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Bull. Soc. Pharm. Bordeaux, 2012, 151(1-4), 105-122
UTILISATION DES PESTICIDES PAR LES FOURNISSEURS ET AGRICULTEURS DU
GHARB ET DU LOUKKOS (*)
Sanaa OUDEBJI ( 1 ) , Amina OUAZZANI TOUHAMI ( 1 ) , Jamila DAHMANI ( 1 ) , Rachid BENKIRANE ( 1 ) ,
Alain BADOC ( 2 ) , Allal DOUIRA ( 3 )
Une enquête auprès de 25 entreprises phytosanitaires et 48 agriculteurs du Gharb et du Loukkos (Maroc) a été réalisée pour évaluer le niveau des connaissances et les pratiques d’utilisation des pesticides. Les fournisseurs et agriculteurs du Loukkos utilisent principalement des carbamates (28 et 21 %) alors que ceux du Gharb préfèrent les hétérocycles azotés (17 et 20 %).
Un meilleur niveau d’instruction et plus de connaissances sur l’utilisation des pesticides limiteraient les risques sur la santé des populations et l’environnement.
(*) Manuscrit reçu le 12 juin 2011. (1) Laboratoire de Botanique et de Protection des Plantes, Département de Biologie,
Faculté des Sciences, BP 133, Université Ibn Tofaïl, 14000 Kénitra, Maroc. [email protected], [email protected], [email protected], rachid.benkirane@ yahoo.fr, [email protected], [email protected]
(2) GESVAB – EA 3675, Faculté des Sciences pharmaceutiques, Université de Bordeaux, Villenave-d’Ornon Cedex. [email protected]
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INTRODUCTION
L’utilisation des pesticides permet une augmentation des rendements par élimination ou réduction des prédateurs des cultures, mais a des effets insidieux sur l’environnement, la qualité des produits agricoles et la santé des populations [3]. Selon le Centre antipoison du Maroc, de 1980 à 2005, les pesticides ont été incriminés dans 7833 cas sur 158 903 intoxications, soit 4,9 % [6].
Le Gharb et le Loukkos sont deux zones importantes de production agricole au Maroc proches de grands centres de consommation : Tanger, Rabat, Fès et Casablanca [2]. La région du Gharb est considérée comme un pôle d'excellence en matière de production agricole dans plusieurs filières (Figure 1). Dans le périmètre du Loukkos, les céréales occupent la plus grande superficie (42 955 ha) suivies des cultures maraichères (12 787 ha) [6], puis des cultures sucrières (Canne à sucre et Betterave), du Tournesol, de l’Arachide, des légumineuses, des cultures fourragères, et de l’arboriculture (Figure 2).
Fig. 1: Importance du Gharb dans
les principales productions végétales marocaines [2].
Fig. 2 : Répartition de la production agricole de la campagne 2003-2004
dans le Loukkos [6].
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Cette présente étude a pour objectif de déterminer la nature des pesticides utilisés, leur formulation, les pratiques d’utilisation, ainsi que les mesures de protection à l’aide d’enquêtes auprès des agriculteurs et des boites phytosanitaires dans la région du Gharb et le périmètre du Loukkos.
MATÉRIEL ET MÉTHODES
La plaine du Gharb et le périmètre du Loukkos sont situés au Nord-Ouest du Maroc (Figure 3).
La région du Gharb est localisée au niveau de l’axe Rabat-Tanger. Elle totalise 1,2 % du territoire national avec une superficie de 893 860 ha. On a 68 % de surface agricole utile (7 % au niveau marocain) dont un peu plus de 20 % de la SAU est aménagée et irriguée [2].
Le périmètre du Loukkos est localisé entre la région tangéroise et le Gharb. Il s’étend sur 256 000 ha dont 57 % de terres agricoles utiles [6].
Une enquête basée sur des questionnaires a couvert la campagne du printemps 2010 entre mars et avril avec pour objectif l’évaluation du niveau des connaissances, attitudes et pratiques sur l’utilisation des pesticides par les gérants d’entreprises phytosanitaires et les agriculteurs du Gharb et du Loukkos.
Elles ont été menées dans cinq sites choisis au hasard du Gharb (Bel Ksiri, Kénitra, Sidi Slimane, Sidi Allal Tazi et Souk El Arbaa) auprès de 15 fournisseurs et 30 agriculteurs et dans trois sites du Loukkos (Dlalha, Ksar El Kbir et Laouamra) auprès de 10 fournisseurs et 18 agriculteurs choisis au hasard (Figure 3).
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Fournisseurs Fournisseurs Agriculteurs
Gharb Kénitra 4 8 Souk Elarbaa du Gharb 4 5 Mechra Bel Ksiri 3 5 Sidi Slimane 3 4 Sidi Allal Tazi 1 4 Sidi Kacem 0 4 Loukkos Laouamra 4 6 Dlalha 4 6 Ksar el-Kébir 2 6
Fig. 3 : Localisation des localités étudiées avec indication du nombre de
fournisseurs et d’agriculteurs enquêtés.
Les questions ont concerné la typologie des différents produits phytosanitaires appliquées, les méthodes de diagnostic, les mesures d’hygiène lors du stockage et de l’utilisation des produits phytosanitaires et les mesures de protection (Figures 4 et 5).
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Bonjour, mon nom est Sanaa Oudebji. Je prépare un mémoire dans le cadre d’un master MPP. Pourriez-vous m’accorder quelques instants ?
Évaluation du niveau des connaissances, attitudes et pratiques sur
l’utilisation des pesticides par les gérants des boites phytosanitaires du
Gharb et du Loukkos
Questionnaire fournisseur
Date : / / Questionnaire n° :
I Généralités 1- Quelle est la date de création de votre entreprise ? ..................................... 2- Sexe de l’enquêté : Homme Femme 3- Quel est votre âge ? ......................................................... 4- Quel est votre niveau d’étude ? Technicien agricole Diplôme d’ingénieur agronome Licence sciences Maitrise sciences Maitrise sciences et technique Ingénieur d’application agricole Autre (spécifier ………………….) 5- Quelle est l’activité de votre entreprise ? Vente de (choix multiple) : Semences certifiées Pesticides Matériel d’irrigation Autre (spécifier ……) 6- Procédez-vous à un contrôle à la réception des produits achetés : Date de péremption des pesticides ? Oui Non Étanchéité des pesticides ? Oui Non Date de péremption de semences ? Oui Non Nombre de pièces par lot ? Oui Non Défaillance du matériel d’irrigation ? Oui Non 7- Selon votre expérience, quelles sont les cultures les plus répandues dans la région ?
.......................................................................................................... II Typologie des produits phytosanitaires 8- Quel types de formulations de pesticides sont les plus utilisées ? Solide GR WG WP TB Liquide SL SC EC EW DC LS Gazeux GA VP 9- Quel type de pesticides est le plus vendu ?
Herbicides Insecticides Fongicides 10- Quelles sont les substances actives ou les produits commerciaux les plus vendues ?
…………………………………………………… III Méthodes de diagnostic 11- Lorsqu’un agriculteur vient chez vous… Apporte t-il avec lui un échantillon de la culture attaquée ? Oui Non Parfois 12- Si oui, comment faites-vous le diagnostic ? ……………………………… IV Mesures de protection 13- Donnez-vous des conseils d’utilisation des pesticides aux agriculteurs ?
Oui Non Parfois 14- Séparez-vous les pesticides en fonction de leur dangerosité ? Oui Non 15- Le lieu de stockage est- il… Fermé Bien ventilé Lumineux
Protégé contre l’extrême chaleur 16- Utilisez-vous des étagères ou des palettes pour ranger les pesticides ? Oui Non 17- Possédez-vous un équipement de protection ? Oui Non 18- Si oui, lesquels ? Gants Masque Lunette Combinaison
Autre (spécifier…………………) 19- Que faites-vous des emballages des pesticides périmés ?
………….………………………………………………………………
Fig. 4 : Questionnaire fournisseur.
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Bonjour, mon nom est Sanaa Oudebji. Je prépare un mémoire dans le cadre d’un master MPP. Pourriez-vous m’accorder quelques instants ?
Évaluation du niveau des connaissances, attitudes et pratiques sur l’utilisation des pesticides par les gérants des boites phytosanitaires du
Gharb et du Loukkos
Questionnaire agriculteur
Date : / / Questionnaire n° :
I Généralités sur le ménage et la ferme 1- Quelle est la superficie agricole utile totale de votre exploitation ? ............. 2- Etes vous… Propriétaire de votre champ Locataire de votre champ
Autre (spécifier ………………) 3- Où se trouve votre champ ? Localité : ............................ Ville : ..................... 4- Quelle est votre âge ? ....................................................
Sexe de l’enquêté : Femme Homme 5- Êtes-vous le chef de famille ? Oui Non 6- Quel est votre niveau d’étude : Analphabète École coranique Primaire
Collège Cycle secondaire technique agricole Études supérieures non agricoles Études supérieures agricole
7- Quelles plantes cultivez-vous actuellement ? ............................................... 8- Utilisez-vous des pesticides sur vos cultures ?
Régulièrement Occasionnellement Non II Typologie des produits phytosanitaires 9- Quel type de formulation de pesticide utilisez-vous le plus ?
Solide GR WG WP TB Liquide SL SC EC EW DC LS Gazeux GA VP (plusieurs réponses possibles)
10- Quel type de pesticides manipulez-vous le plus ? Herbicides Insecticides Fongicides
11- Si vous vous souvenez des noms des substances actives ou des produits commerciaux, merci de les renseigner : ……………..………………….
12- Quelles sont les périodes de l’année où vous traitez ? (Choix multiple) Janvier Février Mars Avril Mai Juin Juillet Aout Septembre Octobre Novembre Décembre
13- Faites-vous des traitements : Préventifs Curatifs III Pratique sur l’utilisation des pesticides 14- Possédez-vous un matériel de protection ? Oui Non 15- Lisez-vous d’habitude les étiquettes sur les emballages de pesticides ? Oui Non 16- Comprenez-vous les instructions d’utilisation ? 17- Si oui, pouvez-vous toujours appliquer les instructions ? Oui Non
Parfois Ne sait pas 18- Connaissez-vous les doses de chaque pesticide que vous utilisez ? Oui Non
Parfois Ne sait pas 19- Si non, comment décidez-vous la dose correcte à utiliser ?
Conseil d’un fournisseur Conseil d’un agent d’agriculture Expérience Autres fermiers Autre (spécifier ……………….)
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20- Comment utilisez-vous les pesticides sous forme de poudre ? Avec… Mains Sac à poudre Sac plastique Appareil mécanique Autre (préciser………..)
21- Comment utilisez-vous les pesticides sous forme granulés ? Avec… Mains Appareil mécanique Autre (préciser ……………………..)
22- Comment utilisez-vous les pesticides sous forme liquide ? Avec… Flacon Pulvérisateur à dos Véhicule avec pulvérisateur Injectés dans le système d’irrigation Autre (spécifier …….…………)
23- Où préparez-vous les pesticides avant leur utilisation ? Près d’une source d’eau communautaire Près d’une rivière À la maison Dans votre champ Autre (spécifier ……………)
24- Que considérez-vous avant de payer un pesticide ? Prix Disponibilité Toxicité Recommandé par un voisin Autre
25- Après application des pesticides, respectez-vous le délai avant récolte ? Oui Non 26- Si non, après combien de jours faites-vous en moyenne la récolte ? ………… IV Mesures de protection 27- Qui pulvérise les pesticides ?
Père Mère Fils Fille Employé Autre (spécifiez ………..) 28- La personne qui pulvérise porte t-elle un équipement de protection ?
Oui Non Pas systématiquement 29- Si oui, lesquels ? Gants Masque Lunettes
Combinaison Bottes Chapeau 30- Après l’usage des pesticides… Lavez-vous vos vêtements ? Oui Non
Prenez-vous une douche ? Oui Non 31- Après traitement que faites-vous des emballages vides des pesticides ?
Enfouis dans le sol Vendus Brûlés Jetés sur place Réutilisés pour le stockage d’eau et/ou d’aliments
Fig. 5 : Questionnaire agriculteur.
Après le choix au hasard des fournisseurs, on leur a demandé l’autorisation de les enquêter, ainsi que pour les fermiers venant acheter les produits phytosanitaires de la part des fournisseurs. La vente de produits phytosanitaires se fait uniquement au niveau régional. Deux fournisseurs du Gharb et un du Loukkos ont refusé de collaborer, ainsi que 4 fermiers du Loukkos.
Les questionnaires ont été remplis sur place avec les fournisseurs et les fermiers. Les sigles (DC = concentré dispersable, EC = concentré émulsionnable, EW = émulsion aqueuse , GA = gaz comprimé, GR = granulé, LS = concentré soluble, SC = suspension concentrée, TB = comprimé [tablette], VP = produit diffuseur de vapeur, WG = granulé à disperser dans l’eau, WP = poudre mouillable, etc.) ont été explicités oralement par les enquêteurs.
Les données des questionnaires ont été traitées sur Excel.
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RÉSULTATS
Tous les enquêtés sont des hommes et tous les membres de famille pulvérisant les produits phytosanitaires sont de sexe masculin et ont plus de 18 ans.
La majorité des revendeurs du Gharb sont des techniciens agricoles (sept sur quinze), quatre des bacheliers, trois ont une maitrise sciences et techniques, et seulement un est ingénieur. Des dix fournisseurs du Loukkos, six sont techniciens, trois bacheliers, et un seul a une maitrise des sciences et techniques. Seulement 47 et 50 % des exploitants savent lire les instructions des étiquettes sur les emballages des pesticides. Sur 29 fermiers du Gharb, 15 sont analphabètes, 7 ont le niveau primaire, 3 ont suivi le collège, 3 ont fait des études supérieures non agricoles et un est technicien agricole. Pour le Loukkos, sur 15 fermiers, 6 sont analphabètes, 5 ont le niveau primaire, 3 ont suivi le collège et un seul est technicien agricole.
Dans le Gharb, les insecticides (39) comme les fongicides (39) sont les plus vendus suivis des herbicides (22 %). Dans le Loukkos, les insecticides sont les plus vendus (44) suivis des fongicides (17) et les herbicides (17 %). Dans le Gharb, les insecticides (40) sont les plus achetés suivis des fongicides (36) et des herbicides (24 %). Dans le Loukkos, les insecticides sont les plus achetés (43) suivis des fongicides (29) et des herbicides (28 %).
Les composés utilisés ne se recoupent pas totalement entre les deux régions (Tableau I). Pour les fournisseurs, la lutte chimique pour le Gharb est assurée par 18 matières actives appartenant à 10 familles chimiques et pour le Loukkos, par 19 matières actives appartenant à 9 familles chimiques (Tableaux II et III). Les agriculteurs assurent la lutte chimique au niveau du Gharb par l’usage de 22 (Gharb) et 21 (Loukkos) matières actives appartenant à 12 familles chimiques (Tableau I).
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Tableau I : Pesticides [2] utilisés dans le Gharb (G) et le Loukkos (L). Produit Matière active Famille chimique Fongicides Antracol combi
cymoxanil + propinèbe acétamide + carbamates L
Galben bénalaxyl + mancozèbe acylalanines + carbamates G Dithane mancozèbe carbamates GL Emthane GL Turbo GL Managri manèbe L Maneb GL Antracol propinèbe G Basultra thirame L Captane captane dicarboximides G Amistar azoxystrobine hétérocycles azotés G Ortiva GL Opus époxiconazole G Impact flutriafol + carbendazime GL Topas penconazole L Aliette phosethyl d’aluminium organophosphorés L Ridomil méfénoxame + mancozèbe phénylamides + carbamates G Systhane myclobutanil triazinones G Insecticides Vertimec abamectine avermectines GL Lannate méthomyl carbamates GL Confidor imidaclopride dérivés des chloronicotiniles L Prosulfan endosulfan organochlorés G Dursban chlorpyriphos-éthyl organophosphorés GL Reldan chlorpyriphos-méthyl G Dimethoate diméthoate L Tractor alphacyperméthrine pyréthrinoïdes de synthèse L Akito betacyperméthrine GL Arrivo cyperméthrine G Tarique L Decis deltaméthrine GL Delta G Karate lambda-cyhalothrine GL Acaricides et insecticides Artila dicofol carbinols G Rtilafol GL Herbicides Lasso Linuron alachlore + linuron acétamides + urées substituées L Basta glufosinate-ammonium amino-phosphonates L Mamba glyphosate G Topik clodinafop propagyl +
cloquintocel mexyl aryloxyphénoxy-propionates + dérivés de la quinoléine
G
Hussar fénoxaprop-p-éthyl + mefenpyr-diéthyl+iodosulfuron-méthyl-sodium
aryloxyphénoxy-propionates + dérivés pyrazolés + sulfonylurées
GL
Stratos Ultra cycloxydime cyclohexane-diones L Menjel 2,4-D dérivés aryloxy-acétiques GL Toro G Printazol 2,4-D+ 2,4MCPA G Mustang 2,4-D + florasulam dérivés aryloxy-acétiques +
triazolpyrimidines G
Pallas proxsulam + cloquintocet méthyl dérivés de la quinoléine G Gramoxone paraquat dipyridiles G Derby flumetsulam + florasulam triazolopyrimidine sulfo
nanilides + triazolpyrimidines G
Afalon linuron urées substituées L
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Pour les fournisseurs, dans le Gharb, les hétérocycles azotés (17) et des pyréthrinoïdes de synthèse 17 % prédominent. Dans le Loukkos, ce sont les carbamates (28) suivis des hétérocycles azotés (22 %) (Tableau I). Pour les agriculteurs, les carbamates sont dominants (20 et 21) suivis des pyréthrinoïdes de synthèse (15 et 21 %). Les hétérocycles azotés sont fréquents dans le Gharb (20) et les acétamides (11 %) dans le Loukkos (Tableau II).
Les matières actives des produits commerciaux les plus vendus du Gharb sont le mancozèbe (14) et le chlorpyriphos (14 %). Celles du Loukkos (Tableau II) sont dominées par le mancozèbe et la deltaméthrine (15 %). Les matières actives les plus utilisées par les agriculteurs sont la deltaméthrine (20) dans le Gharb, et le mancozèbe (13) suivi de la deltaméthrine (12) et du manèbe (12 %) dans le Loukkos (Tableau III).
Tableau II : Pourcentages des familles chimiques de pesticides vendues par les
fournisseurs et utilisées par les agriculteurs du Gharb et du Loukkos. Fournisseurs Agriculteurs Familles chimiques Gharb Loukkos Gharb Loukkos
Acétamides 6 — — 11 Amino-phosphonates 6 — 5 5 Aryloxyphénoxy-propionates 12 5 5 5 Avermectines — 5 5 5 Carbinols — 6 5 5 Carbamates 12 28 20 21 Cyclohexane-diones — — — 5 Dérivés des chloronicotiniles — — — 6 Dérivés aryloxy-acétiques 12 6 5 — Dérivés de la quinoléine — — 5 — Dicarboximides 6 — — — Dipyridiles 6 — 5 — Hétérocycles azotés 17 22 20 5 Organophosphorés 6 17 5 6 Sulfonates — 6 — — Pyréthrinoïdes de synthèse 17 5 15 21 Triazinones 6 — 5 — Urées substituées — — — 5
— famille chimique non utilisée
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Tableau III : Pourcentages des substances actives conseillées par les fournisseurs et
utilisées par les agriculteurs du Gharb et du Loukkos. Fournisseurs Agriculteurs
Matière active Gharb Loukkos Gharb Loukkos 2,4-D 8 6 6 — 2,4-MCPA 2 — — — abamectine — 3 2 10 alachlore — — — 2 alphacyperméthrine — — — 2 azoxystrobine 4 3 3 2 betacyperméthrine — 3 — — cadusafos — 3 — — captane 2 — — — carbendazime 12 3 9 — chlorpyriphos-éthyl 14 12 7 7 clodinafop-propagyl 2 — 1 — cloquintocet-méthyl — — 1 — cycloxydime — — — 2 cymoxanil — — — 7 cyperméthrine 8 — 3 3 deltaméthrine 10 15 20 12 dicofol — 3 2 3 diméthoate — 3 — — époxiconazole — — 3 — fénoxaprop-p-éthyl 2 6 — 2 flutriafol — 3 9 — glufosinate-ammonium — — — 5 glyphosate 2 — 1 — hexaconazole 2 — — — huile blanche — — 1 — imidaclopride — — — 2 iodosulfuron-méthyl-sodium — — — 2 lambda-cyhalothrine 6 — 5 2 linuron — — — 3 mancozèbe 14 15 7 13 manèbe 6 9 5 12 méfénoxame — — 3 — mefenpyr-diéthyl — — — 2 méthomyl 2 3 3 — myclobutanil 2 — 2 — paraquat 2 — 2 — penconozale — 3 — — propinèbe — 3 2 7 tétradifon — 3 — — thirame — 3 — 3
—non utilisé 2,4-D : acide 2,4-dichlorophénoxyacétique 2,4-MCPA : acide 4-chloro-2-méthylphénoxy acétique
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Les formulations de pesticides les plus vendues au niveau du périmètre du Loukkos sont les poudres mouillables (34), suivies des concentrés émulsifiables (33 %) (Figure 6). Dans la région du Gharb, ce sont les concentrés émulsifiables (40) et les suspensions concentrées (21 %).
Les formulations de pesticides les plus utilisées par les agriculteurs dans le Gharb et le Loukkos sont les concentrés émulsifiables (44 et 36), les poudres mouillables (41 et 17), la suspension concentrée (14 et 20), les granulés dispersables (13 et 3 %). Les autres formulations sont négligeables (Figure 6).
Selon les fournisseurs, les agriculteurs apportent parfois un échantillon des cultures attaquées pour diagnostic (93 et 90 % des cas dans le Gharb et le Loukkos), mais seulement 7 et 10 % de manière régulière. Le diagnostic a généralement lieu à l’œil nu (75 et 59 % au niveau du Gharb et du Loukkos) et peu à la loupe (25 et 41 %).
Tous les revendeurs donnent des conseils sur l’utilisation des pesticides aux agriculteurs. 71 et 75 % des agriculteurs du Gharb et du Loukkos prennent des conseils auprès des fournisseurs, 17 et 24 % décident de la dose selon leur expérience et 5 et 8 % des agriculteurs se renseignent auprès d’un agent d’agriculture.
La plupart des revendeurs prennent des mesures de sécurité. Ils séparent les pesticides en fonction de leur dangerosité à 73 % dans le Gharb et 90 % dans le Loukkos. 60 % des revendeurs du Gharb et 50 % du Loukkos possèdent un local de stockage fermé, bien ventilé, lumineux et protégé de l’extrême chaleur pour faire face aux demandes. Les autres font la commande en fonction des besoins. 73 et 80 % de ces locaux présentent des étagères ou des palettes de rangement au niveau du Gharb et du Loukkos.
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Fig. 6 : Formulations de pesticides les plus vendues par les
fournisseurs et les plus achetées par les fermiers du Gharb et du Loukkos en pourcentages en 2010.
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67 et 70 % des revendeurs utilisent du matériel de protection au niveau du Gharb et du Loukkos. L’extincteur en cas d’incendie arrive en première position (67 et 70 %). Le matériel utilisé pour l’hygiène et la protection sanitaire contre toute intoxication pendant le déplacement des pesticides, les contenants pouvant être non étanches, reste négligeable (Tableaux IV et V) : les gants (27 et 20 %) et les masques (20 %) sont surtout cités.
Tableau IV : Matériel de protection utilisé par les revendeurs au niveau du Gharb.
Revendeurs utilisant Utilisa
tion aucun matériel
de protection du matériel de protection
Agriculteurs 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 (%) Extincteur - - - - - + + + + + + - + + + 67 Gants - - - - - - + - - + + + - - - 27 Masque - - - - - - + - - + + - - - - 20 Combinaison - - - - - - - - - - + + - - - 13 Lunettes - - - - - - - - - - + + - - - 13 Bottes - - - - - - - - - - - + - - - 7
Tableau V :
Matériel de protection utilisé par les revendeurs au niveau du Loukkos. Revendeurs utilisant
Utilisation aucun matériel de protection
du matériel de protection
Agriculteurs 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 (%) Extincteur - - - + + + + + + + 70 Gants - - - - - - + - - + 20 Masque - - - - - - + - - + 20 Combinaison - - - - - - - - - - 0 Lunettes - - - - - - - - - - 0 Bottes - - - - - - - - - - 0
70 et 61 % des agriculteurs du Gharb et du Loukkos ont recours à un
traitement curatif contre les ennemis des cultures et 30 et 39 % à un traitement préventif. Tous les agriculteurs préparent les pesticides dans le champ avant leur utilisation. Le délai avant récolte est respecté par 80 et 72 % des agriculteurs au niveau du Gharb et du Loukkos et est de 10 et 20 jours.
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Les pesticides en poudre sont appliqués avec un sac à poudre (50 et 61 %), solubilisés dans un système d’irrigation goutte à goutte (18 et 17), avec les mains (9 et 22), avec un appareil mécanique (18 et 0) ou par aspersion (5 et 0 %). Les pesticides en granulés sont appliqués avec les mains (67 et 87) ou au moyen d’un appareil mécanique (33 et 13 %). Les pesticides liquides sont administrés avec un pulvérisateur manuel (72 et 60), par injection dans le système d’irrigation (23 et 20) ou par aspersion (5 et 20 %).
Les critères d’achat des pesticides sont l’efficacité (52 et 41), suivie du prix (36 et 43) et de la disponibilité (12 à 16 %). La toxicité et la recommandation des voisins ne sont pas prises en compte.
Au niveau des deux zones d’étude (réponses de 30 agriculteurs du Gharb et 18 du Loukkos), 77 et 94 % portent un équipement de protection : 23 et 17 s’équipent de bottes et d’un chapeau, 4 et 4 d’une combinaison, 6 et 1 d’un masque et seulement 3 et 0 de gants et 1 et 0 de lunettes. Après traitement, tous les agriculteurs prennent une douche et lavent leurs vêtements.
Pour les pesticides périmés, les revendeurs procèdent à un retour au fournisseur (53 et 40 % au niveau du Gharb et du Loukkos). Ils sont parfois vidés dans l’évier dans le Loukkos (10 %). Les emballages vides sont brulés par les agriculteurs (58 et 67), jetés dans le champ de manière anarchique (24 et 16), réutilisés pour la préparation des pesticides (6 et 17), enfouis dans le sol (9 et 0), voire réutilisés pour le stockage de l’eau ou des aliments (3 et 0 %).
DISCUSSION ET CONCLUSION
Ce travail a mis en évidence une forte vente et utilisation de produits phytosanitaires dans le Gharb et le Loukkos. Les agriculteurs utilisent environ 40 matières actives appartenant à 22 familles chimiques avec 36 à 44 % d’insecticides et de fongicides et 22 à 28 % d’herbicides.
L’utilisation non réglementée des pesticides se poursuit dans les pays en développement en présence de l'analphabétisme et d’une formation limitée en matière de sécurité et de bonnes pratiques [5]. Elle peut entrainer une contamination de l’eau, de l’air et du sol et avoir un impact négatif sur la santé humaine et la biodiversité [1]. Il faut donc acheter des produits à la fois efficaces contre les ennemis des cultures et à faible impact sur la santé humaine et l’environnement. Les agriculteurs devraient chercher à s’informer au maximum des caractéristiques toxicologiques,
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physicochimiques de ces produits et de leur impact sur la santé, la faune et la flore [9]. Une surveillance biologique et des mesures de dépôts sur les vêtements de protection permettrait de retenir les techniques conduisant à la plus faible exposition afin de limiter les effets nocifs sur la santé [8].
Les revendeurs ont un rôle important à jouer dans l’encadrement des agriculteurs en termes d’utilisation des pesticides. Ils sont d’un niveau de technicité généralement faible et cherchent avant tout à faire du chiffre d’affaire et des bénéfices. Le taux élevé d’analphabétisme dans le milieu rural favorise ce comportement [9].
Le niveau de connaissance des agriculteurs sur les pesticides est limité, notamment concernant les modes d’application, les doses à appliquer et les précautions à prendre. L’usage des pesticides nécessite un minimum de connaissances théoriques et pratiques pour pallier tout risque sur la santé des utilisateurs et sur l’environnement [3]. Malgré une connaissance élevée des agriculteurs des dangers potentiels de l'utilisation des pesticides, les mesures de sécurité signalés peuvent être faibles [4]. Des actions de sensibilisation sont nécessaires pour mieux préciser et expliquer les consignes de base de sécurité et l'importance des équipements de protection. Ces actions sont indispensables pour changer les mauvaises habitudes des agriculteurs parfois dangereuses pour leur santé [4].
Après l’application des pesticides, le respect des délais d’attente avant récolte garantit leur salubrité chimique et la sécurité des consommateurs [3]. Les chefs d’exploitation devraient disposer d’équipements de protection individuelle (lunettes, chapeau, masques, gants, combinaisons, bottes) [1], mais peu se conforment aux règles d’hygiène au cours de l’utilisation des pesticides, ce qui augmente les risques d’intoxication. Les contraintes financières ne favorisent pas l’achat de matériel.
Les formulations de pesticides se dégradent avec le temps et peuvent devenir plus toxiques que le produit d’origine [1].
Les utilisateurs n’ont pas conscience des risques environnementaux des emballages vides de pesticides, qui entrent dans la catégorie des déchets dangereux. Ils ne doivent pas être utilisés pour des usages domestiques comme la collecte de l’eau ou le stockage des aliments [1]. Ils doivent être bien vidés, rincés, séchés et stockés séparément des autres déchets de l’exploitation agricole à l’abri du soleil et il est préférable de les détruire. Plus de la moitié des agriculteurs brulent les emballages vides avec des
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risques de production de fumées toxiques ou d’explosion [7]. L’idéal serait de collecter ces déchets pour les incinérer dans une entreprise spécialisée.
Pour agir efficacement contre les ennemis des cultures tout en respectant l’environnement, agriculteurs et fournisseurs de pesticides devraient se former sur les caractéristiques des ennemis des cultures et l’utilisation des principaux produits phytosanitaires, savoir les précautions à prendre et connaitre les bonnes pratiques agricoles, être sensibles à l’impact des produits phytosanitaires sur l’environnement et la santé des populations, saisir toutes les occasions de séances de formation offertes, consulter l’index phytosanitaire édité chaque année par l’Association Marocaine de Protection des Plantes (AMPP) et favoriser aussi les contacts avec les instituts de recherche et les services techniques du Ministère chargé de l’Agriculture.
RÉFÉRENCES
1 - Bennis (A.), Boutaleb (J.A.), Tanji (A.), Chafchaouni (M.), Fidali (T.) - Les pesticides : Produits dangereux à surveiller. Africa Stockpiles Programme, Maroc, 2009, 37 p. http://www.ribatalfath.com/ divers/brochuref.pdf
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ABSTRACT
Pesticides use by phytosanitary boxes and farmers in Gharb and Loukkos
A survey involving 48 farmers and 25 phytosanitary company managers was carried out in the Gharb and Loukkos areas (Morocco) to assess the level of knowledge and use of pesticides. Farmers in Loukkos used mainly carbamates (28 and 21%) while those in Gharb prefered nitrogenous heterocycles (17 and 20%). Better training and more knowledge about the use of pesticides would limit the risk factor for public health and the environment.
Key-words: Morocco, pesticides.
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