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Travailler l’Histoire des Arts et le socle commun Valérie Krier, collège Paul Langevin à Avesnes-lez-Aubert Sylvie Pereira, collège Jean Moulin à Iwuy Académie de Lille Niveaux et entrées du programme 3 ème Formes du récit aux XXe et XXIe → récits porteurs d’un regard sur l’histoire Numérique et projet d’enseignement Le numérique permet aux élèves d’avoir une position réflexive et un regard critique sur leurs propres écrits. Il permet également d’amener les élèves, par le biais d'un travail tour à tour individuel et collectif, à construire pas à pas l'analyse personnelle d’une œuvre artistique ou littéraire partant de leur sensibilité. (BO, août 2008, p : 12-13 « Modalités de mise en œuvre ») Projet d'enseignement : les représentations de la Première Guerre mondiale à travers des textes et des images. Problématique : l'œuvre d'art rend-elle compte de l'horreur de la guerre ? Supports exploités - Tableau d’Otto Dix, «Die Skatspieler » - Groupements de textes extraits des récits de guerre du XXe s - Planche de B.D de Jacques Tardi, « Le trou d’obus » - Extrait du film de Jean-Pierre Jeunet, Un long dimanche de fiançailles, 2004 - Les écrits d’élèves Objectifs littéraires et culturels - lire et interpréter un texte - lire et interpréter un tableau - Mobiliser les savoirs et les savoir-faire développés en lecture analytique et les transférer vers l’étude picturale : établir des correspondances entre les œuvres littéraires et d'autres formes d'art, comme la peinture. Ressources numériques et outils informatiques mobilisés - logiciel Net Support School - traitement de texte - dictionnaires électroniques Compétences exercées Domaine : lire Item 3 : utiliser ses capacités de raisonnement, ses connaissances sur la langue, savoir faire appel à des outils appropriés pour lire Item 5 : manifester, par des moyens divers, sa compréhension de textes variés. Domaine : écrire Item 4 : utiliser ses capacités de raisonnement, ses connaissances sur la langue pour améliorer son texte. Domaine : faire preuve de sensibilité, d’esprit critique, de curiosité 1 : être sensible aux enjeux esthétiques et humains d’un texte littéraire 2 : être sensible aux enjeux littéraires et humains d’une œuvre artistique Les étapes du projet 1. Pas à pas vers l’analyse d’une œuvre artistique : amener la thématique et poser la problématique (HDA) 2. Lecture et analyse de documents de genres différents : effectuer des rapprochements et rédiger une synthèse 3. Exprimer sa sensibilité face à un texte littéraire 4. Améliorer un écrit en utilisant ses capacités de raisonnement et ses connaissances sur la langue 5. Lecture analytique d’un extrait de « J’ai tué » de Blaise Cendrars 6. Etude comparative avec une planche de B.D extraite de « Trou d’obus » de Jacques Tardi (HDA) 7. Travail final : effectuer des rapprochements entre une œuvre artistique et une œuvre littéraire

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Travailler l’Histoire des Arts et le socle communValérie Krier, collège Paul Langevin à Avesnes-lez-Aubert

Sylvie Pereira, collège Jean Moulin à Iwuy

Académie de Lille

Niveaux et entrées duprogramme

3ème

Formes du récit aux XXe et XXIe → récits porteurs d’un regard sur l’histoire

Numérique et projetd’enseignement

Le numérique permet aux élèves d’avoir une position réflexive et un regard critique surleurs propres écrits.Il permet également d’amener les élèves, par le biais d'un travail tour à tour individuel etcollectif, à construire pas à pas l'analyse personnelle d’une œuvre artistique ou littérairepartant de leur sensibilité. (BO, août 2008, p : 12-13 « Modalités de mise en œuvre »)Projet d'enseignement : les représentations de la Première Guerre mondiale à travers destextes et des images.Problématique : l'œuvre d'art rend-elle compte de l'horreur de la guerre ?

Supports exploités

- Tableau d’Otto Dix, «Die Skatspieler »- Groupements de textes extraits des récits de guerre du XXe s- Planche de B.D de Jacques Tardi, « Le trou d’obus »- Extrait du film de Jean-Pierre Jeunet, Un long dimanche de fiançailles, 2004- Les écrits d’élèves

Objectifs littéraires etculturels

- lire et interpréter un texte- lire et interpréter un tableau- Mobiliser les savoirs et les savoir-faire développés en lecture analytique et les transférervers l’étude picturale : établir des correspondances entre les œuvres littéraires et d'autresformes d'art, comme la peinture.

Ressources numériques etoutils informatiques

mobilisés

- logiciel Net Support School- traitement de texte- dictionnaires électroniques

Compétences exercées

Domaine : lireItem 3 : utiliser ses capacités de raisonnement, ses connaissances sur la langue, savoir faireappel à des outils appropriés pour lireItem 5 : manifester, par des moyens divers, sa compréhension de textes variés.Domaine : écrireItem 4 : utiliser ses capacités de raisonnement, ses connaissances sur la langue pouraméliorer son texte.Domaine : faire preuve de sensibilité, d’esprit critique, de curiosité1 : être sensible aux enjeux esthétiques et humains d’un texte littéraire2 : être sensible aux enjeux littéraires et humains d’une œuvre artistique

Les étapes du projet

1. Pas à pas vers l’analyse d’une œuvre artistique : amener la thématique et poser laproblématique (HDA)

2. Lecture et analyse de documents de genres différents : effectuer des rapprochementset rédiger une synthèse

3. Exprimer sa sensibilité face à un texte littéraire4. Améliorer un écrit en utilisant ses capacités de raisonnement et ses connaissances sur

la langue5. Lecture analytique d’un extrait de « J’ai tué » de Blaise Cendrars6. Etude comparative avec une planche de B.D extraite de « Trou d’obus » de Jacques

Tardi (HDA)7. Travail final : effectuer des rapprochements entre une œuvre artistique et une œuvre

littéraire

Pourquoi recourir au numérique ?

L'utilisation du numérique permet de multiplier, de varier les supports proposés aux élèves. Les supports,placés dans le dossier personnel de l'élève ou sur le dossier commun à la classe, sont très accessibles et peuvent êtreconsultés à n'importe quel moment de la séquence. Cette diversité de textes, d'images, d'extraits de film permetd'enrichir la séquence, d'aider les élèves à en comprendre la problématique, à donner du sens à des sujets parfoistrès éloignés de leurs préoccupations ou sans lien avec la réalité qu'ils connaissent.

Le numérique et plus particulièrement la salle pupitre pilotée par le logiciel Net Support School offre lapossibilité de mutualiser les travaux d'élèves et d'instaurer une dynamique de cours prenant appui sur les idées etles productions de chacun.

Introduction

Cette séquence se propose de faire découvrir aux élèves différentes représentations artistiques de la PremièreGuerre Mondiale. Elle permet non seulement de traiter plusieurs entrées du programme de lettres, en matière delecture et d'écriture, mais aussi de travailler l'histoire des arts, en cours de français.Pour l'enseignant, il s'agira de réfléchir avec eux, à la façon dont un artiste (écrivain, peintre, réalisateur,dessinateur) inscrit, dans son œuvre, réalité historique et jugement critique. Les élèves pourront ainsi se rendrecompte de la transversalité d'un thème et des différents vecteurs d'expression. Ils seront amenés à réagir, à réfléchiret à donner leur avis sur des textes, tableaux, extraits de films ayant pour thème la Première Guerre Mondiale.

Plan de la séquence

Séan

ce

1 lecture d'image : Pas à pas vers l’analyse d’une œuvre artistique

Objectifs : - partir d'une situation problème pour introduire la thématique et la problématique de la séquence- analyser une œuvre artistique

La 1ère séance introduit la thématique et la problématique de la séquence à partir d'une situation problème.L’activité est menée en salle pupitre.

Les élèves sont confrontés à un tableau dont toutes les références ont été supprimées : Die Skatspieler (Lesjoueurs de cartes) d'Otto DIX, 1920.

Annexes : Document 1

Etape 1

La consigne suivante leur est donnée : quelles sont vos impressions face à ce tableau ? Faites une réponseconstruite. Ils produisent alors un 1er jet. Les élèves sont invités à écrire ce qu’ils ressentent à la découverte de cetableau, volontairement donné sans références pour éviter l’identification trop rapide. Le but ici est d’amener lesélèves à formuler un 1er avis qui sera ensuite enrichi.

Au bout de quelques minutes, on observe ce qu’ils ont écrit :

(Dans un souci de lisibilité, les fautes d'orthographe ont été corrigées)

Anaïs Alix

Version 1: « Ce tableau est très étrange. On ne

comprend pas tout à fait le sens du tableau ni le message

que veut faire passer le peintre en peignant le tableau.

On peut apercevoir qu'il manque des membres du corps

à certains personnages présents sur le tableau. Les

personnages de ce tableau sont bizarres car leurs

membres du corps ne sont pas des membres normaux. »

Version 1 : « Pour moi le tableau me paraît vieux et

bizarre. Les personnages sont étranges et mal formés, ils

ont tous des jambes de bois. On dirait que les

personnages sont mis à l'écart. »

Etape 2

Après quelques minutes de réflexion, on leur demande d'ouvrir le document 2 ( Annexes : Document 2)avecles références du tableau qui leur permettra soit de conforter leurs premières impressions, soit de recadrer et guiderleur réflexion. Ils produisent alors un 2ème jet.Les bascules d'écrans permettent alors des échanges et des confrontations et enrichissent les travaux de chacun .

Ce travail permet de mettre en évidence les connaissances et les savoir-faire des élèves sur une œuvreartistique et de mettre en valeur les difficultés que certains rencontrent pour exprimer leur sensibilité face à uneœuvre artistique. (Il s'agit de les confronter à la réalité d'une situation qu'ils connaîtront en fin d'année au cours del'épreuve d'HDA et de dédramatiser la situation).

Anaïs Alix

Version 2: « Ce tableau représente 3 hommes,

Allemands, en train de jouer aux cartes. Il leur manque

des parties du corps car ces hommes ont participé à la

Première Guerre Mondiale. Ils ont été abîmés par la

guerre et maintenant sont presque rafistolés avec des

morceaux d'autres corps mais ils sont encore invalides. »

Version 2 : «Ce tableau illustre 3 personnages qui jouent

aux cartes. Ils sont mal formés, il manque un œil à un

personnage, une main à un autre... Ils ont tous des

jambes de bois car ils n'ont pas de jambes. Le tableau a

été peint après la guerre, les personnages pourraient

être des survivants. »

Etape 3

A ce moment-là de la séance, en prenant les bonnes idées des uns et des autres, le professeur met au tableauune liste de mots clés que les élèves vont pouvoir utiliser afin de nourrir leur commentaire. On constate alors que lesintuitions des deux premiers écrits deviennent alors de vraies analyses.

Les exemples ci-dessous correspondent à un troisième jet d'écriture. Ils rendent compte de la netteamélioration des écrits des élèves qui ont assimilé individuellement les remarques faites à la classe lors de la miseen commun des deuxièmes jets.

Anaïs Alix

Version 3 : « Ce tableau a été peint en 1920 par Otto Dix et se

nomme «Les joueurs de cartes ». Cette scène représente 3

personnes jouant aux cartes dans un café. Ces 3 personnes

sont des Allemands, on peut le deviner grâce aux journaux

écrits en Allemand derrière et aussi grâce à la croix de fer sur

le personnage en bleu. Ce tableau manque de réalisme car les

hommes sont représentés étrangement.

Les 3 hommes sont démantibulés et mutilés … Presque

déshumanisés. Certains ont une mâchoire de fer, des mains de

bois et des jambes de bois, ils sont presque des objets, ils sont

réifiés. Les pieds des personnages de ce tableau sont des pieds

de chaises que le peintre a représentés en les emmêlant. En

représentant les personnages de cette façon le peintre a voulu

montrer les dégâts de la guerre et faire référence aux «

gueules cassées » qu'il y a eu lors de la guerre. L'arrière-plan

du tableau est sombre, il y a juste un luminaire allumé dans

lequel on peut apercevoir des yeux. Le tableau est oppressant,

il est très serré sur les personnages, comme pour montrer

qu'ils sont emprisonnés par un manque de liberté. Le jeu de

carte représente la guerre car pour jouer aux cartes, il faut de

la chance et de la stratégie comme pour aller combattre sur

les champs de bataille. Le mouvement utilisé par le peintre est

l'expressionnisme qui consiste a représenter le mal être. »

Version 3 : « Ce tableau, intitulé «les joueurs de cartes» a été

peint par Otto DIX en 1920. On peut voir 3 personnages qui

jouent aux cartes. Ils sont dans un café. Ce sont des allemands,

on peut voir à l'arrière-plan des journaux allemands ainsi qu'un

personnage qui porte une croix de fer allemande sur son torse.

Ils sont assis autour d'une table. Les personnages ont été

représentés de manière irréelle. Les personnages sont

démantibulés, mutilés, ce sont des gueules cassées. Ils sont

même déshumanisés : ils ressemblent à des robots, le

personnage de droite a une mâchoire en fer et une main en

bois et ils ont tous les 3 des jambes de bois. Otto DIX a voulu

dénoncer les dégâts causés par la guerre. Les personnages

ressemblent même à des objets : ils sont réifiés, on confond

les pieds des chaises avec les jambes des personnages. Au

centre du tableau, on voit le jeu de carte. Il y a une dénotation

avec celui-ci, il représente la chance et le hasard ainsi que la

stratégie. Le jeu de cartes symbolise la guerre, avec la stratégie

des combats. Le fond est noir mais une lumière claire apparaît.

Un visage est présent sur cette lumière, c'est peut être celui du

peintre. C'est un tableau expressionniste. »

Activité alternative possible (Annexes, Documents 2b-2c)

Séan

ce

2 lecture : Lecture et analyse de documents de genres différents

Objectifs : - Lire et effectuer des rapprochements entre différents documents littéraires et artistiques- faire la différence entre le témoignage et la littérature engagée- montrer que l'engagement peut prendre diverses formes

ETAPE 1 : Lecture, première heure (salle pupitre ou salle traditionnelle)

Un pêle-mêle de documents comportant des extraits de romans, des poèmes, une planche de BD, unechanson est distribué. Tous ces documents ont la guerre pour thème commun. (Annexes : Document 3)

Documents :- Apollinaire, "C'est un banquet que s'offre la terre..."- Apollinaire, « Si je mourrais là-bas, ... », Poèmes à Lou- Tardi, Le Trou d'obus, B.D.- René Jacob, Paroles de poilus, Lettres et carnets du front- Joseph Kessel et Maurice Druon, Le chant des partisans- Henri Barbusse, Le Feu- Céline, Voyage au bout de la nuit

Lecture personnelle :

Dans un premier temps, les élèves se livrent, par groupes de deux, à une lecture des documents. Ils doiventles identifier (auteur, œuvre, date, genre....), puis faire des rapprochements entre les différents documents pour entrouver les points communs.

Deux exemples de productions :

Tri de textes (Iola)

Certains de ces documents parlent de la première guerre mondiale et un parle de la seconde.

→ Point communs entre tous ces documents :

-Ils ont tous un rapport avec la guerre.-Ils parlent tous des morts de guerre

-Ils dénoncent les catastrophes causées durant la guerre.-Tous ces documents ont été écrits par une personne qui a vécu ou vu ce «drame» et ces atrocités sûrement, des anciens soldats.

→ Différence entre tous ces documents :

-Ils n'ont pas le même auteur.-Ils sont écrits de différentes manières ( Textes 1et 3: Poèmes et calligramme; Texte 6: Chant; Textes 2 et 4 :textes descriptifs; Texte 7:Planche d'uneBande Dessinée; Texte 5: Lettre ).

Points communs entre textes précis:-Les documents 1, 3 et 6 sont en vers bien que le document 6 soit un chant.

-Les documents 2 et 4 ont un rapport avec le feu ( les combats, les armes, la guerre)-Les récits 2, 4 et 7 parlent des corps déchiquetés d'obus, de la fumée, de l'odeur effroyable, des mitrailleuses et de leurs camarade qui ont périt prèsd'eux.

-Les documents 3 et 5 racontent leur « mort » à leurs « amours ».-Les documents 2,4,5 sont des récits de guerre.

Différences entre textes précis:-Le document 1 est une métaphore.

Tri de textes analyse (Marine)

→ Établir des points communs et des différences entre les textes.

Dans ces sept documents, le thème évoqué est la guerre-mondiale, certains évoquent la 1ère Guerre-mondiale, un autre, la Seconde.

Ils ont été écrits de manières différentes : calligramme, chanson, récit, bande-dessinées et même sous forme de lettre.Le document 1 est une métaphore.Les documents 1,3 et 6 sont écrits en vers.

Les documents 3 et 6 contiennent des rimes alors que le document 1 ne rime pas.Les documents 2 et 4 sont en rapports avec le feu ( explosions des obus, tous les tirs des soldats,...).Les documents 3,5 et 7 montrent les dégâts humains durant les combats : corps déchiquetés, la fumée, les odeurs effroyables, les odeurs de

charniers, les mitrailleuses,...Les documents 3 et 5 raconte l'horreur de la guerre, la peur de mourir et de ne plus revoir leur famille ni leur bien-aimée : l'amour s'arrête avecla guerre.

Le document 7 est une page extrait d'un Bande-dessiné qui nous invite à voir les dégâts de la guerre grâce aux images.Le document 5 est une lettre écrite par René Jacob pour sa femme.Ces documents ont peut-être été écrits par des anciens soldats qui racontent les atrocités de la guerre qu'ils ont vécues.

Oral :

Mise en commun des premières réactions face au groupement.Après confrontation, ce travail nous permet de dégager collectivement le thème et de montrer les différences entrele témoignage, la dénonciation par le récit et par la poésie d'où l'idée que l'engagement peut prendre des formesdiverses.

ETAPE 2 ( salle pupitre )La 1ère étape de la séance trouve un prolongement naturel dans l’écriture. C’est en salle pupitre que les

élèves effectuent ce travail, ce qui permet de faciliter les échanges entre élèves et de retravailler plus aisément lesécrits. Les élèves disposent donc des documents dans leur H/travail en plus des documents « papier ». On leurdemande de rédiger une synthèse de tout ce qui a été dit.Pour les guider dans leur travail, deux questions leur sont posées :

1) Quelle thématique peut-on dégager de cet ensemble de documents ?2) Cette thématique est-elle traitée de la même façon dans tous les textes ? Justifiez votre réponse en prenant appui sur lesdocuments (les citer en exemples).

Les bascules d'écrans facilitent l’échange entre les élèves. Il s'agit de recadrer et d'approfondir leurspropositions.

Ils sont invités à surligner les principaux faits de langue observés dans les textes, les procédés lexicaux,grammaticaux et stylistiques qui produisent des effets (il ne s’agit en aucun cas d’entrer dans une analyseapprofondie de chaque document). Ce travail sera réinvesti et approfondi dans leurs écrits de la séance suivante.Ils ont alors la possibilité de revenir sur leurs documents pour les compléter.

Par plusieurs bascules d'écrans, quelques pistes sont dégagées en guise de correction, sachant qu'aucuncorrigé type ne sera donné afin de ne pas figer les documents dans un genre avec des critères formels trop sériés.

Les élèves ont noté :- que l'on pouvait « dire ou représenter la guerre » par le biais de genres différents : récit (Le Feu, Voyage au bout

de la nuit), poème (Si je mourais là-bas, C'est un festin … ), chant (Le chant des partisans), BD.- que les auteurs pouvaient retranscrire des événements auxquels ils avaient participé (Apollinaire, le soldat René

Jacob) ou qu'ils transposaient des faits qu'ils connaissaient sans pour autant les avoir vécus. (Céline, Tardi)- que certains auteurs cherchaient à dénoncer (Céline, Barbusse), d'autres à témoigner (le soldat René Jacob),

d'autres usaient d'une tonalité plus lyrique (Apollinaire)

Exemples de synthèses réalisées à l'issue de la séance :

Synthèse des documents (Anthony) 1er Jet

Ces sept documents sont tous en rapport avec la guerre, mais ils en parlent différemment. Les textes sont tous écrits pardes auteurs engagés. Ils donnent beaucoup d'arguments sur ce thème. Les documents sont divisés en deux types : lesdénonciations et les témoignages.

Le premier document (Apollinaire) dénonce la guerre à travers la métaphore : «C'est un banquet que s'offre la terre...».

Le troisième document (Apollinaire) parle de la guerre avec un lexique mélioratif et des oppositions : «un bel obussemblable aux mimosas en fleur». Ce texte est une lettre d'adieu destinée à une personne précise, contrairement aux autresdocuments qui s'adressent à tout le monde.

Le septième document (Tardi) est une bande dessinée qui fait référence à la guerre avec le champ lexical de lasouffrance : «Il ressentit comme une déchirure, une douleur, la souffrance, il n'avait presque pas mal etc».

Le cinquième document (lettre) est une sorte de page de journal intime dénonçant la guerre. Celui qui l'a écrit vivait lesévènements au moment même.

Le sixième document est un poème chanté par la Royal Air Force lorsque la France était occupée par les Allemands. Ilest devenu l'hymne de la lutte pour la Libération. Ce chant incite les résistants à participer au combat.

Le deuxième document (Barbusse) est un témoignage qui utilise le chant lexical du feu : «flammes, détonations,

explosifs, cratères etc».

Le septième document (Céline) dénonce la guerre avec un lexique effrayant : «l'odeur pointue de la poudre et du soufrenous restait comme pour tuer les punaises et les puces de la terre entière ; qui venait d'éclater comme l'autre nous l'avait appris ;rien qu'une ouverture au dessus du cou, avec du sang dedans qui mijotait en glouglous comme de la confiture dans la marmite».

2ème jet

Le thème de la guerre est présent dans tous les documents à travers un champ lexical répétitif, celui de la souffrance :«une déchirure, une douleur, la souffrance, sang...». Les textes sont tous écrits par des auteurs engagés. Ces derniers écriventsous forme de poème, de lettre, de journal, de roman ou même de bande dessinée. Les documents sont divisés en deux types : lesdénonciations et les témoignages.

Certains auteurs dénoncent la guerre, comme Guillaume Apollinaire avec «Calligrammes», Louis-Ferdinand Célinedans «Voyage au bout de la nuit»... Ces dénonciations sont très argumentées. Pour exprimer les horreurs de la guerre, des auteursutilisent des figures de style. Notamment la métaphore dans le premier document ainsi que l'antithèse dans le troisième.

D'autres textes sont des témoignages très descriptifs qui font ressortir la réalité, que les narrateurs aient vécu directementou non la guerre. Par exemple, Henri Barbusse utilise le lexique des sensations pour transmettre plus facilement ce qu'il a vécupendant la guerre.

Synthèse (Manon)

Tous les documents traitent du même thème, celui de la guerre. Certains sont des témoignages, c'est-à-dire qu'il s'agit de laréalité qui a eu lieu ici à un moment de la guerre, certains de ces témoignages sont directs, comme le document 5 qui raconte cequi s'est passé au front, il met en valeur les nombreux cadavres qui l'entouraient « des cadavres noirâtres, verdâtres, décomposés», «des cadavres de chevaux, plus douloureux encore que des cadavres d'hommes », il met aussi en valeur l'odeur de la mort «une odeur effroyable », « une odeur de charnier, monte de toute cette pourriture ». Dans le document 2, l'auteur raconte et décritdes moments précis de la bataille, « On voit, on sent passer près de sa tête des éclats avec des cris de fer rouge dans l'eau », « jele ramasse en chancelant et repars tête baissée dans la tempête à lueurs de fauves »

D'autres sont des dénonciations, l'auteur donne son point de vue, c'est donc subjectif et il critique, c'est de l'argumentation, « c'estune bien grande charogne en moins dans le régiment. » dans la document 4, « C'est un banquet que s'offre la terre » dans ledocument 1. Les témoignages et les dénonciations sont bien différents. Ce sont tous des auteurs engagés, mais l'engagement sefait sous diverses formes, certains documents sont des lettres, des bandes dessinés ou encore des poèmes...Selon la forme,certains peuvent être plus convaincants que d'autres et sont plus faciles à retenir.

Certains documents s'adressent directement à quelqu'un par exemple « Le chant des partisans », « La lettre des poilus»... Certains documents incitent à combattre, à agir comme « Le chant des partisans »

Ces documents traduisent l'horreur et à la souffrance de la guerre grâce à certaines expressions employées comme «pénétrèrent sans peine sa chair », « souffrance allait au-delà de la souffrance »

Séan

ce

3 écriture : Exprimer sa sensibilité face à un texte littéraire

Objectifs : - exprimer sa sensibilité face à un texte littéraire.- exprimer son opinion de façon cohérente.- utiliser ses connaissances sur la langue et ses capacités de raisonnement pour lire.

ETAPE 3 ( salle pupitre ) séance d'écriture :

Les élèves sont alors amenés à exprimer leur sensibilité face à un texte littéraire. Le travail se déroule en sallepupitre et la consigne suivante leur est donnée :

Choisissez l'extrait qui vous touche le plus (sensibilité du lecteur) en vous justifiant (pourquoi cet extrait-là plus qu'unautre ? Appuyez-vous sur les procédés lexicaux, grammaticaux...) Les élèves doivent s'appuyer, pour réaliser ce travail,sur les analyses effectuées dans la séance précédente.

Séan

ce

3 écriture : Améliorer un écrit en utilisant ses capacités deraisonnement et ses connaissances sur la langue

Objectifs : - améliorer un écrit en tenant compte des remarques et des propositions- utiliser ses capacités de raisonnement, ses connaissances sur la langue pour améliorer son texte- apprendre à construire et à organiser sa pensée

Après correction (les copies ne sont pas notées), des difficultés ou maladresses récurrentes apparaissentcomme en témoignent les Copies d’Axel et d’Antoine (Annexes, Documents 4 et 5). Elles concernent :

l' enchaînement des idées

« L'extrait 5 m'a le plus marqué car c'est une lettre qu'un soldat écrit pour décrire ce qui s'est passé aprèsles combats; les massacres qui s'y sont déroulés, le traumatisme du narrateur qui a vu cette scène, les cadavrestotalement déchiquetés, l'odeur de charnier, les soldats qui ont survécu sont, eux, en train d 'enterrer ou derecouvrir les corps de ceux qui n'ont pas eu la chance de survivre. L' auteur fait une comparaison entre un rideaude théâtre et le champ de bataille lorsqu'il arrive au sommet de la colline. » l'élève n'établit pas de lien entre ses idées, parataxe.

la difficulté à ne pas paraphraser le texte :

« C'est un homme tué à la bataille de Verdun en 1916. Il a laissé derrière lui sa femme et ses enfants à causede la guerre. Il parle exclusivement de mort et de carnage. Il parle des cadavres qu'on calcine et qu'on enterre. Etl'odeur de charnier qui nous prend à la gorge.” l'élève raconte le texte plus qu'il ne l'analyse : paraphrase

l'insertion des exemples :

« Dans ce document, il y a le champ lexical de la douleur : « perforant, irrémédiables dégâts, déchirures,douleur et souffrance ».

la relation logique entre un procédé littéraire et son effet sur la réception du texte.

« L' auteur fait une comparaison entre un rideau de théâtre et le champ de bataille lorsqu'il arrive ausommet de la colline ». l'élève a repéré une figure de comparaison mais ne l'exploite pas.

Quels outils construire avec les élèves pour les aider à améliorer leur écrit ?

Référence au socle commun :ECRIREUtiliser ses capacités de raisonnement, ses connaissances, savoir faire appel à des outils pour améliorer un texte.

Pour les aider à améliorer leur première version, des documents sont proposés aux élèves : une réflexioncollective, à partir de deux copies anonymées. Comment séparer le procédé et les citations, quand et commentintroduire une citation, comment éviter les répétitions, comment exprimer sa sensibilité, son avis, avec quels mots ?

Annexes, Document 6 «Améliorer un écrit » / Document 7 « Fiche-aide 1 » / Document 8 « Fiche-aide 2 » /Document 9 « Fiche-aide 3 », réalisée avec Lexilogos

Travail amélioré (Annexes, Document 10_choix_Laura_amélioré et Document 11_choix_Gwenegan_amélioré)

Prolongement :

Les élèves visionnent un extrait du film « Un long dimanche de fiançailles », adapté du roman de SébastienJaprisot par Jean-Pierre Jeunet. Il s'agit d'une scène de bataille particulièrement violente sur laquelle les élèvesdoivent réagir. Ils devront exprimer leur ressenti et réfléchir à la façon dont l'horreur est transmise, dans les texteslus et dans cet extrait de film. L'objectif de l'activité consiste à amener les élèves à établir des correspondancesentre les domaines artistiques, correspondances dans la visée d'une œuvre mais aussi dans les moyens utilisés poury parvenir.

(Annexes, Document 12_extrait_Jeunet et Document 13_ressenti_élèves)

Séan

ce

5 lecture : Lecture analytique d’un extrait de « J’ai tué » de BlaiseCendrars

Extrait de "J'ai tué" de Blaise Cendrars. (Annexes, Document 14_Cendrars)

Axe d’étude : le récit de l'horreur : mise en évidence des procédés utilisés par l'auteur pour transcrire l'horreur vécuesur le champ de bataille

Trace écrite rédigée par les élèves.

Les procédés lexicaux et grammaticaux étudiés font l’objet d’une fiche récapitulative à la fin de laséquence.

Séan

ce

6 lecture : Etude comparative d'un texte et d' une planche de B.Dextraite de « Trou d’obus » de Jacques Tardi (HDA)

Objectifs :- montrer qu’un texte et une image peuvent exprimer la même idée- mobiliser les savoirs et les savoir-faire développés en lecture analytique et les transférer vers l’étude

picturale.

Planche de B.D de Tardi extraite de "Le trou d'obus".

Etape 1

On propose alors aux élèves la planche de BD de Tardi (Annexes, Document 15_Tardi) qu’ils connaissentpuisqu’elle faisait partie du groupement de documents (séance 2).

On prend le temps de revenir sur la synthèse de lecture analytique que quelques élèves lisent à la classe.

On leur demande alors de comparer les deux documents et d’en mettre en valeur les points communs (travailoral / échange). Les élèves connaissent les deux documents et n’ont pas de mal à faire ressortir les idées principales.Ils ont ainsi constaté qu’ils transcrivent tous deux la violence et l’horreur d’un champ de bataille mais avec desmoyens spécifiques à chaque genre. (Annexes, Document 16_Tardi_Cendrars)

Etape 2 :

A ce stade, les élèves ont montré comment la planche de B.D transcrit l’horreur et la violence en mobilisantleurs connaissances sur ce genre :

- Les couleurs sombres et le rouge du sang qui gicle et le jet des balles mis en valeur- Le visage du personnage de Faucheux qui figure la mort (cadavre / squelette…)- Les onomatopées : bruits de mitrailleuses + cris du personnage de Binet- Les traits et l’expression des personnages (yeux, la bouche) ainsi que leurs gestes- enfin, le récitatif (texte) où domine avec le champ lexical de l’horreur, de la souffrance…

Pour pouvoir aller plus loin dans l’analyse, on leur propose un travail d’approfondissement sur le genre de laB.D. : lexique spécifique, procédés particuliers (ellipse temporelle, ellipse spatiale…).

Les élèves s’étant familiarisés avec ce genre, on leur propose alors de faire une analyse plus approfondie. Dansun premier temps, ce travail se fait essentiellement à l’oral, puis les élèves rédigent une synthèse à l’écrit. Cetteanalyse donne lieu à la constitution d’une fiche d’histoire des Arts.

Séan

ce

6 lecture-écriture : Effectuer des rapprochements entre une œuvreartistique et une œuvre littéraire

Objectif : associer une image et un texte et justifier l'appariement de manière argumentée

Les élèves doivent être maintenant capables d’entrer dans l’analyse d’un texte et d’une image de manière plusaisée, en mobilisant leurs connaissances.

On propose différents documents (textes et images) aux élèves. (Annexes, Documents 17 et 18)

Ils doivent apparier un texte et une image de leur choix en justifiant leur association de manière argumentée.Ils devront pour cela réinvestir :

- Les savoirs et savoir faire développés lors des séances de lecture analytique (repérage de procédés, effetsproduits, expression d’un ressenti…)

- La méthodologie construite lors des séances d’écriture.

Exemples de productions d'élèves (Annexes, Documents 19 et 20)

BILAN DES USAGES DU NUMERIQUE

Intérêt et enjeux de l’exploitation du numérique

Le numérique apporte clarté et lisibilité dans les différents documents servant de supports (textes, images,écrits…). En effet, le support visuel du travail de chacun peut être mis à disposition des autres tout en servant desupport visuel pour celui qui doit expliciter sa démarche : mutualisation, négociation du sens, passage à l’oral. Parailleurs, il favorise l’échange au sein de la classe et la position réflexive de l’élève. L'utilisation du numérique créeune dynamique de travail : il permet de varier très rapidement et très facilement les supports et d'inscrire l'élève aucœur des apprentissages.

Effets sur la gestion de classe

Le numérique permet de ne pas isoler l’élève dans son travail puisqu’il favorise la concentration de l’élève et lacirculation de la parole dans la classe. L’enseignant peut répondre aux besoins de chaque élève de manière plusaisée. Il permet également au professeur de prendre appui sur le travail de tous, de faire s'alterner les moments detravail individuel, les reprises collectives, et les retours personnels et réfléchis sur un écrit initial.

Ecueils à éviter

Les moments d’observation sur les différents supports doivent rester suffisamment courts pour maintenir unedynamique de la séance.

L’utilisation de l’outil informatique dans la séance ne doit en aucun cas se faire à l’exclusivité de tous lesautres : le cahier est toujours utilisé comme support privilégié pour l’appropriation des notions et commeprolongement de l’activité menée en salle pupitre.

ANNEXE 1

Otto Dix, «Die Skatspieler », Les joueurs de skat, 1920Huile et collages sur toile

ANNEXE 2

La chambre des officiers / Les joueurs de skat

Document 1 : Marc Dugain, La Chambre des officiers, J-C Lattès, 1998

Ce roman évoque le quotidien d’Adrien, « gueule cassée » de la Grande Guerre. Jeune ingénieur officier, il est

défiguré par un obus dès les premiers jours de la guerre et hospitalisé au Val-de-Grâce- à Paris.

L’auteur de ce roman écrit en 1998, Marc Dugain, accompagnait enfant son grand-père à « La maison des

gueules cassées » de Moussy-le-Vieux, château qui avait accueilli les mutilés du visage de la Première Guerre

mondiale.

Document 2 : Extrait du film La chambre des officiers, François Dupeyron, 2001

www.youtube.com/watch?v=8mWLMJCSekE

Document 3

Otto Dix, « Les joueurs de cartes », 1920.

Montrez en quoi les œuvres d’Otto Dix et de Marc Dugain traitent différemment du même sujet.

Pour vous aider, vous pouvez commencer par présenter et décrire chaque support : texte, extrait de

film et image et vous interroger sur les moyens utilisés par les auteurs pour rendre compte de l'horreur

de la guerre.

ANNEXE 3

Représenter la guerre. Des textes et des images.

Document 1 : « C'est un banquet que s'offre la terre... »

La Terre qui se nourrit de ses propres enfants. Telle est la représentation de la guerre que propose

Guillaume Apollinaire (1880-1918). Engagé volontaire en 1914, il est grièvement blessé en 1916.

(...)

C'est un banquet que s'offre la terre

Elle a faim et voici son festin de Balthasar cannibale

Qui aurait dit qu'on pût être à ce point anthropophage

Et qu'il fallût tant de feu pour rôtir le corps humain

Guillaume Apollinaire, Calligrammes, 1918.

Balthasar : roi biblique à qui le prophète Daniel avait prédit la fin de son royaume.

Anthropophage : mangeur d'hommes.

Document 2 : Le feu

Brusquement, devant nous, sur toute la largeur de la descente, de sombres flammes s'élancent en frappant l'air de

détonations épouvantables. En ligne, de gauche à droite, des fusants sortent du ciel, des explosifs sortent de la terre.

C'est un effroyable rideau qui nous sépare du monde, nous sépare du passé et l'avenir. On s'arrête, plantés au sol,

stupéfiés par la nuée soudaine qui tonne de toutes parts ; puis un effort simultané soulève notre masse et la rejette en

avant très vite. On trébuche, on se retient les uns aux autres, dans de grands flots de fumée. On voit, avec de stridents

fracas et des cyclones de terre pulvérisée, vers le fond, où nous nous précipitons pêle-mêle, s'ouvrir des cratères ça et

là, à côté les uns des autres, les uns dans les autres. Puis on ne sait plus où tombent les décharges. Des rafales se

déchaînent si monstrueusement retentissantes qu'on se sent annihilé par le seul bruit de ces averses de tonnerre, de ces

grandes étoiles débris qui se forment dans l'air. On voit, on sent passer près de sa tête des éclats avec leur cri de fer

rouge dans l'eau. À un coup, je lâche mon fusil, tellement le souffle d'une explosion m'a brûlé les mains. Je le ramasse

en chancelant et repars tête baissée dans la tempête à lueurs fauves, dans la pluie écrasante des laves, cinglé par des jets

de poussière et de suie. Les stridences des éclats qui passent vous font mal aux oreilles, vous frappent la nuque, vous

traversent les tempes, et on ne peut retenir un cri lorsqu'on les subit. On a le cœur soulevé, tordu par l'odeur soufrée.

Les souffles de la mort nous poussent, nous soulèvent, nous balance On bondit ; on ne sait pas où on marche. Les yeux

clignent, s'aveuglent et pleurent, la vue est obstruée par une avalanche, qui tient toute la place.

Henri Barbusse, Le Feu, 1916

Document 3 : « Si je mourais là-bas … »

Si je mourais là-bas sur le front de l'armée

Tu pleurerais un jour ô Lou ma bien-aimée

Et puis mon souvenir s'éteindrait comme meurt .

Un obus éclatant sur le front de l'armée

Un bel obus semblable aux mimosas en fleur

Et puis ce souvenir éclaté dans l'espace

Couvrirait de mon sang le monde tout entier

La mer les monts les val et l'étoile qui passe

Les soleils merveilleux mûrissant dans l'espace

Comme font les fruits d'or autour de Baratier

Lou si je meurs là-bas souvenir qu'on oublie

- Souviens-t-'en quelquefois aux instants de folie

De jeunesse et d'amour et d'éclatante ardeur -

Mon sang c'est la fontaine ardente du bonheur

Et sois la plus heureuse étant la plus jolie

Ô mon unique amour et ma grande folie

30 janvier 1915, Nîmes.

La nuit descend

On y pressent

Un long destin de sang

Guillaume Apollinaire, Poèmes à Lou, 1947

Document 4 : Sous le feu

Après ça, rien que du feu et puis du bruit avec. Mais alors un de ces bruits comme on ne croirait jamais qu'il en existe.

On en a eu tellement plein les yeux, les oreilles, le nez, la bouche, tout de suite, du bruit, que je croyais bien que c' était

fini, que j'étais devenu du feu et du bruit moi-même.

Et puis non, le feu est parti, le bruit est resté longtemps dans ma tête, et puis les bras, et les jambes, qui tremblaient

comme si quelqu'un vous les secouait de par-derrière. Ils avaient l'air de me quitter, et puis ils me sont restés quand

même dans mes membres. Dans la fumée qui piqua les yeux encore pendant longtemps, l'odeur pointue de la poudre et

du soufre nous restait comme pour tuer les punaises et les puces de la terre entière.

Tout de suite après ça, j'ai pensé au maréchal des logis Barousse qui venait d'éclater comme l'autre nous l'avait appris.

C'était une bonne nouvelle. Tant mieux ! que je pensais tout de suite ainsi : « C'est une bien grande charogne en moins

dans le régiment. » [...]

Quant au colonel, lui, je ne lui voulais pas de mal. Lui pourtant aussi il était mort. Je ne le vis plus, tout d'abord. C'est

qu'il avait été déporté sur le talus, allongé sur le flanc par l'explosion et projeté jusque dans les bras du cavalier à pied,

le messager, fini lui aussi. Ils s'embrassaient tous les deux pour le moment et pour toujours, mais le cavalier n'avait plus

sa tête, rien qu'une ouverture au-dessus du cou, avec du sang dedans qui mijotait en glouglous comme de la confiture

dans la marmite.

Louis-Ferdinand Céline, Voyage au bout de la nuit, 1932.

Document 5 : Lettre de Poilus

René Jacob a été tué à Verdun en 1916. Il laissait derrière lui sa femme et ses trois enfants

1915

Comment décrire ? Quels mots prendre ? Tout à l'heure, nous avons traversé Meaux, encore figé dans

l'immobilité et le silence, Meaux avec ses bateaux-lavoirs(1) coulés dans la Marne et son pont détruit. Puis

nous avons pris la route de Soissons et gravi la côte qui nous élevait sur le plateau du nord... Et alors,

subitement, comme si un rideau de théâtre s'était levé devant nous le champ de bataille nous est apparu

dans toute son horreur.

Des cadavres allemands, ici, sur le bord de la route, là, dans les ravins et les champs, des cadavres

noirâtres, verdâtres, décomposés, autour desquels sous le soleil de septembre, bourdonnent des essaims

de mouches ; des cadavres d'hommes qui ont gardé des poses étranges, les genoux pliés en l'air ou le bras

appuyé au talus de la tranchée ; des cadavres de chevaux, plus douloureux encore que des cadavres

d'hommes, avec des entrailles répandues sur le sol ; des cadavres qu'on recouvre de chaux ou de paille, de

terre ou de sable, et qu'on calcine ou qu'on enterre. Une odeur effroyable, une odeur de charnier(2), monte

de toute cette pourriture. Elle nous prend àla gorge, et pendant quatre heures, elle ne nous abandonnera

pas. Au moment où je trace ces lignes je la sens encore éparse autour de moi qui me fait chavirer le coeur.

En vain le vent soufflant en rafales sur la plaine s'efforçait-il de balayer tout cela : il arrivait à chasser les

tourbillons de fumée qui s'élevaient de tous ces tas brûlants ; mais il n'arrivait pas à chasser l'odeur de la

mort. « Champ de bataille », ai-je dit plus haut. Non, pas champ de bataille, mais champ de carnage. Car

les cadavres ce n'est rien. En ce moment, j'ai déjà oublié leur centaines de figures grimaçantes et leurs

attitudes contorsionnées. Mais ce que je n'oublierai jamais, c'est la ruine des choses, c'est le saccage

abominable des chaumières, c'est le pillage des maisons...

René Jacob, extrait de Paroles de poilus, Lettres et carnets du front (1914-1918).

(1) Bateaux-lavoirs : bâtisses construites au bord de la rivière où les femmes venaient laver le linge

(2) Charnier : lieu où l'on dépose des cadavres

Document 6 : « Le chant des partisans », M. Druon, J. Kessel, 1943

Document 7 : « Le trou d'obus », Tardi (Manuel Fleurs d'encre 3ème, Hachette)

ANNEXE 4

Copies d'élèves

Axel

Choisissez l'extrait ou le document qui vous touche le plus et justifiez votre choix en vous appuyant sur des

procédés lexicaux ou grammaticaux.

Version 1:

L'extrait 5 m'a le plus marqué car c'est une lettre qu'un soldat écrit pour décrire ce qui s'est passé après les

combats; les massacres qui s'y sont déroulés, le traumatisme du narrateur qui a vu cette scène, les

cadavres totalement déchiquetés, l'odeur de charnier, les soldats qui ont survécu sont, eux,en train

d 'enterrer ou de recouvrir les corps de ceux qui n'ont pas eu la chance de survivre. L' auteur fait une

comparaison entre un rideau de théâtre et le champ de bataille lorsqu'il arrive au sommet de la colline. Il

utilise le champ lexical de la mort: «cadavres, décomposés, des entrailles répandues sur le sol, qu'on

calcine et qu'on enterre, une odeur de charnier, cette pourriture, l'odeur de la mort, champ de carnage... »

Antoine

Version 1 :

L'extrait qui m'a le plus marqué est l'extrait numéro 5 car c'est une lettre d'un père de famille à ses enfants

et à sa femme. Il est écrit pendant la 1er guerre mondiale et raconte l'atrocité des champ de batailles et

l'horreur qu' impose la vue de ces cadavres... ces morts de guerre. C'est un homme tué à la bataille de

Verdun en 1916. Il a laissé derrière lui sa femme et ses enfants à cause de la guerre. Il parle exclusivement

de mort et de carnage. Il parle des cadavres qu'on calcine et qu'on enterre. Et l'odeur de charnier qui nous

prend à la gorge.

ANNEXE 5

Fiche aide àl'écriture 1Améliorer un écrit en tenant compte des remarques et des propositions

en utilisant ses capacités de raisonnement, ses connaissances sur la langue

Copie n°1

J’ai préféré la planche de BD de Tardi qui montredes personnages pendant la guerre.Dans ce document, il ya le champ lexical de ladouleur : « perforant, irrémédiables dégâts,déchirures, douleur et souffrance ».Les couleurs sont sombres, ça fait ressentir unpeu l’angoisse. A la dernière image, on voit unpersonnage qui se fait tuer, on voit les traits despersonnages qui souffrent et il ya lesonomatopées qui montrent la douleur. L’auteurmontre ce qu’il se passait pendant la guerre 14-18.On voit vraiment que c’est la guerre, on voit unpersonnage avec une arme en train de tirer surun soldat. Les onomatopées qui montrent que lesoldat tire.

Précise pourquoi c’est ce document que tu aschoisi

Quel effet produit ce champ lexical ?

Exemples précis ? on peut compléter avecd’autres procédés liés à l’image.

Exemples ?

Comment ? Insérer la justification de manièrecohérente.Exemple ?

1ère étape

Quelles remarques face à ce travail ? Je recueille bien sûr toutes les remarques pertinentes.

Je veux les amener au fait que cet élève n’a pas exprimé clairement pourquoi il avait choisi ce document, ce qui l’a

marqué dans ce document.

On essaiera de déterminer ce qui l’a touché dans ce document (surlignage de ce qu’on peut considérer comme des

impressions) → mise en valeur de ce qui l’a marqué (l’auteur transcrit de manière réaliste la souffrance des

personnages durant la guerre).

A partir de là, mise en place d’une fiche lexique « exprimer son opinion ».

2ème étape

Surlignage des procédés qui justifient cette idée.

Constats :

On remarque qu’il ya peu de procédés ; l’élève a eu tendance à dire ce qu’il voyait.

Quand il ya des procédés, l’élève n’a pas pris appui sur des exemples et n’a pas exprimé l’effet produit…

3ème étape

On corrige de manière collective, chacun apportant ses idées (échange et partage).

Mise en place d’une fiche de critères à suivre pour améliorer le travail.

Copie n°2

Le texte de Henri Barbusse, extrait de « Le feu »,est celui qui m’a le plus touché.Avec les procédés lexicaux, il nous fait plongerdans l’histoire comme si on y était : exemple, leprésent de l’indicatif mélangé au passé composéqui nous donne l’impression de réel.Le champ lexical de la guerre : « détonation,explosifs… » ou l’expression des sens : « on voitde stridents fracas », « par le seul bruit »…L’utilisation de « on » dans « on trébuche », « ons’arrête » ou « qui nous sépare », toutes ceschoses nous donnent des impressions deréalisme et de nombreux repères spatiauxcomme « en lignes, de gauche à droite… ».Pour conclure Henri Barbusse raconte et décritdes choses qu’il a vécues pendant la guerred’une manière réaliste.

ExemplesIl peut exprimer dés le début pourquoi il a choisicet extrait

Exemples

Il y a deux procédés, séparer chacun d’euxPréciser l’effet produit

Nommer le procédéCe n’est pas le même pronom

C’est un autre procédé ; revoir la phrase

Surlignage en jaune : les impressions (ce qui l’a touché dans le document)

Surlignage en bleu : les procédés qui illustrent son ressenti

Surlignage en rose : les exemples qui illustrent les procédés cités

C’est le même travail qui s’effectue à travers cette copie mais il est axé sur la justification des idées par les procédés

et l’insertion des exemples à l’appui.

A l’issue de ce travail, les élèves reprennent leurs écrits (enregistrés dans leur h/travail) et l’améliorent. Ils disposent

des fiches lexique « exprimer son opinion » et « organiser sa pensée » ainsi que de la grille de critères mise en place.

Fiche aide à l'écriture 2

Comment améliorer mon travail ?

Exprimer sa sensibilité

Je justifie mon choix de document (pourquoi m’a-t-il touché plus qu’un

autre ? quel ressenti ? qu’est-ce qui m’a marqué ? …)

J’utilise la fiche lexique « exprimer sa sensibilité » pour exprimer mon

ressenti

Justifier son choix

Je justifie mes idées par des procédés lexicaux, grammaticaux…

Je cite un ou des exemples à l’appui du ou des procédés nommés

J’exprime l’effet produit par ces procédés (qui doit être en rapport avec

ce que j’ai ressenti)

Organiser ses idées

Je vérifie que mes idées s’enchaînent de manière cohérente

J’utilise, si c’est nécessaire, la fiche lexique « organiser ses idées », par

exemple pour insérer les exemples

Fiche aide à l'écriture 3

Des mots pour organiser vos idées

Les différents emplois Les connecteurs

• Pour développer une idée

- expliquer, prouver

- ajouter un élément

- insister

- atténuer

- c'est-à-dire, en d'autres termes, en effet,effectivement, de fait

- d'ailleurs...

- même, notamment, voire...

- du moins, tout au moins...

• Pour enchaîner des idées (valeur logique :l’addition)- ajouter une idée

- énumérer

- comparer des idées

- hiérarchiser des idées

- et, de plus, en outre, par ailleurs

- d'abord, aussi, encore, ensuite, enfin, d'une part....d'autre part, non seulement... mais aussi...

- ainsi que, de même que, comme, de la mêmemanière

- avant tout, en premier lieu, principalement,surtout...

• Pour confronter des idées- une opposition

- une concession

- mais, or, néanmoins, toutefois, au contraire,cependant, pourtant, en revanche, alors que, tandisque

- malgré, en dépit de, bien que, quoique, certes...mais

• Pour établir un rapport de cause à effet

- la cause

- la conséquence

- car, en effet, parce que, puisque, comme, en raisonde, grâce à...

- donc, par conséquent, en conséquence, si bien que,si... que...

• Pour exprimer le but - pour, afin de, en vue de, dans le but de, pour que,afin que...

• Pour exprimer l'hypothèse - à condition de, en cas de ; si, au cas où...

• Pour insérer des exemples - par exemple, ainsi, comme...

ANNEXE 6

Fiche aide à l'écriture 4

Exprimer sa sensibilité

VERBES

Préférer

Séduire

Charmer

Attirer

Captiver

Emouvoir

Fasciner

SYNTAGME :

verbes + noms

exprimant un

sentiment ou une

émotion

(admiration, plaisir,

etc.)

Susciter…

Procurer…

Produire…

Causer…

Provoquer…

Occasionner…

ADJECTIFS

Emouvant

Touchant

Saisissant

Poignant

Bouleversant

Impressionnant

Troublant

Exprimer sa sensibilité

ANNEXE 7

Copies amélioréesLaura

Sujet : Choisissez l'extrait qui vous touche le plusen justifiant votre réponse

Appuyez-vous sur les procédés lexicaux,grammaticaux ...

1er jet

« Paroles de Poilus, Lettres et carnets du front» d'Henri Jacob est l'extrait qui me touche le plus carc'est celui qui m'a le plus marquée de tous les textes.J'aime particulièrement les textes littéraires lorsqu'ilsont la forme d'un journal, où l'auteur témoigne d'unfait réel, historique. Ce texte est une lettre datant de1915 qui est destinée à tout le monde. C'est untémoignage « direct » de ce qu'il se passait à cemoment-là sur le front comme le montre « Aumoment où je trace ces lignes ». Au début, ilcommence par ces deux questions « Commentdécrire ? Quels mots prendre ? » qui montrent quel'auteur est subjectif. L'auteur utilise le champlexical de l'horreur « cadavres, entrailles, tranchée,poses étranges ... ».

Bien que ce texte soit un témoignage, c'estaussi une dénonciation. L'auteur exprime donc sonpoint de vue.Il m'a le plus touché aussi car l'auteur a utilisé unvocabulaire « marquant », on voit à quel point cetteguerre l’a marqué.

Sujet : Choisissez l'extrait qui vous touche le plusen justifiant votre réponse

Appuyez-vous sur les procédés lexicaux,grammaticaux ...

2ème jet« Paroles de Poilus, Lettres et carnets du front »d'Henri Jacob est l'extrait qui me touche le plus carc'est celui qui m'a le plus marqué de tous les textes.J'aime particulièrement les textes littéraires lorsqu'ilsont la forme d'un journal, où l'auteur témoigne d'unfait réel, historique. Ce texte est une lettre datant de1915 qui est destinée à tout le monde. C'est untémoignage « direct » de ce qu'il se passait à cemoment-là sur le front comme le montre « Aumoment où je trace ces lignes ».Au début, il commence par ces deux questions «Comment décrire ? Quels mots prendre ? » quimontrent que l'auteur est subjectif et accentue le faitqu'il ne sait pas par quoi commencer dans son récit.On a l'impression d'être à la place du narrateur, devivre l'action en même temps que lui notamment parl'utilisation du présent de l'indicatif « nous prend », «bourdonnent » et des pronoms personnels « On » et «Je » « qu'on calcine », « on recouvre », « je trace », «je la sens ». Le champ lexical de l'horreur «cadavres, entrailles, tranchée, poses étranges ... »traduit l’horreur et l’angoisse du personnage en lafaisant partager au lecteur.

Bien que ce texte soit un témoignage, c'estaussi une dénonciation. La réalité est rendue par unlexique très péjoratif « pourriture », « odeur decharnier », « effroyable carnage » et par l'utilisationdu suffixe « âtre » qui accentue ce dégoût : « descadavres noirâtres, verdâtres ». L'auteur exprimedonc son point de vue.L’intervention du narrateur dans « Champ deBataille, ai-je dit plus haut. Non, pas champ debataille, mais champ de carnage » renforce encoreplus cette idée de subjectivité.Tout ces procédés éveillent chez le lecteur unecertaine angoisse notamment par son vocabulaire «marquant, choquant » . On arrive à se mettre dans lapeau du personnage. On voit comment cette guerre asuscité chez lui cette horreur, cette crainte etcomment il nous la transcrit.

Gwenegan

1er jet

Le Feu, Henri Barbusse, 1916

L'extrait qui m'a le plus plustouché est le témoignage d'HenriBarbusse, « Le Feu ».Il raconte etdécrit ce qu'il a vécu pendant unmoment précis de la guerre . Quand oncommence à lire ce texte, on est toutde suite plongé dans le récit. On avraiment l'impression que noussommes en train de courir en évitantles bombes qui jaillissent de partout.On ressent presque ce qu'il ressent. Cerécit m'a plu pour sa réalité.

2ème jet

L'extrait qui m'a le plus touché estle témoignage d'Henri Barbusse,« Le Feu » car il est très réaliste etfait ressentir ce que vit l'auteur.En effet, avec l'utilisation despronoms « on » : « on s'arrête », «on trébuche » et « nous » : « nousnous précipitons » nous sommesdirectement projetés dans lemoment. Le lexique des sensations: « on voit », « on sent » accentue leressenti.Le système du présent accentuecette impression de réalité : « on nesait » et « je lâche » qui nous plongeencore plus dans le récit.Henri Barbusse veut nous faireressentir ce qu'il a vécu auparavant.Il a voulu être réaliste et nous fairecomprendre que la guerre estsanglante et terrifiante.

ANNEXE 8

J'ai tué, Blaise Cendrars,1918

On a vu la mer phosphorescente des tranchées (...) Des feux, des brasiers, des explosions.

C'est l'avalanche des canons. Le roulement. Les barrages1. Le pilon. Sur la lueur des départs2 se

profilent éperdus des hommes obliques, l'index d'un écriteau, un cheval fou (...) Nous nous entassons

dans les parallèles de départ, fous, creux, hagards, mouillés, éreintés et vannés. Longues heures

d'attente. On grelotte sous les obus. Longues heures de pluie. Petit froid. Petit gris. Enfin l'aube en

chair de poule. Campagnes dévastées. Herbes gelées. Terres mortes. Cailloux souffreteux. Barbelés

crucifères. L'attente s'éternise. Nous sommes sous la voûte des obus. On entend les gros pépères entrer

en gare3. Il y a des locomotives dans l'air, des trains invisibles, des télescopages, des tamponnements

(...)4 Grincements. Chuintements. Ululements. Hennissements. Cela tousse, crache, barrit, hurle, crie et

se lamente (…) Bouche apocalyptique (…) d'où plongent des mots inarticulés, énormes comme des

baleines saoules. Cela s'enchaîne, forme des phrases, prend une signification, redouble d'intensité.

Sifflet d'argent. Le colonel s'élance les bras ouverts. C'est l'heure H. On part à l'attaque la cigarette

aux lèvres. Aussitôt les mitrailleuses allemandes tictaquent. Les moulins à café tournent. Les balles

crépitent. On avance en levant l'épaule gauche, l'omoplate tordue sur le visage, tout le corps désossé

pour arriver à se faire un bouclier de soi-même. On a de la fièvre plein les tempes et de l'angoisse

partout. On est crispé. Mais on marche quand même, bien aligné et avec calme (...) On est entouré de

flammes et de fumées. Et c'est une peur insensée qui vous culbute dans la tranchée allemande (...) Pas

de répit. « En avant! En avant! » On ne sait pas d'où vient l'ordre. Et l'on repart (…) Maintenant on

marche dans de l'herbe haute. On voit des canons démolis, des fougasses5 renversées, des obus semés

dans les champs. Des mitrailleuses vous tirent dans le dos. Il y a des Allemands partout. Il faut

traverser des feux de barrage. De gros noirs autrichiens6 qui écrabouillent une section entière. Des

membres volent en l'air. Je reçois du sang plein le visage. On entend des cris déchirants (...) On voit

des grappes de cadavres, ignobles comme les paquets des chiffonniers; des trous d'obus, remplis

jusqu'au bord comme des poubelles, des terrines pleines de choses sans nom, du jus, de la viande, des

vêtements et de la fiente. Puis, dans les coins, derrière les buissons, dans un chemin creux, il y a les

morts ridicules, figés comme des momies (...) Il y a là-bas un village à enlever. C'est un gros morceau.

Le renfort arrive. Le bombardement reprend. Torpilles à ailettes, crapouillots7. Une demi-heure, et

nous nous élançons. Nous arrivons à vingt-six sur la position. Prestigieux décor de maisons croulantes

et de barricades éventrées. Il faut nettoyer8 ça.

1 Tirs d’artillerie.2 Il s’agit des « départs » d’artillerie. La nuit sur un champ de bataille on de dispose pas d’autre lumière quecelle des explosions et de fusée éclairantes.3 « Gros pépères » : façon d’appeler certains obus de calibre moyen que l’on identifiait au bruit.4 Dans les récits de la Première Guerre mondiale on assimile souvent le bruit des obus à celui des trains (àvapeur à cette époque.5 Obstacle métallique appartenant à une fortification.6 Obus de gros calibre particulièrement ravageurs.7 Petit canon envoyant des charges légères mais très dangereuses.8 En vocabulaire militaire « nettoyer » c’est exterminer les survivants de l’attaque.

ANNEXE 9

Tardi, Le trou d'obus

ANNEXE 10Tardi/Cendrars

Copie d'élève : AlixMise en relation de la planche de BD de Tardi et du texte de Cendrars

Dans un paragraphe construit et illustré, établissez une comparaison entre les documents de Tardi et de Cendrars.Insistez sur ce qui les unit.Listez les points communs entre les deux œuvres.

Les deux documents dénoncent tous les deux la guerre.

Les deux auteurs de ces œuvres insistent sur la violence et les dégâts causés par ces deux guerres.

Les descritpions sont faites pour créer un effet de réel et marquer le lecteur.

Idées générales Détails communs Exemples

Récit d'attaque - Conditions de vie des soldats

-Souffrance

-Artillerie lourde

-Tranchées

-Atrocité de la guerre

-Les soldats ont froid et sont mouillés : « fous, creux, hagards,

mouillés, éreintés et vannés » ligne 4 et « On grelotte sous les

obus. Longues heures de pluie » ligne 5, « nous nous

entassons » Dans sa planche, Tardi dessine de la boue, des

endroits insalubres avec plein de cadavres... , il pleut, c'est

gris.

- Les soldats sont sur le champ de bataille : « mer

phosphorescente» « les parallèles de départ » « campagnes

dévastées, herbes gelées.... » « vous culbute dans la

tranchée allemande » comme les personnages sur la planche

de Tardi.

- La souffrance des soldats : « des membres volent en l'air »,

« des grappes de cadavres » « on est crispé » je reçois du

sang plein le visage » Tardi réalise un soldat déjà mort, il ne

reste plus que son cadavre, ses os, les traits de visage sont

squelettiques.

Réalisme

- Descriptions

- Présent de narration

- Le bruit des explosions

L'attaque est racontée au présent de narration pour rendre le

récit encore plus réaliste : « Nous nous entassons », « on

grelotte »

Le bruit des explosions : Les onomatopées dans la BD de

Tardi « TAC TAC TAC …. ! » Cendrars utilise le procédé de la

métaphore : « l'avalanche des canons » « les gros pépères

entrent en gare » « des locomotives dans l'air »

Volonté de

frapper le lecteur

Vocabulaire imagé ou gros plans

pour décrire ou montrer l'horreur

Images sanglantes, gros plan sur le cadavre du soldat.

Dénonciation de

la guerre

-Guerre = Mort = Souffrance «On voit des frappes de cadavres, ignobles comme les

paquets des chiffonniers; des trous d' obus, remplis jusqu'au

bord comme des poubelles, des terrines pleines de choses

sans nom, du jus, de la viande, des vêtements et de la fiente»

(Cendrars)

ANNEXE 11

Document 17 / Evaluation

Représenter la guerre : des textes et des images

Evaluation finale

Gino Severini, Canon en action, 1915, huile sur toile, 50 x

60 cm, Museum Ludwig.

Fernand Léger,

La Partie de cartes, 1917

Otto Dix, Lichtsignale (Signaux lumineux),

1917, gouache sur papierFélix Vallotton, Les barbelés, 1916,

xylographie, 25,2 x 33,5 cm,

Galerie Paul Vallotton, Lausanne.

Tardi, C’était la guerre des tranchées, 1998

ANNEXE 11

Textes de l'évaluation

Texte 1 : un extrait de Erich Maria Remarque, A l’Ouest rien de nouveau, 1928

Texte 2

Sur le terrain vague et sale et malade, où de l’herbe desséchée s’envase dans du cirage, s’alignent

des morts. On les transporte là lorsqu’on en a vidé les tranchées ou la plaine, pendant la nuit. Ils attendent

– quelques-uns depuis longtemps – d’être nocturnement amenés aux cimetières de l’arrière.

On s’approche d’eux doucement. Ils sont serrés les uns contre les autres ; chacun ébauche avec les

bras ou les jambes un geste pétrifié d’agonie différent. Il en est qui montrent des faces demi-moisies, la

peau rouillée, jaune avec des points noirs. Plusieurs ont la figure complètement noircie, goudronnée, les

lèvres tuméfiées et énormes : des têtes de nègres soufflées en baudruche. Entre deux corps, sortant

confusément de l’un et de l’autre, poignet coupé et terminé par une boucle de filaments.

D’autres sont des larves informes, souillées, d’où pointent de vagues objets d’équipement ou des

morceaux d’os. Plus loin, on a transporté un cadavre dans un état tel qu’on a dû, pour ne pas le perdre en

chemin, l’entasser dans un grillage de fil de fer qu’on a fixé ensuite aux deux extrémités d’un pieu. Il a été

ainsi porté en boule dans ce hamac métallique, et déposé là. On ne distingue ni le haut, ni le bas de ce

corps ; dans le tas qu’il forme, seule se reconnaît la poche béante d’un pantalon. On voit un insecte qui en

sort et y rentre.

Autour des morts volettent des lettres qui, pendant qu’on les disposait par terre, se sont échappées

de leurs poches et de leurs cartouchières. Sur l’un de ces bouts de papier tout blanc, qui battent de l’aile à

la bise, mais que la boue englue, je lis, en me penchant un peu, une phrase : « Mon cher Henri, comme il

fait beau pour le jour de ta fête ! » L’homme est sur le ventre ; il a les reins fendus d’une hanche à l’autre

par un profond sillon ; sa tête est à demi retournée ; on voit l’œil creux et sur la tempe, la joue et le cou,

une sorte de mousse verte a poussé.

Une atmosphère écœurante rôde avec le vent autour de ces morts et de l’amoncellement de

dépouilles qui les avoisine : toiles de tentes ou vêtements en espèce d’étoffe maculée, raidie par le sang

séché, charbonnée par la brûlure de l’obus, durcie, terreuse et déjà pourrie, où grouille et fouille une

couche vivante. On en est incommodé. Nous nous regardons en hochant la tête et n’osant pas avouer tout

haut que ça sent mauvais. On ne s’éloigne pourtant que lentement.

Henri Barbusse, Le Feu, 1916.

Texte 3 : un extrait de Roland Dorgelès, Les Croix de bois, 1919

Texte 4 : un extrait de Maurice Genevoix, Ceux de Quatorze, « Nuits de guerre », 1917

Texte 5 : Laurent Gaudé, Cris, 2001

L’action de Cris se déroule dans les tranchées. Le roman est écrit sous la forme de monologues, à travers les

voix de douze soldats. Jules, le permissionnaire, va retrouver la vie normale à l’arrière, mais il est poursuivi par l’image

de ses camarades…

Texte 6

Karl Fritz était un caporal de l’armée allemande. Il appartenait au 10e bataillon de chasseurs, 2e compagnie.

Argonne le 16 août 1916

Chers parents et chères sœurs,

Le 2, à Saint-Laurent, nous avons entendu le signal de l’alerte. On est venu nous chercher avec des véhicules, et on

nous amenés jusqu’à quelques kilomètres du front de Verdun. […]

Vous ne pouvez pas avoir idée de ce qu’on a vu là-bas. Nous nous trouvions à la sortie de Fleury, devant le fort de

Souville. Nous avons passé trois jours couchés dans les trous d’obus à voir la mort de près, à l’attendre à chaque

instant. Et cela, sans la moindre goutte d’eau à boire et dans une horrible puanteur de cadavres. Un obus recouvre les

cadavres de terre, un autre les exhume à nouveau. Quand on veut se creuser un abri, on tombe tout de suite sur des

morts. Je faisais partie d’un groupe de camarades, et pourtant chacun ne priait que pour soi. Le pire, c’est la relève,

les allées et venues. A travers les feux de barrage continus. Puis nous avons traversé le fort de Douaumont, je n’avais

encore jamais rien vu de semblable. Là, il n’y avait que des blessés graves, et ça respirait la mort de tous côtés. En

plus, nous étions continuellement sous le feu. Nous avions à peu près quarante hommes morts ou blessés. On nous a

dit que c’était somme tout assez peu pour une compagnie. Tout le monde était pâle et avait le visage défait. Je ne

vais pas vous en raconter davantage sur notre misère, je pense que ça suffit. Nous étions commandés par un certain

adjudant Uffe. On ne l’a pas vu. Mais le Seigneur m’est venu en aide. Là-dessus, nous sommes repartis aussitôt pour

Spincourt où on nous a chargés sur des véhicules à destination de Grandpont, puis nous sommes revenus en deux

jours à nos positions devant Chapelle, où nous sommes maintenant un peu mieux installés.

Je vais aussi écrire à Guste. Je vous embrasse de tout cœur et vous recommande à Dieu.

Votre fils et frère reconnaissant.

Karl.

Paroles de Poilus, Lettres et carnet du front (1914-1918).

ANNEXE 12

Copies d'élèves - évaluation finale

Anthony

Évaluation Finale

Les représentations de la guerre.

Texte : Laurent Gaudé, Cris, 2001.

Image : Félix Vallotton, Les Barbelés, 1916.

J'ai choisi le texte de Laurent Gaudé : « Cris » et je l'ai associé à l'image de Félix Vallotton : « LesBarbelés».

Les deux oeuvres se rapprochent notamment par le contexte : cadavres au sol, durant la nuit, dans lestranchées. L'image est constituée de blanc et noir, pour bien faire la différence entre le sol et le ciel. On al'impression de se trouver sur un lieu de carnage avec les barbelés qui sont dispersés tout le long, les hommesà plat ventre contre la terre. Le texte de Laurent Gaudé est un monologue. Ceci crée une impression desolitude chez le personnage principal, Jules. Sur l'image, on voit la même chose car la scène est vide. Le sensde l'ouïe est très présent dans ce texte, comme dans le titre « Cris » : « Je les entends, mais le tumulte desvoix est là, je les écoute ». Le personnage essaye de ne plus entendre les voix, en vain. Ce que Jules entendest peut être le fruit de son imagination, c'est-à-dire qu'il pense que ses « frères » lui parlent.

Par ailleurs, cette solitude est accentuée par beaucoup de répétitions. La majorité du texte estcomposée de phrases courtes, précédant souvent des points de suspensions. Le personnage s'en sert commeune forme de persuasion. Celle-ci lui disant de fuir le champ de bataille. Le paysage alentour est décrit defaçon très détaillée : « enjambant les ruisseaux, escaladant les murets, me frayant un passage à travers leshauts bosquets d'herbes folles et d'orties ». Contrairement aux autres textes dont le thème est la guerre, on neressent pas l'horreur qu'elle dégage mais le traumatisme qu'elle crée.

Ces deux oeuvres traduisent donc toutes les deux la solitude du soldat, enfermé dans sa souffranceaprès avoir vécu les atrocités de la guerre.

Alexis

Évaluation Finale

Les représentations de la guerre.

Le texte qui m'a le plus touché est le texte n°2 de Roland Dorgelès extrait de « Les croix debois,1919 » que j'ai associé au tableau de Gino Severini intitulé « Canon en action ».

Ces deux documents mettent en valeur les horreurs de la guerre.

En effet, lorsque l'on regarde le tableau de Gino Severini, on remarque au premier plan un canonaccompagné de deux soldats, peut-être Français car on voit écrit sur le tableau « France puissance », ce canonnous le retrouvons dans le texte qui m'a touché celui de Roland Dorgelès qui parle d'un canon de tranchée:« Un canon de tranchée tirait ». On peut également rapprocher le fait d'être dans une tranchée car dans letableau on voit des formes ondulées vertes qui nous font penser à de l'herbe et un canon posé sur une formede couleur marron qui peut représenter de la terre. Les deux soldats ainsi que le canon sont dans unetranchée. Le texte lui nous en parle dès le début car il commence par une scène qui se passe dans unetranchée : « Ses compagnons sont dans la tranchée. ».

La violence aussi est mise en valeur : dans le tableau l'auteur a dispatché des mots violents, choquants un peupartout sur l'oeuvre : « éventrement, feu, puissance, immensité etc... ». Le texte lui nous le fait savoir enutilisant un lexique péjoratif : « Des hommes s'abattaient, des balles miaulaient, des petits flocons de grenade,il fit quelques mètres en titubant et roula... » On remarque aussi que la peur est omniprésente dans le texte etdans la peinture : « On voit que les soldats sont retournés et donc qu'ils ont peur de recevoir un coup ». Lespersonnages crient, courent, sautent : « On se jetait a plat ventre, En avant !, Ricordeau courait sans sebaisser. » Tout ceci nous montre la peur et provoque un effet d'angoisse.

Pour conclure ce texte m'a autant touché que cette peinture car les auteurs n'utilisent pas les même techniquemais expriment la même idée : les horreurs de la guerre.