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UNIVERSITE DE PARIS 1 – PANTHEON SORBONNE
INSTITUT DE RECHERCHE ET D’ETUDES SUPERIEURES DU TOURISME
Mémoire professionnel présenté pour l’obtention du
Diplôme de Paris 1 – Panthéon Sorbonne
MASTER PROFESSIONNEL « TOURISME » (2ème
année)
Spécialité Développement et Aménagement Touristique des Territoires
Par : Mlle Ariane PAYEN
Directeur du mémoire : Mme Maria GRAVARI-BARBAS
Membres du jury : Mme Maria GRAVARI-BARBAS
…………………………………….
Session de Septembre 2012
TOURISME COMMUNAUTAIRE DANS LES SUDS : QUELLE
IMPLICATION DES POPULATIONS LOCALES DANS LES
AIRES PROTEGEES?
Cas du Parc National de Loango, Gabon
REMERCIEMENTS
L’aboutissement de ce mémoire n’aurait pas été possible sans la contribution d’un grand
nombre de personnes auprès desquelles je suis aujourd’hui redevable.
Je tiens à remercier tout particulièrement :
Maria Gravari Barbas pour ses encouragements constants et ses orientations précieuses dans
la direction de ce mémoire.
Au Gabon : tous mes collaborateurs de la conservation et du tourisme notamment Pierre Brice
Maganga, Hans Magaya, Ghislain Bouassa et Romain Beville; les habitants de Sounga, Sette
Cama et Pitonga qui, je le souhaite, sauront trouver leur place au sein des futurs projets de
développement ; A Félicité, Léocadie, Churley, Arcade et à toute la famille Boubala pour leur
accueil et leur soutien sans relâche.
Je remercie chaleureusement tous les acteurs qui se sont prêté au jeu des entretiens.
En France : ma famille et mes proches Anne, Eléonore, Etienne, Adélie, Oyana, Stéphanie,
Agnès, Michel, Marie-Eve, Bénédicte ; Gleda Nzalankazi, Bertrand Mangin et Pamela
Rousselot pour les échanges académiques et amicaux.
CARTE ADMINISTRATIVE DU RESEAU DES PARCS NATIONAUX DU GABON
Source : WWF Gabon
1
SOMMAIRE
INTRODUCTION ................................................................................................................................. 3
CHAPITRE 1: L’INTEGRATION DES POPULATIONS LOCALES AU PROCESSUS DE
MISE EN TOURISME DANS LES AIRES PROTEGEES............................................................... 7
I. LE TOURISME COMMUNAUTAIRE DANS LES AIRES PROTEGEES ....................... 8
1. Contexte international du tourisme dans les pays du sud ........................................................ 8
2. Particularités d’une aire protégée .......................................................................................... 10
3. Le tourisme communautaire, une réponse aux problématiques de gestion des aires
protégées ? ..................................................................................................................................... 13
II. PLANIFICATION DU TOURISME DANS LES AIRES PROTEGEES :
POLITIQUES D’IMPLICATION DES COMMUNAUTES LOCALES ................................... 16
1. Empowerment et gouvernance .............................................................................................. 16
2. Des systèmes de financements privilégiant l’autonomisation des communautés locales ..... 18
3. Quels indicateurs pour la participation ? ............................................................................... 19
4. La « participation », entre discours et réalité......................................................................... 23
III. ANALYSE DE L’IMPLICATION DES COMMUNAUTES LOCALES : UNE
APPROCHE SYSTEMIQUE ......................................................................................................... 25
1. Une multiplicité d’acteurs, des attentes divergentes ............................................................. 25
2. Problématique et hypothèses ................................................................................................. 27
3. Une méthode de recherche qualitative et hypothético-inductive ........................................... 29
CHAPITRE 2: LE PROJET D’ECOTOURISME COMMUNAUTAIRE DU PARC NATIONAL
DE LOANGO:Une appropriation fragile du projet par les communautés locales ....................... 32
I. TOURISME DANS LE PARC NATIONAL DE LOANGO : UNE REPONSE POSSIBLE
AUX CONFLITS D’USAGE ? ....................................................................................................... 33
1. Les prémices du marché du tourisme au Gabon .................................................................... 33
2. Le cadre institutionnel et légal du développement du tourisme au Gabon ............................ 34
3. Un cadre géographique privilégié pour le développement du tourisme ................................ 37
4. Les problématiques liées au territoire .................................................................................... 39
II. BILAN DU PROJET D’ECOTOURISME COMMUNAUTAIRE ................................. 43
1. La mise en place du projet d’écotourisme communautaire ................................................... 43
2. Activités développées ............................................................................................................ 45
3. Le déclin de l’activité touristique .......................................................................................... 47
4. Evaluation de l’impact du projet de tourisme communautaire sur la population locale ........ 50
2
III. LE MANQUE DE SYNERGIE DU SYSTEME D’ACTEURS ....................................... 56
1. Identité des acteurs ................................................................................................................ 56
2. Un système d’acteur non institutionnalisé ............................................................................. 59
CHAPITRE 3 : FREINS A L’IMPLICATION DES POPULATIONS LOCALES ET
RECOMMANDATIONS .................................................................................................................... 61
I. LE MANQUE DE COMMUNICATION ENTRE ACTEURS ........................................... 62
1. Une communauté locale marginalisée par le système de communication ............................ 62
2. Le manque de concertation entre acteurs de la conservation et du tourisme ......................... 67
3. Création d’un cadre privilégié de communication : le Comité Consultatif de Gestion Local
(CCGL) .......................................................................................................................................... 69
II. UN CONTEXTE SOCIOANTHROPOLOGIQUE NEGLIGE ...................................... 71
1. Des réalités territoriales ignorées .......................................................................................... 71
2. Des actions de terrain en faveur des populations locales ? .................................................... 73
3. La dépendance des communautés locales ............................................................................. 75
III. LEVIERS POUR UNE IMPLICATION PLUS EFFECTIVE DES POPULATIONS
LOCALES ........................................................................................................................................ 76
1. Une approche favorisant l’aspect socio-anthropologique du territoire .................................. 76
2. L’utilité des outils de gestion participative ........................................................................... 77
3. L’accompagnement de projet ................................................................................................ 79
4. Formalisation des échanges entre acteurs .............................................................................. 79
CONCLUSION .................................................................................................................................... 82
BIBLIOGRAPHIE .............................................................................................................................. 85
ANNEXES ............................................................................................................................................ 89
LISTE DES ACRONYMES ............................................................................................................... 94
TABLE DES ENTRETIENS .............................................................................................................. 95
TABLE DES FIGURES ...................................................................................................................... 96
TABLE DES MATIERES .................................................................................................................. 97
RESUME ............................................................................................................................................ 100
N.B. : L’Université Paris 1 – Panthéon Sorbonne n’entend donner aucune
approbation ou improbation aux opinions émises dans les mémoires et thèses. Ces
opinions doivent être considérées comme propres à leurs auteurs.
3
INTRODUCTION
Les dernières décennies ont révélé le tourisme comme un fait économique majeur, le plaçant
au quatrième rang mondial des exportations de biens et de services, derrière les carburants, les
produits chimiques et les automobiles (OMT, 2011).1 Son caractère stratégique a séduit les
pays du Sud, aspirant à un développement de leurs commerces, tout en valorisant et en
conservant des patrimoines naturels et culturels intrinsèques à leurs territoires. La création
d’emplois et de revenus générés par le tourisme le place en effet comme un « outil du
progrès » pour les pays en développement (PED). Il a ainsi été adopté par les organismes de
coopération internationale dans un objectif de réduction de la pauvreté à l’échelle mondiale.
Les attributs environnementaux et la qualité fragile des aires protégées en font des espaces
complexes de valorisation touristique. Leur mise en tourisme a été jugée fondamentale afin de
conserver ces patrimoines naturels, tout en générant des revenus pouvant rétribuer les organes
de gestion de ces territoires et des populations locales lésées par de nouvelles restrictions. Le
tourisme s’est ainsi décliné sous différentes formes de « tourisme alternatif » accentuant la
protection de l’environnement et des populations locales en particulier dans les aires
protégées. L’écotourisme vise notamment une durabilité équilibrée entre performance et
satisfaction des communautés, et conservation des paysages et des écosystèmes.
Ce type de tourisme a pourtant révélé son « caractère insoutenable » d’un point de vue social.
Une forme d’exclusion a en effet été créée dans les aires protégées pendant la seconde moitié
du XXème siècle par l’inégalité de répartition des revenus issus du tourisme, les
communautés locales se trouvant reléguées au troisième rang des bénéficiaires après l’Etat et
les opérateurs touristiques étrangers. Elles sont toujours aujourd’hui dans une relation de
subordination face aux autres acteurs des aires protégées (Rodary, 2011)2.
Le rôle des populations locales dans l’aménagement et la gestion des aires protégées alimente
les débats depuis les années 2000 et est devenu central dans toutes questions relatives au
développement. L’ « empowerment », ou « autonomisation » de ces communautés, est devenu
aujourd’hui une notion capitale dans les discours politiques et de coopération. De ces
nouveaux axes prioritaires sont nés le « pro-poor tourism » (tourisme pro-pauvre) et le
« tourisme communautaire » visant la participation effective des communautés locales dans
1 Organisation Mondiale du Tourisme (OMT), Faits saillants du tourisme, 2011
2 Rodary E. (2011) ; « Créer du lien social par le Tourisme » ; Tourisme Durable dans les Suds ?
4
les projets de tourisme et la redistribution équitable des recettes issues de cette activité. Des
mécanismes de gestion participative ont été mis en place dans les politiques d’aménagement
touristiques des territoires et la globalisation de ce terme nous permet de l’inscrire dans une
volonté d’harmonisation internationale des modes de développement.
Cependant, le constat d’échec dans les projets de tourisme communautaire, mis en place dans
les aires protégées des pays du Sud, est fréquent. Nous pouvons en effet entrevoir les mêmes
problématiques persister et d’autres émerger sur ces espaces sensibles de par leur valeurs
environnementales et la présence d’habitants. Conflits d’usage, exode rural et mauvaise
redistribution des revenus, issus de l’activité touristique sont toujours d’actualité, dans un
monde où la pression économique s’accroit quotidiennement en milieu rural.
La mise en tourisme des aires protégées peut-elle permettre une implication effective des
populations locales dans les pays du Sud ?
A la suite de deux années de travail au Gabon en tant qu’assistante technique, au sein de
l’ONG Ibonga ACPE, dans la ville de Gamba, j’ai pu constater que la population locale était
peu intégrée au développement du tourisme dans la région et ce malgré les efforts réalisés par
les acteurs locaux et l’Union Européenne (UE), à l’origine du projet pilote d’ « écotourisme
communautaire » mis en place entre 2003 et 2006 au sud du Parc National de Loango sur la
côte sud-ouest du pays. Par ailleurs, mes voyages et expériences m’ont permis de constater
que cet exemple n’est pas isolé. La majorité des projets de tourisme durable présentent des
bilans mitigés en termes d’appropriation des modèles de gestion par les habitants. Dans le
cadre de ma reprise d’études en Master 2 Développement et Aménagement Touristique des
Territoires à l’Université de Paris 1 Panthéon Sorbonne – IREST, j’ai donc décidé d’étudier
les causes de cette non appropriation, afin de pouvoir comprendre les freins à éviter.
Il me semblait pertinent de choisir le Parc National de Loango comme terrain de recherche,
pour les conflits d’usage rencontrés, avant de remonter en généralité sur le développement du
tourisme communautaire dans les aires protégées des PED. Ce mémoire a été élaboré avec
une posture de « chercheur-acteur », imposant une double implication en tant qu’ancienne
salariée d’une ONG locale œuvrant pour la conservation, puis en tant que « chargée de
mission tourisme » avec la Coopération Allemande (GIZ). Ma posture d’ancienne « actrice de
la conservation » a ainsi pu agir sur certains entretiens, en me permettant à la fois de recueillir
un plus grand nombre d’information auprès de mes partenaires et d’autre part de témoigner
des réserves de la population locale à exprimer ses sentiments. Ces travaux sont avant tout
5
une approche critique et feront donc état des dysfonctionnements liés à la mise en tourisme du
territoire.
Le projet pilote d’écotourisme communautaire (Programme Sectoriel de Valorisation des
Aires Protégées ; PSVAP) du Parc National de Loango, au Gabon, est un exemple concret
d’échec d’appropriation du projet par les populations locales. Six ans après le départ des
porteurs de projet, très peu de progrès social, économique, psychologique ou politique3
peuvent être notés auprès de la population locale. Les nombreux acteurs publics, privés ou
représentants de la société civile tentent actuellement de trouver un terrain d'entente pour ce
processus de mise en tourisme. Cependant le système de gouvernance actuel ne permet pas de
satisfaire toutes les parties prenantes.
Après la fin du projet de l’Union Européenne en 2006, la mise en tourisme du territoire s’est
effectuée sous l’autorité de l’Agence Nationale des Parcs Nationaux, présentant des
compétences principalement orientées vers la conservation plutôt que vers l’anthropologie ou
le tourisme. L’ONG internationale World Wide Fund for nature (WWF) joue, entre autre, un
rôle important dans la gestion de cette aire protégée et de sa périphérie depuis 1992. Les
objectifs de ces deux institutions majeures privilégiant la conservation de la faune et de la
flore, les communautés locales ont longtemps souffert de cette « position secondaire » qui leur
était impartie. La participation des habitants, bien que prise en compte par la politique
nationale, n’est toujours pas effective. Le manque de compétences en anthropologie et en
développement touristique de la part des organismes agissant pour la mise en tourisme n’est
cependant pas la seule raison de cet échec. Il semble que les habitants ne sont pas réellement
associés à la prise de décision. Le contexte socio-anthropologique ne serait pas suffisamment
pris en compte et la communication entre acteurs se révèlerait peu performante.
La volonté de faire participer les habitants au processus de mise en tourisme est réelle. Des
outils destinés à cette implication ont été développés et utilisés tels que des réunions, des
campagnes de sensibilisation, des créations de coopératives. Sont-ils pour autant appropriés ?
Ne faudrait-il pas réserver plus de financements et de temps à l’élaboration et à l’application
de ces outils pour qu’ils ne soient plus un « prétexte », mais pour qu’ils soient conçus avec
pour but premier d’encourager des populations culturellement différentes à une prise de
responsabilité pérenne ? Un Comité Consultatif de Gestion Locale (CCGL), regroupant tous
3 Selon les indicateurs d’évaluation de la participation des communautés locales élaborés par R. SCHEYVENS
(1999), « Ecotourism and the empowerment of local communities »
6
les acteurs du territoire pour une concertation sur les questions relatives à la conservation et
au tourisme, est actuellement mis en place. Ce comité permettra t-il aux habitants d’avoir un
meilleur cadre d’expression ?
Le contexte géographique particulier de cette aire protégée, située à proximité d’un site
d’exploitation pétrolière de l’entreprise internationale Shell, et marquée par la présence des
ONG internationales WWF et World Conservation Society (WCS), inscrit ce territoire dans
un cadre de globalisation à une échelle locale. Son caractère « glocalisé »4 nous permet donc
de l’analyser en tant qu’objet d’étude pertinent pour une généralisation des résultats de
recherche. Le cas du Parc National de Loango nous montre que nous sommes encore loin des
objectifs de participation fixés au départ. Quelles sont les raisons pour lesquelles les
communautés locales dans, et en périphérie, de ce parc ne se sont pas appropriées le projet
"d'écotourisme communautaire" ? Comment mieux les impliquer dans cette activité?
Les recherches menées dans les aires protégées ont ainsi permis d’identifier un certain nombre
de freins à l’implication des communautés locales. L’analyse des mécanismes de
communication entre acteurs et du contexte socio-anthropologique n’ont cependant pas été
approfondis et méritent d’être étudiés dans un cadre où la communication reste l’outil premier
d’implication des populations locales.
L’objectif de ce mémoire est donc d’examiner les obstacles à la participation des habitants,
dans les projets de mise en tourisme des aires protégées, dans les pays du Sud et de réfléchir
aux leviers permettant de mieux considérer cette catégorie d’acteurs. Le premier chapitre
exposera les fondements d’un tel questionnement en mettant en exergue le contexte
international du développement du tourisme communautaire et les problématiques
engendrées. Le terrain de recherche sera ensuite analysé dans un second chapitre dressant le
bilan du projet d’écotourisme communautaire du Parc National de Loango et justifiant les
hypothèses de recherche. Enfin, le troisième chapitre interrogera les dysfonctionnements du
projet en termes de communication et de prise en compte du contexte socio-anthropologique
du territoire et proposera des leviers favorisant une meilleure implication des communautés
locales.
4 Le sociologue Blaise GALLAND (1995) défini le processus de « glocalisation » comme : « le processus double
par lequel la ville se décharge de sa fonction de production, d’échange et de traitement de l’information en la
déplaçant dans le cyberespace tout en développant conséquemment de nouvelles formes d’organisations socio-
spatiales au niveau local. »
7
CHAPITRE 1
L’INTEGRATION DES POPULATIONS LOCALES AU
PROCESSUS DE MISE EN TOURISME DANS LES AIRES
PROTEGEES
8
I. LE TOURISME COMMUNAUTAIRE DANS LES AIRES PROTEGEES
Le tourisme communautaire apparait dans les discours comme une alternative efficace pour
une adaptation des populations rurales des Suds, au contexte international de développement.
Les résultats concrets de la mise en tourisme des aires protégées sont-ils pour autant
satisfaisants ?
1. Contexte international du tourisme dans les pays du sud
Le secteur du tourisme connait une croissance sans précédent à l’échelle internationale et
représente aujourd’hui le quatrième secteur d’exportation derrière les carburants, les produits
chimiques et le secteur automobile, avec une augmentation de 6,6% du nombre de touristes
entre 2009 et 2010. Selon l’Organisation Mondiale du Tourisme (OMT, 2011)5, les emplois
directs et indirects générés par cette activité représenteraient entre 6% et 7% du nombre total
d’emplois dans le monde.
De nouvelles destinations accompagnent cette forte croissance et les pays en développement
ont vu leur part passer de 31% à 47% entre 1990 et 2010. L’Afrique a notamment observé une
croissance de 7% en 2010, et ce malgré les crises économiques et politiques ayant secoué le
continent. Les prévisions de l’OMT laissent à penser que nous allons voir le nombre de
touristes doubler d’ici les années 2020.
Figure 1 : Pourcentage d’arrivées de touristes internationaux, 2010 (Source : OMT)
5 OMT, 2011, Faits saillants du tourisme
51%
22%
12%
5% 5% 6%
Europe
Asie et Pacifique
Amérique du nord
Amérique Latine
Afrique
Moyen-Orient
9
La part d’arrivées en Afrique et en Amérique Latine représente 10% de l’ensemble des
arrivées de touristes internationaux. L’Europe est la principale région émettrice et réceptrice
avec plus de la moitié des touristes. Le marché du tourisme international reste donc encore
très concentré. Pourtant, les pays du Sud visent une mise en tourisme plus importante de leurs
territoires en s’orientant principalement sur des marchés de niche, tel que le tourisme
communautaire.
La croissance annuelle moyenne du nombre d’arrivées de touristes internationaux a augmenté
de 6,6% par an en Afrique Subsaharienne entre 2000 et 2010. Cette dernière occupe
aujourd’hui 3,3% de part de marché au niveau mondial avec 30,7 millions de visiteurs en
2010. Le continent africain n’est pas la destination principale des touristes mais a vu son taux
de croissance augmenter de 5,5% chaque année en moyenne, depuis 1995. Il pourrait voir sa
part occuper 5% du marché mondial d’ici 2020, avec 77 millions de visiteurs par an.
Les dépenses effectuées par les visiteurs dans la restauration, l’hébergement, le transport
local, les loisirs et les magasins créent des retombées économiques non négligeables dans un
secteur où les touristes tendent à consommer d’avantage lorsqu’ils sont en vacances. Comme
l’indique Géraldine Froger (2011), « dans de nombreux pays du sud, notamment en
développement (PED), le tourisme est un secteur essentiel car il génère des devises et attire
des investissements directs étrangers (IDE), créé des emplois (en particulier pour la
population la moins qualifiée) et contribue au développement d’infrastructures publiques
telles que les aéroports, routes, télécommunications, services de propreté, etc. »6.
Cependant, cette mise en tourisme des territoires doit éviter les répercussions négatives sur
l’environnement et les populations locales telles que la pollution, l’urbanisation excessive, et
la marginalisation de certaines communautés. Une étude de l’OMT datant de 2001 indique
qu’en moyenne seulement 43% d’un forfait touristique international atteint le pays d’accueil,
sans compter les exportations de biens et de main d’œuvre7.
Le développement durable défini comme « permettant de répondre aux besoins du présent
sans compromettre la capacité des générations futures à satisfaire leurs propres besoins » par
la Commission Mondiale sur l’Environnement et le Développement tenue à Bruntland en
1987, a mis l’accent sur l’importance d’équilibrer les aspects environnementaux,
économiques et sociaux dans les projets de développement. Les acteurs internationaux ayant
6 Froger (2010), Tourisme Durable dans les Suds ?
7 Caire (2012), « A qui profitent les vacances ? », Le Monde Diplomatique
10
d’abord privilégié les actions en faveur de l’environnement, le 5ème
Congrès Mondial sur les
Parcs tenu à Durban en 2003 a centralisé les débats sur le rôle des communautés locales dans
l’aménagement des aires protégées et a ainsi souligné l’importance de cette implication.
L’industrie du tourisme s’est adaptée à ce cadre formel de « durabilité » et a défini le tourisme
durable comme « toute forme de développement, aménagement ou activité touristique qui
respecte et préserve à long terme les ressources naturelles, culturelles et sociales, et
contribue de manière positive et équitable au développement économique et à
l'épanouissement des individus qui vivent, travaillent ou séjournent dans les espaces
protégés »8. Le tourisme durable concilie ainsi les modes de transport, les types
d’hébergement et d’activités touristiques respectueuses de l’environnement, et la satisfaction
des communautés locales des territoires concernés.
2. Particularités d’une aire protégée
Définition d’une aire protégée
Les aires protégées ont été créées dans le but de protéger certains écosystèmes terrestres ou
marins jugés « fragilisés » et/ou « en danger » par l’Union Internationale pour la Conservation
de la Nature (UICN). Essentielles pour la conservation de la biodiversité, elles ont permis aux
différents organes nationaux et internationaux de mettre en place des mesures et des cadres
institutionnels de protection de ces territoires. Ces quarante dernières années ont été marquées
par la croissance des aires protégées à l’échelle mondiale et nous pouvons noter que 4% de la
planète bénéficie de ce statut de protection, avec plus de 102 000 sites terrestres et marins
répertoriés, couvrant près de 19 millions de kilomètres carrés.9
Les aires protégées sont définies par l’UICN comme « des zones terrestres ou marines
spécifiquement dédiées à la protection et à la conservation de la diversité biologique, ainsi
qu'aux ressources naturelles et culturelles associées. Ces zones et ressources remarquables
doivent être gérées par des moyens efficaces, de nature juridique ou autre (contractuelle,
pédagogique, financière, etc.). »
Six catégories d’aires protégées ont ainsi été déterminées par la Commission des Parcs
Nationaux et des Aires Protégées (CPNAP).
8 OMT, 2004
9 www.iucn.org
11
Figure 2 : Les six catégories d’aires protégées
Catégories Caractéristiques Exemples
Réserve Naturelle Intégrale aire protégée gérée principalement à des fins scientifiques ou de protection des ressources sauvages
Parc national suisse ou l'une des réserves écologiques du Québec
Zone de Nature sauvage aire protégée gérée principalement à des fins de protection des ressources sauvages
Parc national de Yosemite aux États-Unis
Parc national aire protégée gérée principalement dans le but de protéger les écosystèmes et à des fins récréatives
Parc national de la Vanoise en France
Monument naturel aire protégée gérée principalement dans le but de préserver des éléments naturels spécifiques
Monument national de Petroglyph au Nouveau-Mexique, États-Unis
Aire de gestion des habitats ou des espèces
aire protégée gérée principalement à des fins de conservation, avec intervention au niveau de la gestion
Réserve naturelle de Popenguine au Sénégal
Paysage terrestre ou marin protégé
aire protégée gérée principalement dans le but d'assurer la conservation de paysages terrestres ou marins et à des fins récréatives
la chaîne de montagne Wuyi Shan en Chine, les parcs naturels régionaux en France
Aire Protégée de ressources naturelles gérée
aire protégée gérée principalement à des fins d'utilisation durable des écosystèmes naturels
Réserve nationale de faune du cap Tourmente au Québec
Source : www.uicn.org
Les Parcs Nationaux présentent cependant des restrictions plus importantes en termes d’usage
anthropique du territoire qu’un paysage terrestre ou marin protégé, comme un Parc Natural
Régional.
Parmi elles, 211 sites exceptionnels sont répertoriés au Patrimoine Mondial de l’UNESCO,
dans 153 états partis et bénéficient d’une protection juridique particulière dans le cadre de la
Convention du Patrimoine Mondial de l’UNESCO, dont 37 sur le continent africain et 38 en
Amérique Latine, la majorité des sites classés se trouvant en Europe et en Asie.10
Néanmoins, de nombreuses aires protégées sont confrontées à des problèmes d’exploitation
forestière, pétrolière ou de pollution générant des conflits d’usage avec les communautés
locales, en particuliers dans les pays du sud. Ces dernières ont parfois été déplacées suite à la
création d’aires protégées (Froger, 2010)11
. La mise en application de leur cadre juridique
constitue une problématique majeure dans la gestion de ces sites. Le manque de moyens, le
10
http://whc.unesco.org/fr/list/stat#d1 11
Froger G., 2010, Tourisme durable dans les Suds ?
12
manque et la faible qualification des effectifs engendrent des difficultés récurrentes, en
particulier dans les pays du Sud dont la classification de ces aires protégées est encore
récente.
La création des aires protégées a par définition un objectif de protection du patrimoine
naturel, et les six catégories d’aires protégées sont toutes dédiées à la gestion de
l’environnement avec une ouverture plus ou moins limitée sur les activités anthropiques
pouvant y être menées. Les problématiques rencontrées sur ces territoires relèvent pourtant
principalement des activités menées par des populations déjà présentes.
Tourisme et conservation dans les aires protégées
La « conservation » opérée par les ONG environnementales sur ces espaces protège les
espèces fauniques, floristiques et leurs habitats. Son objectif est de maintenir les écosystèmes
dans un bon état et de prévenir leur dégradation par les activités humaines. Bien que le terme
ait été très souvent employé au Sommet de Rio, aucune définition précise n’en a été donnée.
Aujourd’hui, c’est une discipline des ONG environnementales telles que le WWF ou le WCS.
L’activité touristique sur ces territoires permettrait de générer des revenus à la fois pour la
gestion des aires protégées et pour les populations locales, victimes de la restriction d’usages
(Méral, 2011). Les revenus dégagés au profit de ces communautés demeurent cependant
encore très restreints. Il apparait fondamental aujourd’hui de les impliquer davantage dans la
gestion même des aires protégées afin de générer une meilleure redistribution des ressources.
L’écotourisme préconisé par les bailleurs de fonds et les ONG internationales, s’est dans un
premier temps axé sur l’incitation des populations locales à préserver les écosystèmes plutôt
que de les surexploiter, comme l’explique Méral (2011), mais les résultats escomptés n’ont
pas été satisfaisants d’un point de vue social. Les aires protégées sont apparues longtemps
comme des « outils de protection de la biodiversité dans les pays en développement »12
.
De nouvelles initiatives visant à offrir plus d’avantages à ces communautés ont ainsi vu le
jour dans les pays du Sud, sous le terme de « pro-poor tourism » ou « tourisme pro-pauvre ».
Le tourisme communautaire mis en place dans les aires protégées se distingue notamment par
des objectifs sociaux de développement des populations locales afin de compenser les
restrictions d’usage liées à la classification des aires protégées.
12
MERAL (2011), Tourisme et conservation : tentations africaines, Tourisme dans les suds ?, Ed. P.L., Coll.
Ecopolis
13
3. Le tourisme communautaire, une réponse aux problématiques de gestion des aires
protégées ?
Définition du tourisme communautaire
Selon la définition d’Haüsler, « le Community-based Tourism (CBT) ou tourisme
communautaire implique un nombre significatif d’individus vivant sur un territoire. Ces
derniers contrôlent de manière substantielle son développement et sa gestion. La majorité des
bénéfices est redistribuée à l’économie locale. Les membres de la communauté, y compris les
individus impliqués de manière indirecte, y trouvent une forme d’intérêt (fonds pour la
communauté, effet démultiplicateur, etc.). »13
Le concept de participation communautaire puise ses sources dans les théories politiques sur
la démocratie des années 70-80, qui se sont développées en réaction à la centralisation, à la
bureaucratisation et aux rigidités étatiques. La nécessité de l’implication des communautés
dans la planification touristique a été reconnue par de nombreux organismes internationaux
(OMT, CNUCED) comme élément crucial dans l’optique du développement d’un tourisme
durable.14
L’enjeu principal est de parvenir à une gestion des ressources naturelles pour le bien commun,
tout en satisfaisant des populations locales ayant déjà un usage préalable du territoire. Ces
dernières utilisaient en effet les ressources et les paysages pour leur subsistance et traditions.
La mise en tourisme de ces espaces est donc susceptible de générer des conflits d’usage
pouvant annihiler les efforts de conservation.
L’objectif est donc de créer des projets où les communautés se rendent responsables et
gestionnaires de l’activité afin de générer des retombées économiques au niveau local et de
rendre la population plus autonome.
Problématiques liées au tourisme communautaire
Cependant, la communauté n’est pas constituée comme un groupe homogène et des disparités
entre individus, entre famille ou entre groupes socioculturels peuvent apparaitre. Les
complexités sociales de chaque territoire en font des cas d’étude et d’aménagement distincts.
13
Haüsler N, 2005, Planning for Community Based Tourism, The International Ecotourism Society 14
Scheyvens, 1999
14
(Restrepo Gomez, Cloquet, 2011)15
. Chacun doit ainsi être analysé dans ses spécificités
anthropo-sociologiques.
Le tourisme communautaire comporte par ailleurs des limites et des risques pour les
communautés locales qui peuvent se voir « victimes » d’un projet comportant pourtant des
objectifs de développement.
En effet, la mise en tourisme du territoire dans un souci de valorisation culturelle peut
conduire à une forme de « folklorisation » de la population locale. C’est le cas notamment des
tribus Masaï Mara d’Afrique Australe dont le simple contact avec les touristes a suffit à
détruire leur équilibre culturel. Les intérêts économiques découlant du tourisme
communautaire peuvent dénaturer les aspects endogènes d’une culture.
Selon Estienne Rodary (2010), « le tourisme est une exposition de soi, la (re)construction
d’une identité et d’une culture permet de donner à voir une singularité qui justifie « le
déplacement ». Mais cette recréation reconfigure aussi les relations de pouvoir qui peuvent
amener une institutionnalisation de cette culture devenant aussi étrangère au touriste qu’à
l’hôte qui l’accueille. Si donc le loisir de nature a pu créer une marginalisation liée à
l’imposition d’une vision spécifique de la nature, l’approche culturelle peut produire une
acculturation de l’hôte vers une identité « touristique ». 16
Le tourisme communautaire est parfois prescrit à des destinations que l’on estime destinées à
cette forme d’activité pour la satisfaction des communautés locales. Ce système de valeur
externe est alors imposé aux habitants qui ne sont pourtant pas toujours favorables à cette
forme de développement.17
La confrontation à d’autres cultures peut également générer des ressentiments et de
l’animosité de la part des touristes et à l’égard des communautés quant à certaines de leurs
pratiques.
Par ailleurs, de nombreuses études ont permis de constater que les meilleurs emplois étaient
occupés par des personnes extérieures. En effet, les communautés se trouvant dans des
15
Restrepo Gomez M., Cloquet I. (2011), « Ecotourisme : de la pertinence d’une définition plus fine de la
population locale », Tourisme et Mondialisation, Mondes du Tourisme, Septembre 2011 16
Rodary E. (2010), Tourisme Durable dans les Suds ? 17
Froger G. (2010), Tourisme durable dans les Suds ?
15
territoires ruraux dans les pays du sud ne bénéficient pas d’un accès à l’éducation secondaire
et elles occupent principalement les emplois secondaires (Froger, 2010).18
La majeure partie des bénéfices liés à l’activité touristique dans une aire protégée ne
reviennent donc pas aux communautés mais servent au contraire les tours opérateurs, les
compagnies aériennes et les petites et moyennes entreprises à l’extérieur du territoire.
Selon Goodwin, 99% des revenus du tourisme communautaire sont perçus par les villes
voisines du Parc National de Komodo, et non par les communautés vivant dans le parc.
Celles-ci sont pourtant les plus désavantagées quant aux restrictions sur l’utilisation des
ressources au sein du parc, et manquent d’opportunité pour développer des équipements
touristiques.19
La mise en œuvre de projets de tourisme communautaire dépend par ailleurs majoritairement
de soutiens externes, émanant des bailleurs de fonds. Une forme d’assistanat des populations
peut ainsi en découler sur le moyen, voire le long terme, si une politique de gestion
participative n’est pas menée au départ.
Enfin, cette forme de tourisme peut, comme les autres, générer des conflits de classe ou de
genre au sein des communautés si la redistribution des revenus est marquée par des disparités
sociales.20
La mise en tourisme des territoires doit donc s’accompagner de politiques stratégiques pour
l’implication et l’autonomisation des populations locales.
18
Froger G. (2010), Tourisme durable dans les Suds ? 19
Goodwin H. (2002),”Local community involvement in tourism around National Parks: opportunities and
constraints” 20
Froger G. (2010), Tourisme durable dans les Suds ?
16
II. PLANIFICATION DU TOURISME DANS LES AIRES PROTEGEES :
POLITIQUES D’IMPLICATION DES COMMUNAUTES LOCALES
Nous sommes passés d’une conservation des ressources naturelles à une conservation « pour
et par les communautés locales » dans les années 1980. Les politiques de conservation se sont
dés lors orientées vers une plus grande implication des communautés locales dans les projets
de développement. Des stratégies et des méthodes ont ainsi été créées pour optimiser cette
participation, et les bailleurs de fonds ont également privilégié les projets comportant une
composante sociale.
1. Empowerment et gouvernance
Définition de l’Empowerment
L’ « empowerment » des communautés locales est devenu une notion stratégique dans les
politiques de développement durable internationales afin de viser l’autonomisation des
communautés locales. Selon le Groupe de Recherche et d’Intervention en Evaluation
(GRIEVA)21
, « Il se veut un processus de transfert des connaissances visant à développer un
potentiel jusqu’à présent caché ou ignoré chez un individu ou groupe d’individus ». Le
concept traduit en français et se rapprochant au plus près de l’empowerment est celui de
l’autonomisation, définie par le fait de devenir indépendant matériellement ou
intellectuellement22
et est lié de manière intrinsèque à la notion de développement.
L’objectif de l’empowerment est donc d’outiller une communauté donnée pour atteindre
l’auto-détermination.
Définition de la gouvernance
Le concept de « gouvernance » a quant à lui ressurgi dans le vocabulaire des sciences sociales
dans les années 1990. Les crises financières, la montée en puissance des ONGs et un intérêt
accru pour un mode de régulation décentralisé ont poussé les politiques à passer d’un modèle
de « gouvernement » à un modèle de « gouvernance » privilégiant une approche participative
dans les projets de développement.
21
Le GRIEVA dépend de l’Université du Québec à Montréal 22
Nouveau Petit Robert de la langue française, 2008
17
D’après Stoker (1998), le gouvernement désigne les institutions officielles de l’État et le
pouvoir coercitif légitime dont elles ont le monopole. La gouvernance, quant à elle, a trait à
l’évolution des modes de gouvernement, à l’ensemble des relations de pouvoir dans une
société, ainsi qu’aux modes d’arbitrage entre les différents acteurs détenteurs de pouvoir. Le
gouvernement n’est alors qu’un acteur parmi d’autres de la gouvernance. Selon le
Dictionnaire des Sciences Politiques et Sociales (Sirey 2004), la gouvernance peut être définie
comme une méthode de régulation, un processus de coordination d’acteurs, de groupes
sociaux, d’institutions, qui coopèrent pour atteindre des buts propres discutés et définis
collectivement dans des environnements fragmentés et incertains.23
Gouvernance et Empowerment dans le tourisme communautaire
L’approche « bottom-up » visant la participation de la population locale dans les processus de
décision a ainsi remplacé une approche « top-down » consistant à imposer ces décisions aux
citoyens.
Le tourisme communautaire s’inscrit à la fois dans ces politiques de gouvernance et
d’empowerment des communautés locales.
Le Ministère de l’Artisanat, du Commerce et du Tourisme de l’Etat français, a identifié six
leviers en juillet 2012 pour la mise en œuvre de projets de tourisme communautaire 24
:
La participation et la formation de la communauté
La collaboration et le partenariat avec l’industrie
La gestion et l’autonomisation locale
Les objectifs environnementaux et communautaires
L’aide des secteurs public et privé
Les considérations financières pour une durabilité à long terme
Le tourisme communautaire devient donc un axe privilégié de mise en tourisme des
territoires, notamment pour les politiques françaises.
23
Dictionnaire des Science Politiques et Sociales, SIREY, 2004 24
http://www.veilleinfotourisme.fr/le-tourisme-communautaire-ajoute-une-couleur-locale-a-la-durabilite-
93161.kjspv
18
2. Des systèmes de financements privilégiant l’autonomisation des communautés
locales
L’autonomisation des communautés locales est devenue l’une des priorités des appels à
candidature par les bailleurs de fonds internationaux dans les projets de lutte contre les
changements climatiques et de protection de la biodiversité.
En effet, l’étude des récents appels à projets émis par l’Union Européenne (UE), l’Agence
Française de Développement (AFD) et le Programme Régional de l’Afrique Centrale pour le
Développement (CARPE)/Union Mondiale pour la Nature (UICN)25
, permet d’identifier
l’implication des communautés locales comme domaine d’intervention prioritaire. Ainsi, les
projets financés actuellement sont ceux répondant aux exigences de « bonne gouvernance »
sollicitées par les organismes financeurs. Le renforcement de capacités des autorités locales et
de la société civile dans le plaidoyer et dans la phase opérationnelle des projets apparaissent
comme des critères de sélection essentiels. La création d’emplois et la promotion des
initiatives de production locales sont les indicateurs clés permettant l’évaluation de ces projets
par les bailleurs de fonds.
Grégoire Chauvière Le Drian (2010)26
montre par ailleurs que les différents grands
organismes internationaux orientent également leurs politiques en faveur d’un développement
du tourisme avec une plus grande implication des populations locales.
Selon lui, l’Agence Française de Développement (AFD) s’intéresse particulièrement au
financement d’un tourisme durable, « générateur de revenus à tous les niveaux pour les
populations locales ». Elle place la gouvernance locale participative « en toile de fond des
projets liés au tourisme, gage de la durabilité de ses interventions ». Son action « porte sur le
renforcement des capacités administratives nationales, des capacités locales par la formation
professionnelle, la concertation/implication et responsabilisation des populations. ».
25
CARPE est une initiative de financements de l’Agence Américaine pour le Développement International
(USAID) 26
Chauvière Le Drian, 2010, « Financer et promouvoir un tourisme durable », Tourisme Durable dans les Suds ?
19
3. Quels indicateurs pour la participation ?
A partir de ces politiques d’action, comment peut-on évaluer le degré d’implication des
communautés locales ? Cette évaluation se faisant sur des critères sociaux, leur mesure est de
ce fait difficile. Elle doit s’appuyer non seulement sur des données quantitatives mais
également qualitatives, et est susceptible de différer dans chaque contexte social.
Les quatre niveaux de participation communautaire
Froger (2010)27
s’appuie sur Paul (1987) pour définir les quatre niveaux de participation
communautaire :
Les concepts d’ « empowerment », de « gouvernance » et de « participation » employés par
les financeurs dans les appels à propositions ne définissent pas le niveau de participation
requis. Ils sont ainsi souvent critiqués par les chercheurs et les professionnels pour leur
caractère général, englobant des degrés très différents d’implication des populations locales
aux projets de développement.
En Namibie, les communautés sont consultées non seulement pour les prises de décision, mais
également pour la gestion des projets et dans la répartition des revenus générés (Lapeyre,
27
Froger G (2010)
Figure 3 : Les quatre niveaux de participation communautaire, Paul, 1987
1. Le partage des informations : les concepteurs de projet doivent informer la
population sur ce qui va se passer dans le but de faciliter la mise en œuvre du projet.
2. La consultation : la population doit être réellement consultée. Les porteurs de projet
doivent lui demander son avis sur ce qu’il faut faire ou ne pas faire. Néanmoins, la
population n’a pas de pouvoir de décision.
3. La prise de décision : les populations locales sont non seulement consultées, mais
elles participent aux décisions qui sont prises concernant la mise en œuvre du projet.
4. La mise en œuvre du projet : les populations locales sont directement parties
prenantes du projet et participent à son fonctionnement.
20
2010). Cet exemple s’oppose au cas de Madagascar où un décalage peut être observé entre la
perception du tourisme des développeurs et celle des populations locales (Andrianambinina,
2010), et où ces dernières n’atteignent vraisemblablement pas le second niveau de
participation communautaire qu’est la consultation.
Les projets se définissant comme « communautaire » ne précisent donc pas de quelle manière
et à quel point les populations locales sont impliquées. Aucun label de « tourisme
communautaire » n’existe et les politiques devraient veiller à une utilisation spécifique,
répondant à des critères précis afin de garantir certaines retombées positives pour les habitants
d’un territoire donné et d’éviter de créer un simple argument commercial de vente.
Indicateurs d’impacts du tourisme communautaire sur les populations locales
Un tableau permettant d’évaluer les impacts aussi bien positifs que négatifs des projets
d’écotourisme sur les populations locales a ainsi été conçu par Scheyvens (1999)28
. Cet outil
est aujourd’hui utilisé et adapté aussi bien par le monde de la recherche que par certains
porteurs de projets de tourisme communautaire et d’écotourisme pour les phases de suivi-
évaluation.
28
Scheyvens R. (1999), Ecotourism and the empowerment of local communities, Tourism Management, N° 20,
pp 245-249
21
Figure 4 : Tableau de détermination des impacts des projets d’écotourisme sur les populations locales, Scheyvens (1999)29
Signes de renforcement des communautés ou
« empowerment »
Signes d’absence de renforcement des communautés ou
« disempowerment »
Progrès économique
L’écotourisme apporte des gains à la communauté
locale. L’argent gagné est partagé entre de nombreux
ménages. Il y a des signes visibles d’amélioration (eau
courante, amélioration de la qualité de l’habitat).
L’écotourisme n’apporte que des gains limités et irréguliers
à la communauté. La plupart des profits vont aux élites
locales, aux opérateurs extérieurs, aux agences
gouvernementales, etc. Seuls quelques individus ou
quelques familles bénéficient directement de l’écotourisme.
Les autres ne peuvent y participer faute de capital et/ou de
savoir-faire approprié.
Progrès psychologique
De nombreux membres de la communauté prennent
confiance en eux car les gens de l’extérieur
reconnaissent le caractère unique de leur culture, de
leurs ressources naturelles et de leurs connaissances
traditionnelles. Grâce à cette assurance, ils cherchent
des opportunités de formation et de scolarité. L’accès à
l’emploi et à des moyens financiers élève le statut de
secteurs traditionnellement dévalorisés de la société
(femmes, jeunes).
Nombreux sont ceux qui ne bénéficient pas
de l’écotourisme et font face à des difficultés dues à une
réduction de l’accès aux ressources d’une aire protégée. Ils
se sentent frustrés et perdus et sont déçus par l’initiative.
Progrès social
L’écotourisme maintient ou renforce l’équilibre de la
communauté locale. La cohésion de la communauté
s’améliore car les individus et les familles œuvrent
ensemble à monter une entreprise touristique
fructueuse. Certains revenus du tourisme servent au
développement de la communauté, par exemple pour
construire des écoles ou améliorer les routes.
Un manque d’harmonie et la détérioration du tissu social
peuvent être observés. De nombreux membres de la
communauté adoptent des valeurs venant de l’extérieur et
perdent le respect pour leur culture traditionnelle et pour les
anciens. Les groupes défavorisés (par exemple les femmes)
sont ceux qui souffrent le plus des problèmes associés à
l’initiative écotouristique. Ils n’accèdent pas équitablement
à ses bénéfices. Au lieu de coopérer, les individus, les
29
Traduit de l’anglais
22
familles, les groupes ethniques ou socio-économiques se
font concurrence pour s’approprier les gains de
l’écotourisme. La jalousie et le ressentiment sont courants.
Progrès politique
La structure politique de la communauté, qui
représente équitablement les besoins et les intérêts de
tous les groupes de la communauté, offre une tribune
au sein de laquelle les habitants peuvent soulever des
questions concernant l’entreprise écotouristique et
voient leurs préoccupations prises en compte. Les
agences chargées de lancer ou de gérer l’entreprise
touristique recherchent l’opinion de la communauté (y
compris les femmes, les jeunes et autres groupes
socialement défavorisés) et leur donnent l’occasion
d’être représentés dans les organismes décideurs, par
exemple le conseil de gestion des parcs.
La communauté est dotée d’une autorité autocratique ou
servant ses propres intérêts. Les agences de lancement ou de
gestion de l’écotourisme traitent les communautés comme
des bénéficiaires passifs, ne les impliquent pas dans les
prises de décision. Ainsi, la majorité des membres de la
communauté pensent qu’ils n’ont pas grand-chose à dire sur
le si et le comment du fonctionnement de l’initiative
écotouristique.
Les bailleurs de fonds s’appuient donc sur des indicateurs pouvant être mesurés tels que le
nombre de personnes présentes à une réunion, de formations, de touristes ou d’emplois créés.
Mais les indicateurs qualitatifs sont de plus en plus pris en considération dans des projets à
caractère social comme le tourisme communautaire.
Ainsi, la relation entre les institutions présentes sur le territoire et la population locale, les
changements d’habitudes quotidiennes au sein des foyers ou la qualité des échanges en
réunion, deviennent également des indicateurs stratégiques d’évaluation de ces projets.
4. La « participation », entre discours et réalité
Le concept de « participation » est devenu fondamental dans le discours des organismes
étatiques et non étatiques pour les projets de développement. L’omniprésence de ce terme
dans la littérature de l’environnement et du développement nous révèle sa portée stratégique
à l’échelle internationale. Chaque projet doit en théorie aujourd’hui intégrer ce volet social à
ses objectifs.
Les populations locales sont-elles pour autant réellement incluse aux processus de décision et
de gestion ? Comment ces discours sont-ils appliqués sur le terrain ?
Les réalités observées font état d’une abstraction de la présence et des droits des
communautés locales par les politiques de conservation (Boissière, Doumenge, 2008). « Le
concept même de conservation, de bien public mondial à protéger, est imposé par la
communauté internationale au détriment de toute prise en compte des populations qui sont
pourtant les premières touchées par ces décisions. »30
. A ce sujet, Boissière et Doumenge
suggèrent de partir des priorités, des souhaits ou des impératifs des populations locales, voire
de leur propre conception de la « conservation », pour créer les aires protégées et prendre des
décisions à leur sujet.
Par ailleurs, la croyance plaçant ces populations comme « prédateurs nuisibles de la forêt »
(Boissière, Doumenge, 2008) peut entrainer une limitation des responsabilités qui leur sont
données et donc de leur implication.
30
Boissière, Doumenge, 2008, Entre marginalisation et démagogie : quelle place reste t-il pour les
communautés locales dans les aires protégées ?
24
Les observations de Rodary (1998)31
ont montré que les quotas de chasse, la représentativité
des ONG environnementales ou le choix de la localisation des programmes de conservation
restent des éléments pour lesquels les populations locales ne sont toujours pas consultées.
Les programmes de conservation des ONG environnementales s’inscrivent en effet dans un
contexte de globalisation des programmes de démocratisation du Fond Monétaire
International (FMI). Leur lien entre le local (actions sur le terrain) et le global (actions
définies sur des bases internationales) créé une forme de glocalisation32
des projets de
conservation et donc de tourisme communautaire.
Ainsi, les ONG environnementales internationales parviennent à étendre leurs champs
d’action par l’intégration du volet « participation » à leurs activités, sur des territoires où
l’administration d’Etat est en général peu présente. Celles-ci ont besoin de l’assentiment des
populations locales pour la gestion de la faune et la lutte anti-braconnage pour une plus
grande efficacité. Elles conservaient pourtant l’apanage des prises de décision dans ces
espaces où les populations locales restent marginalisées (Rodary, 1998). Qu’en est-il
aujourd’hui ?
L’étude menée en Zambie et au Zimbabwe (Rodary, 1998) montre l’absence d’une réflexion
sur les conséquences de la participation. Les objectifs apparaissent pourtant distincts chez les
ONG nationales et internationales ayant un plus grand pouvoir d’action. Selon Rodary, ce
phénomène de participation ne pourra pas déboucher dès lors sur une démocratie
participative, mais sur un système libéral suivant une logique plus globale.
Les chercheurs s’interrogent : la « participation », est-elle dès lors une construction purement
rhétorique ? Peut-on parler d’une démocratie représentative plutôt que d’une démocratie
participative ?
La mise en tourisme des aires protégées peut-elle permettre une implication effective des
populations locales dans les pays du Sud ?
31
Rodary E., 1998, De la Conservaation participative à la promotion de l’économie libérale. Les programmes de
conservation de la faune en Zambie et au Zimbabwe, Politiques Africaines, N°72, pp 113-129 32
Le sociologue Blaise Galland définit le processus de glocalisation comme : "le processus double par lequel la
ville se décharge de sa fonction de production, d'échange et de traitement de l'information en la déplaçant dans
le cyberespace, tout en développant, conséquemment, de nouvelles formes d'organisations socio-spatiales au
niveau local."
25
III. ANALYSE DE L’IMPLICATION DES COMMUNAUTES LOCALES : UNE
APPROCHE SYSTEMIQUE
La problématique d’implication des populations locales dans les projets de mise en tourisme
des aires protégées suppose une analyse du tissu d’acteurs, de son système et de son
fonctionnement. L’aspect sociologique de cette étude nécessite une recherche qualitative et
hypothético-inductive.
1. Une multiplicité d’acteurs, des attentes divergentes
Les attentes des populations locales
La création des aires protégées ayant généré de nombreux conflits d’usage avec les
populations vivant dans ou en périphérie de ces territoires, les attentes principales des
populations locales sont relatives à la reconnaissance de leurs droits. Celles-ci souhaitent
avant tout poursuivre l’usage qu’elle faisait des ressources de cet espace nouvellement
protégé (agriculture, élevage, chasse, pêche, cueillette, rites traditionnels, etc.).
Souvent volontaire pour participer à la protection de l’aire protégée, elles réclament en
échange une rétribution ou autorisation de collecter ponctuellement certaines ressources,
comme les populations Pahy du centre du Vietnam (Boissière, Doumenge, 2008).33
Elles attendent du tourisme des retombées économiques et l’amélioration des conditions de
vie dans les villages et dans les foyers.
L’opinion publique et les attentes des touristes internationaux
Les touristes internationaux décident, quant à eux de visiter, un territoire pour des raisons
personnelles, à l’exception du tourisme d’affaires. Ils sont à la recherche d’une forme de
loisirs ponctuelle qui leur permette de changer leur quotidien dans un cadre sécurisé.
Le choix de la destination s’effectue en fonction de la médiation (par la publicité) qui en est
faite. L’imaginaire touristique créé autour de la destination par les images et les écrits diffusés
constitue donc un élément majeur de détermination pour le touriste.
Les aires protégées correspondent à des destinations de pleine nature et les motivations des
touristes se rapportent donc principalement à des notions de « détente », de « calme », de
« dépaysement », et d’ « émotion » , toutes suscitées par l’environnement (Nkoghe, 2008).
33
Boissière, Doumenge, 2008, Entre marginalisation et démagogie : quelle place reste-t-il pour les
communautés locales dans les aires protégées ?
26
Deux documentaires ayant été réalisés par des chaînes de télévision internationale sur le Parc
National de Loango, au Gabon34
, nous montrent que l’opinion publique occidentale est
orientée vers la conservation de la nature. Les images diffusées à l’internationale se rapportent
à la forêt équatoriale et aux espèces menacées emblématiques telles que l’éléphant ou les
grands singes. Les populations locales n’y sont évoquées que pour présenter les
problématiques de braconnage. L’image de la culture locale est réduite à une stigmatisation
des pratiques locales. L’imaginaire géographique d’une telle destination encourage donc un
tourisme de nature, encore très peu tourné vers les pratiques traditionnelles des groupements
humains du territoire.
L’aspect culturel de ce type de destination est cependant valorisé de manière croissante
puisqu’il fait aujourd’hui partie des objectifs des pouvoirs publics. Ainsi, les notions de
tourisme « soutenable », « ethnique », « solidaire » ou encore « humanitaire » bénéficient
également d’une médiatisation de plus en plus importante (Cousin, Réau, 2009)35
.
Les touristes souhaitent trouver des produits touristiques de retour à la nature, tout en
conservant un certain confort de vie par les services mis en place. La découverte de « l’autre »
(soit les populations locales) est également en phase de devenir une source de motivation dans
un cadre où l’opinion publique principalement dirigée vers la conservation est en train de
s’ouvrir aux problématiques sociales engendrées par la création d’aires protégées.
Les attentes du secteur public
Le secteur public développe et aménage son territoire dans une optique de mise en tourisme
concurrentielle avec les autre pays ou région récepteurs. Le tourisme doit devenir un
« instrument de diversification économique » du territoire. Les administrations vont donc
utiliser différents moyens pour faire de leur territoire une zone d’attractivité touristique :
législation et plan d’aménagement, création de partenariats, financements des initiatives
publiques et privées, aménagement et valorisation des sites touristiques, formation d’agents
34
Roblin, 2006, Les Gardiens de la Jungle, Gédéon Program, ARTE 2006, Coll. Environnement Nature
Smith, 2009, Living with Monkeys : tales from the Treetops, BBC
« Le contenu du film s d’Arte a provoqué une grande polémique parmi les partenaires en conservation, car il
donne l’impression d’être un film publicitaire pour le WWF, en particulier pour le Conseiller Technique
Principal du WWF-Gamba. Des lettres de plaintes ont été adressées à ARTE et à Gédéon Productions par le
Délégué de l’Union Européenne, ainsi que par le CNPN qui a tenu à se dissocier de l’esprit de ce film. » Prunier
(2006) 35
Cousin S., Réau B. (2009), Sociologie du Tourisme
27
d’exécution et de conception, facilitation des entrées de touristes dans le pays (Nkoghe,
2008)36
.
Le développement durable faisant partie des nouvelles orientations politiques et des enjeux de
développement internationaux, il s’inscrit également dans les prescriptions d’actions des
pouvoirs publics.
Les attentes pour le secteur public sont donc d’abord d’ordre économique (génération de
revenus, apports de devises étrangères), puis d’ordre environnemental (préservation de
l’environnement, justification des aires protégées, éducation environnementale, conservation,
amélioration de la biodiversité), et enfin d’ordre social (création d’emplois, échanges
culturels), (Nkoghe, 2008).
Les attentes du secteur privé
Le secteur privé est, quant à lui, motivé par des raisons économiques. Son objectif est de
satisfaire les touristes et leurs attentes en termes de services, d’activité et de sécurité afin de
garantir un taux de remplissage suffisant pour la rentabilité de son affaire.
Il doit par ailleurs veiller à répondre aux nouvelles exigences environnementales et sociales
des gestionnaires (pouvoir public) de ces aires protégées.
L’expérience a montré que la divergence des attentes de chaque catégorie d’acteurs a souvent
causé des problématiques majeures dans la gestion du tourisme dans les aires protégées. Le
nouveau concept de « gouvernance participative » vise ainsi à créer les conditions d’un
pouvoir organisé et d’une action collective. Elle se distingue des autres modes de gestion par
les procédés qu’elle utilise, notamment dans une concertation poussée des acteurs (dont une
représentation des populations locales), (Lequin, 2004)37
.
2. Problématique et hypothèses
Les attentes des multiples acteurs d’une aire protégée dans la mise en tourisme d’un territoire
divergent par leurs objectifs. La complexité environnementale et sociale de ces espaces rend
la réalisation d’un projet de tourisme communautaire difficile.
36
Nkoghe S. (2008), La psychologie du tourisme 37
Lequin M. (2004), Ecotourisme et Gouvernance Participative
28
Nous avons pu constater que de nombreux projets touristiques à vocation durable mis en place
dans les pays du sud présentent, au moment de leur évaluation, des bilans médiocres en
termes d'implication et d'appropriation des activités par les populations locales.
Le cas du Parc National de Loango, au Gabon, et de son projet pilote d’écotourisme
communautaire mis en place par l’Union Européenne entre 2002 et 2006 présente un échec
relatif au regard des objectifs de participation visés à l’origine.
La mise en tourisme des aires protégées dans les pays du sud peut-elle permettre une
implication réelle des communautés locales ?
A l’étude du projet d’écotourisme communautaire du Parc National de Loango, plusieurs
hypothèses seront développées afin d’analyser les freins à une implication effective des
populations locales liés à la pluralité d’acteurs et les leviers permettant de l’améliorer.
Partant du constat d’une insatisfaction des membres de la communauté, cette étude permettra
de montrer les motivations des habitants à recevoir des touristes sur leur territoire, mais
également le manque de synergie qui est à déplorer dans le système d’acteurs.
Les porteurs de projet avaient au départ une réelle volonté de créer un tourisme
communautaire sur des bases participatives. Des outils destinés à cette implication ont été
utilisés. Cependant, leur utilisation ne serait pas nécessairement appropriée dans un contexte
où les acteurs fonctionnent sur des modes de communication distincts. Ces outils ou méthodes
peuvent apparaitre comme un « prétexte » à la participation des communautés locales puisque
des ressentiments sont encore palpables. Les acteurs de la conservation et du tourisme
rencontreraient des difficultés à partager l’information et à concentrer leurs efforts dans un
objectif commun. Le manque de communication entre les différents acteurs serait donc l’une
des causes à l’origine de l’échec du projet.
Le Projet Sectoriel de Valorisation des Aires Protégées (PSVAP)38
a montré son
fonctionnement durant la présence de l’Union Européenne. Les habitants du village de Sette
Cama se sentaient alors impliqués dans les activités. Ce n’est qu’après le départ de
l’institution que le projet a cessé de fonctionner et que des dysfonctionnements et des plaintes
sont apparus chez les habitants. Le temps consacré à la mise en place du projet ne serait pas
suffisant et son contexte socio-anthropologique aurait été négligé. Le système hiérarchique
traditionnel n’aurait pas été respecté dans son entièreté par les porteurs de projets. Une forme
38
Projet initié par l’Union Européenne entre 2002 et 2006 au Gabon
29
d’assistanat aurait été créée au sein du village et les habitants n’auraient pas su gérer l’aspect
logistique à la suite du départ de l’Union Européenne.
Enfin, les financements destinés au développement du territoire, à sa conservation et à sa mise
en tourisme, ne prendraient pas assez en considération les réalités du terrain. La participation
des communautés locales impliquerait en effet un important travail sociologique en amont,
nécessitant des fonds pour réaliser des recherches et des actions de
sensibilisation/communication adaptées avec les habitants. Les actions menées par les ONG
présentes sur le territoire et financées par les organismes internationaux39
n’incluraient pas
suffisamment la population, au profit de la protection de l’environnement.
3. Une méthode de recherche qualitative et hypothético-inductive
Ce mémoire tente donc de démontrer qu’un manque de communication entre acteurs et de
prise en compte des réalités socio-anthropologiques d’un territoire peut conduire à l’échec
d’un projet de tourisme communautaire dans les aires protégées.
Plusieurs techniques de recherche qualitative ont été mobilisées afin de vérifier ces
hypothèses.
Recherche documentaire
Une première recherche documentaire a permis de dresser un état des lieux de l’implication
des populations locales dans les projets de tourisme à une échelle internationale. Les articles
et ouvrages de recherche centrés sur le même sujet, mais ayant pour études de cas d’autres
sites, présentent en effet des expériences relativement similaires et des problématiques
communes entre territoires.
Le caractère local de mon terrain de recherche nous renvoie à des réalités s’inscrivant dans
l’espace-monde. Marc Abélès (2008)40
note que « les situations locales renvoient sans cesse à
un univers global dont nous sommes les uns et les autres également partie prenante. ». Cette
étude permet donc de mettre en évidence des problématiques universelles à la mise en
tourisme des territoires.
39
USAID, USFWS, AFD, UE sont les plus importants financeurs du territoire gabonais pour la conservation de
ses aires protégées. 40
Abélès M. (2008) « Anthropologie de la Globalisation », Ed. Payot et Rivages
30
La lecture des documents relatifs au projet PSVAP en lui-même et des rapports connexes au
développement du tourisme dans le Parc National de Loango, m’ont permis de constater la
dichotomie entre les objectifs de départ et les résultats actuels en matière d’implication des
communautés locales.
Cartographie
Les données géographiques et tous les fonds de carte proviennent du WWF. Ce dernier est en
effet l’organisme gérant la base de données SIG (Système d’Indication Géographique) du parc
avec l’organe d’administration, l’Agence Nationale des Parcs Nationaux (ANPN).
Dossier medias
Un court dossier « médias » présentant des documentaires ayant été réalisés dans le parc par
des chaines de télévision reconnues m’a par ailleurs permis d’analyser l’imaginaire
géographique occidental qui peut s’en dégager. Ainsi j’ai mis en évidence une opinion
publique des pays du nord toujours orientée vers la protection des espèces animales et
végétales, et indexant les populations locales comme « prédateurs » de ces écosystèmes
fragiles.
Observation participative et entretiens
Dans le but de réaliser une étude hypothético-déductive, partant du cas du Parc National de
Loango pour remonter en généralité vers la mise en tourisme des aires protégées dans les pays
du Sud, douze entretiens avec la population locale, huit entretiens d’acteurs du tourisme et de
la conservation et un entretien avec un sociologue spécialiste du territoire ont été effectués.
Chaque chef de village a été interrogé dans un souci de respect des coutumes. Ils sont donc
inclus dans l’échantillon de la population interrogée.
Ces entretiens furent semi-directifs, afin de ne pas orienter la discussion et de pouvoir obtenir
des informations qualitatives sources de matière pour les analyses. De nouvelles hypothèses
sont ainsi apparues au cours de mes recherches.
Ma position en tant qu’ancienne actrice de la conservation du territoire et chargée de mission
tourisme pour le compte de la coopération allemande (GIZ) m’ont par ailleurs permis
d’étudier au quotidien les actions et les discours de l’ensemble des parties prenantes du
développement du tourisme dans le Parc National de Loango. Cette observation participative
31
et ma participation à des réunions entre ONG, administration et représentants des
communautés ont complété les données recueillies pendant ces entretiens.
Les entretiens ont été retranscrits puis analysés en fonction des typologies d’acteurs
(population locale, anthropologues/sociologue, professionnels), et des hypothèses. Le
traitement des données s’est fait à partir des réponses obtenues et du traitement sémantique
des retranscriptions et des discours d’acteurs (collecte des représentations du territoire par les
acteurs).
Limites de la recherche
Ce mémoire vérifie un certain nombre d’hypothèses mais le caractère large de la
problématique ne permet pas d’aborder tous les freins à l’implication des populations locales
dans les projets de tourisme communautaire. La question de la patrimonialisation et de
l’appropriation d’un territoire par ses habitants n’est en effet pas traitée41
et pourrait venir
compléter cette étude dans le cadre d’une recherche plus approfondie telle qu’une thèse.
Le terrain s’étant effectué pendant la basse saison touristique, deux touristes seulement ont pu
être interrogés sur leur relation avec la communauté. Ces entretiens ne permettent pas
d’obtenir des données suffisantes pour l’analyse de leurs perceptions. Un élargissement de
cette étude prenant en considération les raisons poussant les touristes à venir visiter ce
territoire et leurs réactions pendant et après l’expérience permettrait ainsi de mettre en
évidence un autre aspect de la relation habitant/visiteur.
Toutes les données relatives au nombre de touristes reçus et aux recettes générées n’ont pu
être obtenues. L’étude de l’impact économique du projet d’écotourisme communautaire sur
les populations locales reste donc limitée.
Enfin, le projet de tourisme communautaire concerne uniquement la partie sud du Parc
National de Loango. Cette aire protégée n’a donc pas été étudiée dans sa zone nord. Une
comparaison des pratiques touristiques, de la gestion des établissements et de leurs
conséquences sur l’implication des populations locales est également à envisager. Une thèse
pourrait ainsi comparer les effets d’une mise en tourisme « communautaire » à une mise en
tourisme non contrôlée d’une aire protégée sur ses habitants.
41
Voir les travaux de Faurie M., Gravari-Barbas M. et Renard C.
32
CHAPITRE 2
LE PROJET D’ECOTOURISME COMMUNAUTAIRE DU
PARC NATIONAL DE LOANGO
Une appropriation fragile du projet par les communautés locales
33
Le projet d’écotourisme communautaire du Parc National de Loango présente une implication
limitée de ses habitants, et ce malgré une politique nationale et une philosophie des porteurs
de projet orientée vers l’empowerment des populations locales. La complexité de son tissu
d’acteurs ne semble pas faciliter une cohésion dans les actions de chaque partie prenante.
I. TOURISME DANS LE PARC NATIONAL DE LOANGO : UNE REPONSE
POSSIBLE AUX CONFLITS D’USAGE ?
Le Parc National de Loango paraît s’inscrire dans un cadre politique et géographique propice
pour sa mise en tourisme, malgré les réalités de terrain de ce pays en développement.
L’écotourisme communautaire pourrait réduire les problématiques liées au territoire.
1. Les prémices du marché du tourisme au Gabon
Le tourisme est encore peu développé au Gabon et les statistiques de ce secteur sont difficiles
à obtenir. Un Compte Satellitaire du Tourisme (CST) a été mis en place par la Direction
Générale du Tourisme de la République Gabonaise en 2008 afin d’étudier ses impacts sur
l’économie gabonaise. La diffusion de ses données reste encore très restreinte.
Le CST 2008-2010 annonce ainsi que 2009 dénombre environ 151 000 arrivées de touristes,
dont 96 431 par voie aérienne, soit 64%.
Le classement d’arrivées aériennes du tourisme récepteur a établi le classement suivant en
2009 : la France représente le premier pays émetteur avec 38% du marché, le Cameroun est le
second avec 9% du marché, les anglais 7%, la diaspora gabonaise 7%, les américains et les
sénégalais comptent chacun pour 3%, les ivoiriens, philippins, belges et hollandais 2%. Les
autres nationalités comptent chacune pour moins de 1%, soit 25% du total. Le Gabon ne
possédant pas encore de stratégie marketing à destination des pays émetteurs, les français
demeurent les principaux visiteurs recensés par le CST au Gabon, de par la relation étroite
entre ces deux pays.
Le tourisme d’affaires représente 59% des entrées et les salons-conférences, 8%. Les touristes
venant au Gabon dans le but unique de pratiquer des activités de tourisme-loisirs sont encore
peu nombreux (12 800 touristes, soit 8%) et les statistiques ne permettent pas de savoir où
cette catégorie de visiteurs se rend. Ce phénomène peut être expliqué par la difficile obtention
des visas de tourisme au Gabon. Le gouvernement est cependant en train d’alléger ces
démarches afin de pouvoir accueillir un plus grand nombre de touristes à l’intérieur du pays.
Par ailleurs, les vacances-congés constituent une part de marché non négligeable (9%), de
34
même que les visites parentales (9%). Ces derniers représentent également une clientèle
potentielle pour les activités de tourisme-loisirs, notamment parmi les nationaux résidents à
l’extérieur du pays.
L’Agence Nationale des Parcs Nationaux (ANPN), organisme dépendant directement de la
présidence, s’est fixée pour objectif d’améliorer l’offre du Gabon en matière de tourisme, afin
de passer de 100 000 touristes entre 2006 à 200 000 en 2020 pour la seule catégorie de
tourisme-loisirs. L’augmentation escomptée du nombre de visiteurs permettrait la création de
nombreux emplois supplémentaires dans le secteur : selon eux, le nombre d’emplois directs
pourrait en effet passer de 20 000 actuellement à 30 000 dans cinq ans.
Le tourisme au Gabon en est encore à ses prémices et l’arrivée de visiteurs internationaux
implique d’importants investissements publics et privés dans l’aménagement d’un territoire
tel que le Parc National de Loango, complexe par son accessibilité et son contexte social.
2. Le cadre institutionnel et légal du développement du tourisme au Gabon
Le Parc National de Loango a été créé en 2002 par le Président de la République du Gabon,
Omar Bongo, et fait parti du réseau constitutif de treize parcs nationaux. La création de ce
réseau résulte d’un long processus impulsé par l’UICN en 1987-88 et a bénéficié de l’appui
des ONG internationales WWF et WCS dans sa mise en œuvre.
Le code forestier
Le Code Forestier (loi No. 016/01) décrit en article 76 qu’un Parc National est une aire
protégée destinée notamment à :
- « Développer des activités touristiques qui soient compatibles avec les objectifs de
conservation, qui génèrent des recettes financières pour faciliter la gestion du parc
national et qui contribuent au développement des communautés locales. En
particulier, la gestion devrait promouvoir l’engagement d’investissements locaux,
nationaux et internationaux dans le tourisme ainsi que l’éducation en matière
d’environnement. »
- « Faire participer les populations locales aux activités de conservation. Cet objectif
couvre la protection des ressources naturelles à l’intérieur du PN tout en assurant aux
populations locales vivant en zones périphériques et au cœur de parc de pouvoir
poursuivre leurs activités de subsistance traditionnelles. »
35
La prise en compte des populations locales et de leurs besoins fait donc partie des
prérogatives légales au Gabon.
Par ailleurs, un Plan de Développement du Tourisme au Gabon (2010-2015) définit le cadre
stratégique de la mise en tourisme du pays en s’appuyant sur le Plan Directeur du
Développement de l’Ecotourisme 2008-2015 (PDDE) et sur le Programme d’Appui au
Développement de l’Ecotourisme Communautaire (PADEC).
Le Plan Directeur du Développement de l’Ecotourisme 2008-2015 (PDDE)
Le PDDE présente plusieurs objectifs visant à tracer les grandes lignes d’une mise en
tourisme durable du Gabon.
Ses objectifs généraux sont42
:
- Faire du Gabon une destination écotouristique ;
- Contribuer à la réduction de la pauvreté ;
- Améliorer la contribution du tourisme dans le Produit Intérieur Brut (PIB) ;
- Préserver l’environnement.
Deux de ces objectifs concernent notamment les populations locales et leur implication dans
l’industrie du tourisme. Le gouvernement gabonais annonce ainsi qu’il souhaite « favoriser la
culture touristique des populations » par un programme de formation aux métiers du tourisme
(à plusieurs niveaux de compétences : de la mise en tourisme du territoire aux tâches
opérationnelles d’accueil des touristes) et par une maximisation des retombées économiques
pour les communautés locales (par la création d’emploi et le versement d’un pourcentage issu
des droits d’entrée au parc).
Le Programme d’Appui au Développement de l’Ecotourisme Communautaire (PADEC)
Le PADEC vise à « développer une réseau de tourisme communautaire durable au Gabon
contribuant ainsi à l’amélioration de la qualité de vie des communautés locales, à la lutte
contre la pauvreté et l’exode rural, par la valorisation des ressources naturelles et du
patrimoine culturel. »43
Ses objectifs sont :
- Contribuer à la réduction de la pauvreté par la création d’emplois ;
- Améliorer les conditions de vie des populations autochtones ;
42
PDDE 2008-2015, Direction Générale du Tourisme, République Gabonaise 43
PADEC, Direction Générale du Tourisme, République Gabonaise
36
- Limiter l’exode rural ;
- Etablir des microprojets et petites entreprises ;
- Valoriser le patrimoine naturel et culturel.
Le renforcement de capacités des acteurs, la mise en place d’infrastructures communautaires
et le développement des secteurs liés au tourisme dans les parcs nationaux (chaîne
d’approvisionnement alimentaire et artisanale), sont autant d’actions ambitionnées par le
PADEC.
Vision de l’ANPN
La vision du Tourisme élaborée par l’ANPN44
prétend notamment à « contribuer au bien-être
des communautés rurales ».
La mise en place de Comités Consultatifs de Gestion Locale (CCGL) comprenant des
représentants des populations locales pour toute décision concernant les parcs nationaux et
leur gestion45
, fait partie de la nouvelle réforme politique actuellement en phase d’exécution.
Le renforcement des capacités compte également parmi les préconisations de l’ANPN
concernant l’implication des populations locales dans les projets de tourisme des parcs
nationaux. Il se décline par la création de programmes de formation, « d’ateliers de
communautés » explorant l’impact social et économique du tourisme, de partenariats entre les
communautés locales et le secteur public/privé du tourisme, mais aussi par une participation
de la communauté dans la planification et la réalisation de projets liés au tourisme.
La politique de développement et d’aménagement touristique nationale aspire donc à une
amélioration des conditions de vie des populations locales principalement par la création
d’emplois (PDDE et PADEC). Ce niveau de participation visé par l’administration révèle déjà
une volonté importante d’implication de ces populations. La vision de l’ANPN vient
compléter ces prérogatives en incluant une participation de la population locale à tous les
stades de réflexion et de décision concernant la mise en tourisme des parcs nationaux et de
leur périphérie.
44
ANPN (2007), « Vision pour le Gabon : Le Tourisme, les Parcs et le Développement Durable au 21ème
siècle » WCS, 290 p. La mise en place des CCGL s’est déjà faite dans les Parcs Nationaux de Mayumba et de la Lopé 45
Voir chapitre 3 – I – 3
37
3. Un cadre géographique privilégié pour le développement du tourisme
Cadrage géographique
Situé dans le sud-ouest du Gabon et dans la province de l’Ogoué Maritime (Département de
Ndougou), le Parc National de Loango couvre une surface de 1 500 kilomètres carrés, sur 86
kilomètres de côtes et comprend 175 kilomètres d’une lagune classée Ramsar46
. Il comporte
de nombreux habitats, pour certains considérés comme menacés par l’UICN: mer, plage,
savane, lagune, forêt sèche et inondée, mangrove.
Potentiel touristique
Son potentiel touristique est important puisque la faune sauvage et l’avifaune y sont
abondantes (éléphant et buffle de forêt, potamochère, gorille, chimpanzé, antilopes, pélicans,
ibis, touracos, crocodiles, tortues de mer, lamantin, hippopotame, dauphins, baleines). Les
observations sont cependant aléatoires et difficiles, au contraire des produits de safari
proposés dans des pays tels que le Kenya ou la Tanzanie. L’ANPN vise une stratégie
marketing orientée vers une valorisation des écosystèmes, des paysages et de la culture47
.
La culture et les pratiques traditionnelles font encore partie de la vie quotidienne des villages.
Artisanat, fabrication du vin de palme, cuisine locale, utilisation des plantes médicinales,
rituels Bwiti48
et travaux champêtres sont autant de particularités propres au territoire et
susceptibles d’intéresser les visiteurs.
Le Parc National de Loango n’a pas été soumis à la liste indicative du patrimoine mondial de
l’UNESCO, contrairement à ce qui est annoncé sur le site internet officiel des parcs nationaux
du gouvernement gabonais49
.
Cette information erronée est révélatrice d’une gestion encore fragile des parcs nationaux du
Gabon, malgré les efforts de communication du gouvernement en faveur du développement
du tourisme à l’échelle nationale.
46
La Convention Ramsar est un traité intergouvernemental signé en 1971 pour la conservation et une utilisation rationnelle des zones humides et de leurs ressources. Cette classification n’engendre cependant aucune règlementation et les gouvernements des pays signataires sont les seuls habilités à règlementer leur utilisation. 47
ANPN (2007), « Vision pour le Gabon : Le Tourisme, les Parcs et le Développement Durable au 21ème
siècle » 48
Le Bwiti est un rite initiatique basé sur des croyances animistes et originaire des Mitsogo du Gabon central, mais aujourd’hui largement répandu, notamment dans la moitié sud du pays (Bonhomme, 2005). 49
http://www.gabon-vert.com/les-parcs-nationaux/les-13-parcs-nationaux/le-parc-national-de-loango http://whc.unesco.org/fr/etatsparties/ga
Figure 5 : Le Parc National de Loango et ses villages périphériques (Source : WWF, Réalisation : Samyra Orianne Ndjibou)
Villages concernes par le PSVAP
Quatre villages se trouvent à l’intérieur du Parc National de Loango et huit se trouvent dans sa
périphérie et sont donc également touchés par sa gestion.
Nous allons plus particulièrement nous intéresser aux trois villages concernés par le projet
d’écotourisme communautaire mis en place par l’Union Européenne dans la partie sud du
parc : Sette Cama (50 habitants), Pitonga (20 habitants) et Sounga (7 habitants)50
. Sounga est
situé à l’intérieur du parc, tandis que Sette Cama et Pitonga se trouvent dans sa périphérie sud.
Les résidents subsistent grâce aux activités traditionnelles que sont la pêche et l’agriculture.
Les jeunes quittent les villages pour trouver du travail en ville, notamment à Gamba avec
l’entreprise d’exploitation pétrolière Shell et ses sous-traitants.
La périphérie du Parc National de Loango fait en effet partie d’un ensemble d’aires protégées
appelé le Complexe d’Aires Protégées de Gamba (CAPG). La périphérie du parc demeure
donc sous statut d’aire protégée et les villages doivent également respecter la règlementation
en vigueur, notamment en ce qui concerne la gestion des ressources fauniques et floristiques.
Un terroir villageois regroupant l’ensemble des villages de la partie sud du Parc National de
Loango et de sa périphérie est en cours de création avec l’appui du WWF afin de trouver des
consensus de gestion de ces ressources avec l’ensemble des habitants concernés.
Le cadre géographique idyllique du Parc National de Loango comporte des problématiques
pour sa gestion et pour sa mise en tourisme.
4. Les problématiques liées au territoire
Un territoire enclavé
L’accessibilité au parc est limitée. La partie sud, concernée par le projet PSVAP est accessible
depuis la ville la plus proche, Gamba, par bateau (en une heure et demie) ou en suivant une
piste de sable jusqu’au village de Sette Cama (en 45 minutes). Aucun service de transport en
commun n’est encore existant à ce jour. Seuls les bateaux et les pirogues sont autorisés à
l’intérieur du parc et le village de Sounga relie Sette Cama en vingt minutes par voie
lagunaire.
50
La population rurale est difficilement évaluable puisque beaucoup d’habitants ne sont pas résidents
permanents. Je m’appuie sur les estimations des chefs de village afin d’être au plus proche des réalités
démographiques actuelles.
40
Les difficultés logistiques en découlant ne favorisent pas le développement du tourisme sur ce
territoire, rendant le ravitaillement coûteux pour les opérateurs touristiques. Cet enclavement
concerne non seulement les villages, mais également Gamba. Cette ville de 9000 habitants, a
été créée dans les années 1960, suite à l’implantation de Shell pour l’exploitation pétrolière.
Gamba est desservie par avion depuis la capitale du pays, Libreville, et Port-Gentil, en une
heure et trente minutes. Les tarifs et les fréquentes annulations et retards de vols sont montrés
du doigt par les habitants et par les touristes qui sont souvent victimes des aléas de cette
unique compagnie aérienne effectuant des vols commerciaux sur cette destination. En 2010, la
compagnie affichait six vols sur dix annulés. Quatre vols annulés ont été enregistrés entre
septembre 2011 et mars 2012, et 85% des vols affichent un retard qui peut atteindre les 24
heures. Cette problématique entraine des annulations fréquentes de séjours touristiques ou des
désagréments pour les passagers ayant réservé leurs vols, notamment les touristes qui
viennent pour les weekends ou qui ont des correspondances en direction de l’Europe. Ces
derniers représentent pourtant 60 à 70% des passagers selon le responsable de l’agence de
Gamba.
Gamba peut également être rejointe par une piste de sable et de latérite reliant la ville à
Tchibanga en cinq heures en saison sèche et en huit heures en saison des pluies. La liaison se
fait quotidiennement par les transporteurs routiers et par un véhicule du Conseil
Départemental de Ndougou. Libreville, la capitale du pays, peut ainsi être accessible par voie
terrestre en deux jours de voyage et pour un coût deux fois inférieur au prix du billet d’avion.
La construction d’une route bitumée est en projet avec la GIZ et Shell Gabon et une nouvelle
infrastructure routière reliant Gamba à la ville la plus proche devrait voir le jour pour son
désenclavement dans les années à venir. Celle-ci devrait permettre une plus grande régularité
d’arrivées de touristes, notamment nationaux et expatriés résidents au Gabon. Cependant,
quelles vont être les conséquences de l’inscription du Parc National de Loango dans un
« système-monde » ?
L’enclavement de cette zone génère donc non seulement des difficultés pour les arrivées de
touristes, mais également des problèmes d’approvisionnement pour les opérateurs touristiques
qui se voient forcés de présenter des tarifs élevés pour leurs produits. Les populations locales,
aujourd’hui dépendantes également d’un accès aux ressources alimentaires et aux matières
premières, se trouvent dans une double situation d’embarras, entre un accès limité aux
ressources et aux services publics (hôpital, école, centre d’enseignement secondaire).
41
Les conflits d’usage
La création du Parc National de Loango a généré certains conflits d’usage liés à l’utilisation
traditionnelle du territoire avant sa classification.
Les plantations cultivées par la population locale sont régulièrement dévastées par la faune
sauvage. Les habitants expriment donc régulièrement leurs mécontentements aux
administrations en charge de la gestion du parc (ANPN) et de la gestion de la faune et de la
flore (MINEF51
), et aux ONG de conservation (WWF et Ibonga). Ces plantations ne peuvent
plus être surveillées de manière quotidienne par les villageois qui représentent aujourd’hui
une population principalement vieillissante. Ils estiment que la fréquence des dévastations
s’est accrue depuis la classification du parc en raison d’une croissance de la population
faunique. Ils reprochent aux acteurs de la conservation de favoriser la protection de la faune
sauvage, au détriment des droits coutumiers, allant jusqu’à désigner certains prédateurs
comme « leurs frères » (Papa jean Marie).
Le discours de l’administration et des ONG de conservation infirme une augmentation de la
pression faunique et propose de trouver un consensus avec les communautés pour protéger les
plantations par le biais des terroirs villageois52
.
L’enjeu pour ces acteurs réside par ailleurs dans l’éradication du braconnage. En effet, les
pratiques traditionnelles de chasse ont souffert également de nouvelles règlementations
51
Le Ministère des Eaux et Forêts (MINEF) a pour mission d’assurer une gestion durable et responsable des
ressources forestières du pays. L’une de ses actions est donc de veiller à l’application stricte du Code Forestier. 52
Voir chapitre 3-I
Ph
oto
: A
.Pay
en, 2
00
9
Piste de sable reliant Gamba à la ville la plus
proche, Tchibanga
42
puisque la chasse est strictement interdite au sein du parc et limitée dans sa périphérie53
. La
population locale est mécontente de ces restrictions. Le principe de légitime défense en cas
d’attaque ou de présence d’un grand mammifère dans un rayon de cinq kilomètres de la
plantation est pourtant applicable. Cependant, les habitants estiment que le processus
administratif est trop long et complexe pour faire valoir ce droit.
La pêche est également une pratique ancestrale sur ce territoire comportant d’importantes
ressources halieutiques, notamment au niveau de l’entrée sud du Parc National de Loango.
Cette pratique y est aujourd’hui strictement interdite pour des raisons de pression anthropique
trop importante dans cette zone de reproduction. Les villageois dépendant essentiellement de
cette ressource pour l’apport de protéines dans leur alimentation, se voient lésés. La
diminution des ressources halieutiques est en effet de plus en plus palpable dans les zones
ouvertes à la pêche.
Enfin, la règlementation de la récolte de l’iboga ou « bois sacré »54
, créé également des
frustrations de la part de la population locale.
Les habitants se sentent défavorisés par les restrictions relatives à la classification du parc et
ne conçoivent pas tous les enjeux environnementaux qui en découlent.
L’exode rural
Le désir des jeunes d’améliorer leurs conditions de vie les pousse à quitter les campagnes afin
de trouver des emplois rémunérés en ville. Le contexte particulier de Gamba, ville pétrolière,
génère des activités à rétribution supérieure à la moyenne nationale.
L’exode rural vide donc les villages de ses jeunes. La population vieillissante ne parvient plus
à subsister de manière autonome et certaines connaissances traditionnelles ne sont plus
transmises.
C’est donc à la fois dans un cadre géo-politique propice et un cadre sociologique complexe
que le projet d’écotourisme communautaire du PSVAP a été mis en place.
53
La chasse est règlementée par un système de quotas et une liste d’espèces protégées et strictement interdites à
la chasse. 54
Racine traditionnellement utilisée dans les rites initiatiques
43
II. BILAN DU PROJET D’ECOTOURISME COMMUNAUTAIRE
Les orientations du projet d’écotourisme communautaire ont répondu aux nouvelles exigences
politiques en termes de gouvernance. La philosophie et les actions menées ont favorisé une
implication réelle des populations locales. Pourtant, le constat montre aujourd’hui que ce
projet a cessé de fonctionner après le départ des responsables. Quels sont les résultats six ans
après ?
1. La mise en place du projet d’écotourisme communautaire
Origine du projet d’écotourisme communautaire
Le tourisme ayant été identifié par le gouvernement gabonais comme l’une des priorités pour
la diversification de l’économie et la conservation des ressources naturelles, son
développement a fait partie des stratégies du gouvernement à partir du milieu des années
1990. En effet, le pays se trouvait à l’époque dans une période marquée par la baisse
d’activité d’extraction minière, pétrolière et forestière. Le Parc National de Loango a ainsi été
créé suite à la déclaration du Président de la République Gabonaise au Sommet Mondial sur le
Développement Durable de Johannesburg, tout comme les douze autres aires protégées
constitutives du réseau des parcs nationaux du Gabon.
C’est donc dans un contexte politique favorable que le Programme Sectoriel de Valorisation
des Aires Protégées (PSVAP) a été mis en place sous tutelle du Conseil National des Parcs
Nationaux (CNPN)55
et financé par les fonds européens de développement. La composante III
de ce projet de trois ans s’est ainsi appliquée à « favoriser la mise en place de filières
touristiques durables dans le Complexe d’Aires Protégées de Gamba qui comprend deux
parcs nationaux, Loango et Moukalaba-Doudou. »56
.
La volonté était à l’origine de constituer un projet pilote pouvant être reproduit dans les autres
parcs nationaux du Gabon. Suite à une première étude de faisabilité ayant été menée en 2000,
l’Union Européenne a ainsi défini les objectifs et les activités du projet. Celui-ci faisait suite à
un premier projet de tourisme communautaire, Cecotour, financé par le WWF et ayant essuyé
un échec relatif à l’implication des communautés locales.
Le PSVAP s’est concentré dans la partie sud du Parc National de Loango (hormis le Parc
National de Moukalaba Doudou), dans les villages de Sette Cama, Sounga et Pitonga.
55
Nouvellement Agence Nationale des Parcs Nationaux (ANPN) 56
Prunier M. (Mars 2006), Le Gabon face au tourisme
44
L’objectif de la composante III du PSVAP était de « contribuer à la mise en place d’une
filière durable de l’écotourisme dans les aires protégées du Gabon. ». Les résultats attendus
étaient « l’identification des zones les plus favorables au développement touristique et le test
de produits pilotes effectué avec des professionnels formés et des infrastructures de base
construites »57
.
Actions mises en œuvre pour l’implication de la population locale
La philosophie adoptée par l’UE était à la base celle du Pro-Poor Tourism (PPT), en mettant
l’accent sur l’implication des communautés locales afin d’observer des retombées
économiques dans les villages et de voir la pauvreté se réduire. L’écotourisme communautaire
permettrait donc de faire participer le plus grand nombre d’habitants au processus de mise en
tourisme, et ainsi de générer des revenus pour la majorité du village.
Les porteurs de projet déclarent avoir choisi une participation du village à tous les niveaux
opérationnels et décisionnels, tout en impliquant chaque catégorie d’habitants (hommes,
femmes, jeunes, vieux) de manière directe ou indirecte à l’activité touristique. Ils ont
privilégié une approche par laquelle le projet lui-même est conçu par les habitants en évitant
les concepts préétablis, afin de garantir une meilleure appropriation à la base. La population
locale a ainsi été sollicitée dans les différentes étapes de diagnostic du territoire, de la
conception à la commercialisation des produits touristiques, de développement des capacités
professionnelles, organisationnelles et décisionnelles, et enfin de la mise en place d’une caisse
communautaire.
57
Prunier M. (Mars 2006), Abietu bi Sette Cama : Rapport Sur un Projet Pilote d’Ecotourisme Communautaire à Sette Cama
Figure 6 : Philosophie du PSVAP pour l’implication des populations locales
Toute communauté devrait avoir le droit de dire non au tourisme et ce choix devrait être respecté.
Dans le cas de Sette Cama, il ne sera cependant pas possible d’échapper au développement du
tourisme, et la problématique pour le village consiste donc à devenir gagnant plutôt que victime face
à cette situation inéluctable. En conséquence, la stratégie à adopter était d’amener Sette Cama à
vouloir participer au tourisme sans s’y sentir forcé : il fallait que le village y trouve son intérêt.
L’action menée a été une action de sensibilisation, de concertation et d’écoute auprès du village afin
d’identifier les besoins et désirs du village et d’examiner ensemble comment le tourisme peut
satisfaire certaines de ces ambitions. L’idée était de faire comprendre aux villageois qu’ils peuvent se
prendre en charge eux-mêmes et créer leurs propres emplois basés sur leur savoir-faire existant
ajouté à des formations qui leur seraient dispensées.
Prunier M. (Mars 2006), Abietu bi Sette Cama : Rapport Sur un Projet Pilote d’Ecotourisme Communautaire à
Sette Cama, Libreville, Programme Sectoriel de Valorisation des Aires Protégées, composante III ; Union
Européenne
45
2. Activités développées
Le PSVAP a ainsi mis en place et coordonné plusieurs pôles relatifs à l’écotourisme
communautaire pendant la durée du projet, soit trois ans :
Formation hôtelière (16 personnes formées) ;
Formation de 10 écoguides (dont 9 originaires du village de Sette Cama) ;
Formation du groupement de « mamans Mafubu », femmes artisanes (20 personnes
formées) ;
Construction d’un centre d’accueil situé à la brigade de faune de Sette Cama ;
Construction d’une case artisanale située à l’aéroport de Gamba et destinée à la
revente de produits artisanaux et à servir de pôle d’information sur le tourisme dans la
région.
Des réunions ont été organisées en amont en respectant le protocole local qui impliquait de
consulter d’abord les chefs de villages et les notables, avant les habitants et les acteurs locaux.
Celles-ci ont traité différents thèmes : le rôle des parcs nationaux, le tourisme de manière
générale, le lien entre tourisme et parcs nationaux, les attentes des touristes, les atouts locaux
pour le développement du tourisme, les perspectives d’avenir pour le tourisme dans la région,
en quoi cela affecterait positivement ou négativement le village (Prunier, 2006).
D’après les porteurs de projet du PSVAP, ces réunions ont encouragé la population locale à
s’exprimer, mais celle-ci a montré des réticences à communiquer. Les informations n’étaient
pas transmises par les chefs de village, et les notables et les participants aux réunions étaient à
chaque fois de nouveaux individus. Ces difficultés semblent avoir été surmontées par la suite
et les porteurs de projet affirment que la dynamique de groupe s’est développée, malgré la
réticence des habitants de Sette Cama. En effet, ces derniers se sentaient trompés par le
précédant projet Cecotour. Les femmes se sont notamment fortement impliquées dans le
PSVAP puisque 16 d’entre elles ont participé à la formation hôtelière, 20 au groupement
d’artisans, 16 au groupement de restauratrices et 2 dans le comité villageois de 6 membres.
Les formations étaient basées sur une méthode participative, avec jeux de rôles, et un espace
de discussion était créé pour encourager les personnes formées à donner leurs avis.
46
Le comité villageois, quant à lui, a été créé dans le but de renforcer les capacités
décisionnelles et organisationnelles des habitants. Son rôle était de 58
:
- Représenter les intérêts du village en matière de tourisme ;
- Servir d’interlocuteur avec les divers partenaires et agents extérieurs ;
- Informer le village et organiser des concertations villageoises ;
- Gérer les questions directement liées au tourisme communautaire ;
- Gérer une caisse villageoise rassemblant certains bénéfices du tourisme au profit de tous
les habitants.
Il était composé d’un président qui était un ancien du village, d’un représentant de chaque
corps de métier du tourisme (guides, hébergement, restauration, artisanat), et de membres
représentant les acteurs associés au village. Puis ce comité a créé sous l’impulsion du PSVAP,
la Coopérative Abiétu, organisme à but lucratif permettant de fédérer les groupements
professionnels existants. Les statuts et règlement ont été rédigés par les membres eux-mêmes.
Trois représentants de la coopérative devaient gérer la caisse communautaire dédiée à des
projets de biens communs décidés par l’assemblée générale de la coopérative en concertation
avec le village. Cette caisse devait recueillir à la base 40% des bénéfices de la case Abiétu et
40% des revenus de droits d’entrée au Parc National de Loango.
Services développés
Un groupe d’artisans valorisant le savoir-faire traditionnel local a été créé sous l’impulsion du
PSVAP. Ces artisans - 17 femmes confectionnant des nattes à base d’une plante locale, le
pandanus59
, et trois sculpteurs - ont été encouragés à accroître leur production. Une formation
leur a été donnée afin de systématiser leurs standards de produits et leur prix. L’organisation
des systèmes de ravitaillement et de vente par l’intermédiaire de la « case Mafubu », ou case
artisanale située à l’aéroport de Gamba, ont également été mis en place.
Par ailleurs, un hébergement à peu de frais a été aménagé dans le village sur la base de la
« case de passage »60
gérée par le Conseil Départemental de Ndougou (CDN). Renommée la
58
Prunier M. (Mars 2006), Abietu bi Sette Cama : Rapport Sur un Projet Pilote d’Ecotourisme Communautaire à
Sette Cama 59
La récolte du pandanus se fait en forêt dans des conditions d’accès parfois difficiles et imposant l’utilisation
d’une pirogue ou d’un bateau. 60
A l’origine, le Conseil Départemental de Ndougou avait aménagé des cases de passage dans tout le
département afin d’héberger les visiteurs officiels.
47
« Case Abiétu », elle permet d’accueillir douze personnes après sa rénovation par le Conseil
Départemental en 2004. Les premières années d’ouverture ont connu un grand succès par le
bouche à oreille et aucun marketing spécifique n’était nécessaire pour garantir un taux de
remplissage suffisant. Sa gestion a été confiée à un organisme dépendant du Conseil
Départemental, le GIC Tourisme. L’objectif du PSVAP était de voir cet organe se détacher du
pouvoir public et s’autonomiser à l’image d’un office du tourisme.
Le groupement de femmes restauratrices, au nombre de douze à l’origine, assure donc les
repas pour les visiteurs de la case Abiétu et sont rémunérées à la tâche. Une dame recrutée par
le PSVAP s’occupe du ménage du bâtiment.
Un service de guidage a été mis en place suite à la formation, regroupant six écoguides
originaires de la localité ou du parc national voisin de Moukalaba Doudou. L’objectif était de
les placer sous tutelle du CNPN (nouvellement ANPN), tout en étant étroitement liés au
Centre d’Accueil.
Le Centre d’Accueil, situé à l’entrée du parc et à proximité du village61
, avait à l’origine pour
rôle de coordonner les activités touristiques dans la partie sud du Parc National de Loango, et
notamment l’utilisation des neuf circuits de randonnée créés, afin de ne pas juxtaposer des
groupes de touristes et de ne pas perturber la faune et la flore. Il servait par ailleurs de point
d’information, notamment pour les visiteurs indépendants (non assimilés à un opérateur
touristique) qui constituent une part importante des visiteurs du parc. Le bâtiment abrite
également un écomusée présentant les espèces fauniques pouvant être rencontrées dans le
parc. Sa gestion a été confiée à l’ONG locale Ibonga ACPE62
.
3. Le déclin de l’activité touristique
Le Centre d’Accueil est fermé depuis 2010. La raison évoquée par l’ONG Ibonga est que le
protocole d’accord relatif à sa gestion n’a pas encore été signé par l’administration
propriétaire du bâtiment, l’ANPN. Les visiteurs se trouvent donc privés de l’écomusée et du
site d’information. Aucune donnée relative au nombre d’entrées dans le parc et au profil des
touristes n’est aujourd’hui recueillie.
61
Le Centre d’Accueil se trouve sur le site de la Brigade de Faune de Sette Cama, appartenant au Ministère des
Eaux et Forêts (MINEF) et à l’ANPN 62
Association pour la Connaissance et la Protection de l’Environnement (ACPE)
48
Seul un rapport datant de la période 2008-09, recense le nombre et la provenance des
touristes. 1065 touristes sont venus visiter le Parc National de Loango pendant cette période.
Une saisonnalité étalée permet de recevoir des visiteurs tout au long de l’année, avec une
baisse en octobre-novembre, qui marque la fermeture annuelle des opérateurs touristiques. La
moitié des visiteurs vient principalement du Gabon, en tant que résidents expatriés ou
gabonais.63
La fréquentation de la case Abiétu a d’abord augmenté les premières années, passant de 128
nuitées en 2004, à 315 en 2006. Les dernières données disponibles montrent un retour au
point zéro puisque 2010 n’a reçu que 193 nuitées64
. La perte des données relatives à l’année
2011 révèlent que le système de gestion du GIC Tourisme devrait être amélioré. Selon le
président mandataire du GIC Tourisme, la case Abiétu serait victime des fréquentes
annulations de vols de la part de la compagnie desservant Gamba. La baisse de fréquentation
serait donc due aux déficiences des services de transport.
Par ailleurs, seuls deux circuits sur les neuf ayant été créés sont fréquentés régulièrement par
les visiteurs et leurs guides. Une certaine redondance du tourisme de vision est ainsi déplorée
par les touristes susceptibles de revenir régulièrement tels que les expatriés occidentaux
installés à Gamba, qui réclament une diversification des activités (Payen, 2012)65
. Cependant,
trois zones d’attraction touristiques et cinq circuits ont été identifiés par le WWF en 2011.
Leur mise en œuvre pourrait être faite par le WWF ou l’ANPN.
Deux autres opérateurs touristiques privés proposant des activités d’écotourisme et de pêche
sportive étaient implantés à l’entrée du Parc National de Loango. Le Missala Lodge a fermé
ses portes en 2011 et a revendu le fond de commerce, mais le site n’est toujours pas exploité.
L’autre opérateur, Sette Cama Safaris/CH2O, a réduit considérablement son activité depuis
les trois dernières années et ne satisfait pas entièrement les touristes résidents en termes de
services (Payen, 2012). L’entreprise d’extraction pétrolière Shell, installé à Gamba, met
également à la disposition de ses cadres une maison de location à l’entrée du parc pour des
courts séjours. Son taux d’occupation est de 20 weekends par an en moyenne, selon son
gestionnaire66
. Le groupe Singapourien d’hôtellerie haut de gamme, Aman Resorts, a signé un
63
Mounguengui. (2009), Bilan annuel de l’activité touristique dans le Parc National de Loango (partie sud) et
sa périphérie : de novembre 2007 à octobre 2008 64
GIC Tourisme, fréquentation touristique à la case Abiétu de Sette Cama, années 2004, 2006 et 2010 65
Payen A., 2012, Etude de marché : clientèle de tourisme nationale et expatriée dans le Département de
Ndougou 66
Philip Lawry, mai 2012
49
accord avec le Gouvernement gabonais pour installer 6 hôtels et lodges au Gabon, dont 1
lodge de 10 places et un autre de 20 tentes de luxe dans le Parc National de Loango. La
construction de ces infrastructures est prévue en 201267
.
Les importations de biens extérieurs et les entreprises issues d’un propriétaire étranger sont
les sources de fuite des revenus sur l’économie locale (Goodwin, 2010)68
. La future
implantation d’Aman Resorts pourra n’apporter que des impacts économiques limités aux
populations locales si des termes de référence sociaux ne sont pas édictés par l’ANPN.
L’aménagement touristique s’est donc fait dans le seul village de Sette Cama, générant ainsi
des déséquilibres spatiaux, notamment avec les villages de Sounga et de Pitonga, désignés
également comme cibles du projet PSVAP. Ces deux villages ne voient des touristes que de
manière très occasionnelle, ne bénéficient d’aucune retombée économique et ne sont pas
consultés pour les questions relatives au tourisme.
Malgré la mise en service des sites internet de Gabontour, Gabon Nature et Gabon Vert69
, la
communication autour du Parc National de Loango demeure insuffisante et les touristes
déclarent venir principalement par effet de bouche à oreille.70
Le média informatique étant
aujourd’hui incontournable en matière de tourisme, la majeure partie des visiteurs vont
d’abord aller se renseigner via internet sur leur destination. Aucune réservation et très peu de
contacts directs et fiables vers les opérateurs touristiques se trouvent sur ces trois sites
officiels. Les opérateurs touristiques dépendent quant à eux des agences de voyages ou tours
opérateurs basés à Libreville ou en France pour recevoir leur clientèle et ne disposent pas de
site internet présentant leurs produits et leurs contacts. Une lacune en termes d’information-
communication-marketing est donc à déplorer et ne permet pas aux opérateurs de voir un taux
de remplissage suffisant pour rentabiliser leurs structures.
La commercialisation insuffisante du site et le déclin des infrastructures et services
influencent l’impact limité du tourisme sur l’économie locale (Goodwin, 2008). Le niveau
d’implication de la population locale constitue un autre facteur important pour générer un
impact positif ou négatif sur le territoire.
67
Infos Gabon, Gabon : Aman Resorts investi dans le tourisme, 11 janvier 2012 68
Goodwin, 2008, Local community involvement in tourism around National Parks: opportunities and
constraints 69
http://gabontourisme.com/;
http://www.gabon-vert.com/les-parcs-nationaux/les-13-parcs-nationaux/le-parc-national-de-loango
http://www.gabon-nature.com/ 70
Viard (2008), Rapport de mission : Parc National de Loango sud
50
4. Evaluation de l’impact du projet de tourisme communautaire sur la population locale
Evaluation qualitative
Le tableau de détermination des impacts des projets d’écotourisme sur les populations locales
(Scheyvens, 1999), utilisé par le PSVAP pour l’évaluation de son projet en 200671
, sert de
base à une nouvelle évaluation, six ans après le départ des porteurs de projets.
Les progrès économique, psychologique, social et politique au sein des trois villages
concernés par le projet d’écotourisme communautaire sont ainsi appréciés sur une base
qualitative par les réalités constatées sur le terrain de recherche (villages de Sette Cama,
Sounga et Pitonga).
Toit et tôles soumis aux aléas climatiques dans le village de Sounga
71
Prunier M. (Mars 2006), Abietu bi Sette Cama : Rapport Sur un Projet Pilote d’Ecotourisme Communautaire à
Sette Cama
Ph
oto
: A
. Pay
en, 2
010
Figure 7 : Evaluation des impacts du projet d’écotourisme communautaire du PSVAP sur les populations locales, 2011
Signes de renforcement des communautés ou
« empowerment »
Signes d’absence de renforcement des communautés ou
« disempowerment »
Progrès économique
4 femmes restauratrices, 3 écoguides et 2 artisans
bénéficient du projet d’écotourisme
communautaire.
Le raccordement au réseau de téléphonie mobile
par le projet PSVAP permet aujourd’hui aux
habitants de Sette Cama de bénéficier de plus
grandes facilités de communication.
Les 9 individus bénéficiant de l’écotourisme communautaire sont
tous issus du village de Sette Cama.
A l’exception des 3 guides bénéficiant d’un salaire à temps plein,
la restauration et l’artisanat ne sont que des ressources
complémentaires pour les dames travaillant également à la
plantation.
Les villages de Pitonga et Sounga ne voient pas les effets de
l’activité touristique. Seul 13% de la population réunissant les 3
villages reçoivent des bénéfices de l’écotourisme communautaire.
Les habitations sont vétustes et ne sont pas adaptées aux
conditions climatiques. Des maisons en bois ont été construites
par le Conseil Départemental pour les notables de chaque village
suite à la tempête de 2010 ayant considérablement délabré les
habitations.
Les villageois se ravitaillent toujours en eau potable dans un
campement proche en empruntant la voie lagunaire et dans un
puits.
Le village ne bénéficie pas de l’électricité et le groupe électrogène
commun ne fonctionne plus.
Le stock de médicaments du dispensaire n’est plus ravitaillé par
Total Gabon.
La caisse communautaire n’est plus alimentée par les
pourcentages de droits d’entrée au parc et de la case Abiétu.
Progrès psychologique Les formations organisées par le PSVAP ont
permis d’accroître le savoir-faire d’une grande
partie de la population.
Les femmes artisanes vieillissantes sont pour la plupart reparties
en ville pour des raisons de santé et leur savoir-faire a été peu
transmis, sauf lors de quelques initiations d’une journée
organisées par l’ONG Ibonga avec des enfants de Gamba et de
52
2 des guides cherchent à poursuivre leur scolarité
ou prennent des initiatives pour améliorer leurs
conditions de travail.
L’arrivée de touristes et l’intérêt montré pour les
ressources naturelles et culturelles environnantes
ont développé un sentiment de fierté de la part de
la population locale. Celle-ci exprime une
volonté de faire découvrir leur territoire aux
visiteurs étrangers.
Sette Cama. Cependant ces initiations ont simplement permis
d’éveiller un sentiment de curiosité chez les jeunes participants.
Les conflits d’usage liés aux restrictions d’accès aux ressources
dans et en périphérie du parc sont toujours très présents. Les
réunions entre populations locale, administration et ONG sont
régulièrement vives. Malgré une recherche de consensus, les
mêmes sujets reviennent de manière systématique dans les débats.
Progrès social
Les dames restauratrices s’organisent entre elles
par un système de rotation afin que chacune
bénéficie équitablement des ressources du
tourisme.
Le guide originaire du Parc National de
Moukalaba Doudou a finalement été intégré à la
communauté, après avoir essuyé quelques
difficultés d’acceptation.
Un projet d’épicerie émanant de la population locale et utilisant
les fonds de la caisse communautaire avait débuté mais a été
stoppé. Le chantier n’a jamais abouti et le village ne bénéficie pas
encore d’une épicerie.
Le village est sale et aucune organisation commune n’est pourtant
initiée pour son nettoyage régulier. Les habitants se plaignent
mais chaque foyer continue de ne nettoyer que sa partie de terrain.
Les effectifs de l’école ont réduit de moitié.
Les dames restauratrices rencontrent d’importantes difficultés
d’approvisionnement en produits de base venant de la ville de
Gamba. Un groupe de touristes trop réduit (un ou deux individus)
ne leur permet pas de rentabiliser leurs achats et le carburant
nécessaire pour se rendre en ville par voie lagunaire. Elles
réclament un appui de la part des partenaires (GIC Tourisme,
ONG, administration), mais ne cherchent pas à trouver un
système d’organisation pour leur autonomie. Les binômes créés à
la base se sont même dissouts et les femmes font la cuisine
individuellement et à tour de rôle.
53
Les artisans réclament un appui de la part de ces mêmes
partenaires pour leur approvisionnement en matière première.
Les divisions (souvent ethniques) déjà existantes au sein du
village de Sette Cama en amont du projet PSVAP sont toujours
présentes. La jalousie et le ressentiment sont courants.
Progrès politique
La coopérative Abiétu s’est peu à peu dissoute suite au départ des
porteurs de projet PSVAP. Aucune réunion n’est aujourd’hui faite
pour parler de la question du tourisme. Les opérateurs touristiques
privés et le GIC Tourisme ne consultent pas la population locale
sur les questions concernant ce territoire.
54
Près de 75% des habitants impliqués à l’origine ont quitté le projet. Nous sommes en effet
passés de 39 à 9 emplois directs entre 2006 et 2012.
Seuls les guides sont aujourd’hui employés à temps plein72
mais expriment leur volonté de se
regrouper et de s’autonomiser en officialisant une association des écoguides du Parc National
de Loango Sud. Le métier de guide dans les aires protégées peut en effet générer des revenus
importants. Cependant, ces revenus fluctuent en fonction des saisons touristiques et les guides
sont souvent contraints de combiner leurs métiers avec d’autres activités professionnelles,
comme à Madagascar (Andrianambinina, 2010)73
. Quelles sont donc les perspectives
professionnelles pour les trois derniers écoguides du Parc National de Loango ? Quelle forme
d’organisation pourraient-ils choisir afin de maximiser leurs activités sur une saison étalée ?
Les conditions de vie n’ont subi aucune amélioration depuis le départ du projet. Au contraire,
les systèmes de gestion communautaire ne sont plus gérés aujourd’hui et seul le village de
Sette Cama bénéficie encore de quelques revenus issus du tourisme.
Les progrès psychologique acquis pendant la présence du PSVAP n’ont pas non plus été mis
à profit par la population locale afin d’organiser un système social et politique sur une base
plus communautaire.
Le projet d’écotourisme communautaire a enclenché un processus de développement au sein
des villages concernés par le PSVAP. Ces progrès ont cependant cessé au départ des porteurs
de projet. Cette analyse qualitative permet de constater l’échec de l’implication de la
population locale.
Impact économique
Le calcul du pourcentage des recettes revenant à la population locale dans les forfaits de
tourisme communautaire vendus par le GIC Tourisme en 2008 (hors artisanat) révèle que
seulement 39% des dépenses effectuées par un touriste reviennent à la communauté (guidage
et restauration).
72
Deux d’entre eux sont employés par le GIC Tourisme et leurs salaires sont assurés par le Conseil
Départemental. Un guide est employé à temps plein par l’ONG locale Ibonga. 73
Andrianambinina D., 2010, l’écotourisme à Madagascar : solution ou mirage ?
55
Figure 8 : Part des dépenses des touristes dans les forfaits du GIC Tourisme
Le transport représente en effet la dépense la plus importante puisque le Parc National de
Loango est situé à 50 kilomètres de bateau de Gamba, point de prise en charge des touristes
par les opérateurs touristiques.
Pour un forfait moyen de 115 euros par jour et par personne proposé par le GIC Tourisme74
,
34 euros reviennent à la population locale, dont 20 euros pour les guides et 14 euros pour le
groupe de femmes restauratrices.
Les guides sont rémunérés à hauteur de 300 euros par mois par le Conseil Départemental de
Ndougou, soit 3 600 euros annuels. Ils ne rapportent cependant que 1 930 euros chacun par an
à la structure, sur la base des 193 nuitées reçues en 2010. Leur future autonomisation
impliquera donc une diversification de leurs activités afin de pouvoir assurer cette masse
salariale.
Les femmes restauratrices ne gagnent quant à elles que 2 702 euros par an sur cette même
base. En moyenne, chacune reçoit 675 euros annuels pour les services rendus. Cependant, les
dépenses effectuées pour leur ravitaillement (incluant approvisionnement et carburant pour se
rendre en ville) n’ayant pas pu être évaluées, les calculs ne les prennent pas en compte. Le
service de restauration est-il donc assez rentable pour ces femmes ?
74
Forfait comprenant le transport, l’hébergement, la restauration et le guidage.
20%
16%
23% 6%
35% Hébergement
Restauration
Guidage
Droits d'entrée au parc
Transport
56
Malgré les efforts de l’Union Européenne, le projet d’écotourisme communautaire témoigne
d’un échec non seulement dans le produit touristique et les services créés, mais également
dans l’implication des populations locales. Cependant, l’UE n’est pas le seul acteur de cette
mise en tourisme. Quels rôles jouent les autres organismes et groupes en présence ? Comment
communiquent-ils entre eux ? Et quelles sont les répercutions de ce système d’acteurs sur le
projet d’écotourisme communautaire ?
III. LE MANQUE DE SYNERGIE DU SYSTEME D’ACTEURS
1. Identité des acteurs
Les acteurs de gestion et d’aménagement du Parc National de Loango (sud)
L’Agence Nationale des Parcs Nationaux (ANPN) est le gestionnaire des parcs, sous tutelle
de la Présidence de la République Gabonaise. Ses attributions sont : la surveillance, la gestion
et l’aménagement du parc, l’implication et la participation des communautés locales dans la
gestion des ressources naturelles, le développement touristique du parc. Représentée par un
conservateur dans chaque parc national, elle a mis au point une « vision du tourisme »
privilégiant le développement d’un tourisme haut de gamme et d’un écotourisme
communautaire de niche encourageant les retombées économiques sur les populations locales.
Cependant, aucun membre du personnel n’est délégué à la mise en tourisme du Parc National
de Loango à ce jour. Les compétences « tourisme » et « socio-anthropologie » ne font pas
encore partie des prérogatives de l’ANPN.
Le Ministère des Eaux et Forêts (MINEF) est représenté par la Brigade de Faune de Sette
Cama. Son rôle est de contrôler les ressources fauniques et floristiques en périphérie du parc,
dans le Complexe d’Aires Protégées de Gamba (CAPG).
Le WWF appuie l’ANPN et le MINEF dans la gestion du parc et de sa périphérie. Elle
facilite et élabore la mise en œuvre du plan d’aménagement, elle appuie la structuration des
ONG locales (notamment Ibonga ACPE), elle promeut l’accès aux ressources naturelles par
les communautés et facilite la création de partenariats avec le secteur privé.
Son personnel comporte une équipe chargée des études socio-économiques du CAPG. Le
responsable du bureau Gamba est lui-même sociologue. Un axe de travail privilégiant
l’implication des populations locales est donné depuis 2011, avec la coordination de la
création des Comités Consultatif de Gestion Locale (CCGL).
57
L’ONG locale Ibonga ACPE présente quatre volets d’actions : la gestion du centre d’accueil
(fermé depuis 2010), un appui au développement écotouristique du Parc National de Loango,
la valorisation de l’artisanat local par la gestion de la case artisanale à l’aéroport de Gamba, et
l’éducation environnementale. Elle possède donc un rôle majeur de représentation de la
société civile et des populations locales.
La Coopération allemande (GIZ) et Shell Gabon sont en phase de devenir un nouvel acteur
d’appui au développement touristique du parc et de sa périphérie par la récente mise en place
d’un partenariat public-privé (PPP) visant notamment la structuration et le renforcement de
capacités du GIC Tourisme.
Les acteurs du tourisme
Le GIC Tourisme, organisme dépendant directement du Conseil Départemental de Ndougou,
s’occupe de la gestion de la case Abiétu à Sette Cama, de l’accueil et du transport des
touristes depuis l’aéroport de Gamba jusqu’au village, de la coordination générale, du
contrôle et du suivi des activités et des services. Il a à sa tête un président mandataire nommé
par le Président du Conseil Départemental. Le reste du personnel administratif et de terrain a
été formé pendant ou à la suite du PSVAP.
Sette Cama Safaris/CH2O est un opérateur touristique privé fonctionnant sur des activités
de pêche sportive et de tourisme de pleine nature (observation de la faune et de la flore). Il
collabore de manière ponctuelle avec le village pour proposer des activités liées au tourisme
communautaire (notamment des danses traditionnelles) et emploie cinq personnes du village
de Sette Cama sur un total de neuf employés.
La coopérative Abiétu est aujourd’hui dissoute de manière informelle puisqu’elle ne se
réunit plus. Seules les quatre dames s’occupant de la restauration à la case Abiétu demeurent
organisées.
Les touristes
La moitié des visiteurs du parc vient du Gabon, en tant que résidents expatriés ou nationaux.
64% des touristes viennent effectuer un tourisme d’observation de la flore et de la faune,
contre 20% de pêcheurs sportif, moins enclins à s’inscrire dans une démarche de tourisme
58
communautaire. Les français constituent près de 50% des visiteurs du parc, suivis des
gabonais (13%), des hollandais (7%) et des britanniques (6%).75
Shell Gabon met une maison en location à l’entrée du parc à la disposition de ses cadres, ainsi
qu’un bateau leur permettant de s’y rendre depuis Gamba, leur lieu de résidence. Ces visiteurs
sont donc autonomes. Ils doivent cependant recourir au service de guidage et certains
s’organisent ponctuellement avec le groupe de femmes restauratrices pour leurs préparations
culinaires. Les employés de Shell Gabon constituaient à eux seuls 12% des visiteurs du PNL
en 2007-2008.
Les habitants : le manque de synergie communautaire
Les entretiens menés avec la population locale révèlent que les habitants de Sette Cama ne
fonctionnent pas sur une base communautaire. Chaque foyer gère sa propre plantation et le
nettoyage de son espace dans le village. Aucune organisation commune n’est initiée afin de
créer une synergie et d’associer les efforts.
Minko Mve (2007) évoque une « mutation de la société gabonaise par une remise en question
des croyances, un déracinement culturel de l’être humain et une rupture de ces
appartenances traditionnelles et communautaires. » Cette dynamique aurait, selon lui, « un
effet destructeur sur le vouloir-vivre sous le joug des traditions ». Elle provoquerait
« l’affaissement des solidarités communautaires et la mise en place d’une nouvelle
dynamique culturelle qui conduit parfois au nihilisme. »76
Cette absence de synergie communautaire freine une mise en place durable du projet
d’écotourisme communautaire. Le PSVAP avait reconnu cette difficulté mais semblait vouloir
la surmonter (Prunier, 2006).
75
Mounguengui (2009), Bilan annuel de l’activité touristique dans le Parc National de Loango (partie sud) et sa
périphérie : de novembre 2007 à octobre 2008 76
Minko Mve, 2007, Mondialisation et sociétés orales secondaires gabonaises
59
2. Un système d’acteur non institutionnalisé
Les entretiens menés auprès des populations locales ont révélés des tensions palpables dans la
simple évocation du tourisme ou de la conservation. Les réunions rassemblant les acteurs de
gestion et d’aménagement du Parc National de Loango et la population locale sont par ailleurs
régulièrement sources de discordes. Les problématiques relatives aux conflits d’usage sont
posées par les représentants des habitants qui réclament une contrepartie aux restrictions
d’utilisation des ressources dans et en périphérie du parc.
Le système d’acteurs ne fonctionne donc pas en synergie puisque les conflits et ressentiments
sont perceptibles.
Figure 9 : Schéma du système d’acteurs du Parc National de Loango
L’analyse du système d’acteurs nous montre que nous sommes toujours dans des relations non
institutionnalisées entre l’entité administrative et le reste des acteurs, à l’exception des ONG
qui ont signé des conventions de financements avec l’ANPN.
Les relations entre l’ANPN et les autres acteurs sont principalement ascendantes et
l’information reste centralisée à l’administration. Une zone d’incertitude pertinente (Crozier,
Friedberg, 1977)77
est ainsi générée. Cette zone d’incertitude favorise une relation de pouvoir
ascendant, notamment vers les communautés locales qui n’ont pas connaissance ou n’ont pas
77
Crozier, Friedberg, 1977, L’acteur et le système : Les contraintes de l’action collective
60
accès à toutes les informations nécessaires pour une relation d’interdépendance. Les
prérogatives des chefs traditionnels et des notables, jusque là détenteurs exclusifs du pouvoir
décisionnel sur les questions foncières locales, sont désormais limitées. Cette asymétrie
d’information est maintenue consciemment ou inconsciemment par l’administration pour
maintenir à son avantage des rapports de force.
Jacqueline Barus Michel et Eugène Enriquez expliquent que le pouvoir est instable du fait des
zones de tranquillité évoquées par Crozier et Friedberg. Cette instabilité conduit à une lutte
pour le conserver. Cette lutte peut se manifester par de la rétention d’information ou par le fait
de le faire passer pour un don exceptionnel.78
Cependant, le pouvoir est nécessaire à l’action collective. Il permet de mettre des individus ou
des groupes d’individus en action.
Une interdépendance transparente permettrait pourtant de garantir une meilleure
communication entre acteurs et une plus grande cohérence des actions. Les efforts de chaque
partie prenante pourraient ainsi être associés pour plus d’efficience.
La gouvernance évoquée par Marie Lequin (2004)79
doit en effet traduire « une
interdépendance entre les pouvoirs des institutions associées à l’action collective. ».
La formalisation des relations par des contrats et non des conventions80
liant les différentes
parties pourrait engager des relations d’interdépendance et favoriserait ainsi l’échange
d’information entre les acteurs.
Le constat d’échec du projet d’écotourisme communautaire dans le Parc National de Loango
nous conduit à observer des dysfonctionnements dans le système d’acteurs. Comment ces
dysfonctionnements ont-ils influencé le manque d’implication des populations locales ? Le
discours des porteurs de projets répond-il aux réalités locales ?
78
Barrus Michel J. et al. (2002), Dictionnaire de psychosociologie : références et positions 79
Lequin M., 2004, Ecotourisme et Gouvernance Participative 80
La mise en place des CCGL par l’ANPN et le WWF vise à cette formalisation
61
CHAPITRE 3 :
FREINS A L’IMPLICATION DES POPULATIONS LOCALES
ET RECOMMANDATIONS
62
Les entretiens ont permis de mettre en évidence un manque de communication à plusieurs
échelles entre les différents acteurs du Parc National de Loango. Les actions menées lors du
projet PSVAP ont, par ailleurs, omis certaines réalités sociales et anthropologiques. La
population locale, quant à elle, semble être favorable à la mise en tourisme du territoire.
Comment pourraient être améliorées le cadre d’échange et de travail afin de tendre vers une
plus grande implication des habitants dans le projet d’écotourisme communautaire ?
I. LE MANQUE DE COMMUNICATION ENTRE ACTEURS
1. Une communauté locale marginalisée par le système de communication
La population locale du village de Sette Cama n’a pas une culture du travail en communauté
et l’application d’un système de tourisme communautaire est donc rendue difficile sur le
moyen terme. Pourtant, l’échec du projet n’incombe pas seulement aux habitants. Une
communication à deux échelles limite également une implication effective des populations
locales sur le terrain.
Le manque d’information de la population locale
L’étude des réunions et des entretiens avec chaque typologie d’acteurs nous révèlent une
dichotomie entre les discours officiels et les discours des habitants. Les premiers indiquent
pour la plupart une participation satisfaisante de la part de la population locale, tandis que
cette deuxième catégorie d’acteurs se sent en marge du processus de mise en tourisme et de
conservation du territoire.
Ainsi une grande majorité d’habitants exprime son mécontentement quant au manque de
communication relatif au tourisme :
« Depuis que le tourisme a commencé, personne n’est venu discuter avec nous de cette
question. » (Evelyne Tsinga, chef du village de Sounga)
« Pendant la période PSVAP les choses se passaient bien. Mais depuis que le GIC a pris la
gestion de la case Abietu on ne voit plus rien. Même le pourcentage qui devrait revenir au
village on ne sait plus où il va. Depuis que la politique s’est mêlée dans ce projet ça devient
du désordre. Donc toutes ces questions sur les activités qui se font dans le parc, allez
demander au conseiller du village [cf. Jean Pierre Bayet, Président mandataire du GIC
63
Tourisme]. C’est lui qui vous dira ce qui se fait aujourd’hui au village. Nous, nous ne voyons
rien. » (Jean Mbouity, notable de Sette Cama).
Pourtant, le GIC Tourisme s’estime satisfait des échanges réalisés avec la population locale :
« Il faut dire que j’ai toujours des réunions avec les habitants quand il y a quelque chose de
flou comme l’histoire du pourcentage qu’il fallait éclaircir. Les réunions se passent dans le
calme total, le calme absolu, on se comprend très bien. Ce qui fait qu’aujourd’hui il y a de
très bonnes relations avec les villageois[…] Même si les gens sont en brousse, les gens sont
là, pour écouter, parce qu’ils ont compris que ce n’est pas le travail de Jean Pierre Bayet, ce
n’est pas le travail de l’Etat, mais c’est le travail de tous. » (Jean Pierre Bayet, Président
mandataire du GIC Tourisme).
La population locale de Sette Cama reconnait avoir eu des réunions sur la question du
tourisme mais de manière très ponctuelle et les habitants de Sounga et de Pitonga ne se
souviennent pas d’avoir été inclus dans un processus de réflexion et de participation sur la
mise en tourisme du territoire.
La base de ce manque d’information réside dans une méconnaissance du rôle de chaque
acteur de la part de la population locale. Les entretiens menés auprès des habitants de Sette
Cama, Sounga et Pitonga montrent à l’unanimité qu’il existe une confusion générale de leurs
actions et de leurs objectifs :
« Pour nous c’est la même chose. Nous ne connaissons pas exactement le rôle et les missions
spécifiques de toutes ces structures qui travaillent dans la protection de l’environnement. »
(Papa Gaby, Chef de canton).
Les habitants ne savent pas à qui s’adresser pour les questions relatives au tourisme, et
rattachent les institutions à des individus. Le président mandataire du GIC Tourisme occupant
également le statut de président de l’ONG locale Ibonga ACPE, il est fréquent de trouver des
incohérences dans les discours de la population locale. Cette dernière place ainsi l’ONG
comme responsable du déclin du tourisme dans le village de Sette Cama.
Les acteurs du tourisme et de la conservation se défendent des critiques émises par la
population locale : « Les populations sont toujours réticentes. On nous prend toujours pour
les espions de la gendarmerie. Mais il s’agit d’un travail participatif et il n’y a pas de
traitrise à faire là-dessus. » (Brice Léandre Meye, Conservateur du Parc National de Loango).
64
L’incompréhension se trouve donc des deux côtés générant des situations parfois
conflictuelles entre organismes et habitants.
La réunion du comité local de rezonage tenue le 23 février 2012 à Gamba dans les bureaux de
l’ANPN et du MINEF, a permis de mettre en exergue un manque d’information de la
population locale à la base des réunions concernant tourisme ou conservation. En effet, la
première intervention de la part des représentants de la population locale concernait la
diffusion limitée de l’annonce de la réunion par le seul biais des courriers écrits envoyés aux
chefs de village. Les habitants reprochent de ne pas utiliser la radio locale afin de convier un
maximum de participants à ce genre de réunions. Pour le Conservateur du Parc National de
Loango, « Il revient aux chefs de villages [qui sont informés par courrier] de contacter les fils
de Sette Cama. ». L’administration ne peut pas, selon lui, investir trop de temps dans la
convocation des réunions. La demande légitime émanant directement de la population locale a
été finalement prise en compte et des efforts d’information devraient dorénavant être menés
par les acteurs de la conservation.
Ce manque d’information et d’échanges plus réguliers ne facilitent pas l’appropriation d’un
projet de tourisme communautaire par les populations locales dans les aires protégées. Quelle
est la part d’authenticité dans les attitudes de chaque partie prenante ?
Participation authentique vs non authentique
La comparaison entre une participation authentique et une participation non authentique81
nous révèle une propension mitigée du niveau d’authenticité dans cette même réunion du
comité local de rezonage.
81
Lequin, 2004 : comparaison entre participation authentique et participation non authentique adaptée de Simrell
et al. (1998)
65
Figure 10 : Participation authentique et non authentique des acteurs dans la réunion du
comité local de rezonage du 23 février 2012
Eléments comparatifs Participation authentique Participation non
authentique
Attitude envers « l’autre »
Les représentants de la
population locale se sont
montrés méfiants
Style d’interaction
Dés le début de la réunion,
l’interaction fut conflictuelle.
Les habitants se sont
directement attaqués à
l’administration sur les
questions de conflits d’usage
Début de la participation
La participation est arrivée
dés le départ, avant que toute
décision soit prise
Rôle du décideur public
Les termes techniques
utilisés ont révélé un rôle
d’expert et administratif de la
part du décideur public.
Moins d’une minute est
consacrée par carte exposée,
pour un public non initié à la
cartographie.
Rôle du citoyen Le citoyen est considéré
comme un partenaire
Habiletés et qualités
requises de la part du
citoyen
Il est demandé au citoyen dès
le début de la réunion de
montrer un esprit critique,
une ouverture d’esprit et une
participation constructive
dans la prise de parole
Action du citoyen Le citoyen est proactif dans
ses réactions verbales
La population locale s’est montrée réactive et son niveau de participation est élevé lors des
réunions. Cependant, sa méfiance freine le déroulement d’un débat constructif. Les décideurs
publics sont peu outillés pour encourager une participation aléatoire et efficace dans la
recherche d’un consensus.
La démocratie participative visée par les décideurs publics n’en serait-elle qu’au stade de
démocratie représentative ?
66
Le manque d’outils de communication
La récurrence des demandes relatives aux conflits d’usage de la part de la population locale
révèlent que des solutions appropriées n’ont pas été trouvées à ce jour, mais également que les
informations données par les acteurs du tourisme et de la conservation n’ont pas été toujours
comprises. Les dialogues entre acteurs et habitants se répètent lors des réunions et le
sentiment de satisfaction pouvant être ressenti par l’ensemble des parties prenantes à l’issue
d’une réunion, sont éphémères.
« Il n’y a jamais de décisions concrètes qui sont prises à l’issue de ces réunions. C’est juste
de belles paroles et c’est pourquoi nous avons décidé de ne plus y prendre part. », déplore
Jean Mbouity, notable du village de Sette Cama.
Une incompréhension entre acteurs du tourisme et de la conservation et population locale est
donc à dénoncer. L’analyse des discours des décideurs publics et privés démontrent un
phénomène de condescendance à l’égard des populations locales qui n’ont pas le même
niveau d’études. Malgré l’usage des langues locales bantoues durant les réunions, les notions
techniques et le vocabulaire utilisés sont inappropriés pour les habitants.
La réaction d’un participant parmi les habitants illustre les deux niveaux de compréhension :
« Il ne comprend pas ce que vous dites avec ce gros français ».
Les simples termes de « tourisme » et de « développement » ne trouvent pas d’équivalent en
langue vernaculaire. Ces concepts techniques occidentaux sont employés quotidiennement par
le monde de la conservation et du tourisme, mais les populations locales en saisissent-elles le
même sens ?
La sensibilisation et la formation ne devrait-elle pas être faite pour les décideurs comme pour
la population locale afin de les outiller dans le domaine de la communication ? Comment les
échanges entre ces deux typologies d’acteurs pourraient-ils être améliorés ?
Les entretiens menés avec l’ensemble des acteurs locaux de la conservation et du tourisme
témoignent de l’absence d’outils appropriés dans leurs échanges avec les populations locales.
Seul le WWF utilise la méthode de distribution des cailloux82
dans ses enquêtes socio-
économiques et la cartographie participative pour faciliter le dialogue avec les habitants des
villages et obtenir des résultats satisfaisants dans son analyse du territoire.
82
La Méthode de Distribution des Cailloux (MDC) consiste à évaluer des échelons de pratiques par le biais d’un
jeu de positionnement avec les populations locales.
67
Les acteurs de la conservation et du tourisme ignorent l’existence d’outils de gestion
participative. En effet, à la question : « comment sont menées les réunions ? », ils ne décrivent
que la manière dont ils vont convier la population locale aux réunions, par le biais de courriers
envoyés aux chefs de village.
Pourtant, des outils permettant un dialogue plus fluide et une participation plus active des
communautés rurales ont été créés. Testés principalement en Afrique de l’Ouest, leur
adaptation au contexte local donnerait l’occasion à ces différentes typologies d’acteurs de
mieux communiquer entre elles et de trouver des consensus et des solutions aux conflits
d’usage.
2. Le manque de concertation entre acteurs de la conservation et du tourisme
Le manque de communication entre organismes et en leur sein
Le manque de communication s’observe également entre les acteurs du tourisme et de la
conservation et au sein même de certaines institutions.
Les salariés du GIC Tourisme ne sont pas tenus informés des activités menées avec les
populations locales par leur président. Ils ne sont par ailleurs prévenus parfois que quelques
heures à l’avance de l’arrivée de touristes. Ce système de communication interne défaillant
génère des tensions au niveau de l’organisme, entre les salariés et leur président qui centralise
toute donnée à son niveau.
Cette rétention d’information s’observe non seulement au sein du GIC Tourisme, mais
également entre deux acteurs. Le caractère sensible de certaines données, pourtant essentielles
telles que les archives du PSVAP, de Cecotour ou l’état de la caisse communautaire, restent
concentrées à un acteur. Les archives du PSVAP furent pendant longtemps conservées par un
petit nombre d’acteurs locaux sans être diffusées. Des critiques y sont en effet émises à
l’attention de ces derniers.
Les ONG locales dépendant des bailleurs de fonds, Ibonga n’a pas souhaité diffuser certaines
données à d’autres ONG gabonaises afin de conserver une avance dans ses domaines de
compétences et de s’assurer un avantage pour la « course aux financements ».
Les projets envisagés par les différents acteurs peuvent se chevaucher, notamment dans le
domaine du tourisme. L’ONG locale Ibonga ACPE prévoit de mettre en place deux produits
68
touristiques communautaires dans les villages de Sette Cama et de Sounga. Pourtant, peu
d’échanges ont eu lieu avec ses partenaires. La planification de ces projets peut générer des
incohérences sur le terrain puisque le WWF et l’ANPN ont également des financements et des
axes de travail dédiés au développement de l’écotourisme communautaire sur le terrain.
Aucun cadre de concertation officiel n’est pourtant organisé afin de partager les projets
envisagés avec les partenaires.
Le manque de transparence de la part de certains de ces acteurs risque de créer des
contradictions et des doublons dans la réalisation des projets.
Une coordination de l’activité touristique absente
La communication limitée entre organismes est révélatrice d’une absence de coordination de
l’activité touristique dans le Parc National de Loango. En effet, celle-ci n’est pas facilitée par
le manque de structuration de certains acteurs à la base, tels que le GIC Tourisme ou
l’association des guides.
L’absence du Ministère en charge du tourisme dans le Parc National de Loango freine une
cohérence des actions menées sur le terrain. Le PPDE83
visent pourtant à l’associer à l’ANPN
pour le développement du tourisme sur le territoire. Cet acteur majeur faciliterait la
coordination de cette mise en tourisme entre les nombreuses parties prenantes.
La politique actuelle de l’ANPN priorise l’essor d’un tourisme haut de gamme avec
l’installation prochaine de l’opérateur touristique Aman Resorts dans le parc National de
Loango. Cette politique s’accompagne de cahiers des charges signés entre l’administration et
les opérateurs. Pourtant, aucune transparence n’est donnée quant au nombre d’emplois
générés au niveau local. L’absence de charte commune à tous les opérateurs créé une relation
de clientélisme entre l’ANPN et les organismes privés de tourisme. Les enjeux économiques
en découlant n’encouragent pas une transparence totale sur l’implantation de ce nouvel acteur
et ses conséquences sociales.
Le manque de transparence et de coordination de l’activité touristique révèlent-ils une
dichotomie entre discours officiels et réalités du terrain ? Dans ce contexte fait
d’incohérences, comment les décideurs comptent-ils appliquer une participation plus effective
des populations locales dans le projet d’écotourisme communautaire ?
83
Voir Chapitre 2 ; I ; 2
69
L’approche visant une participation authentique de l’ensemble des acteurs (citoyens et
décideurs) comprend notamment « la création de structures et de processus facilitant la
participation » (Lequin, 2004)84
. La récente mise en œuvre d’un cadre d’échange entre toutes
les parties prenantes du territoire permettra-t-elle de recentrer les informations à une échelle
plus globale du territoire et ainsi de mieux coordonner sa mise en tourisme ?
3. Création d’un cadre privilégié de communication : le Comité Consultatif de Gestion
Local (CCGL)
L’article 45 de la loi 003/2007 de la République du Gabon relative aux parcs nationaux
prévoit la mise en place d’un Comité Consultatif de Gestion Local (CCGL). Le CCGL vise à
réunir l’ensemble des acteurs agissant dans et en périphérie des parcs nationaux pour favoriser
une gestion communautaire durable de ces aires protégées et de leurs ressources. Quatre
plateformes de concertation sont en phase d’être créées dans le Parc National de Loango,
réunissant les populations locales, l’administration, le secteur privé et les ONG/représentants
de la société civile autour d’un pôle centrale de décision, présidé par le conservateur du parc.
Des représentants sont élus dans chaque village par la communauté, dont un représentant des
jeunes et une représentante des femmes, et forment les comités villageois. Leurs mandats sont
consultatifs pour la gestion des ressources et le suivi-évaluation des activités menées dans le
parc. Ils sont par ailleurs décisionnel pour ce qui concerne les terroirs villageois.
84
Lequin, 2004, Ecotourisme et Gouvernance participative
70
Figure 11 : Schéma du CCGL du Parc National de Loango (Source : WWF)
Les populations locales seront donc davantage consultées pour les questions concernant la
gestion du parc et de ses ressources et auront un droit de veto pour les décisions relatives à
leurs territoires.
Cependant, le pouvoir décisionnel relatif à la mise en tourisme du territoire n’appartient pas
aux populations locales. Quelles perspectives pouvons-nous dés lors envisager pour une
implication engagée et une appropriation de l’activité d’écotourisme communautaire par les
habitants ?
L’évaluation du succès ou de l’échec de la participation à un projet par les responsables d’une
consultation s’effectue sur des critères qualitatifs (qualité des échanges) et quantitatifs
(nombre de participants à une réunion) à l’ensemble des représentants de la population
locale85
. Cependant, les attentes spécifiques et les valeurs de chaque groupe de participants ne
sont pas toutes prises en compte. En effet, une communauté est constituée d’un grand nombre
de groupes et de minorités et chaque individus peut se rattacher à plusieurs d’entre elles.
Certains groupes d’individus se voient ainsi marginalisés et non satisfaits par le projet.
85
Lequin, 2004
71
Pourtant, un cadre de concertation peut difficilement représenter tous les groupes et le nombre
de représentants doit être limité dans chaque réunion pour plus d’efficacité. Le CCGL prévoit
d’intégrer les groupes de femmes et de jeunes au cadre de réflexion, mais ne peut prendre en
considération toutes les minorités qui peuvent être constituées d’un seul individu.
Un groupe social tel que les artisans pourra-t-il faire entendre ses attentes et ses besoins ?
Peut-on imaginer une population locale satisfaite dans son ensemble par un processus de mise
en tourisme ?
Comment le CCGL parviendra t-il à s’adapter aux évolutions des attentes et des besoins des
populations locales sur des terroirs villageois déterminés ?
II. UN CONTEXTE SOCIOANTHROPOLOGIQUE NEGLIGE
1. Des réalités territoriales ignorées
Chaque territoire observe des réalités et des mécanismes socio-anthropologiques différents.
Des études spécifiques doivent donc être menées avant toute mise en tourisme afin d’adapter
chaque projet à son contexte territorial.
Le caractère social des projets de tourisme communautaire entraine une action sur le moyen,
voire le long terme. En effet, les processus d’empowerment nécessitent des démarches et des
étapes d’intégration pour chaque groupe social composant une communauté.
Les porteurs de projet du PSVAP ont cependant reconnu l’insuffisance des trois ans du projet
d’écotourisme communautaire. Cette durée aura permis de « créer des capacités
professionnelles de base, de faire comprendre certains concepts et de changer un peu des
mentalités profondément ancrées. »86
.
L’approche programme (sur le moyen terme) aurait donc dû être privilégiée à une approche
projet (sur le court terme) pour une entreprise à caractère social.
Des études socio-économiques ont été conduites sur le Parc National de Loango et sa
périphérie, notamment par le WWF. Le PSVAP bénéficiait-il pourtant de toutes les données
nécessaires à la mise en place d’un système de gestion approprié pour ces populations locales
ne fonctionnant pas sur une base communautaire ?
86
Prunier M. (Mars 2006), Abietu bi Sette Cama : Rapport Sur un Projet Pilote d’Ecotourisme Communautaire
à Sette Cama
72
Le système hiérarchique traditionnel n’a en effet pas été respecté dans sa totalité par le
PSVAP. Malgré un effort d’implication du chef et des notables du village de Sette Cama, le
chef de regroupement/chef coutumier87
déplore aujourd’hui de ne pas avoir été consulté.
La tradition impose aux visiteurs de venir se présenter aux chefs de village et/ou de
regroupement afin d’assurer leur sécurité et leur intégration. Une systématique de respect des
traditions doit être observée afin de ne pas créer un sentiment de rejet de leur culture face aux
populations locales. Les chefs des autres villages (Sounga et Pitonga) n’ont par ailleurs pas
été inclus dans le processus de réflexion.
Les chefs de Sette Cama déplorent également le fait que les touristes ne leur soient plus
présentés. Des visites étaient en effet organisées aux chefs et notables à l’époque du PSVAP,
expliquant aux touristes l’histoire et les traditions locales, les guides n’effectuent plus ce tour
aujourd’hui.
La domination légale des porteurs de projets et du système de gestion du tourisme s’oppose
ici à la domination traditionnelle et gérontocratique des populations locales. Un phénomène
de « malentendu » est ainsi créé entre chefs traditionnels et gestionnaires dans les prises de
décision et de pouvoir (Weber, 1971).88
Le système de gestion du projet n’a pas pu être adapté spécifiquement aux réalités locales
puisque les habitants de Sette Cama ne sont pas organisés en système communautaire. Le
modèle politique et social proposé était-il donc adapté au contexte local dont l’assise est
coutumière ?
Les porteurs de projet du PSVAP avaient connaissance des conflits existants au sein du
village de Sette Cama et de l’absence d’une synergie communautaire. Ils ont pourtant choisi
ce territoire pour leur projet pilote basé sur une assise communautaire. Comment un projet
communautaire pourrait-il fonctionner sur un territoire ayant un fonctionnement
individualiste ?
La prise en compte du contexte socio-anthropologique des parcs nationaux du Gabon
progresse grâce aux récentes études menées par une anthropologue employée par l’ANPN
87
Le chef de regroupement représente l’ensemble des habitants du village et de ses campements. Le chef de
village les représente uniquement à l’échelle du village. Le chef coutumier est quant à lui consulté par les
habitants pour des questions occultes. Il occupe une place importante puisqu’il est systématiquement consulté
pour les nouveaux projets dans le respect des traditions. 88
Weber M, 1971, Economies et Société : Les catégories de la sociologie
73
spécifiquement pour les questions d’implication des populations locales. Cette initiative va-t-
elle pourtant être étendue à chaque parc national afin de différencier ces territoires à une
échelle plus locale ?
2. Des actions de terrain en faveur des populations locales ?
Un système de financement éloigné des réalités du terrain
Les appels à projets au Gabon (UE, UICN, FFEM) font coïncider de manière croissante la
gestion des ressources naturelles et une approche de gouvernance.
Les objectifs sollicités pour l’année 2012 recoupent notamment les notions de
« gouvernance », « renforcement de capacités », « renforcement de réseau », « renforcement
de la société civile », « partage et diffusion », « autonomie », « intégration », « réduction de
la pauvreté », « sensibilisation », « éducation », et « participation ».89
Cependant, les acteurs visés pour ces actions de terrain sont essentiellement les représentants
de la société civile. Aucun appel à projet n’évoque de manière directe les populations locales
en tant qu’acteurs. Cet engouement pour l’implication de la société civile dans les projets de
conservation est une première étape dans la prise en compte des habitants. En effet, ces
derniers correspondent à une typologie d’acteurs plus difficile à représenter au vu des
nombreux groupes sociaux les constituants. Au contraire, la société civile permet d’incarner et
de symboliser l’ensemble des citoyens.
Pourtant, ne sommes nous pas dans le schéma évoqué par Rodary (2008) dénonçant le
caractère simplement rhétorique de la notion de « participation » ? Quelles seront les
destinataires des projets et seront-ils à même de représenter les populations locales ?
Comment les porteurs de projets comptent-ils inclure ces populations ?
La dépendance des ONG, des associations et des centres de recherche non gouvernementaux
face aux financements de ces grands bailleurs de fonds oriente les actions vers des réalités
éloignées du terrain. Les porteurs de projets sont-ils dès lors prisonniers des orientations
bureaucratiques ? Comment peuvent-ils agir afin d’adapter ces appels à projets ?
89
Règlement du concours du PPI3, FFEM en partenariat avec le comité français de l’UICN ;
Programme thématique pour les acteurs non étatiques et les autorités locales dans le développement au Gabon,
Délégation de l’Union Européenne en République Gabonaise, EROPAID/132592/L/ACT/GA ;
Programme de micro subventions des projets CARPE/UICN du 13 janvier 2012.
74
Le WWF, un éco-conquérant du Parc National de Loango
Le Parc National de Loango s’inscrit dans la définition du « front écologique ». En effet, il
s’agit d’ « un front pionnier doté de valeurs écologiques spécifiques. » La notion de « valeur
écologique » est ici représentée par un paysage grandiose ouvert sur un espace sauvage, vaste
et inaccessible que sont la forêt tropicale et l’océan. En outre, ce front écologique est
caractérisé par une biodiversité en péril et par des ressources naturelles aussi rares que
chères : eau, minéraux, forêt, ressources fossiles.
L’ONG internationale WWF, présente dans le Parc National de Loango depuis les années
1990, a contribué à la création de ce « front écologique » et se définit dès lors comme un
« éco-conquérant » (Guyot, 2008). Ce terme, définit et utilisé notamment par les ONG
environnementales, repose sur une vision occidentalisée de la nature. La tendance fut donc
pendant plusieurs décennies de conserver des espaces naturels au détriment des populations
locales.
La variabilité d’utilisation des fronts écologiques par des tissus d’acteurs souvent important,
créé des situations complexes et tend à générer des conflits. Les nouvelles politiques de
gouvernance visent ainsi à concilier les motivations des ONG environnementales aux
pratiques culturelles. Les discours des ONG présentes sur le terrain du Parc National de
Loango suggèrent aujourd’hui que la protection de la nature doit se faire dans une
concertation évidente avec les populations locales.
Pourtant, son programme de lutte anti-braconnage et les campagnes de sensibilisation menées
par l’ONG locale Ibonga ACPE (sous financements du WWF) ont été réfléchis à la base sans
concertation avec la population locale.
Les programmes de conservation dépendent des lignes directrices émanant des bailleurs de
fonds internationaux. Par ailleurs, l’objectif premier du WWF est « d’aider à financer des
projets de protection de la faune et de la flore tout en permettant à de grands groupes
industriels et miniers de soigner leur propagande environnementaliste » (Guyot, 2008).
Quel est donc le niveau d’indépendance d’une ONG environnementale telle que le WWF face
à des parrains dont les objectifs s’inscrivent dans la rentabilité économique au détriment des
populations locales et de l’environnement ?
75
3. La dépendance des communautés locales
La gestion participative vise une autonomisation des populations locales sur le moyen terme.
Les habitants doivent ainsi à leur tour devenir gestionnaires du projet par le biais des
processus d’empowerment mis en place.
Pourtant l’analyse des discours des habitants met en exergue une frustration quant aux appuis
logistiques qu’ils souhaiteraient recevoir de la part des pouvoirs publics et des ONG :
ravitaillement en électricité, en pétrole (pour les groupes électrogènes, les lampes90
, les
bateaux), en médicaments, en produits de base pour les femmes restauratrices, etc.
Pendant la présence du projet PSVAP, la population a bénéficié d’appui de la part de Total
Gabon qui ravitaillait le village en carburant pour la collecte des matières premières dans
l’artisanat et l’alimentation du groupe électrogène assurant l’électricité au village de Sette
Cama. L’entreprise d’extraction pétrolière approvisionnait également l’ensemble des villages
dotés d’un dispensaire, de médicaments, dans le cadre de leur responsabilité sociétale. Les
récents changements de politique encourageant une autonomisation plus durable des
populations locales, l’interruption de cette assistance s’est faite brusquement. Les populations
locales n’ont ainsi pas pu poursuivre cet appui et ont subitement régressé dans leurs
conditions de vie. Le groupe électrogène ne fonctionne plus et le village ne dispose donc plus
de l’électricité. Le dispensaire n’est plus ravitaillé en médicaments.
Par ailleurs, les femmes restauratrices tiraient parti du concours des porteurs de projets du
PSVAP dans les approvisionnements en produits de base (sucre, lait en poudre, pommes de
terre, etc.) depuis la ville la plus proche, Gamba. Le groupe proteste aujourd’hui contre un
manque de rentabilité du service offert. Les trajets effectués jusqu’à la ville en bateau
engendrent en effet des coûts parfois supérieurs aux prix du service. Ces dames réclament
aujourd’hui une assistance de la part du GIC Tourisme ou une augmentation des tarifs fixés à
l’origine par le PSVAP.
L’assistanat pratiqué pendant le PSVAP par des acteurs extérieurs ou internes au projet n’a
donc pas encouragé une autonomisation des populations locales, dont les principales
revendications sont de retrouver les avantages qu’elles connaissaient auparavant.
90
Le pétrole est également utilisé pour maintenir les éléphants éloignés des plantations la nuit.
76
III. LEVIERS POUR UNE IMPLICATION PLUS EFFECTIVE DES
POPULATIONS LOCALES
1. Une approche favorisant l’aspect socio-anthropologique du territoire
Les habitants des villages de Sette Cama, Sounga et Pitonga sont tous favorables au
développement du tourisme. Ils soutiennent dans leur discours une volonté réelle et une fierté
de présenter leur territoire aux touristes.
Pour Evelyne Tsinga, il s’agit de « bien recevoir les étrangers parce que c’est dans notre
culture ». La responsabilité est lourde car il s’agit de « faire bonne impression » (Sidonie
Tchitoula). Le chef de canton pense que l’arrivée des touristes va stimuler les efforts des
habitants et éviter les négligences. D’autres, comme Simone, souhaitent s’enrichir
culturellement de la venue des touristes.
Cependant, ils déplorent également le peu d’impact économique que la venue des touristes
génère sur le territoire et les attitudes parfois inappropriées de ces derniers :
« Je veux que les touristes sachent que nous ne tirons aucun bénéfice de leur présence dans
notre village. Ils n’arrivent même pas à dire bonjour aux habitants du village et se contentent
uniquement de prendre des photos. Ce sont ces comportements là que nous ne voulons pas. »
(Chef du village de Sette Cama).
La population locale se sent mise à l’écart sur un territoire dont elle est pourtant fière. Ce
sentiment de marginalisation repose essentiellement sur un désir de percevoir des profits
directs.
La motivation première des populations locales demeure donc les retombées économiques que
le tourisme peut générer sur le territoire. « Les profits s’établissent sur une base matérielle de
profit lucratif, et non sur une base affective ou humaine. » (Nkoghe, 2008).
Les bénéfices tirés du service proposés par les femmes restauratrices leur permettaient en effet
de supporter les charges de scolarité et d’acheter les produits de première nécessité.
Le chef de regroupement regrette quant à lui les prémisses du tourisme où les impacts se
manifestaient par des dons des touristes : « Nous n’avons aucun bénéfice des touristes. Ils
viennent ici pour notre perte. A l’époque de Maurice Patry par exemple, quand les touristes
partaient à la pêche ils ramenaient du poisson qu’ils distribuaient au village. De même quand
77
ils tuaient un éléphant ils appelaient les populations des villages voisins pour venir chercher
leur part. Mais actuellement rien n’est fait dans ce sens. » (Chef de regroupement).
Les attentes de chaque groupe ou de chaque individu sont donc différents et une mise en
tourisme participative d’un territoire est donc complexe par la multiplicité des attentes.
Les réalités culturelles du site doivent être prises en compte. Tout projet de tourisme dans les
aires protégées devrait associer des spécialistes de sciences biologiques avec des spécialistes
de sciences humaines (Boissière, Doumenge, 2008).
Les compétences liées à la sociologie et à l’anthropologie devraient être développées au sein
des pouvoirs publics et des ONG locales et internationales. Ainsi, les populations locales ne
seraient plus les seuls destinataires de la sensibilisation et de la formation. Il serait en effet
pertinent d’outiller les porteurs de projets de méthodes ouvrant une communication plus
constructive, basée sur le contexte socioculturel local, avec les habitants.
Les bailleurs de fonds devraient donc adapter les financements aux conditions de terrains. Les
études sociales et/ou anthropologiques nécessitent d’accroître la durée « pré-projet », et les
rubriques des appels à projet devraient ainsi privilégier les actions présentant une véritable
recherche en sciences sociales en amont de la mise en tourisme.
2. L’utilité des outils de gestion participative
Des outils de gestion participative pourraient être développés et utilisés par les porteurs de
projets afin de créer des cadres de communication propices entre eux et la population locale.
Les échanges seraient ainsi plus constructifs. Une phase approfondie de recherche
sociologique et/ou anthropologique permettrait d’obtenir une définition plus précise des
groupes constitutifs de la communauté, de mieux prendre en compte les attentes de chacun de
ces groupes et de rechercher des solutions en commun, tout en responsabilisant et en
autonomisant la population locale.
Ces outils de gestion participative doivent cependant pouvoir s’adapter à chaque contexte
local.
La radio rurale
L’information des communautés rurales est la première étape pour établir une bonne
communication entre acteurs du développement et habitants sur le territoire. La base de cette
78
information se trouve d’abord dans la prise de contact pour inviter les personnes à une réunion
ou à un évènement ayant pour objectif de les impliquer. Le simple envoi de courriers aux
chefs de villages ne suffisant pas, il est préconisé d’utiliser le média de la radio locale pour
annoncer les dates et l’objet de l’évènement.
La radio pourrait par ailleurs être utilisée dans les différentes étapes de réalisation des projets,
en créant une émission dédiée à l’information et à l’échange d’opinions sur les
problématiques identifiées.
Le théâtre forum
Un projet de mise en tourisme d’une aire protégée doit nécessairement inclure une phase
importante de concertation avec la population locale afin d’identifier des objectifs et des
leviers clairs pour sa réalisation. Pourtant cette étape est souvent négligée et la consultation de
ces habitants se fait sur une base superficielle.
Le théâtre forum est un outil poussant les participants à l’identification des problèmes et à la
formulation des solutions. Ce mode de communication alternatif permet de responsabiliser et
de viser l’autonomisation des populations locales dépendantes d’une forme d’assistanat.
Le public (les habitants) devient à son tour acteur et actif par une mise en scène
l’encourageant à participer91
. La population locale est la seule capable d’identifier les
solutions adéquates aux problématiques qu’elle rencontre.
Le ciné-débat
Le ciné-débat permet de relever les attentes et les problématiques d’une localité et de
favoriser la proposition de solutions au travers d’un dialogue avec la population locale.
Un micro-trottoir est réalisé à l’arrivée dans le village, interrogeant les habitants sur les
problèmes rencontrés. Le court film monté à partir de ces témoignages lance les bases d’un
débat autour de ces questions d’actualité. Les habitants analysent la situation et trouvent des
solutions adaptées.
Comme le théâtre forum, cet outil encourage la population locale à se responsabiliser, mais il
sert également de mémoire collective des décisions prises par la communauté par le biais des
enregistrements.
91
Technique de théâtre participative qui vise à la conscientisation et à l’information des populations opprimées.
79
Une prise en compte plus importante du contexte social et anthropologique du territoire
entrainerait cependant un allongement de la durée des projets.
3. L’accompagnement de projet
Les études montrent que les projets de mise en tourisme des territoires ont une temporalité
courte (3 ans en moyenne). Le projet d’écotourisme communautaire du PSVAP illustre ce
phénomène puisque la durée prévue n’a pas permis de consolider les bases de gestion et
d’autonomiser la population locale.
Les financements octroyés préconisent des résultats rapides et ne favorisent pas une recherche
approfondie sur les réalités propres au site désigné. Pourtant, les projets communautaires
nécessitent plus de temps pour atteindre une viabilité économique et une appropriation par les
habitants. « Les projets de tourisme communautaire souffrent donc dans ce contexte de
conflit de temporalité. » (Lapeyre, 2010).
Ainsi une « approche programme » (sur le moyen terme : entre 5 et 10 ans) est préférable à
une « approche projet » (sur le court terme : 3 ans).
L’accompagnement de projets doit en effet viser l’autonomisation des habitants. Le manque
d’expertise par les agents de coopération extérieurs en termes de viabilisation freine une
souveraineté future. Des compétences doivent donc être développées dans la
commercialisation du produit de tourisme communautaire. Les acteurs publics ou ONG
peuvent ainsi faire appel à des experts ayant une grande expérience dans le tourisme afin de
garantir la réussite du programme sur le long terme.
Les méthodes générant une forme d’assistanat de la population locale doivent donc être
remplacées au fur et à mesure par un accompagnement de projet ou de programme ayant pour
objectif l’indépendance des communautés.
4. Formalisation des échanges entre acteurs
Le manque de synergie d’acteurs observé dans le Parc National de Loango révèle une relation
consciente et inconsciente de pouvoir entre décideurs publics, ONG, opérateurs privés et
populations locales. Ces dernières sont marginalisées par une zone d’incertitude (Crozier,
Friedberg, 1972) qui les empêche d’avoir toutes les connaissances nécessaires à leur
responsabilisation.
80
L’institutionnalisation des rapports entre organismes et habitants rétablirait des relations de
pouvoir équitables et favoriserait ainsi une communication plus transparente.
Des protocoles d’accord spécifiant les droits et les devoirs de chaque typologie d’acteurs
envers ses partenaires statueraient les engagements. Les échanges deviendraient ainsi formels
et les informations concernant la gestion du territoire seront plus accessibles à la population
locale. Les projets en court ou futurs devront nécessairement être validés par l’ensemble des
parties prenantes.
Figure 12 : Formalisation des échanges dans un projet de tourisme communautaire
L’administration et la ou les coopérative(s) communautaire(s) créée(s) devraient spécifier
leurs rapports avec les opérateurs touristiques privés, les ONG et la population locale par un
document officiel décrivant les droits et devoirs vers et envers chaque partie prenante.
Les opérateurs touristiques devraient quant à eux signer des engagements auprès des
coopératives communautaires et de l’administration afin de maximiser les retombées
économiques pour les habitants (contrats de services, taxes, droits d’entrée dans l’aire
protégée).
Les ONG s’engageant de manière croissante dans une démarche de gestion participative
devraient s’assigner des protocoles d’accord, notamment avec les populations locales afin de
concevoir des projets adaptés au contexte social du territoire et de répondre aux attentes des
différentes parties prenantes.
81
L’expérience menée en Namibie a permis de dépasser le simple discours officiel
d’implication des populations locales. En effet, un texte de loi a engagé la création de
« conservancies ». Ces associations communautaires gèrent un territoire de conservation dans
sa dimension naturelle et culturelle. Elles décident des règles et des limitations et peuvent
mettre en place des projets de tourisme communautaire (Lapeyre, 2010).
La création du Comité Consultatif de Gestion Locale (CCGL) dans le Parc National de
Loango devra donc s’accompagner de décrets explicitant la manière dont les communautés
seront impliquées et le degré de leur pouvoir décisionnel. Cette institutionnalisation des
échanges engagera une meilleure gouvernance des projets de développement, notamment des
projets de tourisme communautaire.
82
CONCLUSION
Malgré son caractère « humaniste » et les mécanismes mis en place dans les aires protégées
pour une participation effective des communautés locales, le tourisme communautaire essuie
de nombreux échecs dans les pays du Sud. Les habitants vivant dans ces aires protégées et en
périphérie subissent toujours les mêmes problématiques liées à la gestion de ces espaces, et
connaissent de nouveaux conflits émergeants. Le sujet, devenu central dans les secteurs de la
recherche et du management, est largement étudié et de nombreuses alternatives ont d’ores et
déjà été proposées pour tenter de créer un système de gouvernance horizontal et de
redistribuer les recettes du tourisme de manière plus équitable. Le caractère socio-
anthropologique de cette question en fait un sujet particulièrement sensible et complexe à
aborder par la spécificité de chaque territoire étudié, mais nous pouvons toutefois noter des
similarités de dysfonctionnements dans de nombreuses aires protégées des pays en
développement.
La recherche menée dans la partie sud du Parc National de Loango nous a révélé les
difficultés relatives à l’implication de ces communautés. Ce projet s’envisage comme une
activité faite « par et pour les communautés », à travers la création d’une coopérative
autonomisant les habitants dans l’organisation du tourisme. Le récent classement de ce
territoire en Parc National a fortement modifié les droits d’usage locaux et le tourisme
communautaire y a été perçu telle une alternative génératrice de revenus rééquilibrant les
nouvelles disparités sociales. Neuf ans après le début du projet, un déclin des activités et de la
redistribution des revenus liés au tourisme est cependant à déplorer.
Le contexte socio-anthropologique, souvent négligé dans les projets de mise en tourisme des
aires protégées, n’aurait pas été suffisamment pris en compte pendant la durée du PSVAP
puisque certaines réalités ont été ignorées : des personnalités stratégiques du village n’ont pas
été consultées et seules les études socio-économiques du World Wide Fund for Nature
(WWF) ont servi de base à la connaissance préalable du terrain. La durée limitée de ce projet
pilote n’a, par ailleurs, pas permis de garantir un suivi par les autorités désignées à sa gestion.
Certaines actions mises en œuvre ont en effet créé un phénomène de dépendance des habitants
face à l’appui technique et logistique octroyé notamment par Total Gabon à l’époque. La
demande d’assistanat de la part de la population est encore très présente à ce jour et cette
83
dernière n’a pas conscience de ses besoins réels en renforcement de capacités, mais sollicite
des « mesures d’accompagnement » matérielles, ne visant pas leur autonomisation.
Par ailleurs, le tissu d’acteurs complexe, composé d’organismes étatiques, non étatiques
(ONG international), privés et représentants de la société civile, créé des phénomènes de
tensions entre population locale et organisations, et entre organisations elles-mêmes. La
rétention d’information y est pratiquée aux différentes échelles de pouvoir et les
communautés demeurent les moins informées de leurs droits et des actions en cours et futures
sur leur territoire. La « vision du tourisme » de l’ANPN92
tend à formaliser le rôle de chaque
acteur et les relations entre eux. En effet, l’institutionnalisation des rapports favoriserait des
rapports d’interdépendance et donc une plus grande communication entre acteurs.
Les recherches menées ont révélé d’importants dysfonctionnements en termes de
communication, freinant une synergie d’acteurs pour la bonne mise en tourisme du Parc
National de Loango. La confusion générale du rôle des acteurs, et l’incompréhension de la
part des habitants lors des réunions de consultation nous montre que les mécanismes de
communication utilisés ne sont pas appropriés. Les habitants ne sont pas en mesure de
comprendre des concepts préétablis et tirés des modèles de gestion touristique et/ou de gestion
de l’environnement. Les représentants des institutions et organismes ont, quant à eux, des
difficultés à concevoir des modes de communication adaptés à la compréhension des
populations locales.
Un Comité Consultatif de Gestion Local (CCGL) est actuellement en phase de constitution,
réunissant des représentants de chaque catégorie d’acteurs et permettant un échange formel
d’information, de consultation et de prise de décision. Une plus grande prise en compte des
communautés et un meilleur partage des actions futures est donc à espérer.
Cependant, une communication effective entre communautés rurales et organisations est-elle
réellement possible ?
Les entretiens réalisés, dans le parc et en sa périphérie, témoignent de la sympathie des
populations locales à la mise en tourisme et à l’accueil des touristes dans leurs villages,
principalement pour des raisons économiques, mais également par intérêt du « partage et de
l’apprentissage ». Parallèlement, ces populations n’observent pas de logique communautaire
dans l’organisation de la vie au village. Nous pouvons donc nous demander comment créer un
92
ANPN, Vision pour le Gabon : Le Tourisme, les Parcs et le Développement Durable au 21ème
siècle
84
modèle de gestion du tourisme sur un territoire rural ne fonctionnant pas sur une base
communautaire ?
Le Parc National de Loango présente les caractéristiques d’un « front écologique ». Quelle
sera la place réelle donnée aux populations locales par des « éco-conquérants » tels que le
WWF ? Comment les politiques de gouvernance vont-elles s’adapter au contexte local ?
La mise en tourisme des aires protégées dans les pays du Sud semble permettre une
implication des communautés locales, dès lors que ces dernières y sont favorables. La
communication entre acteurs et les mécanismes d’autonomisation doivent cependant être
développés d’avantage en approfondissant la connaissance socio-anthropologique de chaque
territoire. L’utilisation d’outils de gestion participative et la formalisation des relations
favoriseront par ailleurs une communication plus effective entre acteurs. La durée limitée des
projets de tourisme communautaire doit être évaluée en amont et en fonction du contexte
socio-anthropologique du territoire afin de garantir une prise en main par les futurs
gestionnaires issus de la population.
L’approche systémique du terrain par entretiens a permis de mettre en exergue un grand
nombre de dysfonctionnements liés à la gestion du territoire et à sa mise en tourisme. Le Parc
National de Loango, au même titre que de nombreuses aires protégées des pays du Sud, nous
montre que des efforts restent à fournir en termes de communication entre acteurs et de prise
en compte des habitants et ouvre de nouvelles perspectives de recherche. Cependant, la
catégorie d’acteurs « touristes » n’ayant pas été prise en compte, il manque un aspect
déterminant à cette étude dans la relation que peuvent entrevoir ces derniers avec les habitants
et inversement. Le sujet portant sur des questions d’ordre socio-anthropologique, une étude
plus complète sur le contexte du territoire devra être menée afin de mieux saisir les modes de
fonctionnement existants.
Enfin, deux questions se posent pour parvenir à une participation effective des populations
locales dans les projets de tourisme communautaire :
Qu’entendent les populations locales par cette nouvelle notion de « développement » et de
« tourisme communautaire » ?
Quels nouveaux systèmes de gestion touristiques pourrions-nous créer afin de s’adapter aux
contextes locaux plutôt que d’appliquer une conception du tourisme communautaire
préétablie ?
85
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89
ANNEXES
Annexe A : Carte du Complexe d’Aires Protégées de Gamba (CAPG)
Annexe B : Données sur la fréquentation touristique de la case Abiétu 2004
Annexe C : Données sur la fréquentation touristique de la case Abiétu 2006
Annexe D : Données sur la fréquentation touristique de la case Abiétu 2010
90
ANNEXE A : CARTE DU COMPLEXE D’AIRES PROETEGEES DE GAMBA (Source : WWF, 2010)
91
ANNEXE B : DONNEES SUR LA FREQUENTATION
TOURISTIQUE DE LA CASE ABIETU, 2008 (Source : GIC
Tourisme)
Nombre de touristes…………………. 137
TOTAL DE GAINS
Hébergement ………………………….. 2.734000 FCFA
Restauration …………………………… 2.127500 FCFA
Guidage…………………………………. 3.145000 FCFA
Parc ……………………………………… 749000 FCFA
Transport………………………………… 4.800000 FCFA
92
ANNEXE C : DONNEES SUR LA FREQUENTATION
TOURISTIQUE DE LA CASE ABIETU, 2009 (Source : GIC
Tourisme)
Noms et prénoms Nombre de touristes
Date d’arrivée Date de départ Nationalité Nbre de Nuitées
Fernandez 02 30/12/08 03/01/09 Espagnol 08
Viviana 04 02/01/09 03/01/09 Espagnol 04
Ernesto 01 05/01/09 09/01/09 Espagnol 04
Jean Alain 03 17/01/09 19/01/09 Française 06
Alex M 04 14/02/09 19/02/09 Française 20
Krammer 02 24/02/09 27/02/09 06
Philip 04 14/04/09 17/04/09 Espagnol 12
Jérôme 02 13/04/09 17/04/09 Française 08
Sodexho 02 09/05/09 10/05/09 Française 02
BOSSELMANN M 01 29/06/09 02/07/09 Allemande 12
BOSSELMANN S 01 29/06/09 02/07/09 Allemande
BOSSELMANN E 01 29/06/09 02/07/09 Allemande
BOSSELMANN Eric 01 29/06/09 02/07/09 Allemande
Chmetien 01 24/07/09 31/07/09 Française 49
KRALMKIMEL Jean D 01 24/07/09 31/07/09 Française
SEITZ Sylvie 01 24/07/09 31/07/09 Française
PICOT Marie Laure 01 24/07/09 31/07/09 Française
SIONNEAU Jean Michel 01 24/07/09 31/07/09 Française
MARTINEAU Philippe 01 24/07/09 31/07/09 Française
MARTINEAU Brigitte 01 24/07/09 31/07/09 Française
MAUD Brunsloick 01 27/07/09 03/08/09 Française 14
RAUBER François R 01 27/07/09 03/08/09 Française
Christian OTANDO 06 12/08/09 14/08/09 Franco - Gabonaise
12
Christian OTANDO 08 14/08/09 20/08/09 Franco - Gabonaise
48
GILLOT J Pierre 01 12/08/09 14/08/09 Française 06
VECOQ Simon 01 12/08/09 14/08/09 Française
GREYO David 01 12/08/09 14/08/09 Française
Groupe Ariane 04 16/08/09 19/08/09 Française 12
Ernesto contrera 01 21/08/09 23/08/09 Espagnol 02
Yolanch cabezas 01 21/08/09 27/08/09 Cubaine 06
VAN DE WEYER Jan 01 02/09/09 04/09/09 Belge 08
NADINE Franck 01 02/09/09 04/09/09 Belge
CLEERBOUT Gina 01 02/09/09 04/09/09 Belge
JANSSEN Marc 01 02/09/09 04/09/09 Belge
Elisabeth 01 17/09/09 19/09/09 Allemande 04
Marianne 01 17/09/09 19/09/09 Allemande
Saget 09 26/10/09 30/10/09 Francaise 36
Bernard 04 02/11/09 04/11/09 Française 08
Jasmien 02 03/12/09 05/12/09 Belge 04
Crozet Etienne 02 24/12/09 28/12/09 Française 08
TOTAL 083 299
93
ANNEXE D : DONNEES SUR LA FREQUENTATION
TOURISTIQUE DE LA CASE ABIETU, 2010 (Source : GIC
Tourisme)
Noms et prénoms Nombre Date d’arrivée Date de départ Nationalité Nbre de Nuitées
00 Janvier Janvier 00
Chevrier 04 19/02/10 22/02/10 Française 12
Marc M 05 23/02/10 26/02/10 Française 15
00 Mars Mars
Filip 04 12/04/10 15/04/10 Allemande 12
Rouzaud 07 16/04/10 19/04/10 Française 21
CARDIEC Floriane 02 10/05/2010 13/05/2010 Française 06
Jaffuel A 04 21/05/2010 23/05/2010 Française 08
MASAO Morita 02 08/06/2010 10/06/2010 Japonaise 04
Katie Skilly 02 13/06/2010 16/06/2010 Américaine 06
Basile PAGE 01 13/06/2010 15/06/2010 Suisse 06
Anna S 01 13/06/2010 15/06/2010 Allemande
IRIS S 01 13/06/2010 15/06/2010 Allemande
Alexander P 02 02/07/2010 06/07/2010 Allemande 08
Christine R 01 09/07/2010 12/07/2010 Canadienne 15
Sarah 01 09/07/2010 12/07/2010 Canadienne
Stephene A 01 09/07/2010 12/07/2010 Canadienne
SAINT C 01 09/07/2010 12/07/2010 Française
FORT P 01 09/07/2010 12/07/2010 Française
Bertrand 04 02/08/2010 04/08/2010 Française 08
Catherine 03 02/08/2010 05/08/2010 Française 09
KNTIEL 04 02/08/2010 06/08/2010 Allemande 16
Michel N 03 04/08/2010 09/08/2010 Espagnol 15
00 Septembre Septembre
Groupe chinois 04 06/10/2010 07/10/2010 Chinoise 04
Eric Jund 01 15/10/2010 18/10/2010 Française 06
Muller 01 15/10/2010 18/10/2010 Française
OUDAH 04 25/11/2010 29/11/2010 Anglaise 16
Groupe Français 03 29/12/2010 31/12/2010 Française 06
TOTAL 67 193
NOMBRE DE TOURISTES NATIONALITES
36 Française
12 Allemande
03 Espagnol
01 Suisse
03 Canadienne
04 Chinoise
02 Américaine
02 Japonaise
04 Anglaise
TOTAL 67
94
LISTE DES ACRONYMES
ACPE : Association pour la Connaissance et la Protection de l’Environnement
AFD : Agence Française de Développement
ANPN : Agence Nationale des Parc Nationaux
CARPE: Programme Régional de l’Afrique Centrale
CBT : Community-Based-Tourism
CCGL : Comité Consultatif de Gestion Locale
CDN : Conseil Départemental de Ndougou
CNUCED : Conférence des Nations Unies sur le Commerce et le Développement
CPNAP : Comité des Parcs Nationaux et des Aires Protégées
CST : Compte Satellitaire du Tourisme
FFEM : Fond Français pour l’Environnement Mondial
FMI : Fond Monétaire International
GRIEVA : Groupe de Recherche et d’Intervention en Evaluation
IDE : Investissements Directs Etrangers
IREST : Institut de Recherche et d’Etudes Supérieures sur le Tourisme
GIC Tourisme : Groupement d’Initiatives Communautaires - Tourisme
GIZ : Deutsche Gesellschaft für Internationale Zusammenarbeit
MINEF : Ministère des Eaux et Forêts
OMT : Organisation Mondiale du Tourisme
ONG : Organisation Non Gouvernemental
PADEC: Programme d’Appui au Développement de l’Ecotourisme Communautaire
PDDE: Plan Directeur de Développement de l’Ecotourisme
PNL : Parc National de Loango
PPT : Pro-Poor Tourism
PSVAP : Programme Sectoriel de Valorisation des Aires Protégées
SIG : Système d’Information Géographique
UE : Union Européenne
UICN: Union Internationale pour la Conservation de la Nature
UNESCO: Organisation des Nations Unies pour l’Education, la Science et la Culture
USAID: Agence Américaine pour le Développement International
WCS : World Conservation Society
WWF : World Wide Fund for nature
95
TABLE DES ENTRETIENS
NOM ET PRENOM FONCTION STRUCTURE/VILLAGE DATE
ACTEURS DE LA CONSERVATION ET DU TOURISME
BAYET Jean Pierre Président mandataire GIC Tourisme 08/03/12
BISSIELO Anaclé
Professeur au
département de
Sociologie
Université Omar Bongo 30/01/12
BOUASSA Ghislain Ecoguide Association des Guides du Parc
National de Loango/Ibonga ACPE 24/02/12
IBAMBA OGALA
Ghislain Ecoguide GIC Tourisme 05/04/12
MAGANGA Pierre
Brice
Responsable du volet
sociologie et des bureaux
WWF Gabon – Programme
Gamba 03/02/12
MEYE Brice Léandre Conservateur du Parc
National de Loango
Agence Nationale des Parcs
Nationaux (ANPN) 20/04/12
MOUNGUENGUI Gil
Avery Directeur exécutif ONG locale Ibonga ACPE 15/02/12
PAMBO Jean-Alain Ecoguide, responsable
du personnel Camp Sette Cama-Safaris, OT 24/04/12
RODDE Quentin Ancien gérant Camp Missala, OT 28/03/12
POPULATION LOCALE
Béatrice Habitante/ancienne
femme restauratrice Sette Cama 15/04/12
Maman Juliette Notable/femme
restauratrice Sette Cama 14/04/12
Mme Jean Mbouity
Habitante/ancienne
maman Mafubu
(artisane)
Sette Cama 15/04/12
MAKAYA Chef de village/Chef
coutumier Sette Cama 15/04/12
MAKAYA Jean
Martin
Chef de regroupement/
Chef coutumier Sette Cama 15/04/12
MASSAMBA
MBOUITY Henri Chef de village Pitonga 21/04/12
MBOUITY Jean Notable Sette Cama 15/04/12
Papa Gabi Chef de canton Pitonga 22/04/12
Papa Jean Marie Notable Sette Cama 14/04/12
TCHITOULA Sidonie Habitante/ancienne
femme restauratrice Sette Cama 15/04/12
Simone
Habitante/infirmière du
village/ancienne femme
restauratrice
Sette Cama 15/04/12
TSINGA Evelyne Chef de village Sounga 22/04/12
Willy, Kassa, Lewis Habitants/jeunes Sette Cama 15/04/12
AUTRE
Auriane Touriste GIC Tourisme 26/03/12
96
TABLE DES FIGURES
CHAPITRE 1 :
Figure 1 : Pourcentage d’arrivées de touristes internationaux, 2010
Figure 2 : Les six catégories d’aires protégées
Figure 3 : les quatre niveaux de participation communautaire (Paul, 1987)
Figure 4 : Tableau de détermination des impacts des projets d’écotourisme sur les populations
locales (Scheyvens, 1999)
CHAPITRE 2 :
Figure 5 : Le Parc National de Loango et ses villages périphériques
Figure 6 : Philosophie du PSVAP pour l’implication des populations locales
Figure 7 : Evaluation des impacts du projet d’écotourisme communautaire du PSVAP sur les
populations locales, 2011
Figure 8 : Part des dépenses des touristes dans les forfaits du GIC Tourisme
Figure 9 : Schéma du système d’acteurs du Parc National de Loango
CHAPITRE 3 :
Figure 10 : Participation authentique et non authentique des acteurs dans la réunion du comité
local de rezonage du 23 février 2012
Figure 11 : Schéma du CCGL du Parc National de Loango
Figure 12 : Formalisation des échanges dans un projet de tourisme communautaire
97
TABLE DES MATIERES
INTRODUCTION ................................................................................................................................. 3
CHAPITRE 1: L’INTEGRATION DES POPULATIONS LOCALES AU PROCESSUS DE
MISE EN TOURISME DANS LES AIRES PROTEGEES............................................................... 7
I. LE TOURISME COMMUNAUTAIRE DANS LES AIRES PROTEGEES ....................... 8
1. Contexte international du tourisme dans les pays du sud ........................................................ 8
2. Particularités d’une aire protégée .......................................................................................... 10
Définition d’une aire protégée ................................................................................................... 10
Tourisme et conservation dans les aires protégées .................................................................... 12
3. Le tourisme communautaire, une réponse aux problématiques de gestion des aires
protégées ? ..................................................................................................................................... 13
Définition du tourisme communautaire ..................................................................................... 13
Problématiques liées au tourisme communautaire .................................................................... 13
II. PLANIFICATION DU TOURISME DANS LES AIRES PROTEGEES :
POLITIQUES D’IMPLICATION DES COMMUNAUTES LOCALES ................................... 16
1. Empowerment et gouvernance .............................................................................................. 16
Définition de l’Empowerment ................................................................................................... 16
Définition de la gouvernance ..................................................................................................... 16
Gouvernance et Empowerment dans le tourisme communautaire ............................................ 17
2. Des systèmes de financements privilégiant l’autonomisation des communautés locales ..... 18
3. Quels indicateurs pour la participation ? ............................................................................... 19
Les quatre niveaux de participation communautaire ................................................................. 19
Indicateurs d’impacts du tourisme communautaire sur les populations locales ........................ 20
4. La « participation », entre discours et réalité......................................................................... 23
III. ANALYSE DE L’IMPLICATION DES COMMUNAUTES LOCALES : UNE
APPROCHE SYSTEMIQUE ......................................................................................................... 25
1. Une multiplicité d’acteurs, des attentes divergentes ............................................................. 25
Les attentes des populations locales .......................................................................................... 25
L’opinion publique et les attentes des touristes internationaux ................................................. 25
Les attentes du secteur public .................................................................................................... 26
Les attentes du secteur privé...................................................................................................... 27
2. Problématique et hypothèses ................................................................................................. 27
3. Une méthode de recherche qualitative et hypothético-inductive ........................................... 29
Recherche documentaire ........................................................................................................... 29
Cartographie .............................................................................................................................. 30
98
Dossier medias .......................................................................................................................... 30
Observation participative et entretiens ...................................................................................... 30
Limites de la recherche .............................................................................................................. 31
CHAPITRE 2: LE PROJET D’ECOTOURISME COMMUNAUTAIRE DU PARC NATIONAL
DE LOANGO: Une appropriation fragile du projet par les communautés locales ...................... 32
I. TOURISME DANS LE PARC NATIONAL DE LOANGO : UNE REPONSE POSSIBLE
AUX CONFLITS D’USAGE ? ....................................................................................................... 33
1. Les prémices du marché du tourisme au Gabon .................................................................... 33
2. Le cadre institutionnel et légal du développement du tourisme au Gabon ............................ 34
Le code forestier ........................................................................................................................ 34
Le Plan Directeur du Développement de l’Ecotourisme 2008-2015 (PDDE) ........................... 35
Le Programme d’Appui au Développement de l’Ecotourisme Communautaire (PADEC) ...... 35
Vision de l’ANPN ..................................................................................................................... 36
3. Un cadre géographique privilégié pour le développement du tourisme ................................ 37
Cadrage géographique ............................................................................................................... 37
Potentiel touristique ................................................................................................................... 37
Villages concernes par le PSVAP ............................................................................................. 39
4. Les problématiques liées au territoire .................................................................................... 39
Un territoire enclavé .................................................................................................................. 39
Les conflits d’usage ................................................................................................................... 41
L’exode rural ............................................................................................................................. 42
II. BILAN DU PROJET D’ECOTOURISME COMMUNAUTAIRE ................................. 43
1. La mise en place du projet d’écotourisme communautaire ................................................... 43
2. Activités développées ............................................................................................................ 45
3. Le déclin de l’activité touristique .......................................................................................... 47
4. Evaluation de l’impact du projet de tourisme communautaire sur la population locale ........ 50
Evaluation qualitative ................................................................................................................ 50
Impact économique ................................................................................................................... 54
III. LE MANQUE DE SYNERGIE DU SYSTEME D’ACTEURS ....................................... 56
1. Identité des acteurs ................................................................................................................ 56
Les acteurs de gestion et d’aménagement du Parc National de Loango (sud) .......................... 56
Les acteurs du tourisme ............................................................................................................. 57
Les touristes ............................................................................................................................... 57
Les habitants : le manque de synergie communautaire ............................................................. 58
2. Un système d’acteur non institutionnalisé ............................................................................. 59
99
CHAPITRE 3 : FREINS A L’IMPLICATION DES POPULATIONS LOCALES ET
RECOMMANDATIONS .................................................................................................................... 61
I. LE MANQUE DE COMMUNICATION ENTRE ACTEURS ........................................... 62
1. Une communauté locale marginalisée par le système de communication ............................ 62
Le manque d’information de la population locale ..................................................................... 62
Participation authentique vs non authentique ............................................................................ 64
Le manque d’outils de communication ..................................................................................... 66
2. Le manque de concertation entre acteurs de la conservation et du tourisme ......................... 67
Le manque de communication entre organismes et en leur sein ............................................... 67
Une coordination de l’activité touristique absente .................................................................... 68
3. Création d’un cadre privilégié de communication : le Comité Consultatif de Gestion Local
(CCGL) .......................................................................................................................................... 69
II. UN CONTEXTE SOCIOANTHROPOLOGIQUE NEGLIGE ...................................... 71
1. Des réalités territoriales ignorées .......................................................................................... 71
2. Des actions de terrain en faveur des populations locales ? .................................................... 73
Un système de financement éloigné des réalités du terrain ....................................................... 73
Le WWF, un éco-conquérant du Parc National de Loango ....................................................... 74
3. La dépendance des communautés locales ............................................................................. 75
III. LEVIERS POUR UNE IMPLICATION PLUS EFFECTIVE DES POPULATIONS
LOCALES ........................................................................................................................................ 76
1. Une approche favorisant l’aspect socio-anthropologique du territoire .................................. 76
2. L’utilité des outils de gestion participative ........................................................................... 77
La radio rurale ........................................................................................................................... 77
Le théâtre forum ........................................................................................................................ 78
Le ciné-débat ............................................................................................................................. 78
3. L’accompagnement de projet ................................................................................................ 79
4. Formalisation des échanges entre acteurs .............................................................................. 79
CONCLUSION .................................................................................................................................... 82
BIBLIOGRAPHIE .............................................................................................................................. 85
ANNEXES ............................................................................................................................................ 89
LISTE DES ACRONYMES ............................................................................................................... 94
TABLE DES ENTRETIENS .............................................................................................................. 95
TABLE DES FIGURES ...................................................................................................................... 96
100
RESUME
De nombreux projets touristiques à vocation durable mis en place dans les pays du Sud
présentent, au moment de leur évaluation, des bilans médiocres en termes d'implication et
d'appropriation des activités par les populations locales.
Le projet pilote d’écotourisme communautaire développé en 2003 par l'Union Européenne
(Programme Sectoriel de Valorisation des Aires Protégées ; PSVAP) dans le Parc National de
Loango, au Gabon, en est un exemple concret, puisque malgré les efforts des porteurs de
projets, et neuf ans après le lancement des activités, on constate aujourd'hui une participation
décroissante de la population locale. Le cas du Parc National de Loango, nous montre que
nous sommes encore loin des objectifs d’implication et d’autonomisation fixés au départ.
Quels sont les freins à l’appropriation du projet d’écotourisme communautaire par les
populations locales ? Une implication est-elle réellement possible et comment mieux
l’envisager ?
Mots-clés : tourisme communautaire, population locale, gouvernance, participation, aire
protégée, Parc National de Loango.
ABSTRACT
When evaluated, many sustainable tourism projects created in developing countries reveal a
poor outcome in terms of involvement of local people.
The CBT project developed by the European Union in 2003 (Programme Sectoriel de
Valorisation des Aires Protégées ; PSVAP) in the Loango National Park , Gabon, is one
concrete example of this setback. Despite a great deal of effort from the institution, and nine
years after the beginning of the project, we establish decreasing local people participation.
These case points out the remoteness between the original goals and the results obtained.
What curbs local people involvement in Communitary Based Tourism (CBT) projects? How
can we reach a better commitment?
Key words: Communitary Based Tourism, local people, governance, participation, protected
area, Loango National Park.