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UNIVERSITE PARIS VAL-DE-MARNE FACULTE DE MEDECINE DE CRETEIL *************************************************************************** ANNEE 2010 THESE POUR LE DOCTORAT EN MEDECINE (Diplôme d’état) Discipline : Médecine Générale ************************************** Présentée et soutenue publiquement le : À : CRETEIL (PARIS XII) ************************************** Par Thi Mai Anh KIM Née le 14 Janvier 1981 à Créteil ************************************** PREVALENCE ET ETIOLOGIES DE L’ANEMIE CHEZ LE SUJET AGE Etude rétrospective d’une cohorte de patients hospitalisés en UGA DIRECTEUR DE THESE : LE CONSERVATEUR DE LA Dr PAUTAS Eric BIBLIOTHEQUE UNIVERSITAIRE Signature du Cachet de la bibliothèque Directeur de thèse universitaire

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UNIVERSITE PARIS VAL-DE-MARNE

FACULTE DE MEDECINE DE CRETEIL

***************************************************************************

ANNEE 2010 N°

THESE

POUR LE

DOCTORAT EN MEDECINE

(Diplôme d’état)

Discipline : Médecine Générale

**************************************

Présentée et soutenue publiquement le :

À : CRETEIL (PARIS XII)

**************************************

Par Thi Mai Anh KIM

Née le 14 Janvier 1981 à Créteil

**************************************

PREVALENCE ET ETIOLOGIES DE L’ANEMIE CHEZ LE SUJET AGE

Etude rétrospective d’une cohorte de patients hospitalisés en UGA

DIRECTEUR DE THESE : LE CONSERVATEUR DE LA Dr PAUTAS Eric BIBLIOTHEQUE UNIVERSITAIRE Signature du Cachet de la bibliothèque Directeur de thèse universitaire

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REMERCIEMENTS

A mon directeur de thèse, le Docteur Eric Pautas, chef de service de l’UGA, à l’origine de ce

travail, qui a su m’entourer de ses précieux conseils et être disponible, pour sa rigueur dans la

réalisation de ce projet.

Au Dr Isabelle Gouin-Thibault, biologiste du laboratoire d’hématologie, pour sa disponibilité,

son aide et sa gentillesse.

Au Dr Jean-Louis Golmard, biostatisticien au Département Biostatistiques du groupe

hospitalier de la Pitié Salpétrière, pour son analyse statistique et son aide dans la

compréhension des résultats.

A madame Maguy Rierny, secrétaire de l’UGA, qui m’a aidé à retrouver les dossiers pour le

recueil des données.

Aux membres du jury, pour leur disponibilité et leur avis sur ce travail.

A mes amies Olpha Balaazi et Yamina Ladjici, pour leur patience et leur aide dans la

réalisation de cette thèse.

A ma sœur Nhu Anh Grondin et son amie Samia Salah, pour leur soutien et leur aide.

A mes parents, les piliers de ma vie, pour leur amour, leur soutien et leur confiance. Pour tout

ce que qu’ils me donnent et m’apportent, je leur dédie ce travail, signe de ma gratitude et de

mon amour. Merci Papa et Maman, que ce travail puisse vous rendre fière de moi.

A mes sœurs Xuan Anh, Thi Phuong et Nhu Anh, qui veillent sur moi et me protègent. Merci

Xuan Anh pour avoir passé des heures à retranscrire mes cours d’anatomie, merci Thi Phuong

pour avoir sorti les chiens pendant que je préparais mon concours et mes examens, merci Nhu

Anh pour ta disponibilité et ton aide, même pendant « tes heures de bureau ». Je vous aime.

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A mes beaux frères Ngoc Anh, Georges et Michel et à mes petits anges mes neveux et ma

nièce, Tuan Anh, Quan Anh, Alexandre, Lucas, Kim Anh et Thomas, que j’aime. Vous voir

grandir est tout simplement merveilleux.

A Sébastien Bergère, mon futur époux que j’aime de tout mon cœur, avec qui je veux vieillir

au quotidien et fonder une famille, et à qui je confie le reste de ma vie.

A Jeanny Giraudet, qui nous a apporté tant d’aide et d’amour, et qui fait partie de la famille.

A mes amies Fatiha, Linda, Loubna, Memtolom, Olpha, Salima, Samia, Yamina qui partagent

ma vie et mon quotidien, avec qui les études de médecine ont été une grande partie de plaisirs

et de rires et avec qui les murs de la faculté n’ont maintenant plus de secret. Merci pour votre

soutien et votre amitié, je vous adore.

A Samia et Loubna, mes témoins, plus de 10 ans d’amitié, de pleurs et de rires, que dire

d’autre que vous êtes pour moi comme des sœurs.

A Olpha et Linda, mes autres témoins, que notre amitié soit éternelle parce que vous m’avez

déjà tant apporté.

A ma future belle famille Claudine, Odile, Jean Denis, Luc, Betty, Cyril, Caroline, Yanick,

Morgan, Thomas, Stéphanie, Jérémy et Michel pour toute leur gentillesse.

A Didier Beguin, mon tuteur, pour ses conseils et le suivi de mon cursus.

A Mélanie, ma co-interne qui m’apportait mes déjeuners en stage de pneumologie et avec qui

une grande amitié a commencé.

(Et à mes chiens Mixa et Milou, mes deux boules de poils adorées).

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TABLE DES MATIERES

I. INTRODUCTION………………………………………………………………. 6

II. GENERALITES SUR L’ANEMIE CHEZ LE SUJET AGE………………… 7

1. Erythropoièse et vieillissement ………………………………………………… 7

2. Définition biologique de l’anémie chez le sujet âgé…………………………… 7

3. Diagnostic clinique de l’anémie chez le sujet âgé…………………………….. 8

4. Prévalence de l’anémie chez le sujet âgé……………………………………… 9

5. Etiologies de l’anémie chez le sujet âgé……………………………………….. 11

a. Anémie par carence martiale………………………………………………. 12

b. Anémie par carence en vitamine B12……………………………………… 13

c. Anémie par carence en folates……………………………………………… 13

d. Anémie inflammatoire………………………………………………………. 14

e. Anémie de l’insuffisance rénale chronique………………………………… 14

f. Syndromes myélodysplasiques……………………………………………… 15

g. Anémie des pathologies endocriniennes…………………………………… 16

h. Anémie et dénutrition………………………………………………………. 16

i. Anémie sur intoxication alcoolique chronique……………………………. 17

j. Anémie hémolytique………………………………………………………… 17

k. Anémie aiguë hémorragique……………………………………………….. 17

III. ANEMIE DANS UNE COHORTE DE PATIENTS AGES : EVALUATION DE

LA PREVALENCE, DESCRIPTION DES CAUSES ET DES CO-MORBIDITES

PERTINENTES…………………………………………………………………. 19

1. Objectifs…………………………………………………………………………. 19

2. Population étudiée………………………………………………………………. 19

3. Variables étudiées………………………………………………………………. 20

4. Définitions……………………………………………………………………….. 21

5. Analyse statistique………………………………………………………………. 22

6. Résultats…………………………………………………………………………. 23

a. Descriptif de la population étudiée…………………………………………. 23

b. Descriptif du groupe de patients anémiés………………………………….. 27

c. Relation entre anémie et variables étudiées……………………………….. 28

d. Relation entre anémie et le nombre de causes potentielles……………….. 29

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IV. DISCUSSION……………………………………………………………………. 30

1. Principaux résultats et comparaison avec la littérature……………………… 30

a. Prévalence de l’anémie chez le sujet âgé…………………………………… 30

b. Etiologies de l’anémie chez le sujet âgé……………………………………. 31

c. Relation entre anémie et co-morbidités……………………………………. 32

2. Forces et faiblesses de l’étude………………………………………………….. 33

a.Population étudiée …………………………………………………………… 33

b. Méthodologie clinique et statistique………………………………………… 34

V. CONCLUSION……………………………………………………………………. 35

VI. BIBLIOGRAPHIE ………………………………………………………………. 37

VII. ANNEXES…………………………………………………………………………. 44

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I. INTRODUCTION

La population mondiale vieillit : en 2000 il y avait 600 millions de personnes âgées de 60 ans

et plus, chiffre qui devrait doubler d’ici 2025, et plus que tripler pour atteindre 2 milliards en

2050 [72]. Ce vieillissement de la population qui se traduit par une augmentation importante du

pourcentage de sujets âgés dans la population générale, est surtout vrai dans les pays

occidentaux ou dans les pays en voie de développement. Ainsi, en France, les résultats du

recensement de 1990 ont montré que la proportion des personnes de 80 ans ou plus a doublé

au cours des trente dernières années, et que dès 2010, la France comptera plus de 10 millions

de personnes de 65 ans ou plus, dont 5,6 millions de 75 ans ou plus [61].

Ce changement démographique aura des conséquences évidentes pour les individus et la

société. Ce vieillissement aura notamment un impact important sur l’offre de soins. Il est donc

important d’identifier et de comprendre l’importance des problèmes de santé courants chez les

personnes âgées, surtout si leur ampleur et leur importance potentielle ne sont pas encore

reconnues [7]. L’anémie est un bon exemple de ces pathologies dont l’importance est sous-

estimée dans la population de sujets âgés, alors qu’elle est un véritable enjeu de santé

publique [32,65].

L’anémie est une pathologie dont la prévalence est importante dans la population âgée [7,41].

Elle est, de très loin, le problème hématologique le plus fréquent en gériatrie. L’anémie a, de

plus, des effets défavorables sur la santé des sujets âgés, du fait de leur polypathologie. Elle

augmente le risque de morbidité (décompensation de pathologies chroniques, risque de chute

et donc de fracture…) et de mortalité [30,37,51]. Elle joue aussi un rôle délétère sur leur qualité

de vie, leur autonomie [14,15,16,46] et leurs fonctions cognitives [29], et augmente leur risque

d’hospitalisation [11,37,51]. A l’inverse, il a été montré que le traitement de l’anémie a un réel

bénéfice sur la morbidité et la mortalité (amélioration des fonctions cognitives, des co-

morbidités, et de la qualité de vie) [43]. De plus, pour les principales causes de l’anémie chez le

sujet âgé, le traitement est simple, efficace et souvent peu coûteux.

Paradoxalement, compte tenu de ces données épidémiologiques, les études spécifiques sur

l’anémie du sujet âgé, notamment pour ce qui concerne ses étiologies, sont rares [18]. J’ai donc

voulu, à travers ce travail, évaluer la prévalence et les différentes étiologies de l’anémie dans

une cohorte de patients âgés, puis rechercher un lien entre l’anémie du sujet âgé et les co-

morbidités; et enfin comparer mes résultats avec les données des rares études qui se sont

intéressées à cette problématique.

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II. GENERALITES SUR L’ANEMIE CHEZ LE SUJET AGE

1. ERYTHROPOIESE ET VIEILLISSEMENT

Le vieillissement est caractérisé par une baisse des capacités fonctionnelles de nombreux

organes. Il en résulte un contraste entre une fonction correcte à l’état basal et une réduction

des possibilités d’adaptation lors d’événements aigus [25].

Le vieillissement de la moelle osseuse obéit à ce type de schéma, en particulier en ce qui

concerne l’érythropoïèse (annexe n°1). A l’état de base, l’étude de la moelle osseuse chez le

sujet âgé, peut montrer une diminution quantitative des progéniteurs de la lignée érythroïde ou

des proérythroblastes, mais sans modification significative de la masse globulaire totale ni de

la durée de vie érythrocytaire [63]. Le vieillissement médullaire s’accompagne majoritairement

d’altérations portant sur les mécanismes de régulation de l’érythropoïèse, qui aboutissent à

une diminution de la capacité de réplication des cellules souches médullaires. Ainsi, les

altérations médullaires associées au vieillissement n’entrainent pas d’anémie à l’état basal, ce

qui interdit de parler d’anémie de la sénescence ou d’anémie sénile, mais elles se manifestent

par une difficulté d’adaptation de l’érythropoïèse aux stress aigus [28].

L’âge ne doit donc jamais être un facteur limitant au diagnostic étiologique d’une anémie qui

ne peut pas être liée au vieillissement lui-même.

2. DEFINITION BIOLOGIQUE DE L’ANEMIE CHEZ LE SUJET AGE

L’anémie est une diminution de la masse de l’hémoglobine (Hb) circulante. Compte tenu qu’il

n’existe pas d’anémie sénile, la définition de l’OMS reste utilisable : un sujet âgé est

anémique quand son taux d’Hb est inférieur à 12 g/dl pour la femme et inférieur à 13 g/dl

pour l’homme [28]. Cependant, cette définition de l’OMS de l’anémie a été souvent remise en

question avec plusieurs tentatives de définitions de l’anémie en fonction des origines

ethniques, du sexe et de l’âge [31,43,47,54,58,64,68].

Pour exemple, des études épidémiologiques montrent une diminution du taux moyen d’Hb

avec l’âge pour le sexe masculin. Des facteurs hormonaux sont proposés : les hormones mâles

stimulant l’érythropoïèse, la baisse de testostérone avec l’âge pourrait entraîner une

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diminution de la production de globules rouges et donc du taux d’Hb [73]. Ainsi, en pratique,

pour les sujets âgés, un taux d’Hb à 12 g/dl pourrait être retenu comme la limite inférieure de

la normale pour les deux sexes [62,70].

3. DIAGNOSTIC CLINIQUE DE L’ANEMIE CHEZ LE SUJET AGE

Tout comme chez le sujet jeune, la vitesse de constitution de l’anémie influe sur l’intensité

des signes cliniques. Plus l’anémie est de caractère aigu, plus les risques d’une mauvaise

tolérance sont grands. Cependant, chez le sujet âgé, l’existence de pathologies associées joue

aussi un rôle important dans cette tolérance; une anémie modérée (de l’ordre de 10 g/dl par

exemple) peut se révéler de manière dramatique chez un patient âgé polypathologique [25].

Comme déjà signalé, il a été montré que le taux d’Hb influe sur la morbidité et la mortalité via

le retentissement sur des pathologies associées [51,54], et a un impact négatif sur la qualité de

vie et les fonctions physiques du sujet âgé [14,15,16,44,46,71]. La diminution du taux d’Hb

s’associe aussi à une diminution des fonctions cognitives [17,41]. L’étude de Esekowitz et coll.

[12] montre par exemple une augmentation de la mortalité des patients insuffisants cardiaques

anémiques par rapport aux insuffisants cardiaques non anémiques. La transfusion des patients

anémiés était associée à une diminution de leur mortalité [49]. La correction de l’anémie chez

les sujets porteurs de co-morbidités, quel que soit leur âge, apporte un réel bénéfice sur la

qualité de vie, sur la morbidité et la mortalité [60, 67, 40, 68, 52].

On a aussi observé, dans l’étude du NHANES III [43], que les sujets âgés anémiés ont plus de

co-morbidités que les sujets âgés non anémiés, et que l’anémie est un facteur indépendant au

risque d’avoir des co-morbidités. Il a été clairement montré que l’anémie, même modérée,

pouvait contribuer de manière significative à la vulnérabilité de la santé des sujets âgés,

évaluée sur une prévalence plus importante de polypathologies, et sur un risque accru de

morbidités, d’hospitalisations [34,35,37,43,50,51,71,73] et de décès [11,19,37,56,57,65]. Ce qui reste non

résolu est de savoir si l’anémie est un marqueur ou une cause de mauvais pronostic chez le

sujet âgé [50]. Plusieurs études ont montré qu’il existait un risque de mortalité plus élevé chez

les sujets âgés anémiés par rapport aux sujets âgés non anémiés, et que cette association

restait significative même après exclusion des sujets âgés ayant des facteurs de co-morbidités

[32, 51].

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Une des particularités cliniques de l’anémie du sujet âgé est liée à la fréquence de la

symptomatologie d’emprunt, très spécifiquement gériatrique [23]. L’anémie, facteur

décompensant une pathologie, se révèle donc chez le sujet âgé le plus souvent par des

tableaux d’insuffisances organiques qui concernent principalement le système

cardiovasculaire : trouble du rythme, insuffisance cardiaque, mais parfois limité à une

hypotension orthostatique et découverte à l’occasion d’une chute. Le tableau clinique peut

aussi concerner le système nerveux central, et alors décompenser une pathologie

neurovasculaire ou neurodégénérative, pas toujours flagrante à l’état basal : équivalent

d’hypoxie cérébrale entraînant une diminution des performances intellectuelles, ou pouvant

expliquer des tableaux confusionnels ou des épisodes de malaises [55].

Une autre difficulté diagnostique de l’anémie chez le sujet âgé est que la symptomatologie

clinique peut être négligée car banalisée [28]. Ainsi, les symptômes classiques d’anémie

peuvent être les mêmes que chez le sujet jeune : pâleur cutanéo-muqueuse, asthénie,

tachycardie, dyspnée d’effort. Mais ce classique syndrome anémique peut être mis à tort sur le

compte d’un vieillissement « normal », ou il peut être difficile à repérer chez le sujet âgé car

masqué par une maladie associée ou par des traitements médicamenteux [69]. Pour exemples,

absence de tachycardie chez les patients ayant des traitements chronotropes négatifs, asthénie

ou dyspnée non décelées du fait d’un faible niveau d’activité, pâleur cutanée rapportée à un

manque d’exposition solaire, dyspnée d’effort rapportée à une pathologie cardiaque ou

pulmonaire connue [25].

C’est l’évocation systématique de l’anémie dans ces circonstances et de ce fait l’indication

très large de la numération formule sanguine (NFS) qui permettent souvent de diagnostiquer

l’anémie devant ces tableaux cliniques atypiques.

4. PREVALENCE DE L’ANEMIE CHEZ LE SUJET AGE

L’anémie est une situation très fréquemment rencontrée chez le sujet âgé dans une pratique

médicale, qu’elle soit ambulatoire ou hospitalière. Cependant, l’évaluation de sa prévalence

dans la population gériatrique est très variable selon les études. Cette variabilité entre les

différentes études peut s’expliquer par l’hétérogénéité des populations étudiées en terme

d’âge, d’état de santé (études chez des patients polypathologiques ou chez des sujets en bonne

santé), d’autonomie (patients autonomes vivant au domicile ou au contraire patients

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hospitalisés), de conditions socioculturelles. Une autre explication possible est la variabilité

des critères biologiques retenus dans les études épidémiologiques : l’anémie peut y être

définie par le taux d’Hb, ou bien par le taux d’hématocrite, avec de plus des valeurs seuils

variables [7,18,25].

Une méta-analyse nord-américaine [18] montre clairement, en reportant 6 études, que la

prévalence de l’anémie augmente avec l’âge pour les deux sexes bien que les valeurs seuils de

l’anémie et que les critères d’inclusion des sujets (âge, terrain, antécédents...) soient différents

[9,24,26,35,38]. Elle confirme une nette augmentation de la prévalence pour les deux sexes après

85 ans, avec dans la plupart des études une prévalence de l’anémie 2 à 3 fois plus importante

chez les sujets de 85 ans ou plus que chez les sujets plus jeunes. Dans les études

épidémiologiques nord-américaines, la prévalence de l’anémie atteint environ 10 % dans des

cohortes de patients de plus de 65 ans, et est supérieure à 20 % à partir de 85 ans [8,37,43,49].

Cette prévalence peut atteindre dans certaines études des taux bien supérieurs de 67,3 % chez

les hommes et de 36,9% chez les femmes de 85 ans ou plus [35]. Dans la grande étude

épidémiologique du NHANES III de 2004, l’anémie atteint un quart des hommes et un

cinquième des femmes de la population nord-américaine des 85 ans ou plus [35,38].

Une méta-analyse [18] comparant 9 grandes études nord-américaines et européennes a étudié la

prévalence de l’anémie chez le sujet âgé en fonction du sexe [1,5,21,24,35,38,39,53,66]. Elle note une

grande variabilité de la prévalence de l’anémie, entre 2,9 % et 61 % chez les hommes et de

3,3 % à 41 % chez la femme, mais avec dans la majorité des études une prévalence plus

importante chez l’homme. Ceci peut s’expliquer par le fait que, dans la plupart de ces études,

l’anémie est définie avec une valeur seuil de l’Hb plus élevée chez l’homme que chez la

femme [18,43]. En effet, seules 2 de ces 9 études utilisent une valeur seuil identique pour les 2

sexes, et retrouvent dans ce cas une prévalence de l’anémie plus élevée chez les femmes que

chez les hommes [5,21]. En utilisant le même seuil d’Hb pour les 2 sexes pour la définition de

l’anémie, la prévalence serait donc plus élevée chez la femme que chez l’homme, ce qui est

cohérent avec les résultats de l’étude du NHANES III de 2004 [43]. Comme déjà signalé,

plusieurs auteurs estiment que cette différence de valeur seuil dans la définition de l’OMS

entre les 2 sexes est inappropriée chez les sujets âgés [7,20,37] car elle est basée sur des études

qui n’ont pas inclus des sujets de plus de 64 ans [18] et car des données épidémiologiques sont

en faveur d’une diminution du taux moyen d’Hb avec l’âge pour le sexe masculin.

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5. ETIOLOGIES DE L’ANEMIE CHEZ LE SUJET AGE

Les mécanismes physiopathologiques de l’anémie chez le sujet âgé ne diffèrent pas

fondamentalement de ceux de l’adulte jeune. Ainsi chez un sujet âgé, toutes les causes

d’anémies sont théoriquement possibles. En revanche, si certaines étiologies chez le sujet âgé

sont exceptionnelles, comme les anomalies constitutionnelles de l’Hb, d’autres sont plus

fréquentes voire spécifiques du grand âge, et doivent être recherchées de façon systématique

[70].

Selon les résultats de l’étude du NHANES III, les principales causes de l’anémie chez le sujet

âgé de plus de 65 ans, se divisent en 3 groupes de proportion égale [43,68] :

Les anémies carentielles représentent 34 % des anémies. Il s’agit dans 48 % des cas

d’une carence martiale seule, dans 19 % des cas d’une carence en folates seule et dans 17%

des cas d’une carence en vitamine B12 seule. Dans 6 % des cas, on retrouve une carence en

folates combinée à une carence en vitamine B12 et dans 10% dans cas on retrouve une

carence martiale associée à une carence vitaminique (folates et/ou vitamine B12).

32 % des anémies sont secondaires à une insuffisance rénale chronique (IRC) et/ou à

un syndrome inflammatoire chronique : IRC seule dans 25 % des cas, syndrome

inflammatoire seul dans 62 % des cas et les 2 causes associées dans 13 % des cas.

Pour 34 % des sujets âgés anémiés, aucune cause n’est retrouvée. Mais le bilan

étiologique dans cette étude ne comprend pas d’examen médullaire et 17 % des patients

présentent un ou plusieurs signe(s) biologique(s) faisant évoquer le diagnostic du syndrome

myélodysplasique (SMD). Quoiqu’il en soit, le pourcentage de sujets âgés sans étiologie

retrouvée reste élevé. En effet, selon d’autres études, le pourcentage de sujets âgés anémiés

sans cause retrouvée varie de 14 % à 50 % en fonction des populations étudiées [7,10,13,48,53].

Dans une étude suédoise, après exploration des anémies comprenant un myélogramme,

aucune cause n’est retrouvée chez 23 à 36 % de sujets anémiés septuagénaires ou

octogénaires [69]. Des auteurs français estiment que 10 à 30 % des anémies du sujet âgé restent

non étiquetées à l’issue d’un bilan étiologique biologique classique, ce qui s’explique d’une

part par des bilans étiologiques pas toujours complets (comprenant notamment un

myélogramme) et d’autre part par un suivi évolutif insuffisant [25,45].

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Un grand nombre d’anémies du sujet âgé sont multifactorielles du fait de la polypathologie

[25]. Dans l’étude du NHANES III, on retrouve plus d’une cause responsable de l’anémie dans

10 % des cas, en sachant que seules les associations de carences ou l’association de syndrome

inflammatoire avec insuffisance rénale chronique sont recherchées. Ce caractère volontiers

multifactoriel de l’anémie du sujet âgé rend souvent plus complexe le diagnostic étiologique,

et oblige à une démarche diagnostique rigoureuse (annexe n°2).

a. Anémie par carence martiale [25,28,41]

L’anémie par carence martiale est classiquement microcytaire mais l’association à une autre

cause d’anémie peut faire poser ce diagnostic alors que le volume globulaire moyen (VGM)

est normal. Il paraît licite, chez un sujet âgé chez qui les causes carentielles sont très

fréquentes, de rechercher les critères biologiques diagnostiques classiques de carence martiale

quel que soit le VGM :

Un fer sérique abaissé voire effondré

Une transferrine plasmatique élevée et donc un coefficient de saturation de la

transferrine abaissé ou effondré (rapport fer sérique/capacité totale de fixation de la

transferrine)

Une ferritinémie basse.

Ce bilan martial peut cependant être difficilement interprétable chez le sujet âgé, quand des

éléments inflammatoires biologiques sont associés, situation assez fréquente en gériatrie

(même si c’est possiblement plus vrai pour des patients hospitalisés que pour des patients

ambulatoires). Ainsi la baisse du fer sérique, constante dans les carences martiales, peut aussi

être notée dans les anémies inflammatoires. La valeur seuil de ferritinémie qui incite à

suspecter une carence ferrique est aussi dans ce cas à adapter car les éléments inflammatoires

peuvent « fausser » le résultat en l’augmentant.

Une fois le diagnostic d’anémie ferriprive posé, une enquête étiologique à la recherche d’un

saignement occulte est indispensable. En effet, les réserves de fer dans l’organisme sont

élevées chez le sujet âgé sain (1200 mg en moyenne chez l’homme âgé) et une carence

martiale par carence d’apport est donc exceptionnelle même en cas de dénutrition majeure, et

même à cet âge.

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b. Anémie par carence en vitamine B12

Le diagnostic d’anémie par carence en vitamine B12 repose sur l’association d’un taux

sérique de vitamine B12 bas, généralement inférieur à 100 pg/ml et d’une anémie

macrocytaire arégénérative, isolée ou associée à d’autres cytopénies [25,28,41].

Les étiologies de carences en vitamine B12 du sujet âgé sont différentes de celles du sujet

jeune [33]. Elles sont exceptionnellement dues à une carence d’apport, les réserves tissulaires

étant suffisantes pour couvrir les besoins durant plusieurs mois, mais cette situation pourrait

exister chez des sujets âgés avec une dénutrition profonde et prolongée. La maladie de

Biermer, de loin la première cause chez l’adulte jeune, paraît moins fréquemment en cause

chez le sujet âgé ; elle ne représente pas la moitié des étiologies des anémies par carence en

vitamine B12 des sujets âgés. La gastrite atrophique non Biermerienne, pathologie dont la

prévalence augmente avec l’âge (jusqu’à 40 % des sujets de plus de 80 ans), s’accompagne

d’une malabsorption de la vitamine B12 et semble la cause la plus fréquente de carence. Plus

généralement, l’étiologie principale de carence en vitamine B12 chez le sujet âgé, est une

dysabsorption par une non-dissociation de la vitamine de ses protéines porteuses (protéines

alimentaires dans le tractus digestif haut puis transcobalamine après l’estomac) [3,4]. Les autres

étiologies classiques sont rares : gastrectomie totale, malabsorption par atteinte du grêle distal.

c. Anémie par carence en folates

La carence en folates (vitamine B9) est assez fréquente chez le sujet âgé avec une prévalence

de l’ordre de 10 à 20 % chez les personnes âgées au domicile, augmentant en institution et

touchant jusqu’à 50 % des patients âgés hospitalisés [28].

Son diagnostic repose sur le dosage des folates érythrocytaires qui sont un meilleur reflet des

réserves tissulaires. Le dosage des folates sériques ne doit pas servir au diagnostic d’anémie

par carence folique et doit seulement être considéré comme un marqueur biologique

nutritionnel car le résultat varie en quelques jours et reflète les apports alimentaires récents.

La carence alimentaire est la première cause de carence en folates dans la population âgée car

les réserves en acide folique de l’organisme sont faibles, de l’ordre de quelques semaines. Les

malabsorptions, autre cause, s’accompagnent généralement d’autres carences. Une pathologie

hématologique responsable d’une hémolyse chronique peut être responsable d’une

surconsommation. Enfin, certains médicaments interférant avec le métabolisme de l’acide

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folique, en modifiant l’absorption digestive des folates ou par une action anti-folique

intracellulaire, doivent être recherchés dans le bilan étiologique d’une carence folique

(barbituriques, isoniazide, triméthoprime, méthotrexate…) [25,41].

d. Anémie inflammatoire

L’anémie inflammatoire est plus fréquente chez les sujets âgés que chez les sujets jeunes. Elle

ne diffère pas, sur le plan physiopathologique et diagnostique, de l’anémie inflammatoire

rencontrée chez les patients plus jeunes. Les étiologies retrouvées sont similaires, mais leurs

fréquences relatives varient avec l’âge. Le syndrome inflammatoire peut résulter de

pathologies multiples : infection bactérienne, néoplasie, pathologie auto-immune…

L’anémie inflammatoire est classiquement une anémie arégénérative initialement

normocytaire puis microcytaire en cas de syndrome inflammatoire prolongé. Le diagnostic

positif repose sur l’association de l’élévation de marqueurs biologiques de l’inflammation et

d’anomalies du bilan martial que nous avons déjà signalées (fer sérique bas, ferritinémie

élevée) [25,28].

e. Anémie de l’insuffisance rénale chronique

Le mécanisme principal de cette anémie est une insuffisance de production médullaire liée à

la diminution de synthèse rénale de l’érythropoïétine (EPO) [28].

L’évaluation d’une insuffisance rénale chronique implique d’estimer la clairance de la

créatinine (principalement par la formule de Cockcroft ou la formule MDRD). Une clairance

de la créatinine inférieure à 30 mL/mn est habituellement retenue pour considérer l’IRC

comme responsable d’une anémie arégénérative, classiquement normocytaire ou modérément

macrocytaire [55].

Le rôle étiologique d’une insuffisance rénale chronique dans une anémie arégénérative du

sujet âgé est une situation clinique fréquente et sous-estimée [25,36]. Cette sous-estimation peut

être très dommageable car le traitement par EPO est efficace et bien codifié [2]. Il est

cependant impératif d’éliminer une cause associée, notamment carentielle, car la mise en

route de l’EPO nécessite la supplémentation d’éventuelles carences [22].

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15

f. Syndromes myélodysplasiques

Les syndromes myélodysplasiques (SMD) également appelés myélodysplasies ou dysplasies

hématopoïétiques acquises sont des affections liées à la prolifération clonale acquise d’un

progéniteur hématopoïétique pluripotent. Ils sont caractérisés par une hématopoïèse

inefficace, responsable de cytopénies périphériques qui contrastent avec une moelle

généralement riche (insuffisance médullaire qualitative avec avortement intramédullaire) [6].

Les SMD sont, avec les anémies mégaloblastiques (anémie par carence en folates ou vitamine

B12), la principale cause d’anémie macrocytaire arégénérative du sujet âgé [27]. Les SMD

touchent avant tout des patients âgés, l’âge moyen au diagnostic étant de 70 à 80 ans comme

nous le montre la figure suivante. Il ne s’agit pas d’une pathologie rare, Leur incidence

annuelle est globalement de 17 pour 100000 personnes [41]. Les SMD représentent une des

hémopathies les plus fréquentes en gériatrie, et l’hémopathie maligne la plus fréquente chez le

sujet âgé [27,28].

Cour de capacité : Anémie/SMD, 2006

Les SMD se manifestent par l’association de cytopénies variables en nombre et en intensité.

Dans plus de 90% des cas, le signe révélateur d’un SMD est une anémie de découverte

fortuite sur une NFS, isolée ou associée à une autre cytopénie. Une neutropénie ou une

thrombopénie isolée est bien plus rare, notée dans environ 5 % des cas au diagnostic [42]. La

0

10

20

30

40

50

60

% en SMD

20-30 30-40 40-50 50-60 60-70 70-80 80-90

Tranche d'âge en année

Prévalence du SMD en fonction de l'âge

% en SMD

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16

découverte à l’occasion d’un accident hémorragique en rapport avec une thrombopénie

profonde, ou d’un problème infectieux lié à la neutropénie, est exceptionnelle.

C’est le myélogramme, et lui seul, qui permet d’affirmer le diagnostic de myélodysplasie. La

moelle est de richesse normale dans la plupart des cas, mais avec des anomalies qualitatives

morphologiques ainsi que des anomalies quantitatives pouvant toucher les 3 lignées

myéloïdes.

g. Anémie des pathologies endocriniennes

L’hypothyroïdie s’accompagne dans environ 50% des cas d’une anémie, le plus souvent

modérée, normocytaire, mais pouvant aussi être macrocytaire, incitant alors à rechercher une

cause associée. La physiopathologie de l’anémie de l’hypothyroïdie est mal connue, même

s’il a été montré que les hormones thyroïdiennes stimulent l’érythropoïèse in vitro sur des

cultures de moelle. Elle répond habituellement à une hormonothérapie thyroïdienne

substitutive bien conduite. L’anémie est plus rare mais possible dans l’hyperthyroïdie, avec

une physiopathologie encore plus mal connue. Il est rare que l’anémie soit la circonstance de

découverte de la dysthyroïdie, ce qui incite certains auteurs à ne pas proposer

systématiquement le bilan thyroïdien dans une démarche diagnostique d’une anémie. La

fréquence des dysthyroïdies chez les sujets âgés rend toutefois licite le dosage de la TSH

devant une anémie normo-macrocytaire du sujet âgé [28].

Chez l’homme, l’hypogonadisme secondaire à une castration chirurgicale ou chimique pour

cancer de la prostate (plus que celui lié au vieillissement physiologique) peut être responsable

d’une anémie normocytaire arégénérative chronique.

h. Anémie et dénutrition

La dénutrition protido-calorique est fréquente dans le grand âge [28], même chez les sujets

vivant au domicile. Elle est quasiment constante chez les patients âgés hospitalisés pour une

pathologie aiguë. Certaines protéines (par exemple la globine) sont indispensables à la

production globulaire et il n’est donc pas illogique de penser qu’une dénutrition protidique

marquée puisse jouer un rôle direct dans une anémie.

Cependant, la dénutrition protidique n’est habituellement pas considérée comme seul facteur

étiologique. Sa responsabilité dans une anémie est en effet difficile à affirmer car elle

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17

s’accompagne le plus souvent de carences vitaminiques et de pathologies sous-jacentes

pouvant participer à la fois à la dénutrition et à l’anémie [28]. Cependant la correction de la

dénutrition est souvent indispensable au traitement de l’anémie [25].

i. Anémie sur intoxication alcoolique chronique

Cette cause peut être rapprochée de la dénutrition quant à ses mécanismes complexes. En

effet, si l’alcool a bien une toxicité médullaire propre, l’intoxication alcoolique chronique

entraîne surtout une carence en folates et une dénutrition, qui sont probablement les causes les

plus prégnantes de l’anémie dans ce cas. Il reste cependant utile de sa poser la question d’une

alcoolisation chronique devant une anémie normo-macrocytaire arégénérative du sujet âgé,

car l’addiction alcoolique reste un problème fréquent dans le grand âge [28].

j. Anémie hémolytique

Le diagnostic d’anémie hémolytique implique l’association d’une anémie régénérative aiguë

ou sub-aiguë, et des stigmates biologiques d’hémolyse (en premier lieu haptoglobinémie

effondrée, et à un moindre degré de spécificité bilirubinémie libre et LDH élevées). Le frottis

est systématique car il peut orienter vers la cause de l’hémolyse en notant des anomalies

morphologiques des hématies, principalement présence de schizocytes, stigmates d’une

hémolyse mécanique.

Chez le sujet âgé, les principales causes d’anémies hémolytiques sont immuno-allergiques

médicamenteuses (antibiotiques…), auto-immunes (souvent idiopathiques, très rarement

secondaire à une pathologie auto-immune systémique ou à une hémopathie maligne

lymphoïde), mécaniques (valvulopathies, prothèses valvulaires…) [25].

k. Anémie aiguë hémorragique

Le diagnostic d’anémie aiguë hémorragique est le plus souvent très simple devant une anémie

de survenue brutale, régénérative, avec saignement. Cependant, le diagnostic peut être plus

difficile en l’absence de saignement extériorisé. Dans cet ordre d’idée, trois situations

« pièges » assez fréquentes en gériatrie, méritent d’être individualisées : l’existence d’un

hématome profond (rétropéritonéal ou intra-abdominal, principalement chez les patients

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traités par médicaments antithrombotiques), un volumineux hématome sous-cutané chez un

chuteur (sous-estimé quant à son volume et son éventuel retentissement sur la NFS), une

hémorragie digestive méconnue du fait d’un ralentissement important du transit (le toucher

rectal doit être systématique autant pour objectiver un méléna que pour chercher un fécalome)

[28].

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19

III. ANEMIE DANS UNE COHORTE DE PATIENTS AGES :

EVALUATION DE LA PREVALENCE, DESCRIPTION DES

CAUSES ET DES COMORBIDITES PERTINENTES

1. OBJECTIFS

Les buts de cette étude sont :

- Evaluer la prévalence de l’anémie,

- Etablir les étiologies de l’anémie et évaluer leur prévalence,

- Etablir un lien entre l’anémie et les co-morbidités,

dans une cohorte de patients âgés hospitalisés en court séjour gériatrique, mais volontairement

sélectionnés comme venant directement du domicile et pouvant donc être considérés comme

des patients ambulatoires pour ce qui concerne une éventuelle anémie.

Les résultats seront ensuite comparés aux données, majoritairement nord-américaines, de la

littérature.

2. POPULATION ETUDIEE

Il s’agit d’une étude descriptive et rétrospective sur dossiers de tous les patients

consécutivement hospitalisés entre le 1er

janvier et le 31 décembre 2007 dans l’Unité

Gériatrique Aiguë (UGA) de l’hôpital Charles Foix (AP-HP, Ivry-sur-Seine).

Les critères d’inclusion sont :

- patient âgé de 70 ans et plus.

- patient hospitalisé en provenance de son domicile habituel (y compris EHPAD) directement

ou après un passage de moins de 24 heures dans un service d’urgences, pour que la cohorte

corresponde à une population âgée ambulatoire.

Les critères d’exclusion sont :

- patient ayant une pathologie hématologique maligne connue avant l’hospitalisation

- patient ayant fait un passage préalable par un service hospitalier de réanimation, de

médecine ou de chirurgie

- patient ayant une anémie déjà connue et traitée.

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20

3. VARIABLES ETUDIEES

Les variables suivantes ont été recueillies par relecture du dossier médical de chaque patient

inclus dans l’étude :

Pour tous les patients inclus

* des données cliniques :

- âge

- sexe

- score de co-morbidité CIRSG, utilisable en rétrospectif sur dossier : score qui se décompose

en score « total » reflet de l’ensemble des comorbidités et en score « composite » reflet de la

sévérité de celles-ci (Annexe n°3)

* des données biologiques qui sont systématiquement recueillies pour tout patient pendant la

première semaine d’hospitalisation à l’UGA (aucun prélèvement supplémentaire n’a été fait

en vue de cette étude) :

- Hb en g/dl

- Albuminémie en g/l

- Fer sérique en µmol/l. Ferritinémie en µg/l. Coefficient de saturation de la transferrine

(CST)

- Folates sériques en nmol/l ou folates globulaires en nmol/l

- Vitamine B12 sérique en pmol/l

- Créatininémie en µmol/l avec calcul de la clairance de la créatinine (ClCr) en ml/min par la

formule de Cockcroft

- C-Reactive Proteine (CRP) en mg/l

- TSH en mU/I

- Haptoglobinémie en g/l

- Electrophorèse des protéines sériques, complétée par une immunofixation en cas de pic, à la

recherche d’une immunoglobuline monoglonale.

Pour les patients anémiques, ont été recueillies en sus, d’autres données biologiques quand

elles étaient présentes dans le dossier :

* pendant la première semaine d’hospitalisation :

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21

- Réticulocytes en Giga/mm3

- VGM en µ3

- Taux de plaquettes et de leucocytes en Giga/mm3. Formule leucocytaire

* possiblement dans une période autre que l’hospitalisation :

- EPO sérique

- Compte-rendu d’un myélogramme

4. DEFINITIONS

- La définition de l'anémie choisie est celle sur laquelle les médecins de l’UGA se basent pour

faire un bilan étiologique d'anémie : Hb < 12 g/dl pour les 2 sexes.

- La carence martiale est définie par :

. ferritinémie < 50 µg/l OU

. ferritinémie < 100 µg/l ET fer sérique < 10 µmol/l ET CST < 0 ,20

- La carence en folates est définie par :

. taux intra-globulaires < 270 nmol/l OU taux sérique < 5 nmol/l

- La carence en vitamine B12 est définie par un taux sérique < 100 pmol/l

- Le syndrome inflammatoire potentiellement responsable d’une anémie est défini par :

. CRP > 20 mg/l ET fer sérique < 10 µmol/l + CST < 0,20 + ferritinémie 100 µg/l

- L’insuffisance rénale (IR) potentiellement responsable d’une anémie est définie par une

ClCr calculée par la formule de Cockcroft 30 ml/min

- La dysthyroïdie est définie, selon les normes du laboratoire de l’hôpital :

. hypothyroïdie : TSH > 4 mU/l

. hyperthyroïdie : TSH < 0,3 mU/l

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22

- L’hémolyse potentiellement responsable de l’anémie est définie par une haptoglobinémie <

0,10 g/l

- La dénutrition sévère est définie par une albuminémie < 30 g/l

- L’anémie multifactorielle est définie par la présence de plus d’une étiologie de l’anémie,

parmi celles définies ci-dessus.

5. ANALYSE STATISTIQUE

L’analyse statistique a été effectuée par le Dr Jean-Louis Golmard (Département

Biostatistiques - Groupe hospitalier Pitié-Salpétrière, AP-HP, Paris).

Les variables étudiées sont soit qualitatives (carence en fer : oui ou non, dénutrition : oui ou

non…) soit quantitatives (ClCr, âge, score CIRS-G…).

Les statistiques descriptives ont été effectuées par des effectifs et des pourcentages pour les

variables qualitatives, et des moyennes et des écart-types pour les variables quantitatives.

Dans un premier temps, les caractéristiques des patients et les variables biologiques (sexe,

âge, dénutrition, carence martiale, carence en folates, carence en vitamine B12, syndrome

inflammatoire, IR, clairance, hémolyse, dysthyroïdie, présence d’un immunoglobuline

monoclonale, CIRS-G total et composite, nombre de causes potentielles) ont été comparées

entre les groupes « patients non anémiés » et « patients anémiés » par des tests du chi-2 ou de

Fischer exact pour les variables qualitatives et par des tests de Student pour les variables

quantitatives. Pour chaque critère, l’étude a été effectuée en 2 étapes, une analyse univariée

des variables et une régression logistique multiple pas-à-pas dans laquelle a été inclue les

variables significatives au seuil de 10% dans l’analyse univariée. Les variables retenues dans

les modèles finaux ont été celles qui étaient significatives au seuil de 5%.

Dans un second temps, avec les mêmes étapes d’analyse univariée et de régression

multivariée pas à pas, a été cherchée une relation entre les mêmes variables et le taux

d’hémoglobinémie des patients (anémies et non anémiés). L’analyse univariée a été basée sur

des tests de Mann et Whitney pour les variables qualitatives et des tests du coefficient de

corrélation de Spearman pour les variables quantitatives. L’analyse multivariée a consisté en

une régression linaire multiple pas-à-pas, avec les mêmes seuils d’inclusion et de conservation

dans le modèle que pour la régression logistique.

Les calculs ont été réalisés avec le logiciel SAS V8.

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23

6. RESULTATS

a. Descriptif de la population étudiée

Parmi les 242 patients hospitalisés à l’UGA du 1er

janvier 2007 au 31 décembre 2007, 190

patients ont été inclus dans cette analyse. Les caractéristiques de ces 190 patients sont les

suivantes :

- Age moyen 85 +/- 7 ans (extrêmes 70-103 ans).

- Les femmes représentent 64,7 % de la population étudiée contre 35,3 % pour les

hommes (123 femmes/67 hommes).

- CIRS-G total moyen 9,8 +/- 3,7, CIRS-G composite moyen 3,7 +/- 1,5.

- Taux moyen d’Hb 12,2 +/- 2 g/dl.

- ClCr moyenne 40,9 +/- 16,5 ml/min, avec une proportion de 30,3 % de patients

présentant une IR sévère définie par une ClCr < 30 ml/min.

- Avec les définitions retenues pour cette étude, 20 % de ces patients sont dénutris, 37 %

ont un syndrome inflammatoire, 28,9 % ont une carence martiale, 4 % ont une carence

en vitamine B12, 9 % ont une carence en folates, 4 % ont une hémolyse et 14,3 % ont

une dysthyroïdie (Tableau 1).

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24

Tableau 1 : Description de la population globale étudiée et de la population anémiée.

Population globale

N = 190 patients

Population anémiée

Groupe 1 = 83 patients

Ratio sexe F/H 123/67 55/28

Age moyen (ans) 85 +/- 7 ans 86 +/- 7 ans

CIRS total moyen 9,8 +/- 3,7 11,8 +/- 4

CIRS composite moyen 3,7 +/- 1,5 4,5 +/- 1,5

Hb moyenne (g/dl) 12,2 +/- 2 10,5

ClCr moyenne (ml/min) 40,9 +/- 16,5 37,6 +/- 17,4

IR sévère 30,3 % 45,8 %

Dénutrition 20 % 34,6 %

Carence en fer 28,9 % 33,3 %

Carence en folates 9 % 7,4 %

Carence en vit B12 4 % 3,8 %

Syndrome inflammatoire 37 % 47 %

Hémolyse 4 % 6,4 %

Dysthyroïdie 14,3 % 10,8 %

Hb : Hémoglobine ; ClCr : clairance de la créatinine ; IR : insuffisance rénale

Les patients inclus dans l’enquête sont divisés en deux groupes :

- le groupe 0 des patients non anémiés dont la moyenne d’âge est de 84 +/- 7 ans.

- le groupe 1 des patients anémiés dont la moyenne d’âge est de 86 +/-7 ans.

La figure 1 montre que la prévalence de l’anémie dans la population étudiée est importante

puisqu’elle atteint 43,7 % (83 patients anémiés/190 patients inclus).

Sa fréquence est similaire dans les deux sexes : 44,7 % pour les femmes contre 41,8 % pour

les hommes (Tableau 2).

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25

Figure 1 : Prévalence de l’anémie dans la population étudiée

Tableau 2 : Distribution de la population étudiée en fonction du sexe et de l’anémie.

Femmes

n (%)

Hommes

n (%)

Total

n (%)

Patients non anémiés 68 (55,3 %) 39 (58,2 %) 107 (56,3 %)

Patients anémiés 55 (44,7 %) 28 (41,8 %) 83 (43,7 %)

Total 123 (64,7 %) 67 (35,3 %) 190 (100 %)

groupe 056,32%

groupe 143,68%

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26

En détaillant la prévalence de l’anémie en fonction des tranches d’âge, on voit dans le tableau

3 qu’elle atteint plus de 50 % de la population étudiée au-delà de 85 ans.

Tableau 3 : Prévalence de l‘anémie en fonction de l’âge (cohorte de 190 patients)

Age en années Nombre de patients par

tranche d’âge

% de patients anémiques

70-74 12 41,6

75-79 34 38,2

80-84 46 30

85-89 46 52,2

90-94 32 53,1

95-104 20 50

La figure 2 montre la distribution de l’anémie en pourcentage en fonction de l’âge et du sexe.

La prévalence de l’anémie est importante pour les deux sexes, dépassant presque toujours les

30 % dès l’âge de 70 ans.

Figure 2 : Pourcentage des patients anémiés en fonction de l’âge et du sexe

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27

b. Descriptif du groupe de patients anémiés

Les caractéristiques des patients du groupe 1 sont détaillées dans le tableau 1.

L’hémoglobine moyenne du groupe 1 est de 10,5 g/dl.

Les patients anémiés ont un CIRS total moyen de 11,8 +/- 4 avec un CIRS composite moyen

de 4.5 +/- 1,5 (tableau 1).

Dans ce groupe, quatre causes potentielles d’anémie ont été fréquemment retrouvées, chez

plus de 30 % des patients anémiés :

- le syndrome inflammatoire (47 %)

- l’insuffisance rénale sévère (45,8 %)

- la dénutrition (34,6 %)

- la carence martiale (33,3 %).

Un SMD est une cause d’anémie dans 14,5 % des cas.

Les autres causes potentielles d’anémie, plus rarement retrouvées, chez moins de 10 % des

patients, sont énumérées dans la figure 3.

Figure 3 : Causes potentielles d’anémie chez les sujets anémiés et leur pourcentage.

0,00%

5,00%

10,00%

15,00%

20,00%

25,00%

30,00%

35,00%

40,00%

45,00%

50,00%

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28

c. Relation entre anémie et variables étudiées

Tableau 4 : Comparaison des différentes variables étudiées entre le groupe 0 et 1, avec

résultat de l’analyse univariée.

Groupe 0

non anémiés

Groupe 1

anémiés

p

Nombres de patients 107 83

Sexe F/H 68/38 55/28 0,76

Age moyen (ans) 84,2 +/- 6,8 86 +/- 7,2 0,1

CIRS-G total moyen 8,2 +/- 2,6 11,8 +/- 4 <0,0001

CIRS-G composite moyen 3,1 +/- 1,3 4,5 +/- 1,5 < 0,0001

Dénutrition 9,3 % 34,6 % < 0,0001

Carence en Fer 25,5 % 33,3 % 0,24

Carence en B9 9,5 % 7,4 % 0,61

Carence en B12 3,8 % 3,8 % 1

Syndrome inflammatoire 29,2 % 47 % 0,01

ClCr moyenne (ml/min) 43,5 +/- 15,3 37,7 +/- 17,4 0,013

IR sévère 18,1 % 45,8 % < 0,0001

Hémolyse 2 % 6,4 % 0,24

Dysthyroïdie 5,9 % 4 % 0,93

Hyperthyroïdie 7,4 % 3,7 % 0,79

Ig monoclonale 9 % 14,5 % 0,27

L’analyse en régression multivariée pas-à-pas (tableau 5) montre que, parmi les variables

étudiées, seul le CIRS-G total est une variable indépendante statistiquement liée à l’anémie, et

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que parmi les causes potentielles d’anémie étudiées, seules deux d’entre elles sont

statistiquement liées à l’anémie de façon indépendante : la dénutrition et l’IR sévère.

Tableau 5 : Etape 2, régression logistique.

Dénutrition IR

sévère

Clairance

créatinine

Syndrome

inflammatoire

CIRS-G

total

CIRS-G

composite

p 0,009 0,032 0,35 0,984 <0,0001 0,365

d. Relation entre anémie et le nombre de causes potentielles

Les patients anémiés ont en moyenne 1,85 +/- 1,02 causes potentielles d’anémie, ceux du

groupe 0 qui ont 1,12 +/- 0,86 cause en moyenne. Deux tiers (65,4%) des patients anémiés ont

entre 2 et 4 causes associées. Le nombre de causes potentielles est une variable

statistiquement liée à l’anémie (p<0,0001).

La figure 4 représente la distribution des patients anémiés et non anémiés en fonction du

nombre de causes potentielles retrouvées.

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30

IV. DISCUSSION

1. PRINCIPAUX RESULTATS ET COMPARAISON AVEC LA LITTERATURE

a. Prévalence de l’anémie chez le sujet âgé

Dans cette étude de cohorte, la prévalence de l’anémie atteint 43,7 % chez 190 patients

âgés de 70 ans et plus, hospitalisés en provenance directe du domicile. Ce chiffre est cohérent

avec les données de la littérature, notamment celles des études épidémiologiques nord-

américaines qui sont réalisées sur une tout autre échelle et qui ne concernent pas

systématiquement des patients présentant un problème somatique aigu associé [7,18,43]. Il

correspond aux chiffres hauts de prévalence de ces études, du fait de l’âge moyen très élevé

des patients de notre cohorte (85 +/- 7 ans).

En médecine de ville, comme en pratique hospitalière de court séjour, la problématique de

l’anémie du sujet âgé est donc très fréquemment posée. Compte tenu du retentissement

prouvé en terme de morbi-mortalité, la recherche et le diagnostic étiologique d’une anémie

chez un patient âgé devrait constituer une priorité dans une pratique médicale quotidienne,

voire constituer une priorité de santé publique [31,32].

Dans notre cohorte, est notée une tendance à l’augmentation de la fréquence de l’anémie avec

l’âge, avec des chiffres de l’ordre de 40 % entre 70 et 80 ans et de plus de 50 % à plus de 85

ans. Cette donnée n’est pas étonnante car elle est retrouvée dans toutes les études descriptives

[11,18,37,5]. L’anémie n’est pourtant pas statistiquement liée à l’âge, ce qui peut s’expliquer par

un manque de puissance lié aux petits effectifs des sous-groupes d’âge et par le fait que la

distribution des âges de nos patients est par définition limitée (entre 70 et 103 ans en

l’occurrence).

La distribution des patients anémiques est la même quelle que soit le sexe, variable qui

n’apparaît pas statistiquement liée à l’anémie. Nous avons déjà signalé que les données quant

à la relation entre sexe et anémie étaient discordantes selon les taux d’Hb utilisés pour la

définition d’anémie et les populations concernées. L’absence de relation est le plus souvent

notée, comme dans notre étude, quand les travaux s’intéressent aux seuls sujets âgés [5,21,66].

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31

b. Etiologies de l’anémie chez le sujet âgé

Les données sur les étiologies d’anémie retrouvées dans notre étude sont concordantes avec

celles retrouvées dans la très grosse étude épidémiologique du NHANES III, dans laquelle les

principales catégories d’anémie chez le sujet âgé sont les anémies carentielles et les anémies

secondaires à une insuffisance rénale chronique et/ou à un syndrome inflammatoire [31,43]. La

distribution n’est pas strictement identique mais les populations sont différentes, en terme

d’âge moyen, de mode de recrutement, de bilan systématique réalisé…

Quelques spécificités des causes d’anémie retrouvées dans notre cohorte de patients très âgés

méritent d’être soulignées :

- Le caractère volontiers plurifactoriel de l’anémie chez les patients les plus âgés est confirmé.

Ainsi, les patients anémiques ont en moyenne 1,85 +/- 1,02 causes potentielles et 65% ont

entre 2 et 4 causes associées. En comparant les deux groupes de patients selon qu’ils sont

anémiques ou non, le nombre de causes potentielles étudiées est une variable statistiquement

liée à l’anémie. Dans l’étude du NHANES III, seulement 10% des patients présentaient plus

d’une cause potentielle d’anémie, mais seules les associations de carences ou l’association

d’un syndrome inflammatoire avec une insuffisance rénale chronique étaient recherchées,

contrairement à notre étude où l’association de toutes les causes potentielles était notée. De

plus, les patients de notre cohorte ont un âge moyen plus élevé, ce qui augmente le risque de

polypathologie.

- Un syndrome myélodysplasique (SMD) est retrouvé chez 14,5 % de nos patients anémiques.

Ce chiffre confirme la grande fréquence de cette pathologie en pratique gériatrique, qui en fait

de très loin la principale hémopathie maligne du sujet âgé [27]. De plus, un myélogramme n’a

bien entendu pas été fait pour tous les patients anémiques de notre étude et les patients qui

avaient une anémie ou une hémopathie antérieurement diagnostiquée n’étaient pas inclus, ce

qui peut entraîner une sous-estimation du nombre de SMD. On rappelle que, si aucune cause

n’est retrouvée pour 34 % des sujets âgés anémiques de l’étude NHANES III, le bilan

étiologique ne comprenait pas d’examen médullaire et 17 % des patients présentaient un ou

plusieurs signe(s) biologique(s) faisant évoquer le diagnostic de SMD [43].

L’anémie, notée fortuitement sur une NFS ou symptomatique, est le mode de révélation

prioritaire d’un SMD [42]. Le myélogramme doit donc faire partie du bilan étiologique d’une

anémie du sujet âgé, quand les prélèvements biologiques « plus simples » n’ont pas permis de

conclure ou quand la prise en charge correcte d’une autre cause ne permet pas une

normalisation du taux d’Hb.

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- Nous avons pris le parti de noter la dénutrition comme une cause potentielle d’anémie, alors

qu’elle n’est pas retenue habituellement dans la liste des étiologies. En effet, la dénutrition est

généralement considérée comme un simple facteur participant à l’anémie, en étant souvent

associée aux carences vitaminiques ou aux carence martiales considérées comme les

« vraies » causes de l’anémie [25,28]. La méthodologie de notre étude ne permet pas de conclure

sur le rôle de la dénutrition dans une anémie du sujet âgé (étiologie ou facteur associé). En

revanche, elle est une des deux variables, statistiquement après analyse en régression

multivariée et donc indépendante, liées à l’existence d’une anémie. Une dénutrition définie,

selon la méthodologie de l’étude, par une altération du bilan protidique, doit donc être

systématiquement recherchée en cas d’anémie chez un patient âgé.

- Comme dans les études nord-américaines, le syndrome inflammatoire est une cause

d’anémie fréquemment retrouvée, notée chez 47 % des sujets anémiques étudiés. Comme la

dénutrition, il n’est en fait pas possible d’affirmer que le syndrome inflammatoire représente

une cause d’anémie, car il peut aussi être considéré comme participant à l’anémie, stigmate

d’une polypathologie aiguë et associé à d’autres causes. Sa liaison statistique avec l’anémie

n’est pas indépendante, car ne ressort pas de l’analyse multivariée. La première conséquence

pratique est qu’il est bien entendu nécessaire de rechercher un syndrome inflammatoire en cas

d’anémie; mais la seconde conséquence pratique est qu’il faut savoir ne pas s’arrêter à un

éventuel syndrome inflammatoire comme seule cause d’une d’anémie d’un sujet âgé.

c. Relation entre anémie et co-morbidités

La méthodologie utilisée dans notre étude en terme de comparaison entre les deux groupes de

patients (anémiques ou non) ne permet pas de conclure quant au degré de causalité des

anomalies biologiques telles que pré-définies dans l’anémie du sujet âgé. L’étude statistique

uni- puis multivariée permet uniquement de décrire un profil type du sujet âgé anémique, basé

sur les critères statistiquement liés à une anémie.

Ainsi, la relation statistique forte entre anémie et insuffisance rénale sévère (seul critère

biologique sortant de l’analyse de régression multivariée) est un élément en faveur d’un rôle

étiologique de cette dernière chez des patients âgés anémiques. Cependant, en toute rigueur

scientifique, elle permet seulement de dire qu’il existe une relation entre IR sévère et anémie,

sans pouvoir affirmer un lien de causalité.

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33

De la même façon, cette étude a montré qu’il existait un lien statistique entre anémie et

comorbidités (évaluées par le score CIRS). Le CIRS peut jouer ici un rôle de critère

composite dans lequel peuvent être incluses les causes d’anémie reconnues, carentielles et

maladies chroniques principalement. Mais il se peut aussi que l’anémie explique une

augmentation du score par son retentissement délétère sur les comorbidités… ce qui est

suggéré dans les études épidémiologiques, par le réel bénéfice sur la morbidité et mortalité

des patients âgés après correction d’une anémie [40,52,60,67,68]. Une des informations de l’étude

statistique est de « valider » le score CIRS comme un bon marqueur de fragilité du sujet âgé

via le fait d’être anémique.

2. FORCES ET FAIBLESSES DE L’ETUDE

a. Population étudiée

Dans cette étude, la population âgée est définie par un âge supérieur à 70 ans, ce qui rend

imparfaite la comparaison avec les données épidémiologiques de la littérature qui intéressent

des cohortes de sujets de 65 ans et plus. Cette limite d’âge de 65 ans provient de critères plus

sociaux que médicaux, liés à l’âge limite des assurances maladies nord-américaines d’où

viennent les principales études. L’âge gériatrique actuellement pertinent du fait du

vieillissement de la population est au moins 75 ans. Le choix d’une limite d’inclusion à 70 ans

dans notre étude était une sorte de compromis, visant à permettre une comparaison des

données, tout en reflétant une « vraie » population gériatrique adressée à l’UGA en

provenance de la ville. En fait, la moyenne d’âge très élevée de nos patients (85 ans) fait de

cette étude la première, à notre connaissance, qui ait tenté d’évaluer les causes d’une anémie

chez des patients « réellement » gériatriques.

La population étudiée est probablement un assez bon reflet de la population ambulatoire car

ne sont inclus dans l’étude que des patients provenant de leur domicile (adressés par leur

médecin traitant ou après un très bref séjour aux urgences). Cependant il s’agit tout de même

de patients porteurs d’au moins une pathologie, justifiant l’hospitalisation, et pouvant

expliquer une anémie. La prévalence de l’anémie dans cette population (environ 44 %)

pourrait donc être plus élevée que dans la population gériatrique générale, même s’il est bien

difficile de l’affirmer étant donné la grande variabilité de cette prévalence dans la littérature.

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34

b. Méthodologie clinique et statistique

Les rares données sur les causes d’anémie du sujet âgé sont issues, nous l’avons vu, d’études

épidémiologiques qui sont bien évidemment faites sur un nombre très important de patients,

contrairement à notre étude d’une cohorte relativement réduite. Cependant, dans une étude de

population à grande échelle, il est impossible de systématiser un bilan étiologique complet, en

allant « jusqu’à » un examen médullaire. La force de notre travail est d’avoir ce type de bilan

systématique pour les patients anémiques. Il est d’ailleurs intéressant de noter que les résultats

sont assez proches pour ce qui est de la distribution des étiologies les plus fréquentes

d’anémie du sujet âgé. Ainsi, la validité de notre étude est renforcée par la cohérence de nos

résultats avec les connaissances antérieures.

Nous avons déjà souligné que la méthodologie statistique permet de démontrer des relations

significatives entre les critères cliniques et biologiques évalués, sans pouvoir affirmer des

liens de causalité. De plus le choix d’évaluer les causes par des critères biologiques qualitatifs

pré-définis (carence ou non, insuffisance rénale ou non, etc.) ne permet pas de calculer des

« seuils » biologiques qui seraient pertinents pour retenir une anomalie comme causale. Nous

avons donc décidé de compléter ce travail en utilisant le même type d’analyses statistiques

uni- puis multi-variées, mais en prenant comme critère des variables quantitatives (résultats

chiffrés des dosages vitaminiques ou ferriques, créatininémie et clairance de la créatinine,

etc.), ce qui pourrait permettre de mettre en évidence des seuils de pertinence de ces dosages

dans un bilan d’anémie du sujet âgé. De plus ces variables quantitatives seront toujours

comparées entre les deux groupes de patients anémiques ou non, mais une corrélation sera

aussi recherchée entre ces variables et le taux d’hémoglobine des patients (utilisée en variable

quantitative continue). Ce type d’approche permettra cette fois, en cas de corrélation

significative, d’être plus proche d’une évaluation de ces variables en terme de facteurs de

causalité. Le recueil et la saisie des variables quantitatives ont été faits dans le cadre de cette

thèse mais l’étude statistique est en cours de réalisation et d’interprétation.

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35

V. CONCLUSION

Le changement démographique avec le vieillissement de la population générale et

l’extraordinaire croissance attendue du nombre de personnes âgées oblige le médecin

généraliste à s’intéresser aux sujets âgés et à leurs pathologies. L’anémie est une des

pathologies les plus fréquentes dans la population gériatrique. Sa grande prévalence et son

retentissement en terme de morbi-mortalité chez des patients volontiers polypathologiques

contrastent avec le caractère incomplet des données de la littérature sur cette problématique,

et nécessite de mieux comprendre l’anémie chez les sujets âgés.

La première ambition de cette étude est de sensibiliser les médecins généralistes sur l’anémie

des sujets âgés, d’autant que son bilan étiologique peut et doit en grande partie être réalisé

dans une pratique médicale ambulatoire. De plus, il a été démontré qu’une prise en charge

thérapeutique, le plus souvent simple et efficace, pouvait diminuer l’impact de l’anémie en

terme de morbi-mortalité et améliorer la qualité de vie des patients âgés. Cette sensibilisation

pourrait inciter à développer des sessions de formation médicale continue axées sur la prise en

charge de l’anémie d’un sujet âgé :

- démarche diagnostique en rappelant son caractère souvent multifactoriel, nécessitant un

bilan étiologique adapté (penser par exemple à rechercher une dénutrition, plusieurs

carences associées)

- importance du traitement d’une anémie même modérée permettant une amélioration

prouvée de la qualité de vie.

La seconde ambition est de préciser les causes spécifiques d’une anémie dans une population

de patients très âgés. L’approche pragmatique présentée dans cette thèse ne répond

qu’imparfaitement à cet objectif. L’étude descriptive de notre cohorte de patients anémiques

très âgés permet cependant de retrouver les causes principales habituellement retenues dans la

littérature et dans des proportions comparables à celles notées dans des populations de

patients âgés plus jeunes. Elle permet aussi de confirmer la fréquence des syndromes

myélodysplasiques quand le bilan étiologique d’une anémie du sujet âgé est complet, ce qui

incite à vérifier cette hypothèse par un examen médullaire quand reste un doute sur la cause

après un bilan biologique ambulatoire bien mené, ou quand la prise en charge thérapeutique

correcte ne suffit pas à normaliser le taux d’Hb.

Un travail complémentaire en cours doit compléter l’étude présentée dans cette thèse en

évaluant les étiologies d’anémie non plus seulement sur le plan qualitatif, mais sur le plan

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quantitatif en terme de recherche de carences ou de pathologies chroniques. L’objectif est de

proposer des seuils biologiques pertinents pour établir un rapport de causalité entre anémie

(ou taux d’Hb) et résultats de dosages biologiques chez des patients très âgés.

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VI. ANNEXES

1. ANNEXE N°1 : PHYSIOLOGIE DE L’ ERYTHROPOIESE

Les globules rouges ont pour fonction le transport de l'oxygène des poumons vers les tissus et

sont produits continuellement par la moelle osseuse.

Ils ont une durée de vie de 120 jours au terme de laquelle ils meurent par vieillissement et

épuisement de leur stock enzymatique. Ils sont alors phagocytés par les macrophages,

notamment de la moelle osseuse et du foie : c’est l’hémolyse physiologique.

L'érythropoïèse est la production continue de globules rouges par la moelle osseuse

permettant de compenser quotidiennement la perte de 1/120ème de la masse globulaire totale

due à l'hémolyse physiologique. 100 à 250 milliards de globules rouges sont ainsi produits

chaque jour chez le sujet normal. En cas de besoins accrus la production peut être multipliée

de façon considérable, jusqu'à plus de 10 fois. On estime qu'un individu produit, au long de sa

vie, environ une demi-tonne de globules rouges.

a. La lignée érythrobastique

L’érythropoïèse normale est assurée à partir de cellules souches par un processus progressif

de différenciation qui aboutit initialement à l’émergence de : progéniteurs myéloïdes

multipotents (CFU-GEMM) puis de progéniteurs érythroïdes indifférenciés (BFU-E) et enfin

de progéniteurs érythroïdes différenciés (CFU-E). Les CFU-E se différencient ensuite en

précurseurs érythroblastiques qui acquièrent progressivement la capacité de synthétiser de

l’hémoglobine et les autres protéines spécifiques du globule rouge.

On reconnaît dans la moelle, par ordre de maturité croissante, le proérythroblaste,

l'érythroblaste basophile, l'érythroblaste polychromatophile, l'érythroblaste acidophile et le

réticulocyte, qui deviendra le globule rouge 48 heures après son passage dans la circulation.

La lignée érythroblastique, comme les autres lignées myéloïdes, est caractérisée par un double

phénomène :

=> la multiplication, qui s'arrête au stade d'érythroblaste acidophile. Il y a 4 mitoses en tout (1

au stade du proérythroblaste, 2 au stade de l’érythroblaste basophile et 1 au stade de

l’érythroblaste polychromatophile), 1 proérythroblaste pouvant donc théoriquement donner

naissance à 16 globules rouges si tous arrivent à maturation.

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=> la différenciation, qui correspond à l'acquisition de la propriété fonctionnelle du globule

rouge, c'est-à-dire la synthèse d'hémoglobine.

A partir du stade d'érythroblaste acidophile il n'y a plus de mitoses et les cellules terminent

leur maturation pour devenir des réticulocytes après un processus d’expulsion du noyau.

Après 48 heures, les réticulocytes passent dans la circulation sanguine où ils deviendront en

24-48 heures les globules rouges matures.

Les modifications morphologiques accompagnant ces phénomènes sont la diminution

progressive de la taille des cellules à chaque division, une diminution régulière du rapport

nucléo-cytoplasmique, au stade de l'érythroblaste acidophile, l'expulsion du noyau ou

énucléation.

Il existe, à l'état normal, une synchronisation parfaite entre la multiplication et la

différenciation, donc un parallélisme entre l'évolution du noyau et celle du cytoplasme.

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Schéma 1 : la lignée érythroblastique

Erythropoïèse et hémolyse physiologique: Dr MARFAING-KOKA A, Dr TERTIAN G.

De plus, il existe une régulation des mitoses par le contenu en hémoglobine cytoplasmique :

lorsque ce dernier atteint sa valeur normale, au stade d'érythroblaste acidophile, les mitoses

s'arrêtent. Si la synthèse d'hémoglobine est insuffisante, des divisions supplémentaires auront

24 à 48h

CFU-E

EB

Basophile

EB

Basophile

EB acidophile

hématie

Pro-érythroblastee

EB Polychromatophile

réticulocyte

sang

48h

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lieu, conduisant à une microcytose. Inversement, une diminution du nombre des mitoses des

érythroblastes, conséquence d'un défaut de synthèse d'ADN, conduira à une macrocytose.

b . Régulation de l'érythropoïèse

La régulation de l'érythropoïèse permet de moduler en permanence la production de globules

rouges en fonction des besoins. Elle permet en cas de besoins accrus, par exemple en cas

d'hémorragie aiguë ou d'hémolyse :

=> l'augmentation de la production de globules rouges,

=> l'accélération de l'érythropoïèse : 3 à 4 jours au lieu de 7 jours normalement.

Ces modifications se traduisent dans la moelle par une augmentation du nombre

d'érythroblastes et dans le sang par une augmentation du nombre de réticulocytes, voire le

passage sanguin d'érythroblastes acidophiles, et par une macrocytose et une

polychromatophilie témoignant de l'accélération de l'érythropoïèse.

Les principaux facteurs de croissance impliqués dans la régulation de l'érythropoïèse sont

l’interleukine 3 (IL3) et le GM-CSF qui agissent au niveau des progéniteurs érythroïdes

immatures, le stem cell factor (SCF) qui intervient jusqu’au stade de CFUE, et

l’érythropoétine qui agit à partir du stade BFU-E mature, et dont sa cible essentielle est le

CFU-E mais également en aval sur les cellules plus matures.

L'érythropoïetine (EPO) est le régulateur physiologique de l'érythropoïèse sur laquelle elle

agit spécifiquement et directement. C'est une glycoprotéine d'environ 36 KDa, synthétisée par

les cellules péritubulaires du rein et accessoirement par le foie chez l'adulte et dont le gène est

situé sur le chromosome 7. Le stimulus électif de sa synthèse est l'hypoxie. Son taux sérique

peut être multiplié par 100 en cas d'anémie. Elle peut être anormalement sécrétée en

pathologie par certaines cellules tumorales (tumeurs rénales, hépatiques et cérébelleuses) et

entraîner alors une polyglobulie.

L’EPO interagit avec des récepteurs spécifiques de membrane (EPO-R). A la suite de cette

interaction, elle induit toute une série d’événements qui aboutissent à la transduction d’un

signal prolifératif, anti-apoptotique et de différenciation, elle accélère leur sortie médullaire et

elle est nécessaire à l'hémoglobinisation des érythroblastes.

Le dosage de l’érythropoïétine peut être intéressant pour documenter une exploration de

l'érythropoïèse. Il peut avoir un intérêt dans le cas d'anémies complexes, aux causes intriquées

(participation d'une insuffisance rénale par exemple), ou peut montrer une non adaptation du

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taux d'érythropoïétine au degré d'une anémie, pouvant faire supposer qu'un traitement par

l'érythropoïétine recombinante sera efficace.

c. Besoins de l'érythropoïèse

La synthèse normale d'hémoglobine suppose :

=> une synthèse normale de la globine,

=> une synthèse normale de l'hème, donc la présence des enzymes et coenzymes nécessaires,

notamment l’ALA-synthétase et la vitamine B6,

=> un apport normal de fer.

d. Facteurs nécessaires à la synthèse d'ADN

L'érythropoïèse nécessite des mitoses et, pour se diviser, une cellule doit avoir doublé le

contenu de son noyau en acide désoxyribonucléique (ADN). La synthèse normale d'ADN

nécessite impérativement deux vitamines dont la carence entraînera un ralentissement et une

diminution des mitoses, non seulement des érythroblastes mais également de toutes les

cellules en division rapide de l'organisme : l'acide folique et la vitamine B12.

METABOLISME DE L'ACIDE FOLIQUE

L'acide folique est une vitamine apportée par l'alimentation (viandes, céréales et légumes

notamment) et dont l'absorption se fait tout le long de l'intestin grêle. Il circule dans le plasma,

liés à diverses protéines. Le taux sérique normal est de 5 à 15 ng/mL (1 ng = 10-9

g). Il est

possible également de doser les folates présents dans les globules rouges (folates

érythrocytaires dont le taux normal est de 200 à 300 ng/mL).

Les besoins sont importants (environ 200 µg/jour) et les réserves sont faibles donc rapidement

épuisables (quelques mois) en cas de carence d'apport ou d'augmentation des besoins. La

forme active de l'acide folique est l'acide tétrahydrofolique (FH4) qui agit comme donneur de

méthyl pour la synthèse d'acide thymidilique, composant de l'ADN.

METABOLISME DE LA VITAMINE B12

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Cette vitamine agit sur la synthèse de l'ADN par l'intermédiaire de l'acide folique, en

permettant la pénétration de FH4 dans les cellules ou la régénération permanente de la forme

active de l'acide folique. Toute carence en vitamine B12 aura donc les mêmes conséquences

qu'une carence en folates au niveau de la synthèse d'ADN.

Le métabolisme de la vitamine B12 est très particulier : elle est apportée exclusivement par

les aliments d'origine animale (oeufs, lait, poisson, abats) puis elle est couplée dans l'estomac

à un transporteur spécifique, le facteur intrinsèque (FI), glycoprotéine sécrétée exclusivement

par les cellules du corps et du fundus gastrique. L'ensemble vitamine B12-FI chemine dans

l'intestin jusqu'à l'iléon terminal qui est l'unique lieu d'absorption de la vitamine B12 grâce à

la présence d'un récepteur spécifique pour le FI au niveau de la muqueuse. La vitamine B12

passe dans le sang où elle circule fixée sur la transcobalamine I, forme de réserve circulante

synthétisée par les granulocytes, et la transcobalamine II, forme de transport vers les réserves

et les cellules en division de l'organisme. Le taux sérique de vitamine B12 est de 200 à 400

pg/L (1 pg=10-12

g). Les besoins sont faibles (environ 1 µg/jour) et les réserves sont,

contrairement à celles de l'acide folique, très importantes, notamment dans le foie, suffisantes

pour plusieurs années (4 à 9 ans) en cas de carence d'apport ou d'absorption.

e. L'hémolyse physiologique

Les globules rouges ont une durée de vie de 120 jours au terme de laquelle ils meurent par

vieillissement et épuisement de leur stock enzymatique. Ils sont alors phagocytés par les

macrophages, notamment de la moelle osseuse et du foie.

Les globules rouges phagocytés sont détruits dans le cytoplasme des macrophages, libérant le

fer qui est transporté et réintroduit dans les érythroblastes, libérant la globine qui est

dégradée en acides aminés, et la protoporphyrine qui est métabolisée en bilirubine libérée

dans le plasma sous forme libre (la bilirubine plasmatique non conjuguée est le produit de

l'hémolyse physiologique)

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ANNEXE N°2 : DEMARCHE DIAGNOSTIC ETIOLOGIQUE

Comme chez le sujet jeune, toute anémie constatée chez le sujet âgé doit faire entreprendre

des explorations à visée étiologique.

Cependant le bilan étiologique d’une anémie chez le sujet âgé pose plusieurs problèmes tel

que [25]:

La difficulté de l’interprétation chez les sujets âgés de certains paramètres

biologiques

Un grand nombre d’anémies (50 à 60 %) du sujet âgé sont multifactorielles du fait

de la polypathologie

Un certains nombres des anémies constatées chez le sujet âgé n’ont pas de cause

retrouvée, expliquées d’une part par des bilans étiologiques pas toujours assez

complets, et d’autres parts par un suivi insuffisant.

L’orientation étiologique devant une anémie repose classiquement sur 3 éléments

biologiques :

1/ le chiffre des réticulocytes, permettant de définir une anémie régénérative si le taux de

réticulocytes est supérieur à 100 000/mm3, dite anémie d’origine périphérique ou, une anémie

arégénérative si le taux de réticulocyte est inférieur à 100 000/mm3, dite anémie d’origine

centrale

2/ la numération formule sanguine (NFS), permettant de recherche l’atteinte d’autres lignées

médullaires et témoignant ainsi d’un dysfonctionnement médullaire

3/ le volume globulaire moyen (VGM) permettant de définir les anémies microcytaires si

VGM < 80 µ3, normocytaire si VGM entre 80 et 100 µ

3, et macrocytaire si VGM > 100 µ

3.

Cependant, en pratique gériatrique, ces éléments simples d’orientation étiologiques peuvent

être pris en défaut. Ainsi, si le VGM a une valeur d’orientation certaine dans le diagnostic

étiologique des anémies des sujets jeunes, il est beaucoup moins utile chez les sujets âgés du

fait de la polypathologie et du caractère très souvent multifactoriel des anémies dans cette

population.

Ainsi, on distingue plusieurs types d’anémies, les anémies régénératives et les anémies

arégénératives.

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a. Les anémies régénératives

Les anémies régénératives correspondent à une perte excessive érythrocytaire par une

hémorragie ou par une destruction érythrocytaire périphérique dite hémolyse pathologique, et

sont donc d’origine périphérique. Le fonctionnement médullaire est normal.

Les anémies régénératives sont le plus souvent macrocytaires, le volume globulaire

augmentant du fait de l’accélération de l’érythropoïèse. Mais cette macrocytose peut être

masquée par l’association à une autre cause d’anémie, situation fréquente chez le sujet âgé.

Les anémies régénératives sont de trois types, les anémies hémolytiques, les anémies

hémorragiques et les anémies correspondant à un stade intermédiaire de correction (anémie

par carence ferriprive en cours de supplémentation martiale par exemple).

b. Les anémies arégénératives

Les anémies arégénératives correspondent à un trouble de la production : soit les cellules

médullaires sont fonctionnelles mais manquent de substrats (trouble au niveau de la synthèse

de l’Hb par carence en Fer, folates, ou B12, une diminution de la synthèse de l’EPO), soit les

cellules médullaires sont incompétentes. Ces anémies sont donc d’origine centrale.

Elles représentent la situation clinique la plus fréquente. Leur diagnostic est classiquement

abordé en fonction du VGM définissant un caractère micro, normo, ou macrocytaire. Cette

classification est utilisée et adaptée au sujet âgé pour les arbres diagnostiques proposés,

résumant la démarche diagnostique initiale qui peut être réalisée en ambulatoire.

Cependant, la difficulté chez le sujet âgé tient principalement à la co-existence fréquente de

plusieurs étiologies d’anémie chez un même patient, obligeant à respecter une démarche

diagnostique rigoureuse.

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ANNEXE N°3 : SCORE DE CO-MORBIDITE, LE CIRS-G

Score de co-morbidité : CIRS-G

Instructions de cotation du CIRS : pour chaque système, indiquer le degré de sévérité :

Attention : on a tendance à oublier des co-morbidités quand elles ne posent pas de problème aigu

0 = aucun pas de trouble de l’organe ou du système

1 = léger trouble n’affectant pas l’activité normale

un traitement peut être ou ne pas être requis ; pronostic excellent

2 = modéré trouble affectant l’activité normale

un traitement est nécessaire ; pronostic bon

3 = sévère trouble invalidant ou handicapant

un traitement est urgent ; pronostic réservé

4 = très sévère trouble menaçant la vie

traitement urgent ou inefficace ou inexistant; pronostic grave

Items du CIRS-G (si plusieurs maladies dans même système, coter la plus grave)

SCORE

(0 à 4)

CARDIAQUE cœur seulement

HEMATOLOGIE sang, moelle osseuse, rate, vaisseaux sanguins, ganglions

HTA cotation fondée sur sévérité (organes touchés cotés séparément)

RESPIRATOIRE poumons, bronches, trachée sous larynx

ORL et OPH oreilles, nez, larynx, yeux

DIGESTIF SUP œsophage, estomac, duodénum, voies biliaires, pancréas

DIGESTIF INF reste des intestins, dont hernies

HEPATIQUE foie seulement

RENAL reins seulement

GENITO-URINAIRE uretères, urètre, prostate, vessie, gonades

MUSCULO-SQUELETTIQUE et TEGUMENTS muscles, os, peau

NEUROLOGIQUE cerveau, (démences exclues), moelle épinière, nerfs

ENDOCRI NO-METABOLIQUE diabète, infection diffuse, intoxication

PSYCHIATRIE inclut démences, agitation, dépression, anxiété, psychoses

CIRS-G total

CIRS composite = nombre de systèmes cotés 2