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ÉTUDES A LA RÉUNION

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ÉTUDES SUR

LA SORCELLERIE A LA RÉUNION

(Désir et Réalité)

de Gérard Mouls

Préface de Jean-François SAM-LONG

Photo couverture Noël Chane-Fo

Editions UDIR - Collection Anchaing - 1982

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PRÉFACE

Ne vous est-il pas déjà arrivé de vous sentir sous le coup d'événe- ments malheureux et étranges ? D'être la victime d'une maladie mystérieuse et bizarre ? Ces douleurs que vous ressentez au niveau de l'abdomen, du dos, de la tête ? Ces accidents inexplicables ? Tous ces malheurs qui vous tombent dessus à l'improviste sans que vous avez le temps de reprendre votre souffle ?... Vous n'avez plus d'appétit, ni goût à la vie. La nuit, il vous est impossible de fermer l'œil. Et puis, tous ces spasmes divers qui vous secouent le corps à la manière d'un courant électrique ? Où trouver refuge ?...

Bien sûr, vous avez consulté votre médecin traitant, puis un autre, encore un autre... sans résultat. Echec total. Oh ! les faits «maléfiques» remontent à de nombreuses années déjà. Depuis quand exactement ? Comment cela a-t-il commencé ? Vous ne le savez plus trop bien. Il vous est pénible de penser, surtout avec ces troubles de mémoire qui vous causent une angoisse perpétuelle. Vous avez peur de perdre votre emploi. Vos relations avec l'autre sont médiocres, la vie familiale est un fardeau, la société prend figure de persécutrice. Chaque jour est un cauchemar et vous n'avez plus la force de lutter. Vos défenses rationnelles ont volé en éclats. Contre qui faut-il lutter ? A qui se fier ? Se confier ?

Mon Dieu ! un peu de lumière dans ce tunnel si obscur !...

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— Et si vous alliez voir un sorcier ? J'en connais un. Il est très bien...

Pourquoi pas ? Qu'avez-vous encore à perdre ? Les médecins n'ont pu apporter un seul remède à votre maladie devenue «surna- turelle». Il n'y a pas de doute, vous avez le «mauvais œil», on vous a «jeté un sort», on vous a «arrangé», et seul un sorcier peut vous apporter la guérison.

Une adresse, un premier pas dans le monde étrange de la sorcel- lerie. Vous n'êtes pas le seul, car «2/3 des malades hospitalisés en milieu psychiatrique ont recours à un sorcier... élément de la réalité quotidienne».

Le Mémoire que le psychiatre Gérard Mouls a réalisé, en colla- boration avec une équipe de chercheurs, pose un certain nombre de problèmes théoriques, tout en essayant de cerner le phénomène de la sorcellerie à la Réunion, sous ses aspects différents et dérou- tants, auxquels nous n'y pensons pas bien souvent, soit par réflexe d'auto-défense, par incrédulité ou indifférence.

Pourquoi le Réunionnais croit-il à la sorcellerie, aux pouvoirs du sorcier ? Pourquoi croit-il que son voisin consulte régulière- ment le sorcier du village ? Pourquoi cette croyance ? Le sorcier joue-t-il un rôle dans notre société ? La sorcellerie présente-t-elle un aspect économique intéressant ? Y a-t-il un lien entre sorcellerie et clinique psychiatrique ? De quel milieu social est issue la clientèle du sorcier ? Ce dernier, qui travaille avec un «esprit», bénéficie-t-il des pouvoirs réels ? Qui est sorcier ? Qui ne l'est pas?...

Selon Gérard Mouls, «tout individu qui effectue des pratiques magiques ou surnaturelles dans le but d'influencer les phénomènes naturels», est un sorcier, c'est-à-dire celui qui guérit, qui «tire le mal», qui «tire l'esprit», qui prédit l'avenir et connaît les secrets des plantes médicinales. A la Réunion, nous avons le choix entre le sorcier malabar qui a gardé ses traditions religieuses, le sorcier comorien qui peut se vanter d'être considéré par l'opinion locale comme puissant, dangereux, capable de tuer à distance ; et puis le sorcier malgache, le sorcier «blanc» qui utilise les livres de magie blanche ou noire.

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Et vous ne savez plus quoi penser quand, un beau jour, vous apprenez que tel sorcier (cela peut être le vôtre) a été hospitalisé en psychiatrie, plus ou moins «démencifié» par l'abus de l'alcool et d'autres drogues, souffrant de «bouffées délirantes», de «confu- sions mentales», ou alors, que tel autre a été jeté en prison pour escroquerie. Il ne vous reste plus qu'à prendre votre destinée en mains, coûte que coûte, car nous sommes persuadés, en accord avec Gérard Mouls, que «la prégnance et la survivance des croyances sorcières à l'île de la Réunion, trouve certainement une ébauche d'explication dans un certain retard culturel...» Ceci n'explique pas tout, mais une petite lumière peut filtrer à travers les interstices de la connaissance véritable. Un autre chemin à prendre. S'il est vrai que «potentiellement, tout individu est susceptible de devenir client du sorcier», il est vrai aussi que poten- tiellement, tout individu possède au fond de son être des pouvoirs insoupçonnés qui peuvent faire de lui un être entièrement respon- sable, confiant en l'avenir, en son avenir.

Et cet ouvrage apporte un éclairage nouveau sur cette «réalité étrange» qui a bouleversé votre vie.

Jean-François Sam-Long

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INTRODUCTION

Cette étude ayant pour thème la sorcellerie Réunionnaise se voit motivée par l'importance de ce phénomène dans l'île, lequel pose un problème ethno-psychiatrique difficile à résoudre.

Un groupe de psychiatres en fonction, au cours de l'année 1975, a pris comme thème de réflexion ce sujet en tant qu'il constituait un mode d'abord d'une réalité étrange à bien des points de vue.

En effet, notre pratique quotidienne nous met en contact avec des malades ayant été consulter divers sorciers et dont la sympto- matologie en est influencée. Ce mémoire issu du travail effectué par ce groupe sous forme d'un séminaire de réflexion doit beau- coup aux faits, aux découvertes, aux idées qui y ont été abordés.

La prépondérance du sorcier Réunionnais dans le domaine psychiatrique ne saurait être sous estimée, lorsque l'on sait que pratiquement 2/3 de nos malades hospitalisés y ont recours, et que de nombreux autres empruntent préférentiellement le circuit sorcier. Ce parcours n'empêche d'ailleurs nullement des inter- férences avec le circuit médical classique, créant ainsi des zones d'ombre et de lumière sur la pathologie insulaire.

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Si le sorcier entre dans le discours des malades, c'est bien sûr d'une part en tant que figure persécutrice délirante mais encore plus en tant qu'élément de la réalité quotidienne. Cette place double entraîne les classiques ambiguïtés au sujet de la distinction de ce qui est délire ou croyance, mais plus encore produit un trouble estompant les frontières du normal et du pathologique.

Leur présence nous confronte donc à des problèmes théoriques que nous essaierons de situer plutôt que de résoudre. Ces pro- blèmes qui vont de l'individu, à la société environnante, en passant par les constellations familiales, ethniques et culturelles dépassent largement le champ psychiatrique pour, mais cependant le concer- nent en priorité si nous voulons être autre chose que des entomo- logistes. L'entomologie est certes une science passionnante, mais elle manie l'insecticide et le microscope en même temps que les nomenclatures latines - ce qui dans le champ de l'humain entraîne de singulières déformations. Nous préférons, à l'objectif du bino- culaire,ouvrir des yeux subjectifs mais multiples, munis de filtres colorés, de diaphragmes et d'effets de «zoom» sans oublier la bande sonore, afin de restituer le mouvement de cette pensée magique dite si justement animiste. Notre objet n'est-il pas juste- ment ce «sujet» qu'on dit subjectif, et l'objectif = de le comprendre pour éventuellement le modifier. La métaphore est d'actualité pour y voir clair dans ces histoires de «mauvais œil», d'œil perçant des sorciers et de consultations qui loin d'être à l'œil, se nomment en créole «aller se faire guetter».

D'autre part les sorciers vécus comme extrêmement actifs dans le domaine en particulier de la maladie mentale nous infligent des blessures narcissiques, ce qui somme toute est bénin, mais ne manque pas d'avoir des répercussions au niveau des familles, et de la compréhension réelle des symptômes de leurs malades. Ceci amène la création d'un clair obscur éminemment favorable à l'institution et au maintien des phénomènes aliénants caractéris- tiques des maladies mentales.

L'idéologie sorcière est un problème socio-psychiatrique de l'île et son étude est à même non seulement de nous éclairer sur ses impasses, mais dans le même temps de nous révéler les nôtres. Autrement dit la présence du sorcier au lieu d'être négligée comme phénomène irrationnel, incongru, illogique, gênant notre pra- tique, peut être utilisée au contraire comme révélateur ou mieux comme analyseur de nos théories et institutions.

Au sein de la société créole, la croyance aux sorciers et à leurs faits et méfaits (ou bienfaits) est généralisée à un grand nombre

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d'individus ; au point qu'on peut affirmer que presque tout le monde y croit ou croit que les autres y croient.

Certes des doutes, des réserves subsistent mais ils concernent avant tout la critique de sorciers peu capables, opposant ainsi les vrais, les puissants, aux faux vécus comme charlatans. Lorsqu'on oriente la conversation sur ce sujet, on est frappé par la prévalence de ces croyances, ou lorsque incroyance il y a, elle prend la forme d'une réticence, d'un masque, qui sous une négation apparente ne manque jamais de raconter l'histoire troublante, le fait étrange manifestement destinés à ébranler les certitudes rationnelles de l'interlocuteur. Les légendes les plus fantastiques, les cas réputés, les faits les plus échevelés circulent ainsi dans l'Ile, amplifiés, magnifiés, et vectent comme signification latente : «Cela n'est explicable logiquement que par la sorcellerie».

Pourquoi cette croyance ?

L'explication la plus simple, la plus facile, la plus couramment admise, fait appel à cette fameuse mentalité primitive, prélogique, magique, qui flotte dans tous les pays exotiques, quand ce n'est pas le recours encore plus cru à une débilité, une inintelligence pure et simple.

Outre le primitivisme de ces explications qui reprennent les pre- mières idées philosophiques sur le sujet au magasin poussiéreux des concepts périmés, on ne cesse d'y entendre ce mépris (qui est une méprise) que le discours supérieur inflige toujours à son subordonné :

«Ces gens-là sont crédules, infantiles, naïfs, barbares» avec modulation nuancée, selon qu'on invoque la mentalité du Noir Africain : ce grand enfant, ce brave type rigole (BANANIA) mais tout de même un peu simple ; ou les Hindous, (Malabars à la Réunion) plus complexes certes, leur religion le démontre, mais tout de même bien sauvages et cruels : ils marchent sur le feu, ils sacrifient des animaux dans des orgies sanglantes rythmées par des tam-tams. Ainsi donc une deuxième explication est avancée qui fait appel à la présence de cultures étrangères, exotiques. Ce fait est certes d'importance mais il n'explique pas que si bien sûr ces deux groupes ethniques y croient, pourquoi le reste de l'île y croit autant qu'eux sinon plus, en particulier au niveau des éléments évolués.

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Car les Hindous évolués sont très souvent religieux au sens strict qui exclut la magie comme pratique impure et ancienne, tandis que les Africains évolués sont christianisés d'une façon telle qu'elle rejette avec horreur ces pratiques d'essence évidemment diabo- lique. On ne peut en dire autant des «(Blancs» de l'Ile évolués ou pas qui recrutent énormément dans la clientèle du sorcier. Alors ? Faut-il faire intervenir une survivance populaire archaïque des éléments blancs de l'Ile en provenance directe du XVIIème siècle et des provinces Françaises où ces croyances étaient très répandues ? Ou faut-il évoquer l'absence de laïcisation longtemps régnante à la Réunion ? Celle-ci issue du siècle des Lumières, avec son rejet ostentatoire et dogmatique des superstitions et croyances de tout poil au profit d'un culte du Rationnel a effectivement infiniment peu laissé de traces à la Réunion. Ainsi nos instituteurs de campagne, modernes sorciers du nouveau culte de la Raison triomphante inculquée à la baguette, à la craie et au livre de lecture ; par leur absence auraient peut-être laissé le champ libre à d'autres tuteurs maniant la baguette magique, les signes kabbalis- tiques et le livre du Petit Albert. C'est sûrement vrai mais n'expli- que pas le nombre effarant de croyants en sorcellerie dans le corps enseignant Réunionnais.

En fait ces explications, pour toutes qu'elles interviennent n'épuisent pas la véritable structure spécifique du «fait sorcier» dans l'île. Celui-ci fonctionne, persiste et se maintient vivace, ce qui indique bien qu'il a un rôle à jouer ici et maintenant et non pas dans un ailleurs indéterminé. «Vous, Européens vous ne pouvez com- prendre, disent-ils, ce sont des histoires du pays - «(z'affaires pays)». Effectivement il y a bien là un fait social original, spécifi- quement créole qui se définit de synthétiser trois sortes de cultures y compris leurs magies : l'Hindoue, l'Africaine et la Française.

Cet ensemble fonctionne-t-il ? et comment ? est-il aliénant ? ou tout au moins favorise-t-il une stagnation évolutive des menta- lités ? Joue-t-il un rôle de régulateur actuel des tensions sociolo- giques, psychologiques et religieuses, dues aux interférences des trois aires culturelles plus haut nomées ? Est-il une survivance anachronique, témoin d'une histoire immobilisée par des struc- tures sociales figées ? Ou au contraire un phénomène dynamique, porteur de potentialités actives dans la société créole contem- poraine ? Autant de questions que nous essaierons d'examiner sans

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oublier la principale qui provient de ce que le phénomène sorcier est une structure soignante donc thérapeutique, sans préjuger de la bénignité ou de la malignité des soins ainsi prodigués. Il maintient une population dans un certain état d'équilibre avec la nature. Ce même état d'équilibre précaire appelé santé dont on sait qu'elle peut être fallacieuse, névrotique malgré une apparence saine ou au contraire réelle et authentique avec une piteuse mine.

La santé est un concept difficile à cerner mais sa principale caractéristique semble bien être l'absence d'un mal - (Maladie, Mal, malignité, sont en réalité moins des «faits que des valeurs» (G. CANGUILHEM... Le normal et le pathologique) et il semble bien que leur élimination ne fasse pas obligatoirement surgir un Bien (bien être, bonne santé). La purgation du Mal peut n'être qu'un bénéfice secondaire, autrement dit un état d'équilibre névrotique individuel ou social. Bien, bénéfice, ces termes jouent avec une ambiguïté particulière à la Réunion, où les «bienfaits» produits par l'idéologie sanitaire de l'Ile bénéficient à beaucoup de monde... Les sorciers sont classés dans le camp les forces du Mal, bien que de ce camp, ils exercent des effets de guérison. Par contre tous les bien- faiteurs, bien pensants, bénédicteurs, tous curieusement hommes de «biens» classés dans les forces du Bien, bénéficient... d'un préjugé favorable ! Les sorciers sont universellement réputés pour être malins, voire malicieux, et nous essaierons de localiser par l'examen de leurs pratiques l'endroit et l'envers de leur exploi- tation de la mentalité magique.

Nous appelons ce phénomène du terme génétique de sorcellerie en nous référant au terme de «sorcier» employé à la Réunion dans une acceptation large. Il désigne tout individu qui effectue des pratiques magiques ou surnaturelles dans le but d'influencer les phénomènes naturels. Il n'y a pas de distiction subtile entre magicien et sorcier dont les domaines seraient pour l'un licites et bons, mauvais et illégaux chez l'autre, pas de clivage entre magie blanche et noire - Le sorcier est une figure Réunionnaise qui jette et retire des sorts «y tire le sort». guérit les maladies mystérieuses somatiques ou psychiques : «y tire le mal», «y tire l'esprit», qui prédit l'avenir «devineur», qui prépare des thérapeu- tiques (c'est alors un «simple», un «tisaneur»). C'est un être de pouvoir, ce qui le rend dangereux, fascinant et actif - On n'en parle peu, le sujet est tabou, mais on laisse sous entendre allusivement que bien des choses lui sont liées. Certes le phénomène n'est pas original, puisqu'il semble bien qu'aucune culture n'en soit indemne. Même de nos jours dans les sociétés occidentales post-

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industrielles le même flux magique continue d'orienter les pensées et les croyances d'un nombre important d'êtres humains. Nous pensons que loin d'être un écho des temps anciens, survivance d'une pénible maturation de l'esprit logique les croyances magi- ques témoignent de la présence de l'inconscient dans l'homme. Cette présence est actuelle et agissante même à notre insu, et c'est en cela que réside l'intérêt d'une étude de ce phénomène, car elle fournit un nouveau symptôme de la présence de l'inconscient que Freud a découverte. Comme tout phénomène inconscient sa mise à jour nécessite une interprétation que l'on peut qualifier de subjec- tive. Il nous semble que c'est grâce aux recoupements qui signifient toujours la même chose qu'une «vérité» de la magie peut être mise à jour.

La sorcellerie : Définition

Ce terme qui ne correspond pas exactement à la définition stricte qu'il a en France Métropolitaine condense ici un certain nombre de phénomènes qui ont en commun d'être relatifs au destin de l'homme. Qu'il s'agisse des procédés de guérison non orthodoxes, de la manière de devenir malade, de mourir de façon naturelle, de la chance ou de la malchance qui s'attache aux êtres, ou des croyances aux forces du Mal - toujours des images de sorcier sont présentes à chacun de ces faits. Au point de vue lexical les termes les plus couramment employés à ce sujet désignent bien l'éventail de son activité sorcière. Le sorcier est appelé «sort», «sigideur», «traiteur», «mazigador», «devineur» parfois «pusari» (terme hindou signifiant prêtre). Il est mal différencié des herbo- ristes nommés «tisaneurs» ou «gratteurs de ti bois» parfois «simples» du nom des «tisanes» qu'ils préparent, de la façon typi- que qu'ils ont d'enlever de petits copeaux de bâtonnets de bois divers ou des «simples» qu'ils manipulent. Le terme de batteur de bobine est encore utilisé (ou bobineur) et semble s'appliquer à la fois aux Indiens Malabars qui utilisent «l'urklé» ou tambour à esprit ainsi qu'aux sorciers Comoriens qui utilisent des fils colorés enroulés sur des bobines. En fait l'imprécision est générale du fait du tabou premier qui commande de ne point trop parler de tout cela du fait du malheur qui en résulte. Etre envoûté, ensorcelése dit être «endrogué» ou «arrangé». Les sorciers sont gens méchants, jeteurs et tireurs de sorts, «d'esprits» dits parfois «bébêtes» lors-

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La sorcellerie à La Réunion n'est pas ce qu'on imagine, mais représente une somme de phénomè- nes plus ou moins étranges qui, à coup sûr, a un im- pact sur nombre de nos contemporains.

Outre l'aspect d'enquête de ces études de Gérard Mouls, l'accent a été mis sur des descriptions, des tentatives d'explication, des analyses qui ont toutes en commun, non pas de démystifier, mais d'ouvrir des portes, faire communiquer des savoirs locaux dans leurs aspects utiles ou malfaisants du fait bien souvent de l'ignorance et de l'exploitation de l'an- goisse par certains.

La sorcellerie réunionnaise est une production culturelle originale qui mérite attention de ce qu'elle est une mythologie, une poétique et une esthétique, en plus de ses aspects poétiques qui se réclament d'être le maintien d'un équilibre entre l'esprit de l'homme et les esprits qui l'entourent...

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