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Un guide pour tout comprendre de l'alternance

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L'alternance permet d'éviter le chômage

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REPORTAGE Ces établissements d’enseignement supérieur qui développent les cursus en alternance

ENQUÊTE 10 raisons de préférer l’apprentissage à Bac + 5

INTERVIEW L’art et la manière de décrocher son contrat d’alternance

les dossiersDEMPLOIPRO

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LE CONTRAT DE PROFESSIONNALISATION : UN SYSTÈME IDÉAL POUR LES ENTREPRISES

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Edito

La France est une société de défiance. Les économistes Cahuc et Algan l’ont parfaitement démontré dans leur ou-vrage. C’est vrai à tous les niveaux de la société, et particulièrement dans l’acte de recruter. On ne compte plus les strates d’entretiens que les employeurs jugent indispensables pour embaucher quelqu’un. C’est pourquoi, contre mau-

vaise fortune, il faut faire bon cœur. Et privilégier les cursus en alternance. Que ce soit en apprentissage ou en contrat de pro-fessionnalisation, ce système cumule des avantages. Il permet, par exemple, de se rencontrer. Puis de s’évaluer, de s’estimer et de mesurer tout l’intérêt de faire un bout de chemin ensemble. Les Allemands l’ont bien compris. Eux qui ont fait de l’appren-tissage l’une des grandes voies pour s’insérer professionnelle-ment. Regardons maintenant leurs résultats. Selon Eurostat, le chômage des jeunes Allemands avoisinait en 2012 les 8 %. La même année, on déplorait 24,7 % de chômage chez les moins de 25 ans en France. Il y a plusieurs explications à ce phénomène, mais l’apprentissage y joue un grand rôle. À économie et taille comparable, le tenant de l’alternance compte 3 fois moins de chômeurs chez ses jeunes que le tenant de la formation initiale classique. En outre, comme le souligne Vincent Chriqui, directeur

général du Centre d’analyse stratégique qui vient de publier un rapport comparé France-Allemagne sur le sujet, les jeunes Alle-mands subissent moins les crises. « Au cours des années 1990-2000, précise-t-il, le taux de chômage des jeunes Allemands est, en outre, resté dans un rapport de 1 à 1,5 par rapport à celui des adultes. En France, le taux de chômage des jeunes a été jusqu’à 3 fois plus élevé que celui des adultes. »

Mais qu’on ne s’y trompe pas. L’alternance ne résoudra pas tous les maux de la société française. Ce dispositif peut cependant permettre une bonne insertion tout en autorisant les jeunes (et leur famille) à se former gratuitement, en étant rémunérés tout en acquérant une expérience professionnelle. Que demander de plus ? Il faut donc souscrire à cette alternance quand on est em-ployeur et s’y précipiter quand on est étudiant. Et c’est encore plus vrai lorsque le niveau d’études augmente.

Gwenole GuiomardRédacteur en chef d’emploipro

[email protected]

Sommaire

Emploi-proSite Internet : www.emploipro.fr Antony Parc II - La Croix de Berny 10, place du Général-de-Gaulle 92160 AntonyTéléphone : 01 77 92 92 92 Fax : 01 77 92 98 64

Directeur de la publication :Christophe Czajka

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Directeur du Pôle Annonces : Franck Terrier - 93 95RédactionRédacteur en chef : Gwenole Guiomard - 94 51Rédaction : Lucile Chevalier, Gwenole Guiomard, Guillaume Serres, Marie-Madeleine SèveSecrétaire de rédaction : Martine FavierPôle commercialCyril Dubois - 01 77 92 97 36Maquette /conception graphique et réalisationCaroline Place - 94 15

GRAND TÉMOIN

INTERVIEW

REPORTAGE

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Spécial «Formation Continue»Supplément à «L’Usine Nouvelle» n°3328 du 25 avril 2013Numéro d’enregistrement à la Commission paritaire pour les publications non quotidiennes 0712 T 81903Supplément à «L’Argus de L’Assurance» n°7310_11 du26 avril 2013Numéro d’enregistrement à la Commission paritaire pour les publications non quotidiennes 0212 T 81380Supplément à «LSA» n°2271 du 25 avril 2013 Numéro d’enregistrement à la Commission paritaire pour les publications non quotidiennes 0914 T 84928Supplément à «L’Echo Touristique» n°3065 du 26 avril 2013 Numéro d’enregistrement à la Commission paritaire pour les publications non quotidiennes 1111 T 80945Supplément à «Industrie & Technologies» n° 954 de mai 2013Numéro d’enregistrement à la Commission paritaire pour les publications non quotidiennes 0612 T 81775

Ne peut être vendu séparément.

Des publications du groupe Gisi, Antony Parc II10, place du général-de-Gaulle - 92160 Antony Cedex

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L’alternance pour renouer les liens

À économie et taille comparable, le tenant de l’alternance compte 3 fois moins de chômeurs chez ses jeunes que le tenant de la formation initiale classique.

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DOSSIERL

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10 raisons de préférer l’apprentissage à Bac + 5

Suivre un cursus d’élite dans les meilleures écoles et universités, en ne déboursant pas un sou, mais au contraire en étant payé. Arriver sur le marché de l’emploi, fraîchement diplômé, mais avec déjà une solide expérience en entreprise. L’apprentissage à niveau bac + 5 offre ces avantages et de nombreux autres. Zoom sur 10 raisons de préférer l’apprentissage à haut niveau. P 8

ENQUÊTE

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Un contrat de professionnalisation idéal pour les entreprisesLancé en 2004, le contrat de professionnalisation est de-venu une nouvelle forme d’alternance pour les étudiants de moins de 26 ans et un nouveau type de formation pour les demandeurs d’emploi. Ses avantages pour les employeurs sont nombreux. Explications. P 16

Comment convaincre un employeur de vous prendre en apprentissage ? Trouver un employeur est sûrement la partie la plus délicate de l’apprentissage. Corinne Hahn, directrice scientifique de la filière apprentissage à l’ESCP Europe, explique comment et avec quels arguments le futur apprenti pourra séduire son employeur. P 14

Ces établissements d’enseignement supérieur qui développent les cursus en alternanceÀ l’initiative des écoles et des universités, l’apprentissage et le contrat de professionnalisation se développent. De plus en plus de cursus diplômants proposent un système d’alternance pour mieux préparer l’étudiant au monde du travail. P 20

L’art et la manière de décrocher son contrat d’alternanceIl est toujours délicat d’arriver à convaincre une entreprise d’embaucher un « alternant ». Dès lors, comment s’y prendre ? Les conseils de Nathalie Carra et Hervé Demazure, respectivement chargée de mission et chef de service à la direction formation et compétences au sein de CCI France. P 24

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Brèves

« La taxe d’apprentissage doit être entièrement consacrée à l’apprentissage », a plaidé avec détermination le président de la République lors d’un déplacement à Blois, le 4 mars dernier. Une évidence. Mais si François Hollande a rappelé son intention, c’est bien que, dans les faits, l’axiome ne s’applique guère. Sur les 2 milliards que rapporte chaque année la taxe d’apprentissage, moins des deux tiers (62 %) sont effectivement destinés à l’ap-prentissage. Les 38 % restants sont reversés par les entreprises aux établissements d’enseignement secondaire ou supérieurs de leur choix. Certains établissements savent y faire. Ainsi 20 % du budget de l’Essec sont financés par cette taxe.

L’herbe est plus verte chez notre voisin allemand. À la fin de 2012, le taux de chômage des moins de 25 ans y atteignait les 8,1 % contre 24,7 % en France, soit 3 fois plus dans l’Hexa-gone. Il y a de quoi être jaloux, et encore tout n’a pas été dit. Les jeunes Allemands ont certes souffert pendant la crise, plus que les adultes, mais beaucoup moins que les jeunes Français. Au cours des deux décennies 1990 et 2000, le taux de chômage des moins de 25 ans outre-Rhin « est resté dans un rapport de 1 à 1,5 par rapport à celui des adultes », observe le Centre d’analyse stratégique dans un rapport sur l’apprentissage en France et en Allemagne. Chez nous, il a été aussi jusqu’à 3 fois plus élevé. Pourquoi ne pas s’inspirer du modèle allemand ? Le CAS met en avant quelques initiatives qui font l’efficacité du système d’apprentissage allemand et qui pourraient être appli-quées en France, comme le tutorat externe par des bénévoles retraités, la création de centres interentreprises pour accueillir les apprentis ou la valorisation du rôle du formateur.

S’inspirer de l’Allemagne…

Le fruit de la taxe d’apprentissage

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L’Université de technologie de Troyes s’y met à son tour. Elle lancera en septembre prochain ses « alter-nances d’excellence ». En clair, l’intégralité des formations d’ingé-nieurs de l’école sera proposée aussi en alternance. Mais seu-lement quelques élus, les meilleurs étudiants, seront retenus. Ils pourront alors termi-ner leur dernière année d’étude en entreprise. « Cette alternance d’excellence permet-tra de répondre au be-soin de professionnali-sation de nos étudiants et aux besoins de recrutement des entre-prises », explique Guillaume Ducellier, responsable des relations formation-entreprise à l’UTT.

Alternance à l’UTT

Certains y verront le verre à moitié plein, d’autres à moitié vide. En 2012, 448 835 contrats en alternance ont été enre-gistrés. Certes, c’est toujours 10 000 de moins qu’en 2011. Néanmoins, l’année avait telle-ment mal démarré que, au final, ce chiffre est un soulagement. Les contrats de professionna-lisation sont en repli, analyse la Dares, passant de 168 553 en 2011 à 154 559 en 2012. À l’inverse, le nombre de contrats d’apprentissage est en hausse : 294 276 en 2012 contre 290 460 l’année précédente.

448 835 contrats en alternance

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Guillaume Ducellier.

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Brèves

L’apprentissage moderne est né au cours de l’été 1971. Certes, les bases avaient déjà été lancées dans les années 1920. Néan-moins, il fallait mettre un peu d’ordre : fixer un contrat, sa du-rée, fonder les centres de formation d’apprentis, bref redorer le blason. En vain. Seulement 80 000 jeunes par an devenaient apprentis dans les années 1970. 2e assaut de séduction dans les années 1980. Les Régions récupèrent la situation et la loi Séguin (1986) élargit l’accès de ce type de formation aux jeunes de moins de 25 ans (contre 20 auparavant) et aux diplômes du su-périeur. Les réformes des années 1990 et 2000 (crédit d’impôts, aide à l’embauche, amélioration du statut) ont continué l’entre-prise de séduction. Avec succès, car en 2012 près de 300 000 jeunes étaient en contrat d’apprentissage.

Et l’apprentissage fut !

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Comment trouver un contrat en alternance ? Il suffit d’un smartphone. Pôle emploi a lancé en juin der-nier un site mobile rassem-blant les offres de contrats de professionnalisation et d’apprentissage, mais aussi des conseils pour les décro-cher et des informations sur les salons et forums sur cette thématique. Voici le sésame pour être connecté : h t t p : / / m . p o l e - e m p l o i -jeune.fr

L’alternance au bout du fil

Une illustration du site.

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Presque dix ans. Le contrat de professionnalisation est né en effet le 5 décembre 2003. Le contrat de qualification, celui d’adaptation et enfin celui d’orientation, cela faisait beaucoup. Aussi un accord national inter-professionnel a permis de les rassembler en un seul : le contrat de pro-fessionnalisation. Il s’adresse aux demandeurs d’emploi mais éga-lement aux jeunes âgés de 16 à 25 ans désireux de compléter leur formation initiale. C’est un contrat de travail en alternance d’une du-rée de 6 mois à 1 ans, renouvelable une fois.

Le contrat de professionnalisation aura dix ans.

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En 2020, 10 % des étudiants seront apprentis. C’est du moins l’objectif que s’est fixé Geneviève Fioraso, ministre de l’Ensei-gnement supérieur. En d’autres termes, la ministre veut doubler les effectifs d’alternants dans le supérieur. Selon les dernieres données du ministère, à la rentrée 2010, 111 400 jeunes prépa-raient leur diplôme par la voie de l’apprentissage sur un total de 2 318 700 étudiants. Les BTS concentrent à eux seuls 48 % des apprentis. Mais concurrencés par les licences et les Masters pro en constante progression, leur poids diminue.

Geneviève Fioraso.

Doubler le nombre d’étudiants alternants

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Philippe Séguin.

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Dossier

À l’université de Marne-la -Vallée, un quart des étudiants sont des apprentis.

10 RAISONS DE PRÉFÉRER L’APPRENTISSAGE À BAC + 5

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Dossier

Qu’on se le dise. Et qu’on fasse passer l’informa-tion. Les entreprises plébiscitent l’apprentissage à haut niveau. Selon un sondage Ipsos pour le Cesi,

publié en janvier dernier, 71 % des patrons voient dans les contrats en apprentissage un excellent moyen d’inté-grer les jeunes salariés dans leur société. Les grandes écoles et universités l’ont adopté. Selon la Conférence des grandes écoles, en 2012 les écoles accueillaient plus de 12 300 apprentis. À l’université, même frénésie, les statis-tiques du ministère de l’Enseignement supérieur pointent que « les effectifs d’apprentis préparant un Master pro-fessionnel sont en constante progression ». Bref, tous sont séduits, même les politiques qui ne cessent de prôner l’apprentissage comme solution pour insérer les jeunes sur le marché du travail. Mais qu’en est-il des étudiants ? Pourquoi préféreraient-ils ces cursus en apprentissage à ni-veau bac + 5 aux formations académiques classiques ?

1 ≠ PARCE QU’UNE EXPÉRIENCE SE VALORISE TOUJOURSL’expérience professionnelle constitue le beurre dans les épinards de l’apprenti. Ce dernier, comme un étudiant en Master classique, décroche in fine le même diplôme. Mais quand le second glisse un pied dans l’entreprise une fois par an lors d’un stage, le premier y est tout au long de l’année. Et ce pendant deux ou trois années, selon le cursus suivi. Au cours de cette période, il fait des allers-retours entre l’entreprise et son établissement scolaire. À Telecom Lille 1, les apprentis effectuent 6 semaines en entreprise pour 1 semaine à l’école. À l’IAE de Paris, les apprentis du Master contrôle audit sont pendant 4 semaines en entreprise avant de revenir 2 semaines en cours. Bref, un mi-temps, voire plus chez l’employeur. Sur le long terme, cela développe

une expérience professionnelle séduisant les recruteurs. « Nous avons constaté qu’entre deux CV comparables, nos clients privilégient dans la majorité des cas l’ancien apprenti, observe Isabelle Bastide, directrice générale du cabinet de recrute-ment Page Personnel. L’expérience est devenue l’argument n° 1 et suscite toute l’attention des recruteurs. » Mais que se passe-t-il quand cette « fameuse » expérience n’est pas directement en lien avec le poste visé ? Le compteur retombe-t-il a zéro ? « Une expérience professionnelle peut toujours être valorisée, tranche Valérie Sablé, associate director chez Robert Half. Le diplômé en apprentissage pourra toujours mettre en valeur les missions et tâches périphériques qu’il a réalisées et qui sont plus en lien avec le poste-cible. »

2 ≠ PARCE QU’UN APPRENTI ACQUIERT LES CODES DE L’ENTREPRISEL’apprenti fait un bon bout de chemin avec l’entreprise. Il la voit dans ses bons et moins bons jours, intègre son fonctionnement, analyse ses besoins, apprend à parler sa langue. « Lors d’un entretien de recrutement, l’ancien apprenti est plus à l’aise. Il a un discours très concret, et donc souvent plus percutant. Il se projette mieux dans l’entreprise qu’un diplômé de formation académique », analyse Serena Krakovitch, responsable du recrutement des cadres à la SNCF. L’entreprise compte dans ses rangs un millier d’apprentis.

3 ≠ PARCE QUE L’APPRENTI EST UN SALARIÉ À PART ENTIÈRE « Lors de mes stages précédents, j’étais la “stagiaire”, terme très réducteur. Quand je suis devenue apprentie, j’ai signé un contrat. J’ai été intégrée et impliquée dans l’entre-prise », témoigne Ophélie Ducombs, diplômée en 2010 du

Suivre un cursus d’élite dans les meilleures écoles et universités, en ne déboursant pas un sou, mais au contraire en étant payé. Arriver sur le marché de l’emploi, fraîchement diplômé, mais avec déjà une solide expérience en entreprise. L’apprentissage à niveau bac + 5 offre ces avantages et de nombreux autres. Zoom sur 10 raisons de préférer l’apprentissage à haut niveau.

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Dossier

De la littérature russe à uncabinet de courtage

Il y a 3 ans, Enora Le Bleis, avec son DEA en langue et littérature russes et la préparation de sa thèse, se destinait à une carrière dans la recherche. Mais, « je me suis rendu compte que les dé-bouchés étaient très restreints ». Et sa formation recherche n’émoustillait pas les recruteurs. À Pôle emploi, elle entend parler du dispositif Elsa, porté à l’époque par le Cnam et Science-Po et récupéré par l’École nationale d’assu-rances. Cette école ouvre des contrats

d’alternance aux étudiants diplômés en lettres ou sciences hu-maines. Séduite, elle s’oriente vers le secteur de l’assurance. « J’ai pu profiter d’un accompagnement personnalisé au cours duquel j’ai notamment appris à parler le langage du recruteur, à traduire mes expériences en compétences. Par exemple, au lieu de sou-ligner mon précédent statut d’“allocataire recherche”, je parlais du business plan et du planning de recherche que j’avais réalisés. J’ai commencé dans la veille stratégique et j’y ai pris beaucoup de plaisir. Je me suis rendu compte que c’était quelque chose que je savais déjà faire. Lors de ma préparation de thèse, j’avais déjà réalisé un énorme travail de recherche d’informations. Cela avait du sens. Le fait que je parle russe a aussi été un bon atout. Mon contrat terminé, j’ai décroché un poste en moins d’un mois. » L. C.

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Enora Le Bleis.

Master, en apprentissage, direction administrative et financière à l’IAE de Pau-Bayonne. Une différence d’appréciation mais aussi de durée. « Un stagiaire en 3 mois n’a pas le temps d’acquérir toutes les compétences nécessaires pour devenir autonome, estime Mathieu Bouchy, ingénieur diplômé en 2012 par la voie de l’apprentissage à Telecom Lille 1. Pour un apprenti, l’entreprise a le temps de le faire monter en compétences. Moi, au bout de 6 mois, j’étais déjà envoyé seul chez les clients. »

4 ≠ PARCE QUE L’APPRENTISSAGE EST UN PRÉRECRUTEMENTÀ la SNCF, on ne s’en cache pas, l’apprentissage est utilisé comme un vivier de prérecrutement. « L’apprenti passé chez nous a eu un pied dans l’entreprise, c’est un réel atout car nous cherchons des cadres directement opérationnels », souligne le groupe fer-roviaire. Les chiffres d’insertion des apprentis démontrent que la SNCF n’est pas la seule à penser ainsi. À Telecom Lille 1 comme à l’université Paris-Est Marne-la-Vallée, la moitié des apprentis sont, une fois leur diplôme obtenu, embauchés par l’entreprise qui les avait pris en apprentissage.

5 ≠ PARCE QUE L’APPRENTI PASSE DE LA THÉORIE À LA PRATIQUE La pédagogie de l’apprentissage s’appuie sur l’alternance entre expérience professionnelle et cours académiques. Une manière d’apprendre « très enrichissante qui permet [aux apprentis] de mûrir très rapidement, estime Stéphane Lefrancq, directeur du Master, en apprentissage, contrôle et audit à l’IAE de Paris. Les apprentis acquièrent rapidement une conscience très fine de l’articulation entre les études, l’académique et les contraintes des métiers. Tout au long de l’année, ils mettent en perspective l’enseignement théorique appris en cours et le savoir-faire mé-tier acquis en entreprise, et cela l’un par rapport à l’autre ».

6 ≠ PARCE QUE L’APPRENTI CONSTRUIT SON PROJET PROFESSIONNELAu cours de son apprentissage en entreprise, l’apprenti acquiert une meilleure visibilité du marché de l’emploi qu’un étudiant lambda. « Il sait aussi mieux ce qu’il veut ou ne veut pas faire. Pour résumer, il est mieux équipé pour construire de manière efficace son projet professionnel », souligne le cabinet Robert Half.

Un apprenti gagne-t-il plus qu’un autre diplômé ? Les apprentis arrivent sur le marché de l’emploi avec une à trois années d’expérience. Ce plus se traduit-il sur la fiche de paie ? Cette expérience est valorisée mais assez peu, constate l’In-see dans une étude réalisée sur le sujet et s’appuyant sur les données génération 2004 du Céreq. En 2007, soit 3 ans après avoir obtenu leur diplôme, les apprentis touchent en moyenne 2,9 % de plus que leurs collègues issus d’une formation initiale purement académique. « Dans 95 % des cas, ce gain se situera entre 1,7 % et 4 % », ajoute l’Insee. « L’expérience pratique accumulée par les apprentis, ainsi que l’acquisi-tion des codes et comportements à adopter en milieu professionnel, est probablement valorisée par les employeurs » , explique l’Institut de statistiques. Mais peu au niveau du salaire. Une précédente étude du Céreq, publiée en 2005, avait quant à elle noté que plus le diplôme obtenu par la voie de l’apprentissage est éle-vé, plus le gain est important. « Lorsque les apprentis ont le niveau CAP ou BEP, leur salaire au bout de 3 ans de vie active est globalement équivalent à celui des autres jeunes. » Au ni-veau du baccalauréat, le gain est de 30 euros net par mois. En revanche, à partir du niveau Bac + 2, « les anciens apprentis ont un salaire mensuel médian supérieur de 110 euros à celui des jeunes issus de la filière scolaire », conclut l’étude. L. C.

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7 ≠ PARCE QUE L’APPRENTI EST PAYÉ POUR ÉTUDIERL’apprenti est exonéré des frais de scolarité, pris en charge par l’employeur. Appréciable. Encore mieux, il perçoit une rémunéra-tion en tant que salarié de l’entreprise. Un apprenti âgé d’au moins 21 ans gagnera au minimum 758,02 euros par mois, soit 53 % du Smic. Et cela en brut comme en net, le salaire de l’apprenti étant totalement exonéré des charges sociales patronales et sala-riales. En 2e année d’apprentissage, son salaire mensuel passe à 872,43 euros (61 % du Smic). Et en 3e année, il monte à 1 115,57 euros (78 % du Smic). Sans compter que l’apprenti bénéficie de la même protection sociale que les autres salariés de l’entreprise : cotisations chômage, maladie et retraite.

8 ≠ PARCE QU’AUTREMENT L’APPRENTI N’AURAIT PAS CONTINUÉ SES ÉTUDESCinq années d’études ne sont pas à la portée de toutes les bourses. Certains sont freinés par la perspective de poursuivre des études pendant 5 ans avant d’entrer enfin dans le vif de la pratique. Tandis que d’autres sont complexés. « Beaucoup de nos apprentis m’ont confié que sans la formule en apprentis-sage, ils n’auraient jamais pensé prétendre à un titre d’ingénieur. Enfants d’ouvriers, issus de DUT, dans leur tête ce cursus d’élites n’était pas pour eux », rapporte Bertrand Bonte, directeur de Te-lecom Lille 1. Aujourd’hui, de nombreux cursus d’élites s’ouvrent à eux. L’Essec depuis 1993 ; la Grenoble École de management depuis 1998 ; l’ESCP depuis 1999 ; l’Edhec business school depuis le début des années 2000 ; Supélec depuis 2008 ; Centrale Paris et Telecom ParisTech depuis 2010, pour ne citer qu’elles. Seules HEC ou Poly-technique campent encore sur leurs traditions. Jusqu’à quand ?

9 ≠ PARCE QUE L’APPRENTI SE CONSTRUIT UN RÉSEAU PROFESSIONNELPage Personnel comme Robert Half en ont fait l’expérience : un apprenti laisse des traces. Lors de la prise de référence, même plusieurs années après la fin d’un apprentissage, l’employeur n’a aucun mal à remettre un nom sur l’apprenti en question. Et cela aide notamment « lors de la recherche d’emploi, comme le souligne l’étude “Apprentissage entre formation et insertion professionnelle” de l’Insee. Les apprentis bénéficient alors du fait de leur présence continue dans l’entreprise, d’un réseau relationnel plus dense et plus efficace que leurs homologues de filières classiques, qui ne sont en contact avec l’entreprise qu’à l’occasion de stages ».

10 ≠ PARCE QUE L’APPRENTISSAGE BOOSTE LA CARRIÈRELa plupart des cabinets de recrutement et des entreprises comptabilisent les années d’apprentissage comme autant d’an-nées d’expérience. Un précieux calcul qui booste le salaire, mais aussi sa carrière. « Les apprentis, une fois diplômés, ont ainsi accès à un panel d’offres d’emplois plus important. Ils peuvent prétendre à des postes nécessitant une à deux années d’expé-rience », relève Gille Roussel, président de l’université Paris-Est Marne-la-Vallée et de la commission de la formation et de l’in-sertion professionnelle au sein de la Conférence des présidents d’universités. L’apprenti Mathieu Bouchy confirme : « Sans cette alternance, je n’aurais pas pu obtenir le poste que j’occupe. Il s’agit d’un poste stratégique et les RH cherchaient une personne qui connaisse la boîte. »

Lucile Chevalier

Pourquoi la France n’arrive-t-elle pas à atteindre son objectif des 500 000 apprentis ? Depuis 1993, les gouvernements fixent l’objectif de 500 000 apprentis en France. Il n’a jamais encore été atteint. C’est un rituel. En novembre dernier, le Premier ministre Jean-Marc Ayrault a, de nouveau, fixé l’objectif de 500 000 apprentis en France d’ici à 2017. L’exercice relève presque de la tradition depuis 1993 et la loi Balladur. Vingt ans plus tard, comment se fait-il que l’objectif ne soit toujours pas atteint ? Emmanuel Sul-zer, sociologue et chargé d’études au Céreq, apporte quelques éléments de réponse. « Depuis une dizaine d’années, l’apprentissage se développe beaucoup au niveau de l’enseignement supérieur. Mais, à l’inverse, et dans le même temps, en raison d’un fort déficit d’image, il a cessé de se développer au niveau du Bac et du CAP. Les apprentis que la France perd aux niveaux IV et V, elle ne les regagne pas au niveau du supérieur. Ensuite, sur le terrain, nous constatons que les jeunes voient plutôt d’un œil favorable les formations en apprentis-sage. Les entreprises aussi, mais surtout chez les autres. Elles sont bien disposées à embaucher un jeune diplômé d’un cursus en apprentissage, mais l’accueillir pendant sa période d’apprentissage est une autre histoire. Cela coûte du temps et de l’argent, sans compter qu’une fois diplômé, l’ex-apprenti peut partir se faire embaucher ailleurs. » L. C.

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Emmanuel Sulzer, sociologue et chargé d’études au Céreq.

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Grand témoin

Prendre un étudiant encore en formation, mais sous statut sala-rié, lui payer ses frais de scolarité et en plus lui verser un salaire. À cela il faut ajouter une présence à mi-temps. Présenté ainsi, l’apprentissage n’a rien pour séduire l’employeur. Corinne Hahn,

professeur et directrice scientifique de la filière apprentissage de l’ESCP Europe, donne quelques pistes sur l’art et la manière pour un candidat de se mettre en valeur et de convaincre un em-ployeur de le prendre en apprentissage.

Comment convaincre un employeur de vous prendre en apprentissage ? Trouver un employeur est sûrement la partie la plus délicate de l’apprentissage. Corinne Hahn, directrice scientifique de la filière apprentissage à l’ESCP Europe, explique comment et avec quels arguments le futur apprenti pourra séduire son employeur.

Corinne Hahn, directrice scientifique de la filière apprentissage à l’ESCP Europe.

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Grand témoinLucile Chevalier. Qu’est-ce qu’un jeune apprenti ins-crit dans un cursus à niveau Bac + 5 peut apporter à l’entreprise ? Corinne Hahn. Un apprenti de ce niveau apporte avec lui un ba-gage académique. Il a suivi et continuera de suivre pendant son apprentissage des cours avec des experts reconnus dans cer-tains domaines. Il apporte alors à l’entreprise un œil neuf. Il contri-bue au renouvellement des pratiques de l’entreprise en appor-tant les théories étudiées à l’école. Une approche précieuse dans des entreprises où les salariés n’ont pas toujours le temps de se poser, de prendre du recul et d’aller en formation. Il est un facteur d’innovation. Sans compter qu’à ce niveau d’étude, le jeune est très organisé et a une grande capacité de synthèse et de travail.

Lucile Chevalier. Comment un candidat peut-il convaincre un responsable RH de l’accepter en appren-tissage ?Corinne Hahn. Il a déjà l’argument de la durée. D’abord, un ap-prenti est intégré à part entière dans l’entreprise, et cela sur une période allant de 1 à 3 ans. Période au cours de laquelle l’ap-prenti et l’entreprise ont le temps de construire quelque chose ensemble. Ensuite, en acceptant un apprenti, une entreprise lie un partenariat avec une école. L’apprentissage est porté par un trio : l’apprenti, un professeur de l’école et le tuteur en entreprise. Ces relations renforcent les liens entre l’entreprise et l’école et

ouvrent la voie sur d’autres partenariats. Enfin, certaines entre-prises recrutent des apprentis avec, dans la tête, l’idée de créer une nouvelle activité ou un nouveau service. L’apprentissage peut ainsi être approché comme un prérecrutement, et ce à moindre coût du fait de certains avantages fiscaux.

Lucile Chevalier. Comment un candidat peut-il convaincre un manager de l’accepter en apprentis-sage ? Corinne Hahn. Il faut voir que dans beaucoup d’entreprises, la charge de travail progresse et qu’à l’inverse les effectifs ont tendance à diminuer. Avec les inquiétudes sur l’avenir, certains employeurs ont aussi tendance à repousser les recrutements. Cela n’arrange rien. Dans ce contexte, un apprenti est rapide-ment incontournable en termes de production. Embaucher un apprenti permet au service de souffler un peu. De plus, il fait par-tie des missions du manager de former les nouveaux arrivants. L’apprentissage s’inscrivant dans la durée, le manager trouvera plus facile de former ces jeunes apprentis dans un contexte de moindre urgence opérationnelle. Il a de 1 à 3 ans pour devenir progressivement opérationnel. Enfin, il est toujours agréable de transmettre un savoir-faire. Il n’est donc pas déplaisant d’avoir en face de soi un jeune aspirant au métier que l’on exerce et qui vous dit : « Je veux apprendre de vous. »

Propos recueillis par Lucile Chevalier.

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Sociétal, Economique, Environnemental

DIPLOME UNIVERSITAIRE LOGISTIQUE DURABLE

(NIVEAU 2 - BAC + 3)

UNIVERSITE DE BOURGOGNE

Objectif Faciliter le changement des pratiques professionnelles de gestion de la chaîne logistique pour accompagner la prise en considération du développement durable

Lieu IUT de Chalon sur Saône

Durée 161h (3 jours par mois durant 8 mois dès janvier 2014)

Public Exploitants de plateformes (logistique, valorisation), Responsables logistiques, Responsables transports, Chargés de mission traitement de déchets...

Pré-requis Bac + 2 ou validation des acquis professionnels

Programme UE 1 - Présentation générale UE 2 - Transport-Logistique et Développement Durable UE 3 - La logistique des déchets UE 4 - Une activité de service responsable UE 5 - Mise en œuvre de la démarche UE 6 - Mise en pratique UE 7 - Examens

Pédagogie [email protected] [email protected]

Administratif [email protected]

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Grand témoin

Pour Anne Dujoncquoy, conseillère formation pour les entreprises de l’antenne Île-de-France-Ingénierie de l’OPCA Fafiec, le contrat de professionnalisation a pour mission de mettre la formation en action. « Toute connaissance qui n’est pas mise en pratique est oubliée », précise-t-elle.

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UN CONTRAT DE PROFESSIONNALISATION IDÉAL POUR LES ENTREPRISES

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Enquête

Le contrat de professionnalisation remplace depuis plus de huit ans les contrats de qualification, d’adaptation et d’orientation. Prioritairement destiné aux 16-25 ans, il est devenu une nou-

velle forme d’alternance permettant de passer de la théorie à la pra-tique en entreprise.

Aides et financements L’intérêt majeur du contrat de professionnalisation pour un em-ployeur est d’ordre financier. L’OPCA (Organisme paritaire collec-teur agréé) du secteur de l’entreprise prend en charge les dépenses de formation. La plupart des OPCA proposent un forfait de 9,15 euros l’heure de professionnalisation. Pour l’employeur, cela représente donc un financement de 915 euros pour 100 heures de formation et 4 575 euros pour 500 heures… Soit de quoi financer la plupart des cursus existant en France. L’OPCA Fafiec, qui s’occupe des secteurs informatique, ingénierie et conseil, offre de son côté des forfaits plus élevés (15 à 20 euros l’heure) pour certains métiers et selon cer-taines conditions. Dans les secteurs couverts par le Fafiec, où 85 % des entreprises sont des PME de moins de dix salariés, ces tarifs plus élevés sont bienvenus. « De plus, dans les métiers de notre branche, ceux du savoir, les connaissances deviennent rapidement obsolètes. Dès 40 ans, les salariés sont considérés comme séniors. Un ingénieur doit suivre régulièrement des formations pour actuali-ser ses compétences techniques et transversales », explique Anne Dujoncquoy, conseillère formation pour les entreprises de l’antenne Île-de-France-Ingénierie de l’OPCA Fafiec. C’est dans cette logique de reprise d’études ou de reconversion que le contrat de profes-sionnalisation a été ouvert à divers publics, comme les plus de 26 ans et les demandeurs d’emploi. De surcroît, les GEIQ (Groupements d’employeurs pour l’insertion et la qualification) qui recrutent en contrat de professionnalisation un

16-25 ans sans qualification, ou un demandeur d’emploi de plus de 45 ans, peuvent bénéficier d’une aide de l’État annuelle de 686 euros par personne et par an. Les entrepreneurs adhérents du GEIQ ont donc tout à gagner dans l’utilisation de ce contrat. Actuellement, huit GEIQ travaillent en priorité avec l’OPCA Transports. « Nous avons orga-nisé fin mars un Prix du “contrat pro” au SITL (Salon des solutions logistiques), afin de récompenser nos jeunes alternants. Le but était également de mettre en avant les entreprises qui les ont hébergés », raconte Raphaëlle Franklin, nouvelle DG de l’OPCA Transports. Ces organismes paritaires peuvent aussi prendre en charge une partie du financement du tuteur, qui suivra au sein de l’entreprise l’alternant en professionnalisation. Une aide pécuniaire de plus pour l’employeur.

Le tutorat, chaînon utileEn alternance, le titulaire d’un contrat de professionnalisation n’est pas laissé en liberté dans l’entreprise. Le tuteur doit planifier les acti-vités de l’alternant, lui fournir un retour d’expérience et intégrer les besoins exprimés par l’école dans les projets de l’entreprise. C’est un grand avantage pour l’employeur. « Être tuteur me permet de rester au plus proche de la formation théorique dispensée dans l’école de l’alternant, explique Guillaume Lépine, tuteur au sein de Steria pour des étudiants en contrat de professionnalisation Personnellement, je travaille en PLM [NDLR : Project Life-cycle Management], et je peux ainsi me tenir au courant des nouveautés dans ce domaine. De plus, les questions posées par l’étudiant permettent au tuteur de se “challenger”. » Du point de vue de l’entreprise, le tutorat permet aussi d’établir un lien privilégié avec l’école et de créer une relation entre l’alternant et l’employeur plus directe qu’en apprentissage. Surtout, il influe sur les stratégies RH en permettant de véhiculer une certaine image de la société. Cette image pourra aider au recru-

Lancé en 2004, le contrat de professionnalisation est devenu une nouvelle forme d’alternance pour les étudiants de moins de 26 ans et un nouveau type de formation pour les demandeurs d’emploi. Ses avantages pour les employeurs sont nombreux. Explications.

UN CONTRAT DE PROFESSIONNALISATION IDÉAL POUR LES ENTREPRISES

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Enquête

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« Mettre en pratique ce qu’on apprend en théorie »Océane Bracco, 25 ans, est étu-diante en Master Management et Stratégie des entreprises à l’école Grandjean de Strasbourg. Elle a signé un contrat de profes-sionnalisation chez La Pizza de Nico.

« Ce Master se fait en un an : on passe les épreuves théoriques

et le mémoire de Master 1 en juin. On valide le Master 2 en oc-tobre. On est en entreprise lundi et mardi et en cours jeudi et vendredi. Les vacances d’été se passent intégralement en en-treprise. Je suis alternante au siège de La Pizza de Nico en tant que chargée de développement marketing et communication. Je fais du développement stratégique, de la communication avec les franchisés et les partenaires. J’ai été à la base embau-chée dans l’entreprise en CDI. Mon employeur m’a proposé un contrat de professionnalisation. Je trouve que ce contrat per-met de mettre en pratique ce qu’on apprend en théorie. En plus, à ce niveau d’études, et lorsqu’on a plus de 20 ans comme moi, on touche 80 % du SMIC. J’ai fait des BTS privés avec stages à la sortie desquels on nous reprochait souvent le manque d’ex-périence. En contrat de professionnalisation, on a une véritable double casquette. L’intérêt pour l’entreprise étant de trans-mettre un savoir-faire. »

tement de profils jeunes. Les objectifs 2012 de Steria en matière d’embauches visaient 1 200 recrutements France, dont la moitié de jeunes diplômés, stagiaires et alternants compris.

Un profil plus « pro »L’entrepreneur, en recrutant une personne en contrat de profes-sionnalisation, forme un alternant qui choisit une voie en fonction d’un projet individuel. Ce qui diffère du contexte plus collectif de l’apprentissage. « Il y a des sociétés qui hésitent devant des contrats de professionnalisation car ils se montent au cas par cas. Mais jus-tement, l’aspect personnalisé d’un contrat de professionnalisa-tion permet à l’entreprise de sélectionner le profil qui correspond le mieux », argumente Annick Dubray, responsable recrutement et formation continue pour les Mastères spécialisés de SKEMA Bu-siness School. Cette école propose plusieurs Mastères spécialisés (Bac + 6) en contrat de professionnalisation, destinés à des per-sonnes de haut niveau, issues en partie du monde de l’entreprise et souhaitant faire évoluer leurs compétences. Les recruteurs

ont donc tout intérêt à employer de pareils profils, car leur profes-sionnalisation augmentera leur valeur. Les derniers alternants de ces Mastères ont été intégrés en contrat de professionnalisation au Printemps, chez Natixis ou aux Galeries Lafayette. Depuis la loi Cherpion (2011), les entreprises de plus de 250 personnes ont l’obli-gation d’avoir 4 % de leurs effectifs en alternance. Cette exigence n’impose pas la professionnalisation. Mais sur les 1 200 étudiants alternants que compte l’IDRAC Lyon chaque année, 90 % sont en professionnalisation et ont donc trouvé des entreprises pour les accueillir. « Nous proposons ce type d’alternance aux niveaux BTS, Bachelor et Master. Nous avons également un vétérinaire de 30 ans qui voulait acquérir une aptitude tertiaire. Il va faire un Mas-ter 2 Marketing en contrat de professionnalisation “adulte” (plus de 26 ans) », détaille Alain Scappaticci, responsable des alternances à l’IDRAC Lyon. Ces contrats « adultes » constituent un autre avan-tage : amener dans l’entreprise des profils ayant le plus souvent déjà travaillé. Donc plus « professionnels ». Même si l’alternant en contrat de professionnalisation n’est pas compté dans les seuils

« Pour l’entreprise, cela coûtemoins cher que d’engager unsalarié »Julien Cheveux, 22 ans est étudiant en Master 1 International Track à l’INSEEC Chambéry. Il est en contrat de professionna-lisation chez CIAT (Compagnie industrielle d’applications ther-miques).

« Les cours de ce Master International Track sont uniquement en anglais. On y étudie la finance, les RH et le marketing au 1er semestre. Au 2e semestre, on choisit une majeure. Dans mon cas, il s’agit du business international. Pour mon contrat de professionnalisa-tion, je travaille chez CIAT comme acheteur de produits sur l’Asie. J’apprends donc le mandarin et j’ai travaillé pendant quelques mois à Shanghai en Bachelor (Bac +3) à l’ESC Amiens. Mon contrat de professionnalisation est organisé comme tel : deux semaines de cours, deux semaines en entreprise. En Master 2, je passerai trois semaines en entreprise, une semaine en cours. Je trouve que ce type de contrat permet d’acquérir une expérience professionnelle non négligeable. On est considéré comme un salarié à part entière. Pour l’entreprise, cela coûte moins cher que d’engager un salarié. Personnellement, ce contrat me donne des opportunités : il dure jusqu’en octobre 2014 et s’arrête donc à ma diplômation. Le but est d’être prolongé chez CIAT».

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Océane Bracco.

Julien Cheveux.

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Enquête

d’effectifs d’une société, il y est normalement traité comme un col-laborateur. « Il est plus intéressant pour l’entreprise d’avoir un jeune pendant un an considéré comme semi-salarié, qu’un stagiaire consi-déré comme stagiaire pendant six mois. La professionnalisation est plus chère que l’apprentissage, mais les entreprises de notre secteur ne sont pas rebutées pour autant : cette année, trente sociétés ont choisi des contrats de professionnalisation chez nous, et Thalès nous en a pris neuf », témoigne Marc Faudeil, directeur de l’ISEN Brest.

Un « pré-collaborateur »L’an dernier, la rémunération moyenne brute des étudiants en professionnalisation de cette école d’ingénieurs était de 1 430 euros par mois. Ce qui n’est pas déshonorant pour un alter-nant d’une vingtaine d’années et se révèle moins coûteux pour l’entreprise qu’un salaire de collaborateur pleinement embauché. Le contrat de professionnalisation peut également convenir aux profils étrangers. Le réseau N+I, qui regroupe soixante grandes écoles d’ingénieurs en France, cherche à intégrer dans les cur-sus hexagonaux d’ici à la rentrée 2014 des étudiants venus de loin. « Les Anglo-Saxons ont déconnecté de la formation diplô-mante des cursus académiques. En France, un ingénieur diplô-mé est reconnu en tant que tel. Le contrat de professionnalisa-tion est un excellent moyen pour l’alternant de juger l’entreprise, et pour l’employeur d’identifier un futur collaborateur », estime Jean-Pierre Trotignon, professeur aux Arts et Métiers ParisTech et directeur de N+I. Cela permettrait aux étudiants étrangers de finan-cer leurs études. Et aux entreprises françaises de garder des profils internationaux dans leurs effectifs, sur des postes à l’export et des

fonctions axées sur le monde. Ce contrat de professionnalisation permet à l’entreprise d’avoir une personne opérationnelle, formée pendant un ou deux ans. Encore faut-il que l’employeur puisse se projeter. C’est difficile en période de crise. Néanmoins, une entre-prise sûre de son marché et de ses besoins peut aujourd’hui signer un « CDI de professionnalisation » qui équivaudra à une longue période d’essai pour l’alternant : s’il est prolongé dans l’entreprise, il sera alors engagé pour une durée indéterminée. Pour le futur collaborateur, c’est une voie idéale pour s’insérer ou se réinsérer professionnelle-ment. Pour l’entreprise, un moyen efficace de recruter une personne compétente et préparée au monde du travail. Guillaume Serres

Une « alternance d’excellence » à l’UTTAbdessalam Mounaouir, 23 ans est étudiant à l’UTT (Université de technologie de Troyes) en dernière année (Bac + 5) de Systèmes mécaniques (SM). Il est en contrat de profession-nalisation chez Alstom.

« Je fais partie de la première génération d’élèves de l‘UTT en alternance d’excellence. Ces alternances sont des contrats de professionnalisation proposés aux étudiants de cinquième année, qui n’ont qu’un semestre et six UV à valider. Ce contrat me permet d’être en immer-sion complète dans l’entreprise, puisque je passe quatre jours chez Alstom et un jour à la fa-culté. Comme Alstom est à La Défense, je prends mes cours à distance. Ils sont disponibles en streaming. Par ailleurs, les projets qu’on me donne à l’école sont vraiment adaptés à ce que je fais chez Alstom. C’est aussi un contrat très avantageux, puisque nous sommes rémunérés et les frais de scolarité sont pris en charge par l’entreprise. Je me sens tout simplement inté-gré au monde du travail, tout en continuant d’acquérir des connaissances théoriques. C’est la meilleure combinaison. Mais il faut savoir que les étudiants étrangers, comme moi, doivent faire une demande spéciale auprès de la direction de leur département universitaire. »

Abdessalam Mounaouir.

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« Nous sensibilisons nos élèves au contrat de professionnalisation dès la 3e année », rappelle Marc Faudeil, directeur de l’ISEN Brest.

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Reportage

CES ÉTABLISSEMENTS D’ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR QUI DÉVELOPPENT LES CURSUS EN ALTERNANCE

Le Campus Centre de HEI, à Chateauroux,intégrera prochainement un centre de formation de la CCI.

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Le contrat de professionnalisation est une formation professionnelle continue, financée par un OPCA. L’ap-prentissage se fait en formation initiale et est soutenu

par la Région et les CFA (Centres de formation d’apprentis). Ce sont deux formes d’alternance.

L’alternance en facLes universités mettent en place depuis des années des cursus en alternance. Les IUT (Instituts universitaires de technologie) y ont recours depuis longtemps. Le DEUST (Bac + 2) existe toujours malgré la réforme LMD, la Li-

cence professionnelle (Bac +3) et le Master professionnel (Bac + 5) se sont développés. L’Université de Nantes propose ainsi plusieurs Licences et Masters pro en contrat de profes-sionnalisation, principalement en droit, en économie et dans les sciences dures. L’université de Lille I, axée sur l’enseigne-ment scientifique, dispose de près de cinquante diplômes qui peuvent être décrochés en professionnalisation et d’une quinzaine en apprentissage. L’UTT (Université de technolo-gie de Troyes) propose, elle aussi, les deux alternances. « On permet aux meilleurs étudiants en dernière année de notre formation d’ingénieurs de faire leur diplôme équivalent Mas-

À l’initiative des écoles et des universités, l’apprentissage et le contrat de professionnalisation se développent. De plus en plus de cursus diplômants proposent un système d’alternance pour mieux préparer l’étudiant au monde du travail.

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Reportage

ter en contrat de professionnalisation. Nous avons aussi deux cursus intégralement en apprentissage : une Licence pro en MEER (maîtrise de l’énergie et des énergies renouvelables) et, pour travailler dans les métiers de la forge, un diplôme Bac + 5 en PMOM (procédés de mise en œuvre des matériaux), hyperspé-cialisé sur le bassin technologique de Haute-Marne », développe Guillaume Ducellier, responsable du service formation-entre-prises de l’UTT. À la faculté, l’alternant bénéficie de la proximité d’enseignants-chercheurs et d’une grande variété de cursus et de spécialisations.

Chez les ingénieursEn France, la plupart des écoles d’ingénieurs privilégient en-core l’apprentissage sur le contrat de professionnalisation. Les

centres de formation d’apprentis existent depuis longtemps et la gestion administrative de cette forme d’alternance est assez simple. HEI Campus Centre est exemplaire du système mis en place. L’établissement a été ouvert à Châteauroux en septembre 2012 et ne propose que de l’apprentissage. Le campus a été lan-cé à l’initiative de la CCI (Chambre de commerce et d’industrie) de l’Indre. Elle souhaitait depuis vingt ans répondre au manque d’in-génieurs sur le département. Aymeric Gillet-Chevais, directeur de HEI Campus Centre, détaille le principe de son établissement : « Notre cursus commence au niveau Bac +3 et l’alternance est adaptée aux années d’études : un mois académique et un mois en entreprise (1re année), deux mois en école et deux mois en entreprise (2e année), six mois de chaque pour la dernière année. Les élèves obtiennent au final le même diplôme qu’à Lille, mais

Pour Magali Debray, la responsable du pôle alternance de l’EM Normandie, « la répartition des jours entre entreprise et école n’est pas fixe, mais la majorité des cours sont sur les premiers semestres ».

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Reportage

Un classement des « meilleures alternances »Le quotidien Le Parisien-Aujourd’hui en France a publié en 2012 un dossier spécial sur l’alternance, contenant un classement des meil-leures écoles françaises pour l’apprentissage et l’alternance.

Un hit-parade fondé sur la somme de dix critères chiffrés, comprenant entre autres la durée de l’alternance, le nombre d’alternants, l’encadrement, le grade du diplôme et l’insertion professionnelle trois mois après son ob-tention. C’est l’ESC Montpellier qui prend la première place, comptant plus de 400 apprentis et quatre conventions de partenariats. L’école est suivie par l’ESSEC, la première business school française à avoir pris des appren-tis il y a vingt ans. Elle se positionne au deuxième rang avec dix étudiants en valeur absolue pratiquant cette forme d’alternance (3 % des effectifs) et quatre conventions de partenariats entreprises. L’EM Grenoble (2 % de ses étudiants en alternance), comprenant un cursus Management de la technologie et de l’innovation, est troisième. Les sept établissements suivants sont l’INSEEC (Bordeaux-Paris), PPA (Paris), SKEMA (Lille-Paris), l’EDHEC (Lille-Nice), Sup de Co Reims, l’EM Normandie et Euromed Management.

avec une orientation mécatronique. » L’aspect généraliste de l’enseignement n’empêche pas l’apprenti de se spécialiser au sein de l’entreprise. En ce moment, HEI Centre a des apprentis dans l’armement, l’automobile ou les transports. La mécatro-nique touchant à beaucoup de secteurs, un diplômé d’une école comme HEI Centre pourra changer facilement de métier.

En business schoolLes écoles de commerce permettant l’alternance sous des formes diverses et variées sont nombreuses (cf. encadré). L’EM Normandie propose, par exemple, deux choix pour faire son Master. On le prépare en deux ans, en apprentissage ou en contrat de pro-fessionnalisation : l’élève alternant passe alors deux mois à l’école et quatre mois en entreprise sur quatre semestres. Ou l’on opte pour une des dix spécialisations (Audit & Finance d’entreprise, Marketing et Stratégie commerciale…) sur la deuxième année en contrat de professionnalisation. « Dans le cas du Master sur deux ans, les étudiants se spécialisent à travers le choix de leur entre-prise : commerce, marketing... Sur les trois dernières années, il y a eu une hausse des effectifs et une demande pour pouvoir faire l’alternance sur un an. En 2012, on a donc testé des étudiants alternants sous contrat de professionnalisation en SI (systèmes d’informations) et en techniques de RH », précise Magali Debray, la responsable du pôle alternance de l’EM Normandie. Les étu-diants en spécialisation sont mélangés avec des étudiants clas-siques. Pendant que ces derniers sont en stage ou en mission, les premiers sont en entreprise. L’alternance tiendra toujours une place prépondérante dans les business schools. D’autant que 20 à

30 % des PME du secteur commencent à s’ouvrir à l’alternance sur les Bac +5.

Intégration et terrainLes chefs d’entreprise reconnaissent aussi l’utilité des cursus en alternance, notamment dans les secteurs techniques. C’est ce que déclare Philippe Rubio, directeur de la société de travaux TPC : « En ce moment, nous privilégions beaucoup plus les ap-prentis que les contrats de professionnalisation. Nous prenons un jeune ingénieur apprenti chaque année depuis neuf ans. Au début de l’expérience, on rencontrait des jeunes un peu préten-tieux, mais les apprentis respectent désormais leurs engage-ments moraux vis-à-vis de la société qui les accueille. » TPC sé-lectionne ses apprentis au sein d’établissements divers : écoles d’ingénieurs normandes, nantaises et franciliennes, INSA et les lycées pour les BTS. Fabien Lecaillon, ingénieur travaux embau-ché au sein du groupe Vinci en 2012, a passé le diplôme de l’ESITC Caen en tant qu’apprenti. « On faisait six semaines d’école, six semaines d’entreprise. On devait rendre un rapport, faire plu-sieurs soutenances. Je me suis familiarisé avec la conduction de travaux, les études de prix ou les RH. Notre métier est poly-valent, il y a de la gestion humaine, matérielle, financière et de la relation clients », explique le jeune diplômé. Actuellement en CDI, Fabien Lecaillon travaille sur un chantier à 4,5 millions d’euros, dont il est le seul conducteur de travaux : la station d’épuration de Cherbourg. C’est un exemple d’insertion réussie qui prouve qu’une fois diplômés, les anciens alternants se montrent très efficaces dans leurs fonctions. Guillaume Serres

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Hervé Demazure est chef de service à la direction formation et compétences au sein de CCI France.

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Interview

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Il est toujours délicat d’arriver à convaincre une entreprise d’embaucher un « alternant ». Dès lors, comment s’y prendre ? Les conseils de Nathalie Carra et Hervé Demazure, respectivement chargée de mission et chef de service à la direction formation et compétences au sein de CCI France.Les CCI (Chambres de commerce et d’industrie) françaises constituent un acteur majeur de l’alternance. Près de 60 % de leurs apprentis suivent un cursus Bac et plus. Nathalie Carra et Hervé Demazure, de CCI France, nous conseillent sur les voies à suivre pour intégrer au mieux une entreprise et un centre de formation.

Quelle est la bonne saison pour chercher un em-ployeur prêt à vous former sous statut de salarié ?Nathalie Carra. En avril-mai. Le candidat a intérêt à profiter des journées portes ouvertes au printemps organisées par les écoles, CFA, universités, lycées professionnels afin de se renseigner sur les métiers et les secteurs en quête d’alter-nants. Le postulant apprenti a de fait jusqu’à la fin décembre pour trouver une entreprise. Le contrat de professionnali-sation lui, souvent plus court, est plus souple. Il dépend des budgets de l’OPCA qui le finance. Les cours peuvent donc ne se dérouler qu’en 2014. Cette formule peut être d’ailleurs une issue de secours pour celui qui n’a pas eu de contrat d’apprentissage à temps. Les CFA mixent les publics.L’établissement a-t-il un rôle si important ?Hervé Demazure. Ce rôle est déterminant. Il faut trouver le

CFA (ou organisme de formation) avant de chercher l’entre-prise. D’abord, parce que c’est l’établissement qui valide le projet et la candidature du candidat. Si d’aventure ce dossier était recalé, parfois faute de place, une fois l’entreprise trou-vée la situation deviendrait délicate à gérer. Ensuite, les CFA aident leurs élèves à trouver des PME ou filiales de groupes ouvertes à la formule de l’alternance. S’ils ne les démarchent jamais à la place du jeune – ce ne serait guère pédagogique –, ils lui ouvrent leur carnet d’adresses. Où trouver d’autres pistes ?Nathalie Carra. Sur notre site Internet, par exemple (www.cci.fr), en particulier sur le site des « bourses de l’alternance » (www.bourse-apprentissage.com) qui facilite les contacts entre étudiants et entreprise. Mais il y a aussi les salons de l’alternance, les points A des CCI, les contacts de l’Afij (Asso-ciation pour faciliter l’insertion professionnelle des jeunes diplômés), le réseau des parents, amis, etc. Il faut faire feu de tout bois.L’entreprise engage un recrutement. Est-ce une for-malité ou une étape sélective ? Hervé Demazure. Il y a deux étapes sérieuses. En CFA d’abord, le candidat passe un entretien pour valider si le mé-

L’ART ET LA MANIÈRE DE DÉCROCHER SON CONTRAT D’ALTERNANCE

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Interview

« Les employeurs veulent savoir pourquoi on les choisit » Cyrille Godefroy, 22 ans, est apprenti en 1re année de cycle ingé-nieur au Campus Centre de Châteauroux de HEI.

« J’ai démarré ma recherche d’entreprise en juillet 2012 dès que j’ai su que j’étais admis à l’école. J’ai regardé les secteurs qui m’attiraient et j’ai épluché les annuaires, Internet. J’ai aussi étu-

dié les contacts de HEI. J’ai suivi les deux pistes pour optimiser mes chances. J’ai appelé les RH qui m’invi-taient alors à leur écrire. Mon CV était prêt, mais pas la lettre de motivation. J’ai pris soin de la personnali-ser à chaque envoi. C’est important. Les employeurs veulent savoir pourquoi on les choisit eux. Alors, je me suis beaucoup documenté.

Chez le plasturgiste qui m’a embauché près de Vendôme, j’ai pu dire que la PME m’intéressait parce qu’elle avait de l’avenir. J’avais vu que son chiffre d’affaires ne cessait de progresser. La PDG avait en outre reçu des prix. Par écrit, j’ai expliqué mon projet professionnel, mon goût de la technique et de l’organisa-tionnel en continuité avec mon BTS électrotechnique. De fait, le travail en bureau d’études ne me passionne pas. À l’oral, lors d’un entretien global avec trois opérationnels, j’ai valorisé mon ex-périence des projets dans une association. On m’a vite proposé une mission d’ingénieur méthodes dans le domaine des auto-matismes industriels. Pile ce que je voulais. J’ai dû dire “oui” sur l’instant, car la PME avait essuyé plusieurs refus avec d’autres candidats. » M.-M. S.

tier choisi est fait pour lui, s’il a le niveau et les qualités requises. Et il n’est pas rare qu’un patron de PME soit présent, si celui-ci recherche des apprentis. Le jeune doit savoir se vendre. Chez l’employeur ensuite, pour lequel il faut réaliser un CV mention-nant ses expériences, son projet et rédiger une lettre de moti-vation. La plupart du temps, les formateurs le préparent à cela. Une fois le contact établi avec un RRH (responsable des rela-tions humaines) en entreprise, le postulant passera un entretien de recrutement puisqu’il sera un salarié comme les autres. Ce moment est sélectif. Les grands groupes de distribution, notam-ment, ont un processus d’embauche bien rodé pour leurs alter-nants. Rien n’est laissé au hasard. En PME, cela se déroule de fa-çon moins formelle et parfois directement avec le patron. Mieux vaut toutefois bien connaître l’entreprise, montrer son intérêt pour elle. Le jeune considère trop souvent que l’alternance est un moyen de poursuivre ses études alors que c’est déjà un pied dans le monde du travail.Quels arguments peuvent aider le jeune à bien se vendre ?

Nathalie Carra.Sa motivation et la bonne connaissance des dis-positifs. Beaucoup d’employeurs méconnaissent en effet ce type de contrat. Il est astucieux alors de mettre en avant les avantages qu’ils peuvent en retirer : allégements de charge, aides régionales, crédits d’impôts. Savoir parler des aspects administratifs, c’est s’approprier le sujet. C’est un avantage. Le candidat peut aussi ajouter que, inscrit dans une filière du supé-rieur, il apportera son savoir tout neuf sur l’état de la recherche et les dernières techniques ou innovations. Autre conseil, mieux vaut vérifier les termes du contrat avant de le signer. Pour l’ap-prentissage, le texte doit mentionner les noms de l’entreprise, du jeune et du maître de stage, la rémunération, le centre de formation, le diplôme préparé et la durée de travail hebdoma-daire. Puis, il faut s’assurer que le contrat est bien enregistré auprès des chambres consulaires. Le professionnalisant sera, quant à lui, vigilant sur les termes de la convention de forma-tion et la réelle disponibilité des financements en temps voulu. Propos recueillis par Marie-Madeleine Sève

L’Anaf, une association qui accompagne les alternantsRéseauter pour dénicher la bonne entreprise ! C’est la préco-nisation de l’Association des apprentis de France, créée à la fin 2010 en vue d’aider les jeunes avant, pendant et après le contrat d’alter-nance. « Nous préparons les alternants à aborder l’employeur sous l’angle de ce qui l’intéresse lui. Plutôt que de lui parler du poste et de l’impor-tance du contrat pour leur forma-tion, ils lui parleront d’abord marché, techniques, produits pour établir le contact », explique Morgan Marietti, 24 ans, cofondateur et président de l’Anaf. Cette méthode du réseau-tage à l’anglo-saxonne s’inspire de celles des outplacers. Globalement, elle se découpe en cinq étapes. 1. Travailler sur le référentiel du métier. 2. Cibler un opérationnel en entreprise et élaborer à sa destination un questionnaire sur un thème précis. 3. Lui téléphoner à en se présentant comme étudiant et l’interro-ger : « J’ai noté que vous utilisiez tel procédé chez vous, j’ai vu cela en cours, mais je n’ai pas tout saisi. Pouvez-vous m’expli-quer ? Puis-je vous rappeler si nécessaire ? ». 4. Rappeler en poussant l’échange et prendre rendez-vous. 5. Approfondir le sujet lors de l’entretien, sentir ses besoins et offrir ses ser-vices comme apprenti (ou professionnalisant). À défaut, sollici-ter des contacts ailleurs. À cet effet, l’Anaf propose des stages de 3 à 6 heures pour un tarif allant de 10 à 25 € le module, l’adhésion coûtant, quant à elle, la modique somme de 2 €. www.a-n-a-f.fr. [email protected]. M.-M. S.

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Cyrille Godefroy.Morgan Marietti.

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Morgan Marietti. www.forum-charlety.fr Des opportunités & des métiers

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