30 cas dont une fois une
fracture associée à une luxation ; une luxation était attendue 4 fois dont une fois une luxation
de la tête radiale.
Enfin, dans 21 cas, le clinicien prescripteur déclarait s’attendre à une radiographie
normale, pour 2 radiographies montrant une fracture.
Une radio de face était prescrite dans 67 cas, de profil dans 63 cas, une radio oblique
interne dans 3 cas et oblique externe dans 1 cas.
34
Tableau 3 – Diagnostic final et élément radiographique attendu par le prescripteur.
Si l’on veut évaluer l’appréciation clinique du clinicien investigateur (exprimée dans 57 cas
sur 67) comme un test diagnostic nous obtenons au final :
• Aucune luxation manquée, mais 3 luxations suspectées à tort sur des contusions
simples.
• Sur le critère seul de fracture :
o 15 fractures sur 18 suspectées, 3 manquées.
o L’impression clinique obtiendrait comme test diagnostic par rapport à la
radiographie:
Sensibilité =83% (IC95% 61-94%), Spécificité=64% (IC95% 48-77%)
VPP=52% (IC95% 34-69%) VPN=89%(IC95% 73-96%)
RV+=2.3 RV-=0.26
6. Interprétation des examens radiographiques
Sur le cliché de face
3 fractures visualisées sur les 29 recherchées par le prescripteur (57 clichés renseignés).
1 luxation était diagnostiquée sur les 5 suspectées par le prescripteur.
1 seul cliché jugé de qualité insuffisante.
Sur le cliché de profil
Sur 20 fractures, une hémarthrose était visible dans 2 cas, et dans aucun autre cas. Elle
venait confirmer le diagnostic de fracture suspecté par le clinicien dans un cas.
Une seule des 2 luxations était visible sur le cliché de profil, venant confirmer la suspicion
clinique (1 cas sur les 5 luxations cliniquement suspectées).
Aucune fracture de la coronoïde décelée,
35
3 fractures de l’olécrane (dont une avec suspicion clinique de radiographie normale),
8 fractures de la tête radiale (toujours avec suspicion clinique de fracture, sur 29
suspicions au total).
Clichés obliques
3 clichés obliques internes ont été prescrits, un a permis de déceler une fracture.
7. Diagnostic final
Diagnostic final Effectif
(ntotal=67)
Pourcentage IC95%
Contusion, plaie, Hygroma 40 59,7% 38,6-84,6%
Entorse 5 7,5% 2,5-16,6%
Luxation 2 3% 0,4-10,4%
Fracture 20 29,8% 19,3-42,3%
Tableau 4– Diagnostic Final : diagramme et tableau de répartition.
36 patients sont sortis et n’ont pas nécessité d’être reconvoqués en orthopédie ou aux
urgences sur les 67 patients.
Les autres ont été reconvoqués dans la quasi-totalité des cas (sinon opérés, hospitalisés).
Sur les 20 fractures (Cf tableau 4), on dénombre (Cf tableau 5) 14 fractures de tête radiale
dont deux précisées non déplacées, et deux visualisées indirectement ou du moins fortement
suspectées (Clinique, hémarthrose radiologique), 3 fractures de l’olécrane , une fracture de la
palette humérale (traitement chirurgical), une fracture de l’épitrochlée non déplacée, un
arrachement osseux en regard de l’olécrane (diagnostic discutable, enthésopathie
préexistante probable).
FRACTURES N (ntotal=20)
Tête radiale 14
Olécrane 4
Palette humérale
(chirurgicale)
1
Epitrochlée 1
Tableau 5 : Diagnostic final : fractures
36
Éléments cliniques associés diagnostic final : Analyse univariée.
Comme précisé dans le chapitre Méthode (p26), le test p bilatéral a été réalisé selon la
méthode Chi2, Fisher exact ou Yates en fonction la faiblesse des effectifs afin de déceler une
différence significative entre la population avec luxation ou fracture et le reste de la
population étudiée.
ELEMENTS CLINIQUES
EVALUES
POPULATION
COMPLETE :
N (%)
(ntotal=67)
LUXATION OU
FRACTURE
N (%)
(ntotal=23)
P
(bilatéral)
Flexion complète active conservée 37(55,2%) 7(30,4%) 0.003
Extension complète passive
conservée
42(62,7%) 10(43,5%) 0.02
Flexion complète passive conservée 42(62,7%) 10(43,5%) 0.02
Extension complète active conservée 35(52,2%) 9(39,1%) 0.12
Douleur palpation palette humérale 21(31,3%) 10(43,5%) 0.12
Douleur palpation olécrane 22(32,8%) 5(21,7%) 0.16
Limitation de la prono-supination 23(34,3%) 10(43,5%) 0.25
Douleur prono-supination 44(65,7%) 17 (73,9%) 0.3
Œdème présent 27(40,3%) 11(47,8%) 0.36
Douleur palpation tête radiale 35(52,2%) 13(56,5%) 0.61
Trouble sensitif en distalité du coude 7(10,4%) 3(13%) 0.63
Douleur palpation épitrochlée 5(7,5%) 1(4,3%) 0.97
Douleur palpation épicondyle 3(4,5%) 1 (4,3%) 0.97
Trouble sensitif local 2(3%) 0 -
Trouble vasculaire (lésion vasculaire) 0 0 -
Tableau 6 – Analyse univariée: Total, sous groupe « luxation ou fracture », valeur p de
test bilatéral pour la différence entre sous-groupe fracture/luxation et sous groupe
complémentaire.
Individuellement, les 3 éléments cliniques analysés distinctement comme prédictifs de
radiographie normale (i.e. ni fracture ni luxation) donnent dans notre série les caractéristiques
suivantes :
• Extension complète passive conservée :
37
o Sensibilité 57%, Spécificité 73%, VPN (Valeur Prédictive Négative) 76%
(IC95% 61-87%), RV+ (Rapport de Vraisemblance Positive)= 2 et RV-= 0.6
o Avec 10 fractures manquées et 42 radiographies évitées si l’on suit le test.
• Extension complète passive conservée
o Sensibilité 70%, Spécificité 68%, VPN 81% (IC95% 66-91%), RV+= 2,2 et
RV-= 0.45
o Avec 7 fractures manquées et 37 radiographies évitées si l’on suit le test.
• Flexion complète passive conservée
o Sensibilité 57%, Spécificité 73%, VPN 76% (IC95% 61-87%), RV+= 2 et
RV-= 0.6
o Avec 10 fractures manquées et 42 radiographies évitées si l’on suit le test.
Régression logistique :
Nous n’avons pas rencontré les conditions d’effectifs pour réaliser une régression
logistique offrant des résultats significatifs.
Analyse a posteriori de critères composites :
• FROM 2 :
Fracture/
Luxation
Ni fracture, Ni
luxation
TOTAL
Extension et Flexion complètes
passives Conservées
6 28 34
Extension ou Flexion passive atteinte 17 16 33
TOTAL 23 44 67
Tableau 7– « Full range of Motion2 items » : si l’on se fie à la capacité à réaliser
extension et flexion complète en passif, analyse des fractures ou luxation manquées
Ce test à 2 éléments cliniques combinés permet, en analyse a posteriori, d’éviter 34
radiographies sur 67 patients en manquant ainsi 6 diagnostics de fracture ou luxations (donc 6
cas à clichés radiographiques anormaux).
Il ne maximise pas la Valeur Prédictive négative (VPN) comme le montrent ses
caractéristiques : Sensibilité 26% (13-47%), Spécificité 36% (24-51%), VPP 18%, VPN 49%,
RV-=2, RV+=0.4.
38
• FROM 4 (Full Range of motion 4 items) :
Rappel : « Full Range of Motion 4 items » est un test considéré positif si incapacité de
reproduire complètement au moins un item parmi : flexion complète, extension complète
(actif et passif), mouvement de prono-supination complet, prono-supination indolore.
Total Fracture/luxation Autres lésions
FROM4 (+) 12 1 11
FROM4 (-) 55 22 33
Tableau 7 – Application théorique du FROM4 a posteriori sur la cohorte de patients,
avec le critère de jugement Diagnostic final=1 si fracture ou luxation. (test FROM4 :
Fisher exact p<0.05)
Figure 7 – Full Range of Motion 4 items.
Le test Full Range of Motion 4 items est considéré positif si le patient échoue à l’un des
items au moins.
Avec ici une prévalence de 34% pour le critère « luxation ou fracture», nous obtenons
une sensibilité de 96% (IC 95% 79-99%) et une spécificité de 25%, une valeur prédictive
négative de 92% (IC 95% 65-99%), avec un rapport de vraisemblance positif de 1.28 pour un
rapport de vraisemblance négatif à 0.17.
39
Discussion
Nous avons donc réalisé en phase exploratoire notre étude prospective monocentrique
observationnelle chez des patients, de 18 ans et plus consultant pour traumatisme du coude
sur une période totale de 8 mois et demi, sans parvenir à obtenir un effectif suffisant pour
réaliser une analyse multivariée par régression logistique. Nous sommes parvenu toutefois à
conclure par l’élaboration cliniquement pertinente d’un test diagnostic, le « FROM4 »,
pouvant faire éviter 12 prescriptions en urgence de radiographies sur les 67 patients inclus, en
ne manquant qu’une radiographie « anormale » correspondant à une calcification tendineuse.
1. Forces et limites
Echantillon, inclusions
Nous avons réalisé une étude prospective, observationnelle, avec un taux d’exhaustivité
inférieur à 20% (i.e., les éléments incomplètement remplis de codage de diagnostic final
associés à ceux des prescriptions de radiographies nous indiquent que moins de 20% des
patients satisfaisant aux critères d’inclusion sur la période ont été inclus).
Nous avons dépassé l’objectif de 30 patients pour l’analyse intermédiaire, cependant nous
ne sommes parvenus que difficilement à nos 67 patients en tout et pour tout en fin de période
d’analyse. La simplicité des critères d’inclusion et du remplissage binaire et standardisé des
éléments cliniques a permis un recueil efficace des informations, ne posant pas en soit de
problème pour leur analyse ultérieure.
Le premier biais dans notre étude a donc été le manque de puissance pour conclure sur
notre objectif principal. Cependant, nous avons réalisé une épidémiologie du traumatisme du
coude qui permet d’envisager, avec des objectifs raisonnables d’effectifs, d’atteindre
définitivement, dans le futur, notre objectif principal.
Un autre biais majeur a été l’ensemble des biais de recrutement ; d’abord par l’effet centre,
puisqu’il s’agissait d’une étude monocentrique. Ensuite, comme l’a montré la figure 1, la
dynamique de recrutement des patients a été très « motivation-dépendante », mais surtout
« praticien-dépendante » ; un changement d’internes au début du mois de mai, et surtout un
changement progressif des médecins séniors en secteur de traumatologie a beaucoup joué ;
nous sommes en effet passé sur cette période de praticiens extérieurs au service qui
« remplissaient » le tableau de garde vers des praticiens généralistes et urgentistes souvent
plus sensibilisés à la participation aux études du service. Le biais de recrutement résulte donc
40
dans ce que les patients inclus ne l’étaient que par un nombre limité de praticiens. Nous
n’avons pu réaliser une étude comparative entre urgentistes et radiologues ; les biais de
classement entre fracture et absence de fracture ne peut donc être évalués. Cependant, on peut
se fier à la littérature qui nous apprend que les fractures du coude, qui comptent parmi
fractures les plus fréquemment manquées à la radiographie (7%) [27]. Dans cette étude de
2006, 33% des fractures manquées aux urgences étaient en réalité radiographiquement
imperceptible dans un premier temps. Ce qui plaide en faveur d’une prescription raisonnée de
radiographies en urgence d’une part, ainsi qu’en faveur d’une réévaluation à distance dans
l’étude complète à prévoir.
Recueil des données
Les données relatives à l’analyse détaillée radiographique ont été mal remplies par nos
investigateurs. Aussi une analyse comparative à une lecture par un radiologue était
difficilement envisageable ici.
Les données relatives à l’histoire de la maladie étaient également probablement
incomplètement réfléchies. L’item « agression » est arrivé rapidement mais secondairement
au cours de la phase initiale (i.e. avant l’analyse intermédiaire). Afin de mieux replacer
l’analyse sémiologique dans un contexte physiopathologique pertinent (on peut supposer
qu’une antalgie efficace et un glaçage préalable d’un coude tuméfié influence le résultat de
l’examen clinique), les notions de durée entre prise d’antalgie et examen clinique, entre
utilisation de glace et examen clinique, nécessiteront pour une étude prochaine d’être mieux
précisées et standardisés dans la feuille de recueil des données.
Nous avons réussi à faire remplir de manière exhaustive tous les éléments cliniques
associés au coude traumatisé, et il semble que la part la plus difficilement analysable reste la
localisation de l’œdème et la topographie d’éventuels déficits neuro-sensitifs. Toutefois ces
déficits tout comme une atteinte vasculaire demeurent rares et de toute façon associés à une
gravité fonctionnelle n’amenant pas à une prise en charge ambulatoire simple.
Enfin nous envisageons, forts de l’expérience de cette phase, de prévoir en amont, pour le
schéma d’une phase ultérieure, un suivi des patients par téléphone ainsi qu’une réévaluation
en double aveugle des radiographies entre clinicien et radiologues.
41
Synthèse
• Cette étude a été envisagée dès le départ comme une phase exploratoire, étant donné
le manque de données initiales susceptibles de permettre de calculer des objectifs
d’effectifs réalistes.
• Nous avons évidemment remarqué la difficulté à motiver une équipe médicale
hétérogène, et nombreuse, ce que l’on démontre à travers le graphe des inclusions de
patients (figure 4). Nous aurions probablement eu moins de difficultés sur la période
hivernale, période à laquelle les équipes sont plus stables et enchaînent plus
fréquemment les gardes et, par conséquent, requierent moins souvent des rappels sur
chaque étude.
• Enfin, nous avons retiré quelques leçons concernant la conception de la phase
prospective à venir.
2. Principaux faits observés
Il n’y a pas d’asymétrie notable dans le sexe-ratio de notre population traumatisée du
coude, alors que cette asymétrie a généralement cours dans la traumatologie non vitale en
général. Il s’agit d’une population globalement jeune active de moins de 50 ans.
L’enjeu fonctionnel prend d’autant plus de l’importance qu’il semble s’agir d’une
population exerçant dans la moitié des cas un métier manuel.
Pour dresser un tableau général, notons qu’il s’agit la plupart du temps d’une chute avec
traumatisme indirect de faible cinétique.
L’élément clinique qui ressort le plus souvent est une prono-supination douloureuse. C’est
de fait un des éléments qui semble le moins discriminant entre fracture ou luxation et absence
de lésion significative. La douleur à la palpation a difficilement une valeur localisatrice dans
notre étude. L’œdème, présent dans près de la moitié des cas, n’a pas de valeur discriminante
dans notre étude, mais mériterait probablement d’être plus précisément étudié avec des
effectifs plus importants et en tenant compte de l’utilisation du glaçage.
Nous avons demandé aux cliniciens investigateurs de justifier leur demande de
radiographie par l’élément attendu d’une part, et de faire un « pari » en se prononçant sur leur
suspicion clinique ; l’analyse du premier élément n’est pas possible par un faible taux de
remplissage ; l’analyse de la suspicion clinique est en revanche possible et a montré, lorsque
le clinicien a déclaré suspecter un diagnostic, qu’une radiographie normale était souvent
42
attendue. Le sens clinique par lui même est probablement suffisamment sûr pour ne pas
manquer facilement de fracture, mais est sans doute trop peu spécifique pour limiter le
nombre de radiographies à prescrire.
Malgré l’insuffisance de notre recueil des données sur l’analyse des radiographies
réalisées, nous remarquons que, conformément aux recommandations actuelles, le couple
cliché de face et cliché de profil est ce qui est communément prescrit. Nous remarquons que
le cliché de face, en dehors de fractures avec déformation, est ce qui est le moins souvent noté
comme informatif d’une fracture (3 fractures visualisées sur 57 clichés décrits). Le cliché de
profil est celui qui est décrit comme informatif, avec en revanche seulement 2 fractures
détectées par une hémarthrose (« signe du liseré graisseux »).
Notre critère de jugement étant « diagnostic final de fracture ou luxation », nous avons
évalué les éléments cliniques pour leur caractère prédictif.
Comme nous venons de l’envisager, l’élément «suspicion clinique » du clinicien est un
élément clinique vraisemblablement sûr (VPN au maximum vers 96%, bien que 3 fractures
manquées sur 18 dans cette série) mais peu efficace en terme d’économie de clichés
radiographiques. Parmi les diagnostics de fracture manqués par le sens clinique, on compte
une fracture non déplacée de l’épitrochlée (à immobiliser) et une fracture déplacée de
l’olécrane réduite chirurgicalement en urgence. Finalement, ce sont les conservations
combinées d’amplitudes complètes de mobilisation en flexion, extension, prono-supination,
que ce soit en actif ou passif, qui semblent le plus facilement significatifs (p<0.05) en dépit de
nos faibles effectifs.
Malgré le manque de puissance de cette première phase pour réaliser une régression
logistique et réaliser un score clinique robuste, nous sommes parvenus à dégager - plus
empiriquement - un algorithme simple, réalisable en conditions de soins primaires (sur le
terrain de sport, en cabinet de médecine générale, aux urgences en conditions de surcharge de
l’antenne radiologique par exemple) pour trier les patients pour lesquels la radiographie va
changer la prise en charge initiale versus ceux pour lesquels la radiographie va être normale :
il s’agit du « FROM-4 items ».
43
Le FROM-4items permettrait, d’après nos résultats avec un risque alpha à 5% et une
puissance à 80%, de diminuer de 10 à 28% le taux de prescription de radiographie en urgence
sans manquer une seule sanction chirurgicale.
3. Implications pour la pratique
L’attitude thérapeutique que nous préconisons pour les patients « FROM4 négatifs » est
une immobilisation souple type coude au corps associé au protocole « RICE » avec une
réévaluation à 5 à 7 jours avec ou sans radiographie à 5 à 7 jours, sans radiographie initiale.
Ainsi, en cas de fracture de tête radiale Masson 1, une rééducation précoce sera démarrée en
accord avec les recommandations, sinon, une immobilisation plus prolongée sera
envisageable.
Etant donné ce que l’on a vu concernant la prise en charge de certaines fractures d’olécrane
non déplacées avec intégrité de l’appareil extenseur et surtout concernant les fractures de tête
radiale Masson I, il apparaît intéressant classer ces deux diagnostics dans la catégorie de ceux
pour lesquels la radiographie en urgence est optionnelle. En effet, pour ces deux diagnostic
l’immobilisation et le suivi (initial pour l’olécrane et complet pour la tête radiale) sont tout à
fait envisageables par le médecin généraliste seul. Ce point de vue sera à prendre en compte
pour l’élaboration d’un score clinique plus précis lors d’une phase ultérieure.
4. Perspectives pour la recherche
Le design général de l’étude est satisfaisant : prospectif, observationnel.
Les critères d’inclusions sont au plus simple et sont satisfaisants : 18 ans et plus, motif de
consultation incluant un traumatisme du coude.
Dans la phase ultérieure, l’analyse des éléments cliniques sera à faire en regard du
diagnostic exact : le type de luxation et surtout le type de fractures (classifications de Masson
pour les fractures tête radiale, de Morley pour les fractures ulnaires, de la SOFCOT pour les
fractures humérales) sera à faire préciser par les médecins investigateurs.
L’antalgie préalable, l’heure de sa prise, l’utilisation de poche glacée sur l’articulation et sa
durée seront à faire bien préciser. De même l’heure (voire le jour) du traumatisme. Les
circonstances du traumatisme seront peut-être à mieux réorganiser sur la fiche de recueil. Le
motif agression ne doit pas être oublié. Une définition plus précise de la cinétique du
traumatisme, bien qu’elle ne semble pas avoir posé de problème parmi les investigateurs
urgentistes, sera à donner.
44
La description clinique semble quasi parfaite dans ce recueil, bien qu’il ai fallu préciser la
notion de mobilité complète : celle-ci se juge en testant les deux membres supérieurs en
parallèle et en comparatif. Par ailleurs, il faut à l’avenir bien garder le « Oui/Non » et non une
simple case à cocher comme initialement, ce afin d’avoir un contrôle de ce qui est rempli
versus ce qui a été omis.
Enfin, la grande question concerne les effectifs à prévoir. La règle du un pour dix pour une
régression logistique stipule que l’obtention de résultats significatifs nécessite que pour
chaque élément étudiés, le moins fréquent des deux résultats (ici « fracture ou luxation »
versus « contusion ou atteinte des parties molles ») revienne au moins 10 fois pour chaque
élément prédictif jugé.
En réalité ici, ce sont 16 éléments cliniques évalués, pour lesquels nous souhaiterions
retenir moins de 10 éléments types, soient 10X10 fractures ou luxations, soient environ 340
patients à inclure.
Enfin, si l’on souhaite réaliser ce score prédictif et réaliser une analyse par type de fracture,
il nous faut estimer à un minimum de 10 voire 30 cas le minimum pour chaque type de
lésion : dans ce cas selon le choix réalisé, avec dans notre étude exploratoire une seule
fracture de l’épitrochlée, la population nécessaire serait à estimer entre 670 et 2000 patients,
ce qui n’est pas raisonnable. Ce type de choix recherchant l’exhaustivité pourrait se justifier
en estimant par exemple qu’une fracture de la tête radiale Mason 1 une fois immobillisée par
contention souple ne nécessite pas d’imagerie en urgence, et en estimant que ce type de
diagnostic doit pourvoir être analysé à part dans une cohorte par conséquent importante.
Nous estimons pour notre part qu’une cohorte de 330 patients est un objectif réaliste et
utile sur le plan de l’apport statistique.
5. Validation externe
L’idée motrice derrière cette étude était de pouvoir établir des critères permettant de ne pas
réaliser en urgence une imagerie, et permettant de surseoir à un avis spécialisé urgent dans la
majorité des traumatismes du coude, ce pour une pratique en médecine générale de ville.
Nous pensons, forts de cette expérience aux urgences du CHU Lariboisière, que la phase
ultérieure se devra d’être multicentrique prospective avec au moins 330 patients à inclure ;
45
toutefois nous pensons qu’une telle étude avec des investigateurs en ambulatoire sera très
compliquée à réaliser.
En revanche, une validation en étude d’impact prospective se devra d’être réalisée en
conditions de médecine ambulatoire.
Ne pouvant réaliser une étude par régression logistique dès cette phase exploratoire, nous
avons fait un choix pragmatique du « FROM-4 items », dont nous avons estimé qu’il
permettait d’éliminer les fractures de tête radiale, de l’ulna, de l’extrémité inférieure de
l’humérus déplacée. Nos premiers calculs d’impact a posteriori (donc en validation interne)
semblent trouver un intérêt clinique au FROM-4 items. Nous pensons que nous pourrions
d’ores et déjà évaluer le FROM-4 items en analyse de validation externe en conditions de
pratique ambulatoire. Une idée pragmatique, afin d’inclure suffisamment de patients, en
conditions multicentrique ambulatoire pour un motif de consultation aussi peu fréquent, serait
de s’aider d’un outil internet tel qu’un modèle de questionnaire libre de droit
« LimeSurvey® » pour le recueil des données. Pour 4 items, il faudrait minimum 10X4
fractures ou luxations, soient au moins 130 patients.
46
Conclusion
Finalement, nous avons voulu réaliser sur une étude observationnelle prospective, par une
analyse statistique exhaustive des divers éléments cliniques systématiquement recherchés lors
d’une consultation pour coude traumatisé, un algorithme prédictif de « radiographie initiale
inutile » ne montrant ni fracture ni luxation.
Cette phase exploratoire a surtout permis une évaluation de l’épidémiologie des coudes
traumatisés ; nous avons montré sur cette étude monocentrique, que le taux de « 3% » de
l’ensemble des consultations relevé dans la littérature était vraisemblable ; nous avons
également montré qu’environ un tiers des coudes traumatisés étaient fracturés. La fracture de
la tête radiale comptait pour deux tiers de ces fractures.
Malgré notre incapacité, par manque d’effectifs, à réaliser une analyse de l’ensemble des
critères cliniques, nous avons pris le parti de réaliser un test prédictif cliniquement pertinent
avec ce que l’on recherche pour les fractures du coude, et notamment les fractures déplacées
de tête radiale. Nous en avons extrait le Full Range of Motion 4 items, dont l’évaluation en
interne a posteriori, sur notre cohorte, montre que ce test aurait permis d’éviter 12
radiographies en urgence (10 à 28% de radiographies en moins) sans manquer une seule
indication chirurgicale ou d’immobilisation stricte.
Pour la suite à prévoir concernant cette étude exploratoire, deux pistes sont à envisager :
Soit nous devrions réaliser une évaluation prospective multicentrique du FROM4 si l’on fait
le pari qu’il s’agit du score le plus simple et donc le plus réaliste à implémenter à la fois en
médecine d’urgence et en médecine ambulatoire ; soit nous ne nous contentons pas de cette
phase exploratoire et décidons d’augmenter notre puissance d’effectifs en corrigeant les
défaut de cette dernière et en obtenant, en prospectif et multicentrique, un effectif d’au moins
330 patients. Cela serait réalisable en moins d’un an sur plusieurs centres d’accueil des
urgences ; il paraitrait plus judicieux alors de réaliser une étude interventionnelle avec clichés
en incidences de face, de profil, et de trois quart interne en systématique avec lecture par les
radiologues afin de reposer sur un Gold Standard solide.
Une idée encore plus enthousiasmante serait de réaliser cette étude en médecine
ambulatoire. Cela aurait au moins le mérite d’obtenir des données adaptées à l’exercice de la
médecine générale. La mise en place serait évidemment plus complexe et s’envisagerait
47
surtout chez des médecins dont la patientèle est plus habituée à consulter leur médecin
généraliste pour de la traumatologie. Mais compte tenu de la légèreté du dispositif (un
questionnaire sur un seul voire deux feuillets), il est possible d’aisément réaliser une telle
étude sur le plan logistique. Le nombre de patients à inclure serait en revanche plus important
étant donnée la plus faible proportion de fractures que l’on trouvera chez de tels patients (les
patients avec les fractures les plus évidentes iront plus souvent à l’hôpital directement).
48
Annexe: Feuille de recueil de données
Figure 7 – Feuillet de recueil des données pour l’étude COUDE
49
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51
ANNEE : 2011
AUTHOR: SYLVAIN BENENATI MEMOIRE’S DIRECTOR: DR CHRISTIAN FULLEDA
Can we assess the usefulness of radiographs prescription through a clinical rule for
elbow injury primary care management?
INTRODUCTION At least 3% of all general practice consultations are about minor injuries.
2 to 3 % of any emergency department consultations do concern elbow injuries. Given that
functionality is at stake, systematic prescription of elbow radiographs seems to be the rule,
despite some previous studies suggesting that his could be avoided (Darracq et al, AJEM
(2008)). We aimed to create a predicting rule allowing us to limitate elbow radiographs
prescription to what is most relevant in a primary care setting.
MATERIAL AND METHODS Our mono-centric prospective and observational study was
performed in a Parisian teaching hospital, in an A&E department. We did include any patient
aged 18 years and older, presenting to the department with an injured elbow that would be
requiring a radiograph. We aimed to build a decision rule for the outcome “fracture and/or
luxation” that would maximize the negative predicting value, along with a sensitivity
allowing avoiding a number of useless radiographs.
Our analysis was performed with EpiInfo® and OpenEpi® with an alpha risk of 5%.
RESULTS Over an 8 and a half months period, 67 patients (36 men) with 20 fractures (12 on
the radial head) were included for analysis. The FROM4 (Full range of motion - 4 items,
positive if either a persistent pain on prono-supination or a loss of complete flexion,
extension, or prono-supination was found) was the best decision rule we could find, with a
sensitivity of 96.3%, a NPV of 91.7%. We found it would help to avoid safely 12 radiographs
prescriptions.
CONCLUSION Elbow imaging was not mandatory to an efficient primary management,
despite the high proportion of fractures. We need further assessments of our FROM 4, in
order to confirm that the use of such a decision rule could decrease by 10 to 28% the amount
of initial imaging prescriptions.
MOTS CLES : Bone fractures, Prospective studies, Elbow, Decision support techniques,
Radiography
ADRESSE DE L’UFR MEDECINE DE L’ UNIVERSITE PARIS-EST-CRETEIL:
8 RUE DU GENERAL SARRAIL 94010 CRETEIL CEDEX
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ANNEE : 2011
AUTEUR : BENENATI SYLVAIN DIRECTEUR DE THESE : DR FULLEDA CHRISTIAN
Peut-on évaluer par des critères cliniques la nécessité de radiographies standards en
soins primaires dans la prise en charge des traumatismes du coude ?
INTRODUCTION Au moins 3% des consultations de médecine générale concernent la
traumatologie non vitale. 2 à 3% des consultations (aux urgences hospitalières) concernent
des traumatismes du coude. Devant l’enjeu fonctionnel, la prescription systématique de
radiographies du coude lors de la prise en charge initiale semble être la règle, en dépit des
publications (Darracq et al, Am J Emerg Med (2008)) prédisant leur futilité. Nous avons
voulu créer un algorithme clinique optimisant la décision de prescription des radiographies du
coude traumatisé.
MATERIEL ET METHODES Nous avons réalisé une étude monocentrique, prospective,
observationnelle aux urgences d’un CHU parisien. Les critères d’inclusion de cette phase
exploratoire étaient : avoir plus de 18 ans et un traumatisme de coude nécessitant une
imagerie standard. Nous avons recherché la combinaison d’éléments cliniques et
anamnestiques maximisant sensibilité et valeur prédictive négative pour le diagnostic «
Fracture ou Luxation». L’analyse de cette phase exploratoire de l’étude a été réalisée avec EPI
INFO® et OPENEPI® au seuil de significativité de 5%.
RESULTATS Sur 8 mois et demi d’étude, 67 patients (36 hommes), avec 20 fractures
(dont 12 de la tête radiale) et 2 luxations ont été inclus. Nous avons proposé le FROM4 (Full
range of motion 4 items) qui correspond à la conservation d’amplitude de la flexion, de
l’extension, de la prono-supination, ce en absence de douleur systématique en prono-
supination. Cette combinaison d’items a permis, en analyse a posteriori, d’éviter la
prescription de 12 radiographies (Sensibilité= 95.3%, VPN 91.7%) sans manquer de
diagnostic à sanction chirurgicale.
CONCLUSION L’imagerie du coude n’a pas nécessairement sa place en soins primaires,
malgré la proportion importante de fractures. L’utilisation du FROM4 permettrait par
exemple de diminuer de 10 à 28% la prescription de radiographies en urgence. Une extension
de cette phase exploratoire, voire une étude d’impact du FROM4, appuierait notre point de
vue.
MOTS CLES : Fractures osseuses, Etudes prospectives, Coude, Radiographie, Techniques d’aide à la décision ADRESSE DE L’UFR MEDECINE DE L’ UNIVERSITE PARIS-EST-CRETEIL:
8 RUE DU GENERAL SARRAIL 94010 CRETEIL CEDEX