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K. Blanckaert Hydraulique fluviale et aménagement des cours d’eau – Transport de sédiments TS1
Transport de sédiments : l’essentiel ___________________________________________________________________________
__
Ce chapizre est consacré à l’étude des sédiments transportés par un écoulement. Le lit des
cours d’eau naturels est formé et constamment déformé par les sédiments en mouvement. Il
est variable dans le temps et dans l’espace, et s’adapte aux changements de l’écoulement.
Le but de ce chapitre est tout d’abord de comprendre les différents modes de transport de
sédiments, les mécanismes qui engendrent ce transport, et leur modélisation. Ensuite, deux
formes d’interactions dynamiques entre l’écoulement et la morphologie sont abordées:
(i) Les ondulations du lit dues au transport des sédiments qui changent la rugosité du
lit et influencent donc l’écoulement
(ii) Les perturbations de l’équilibre écoulement-sédiments qui engendrent des
changements de la morphologie de la rivière.
1 Modes de transport de sédiments
La figure 1 illustre comment un granulat de sédiment posé au fond de la rivière subit une
tension de frottement !0, générée par le gradient de vitesse :
!
"0# =u$
2= (% +%
t)&u &z '%
t&u &z ;
" et "t sont les viscosités moléculaires et turbulentes. Dans un écoulement uniforme, le profil
de !0 augmente linéairement de zéro à la surface à une valeur maximale au fond (voir chapitre
2 “Considérations hydrodynamiques”) :
!
"0 # =u$2
=gRh Jf
!(z)
!0
u(z)
k(z)
Règle indicative: charriage à partir de u*/vss>0.1 et suspension à partir de u*/vss>0.4
Figure 1: Schéma des modes de transport et répartition de vitesse, u, de tension de frottement, !, et
d’énergie cinétique turbulente, k, dans un écoulement uniforme
K. Blanckaert Hydraulique fluviale et aménagement des cours d’eau – Transport de sédiments TS2
C’est seulement à partir d’une valeur critique !0,cr, que l’action déstabilisante de !0 l’emporte
sur l’action stabilisante du poids du granulat, et que le granulat se met en mouvement. Les
granulats se déplacent d’abord en roulant. Au fur et à mesure qu’on augmente !0, ils
commencent à glisser et à sauter brièvement. Ce mode de transport, où les granulats restent en
contact étroit avec le fond, est appelé transport par charriage, et noté par qsb.
En augmentant davantage !0, les sauts des granulats deviennent de plus en plus hauts et longs,
et finalement les granulats n’ont plus qu’occasionnellement contact avec le fond. Ce mode de
transport, où les particules restent dans la colonne d’eau, est appelé transport en suspension,
et indiqué par qss. Les granulats de quartz (#=2650 kg/m3) peuvent rester suspendus dans la
colonne d’eau (#=1000 kg/m3) grâce à l’effet ascendant de la turbulence. La figure 1 illustre
schématiquement le profil exponentiel de l’intensité de la turbulence (Nezu et Nakagawa,
1987) :
!
k = 4.78u"2exp(#2z h)
Même si les transports par charriage et en suspension sont paramétrés par la même tension de
frottement au fond,
!
"0# =u$
2, leurs mécanismes sont fondamentalement différents. Dans le
cas du charriage,
!
"0# =u$
2 est un paramètre de l’écoulement moyen, tandis qu’il paramètre la
turbulence dans le cas de la suspension. Contrairement au charriage, le transport en
suspension ne peut donc pas exister dans un écoulement laminaire.
Il est souvent admis que le transport par charriage commence pour u*/vss>0.1 et le transport en
suspension pour u*/vss>0.4.
2 Importance de l’interaction entre l’écoulement et le transport de
sédiments
Dans ce qui précède (chapitres UN, NUN, NP), on a admis que l’eau s’écoule dans une
morphologie connue. Cependant, la morphologie des cours d’eau naturels et leurs
rugosités sont formées par l’interaction dynamique entre l’écoulement et le transport
des sédiments. Cette interaction conditionne la morphologie et l’écoulement à toutes les
échelles spatiales et temporelles, comme résumé dans le tableau 1.
Comme auparavant pour l’écoulement, on se limite au cas unidimensionnel (1D), c’est-à-dire
des rivières rectilignes de section invariable (voir tableau 2). L’écoulement non-permanent et
non-uniforme est toujours décrit par les équations de Saint-Venant (voir Tableau 2).
Cependant, la côte du fond n’est plus connue, mais représente une variable supplémentaire à
déterminer à partir de l’équation de conservation de masse des sédiments (voir tableau 2).
Cette équation exprime qu’un déséquilibre entre les flux de sédiments entrant et sortant d’un
tronçon de rivière provoque un changement de la côte du fond.
K. Blanckaert Hydraulique fluviale et aménagement des cours d’eau – Transport de sédiments TS3
PROCESSUS ET ECHELLE SPATIALE ÉCHELLE DE TEMPS
October 2000course CT5311
13
Bedform types in rivers (Simons and Richardson, 1966)
1D : Formes du lit :
rugosité des grains +
rugosité des formes
du lit ! capacité
hydraulique (chap.
EU)
Quelques heures à
quelques jours
2D : érosion locale,
affouillement (pile de
pont, courbe, etc),
section de la rivière
Quelques jours à
quelques années
1D : Profil
longitudinal et pente
du fond (barrage,
delta, prise d’eau,
etc)
Quelques années à un
siècle
1D, 2D : alignement
de la rivière
(méandres, tresses)
Quelques siècles à
quelques millénaires
Tableau 1 : Exemples de l’interaction écoulement-sédiments à différentes échelles spatiales et
temporelles
K. Blanckaert Hydraulique fluviale et aménagement des cours d’eau – Transport de sédiments TS4
SITUATION REELLE VS. SITUATION 1D ETUDIEE
Equations de Saint-Venant-Exner
!
"h
"t+"Uh
"x= 0
!
1
g
"U
"t+U
g
"U
"x+"h
"x+"z
"x= #Je
!
"z
"t+1
1# p
"qs"x
= 0
3 équations pour résoudre les 3 variables U, h, z $ Je et qs doivent être exprimés en fonction de U, h,z
Tableau 2 : Les équations de Saint-Venant-Exner pour le cas 1D
Les équations de Saint-Venant-Exner expriment trois principes fondamentaux :
- la conservation de la masse du fluide
- la conservation de l’énergie ;
- La conservation de la masse de sédiments. Les trois équations correspondantes
peuvent être résolues pour les trois variables U, h et z, à condition de pouvoir
exprimer les paramètres Je et qs en fonction de U, h et z.
La pente énergétique est modélisée en utilisant une formule de résistance, comme celle de
Chezy :
!
Je =8g
C2
1
4Rh
U2
2g, ce qui réduit le problème à la détermination du coefficient de
rugosité C.
La modélisation du transport de sédiments qs et de la rugosité C sont maintenant traitées.
K. Blanckaert Hydraulique fluviale et aménagement des cours d’eau – Transport de sédiments TS5
3 Modélisation du transport de sédiments, qs
3.1 Simplifications
Dans un premier temps, la modélisation du transport de sédiments est simplifiée en ne
considérant que :
- Des sédiments sphériques de taille uniforme de diamètre d
- Des écoulements uniformes
- Des sédiments non-cohésifs et des concentrations de sédiments relativement faibles
L’influence d’une granulométrie étendue sur le transport de sédiments est ensuite traitée dans
le chapitre 3.5.
3.2 Le transport par charriage
Le transport de sédiments par charriage, qsb [m2/s] dépend pour le cas simplifié considéré de 7
paramètres :
- # et " qui caractérisent le fluide
- # s et d qui caractérisent les sédiments
- Rh (ou h), Je et g qui caractérisent l’écoulement. Notons qu’en combinant ces trois
paramètres, on trouve
!
u" = #0 $ = gRhJ e qui paramètre la tension de frottement
appliquée aux granulats du lit ainsi que la turbulence qui maintient les granulats en
suspension.
D’après la théorie de l’analyse dimensionnelle, ces 7 paramètres dimensionnels peuvent être
réduits à 5 paramètres adimensionnels. Pour modéliser le charriage, qsb [m2/s] on prend les 5
paramètres suivants dont la signification physique est importante:
-
!
" =qsb# =qsb
ss $1( )gd3 : une intensité adimensionnelle du transport par charriage.
Notons que qsb [m2/s] représente le débit solide volumique par largeur unitaire.
Souvent, d’autres unités sont utilisées pour exprimer le débit solide, comme gsb
[kg/ms], donnant un résultat numérique différent de quelques ordres de grandeur (voir
p.451). Soyez donc toujours prudents au choix des unités.
-
!
d" = d#s# $1
%2& ' ( )
* + 1 3
: un diamètre adimensionnel des particules
-
!
"# =$u#
2
%s& %( )d
=%R
hJf
%s& %( )d
: une tension adimensionnelle de frottement
-
!
Rh
d ou h d : une profondeur relative
-
!
ss
= "s" : une densité relative
K. Blanckaert Hydraulique fluviale et aménagement des cours d’eau – Transport de sédiments TS6
La formulation générale du transport de sédiments par charriage, illustrée dans la figure 2,
s’écrit donc:
!
" =" d#,$#,Rhd,s
s( )
!
X = d"
!
Y =# "
!
Z =h
d
Figure 2 : Illustration (selon Yalin 1977) de la formule générale pour le transport de sédiments par
charriage
La figure 2 montre que les sédiments sont transportés par charriage si la tension
adimensionnelle de frottement !* dépasse une valeur critique !*cr, qui dépend uniquement du
diamètre adimensionnel des sédiments d*. C’est le critère de Shields, traité dans le chapitre
3.4.2 du livre et illustré dans la figure 3a (qui est une vue en plan de la figure 2).
Pour d*>100, !*cr est quasiment constant à une valeur de 0.05. Vu la définition de !*cr, ceci
implique une augmentation linéaire de la tension dimensionnelle de frottement !0 avec le
diamètre d des granulats. C’est le cas dans les régions alpines, où les sédiments sont assez
gros.
Entre 20<d*<100, !*cr augmente de 0.03 à 0.05, impliquant que !0 croît plus que linéairement
avec d.
Pour d*<20, !*cr diminue de 0.2 à 0.03. Ceci est le domaine des sédiments cohésifs, ou la
cohésion entre les sédiments fins augmente leur résistance au mouvement.
K. Blanckaert Hydraulique fluviale et aménagement des cours d’eau – Transport de sédiments TS7
Figure 3a : Tension adimensionnelle de frottement
critique pour le début de mouvement des sédiments,
selon Shields-Yalin (figure 3.13 du chapitre 3)
Figure 3b : Comparaison entre différentes formules
de charriage, chacune représentant une courbe dans
la figure 2.
Aucune formule existante de transport de sédiments par charriage a une validité générale. La
majorité des formules négligent la dépendance des paramètres Rh/d et #s/#. Notons qu’une
dépendance de ces deux paramètres est quand même implicitement conservée à travers !* et
que #s/# est constant à 2.65 pour le transport de sédiments de quartz dans l’eau.
De plus, la majorité des formules négligent la dépendance de d*. Ceci peut être une bonne
approximation pour d*>100, ou !*cr!0.05=cte, mais pas dans la région où !*cr dépend de d*
(voir Figures 2 et 3a).
Une multitude de formules de charriage ont été proposées, elles ont pour forme générale:
!
" =" d#,$#,Rhd,s
s( ) $
!
" =" #$( )
Ces formules sont en général semi-empiriques et basées sur des expériences faites en
laboratoires ou des mesures faites dans les rivières. Elles ne doivent pas être utilisées en
dehors de la plage paramétrique (notamment d et Jf) utilisée pour leur dérivation.
La figure 3b montre des différences considérables entre quatre formules souvent utilisées.
Chacune de ces formules représente une seule courbe dans la figure 2, ce qui explique leur
validité et précision limitées.
La formule de Meyer-Peter-Müller (1934 et 1948) peut être donnée comme exemple :
!
" =8(#$ % #$cr )3 2
, valable pour 3.1 < d[mm] < 28.6 et 0.0004 < Jf [/] < 0.02
Notons aussi la formule d’Einstein (développé dans le livre) qui se base sur des principes
probabilistes et modélise en détail les processus physiques du transport par charriage. Cette
formule est assez complexe, mais donne des résultats assez semblables à la précédente.
K. Blanckaert Hydraulique fluviale et aménagement des cours d’eau – Transport de sédiments TS8
3.3 Le transport en suspension
cs(z)
dz
!vsscs
!vsscs
+"c
s
"zdz
# $ %
& ' ( c
sw+
"csw
"zdz
csw
dx
Figure 4 : Concentration de sédiments en suspension, cs et flux verticaux de sédiments à travers un
volume élémentaire
Le flux de sédiments transportés en suspension dans la colonne d’eau s’écrit sous la forme
(figure 4):
!
qss = cs (z)u(z)dzzsb
h
"
Si on admet que la répartition de vitesse u(z), est connue (voir chapitre 2 « Considérations
Hydrodynamiques »), le problème est ramené à la détermination du profil de la concentration
volumique cs(z) et du niveau de référence, zsb.
La concentration de sédiments en suspension, cs [/] dépend pour le cas simplifié considéré des
7 mêmes paramètres que dans le cas de charriage :
- # et " qui caractérisent le fluide
- # s et d qui caractérisent les sédiments
- Rh (ou h), Je et g qui caractérisent l’écoulement.
Notons qu’en combinant ces trois paramètres, on trouve
!
u" = #0 $ = gRhJ e qui paramètre
la tension de frottement appliquée aux granulats du lit ainsi que la turbulence qui maintient les
granulats en suspension.
K. Blanckaert Hydraulique fluviale et aménagement des cours d’eau – Transport de sédiments TS9
Physiquement, les sédiments sont maintenus en suspension si la force descendante due à la
gravité est compensée par la force ascendante due à la turbulence. La théorie du transport en
suspension ne considère pas directement le bilan des forces agissant sur les particules, mais se
base sur le principe de conservation de masse des sédiments. Elle considère un volume
élémentaire dans la colonne d’eau et exprime que les flux descendant et ascendant des
sédiments sont égaux (figure 4).
Le flux descendant, dû à l’effet de la gravité, est
fonction de la vitesse de sédimentation vss, qui est
définie comme la vitesse constante d’une particule
tombant dans de l’eau stagnante. Cette vitesse de
sédimentation dépend du diamètre d du granulat, de
la densité relative #s/# et de la viscosité du liquide ".
La vitesse de sédimentation vss caractérise donc à la
fois le liquide et les sédiments. La figure 5 illustre la
dépendance de vss sur d, pour des granulats de quartz
dans l’eau.
Figure 5 : Vitesse de sédimentation, vss, en
fonction du diamètre, d, d’une particule.
Le flux ascendant est dû à la turbulence de l’écoulement qui est paramétré par la vitesse de
frottement u*.
Le seul paramètre adimensionnel intervenant dans la théorie de la concentration cs de
sédiments est le rapport vss/u* entre la vitesse de sédimentation et la vitesse de frottement.
Cette théorie, résumée dans le tableau 3, est développée en quatre étapes :
(i) L’équilibre des flux instantanés (à un moment donné) ascendant et descendant à
travers un volume de contrôle (voir figure 4) est exprimé.
(ii) Les vitesses et concentrations instantanées sont décomposées en valeur moyenne
(qui est constante dans le temps) et des fluctuations temporelles autour de cette
valeur moyenne. Par définition, la moyenne temporelle des fluctuations est zéro.
Cependant, la valeur moyenne de la corrélation entre les fluctuations de vitesse
verticale et de concentration
!
" c s" w , n’est pas nulle.
K. Blanckaert Hydraulique fluviale et aménagement des cours d’eau – Transport de sédiments TS10
(iii) Le flux vertical turbulent de sédiments
!
" c s" w est modélisé comme une diffusion
turbulente, par analogie avec la diffusion turbulente de quantité de mouvement
(voir aussi le chapitre « Transport de matière »). Ainsi, la variable inconnue
!
" c s" w
est exprimée en fonction de
!
c s. Notons que la diffusivité des particules solides en
suspension, %s, est prise comme proportionnelle à la diffusivité de quantité de
mouvement, "t, qu’on appelle viscosité turbulente.
(iv)
!
c s étant uniquement fonction de z, l’équation en dérivée totale peut être intégrée
pour trouver le profil de concentration .
1. Equilibre des flux instantanées
!
Flux descendant : " vss
#cs
#zdzdx
Flux ascendant : #c
sw
#zdzdx
$
% &
' & " v
ss
#cs
#z+#c
sw
#z=0
2. Turbulence et équilibre des flux moyennés dans le temps
!
vss
=cte
cs(t) = c
s+ " c
s(t) avec " c
s(t) = 0
w(t) =w + " w (t) avec " w (t) = 0
MAIS " c s(t) " w (t) # 0
$
%
& &
'
& &
( vss
)c s
)z+) " c
s" w
)z=0
3. Modélisation du flux ascendant turbulent
!
"xz
= # $ u $ w = %t
&u
&z avec %
t= 'u(h
z
h1#
z
h
) * + ,
- .
# $ c s $ w = /
s
&c s
&z= 0
s%
t
&c s
&z
1
2 3
4 3
!
" vss
dc s (z)
dz+
d
dz#s$ t (z)
dc s(z)
dz
% & ' (
) * =0
4. Solution
!
c s(z)
c s(zsb )=
h "z
z
zsb
h "zsb
#
$ %
&
' (
v ss
)s*u+
et
!
qss = c sudzz a
h
"
Tableau 3 : Résumé de la théorie pour le transport de sédiments en suspension
K. Blanckaert Hydraulique fluviale et aménagement des cours d’eau – Transport de sédiments TS11
Interprétation de l’équation pour le profil de la concentration des sédiments :
- Le profil de concentration
!
c s(z) est déterminé par la concentration
!
c s(zsb ) au
niveau de référence zsb. La définition de ce niveau de référence, qui distingue le
transport par charriage du transport en suspension, n’est pas basée sur un critère
physique ou théorique. La concentration de référence à ce niveau,
!
c s(zsb ) , est
déterminée à partir du transport en charriage. Une multitude de formules pour le
niveau et la concentration de référence ont été proposée dans la littérature.
- Le profil de concentration est déterminé par l’exposant de Rouse, vss/& s'u*, qui fait
apparaître le rapport vss/u*. Pour des valeurs élevées de vss/u*, les sédiments en
suspension se trouvent près du fond. La concentration de sédiments s’uniformise dans
la colonne d’eau avec une diminution de vss/u* (plus de force ascendante due à la
turbulence).
- Contrairement au transport par charriage, la théorie du transport en suspension ne fait
pas apparaître de seuil critique pour la mise en suspension des sédiments. Cependant,
la figure dans le tableau 3 montre que pour des valeurs élevées de vss/&s'u*, les
sédiments sont concentrés près du fond, et la concentration est quasi-nulle dans le
reste de la colonne d’eau. On utilise souvent vss/u*< 2.5 comme critère de mise en
suspension.
- Le paramètre &s=%t/"t représente le rapport entre les diffusivités de sédiments et de
quantité de mouvement. On admet souvent que &s=1, ce qui veut dire que les
sédiments suivent parfaitement les fluctuations turbulentes (tourbillonnaires) de
l’écoulement.
- La théorie est limitée aux concentrations relativement faibles de sédiments, qui ne
modifient pas les propriétés rhéologiques de l’eau (le liquide reste Newtonien).
3.4 Le transport total
Deux approches existent pour déterminer le transport total, qs :
(i) qs=qsb+qss, en calculant qsb et qss avec une formule de charriage et de suspension
respectivement, et combinant les deux par le choix du niveau et de la concentration
de référence, zsb et
!
c s(zsb ) . Einstein, par exemple, définit zsb=2d, et base la
concentration de référence comme
!
c s(zsb ) = qsb ub zsb avec ub la vitesse de
déplacement du charriage.
(ii) Par des formules empiriques qui donnent directement le transport total en
fonction des paramètres du liquide, du sédiment et de l’écoulement. Dans le livre,
les formules de Graf (1971) et de Ackers et White (1973) sont présentées.
Comme les différentes formules de charriage, ces formules ont une précision limitée et ne
doivent pas être utilisées en dehors de la plage paramétrique (notamment d et Jf) utilisée pour
leur dérivation.
K. Blanckaert Hydraulique fluviale et aménagement des cours d’eau – Transport de sédiments TS12
3.5 Effets d’une granulométrie étendue
Les formules de transport de sédiments
ont été élaborées ci-dessus pour des
sédiments sphériques de taille
uniforme. En réalité, le lit des rivières
est composé de sédiments ayant une
large expansion granulométrique. La
figure 6 illustre la granulométrie
étendue de quelques sédiments de
rivières alpines.
Figure 6 : Granulométrie de quelques rivières alpines
Les sédiments de différentes tailles n’ont pas la même mobilité. Tous les sédiments du lit
seront en mouvement seulement dans le cas de débits très élevés. Pour des débits plus faibles,
seulement les sédiments fins seront transportés par l’écoulement tandis que les sédiments
grossiers resteront immobiles. Ceci implique que les granulométries du lit et des sédiments en
mouvement sont différentes.
Cette mobilité partielle du lit provoque un tri des sédiments. Les petites particules sont
emportées plus facilement que les grandes, provoquant une accumulation résiduelle de
grosses particules à la surface du lit, appelé couche de pavage. Lors d’une crue
exceptionnelle, le pavage peut être détruit, exposant le granulat primitif plus fin. Une érosion
très importante peut en résulter.
Deux approches existent pour traiter le transport d’une granulométrie étendue de sédiments
(i) Approche simple : diamètre caractéristique de la granulométrie
Cette approche consiste à appliquer les formules de transport élaborées pour une
granulométrie uniforme, en utilisant un diamètre caractéristique de la granulométrie.
Ce diamètre caractéristique dépend de la formule utilisée, comme illustré par quelques
exemples : Schoklitsch préconise l’utilisation de d40, Meyer-Peter-Müller de dm ou d50 et
Einstein de d35.
Il est évident que cette approche est intrinsèquement incapable à décrire des
phénomènes de ségrégation (comme le pavage). Leur seul but est de simuler la quantité
totale de sédiments transportés.
K. Blanckaert Hydraulique fluviale et aménagement des cours d’eau – Transport de sédiments TS13
(ii) Approche sophistiquée : modèle multi-fraction
Cette approche consiste à diviser la courbe granulométrique en fractions, après avoir
éliminé une faible fraction (5%) des particules les plus fines et grossières :
!
1(100%) = ibi =" ib1 + ib2 + ...+ (5% +5%)
Pour chaque fraction, on détermine le diamètre moyen di et on calcule le débit solide
correspondant ibiq’sb en utilisant une formule de transport de sédiments. Pour tout le
mélange granulométrique, le débit solide se calcule alors comme :
!
qs = " q si# = ib1" q s1 + ib2
" q s2+ ...+
!
1(100%) =" q si
qs
# = isi# = ib1
" q s1
qs
+ ib2
" q s2
qs
+ ...+
En général, la courbe granulométrique des matériaux du lit diffère de celle des granulats
transportés, car ibi"isi. Par conséquent, les granulométries du lit et des sédiments en
transport sont différentes (voir figure 7), comme montré par leurs diamètres moyens :
!
dm
= ibidi" et
!
dsm
= isbidi" , respectivement
Figure 7 : Schéma des courbes granulométriques des matériaux du lit, L, et du lit pavé, La, du
transport par charriage, C, et en suspension (intrinsèque), S (SI)
Notons encore que les granulats d’une même taille se comportent différemment dans
une granulométrie uniforme ou étendue. Du fait de la structure de la matrice de
granulats non-uniformes, les particules fines sont protégées par les particules grossières
par imbrications, tandis que les particules grossières sont plus protubérantes et donc
plus exposées à l’écoulement.
K. Blanckaert Hydraulique fluviale et aménagement des cours d’eau – Transport de sédiments TS14
On en tient compte dans les formules de charriage au moyen d’un coefficient de
masquage (H qui multiplie la tension de frottement critique. La formule de Meyer-
Peter-Müller corrigée, par exemple, devient :
!
" i = 8(#$ %&H#$,cr )32 avec
!
"H =log(19)
log(19di dm )
#
$ %
&
' (
2
Pour d<dm, ce coefficient augmente la valeur de la tension de frottement critique, tandis
qu’il la diminue pour d>dm.
3.6 Conclusions
Même en adoptant toutes les simplifications possibles (situation 1D, écoulement uniforme,
sédiments sphériques et uniformes, sédiments non-cohésifs), le transport de sédiments reste
un problème extrêmement complexe. Une multitude de formules semi-empiriques ont été
proposées qui sont caractérisées par une précision limitée. Il est fondamental de garder à
l’esprit que ces formules ne doivent pas s’appliquer hors de leurs conditions
d’établissement.
Des facteurs complexes, comme une granulométrie étendue, l’incertitude sur la rugosité (voir
section suivante), un écoulement non-uniforme, ou encore une situation 2D, détériorent
encore la valeur prédictive des formules de transport.
Notons qu’une précision de 100% est aperçue comme un excellent résultat en transport de
sédiments (voir Figure 6.13 dans le livre). L’ingénieur devra donc toujours comparer les
prédictions de différentes formules de transport et interpréter avec prudence les résultats.
4 Modélisation de la rugosité, C
Dans la modélisation du transport de sédiments, on a admis que la tension de frottement au
fond,
!
"0 # =u$2
=g C2U2, est un paramètre connu de l’écoulement. Ceci revient à dire que la
rugosité du lit est connue.
Quoiqu’on connaisse la rugosité d’un lit de rivière plan composé de granulats, on ne connaît
pas la rugosité d’un lit avec du transport actif de sédiments. En effet, dès l’initiation du
transport de sédiments, le lit de la rivière devient instable et des formes du lit (ondulations du
lit) se manifestent.
K. Blanckaert Hydraulique fluviale et aménagement des cours d’eau – Transport de sédiments TS15
Ces formes du lit dépendent fortement des conditions hydrauliques et s’y adaptent
constamment comme illustré schématiquement par la figure 8. Dans le régime fluvial (Fr<1),
les dunes qui migrent vers l’aval sont la forme prépondérante des formes du lit. Autour de
l’écoulement critique (Fr!1), le lit redevient plan. Des antidunes, migrant vers l’amont, sont
les formes du lit caractéristique pour l’écoulement torrentiel (Fr>1).
October 2000course CT5311
13
Bedform types in rivers (Simons and Richardson, 1966)
Figure 8 : Schéma des types de formes du lit dans une rivière, selon Simons et Richardson (1966). Le
nombre de Froude augmente de A à H.
Ces formes du lit contribuent significativement à la rugosité du lit et donc à la tension de
frottement au fond, comme illustré dans la figure 9.
Il existe donc une interaction dynamique entre l’écoulement et la morphologie, appelée
morphodynamique. Le transport de sédiments, causé par l’écoulement, modifie la rugosité
de la rivière, qui à son tour détermine les propriétés de l’écoulement et donc le transport de
sédiments. L’écoulement, la rugosité et le transport de sédiments sont donc interdépendants.
Notons que l’augmentation de la rugosité due aux formes du lit diminuera la capacité
hydraulique de la rivière. Il est donc essentiel de tenir compte de l’adaptation de la rugosité
aux conditions hydrauliques dans l’élaboration des courbes de jaugeage d’une rivière (voir
paragraphe 5).
K. Blanckaert Hydraulique fluviale et aménagement des cours d’eau – Transport de sédiments TS16
Frottement au fond !b en fonction de la vitess moyenne U
!
"0#
=u$2
=g
C2 U2
!
"0
#=
$ " 0#
+$ $ " 0#
=g1
$ C 2 +1
$ $ C 2
% & ' (
) * U 2
!
"1
C2
=1
# C 2
+1
# # C 2
Rugosité totale =
Rugosité des granulats (connue) +
Rugosité des formes du lit (inconnue)
Figure 9 : Augmentation de la tension de frottement au fond et de la rugosité due aux formes du lit.
De nombreuses méthodes ont été proposées dans la littérature pour déterminer la rugosité
totale, ce qui est indicatif pour l’incertitude importante dans la prédiction de la rugosité. Ces
méthodes sont souvent associées à une formule de transport de sédiments précise, comme la
méthode de Einstein-Barbarossa (Figure 3.6 dans le livre).
En général, la procédure consiste à :
(i) Déterminer le type des formes du lit. La figure 10 montre la détermination du type
des formes de lit en fonction des paramètres hydrauliques et sédimentologiques,
selon la méthode de Van Rijn (1984), qui est couramment utilisée dans la pratique.
(ii) Déterminer les dimensions des formes du lit
(iii) Déterminer la rugosité des granulats et des formes du lit
(iv) Déterminer le frottement total au fond du lit
Les formules de transport de sédiments tiennent compte de l’augmentation de la rugosité due
aux formes du lit. La formule de Meyer-Peter-Müller, par exemple, multiplie la tension de
frottement au fond par un facteur de minoration qui exprime que seulement la rugosité due
aux granulats intervient dans le transport de sédiments :
!
" i = 8(#M$% & 'H$%,cr )32 avec
!
"M =KS
# K S
$
% &
'
( )
32
=rugosité totale
rugosité desgrains
$
% &
'
( )
32
K. Blanckaert Hydraulique fluviale et aménagement des cours d’eau – Transport de sédiments TS17
October 2000course CT5311
17
Figure 10 : Classification des formes du lit selon van Rijn (1984, 1989)
!
D*
=d" = d#s# $1
%2& ' ( )
* + 1 3
et
!
T =" # $ #
cr
#cr
avec
!
" # = $gu
" C
% & ' (
) *
2
et
!
" C =18log12h
3D90
.
K. Blanckaert Hydraulique fluviale et aménagement des cours d’eau – Transport de sédiments TS18
5 Application : courbes de jaugeage
Une application très importante des équations de Saint-Venant-Exner consiste à déterminer la
capacité hydraulique d’une rivière, par exemple dans le cadre de l’élaboration d’une carte de
dangers. Ceci a pour but d’identifier les endroits menacés par la rivière en cas de crue, en
comparant l’élévation de la surface libre au gabarit disponible de la rivière.
La détermination de la capacité hydraulique nécessite l’élaboration des courbes de jaugeage
liquide et sédimentologique, illustrées à la figure 11:
- La courbe de jaugeage liquide fournit la relation entre le débit Q et la profondeur
d’eau h. Cette relation est fortement déterminée par la rugosité C, qui varie avec le
débit à travers les formes du lit. Les irrégularités dans la relation Q-h (voir figure 11)
sont dues aux changements du type de formes du lit.
- A part la rugosité, la courbe de jaugeage sédimentologique fournit d’autres
informations essentielles. Lors du passage d’une crue, le transport de sédiments peut
fortement augmenter et entraîner un exhaussement important du lit de la rivière. Ceci
diminue la section de la rivière (distance entre fond et crête des berges diminue) et
donc sa capacité hydraulique. Notons encore les différences importantes entre les
courbes de jaugeage sédimentologique estimées à l’aide de différentes formules de
transport.
Figure 11 : Courbes de jaugeage liquide et sédimentologique (attention : échelle logarithmique)
K. Blanckaert Hydraulique fluviale et aménagement des cours d’eau – Transport de sédiments TS19
6 Application : analyse morphodynamique 1D
Admettons qu’une rivière rectangulaire prismatique (1D) soit en équilibre : l’écoulement
uniforme y est en équilibre avec le transport de sédiments. Donc chaque section de la rivière
est identique et les sédiments en mouvement transitent la rivière, sans modifier sa
morphologie.
La moindre perturbation de cet équilibre, que ce soit au niveau de l’écoulement (courbe de
remous dû à un barrage, changement de niveau d’un réservoir, etc) ou du débit solide
(blocage de sédiments par un barrage, apport par un tributaire, glissement de terrain,
extractions dans les gravières), provoquera une réaction de la rivière. La rivière tend toujours
à restaurer l’équilibre, en érodant ou aggradant le fond du lit. Quelques exemples sont donnés
à la figure 12.
Figure 12 : Quelques exemples de dégradation et d’aggradation
6.1 Solutions numériques
Les équations de Saint-Venant-Exner n’ont pas de solution analytique, mais doivent être
résolues à l’aide de méthodes numériques. Au lieu de chercher la solution (Q,h,u,z) en tous
points du plan (x,t), on la cherche sur le réseau de points discrets (xi, ti), obtenu en projetant un
maillage sur le plan (x,t). On distingue deux méthodes :
K. Blanckaert Hydraulique fluviale et aménagement des cours d’eau – Transport de sédiments TS20
La discrétisation des équations sur un maillage rectangulaire dans le plan (x,t) : figure
13a
Le réseau de points discrets (xi, ti) est obtenu en projetant un maillage rectangulaire avec des
éléments de taille (#x, #t) sur le plan (x,t). En approximant les dérivées partielles par des
quotients de différences finies, les équations de Saint-Venant sont réduites d’une forme aux
dérivées partielles à une forme algébrique. Comme mentionné au chapitre 5 « Ecoulement
Non Permanent », une multitude de schémas de discrétisation existe.
Figure 13 : (Gauche, Fig. 3a) Discrétisation des équations sur un maillage rectangulaire dans le plan
(x,t) ; (Droite, Fig. 3b) Discrétisation des équations sur un maillage défini par les caractéristiques ;
Notons que la figure montre uniquement les deux caractéristiques pour l’écoulement, mais pas la
troisième caractéristique pour le fond.
La méthode des caractéristiques : figure 13b
Au lieu de discrétiser les équations sur un maillage rectangulaire quelconque (#x, #t), on peut
exprimer les équations le long des caractéristiques, qu’on peut interpréter comme des lignes
dans le plan (x,t), le long desquelles les informations se propagent.
Le long de ces caractéristiques, les équations aux dérivées partielles de Saint-Venant-Exner
peuvent être réduites à une forme aux dérivées totales, plus simple à résoudre. Cependant, la
solution de ces équations aux dérivées totales passe toujours par des méthodes numériques
(discrétisation).
De plus, les caractéristiques indiquent clairement les types de conditions initiales et de
conditions aux bords qui doivent être imposés.
Le tableau 4 résume la dérivation des célérités des perturbations le long des caractéristiques.
K. Blanckaert Hydraulique fluviale et aménagement des cours d’eau – Transport de sédiments TS21
Simplifications :
!
" ="(#*) $ qs = qs (U) = qs
C
g
#0
%
&
' (
)
* + avec C connu
!
"h
"t+"Uh
"x=0
1
g
"U
"t+U
g
"U
"x+"h
"x+"z
"x= #Je
"z
"t+1
1# p
"qs"x
= 0
$
%
& & &
'
& & &
!
"U "t
"h "t
"z "t
#
$
% % %
&
'
( ( (
+
U g g
h U 0"qs "U
1) p0 0
#
$
% % % %
&
'
( ( ( (
"U "x
"h "x
"z "x
#
$
% % %
&
'
( ( (
=
)gJe
0
0
#
$
% % %
&
'
( ( (
" "t[ ] + cw[ ] " "x[ ] = A[ ]
avec cw les valeurs propres de la matrice
Equations aux dérivées totales le long des caractéristiques,
!
dx
dt=c
w "
d
dt=#
#t+
dx
dt
#
#x
!
" =cw
U
# =1
1$ p
1
h
dqsdU
%
& '
( ' )
!
"#3
+2#2" 1"Fr
"2" $Fr
"2( )# "$Fr"2 = 0
)=cw/U=célérité relative des perturbations à la surface et au fond
!
Fr < 0.6 ou Fr >1.2 " #1, #
2>> #
3
$ écoulement quasi-permanent
Variations de l’écoulement et du lit dissociables car
occurant à une autre échelle de temps
!
"1# c
w1U =1+Fr
$1: surface d'eau
"2
= cw 2
U =1$Fr$1
: surface d'eau
"3
= cw 3
U =% 1$ Fr2( ) : lit mobile
&
' (
) (
)1, )2 : voir écoulement non-permanent
Fr<1 $ )3>0 : migration avale des dunes
Fr>1 $ )3>0 : migration amont des antidunes
!
Fr ~ 1 " #1, #
2~ #
3
Variations de l’écoulement et du lit non-dissociables
car occurant à la même échelle de temps
Tableau 4 : Résumé de la méthode des caractéristiques pour la propagation des perturbations
K. Blanckaert Hydraulique fluviale et aménagement des cours d’eau – Transport de sédiments TS22
La méthode des caractéristiques nous fournit des informations physiques concernant la
propagation des perturbations. On retrouve les deux perturbations à la surface libre, déjà
étudiées au chapitre 5 « Ecoulement Non Permanent » ainsi qu’une perturbation au lit. Elle
nous quantifie la célérité de ces perturbations en fonction du nombre de Froude et de la
quantité de transport.
Le résultat principal de la méthode des caractéristiques est que les échelles temporelles des
perturbations de l’écoulement et du fond sont différentes de quelques ordres de grandeur, à
condition que le nombre de Froude n’avoisine pas 1. Ceci à des conséquences très
importantes :
- On peut traiter l’écoulement comme étant quasi-permanent. Cela revient à dire que le
changement du fond de la rivière est tellement lent que l’écoulement s’y adapte
instantanément. L’écoulement reste donc non-uniforme, mais permanent.
- Quand on étudie l’évolution à long terme du fond de la rivière (aggradation,
dégradation sur des décennies), on peut se dépasser des variations (relativement)
rapides du débit (typiquement quelques jours pour une crue), et il suffira souvent de
considérer un débit représentatif.
6.2 Solutions simplifiées analytiques pour Fr< 0.6 ou Fr>1.2
Même si la solution numérique des équations de Saint-Venant-Exner est possible, les
solutions simplifiées analytiques restent très utiles :
- Elles donnent une bonne approximation sans calcul lourd et indiquent notamment
l’ordre de grandeur des variables
- Elles quantifient l’influence des différents paramètres et donnent ainsi une meilleure
compréhension du problème que les solutions numériques
- Elles sont utiles pour la validation des schémas numériques.
Pour Fr<0.6 ou Fr>1.2, les échelles de temps de l’écoulement et de l’évolution du fond sont
dissociables et l’écoulement peut être considéré comme quasi-permanent. Si, de plus, on
admet que l’écoulement est quasi-uniforme, des solutions analytiques sont possibles. Les
équations de Saint-Venant-Exner sont réduites comme :
K. Blanckaert Hydraulique fluviale et aménagement des cours d’eau – Transport de sédiments TS23
!
"h
"t+"Uh
"x=0
1
g
"U
"t+
U
g
"U
"x+"h
"x+"z
"x= #Je
$
% &
' & (
"U
"x
U
g#
h
U
)
* +
,
- . +
"z
"x= #Je =#
U3
C2q
"z
"t+
1
1# p
"qs
"x= 0 (
"z
"t+
1
1#p
"qs
"U
"U
"x=0
$
%
& & &
'
& & &
!
"z
"t#K(x,t)
"2z
"x2=0 avec
!
K(x,t) =1
3
1
1" p
#qs#U
C2h
U
Si de plus, on néglige les variations spatio-temporelles de K, en prenant la valeur initiale K0,
l’équation peut être résolue analytiquement.
Les cas d’un canal en dégradation par abaissement du fond et d’un canal en aggradation par
augmentation de débit solide, #qs, sont traités en détail dans le livre, et résumé dans la figure
14.
!
"z
"t#K
"2
z
"x2= 0 avec
!
z(x,0) = 0
z(0,t) = "h
limx#$
z(x,t) = 0
%
& '
( '
!
z(x,t) = "h erfcx
2 Kt
# $ % &
' (
!
"z
"t#K
"2
z
"x2= 0 avec
!
z(x,0) = 0
z(0,t) = "h(t)
limx#$
z(x,t) = 0
%
& '
( '
!
z(x,t) = "h(t) erfcx
2 Kt
# $ % &
' (
avec
!
"h(t) ="qst
1.13(1# p) Kt
Figure 14 : Solution analytique pour des canaux en dégradation par abaissement du fond (gauche) et
en aggradation par augmentation de débit solide.
K. Blanckaert Hydraulique fluviale et aménagement des cours d’eau – Transport de sédiments TS24
7 Conclusions
Les notions de ce chapitre à retenir se résument:
- Le transport des sédiments et l’interaction dynamique entre l’écoulement et le
transport de sédiments sont des phénomènes dominants en hydraulique fluviale, à
toute échelle spatiale et temporelle, en environnement naturel comme construit.
- Deux modes de transport fondamentalement différents sont à distinguer : le transport
par charriage sous l’effet de la tension de frottement moyen au fond, et le transport en
suspension sous l’effet de la turbulence. Il est important de comprendre les principes
de leur modélisation.
- La modélisation du transport de sédiments est extrêmement complexe, même pour le
cas le plus simple : situation unidimensionnelle, écoulement uniforme, sédiments non-
cohésifs sphériques de taille uniforme. De nombreuses formules ont été proposées ;
elles sont limitées aux conditions (notamment d et Jf) utilisées pour leur établissement
et sont caractérisées par une faible précision.
Il est important de comprendre qualitativement l’influence des facteurs complexes
comme une granulométrie étendue, un écoulement non-uniforme ou une situation
tridimensionnelle.
Le jugement de l’ingénieur doit toujours se baser sur des prédictions faites au moyen
de plusieurs formules de transport et en tenant compte de ces facteurs complexes.
- Il est essentiel de comprendre l’interaction dynamique entre l’écoulement et le
transport de sédiments, qui se manifeste à travers des changements de la rugosité dus
aux formes du lit.
- Il est important de comprendre physiquement le résultat de la méthode des
caractéristiques, qui justifie le traitement découplé de l’écoulement et de la
morphologie si le nombre de Froude n’avoisine pas 1.
- Il est important de comprendre le principe des solutions numérique et analytique
(simplifiée) des équations de Saint-Venant-Exner.