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Un regard Inoubliable - ekladata.comekladata.com/9l7erSK33FoDjLWoRuq2Ia52Qdg/EBOOK_Lebaillif_Steph… · Chapitre 1 – Allez, ma belle, sors un peu de chez toi ! Tu vas bien t’amuser,

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UNREGARDINOUBLIABLERomance

LEBAILLIFStéphanie

UNREGARDINOUBLIABLERomance

ISBN979-10-93434-43-8byceriseavril2015©Erato-Editions

TousdroitsréservésCetteœuvreestprotégéeparledroitd’auteuretstrictementréservéeàl’usageprivéduclient.Toutereproductionoudiffusionauprofitdetiers,àtitregratuitouonéreux,

de tout ou partie de cetteœuvre, est strictement interdite et constitue une contrefaçon prévue par les articlesL 335-2 et suivants duCode de la Propriété intellectuelle.L’éditeurseréserveledroitdepoursuivretouteatteinteàsesdroitsdepropriétéintellectuelledevantlesjuridictionscivilesoupénales

Résumé

LorsqueMathildeseretrouveentraînéeparsonamieLéaàunesoirée,unbalmasqué;elleestloindesedouterqu’ellevavivreungrandbouleversement,quiserauntournantdanssavie.

Cettejeunefemmetimideetréservée,préférantlasolitudeetladiscrétion;vaconnaîtredesémotionsinconnuesetdangereuses.

Maisquiestcethomme,auregardinoubliableetcaptivant?

Commentpeut-ilprovoquerenellecetabandondesoi?

Commentpeut-ilfairecirculerdanssesveinescettebrûluresisournoiseetenmêmetempssidélicieuse?

Chapitre1

–Allez,mabelle,sorsunpeudecheztoi!Tuvasbient’amuser,tuverras.

–Non!N’insistepas,rétorqualajeunefemme,fermement.

– Tu ne vas pas encore ester enfermer un samedi soir ; toute seule. Michel et Anna ont eu lagentillessedet’envoyeruneinvitation;tunepeuxpasrefusertoutdemême!

Depuisplusd’uneheure,LéaessayaitsansrelâchedeconvaincresonamieMathilded’assisteràunbalmasqué;quiavaitlieulelendemainsoirchezdesamiscommuns.MaisMathilden’aimaitpastropsortir,etLéacommençaitàsedemandersielleallaitarriveràl’emmeneràcettesoiréecommeellel’espérait.

–Celanemeditriendutout,soupiralajeunefemmeens’asseyantsurunfauteuil.Etpuismêmesijemedécidaisàvenir,jen’airienàmemettredetoutefaçonalors…

–Net’inquiètepaspourcela,s’exclamajoyeusementLéa.J’aitrouvélarobeparfaitepourtoi.Jedoisallerlacherchercesoir,aumagasinoùjel’aicommandéaveclamienne.Donc,toutestréglé;tun’asplusaucuneexcuse,conclut-ellemalicieusement.

–Maispourquoim’as-tuachetéunerobe,alorsquetunesavaispassij’allaisvenir?Parailleurs,tumedirascombienjetedois.

–Alorstuviens?demandasonamie,ravie.

–Ai-jelechoixfranchement,Léa?Tun’arrêtespasdepuistoutàl’heuredemeressasserlamêmechose.Jeviens,maisàconditionquejeteremboursecetachat.

–Non.C’esttoncadeaud’anniversaire,répondit-elled’untoncatégorique.

–Maismonanniversairen’estquedanssixmois!protestaMathilde.

– Pour une fois que je ne serai pas en retard sur quelque chose. Et puis cette robe ne pouvaitvraimentpasattendred’êtreportée.

Mathilderegardasonamied’unairperplexe.Depuisqu’ellesseconnaissaient,Léaavaittoujourseulechicpouravoirdestenues«tapeàl’œil»seditlajeunefemme.Unpeutropsexy,voiremêmeoutrageantes. Ou alors elles étaient surprenantes par leurs couleurs, leurs extravagances. Prenonscommeexemple la tenuequeportait la jeunefemmeaujourd’hui :un tailleurà lacoupe trèsstrict,maisd’unrosevifquiétaitloindepasserinaperçu.Etcommesicelanesuffisaitpas,lecoletleborddesmanchesétaientd’unjauneaussiéblouissantqu’unsoleil.Maismalgrésestenuesbienàelle,celanegâchaiten riensabeauté.Depetite taille,elleavaituncorps finà lapeaubronzée.Sescheveuxnoirs, coupés courts, encadraient un visage rond bien dessiné. De jolis yeux bleus rehaussés desourcilsfinsdonnaientàsonregarduneffetlumineux.

–Jen’oseimaginerquellerobetum’aschoisie!

– Ne t’inquiète pas, je suis sûr qu’elle te plaira, la rassura-t-elle. Très sexy,mais pas vulgaire.

Quandjel’aivue,ellem’atoutdesuiteplu.

–Pourquoinel’as-tupasprisepourtoialors?demanda-t-elle,étonnée.

–Jesuistroppetitepourcegenrederobe.Etpuismoileblanc,nonmerci;jepréfèrelacouleur.Toi,avecteslonguesjambes,ellet’iraàravir.

–Situledis,jeveuxbientefaireconfiance.ConclutMathilde.

Lesdeuxamiesrestèrentencoreunmomentàdiscuterdetoutetderiendevantuncafé.

LorsqueLéafutpartie;Mathilden’arrêtaitpasdesedemanderpourquoielleavaitcédéàsonamieausujetdecettesoirée.

DepuissaruptureunanplustôtavecMartin;ellerestaitchezelle;aussibienaprèssontravailquelesweek-ends.

Nesortantquepourallervoirsesparentsquihabitaientunappartement,quelquesruesplusloin.Savieétaittrèssimple,etsurtoutsansimprévus.

Ainsi,avecunevieaussibienplanifiée;celaluiévitaitlesdésillusions.

Léa lui avait proposé plusieurs fois de sortir avec elle, pour une soirée entière ; ou bien justehistoired’allerboireunverre,uniquementtouteslesdeux,ouavecdesamis.

Mêmepouralleraupubducoin,elleavaittoujoursrefusé.Elletrouvaituneexcuse.Àchaquefois!

Léa n’était pas dupe de toutes ses excuses, loin de là.MaisMathilde ne voulait pas s‘imposer,sachanttrèsbienqu’elleseraitdetrèsmauvaisecompagniedetoutefaçon.

Elleavaitperdutotalementsajoiedevivre.LajeunefemmeavaitcruqueMartinétaitl’hommedesavie.Leurséparationquelquepeubrutalel’avaitchamboulé.

Étantsonpremieretseulamant;ellesavaitquecetteruptureseraitplusdifficileàoublier,àeffacerdesamémoirequesespetitsflirtsprécédents.Maisdepuisquelquessemaines;elleavaitl’impressiondevoirleboutdutunnel.

L’avenir lui semblait moins sombre, moinsmorose. Avec le temps, cela était devenu beaucoupmoinsdouloureuxd’ypenseretd’enparler.

C’estcequeluiavaitditsonamieautoutdébutdesoncalvaire.Léaétaitégalementsacollègue.

Ellestravaillaientensembledepuistroisans,àlabibliothèqueprincipale.Elleavaitétélà,quandçaallait mal. Elle l’avait écouté, réconforté dans les moments difficiles. Mais maintenant son amietrouvaitqu’ilétaittempspourelledetournerlapage,desortir,des’amuser.

Etsurtoutdefairedenouvellesrencontres.Etpourunefois,elleseditqu’elleavaitraison.

Peutêtrepasencorepourlesrencontres,maisentoutcasfiniderestercloîtréetouteseulechezelleàpleurer.Finide s’apitoyer sur son sort.Elle irait aubaldemain soir, s’amuserait commeellenel’avait jamais fait ; sans toujours seposerdesquestions et faire attentionauxconséquencesde sesactes. Elle allait arrêter de se fermer aumonde extérieur.Au bal, elle sera joyeuse, insouciante etspontanée.Ellevoulaitenfinprofiterdelavie,totalement.

Lelendemain,aprèsunebonnenuitdesommeil,elledécidadesefaireplaisirenallantvoirsielle

pouvaittrouverquelquechosepourcompléterlatenuedecesoir.

Léaluiavaitditquesarobeseraitblancheetsexy.Illuisuffisaitdetrouverunepairedechaussuresquirépondraitàcescritères.

Cesbonnesrésolutionsdelaveilleétaienttoujoursd’actualité,etellecomptaitbiens’ytenir.

Fini«laMathilde»timideetréservée.Cesoir,ellevoulaitétonner,éblouir,etsurtoutnepaspasserinaperçuecommeàsonhabitude.

Ellevoulaitprofiterdecettesoiréeaumaximum.Elletrouvadoncdejolistalonshauts,d’unblancperle;s’achetaunsandwichetdécidadeflânerunpeudanslagaleriemarchandedugrandmagasin.Sesyeuxs’arrêtèrentsurunpendentifdisposédanslavitrined’unbijoutier.Unangeblanc,suspenduàunechaîned’unetrèsgrandefinesse;letoutdisposésuruncoussindeveloursbleuroi.Sonprixétaitunpeuélevé,maiselleneputrésister.

Elleneput résisternonplusauxdeuxpeignesargentésque lavendeuse lui conseillaetqui, elledevaitbienl’admettre,compléteraientàmerveillesatenue.

À son retour, elle prit un bon bain ; se massa le corps avec un lait de toilette, comme à sonhabitude ;puis semaquilla légèrement.Aprèsavoir séchésesboucles rousses, elle les relevad’unpeignedechaquecôté,pourdégagersonvisage.

Mathilde se vaporisa d’un parfum que ses parents lui avaient offert pour Noël dernier ; et seregardaattentivementdanslemiroir.

Léaluidisaitsouventqu’elleétaitunetrèsbellefemme,maiselleavaitdûmalàs’enconvaincreencequilaconcernait.

Pourtant,enseregardantdeplusprès,elleconstataqu’ellearboraitunvisagefinetdélicat.Petitnez mutin, lèvres fines bien dessinées d’un rose clair. Une peau laiteuse avec de petites, maisnombreusestachesderousseursurlespommettes.

Sonamieluidisaitquecelaluidonnaituncharmesupplémentaire.Sesyeuxenamandeétaientd’unvertémeraude.Ilsétaientrehaussésdesourcilsclairsetdiscrets.

Effectivement,enseregardantavecattention,onpouvaitenconclurequ’ellen’étaitpeut-êtrepassiinsignifiantequ’ellelecroyait.

Chapitre2

Lasonnettede laported’entrée l’a fît sursauter.Ellecourut l’ouvriren resserrant laceinturedesonpeignoir.

–BonsoirLéa!

–Bonsoirmabelle!Alors,toujoursdécidéeàm’accompagnerj’espère?

–Ouibiensûr;plusquejamais.Entre.

– J’avais peur envenant que tu ne trouves encoreune excusepour nepas venir, déclaraLéa enpénétrantdansl’appartement.

–NonLéa;j’aidécidédem’amusercesoir.J’aienviedepasseruneexcellentesoirée.

–Ah !Enfin ; te voilà gaie et pleine de vie, soupira la jeune femme, soulagée. Il était plus quetemps!Tiens,tarobe.Etnemedispasqu’elleesttropsexy.Jeneveuxaucuneobjection.Enfile-lavite!

EllesarrivèrentchezMicheletAnnapourlebalmasqué.Touslesinvitésdevaientporterleurloup,qui leur avaient été envoyé avec les invitations. Leurs hôtes attendaient leurs amis à l’entréeprincipale.

–BonsoirMichel.Anna,tuesresplendissante!

–MerciLéa.Jevoisqu’aveccetteroberougetunepasseraspasinaperçue,commeàtonhabitude!

–Oui,jen’aimepasladiscrétion,répondit-elleenriant.

–C’estbientoiMathilde?

–Ehoui.

–Quelchangement!Jenet’auraispasreconnuesiLéanenousavaitpasditquevousarriveriezensemble. Cette transformation est totale ! Le jour et la nuit avec ton apparence habituelle ; sansvouloirteblessermachère,ajoutaprécipitammentMichel.

–Sansproblème,lerassuraMathilde.

–Oui,tuesravissante,etcetterobeestsimplementmagnifique.

–MercibeaucoupMichel,réponditlajeunefemme,lesjouesrouges.J’aidécidédesortirdurangcesoir.Etcetteidéedebalmasqué,quellemerveille!

–Oui,celadonneuncôtémystérieux.Allezentrertouteslesdeux,etamusez-vous.

Lasallederéceptionavaitétédécoréepourl’occasion.Desdoublesrideauxbordeauxencadraientles nombreuses portes-fenêtres.Une immense table de buffet avait été soigneusement dressée. Lesvasesencristalétaientgarnisdesuperbeslysblancsdoncleparfumembaumaitlapiècetoutentière.

Des chandeliers, d’où les bougies scintillaient ; étaient disposés ici et là. Les premiers invités quiétaient arrivés dansaient déjà au rythme de lamusique ; tandis que les arrivants s’installaient auxtablesrondesrecouvertesd’unenappeblancheetdevaisselleenporcelaine.

Lasoiréesedéroulaittrèsagréablement.

Mathildeacceptatouteslesinvitationsàdansersansretenue.

Ses cavaliers étaient très divers. D’un grand blond sec de tout juste vingt ans, au petit trapugrisonnantquiauraitpuêtresonpère…

Elle s’était arrêtée juste le temps demanger un peu de salade composée et était repartie danser.Mathildes’amusaitfollement,discutantdetoutetderien.

C’était trèsagréablededanseravecdeshommes,sanssavoirqui ilsétaientpourcertainsd’entreeux.Maissurtout,cequiétaitagréable,c’étaitqu’euxnesachentpasquielleétait.

Avec cette tenue, qui n’était pas dans ses habitudes ; aucun n’avait réussi à savoir qui elle étaitvéritablement.Beaucoupavaientessayé,enluiposantdenombreusesquestions.Maislajeunefemmeneleurrépondaittoujoursqu’évasivement,enminaudant.Sonidentitéavaitpuêtrepréservée,carlespersonnes qui la connaissaient avaient dans l’esprit l’image d’une jeune femme habillée trèssévèrement;lescheveuxtoujoursattachésenunchignonserré.

Quelqu’undetotalementfade,presquetransparente.Parailleurs,trèspeuparmicespersonnesquilacôtoyaiententantquebibliothécaireneluiavaitmanifestéderéelsintérêtsauparavant.Danssaviequotidienne,ilsnecherchaientpasàcréerlemoindrelienavecelle.Mathildeenprofitadoncenselibérant totalement.Elledevenait deplus enplus séductrice au fur et àmesuredesdanses ; et celal’amusaitvraimentbeaucoup.

*****

Thomasétaitassisàsatable,unverredechampagneàlamain;regardantlesinvitésvalserdanslasalle.

Michel lui avait envoyécette invitationqu’il avait aupréalable jetéedans sa corbeille àpapier ;puiss’était ravisé,sedisantqueseserait l’occasiondesechangerunpeut les idéesetderevoirdebonsamis.N’était-ilpasvraiquedepuisplusieurssemainesiltravaillaitd’arrache-piedpourfinirsesdernièrestoiles.Et,ilyaunesemaine,lespropriétairesd’untrèsgrandrestaurant,oùilluiarrivaitdedîner,l’avaientcomplimentésursesœuvres.Ilsavaientvu,unanplustôt,sonexpositionàparis;etluiavaientditcombienceseraitunhonneurpoureuxd’avoirdansleurétablissementuneœuvredel’artiste.Ilsavaientinsistéendemandants’ilseraitpossiblequ’ilfasseuntableauspécialementpoureux.Généralement, les tableauxdeThomasétaientdestinésàêtreexposésdansdesgaleriesd’art ;maisilluiarrivaitdedérogeràcetterègleenpeignantdirectementpourunclient.Unepersonnequ’ilconnaissaitpersonnellementdanstouslescasetàquiilvoulaitfaireplaisir.Naturellement,leprixdel’œuvreétaitunpeumoinsélevé,parrapportauxtableauxquisevendaientengalerie,maisaumoinsilenretiraittoutelagloire.Etpuiscelaimportaitpeut,carilavaitdequoivivreconfortablement,deplusrevoirdetempsentempscesœuvreschezcesparticuliersluiapportaitunsentimentdefiertéqueriennepouvaitégaler.Carpourcequiétaitdestableauxqu’ilconfiaitengalerie,ilnes’intéressaitpasparticulièrementauxacheteursetnesavaitmêmepasleursdestinations.

Maiscesoir,Thomasvoulaitsoufflerunpeuetprofiterdecettesoiréederepos.

Depuissonarrivée,sonattentions’étaitportéesurcettejolierousse,quiattisaitsacuriosité.Ellesouriait, s’amusait, flirtait légèrement même avec tous ses partenaires de danse. Elle valsaitdivinement,maistoujoursengardantunecertainedistanceavecsoncavalier,avait-ilremarqué.Lui,n’avaitjamaisétéunadeptedelavalse;maisdèsquelasériedeslowsdébuta,ilsedirigeadroitverselletoutenlaregardantdespiedsàlatêteavecadmiration…maissurtoutavecenvie.

Sarobeblanchemoulaitsoncorpsparfaitementdessiné.Undécolletéplongeantlaissaitdécouvrirlanaissancedesesseinsgénéreux.Decettefentesurlecôtéonpouvaitentrevoirunejambelongueetfine.Sondosétaitnu.

Elleavaitunepeaudélicateetpure.Ilvenaitdes’apercevoirquesaroben’étaitretenuequeparunerosette derrière la nuque, que recouvrait unemagnifique chevelure bouclée. Plus il la détaillait, etpluslespicotementsdanslebasdesondosétaientnombreuxets’intensifiaient.

Chapitre3

Aprèsavoir remercié le jeunehommeavecquiellevenaitdedanser,Mathildes’apprêtaitàallers’asseoirlorsqu’unevoixgrave,derrièreelle,lafittressaillir.

–M’accordez-vouscettedanse?

Enseretournant,elledécouvritunhommedegrandetaille,dansuncostumegrisclairàlacoupeparfaite. Sa chemise blanche, ouverte au col, laissaitmontrer une pomme d’Adam prononcée. Sescheveuxnoirs,coupéscourts,étaient impeccablementcoiffés.Soussonloupreflétaitdesyeuxd’unbleu intense.Un regard déstabilisant.Un sourire charmeur dessinait ses lèvres. Il avait unmentonvolontaireetsoigneusementrasé.

–Vousêtesentraindevousdemandersivousdevezaccepterounonmoninvitationàdanser,n’est-cepas?dit-ilavecunsouriremoqueur.

–Non…biensûrquenon!

–Alorsdansons,voulez-vous?

–Mais,trèsvolontiers,répondit-elled’unevoixlégèrementtremblante.

Ill’enlaçaavecdouceur,maisbeaucoupplusétroitementquenécessaire.

La jeune femme ne songea même pas à s’écarter, comme si ce rapprochement était une chosenormaleaveccepartenaire.

Ellepouvaitsentirsarespirationcalmeetrégulière.Samainfermesursondosnuluiprocuraitunefortechaleur,trèsagréable;devait-elles’avouer.

Il avait de grandesmains puissantes aux longs doigts. Il n’avait absolument rien de comparableavecsesautrescavaliersdelasoirée;mêmesicertainss’étaientmontrésd’agréablescompagnons.

Il émanait de lui une force tranquille ; un charme impressionnant. Il devait avoir une trentained’années;etmalgrécemasquequiluicachaitlehautduvisage,onnepouvaitqueconstaterqu’ilétaitbelhomme,vraimenttrèsbelhomme.Unétaitrarederencontrerunhommeaussiséduisant,toutenayantuntroublantmagnétisme,presqueanimal.Ilsdansèrentplusieursslowslangoureuxensemble,sansmême penser à s’arrêter ; comme s’ils étaient seuls tous les deux, seuls aumonde. Elle étaitlégèrementpluspetiteque lui, et si fragiledans sesbras, constataThomas.Sapeauétait fraîcheetdouce;quantàsonparfum…

–Délicieux…

–Jevousdemandepardon?

–Vous…êtesdélicieuse.

–Merci.

–Cetterobeestunemerveille.Lasoieestsidouce,unematièretellementagréableaucontactdelapeaunue.

–Cen’estpaslegenredetenuequejeportehabituellement,sedéfendit-ellesanssavoirréellementlaraisonquilapoussaitàleluirévéler.

–Ahbon,pourquoi?

–Euh…disonsquec’estunpeutropsexy,s’excusa-t-elle.

–Non,justecequ’ilfautjedirais,murmura-t-ild’unton,charmeur.Vousêtesvenueseulecesoir?

–Non,avecuneamie.C’estelled’ailleursquiachoisicetterobe.

–J’aimerail’enremercier,répondit-il,malicieux.

–Ellemetrouvegénéralementtropdiscrète,effacée,ajoutalajeunefemmesansprêterattentionàsaremarque.

–Sinoussortionsprendrel’airunpeu?Lanuitestsidouce.

–Oui,celameferaleplusgrandbienàmoiaussi.Jen’aipasarrêtédedanserdetoutelasoirée;etleparfumdeslysmedonneunpeuletournis.

Mathildenesavaitpaspourquoielleluiracontaittoutça,maisellenepouvaitsansempêcher.Elleavaitbesoindeparler;parlerpourluiéviterdesesentirmalàl’aise.Parlerpouréviterqu’untropgrandsilences’installeentreeux.Parlerpouressayerd’ignorercetteattirancequ’elleressentaitpourcetinconnu.Maistoutcelaétaitmalheureusementinutile.

–C’estvraimentunetrèsbellemaison!ajouta-t-elleenregardantautourd’elle.

Oui,unemagnifiquepropriété.Lejardinétaitparfaitemententretenu.Ilyavaittoutunéchantillondeplantesetde fleurs.Deshortensiasà lacouleurviolacée,desparterresde jonquillesd’un jaunepâle. Des rosiers rouge et blanc bordaient les allées recouvertes de petits cailloux blancs. Unemagnifiquefontaineétaitdresséeaumilieud’unbassin.

Plusilss’éloignaient,moinsilsentendaientlesmurmuresdesconversations,moinsilsentendaientlebruitdelamusiqueetlesriresdesinvités.

–Asseyons-noussurcettebalancellelà-bas,voulez-vous?

–Oui,celamepermettrad’enlevermestalons;j’aiunpeumalauxpieds.Jelesaiachetéespourl’occasionetleschaussuresneuvesnemeréussissentpasd’habitude.J’auraispeut-êtredûenacheterdemoinshautes,oubien…

– Pourquoi parlez-vous autant ? l’interrompit-il. Seriez-vous nerveuse par hasard ? demandaThomasavecmoquerieenlafixantdesesmagnifiquesyeuxbleus.

–Euh…non.

–Passez-vousunebonnesoirée?demandalejeunehommeenchangeantdélibérémentdesujettoutens’asseyant.

–Oui, assez, réponditMathilde, soulagée qu’il n’insiste pas.Et commemedisaitMichel àmonarrivée ; ce thèmedebalmasquédonneunaspectmystérieux. Je suis tout à faitd’accordavec lui.

C’esttrèsagréable,déclara-t-ellesanscessersonbavardage.

–Quetrouvez-vousdesiagréableaufaitdeporterdesmasques?

–C’esttrèsexcitantdepouvoirdiscuterdetoutcequel’onveut,sansfairetoujoursattentionàquil’on parle. On a l’impression d’être complètement caché grâce à ces loups, et cela permet d’êtremoinsréservé.Jeparlepourmoibienentendu,conclut-elle,timidement.

– Quant à moi, je ne me cache surtout pas et je suis très loin d’être réservé. Je porte ce loupuniquement pour ne pas vexer nos hôtes. Mais je n’ai nullement besoin d’un masque pour direréellementcequejepense,etressens.

–Qu’entendez-vousparlà?demanda-t-elleenfronçantsessourcils.

Ils’étaitrapprochéd’elledesiprèsqu’ellepouvaitvoirl’éclatdesesyeuxsiétincelant.

–Vousmeplaisez.J’aieuenviedevousembrasserdèsquejevousaivu,murmura-t-il.

–Nousnenousconnaissonsmêmepas!s’offusqua-t-elle.

–Jen’enainulbesoinpourvoustrouvertrèsattirante.N’avez-vouspasditvous-mêmequevoustrouviezcemystère…excitant?

–Pourdiscuter,oui,mais…

–Maisquoi?insistalejeunehomme.

–Mais rien.Apparemment il y a unmalentendu entre nous, dit-elle en s’écartant un peu de lui.Désolez,jenesuispascellequevouspensez!

–Etd’aprèsvous,qu’est-cequejepense?J‘aimeraibienlesavoir.

–Que…quejesuisdugenredecesfemmesquicherchentunhommepourlanuit.Maisc’estfaux!J’aivoulujouerunrôlequin’étaitvraimentpaslemien.Cetterobe,cettecoiffure,cen’estpasmoi!s’emportaMathilde.

–Celavousvapourtantsibien.

–Laseuleetuniquechosequim’aillebienc’estcetange,enpendentif ;c’est tout. Ilestcommemoi,sageetsansdésirs.

–J’aimeraiêtreàsaplace,auchaud,contrevosseins.

Mathildes’empourpra.Elles’envoulutd’avoirattirésonregardsursapoitrinemiseenvaleurparsondécolletéquiétaitdevenupourelletoutd’uncoupabsolumentindécent.Elleposaunemainsursesseinsgénéreuxenespérantparcegestelesdissimuler.

–Inutilemabelle.Jelesvoistoujours,déclara-t-ilpoursemoquerd’elle.

–Jesuisencoredésoléedevousavoirfaitcroirequ’ilpouvaityavoirquelquechoseentrenous.Maiscen’estpaspossible.

–Vosexcusesnem’intéressentpas,majolie,répondit-ild’unevoixrauque.

–Maintenantjerentre,déclaraprécipitammentMathilde,affoléeparl’intensitédesonregard.

Ill’encerclaparlatailleaumomentoùelleallaitselever.Ilétaitsiproched’elle,tropprès.Ellesentaitsarespirations’accélérer,toutcommecelledujeunehomme.Savoixétaitrauqueetsensuellelorsqu’ilmurmura:

–Êtes-voussûrd’êtresansdésirs?

–Quoi?

–Vous avez dit que vous étiez sans désirs, comme cet ange. « Sage et sans désirs » ; sont vospropresmots.

–Oui.Laissez-moi…

Thomasl’attirasoudaintoutcontreluietl’embrassaavecavidité.Mathildesentaitdespicotementslui courir le long de la nuque. Sa bouche était douce, chaude. Il éveillait en elle des émotionsinconnues.Quandils’écartaenfin,ellesentitsesjouesenfeu,rougeparledésir.

–Alors;êtes-voustoujourscertaineden’éprouveraucundésir?susurra-t-il.

–Sij’enai;etjedisbiensi;jen’aijamaisditquejevoulaislesassouviravecvous!hurla-t-elle.

–Ahbon,enêtes-voussûr?J’aipourtantl’impressiondevousavoirquandmêmefaitdel’effet,luiréponditThomas,ironique.

–Non!

–Menteuse!savez-vouscequedisaitMaupassant?

–Non.Dit-ellesanscomprendreoùilvoulaitenvenir.

–«Qu’unbaiserlégalnevautjamaisunbaiservolé.»

Etsurcesmots,ill’embrassadenouveau.

Sonbaiser l’incendia ; soncontactétait si agréable, si chaud.Unesensation inespérée. Il régnaitautour d’eux une atmosphère enfiévrée. Sans savoir ce qu’elle faisait réellement, elle semit à luicaresserlesépaules,enleverlespremiersboutonsdesachemise.

Sesmainsagissaientsansqu’elles’enaperçoive,inconsciemment.Elleeffleurasontorsepuissantavecaudace;ellesesentaittransportée.Thomas,quantàlui,défitlarosettedesoiederrièresoncou;découvrantsesseinsnus.Sesmainsdescendirentpourlestoucher.Elletremblaitd’émotionssoussesdoigtsexperts;enencoreplusquandilsepenchasursapoitrineofferte.

Souscecontact,Mathildesecambradavantage,émerveillée.Ilcaressaitsoncorpssansretenue.Sabeautél’exaltaittotalement.Puisilpassasamainparlafentedesarobe,pourcaresserlecreuxdesescuisses;toutesaféminité.

–Vousêtessidouce,sibelle,siréceptive.J’aienviedevousfairel’amour.Unetelleenvie,gémit-il.

Chapitre4

Mathilderevinttoutàcoupàlaréalité.Lesondesavoixl’avaitcommetiréd’unrêveéveillé.Ellelerepoussapresqueviolemment.Queluiétait-ilarrivé?Commentavait-ellepuseconduiredecettefaçon?Commentavait-ellepu le laisser lacaresser, l’embrasser?S’iln’avaitpasparlé, s’il avaitcontinué à parcourir son corps sans prononcer un seulmot ; elle se serait sûrement donnée à lui.Donnéesansretenueàuninconnu.Ellerougitdehonteàcetteidée.

–Je…jenepeuxpas…murmura-t-elle,essoufflée.

Elle se rajusta précipitamment ; ramassa ses chaussures, et s’enfuit vers lamaison. Thomas nechercha pas à la retenir, demeurant interdit.Mathilde sentit la colèremonter en elle. Sesmauditesrésolutions d’être inconsciente, spontanée.Quelles bêtises ! Elle s’était conduite comme toutes cesfemmesqu’elledétestaittant;aveclégèreté,sansmorale,sansconscience.Cesoir,ellenevalaitpasmieuxqu’elles.Oui,ellen’étaitqu’unedébauchée.

Après avoir remis ses chaussures et un peu d’ordre dans sa tenue ;Mathilde retrouva Léa quidiscutaitàunetableavecAnna.

–Léa,peux-tumeramener?luidemanda-t-elle,suppliante.

–Euh…oui,biensûr,réponditsonamie,étonnée.

–Jepeuxprendreuntaxisituveuxresterencoreunpeu!

– Non non, je te ramène. Je remerciais Anna pour son invitation et m’apprêtais justement à techercher,mentit-elle.

–BonsoirAnna.Etmerciégalementpourcettesoirée.

–DerienMathilde.Defutunréelplaisirdevousrecevoir toutes lesdeux.Rentrezbienetàuneprochainefois.

–Jet’appelle!s’exclamaLéaàl’attentiondelamaîtressedemaison,avantdeprendreMathildeparlebrasetdelatirerverslasortie.

Elles sedirigèrentvers leparking.Dèsqu’elles furent installéesà l’intérieurde ladécapotable ;Léaregardasonamiequivenaitdejetersonmasqueausolavecrage.Uneforteréactionqu’elleneluiconnaissaitpasetqu’ellen’auraitpascruecapablechezelle.

–Maisquet’arrive-t-il?

–Rien,riendûtout!cria-t-elle.

–Allons,jet’enpris.Tuaslesjouesrouges,tuesplusqu’énervée.Etjeteconnaissuffisammentpoursavoirquetonattituden’ariend’habituel,doncquequelquechosenevapas.

–Toutvatrèsbien,net’inquiètepaspourmoi.

–Mais si justementMathilde, jem’inquiète ! J’ai toujours été là pour toi, pour t’écouter, non ?Alors,dis-moicequinevapas.Jesuistonamie!s’emporta-t-elleavecfermeté.

–Cequinevapas;c’esttrèssimple;c’estmoi.

–Commentça,toi?

–J’aiétéroyalementstupide;unevraiepetiteidiote;complètementécervelée!hurla-t-elle.

–Ques’est-ilpassé,dis-moi?

–J’aivouluséduire,fairedessouriresenjôleurs;maispourm’amuser!sedéfendit-elle.

–Et?

–Jenepensaispasàmal,jet’assureLéa.Tumeconnais!

–Ouimabelle.Etalors,ques’est-ilpassé?

–J’aivoulujoueraveclefeu,etjemesuisbrûlée;commeondit.

–Vas-tuarrêterdetournerautourdupotetfinirparmedirecequit’estarrivé?S’emportaLéa,inquiète.

–J’airencontréquelqu’uncesoir.

–Oui,jet’aivudanseravecungaminetd’autreshommes.Maisaprès,j’étaisoccupéedemoncôté.

– Oui j’ai dansé avec différents partenaires et tout se passait merveilleusement bien jusqu’àl’arrivéedecethomme.

–Quelhomme?

– Il avaitun regard si intense, sibleu ; etunevoix si envoûtante,déclaraMathildecommepourelle-même.

PuisellelevalesyeuxversLéa.

–Noussommesrestésunbonmomentsurlapistededanse,puisnoussommessortisprendrel’airetassissurlabalancelleaufonddujardin.

–Oui,etpuis?

–Etpuis…sesmains,sabouche…

Aprèsunmomentdesilence,Léaregardasonamie.

–Houa!Etbienmabelle!s’exclama-t-elledevantl’embarrasdeMathilde.

–OhLéa…avecMartinc’étaitsidifférent.Confia-t-elled’unepetitevoix.Nousavonsétéamantsauboutd’unan,pasavant.Etmêmeaveclui,c’étaittellementsimple.

–Commentçasimple?Queveux-tudire?

–Sansréellepassion.Sanscettechaleurquitebrûledanslesveines,danslesreins.Sansquecelamefasseperdrelatêteàcepoint.Aupointquetunesaispluscequetufaisetquetuneveuxplusqu’ils’arrête.Jen’avaisjamaisconnucela.

–Jevois;etcesoir?

–Nousn’avonspasété jusqu’à…enfin, tuvoisceque jeveuxdire,dit-elleenbaissant lesyeux.Non heureusement, pas jusque-là. Mais rien que ses baisers, ses caresses, étaient si… j’étaiscomplètementdéboussolée.Quandjemesuisrenducomptedecequel’onfaisait;jemesuisenfuie.

–Etcomments’appelleceséducteur?demandaLéa,curieuse.

–Jenesaispas,soupira-t-elle.

–Commentça,tunesaispas?s’exclama-t-elleenlevantlessourcils.

–Nousnenoussommespasprésentés.Jeneconnaismêmepassonprénom.

–Encoremieux ! ricana la jeune femme.Etbenditdonc !Quelle soirée ! Jene te savaispas sisensuelle;avectantdedésirs,luidit-elleaveclesourire,légèrementmoqueuse.

–Ohnon!Surtoutpascemot-là!s’exclamaMathilde

–Maisquelmot?demanda-t-elle,ahurie.«Sensuelle»?

–Non…«Désirs».

–Allez,rentrons.Calme-toi.

Chapitre5

Thomasétaitallongéaumilieudesonlit.Lesoleilcommençaitàselevertimidement.Iln’avaitpasdormi de toute la nuit. Ses yeux étaient restés fixés au plafond à repenser à cette femme. Sesmagnifiquesyeuxvertsenamande,cettebouchefineetsiattirante.Sesseinscharnusqu’ilavaittenusdanssesmains.Lejeunehommenefaisaitquerepenseràcecorpsmagnifiqueàlapeausidouce,cecorps qui frissonnait sous ses doigts lorsqu’il le caressait. Aux petits gémissements de la jeunefemmequand il embrassait sapoitrine.Le souvenirdecette scène sur labalancelleallait le rendretotalementdingue.Audépart,ilétaitrestésansbouger,laregardantserajusteretensuites’enfuir.Unefoisseul,ils’étaitsentifrustréqu’ellelerepousse.Puisaprèsavoirretrouvésesesprits,Thomasavaitcomprisquesiellenel’avaitpasarrêtéàtemps;ilsauraientfaitl’amour;auxrisquesd’êtresurprisparundesinvitésouparleurshôteseux-mêmes.Nonpasqu’iln’auraitpassouhaitéallerplusloinavec elle ; mais naturellement pas à la vue de tout le monde. Il l’avait désiré tellement, oh ouitellement;etilladésiraitencore.Ilavaiteuplusieursconquêtesféminines,oui,maisilétaittoujoursrestémaîtredelui-même,maîtredesesgestes.Aveccettejolierousse,ilnesavaitmêmeplusquiilétait.Cesoir-là,elleluiavaitfaitperdrelatêtecomplètement;neluifaisantécouterquesessens.Lareverrait-ilunjour?Ilnesavaitmêmepasquielleétait...

*****

–Allez,Mathilde,onyva!Ilfautqu’onfermelabibliothèque.

Mathildeétait assiseàune table, avecun livreà lamain.Cela faisaitdixbonnesminutesqu’ellen’avaitpastournéuneseulepage.Sespenséesétaientailleurs.Troismois, trois longsmoisavaientpassédepuiscebalmasqué.Quasimenttouteslesnuits,ellerêvaitdecethommeauxyeuxclairs.Ellerevoyaitdanstouslesdétailscequis’étaitpasséentreeux;etnepouvaits’empêcherd’êtretoujourshonteusedesapropreconduite.Maismalgrécesentiment,cesmainsfermesetchaudessurelle luimanquaient.Commentpouvait-ellesesentirsicoupableetenmêmetempsrêverquecemomentsereproduise?C’était totalementparadoxal !Cethomme,qu’elleneconnaissaitpasavant ce soir-là,avaitfaitnaîtreenelledessensationsjamaiséprouvées.

–Mathilde!

–Quoi…quoiLéa?demanda-t-elleensursautant.

–Jet’appelledepuistoutàl’heure!

–Excuse-moi.

–Etàquoipensais-tu?demandacurieusementlajeunefemme.

–Àrien,jelisais.

–Tupensaisàcetinconnu,chezMichel,n’est-cepas?

–Oui,avoua-t-elledansunsoupir.

–Iltefaudrabienl’oublier.

–Oui,jelesaisbien;maisjen’yarrivetoujourspas.

–Jenecomprendspas.Vousn’avezéchangéquequelquesbaisers…

–Non,pasquequelquesbaisers!s’offusquaMathilde.

–Oui,jesais,unpeuplus.Cenesontpassescaressesquitefontperdrelatêteàcepointtoutdemême?

–Malheureusementsi.Leremordsm’obsède.

–Etbien;j’aimeraibienleconnaîtremoicethomme,déclaraLéapourdétendrel’atmosphère.

–Etbien,moi,jeneleveuxpas.

–Onpourraitserenseignerauprèsd’AnnaetMichel!

–Non!hurla-t-elle.

–Ilsuffitde leurdemander la listedespersonnes invitées,etenéliminantaufuretàmesure lespersonnes…oubienendécrivantceséducteursienvoûtant;ilspourraientsavoirdequituparles.Ilst’ontsûrementaperçueavec,aucoursdelasoirée.

–Non,cen’estpaslapeine,persista-t-elle.

–MaispourquoiMathilde?

–Toutsimplementparcequej’aieuhontedemoi.Sijelerevoyais,jenepourraispasleregarderenface.Etdetoutefaçon,pourlui,cen’étaitcertainementqu’unesoiréeordinaire.J’étaisunefilleparmitantd’autres.Ilm’asûrementoublié,lelendemainmême.

–Nedispasça!Tuétaistellementsuperbe,quejesuissûrqu’ilnet’apasoubliéaussivitequetulepenses.

–Justement;j’étaistropsexy;cen’étaitpasmoi.

–Onn’estjamaistropsexy.Etarrêtedetecacher!Tuneveuxpastevoirtellequetues,c’esttout,lasermonna-t-elle.

–Laissetomber,s’ilteplaîtLéa.Jel’oublierai.J’aibienréussiàoublierMartin.

–Saufquecethomme-làn’arienàvoiravecMartin;àcequej’aipucomprendre.LuiréponditLéaavecunsourirenarquois.

–Absolumentrienàvoir,ça,c’estcertain.Maiss’ilteplaît,laissetomber.Jamaisjenepourraismeretrouverenfacedeluisansmourirdehonte.

–Mathilde…

–NonLéa.Situesmonamie,nemeparleplusdecettesoirée.

Aprèsunmomentdesilence,Léarépondit:

–Commetuvoudras.

Chapitre6

Aprèsavoirraccompagnésonamie,Léaserenditchezsonfrère.Ilhabitaitendehorsdelaville;dans unemagnifiquemaison. Il était son aîné de six ans et lui ressemblait assez.Lesmêmes yeuxbleus,touslesdeuxlescheveuxnoirsetleteintbronzé.Saufqueluiavaitcettedéterminationdansleregard ; une assurance qui se voyait dans le moindre de ses gestes ; et cette franchise qui lecaractérisait. Un franc parlé qui ne plaisait pas à tout le monde et qui parfois mettait certainespersonnesmalàl’aise.Maisbon,ilétaitcommeça,etaumoinsonsavaittoujoursàquois’enteniraveclui.Disaitsouventlajeunefemme.

Léa s’engagea dans la propriété dès que l’imposant portail fut ouvert. Elle se gara devant lamaison,coupalemoteuretaprèsêtredescendudevoiture,montal’escalier.

–BonsoirThomas!l’apostropha-t-elledèsquesonfrèreluieuouvertlaporte.

–Bonsoirsœurette.

–Quelletêtetuas!

–Mercimachère.

–Maisregarde-toi.Tuestoujoursimpeccabled’habitude.Là,tun’espasrasé,tuasdescernessouslesyeux.

– Ne t’inquiète pas. J’ai juste un peu de mal à dormi depuis quelque temps, lui répondit-il enrefermantlaporte.

–Ladernièrefois,tun’avaispascettemine-là!

–Ladernièrefois,j’étaisplusprésentable,etmafatiguesevoyaitbeaucoupmoins.Etquejesache,c’estaugrandfrèredeprotégersasœur,nonlecontraire,déclara-t-il,faussementsévère.

Aprèsunetapeamicalesurl’épauledeLéa,ilsedirigeaverslesescaliersquimenaientaupremierétage.

–Allez,jevaisprendreunedouchevitefaitetjet’inviteàdîner.Situeslibre,bienentendu?

–Oui,jelesuis.

–Parfait.Sers-toiunverre,jen’enaipaspourlongtemps.

Installés à leur table,ThomasetLéaprirent commandede leur repasauprèsde la serveuse.Léaadmiraitun tableauaccrochéàundesmursdu restaurant, lorsqu’elle reconnut la signaturede sonfrère.

–C’esttoiquiaspeintcetableau?demanda-t-elle,admirative.

– Oui. Le patron de ce restaurant, chez qui je viens manger régulièrement maintenant, voulait

donnerunpeudecouleuràsonétablissement.Jeluiaiamenécettetoileilyadeuxmois.

–Ilesttrèsréussi.J’aitoujoursadmirétespeintures.Tuasuntalentfou.Cettemerestd’unbleu…quel’onaimeraitpresques’ynoyer.Etcesvoiliersenarrière-plan,quelleprécision.

–Onappellecelaunepeinturemarine.C’estcequevoulaitlepatron.

–Pourquoimarine?Poursacouleur?

–Non.Simplementparcequ’elleapoursujetlamer,dit-ilaveclesourire.

–Elleestvraimentsplendide.Jemesouviensencorequandnousétionsenfants,etquemamannousemmenaitaumuséeouàdesexpositions.Tuétaisémerveillépartoutescespeintures,cessculptures.Moi,àl’époque,jetrouvaiscelad’unennui,soupira-t-elleaveclesourire.

–Oui,c’estunevraiepassion.Unepassionquej’aitoujourseue,jecrois,luirépondit-ild’unairpensif.

–Cela sevoitquand tupeins.Tues totalementabsorbé. Je suis ravieque tuaiespuen faire tonmétier.Excuse-moide changerde sujet, dit-elle aubout dequelques secondes,mais je voudrais tedemanderquelquechose?

–Jet’écoute.Queveux-tu?

–Voilà ! Jesuisenvacanceà la finde lasemaine ;et j’auraisbienaimépouvoirdisposerde tapiscineunenouvellefois;situveuxbien?

–Biensûr!Tupeuxyrestertantquetuveux.JedemanderaiàMariadepréparerlachambrequetuavaisladernièrefois.

–QuiestMaria?

–Manouvellegouvernante.

–EtEdna?

–Sonmariestmuté.Ilspartentàlafindumois.

–Etoùas-tutrouvéMaria?

–C’estuneamied’enfanced’Edna.C’estellequimel’aconseillépourlaremplacer.Petitebonnefemme,maistrèsdynamiqueetefficace,commeétaitEdna.

–Jepeuxtedemandeuneautrefaveur?demandalajeunefemme,mielleuse.

–Profite,c’estmonjourdebonté.Queveux-tuencore?

–Macollègueetsurtoutamieestégalementenvacances.J’aimeraiqu’ellepuisses’amuserunpeu,aulieuderesterdanssonpetitappartement.Est-cequejepeuxl’inviter?Ellenetedérangerapas,jetelepromets.

–Aucunproblème.Lamaisonestassezspacieuseetcomporteplusieurschambres.

–Tuesunamour!

–Bahvoyons!Jelesuistoujoursquandj’acquiesceàtesdemandes.J’espèreseulementquetune

meramènespasunehystérique?luidit-ilmoqueur.

–Non,biensûrquenon!

–Etquelâgea-t-elle?

–Elleatrenteetunans.

–Etcomments’appelle-t-elle?

–Mathilde.

–Joliprénom.

–Joliefilleaussi.Tul’asd’ailleurspeut-êtredéjàvu.

–Etoùauraisjepularencontrer.Jesuisplusgaleried’artquebibliothèque.J’aimeleslivres,maisjepréfèrelesacheterquelesemprunter.

–PeutêtrechezMicheletAnna.Ils l’avaient invitéeàleursoiréedebalmasqué.Elleestarrivéeavecmoi.

–Ilyavaittellementdemonde.Toimêmejenet’aivuquedeloin.Maisc’estpossible.Commentest-elle?

–Grande,àlataillefine;rousse.

–Maisencore?demandaThomas,soudainintéressé.

– Elle a les cheveux longs, bouclés. De beaux yeux verts, de petites taches de rousseur sur sespommettes.Elleportaitcesoirlàune…

Thomasécoutaitsasœurluidécrirecettefemmedoncilavaitrêvédepuistroismois;jusqu’àlanuitdernièreencore.Sauflestachesderousseurqu’iln’avaitpaspuapercevoiravecsonloup;maiscenepouvaitêtrequ’elle.Aveccetangeenpendentif ;cepetitangeaucreuxdesapoitrine.Alorscommeça,cettejolierousses’appelaitMathilde.Unlargesourireilluminasonvisage.

–Ilestpossibleeneffetquejel’aiecroisé.Jeseraisplusqueravidelarecevoir;sousmontoit,luirépondit-il,lesouriretoujoursprésentauxlèvres.

–Merci,Thomas,tuesungrandfrèregénial.

–Maisnon,c’estàmoideteremercierdem’amenerdelacompagnie.

–Mathildeestunefillesympa,trèssympa.Celaluiferaleplusgrandbiendesechangerlesidées.

–Pourquoidistucela?demandaThomas,perplexe.

–Et bien, nous sommes partis un peu précipitamment de cette soirée chezAnna.Quand elle estvenue me chercher, elle était bouleversée. Elle voulait prendre un taxi, mais j’ai préféré laraccompagner.

–Bouleversée!Queveux-tudireparlà?l’interrogea-t-ilenfronçantlessourcils.

–Monamieestunetrèsbellefemme;etcesoir-là,elleenaenfinprisconscience,jecrois.Jeluiavaistrouvécetterobeenespérantqu’ellesesentiraitmieuxdanssapeau.Pourlalibérerunpeudece

côtéaustèrequ’ellearboretoutletemps.Mathildeabesoind’êtrelégèrementsecouée,remuée.Elleest jeune et je ne voudrais pas qu’elle reste seule. Il serait dommage qu’une aussi jolie femmedevienneaigrie.

–Etques’est-ilpassé?Ellet’enavouludel’avoirbousculé?

–Non,cen’estpas songenre.Maisce soir-là, elle s’est renducomptede l’effetqu’ellepouvaitproduireauxhommes.Elleaétébeaucoupsollicitéepourdanser;etavecsonderniercavalier,çaaété légèrement plus loin qu’une simple danse. Et aussi plus loin qu’un simple baiser. Je croissimplementqu’elleaprispeur.

–Peur?Tun’exagèrespasunpeu!

–Non,jet’assure.

–Ellen’ajamaisconnud’hommes?demanda-t-il,inquiet.

–Si,elleenaconnuun,unseul.Ilsétaientamis,puiscetteamitiéestdevenueuneliaisontranquille.Ils sontdevenusamantsauboutd’unan.Maispasun réelamour, jepense. Iln’yavait riende trèsexplosifentreeux.Puisill’aquittédepuisplusd’unanpouruneautrefemme.

–Ilnesavaitapparemmentpascequ’ilperdait.

– Voilà pourquoi de te demanderais d’être particulièrement gentil avec elle. Mathilde est trèssensible.

–Net’inquiètepas.Jeseraiplusquegentil.

PuisThomasposasesdeuxcoudessurlatableetsepenchaverssapetitesœur.

–Etsiparhasardellemeplaît?demanda-t-il,lementonposésursesmainsjointes.

Léapartitd’ungrandéclatderire,peusoucieusedesefaireremarquerdesautresclientsassisauxtablesproches.

–Tuesmajeur,moncher.Astoidevoir,celanemeregardepas.Detoutefaçon,sielleteplaît,peuimporte ce que je pourrais dire, tu n’en feras qu’à ta tête.Mais je te demanderai d’être sincère etcorrect,sijepuismepermettre.

Ilnevoulaitenaucuncasêtreincorrectavecelle.Ilserendaitbiencomptequ’ils’étaitmontréunpeutropdirectcesoir-là;etilvoulaitréparersonerreur.Sesdernièresconquêtesétaientdesfemmesquisavaientetquimontraientcequ’ellesvoulaient.Ellesn’avaientpaspeurdeleurssentimentsoudeleursbesoins.Maisàl’évidence,ilavaitperdul’habituded’êtrecourtoisetsurtoutpatient.L’occasionseprésentait unedeuxième fois ; il fallait doncnepas lamanquer.Car elle lui plaisait ; oui, cettepetiterousseluiplaisaitmêmeénormément.

Aprèsavoirfinileurrepas,Thomasréglal’additionetilssortirentdurestaurant.Ilsroulèrentdansunquasi-silence.Arrivéschezlui,ilss’installèrentdanslegrandsalonpourpendreundigestif.

–Lerepast’a-t-ilplu?demandalejeunehommeconfortablementassisdansunfauteuil.

–Oui,excellent,merciàtoidem’avoirinvité.

–Maisjet’enpris.Celam’afaitplaisir.Jen’aipaseul’occasiondesortirbeaucoupcesderniers

temps.

–Tutravaillestrop.Tudevraissoufflerunpeuettereposer.

–Lapeintureestcommeunedroguepourmoi.Jeneconsidèrepasçacommeuntravail ;etdetoutefaçon,jenepeuxpasm’enpasser.Ellemedétend;ellem’apportelecalmedontj’aibesoinencemoment.Quandjecommenceunetoile,jesuisentièrementdanscequejefais;etcelam’évitedepenseràautrechose.

–Etàquoit’évite-t-elledepenserencemoment,commetudis?

–Ohriendespécial,rétorqua-t-iltrèsvite.Etjeterappelle,aucasoùtul’auraisoublié,quej’aiunrendez-vousavecunegaleried’art,àLondres,lundiprochain.Ilfautquemadernièretoilesoitfinie.

–Mêmesiellen’estpasfinie,cen’estpasgrave!Elleferapartiedetaprochaineexpositionc’esttout.

–Non.Jen’aimepastroplaisserunetoileinachevéequandjeparsenvoyage.Surtoutquandcelle-ciestquasifinieetqu’elleferacertainementpartiedesplusbelles.

–Quandpars-tu?

–Dimanchematin.

–Etpourcombiendetempscettefois?

–Troisouquatrejours;toutauplus.Tun’aurasqu’àprendreenpartantletrousseaudeclefsquise trouvesur lacommandede l’entrée.Commeça, tupeuxvenir t’installerquandtu lesouhaites…avecMathildebienentendu,ajouta-t-ilavecunsourire.

–Merciencored’avoiracceptédel’inviter.

–Toutleplaisirserapourmoi,net’inquiètepas.

–Bon,jevaistelaisser.DéclaraLéaenselevantducanapétoutendéposantsonverresurlatabledesalon.Boncouragepourtonrendez-vousàLondres,etàlasemaineprochaine.

–Bonsoirsœurette.

DèsledépartdeLéa;Thomasallapeindre.Ilfallaitabsolumentquecettepeinturesoitfinieavantdimanche.Ilavaitdéjàenvoyélesautresparavion.Ilétaitcequ’onappelaitunpeintrepaysagiste.Ilfaisaittoujoursdespeinturesfigurativesetréalistesengénéral.Ilpréféraitpeindresurlevif,enpleinair.Maiscesoir, ilseservaitd’unedesesnombreusesexquisesqu’ilavait faiteaupréalable. Il luiarrivaitd’enfaireplusieursd’avance,celaluipermettaitdetravaillermêmequandilfaisaitmauvaistemps, sans sortirde chez lui ; oubien le soirquand il n’arrivaitpas àdormir.Cequi était le casdepuisquelquesmois.Soninsomnieavaitdûbon;elleluiavaitpermisd’emporterplusdetoilequ’ilavaitprévuaudépart.Sedit-ilavecunsourireforcéauxlèvres.Pourcesoir,ilavaitpréparédestonsfroidspourfairecequ’onappelaitunenocturne.Soussonpinceau, l’ombredesarbressedessinaitdanslebleudelanuit.Lalune,d’uneblancheurivoire,formaituncroissant.Desamoureuxenlacéss’embrasaient sur un banc, dans un jardin public désert ; éclairés uniquement par la lune et lescintillementdesétoiles.Leplusgrostravailétaitdéjàfait.Ilneluirestaitplusqu’àadoucirunpeules formes trop tranchantes et trop nettes ; pour donner une légère sensation de flou. Quand sontravailfutterminé,ilreculaunpeupouravoiruneffetd’ensemble.Ouicettetoileétaitvraimentune

de ses plus belles. Elle aura certainement une côte excellente. Sa signature apposée il trempa sespinceauxdanslatérébenthine,nettoyasescouteauxetsaplanchepuisfermasestubesdegouacheetd’aquarelle.Quandileuttoutrangé,ilmontasesescalierspourallerprendreunebonnedouche.Enentrantdans lasalledebain, il jetaaussitôtsesvêtementssalesdans labannetteà lingeprévuàceteffet,puisseglissasouslejetd’eauchaude.Celaluiapportaunbien-êtreimmédiat.Ilposasesdeuxmainsàplatsurlemurcarreléetbaissalatêtepourquelejetfouettesanuqueetsesépaules.Quecelaétaitbon,trèsbon!Sesmusclessedétendirentaussitôt.Thomasessayadefairelevidedanssatête;mais malheureusement ce n’était pas chose facile. Comment une femme pouvait-elle remplir sespensées à ce point ? Il avait cru, pendant ces trois longs mois, qu’il allait devenir complètementdingue.Iln’yavaitquelesmomentsoùilpeignaitqu’ilnepensaitpasàelle.Maisdèsqu’ilsortaitdeson atelier ; parfoismêmeavantqu’il ne franchisse la porte, elle refaisait surfacedans son esprit.Thomas sepassa lesmains sur le visage, puis avecun soupir, attrapa le gel douche. Il se savonnavigoureusementetaprèsavoirlevésonvisage,lesyeuxfermésversl’eau,ilcoupalesrobinets.Lejeunehommeenroulauneservietteautourdesesreinsetsedirigeaverssachambred’unpaslourd;ilétaitexténué.

Aupetitmatin,ilfutréveilléparlesoleilquiinondaitsachambre.Pourlapremièrefoisdepuisdenombreusessemaines,ilavaitpasséunemerveilleusenuit.Nonpasparcequelemanquedesommeilavaiteuraisondeluietluiavaitpermisdedormird’unetraitetellementilétaitàboutdeforce;maiscela tout simplement parce qu’il avait enfin une réponse à sa question, qu’il se posait sans cessedepuis que cette jolie rousse s’était enfuie de ses bras : « La reverrait-il un jour ? » Et bienmaintenant,ilétaitcertaindelarevoir,dèssonretourdeLondres,etchezluiquiplusest.Ilnepouvaitdécemment espérermieux.Mais saurait-il éviter de la toucher, de la caresser, après ce qui s’étaitpasséentreeux?Ilvoulaitévidemmentnepasrépétersonerreurensemontranttropdirect,commelapremière fois.Mais comment faire justementpourquecelane se reproduisepas ?Comment semontrerpatientenversunefemmequ’ondésirepar-dessustout?Toutenseposantcesquestions,ilsedirigeaverslasalledebain,enfilaunmaillotetunpeignoir;prisunegrandeservietteetdescenditaurez-de-chaussée.

–BonjourMaria,dit-ilenarrivantdanslacuisine.

–Bonjourmonsieur.Voulez-vousquejevousprépareunpetitdéjeuner?

–C’esttrèsaimableàvous,maisnormalementjevousemploiepourleménage.Lesrepasnesontpascomprisdansvotrecontrat!déclaraThomasaveclesourire.

–Aveccequevousmepayez,jeserairavidevouspréparervosrepaségalement.Celanemegênepaslemoinsdumonde.

–Commeilvousplaira.Jemodifieraisvotresalairedanscecas.

–C’esttrèsgentilàvous,maiscen’estpasnécessaire!Vousmerémunérezdéjàtrèsbien.

–Oui,maissijedevaisemployerunecuisinièrecommej’enavaisl’intention;celam’auraitcoûtéplus cher encore. Et je préfère de loin avoir une seule personne chez moi que deux. J’aurail’impressionsinond’êtreenminorité,ajouta-t-ilaveclesourire.

Mariaréponditàsonsourire.

–Commevousvoudrez.Mamèrem’a toujoursapprisàne jamaisrefuserdeuxfois lesbonnesintentions.

–Sageconseil.Alorsnoussommesd’accord.Jevaisfairequelquesbrassesdanslapiscine.Àtoutàl’heure.

Thomasavaittoujoursaiménagertôtlematin;celaluifaisaitdubienetluipermettaitd’attaquerlajournée du bon pied. Et cette sensation de liberté qu’il éprouvait ; quel bonheur !Après plusieurslongueurs, il sortit de la piscine, se sécha les cheveux et enfila de nouveau son peignoir pourretournerdanslacuisine.

–Maria!

–Ouimonsieur?

–Masœuretuneamieàellevontvenirdèslasemaineprochainepasserleursvacancesdansmapropriété.Pourriez-vousleurpréparerunechambre,merci.

–Maisnaturellement.

–Léaaimeêtredanslapremièreàdroite;vousn’auriezqu’àinstallersonamiedanscelled’enface,quidonnesurlapiscine.

–Oui,aucunproblème.Ellesserontprêtesdèsdimanchesoir.Votresœura-t-elleuneclef?

–Oui.Quantàmoi,jeseraiabsentquelquesjours.Jeparsdemainmatinetseraideretouravantleweek-endprochain.Qu’avez-vouspréparépourlepetitdéjeuner?demandaThomas,l’œilgourmandensentantlesbonnesodeursquisedégageaientdanslapièce.

–Ilyadupaingrillé.Descookies,delamarmeladed’orange,dujusdefruit,ducaféetdesœufsaubacon.

–Miam!Alorsàtable!

Chapitre7

LéaetMathildes’étaientdonnéesrendez-vousdansunrestaurantoùellesavaientl’habituded’allerensemaine,pendant l’heuredudéjeuner.L’établissementétait trèsagréable, lacuisineexcellenteettrèsbonmarché.Léaétaitassise,attendantsonamie.Quandelleluiavaittéléphonélaveilleausoir,elleluiavaitannoncéqu’unesurprisel’attendait.Mathildeavaitvouluensavoirplus,maisLéaavaittenulecoupetrefusédeluiendiredavantage;préférantluidiredevivevoix.EllefinissaitdepassersacommandeàlaserveusequandMathildeentradanslerestaurant.

–Bonjour!

–BonjourLéa!Commentvas-tu?

–Bien, trèsbien.Assieds-toi. J’aipris la libertéde tecommander le repasdu jour.Cesontdeslasagnesetjesavaisquec’étaitundetesplatspréférés.

–Trèsbien, tuasbienfait.Alors,cettesurprisequetum’aspréparée.Ai-je ledroitd’ensavoirplus ? J’espère qu’après m’avoir fait attendre une nuit, que c’est une belle surprise ? demandaMathildeaveclesourire.

–Oui.Unemerveilleusesurprise.Jet’aidéjàparlédemonfrère?

–Oui,réponditlajeunefemmesanstropsavoiroùLéavoulaitenvenir.Jesaisqu’ilesttonaîné,qu’ils’appelleThomasetqu’ilestpeintre.J’aid’ailleurspuadmirerplusieursdesesœuvresdansunegaleried’art.Ilaunréeltalent;sestableauxsontvraimentmagnifiques.

–Ilaimeraitt’entendredirecela.

–Maisàpartça!

–Et bien il habite une splendidemaison endehorsde la ville ; une très grandedemeure.Avecpiscineetsauna.Pendantmesvacances;j’yvaisgénéralementtoujourspasserquelquesjours.Ilnem’ajamaisditnon.

– J’en suis ravie pour toi ; mais je ne vois pas le rapport avecma surprise ? demanda-t-elle,étonnée.

–Lavoilàjustement.

–Jenecomprendspas.

–Ilestd’accordpourmerecevoirdenouveau,autantdetempsqu’ilmeplaira;etd’accordpourterecevoirégalement.

–Commentça,merecevoir?s’exclama-t-elle,ébahie.

–Tuesbienenvacances,commemoi?

–Oui,tulesaisbien.

–Etjesupposequetun’asriendeprévu?

–Non,rien;mais…

–Tunevaspaspassertoutestesvacancescheztoienfermer;oubiencheztesparents.Cesontdesgenstrèsagréables,naturellement,maisjevoudraisquetut’amusesunpeu.

–C’esttrèsgentildetapartLéa.Jesaisquetuespleinedebonnesintentionsàmonégard,maisladernièrefoisquej’aivoulum’amuser,jemesuisconduitecommeuneidiote.Jem’enmordsencorelesdoigts.

–Mais là, cela n’a rien çà voir ! Je te demande juste dem’accompagner chezmon frère pourprofiter pleinement de nos vacances. Nous pourrions passer toute la journée à la piscine. Toi quiadoresleslivres,Thomasaunesplendidebibliothèque,dit-ellepourl’amadouer.

–Tusaisquejen’aimepasm’imposeretdéranger,soupiralajeunefemmegênée.

–Tunet’imposespas,c’estmoiquit’aiinvité.Etiln’yaabsolumentpasdesoucis,tunedérangespasdûtout.

–Maisquevadiresafemme?

–Iln’estpasmariéetilvitseul.AllezMathilde,ilm’alui-mêmeditqu’ilseraitravid’avoirdelacompagnie,ravideterecevoir.

–Ilnemeconnaîtpasetseraravidemerecevoir!

–Ilveutjustemefaireplaisiretilsaitquesij’aidemandétavenue,c’estquetuesunebonne,unetrèsbonneamieàmoi.

–Bonetbiend’accord.Sicelanedérangepas.

–Jet’assure.Ilmel’aconfirmé.

–EtbienOK.

–Merveilleux!C’estmerveilleuxMathilde!Nousallonsavoirlapiscine,lesauna.Quedemanderdeplus?

–Oui,effectivement.

–Jeviendraistechercherlundimatin.

–Sitôt!s’exclama-t-elle,surprise.

–Plustôtnousyserons,plustôtnouspourronsbronzerauborddelapiscine,rétorqualajeunefemmeaveclesourire.Thomasseraabsent.IlpartquelquesjoursàLondres,maisilseraderetourdanslasemaine.Onvapasserdesuperbesvacances,tuverras.Allezmangeonsmaintenant,sinoncelavaêtrefroid.

*****

Mathilde passa l’après-midi chez ses parents. Ne voulant pas qu’ils s’inquiètent de son absenceprochaine,elleleurannonçasesprojets;enleurpromettantdeleurtéléphonerdèsqu’ellelepourrait.

Ilsfurentravisd’apprendrecesprojets,inquietsmalgrétoutdesonisolementdepuissaruptureavecMartin.

Aucoursdelasoirée,ellepréparasavalise.Quelquesvêtementslégers,qu’ellen’avaitpasportésdepuis l’été dernier ; un tailleur au cas où… son uniquemaillot de bain…Sa valise prête, elle ladéposaàl’entréeetallasecoucher.

*****

LéaetsonamiearrivèrentchezThomasenfindematinée.Mathildeétaitémerveilléeparlabeautéde cette maison. Elle trouvait déjà celle d’Anna et Michel très belle, mais celle-ci… Les mursextérieursétaientengranitlégèrementrosé.Unimposantescalierdonnaitsurl’entréeprincipale.Lesfenêtresdupremierétageavaienttoutesunbalcondonclesjardinièresétaientgarniesdepétuniasauxfleursrosesetblanches.Lamaisonétaitd’unearchitectureassezmoderne,avecla toitureplate.Onapercevaitauloinuneserreetàl’avantdelapropriété,lapiscinedoncLéaluiavaittantparlé.C’étaitvraimentsuperbe.Onnepouvaitrêvermieuxcommelieudevacances.Elleavaittoujourshabitédepetitsappartementsdelocation.Sesparentsavaientéconomisédenombreusesannéespouravoirdequoisepayer le leur,à leurs retraites.Léa,quantàelle,venaitd’unefamilleplusaisée ;beaucoupplus.Elletravaillaitsimplementparcequ’ellen’aimaitpasrestertoutel’annéesansrienfaire.N’étantpasmariée,etvivantchezsesparents,ellenesevoyaitpasaffalersurlecanapétoutelajournée.Cequiétaittoutàsonhonneur.QuandàThomas,àvoircettemaison,cedécor,onvoyaittrèsbienquecestableauxsevendaientcommedespetitspains;mêmesiluiaussiavaiteuuneenfancesanssoucismatérielsgrâceàsafamille.Maiscen’estpasl’argentquiluiavaitapportésonexcellenteréputationdanslemondedelapeinture,c’étaituniquementsontalenttoutenrestantdiscretsursavieprivée.Onparlaittrèspeudelui.Ellen’avaitd’ailleursjamaisvudephotodel’artiste;oubienalorsdesclichéstrèsflousoùl’onnedistinguaitquevaguementsasilhouette.Et,aussibizarrequecelapuisseparaître,Léaneluiavaitquasimentjamaisparlédelui.

Chapitre8

Àleurentrée,unepetitefemmed’unequarantained’annéess’activaitauxfourneaux.

–Bonjour!Maria,n’est-cepas?demandajoyeusementLéa.

–Oui,Maria, répondit la femmeenposantunemainsursagénéreusepoitrine.VousdevezêtremademoiselleLéa,affirma-t-elleplusqu’ellenedemandait.Vousressembleztellementàvotrefrèrequel’onnepourraits’ytromper.

–Oui,vousavezparfaitementraison,luirépondit-elleaveclesourire.

–Etvousdevezêtresonamie?demandaMariaenregardantMathilde.

–Oui.Confirma-t-elled’unsourireplutôttimide.

–Enchantez.Jevousaipréparévoschambres.

–Merci,s’exclamèrent-ellesencœur.

–MonsieurThomasm’ademandédevousinstallerdansvotrechambrehabituelle.Quantàvotreamie,elleestinstalléedanscelled’enface.

–C’estparfait.Nousallonsnousinstaller.

La maison était aussi belle à l’intérieure qu’à l’extérieur. La cuisine était grande, largementéquipée.Une salle àmangermeublée en rustique. Le salon était particulièrementmagnifique.Unelarge baie vitrée. Un décor à l’image du propriétaire, de son métier. Ainsi, la table de salonreprésentait une palette à peinture.Avec son ouverture où les artistes plaçaient leur pouce pour latenir.Deuxpinceauxcroisés, sculptésdans lebois, formaient lespieds.Pourcequiétaitdesautresmeubles,onpouvaitvoirdescanapésetfauteuilsencuirblanc.Ilyavaitàchaquecoindecettegrandepiècedeschevaletsd’oùétaientexposéesdespeinturesfaitesparThomas.Pourallerauxchambres,unescalierenboisrecouvertd’unemoquettebordeauxatténuait lesondespas.Unefoismontée ladizainedemarches,ondébouchaitsurunlongcouloirauxmurscrème.Lamoquettesepoursuivaitjusqu’aubout.Leslustresétaientcristallinset lumineux.Surunecommodeenpinclair,unevasquerempliedepot-pourriyétaitmiseenévidence.

–Waw!Quelendroitsplendide!criajoyeusementMathilde,ravie.Oùsontnoschambres?

–Jesuiscontentequelamaisondemonfrèreteplaise.J’avaisunpeupeurqueturegrettesd’yêtrevenue.

–Non,absolumentpas.

–Tantmieux.Pourcequiestdeschambres,moic’estcelle-ci,dit-elleens’adossantàuneporte.Toicelled’enface.

–J’aicrucomprendrequetuprenaistoujourscelle-ci.Pourquoidonc?

–Elledonnesurl’arrièredelamaison.Lebalconsetrouveenfacedelaserre;c’esttrèsagréabledesentirl’odeurdesplantesetdesfleursdepuislelitent’endormantlesoir,oulematinauréveil.Etjedoisavoueraussiquedanscelle-ciaumoinslesoleilnemeréveillepas.

–Oui,toiquiaimeslesgrassesmatinées,celat’arrangebien,lataquinaMathilde.

–Effectivement.Allez,ouvronsnosvalisesetallonspiquerune têtedans lapiscine. J’enmeursd’enviedepuisquenoussommesarrivés.

Cespremiersjoursdevacancesétaienttrèsagréables.Ellesavaientfaitdushopping;etpassaientlaplusgrandepartiedeleursjournéesàlireunlivreouàécouterdelamusiqueauborddelapiscine.Ellesallaientausaunaunepetiteheure,lesoir,aprèsdîner.D’oùellesdiscutaientsansdiscontinuer.

–Tunetrouvespasquecelafaitdubiendetranspirerunpeu?

–Oui,c’esttrèsagréable,convintMathilde.

–Aufait,monfrèredevraitarriverdemain,danslamatinée.

–C’estluiquit’aappeléhier?

–Oui.Ilvoulaitsavoirsinousétionsbienarrivéesetsinousétionsinstallésconfortablement.

–C’esttrèscourtoisdesapart.

–Thomasestunhommetrèsagréable,quandils’endonnelapeine.Etjenedispasçaseulementparcequ’ilestmonfrère.

Thomasarrivaendébutdematinée.SonséjouràLondresetsurtoutsonentretienaveclagaleried’arts’étaienttrèsbiendéroulés.Lestableauxavaienteuxunecôteexcellente,etledirecteurdecettegalerievoulaitetpouvaitpratiquementtouslesexposer.Ilavaitvoyagédenuitetmêmes’ilavaitpudormirunpeu,ilavaithâtederentrerchezlui.Ilréglalacourseautaxiquil’avaitprisàl’aéroportetretirasesbagagesducoffre.

–Bonjourmonsieur, déclaraMariadèsqu’il eut franchit laported’entrée.Votrevoyage s’est-ilbienpassé?

–Oui,merci.

–Voulez-vousuncafé?

–Volontiers.Masœuretsonamiedorment-ellesencore?

–Oui,maisilestencorebientôt.

–Léam’aditquevousétiezunvraicordonbleu.

–C’esttrèsgentilàelled’avoirditcela,répondit-elle,légèrementgênée.

–Etc’estsincère,croyez-moi.Ellen’estpasdugenreàfairedescomplimentsàlalégère.

–Merci.Enparlantderepas,j’aiprévuunlapinàlamoutardepourcemidiavecdesfrites.

–Hum…parfait.Maispourl’instant,jevaismontermedoucherdèsquej’auraifinimoncafé.

Chapitre9

Mathildeseréveilladebonneheure,commeàsonhabitude.Mêmeenvacance,ellen’arrivaitpasàfairelagrassematinée.Celanelagênaitpaspourautant.Elleaimaitprofiterdechaqueinstantdelajournée.L’airfrais,lesodeursetlesilencedumatin.Lachaleuretl’agitationdel’après-midi.

Quoique, ici, dans la maison du frère de son amie Léa, on ne pouvait vraiment pas parlerd’agitation.Lecoinétaitplutôt tranquilleet lesmaisonsétaient loin lesunesdesautres.Elleaimaitaussi ressentir la fraîcheur quand le soleil commençait à se coucher. Les couleurs du ciel étaientextraordinairesendébutdesoirée.Etlesnuits,oui…sesnuitsétaientencoreettoujoursperturbéesparcethomme.Maisilétaittempsquecelas’arrête.Ellen’allaittoutdemêmepascontinueràpenseràluipendantdesjours,dessemaines…ouencoredesmois.Non!Celaavaitassezduré.Elleselevad’un bon du lit, bien décider à tout faire pour oublier cet homme au regard pourtant inoubliable.Après un bon bain, elle enfila un pantalon en coton léger, couleur vert pomme ; et un chemisierassorti,sansmanches.Ellelaissasescheveuxlibrespourqu’ilspuissentsécheretsedirigeaverslaporte.Aumomentoùellesortaitdesachambre,elleseheurtaàquelquechose,ouquelqu’unetseretrouvaprojetéeàterre.

–Oh!Excusez-moiMaria,je…balbutia-t-elle.

Maiscen’étaitpasMaria.Unhomme,trèsgrand,setrouvaitdevantelle.Ilportaitunpantalondetoile, sa chemise noire refermée par une cravate bleu foncé. Il avait les cheveux courts, d’un noird’ébène.Unhommeséduisantavecunregardbleu,d’unbleucomme…

Non ! Ce n’était pas possible ! Ce ne pouvait être lui. Mais plus elle le détaillait, plus elle sesouvenaitdecesyeuxquil’avaientfixéeavectantd’effronterie.Decettebouchesensuellequil’avaitembrasséavecunetellefougue.Ellereconnutégalementcettevoix,sienvoûtante,lorsqu’ildemanda:

–Pardonnez-moi.J’espèrequejenevousaipasfaitmal?Prenezmamain,quejevousaideàvousrelever.

–Non…vousnem’avezpasfaitmal,merci,ditMathildesansoserleregarder.

–VousdevezêtreMathilde,l’amiedeLéa?

–Euh…oui.Etvous?luidemanda-t-elle,unefoisrelevée.

–JesuisThomas,sonfrère.

–Sonfrère!s’exclama-t-elleenleregardantcettefoisavecunelégèrepeur.

–Oui,biensûr,dit-il,lesourireauxlèvres.Quicroyez-vousquej’étais?

– Oh… personne en particulier. Mais quand Léa me parlait de son frère, je m’attendais àquelqu’un…deplusâgé.

–Jesuisquandmêmesonaînédesixans.

–Debeaucoupplusâgé.

–Ahouietpourquoi?

–Parcequ’ilestrarequ’unpeintredevotreâgeaitdéjàuneréputationcommelavôtre,déclara-t-ellequandelleeutretrouvélégèrementsesesprits.Etpuisjem’attendaisàquelqu’unde…différent.

– Je vous remercie, c’est un des plus beaux compliments que l’on m’ait fait. Mais dîtes moi,pourquoidifférent?

–Jenesaispas…vousneressemblezpas…àunpeintre.

–Voyez-vousça!riat-il.Etàquoijeressembled’aprèsvous?demanda-t-ilenlafixant.

Lajeunefemmebaissalatêteetmurmura:

–Jenesaispas.

Thomas s’amusait follement de son embarras. Mais il préféra changer de sujet, pour évitertoutefoisdelamettretropmalàl’aise.

–VousvousintéressezàlapeintureMathilde?

Ilentenditplusqu’ilnevitlajeunefemmesoupirerdoucementavantqu’ellenerelèvesonvisageverslui.

–Oh…en amateur. J’ai simplement vu plusieurs de vos peintures dans une galerie d’art et j’aiaussiludifférentsarticlessurvousdanslesjournaux.

–Etêtes-vousd’accordaveccequ’ilsécriventsurmoidansleursarticles?

–Oui,jelesuis.Jetrouvequevousavezbeaucoupdetalent.

–Etbien,nousnenousconnaissonsmêmepas,etvousm’appréciezdéjà.Jeparleentantqu’artiste,bienentendu,précisa-t-il,malicieusement.

Devantsonsilence,ilajouta:

– Je m’apprêtais à descendre. Voulez-vous vous joindre à moi ? Nous ferions plus ampleconnaissance.

– Je vous rejoins tout de suite, répondit-elle précipitamment. J’ai oublié quelque chose dansmachambre,mentit-elle.

–Jevousattendsdanslesalon,répondit-ilavecunsouriremoqueur,nullementdupedesonexcuse.

Mathildes’adossaàsaportedechambreaprès l’avoir referméederrièreelle.Ellesesentaità lafoisrassuréequ’ilnel’aitpasreconnuetàlafoisvexée.Ill’avaitbeletbienoublié.Lapreuvequepour lui ;cettesoiréeavaitétéunesoiréecommetantd’autres.Etquecesoir là,elleouuneautreaurait trèsbien fait l’affaire.Qu’allait-elle faire ?Ellenepouvaitpas rester sous son toit,mais enmême temps, que pouvait-elle trouver comme raison pour s’en aller ? Elle se sentait indécise,terrifiée,lorsqu’onfrappaàsaporte.Pourvuquecenesoitpaslui!Ellen’étaitpasencoreprête.

–Mathilde,tudorsencore?

–NonLéa,répondit-elleenrelâchantsesépaules.J’arrivetoutdesuite.Jeterejoinsenbas.

–OK.

Mathilde se ressaisit et après avoir passé de l’eau froide sur son visage en feu, elle descenditjusqu’ausalon.Ilsétaientassissurlescanapésàboireuncafé,discutanttranquillement.

–Mathilde!Laisse-moiteprésentermonfrère,Thomas.

–Nousavonsdéjàfaitconnaissancesœurette.Jel’aimalencontreusementbousculéetoutàl’heure,réponditlejeunehommeenjetantuncoupd’œilàlajeunefemmerestéeimmobileauchambranledelaporte.

–Commentcela,bousculée?

– Oui… je sortais de ma chambre et… je me suis retrouvée par terre, répondit timidementMathilde.

–MaisentrerdoncMathilde.Venezvousasseoir,ajoutaThomasentapotantlaplacejusteàcôtédeluisurlecanapé.

Maislajeunefemmepréféras’asseoirauxcôtésdeLéa,cequiluivalutunsouriremoqueurdelapartdujeunehomme.

–Alors commeça, tu l’asbousculée.Commepremier contacton faitmieux,moncher frère, letaquina-t-elle.

–Oui, j’aiconnumieuxeffectivementcommepremiercontact, rétorqua-t-ilunrictusauxlèvres,toutenrepensantàleurréellepremièrerencontre.

Chapitre10

Au cours de lamatinée, Thomas leur raconta son voyage et son entretien avec le patron de lagaleried’art.Ilétaittrèsàl’aise,trèssûrdeluiaussi,etravidelarevoirévidemment.Mathilde,quantà elle, elle se sentait embarrassée. Elle avait toujours, au creux du ventre, cette angoisse d’êtrereconnue.Maisellenepouvaits’empêcherdeleregarderàladérobée.Ilsavaitcharmeretdèsqu’illasurprenaitàlefixer,illuisouriait.Unsourireenjôleur,irrésistible…etsurtouttrèsdangereux.Lafindelamatinéesedéroulatoutdemêmenormalement.Àl’heuredudéjeuner,ilss’installèrentsurlaterrasse.Thomasluitintlachaisepourqu’ellepuisses’asseoir,puisilcontournalagrandetablepourseplacerjusteenfaced’elleetçamalgrélesnombreusesautresplaceslibres.Lerepasfutexcellent,commed’habitude depuis leur arrivée.Mais la jeune femmene pouvait qu’espérer qu’il finisse leplusvitepossible.Tout,ouitoutchezcethommelatroublait.Sonregard,sessourires…lemoindresde sesgestes la faisait trembler.Etquand leurspieds se touchaientpar inadvertance, enfincroyait-elle;ellefrissonnait.

–Léam’aditquevoustravaillezensemble,àlabibliothèque?l’interrogeaThomas.

–Oui,depuistroisans,répondit-ellesansmêmeleverlesyeux.

Elleavaitbienconsciencequecelapouvaitparaîtremalpoli,maisellenepouvaitserésoudreàleregarderfixement.Toutjustesesentait-ellecapabledeleverlevisageunesecondepourlerabaisseraussitôt.

–Commentsefait-ilquejenevousconnaissepas?Jeconnaispourtantlaplupartdesamisdemasœur.

–Jesorstrèspeu.

–Et dites-moiMathilde, qu’est-cequi vous a fait choisir cemétier ?Avecvotre physique, vousauriezpufaireautrechoseplutôtquederester…cachéedansunebibliothèque.

–Enl’entendantdirecela,Mathilderelevad’uncouplatête,surprise.

Thomasluisourit.Ilavaitsecrètementespéréquesaremarqueluiferaitleverlesyeuxverslui.

–AlorsMathilde,pourquoirestercachéedansunebibliothèqueavecunphysiquecommelevôtre?

–Thomas!intervintLéa,mécontente.

Lajeunefemmenecomprenaitvraimentpaspourquoisonfrèresemontraitaussiinsistantauprèsdesonamie.Surtoutquandellevoyaitbienquesesquestionsl’embarrassaient.

–Quoisœurette,jesuiscurieuxc’esttout.

–Jenepensepasavoirunphysiquesiexceptionnel!réponditenfinMathilde.

–Pourtantill’est,jevousl’assure.Vouspouvezmefaireconfiancesurcesujet.Jesaisreconnaîtreunebellefemme…unetrèsbellefemme.Maispourquoicemétier?insista-t-il.

–J’aimebeaucoupleslivres,répondit-elleenrebaissantlesyeuxsursesmains.Lesliresbiensûr,maisaussi lesclasser, lestoucher,sentir l’odeurdupapier.Celavavousparaîtrepeut-êtreridicule,maisc’estpourmoicommetravaillerdansunebijouterie.

–Jenevoislàrienderidicule.Maisdites-moitoutdemêmecequevousvoulezdireparlà?

–Queleslivressontdesrichessesintellectuelles.

–Jevois,murmura-t-il, lesyeux toujoursfixéssursa têtebaissée.C’est trèsrarede trouverdespersonnes,àpartlesartistesbienévidemment,quiexercentleurmétieravecunetellepassion.

–Monmétierestmaseulepassion,dit-ellepresquepourelle-même.

–Dommage!

Quandellelevalesyeuxdoucementverslui, il laregardaquelquessecondesavantdesetournerverssasœur.

–Et toi sœurette,vois-tu toujours tonadmirateur ?demanda-t-ilpour changerde sujet etpar cegestelaisserMathildetranquille.Illasentaittendueetvoulaitluiaccorderunmomentderépit.

–Michaël?Oui.Noussommessortistroisouquatrefoisensemble.

–Apparemment,ilal’airplusintéressantquetesautresprétendants,dit-iltaquin.

–Qu’est-cequitefaitdirecela?luidit-elle,surlemêmeton.

–Pourqu’ilaiteulachancedet’inviterunedeuxièmefois,c’estdéjàquetuluitrouvesuncertainintérêt,uncertainattrait.Maisquatreinvitations,c’estvraimentqu’ilteplaît.

–Onnepeutrientecacher!Oui,ilmeplaît,c’estvrai.

–Jesuisungrandfrèreenvahissantpeut-être?

–Unpeu,oui.Maisjenem’enpleinpas,lerassura-t-elle.

–EtvousMathilde,avez-vousdesfrèresetsœurs?réattaqua-t-il.

–Non,jesuisfilleunique.

–Vousdevezvoussentirunpeuseule?demanda-t-il,sanslaquitterdesyeux.

–J’aimelasolitude,luirépondit-elle,enbaissantsonregard.

–Parfois,ellepeutêtrereposanteetagréable,jel’admets.Maisparfois,ellepeutêtreaussipesante,non?insista-t-il.

–C’estpossible.Excusez-moi,jevaisprendreunpeul’air,déclaraMathildeenselevant.

–Maisvousêtesdéjàdehors!dit-ilenriant.

–Jeveuxdire…marcherunpeu.

–QuelquechosenevapasMathilde?

–NonLéa,net’inquiètepas.Toutvatrèsbien.

–Vousenêtescertaine.Vousavezl’airembarrasséeet…troubler?luidit-il,uneflammedanslesyeux.

–NonnonThomas.Jeveuxjustemarcherunpeu,répéta-t-elleenpartant.

Chapitre11

Mathildeétaitassisesurunbancenfer forgé,devant laserre.LeregarddeThomas la troublait.Ellen’avaitpaspuresterfaceàluipluslongtemps.Poursapropresécuritéémotionnelle,elleavaitdûfuir. Il avait une manière si douce de prononcer son prénom… Il avait suffi qu’il lui parle et laregarde de nouveau pour revivre cette soirée du balmasqué. Elle n’arrivait pas à chasser de sonespritcequis’étaitpasséentreeux.Ellesesentait rougir jusqu’à la racinedescheveuxdèsqu’elleétaitfaceàlui.

–Maisquesepasse-t-ilavecmonfrère?

Léal’avaitrejointesansqu’ellel’entendearriver.Elles’assitàcôtéd’ellesurlebanc.

–Jevousaivuà table.Quesepasse-t-il? insista-t-elle.Quevousarrive-t-il à tous lesdeux? Iln’arrête pas de te regarder. Et toi, j’ai l’impression que tu fais justement tout pour éviter de leregarder,lui.Ondiraitquesasimpleprésencetemetmalàl’aise.

–Non,murmura-t-elle.

–Jesaisqu’ilintimideunpeu,mais…

–Léa,c’estlui,déclaraMathilde,paniquée.

–Commentça,«c’estlui»?Queveux-tudire?demanda-t-elle,sanscomprendre.

–Cethomme,àlasoiréechezAnna.C’étaitThomas,Léa.C’étaittonfrèreavecqui…

–MaisMathilde,cen’estpaspossible!

–OuiLéa,c’étaitThomas.

–Tuenessûr?demandalajeunefemme,éberluée.

–Ohoui,j’ensursûr!Iln’yaaucundoutepossible.

–Maispeuêtresimplementqu’illuiressembleet…

–NonLéa,jen’aipasoubliésonregard.Jel’aireconnudèsqu’ilm’atendulamainpourm’aideràmereleveraprèsm’avoirbousculée.Sesyeux,sesmains,etsavoix…jenelesaipasoubliés.Ohoui,c’estThomas,j’ensuiscertaine.

–T’a-t-ilditquelquechosecematindanslecouloir?demanda-t-elle.

–Non,rienàcesujet.Jesuisconvaincuequ’ilnem’apasreconnue,lui.

–Etmaintenant,tutesensgênée,n’est-cepas?

–Oui,exactement.Jenesaispascommentmecomporter.

–Essaiedetecomporterleplusnaturellementpossible.

–Jen’yarrivepas.

–Etbientun’asqu’àluidirequitues.

–Non!

–Mathilde, tu n’as pas arrêté de penser à lui depuis troismois. Aujourd’hui, tu sais qui est ceséducteur.Alorspourquoinepas…

–Ilenesthorsdequestion!Non,cen’estpaspossibleLéa!hurla-t-elle.

–Tun’aspasditnonlapremièrefois,luirétorqua-t-elle.

–C’étaittotalementdifférent.

–Ilteplaisait.

–Léa,leconceptdecebalétaitletotalsecretd’identité.L’ambiance,ledécor,toutfaisaitensortequ’onavaitenviedes’amuser,detoutoublier.Jepouvaisdireetfairedeschosesdontjen’auraipasoséautrement.Jenem’étaisjamaiscomportécommejel’aifaitcesoir-là.Etcequis’estpasséavecThomas est arrivé si vite, sans que je nem’en rende vraiment compte ! Je n’avais pas l’intentiond’allersiloin.Lesjoursquiontsuivi,jemesuisrassuréeenmedisantquejenelereverraiplusdetoutefaçon.J’aitoujourshontedemoiLéa.

–Iln’yapasdequoiavoirhonte.Toutceciesttrèsnaturel.Tuasdesenviescommetoutlemonde.Oùestlemalàlesmontreretàlesassumer?

– Justement, je ne veux pas lesmontrer et je ne les assume pas. Je n’ai jamais connu de tellesémotions.C’étaitsiprésent,sifort.

–Jetecomprends,affirmapluscalmementlajeunefemme.Toutceciestnouveaupourtoi.MaisThomas n’est pas un goujat. Un peu pressant et direct, je te l’accorde. Mais apparemment, il nes’attendait pas à quelqu’un d’aussi… fragile que toi. Sinon, je pense qu’il se serait conduitdifféremmentcesoir-là.

–Jeveuxbientecroire.

–Etdetoutefaçon,c’étaitdemafaute.C’estàmoiquetudevraisenvouloir.

–Pourquoi?demandaMathilde,étonnée.

–J’auraisdûtechoisirunerobequitecorrespondaitmieux.

–Cetterobemeplaîténormément.C’estsimplementquejen’aiaucuneconfianceenmoi.Peut-êtrequ’unjour,quandjemesentiraibiendansmoncorps…defemme,jelareporterai.

–J’enserairaviepourtoi.Jevoulaistedireautrechoseencore,ajoutaLéa.

–Oui,quoi?

– Thomas est un homme entêté, alors quand il a une idée derrière la tête… Mais c’est aussiquelqu’undecharmantetcorrect. Ilne teforcerapasàfairequoiquecesoit,s’ilsentque tune leveuxvraimentpas.Maiss’ils’aperçoitquetudoutes,quetueshésitante,ilessaieradeteconvaincre

partouslesmoyensqu’ilaura.

–Jen’aijamaisditquetonfrèreétaitunmonstre,bienaucontraire.Maisdevantlui,jeperdstousmesmoyens.Jemesensidiote.

–Oui,ilestdéstabilisant,ricana-t-elle.Ilestnormalégalementqueturéagissescommeça.Tun’asconnuqu’unamourcalme,paisible,sansfrissons.Maistoncomportementn’arienderidicule,crois-moi.

–MerciLéa.Tuasunevéritableamie.

–Jet’enpris.Jevaistelaisserréfléchir.Àtoutàl’heure.

Chapitre12

QuandLéaretournasurlaterrasse,Thomaslisaittranquillementsonjournal.Àsonarrivée,illerepliaetleposasurlatable.

–EtMathilde,commentva-t-elle?demanda-t-il,innocemment.

–Àtonavis?

–Jenevoispascequetuveuxdire!déclara-t-ilcalmementenlafixant, lessourcilslégèrementfroncés.

–Jet’enprisThomas.Pourquoinem’as-tupasditquec’étaittoicegrandséducteurquandjet’aiparléd’inviterMathilde?demanda-t-elle,sarcastique.

–Désolersœurette,jenevoistoujourspasoùtuveuxenvenir?mentit-il.

– Remarque, ajouta-t-elle sans tenir compte de son interruption, j’aurais dûm’en douter quandMathildem’adit ce qui s’était passé avec cet homme.Et étant donnéque tu étais à cette soirée toiaussi,j’auraisdûfairelerapprochement.

–BonOKsœurette!C’étaitbienmoi,avoua-t-il.Sijenet’airiendit,c’estparcequejevoulaislarevoir,c’estaussisimplequeça.Situluiavaisditquij’étaisavantdel’inviter,elleneseraitjamaisvenue,n’est-cepas?

–Exact!Maisj’auraistrèsbienpunerienluidire.

–Excuse-moi,jenevoulaispascourirlerisquequecelat’échappe.

–Excuseacceptée,luirépondit-elleaveclesourire.

–Maisjenepensaispasqu’ellemereconnaîtraitaussivite,déclara-t-ilensoupirant.

–Tutesous-estimesmoncherfrère.Ellet’areconnuedèsqu’ellet’avue.Cettesoiréelaplusquetroublée.Tuluiasfaitunetelleimpression,semoqua-t-elle.

–Jet’enprissœurette.

–PasdefaussemodestieThomas.Je t’assurequ’ellen’avaitpasoublié tonregard, tavoix,et lerestebienévidemment.

–C’estellequit’aditça?demanda-t-ilavecfierté.

–Oui.

–Merci,c’esttrèsflatteur,répondit-ilavecunsourirenarquois.

–Bon,çasuffit,assezrigolé,cariln’yariendedrôleThomas!lesermonna-t-elle.

– Je ne plaisante pas sœurette, dit-il soudain sérieux. Je suis désolé, mais je n’ai pas pu me

contrôler avec elle. C’était plus fort que moi. Au départ, je voulais juste l’embrasser. Et ensuite,ensuitejenepouvaisplusm’arrêter.

–Etsijenet’avaisrienditsurelle?Sijenetel’avaispasdécritecommeelleétaitchezAnnaetMichel,l’aurais-tureconnu?questionnalajeunefemme.

–Mathildeestunefemmequ’onnepeutpasoublier.Maiscelam’asoulagédesavoirquielleétaitavantmondépartpourLondres.

–Ahoui,àcepoint?

–Oui,àcepoint.

–Ilnefautsurtoutpasqu’ellesachequetul’asreconnu,sinonellepartira.Carellepense…qu’ellen’étaitpourtoiqu’unefemmeparmitantd’autres.

–Jen’avaispasl’intentiondeleluidiretoutdesuite.Maisjeleferai,siçadoitalleraussiloinquejelesouhaite.

–Thomas, je sais très bien que tu n’aimes pas quand quelque chose t’échappe et que tu obtiensgénéralementtoujourscequetuveux…

–Oui,coupa-t-il.Cequisignifie?demanda-t-ilencroisantsesbrassursontorsemusclé.

–J’espèresincèrementquesitun’aspasoubliéMathildedepuiscestroismois,c’estqu’ilyaautrechosedeplusqu’uneenviesexuellenonsatisfaite.

–Possibleeneffet,répondit-ilévasivement.

–Tul’aimes?

–Tuestropfleurbleue,sœurette,semoqua-t-il.

–Arrêtedetevoilerlaface.Regardeleschosestellesqu’elleslesont!Etsoishonnêteavectoi-même!cria-t-elle.

–Ilestencorebeaucouptroptôtpourdirequejel’aime,toutsimplement.Ellem’intrique,ouiçac’estcertain.Lesoirdubal,j’étaisvexédansmonorgueildemâle…

–Tupeuxparlerfranchement,jesuisunegrandefille,déclaraLéadevantsonmutismesoudain.

– J’étais frustré que nous n’ayons pas fini ce que nous avions si bien commencé, reprit-il. Jevoulais la posséder, c’est vrai, dit-il, fou de rage. Tu voulais que je sois direct, et bien je le suissœurette. Oui, je la voulais de manière très primitive je l’avoue, mais à ce moment-là je peuxt’assurerque jenepensaispasavecmoncerveau.Elleétait sienvoûtanteetelle l’estencore. Jeneréalisaispasoùj’étais.Jenevoyaisqu’elle.Seslèvres,soncorps,riend’autren’avaitd’importanceàcetinstant-làquelafemmequejetenaisdansmesbras.Maisd’unsens,jesuissoulagéqu’ellem’aitarrêté.Cen’étaitvraimentpaslelieuapproprié.

–Etmaintenant?

–C’estplusqu’uneenviephysique.Sic’étaituniquementcela,jel’auraisoubliéeetremplacéevitefait.Maisjustement,jen’aipascessédepenseràelle.Quandtuesvenuel’autresoir,tutrouvaisquej’avaisunesaletête.Tuvoyaisquej’avaisdescernessouslesyeux.Jen’arrivaispasàdormirtout

simplement, voilà la vérité. Je repensais sans cesse à elle, à son corps sousmes doigts, sousmeslèvres.J’endevenaisfou.

–Alors,quecomptes-tufaire?questionnaLéa,compréhensive.

–Recommencerdepuisledébut,déclara-t-il,sérieusement.

–Commentça?

–Ellemeplaît, sœurette.Ellemeplaîtplusque jeneveuillebienme l’avouer. J’enaiassezdesfemmes intéresséesparmonargentouparmapopularité.Assezdes femmesquineveulentqu’uneaventurepassagère.Ohj’enaibienprofité,jel’avoue.Pendantdesannées,c’étaituniquementcequejevoulaisd’ailleurs;riendeplus.Etquantàelles,ellesprofitaientaussidemoiàleursmanières.Onytrouvaitchacunnotrecompte.

–Nemeditpasquelecélibataireendurciquetuesveutsecaserpourdebon?demandaLéa,sansoserycroire.

–Jevaisavoirtrente-cinqanssœurette.Jeneveuxpasm’engageràlalégèreetsurtoutpasavecn’importequi.Cela faitunmomentque j’ypense.Mais jen’avais encore trouvépersonnequoi envaillelapeine.

–EtMathildeteconviendrait?

–Oui,possible.Ellemeplaîtvraiment.Elleesttellementdifférentedesfemmesquej’aieues.J’aienviedelaconnaîtredavantageetdetentermachance.

–UnconseilThomas.Jeterecommanderaisd’yallerdoucementetd’êtrepatient.Commetul’assibiendit,ellen’ariendecomparableaveclesautresfemmesquetuasconnu.

–Jesaissœurette.Maiscommetulesais,jesuisd’untempéramentactif.J’aidesappétitssexuelsquej’aidûmalàcontrôler.Jedisetjefaisleschosestellesquejelesressens.Jen’ypeuxrien,c’estcommeça.Celafaittroismoisquejenerêvequed’unechose:larevoir.Alorsj’aibienpeurquemapatiencesoitàbout.

– Je sais,maisMathildeestunepersonne timideet réservée.Ellene fera jamais lepremierpas,mêmesielleenmeurtd’envie.

–Crois-turéellementqu’elleenmeurtd’envie?demandaThomas.,curieux.

–Oui,jecrois.Maissatimiditélabloquetotalement.

–Elleestpourmoiunsacréchallenge.C’estàlafoistrèsdélicatetaussitrèsexcitant.Pourcequiestdupremierpas,fais-moiconfiance,jem’encharge…toutenessayantd’yallerdoucement.

Ilsseregardèrentunmomentensilence,puisThomasseleva.

–Jevaislarejoindre.

–Thomas!

–Ouisœurette,jeteprometsdemefreineraumaximumdemespossibilités.

–Mercipourelle.Mathildecomptebeaucouppourmoi. Jevous laisseunpeudiscuter, seuls. Jemontedansmachambre.Bonnechance.

–Merci.

Chapitre13

Thomasétaitbiendécidéà tenter sachance,mais ilnevoulaitpasêtre faux. Iln’avait riend’ungentlemanetn’avaitsurtoutpasenvied’enêtreun. Il serait lui-même,car ilnepouvaitpasenêtreautrement. Ilessaieraitsipossibled’êtrepatient.Sipossible,carelle l’envoûtait totalement. Il lavitassisesurlebanc,latêtebaissée.Ilrestaàlacontemplerunmoment,puiss’avançadoucementverselle.

–Mathilde,murmura-t-il

Ellenebougeapas,l’avaitelleentendue?Apparemmentpas.

–Mathilde!répéta-t-il,d’untonplushaut.

Lajeunefemmesursauta.

– Oh Thomas ! s’exclama-t-elle en le voyant debout, devant elle. Excusez-moi, j’avais envie…d’êtreunpeuseule.

–Maisvousêtesicichezvous.

–Mercipourvotreaccueil,dit-elletimidement.

–Jevousenprie,c’estunplaisir.Allonsnouspromenerunpeu,voulez-vous?Léaestmontéesereposer.

–Oui…volontiers.

Ilsmarchèrentlonguement.Thomasluimontralaserreetlesdifférentsendroitsdujardin.C’étaitvraimentunebellepropriété. Ils retournèrent ensuite s’asseoir sur le banc.Thomasplaça sonbrasderrièreelle,surledossieretsetournaverslajeunefemme.

–Jenesaispasgrand-chosedevousMathilde.Saufquevousêteslacollègueetsurtoutamiedemasœur,etfilleunique.J’aimeraiensavoirplussurvous.Cequevousaimezetdétestez.

– Il n’y a rien d’extraordinaire à savoir sur moi. Je suis parfaitement banale, déclara-t-elle enbaissantunenouvellefoissonvisage.

– Je n’ai pas la même opinion à votre sujet. Je vous en prie. Je voudrais vous connaître plus,beaucoupplus.Iln’yapasdemalàcela.

– Je suis certaine que vous avez énormément de travail. Jem’en voudrais de vous faire perdrevotretempsquidoitêtrej’ensuissûrsiprécieux,déclara-t-ellebienviteenessayantdeselever.

MaisThomasposasamainsurlasienne,l’empêchantainsidepartir.

–Non,aucontraire.Jen’aipasarrêtécesdernièressemainesetj’aibesoindesoufflerunpeu.Jepeinstoujoursunpeulesoirpourmedétendre.Et jevousassurequevousnemefaitespasperdre

montemps…loindelà.

–Bon,commevousvoudrez.

–Parlez-moidevous,insista-t-ilquandillavitencorehésiter.

Elleinspirad’uncoupetselança:

–J’ai trenteetunans, trente-deuxbientôt.Jevisseuledansunpetitappartementquejeloue,nonloindemontravail.Mesparentspossèdentleleuràdeuxruesdechezmoi.Jen’aipaslepermisdeconduireetn’enaid’ailleurs jamaiseubesoin.Jedéteste leschoux, lesasperges,mesplatsépicés.Parcontre,j’adorelesplatsensauceetlescrèmesglacées.Enfin,unevietoutàfaitsimple,récita-t-elleprécipitamment.

–Ilnetientqu’àvousdelarendreplus...palpitante,murmuraThomas.

–Qu’entendez-vousparlà?

Thomassepenchaunpeuverselleetajouta:

–Vousn’avezjamaiseuenviedevousmarier,d’avoirdesenfants?Vousêtesencorebienjeune,maisvotrehorlogebiologiquetourneMathilde.

–Vousêtesbienindiscret,répondit-elled’unepetitevoix,lesjouesrouges.

–Oui,jelesuis.Undemesnombreuxdéfauts.

–Jesuisétonnéequevousavouezenavoir.

– Personne n’est parfait…même si parfois on se vante de l’être.Mais je peux répondre à vosquestions,sivousenavezàmeposer,ajouta-t-il.Jen’aiabsolumentrienàcacher.

–Onatousquelquechoseàcacher,Thomas.

–DésolédevouscontredireMathilde,maisessayezdemetestersivousavezdesdoutes,précisa-t-ilaveclesourire.Quantàmoi,jenevousdemanderaipascequevous,vousmecachez,semoqua-t-ilgentiment.

Ellesemitàrougirviolemment,cequilefitrire.

–AlorsMathilde,pourquoin’êtesvouspasencoremariée?

Elleleregardatimidement,puisacceptadeluirépondre.

–J’aicru,unjour,quej’avaistrouvélapersonneidéale.J’aiespérélemariageetlesenfants.J’aipenséqueceseraitpossibleavecMartin.Maisjemesuistrompée,lourdementtrompée.

–Vousl’aimezencore?

–Ohnon.Onditquel’amourrendaveugle,etbienjepeuxvousdirequec’estvrai.Jesuiscontenteaujourd’huidenepasêtresafemme,dit-elleavecunréelsoulagement.

–Pourquoi?demanda-t-ilàlafoisétonnéetravi.

–Iln’étaitpaslapersonnequimefallait.Jem’ensuisrenducompteaprès,unefoislechagrindelaséparationenvolé.Maintenantilestmariéàuneautrefemmeetjelaplainssincèrement.

–Laplaindre!Pourquoilaplaindre?

–Martinpeutêtreunbonami,jeleconçois,maisunbonmari,non.Enfintoutdépendbiensûrdecequel’onrecherchechezsonfuturmari.Aprèstout, je le jugepeut-êtretropsévèrement.Sipourelleilestsonhommeidéal,tantmieux.Maisiln’étaitpaslemiença,c’estcertain.

–Etvousrecherchezquoichezunhomme?

–Je…jenesaispastropexactementcommentl’exprimer.

–Maissi,essayez,vousallezcertainementyarriver.Pourqu’aprèsvotreséparationavecceMartinvousvoussoyezditqu’iln’étaitpasceluiqu’ilvousfallait,c’estquevousavezaumoinsunepetiteidéedecequevousrecherchezetqu’iln’avaitapparemmentpas.

Lajeunefemmesoupira,maisfinitparluirépondre:

–Jeveuxunhommequim’aimepourcequejesuis,etquinecherchepasàm’imposersesidéesetseschoix.Jeveuxêtrelibretoutenmesentantprotégée.Jevoudraiquemonfuturmarivoieenmoilafemmeetnonpasuniquementlafutureouprésentemèredesesenfants.Jeneveuxpasd’unamourquidevientunehabitudeaufuretàmesuredesannées.ToutlecontrairedeMartinenquelquesorte,finit-elleavecunpetitsourire?

–Jevoisquevousprenezleschosesavechumour,répondit-ilenluisouriantàsontour.

Maisnecraigniez-vouspasque…cettedéfinition,sijepuisdire,necorrespondeplusàunamantqu’àunmari?

– Euh… peut-être. Mais un amant pour la vie alors. Et vous ? demanda soudain la jeunefemmevoulantsavoirautantsurluiquecequ’elleavaitpuluidévoiler.

–Commentçamoi?

–Pourquoin’êtes-vouspasmarié?

–Jevoisquevousvousprenezaujeudesquestions,lataquina-t-il.

Quandillavitbaisserlesyeux,iléclataderire.

–Jesuisheureuxquevousvousintéressiezassezàmoipourmeposerdesquestionspersonnelles.Donc,ausujetdumariage,j’aieuplusieursoccasions.Jepossèdeunefortunequiattirebeaucoupdefemmes.Maisjamaisaucune,cesdernièresannées,n’acouchéavecmoipourmoi-même,déclara-t-ilavecfranchise.Excusezmonfranc-parlerMathilde,ajouta-t-ilprécipitammentquandilvitsonvisagelégèrementchoquer,maisiln’yapascinquantefaçonsdedireleschoses.

–Cen’estrien.Jesuisseulementdésoléepourvous.

–Iln’yavraimentpasdequoi.Pourmoi,lemariagenevautlapeinequesionépousecellequel’onveutvraiment.Deplus,ilfaudraquemafuturefemmes’intéresseàmoiavantdes’intéresseràmoncompteenbanque.Jenevoudraipasépouserunefemmesimplementparcequ’elleest jolie…unebelle«potiche»accrochéeàmonbras,nonmerci.Lemariageestunengagementpourlavie,dûmoinsonl’espèretous.

–Encorefaut-ilêtresûrd’aimeretdevouloircettepersonne

–Lejouroùjeferaimademande,j’enseraisûr,vouspouvezenêtrecertaine.

–Etbienj’espèrequecelavousarriverabientôt,luidit-elleunpeujalouseaufondd’elle-mêmedesafuturefemme.

–Celanedevraitplustarder,réponditThomas,presquepourlui-même.Pourrions-nousoublierlevouvoiement?

–Oui…sivousvoulez.

–Aimes-tunager?

–Oui,j’adore!

–Àcepoint?

–Oui.Onéprouveunetellesensationdebien-êtrelorsqu’onestdansl’eau.

–Alorsj’oseespérerquetun’aspasoubliétonmaillotdebaindanstesbagages?laquestionna-t-il,narquois.

–Non,jel’aipris.Léaetmoiavonsdéjàprofitédelapiscineetdusauna.J’espèrequecelanevousdérangepas?

–Tuhésitesàmetutoyer,constatalejeunehomme.

–Jetrouvequec’estdifficileavecquelqu’un…qu’onneconnaîtpas.

–Nousavonspasmaldiscutédepuistoutàl’heure.Nousavonsapprispasmaldechosessurl’unetsurl’autre.Etjenedemandequ’àcontinueràteconnaîtredavantage.

–D’accord…commetuveux.

–Voilàquiestmieux.Etjeterépètequetunemedérangespas,bienaucontraire.

Ilsbavardèrentdetoutetderienpendantencoreunebonneheure.Deleursgoûtsculinaires,deleurcouleurpréférée.Deschosesensommeparfaitementbanales,maistoutcecipermettaitàThomasdesavoirquiétaitexactementMathilde.Ilsentaitqu’ellesedétendaitdeplusenplus,qu’elleétaitmoinsméfiantequ’autoutdébutdeleurconversation.Ilappréciaitsacompagnie,sasimplicité.Ilaimaitsoncôté timideet réservé, commeunepetite fille.Mais elle lui avaitmontré aussiqu’ellepouvait êtresensuelleetpleinededésirs.Et,ildevaitbiensel’avouer,nerêvaitqued’unechose,revoircetéclatdanssesyeux.Revoirsesjouesenfeuparsesbaisersetsescaresses.

–Tuestrèsbelle,déclaraThomas,sensuellement.

Mathilderegardalejeunehomme,unpeusurprisedecesoudaincompliment.

–Merci,répondit-elledoucement.

–Plusgrandequemasœur,maisavecteschaussuresplates,tuparaisquandmêmesipetitedevantmoietsi…

Chapitre14

Ilsepenchaetl’embrassaavantd’avoirfinisaphrase.Ils’étaitretenudepuisledébut,maislàilnepouvaitplus.Ilvoulaitluidonnerunbaiser;unseul.Justeretrouverlegoûtdeseslèvres.Mathildeneprotestapas.Toutaufondd’elle,ellesavaitqu’elleenavaiteuterriblementenvie.Qu’ellel’attendait,qu’ellel’espérait,sansosersel’avouer.Lajeunefemmevoulaitdenouveausentirlachaleurdesonbaiser,unbaiserquil’incendiaencorecettefois.Cecontactétaitsichaudetsidouxaussi.Sontorseétaitmuscléetsidurcontresapoitrine.Sesbraslamaintenaientserrée,elleavaitl’impressiond’êtreunobjetprécieuxqu’ilnevoulaitabsolumentpaslâcher.Latêteluitournait.Ilsereleva,relâchasonétreinte,etlaregardad’unœilsatisfait.

–J’espèrequecebaisernet’apascontrarié?Maissituveuxmegiflerpourmonaudace,n’hésitesurtoutpas,dit-ilaveclesourire.Jeleméritesûrementpournepast’avoirdemandétonavis.

–Je…jen’aipasenviedetegifler.

–Danscecasjepeuxrecommencer?demanda-t-ilavecprovocationensebaissantlégèrementsurelle.

Mathildesereculaaussitôt.

–Tuvasunpeuvite.

–Tutrouves?Cen’étaitqu’unbaiser,riendeplus.Etcommeexcuse,jetediraiuniquementquej’enavaisenvie.

Oui,aprèsplusieursmoisàrêverdecettefemmesanscesse, il luiavait fallucebaiser.Mathildequantàellepréféranepasrépondre.

Chapitre15

Lesjourssuivantssepassèrenttoutaussibienquelespremiers.Commeprogramme:lanatation,lespromenades,lalecture,écouterdelamusique,sedétendreenfindejournéeausauna.Ilsprenaientchaquerepassurlaterrasse.Letempsétaittellementsuperbequecesvacancesn’enétaientqueplusagréables.Thomasétaitdevenupresquedistantavecelle.Surtoutaprèslebaiserqu’illuiavaitdonnésurlebanc,sondésintéressementàsonégardn’enétaitqueplusétonnant.Maisilrestaitpourautantd’unemerveilleusecompagnie.Secomportantavecellecommeavecunedeuxièmesœur.Léaetsonfrèreracontaientleurenfanceettouteslesbêtisesqu’ilsavaientpufaire.Mathilde,quantàelle,faisaitlerécitdelasiennedanslescoloniesdevacancesoùelleallaitchaqueété.Sesparentstravaillaientduretnepouvaientpaslagarder.

Unsoir,LéaetMathildeseretrouvèrentausauna.Thomas,quantàlui,montapeindreunpeudanssonatelier.

–Jevoisque tes rapportsavecThomassontmieuxqu’au toutdépart ! s’exclama toutd’uncoupLéa.

–Oui,çava,réponditlajeunefemmetimidement.

Elleavaitpréférénepasluiparlerdecebaiseréchangersurlebanc.

–Tuesmoinstendueaveclui.Jediraismêmequevousvousentendezassezbien.

–Oui.

–Iltefaitrireetlui,desoncôté,estfascinépartoi.

–Jenevoispascequitefaitdirecela?

– Je ne suis pas aveugle, crois moi ! ricana-t-elle. Depuis le tout début tu le fascines. Soncomportement est tout ce qu’il y a de plus correct, mais cela n’empêche rien, bien au contraire.Qu’as-tuàrépondre?

–Ilestintéressant,réponditévasivementMathilde.

–Jeneteparlepasd’unlivre,tusais!semoqua-t-elle.

–Il…ilrestetrès…trop…

–Très,tropquoi?

–Attirant,finit-elleparavouer?

Léaregardasonamieaveclesourire,raviequ’elleaitenfinavouécequ’ellepensait.

–Thomasestunbelhomme,c’estvrai.Ilestcraquantetàuncharmefou.

–Oui.Maisnevasurtoutpasleluidire!S’empressadedireMathilde,paniquée.

–Non, je te laisse lesoindele luidire toi-même,quandlemomentseravenu,rétorquala jeunefemmeenluifaisantunclind’œil.Aufait,j’aioubliédetedirequejeneseraipaslàdemainsoir.

–Ahbon,etoùvas-tu?

–Michaëlm’ainvitéàdîner.

–Ettut’esempresséed’accepter?

–Biensûr!Jenesuispasaussitimidequetoi,répliqua-t-elle,gentiment.

–Et dansquel restaurant cette fois-ci t’emmène-t-il ? demanda-t-elle sansprendreombrage à larépliquedesonamie.

–Nousn’allonspasaurestaurant,maischezlui.

–Voilàquiesttrèssuggestif!

–Oui,maispeuimporte,ilmeplaîtvraiment.Jemesensbienaveclui.

–Jesuisheureusepourtoi,sincèrementLéa.

–Merci,ilestabsolumentchou.

Chapitre16

Mariaavaitpréparépourlerepasdespaupiettesdeveauaccompagnéesdepommesdeterresautéesetdecourgettes.Pour ledessert, une tarte auxmyrtilles.Thomas,quidepuisquelques jours s’étaitdoncmontrégentil,maisplusréservéavecMathilde,redevintd’uncoup,aucourtdudîner,taquinetlégèrement narquois envers elle. Ce changement soudain de comportement la désorientacomplètement.Aprèsavoirbusoncafé,illaregardafixementpendantquelquespetitessecondesquisuffirentàlabouleverser.Lejeunehommeselevaensuiteetretournadanssonatelierquantauxdeuxjeunesfemmesellesjouèrentauxcartesenécoutantdelamusique.

–Léa,pourquoitonfrères’est-ilcomportécommecelacesoir?

–Jenevoispascequetuveuxdire?mentit-elle.

–Il…ilétaitgentildepuisquelquesjoursetlà…

–Iln’apasétégentilcesoirtuveuxdire?

–Non…enfinoui,maisiln’apasarrêtédemetaquineretdesemontrerrailleurenversmoi.

–J’aibienmonidée,maisjedoutequetuveuillesl’entendre,semoquaLéa.

Mathildegardalesilenceetellescontinuèrentàjouerencoreunmoment.

–Léa, il faudraitque je téléphoneàmesparentsdemain.Je leuravaispromisde leurdonnerdemesnouvelles.

–Oui,pasdeproblème. Il y aun téléphonedans labibliothèqueoudans l’atelierdemon frère,n’hésitepas.Utiliseceluiquetuveux,lanargua-t-elle.

–Merci.

–Bon,ilsefaittard.Jevaismecoucher,çanetegênepasderesterseule?

–Non.Jevais resterencoreunpeuàécouter lamusique.Jen’aipassommeil, répondit la jeunefemmeenallants’asseoirsurlecanapé.

–AlorsbonsoirMathilde.

–BonsoirLéa.

– Ne t’inquiète pas sœurette, je vais lui tenir compagnie ! déclara le jeune homme qui venaitcertainementdesortirdesonatelier.

–Parfait.BonsoirThomas.

–Bonsoir.

Dèsquesasœurfutpartie,ils’approchadeMathildeets’assitàcôtéd’elle.

–Celanetedérangepassijetetienscompagnie?demandaThomasens’asseyant.

–Non,bienentendu,murmura-t-elle.

Thomaspassasonbrasautourdesesépaules.

–Jepeux?

–Euh…oui.

Ilsrestèrentainsi,àécouterlamusique,pendantprèsd’uneheure.Lajeunefemmesesentaitbien;sonbrassursesépauleslarassurait.Dequoi,ellen’auraitsuledire,maiscelaluifaisaitunbienfoudesesentirprotéger.Depuissonbaiser,lepremierjourdesonretourchezlui,iln’avaitpasessayéde recommencer et encore moins d’aller plus loin. Elle était certaine dorénavant que Thomas nel’avaitpasreconnuetellenesavaitpassielledevaits’ensatisfaireoupas.D’unsensouicetteimagedefillefacilequ’elleluiavaitlaisséeneluiplaisaitpas.Elleavaittellementappréciésescaressesetnes’enétaitpascachée.Elleauraitpréféréque leschosesarriventdoucement.Mais il l’avaitpriseaudépourvu,alorsqu’ilsneseconnaissaientpas.Etc’estpourcelaqu’elleétaitheureusededécouvrircenouveaucôtédesapersonnalité.Aumoins,commecela,elleavaitpuapprendredavantagesurlui.Thomasn’étaitpasuniquementbelhomme,ilétaitintelligent,drôle,cultivé.Maisilétaitégalementetdemeuraittoujoursimposant,trèsprésent.Ilsedégageaitdeluiuneforceetunedouceurparfaitementparadoxale.C’étaittrèscontradictoire,maisc’étaittoutlui.Etd’unautresens,lefaitqu’ilnel’aitpasreconnue ne faisait que renforcer sa première impression : une autre femme aurait très bien faitl’affairecesoir-là,aubal.

–Passes-tudebonnesvacances?demanda-t-ilsubitement

–Ouimerci.D’excellentesvacances.

–Àcepoint?Semoqua-t-ildoucement.

–Oui.

–Lamaisonteplaît-elle?

–Oui,elleestextrêmementconfortable.Etaussimagnifique,vraimentmagnifique.

–Parles-tutoujoursavecautantdegrandeur?dit-ilensouriant.

–Jenevoispascequetuveuxdire?

–Tuemploiessouventlesmots:«extrêmement»,«vraiment»,«très»ouautres.

–Jenefaispasattention,murmura-t-elle,lesjouesrouges.

– Peux être est-ce nerveux. Tu te lèves de bonne heure, à ce que j’ai pu constater, dit-il pourchangerdesujet.

–CommediraitLéa,riennet’échappe.

–Non,rien.Enfin,jefaistoutpour.Surtoutquandlesujetm’intéresse.Voudrais-tunageravecmoidemainmatin?Tumeferasplaisirsituvenais,insista-t-ilenpressantdavantagesesépaulesdesonbras.

–Touslesdeux?s’inquiéta-t-elle.

–Oui,touslesdeux.Masœurselèvetoujoursplustard.

Illuisoulevalementondesamainlibreettournasonvisagefinverslesien.

–Tun’aspaspeurdemoi,toutdemême?luidemanda-t-il,moqueur.

–Non…pourquoi…auraisjepeur?bégaya-t-elle.

–Jenesaispas,àtoidemeledire.Ilyapeutêtreuneraisonquetunem’auraispasdîtes,d

emanda-t-ilenlafixant.

–Jeviendraisnagerdemain,affirmalajeunefemmeauboutd’unmoment.

–Parfait.

Ildéposaunbaiserrapidesurseslèvrespuisluirelâchalementonavantdeselever.

–Alors je tedisàdemain,dans lapiscine.Bonnenuit…et faisdebeauxrêves,conclut le jeunehommeavecunlégersourire.

–BonnenuitThomas.

Il restaunmomentdebout,devantelleensilence,à regardersa têtebaisséepuisallasecoucher.Mathilderestaencorequelquesminutesetmontasecoucheràsontour.

Chapitre17

Dèsqu’ellefutréveilléelelendemain,ellesedirigeaverslebalcon.Thomasnageaitdéjà.Elleleregardait parcourir la piscine de toute sa longueur avec une aisance admirable. Elle admirait seslargesépaulesbrillersouslesoleildéjàlevé.Elles’imaginaitentraindelescaresser,lesembrassermêmepeut-être.Lajeunefemmesecoualatêtepourchassercesimagestropévocatricesettentantespoursapaixintérieure.Rentrantdanssachambre,elleallacherchersonmaillotdeuxpièces,quiluisemblabeaucoupplusindécentqueladernièrefoisqu’ellel’avaitporté.Nepréférantpass’attardersurlesujet,ellel’enfilavitefaitavantdechangerd’avisetfitunenattepouremprisonnersesbouclesroussespour finirpardescendreavecuneserviette.QuandMathildearrivadans lacuisine,elle futsurprisedenepasytrouverMaria.Ledéjeuneravaitétépréparé,prêtàréchauffer.Lacafetièreétaitencore fumante, le lave-vaisselle tournait. Oh, elle devait sûrement être dans la buanderie, ou àl’étage,seditlajeunefemmeenseservantuncaféetenprenantunpetitpainqu’elleavalarapidementavantderejoindreThomas.

– Jemedemandais si tu n’avais pas changéd’avis. Je commençais àm’impatienter, déclara-t-il,aveclesourire.

–Non,commetupeuxlevoir,jesuislà.

–Oui,ça jevois,murmura-t-ilen ladétaillant.Vraimentexquise.Le tonpêchede tonmaillotsemarietrèsbienavectachevelurerousse.

–C’estgentilàtoi,dit-elle,confuse.

Aprèsavoirposésaserviettesurletransat,elledescenditvivementdansl’eaupoursesoustraireàsonregardbeaucouptroppénétrant.Ilsfurentplusieursbrassesensemble.Lapiscineétaitchauffée,cequiétait trèsagréable lorsque la températureextérieureétaitunpeu fraîche.Deplus, elleétait trèsgrandeetpouvaitêtrecouverteenhiver.Mathildenageaitenévitantdeleregarder.Thomas,quantàlui,nesegênaitpaspourladévorerdesyeux.Riend’ailleursn’auraitpul’empêcherdes’abreuverdece spectacle qu’était son corps fin et gracieux flottant dans l’eau. Elle avait un corps superbe quiévoluait dans l’eau comme une sirène. Plus il la regardait, plus il avait envie d’elle. Il attendaitpatiemment le moment où il pourrait à nouveau tenir ses seins dans ses mains. Mais ce momentdevenaiturgent,indispensableàl’apaisementdesessens.

–Sinousnousarrêtionsunpeu?

–Oui,commetuveux.

–Viensprèsdemoi,demanda-t-ilenlafixant.

–Jesuisbienoùjesuis,rétorqua-t-elle,gênéedesesentirainsiobservée.

Sesyeuxrestèrentfixésauxsiensintensément.Ellesesouvenaitdeceregard,lemêmequ’ilavaitposésurelleaumomentoùiladmiraitsonangecontresapoitrine.Ilserapprochad’elledoucement,deplusenplusprès.Mathildeseretrouvaencercléeparsesbras,ledoscontrelereborddelapiscine.

Thomaseutunsouriresatisfaitsurleslèvres.

–Sais-tuquetuesvraimentdésirable?Etcemaillot…çadonneenviedetecroquer,ronronna-t-ilenpassantsalanguesurseslèvres.

La jeune femme fut automatiquement attirée par ce geste, comme il l’escomptait. Quand il sepenchatrèslégèrement,ellesursauta.

–Cen’estpasparcequetuesbeau, jeuneetrichequejedois inévitablement te tomberdanslesbras,s’emporta-t-ellecommepourseprotéger.

–Alorscommeçajesuisbeau?semoqua-t-il.

–Ouienfin…

–Ouiounon?lataquina-t-ildavantage.

–Tunevaspasmefairecroirequetunelesavaispas!

–Si bien sûr, j’en suis contientMathilde.Mais je ne vais pasm’en plaindre.Et l’entendre de tabouche,c’estsiagréable.Quelplaisir!Celaprouveaumoinsquejenetesuispasindifférent.

–Tun’auraispasuntableauàfinirparhasard?

Ileutunrirerauque.

–Situcherchesàmefairepartir,désolépourtoi,maisjemesenstrèsbienoùjesuis.J’aimetesentirsiprochedemoi.Tuessibelle.Et,pourtagouverne,jepeinsencemomentessentiellementlesoiretlanuit.

–Pourquoilanuit?questionna-t-elle.

Maisquandlajeunefemmelevitsourire,elleregrettaaussitôtsaquestion.

–Parceque jen’aimepasdormirseul.Surtoutavecunefemmecommetoisousmontoit.Unlitdoubleestfaitpourquelesdeuxplacessoientprises…etj’aidéjàmapetiteidéedelapersonnequipourrait lecombler.C’est trèsdésagréable lasolitude, tun’espasdemonavis?demandaThomasd’unevoixsensuelle.

Illaregardaitenluicaressantsesépaulesnuesainsiquesoncouquifrissonnaientsoussesdoigts.Lespetitestachesderousseursursespommettesluidonnaientunaircoquin.Elleétaitexquise.Sedit-ilensoupirant.Ils’étaitpromisd’allerdoucement,etilavaittenuparoledepuisquelquesjours.Maiscela ne changeait pas au fait que ce n’était pas chose facile de se retenir. Thomas ne voulait pasqu’elle croie que seul le sexe lemotivait.Qu’elle pense qu’il ne s’intéressait qu’à son corps. Il levoulait, oh oui, surtoutmaintenant. Ils étaient quasi nus tous les deux, et leurs peaux se touchaientpresque.Ilvoulaitcontinueràtenirsapromesse,enévitantdelabrusquer,maisilvoulaitégalementqu’ellesacheàquelpointellelerendaitdingue.

–Tuasuncorpsàfaireperdrelatêteàunhomme.Essentiellementunhommecommemoi.Allezsortons,ilvautmieux,jenesuispasfaitdebois,déclara-t-ilenlahissantsurlereborddelapiscine,justehistoiredesentirsoussesdoigtssoncorps,neserais-cequequelquespetites,maisdélicieusessecondes.

*****

Ilsétaientassisàlatabledelacuisine,l’unenfacedel’autreàboireuncafé.Cesilencequirégnaitdepuistoutàl’heurelapesait.Lejeunehommenedisaitrienpourlebriser,ilrestaitlesyeuxfixéssursatasse,pensif.Depuisleursretoursdelapiscine,ilnel’avaitmêmepasregardé.Ellenesaittroppourquoi,maisMathilden’eutassezdesonindifférence.

– À quoi pense l’artiste ? demanda-t-elle avec un trait d’humour pour essayer de détendrel’atmosphère.

–Qu’il passerait volontiers de peintre paysagiste à peintre intimiste depuis qu’il t’a vu dans sapiscine,répondit-ilenlafixantcettefois.

–Quefont-ilsexactementcommepeintures?l’interrogea-t-elle,prudemment.

–CespeintrescommeAugusteRenoirouEdgarDegasontreprésentésurcertainesdeleurstoilesdesscènesdelavieprivée.Desmomentsintimes,secrets…etquisontdesnuspourlaplupart.

–Nepourrait-onpaschangerdesujet?s’exclama-t-elle,rougedeconfusion.

–Jerépondaissimplementàtaquestion.Commeondit:«Situneveuxpassavoirlaréponse,neposepaslaquestion».

Quandellelevauninstantlesyeuxverslui,ilajoutanarquois:

–Parlerdenustegênetantqueça?

–Oui…ettulesaistrèsbien.

–Iln’yariendeplusbeauqu’uncorpsdefemmenu.

–Qu’elleesttapeinturepréférée?demanda-t-ellepourparlerd’autrechose.

–Unetoileappelée«Rolla»,d’HenriGervex.

–Jenelaconnaispas.

–Sonœuvrefituntelscandale,àl’époque,qu’ellefutretiréedusalonoùelleétaitexposée.

–Pourquoi?Qu’avait-elledesiscandaleux?

–Gervexavaitosépeindredesdessousfémininsentremêlésàdesvêtementsd’homme.Celanesepardonnaitpasen1878.Etquiplusest,cetableaureprésentaitunejeunefemmenue,entenduesurunlit défait. Son amant se tient debout à la fenêtre, débraillé. Il l’observe pendant qu’elle dort.Certainement fatiguée des plaisirs qu’elle vient de prendre avec cet homme, ajouta Thomas,malicieusement.Jeviensdemerendrecomptejustementquetuesaussiroussequ’elle,murmura-t-ilsensuellement.Lesmêmescheveuxlongsetbouclés,lapeauaussiblanchequelasienne,etles…

–Pourquoimedis-tutoutça?l’interrompit-elledeplusenplusgênée.

–ÀtonavisMathilde?

–Jenesaispas,mentit-elle.

Illaregarda,toutàcoupsérieusement.

–Tumeplais,énormément.Ettulesaistrèsbien.

–Ouijelesais,finit-elleparluirépondresansoserleregarder.

–Jevoudraissentirtoncorpscontrelemien.

–Thomas…

–Quoi?Qu’ai-jeditdemal !Celan’a riendescandaleux, s’emporta-t-il.L’attiranceentredeuxêtresestunechosemerveilleuse.ÉcouteMathilde,dit-ilpluscalmement.Tunepeuxpasm’envouloird’essayer toutdemême.Mais si jene teplaispas,dit lemoiet jem’abstiendrais là.À regret je tel’avoue,maisjen’insisteraispas.

–Non,jen’aijamaisditquetuneme…

–Bonjourvousdeux!

Chapitre18

Léavenaitd’entrerdanslacuisine.

–BonjourLéa,soufflaThomasd’untonsec.

–«Léa!».C’estrarequetum’appellesparmonprénom.Saufbiensûrquand…

« … tu es énervé contre moi pour quelque chose. », finit-elle pour elle-même. Elle regardaattentivementsonfrèreetsonamie.

–Aurais-jeinterrompuuneconversationimportante?dit-elle,taquine.

– Oui, mais ce n’est que partie remise. Nous la reprendrons un peu plus tard, n’est-ce pasMathilde?

Lajeunefemmeluijetaunbrefcoupd’œil,maispréféras’abstenirderépondre.Aprèsavoirfinisoncafé,ilseleva.Dèsqu’ilfutàcôtédeMathilde,illuicaressalajoueetlaregardaensouriant.

–Jevaism’habilleretpeindreunpeu.Tuesmanouvelleinspiration,semoqua-t-il.

–Quelleinspiration?demandasasœur,intéressée.

–C’estunsecretsœurette,répondit-illesyeuxtoujoursbraquéssurl’amiedesasœur.Maisjenepensaispasque lepeintreHenriGervexetmoi aimions lesmêmesmodèles.Au fait, ajouta-t-il enrelevantlatêteversLéa,j’aidonnéquelquesjoursàMaria.Àtoutàl’heurelesfilles.

Dèsquesonfrèrefutsorti,LéaregardaMathildequiétaitrougecommeunepivoine.

–Leschosesseprécisentàcequejevois,entrevousdeux.

–Unpeutrop,murmural’intéressée.

–Situveuxmonavis,cen’estjamaistrop.

–Parlepourtoi.

–Tudevrais te laisser aller, au lieude toujours te poser des questionsdonc tu connais de toutefaçon déjà les réponses. Je te connais Mathilde et je sais très bien que c’est ce que tu souhaitesréellement.C’estécritsurtonvisage,çaselitdanstesyeux.

–Non,jenepeuxpas!s’exclama-t-elle,paniquée.

–Tunepeuxpasdistu,maistuleveux?

–Léa!s’ilapprendquejesuiscettefillequ’iladéjàcaressée,je…

–Etbien,oùestleproblème?questionnasonamieaprèsunmomentdesilence.Iltevoulaitàcemoment-là,ilteveutaujourd’hui,iltevoudraencorequandtuleluidiras.

–Justement,jeneveuxpasleluidire,surtoutpas.

–Maispourquoi?

–Ilestdéjàtrèsattiréparmoi,jenevoudraispasqu’illesoitplus.Jenesuispasprête.

–Tucroisqu’ilpeutêtreplusattiréencore,maisilestaumaximummachérie,crois-moi.Tudisnepasêtreprête.Moijepensequetul’esaufonddetoi-même,maisquetuneveuxnotammentpaslereconnaître.Unechoseestsûre,tul’aimes,çacrèvelesyeux,avoue-le.

–Ilvatropvite.

–Jenetrouvepas.Jenel’aijamaisconnuaussipatientavecunefemmeoupourtouteautrechose.S’ilpeintlesoir,pendantquenoussommesausauna,c’estpouréviterd’êtreencoreplustentépartoi.Lapeinturelecalme.Pendantcetemps,ilpenseàautrechoseetretrouvelasérénitédesoncorps.

–C’estluiquit’aditça?demanda-t-elleenouvrantgrandlesyeux.

–Àpeuprès,maismêmeavantqu’ilnem’enparle,jel’avaiscompris.Jeleconnaissuffisamment.

–Maisj’aipeur,soupira-t-elle.C’estpeut-êtreridiculepourtoi,maisjen’ypeuxrien.

–PeurdeThomas?

–Non,demoi.Decetteenviequ’il faitnaîtreenmoi.C’estnouveauet j’aidumalàgérercetteattirancequejeressenspourlui.Alorsjelerepoussebêtement,maladroitement.Jen’arrivepasàmelibérer,àmelaisserallercommetudis.Jenesuispasfrigideetj’aidéjàfaitl’amour,maisavectonfrère…cesbaiserssontsipassionnésquejen’osepasimaginercequeseseraitde…

–Oui, il aun sacré tempérament.Sansoublierqu’ilne te laissepas indifférente.Et ça, il le saitparfaitementetilenjoue.Sic’étaitlecontraire,iln’insisteraitpasautant.

–Oui,jesais.

–Unconseil,situneveuxvraimentpasqueçaailleplusloin,dis-le-luitoutdesuite,etdefaçonclairetprécise.Carluinetelâcherapas,jet’assure.

–Jen’aijamaisditquejenevoulaispas…queçaailleplusloin,maisàmonrythme.

–Alorsà toidecontenirsesardeurs, si tu lepeux!dit-elleensouriant.Mais jevoudraisque turépondesàunequestion,s’ilteplaît?

–Oui,laquelle?réponditMathilde,perplexe.

–L’aimes-tu?Aimes-tusincèrementmonfrère?

–Oui,murmuralajeunefemme.

Mariaavaitpréparéavantdepartirunpouletsaucebasquaisequis’avéraêtreunvéritabledélice.Durant tout le repas, Thomas l’observait, lui souriait, mais sans jamais lui adresser la paroletoutefois.Ilsmangèrentassezrapidementdansunsilencequiauraitpuêtrereligieuxsansl’énergienaturelledeLéaetsonbavardagequasiincessant.Quandlejeunehommeeufinidemanger,ilsortitdetableaussitôtenmurmurantunevagueexcuse.

–Léa,tuescertainequejepeuxtéléphoneràmesparents?

–Maisouiévidemment.Jet’aiindiquéoùétaitletéléphone,vas-ymoijemontedansmachambremepréparer.

–Merci,jevaisallerdanslabibliothèque.

–Pourquoipasdansl’atelierdeThomas,laprovoqua-t-elle.

–Non!

–Trouillarde!ricanaLéaenmontantàl’étage.

Dèsquelajeunefemmefutmontée,Mathildedébarrassalatableetmitlelave-vaisselleenrouteetsedirigeaverslabibliothèque.

–Oh,excuse-moiThomas,s’exclama-t-elleenouvrantlaporteetenlevoyantdanslapièce.Jenesavaispasquetuétaislà.

–Cen’estrien,entre.

–Jevoulaisappelermesparentspourlesrassureretqu’ilsnes’inquiètentpas.

–Ilestvraiquesij’avaisunefillecommetoi,jenelaquitteraispasdesyeux,dit-ilavecunsourire.Jet’enpris,appelle-les.

–Merci,répondit-elleensedirigeantversletéléphoneposésuruneconsole.

–Veux-tuquejetelaisseseule?

– Non, il n’y a pas de raison. Ce sera bref. Allo papa ! s’exclama-t-elle soudain en entendantdécrocheràl’autreboutdufil.

–Bonjourmafille.Commentvas-tu?

–Trèsbien.Etmaman?

–Ellesereposeunpeu.Commentsepassenttesvacances?

–Trèsbien,net’inquiètepas.

–EtlefrèredeLéa,lepeintre,c’estbienchezluiquetues?

–Ouipapa;

–C’estlamaisondesonfrère?Jeconnaiscertainesdesesœuvres,maisluicommentest-il?Ilestsympathiquej’espère?

–Maisouipapa,ilesttrès…courtois!réponditMathildeenbaissantlesyeuxdevantleregarddeThomas.

–Bien.Jepasserailebonjouràtamère.Elleseradéçuedenepast’avoireuautéléphone.

–Ditluibienquejel’embrasseelleaussi.

–Ouimapuce.Amuse-toimabelle.

–Mercipapa,àbientôt.

–Aurevoir,Mathilde,conclutlevieilhommeavantderaccrocher.

Ellereposaàsontourlecombinéets’apprêtaàsortirdelapiècequandThomass’approchad’elle,lesbrascroiséssursespuissantspectoraux.

–Alorscommeça,jesuiscourtois?déclara-t-il,lesourireauxlèvres.

–Quevoulais-tuquejeluidised’autre?s’exclama-t-ellesoudainfollederage.

–Jenesaispasmoi,parexemplequejesuisbeau,jeuneetriche.C’estbiencequetum’asditdanslapiscine,non?

–Oui,mais…

–Outupouvaisluidirequejesuisunhommepressantquineveutqu’unechose:c’estdet’avoirdanssonlit!

–Jen’allaispasluidireça!hurla-t-elle.

–Mais bien sûr que si…puisque c’est la vérité, ajouta-t-il en faisant un pas vers elle, les yeuxbrillants.

–Jevaismonterprendreunedouche,inventa-t-ellecommeexcuseenreculantverslaporte.

–Serait-ceuneinvitation?demandalejeunehommed’unevoixmielleuse.

–Non!criaMathilde.

–Sij’étaistoi,jefermeraisbienmaporteavantdemedéshabiller,onnesaitjamais.Aucasoùjemonteraisjustederrièretoi,déclaraThomasenladétaillantavecenvie.

Mathildesortitd’unpaspressantdelabibliothèquesousleriredeThomasetmontalesescaliers.Dansuneheuretoutauplus,elleseraitseuleaveclui,carLéaallaitvoirsesparentsavantsonrendez-vousdecesoir.Mathildeavaitenviede luicéder,carelle l’aimait,oui, sonamieavait raison,ellel’aimait énormément.Mais si son cœur et son corps le voulaient, le désiraient, sa raison elle l’enempêchait.Et,espérantquecelaleretiendraitd’approchertropprèsd’elle.Ellechoisit,aprèsavoirprisunebonnedouche,untailleurgrisperleclassique.Unchemisierblancensoiequiseboutonnaitjusqu’au cou compléta sa tenue. Oui, une tenue très austère avec ses escarpins noirs qui jusqu’àl’heure,avaittoujourseuuneffetdissuasifauprèsdelagentmasculine.Quandellefuthabillée,ellerassemblasescheveuxenunchignonserrésurlanuque.LajeunefemmepritunlivreetseslunettesquisetrouvaientsurlatabledenuitetallafrapperàlachambredeLéa.

–Oui?

Chapitre19

–C’estmoiMathilde.

–Entre.

–Alors,tuesprête?demandalajeunefemmeenentrant.

Sonamielaregardaquelquessecondesensilence,puissetournacomplètementverselle.

–Veuxtubienfermerlaportederrièretois’ilteplaîtMathilde,demanda-t-elletranquillement.

Lajeunefemmeobéitetpénétraunpeuplusdanslapièce.

–Ouijesuisprête.Maispeux-tumedirepourquoituportescettetenue?demanda-t-ellesoudain.J’ail’impressiondetevoirautravail.Carcetailleurestundeceuxquetuportesàlabibliothèque,n’est-cepas?

–Ouietalors?dit-elleenredressantlementonetlesépaules.

– Ah je vois ! ricana-t-elle. Aurais-tu peur que mon grand frère te saute dessus pendant monabsence?questionna-t-elle,narquoise.

–Celacalmerapeut-êtreleschoses,dit-ellesanscontrediresonamie.

–C’estmalleconnaître.Deplusilsaittrèsbienquiestcachésouscettevestegriseetceslunettes.Celanelecalmerapas,jediraismêmelecontraire.Ettelquejeconnaismoncherfrère,ilvatrouvercelaplutôtamusantetexcitant.

–Onverrabien,répondit-elle,fataliste.

–Bon,moij’yvais.Commentmetrouves-tu?

–Superbecommetoujours.

–Merci.ÉtantdonnéqueMariaestencongé,jevousaicommandéunrepaspourcesoir.

–Ohcen’étaitpasnécessaire.

–Jesais,maiscelamefaitplaisir.Ildevraitêtrelivréentoutdébutdesoirée.

–Merci,c’estgentilàtoi.

–Derien.Jerentreraidemain.

–AlorsjetesouhaiteunexcellentdîneravecMichaël.

–Maistoiaussi…avecmonbourreaudefrère,semoqua-t-elle.

–Léa!cria-t-elle,gênée.

Maislajeunefemmesortitenricanant,sansprêterplusd’attentionàl’embarrasdesonamie.

Chapitre20

AprèsledépartdeLéa,Mathildelutledernierchapitredesonlivredanslesalon.Unpeuavantdix-neufheures,ellepréparalatable.Puisensuite,elledéposalesplatsquelelivreurvenaitd’apporter,etpartitàlarecherchedeThomas.

Ellene le trouvanidans labibliothèquenidanssonatelieroùelle lecroyaitpourtantàpeindre.Ellesedirigeaverslebureauenrepensantàl’hésitationqu’elleavaitressentieavantd’ouvrirlaportede sonatelier.Quelle idioteelle faisait !Aprèsavoirdenouveau frappéà laporte sansobtenirderéponse,elleentradoucement.Thomasétaitallongésurledivan,lesyeuxclos.Elles’avançad’unpasléger, sans faire de bruit.Mathilde ne pouvait détacher son regard de son corps. Il était vraimentséduisantetl’attiraitbeaucoupplusqu’ellenevoulaitbiensel’avouer.

C’étaitlapremièrefoisqu’ellelevoyaitsidétendu.Sesbrasétaientcroisésàl’arrièredesatête,dégageantsesépauleslargesetpuissantes.

Sa chemise blanche totalement ouverte laissait voir un torse recouvert d’une toison noire. Unetoison qu’elle eut soudain envie de caresser. Il avait aussi ce qu’on appelait : « des tablettes dechocolat»etsonjeanluimoulaitindécemmentleshanches.

Ildégageaitunetelleforce,untelmagnétisme.Thomasétaitvraimentimpressionnant…fascinant.Elleétaitattiréeversluicommedeuxaimantsl’unenversl’autreetn’avaitqu’uneenvie:letoucher,lecaresser…l’embrasser.

–Situasenvied’enprofitersurtout,n’hésitepas!Jeteprometsdenerienfairepourterésisteretd’ailleursjenedemandequeçaquetumetouches.

Mathildesursauta.Ilparaissaitsicalme,qu’ellelecroyaitendormi.Ellel’avaitobservésanshonte,avecdélectation,sanscraindred’êtresurprise.Ilétait toujoursallongé,mais lafixaitmaintenantdesesmagnifiquesyeuxbleus,avecunsouriremoqueurauxlèvres.

–AlorsMathilde?

–Alorsquoi?bégaya-t-elle.

–Viensm’embrasser,j’attends,demanda-t-ilcalmement.

–Qu’est-cequitefaitcroirequejeleveux?s’emporta-t-elle.

–OhMathilde… je sais très exactement ce que tu veux. Et c’estmoi, déclara-t-il en fixant sonregard.

–Non.

–J’aitrèsbiensentilamanièredonctumeregardaisoudevraisjedire,medéshabillaisdesyeuxilyauninstant,ricanalejeunehomme.Mêmeencemoment,tunepeuxt’empêcherderegardermonvisage,montorseetbiensûr…

–Non!cria-t-ellesanspourautants’empêcherd’admirersontorsedévoilé.

– Je n’ai rien contre, bien au contraire. C‘est très valorisant pourmoi,mais aussi terriblementexcitant.Leproblème,c’estquejen’aimepasrestersurmafaim.Vienslà,ordonna-t-ildoucement.

–Jeneveuxpas.

–Tuenescertaine?Jenetecroispaspourtant.

Ilserelevad’unbondets‘approchad’elle.Ilressemblaitàunfauvedevantsaproie.Prêtàbondiràtout instant. Mathilde sentait ses jambes fléchirent, prêtes à la lâcher. Il était si proche d’ellemaintenantqu’elle tremblaitcommeune feuillesous leventd’automne. Il la regardaattentivement,despiedsàlatête,unpetitsourireespiègle.Puisreportasonregardsursonvisage,lessourcilslevés.

–Cettetenueestsupposéem’arrêtersijecomprendsbien,n’est-cepasMathilde?Elleestcenséeservir de bouclier contre moi ? Tu crois peut-être qu’elle va m’empêcher d’avoir envie de tecaresser?Maisjesuisnavréd’anéantirtousleseffortsquetuasfaitspourrefroidirmespulsions,majolie.Carquoiquetufasses,j’aienviedetetoucher;tellementenviequecelam’obsède.

–Thomas…

–Quiteditquecen’estpasundemesfantasmesjustement,séduirelajoliebibliothécaireàl’allurecoincée?demanda-t-ilavecunsourire.C’estsûr,cetailleurn’arienàvoiraveccettesuperberobeblanchequitecollaitàlapeauetnecachaitpratiquementpastesformeslorsdubalmasqué.

Elleleregarda,stupéfaite.Ellenesavaitquoidire,quoifaire.Illevalamainpourluicaresserlajoue.

–Tuétaissisensuelleaveccetangeaucreuxdetesseinsetcedosnu,hum…queldélice!J’enaiencoredesfrissonspartout.

–Mais…depuiscombiendetemps…depuisquandsais-tuquec’étaitmoiaubal?interrogea-t-elle,médusée.

–Maisdepuisledébut.

–Commentça?Tum’asreconnuelejourdetonarrivée?

–Non.Quandmasœurm’ademandésiellepouvaitinviteruneamie,j’aivoulusavoirquituétaisnaturellement.Ellem’aditquejeteconnaissaispeut-êtreetm’adoncparlédecettesoiréeetdecequetuportaisaubal.Aufuretàmesurequ’elletedécrivait,jeterevoyaisdansmesbrasavecmeslèvressurtoi,susurra-t-il.

Illuiretiraseslunettesetlesdéposasurunetableàcôtédeluipuisluisoulevalementonpourlaforceràleregarder.

–Maisdetoutefaçon,jet’auraisreconnue.Nousnousconnaissionsdéjàsi…intimementmabelle.

Thomasavaitfaitexprèsdemarqueruntempsd’arrêtavantdeprononcercemotsirévélateur.Celalamitencolère.Colèredueàlahontequ’elleressentait.

–Tut’esbienamuséj’espère,àmefairecroirequetunemeconnaissaispas?s’emportalajeunefemme.

–Ohquenon!Carcelam’aobligéàmecontenir!Etpuisnousnenousconnaissionspasvraimenttoietmoi.

–Pourquoinem’as-turiendit?

–Pourquetutesauvesunedeuxièmefois,nonmerci!Unefoisalargementsuffi.Maismaintenantquetueslà,devantmoi,àmamerci,ilesthorsdequestionquetutesauves.Nousallonspouvoirfinircequenousavionssibiencommencésur labalancelle, tu tesouviens? l’interrogea-t-ilenprenantdoucementsonvisagedansseslargesmains.

–Thomas…

–Cen’estpasce tailleurstrictetcechignonquivam’empêcherd’avoirenviede te toucher.Jecrois qu’au point où j’en suis, rien deme détournera du fait que j’ai envie de toi. Tu ne sais pasencoreàquelpointjerêvedetefairel’amour,maisjecomptebientelemontrer.Jesaisquetuaslapeau si douce, si belle, si pure. J’ai tellement besoin de la caresser une nouvelle fois, de la voirfrissonnersousmesdoigtscommelapremièrefois.

–Thomas,tuvastropvite,murmura-t-elle.

–Tropvite !s’exclama-t-ilenpressantunpeuplussonvisageentresesdoigts.Depuisque tuessousmontoit,j’aiévitétantbienquemaldetetoucher.Jemesuisretenuplusieursfoispournepasvenirdanstachambreenpleinenuit.J’aitoutfaitpouressayerdevoirentoiunesimpleamiedemasœuretnoncommecette femmeque j’avaiscaresséeaubald’AnnaetMichel !Maisévidemment,celan’apasmarché.Cesimagesdenousdeuxenlacésm’ontobsédépendantdesjoursetdesnuits.Celafaitplusdetroismoisquejepenseàtoisanscesseaupointd’endevenirdingue.Maisàprésentquenoussommesenfinseuls,jen’aiplusl’intentiondemeretenir.Jen’enpeuxplus.J’aitropenviedetoi.

–C’estpourcelaquetuasdonnécongéàMaria,sachantqueLéaseraitégalementabsente?

–Maisbienentendu.Jenevoulaispasquequelqu’unpuissenousinterrompre,maintenantquetuessurlepointd’êtreenfinàmoi.

Illapritdanssesbrasetlaserrafortcontrelui.Ilenfouitunemaindanssescheveuxpouryretirerlesépinglesquilesretenaient.Ilmoulaitsoncorpstoutcontrelesienpourqu’ellepuissesentirsondésirsiprésentcontreelle.

–Tuessibelle.Jeveuxtefairel’amourtoutdesuiteetjesaisquetuenmeurségalementd’envie,souffla-t-ild’unevoixrauque.

Illasoulevadanssesbrasetladéposasurledivan,sansqu’elleneproteste.Penchésurelle,illacouvraitdebaisers,decaresses.Aprèsavoirouvertsavestedetailleur,ilcommençaàdéboutonnerson chemisier pour pouvoir toucher sa peau nue.Mathilde avait l’impression de défaillir.Thomasétaitdorénavantallongésurelleetlajeunefemmepouvaitsentirsessensenébullition.Maisellenesavaitpaspourquoi,quelquechoselaretenaitencoredeselivrercomplètement.

–Thomas…pastoutdesuites’ilteplaît,murmura-t-elled’unevoixétouffée.

–QuandMathilde?Questionna-t-ilenlaregardantdanslesyeux.Tumerendsfou.

–Bientôt.Laisse-moiletempsd’acceptermesenvies.J’aiencoretropdedoute.

Ilsereleva,s’assitàcôtéd’elleetsepenchapourreboutonnerlechemisierdeMathilde.Lajeunefemmevitsonvisagetendu,samâchoireserrée.Ellesavaitquesespropresjouesétaientenfeu,queson propre corps tout entier tremblait encore de désirs pour lui. Thomas ne pouvait que s’enapercevoir,elletremblaittellementqu’illuiétaitimpossibledenepasleremarquer.

Pourtant,ilrefermaitunàunlespetitsboutonsblancsrespectantsonrefusd’allerplusloin.

–Excuse-moiThomas.Je…

–Tun’aspasàt’excuser.J’aitrèsenviedetoi,commetulesais,maisjeteveuxuniquementsituledésiresaussiardemmentquemoi.J’aidéjàété frustréàcausede toi,cen’estpas lapremière fois,ajouta-t-ilensemoquantd’elleouvertement.

Quandillavitbaisserlesyeux,ilrelevasonvisageverslui,toutd’uncoupsérieux.

–Jepeuxattendreencoreunpeu,maispastroplongtemps,carjenepeuxpasteregardersansypenser.Alorsàmoinssi tuneveuillespasdemoi, je te rappelleraiseulementque jenesuisqu’unhomme.Unhommequitedésiredepuisplusieursmois.

Illaregardaensilencependantquelquessecondes,puisilselevadèsqu’ileutfinid’aiderMathildeàserajuster.

–Allonsdîner,luidit-ilenluitendantlamain.C’estbienpourçaquetuétaisvenumechercher,jesuppose?

–Oui.Tasœur…nousafaitlivrerlerepas.

–Trèsjudicieux,jelareconnaisbienlà,dit-ilensouriant.

–Queveux-tudire?

–Ellepensaittoutsimplementquenousaurionsmieuxàfairequedenousprépareràmanger.

ThomasriadevantlaminedéconfitedeMathilde.

– Allez viens, ma sœur a apparemment surévalué mon pouvoir de séduction, ajouta-t-il enl’entraînanthorsdelapièce.

Chapitre21

Léaavait commandédumelonauporto, suivid’unmagretdecanardetpour finirune tarteauxpommes.Thomasluiparladesaprochaineexpositionetd’unvoyagequ’ilprojetaitdefaire.

–Etoùcomptes-tualler?

–J’aiprévudepartirunesemaineoudeuxauCanada.

–Etquandpars-tu?demanda-t-elle,timidement.

– Jene sais pas encore…çadépendra, répondit-il en la fixant. J’ai peint despaysagesde toutessaisons, mais peu représentant l’hiver, les montagnes, la neige. Il y a des endroits tranquilles etmagnifiqueslàbas.

–Oui,celaapporteraunplusdansladiversitédetespeintures.

–Jepenseaussi.Tuasfinitondessert?

–Oui.

–Sinousallionsprendrelecaféausalon?

–Peut-êtredevrions-nousdébarrasseravant…

–Non,laisseetviensavecmoi,déclaralejeunehommeenluitendantlamain.

Mainqu’ellepritaprèsunmomentd’hésitation.Illafits’asseoiretsepenchaverselle.

–Attendmoi,jereviens,murmura-t-ilavantdedéposerunbaiserlégersurseslèvres.

Pendant son absence, Mathilde admira les tableaux à chaque coin de la pièce. Le premierreprésentaitunemeragitée.L’eau,d’unecouleurbleunuit,s’engouffraitdansl’échancrured’unrécif.Au loin, un horizon solitaire, calme et un ciel sombre sans nuages. Le deuxième montrait desmarronniersrosesenfleur,dontlacouleursedétachaitsurlesfeuillagesverts.Aufond,unpontenpartie masqué par des arbres puis un ciel légèrement violacé. Le troisième était un de ses rarestableauxd’hiver.Thomass’étaitservid’unegammedecouleurstrèsréduite:blanc,noir,marronetbleu. Ilyavaitune luminositéexceptionnelle.Lesdifférentesdensitésde laneigeétaientexpriméespar des effets de blanc plus ou moins colorés. L’œuvre représentait au premier plan un champtotalementrecouvertdeneige,sansaucunetracedepasoumêmedepattes.Aufond,lestoitsd’unefermeetlecielblanc.Celadonnaituneimpressiondecalmeetdesolitude.Etlederniertableauétaitunmagnifiquecoucherdesoleil,dontlejaune,l’orangeetlerouges’emmêlaientsuperbement.Unemerpaisible,sansvaguesetau-devant,uneplagedesablefin,déserte.

Thomasrevintaveclecafé.IlenservitdeuxtassesetentendituneàMathilde.

–MerciThomas.J’admiraistestableauxpendanttonabsence.Ilssontsuperbesettrèsreposants.

–Ilsfontpartiedespremiersquej’aipeints.

Chapitre22

Ilyeutunsilencedequelquesminutesetdèsqu’ilseurentreposéleurstasses,Thomass’approchadelajeunefemme.Elleétaitdroite,légèrementtendueetn’osaitpasleregarder.

–Mathilde,murmura-t-il.

–Oui?

–J’aiquelquechoseàtedemander.

–Oui,quoi?

– Ma proposition va peut être, même sûrement t’étonner, mais je voudrais pourtant que tum’écoutesattentivement.

–Jet’écouteThomas,déclara-t-elleenleregardanttimidement.

–Veux-tum’épouser?

–Pardon!s’exclamaMathilde,stupéfaite.

–J’yaibeaucoupréfléchi,tusais.J’aiapprisàteconnaîtreetjesuissérieux.Jet’aimesincèrementetjeveuxquetusoismafemme.

–Mais…maispourquoicettedemandeetpourquoimoi?Jenecomprendspas, répondit-elleenbaissantlesyeuxsursesmainsnouées.

Ilpritsonmentondanssapaumeetretournasonvisagefaceàlui.

–Parcequejesuisdinguedetoi.C’esttoiquejeveux,pasuneautre.

–MaisThomas…

–S’ilteplaît,écoute-moi.Jesaistrèsbienpourquoituhésitesàmecéder.Quetuaiespeurdetesdésirs,jelecomprendsparfaitement,maisjepensequec’estsurtoutparcequetudoutesdemoi.

–Maistun’espasobligéedemedemanderenmariagepour…pour…

Ellen’osapascontinuer.

–Oui, je saisque jenesuispasobligéde tedemanderenmariagepourarriverà faire l’amouravec toi, finit-ilpourelle.Nous savons tous lesdeuxquecen’estplusqu’unequestionde jours…d’heuresmêmepeut-être,ajouta-t-ild’unevoixsensuelle.Mais jeveuxquetusachesquejenesuispasàlarecherched’uneaventuresanslendemain.Etiln’yapasquetoncorpsquim’intéresse.Jeteveuxtoi,toutentière,tumeplaisénormément.

–Thomas…

–Mathilde,tuestoutcequejecherchechezunefemme.Tuesdouce,belle,intelligente.Tuesune

femmesincère,gentille,naturelle.Tuesaussisensuelle,troublante,excitante.Tutefichespasmaldemapopularitéoudemoncompteenbanque,tusaisapprécieretcomprendremapeinture.

–Mais…

–Chut !Pas toutde suite.Nedis rien. Je tedemanded’ypenser,de réfléchir àmademande.CevoyageauCanada, jeveux le faireavec toi.C’estpourcelaque jen’aipasencore fixédedatededépart.Toutdépendradetaréponse.

–Thomas…

–Jesaisquejepeuxtefaireconfiance,c’estpourcelaquejeteparleaussifranchement.Jesaisquetun’espasunefemmevénale.Jesaisaussiquecen’estpascevoyagequimotiveratadécision.

Aumomentoùelleallaitparler,ilposaundoigtsursaboucheetlaregardafixement.

–Maintenant je ne te toucherai plus. Je nem’approcheraimêmeplus de toi pour t’embrasser etpourtant j’en meurs d’envie rien qu’à te regarder. J’attendrai que tu le veuilles et que tu me ledemandes.

–Thomas,je…

–Jeneveuxpasd’uneréponseimmédiatement.Réfléchi.Jevaisallerausauna,celameferaleplusgrandbien.

*****

Mathildeétaitmontéedanssachambredèsqu’ilfutpartidusalon.Elleétaitallongéesursonlit,àrepenserauxparolesdeThomas.Ilvoulaitl’épouser.Elleavaitencoredumalàycroire,tellementelleavaitétésurprisedesademande.

Ilavaitvujusteentoutcas.Elleavaitdesdoutes,biensûr,maislavéritableraisonquiluiavaitfaitrésisterjusqu’àprésentétaitlapeurdeseretrouverseuleaprèss’êtredonnée.

AvecMartin, elle avait cru à ces belles paroles et s’était trompée.Mais Thomas n’avait rien decomparableaveclui.S’ill’avaitvoulu,ilauraittrèsbienpucontinuertoutàl’heuredanslebureau,quandilétaitallongéau-dessusd’ellesurcedivan.Ellelesavait.Etpuisluiaumoins,valaitlapeinedeprendrelerisquedelecroire.S’ilpensaitvraimentcequ’ilavaitdit,etelleavaittouteconfianceenlui,ellen’avaitalorsplusderaisondelerepousser.Carellel’aimaitetledésiraittellement.Toutcequ’elleespérait,c’estquecettedemandesoitvraimentcequeluisouhaitait.Qu’ilsoitsincère,ellen’endoutaitpas,maisétait-cevraimentcequeluidésiraittoutaufonddesoncœur?Etsurtout,ellene voulait pas qu’il pense qu’elle se donnerait à lui seulement quand il lui aura passé la bague audoigt. Elle ne souhaitait surtout pas qu’il se sente piégé.Même si ses hésitations étaient dues à unmanquedeconfianceenelleetàlapeurd’êtreabandonnée,ellenevoulaitpasqu’ilsesenteobligédeluiproposerlemariagepourl’avoir.Oh,ellenesavaitplusquepenser!Oui,illuiavaitditqu’ilétaitdingued’elle.Que c’était elle qu’il voulait et pas une autre femme !Oui, il lui avait affirméqu’iln’était pas à la recherche d’une aventure, qu’elle était tout ce qu’il cherchait chez une femme !Apparemment, il savait aussi qu’il pourrait très bien parvenir à faire l’amour avec elle sans cettedemande.Carmêmeavecsesdoutes,sespeurs,seshésitations,ellenepourraitpastenirlongtempssansretrouversesbaisersetsescaresses.AlorscettedemandeenmariagedeThomas,quepouvait-elleetquedevait-elleenpenser?

Elleselevad’unbondetalladanslasalledebain.Aprèss’êtrecomplètementdévêtue,elleenfilaunegrandeservietteautourdesoncorpsetdescenditaurez-de-chaussée.

*****

Thomas était assis sur le banc, à l’intérieur du sauna. La sueur coulait sur son torse nu et saservietteluicollaitauxhanches.Ilavaitlesyeuxouverts,leregardvide.Ilavaittoutessayé,sedit-il.Touttenté.Ilneluirestaitplusqu’àattendre.Thomasauraitaimépouvoirluidemandersamainaprèsleurpremièrenuit,dansuneambianceplusappropriéeetplusromantique.Maislescraintesqu’elleressentaitl’avaientpousséesàagirautrement.Oui,ilauraittrèsbienpucontinueràlaséduirejusqu’àyarriversanssoucisetassezvite.Maisseserait-elledonnéecomplètementàlui?Aurait-elleeudesregrets?Uncoupàlaportelesortitdesespensées.

–Jepeuxentrer?

–OuiMathilde,entre.

Elle ouvrit la porte doucement et après l’avoir refermée, se plaça en face de lui. Thomas laregardait fixement. Il lui avait promis de ne plus la toucher de lui-même, mais voilà qu’elle seprésentaitquasimentnuedevantlui,danscetespaceexigu.Elleneportaitqu’unesimpleserviettesurce corps qu’il désirait tant. Il n’avait qu’un geste à faire pour pouvoir l’admirer totalement. Afind’éviterdefairecegeste,ilserrasespoingsaussifortqu’illeput.Est-cequ’elleserendaitcomptequ’elle jouait avec ses nerfs ? Il y avait des femmes qui profitaient de leur beauté,maisMathilde,commeleluiavaitditLéa,n’avaitpasconsciencedel’effetqu’ellepouvaitproduireauxhommes.

–Thomas!

–Oui?

–Jepeuxteposerunequestion?

–Biensûr,queveux-tusavoir?demanda-t-ilensedétendantunpeu.

–Étais-tusérieuxtoutàl’heure?

–Quejenetetoucheraiplus,oui!Malheureusementpourmoi.

–Nonpasça.

–Alorsquoi?

–Àproposdetademandeenmariage.

–Oui, très sérieux.C’est lapremièredemandeque je fais, et ladernière.Lemomentétaitmalchoisi,jetel’accorde…maistesdoutesm’ontfaitpeur.

–Peur!Maisdequoi?

–Deteperdre,murmura-t-il.

–Tum’aimesdoncvraiment?questionna-t-elle,lesyeuxhumides.

–Oui.Ilmesemblet’avoirditquelemariagepourmoinevautlapeinequesionépousecellequel’onveutvraiment.

–Oui,jem’ensouviens.

–Et que le jour où je feraisma demande, c’est que je serais sûr demoi et de la personne quej’auraichoisie.

–Oui,jem’ensouvienségalement.

–Alorstuastaréponse,répondit-ilsimplementavantdeserelever.

Thomasregardasesbouclesroussesquiretombaientendésordresursesépaulesnues.

–Ilvautmieuxquejesorte.

–BonnenuitThomas,dit-ellemachinalement.

–Elleseralongue,trèslongue.

–Longue?demandalajeunefemmeenlevantsonvisageverslesien.

– Je ne dors pratiquement plus depuis que tu t’es enfui demes bras quand nous étions sur cettebalancelle,chezAnnaetMichel.Bonnenuitàtoi,Mathilde,ajouta-t-ilavantdefranchir laportedusauna.

Chapitre23

Ellemontapeude tempsaprès lui.Ellepritunedoucheet en sortant, se regardadans lemiroir.C’était à elle de faire le premier pas dorénavant. Elle était certaine de ses sentiments, il l’aimaitréellement. Ses peurs et ses doutes n’avaient plus aucune raison d’être. Elle le voulait, le voulaittellement. Mathilde se sécha les cheveux rapidement, se vaporisa de parfum et se dirigea vers lapenderie.Cette robeblanchequ’elleportait aubal, celleparquoi toutavait commencé…elleavaitencoresonrôleàjouer.Etc’étaitcesoirl’occasionoujamaisdelareporter.Enfaisantsesbagages,laveilledesondépartdechezelle,ellel’avaitmiseaveclependentifdanssavalise,nesachantpastroppourquoiellelaprenait.Parnostalgiepeut-être.Ensedisantquec’étaitlaseulepreuveréellequecettesoiréeetsurtoutcetépisodesurlabalancelles’étaitbienpassé,qu’ellenel’avaitpasrêvé.Etelleétaitheureuseencemomentdel’avoiremportée.

Thomasétaitallongé,soussesdraps.Ilavaitmisundisque,histoiredesedétendre,sipossible.IlfermalesyeuxetrepensaàMathilde,encoreetencore.L’imagedesesseins,desescuissessoussesmainslehantait.Lorsqu’ilrouvritlesyeux,elleétaitlà,deboutprèsdelaporte.Elleétaitcommelapremière foisoù il l’avaitvuaveccette robeetcetangeposésursapeaudouce. Il sedemandauninstant s’il ne rêvait pas, comme cela lui était déjà arrivé.Mais quand il l’entendit faire un pas enavant,ilsutqu’elleétaitbienréellecettefois.

–Thomas…je…

–Refermelaportederrièretoietapproche,dit-il,lesoufflecourt.

Elle s’avança doucement et referma la porte.Quand elle fut près du lit, elle retira la rosette auniveaudesanuque.Larobeglissajusqu’àsespieds.Thomasécarquillalesyeux,labouchesoudainesèche.Puisilrepoussaledrap.Ilétaitentièrementnu.Elleleregardaenfrissonnant,maisaussiavecenvie.Ilétaitvraimentsuperbe.Uncorpssplendide.Ilsedécalaetluitenditlamain.

–ViensMathilde,viens.

Elles’allongeaprèsdeluietremontaledrapsureux.Elleressentaitlachaleurdesoncorpstoutprèsdusienetsonpropredésirmonté.Thomass’étaittournéverselle,lebraspliépourmaintenirsatête.Illaregardaittoutenattendantqu’ellediseouqu’ellefassequelquechose.

–PosetesmainssurmoiThomas.Viens,caresse-moi.

Ill’enlaçadoucement,tendrement.Ilavaittantattenducemoment.Elleétaitlà,danssesbras,dansson lit. S’offrant à lui, enfin sans retenue ! Il lui caressa les seins, voluptueux, dont les pointes sedressaientparledésir.Ill’embrassaavecferveur.Sabouchedescenditjusqu’àsapoitrinequifrémit.Lorsqu’ilpassaunemainsoussadentelleencoreprésente,ellesesoulevapourl’aideràlaretirer.Ilcontinuaàl’embrasser,àlacaresserjusqu’aucreuxdesescuisses.Ilnes’enlassaitpas.Elleétaitsienvoûtante,sidésirable.Thomasremontaàelle,sonsouffleétaitcourtetsavoixrauque.

–Situnem’arrêtespas,dansuneminute,ilseratroptard.

–Jeneveuxpasquetut’arrêtes.J’aienviedetoi.Viens,prends-moiThomas.

Il vint en elle doucement. Il resta immobile quelques secondes, puis commença un va-et-vientlangoureux.Lemouvement était lent, doux.Et devint de plus en plus vite, de plus en plus fort, ilsétaientenétaitd’exaltation.Ilsfirentl’amourunedeuxièmefoiscettenuit-là.Puisunetroisièmefois.Pluslentement,pluslongtempsetfinirentpars’endormirenlacél’uncontrel’autre,àl’aube.Thomasse réveilla quelques heures plus tard. La jeune femme était blottie contre lui, endormie. Elle étaitvraimentsuperbe,unefemmemerveilleuse.Ils’écartadoucement,pournepaslaréveilleretseleva.Aprèsavoirenfiléunpeignoir,ilsortitdesachambresansbruitetdescenditàlacuisine.

Chapitre24

ThomassepréparaittranquillementuncafélorsqueLéaentra.

–BonjourThomas!

–Bonjoursœurette.

–Tun’espasencorehabilléàcetteheure-ci!Ilestpratiquementmidi,celaneteressemblepas.

–Ouijesais.

–OùestMathilde?

–Dansmonlit,luirépondit-il,leplusnaturellementdumonde.

–Ohjevois!Elleaenfinécoutésoncœuretbaissésesdéfenses.

–Avecdifficultés.

–Oui,jem’endoute.Etmaintenant,queva-t-ilsepasser?Lesais-tuaumoins?

–J’attendssaréponse.

–Àquelsujet?

–Mademandeenmariage.

–Alorstuluiasdéjàdemandédet’épouser?demanda-t-ellesurprise,maisenmêmetempsravie.

–Oui.

–Etellenet’apasencorerépondu?

–Àsamanière,jepensequ’ellel’afait.Maisjepréfèrem’enassurerettoutdesuite.

–Toujoursaussiobstiné,sourit-elle.

–Tantqu’elleneserapasofficiellementmafemme,jenelalâcheraipas.Mêmeaprèsnonplus,jecrois.

–Mathildet’obsèdeàcepoint?demanda-t-elle,unsourireauxlèvres.

–Encoreplusdepuisqu’elleestdansmonlit.Jen’aijamaisaiméetdésiréunefemmeautantquej’aimeetdésireMathilde.

–Jesuisraviepourvousdeux.

–Mercisœurette.Ettoi,avecMickaël?

– Ilm’ademandédevivre avec lui, et j’ai évidemment accepté. Jevais de cepas, préparermesaffaires.

–Jesuistrèsheureuxpourtoi.Excuse-moi,maisjetedisàplustard,ajouta-t-ilpressé.

–Oui,coursvitelarejoindre,réponditLéaenriant.

–Poselaclefsurlacommodedel’entréeenpartant.Etàtrèsbientôt.

–Oui,àbientôtThomas.

*****

Lorsqu’ilentradanssachambre,Mathildedormaittoujours.Ildéposalescafésqu’ilavaitapportéssurlatabledenuitetseglissadanssonlitaprèsavoirôtésonpeignoir.Lajeunefemmeétaitsurleventre,levisagetournéverslui.Salonguechevelurerousses’étalaitsurl’oreiller.Ilrepoussaledrappouradmirerlebombementdesesfesses.Soncorpsréagitaussitôt.Ilsepenchapourluiembrasserlecoutoutencaressantsondosnuetseshanches.Elleouvritlesyeuxengémissantdoucementetluisourit.Quandellevitl’éclatdesesyeux,elleseretournasurledosenluiexposantsapoitrinesanshonte.Sansattendre, ilcapturaunepointeentreses lèvreschaudes toutenagaçant l’autreentresonpouceetsonindex

–Hum…quetapeauestdouceMathilde.

–Tun’espasencorerassasié?demanda-t-elleenfrissonnant.

–Onnepeutpasl’êtreavecunefemmecommetoi.

–Tuesunamour.

– En parlant d’amour, tu ne m’as toujours pas répondu clairement, rétorqua-t-il en levant sonvisageverslesien.

–Commentça?demandalajeunefemme,surprise.

–Veux-tum’épouser?questionnaThomas,soudainsérieux.

Elleleregarda,lesyeuxdenouveauenlarmes.

–OhouiThomas.Jeleveuxplusquetout.

Elleleserradanssesbrasetajouta,d’untonplustaquin:

–Unhommequivousapportelecaféaulitnesetrouvepasàtouslescoinsderue.

– Très amusant. Mais pour l’instant, oublie le café. On a beaucoup mieux à faire, dit-il en luimordillantl’oreille.

–Ahbon,etquoi?semoqua-t-elleensecambrantverslui.

–Jenesavaispasquetuavaisautantd’humour,ricana-t-il.Aufait,tum’avaisditquetuvoulaisquetonfuturmarivoieentoilafemme,etpasuniquementlafuturemèredesesenfants.Etbienjepeuxterassurerlà-dessusmabelle,dit-ilensecouchantlittéralementsurelle.Jesouhaitebiensûravoirdesenfants de toi,mais jamais je ne pourrais oublier en premier la femme que tu es, si désirable, sienvoûtante,sibelle,siexcitante…Jenepeuxm’empêcherdevouloir tefaire l’amour,murmuralejeunehommeennichantsonvisagedanssoncou.

–Mais…neteretienspas,gémit-ellequandellesentitseslargesmainsseglissersoussesfesses.

Ohoui,Thomas,viens…viens.

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