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Utopie ou anticipation ? Le « Journal d'un prêtre d'après-demain » (1902-1903) de l'abbé Cailppe, « Religion et sociétés » by Émile Poulat; Gabriel Le Bras Review by: François-André Isambert Cahiers Internationaux de Sociologie, NOUVELLE SÉRIE, Vol. 34 (Janvier-Juin 1963), pp. 182- 183 Published by: Presses Universitaires de France Stable URL: http://www.jstor.org/stable/40689232 . Accessed: 12/06/2014 16:01 Your use of the JSTOR archive indicates your acceptance of the Terms & Conditions of Use, available at . http://www.jstor.org/page/info/about/policies/terms.jsp . JSTOR is a not-for-profit service that helps scholars, researchers, and students discover, use, and build upon a wide range of content in a trusted digital archive. We use information technology and tools to increase productivity and facilitate new forms of scholarship. For more information about JSTOR, please contact [email protected]. . Presses Universitaires de France is collaborating with JSTOR to digitize, preserve and extend access to Cahiers Internationaux de Sociologie. http://www.jstor.org This content downloaded from 62.122.76.48 on Thu, 12 Jun 2014 16:01:03 PM All use subject to JSTOR Terms and Conditions

Utopie ou anticipation ? Le « Journal d'un prêtre d'après-demain » (1902-1903) de l'abbé Cailppe, « Religion et sociétés »by Émile Poulat; Gabriel Le Bras

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Utopie ou anticipation ? Le « Journal d'un prêtre d'après-demain » (1902-1903) de l'abbéCailppe, « Religion et sociétés » by Émile Poulat; Gabriel Le BrasReview by: François-André IsambertCahiers Internationaux de Sociologie, NOUVELLE SÉRIE, Vol. 34 (Janvier-Juin 1963), pp. 182-183Published by: Presses Universitaires de FranceStable URL: http://www.jstor.org/stable/40689232 .

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les considérations économiques, à elles seules, n'expliquent rien. II définit la grève, phénomène sociologique comme un acte par lequel un groupe social mani- feste à la fois sa solidarité interne et sa désolidarisation par rapport au reste de la société ; cette manifestation se traduit généralement mais pas nécessairement , par un arrêt concerté de travail ; le groupe social y recourt afin d'exprimer une volontét un mécontentement ou une opinion, dans le cas où il ne trouve plus d'autre moyen pour influencer les décisions à prendre en cette matière (p. 298). On peut faire à cette définition une objection, c'est que si elle rend bien compte des caractères essentiels de la grève, elle ne permet pas de distinguer une grève d'une mani- festation paysanne par exemple, comme celles que nous avons connues en France ; il faudrait préciser un des critères : la désolidarisation ; elle ne nous semble pas s'adresser, ainsi que le dit l'auteur, « au reste de la nation » ; il semble par contre juste et important d'insister sur la solidarité interne, que les réponses patronales méconnaissent, précisément parce qu'elles valorisent les objectifs d'ordre matériel et voient dans l'esprit revendicatif une simple résultante de la propagande, de l'action des syndicats. Cette notion de solidarité est liée au problème, controversé, de la spontanéité des grèves ; la croyance en une spontanéité absolue des grèves ne peut être soutenue que par un obser- vateur qui regarde de l'extérieur, car la grève, phénomène collectif, au moment où elle éclate brusquement, suppose néanmoins un mouvement concerté, un « planning », une « stratégie ». Le mouvement ouvrier tire sa force de sa soli- darité et il lui est impossible d'accepter les principes du libéralisme, soutenant que le droit d'un seul à travailler est aussi respectable que celui de dix mille à se mettre en grève et qui, traditionnellement, empêchent les grévistes de prendre les mesures pouvant donner à la grève son efficacité maximum.

L'examen des données juridiques met en relief le rapport dialectique que la société entretient avec ses lois et arrêtés. Contrairement à beaucoup d'autres pays, la Belgique n'a pas résolu la question de la licèi té de la grève ; aucun texte légal ne consacre explicitement le droit de grève : le droit civil ignore la grève mais la législation sociale, sans jamais aborder le problème en tant que tel, s'y intéresse dans de nombreux cas de façon indirecte. On se trouve en présence, dit un auteur belge, « d'un régime de liberté de la grève et non un régime de droit de grève » ; cette liberté ne tient donc qu'à la pression des organisations ouvrières, à leur force. Si on essaie de définir les conséquences civiles de la grève, on retrouve ce même rôle d'une action empirique quoti- dienne d'où découle une législation nécessairement hétérogène.

Rejetant la conception simpliste que certains tentaient de répandre, selon laquelle « le progrès technique fait disparaître les antagonismes sociaux » (p. 86), M. Gubbels reconnaît à la grève le double caractère d'arme de combat et d'arme d'exercice (p. 290) ; le syndicalisme est devenu, comme on l'a écrit, syndicalisme de contrôle. Étant le mode d'expression de la classe ouvrière dans une démocratie qui tend à devenir de plus en plus formelle, la grève, qu'elle atteigne ou non ses objectifs immédiats, est utile ; elle permet au groupe de faire entendre sa voix ; « elle intervient pour remettre en place les mécanismes faussés du régime démocratique

Jeannine Verdès. Section de Sociologie de la Connaissance, CE. S,, Paris,

Emile Poulat, Utopie ou anticipation ? Le« Journal d'un prêtre aV après-demain » (1902-1903) de Vabbé Calippe, préface de Gabriel Le Bras, coll. « Religion et sociétés », Paris, Tournai, Casterman, 1961, 333 p. La question des prêtres-ouvriers s'est posée dramatiquement il y a quelques

années, en soulevant une émotion qui a largement dépassé la France et même les milieux catholiques dans leur ensemble. Il est peut-être trop tôt pour faire, à l'heure actuelle, un bilan parfaitement objectif de 1' « expérience ». En revanche éclairer par une information historique un débat qui est loin d'être clos et

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contribuer ainsi à le dépassionner est sans aucun doute faire œuvre utile dans la voie de ce bilan objectif. C'est ce qu'a fait Emile Poulat.

Curieux livre, à première vue, que ce Journal d'un prêtre d'après-demain qui se présente en quelque sorte comme une édition annotée et commentée d'un texte qui, sans l'occasion, et de par sa seule valeur propre, aurait sans doute été condamné à l'oubli. Verra-t-on alors dans cette exhumation une simple recherche de pittoresque, ou encore l'expression d'un de ces multiples « il n'y a rien de nouveau sous le soleil », dont certains historiens se montrent friands ? On pourrait aussi voir là, plus sérieusement, une tentative pour justifier la pensée des prêtres-ouvriers par l'autorité d'un prêtre d'avant-hier que nul ne songe à taxer d'hétérodoxie.

Rien de tout cela ne caractérise en fait le propos d'Emile Poulat qui, en prenant pour point de départ le journal imaginaire d'un prêtre se faisant ouvrier, et ceci, au début du siècle, a conduit une enquête régressive sur le travail sacerdotal dans l'Église catholique. L'abbé Calippe imagine des circonstances politiques (l'arrivée au pouvoir du parti socialiste) qui obligent les prêtres à travailler de leurs mains. La « crise » passée, le héros fonde un ordre de moines- ouvriers, comme d'autres jadis avaient fondé les ordres mendiants. Pensée et circonstances bien éloignées, comme on peut le voir, de celles qui ont présidé à l'institution des prêtres-ouvriers, et nul plus qu'Emile Poulat n'est conscient de cette distance. Mais situant la pensée de l'abbé Calippe dans les années entourant 1900, le présentateur se faisant auteur, montre l'effervescence apos- tolique qui se manifeste à ce moment et l'importance des controverses que suscite alors la question du contact entre l'Église et la classe ouvrière et même celui d'un socialisme chrétien.

Quelles racines pouvait avoir alors l'idée d'un sacerdoce non professionnel, rendu possible par le travail manuel du prêtre ? Emile Poulat montre combien l'histoire s'est montrée avare dans ce domaine et, tout en ordonnant les maté- riaux qu'il a pu trouver, il trace des lignes de recherche à venir. Si l'on met à part la question des normes canoniques - qui ne sont pas pour autant d'une totale univocité, l'analyse se portera principalement sur les situations concrètes rencontrées par les clercs et sur les attitudes spirituelles qui les ont amenés à répondre à ces situations.

Une première série de situations se groupe autour de la nécessité matérielle où se sont trouvés, à diverses époques les prêtres, de travailler de leurs mains, soit que les revenus proprement ecclésiastiques fussent devenus insuffisants, soit que - et ce fut le cas sous la Révolution française - la condition sacer- dotale ne fût plus reconnue.

Dans certains cas, de la nécessité on en vint au libre choix, de sorte que le travail profane, pour les prêtres, apparut parfois comme une tentation de substituer une source de revenus supplémentaires aux tâches pastorales, d'où une revendication et une discipline : le prêtre doit pouvoir vivre de l'autel et s'il le peut, il doit s'en contenter.

Il semble que ce soit justement vers le début du xxe siècle que s'opère une mutation : le problème se pose alors de savoir si l'état sacerdotal ne rend pas le prêtre trop différent des laïcs pour qu'il puisse les comprendre et être compris d'eux. Certains prêtres alors s'engagent à titre individuel, comme ouvriers d'usine. En 1906 se fonde 1' « Alliance des Prêtres-ouvriers ». Mais, surtout ruraux, ses membres se contentent de consacrer quelques heures par semaine au travail artisanal.

L'auteur se garde bien de tirer de cette étude une leçon applicable à la situation actuelle. Mais faire à travers l'histoire une typologie des situations et des attitudes concernant le travail des prêtres, doit aider à une analyse, encore à faire, des situations et des attitudes vécues par les protagonistes de la récente « affaire » des prêtres-ouvriers.

F.-A. ISAMBERT.

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