2
médecin scolaire de vaincre la réticence à mon- trer leur corps en EPS et le barrage savamment établi de plaintes somatiques, dossier radiolo- gique, etc. Inversement on est souvent surpris de voir com- bien, après des années de « dispenses » perçues comme inéluctables, l'élève et sa famille reçoi- vent très positivement l'annonce de la possibilité d' « intégrer » l'EPS grâce aux adaptations (« j'attendais à l'étude comme une potiche que les autres aient fini »). Le médecin scolaire se sera bien évidemment au préalable assuré, auprès du chef d'établissement et de l'enseignant, de la possibilité d'offrir au jeune les adaptations nécessaires. Une informa- tion est à fournir sur les problèmes et risques posés par le handicap ou l'affection. Dans le cas où le certificat médical d'inaptitude ne permet pas une adaptation des APSA, le médecin scolaire se mettra en rapport avec le médecin « certificateur », médecin traitant ou spécialiste, afin de l'informer des possibilités d'adaptation de l'EPS au sein de l'établissement. Un courrier et un certificat type sont éventuelle- ment transmis au médecin. Un entretien télépho- nique entre confrères est souvent utile. Le certi- ficat ainsi adapté permet à l'enseignant d'établir le programme d'adaptation de l'EPS, conjointe- ment avec l'élève dans le cadre du projet indivi- duel d'intégration. Il soumet ces adaptations à l'approbation du médecin prescripteur qui est ainsi sollicité une deuxième fois, cette fois par l'enseignant lui-même, ce qui constitue assuré- ment une innovation intéressante. Au cours de cette étape le rôle du médecin scolaire se limite à un recours éventuel à la demande de l'élève, de l'enseignant, en cas de doute sur les modalités choisies ou en cas de modification de l'état de santé. Le médecin scolaire est en principe habilité à déterminer lui-même les capacités fonction- nelles et les aménagements correspondants. En pratique le lien avec le médecin prescripteur est incontournable ne serait-ce que pour des raisons déontologiques, et bien sûr de compétences spé- cifiques. Le médecin scolaire assure par ailleurs le suivi de l'élève, « à la demande » tout au long de l'an- née scolaire, avec modification des adaptations et du projet individuel si nécessaire. Le médecin scolaire siégeant à la CDES est par- tie prenante à la décision d'accorder les adapta- tions aux examens. * ** L'adaptation des APSA et la possibilité donnée aux élèves handicapés de passer des épreuves adaptées aux examens sont une composante très importante de leur intégration dans la société, visant à réduire leur désavantage social en pre- nant en compte spécifiquement les inaptitudes liées à leur déficience. Les efforts de l'Éducation nationale en ce sens ont comme condition la coopération éclairée du corps médical, dans l'in- térêt de ces enfants dans une perspective de santé (cf. encadré 2). La connaissance mutuelle des compétences et du travail des uns et des autres doit permettre d'at- teindre ce but : marginaliser le phénomène dis- pensatoire préjudiciable aux élèves à besoins spécifiques. Qu'ils ne soient pas exclus du plai- sir de pratiquer les APS, et du bénéfice de ces dernières pour leur insertion professionnelle ultérieure [12]. Gérard Kohout Pédiatre, médecin de l'Éducation nationale, Centre médico-scolaire, Aubenas, 07. Notes (1) Un tel regroupement de deux heures hebdomadaires a eu l'effet bénéfique de diviser miraculeusement par deux le nombre des inaptes dans un lycée professionnel de l'académie. (2) Dans certains établissements des activités hybrides ont été imaginées, par exemple en milieu aquatique des enchaî- nements inspirés à la fois de la natation synchronisée, de la danse et de la gymnastique, permettant une évaluation, pour des élèves avant des oroblèmes de aenoux et de chevilles nécessitant une sollicitation minimale des membres inférieurs [13]. Bibliographie [1] Raut. Y. M., « Le phénomène dispensatoire en EPS ». Revue ERS n° 231, septembre-octobre 1991. [2] Devoize. A.. « De l'inaptitude totale à l'aptitude par- tielle ». Revue EPS n° 264, mars-avril 1997. [3] Suprun C. et All., Compte rendu du stage Mafpen Reims les 27 et 28 mars 1997. [4] Pailler D., « Fédération française handisport. Contre- indication à la pratique du sport pour les handicapés ». in Handicapés physiques et inaptes partiels en EPS. Dossier EPS n° 23, Ed.Revue EP.S. [5] Y. Larnicol et H. Roudet, « Dispensé d'EPS ? Non, par- ticipant privilégié du cours » Revue EP.S n° 231, sep- tembre-octobre 1991. [6] « Dossier EPS et handicap », Revue EPS I n° 73. mai- juin 1995. [7] J. P. Garel, « Gérer un groupe hétérogène », Dossier EP.S n° 23, Éd. Revue EP.S. [81 B. Truant, « La scolarisation des élèves handicapés moteurs », Dossiers n° 23, Éd. Revue EP.S. [9] F. Guyard Bouteiller, « Inaptes totaux, inaptes partiels, quels enjeux ? » Revue EP.S n° 289, mai-juin 2001. [10] « Dossier handicap visuel et EPS » ; Revue EPS I n° 32, mars-avril 1987. [11] « Enseignement et contrôle adaptés ». Sous la direc- tion de N. Costantini. Inspection pédagogique EPS, acadé- mie de Grenoble, année scolaire 2003-2004. [12] Garcia C. « Dispense de cours ou dispense de corps ». Les cahiers pédagogiques, n° 399, décembre 2001. [13] Amic-Desvaud C. et Decouty F., « Dispensé d'EPS », Les cahiers pédagogiques n° 399, décembre 2001. Extrait de l'article du même nom paru dans la revue mt pédiatrie, vol. 7, n° 5-6, sep- tembre-décembre 2004. TÉMOIGNAGE L'INTÉGRATION DES ÉLÈVES À BESOIN SPÉCIFIQUE OUI, MAIS.... ! PAR А.-М. LACLAU Aujourd'hui il apparaît comme bien dif- ficile d'afficher une certaine réticence par rapport à l'intégration des élèves handicapés en cours d'EPS. Pourtant, avoir un point de vue critique et évoquer les problèmes rencontrés semble non seu- lement important, mais tout à fait légi- time. Il est évidemment nécessaire de préciser d'entrée ce qu'il convient d'entendre par handicap. Aussi, sans ignorer les textes officiels, je proposerai une définition personnelle qui me sert de repère. Est handicapée, selon moi, toute personne qui pré- sente des caractéristiques particulières et des besoins spécifiques impliquant des stratégies d'apprentissage, des stratégies éducatives et pédagogiques adaptées, modulées en fonction des ressources dont elle dispose. Plus le handicap est lourd, plus les adaptations sont nécessaires. Ce point de vue oriente donc l'organisation de l'EPS vers trois types d'adaptation. TROIS TYPES D'ADAPTATION Les élèves handicapés parfois ne souhaitent pas être dans le cadre de la classe. Ils apprécient 23 Revue EP.S n°319 Mai-Juin 2006 c. Editions EPS. Tous droits de reproduction réservé

TÉMOIGNAGE L'INTÉGRATION DES ÉLÈVES À BESOIN …

  • Upload
    others

  • View
    10

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: TÉMOIGNAGE L'INTÉGRATION DES ÉLÈVES À BESOIN …

médecin scolaire de vaincre la réticence à mon­trer leur corps en EPS et le barrage savamment établi de plaintes somatiques, dossier radiolo-gique, etc. Inversement on est souvent surpris de voir com­bien, après des années de « dispenses » perçues comme inéluctables, l'élève et sa famille reçoi­vent très positivement l'annonce de la possibilité d' « intégrer » l 'EPS grâce aux adaptations (« j'attendais à l'étude comme une potiche que les autres aient fini »). Le médecin scolaire se sera bien évidemment au préalable assuré, auprès du chef d'établissement et de l'enseignant, de la possibilité d'offrir au jeune les adaptations nécessaires. Une informa­tion est à fournir sur les problèmes et risques posés par le handicap ou l'affection. Dans le cas où le certificat médical d'inaptitude ne permet pas une adaptation des APSA, le médecin scolaire se mettra en rapport avec le médecin « certificateur », médecin traitant ou spécialiste, afin de l'informer des possibilités d'adaptation de l'EPS au sein de l'établissement. Un courrier et un certificat type sont éventuelle­ment transmis au médecin. Un entretien télépho­nique entre confrères est souvent utile. Le certi­ficat ainsi adapté permet à l'enseignant d'établir le programme d'adaptation de l'EPS, conjointe­ment avec l'élève dans le cadre du projet indivi­duel d'intégration. Il soumet ces adaptations à l'approbation du médecin prescripteur qui est ainsi sollicité une deuxième fois, cette fois par l'enseignant lui-même, ce qui constitue assuré­ment une innovation intéressante. Au cours de cette étape le rôle du médecin scolaire se limite à un recours éventuel à la demande de l'élève, de l'enseignant, en cas de doute sur les modalités choisies ou en cas de modification de l'état de santé.

Le médecin scolaire est en principe habilité à déterminer lui-même les capacités fonction­nelles et les aménagements correspondants. En pratique le lien avec le médecin prescripteur est

incontournable ne serait-ce que pour des raisons déontologiques, et bien sûr de compétences spé­cifiques. Le médecin scolaire assure par ailleurs le suivi de l'élève, « à la demande » tout au long de l'an­née scolaire, avec modification des adaptations et du projet individuel si nécessaire. Le médecin scolaire siégeant à la CDES est par­tie prenante à la décision d'accorder les adapta­tions aux examens.

* **

L'adaptation des APSA et la possibilité donnée aux élèves handicapés de passer des épreuves adaptées aux examens sont une composante très importante de leur intégration dans la société, visant à réduire leur désavantage social en pre­nant en compte spécifiquement les inaptitudes liées à leur déficience. Les efforts de l'Éducation nationale en ce sens ont comme condition la coopération éclairée du corps médical, dans l'in­térêt de ces enfants dans une perspective de santé (cf. encadré 2). La connaissance mutuelle des compétences et du travail des uns et des autres doit permettre d'at­teindre ce but : marginaliser le phénomène dis-pensatoire préjudiciable aux élèves à besoins spécifiques. Qu'ils ne soient pas exclus du plai­sir de pratiquer les APS, et du bénéfice de ces dernières pour leur insertion professionnelle ultérieure [12].

Gérard Kohout Pédiatre, médecin de l'Éducation nationale,

Centre médico-scolaire, Aubenas, 07.

Notes

(1) Un tel regroupement de deux heures hebdomadaires a eu l'effet bénéfique de diviser miraculeusement par deux le nombre des inaptes dans un lycée professionnel de l'académie.

(2) Dans certains établissements des activités hybrides ont été imaginées, par exemple en milieu aquatique des enchaî­

nements inspirés à la fois de la natation synchronisée, de la danse et de la gymnastique, permettant une évaluation, pour des élèves avant des oroblèmes de aenoux et de chevil les nécessitant une sollicitation minimale des membres inférieurs [13].

Bibliographie

[1] Raut. Y. M., « Le phénomène dispensatoire en EPS ». Revue ERS n° 231, septembre-octobre 1991.

[2] Devoize. A.. « De l'inaptitude totale à l 'aptitude par­tielle ». Revue EPS n° 264, mars-avril 1997.

[3] Suprun C. et All . , Compte rendu du stage Mafpen Reims les 27 et 28 mars 1997.

[4] Pailler D., « Fédération française handisport. Contre-indication à la pratique du sport pour les handicapés ». in Handicapés physiques et inaptes partiels en EPS. Dossier EPS n° 23 , Ed.Revue EP.S.

[5] Y. Larnicol et H. Roudet, « Dispensé d 'EPS ? Non, par­t icipant pr ivi légié du cours » Revue EP.S n° 2 3 1 , sep­tembre-octobre 1991.

[6] « Dossier EPS et handicap », Revue EPS I n° 73. mai-juin 1995.

[7] J. P. Garel, « Gérer un groupe hétérogène », Dossier EP.S n° 23 , Éd. Revue EP.S.

[81 B. Truant, « La scolarisation des élèves handicapés moteurs », Dossiers n° 23, Éd. Revue EP.S.

[9] F. Guyard Bouteiller, « Inaptes totaux, inaptes partiels, quels enjeux ? » Revue EP.S n° 289, mai-juin 2001.

[10] « Dossier handicap visuel et EPS » ; Revue EPS I n° 32, mars-avril 1987.

[11] « Enseignement et contrôle adaptés ». Sous la direc­tion de N. Costantini. Inspection pédagogique EPS, acadé­mie de Grenoble, année scolaire 2003-2004.

[12] Garcia C . « Dispense de cours ou dispense de corps ». Les cahiers pédagogiques, n° 399, décembre 2001.

[13] Amic-Desvaud C. et Decouty F., « Dispensé d 'EPS », Les cahiers pédagogiques n° 399, décembre 2001.

Extrait de l'article du même nom paru dans la revue mt pédiatrie, vol. 7, n° 5-6, sep­tembre-décembre 2004.

TÉMOIGNAGE L ' INTÉGRATION DES ÉLÈVES À BESOIN SPÉCIFIQUE

OUI, MAIS.... ! PAR А . - М . LACLAU

Aujourd'hui il apparaît comme bien dif­ficile d'afficher une certaine réticence par rapport à l'intégration des élèves handicapés en cours d'EPS. Pourtant, avoir un point de vue critique et évoquer les problèmes rencontrés semble non seu­lement important, mais tout à fait légi­time.

Il est évidemment nécessaire de préciser d'entrée ce qu'il convient d'entendre par handicap. Aussi, sans ignorer les textes officiels, je proposerai une définition personnelle qui me sert de repère. Est handicapée, selon moi, toute personne qui pré­sente des caractéristiques particulières et des besoins spécifiques impliquant des stratégies d'apprentissage, des stratégies éducatives et pédagogiques adaptées, modulées en fonction

des ressources dont elle dispose. Plus le handicap est lourd, plus les adaptations sont nécessaires. Ce point de vue oriente donc l'organisation de l'EPS vers trois types d'adaptation.

TROIS TYPES D'ADAPTATION

Les élèves handicapés parfois ne souhaitent pas être dans le cadre de la classe. Ils apprécient

23

Revue EP.S n°319 Mai-Juin 2006 c. Editions EPS. Tous droits de reproduction réservé

Page 2: TÉMOIGNAGE L'INTÉGRATION DES ÉLÈVES À BESOIN …

d'avoir un enseignement spécifique leur permettant de progresser à leur vitesse et en fonction du projet établi avec leur enseignant. Toute décision concernant l'activité, l'intégration au groupe, les situations proposées, l 'évaluat ion, nécessite l'adhésion de l'élève au regard de la signification que revêtent ces adap­tations.

L'adaptation des activités La mise en place des cycles d'APSA résulte d 'une réflexion prenant en compte les exigences institutionnelles, pédagogiques, matérielles.

Les ressources des élèves handicapés ne cadrent pas nécessairement avec les activités proposées. Est-il alors judi­cieux de modifier le cursus d'une classe pour rendre l'activité accessible à tous les élèves de la classe ? La pratique de certaines activités est problématique en raison du handicap de l 'é lève et implique pour l 'enseignant de se résoudre à lui proposer une autre acti­vité. Dans ce cas, si l'élève est conduit à fonctionner en marge des activités pro­posées pour l 'ensemble de la classe, même s'il pratique dans le même cré­neau horaire que ses camarades, peut-on parler d'intégration ? Comment l'ensei­gnant gère-t-il ce double cours ? Peut-on introduire la relaxation ou le tir à l'arc qui exige un gros investissement finan­cier pour toute une classe ? N'est-ce pas un problème pour l'évaluation que ces activités n'appartiennent pas à la liste nationale des épreuves officiellement évaluables en Terminale ?

Les installations ne sont pas toujours adaptées à la pratique des jeunes handi­capés. L'accès au vestiaire ou une rampe d'accès au stade ne solutionne pas tous les problèmes. Des moyens très spéci­fiques doivent être envisagés selon la nature du handicap (température, revête­ment des sols, etc.). L'élève doit être en sécurité.

L'adaptation des situations et des tâches Il est indispen­sable de penser les séances d'EPS en fonc­tion de l'hété­rogénéité des élèves et donc de prévoir des situations et des tâches adaptées au niveau de chacun. La pré­sence d'un han­dicapé impose des contraintes supplémen­taires.

Déterminer et mesurer préci­sément les res­sources de

l'élève. Les situations ne seront-elles pas trop exigeantes, fatigantes, orientant l'élève vers un dépassement dangereux ? De quelles informations médicales dis­posons-nous ? Qui nous renseigne sur le bien fondé des tâches proposées ?

Responsabiliser et rendre les élèves autonomes. Multiplier les situations impose à l'enseignant de se partager dans le temps et de compter sur l'auto­nomie et la responsabilité des élèves. Donner une fiche de travail aux élèves handicapés et s 'occuper des autres élèves est une solution qui n'intègre per­sonne. De même porter son attention prioritairement et essentiellement aux élèves handicapés occulte les besoins des autres. Oui à l'autonomie, non à la prise de risque proche de la mise en danger.

L'adaptation de l'évaluation Les instances institutionnelles nous renseignent sur les stratégies concernant l'évaluation des handicapés. Un docu­ment proposé par l'inspection acadé­mique « enseignement et contrôle adapté » précise les différentes phases de construction des épreuves concer­nées. Des fiches d'évaluation sont bien sûr proposées. Ce travail est important et précieux mais le plus souvent l'élève handicapé n'entre pas dans le cadre donné. Il devient alors indispensable de repenser et les épreuves et l'évaluation.

La répartition du temps consacré à l'adaptation de l'évaluation • Rencontrer le médecin de famille ou le médecin scolaire afin d'être parfaitement informé de l'état de santé de l'élève. • Rencontrer les parents et leur faire part des activités proposées et des modalités d'évaluation. • Situer l'élève dans la classe, le faire accepter par les autres et le faire s'ac­cepter comme autre en raison d'une pra­tique et d'une évaluation spécifique. • Mesurer les possibilités de l'élève au regard de ses ressources.

• Rencontrer l'administration et propo­ser un contrat personnalisé. • Établir un projet cohérent pour l'élève. • Construire des situations et des tâches adaptées avec des buts et des règles modulés. • Créer une fiche d'évaluation adaptée qui apporte à l'élève un regard positif sur ses compétences et ses progrès. Il s'agit de définir précisément les com­pétences attendues, les niveaux acces­sibles, les critères d'évaluation dans les deux registres de la connaissance, la situation d'évaluation et les modalités d'organisation de l'épreuve.

BILAN

Pour ajouter à ces nombreuses difficul­tés et au risque d'être montrée du doigt, je dois avouer ma « peur du handicap ». L'intégrité physique est essentielle pour moi et ce n'est peut-être pas par hasard que j ' a i choisi le métier de professeur d'EPS. Toutefois, comme chaque ensei­gnant, je participe au désir d'intégration de tous les élèves dans l 'école de la République. J'ai eu l'occasion de fonc­tionner avec des élèves handicapés dont la volonté et le courage m'ont beaucoup apporté. Mais l'intégration n'est pas une fin en soi ; elle reste un moyen qui doit favoriser l'épanouissement de l'individu et qui doit tenir compte aussi de ses besoins et de ses possibilités. La soif d'intégrer ne doit pas occulter les problèmes rencontrés par les ensei­gnants d'EPS qui, sous couvert d'égalité des chances, se retrouvent confrontés à un travail supplémentaire lourd qui n'est pas pris en compte. Peut-on accepter d'avoir trente cinq élèves par classe dont des élèves handicapés ? Comment l'enseignant peut-il gérer les besoins particuliers de certains élèves en même temps que ceux des autres élèves ? Peut-il associer des stratégies particulières et des stratégies com­munes ? S'adresser à certains élèves handicapés impose une formation spéci­fique et le « vous le sentirez, etc. », pour justifier la compétence n'est pas une réponse raisonnable.

S'il est admis que la pratique de l'EPS contribue à l'intégration des élèves han­dicapés car elle leur permet de vivre avec et comme les autres, il ne faut pas gommer les difficultés que cela engendre. Peut-on se passer d 'une réflexion sur : le nombre d'élèves par classe, le manque de formation spéci­fique, la non reconnaissance du temps indispensable à l'organisation d'une EPS adaptée, la gestion administrative des dossiers, les modalités de regroupe­ment des élèves, etc. ? Car intégrer ne veut pas dire côtoyer mais prendre en compte l'individu dans sa spécificité sans l'y réduire.

Anne-Marie Laclau Professeur EPS,

Lycée Pierre Beghin, Moirans (38).

24

Revue EP.S n°319 Mai-Juin 2006 c. Editions EPS. Tous droits de reproduction réservé