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VENISE ET LE BAS-lMPIRE. HISTOIRE DES RELATIONS DE VENISE AVEC L'I4MPIRE D'ORIENT DEPUIS LA FONDATION DE LA BÊI'fLIQUE JUSQU'À LA PRISE DE CONSTANTINOJ'LE J XIII 0 SIÈCLE, PAR J. ARMINCÀUI &NCILN MLII BEL DE L'ÉCOLE FC»ÇAISL D'ATIIÛÇES Pi FLSSEUR 091 IflOIIIL AU COLLIIGP. UOLI.IN . PARIS. IMPII1MERIE IMPJ}1IÀJJE. M DCCC LXVII!. Document II II 111111111111111! 1111111111 0000005564217

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VENISE ET LE BAS-lMPIRE.

HISTOIRE

DES

RELATIONS DE VENISE AVEC L'I4MPIRE D'ORIENT

DEPUIS LA FONDATION DE LA BÊI'fLIQUE

JUSQU'À LA PRISE DE CONSTANTINOJ'LE J XIII0 SIÈCLE,

PAR J. ARMINCÀUI

&NCILN MLII BEL DE L'ÉCOLE FC»ÇAISL D'ATIIÛÇES Pi FLSSEUR 091 IflOIIIL

AU COLLIIGP. UOLI.IN .

PARIS.

IMPII1MERIE IMPJ}1IÀJJE.

M DCCC LXVII!.

Document

II II 111111111111111! 11111111110000005564217

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EN '1' no I) I) C T10 N.

l ie me suis . prosé l'étude des rapportsla u ti nopie pendant la période primitive.de la république ttau règne de Justinienconquête (le l'empire, au commencementVéni tiens et les Francs.

C'est à Venise que les matériaux ([LI pirecueillis; c'est à Athèttes qu'ils ont été mià Constantinople m'a permis d'expliquer.passages difficiles, des cbrysohulles ùnpéria

La bibliothèque Saint-Marc, et surtoutiii'ont fourni mes principales sources. Beaulivre tics Puni sont commentés clans ce trifois, et, si l'activité des -savants allemandsc h u es années ,j'ai pu cependant trouver; apriinédites qui sont insérées plus loin. Je sigCommission donnée aux ambassadeurs vdniuDandolo (L 18), qui Sait époqûe clans Phivénitienne. Mon but.a été d'ailleurs de cwxsemble, en. profitant clos travaux - allernairécemment ou peu connus eu France.

Sans prétendre indiquer ici toutes mesCollection byzantine L - les Chroniques de

Corpus scriptorum /uistou-iœ byza:,rinœ, cdiiio couisiRouan, in! ,en sis cd. Weber j 1828 cL ami. ser 1 q., in.

2 And reu lia id,,] , Vci cl on, ni cluci s , C/uo,uiconMt -ri ail aniu 'i ci 1339, api i il Mi, ra (oui Scriplorcs rcr,

Venise et de Cons11011 lan t à I 'drigiulepris pou[, limite laxiil, siècle, par les

nt mémoire ont étén oeuvre. Un. voyage-les, lieux certains

rcluives (les Frari,y' de clocueiuts du1 pour la premièrea devancé do quel-ux, plusieurs piècesrai entre autres lapar le doge Enrico'

ut de la cl iphoniatieor un tableau d'en-et italiens publiés

,je citerai la2 et de Sagor-

G. Niebiulurii ,uistjtuta

dur ut o pan 4 i/icatui ça ri criilatiraruuai t. XII . j n-lai!

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- li -

nino I; - le XII' volume des Fontes rerum Austriacarum, publicalionimportante faite par MM. Tafel et Thomas sous les auspices de l'Aca-démie de Vieine; - l'histoire de Venise, par S. Ronxanin (Storiadocumentaia di Venezia) 2, monument élevé à la gloire de sa patriepar un homme qui fût la fois un esprit patient, prodigieusement.érudit, et un héroïque martyr de la science cette histoire (le larépublique vénitienne depuis Attila jusqu'à Bonaparte est puiséeaux sources les plus authentiques, avec, un soin et une exactitudedont mes recherches personnelles aux archives m'ont donné defréquentes preuves, et cependant elle est pi-esque inconnue cheznous;— M. Aman, J. Diplorniarabi de! R. Archivio florentine, Fi-renze, Le Monnier, 1863, in-4 0 , précédés d'une introduction his-torique sur le commerce des républiques italiennes; - Miiller,Diplômes grees (éhrysobulles impériaux -tirés des Ai-chives d'Ita-lie) Fircn2e, lie Monnier»i8611,-in-4°. + .

Les rechetches particulières 'des savants vénitiens' consighésdans les Mé:noire de l'instant rùyal des sciences, •lettres et arts etdans ceux de l'Athdnée Vjnitien m'ont été du plus grand secours.:

Les ouvrages vénitiens, déjà anciens; -sur la matièrefourni égdlement des renseignements considérables sur les moeurs,les coutulyles i le commerce. :Les plus importants sont': C. A. Ma-i-iii, Storia civile e •pôlitica dcl côrnnîercio dci Veneziasi B ;t._... For-maldoni, Storia delta: flavigazione. ne! mai' Nero ; . GiacomoFiliasi; Veneti prirni e secon di, Padovii Seminario, :.181 i - i 8 ut

--7 vol. in-8?;Morosini, tmprese dei, Veneziani iii- Terra Sanie,Venezia., Pinelli, F627, in-/i ; - Mutinelli, Del cornmercio dei Vc-nezinni, 'enezia,;i835, i vol. in-8 0 .1 :

il nie reste un devoir bien doux àremplir, c'est d'éxprimet' icima vive reconnaissance pour la haute bienveillancé dont SiExe.M. le Ministre de l'instruction publique m'a donné tant de témôi-gnagesrJe liiiclois (t'avoir -pu comihencer et poursuivre rà Venisemes études cYmes recherches. Par une pzotection éclairée S. .Exe.M. le Ministre est venu doubler la dette contractée par, son:-élève

Cli ,onicon Vnzcriin J ohan ni Sa goriu ii o f rib ul ani. Voue t ii s , Frai' cesen Z:i i ciii' 765, in-S?.

Vcucria, iNara I oviicli ,. in-8', iSA 9-1863.Vrncio, Coleti , 18-t SoS , votuiniolto,

_ lti,L 7-88, 2 VOL.

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envers le meilleur et le plus aimé (les maures mon coeur n'ou-bliera in i'ancienn e ni la nouvelle.

L'Académie (les inscriptions et Belles-Lettres voudra bien aussi,je l'espère, agréer l'hommage que je suis heureux de lui rendreau début de ce travail. Tous les membres de la Commission, dontFi Il

d'Athènes connaît depuis quinze ans la direction salutaire,m'ont donné air d'excellents conseils dont mes voyagesont. grandement profité. M. Egger et Miller m'ont prodigué lesecours de leur vaste et aimable érudition. Qu'ils nie permettentde leur en témoigner toute ma reconnaissance.

Paris, .5 janvier 1865.

EXTRAIE

Dit rend,, de In séance tenue pur l'Académie des Inscriptions et Belks-Letjrcsle 21 juillet 1865.

atin des principaux mérites du Mémoire dc M. Armingand, c'est la variété desdbeuments et des aperçus qu'on y trouve. Les événements sont bien présentés;le récit est rapide et attachant. Point de détails inutiles. L'auteur sait distingueret mettre en relier les faits qui présentent un caractère général, et en tire desinductions ingénieuses et d'utiles observations. L'histoire politique et commer-ciale de Venise dans ses rapports avec Constantinople occupe de droit fa pre-mière place; niais les questions d'art, rie grammaire même et de pbiioiogic, lesinfluences de l'Orient sur Venise et l'italie y sont exposées et expliquées avec ungoût parfait, avec une érudition qui attestent des études toutes spéciales ......

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VENISE ET LE BAS-EMPIRE.

HISTOIREDES

RELATIONS DE VENISE AVEC L'EMPIRE D'ORIENTIl

DEPUIS TA FONDATION DE LA R11UB1LIQLJE

JUSQU'À LA PRISE DE CONSTANTINOPLE AU XIII' SIECLE

—t-

CII APITRE PREMIER.

1)5 LA PART QUI REVIENT AUX EMPEREURS GRECS DANS LA FONDATION

ET LES PROGRÈS DE LA RÉPUBLIQUE VÉNITIENNE.

Les rapports de Venise avec les Grecs sont contemporains deses origines aussi bien que de sa puissance. La république quioccupe dans l'histoire le premier rang par la durée doit l'existenceau plus féroce des rois barbares, et les bienfaits d'une longuetutelle aux Césars de la décadence. En maintenant sur l'Italie desprétentions surannées, ces princes ne réussirent guère dans leursvues, mais ils contribuèrent, sans le vouloir-toujours, à l'affer-missement et aux progrès d'une démocratie naissante. Si leursexpéditions ne purent rétablir la domination impériale dans lapéninsule, elles y prévinrent, du moins, la constitution d'une mo-narchie barbare. La fragilité des puissances gothique et lombardeprépara l'humble ville des lagunes à devenir un joui- la reine del'Adriatique. Venise grandit inaperçue au milieu des bouleverse-ments dont les pays voisins étaient le théâtre. Les catastrophes del'invasion, si fatales à d'autres, lui profitèrent. Née d'un premierdésastre au temps d'Attita , elle s'accrut à la faveur (le ceux qui

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suivirent. Elle hérita des cités détruites, de leur population, deleur richesse. Des ruines commencèrent sa fortune 1.

Théodoric l'ut, en Italie, le premier instrument des Grecs.Zénon n'osaitpas entreprendre lui-même la conquête de la pé-ninsule; mais, en faisant passer les Alpes au roi des Goths, iléloignait le plus incommode des amis et rétablissait une supré-matie nominale sur la moins soumise de ses provinces.

L'invasion de Théodoric, qui entraînait avec lui tout un peuple 2,

produisit dans le nord de l'Italie un grand désordre. A tous lesmalheureux qu'elle dépouillait de leurs biens ou faisait trem-bler pour leur vie un refuge était ouvrt. Si la terre était partoutpleine de périls, l'art de l'homme élevait au milieu des lagunes

- de l'Adriatique une ville bâtie loin, entière sur pilotis, séparée ducontinent par la ceinture protectrice des eaux et dont la fondationmême semblait un4ouble défi jeté aux barbares qui ne pouvaient -l'atteindre, et à la mer qui la portait. Ce n'étaient encore qued'humbles cabanes de pêcheurs, où régnait l'égalité de la misère 3,

mais aussi l'égalité du travail, de l'industrie et de la patience 4 . Là -- étaient aceourus'les habitants des cités voisines épouvantés $r les

- - Huns, là venaien{ en foule les suiwivhùb 'd'Aquilée, et cet asileinviolable avait été respecté d'Atlila. Ldconiusion sanglante quiattrista les derniers jours dc l'empire d'Occident fit de ce mouve-ment-une émigration régulière qui grossit encore à l'approche desOstrogoths. . . --. r

Les vénitiens exploitèrent largement les ruines dAquilée. Nous reviendronssur ce fait, qui intéresse au plus haut degré l'histoire de l'art.' » Je seOc?ç Tif .hoO4ic,i, cli trùisv fcj, na? ŒT5 ô TV FdrOoji, ),SW

ettisroÇ tîJdç te ne? yuveîxee eV teTç ddegg dvO4evbi xc? T& bg,r?-c, de @épeivoToi n ?cgv. (Procope, De Belle go(hico éd. Bonn, i, i, p. 7 . )-

« I-lahitatio similis universa cozicludit. ?esciunt de penatibus invidere. s (Cas-siotiori Vorim Episto(m, 111J. XII, epist. 21J •, éd. J. Garetius. ilothomagi. 1679-,[.l ' p. 198agg.

Les Vénitiens n'employaient alors qu'une petite monnaie courante macciaarécucilis,dit ?asiedore.' --Zone (Origine di 'Venezia, 155) dit: «Oltre di cièbandirono i 'Vdseziani l'oro - e la moneta, non volendo che si battesse se nonqttella pieciola per b giol-nale spendere accadeva. S - Giulio Faroldo (ÂnnaliVe,ieii, Venetia, 55 77 , p. 17) émet la même opinion : «Bora -regnando Teodo-'ico .... . e bandinno l'usa dell' ore e ogni soi-te di nioneta èeeetto i denai-ini diralne, 1 ier la comnintazione delle case quotidiane. - V; F. Schweitzer, Scricdelle-moieec e mer/ngUe cfl4quilcja e di Vcnezio. Trieste, Papsch à Ci, tipografl delbloyrlAustriaco - t 848-1 852, 2 Vol.

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-3—Venise avait hérité d'Aquilée, cette seconde Borne, qui tenait

ouverte la communication entre la mer Noire et l'Adriatique parla voie des fleuves, Isonzo, Tagliamento, Save, Danube'; de Pa-doue qu'enrichissait à l'époque romaine un commerce considé-rable de draps et autres manufactures 2. Mais une autre ville pros-père s'était maintenue à travers les malheurs sans nombre duy5 -siècle. Rayonne, que les successeurs d'Honorius préféraient àBorne et où ils établirent leurcapitale, était toujours le principallieu d'échange entre les deux empires, entre l'Occide,flet l'Orient.La vie de saint-Néon, archevêque de -Rayonne, vers 1 bo, renfermeune preuve éclatante (le- GOS antiques relations. Un marchand decelte ville, ayant emprunté Soc -sous d'or, partit aussit6t pour tra-fiquer de côté et d'autré. Lorsqu'il eut quadruplé cette somme, ilparvint à Constantinople, et, voyant que l'argent multipliait dansses- mains, il ne voulait pas retourner dans sa pafrie3.

.!Ce tte nouvelle métropole de l'Italie eut beaucoup à souffrir del'expédition de Théodoric. Elle soutint un siége et un blocus detrois ans qui portèrent les plus rodés atteintes son commerce.Venise, quoique très-près encore de sa naissance, était déjà pré-parée à de, lointains voyages, et peu lui coûta de faire elle-mêmeles opérations de transit i dont Ravenne- assiégée n'était plus ca-pable. Théodoric, si utile aux Vénitiens pendant la guerre, leurdevint presque fatal pendant la paix. Le rétablissement de l'ordre,le retour de la confiance étaient pour eux de véritables malheurs,car la sécurité arrêtait l'émigration dont ils profitaient tous les -Jours. Le même roi barbare, qui rendait - à l'italie -une prospérité

Strabon, ap. Marin, l.p. 6o--' Ausone dit --

Non eraL iste locus, merito tame,i aucta recci,ti,Nona inier datas, Aquileja, ciebes-is orbes,hala té illyricos objecta colonia montes.Slwnibus et porto celeberriina.......

(Lis Claris urbibns, VI).

La colonie dont parle le poate était fort ancienne. Elle datait de l'an t 8o avantJésus-Christ.- - -

G. Zanetti, Dell' origine di alcune eirttpruscipalr appresso i Vencziani-.libri due.Venezia, Orlandini, 1758, in-à', p. '7 . — Fleury (t. VI, P. 538) l'appelle Née-nus et mentionne une lettre du pape û ce prélat (il 58).-

6 « Estote el-go prornplissimi ad vicina , qui sape spatia (r-ansmittitis (trous-ni cal k ?) iniinita. t (Ciisiodore , Far. Xî1 24.) -

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— 4 —depuis longtemps inconnue, ne gardait pas rancune à Ravenned'avoir abrité la résistânce de ses ennemis et d'avoir tenu trois ansl'empire incertain entre lui et le roi des Hérules. II lui restituaitson rang de capitale, et, en ranimant son commerce d'échangeentre l'Occident et l'Orient, il -enlevait à ses rivaux -les heureuxrésultats de la dernière ihvasion.

Cejendant l'impulsion était donnée, la i'oute ouverte, et le moùve-meht devait survivre aux causes qui l'avaient fait naître. Si Ravennercprenait sou rôle politique et -commercial, les Vénitiens conser-vaient les nombreux htirnents qu'ils avaient construits pendantle siégepour répondre à. des exigences plus grandes 1 . Théodoriclui-même les employait au transport des marchandises. Cassiodoreadressait à leurs tribuns maritimes une lettre remarquable, -quiest le premier jnonhment de l'histoire de cette république et letémoignage le plus ancien de sa pt-ospérié 2 . Le minitre cia con-quérant, faisant appel à leur marine pour le transit desdenréesistriennes, les félicite de parcourir des espaccsinfi ais 3, parole vague,mais qui doit désigner. la Méditerranée orientale. Il- remarquel'iinpôrtance de leurs salines' et-du -trafic qu'elles alimentaient.Enfin Ravenhe elle-mùm&, Lotit en redevenànt l'entrepôt dePOrient, ne pouvait dédaigner le±oncours d'une puissance née deses malheurs, car elle avait besoin des -barques vénitiennes pourrépandre ses marchandises dans la haute Italie etl'Allemagnenériilionale. L'Adige, la Brenta, l'Iso'izo et tant d'autres voiesfluviales ouverIs aux habitants des lagunes les rendaient dons-tament nécessaires à leurs rivaux eux-mêmes.

Zénon n'avait fait que rappeler à l'italie les prétentions . ini-péi-iales. Justinien entreprit de la reconquérir. La guerre quiéclata bientôt entre les Ostrogoths et les Grecs fut encore plusfavorable que la précédente aux développements tic Venise. Ellerenversa la domination qui se fondait dans la péninsule et à la-quelle le génie de, son auteur semblait donner les chances les plus

L Vos qui s, unie rosa n&vi9ia possidetis. s (Cassiodore, Var. XXJI ,C'est la lettre XXIV du douzième livre, écrite vers 537, et dont nous avons

cité ptiaieur passafls. (Voy. l'Appendice n'!.)Voy. p. 3o3, note 4,

in saiiiiis notent exercendis Iota contentio est .......Potest autum aliqilisnimiuni qurrete, nemo est qm salem non desideret ilivenire; meriu.o quando ist.idebet omnis cil,us , qui p01 est esse gratissimus. » (Cassiodore, !oco laudato.)

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- o -sérieuses de durée. Elle substitua aux Ostrogoths le règne impuis-sant et éphémère des empereurs grecs; elle prolongea cette périoded'anarchie, où la jeune république put grandir sans craindre.qu'un roi barbare l'étouffât au berceau. En ramenant le désordredans le nord de l'italie: elle ranima l'émigration interrompuequi avait peuplé, les lagunes et commencé de les enrichir. LesOstrogoths appelèrent à leur secours des alliés plus desfructe'urèqu'ils ne l'étaient-eux-mêmes. Les Franks commirent, en effet, detels, ravages, que la terreur revint, comme au temps d'Attila, surles bords du P6, et que ' Venise ouvrit ses canaux à dé nouveauxréfugiés.

Ces événements eurent aussi pour résultat de mettre les Grecset les Vénitiens en contact. Le mouvement d'hommes, de vivres,qu'ils amenèrent dans le golfe 'Adriatique, 'ne put s'opérer sansle concours des bâtiments de la république. Entre les Ostrog6thsrestés barbares et les Grecs mal préparés, même aux expéditionsqu'ils méditaient depuis longtemps, les Vénitiens, munis de bar-ques de transport, peu éldignés du théâtre des opérations; de-vaient être recherchés des , deux partis, et ils le furent. Esagirenten hommes qui sentaient leur importance et quiyoulaiént en tirerprofit. Ils furent d'abord les alliés des Ostrogoths, et, quand le roide ce peuple, Théodat, allait être assiégé dans Ravenne, ils intro-duisirent dans la ville du blé'et des provisions de tout genre'. Maisils passèrent bientôt du côté des Grecs là étaient leurs sympa-thies et les plus grandes chances de victoire. Ils leur fournirentdes secours d'hommes, de vivres et de transports 2, Pour la pre-mière fois Grecs. et Vénitiens se trouvaient en présence. QuandBélisaire. vint assiéger. Ravenne, -il 'obtint de ceux-ci un grandnombre de barques qui empêchèrent les Goths de ravitailler laville par mer'. En même temps il envoyait Vitalios occuper laVénétie maritime dont-les ports devaient servir dé relâche à saflotte. On trouve à cette époque des navires et des soldats grecs

C'est ce qui ressort de cette lettre XXIV du livre douzième, écrite aux tri--ljuhs maritimes pour obtenir d'eux cet important service. La lettre XXVI dumême livre n'est pas moins curieuse en raison de la stérilité de l'année, Cassie-dore, préfet du prétoire, remet aux Vénitiens tes contributions en nature qu'ilavait réclamées de leur province et pourvoit A leur approvisionnement. ( Voy. l'Ap-pendice, n" I et U.)

Marin, L I-, P . g'.-Rossi, 'Sioria di 'Ilaveitrsa • ap. Marin, t. J, p. 36.

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sementionnés à Grade; la mer Adriatique, les iles l'lstrie, la Dal-matie en leur pouvoir'. Si les Vénitiens contribuèrent puissam-ment- à la chuté de Ravenne,. lés Dalmates combattirent, aumilieu de la flotte impériale, à la bataille d'Ancône. Lorsque Béli-saire, après sa disgrâce, fut renvoyé en'Jtalie pour arrêter Totilaclans le cours de ses victoires et reconquérir 1a péninsule, c'estàPola même qu'il aborda 2. Le successeur de Bélisaire, Narsès ,-avaitcôncentré le gros de son armée à Salone 3 . Il ne pouvait prendrela route- de terre à cause des Franks, qui auraient barré le passagede la Vénétie continentale; il n'avait pas assez de navires pouropérer par mer le transport de toutes ses troupes. Jean, neveu de

- Vitalios i lui proposa.de suivre la voie de la lagune peu gardée-enraison même des fleuves et des marais qui la faisaient croire im-praticable. Cette détermination le tira d'un: grand embarras.. De-puis l'époque romaine il y avait un passage régulièrement établipar la-lagune de Grado à Ravenne. Narsès réunit chez les Véni-tiens les nombreuses barques qui lui étaient nécessaires, cons-truisit des ponts, et arriva sans obstacle dans la capitale de l'exar-chat. Il laissa Constantianos derrière lui, avec l'ordre d'occuperles iles de la Vénétie. Ce furent encore les petits bâtiments vni-tiens qui permirent à Narsès de Taire arriver par les fléuves de lahaute Italie 12,000 Lombards auxiliafres '. Les soldats - du Bas-Empire rdstèrent. dans ces régions jusqu'à -la fin du vi e siècle,et leur présence à Crado nous est -attestée par lés pierres quiportent leurs noms et le témoignage de leurs offrandes à l'église deSainte-Euphémie 5 . Les rapports entre les deux peuples étaientdevenus intimes et l'alliance établie sur des intérêts communs,lorsque l'arrivée de deux vicaires impériaux resserra-ces nouveauxliens...-.'

Quelques années après la dernière défaite des Ostrogoths Narsès- . débarquait à Venise.-Il y fut reçu avec enthousiasme. Une députa-

tion des. Padouans vint l'y trouver'. Ceux-ci reprochaiext aux Vé-

Romanin, Storia documentata di Venezia, t. 1, cl,. j, , 1). 33.2 Du Roure, Histoire de Thdodoric le Grand, t. II, p - 4$, Paris, 1846.

Procope, De Bello y6thico, liv.!! et III, x%t',-xxIv. - Cf. Filiasi, t. V,.p.-2o7.Marin, t.I,p. 1 29. .Filiasi , Memorie s(oriche dci Veneii primi e sceondi, t. VIF, p tBossi , liv. VI. Ap. Marin, t. I. p. i 20. - Cf. B. CinsUninno, in-fol. liv. VI,

Venetiis, 1498.

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nitiens de s'être approprié Malamocco, port de Padoue, de leuravoir enlevé toute communication avec la iner, d'avoir occupé etfortifié lés embouchures de tous les fleuves. Ils demandaient àêtre remis en possesion de leurs anciens droits. Les Vénitiensrépondaient que le port de Malamocco avait été pris par eux àl'époque de la grande invasion, -que Padoue n'y avait point pré-tendu au temps de Théodoric, et qu'elle avait moins que jamaisle droit d'y prétendre. Des lagunes appartenaient à-ceux qui avaienteu le courage de les peupler, qûiles silloainaient de leurs barques,qui les arrachaient aux barbares. Narsès tint la sentence en suspenset se contenta d'exhorter les deux peuples à la modération et à laconcorde. La Chronique d'Altino chante les louanges Narsès;11 aurait été le bienfaiteur de tous, il aurait fondé de nombreuseséglises, deux près du palais des chefs de la république, -une autreen l'honneur du martyr saint Théodore, ornée de pierres et de co-lonnes précieusès; il aurait qréé une bibliothèque publique (56o).

La visite du successeur de Narsès, l'exarque Longiai, est encoreplus digne de remarque, car, s'il faut en croire la Chroniqued'AI-tino 2, elle aurait eu de plus grands -résultats politiques. ---

Avant la mort de Narsès, Longin aurait fait dire aux Vénitiens:Si votre chef et vous consentez à me recevoir, si- vous êtes vous-

mêmes disposés à venir à Constantinople, j'irai -chez vous. J'ai étéannoncé comme vice-roi -à l'Italie. Cependant, si vous vouliez bienfaire hommage à-l'empire, je ne vous astreindrai pas au sermentde fidélité, je me contenterai d'un engagement que prendra votrechef d'être dévoué à l'empire et de faire pour lui la guerre, en casde nécessité. Votre chef m'accompagnera à Constantinople. Dé-clarez par écrit vos sentiments à l'égard de l'empereur, etje m'en-gage à-vous obtenir de mon côté un acte solennel qui vous -assurede sa protedion. Ceux d'entre vous qui voyagentjusqu'à Antioche,et doùt les navires marchands parcourent toutes les parties del'empire, pourront s'adonner au commerce en toute sécurité. m -

Le chef du peuple et le peùple lui-môme accueillirnt cesoffres avec joie. On envoya à Constantinople une ambassade ex-traordinaire qui devait- prier Longin de serendre --à Venise. Ledoge, Narsès, les tribuns, une foule immense d'habitants et clé-

Voy. la Ch p. (I',l hi,w. A;- ch. Scorico i&,liai,o, App. h' 9, j).' Ihd. Ill. P- ' - ' a et si,iv- -- -

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trangers, répandue sur les embarcations les plus diverses, allèrentà sa rencontre. Comme si l'empereur lui-même était venu, où fitretentir les chants d'allégresse, les cloches et les instruments4e musique. Aux- portes (le l'église de Saint-Th- éodore, Cinquanteprêtres, revêtus des ornements sacerdotaux et ntonnant les can-tiques sacrés, le reçurent avec les plus grandes marques d'hon-neur. Au retour de l'église, le chef du 'peuple le retint dans sonpalais. Les tribuns, la foule entière, composée d'habitants etd'étrangers,s'y rendirent- également pour voir l'envoyé de l'em-pereur; tous y avaient été convoqués à cause de lui..

Longin leur parla en ces termes Vous êtes assurément undes peuples les plus heureux du monde par l'excellente positionque vpu- occupez. Vous jouissez, dans vos lagunes, d'une Sécuritéparfaite, et aucun souverain du monde iie pourrait ni vous_in-quiéter, ni vous atteindre. Je vousdis donc :,si vous voulez faire•hommage à'l'empereur, exposez vos dispositions par écrit. J'espèreconduire auprès du prince les choses à bonne fin, ' et à la satisfac-tion de vous tous. Le chef cl u peuple, suivi, desprincipaux deta noblesse, accompagna l'exarqtae à Constantinople. Quand il futen présence de son souverain, Longin exposa les résultats de samission. Les autres -firent acte de dévouement,à. l'empereur, et ceprince s'engagea, en retour, adonner aux Vénitiens une protectionperpétuelle dans toute l'étendue de ses Etats ¶.-

Ce 'récit éclaire 'vivement les premiers rapports (le Veniseaveà

On se demande s'il est permis d'admettre tous IPS détails de cette narration.Nons croyons que l'événement est incontestable, si les détails ne le sont pas. L'as,-

•Ilsenticité (le laChronique d'Altino,'d'o& ce récit est tiré, est reconnue parles sa-vants tes plus autorisés. Éérité ail ix' siècle, elle est assez rapprochéd de cetteépoque pour en être le fidèle écho. Le voyage de Lo'ngin à Venise et les résultatspolitiques qui en découlent sont d'ailleurs attestés par d'autres documents. Citons,entre autres, la Chronique Barbara iLongino impetré clic questi isolanifosscra/i,qli dde Jmprro con ampla faeoltà di poter negoziare, mereantare e praticarein tutti j ls,oI ' i dell' Impero soggetti liberameute et con sicurth e se'nza alcunadifflcoltà.o inipedimenti cosi della persdl?a corne delle cose. u Nous croyons qu'ilfaut admettre ('ans le passage que nous venons d'extraire dola Chronique dAlti,ao,non-seulement le fait principal, mais l'ensemble du récit. L'amplification Dciireste pas moins évidente dans le double discours de Longiu avant et après sonarrivée à Venise. Le style est d'ailleurs tellement barbare qu'il cri devient parfoisinintelligible. Aussi n'avons-nous pas donné une traduction complète, qui eût étéaussi incertaine pie, fastidieuse. Nous avons préféré un extrait, oi'i nous n'avonsconservé que les parties dont le sens e paris su [lisamni eut clair.

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— g —Constantinople. Il établit une sotte de protectoratiinpérial sur larépublique, protectorat fondé par un exarque: accepté par lapremière ambassade vénitienne qui ait paru sur le Bosphore.- Une dépendance nominale, une reconnaissance officielle de la

suprématie byzantine', tel a été le prix dont Venise acheta, dès ledébut, les immunités que son commerce 'réclamait dans toutl'Orient. Elle accorda plus tard les mêmes hommages âïix em-pereurs d'Occident et y gagna la même sécurité en Allemagne.Aveè les maitres du Bas-Empire, le lien fut plus étroit et luslations plus, intimes. Les historiens vénitiens', animés d'un pa-triotisme fort honorable, ont mis 'une certaine vivacité à défendrel'indépendance originelle de leur patrie. II est certain que Venisen'a jamais été soumise d'une faç.on.effective'à un prince étranger,et que ses chefs primitifs s'intitulaient à juste titreNous, .&i-bans des Lagunes maritimes, nommés par elles. Mais les Vénitiensn'assuraient leur autonomie et leur tranquillité intérieure qu'enrespectant les droits, nouvellement rétablis, de l'empire grec surla,péninsulè entière. L'exarque de Ravenne 'prétendait être unvéritable vice-roi d'Italie, et les Vénitiens comprenaient trop bienles avantages qu'ils tiraient de son alliance pour choquer une am-bition aussi absolue qu'inoffensive. lis avaient autrefois reconnules rois - germains d'italie,, Odoacre et Théodorik. Pourquoi au-raient-ils refusé à une domination fàible, lointaine, amie, leségards et les 'litres quils n'avaient point contestés à un roi puis-'sant, voisin, enhemi? Les Justinien et les Héraclius, dans tonteleur gloire, ne leur causaient pas les mêmes inquiétudes que lemoins grand des fils d'Odin.

Les prétentions surannées que la cour de Constantinople éle-vait sur l'Italie ' tout entière étaient même pour ces marins encoreignorés un principe de force et d'indépendance. 'Ils n'aspiraientpas, ils ne pouvaient songer .pour eux-mêmes à la possession del'Italie du nord et de l'Italie centrale. Ils devaient donc encouragerle maintien de ces droits anciens, qui entachaieht d'usurpation'toutes les monarchies germaniques si menaçantes pour leurliberté. Ils devaient défendre à leurs portes un débris d'état gréco-:omain qui était pour les Lombards un (langer permanent, sansqu'il pût le devenir pour eux-mêmes. ils devaient prolonger une

I \'ny snrlo,it 13, tii,sli,,iann, liv. VI.

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10agonie qui- favorisait leurs progrès et quilaissait l'Italie commesuspendue. entre plusieurs héritiers barbares.

Au temps des Lombards , Venise développe sa prospérité etresserre son.alliauce déjà séculaire. La lutte de l'empire byzantincontre les nouveaux envahisseurs fut longue, sanglante et mal-heureuse. Elle lui rendit les Vénitiens plus nécessairesque pal- lepassé, et, de protégés qu'ils étaient, elle les éleva presque -au rangde protecteurs;

Leurs embarcations servirent, comme- autrefois, à transporterles troupes grecques, et- à remonter lIes fleuves'. Des secoursd'hommes permirent à celles-ci de s'empa rer de Bressello 2, Tantde services rendaient les successeurs de Justinien chaque jour plusbienveillants. Si l'on en croit le chroniqueur Sagoraino, la 'villed'Eraclea aurait été construite jrnr Héraclins; il est probable qu'ilexagère; mais on doit admettre que les Opiterginiens , chassésde leur-ville; détruite parRotharis, roi des Lombards, reçurentde cet empereur des sommes d'argent,' 'et que, si les fugitifs, gui-dés par leur évêque Magnus-; donnèrent à leur nouvel asile le nomd'Eraclea, c'est 'qu'ils voyaient dans Héraclius un souverain, et unbienfaiteur 1 . La munificence de -ce prince ne fut pas moinséclatante à l'égard 'du légitime patriarche de Grade. Fortunato,patriarche d'Aquilée, élupar l'es Lombards 'au mépris des loiscanoniques., avait dépouillé Crado de ses trésors, grâce aux forcesque lui avait fournies le duc de Frioul. Le pieux empereur rendità Priaiigenius, patriarche, victime de cette spoliation, bien audelà de ses pertes 5 .

-En faisant cause commune avec les Grecs, Venise s'était expo-sée aux incursions presque annuelles des- Lombards. La terreferme, jalouse des lagunes, excitait encore les 'barbares.- Les pé-rils constants qui menaçaient la république l'obligèrent à fortifier

, Nicola Zeno, Dell' origine de' barbari che distrusserô per tiTtlo il tnazi4o liTIT-

perio'di Rama, onde ebbeprineipiola ciuà di Venezia, Venezia 1557, ap. Marin,l..lp. 'A& etsuiv. -

Id. ibid. Bressello, BrSrclln,n, petite ville située à l'embouchure de la Pannadans le Pb.

Oderzo, Op&erginm, t, 26 kil. N. E. de Venise, sur le Manticano.«Hie (flotitaris) Opitergiam oppidum ùfcsruot,qaia !tomunis saberat, expit-

guavit ' et dirait.. 'lune Magnus .......civitatein construxit, quam sub impers-loris nomine 1-foracliam vocavit. (A. Dandolo, p. T I 5.) - Cf. Marin, LI, p.

Marin,tn,,dato. -

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- Il -chez elle le gouvernement, changèrent sa constitution intérieureet son avenir. La magistraturedes tribuns maritimes, qui avaitsuffi à des débuts presque toujours paisibles, fléchissait sous lepoids d'une défense quotidienne et laborie-use. Elle fit place àl'institution d'un duc, chef militaire dont l'idée et le nom furentempruntés aux Lombards qu'il devait combaûre Ce due prit avecle temps un caractère plus pacifique, son titre s'altéra; mais ledoge de Venise resta ldngtemps à la tête des forcés publiques. Uneattaque simultanée des Lombards sur les lagunes, des pii'ates dal-mates sur un convoi -venu du Levant, réhuit les pour lechoix du premier doge (697). L'élection de Paoluccié Anàfestôfut notifiée au pape et à l'qmpeeur d'Orient '.

Si l'institution et le- nom du chef de la république vénitiennesont dus aix Lombards, une partie du cérémonial adopté pour lanouvelle magistrature est d'importation byzantine. L'habillementducal reproduisait certains détails du costume des exarques, desconsuls et des empereurs. Le doge portait, dans les premierstemps, un manteau de soie avec ornements et bossette d'or; sousle manteau, une soutane à manchettes étroites et liant rabat, col:let de peau et chaussures rouges. -On priait pour lui dans les églisesselon la formule grecque. Lorsqu'il mourait, on observait, dansles funérailles, un cérémonial qui tenait -à lafois du byzantin etdulo'mbard 2. Ces usages ne furent pas les seuls que les Vénitiensde cette époque empruntèrent à leurs ennemis ou à leurs alliés.Ils leur prirent aussi certaines peines atroces, comme celles quiconsistaient à couper les mains et à crever les yeux. Le supplicede Giovanni Fabriciazio, que f .e . peupleavengla, rappelle une desscènes si fréquentes à Constantinople (742). --

Le règne de Léon III l'Isaurien marque l'époque la plus glo-rieuse de l'union gréco-vénitienne contré les Lombards. Le fana-tisme iconoclaste de ce prince amena -une-rupture entre lui et lepape, qui trouva de l'appui à Milan. L'édit contre les images(726), -promulgué en Italie, souleva dans l'exarchat de Ravenne,et surtout à Home, une opposition violente, que Luitprand sut ex-ploiter. Tandis que les o fficiers impériaux commettaient sur lapersonne du pape un attentat aussi odieux qu'impolitique, le roi

Rornania, -i. t, p. 02. — A. Dandolo. I. VIF, eh. I-Rornanin t. t, p. 1 02 cl 1 17. -V-oy. "et re Cl' apil rc-ij 1, p. i33. -

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12 -lombard envahissait la Pentapole 1, s'en rendait montre, dégageaitfiole, un instant cernée par les forces ennemies 2, entrait vic-torieux dans Ravenne, mettait en fuite le vicaire impérialCestà Venise. que l'exarque Paul se réfugia. Les Vénitiens voyaientleurs lagunes, qui n'avaient d'abord abrité que leur indépendancenationale, devenir l'asile du représentant des Césars. Ils proté.geaient- leurs protecteurs.-

Panl leur exposavivement les motifs - qui les obligeaient à con-fondre leur cause avec celle de l'ernpii-e. Deux partis se for-mèrent l'un dévoué ait Grecs, l'autre penchant. vers la neutra-lité ou l'alliance lombarde. Mais le parti grec, quiavait le dogepour lui, l'emporta sur son rival. Les Vénitiens, sans obéir aufanatisme du prince iconoclaste, ne pouvaient se laisser enve-lopper par une domination barbare. Le pape, effrayé 'des succèsmenaçants de ses alliés, encouragea la résistance. Une flotte véni-tienne, commandée par Orso,.le I.roisième doge delàrépublique,surprit J!avenne et l'emporta.malgré la vigoureuse défense de liii-delirancl, neveu du roi lombard, et de Perédeo, duc de Vicence,qui 'succomba sous les murs de la ville assiégée. Paul rentra clanssa capitale à la suite de ses alliés Victorieux, et la cour de By-zance, absolue dans ses prétentions, et si-fière dans son langage,dut aux pêcheurs, naguère inconnu de l'Adriatique, lerétablisse-ment d'une autorité qu'elle était impuissante à maintenir 3 (72v).

Tels étaient les progrèsétonnants d'une république, si faible sonorigine, mais destinée à étendre dans tout l'Orient son commerce,son influence et même son empire..

Les promesses de -l'exarque.fugitif furent tenues après la vic-toire. Malgré l'absence (le documents authentiques, on est.en droitd'affirmer que de grands privilèges furent accordés aux Vénitiensdans l'exarchat de -Ravenne, bar, un demi-siècle plus fard, onles y retrouve étIis en assez grand nombre pour attirer l'atten-lion et les rigueurs de Charlemagne. Le pape Adrien l r écrit àl'empereur que, pour se -conformer à- la volonté sôuveraine, il apublié l'ordre d'expulsiondonné contre les Vénitiens qui trafiquent

La Pentapole comprenait tes cinq villes de Rimini, Pesaro, Sinigaglia, Fanoet. Ancône.

Anastase ic bibliothécaire. Éd. vén. P- 37.Marin ,t.J.p.176-177.—Romanin.lp.117-12o.—Cf])arn.M. in-i8',

Paris, ' 826, t. t, p .35. Ily traduit la Icure CI,, pape au doge.

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- 13 -à Ravenne et dans la Pentapole. il a enjoint à l'archevêque etcchasser de son territoire ceux qui y possèdent des biens et deschâteaux forts. Les Vénitiens n'étaient donc pas là de simples inar-chauds. Les châteaux forts mentionnés par le pontife indiquentun établissement politique et militaire dont la concession fut arra-chée à la détresse dés Grecs un siècle plus tôt, mais dont la na-ture inquiétait l'empereur, le pontife et peut-être l'archevéqelui-même '. La cour de Byzance voulut, en outre, témoigner -sareconnaissance au doge Orso, qui avait eu lé comrnandément dela flotte Victorieuse. Elle lui accorda un deslitres honorifiqiiesdont le prestige avait survécu, même chez les barbares, à demide l'empire romain, et- qui lui prmettaient de maintenir, à peude frais, une influence sérieuse et un air de protection qui dé-guisait sa faiblesse. Orso obtint la dignité de Jiarb g2. Il est restéconnU sous le nom d'Orso - fI,ypatô. Ainsi, -le troisième doge de larépublique prenait rang dans ],a impériale. Un dés maîtres -(les soldats, magistrats annuels qui remplacèrent les doges peu-(]art quelques années i Gioviano Cipario (737-74-) reçût la mêmedistinction, soit qu'il eût foîii'ni à Constantin Copron s'me , suc-cesseur de Léon l'Isaurien, quelque secourscontre les Arabes ouile rebelle Artabase, soit que la- nécessité chaque jour plus grandeoù se trouvaient lès empereurs de ménager l'alliance vénitienne -leur fit déjà pre\dre Ihûbitude de ces libéralités peu coûteuses 3.

Entre Léon l'Isaurien et Charlemagne s'étend une période dequarante ans, qui présente beaucoup de désordre et de confusion.Borne et Constantinople se font une guerre -tantôt- sourde, tantôtdéclarée: L'une s'appuie sur les Franks, l'autre sur les Lombards.

Cod. Cnrotinus. Epist. LXXXIV Adriani pontifleis ad Carolum magnum Adaures ciemiintissimr regalis Eicellentic intirnantes innotescimus quia dom-- -s'eslra regalis-irt triumphis victoria prœcipicndu;n cmisit, ut e partibus Ravcnnœ setPentapokos exptflerentur Jggjgj ad negatia:u(uzn, nos illico in partibus -illis cmi-simus,vestrarn adimplentcs i'egalem voluntatcm, Jnsuper ad Arelaiepiscopunspraceptoin direximus ut in quodiibet ( sic) ter,'itorio oestre etjurc sanctœ ilaven-natis icelesin ipsi Venetici proesidia atque posscssiones Jiabereut, ornnino ces ex,,,dcexpeUeret et sic eeclesiœ suiejura mambos suis teneret. ---- 2 i'nTog désignait la fonction des consuls, qui Firent maintenus à Constanti-nople jusqu'au règne de Justinien. Mais, au temps d'Orso, ce n'était pins qu'untitre honorifique que l'on donnait aux préfets des villes et qu'on prodigua beau-coup. (Voy. plus loin eh. vi,, p. i S!,

' Remania, t. I, p. 157. Vny. Lebeau, 13es-Empire, t. Xli, p. t 88-iob, et, surles massacres de Ravenne, le mémo auteur. ibid. P. 16 et 76. --

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- 14 -Venise semble surtout préoccupée d'étendre son commerce mêmechez ses ennemis i et de remplacer. les Grecs, chaque jour décli-nant, sur 'l'Adriatique. Elle avait succédé définitivement à Ra-venne, et, lorsqu'elle délivrait sa rivale des Lombards, elle n'avaitplus à craindre de concurrence commerciale ou politique..

Peu de villes ont été plus éprouvées que Ravenne pendant quel-ques siècles de puissance. Prise et saccagée par les premiers bar-bares, restaurée par Théodorik, qui l'avait d'abord appauvrie, ellevit tout le monde réuni contre sa grandeur renaissante; elle n'eutpas de plus cruels ennemis que , ses maîtres. C'est d'un empereurhyzaitin qu'elle reçut les coups les plus redoutables. En 709, Jus-tiaien Jl envoya contre cette capitale indocile le patrice Théodoros,qui 'J a prit et la mit au' pillage. L'année suivante, une nouvellerévolte éclata contre le patrice Rizocopos. L'ordre ne fut rétablique vers la fin du règne. Prise par les Lombards, reprise par lesVénitiens, Ravenne retomba sous la domination grecque sans re-trouver Foi-ci-e et la paix. L'exarque Paul 'n'était pas plutôt ramenépar la flotte victorieuse, que l'édit dé Léon l'.lsaurien, portait sesfruits. La ville se divisait en deux factions, l'une proscrivant, l'autredéfendant le culte> des images. Au milieu de troubles sanglants,Paul était massacré (727). Eutychios, envoyé de Constantinoplepour le remplacer, n'exerça plus qu'une ombre de pouvoir jus-qu'au jour où Ravenne tomba sou,s les coups du pape, des Fran]set, des Lombards (751)1.

Justinien H ne s'était pas contenté de prendre et de châtier laville • rebelle : il l'avait presque dépeuplée. J] lui avait extorqué. sesrichesses, il avait transporté ses, nobles sur 'les rivages 'de la merNoire 2 . 'Même en temps ordinaire, le poids de la dominationgrecque était lourd. L'autorité de Ilexarque n'était contenue paraucun frein légal, let, en matière d'impôts, elle' s'exerçait avectoute la rigueur inhérente à la fiscalité impériale. Beaucoup d'ar-tisans et d'industriels, ruinés par un despotisme aux abois, imitè-rent, au vine siècle, 'les fugitifs qui pendant le y' et le vie, 'étdientallés demander aux lagunes vénitiennes un asile contre les bar-bares. lis trouvaient à Venise un gouvernement' intelligent-,jalouxde favoriser le travail et l'industrie. Ravenne, privée pa y ses niai-

Ronianin , L. 1, p. i 20 et. suiv.Rossi, .9 ,ii Rarnap. Api\larin. t. 1, p177.

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- 15 -Ires eux-mêmes (le la partie la plus riche ou là plus active de sa po-pulat.ion, abandonnait à sa rivale cet empire de l'Adriatique, quecelle-ci, devait qonserver pendant tant de siècles. Orso Hypato en-couragea ses compatriotes à construire des navires fort légers,comme ceux des pirates liburniens. Les maîtres venus de la Peu-tapole, unis à ceux que Felice Cornicola appela del'Esclavonie, del'Istrie et de la Pouille, pefeciionnèrent cette science, chez les Vé-nitiens. Le même doge s'occupa de leur donner l'usage des armes,et ces hommes, qui n'avaient été jusque-là que des mercenaires im-périaux ,- commencèrent à former le noyau d'une armée indépen-dante et nationale 1

Aux Lombards succédèrent 'les Franks dans la domination del'italie; aux Albain , aux Luitprancl; les Pépin et les Charle-magne.

Q (land le g l orieux roi des Franks eut triomphé des derniersbarbares et mis 'sur sa tête la couronne des empereurs latins , lapaix sembla rétablie clans l'Occident bouleversé depuis plusieurssiècles. Ce furent de belles années dans l'histoire de la civilisation.L'unité romaine n'était plus, inais . l'on voyait deux groupes se dé-gager du chaos l'Occident germanique avec Charlemagne, l'OrientgreQavec Irène. Un instant même les deux mondes se rapprochent,leurs chefs apprennent à se connattre, à s'estimer; il -semble qu'ilsvont s'unir et se donner la main. Ordre éphémère, mais imposant,rehaussé par le contraste de .la confusion qui l'avait précédé, ,del'anarchie plus profonde encore qui devait le suivre!

Il y eutun point où les deux empiresqui se -partageaient lac1iréIient se touchèrent, une ville qui devint le théâtre de leurlutte, mais qui sut échapper à l'un et à l'autre. Venise joua, entreles maîtres de l'Occident et ceux, de l'Orient, un rôle indépendantet glorieux. -

Depuis la conquête de là Lombardie et de l'exaréhat, l'empirefi-auk confinait aux lagunes vénitiennes. Mais, sur la rive orien-tale de l'Adrùitique, l'Istrie et la. Dalmatie appartenaient auBas-Empire. Venise restait seule entre deux grandes monarchiesrivales elle devint l'objet d'une compétition qui devait-dégénéreren guerre ouverte. Un parti grec s'y était formé depuis nu demi'-siècle. Il datait du jour où l'exarque Paul avait obtenu asile et pro-

V-y. Marin. t, p. 200230 c( passim.

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— 16 -tection, où Ravenne avait été reprise sur les Lombards par une.flotte-vénitienne, où le doge avait jointà son titre légal celui d'unedignité monarchique. Orso l-lyato en était le chef'. Par lui l'in-fluencebyzantine-tel!dait à se répandre dans la politique et jusque([ans les formes extérieures du gouvernement. Le doge avait à

-peiné reçu de Constantinople un honneur - nouveau dans les an-nales de son pays, qu'il affecta -un luxe et un orgueil extraor-dinaires 1 . Les républicains s'alarmaient. L'institution des doges futsuspendue pendant quelque temps et fat place ii celle-des-maîtresdes soldats. Vingt ansplus tard, au nombre- des factions véni-tiennes on retrouve les amis des Grecs. Enriro Barbaromano oc-cupe, avec le secours de-ceux-ci, les Lidi Be,noridini;dellc Pinete,de la Piave, de- la Livenza jusqu'à Grado . Mais il -est vaincu parGalagaulo, qui représente le parti contraire et qui usurpe un

- instant la dignité -ducale - (755). Des haines intestines devaientaggraver ces conflits. Deux villes se disputaient, dans les lagunes,le gouvèrnement de l'État. Eraclea avait été pendant longtempslaiésidence des doges Quoiqu'elle et perdu ce privilége, ellep'en conservait pas- moins la suprématie. Tous les doges étaienttirés de son sein. -Les autres villes, lesolo en tête, voyaient avecjalousie celte prépondérance. De là deux partis acharnés, commeon en trouve au commencement (les petites républiques,- les Hé-ncléens et-leslesolaniens. -Venise était donc préparée à une riva- -lité-d'influence, et la dualité qui se manifestait au dehors existaitdepuis quelque temps en elle-même

A la fin du vin' siècle, les Héracléensavaient le pouvoir par lemoyen des Galbaj, que l'affection du peuple perpél:uait dans l'au-torité ducale. Les Galbaj penchaient pour les - Grecs. -MaurizioGalbaio, devenu vieux imitait les- usages byzantins en s'associantGiovanni, sou fils. Celui-ci, devenu le second doge en 787,ren-contra une vive opposition dans le. patriarche, qui avait le même

Marin, t. I,p $90.--- -Lido,. ho 5 désigne une portionportion- du rivage dans ],a des lagunes. Les Liii

flcinondiui et ici le Pinece sont situés cuire l'embouchure dé la Brenta et celle dela Piave. Grade (2 2oo k), A 22 kil. S. S. O. de Coriz, a un petit port qui coni-moniquc avec Aquilée (t 5ôo la) par un canal, et- est bâti sur une lie, près del'embouchure de la Natisa. Barbaromano occupait donc toute la lagune, depuisVcniac jusqu'au fond de lAdiiatique. - -

Sagornino et B. Giustiniano , De orjyhie u-bis Venesio,-i,rn fil). XV - Vea,etiis1qS. Ap. Marin - tI p. 17---

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- 17nom, mais qui, sujet de Charlemagne avant son élévation', sedéclara le chef du parti frank et gagna les les - olaniens à sa cause.Les.deux factions ordinaires de la républiqe arboraient le dra-peau des deux empires qui s'y disputaient T'influence. Un événe-ment imprévu les mit aux prises]_

El' 797, l'évêque d'Olivolo 2; Obelerio, vint à mourir. La cour deConstaritinopl&, par l'entremise des marchands vénitiens qui tra-flqaient clans ses -États, communiqua aux Galhaj son vif désir de..voir . nommer au siège vacant un jeune Grec ,'Christophoros. Les'doges se rendirent à ces instances et firent agréer du synode na-tional la promotion du candidat. Ce choix souleva ' uuevivc op-position chez les Jesolaniens elles chefs dit frank. Saisissantcette occasion d'exercer ses droits de métropolitain et de montrerson dévouement aux intérêts de Charlemagne, le patriarche deGrade, Giovanni, lança l'excommunication ontre lés doges etrefusa de reconnaître l'élection. Ceux-ci répondirent à leurs en-nemis pal- des mesures énergiques. Giovanni GalbÀio envoya -sonfils, le jeune Maurice, qu'il s'était associé, assiéger Crado. avecdes forces- considérables. Grado fut pris et le patriarche précipitédu haut. d'une tour. Une sorte de terreur régna à la suite de cettecruelle exécution.

Mais une réaction se manifesta bientôt en faveur de la victime.Contraints de donner satisfaction aux sentiments populaires, lesvainqueurs laissèrent porter ait For-tunato, neveu (leGiovanni. Le nouvel élu n'eut qu'une passion venger son ondé.L'inondation -des làguncs, qui suivit de près -accrut, encore Je mé-conlenternent:Fortnnatd crut Je moment venu d'exécuter ses pro.jets. Il ourdit avec plusieurs chefs de familles tribunitiennes uneconspiration contre les Galbaj. Les -Fi-aiks devaient aider à les-reuvêrser, mais le complot fut découvert à temps. Les doges en-voyèrent contre Grado une nouvelle flotte. - Fortunato fut obligéde prend re la-fuite.avec ses ' complices Ohelerio, tribun de Mala.mocco, Felice Tribuno, Demetrio Mariniano, Gregorio et un cet'--tâin nombre d'autres nobles Vénitiens.

Les conjurés se retirèrent à Trévise où ils continuèrent leurs

Le récit qui va soi vi-c est tiré-des Chrnniucs de Dandolo ('I. Vif, eh xii,xiii, xiv, et J. Vit!, eb. i, p.-'h3-i66) et de Sagoniinn. (À1. Marin, 1. 1,p . 2 6-260.)

C'est-à-di 'e dc hivoalto 011

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- 18 -intrigues. Leur chef, Fortunato, alla trouver Charlemagne à Saliet mi t son parti sous celte protection puissante. 11 lui représentaiesGalbaj comme les instruments de la politique byzantine etlesennemis déclarés des Franks. En même temps, ]es conjurés quiétaient demeurés à Trévise proclamaient doge Obelerio, tribun deMalarnocco. Débordés à Venise même par un parti qui ne-cessaitde.grandir et qu'ils renonçaient à comprimer, les Galhaj abandoti-nèrent le champ de bataille. Ils se retirèrent- à Mantoue et lais.sèrent Obelerio maitre du gouvernement (Soir). Ils- auraient vouludisputer à leurs adversaires le patronage de Charlemagne; muais,convaincus bientôt que la place était prise, ils s'adressèrent k leurallié naturel, Nicéphore', et, comme la première faction avait-demandé l'appui des Franks, l'autre, vaincue à son tour, appelales Grecs.

La rivalité sourde du parti frank et du parti byzantin éclataitdonc au dehors et -allait mettre aux prises les deux empires.Venise semblait être le prix de la lutte entre Nicéphore et Char-lemagne. -

Les F.ranks, aS'ant pour eux Obclei'io, son frère. Beato et For-tunato rétabli sur son- siège, obtiennent d'abord l'avantage. Lesdoges paraissent même décidés à faire de leur patrie une-provincefi-anIse. Une conspiration dirigée contre leurs projets ne réussitpas. En 8o5, Obeleriô et Beato, le duc et l'évêque (le Jacl-ra, dé.putés dalmates, allèrent trouver Charlemagne. D'aprèslEginhard,l'empereur auriit réglé les affaires de Vénétie et de Dalmatie, etpeut-être accordé aux doges une sorte d'investiture 2 .- -

Mais, si les chefs de la république étaient d'un côté, la nationtout entière était, de l'autre. Tant qu'il- ne s'agissait que d'unerivalité entre deux factionsamies, l'une clés l'autre desGrecs, le désaccord était possible. Les Vénitiens pouvaient êtregagnés à l'une ou ramenés à l'autre par les intrigues heureuses desvaindus, par les excès mêmes des vainqueurs. La réaction contre

I Lin pereurde8o à Bu.- --Éginhard Venerneit Wilieri et Beatus, duces Venetim, nec non, et Paulus,

duix Jadra, at4ue Donatus , ejnsdem civitatis episcopus , legati Dalrnat.icornm , miprsentiam imperatoris dum ma-ris donis. Et facta est ibi osxlinatio ah imper-1-tore de ducibus et populis tain Vençtiam plain Daln,atise. s [Ami. Bob. Ap Du.clueine, t li, p. 253. Cf. Annales FÇ-ancoi-,,,n ouetio,-eç, ibid. P. 20, CL A,inaks

rerrun Pro neorunu (incei-tisauetorihns) , ibid. p- 43.]---

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- 19 -de cruelles vengeances empâtait les amis des Grecs, élevait lesamis des Franks. Lorsque la question se posa entre la dominationfranke .et la suprématie byzantine, les Vénitiens, .à l'exception dequelques meneurs, furent unanimes. Tous les témoignages con-cordent â le prouver. Dandolo assure que les Vénitiens étaient dé-voués en niasse à la cause de -l'empire grec 1 . Le pape lui-même,un ami de Charlemagne, reconnait le fait dans une lettre à ceprince. Léon 111 dit en parlant del'exil de FôrtunatoIl o fuidevant ],a des Grecs oit Vénitiens 2

Jamais sentiments ne furent plus naturels et plus justes. Quereprésentait polir les Vénitiens l'alliance franke La perte assuréede leur indépendance, la soumission à un prince aussi redoutableque malveillant pour eux. Ils n'oubliaient pas que Charlemagneavait chassé leurs marchands de la -Pentapole, où les empereursd'Orient les avaient admis si largement et dotés de précieusesfranchises. Ils avaient devant eux l'exemple des Lombards, detant de peuples qui avaientsuceombé sous les coups du conqué-rant et qui étaient venus se perdre dans ce monde germanique,moins digne pour Venise d'admiration que 'de mépris. Ne pou-vantffint armer absolument son indépendance, obligé d'arborerle drapeau de l'une des deux monarchies qui se partageaient lachrétienté, ce peuple courageux se rangea sous la bannièregrecque; elle signifiait pour lui le développement de sa rospé-rué cohmei-ciaie, l'exploitation prochaine d'un empire immenseet dégénéré, le maintien de sa nationalité sous une, suprématiequi devenait souvent protectrice sans jamais cesser d'être inof-fensive. Telles sont les causes (lui expliquent l'attachement desVénitiens à cette alliance, leur fermeté inébranlable devant lespromesses ou les menaces de Charlemagne, et jusqu'à l'héroïsmedéployé pour des amis qui • ne méritaient guère de l'inspirer àpersonne.

Lorsque le doge Obelerio et ses collègues prêtèrent hommageau maftre (lc l'Occident, la cour de Constanlinoplé ne tarda pasà s'émouvoir. 'Dans le traité. conclu en 802 entre Nicéphore etChai-les, Venise avait été laissée aux Grecs, bien que la Dalmatie

Vencui, qui Conslanlinopolitano impei-io totaliter adhoerere videbanLur. »Cure,,. p. 153.)

«Pi-opter persccutioncrn (' rrccorum sen Vcnet.ioorum exsil esse dignoscitiir. o(. Raronios i. X (V, p. 389. ) ,-

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-20-- appartint aux -Fianks 1• L'empei-euid'Oriènt vit donc dans la ré-

ception -d'Ohelerio une sorte de rupture. Bien renseighé sur lesvéritables dispositions de la majorité des Vénitiens, il résoidt de,les faire éclater par une démonstration maritime.maritime. Il envoya dansl'Adriatique fine flotte commandée par le pati'ice 2 .Nicétas 3 A' sonappéoche,- les villes de la Dalmatie, nu, instant détachées deletnpire, rentrèrent dâns l'ordre. •A Venise, l'arrivée de 'Nicétascausa une. véritable révolution. Le ph'rti grec s'enhardit; le pei-pIe, mécontent du gôuvernernent, fit hne ' opposition -menaçante.Les doges se trouvèrent alors dansle plus'grâncLembarras. Inca-pables de tenir.téte à l'opinion publiquç étaux forces -maritimesdu patrice , ils prirent -la prudente détermination •(le céder, aucourant'populaire. Un d'eux, Bello, avait eu une secrète inclina-tion pour les Grecs,Le moment était venu de la 'déclares-et deforcer la main à' son oncle. Ohelerio déserta- l'afliance des'Frnks.L'avehir "prou\ra quecette conversion n'était pas sincère, niais cbrusque revirement chez le chef . du 'parti contraire 'montre laforcé de. l'inlhience byzantine mieux 'encore que n'eût - pu faireun changeihent dspersonnes car on il y saurait voir antre chosequ'un- honimage forcé des gouvernants à"u'ne opinion' prequeunâni in e.

Nicétas fut reçu avecientiiousiasni& Devant ces manifestations,le patriarche Forl;unato'.'se résigna il s'enfuit ne seconde fois etse retira'en France. A la suite de longues - délibérations, les Véni-tiens conclurent un traité avec Nicéphore. La république promet-utit de garder fidèlement la neutralité qui avait été reconnuequelques années plus tôt par frêne et Chai-lemigne. Le doge Beatoirait lui-même à ' Constantinople assurer l'empereur (le son dévoueLment. On avait décidé que l'évêque Chrittophoros, le tribun Félixet 'd'autres personnages seraient 'remis à l'amiral, et que ces ôtagesrépondraient de la sincère exécution du traité. Quant ait

des doges Gaibaj, que Nicétas avait réélamé, la république-Atquc Dalinatiam exceptis maritirnis civitâlibus quas oh arnicitiam et. m ue-

tom cuva co Foedqs -constaniinopolitanusis imperatorem hahere. pennisit.. (Eginhardus, Vira Koroli Mogni, op. Duchesne, historia Yraacorrznt Scripiorcs, 1636,

t. 11, p. qg).— CF. Paulus £mi!ius, trad. française, Paris, s 498, p . i,8.Le pati-iciat était une dignité élevée et donnée,-dans l'origine li cclix qui

avaient rempli toutes les charges et 'étaient arrivés au sommet de la l,iéi-ai chieadministrative (Voy. plus loin, eh, vit, p. 43A.)

Annales Froncer,,,,, (Éginhard), ann. 8o6 , a l ). Duchesne, i. If, p 253. -

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— 21 —necondescendre à cette demande sans violer sa propreconstitution. Le pairice.céda sur le dernier point; il conféra uléaneà soit adversaire Obelerio la dignité dé tpwToraûdpsos1,.au nom de Nicéphore, et partit avec Beatô elles otages..Nicétasn'avait pas rétabli les doges grecs mais il avait grécisé les dogesfranks. C'était pdur la politiqué de son maître une plus grandevictoire.

Cependant les intrigues patientes de fortunato préparaient unelutte plus 'vive. Satisfait de l'hommage qu'il avaitreçu,Charleniagnen'était pas encore décidé à intervenir. Pour intéresser davantage-les Franks aux affaires de Venise, Fortunato.proposa à Pépin, roid'Italie, la . coûquéte des villes maritimes de la Dalmatie. Il luipersuada de demander aux Vénitiens leur concours c'était mettrela république en demeure de rompre avec l'empereur d'Oiientsouverain légitinie de la Dalmatié. De son côté,Beato ne restait pasinactif, à Constantinople;*onstantinopie; il décida Nicéphore à envoyer de nouvelles forces aux Vénitiens. Avant que les projets de Pépin eussentété, divulgués, deux flottés parurent, l'une clans lamer Tyrrhé.nienne; où elle prit et dévasta Populonia , l'atre'dans l'Adriatique,où elle rçut un renfort de Dalmates et de Vénitiens. La premièreétait commandée par le patrice Nicétas, l'autre par Paul Cesphe-i-anos, préfet de Céphallénie. L'amiral grec hiverna à Venise (809)2,Au printemps, il fit une tentative sur Comaechio. D'après certainschroniqueurs, une bataille navale se serait engagée entre les Frankset' les Gréco-Vénitiens, sànsl que des témoignages contraires per-mettent d'établir de quel côté aurait été la victoire.' La mésin'telLligence ne tarda point à se manifester, entre 'Cespheranos et Ohe-Jerib.; celui-ci .cberchait,tous' les moyens de refuser aux: Grecs laflotte auxiliaire que le peuple avait décrétée; il fit échouer leursnégociations avec le roi d'Italie. L'amiral se retira sans avoir atteintle but de sa mission. Presque au même moment, Beato revenaitde Constantinople avec le titre •(le tS 7rog; il se mit à la têtg duparti grec, et la discorde fut bientôt, en permanence dans le gou-vernement. Ville ,ntino;.un troisième doge'qu'on adjoignit aux deuxautres, ne réussit pas à les réconcilier.

Hperoctaûdpios, le premier des spathaires (ndoœ, major gladius), grandécuyer, si toutes les assimilations de ce genre n'étaient pas à côté cic:la vé,'ité. Sun'celte question diflicile des dignités byzantines; voy. notre cli: vii, P-

Anp,ates F,ancor,,,n, non. 809, ai). Duchesne,, t. :11, p. 255.

rr.

(:iiLluTH È)t

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22 —Telle était la situation deda république lorsque lui parvinrent

les offres de Pépin au-sujet de la Dalmatie. Jamais propositionplus.insidieuse ne lui avait été faite. Accepter, c'était perdre lesavantages dus à une vieille alliance, compromettre les intérêts et.peut-être la vie de tant de concitoyens répandus dans l'Orient,tarir une source abondante de richesses. Mais le refus semblaitplus dangereux 'encore il allait provoquer un souverain 'qu'onn'insultait pas impunément, sacrifier des intérêts presque aussiiportatts que les 'autres en amenant l'expulsion .des Vénitiens quitrafiquaient dans la 'vaste monarchie 'de Charletagne; on verraittoutes les bouches des fleuves de la Vénétie £erméespar des forcessupérieui'es, Ravenne elle-même armée conù-eson-antique rivaleet le faible État vénitien exposé aux derniers hasards. -Malgré lagravité du péril, la 'proposition de Pépin fut rejetée.. Un ambas-

u sadeur 'alla lui 'exposer l'obligation où se trouvait la républiqued'observer .ses anciens traités avec l'empire grec, et l'assurer deson dévouement toutes les fois que l'honneur et la foi jurée ne s'yopposeraient pas.. Selon (Vautres, fatigué d 1 attendro la réponse 'desVénitiens, Pépin rompit les négociations et envoya une innom-brable armée de Lombards attaquer leur. pays.'

La fermeté 'des Vénitiens fut admirable. Après les prières pu-bliques , les jeûnes, les auniônes et autres démonstrations reli-gieuses, ils commencèrent 'de sériêux préparatifs de défense. Ilsavertirent leurs concitoyûs établis en Occident de se mettre ensûreté; ils envoyèrent à Constantinople demander des secours; ilsfermèrent l'entrée des canaux', fortifièrent les principaux passagesde terre et attendirent ' bravement l'ennemi.

Cependant Pépin mai-chah contre eux (il' entraînait 'avec luiles gens de Rimini, de Comacehio; de Ferrare,de Ravenne, tousrivaux. des Vénitiens, heureux de leur porter le coup fatal. Le roid'Italie s'empara' facilement de toutes les terres ;-il prit même,après de grandes difficultés, quelques îles ainsi que les ports deBrondolo',,Chioggia et Palestrina. Ici les versions diffèrent; ce quiest certain, c'est'que Pépin 'ne réussit-pas dans ses projets,et queles Vénitiens résistèrent dans Rialto 2. Mais leurs chroniqueurs na-

1 Brondolo, plage en face dela' grande île de Chioggia. Palestrina est à peu ddistance de flronclolo.

D'après les conseils d'Angelo Partecipaaio , ils ti'ausportèrent toute la popu-lation dans B alto et abandonnèrent Malarnocco.

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tiouaux vont plus loin. Les Franks auraient épouvé une défaitetotale, et le règne dc Charlemagne devrait enregistrer un seconddésastre de Roncevaux.- -

Maîtresse de Malamocco, l'arjnée.frankc s'était engagée dans legrand canal pour attaquer Rivoalto; mais les Vénitiens s'étaientplacés en face d'elle pour mettre l'île à l'abri d'un coup de main.Le vent, l'inexpérience des lieux, le nombre excessif des vaisseauxde l'ennemi, tout conspirait à sa perte. Les Vénitiens l'attirèrentau point le plus étroit du canal afin d'y tenir tête à des forces su-périeurès. L'avantage de leur positionles enhardit: ils tentèrentune vigoureuse attaque contre les embarcations frankes. Celles-ci,.surprises, reculèrent. Les marais voisins leur devinrent funestes.La retraite de l'avant-garde porta la confusion dans le reste de laflotte. Réduite parle désordre mênie àl'incapacité de se mouvoir,elle tomba presque sans défense sous les coups des Vénitiens; Lemassacre fut général et les vainqueurs, -excités par le fanatismenational, rougirent du sang français.les eaux de leur grand canai,à qui cetteterrihle extermination aurait fait donner le nom decanale Orfano 1 . Pépin se saura avec quelques-uns des siens surun point voisin du littoral, voyant ses forces entièrement dé-truites. Et, comme le clifsagornino, Dieu donna aux Vénitiensune victoire complète sur leurs ennemis..

Les annales des Franks nient complétement ces faits. Les autreschroniqueurs 4ela mémè origine et du même parti ont reproduitles exagérations. d'Eginhard. Pépin aurait triomphé et forcépeuple orgueilleux à reconnaître les lois de l'empire'.

Un troisième récit, celui des chroniqueurs byantins, noussemble rejeter les illusions nationales des deux autres et concilierdes témoignages contradictoires. Le roi Pépin marcha contreles Vénitiens avec de grandes forces; il s'établit sur le Continent,près du passage des îles vénitiennes qui s'appelle Aibolas (Albiola).Les. Vénitiens, voyant lent adversaire prêt à occuper avec .deschevaux l'île de Malamocco, voisine du continent, barrèrent lepassage en y jetant des vergues. L'armée'franke, arrêtée par unobstacle insurmontable, se vit assiégée pendant six mois par les

De ôpavô..' Éginhard, ami. 81 o, ap: Duchesne, t. If. p. 256 Suhactque Venetia, ac

ducibus çius in dcditionern accept.is..o [Cf. Annales- renie, Prancoru,,, (inceriisnuctoribtis). Ap. Duchesne, t. H, p 47]

Fi

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- 24 -Vénitiens, a'ec lesquels elle -avait chaque jour des engagements.Ceux-ci, du haut de leurs navires, se protégeaieit derrière lesvergues qu'ils avaient jetées. Pépin et son armée. se tenaient surle rivage. Les Vénitiens, lancant des flèches- et toute sorte detraits, les empêchaient de passer dans l'-11e. Pépin, à bout demoyens, leur criait : Vous- êtes nies sujets, car vous êtès demon pays et de mon empire. o Ils, répondaient.: o C'est àl'empe-reur des Romains que nous voulons obéir; 'à toi, jamais. Cepen-dant,- las de se voir harcelés sans cesse., ils furent contraints defaire -la paix avec Pépin, ils lui promu-eut des tributs considé-rables, qui furent diminués chaque année à partir de celte épo-que, quoiqu'ils subsistent encore , aujourd'hui. Cette, républiquepaye au roi d'Italie .ou de Pavie un tribut annuel de 36 livresd'argent non monnayé. C'est ainsi que se termina la guerré entreles Vénitiens et. les Franks 1 - -

-- Ce récit a tous les caractères de la vraisemblance. Les Vénitienss'opposent héroïquement au passagede leurs canaux et empêchentl'ennemi de^débarquer dans leurs îles. Pépin les bloque à Rialtosans pouvoir les atteindre; les deux partis, fatiguésd'bne longuelutte; en viennent -à - un arrangement. Tous ces faits sont dans lanature des choses, dans les -données historiques de la situation.Quant au tribut que subirent les Vénitiens, malgré leur heureuserésistance, ce peuple,. pratique avant tout et très-marchand, n'yattzichait aucune idée .d'humiliation. Plus tard nous le -voyonsacheter, au prix d'une contribution annuelle-, la sécurité que son,commerce réclamait dans l'Adriatique. il eût pu réduire les pi-rates qui infestaient ces parages; . il trouva moins coûteux de lesdésintéresser. Il aura de même, au ix' siècle; -désarmé le puissantroi d'italie en lui- payant la reconnaissance de son autonomie etde ses franchises. --' -----

Une flotte, commandée par Cesphéranos, approchait des rivagesde la Vénétie. Pépin mourut h Milan -à ce moment même. Uneambassade grecque avait ouvert avec lui (les négociations qu'ellecontinua avec Charlemâgne, et -qui rétablirent la paix entre les

Cor.stanli,i Porphyrogénète JJspldpis, xe?A2cov c, dirop1a.o ov ôJT,nîvo g ehe cpàs zO'.)e Brvcr/xous d-r, t' iro Tv dtz,r XCTP Œ oce wpdvov yivec,Oe,iregâ, d,rè -,Ø, dzÇe kchpa, ù2 docwiaç È1é oi âè Bsa'rç,00 d,),é).t2-ov d'h du,peFg âorÀo, $-éÂo1zrv zive, TOU Roù. éwso o,coG. (Éd. BonntIF,J'. 1211.) . -

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- 25 -deux États. Le traité de 8iô renouvela, en le précisant, celui d802. L'empire grec stipulait au nom de la république, dont ilétait le protecteur et le représentant. C'est àNicéphore que lesFranks restituaient les franchises des Vénitiens; c'est à lui queCharlemagne rendait Venise. Obelerio, abandonné par les Franks,fut relégué à Constantinople. L'influence byzantine triomphaitau dedans comme au dehors..

Ce traité portait les plus heureuses promesses pour l'avenir. Ilinaugurait la forte neutralité qui & préservé la reine de RAdria-tique de tant de crises où les petits Etats. succombent. C'est pal'le maintien de cette politique qu'elle échappera pendant huiisiècles à tant de chances de ruine. C'est à un précieux isolementqu'elle devra le développement et l'originalité de ses institutions.Qu'on cherche dabs tout l'Occident, on, ne trouvera pas (l'autrepays qui soit resté pur de Ï'invasiozÇ au yû siècle et de la conquêtefranke au viii'. Partout les Germains ont pénétré, un peu plustôt, un peu plus tard; partout ils ont dominé ou laissé quelquestraces durablés de leur passage. Les cités mêmes qui ont con-servé, au moyen age, les institutions municipales de Rome, ohteu à subit', pendant une période plus ou moins longue de leurexistence, le poids de quelque monarchie barbare ou issue de labarbarie. Celles qui n'avaient pas connu les premiers envahiseurs -n'échappèrent ni à Char]emagne, ni au régime qui lui succéda,c'est-à-dire à la féodalité. Ce système a régné jusqu'au xv° -sièclesur l'Europe entière. On le retrouve à l'otigine de toutes les na-tions actuellement florissantes, et c'est sur ses.ruines que se sontélevés les gouvernements modernes; Seule Venise.resta mie sorte•db terre vierge et de monde à part. Le jour où elle fut déclaréeindépendante de l'empire germanique décida, de sa destinée.Charlemagne à Venise, c'étaient, pour cinquanteans; les ducsimpériaux, les missi dontinici, fadmin jstration, grossière encore,mais intelligente du conquérant; c'étaient aussi, pour cinq à sixsiècles, l'anarchie féodale, les guerres sans fin, les violences,

o Venetioe urbes, quz in devotiohe imperii (-d'Orient) illihala pers lit .cran t, abionperio occideutali nequaqioam cleheant molesuori, invadi .vel minorari. (A. Dan-rlolo,p. 155.) . .. '

2 « \' enctia m Nicephoro censuil i'eli ait umcnda. o (Daoido!o,p. o58. )—Éginharddi i. mêmeo Nicep1ooro \'cnei i 1m reddidi I. » ( Ana. 81 o, n p. Ducjiesne, t. -IlP. 256)

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- 26 -la misère, l'ignorance, l'immobilité dans le désordre. Si elle n'atraversé ni ce régime destructeur, ni la série des révolutions po-litiques qui ont transformé tous les pays de l'Europe occidentale,sans en excepter le reste de l'Italie, si elle n'a connu ni royauté,ni féodalité, ni communes, si enfin son gouvernement, présenteun caractère unique clans l'histoire moderne, un développementrégulier dé treize siècles, elle le doit aux événements qui l'arra-chèrent à la main puissante de Charlemagne, h l'empreinte ger-manique et féodale dont ce redoutable organisateur allait marquerl'Europe entière. L'honneur en revient aux Vénitiens eux-mêmes,et, après eux, aux empereurs grecs qui les défendirent avec une

.constance victorieuse.On doit donc attribuer une part considérable aux héritiers de

Constantin dans la fondation et les premiers développements dela république vénitienne. Justinién l'a sauvée au temps des Goths;

• ses successeur, au temps des Lombards, en- combattant les roisbarbares qui devaient l'étouffer au berceau. Justinien II et Léon 111l'ont enrichie des dépouilles ck liavenne, leur capitale italienne.Nicéphore -lui a prêté -contre Charlemagne le secours de ses flotteset (le -son influence diplomatique. Les Césars byzantins l'ont laisségrandir inaperçue sous leur protection-; et, quand l'heure est ve-flUC 1 ils l'ont produite au jour en faisanttreconnaître son indépen-dance. Venise, de son côté, resta leur alliéefidèle pendant, cettelongue période. Elle aidaà la conquête de l'Italie-par Bélisaire,elle soutint la domination chancelante des exarques, elle ramenatriomphant dausfiavenne le -vicaire impérial qui était venu luidemander asile. -Dès l'origine elle accepta la suprématie et - lesusages byzantins. Elle vit d'un bon oeil ses chefs suprêmes recevoirles dignités auliques et prendre rang dans l'aristocratie de Cons-tantinople. Enfin, lorsqu'un ennemi redoutable lui proposa detrahir ses alliés séculaires, elle ne craignit pas d'affronter les périlsd'un: refus et d'une guerre où elledevait succomber. Défendantavec héroïsme une alliance -qui représentait pour eux l'autonomiesous un utile protectorat, les Vénitiens rendirent à l'empire grecun glorieux témoignage le jour où, Pressés jusque: dans leurs liespar une nombreuse armée, ils répondit-en-t aux sommations (lu filsde CharlemagneCe n'est pas à toi, c'est à l'empereur des lb-mains que nous voulons appartenir.-

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—r 27 -

CHAPITRE II.

TROIS SIÈCLES D'INTIME ALLIANCE.

Avec le règne de Nicéphore finit le protectorat byzantin surVenise naissante. De Nicéphore à Manuel Comnène s'étend unepériode nouvelle. Malgré les témoignages rie subordination donnéspar la république aux empereurs, on voit deux Etats.indépendanlsqui traitent librement de leurs iitéréts réciproques, qui s'envoientde fréquentes ambassades, s'unissent contre le même ennemi. LesVénitiens mettent leurs llot.tesau service de l'empire, CI. entre-prenfient, pour son compte, toutes les guerres maritimes dont ilest affligé. En même temps celui-ci ouvre un champ immense àleurs afflires et à leur activité; il leur ouvre ses ports innombrables,et leur presque tout le commerce de l'Orient. La vieillecivilisation ' byzantine, moins stérile qu'on ne l'a dit, pénètre aufond des lagunes et transforme Venise par l'influence de Part, desusages, de 'in religion. Les liajclis marins qui vont dans les pa.rages de la Grèce et jusqu'au fond de la mer Noire porter lesprociuits• . de l'industrie nationale et les denrées de-l'Occident nechargent pas seulement les marchandises de la lkomànie, de laPerse ou de l'Inde; ils rapportent également quelques débris deFart grec ou byzantin. Ils mettent au, fond de leur navire un bas-.relief, une colonne antique, et chaque, voyage sert à l'ornementde Venise comm. -au développement 'de sa richesse. L'espritmercantile,-mais religieux, de la nation se tourne- aussi versd'autres trésors, les plus précieux aux époques de croyance. Lesreliques des saints d'Orient excitent en elle une pieuse avidité,qui -les disputera au culte jaloux des Grecs ou à l'ombrageuxmépris des musulmans.

La civilisation gréco-vénitienne se ressentira sans nul doute deseffets d'une imitation constante et parfois servile. HOflQrOEIil d'unevéritable superstition le pays de leurs spéculations et de leurscourses, ces marchands, qui étaient souvent des corsaires, onttout saisi, sans tout comprendre ni tout respecter. .Pour euxrien qui ne fôt de bonne prise denrées-, colonnes, statues, re-liques, >coutumes, mots et formes mêmes du langage. De 'là cetentassement un peu étrange de marbres arrachés à l'Orient:, cci.engouement pour des saints étrangers, ce faste imitateur de Cons-

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- 28 -tantinople ., ces modes empruntées, ces termes niai entendus, ceslocutions mal comprises et transportéès violemment du grec dansJe dialecte national. Mais Venise n'en a pas moins la gloire d'avoiréchppé à ces ténèbres profondes où des villes, aujourd'hui sa-vantes,- sont restées ensevelies. Cette dette, contractée envers laGrèce dû moyen âge, n'est-elle pas écrite sur la Place merveil-leuse qui a été le forum de Venise et esLencore son incompa-rable salon? Les centaines de colonnes qui soutiennent ou quidécorent l'église nationald ne viennent-elles pas en grande partiede l'Orient? Les coupoles. que l'étranger aperçoit de la mer des-rière la façade du palais Ducal ne sont-elles pas une imitation (lePart byzantin, l'oeuvre peut-être de ûiains byzantines? Et n'est-ce Pas dans une illustre rnélrôpôl6 de l'église grecqué que les na-vires vénitiens sont allés chercher les restes prédieux de saintMarc, patron vénéré de. la -république; dont il p'ersoinifié 1apuissance?

Le premier fait qui atteste l'intimité croissante des Grecs et désVénitiens au ixe siècle, c'est la régularité de leurs rapportsdiplo-matiques. L'aVénement d'un empereur ou d'un doge fournissait àVenise l'occasion (t'envoyer un repî-sentant à Constântinople, soitqu'elle eûtà féliciter le nouveau prince, soit qu'ellevonlùt noli-Der au prince régnant l'électioh (le soit presquetoujours l'ambassadeur était: le fils même du doge. Ces relationscommencèrent au lendemain -du traité qi avait terminé si glo-rieusement la lutte avec Charlemagne. Le successeur d'Obeleio,Angelo Partecipazio (812-827) enoya S OI' Giustiniano com-plimenter Léo'n l'Arménien (8i 3)], Quand celui-ci fut remplacépar Michel et Théophile, le même (loge leur adressa son petit-fils Angelo; qui-avait épousé une femme grecque (821) 1 . Le fils'd'rso Partecipazio II (g i.2-932) 3 et celui de Pietro Candiano Il(932-939) allèrent féliciter Constantin et Alexandre. Tous cesprinces reçurent au lendeiain de leur avénement un amba'ssa-deurvénitien du plus haut rang. Si, dans certaines circonstances,

Dandolo, Chron. p. '6â, et Caroldo, I. H. • -Dandolo, CAna, p; ' 6 7 . l-lis 'enim imperio snblimatis duces Vcnetiaruui

Ange] cm Gi,,stioiani natum , cui nobilis foemina , flomana nomine, uxor eraf,Iogationis causa Consianti nopol im dircxcrunt.

Dandolo, Glu-ou, 1).98, et Caroldo, I. II, --Dand olo , Glu-d,,. p. 2O ----

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iiii fils. ou un collègue du doge n'est pas venu à Consiantinoplerendre hommage à de nouveaux souverains, c'est que la répu-blique aura eu quelque empêchement bu quelque raison de s'abstenu- I

De leur côté, les empereurs aimaient à reconnaître les égardsqu'on leur témoignait. Rarement l'ambassadeur vénitien partaitsans recevoir une marque de leur estime et de leur bienveillance.A défaut (les grands cordons qui sont clelmode à notre époque, ilobtenait, un de ces litres pompeux si recherchés des Occidentaux.C'était la monxaie dont Byzance aimait à rembourser les sub-sides. Elle eût bien voulu n'en pas dépenser d'autre; mais l'ohs-I.ination patiente de es alliés l'obligera à des contributions plussétieuses. -

La dignité de consul (hraro) 2 est la première en date. Nousl'avons vue décernée trois fois avant la période qui nous occupeau troisième doge, Orso Hvpato (727), à un midtre des soldats,Gioviano Cipario (737), à un. collègue de doge ? Beato (8o4).Guistiniano Partecipazio la reçut, à Constantinople, del'empereuLéon l'Arménien (813). La dignité in plus fréquente aux if etf siècles est celle de protospaihaire 3. PietroTradonico l'obtint du patrice Théodose, qui vint la lui conférerà Venise (BIt t); OrsoPartecipazio, des mandataires de Basile 1cr&dont il avait épousé ta petite-fille. Pietro Tribuno en fui honoréaprès sa -grande victoire d'Albiola sur les envahisseurs hongrois.Le fils de Phrtecipazio 11(912)-et celui de Pietro Candiano il(3) altèrent la chercher sur le Bosphore...- L'empressement des doges et des fils de doges, la libéralité desempereurs, provenaient de plusieurs causes. II y avait des cieuxparts beaucoup de vanité, mais encore plus de politique. Les unsconservaient à peu de frais un air :de protection et une influenceréelle. Les antres, eh revétafit des dignités étrangères et monar-chiques,. donnaient à leur autorité une nouvelle consécration. AVenise, ils imposaient au peuple; ail dehors, ils inspiraient lerespect et parfois l'obéissance à certaines nations qui restaient

Marin, t. 11. p- 4- 15.Voy. plus loin ch. vti,p. '33, 13Ibid.t Ursss , dux Venctiarum , 1cr apociisarios l3asilii Imperatoris protopat1 latins

effeclus , -rnagn k et [am ninnerillus dilatas est. i, (DAndolo , p. 18.)

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- 30 -encore sous la dépendance nominale de J'empire. Les peuplesrépublicains se prennent parfois d'un véritable engouement pourles-dehors monarchiques. Quand le jeune lits de doge revenait deConstantinople avec un titre et une sorte d'investiture impériale,la faveur populaire lui était acquise, comme si l'honneur qu'ilvenait d'obtenir eût rejailli sur la république entière. On lui recon-naissait une sorte de. caractère public: il semblait qu'après celteprise de possession il lui fût impossible de rentrer dans la vie -pri-vée. Jaloux de perpétuer le pouvoir (jans leur famille, les dogessaisissaient cette occasion. de s'associer leurs fils. Le peuple, pen-dant plus_de deux siècles, ne fit pas opposition, et laissa la magis-trature suprême de la république -usurper, à la faveur et à l'imi-tation de l'empire grec, le plus important privilège de la royauté.

L'association des fils de doges au.pouvoir devient-très-communeaux ix° et f siècles. Cette coutume âvait commencé au vin e, avecles Gaibaj et les premières ambassades qu'on eût envoyées sur leBosphore. Elle se répandit- aux siècles suivants avec l'usage plusfréquent de ces ambassades. Les deux faits se tiennent à tel point,que tous les- fils de doges associés à leur père ont été préalable-ment revêtus d'une dignité 'byzantine. Angelo Partecipazio avaitd'abord appelé au partage (lit son fils aihé; Giovanni.Mais quand le second, Giustiniano, revint d'Orient avec le titre de£7rrog, il réclama comme un droit la place de son'frère, et l'obtintsans beaucoup de peine, malgré la vive affection que le père por-tait à Giovanni. Giustiniano succède à Angelo. Il s'associe à sontour Giovanni qu'il rappelle -de Constantinople, et qui devient,deux ans après, son successeur. Malgré la primauté d'âge, Gio-vanni n'a régné que le second ,parce qu'il .-n'a été que le secondà Constantinople.

La capitale de l'empire grec commençait à -devenir, pour lesVénitiens, une seconde -patrie, hospitalière dans les- bons commedans lés mauvais jours. Si elle recevait les fils de doges dans toutl'éclat d'une ambassade solennelle, elle était aussi l'honorableséjour de leur exil, le refuge destiné aux-victimes de l'ostracismevénitien. Chassé à l'époque de l'invasion franke et abandonné parCharlemagne, Obelcrio fut relégué dans cette ville. Il y vécuttranquille et la cour n'inquiéta pas ce chef d'un parti ennemi desGrecs. Giovanni, fils d'Angelo, y fut renvoyé, à son tour, lorsqueson fi-ère Giusliniano , venu de la même résidence, alla Je i-cm-

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- aL -placer auprès de son père. Cet éloignement né paraît pas lui avoirfait tort, puisque sonfrère lui-môme le rappela à la mort d'Art-gelé, et l'associa au pouvoir; Obelerio n'en dût l)5 souffert nonplus, s'il n'eût cédé aux conseils (le l'ambition. Voulant reprendrepar la force l'exercice, de l'autorité, il choisit, pour y réussir,l'avénement même de Giovanni, 'qu'il avait pu rencontrer et con-naître clans son exil. Mais le nouveau doge fut impitos rahle enversson ancien compagnon. Après une lutte qui resta quelque tempsincertaine, 'Giovanni s'empara -d'Obelerio et le fit décapiter auxenviions de Mestre . Les exemples de doges déposés qui furentrelégués à Constantinople et qui en revinrent, soit d'eux-mêmes,soit à la suite d'un rappel, ne feront que se multiplier aux époquessuivantes.

Les relations étroites que les doges entretenaient avec le Bas-Empire ne servaient pas moins les intérêts de la république audehors que leur pouvoir politique à l'intérieur. 'Ils ne se ,co'nten-laient pas de porter chez eux les insignes de leurs dignités byzan-tines; ils mentionnaient celles-ci en tête des décrets et des traités.Déjà en 82g, Giustiniano s'intitule: Dax J'cnctiarurnalque Iiypaussinrperialis 2 . Dans le Codex Trevisani 3 , Orso Partecipazio se nomme:Unes, divinoJ'elius auxilio, irnperialis protospailiarius et VeneLiarum-dux. -Nous verrous les doges s'introduire, à la faveur de cette dé-pendance honorable, clans un pays voisin, la Dalmatie, longtempssoumis à l'empire, s'insinuer peu à peu dans l'affection des ha-bitants, plutôt comme vicaires impériaux que comme souverains,et faii-e concourir toutes les habitudes créées par les Grecs à Pavé.nementcI'une domination nouvelle.

Les successeurs de Constantin ressemblaient chaquejour davan-tage à des rois fainéants (lui ne sauraient défendre par-eux-mêmesune monarchie trop grande pour leur faiblesse. Les Vénitiens, endevenant leurs hommes daffaires, se préparaient à recueillir leursuccession. Aussi voit-on ces habiles marchands , multiplier leursmarques de soumission à l'empire,.en raison même de soit

Ils- acceptent sans répugnance les ambitieusesformulesdu cérémonial byzantin. Le nom du souverain, l'année de son

Mcstre, petite ville située, en face de Venue, dont elle est séparée par lalagune.

Tafel et Thomas, -Voiries rerrzm A rslriacorrrnr, 1. XII, p . 2. -A la Bibliothèque Saini .Marc.

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-à2 -règne, figurent en tète des actes publics traités intervenus entrela- république et les empereurs, déci-ets relatifs aux affairespo-litiques et commerciales de l'Orient I, lois ou documents d'intérêtlobai. Le compte rendu .d'unconcile présidé pat- le patriarche deGrado se termine par ces dots :!mperanec 2'ibcrio (]esara-Auçjusto2.

Mais un titre du f siècle est encore phis explicite. Une concessionde terre, faitepaf le dogé au monastère (le Saint-Georges, cm-meure ainsi • In nomme Dornini Dei et Salvatoris miei JesuChristi; anno ah incarnatione ejusdem Rédeiiiptoris uccccLxxxir,imperantihus cloni.inis nostris Basilic, et Contantino fratribus,filiis Romani, m.agistriset pacificis imperatorihus, anno autiin -imperii eoruni post ohitum Johannis Zimiskis undecimo, mensedecembri 3 . Il n'y, avait là qu'un acte de donation, et cependnt.on y râppelait -le nom des emppreurs régnants, l'année de leurrègne, la circonstance la plus grave de leur avéneiïrent. Venise nemarchanda jamais à l'orgueil impérial lessatisfactions peu coû-teuses -

Cette dépendance nominale dès Vénitiens contrastait singuliè-rement avec leur influence croissante. A ne voir que la lettre desdocuments, les- ambassades officielles, les collations de titres, onles croiraità la merci de lempirè. Si l'on considère attentivementles faits, c'est l'empire qui ne saurait se passer d'eux, et qui - léstraite en homnies nécessaires, -- -

Les plus redoutablesennemis de la monarchie byzantine étaien Lles Arabes, que le fanatisme nationalet religieux avait poussé,en-ijjojns d'un siècle, de la Meccju'e aux- bords de l'Indus, (le la-Mecque aux Pyrénées. Elle avaitperdu, avec une rapidité sur-prenante, l'Egypie, la Syrie, -une partie de l'Asie Mineure. Aucommencement (lu vin e siècle, les Mites - musulmanes parurenten vue de Constantinople, et plusieurs fois la menacèrent- d'uneruiiie qui semblait certainer Aux ix° et x' siècles, l'élan de la con-quête s'était ralenti, on plutôt l'activité -mes-veilleuse de la racearabe avait pi-is une direction différente. Tandis que les envahis-seurs de la Syrie et de l'Espagne s'adonnaient aux arts de la-paix,

Tous les actes cités pins loin rentrent dans celte catégorie.2 Patti, 1, p. 54, aux archives des Frari à Venise.

Parti, 1, p. 51. ibid. Basile et Constantin, fils de Romain II, Petits-fils deConstantin Porpliyrogéuiète , successeurs de jean Z i isiscés . non tèrent sur letrône 011

I

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- 33 -ceux de l'Afrique tournaient vers la mer, qui leur restait seule ou-verte, leur courage et leur esprit d'aventures : ils devinrent desmarins ou des pirates. Ils infestèrent les côtes de laProvence et del'Italie; ils conquirent les iles de la Méditerranée occidentale. Surce champ nouveau ils rencontraient non-seulement les Grecs,mais les républiques maritimes de l'Italie, contre lesquelles ils nepurent jamais prévaloir.

Les empereurs, en conservant Naples et la Sicile, s'étaient ré-servé une possession onéreuse. Ce fut une lourde tâche que de hdéfendre contre l'acharnement des Arabes. Michel le Bègue', dèsles premiers jours de son règne, envoya une armée en Sicile. Lafaiblesse des Grecs ne tarda pas à se révéler. Alors Michel eutrecours à ses alliés ordinaires. Giustiniano Partccipazio répondith cet appel et confia une flotte vénitienne au patrice Théodat uneseconde expédition aurait même eu lieu sur de nouvellés ins-tances de l'empereur. Toutes les deux échouèrent 2 -

Sous Pietro Tradonico (836), Théophile envoya le patrice Théo..dose demander encore assistance. La république hésita quelquetemps au souvenir des revers passés, et avec le vague.presscnlimentdes revers-futurs. Cepndaut les traditions et surtout les intérêtscommuns l'emportèrent Gagné par le titre de protospathaire (luelui avaiLapporté Théodose, le doge défendit et fit décider l'expé-dition. On arma soixante navires, montés chacun par deux centshommes. La flotte vénitienne s'unit à la flotte grecque. Mais lesuccès lui fut encoi-e refusé. Les Arabes, vainqueurs, pénétrèrentjusqu'au fond de l'Adriatique, et répandirent la terreur dans leslagunes. Ils parvinrent à Porto Hadriense 8. Ils incendièrent Ossaro,Ancône', et, à leur sortie du golfe, capturèrent un assez grandnombre de navires vénitiens qui revenaient de Sicile ou d'Orient.

Le règne d'Oso Partecipazio (86!i) commence à voir des joursmeilleurs. Les deux empereurs Louis d'Occident et Basile d'O-rient, unis par de liens de famille, avaient combiné une vigou-reuse attaque contre les Arabes. Ils informèrent la république•de leurs projets, et -l'invitèrent à s'y associer. Louis mit le siège

Michel le Bègue, premier empereurde la maison phrygienne régna de 82Dà Sag.« heru ru imperatore efflagitonte exercitiim ail Sicilianl praparaveru ut qui

él «oui rcvcrsns est sine tri uinplio. « ( Sagoruino , «q'. Marin, t. Jl , p. 22.)Emp aceine ni de V ail ci eu ne ïiadrui,

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- 311 -

(levant Bail, tandis que la floue grecque bloquait la ville parmer. En même temps la liane vénitienne rencontrait l'ennemi dansles eaux de Tarente, et remportait une victoire complète. Bari futpris (87 i) et les ennemis de la foi repoussés i• Mais les deux somverains cessèrent bientôt de s'entendre, cette ligue éphémère sedénoua, et la lutte avec lés Arabes fatencore à. recommencer.

Pour maintenir les Vénitiens dans une alliance aussi coûteuse,il ne fallait rien mains que l'intérêt de leur commerce. La fortunet l'avenir de la république étaient à Constantinople. Dès que les

réfugiés des lagunes purent affronter les périls d'une navigationlointaine, l'Orient vit apparaître leurs voiles. Du y0 an x° siècle, lacontinuité de ces opérations commerciales nous est attestée.par denombreux écrivains. Au temps de Théodorik, Cassiodore féliciteles Vénitiens de parcourir des espaces immenses. Ces mots, qui s'op-posent à l'Adriatique, doivent indiquer la- Méditerranée orien-tale. Liii siècle plus tard, l'exarque Longiq offre la protection im-périale aux Vénitiens qui trafiquent clans les environs d'Antiocheet- (tans tout l'Orient. Au temps de Charlemagne nous avOns tintémoignage plus précieux ..et plus explicite; Le moi»e de Saint-Gall raconte que Charlemagne, se trouvant.à Forum Julii (Cmi-dale, clans le Frioûl), proposa à ses fidèles une chasse dans lesenvirons L'Empereur ne portait qu'une peau de brebis, maisla simplicité du maître n'avait -guère d'imiateurs. ' La plupartdes grands, arrivés (le Pavie, où-les Véni tiens avaient apporté récent-rnentdes contrées d'entre- mer toutes les richesses de l'Orient, étaient,comme dans les jours fériés, surchargés de peaux d'oiseaux dePhénicie, garnies de soie 3 de plumes naissantes du-cou, du dos etde la queue des paons, enrichies de la pourpre de Tyr, et defranges d'écorce de cèdre; sdr quelques-uns -brillaient clos étoffespiquées; surd'autres, des fourrures de-loir..-

- 't Ctcni vero, utpote feriatis d-iebus, et qui modo de Papia vo-nissent , ad quam imper Venetici de transmarinis partibusO,-ientalium divitias advectassent, phoenicum pellibus ayium senicocircunidLis, et pavonuin coltis cum tergo et clunis mox liorescereincipientihus, tyria purpura vl diacedrina litra decoratis, alii de

- lodicibus, -quidam de gliribus circunamict:i procedebant2.

.Dando]o p. 184.Monachi S. Gallensis Dc relus gestis Caroti utr'giti titi-i duo, ap. Dnchesnc-... 33.

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'35 -Le soir, Charlemagne invita lcs:grands à se sécher auprès du feu.

Le lendemain, ceux-ci virent avec dépit ces fines étoffes, qui s'é-taient plissées très-vile, se rompre et craquer comme des' baguettessèches. Charlemagne, (lui s'était contenté (le faire frotter sa peau (lebrebis, et qui la trouvait aussi belle que la vieille, l'éleva devantl'assemblée. II- saisit, poUr faire un sermon, l'occasion qui se pi-6-sentait, et que le moine de Saint-Gall ne lui buse jamais man-quer :- 't-0 les plus- insensés de hommes! quelle est maintenant laplus utile des peaux? Celle-ci, qui me coite un son ou les autres,que vous avez payées, poil-Seulement -des livres d'argent, maisdes talents?-- ,-

Au x' siècle, l'histoire du commerce vénitien enregistre lacurieuse mission d'un Germain à Byzance.-

Lother, roi d'Italie, et beau-frère de Romain II'; résolut d'en-voyer une ambassade à ce dernier prince. Luitprand s'embarquaà Rialto sur un navire vénitien, qui atteignit en vingt trois joursle Bosphore. Il était accompagné d'un chambellan grec envoyé àsa rencontre. La. relation de Luitprand atteste l'étonnement quelui causa la vue de Constantinople, l'opulence de cette capitale,le faste tout oriental qui régnait à la cour avec un système demerveilles apprêtées et de piiérilités ambitieuses. Ce rude enfantde l'Occident dut seprosterner jusqu'à terre (levant l'empereur.Le trône impérial, étincelant d'or, était supporté par deux lionsqu'on entendait rugir, et dispàraissait sous les branches d'un arbrede cuivre doré, dont les oiseaux chantaient à foi'ce- de ressorts.Mais le passage le plus important de son -récit est sa réponse à desGrecs qui voulaient gêner la liberté de ses achats. Ceux-ci lui d4-fendaient d'acquérir, dans leur ville, certains habillements 'deluxe. Luitprand -leur répliqua que les objets dont ils prétendaientle priver n'étaient pas rares en Occident, gi4ce aux gens d'Atnalfietde Venise, qui gagnaient leur vie enles portant à l'Allemagne'. \'e.nise était donc, au -milieu du x' siècle, abondamment pourvue des -objets les plus rates que pût confectionner l'industrie byzantine.

Empereur dix ans plus tard, de 959à 963.- --Cette mission de Luilprand eut lieu la sixième année du règne de Pietro

Candiano UI, c'est-à-dire en 948. - - -- s A Veneticis et Aunalfi anis institu (orihus qui nostris ex victualibns ha-e le-

rendo nabis vitam nutriunt suam. (Luitprand 1, 6.) -Ap. Filiasi , t, VI-,p. 175-6et M'rin, tu, P . 112-5.- -

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- 36 -Déjà même elle s'habituait à les fabriquer elle-même, cl pouvaitse passer (le ses orgueilleux devanciers dans les arts utiles.

Ces relations d'affaires, dont nous venons d'attester l'existence,même pendant les siècles les plus obscurs, étaient facilitées partout un système d'immunités et de privilèges. Dès l'origine, leseinperéurs firent aux Vénitiens une position unique et meilleureque celle des Grecs.èux-mêlnes. Ils leur accordaient -un& bulled'or, qui était: traduite en latin, conservée frééieusemeut dansles archives de la- république, et qui devenait la charte- de leurcommercé dans tout l'Orient. Le premier chrysobulle dont onait, non le ,texte grec, mais la traduction latine- conservée ii -Venise clans le livre des Patti, et à Vienne clans le Liber Albus,appartient à la fin du x' siècle. Nul doute cependant qu'il- n'aitété précédé de beaucoup d'autres. Ceux-ci auront été brûlés,comme tant de précieux documents, dans l'incendie qui consumaune partie des archives vénitiennes au moyen âge. La preuve enest a priori dans l'impossibilité même d'un trafic loïntain'qui etmanqué de garanties. 'Mais clIc, ressort aussi du premier chryso-bulle qui, en invoquant lés antiqués usages, ne fait que les con-firmer ou les étendre .- - ----

En l'bsence de- charte comiherci ale , ,antériéure à -l'annéenous avons, aux ix' et -x' siècles, certains actes relatifs au com-merce de l'Orient qui émanent des doges, mais-sont, inspirés parles empereurs. Ces décrets, dont la majorité est restrictive, ai-testent l'étenduei des affaires qu'ils ont pour but (le-limiter.'- N -toutes les époques, l'esprit-mercantile est dominé par lesintérêts matériels; il est prêt à leur sacrifier le fanatisme religieux,-les, répugnances nationales, -et, trop souvent-, l'humanité. Aussia-t-il toujours été pour.le progrès moral un puissant secours et unredoutable péril. il a rapproché les peuples en abaissant les bar-rières de l'intolérance ou cl'dn patriotisnie exclusif; mais il a tropde- fois oublié que, s'il peut toucher aux richessés de la nature,aux productions cleI'hôrnme, il est un bien d'une espèce supé-rieure qu'il doit toujours respecter, c'est l'homme lui-même. LesVénitiens ont rendu lesles mêmes services et cédé aux mêmes en-traînements que toutes les nations commerçant-es du inonde.

Ci l rys. dc 991. « Qum an iquiitus lècerirnt -. sectiuduin anliquas Cons, ,etu-(Jifles - secundum piod ai) an t quo fuit, r.onsuet,,,dn. , --

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- 37 -Taudis que l'Eurppe chrétienne maudissait le nom inusuihian

et qu'une haine mutuelle séparait deux grandes races, les Vénitiensallaient répandre sur les rivages - mahométans les produits dela chrétienté et rapporter aux chrétiens les produits de l'isla-misme. Mais ces relations nouvelles blessaient à la fois les intérêtsdes souverains grecs et l'esprit religieux du temps. Aussi voit-onpendant deux siècles les doges céder aux réclimations simultanéesde Constantinople et de Borne, et promulguer dans leur répu-blique les intrdictions décrétées dans l'empire.

A côté dé transactions salutaires (lui multipliaient les rapports,d'ailleurs si rares,-entre cieux mondes, se manifestait le goût d'unhonteux trafic, que notre époque a mission de dél.ruitt. L'esclavageavait survécu au paganisme dns l'Europe chrétienie; niais l'égliseromaine, aidée de la cour schismatique de Byzance, enpoursui-''ait avec ardeur l'abolition. Les Vénitiens, au contraire, n'étaientque trop portés à un commerce lucratif dont ils avaient le mono-..pole. Ils éludaient les défenses venues des deux capitales, et adop-tées par les doges. Les édits montrent la force d'un niaI qui résis-.tait à tant de persévérance, et dont les remèdes répétés attestentle dévcioppement..

Entre 81/1 et 820, les lieux saints de Jérusalem étant profanés,Léon et sou fils, ernpereùrs augustes, rendirent un décret interdi-saut à leurs-sujets les côtes de .Syrie et d'Egypte.. Les ducs catholiques de Venise, .partageant les vues de ces princes, proul- jguèrent la même défense',. -.

Ce premier témoignagé, qui indique seulement la profanation

des lieux saints, est vague. Mais ceux qui suivent deviennent plusprécis et plus amples.

Le commerce des esclaves fut prohibé, en 876, par le dégeOrso Partecipaiiô. A cette époque les commerçants véniliets,cédant à l'appât du gain, achetaient aux pirates et aux brigandsdes esclaves dont ils faisaieut le transport. Les doges, voulantmettre tin terme au scandale, défendirent pieusement aux clercset au peuple tout commerce ou toute admission d'esclaves dans lesnavires vénitiens. Les châtiments les plus sévères furent infligés.aux délinquapts2. o

Daudolo, Ch,-o,i, p. 167.

M. ibid. P. i86.

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— ,38 —

Un demi-siècle plus tard, le même abus appelle la même ré-forme. Cette fois de simples particuliers prennent Pinitiative. En9115, les frères Molinj et d'autres signent une résoiflhion, bientôtpublique, qui défend le commerce d'esclaves et le port ries lettresd'Occident en Orient, sans le consentement dé l'Etat 1

La quatorzième année du règne de l'empereur Romanos, Je dogePietro Candiano TV, 'de concert avec Je patriarche Bon,'Pierre,évêque d'Olivolo, Jean, évêque de Torcello, et les autres prélats,donnèrent, en présence du peuple et du clergé dé Venise, unesanction nouvelle au décret d'Orso.jls interdirent 16 commerce

- des esclaves chrétiens, -le %ransport des lettres que les Italiens oules Allemand envoyaient aux Grecs ouà leur souverain, et infli-gèrent aux délinquants une peine spirituelle et temporelle 2

Le décret même, -rendti à Rialto porte la même date que lepassage de Dandolo imperante Romano .gloriosissimo'impera-tore, anno autèm imperii ci as ziv. » Il rappelle la bonne consti-tution d'Orso; mais ,constate qu'elle a été violée sans cesse. il laremet en vigueur et la place sous- la double sauvegarde de l'au-torité politique et de l'autorité religieuse. * -.

Défense d'acheter ou de vendre des esclaves, d'engager sesfonds dans ce genre de trafic, d'employer sur son navire aucunede ces victimes, venant de Venise, d'Istrie, de Dalmatie.ou d'ail-leurs. Des Grecs d'Orient et de Bénévent sont particulièrement si-gnalés comme coupables decemonstrueux commerce. La loi apportecependant une restriction à ses défenses, dans le cas d'intérêt pu-blic ou ,de salut personnel, lorsque le Vénitien aura besoin dé seracheter lm-même de captivité. C'était assez pour encourager lacontrebande.

Les dangers que présentait le transport des lettres d'Italie etd'Allemagne à Constantinople ne sont pas clairement indiquésdans le texte barbare du décret. Il semble que les doges aientvoulu se résen'er les communications écrites avec l'Orient, fermer

- au Bas-Empire toute espèce d'ouverture du côté de l'Occident, etl'isoler dans leur alliance .

La pénalité est de deux sortes,' comme l'autorité d'où émane là

Cod. fat. S. Marc. CI. xiv, C. 39.2 Dandolo, Chien, P . 2 oG.1 Coi!. Treiisanj, fol. 56, h la hiblioihèpie Saint-Marc.

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loi . temporelle et spirituelle. Le transgressent , payera aitdu (loge 5 livres d'or; celui qui n'aura pas de quoi payer perdrala vie et les membres; ses biens seront confisqués au profit dutrésor public. De plus, le patriarche et tous les évêques déclarentqu'il sera mis hors de la communion chrétienne dans cette vie etbrûlé dans l'éternité.

L'exagération des peines atteste I'impuisance présumée (le laloi. Malgré cette constitution et tant d'autres, l'esclavage fut main-tenu h Venise pendant Ioule la durée du moyen âge. C'était clans leport d'Ostie, à quelques lieues des foudres pontificales, que lesVénitiens chargeaient les esclaves sur leurs navires. Home elle-même avait été pendant longtemps un clos principaux marchésde ce genre, et l'on voit un pape délivrer de sa main les victimessur une des places de sa capitale. A Venise, cette funeste coutumeprit de tels développements, qu'elle fut reconnue et réglée parles lois. En 1270; le Grand Conseil ordonne que tout citoyencoupable d'avoir tiré un esclave de la maison de soit oude l'avoir accueilli, payera une amende (le 50 livres; s'il ne peutl'acquitter, il sera mis en prison; s'il cherche à fuir, banni à pr-pétuité. Deux siècles plus tard, un. décret du sénat, assimilant lesesclaves aux autres marchandises, imposait un droit de 5 ducats

•sur chadun d'eux, à lexjortation. L'esclavage est, clans cette ré-publique, une institution il y eut une existenêc légale, et unelongue histoire... . .-

Pietro Candiano IV proscrivit de même Je commerce avec lesSarrasins (971). Il •céda aux instances des empereurs de Cons-

- Lantinople. Dandolo dit (lue le (loge voulait satisfaire ces princesqui avaient proposé le recouvrement de la terre. sainte, 2, Lepréambule de l'acte est plus explicite

In nomine Dei et Salvatoris nostri Jesu Christi, imperaule do-mino .!ohanne, niagno impe7-atore, cairn autant iniperii ejus secundo,mense Jnliô, indictione decima quarta. Rivoalto. D

Les envoyés des très-saints empereurs Jean, Basile .et Cons-

Il n'entre pas dans notre plan d'écrire cette histoire. Nous renvoyons ausavant opuscule de M. Vinccnzo Lazari , qui n présenté on aperçu des plus inté-ressants et des pins nouveaux sur l'esclavage ii Venise dans son Di, iuo servile(Mémoires de l'Athénée vénitien).

t Cupientes Constaniinopolitaliis i mperatorihus satisfieere , qui ad recupe-randam terrain operaus 'date proposuernn r. .( Dandolo, Citron, p. 2 1 o)

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- -tantin sont venus se plaindre à nous des armes et du bois queles nôtres fournissent aux Sarrasins; ils nous ont déclaré, au nomde leurs très-glorieux souverains, que, si de pareils faits se renouavelaient, au- détrimut de l'empire et du peuple chrétien, lesempereurs ordonneraient de brûler vaisseaux, hommes et char-.gements.

Le décret émane de l'assemblée populaire convoquée par- ledoge et par Vital, patriarche, Marin, évêque d'Ol.ivolo, et les autresévêques. Il est sévère comme le précédent; mais il présente assezde restrictions calculées pour épargner un commerce qui enrichis-sait la république..

Nul ne devra porter d'armes dans le pays des Sarrasins, les leurvendre ou donner point de casques, d'écus, d'épées, de lances;point de bois destiné aux constructions navales et pouvant nuireà la cause chrétienne. Le bâtiment -aura seulement la quantitéd'armes nécessaire à la défense- de J'équipage. Le commerce detransit au profit des Sarrasins est également défendu. Mais on per-met la vente des tables de frêne longues de cinq pieds et largesd'un demi-pied, des couques, des plats, des verres de bois, desécuelles. Une exception est faite encore en faveur de- trois navirespartis: avant l'arrivée des ambassadeurs impériaux; toute libertéleur est laissée en raison .de la pauvreté de, leurs patrons. Lèstransgresseurs seront punis . d'une amende de 100 livres qu'ilspayeront au doge, à défaut de quoi ils devront subir la peinecapitale. -

Si.les voyages d'Orient mettaient le Vénitien en rapport avec lesinfidèles, ils le portaient au milieu depays autrefois chétiens-etnourrissaient, le pieux enthousiasme (le cet âge. Bien des coures,entreprises dans un - inlérêt mercantile, se terminaient par laconquête de quelque relique ou de quelque débris sacré. Lesmhitres de Byzance, avant et après le schisme, favorisèrent lesfonda [ions catholiqûes ils -laissèrent; plus d'une Lois, les restesdes saints les plus vénérés de l'Orient abandonner leurs États,atteindre les rives de l'Adriatique et y recevoir un fervent accueilavec les honneurs d'un culte nouveau.

En . 8i4 , Giustiniano obtint de Léon l'Arménien le corpsdu prophète saint Zaccharie., une partie du bois de la vraiecroix, des vêtements du Christ et de la Vierge. il fonda, près deson palais, un monastère de femmes sous -le vocable de saint Zac-

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-4l -charie. Il lui donna les reliques et lui concéda les terres et leseaux voisines 1.

Le doge obéissait aux conseils et même aux ordres précisde J éon l'Arménien. La proclamation qui annonce celte libé-ralité est un des actes qui altestent le plus clairement la supré-matie au moins nominaledes empereurs grecs sur les doges vénitiens. -

...Nous, hypatos impérial et doge de Venise voulantnous conformer à la révélation du Dieu tout-puissant et à la volontédu souverain et sérénissime empereur Léon, protecteur du monde entieret notre bienfaiteur constant, avons fondé ce monastère de viergesà Venise, d'après les ordres de l'empereur, qui l'a fait élever auxfrais du trésor impérial, et qui nous a fait -tenir tout l'or et toutl'argent.

Aujourd'hui nous lui devons encore les reliques de saint Zac-charie, prophète, un morceau du bois de la croix du Seigneur,des vêtements de la sain te- Vierge et du Sauveur et d'autres reliquesdes saints qu'il nous a donnés pour consacrer cette églis.

o Voulant satisfaire aux exigences de cette œuvre et la conduireplus rapidement, il nous a envoyés des maîtres et a décidé qu'unefois le travail achevé, la sainte congrégation prierait consta,hnieutpour le salai de l'empereur et de ses héritiers.

Quant au trésor et à tous les dons qu'il renferme et que sacharte en lettres d'or fait connaître, nous l'avons déposé dans notrepalais en, toute sûreté.-.-

t En outre, nous avons voulu que la charte elle-même restât àperpétuité dans notre- palais, afin que personne ne pût dire que Cemonastère de Saint-Zaccju-zi-ie a été construit aux friùs d'un autre luedu très-saint empereur Léon, notre mdttre 2 -

Dandolo, Chron. p. 165.Cogiiitoi u, sit omnibus Christi et sancti roniani imperil fidelibus , tan)

1,reseniibus , qoiam ci iUis qui pst nos futur1 ernoit • tain ducibus , quam pa-triarcliis aique episcopis mu cotons primatibus , pila ego Jiistinianus , irnperiatishypathus ct • Vcnc:iarsrm dcx, per revdationoni domiul riosiri otonipotentis et jus.51010e donne scrnussimi iotperotoris sen et coasen'ajorjs latins rnundi, Lonis, pounuo!!ti nobis licueficia concessa., feci l 'oc monasterium virgintorn bic in Venetia,scdandurn qnod ipse jussit edijicarc ilt' propria co'nern ionpc:-iali; ci sccu,idun, piedinuit nhi/ii station cunetti neccssarij noir-i sire arycuti (1011.

Tome etiatn nobis reliquias sancti Zacchariie prophetœ CI lignulu cruels Doniini

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- -Le plus grand événement religieux de 'l'époque est clii à l'ini-

tiative de quelques marins. En 828, Buono de-MalaMocco etRustiço de Casteilo se rendaient à Alexandrie pour leur com-merce. Leurs navires faisaient partie d'un convoi assez considé-rable. Pendant qu'ils s'occupaient d'affaires, ils entendirent pàr-.1er d'un trésor qui .étit renfermé dans l'église dé Saint-Marcd'Alexandrie. Les reliques du saint y étaient encore oubliéesdepuis plusieurs siècles, et dérobées aux profanations des infi-dèles. Le nom de saint Marc était; à Venise, déjà populaire etvénéré. Des traditions fort anciennes racontaient que l'apôtreavait été le premier archevêque d'Aquilée; il - était veflu à

- Rialto, il y avait 'entendu la voix d'un ange: n Paix à toi, Marcc'est ici que reposeront tes os. n Poss4der . le rates de saint Marcétait doac une espérance nationale. Saint Théodore avait-jusqu'àcette époque, protégé la république, mais Venise attendait unplus haut patron;

Biiono de Malamocco-et Rust.ico de Castello gardèrent soigneu-seinent le .secret de leur découverte; avec une habileté digue decontrebandiers, ils ravirent aux gardiens de l'églisela châsse dusaint, la dérobèrent aux recherches (les musulmans et la couvri-rent de chair de porc. L'horreur que ressentirent à'çette vue lesfidèles sectateurs du Prophète fit le succès du pieux stratagème.Buono et Rnstico mirent à la voile en toute hâte. Mais, avant d'en-trer dans leur port natal, ils avertirent le gouvernement. Celui-ci,appréciant le service rendu k I'Elat et les difficullés de l'entre-prise, pardonna aux marchands leur commerce-illicite, avec lesSarrasins. Sans cette formalité, lé corps du patron de Venise en-trait chez elle en contrebande. Une foule immense vint recevoir la

atquc sancim Marizn pannuni , sive de vestimentis Salvatoris et alias reliquiosSanctoruin nohis ad ecclesiam sanctam consecrandam dari fecit.

n Ad nccessaria hujus opens etiarn magistros tri!),] t, ut citius opus expiercntet explcto opere conyreyalio scinda i,nccssai,ter pro sainte scrtlniSsi'ni lmperatorts etsacrum Ine,edwn oraret'.

.De. 'tlnesauro vero , qnod unainifistal sise 'carte cum initerisantreis, et totuns do-nitrai. quod in hoc loco1pse transmisit, in ipsa camera Salvulu esse statinnm,,s.- Tanicn ipsafli cartam in camera nosiri- palatii volurnus ut semper perlua-ucat, et itt n'oit valeai aliquis bec riiccre , quod illud monasterium sa,,cti Zac-cliafiai de alicujus thesanro esset, con stroci uni • aiisi de sanetissinni (iamrnn IiOStfi'imperatoris ,Leo,nis., (TaUd, t. XII, P. s.) - Cf. Dandolo apud Muratori, t. XII.

P . 165.

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châsse de saint Marc'. A partir de ce jour saint Théodore n'occupaplus que le second rang dans le culte national des Vénitiens. SaintMarc prit et garda le premier. Son nom retentit dans les bataillescomme celui de la patrie. L'église qu'on lui dédia, merveille defoi, clé patience et d'amour, fut l'oeuvre de tout un peuple et deplusieurs-siècles. Autour de saint Marc se réunirent-désormais lesassemblées populaires. Cette place antique a-été -le forum de Ve-nise saint Mare rappelle aux enfants de cette république une vie.glorieuse de dix siècles et l'honneur d'une belle mort.

CHAPITRE 111. -

LES OB5EOLI (ggf-1030).

Les derniers débris de la domination grecque dans litalieméridionale excitaient de puissantes convoitises. Depuis qu'unroide Germanie -était venu ceindre àflome la couronne de Char-lemagne, ],a entière devenait l'objet des prétentionsallemandes. Sous le doge Tribuno Métro (g-gg,), Otton lientreprit une expédition contre les Grecs de -Calabre. Vénise,bravant le maître de l'Occident, secourut ses alliés ordinaires,'conime l'atteste un document des empereurs Basile et -Cons-tantin,- qui mentionne honorablement ses services'. Otton IIbattit en retraite jusqu'à Vérone, où il se hâta de préparer unenou'elle guerre. Sa colère parut -si menaçante qu'on lui envoyatrois ambassadeurs Pietro Morosini, moine, Pietro Andreadi,tribun, et Badoerio Nocli. Ceux-ci furent traités avec -hauteuret sommés de produire les diplômes impériaux qui reconnais-saient leur république. Otton consentit 'à les renouveler. Mais,peu de temps après, sa haine et son ambition se réveillèrent.Une trahison faillit les rendre funestes aux Vénitiens. Ces défen-

Daudolo, p. 170-17] - - Saint Nierait, sainte Barbara, saint Pantaléon ettant d'autres fuit-nt transportés de même à Venise, des églises fondées sous lotirvocable, et des cérémonies particulières furent instituées pour leur culte. LesVénitiens poussèrent si foin cd goût pour les sainis d'Orient, que leurs voisinsde terre ferme, et les Italiens en général , en fuient quelque lieu scandalisés etse vengèrent par des railleries et des sobriqueis.

flnniauuin , I. 1, p. 259. -- -.-

S.;

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- tiliseurs constants du Bas-Empire compromettaient une seconde foisponi: lui leur -indépendance.

Les Allemands étaient à peine chassés de l'italie méridionale queles infidèles y recommençaient leus incursions. Les Sarrasins repzf-rurent sur les côtes des Lalabres, et assiégèrent dans Bari k gé-néral Gregorios -(1002). Basile et Constantin , à de leursprédécesseurs, invoquaient l'alliance vénitienne. Le doge conduisitune flotte considérable devant la ville calabraise. Les Vénitiensdéba1quèrcnt vaillamment en présence de l'ennemi. Les Sarrasinstentèrent vainement de les jeter à la nier, et virent bientôt leurslignes forcées par les assiégeants: L'entrée des vainqùeurs dansBari devint un véritable triomphe, et le doge fut porté solennelle-ment au palais du gouvernent,. Attaqués par terre et par mer, les,Sarrasins soutinrent une lutte acharnée de trois jours, après la-quélle ils se retirèrent. Pietro Orscolo revint à Rialto au milieudes acclamations de tout tin peuple}.

D'aussi importants services devaient obtenir leur prix, et lesVénitiens étaient trop prattques pour remporter de stériles - vic-toires. Pietro Orseolo' fit- payer à la cour byzantine les secoursqu'elle avait reçus de son prédécesseurcontre les Allemands, delui-même contre les Arabes-. --

Après la défaite d'Otton en CalS-e., Tribuno -Memo avait en-voyé à Constantinople son fils Maurizio. Nul doute que cet ambas-sadeur - n'ait ouvert les premières négociations qui aboutirent plittard. Mais à la mort de son père il retourna dans son pays et laissaau nouveau doge l'honneur de les terminer. A peine arrivé au -pouvoir, Pietro Orseolo.continua ces relations avec Basile et Constantin. Ces princes signèrent un acte solennel qui augmentait lesptivi1éges des Vénitiens. C'est le jrùmier chrysobulle qui nous aitété conservé, au moins dansla traduction latine il devait servirde basé à tous les autres (99 1). . .

Les commerçants vénitiens auront, seuls le bénéfice d'une ré-duction des droits. Chaque navire payera 2 soli& à l'entrée et 15à la sortie-, dè telle sorte que la somme acquittée ne dépasseraPoint 17 solidi .-,-

Dandolo, Chro,,. L IX, ch. . De duc-alu Petri Ursioli.-p. 223-235.- 2 Solidus, nummus aurcus- . t Voy. Du Cange, Glèssor'iwa ad scriplores. medim

et infiinor gra'cilut,s. I1-, -

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Ils obtiennent., en outre, une grande liberté, garantie contre.leshabitudes tyranniques des officiers impériaux, et une juridictionspéciale, destinée à leur épargner les vexations subalternes. Lexopppxdpto 1 ne pourra les retenir plus de trois jours-clans lesvilles où ils auront fait escale, et d'où ils voudront partir. L'ins-pection de leurs navires, la décision des afihires jendantes enl.i-ceux et les Grecs, sont enlevées à tous les agents inférieurs et ré-servées au logothète- impérial 2 , niagisl:rat assez élevé pour assurerla justice à leurs négociants, la célérité à leurs affaires. Les officiers'de second rang qui voudraient les soumettre à la loi communeetleur imposer les mêmes visites qu'aux autres commerçants sontmenàcés des 'peines les plus sévères.

Une seule restriction est mise à leurs priviléges. Il leur est in-terdit d'importer, à l'aide de leur S monopole, les marchandisesétrangères et notamment celles d'Amalfl, des Juifs, des Lombardsde Pari. -S'ils essayent (le •ce, genre de contrebande, ces marchan-dises seront saisies et leurs produits nationaux Confisqués .

Ces concessions livraient aux Vénitiens tout le commerce del'Orient, car elles rendaient aux antres peuples la concurrenceimpossible. Pietro Orseolo ne se contenta pas d'nriclir sa patrie;il la for(ifia encore aux dépens des Greds. La cour de Byzance dé-pendait tellement desVénitiens, qu'elle ferma les yeux sur leursempiétements. ---

La république grandissait tous les jours sans avoir une étenduede côtes proportionnée à -sa puissance maritime. Elle étouffiuit clansces lagunes qui avaient abrité son berceau. Mais, €1] lace d'elle,sur l'Adriatique, une ancienne province grecque offi'ait de longsivagés à sa nouvelle ambition. Le traité de 802, confirmé en Bio,

laissait aux empereurs la Dalmatie maritime. Mais le gouvernementde ces princes était trop faible pour - exercer les droits que leurhabile diplomatie savait encore maintenir. Leur -souveraineté, re-présentée à Zara par des 4ucs ou vicaires, ne put: . s'implanter dansun pays qui leur demandait vainement l'ordre, la prospérité inté-rieure et une protection efficace coutre les pirates. La Dalmatiemaritime, livrée à elle-même, comme l'avoue Constantin Porphy-

Fonclionnitire préposé aux douanes. Voy. phis loir, eh. VIT., p . I 22.

Voy. eh. vu, P. 122.

-Tel est, du moins, le sens que nous donnons au passage fori I oui inen IiicI,rysohiii e, d'accord avec Mai'ii, , t. Il, 1. 21 2.

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rogénète', se morcela en petites* républiques indépendantes. Elle sedonna des lois, des magistrats indigènes; elle , dut k l'abandon deses maîtres la renaissance de ses libertés municipales. Mais les di-visions qui en furent la suite l'affaiblirent encore.devant l'ennemicommun. Les Narentans, qui avaient à. Lissa leur. repaire, la rui-naient par des' attaques -aussi imprévues que fréquentes. Contreces féroces brigands elle invoquait tour k tour Constantinople, qui.restait sourde à son appel, et Vênise, qui attendit le règne d'Orseolopour y répondre.. .

Celle-ci, voulant soustraire son commerce aux vexations d'uninsaisissable ennemi, s'était résignée à lui payer un tributannuel. Le doge, qui plantait sur les murs de- Ban .le - drapeau 'de.saint Marc, ne povaitsouffrit une pareille honte à ses portes. PiètroOi-seolo-mit Bacloario, dit'Bragadino à la tête d'une flotte puissante.,qui donnala chasse aux Narentaus dans-toute l'Adriatique. La merétait libre; mais il fallait atteindre, détruire le nid des pirates. LesVénitiens débarquèrent à Lissa, la ville fut prise et rasée, lesfemmes et les enfants emmenés captifs à Malte.

Cependant beaucoup d'hommes avaient échappé. Leur défaiteles rendit plus acharnés à de nouvelles déprédations; -plus avidesde nouveaux massacres. Unis aux Croates, ils se jetèrent sur laDalrnatie maritime, qui, incapable de se défendre elle-même, ap-pela les Vénitiens.

Une ambassade -solennelle demanda la protection. de la répu-blique. Orsolo réunit l'assemblée populaire, qui donnait son avissur les affaires importantes et contrôlait les résolutions -du gou-vernement. li ne se borna point à démontrer les avantages poli-tiques et commerciaux de l'entreprise; il ménagea la dignité del'empire et les scrupules de son peuple. Basile et Constantin, nepouvant défendre eux-mêmes la Dairnatie, verraient avec plaisirleurs alliés se charger de cette mission. Ces princes nô sauraient.préférer au protectorat vénitien la tyrannie narenlane ou sarra-sine 2. On . voit qu'il 'y avait toujours une opinion favorable à l'ai-

I1ep dpg, x4dtov nO.'. (Éd. Bonn, t. III, P . 128.)---lton,anin, t. 1, p. 275. - Qua de causa Vendi, ah illis ovocati, clin, per-

Inissione Basitil et Consiantini , Jmp. Coi'si.ani.inopolitanornrn , a -quibus reges illisceptrurn antiquitns recognoverant , doini iiiun, Dalmatim pri mii us acceperu ni ii thistoria, quinin reperinius in antiquissimis Greorum et Veneioi'uns codicihuus.....serinse declarat. (Dandolo, P. 227.)---

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fiance grecque, et que le doge évitait de la froisser même dans 1eaffaires les plus nationales. Orseolo demanda aux deux souverainsla permission (le secourir les Dalmates. Les Vénitiens prétendaientobéir à l'empire d'Orient lors même qu'ils prenaient sa place ilsne 1e dépouillaient que pour le servir. -

L'expédition conduite par le doge en personne, fut Ut) longtriùmphe..Parenzo, Pola, tout le Quarner, les îles de Cherso etd'Qssaro, Zara 4 Veglia, Arbe le reçurent en libérateur. Les habi-tants slaves ou grecs sortaient à sa rencontre et lui prêtaient ser-ment 1 . Mais l'empereur conierva son prestige en perdant son au-tenté. Ce prince était le maître légitime dans les idées du tempset du pays; les Vénitiens respectèrent les sentiments et les habi-tudes de tout un peuple. Orseolo tint parole à ses concitoyens'.Au. dessus du nouveau pouvoir, il laissa planer la vieille souve-raineté byzantine; il usurpa avec les dehors de là fidé!ité il s 'an-nonça non comme le successeur des Césars, mais comme leur.vicaire. Son titre même lui donnait ce caractère aux yeux des habi-tants, qui ne distinguaient pas le duc de Venise, ami de l'empereur,et les ducs irnpériaux. , lieutenants du prince. On priait pour le doge(tans les églises (le Dalmatie, mais c'était selon la formule grecque.On entonnait l'hymne Exaudi. Christe, comme à Constantinople.Cette invocation en faveur d'un nouveau maître nc . supprimait pasles louanges de l'ancien, et :les Dalmates ne s'engageaient à glori-

fier le nom du doge qu'après celui de l'empereur 2 Ils finis-saient, dans leurs priè-es.ie représentant.du souverain aitJuimême. La Dalmatie ne s'attachait à la république vénitienneque par les liens assez larges du vasselage. Les principales villes (lela province, comme celles de l'Jstrie, devaient envoyer chaqueannée, à Venise, une contribution en nature fort modérée, diffé-rente pour chacune d'elles, et qui semblait être plutôt leur partdans les charges de l'État, que le signe humiliant de la •ctépen-(lance.

Mais cette domination; déguisée à l'origine sous les formes duprotectorat et d'une sorte de délégalion impériale, s'appesantit sur

-' «Non modocives, velum omnede finitimis tacthomanoruin qusul Scia-vorum castellis. convenientes et sacramentis ab omnibus pactis sub ithus pnincipispotestate inanere dccreverunt. (Sagroino , ç . liomanin , t. J, p 277.1

2 Quod istius principis nomen post ilnpera(oreln g!oriricarent. . ( Sagorni no,ç. Romarin, t. 1, p. 277.) Ci. Daudojo, p. 227-230.

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âs -le pays et -secoua la suzeraineté étrangère. Otton Orseolo, fils dudoge, fut envoyé à Spalatro; Domenico Polani, k Trau; GiovanniCornaro, à Seheuico; Vital Michieli,-'à Belgrade; MatL.ia Glus-liman, à Zara; Mari.ti Menue, à Curzola. Ces agents cia dogeaffectèrent d'abord le caractère de consuls et s'effacèrent devantles prieurs, juges et autres magistrats indigènes; mais le tempsles rendit maitrs de la province. Les révôltes que les villes dal-mates, Zara entre autres, opposèrent plus tard àla lente invasionde cette tyrannié, la consolidèrent et démasquèrent l'hypocrisie dela conquête. En accordant au-doge ét à ses successeurs le titre deduc de Dalmatie et l'inscription de leurs noms sur les décrets-publics et les médailles, les Dalmates signaiènt l'acte de leurprochain asservissement (998) 1.

Les Vénitiens comprirent et célébrèrent ce nouveau succès deleur politique.- Ils prirent possession, non-seulement de la Dal-matie, mais de la mer, dont les deux rives étaient désormais leurdomaine. La ville des lagunes devenait la reine de l'Adriatique.

Quant Pietro Orseolo reii1ra -vainqueur à Rialto, des acclama-tions enthousiastes l'accueillirent. L'assemblée populaire sanc-tionna d'ùne voix unanime son nouveau titre 2 . A partit de ce jour,tous lès décrets des doges portent invariablement os N. N. Deiq relia T'cnclioe et Dal;natiœ dux. Mais ce n'était pas assez de mon-trer le prix qu'ils attachaient- à la Dalinatie, Les Vénitiens, avecune'parfaite intelligence du présent, un profond sentiment 4el'avenir, choisirent ce grand jour pour fonder ]acéréinonie quiconsacrait leur puissance maritime. L'-institution (lut sa 1hz-me etson nom historiques au pape Alexandre III et au (loge Ziani, deuxsiècles plus tard c'est alors qu'elle devient il Sposalizio deïMaremi le Mariage de l'Adriatique. Mais l'origine de cette coutume re-monte à l'année 999, au conquérant de la Dalmatie, à l'assem-blée (lui acclama son glorieux retour.-

Les Vénitiens décidèrent que le doge se rendrait chaque année,lejour de l'Ascension, au Lieu, pour fairé hommage àla nier... On

A populo decretom est ut non Venetiaruni modo in puhuicis titteris et. tabellissed et Dalinatim dux ipse ne deirsceps reliqui principes in postcrn.n insenherentiir.Savoreo, De 1kb. flairant. end. al la Marciana op, Rornanin , t. (,.p. 279,)

loi] p, d'ix pred i etas ciii tates repet Cli dO' reines " i t pari 011)11 ioni coi) sen su- dii-coin Dalinaiiaz se pi-iniitus non,iait et z,! Vouelian, I&iidein ci,", tali triiiinjilioi-egrcsmns clii (Dandolo, p. 3o.) -

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— 49 -réparait ,de bon matin une barque (lite piano, couverte d'undrap d'or; elle portait un bassih d'eau un vase de sel pour laconsacrer et un goupillon fait de branches d'olivier; les chanoineset les clercs . y.entraient et se dirigeaient vers lecanal de S. Niccolàdu Lido. Là -ils attendaient le navire du doge, qu'on appela plustard le I3ucintoro. Deux chanoines entonnaient l'Ext-nidi nos, Domine,et, une fois les litanies terminées, l'évêque se levait et pitnonçaiten latin avec ungrand recueillement les paroles sukantes Daignefaire, Seigneur, que cette mer sQit pour nous, comme pour tousceux qui naviguent dans ses eaux, tranquille et favorable; voilànoire prière exauce-nous Alors l'évêque bénissait l'eau, et, arrivéhS. Niccoiô, avant de &avancer dans la hier, il s'approchait de làbarque du doge, et le primicier disait: Asperge-moi, Seigneur.,avec l'hysope, et je serai pur..» Alors. l'évêque aspergeait le dogeet ses compagnons, et finissait en versant lé reste de l'eau dans lamer l . Telle était; empreinte de grandeur.dans sa simplicitémême, la cérémonie primitive qui inaugura et consacra chaqueannée l'empire. de Venise sur l'Adriatique.• La possession de la Dalmatie assurait de précieuses ressources

à l'alimentation et au trafic. Cette province fournissait, soit parelle.même,, soit pii' les pays enVirohnants,. les denrées de .pre-.mière nécessité, les grains de Bôigrie; lé vin le viazidesfraicheset salées, les, fruits secs et enfib le sel, branche importante ducommerce de la république, et les-bois de construction si néces-saires au développement de sa marine. Maisla -Dalmatié n'offraitpas seulement de précieux produits;, elle 'tenait lés clefs 'd'nheiiriportante voie de communication, celle de la Save et du Da-nube, qui n'avait jamais été abandonnée, même des barbares,que les Vénitiens sillonnaient depuis longtemps, niais dont lesabords leur appartenaient pour la première fois. Ceux-ci pou-vaient fonder des établissements à Zara et recevoir lés arrivagesde terre et de mer. Leurs marchands échangeaient la juu;idictiongrecque 'contre celle de leus propres magisrrîts: et s'empa-raient de toutes les affaires du pays..L'Etat, de son côté, s'en-richissait- par la perception des droits d'octroi et de mouillage;les bois de construction, d'une abondance rare, lui étaient foni-nis sous forme de contribution annuelle. La forêt de Curzo]a

Rornaniui , il, p. 281282

- '- -

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- 50 -dont l'expl9ittion était pour une nation maritime une véritablefortune, fit bientôt baisser le prix du bois -de construction, qu'ontirait auparavant des provinces de Trévise et de Bellune et qu'onachetait à des conditions onéreuses. L'État, les particuliers, lecommerce, la marine, Venise entière trouvait d'immenses profitsà cette conquête. --..

Tels étaient,- sous Pietro Orseolo, les résultats de l'alliancegrecque liberté de navigation dans toute la Romanie, grâce auchrysobulle de ggi-, acquisition d'un pays qui donnait les denréesde première nécessi4é et des revenus nouveaux, ouverture d'unegrinde voie de commerce terrestre. -possession des deux rives del'Adriatique dont,. pour la première fois, la république assumaitl'empire.• En gérant bien les affaires de -FEtat, Orseolo n'oublia pointles intérêts de sa famille. Il • y avaiCentre les doges ambitieux- etla de Byzance une sorte de sympathie, qui commençaitpar flatter les Vénitiens et finissait - par leur porter ombrage. LesOrseoli, engagés clans èettè voie, devaient, comme leurs prédé-cesseurs, y trouver tour à tour l'approbation et les ressentimentspopulaires.

Après la reprisede Ban, Basile et Constantin voulurent donnerau doge qui avait conduit l'expédition des témoignages, Personnelsde leur reconnaissance. Ils l'invitèrent pour là seconde fois' àleur envoyer son fils Giovanni (gg). Lejeune Vénitien, accom-.pagrié de sou. frèie Otton, reçut -à Constantinople l'accueil leplus honorable. On lui donna en mariage une princesse du sangimpérial, Marie, fille d'un noble personnage, Argyropoulos, niècede Basile, soeur de ikomànos,.quï régna plus tard 2 Çedrenos ob-serve que Basile espérait s'attacher plus fortement la, nation vé-

j• Interea iMe dux Johasncm filmai requisitus a llasilio et Costantino impers-il toribus misit Consantinopolim, qui honore-et muneribus ai) eis decoratus al pa-

trem redut s (Dand. p. 226.) Ce fait eut lieu dans les premières années du- r(gne de Pietro Orseolo. -

Romain III Argyre . épousa Zoé, fille de Constantin VIII, et succéda celui-cicl' ,o8. Basile Il, frère et collègue de Constantin VIII; était, comme lui, pe tit-fils de .Constantin VI Porphyrogénète.

Td-rs ,aj rQ &povri Bevnt ydvœ,xa vdfu{ioP £&owtv ô lSaaiXS 5 nvS-vya-réps rof  790, dJcAv Jè ëffipavoc tQU ind rdta Çec.sdcavro rè dop. 5ott-ra,ç hno,otevos. - (G. Cedreni Hinoriw Comj,endùi pn, cou. hyz. éd. Bonn.33 9 .t. Il, p. 1152.)

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- 51nitienne par le prestige dé cette haute alliance. Les noces furentcélébrées avec magnificence, et les empereurs mirent sur la tètedes dèux époux une: double couronne d'or. Les fêtes durèrent troisjours. GiovSuni avait hâte de partir, mais les souverains le retin-rent dans le palais 'que la princesse Marie reçut en dot avec unesomme considérable. il dut attendre le retour de Basile, qui l'avaitquitté pour repousser les Bulgares. Lorsque ce prince fut revenu,il conféia solennellement à Giovanni la dignité de -patrice. Puis ilaccorda -aux pieuses instances dé Marie le corps de sainte Barbe,fille de Dioscore. Giovanni rènira dans sa patrie avec sa royaleépouse et son frère. Lé peuple leur ménagea une brillante cira-lion, et la précieuse relique fut placée dts la chapelle ducale.Le cortège de barques qui vint à leur rencontre, les fêtes quei'oncélébra pendant de longs jours, firent oublier l'éclat de toutes -.les réjouissances passées (ioo) 1.

Cette union priàcière ne fut pas heureuse. Pietro Oi'seolo, quil'avait vue s'accomplir avec tant de joie, voulut tenir lui-mêmesur les fonts baptismaux -le fils de Giovanri et de Marie, Basile.Le vieux doge avait même manifesté son contentement par unefondation charitable, lorsqu'une peste terrible, apportée d'Orientpar !es navires vénitiens; lui enleva soir sa belle-fille et leurenfant; Un même tombeau réunit les dépouilles de Giovanni etde Marie dans le monastère de S. Zaccaria. Le peuple, au milieumême de son deuil et des terreurs qui l'accablaient, eut pitié del'infortune de sou chef, et, pour y apporter quelque soulagement,lui permit de s'adjoindre comme eollègùe, à la place de Giovanni,

iPost ducis rqditum (après Ban) Johanniem dueemcum Ottone fratte Cons-mantinopolim (misit) ad Basilium et Costantinum isnperatores, qui curesuseipiontes ilium Mariam ex sonore neptem, filiam uobiiis viri Argyropuli satissplendide dotatam , sihi in conjiigem tradidere, statutoque die nuptianim cnnjugesin-capela imperiali n jsatriarcha Constantinopolitano menus henediciionis et ahimperatonibus alirea diademata capitibus suis suscepere. Celebratis iiaque corn-honore nuptiis, Johannes -ail repatrianduin dispositus regain J3asilii euntis contraBùlgarosusque ad ejus reversioneni in urbe cure Revenus quoquel3astlnis Johannem ducem patricium Fecit, et supplicanti nepti corpus sanctieI3ai'barr, filin Diatcori, gratiose conceisit. Qiibns obtentis Johannes coin uxoreet rratre Venetias redut, a paire et Vendis coin receptus, et in capelladocali corpus iaucta Barbare deposuit. Coins cônjux l'ilium in- Coostantinopolim.cooceptum pepenit, avunculi soi Basilil nomine,vôcatum. r (-Dandolo, Cbron.p. 233.) — Voy. Marie, t. IF, p. a65, et Ràmanin, t. 1, p. 288.

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- 52 -son autre fils, Otton, qui- était encore fart jeune 1. Lorsque, troisans plus, tard, le . vieil Orseolo s'éteignit pieusement, il put.voirsoI?,dernier enfant déjà préparé à l'exercice du pouvoir et prêt àrecueillir l'héritage paternel.

• Ces, fils 4e dogs puissants associés à leur père n'avaient jainairéussi. Le peuple, cédant tout d'abord à un entraînement favo-rable, revenait bien vite à ses déflnces. Le doge, qui avait mé-nagé la transmission dei'utoriLé da'ns sa famille, trouvait bien

• rarement tin fils aussi habile et. sachant, comme lui, déguisersous les dehors les plus modestes l'illégalité (le cette lente usur-pation monarchique. Les Orseoli eurent le sort des, Galbaj et detoutes les autres maisons ducales auxquelles l'alliance byzantineavait fait concevoir la chimère de l'hérédité., Ferme et heureux dans sa politique èxtériure, Otton Orseolo

manqua de modération à Venise En face d'un parti naissanrquimenaçait la grandeur de sa, famille, il ne sut ni garder la ré-serve nécessaire ni.se maintenir la faveur du 'peuple. Il justifiales suppositions' hostiles par son mariage avec nue princesse d'unsang royal, soeur de saint Etieine de Hongrie L'empressement -inconsidéré qu'il 'mit, à pourvoir 'ses parents des plus hautescharges éveilla les, craintes les plus vives. Unde ses frères devintévêque de' Tforcello, l'autre, patriarche de Grade. L'esprit républi-cain s'alarma lorsqu'on vil la première autorité religieuse entrerdans la famille -qi exerçait déjà le pouvoir suprême . '.

Un aventurier, batailleur entré dans. 'es ordres, mais fidèle àses anciennes habitudes, souleva' lesessentiinents . secrets .qu'il seflattait d'exploiter. 'C'était Poppon, patriarche d'Aquilé'e. Il exditaf. s esprits contre Orso Orseolo,-son collègue, avec un acharne-

en[ et une perfidie qui réussirent. Le patriarche de Grade, et

';Dandolo dit que la mortalité était grande à Venise comme partout et quel'on manquait de tomheanx. j i ajoute «Et inter eateros Joannes dut cnm uxorésua Maria sexdeeini dierum spatio , in sancti Zacbarirn monasterio 111ko 'scpialchroclausi sur[. Veneti cloaque ut tamis matis quoddam pisidtsisn adesset consola-,tionis , panter Ottouc,'n dtucis genituui , eiaiis XIV annor,In, , condiicens constitue-mut. i ( Chrori. p. 234.)

Félicia; une autre fille dOrseolo , qui devint aI,besse du cloîtré de Saint-Jean de Torcello, obtint que 'e corps de sainte Barbe, rapporté de Constantinople

par sa belle-soeur 'Marie et pincé dans la chapelle ducale de Saint-Marc, fittransféré clans ce monastère. jDandolo, p. 234-235.)

2 Dandolo Citron. 1. lx, ch. t,. De ducat,, Oltonis Eirsiolo, p. 235-239.

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- 53- -ôu frère .Otton se réfugièrent en Istrie. L'audacieux prélat

s'enhardit à cette nouvelle; il s'empare de Crado, pille la ville ety laisse une forte garnison. Les Vénitiens, voyant qu'ils s'étâiehtdonné un maître beaucoup plus dangêreux que leur chef légi-time, rappelèrent les Orseoli. Otton releva l es fortifications deGrado et se maintint quelque temps à Riùlio' Mais le parti con-traire, fortifié par l'alliance de la puissante famille des Flahianici,reprii bientôt l'avantage. Otton toiha au pouvoir de ses ennemis.Il fut tondu et relégué à Contantinople, où lui et son frère avaientpal -u avec tant d'éclat, où les doges (le la république vénitiennesemblaient devoir accomplir tour à tour leur triomphe et leurexil (1026). -

Mais l'influence grecque, qui causait indirectement leur chute,était assez forte pour les rétablir. Remplacé par Pietro Centra.nico , Otton trouva dans le nouveau César Romanos Argyre unardent protecteur. Ce prince, beau-frère de Giovanni OrseoIo1,Ieunit au doge fugitif pardes liens trop étroits pour l'bandànn.ii-dans son malheur, et les troubles de la république vénitienne yfavorisaient l'action (l'une puissance étrangère. Bien n'était plusfacile à unTernpereur que de faire sentir son mécoritétement auxVénitiens il shWisait de laisser leurs intéits en .souffrance danstout l'Orient. -

Quatre ans s'étaient à peine écoulés que leurs marchands seplaignaient amèrement et demandaient la reprise' (les relarionsamicales avec -la cour byzantine. une puissante réaction éclatabientôt contre les adversaires des Orseoli. Pietro Centranico futà son tour déposé, rasé et envoyé à Constantinople. En mêluetemps, Otton était procladé de nouveau, l'administration de l'É-tat confiée provisoirement à son frère, le patriarche Orso, qu'onavait rappelé de sa retraite. Une àmbàsade solennelle allait rendreau doge exilé sa couronne. Mais, quand elle arriva dans la capitalede l'empire, celui qu'elle y cherchait n'était plus ( 1 o3o).

- A cette nouvelle, Orso Orseolo abdiqua la régence et fit pro-céder à une élection régulière. L'interrègne parut favorable à tinautre Orseolo, Domenico, pour usurper le pouvoir et rétablir enpersonne le droit héréditaire que revendiquait sa famille. Cette

Dandolo, C/iron. I. IX, eh- iii, p. 239. -2 'ny. p - 350. -

Dandolo, Chro,, - I, lx, cii - iv, '. 240.

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tentative coupable échoua'; mais les conséquences politiques quiCI) résultèrent furentbeaucoup plus grandes que l'événement lui-même.. -

Le peuple, indigné de l'attentat, sentit se ranimer en lui touteson arcleuriépubliôaine. Il ne se contenta pas de chasser l'usurpa-teur, qui alla se cacher à Rayenne, et d'élever au .rang. suprêmeun mortel ennemi de sa maison, Domenico Flabianico; il renditun décret: qui prévenait toute nouvelle entreprise des Orseoli, etles déclara incapables' d'exercer 'a l'avenir aucune fonction poli-tique. La réaction n'atteignit pas seulement une famille entière,elle suspectti toules belles qui pourraient obtenir la première nia:gisirature de l'étai. ,justement jaloux de ses libertés, le peuplevénitien frappa, dans la personne des Orseoli, tous tes doges mi-bus d'idées et de prétentions dynastiques. -

Une loi nouvelle interdit à ceux-ci de s'associer leurs fi ls et

détruisit une coutume qui tendait à faire dégénérer, la républiqueen monarchie héréditaire. L'institution ducale elle-même, ta-menée au principe électif, parut trop puissante pour un étatdémocratique. Le doge fut obligé de consulter, da6s les affairesles plus importantes,.les principaux citoyens, et on lui adjoignit,pour les affaires courantes, deux conseillers qui devaient imiterson pôuvoir. C&tte réforme renfermait le germe d'une institutioncapitale, le conseil des Pregadi, qui- prit deux siècles plus tard,sous le doge Jacopo Tiepolo, une forme définitive et durable 2•

Telle est la série des révolutions qui suivirent la mort du plusgrand des Orseoli et peut-être de tous les doges.. Taudis quel'alliance grecque assurait à cette nation de marins et de mar-chands un commerce immense , et l'empire de l'Adriatique, l'imi-tation des usages de Byzance entraînait ses chefs dans une voiçpérilleuse où la faveur populaire ne les suivait qu'un instant.Séduite «abord par le prestige de titres antiques et par la pompeorientale, la foule encourageait des prétentions à l'hérédité. Maisbientôt la crainte succédaità la confiance excessive des premierstemps. Le fils devenait aussi odieux que le père avait été popu-laire, et l'opinion publique, qui.avait permis certains empiéte-ments au fondateur d'une glorieuse famille, se réveillait mena-çante pour ses descendants. Le peuple ne se bornait pas à re-

])ttdoIo, Chron. I. IX, cl'. Y. P . 2.1o.

' tlonianiui j. t, i. 20fl.

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- 55 -prendre sur eux tout le terrain perdu, il les faisait reculer àtour et conienait ses chefs par de nouvelles lois. C'est ainsi qu'envoulant accroître leur puissance les doges l'eurent bien vite tffai-hile. L'influence monarchique du Bas-Empire provoqua' contreses imitateurs la réaction républicaine, qui les subordonna d'abord

]il ultitude et plus tatd à l'oligarchie.

CHAPITRE 1V.

LES NORMANDS ET LE CURYSOBULLE D'ALEXIS.

• S'il est vrai que l'llalie entière ait expié sa grandeur antiquePa" une douloureuse succession de conquêtes, Naples et la Sicilesemblent avoir été destinées, entre toutes les provinces italiennes,à devenir la proie d'enuahisseurs hétérogènes; En s'obstinant kmaintenir sur le sol si mouvant de l'Italie méridionale les restesd'une domination chancelante dès l'origine, les successeurs deJustinien s'exposaient aux attaques de tous les aventuriers duSud et du' Nord, de l'Orient et de l'Occident. On n'a pas tantd'ennemis sans être à b merci de ses alliés. Les Vénitiens lecomprirent. • -

Sur cette terre où les Grecs avaient combattu les Goths, lesLonihards et les Arabes, l'esprit d'aventure conduisait; au com-mencement du xC siècle, mi plus habile ennemi. Fléaux de toutesles populations maritimes de l'empire carolingien, et plus tardde la Neustrie et de l'Angleterre, les derniers venus des barbares(le l'Occident tournèrent leur convoitise vers ces belles provincesnapolitaines, dont mille récits enchanteurs leur vantaient la ri-chesse. Quelques gentilshommes normands, au milieu de la con-fusion qui régnait dans cette contrée, se rendirent redoutablesaux Grecs, aux princes lombards, aux républiques, aux Sarrasinsqui se disputaient la possession (lu pays. Maîtres (le l'ancienneApulie, ils inquiétaient l'empereur d'Orient déjà dépouillé pareux, le pape, dont leur voisinage menaçait les Éta ts , la Républiquevénitienne elle-même, qui voyait poindre, une (le ces fortes monar-chies dont elle avait toujours empêché l'établissement dans la pé-ninsule.

C'est (le Rome que partit le cri d'alarme. Il ne fallut rien' moinsque la voix de Léon IX pour tirer de leur sommeil-les souverains

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dégradés de l'Orieift. La cour de Contantinople donna à soitArgyros un titre pompeux, celui de duc d'Italie, mais pu de sol-dàts. Léon IX se transporta n Allemagne, àVèiiise, pouf formerune ligue contre les ennemis communs. S'il ne réussit guère auprèsde l'empereur germanique, il obtint clans les lagunes un , accueilchaleureux et des promesses de. secours. Tous 'ces efforts n'empêchièrent pas le pontife d'être battu et pris à Civitella 1 (1 o53) parRobert Guiscard et les hommages que les vainqueurs s'empres-sèrent de lui rendre n'étaieht pas de nature à le-consoler de sadéfaite. Argyros était vaincu à Spolète; il n'échappait que par lafuite à une mort certaine. Robert Guiscard étendait son autorité,ait même de la Pouille, sur butes les Calabres.'Rogér con-quérait la Sicile, et la royauté normdnde était fondéé.

.La cour de Constantinople se sentait encore une Ibis- trop faiblepour défendre ses possessiôri italiennes sans le secours de sesalliés ordinaires. Aussi prépara-t-elle de longue main leur inter-vention contre les Normands. Pendant la période où elle fut ré-duite à ses propres forces, elle prodigua les égards qu'elle avaitl'habitude de témoigner aux chefs de la république-Loin de leurgarder rancune du renversement des Orseoli, elle fit bon visageaux nouvelles familles, et noua avec celles-ci les mêmes rapportsqu'elle avait eiitretenus avéc l'autre; L'intérêt politique dominait

• tous les sentiments persdrinels -et resserrait l'alliance gréco-véni-donne au moment même où elle paraissait rompue.

Dans un acte officiel de l'année- 1049, le doge Domenico Con-tarini s'intitule patrice -impérial et protosevastos 2 Jamais -empe-reur n'avait , été si libéral avec les. premiers -magistrats de Venise.Dornènico Selvo, successeur de Contarini, devint protoizadre im-pénal 3 . Il eut, de plus, en -mariage mie jeune Grecque, fille,seloh les uns, de Constantin Ducas 4 , selon les autres/Niselonphore Botoniate 5 , qui ceignit plus tard la couronne impéiale. Le

Il y n beaucoup de villages qui portbut. cc nain Toscane, dani les États deI'Eglise et dans le royaume de Naples. II s'agii ici-de CivDella dans la Capitaliste -presque à égale distance de Lucera au N-E. et de Bénévent au S . -O-

flozoanin . t. t, p. 3o5. Pour ces deux dignités- byzantines, voy. cli - vit,

P- '- - -Comme l'atteste u il de 1075. (Voyez Tate] - 1. XII, p. 4' -) Digi ut é

Jiyi.autinc, eh. vii -I 3/. - - -Cotistautin X - empereuf rie -059 1067. -N i c pItote III Bot n, jiate ô,, Bot n tinte , i,rn1'creu r de I 07 8 à 1 o8 1-

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luxe asiatique déployé à Venise par cette princesse étonna beau-coup les coûtemporains. Elle fit scandale en attendant d'être unmodèle. Les-chroniqueurs vénitiens rappellent les eaux parfu-mées qu'elle employait à sa toilette; les cuillers d'or dont elle seservait pour-porter les alinientsà sa bouche, l'odeur balsamiquequ'exhalaient ses vêlements, -les gants qui ne lui laissaient jamaisles mains nues. Chaque matin ses.nombreux serviteurs recueillaient

- la rosée,-dont elle s'humectait pour donner une plus grande fi'a-eheur à sort L'abus des essences lui devint-si funeste, que ladécomposition de son corps éloignait d'elle tout le inonde:' Uneseule servante lui resta fidèle, et ce nefut pas sans le secours-des par-J'unis. Encore avait-elle soin d'approcher vite et de s'éloigner en cou-rant. -C'est Pierre Damien qui nous apprend ces derniers détails'.L'indignation crédule du pieux écrivain a de quai nous faire sou-rire; mais elle n'est pas moins instructive pie plaisante. Quand 51constate avec étonnement que la princesse ne touchait pas les metsavec les mains, qu'elle les faisait cotiper paries eunuques en petitsmorceaux et qu'elle les approchait de ses lèvres avec descuillers d'oret des fourchettes 1 , il ne nous dbnne pas la puis haute idée desmanières de ses contemporains; et, tout en rendant justice ait' -XI '. sièck, •on se demande s'il ne vaut pas mieux vivre Au xix e etsurtout y diner. - -

Les Vénitiens appréciaient à Ieut'juste valeur les bons procédéset les hautes alliances; muais, pour leur faire prendre les armescontre un Robert Guiscard, il fallait un intérêt ou un dangergrave. En 1075, la hardiesse (les corsaires normands donna nais-sance'à l'un et à J'autre. Les conquérants de l'italie méridionaletournaient les yeux vers l'Adriatique et débarquaient sur les côtésde la Dalmatie. Domenico Selvo les chassa de êette région, puisexigea des habitants la promesse solennelle de leur en fermeri'entrée. Les Dalmates, qui avaient appelé autrefois les Vénitiens

Voy. Bonjanin . t. I, p. 31 1. -Petri Dainiani Opera omuta, collecta studio oc labo ce Gonsz. Cafetans. Venetiis

,los. Corona , 4 t, en 2 vol. 17/13. Instrtntio Mbniuhs, opiise. L, e. xi. De Veaetiibieis uxore, qua, pries rsimiinn delieosa, derniun toto corpore comparruit. (Voy. Spp.n' III.)-

' -Voy. App. Il']][.. s In quo ternporc Nornianni Dainialinorum unes javas! uni et destriiont. ,Diix

igitûr egressos cos ahi re eoegit , et ai, I ucolis solirlan, fiÉlclitai cm coin promis-non ndtI,irendes Noimaisons iii Dulmatiani siiscepil. s (À. 1)aiidolo, p. 3/18.).

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contre les-pirates du Quartier, invoquaient l'appui des Normandscontre leurs anciens libérateurs. Un acte solennel imposé à laDalmatie et signé par les magistrats des principales villes du pays,reconnut Selvo comme duc de Venise, duc et seigneur de Dal-matie, protohèdre impérial. Il frappa des peines les plus sévères,la mort et la confiscation, ceux qui appelleraient les Normandsou favoriseraient leur invasion '.Les Vénitiens se bornèrent à reven-diquer ainsi les droits qu'ils possédaient depuis près d'un sièclesur cette province. L'anarchie qui désola le-Bas-Empire pendantles six années suivantes ne Tes encourageait pas à le défendre;Comment trouver, au milieu de rivalités sanglantes et de règneséphémères, un prince capable de leur inspirer confiance? LaDalmatiè était sauvée et, avant d'affronter les-armes normandes,Venise attendait qu'elles fussent devenues plus menaçantes et lesprones.ses des Grecs plus.précisçs.

L'audace de Robert Guiscard, qui croissait avec la faiblesse (leByzance, rendit l'intervention nécessaire. L'héroïque aventurierrésolut de franchir l'Adriatique et de porter la guerre sur le ter-ritoire ennemi. Pour justifler son entreprise et mettre à profitla confusion qui régnait en Orient, il maria sa fille à Constantin,fils de Michel Parapinace 2 , et se présenta comme le soutien duprince légitime contre les usurpateurs. Il partit de Brindes aveccent soixante bâtiments, prit Corfou et, malgré une violente tem-pête qui détruisit une partie de sa flotte, vint mettre le siégé de-vant Durazzo 1.

- 1 « Promittinius ......... vobisDoninico Silvio. dcci Vc,.et,a et Dalrnatirn neiniperiati IîrdtoIl gdrO et senibri nostro , ut ah bac (lie In a,ilea quarlin] nul1,, snostroruin civinin audeat adducere Norniannos ara extraneos in Dalniatiam ontper se ipsum, vel quovis ingcnio.--• «Si quis aulem hujus sceIers prvai-icator inventus fkicrit et se legitirne cxci'-sare non poSent, amiltat vitam sonne, et quidqrnd possirlet in bec secuin - medie-tate,n in camera ducis , et anedietatem civibus - qua in elvitate proevaricator inven-tus fuerit per judicem et per 1-omanan, ]egem quit in prresenti pagina scripta essevideatur in quarto capitulo ejusdcni legis.

Quia, si quis iniinicos infra provinciam invitaverit a,aI introduxerit , anin)a sieninciarrat perierdum et res ejus inferantur. (Talel . L. XII, p. 43.)

Michel VII, dit Parapinace, fils rie Constanlin Ducas, empereur en j 07]- Larévolte de Nicéphore Botaniste le découragea. Miche] abdiqua et Je rebelle devintNicépliore lIt (1078)..

Sur ces événements, voy. Ani. Cornnne - A fox. I. IV et V. (Éd. Bonn,1 188-267-) . -

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La monarchie de Justinien ne combattait plus pour ses posses-sions italiennes, pour les restes de sa, grancleur passée : elle dé-fendait cette fois sa propre existence. Dans ka -foule des préten-dants, un maUre s'était levé, Alexis Comnène i, qui avait conquis,avec l'empire, la redoutable mission de le sauver., Il se tournade fous côtés pSi- demander assistance. 11 lit appel au pape, àl'empereur d'Occident; il prit à sa- solde des Waranges et desTurcs, et montra que le peuple énervé tient il était le chef comp-lnif sus' les alliés les plus lointains beaucoup plus que sur • lui.:même. Dans la détresse où l'avait jeté la marche audacieuse deRobert Guiscard, il frappait à toutes les p6rt.es sans avoir grandechance d'être entendu. Mais il y eut un point sur lequel se diri-gèrent les .plus grands éfforts de sa politique aux abois Veniseétait le. dernier espoir de Byzance (io8i)..

Alexis eut la sagesse de comprendre qu'il fallait proportion-ner les sacrifices à la gravité de la situation et à l'importancedes secours. Il ne ménagea, dit Anne Comnène, ni les (ionsni les promesses pour décider les hardis marins (i.e l'Adriatique àpréparer toutes leurs foates navales, à faire voile vers. Durazzo, àchercher et à combattre Robert Guiscard. Qu'ils dussent, avec l'aidede Dieu, remporter la victoire ou tout au contraire-avoir le des-sous, ils obtiendraient les bénéfices du traité. En outre, tout cequ'ils pourraient désirér . de l'État romain sauvé par eux seraitgaranti par des bulles d'or. Ceux-ci ayant reçu ces offres trans-mirent au prince toutes leurs demandes, par le moyen de leursambassadeurs, et l'on sanctionna les engagements réciproques 2.

Alexis Comnène, d'une illustre famille, s'était distingué par son courage etses services sous les règnes de Michel Vil et de Nicépliore III. Quand les mi-nistres de celui-ci complotèrent sa perte, il sortit de Constantinople, se fit pro-clamer par les soldats et fuit la place deBotaniatc (1081).

Ace. Comnène. Atex. I. IV, e. n, éd. Bonn p. 191-192flI TOÔÇ Bet'e-t/nous upounsAehsi J1' e.ou xéaEov nsi Jcbp&n'... t& LèV ra aè '&tportlron' IJs7 Li fLd vos $€À4CSILV TÔ vauuxàv drdsç iii1 zptt ST&V éo,rklgs1XŒ TdI0V ck iô &dQ0V ,tara?.œe1s', d' & 'o-7'o ièt' ?u ),dœ,, ptra Jè -zoU

1o'Aou roU t'opzréptov xap 7 epov aval ,$ ouaOw wdAepov. K& cl xer& td JiasnvuOéns-a*oîs ir011a:ev, cttc. $coU ênpdyov;oc TltJ vIXaŒv a%01LV, cYtt..'dxc?ve adTa A2f4?OVTŒ& X3T& Tdcax1flhiz;, cicrtp €1 ,tr& xpdToc h'hrsjasi'. Àxaa,ca? ô,rdaoe -r&hj .&O.ndrwv aer&sj pi hsaaÀfi T rrv Pwplov dpiycTev, dwoirÂn.pwûdaovtei, Ji., xpu»coPowv ?.dywv itz,rcJwOésîa.-

D'après Dandolo, ces concessions auraient fait l'objet d'un premier chryso-

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60 -Dans l'hydthèe des succès comme dans célle (les r evers les

Vénitiens assuraient leurs intérêts vaincus, il obtenaient au-moinsle remboursement des fiais (le l'expédition; vainqueurs, ils acqué-raient par un nouveau chrysobuile l'extension des favéurs quel'empira d'Orient accordait ùleui commerce. Ce peuple avisé s'en-gageait à coup sûr dans une expédition -qui, par elle-même, pré-sentait des chances fort incertaines.-

La guerre qui résulta de ces négociations eut de nombreusespéripéties, et, si l'empereur n'avait pas marchandé à ses alliés lesrécompenses, ceux-ci ne lui mesurèrent pas les services.

Une flotte (le 36 bâtiments de transport, de i trirèmes et deg galées 1 , mit à la voile sous le commandement du doge DomenicoSelve, Elle occupa bientôt Pallia, à trois milles de .Durazzo,que défendait le général Georges Paléologue. De là, les Vénitiensapercevaient l'armée (les Normands campée hors desmurs et leurflotte qui se déployait dans le port même de Durazzo. Robs-tenvoya au (loge son fils Bohéinond pour ouvrir des négociations etl'engager vivement à abandonner la cause d'Alexis. DomenicoSelvo fit mine d'écoutea favorablement ces propositions, et invitale jeune prince à revenir le lendemain. -- -

Cependani la plds grande activité régnait dans le camp des Vé-siitiens. ils passèrent tonte la nuit en préparatifs de bataille. Leinavires, attachés l'un à l'autre, présentèrent un front inox-pugnable aux assaillants. Destours furent élevées à côté des

- mâts, et de soldats s'y établirent pour accabler les Normands deflèches. Des poutres gat-nies de croix en fer étaient mises cri mou-vement par des machines, et destinées à saisir et à submerger lesbâtiments ennemis. 1-

Quand Bohémond reparut le lendemain matin, espérant troc-voir la soumission du doge au fantôme d'empereur que son père-mettait en avant 2, il fut aussi effryé que surpris à la vue de detteordonnance de combat. Les matelots vénitiens l'accueillirent pardes huées. Le Normand, furieux, commanda l'attaque et dirigea le

bulle- antérieur dune année à celui qui est si connu sous le nom de chrysobuled'Alexis et que nous analyserons pins loin. (V. Daurlolo, p. 2à i.)

I Navires plats et larges qui servaient le plus souvent l'embarquement dechevaux (hrucywyoO. Villehardouin poile de ,-oissiers et de qaWas-vuissières dansle môme sens.- -

Miche] Parapinaee.- -

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- 61 -bâtiment qu'il commandait sur la galère* capitane. Bohémond. etles siens s'élançaient bravement à l'abordage, lorsqu'une de cespoutres mobiles, dont les navires vénitiens s'étaient munis, frappala galère du prince avec une telle violence qu'eue se brisa enmorceaijx. Boliémond eut grand'peinè à se réfugier sur les bâti-rneifls qui suivaient. Encouragés par le succès, les . vainqueursmirent en fuite la flotte normande et délivrèrent Durazzo du côtéde la mer. Voyant le moment favorable, les Grecs assiégés firentune sortie vigoureuse, et les Vénitiens, débarquant aussitôt, atta-quèrent le camp ennemi. La victoire ne parait pas avoir été aussicomplète que sur nier; mais les Normands furent repoussés àquelques milles, et 'es approches de Durazzo dégagées même parterre. Les Vénitiens avaient tenu parole, et Alexis, plein de re-connaissance pour ses vaillants alliés leur envoyait les plus richesprésents. -

Robert Guiscard n'était pas homme à se résigner après unedéfaite. ii recommença la lutte avec plus d'ardeur. Malgré lafloue vénitienne qui croisait dans l'Adriatique, il reçut d'Italiedes vivres et des ren.fôrts. L'empereur, enhardi pal- la victoire etpar une épidémie qui ravageait le camp des Normands partit deConstantinople avec une puissante armée, et, après une marchede deux mois, vint camper sous les hauteurs de Durazzo. Il ap-pela presque aussitôt à lui Pqléologue, qui vint unirsa petite arméeà celle de son ):naître. Impatient, présomptueux, Alexis négligeale sage conseil du générai qui lui recommandait d'éviter unebataille rangée, de serrer les Normands entre son armée et laville et de les réduire par la famine. Il n'écouta que sa proprefougue et celle des jeunes officiers qu'il avait amenés de Cons-tantinoplé. La bataille fut engagée par son ordre. Bobert,Guis-card ne demandait pas autre chose, et les Normands saisirentl'avantage qu'ils avaient toujours conservé, même sur les peuplesaguerris (le l'Occident. Ce fut un désastre pour les Grecs et pourles Vénitiens qui conibattaiebt avec eux. L'empereur prit la fuite,abandonnant à Paléologue le soin de ,la retraite et la défense deDurazzo.

Les habitants résistèrent quelque temps avec bravoure. Un "é-nitien ,.Domenico, les aurait trahis et aurait favorisé une attaquedes Normands. Ceux-ci ne furent repoussés qu'à .grand'peine et . -restèrent maîtres de plusieurs positions importantes. Les Véni-

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tiens, qui s'étaient-i'enfermés.daûs la ville, rivalisèrent de courageavec les Grecs. Mais le départ de la flotte alliée, l'inflexible obsti-naion'de Robert, qui se montrait prêt à tout sacriflce, répan-dirent dans la ville assiégée lb découragement et la i.erredr. Lescolons anialfilains'et vénitiens, songeant à leurs intérêts, propo-sèrent de capituler. Une assemblée des principaux citoyens seréunit, et; après une discussion qui ne fut pas longue, tous con-vinrent que le seul parti à prendre était d'oùvrir les portes à Ro-bert Guiscard? Les Normands entrèrent dans Durazzo'.

Alexis racheta sa témérité par une remar4uable 'énergie. Il en-voya à la monnaie son argenterie et celle de la famille impériale;il invita les principax citoyens à suivre son exemple. Il obtintdu clergé des subsides pour la guerre. Enfin ii fi t un-nouvel appelà l'empereur d'Occident et aux Vénitiens. Ceux-ci répondirent avecleur activité habituelle. Ils rencontrèrent la flotte des Normandsà la hauteur de Cassopo 2 et la défirent dans un combat acharnéqui se renouvela pendant trois jours. Croyant celle-ci détruite,ils se relirèient sur les côtes d'Albanie; et s'abandonnèrent à uneextrême confiance. Robert saisit cette, occasion pour les sur-prendre. Leurs bàtimens ne tardèrent pas à'senuire les uns auxautres à cause de leur poids et (le l'incohérencé des manoeuvres;malgré une vigoureuse résistance, l'ennemi les aborda et' fil ungrand carnage. La plupart des prisonniers furent traités avec bar-barie. Quand le vainqueur proposa aux autres d'entrer à son ser-vice,'iis répondirnt u Sache, ô duc Robert, que si nous voyionsnos femmes et nos fils massacrés sous nos yeux, nous -ne pour-rions,, même alors, violer la foi que nous avons jurée à l'empe-Teur Alexis. Plein d'admiration pour tant de 'fermeté, le duc de.Pouille et (le Calabre consentit au rachat de ces captifs.

La nouvelle de cette défaite produisit à Venise un grand tu-multe, qui fut suivi d'une espèce de révolution. Laklduleur causéepar, l'humiliation nationale, la perspçctive de la grandeur croissaute des Normands, tout conspirait à perdre Dornenfro Selve,dont le règne avait été, malgré la délivrante éphémère de Du-razzo, funeste aux armes de la république. Une démonstration'

- violente éclata, et le peuple,'excité 'ou soudoyé par Vitale Falier,

Rornanin, t. 1, p. 3,$-325. Lch'eau, t.XV, p. )32-139.Petite ville (le l'ue 'de Corfou elle donne son onni an go] r0' formé par l[en j cnn e en Ire n r e CI.' la eMo d A]l 'an je, --

L--

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- 63 -exigea du vieux doge soit et sa retraite dans un nid-nastère. -

Le changement dé personne devint favorable à la cause véni-tienne, et Vitale Falier, arrivé au but de son ambition 4 tint lespromesses qu'il avait faites (io85). Il commença par envoyeràl'empereur Alexis Une nouvelle ambassadé composée d'AndreaMichieli, de Domenico Dandolo et de Jacopo Aurio; ceux-ci re-çurent l'accueil le plus honorable. Alexis leur exposa le besoinqu'il avait de nouveaux secours; il promit, en échange, les privi-léges les plus larges et s'engagea à reconnaître d'une manière ex-plicite le titre de duc de Dalmatie et de Croatie. Il conféra au dogela digiiité de protoscuaslos 1 . Les Vénitiens consentirent à pour-suivre la guerre contre les Normands, jusqu'à la délivrance duterritoire grec. Ils équipèrent une flotte plus considérable que lesprécédentes et détruisirent celle de Robert Guiscard dans les eauxde Corfou et de Butrinto2.

Cette année, d'ailleurs, la mort combattit pour eux. Promptà se relever d'une défaite, Robert Guiscard assiégeait Céphal-lénie, lorsqu'une épidémie qui s'était déclarée dans soitl'emporta lui-même (juillet io85). Pour les Grecs et les Véni-,tiens, cet événement valait mieux qu'une victoire c'était la finde la guerre. Les dissensions qui éclatèrent entre les deux fils dece prince, Roger et Bohémond, permirent aux Grecs de recou-vrer les terres qu'ils avaient perdues, entre autres Durazzo, qu'ilsrachetèrent aux Vénitiens, établis dans cette ville.

Délivré de son redoutable adversaire, Alexis remplit ses enga-gements envers ses amis.- C'est après la victoire de Butrinto etla mort de Robert Guiscard qu'il leur accorda le chrysobulle quiporte soit nom. Lejexie latin de cet acte nous a été conservé dansle Libro

'dei Patti 3 et le liber Àlbus 4. Lorsque les empereurs re-

nouvelaient des priviléges conférés un demi-siècle ou un siècleplus tôt, leur chancellerie reproduisait tout au long les chryso-

llp&noréGcclos, le premier (les vénérables (cac1ot) - dignité byzanTinecréée par Alexis Comnène. (Voy. eh. vit, p. 133.) -- ' Ville a'Albanie, située en face de Corfou , sur le détroit de-ce nom. (Voy.surces féits et ceux qui suivent Anne Coninène, Mcx. t. V et VI. Cf. Dandolo,P- 267-249.)

Aux archives des Finii, A Venise.A Vienne. -

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bulles antérieufs qu'il- -s'agissait dé confirmer. On ne craignait pasde répéter plusieurs fois dans le nouvel acle des textes différentspir la-date, mais idéntiques dans la forme. C'est ainsi que le chry-sobulle de io85 a pu être extrait dé celui de 1187, où il est in-séré comme celui de' 1 146. -

Le décret impérial commence, ainsi que tous les actes byzan-4in, par tin préambule sentencieux, vague et solennel. Il semblequ'une majesté toute-puissante laisse tomber ses grâces lesfidèles Vénitiens, dont - elle veut bien rappeler le dévouement àDurazzo.

Ces dehors pompeux cachent mal la contrainte et la dépendancedu donateur.' Si la cour dé Byzance a le stérile plaisir d'écrire lepréambule, Venise a dicté les articles. Doge et patriarche, répu-blique et 'Église, Vénitiens de Venise et Vénitiens de Constanti-.nople,-ious viennent à la curée de l'empire.

Les titres conférés depuis si longtemps aux chefs politiques etreligieux de la république- deviennent un attribut de leurs 'fonc-tioiis, au lieu détre un honneur individuel et viager. La qualitéde protosevastos est attachée perpétuellement au pouvoir ducal',tomme celle de Itypertimos au patriarcat 2 . De plus, ces dignitéstessônt d'être pure ment honorifiques. Elles donnent droit toutesles deux à un traitement, annuel qui-, pour la seconde, est fixé à20 livres.

Les églises de la république 'recevront un doit d'égalevaleur. Quant à la mère de toutes' les églises vénitiennes, l'Em-pereur lui -réserve des'priviléges spéciaux': Saint-Marc aura pourtributaires' tous les :Amaifitains qui ont des comptoirs dans lacapitale et dans toute l'étendue (le la Romnie. »--

Les Vénitiens obtinrent tout un quartier de Constantinople.Leur colonie, jusqu'alors faible et dispersée, s'établit fortement etse développe dans cette grande cité,- en atténdant le jour 0i1 elle

Non in persona vero ipsius (toterminavil honorem; ied indesinentern esseatque pei'petuu»n et per successiones us qui secundum deinceps fuerint, d,'cihus

• transmilti definitivis in orbe...».Et hune vero honorem per s,,eeessionem in cos, qui deiocéps fuerint, patriar-

chas tzansniisit, ,,t hic -quoque sit indesinens atqne perpètous, -et non tonton,personz ejus.» (Tafel' t. XII ,.p. 2.) tlrépvlIw» , litre qonféré-aux inéiropoliicins.(Voy. 01h vii, P . '34.) -

N,»niis,nata tria, s Les Amal filai ris paveront. à Saint-Marc 3 deniers ( sn,rnis-NOUa). -

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en ouvrira les portes à la flotte conquérante de Dandolo. L'articlele plus important dix chrysobulle, comme le remarque AnneComnène, leur donne la faculté de fréquenter les ports de l'em-pire, et les exempte de toutes les taxes et de toutes les juridic-tions onéreuses qui pesaient sur les étrangers. Déjà Basile etConstantin avaient commencé ce régime de faveur en abaissantles . droits; mais Alexis les supprinûit entièrement et inaugurait,pour le commerce vénitien, l'ère de la franchise et de 'la libertéabsolue I -

-. L'alliance grecque avait donné 1ûx Vénitienstou . iès profitsqu'ils eu Pouvaient attendre, -Prêts à s'armer pour le compte (leleurs faibles amis, non moins prompts à toucici' les trais de laguerre, ils s'étaient moins préoccupés de remporter des victoiresque de n'en pas gagner de stériles. Heureux ou malheureux, leursservices recevaient une récompense, et Constantinople en était ré-duite à]eur payer ses défaites aussi cher, que ses triomphs. Ilsavaient mis sur l'ambitioii aveugle, sur la vaine gloire des succes-seurs de Justinien, un impôt de très-bon iapport.La chimère dela domination grecque en Italie avait pour eux des résultats pra-tiques. Parvenus au point de suppianiei' dans les ports de la Grèceles Grecs elix:mêmes, rie déposséder les-Byzantins (l'une partie rieByzance, que pouvaient-ils espérer encore de leurs vieux alliés?Pour étendre de si grandes acquisitions, ou seulement pour lesmaintenu-, la paix offlira moins dc ressources que la guerre Cene sera plus assez d'exploiter l'enipirc d'Orient -: dans l'intérêtmêrn6 de l'exploitation, il faudra Je. conquérir.

«Non prahentibus omnino, pro quabliot propria iegoliatiohe, quidiibetcomijiorcil gratin vel cujtisvis alius condiionis, qum demosio inf'ortur. o (Tale!,t. XII, P . 53.)

Tb êè J, peîov n»' éçzroplcw adr&v d,jj1o,, é'rohicS dovdw 5 Taie ?nrà îo40viV t'&qzakiv épwç, ca1e dvércos 4opSccOw, X& nord ràrd", L4T€ L7oruêp XQfZ(ÀCpxIov it &ré pas r'vs t?aipEewç r Jn1iock, cicxop,to,zé-

vus 'tapézcsv dpt noi ';GOAOc êvds, GX).' ëew 'wdc,jt j ' Pwaïgç Eot,u&r.(A. Comiïèoe, dd. l3oion , t. J. p. 87.)

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• _L_6Q_• -

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CHAPITRE V. -

LES CROISADES. tTABLIS5EMENT5 DESvNITJNS

DANS LES R6YAUIE5 cnnéfltNs D'ORIENt.

La lutte, -i,tminent& cintre les Grecs et les Vénitiens, fut- ajour-née-par les croisades. L'Europe chrétienne, ardente dans sa- foi,imposante danrson unité, docile à ta grande voix de I'Eglise, sarmait tout entière pour la délivrance - du Saint-Sépulcre. Centhou-siasmereligieùx réunissait dans de communes entreprises les peuplesles plus divisés, poussait vers de lointains rivages les hommes lesplus fortement attachés à leur château où à leur glèbe, et préci-pitait sur la Palestine des flots de pèlerins et- de pieux soldats.

-Tandis que Ies autres nations occideptales ne connaissaient .l'Otient musulman que pgur le maudire, ne-le visitaient que pour lecombattre, les Vénitiens nouaient des relations avec- les Sarrasins,signaient, des traités avec leurs princes, naviguaient, trafiquaient-en pays infidèle; Une ère nouvelle s'ouvrait avec les croisades; aulieu de rapports difficiles, compromis à tout moment par, un fana-tisme réciproque, allaient commencer des communications fi-é-ventes, régulières. Des royaumes chrétiens allaient succéder auxdominations -mahométanes. Le commerce avec les régions de laMéditerranée orientale ne serait plus une impiété. Laconscienecdes marchands serait tranquille et leurs affaires plus actives.-

Les Vénitiens laissèrent donc aux nations militaires(le fOdci-dent lepremier rôle dans-ces expéditions religieuses, lisse gardèrentd'assumer, en te prenant, la responsabilité et les périls des revers,de se fermer toute chance de retour auprès dQs princes musul-mans. Les comptoirs vénitiens avaient précédé les -établissementsde la féodalité sut les i-iviiges (le la S yrie chrétienne -ils (levaientégalement leur survivre.

Lés croisades entraînaient un mouvement considérable d'hommeset de matériel. Si une grande partie des croisés, cédant à l'aveu-glement de l'enthousiasme, allèrent devant civ, sans se préoccu-per des fatigues, (les obstacles, des trahisons, tes plus sages son-gèrent tout d'abord à se faire transporter par mer. Les pèlerins qui,môme entre deux croisades, visitaient la terre sainte, préféraient-presque tons cette dernière voie. Mais les rois les plus puissants

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-- 67de. l'époque n'avaient pas de vaiSeaux. La marine était alors unmonopole réservé à-quelques républiques de l'Italie, en première-ligné à Venise. Dans les croisades comme dans les guerres byzan-tines, les Vénitiens devaient être clés auxiliaires indispensables,voyant venir à eux les prilices, les guerriers, les pèlerins, appe-lés, implorés Partout, faisant :désirer et acheter leur concours-Malgré les expéditions glorieuses dont ils partagèrent l'honneur,ils furent moins les soldats qie, les marins, les -marchands, - lespourvoyeurs te la croisade. --- Leur flotte n'était pas moins nécessaire aux broisés dans le cours

de la guerre que clans le pasge. Après les avoir débarqués, elleserVait à les- nourrir. Elle secondait puissamment leurA opérations,s permettant de combiner une double attaque sur les villes dulittoral; elle offrait, à tout hasard, un refuge aux, vaincus, quin'auraient trouvé devant eux que les Sarrasins, ou le désert, plusterrible que l'ennemi. --- Dès -le principe, le pape Urbain: II s'adressa aux trois répu-

bliques maritimes de l'Italie, pour obtenir d'elles le transport descroisés. Le silence clés historiens de Venise n'empêche pas d'aûh-mer, d'après d'autres documents 1 , que cet appel y fut entendu. Mais'es détails -nous manquent absolument -sur les deux premièresannées de la croisade.- ---- -

- C'est après le siégé d'Antioche (juin 1098) que l'on voit repiralire les Vénitiens. Les croisés, §'étant arrêlés au siége du châteaud'Arca 2, virent approcher leurs navires vénitiens et grecs', qui por-taient du blé; -du- vin et de l'orge. La bonne intelligence se main-tenait-encore avec les deux marines, mais l'accueil fait par Alexis

•Comnèûe aux croisés montre que les Grecs -ne venaient qu'àcontre-Cœur.

Peu de temps après la première croisade, Vitale Micltiel:i propo-sait à l'assemblée du peuple une grande expédition en Palestine.Tout en alléguant les motifs religieux qui devaient toucher des

k Acta Dci per Fra,icos, p. 89, ap. Romanin • t. Il, p. io.- ' La colline d'Arca, célèbre dans l'histoire des croisades par sa citadelle,

connue dans 1antiquitd sous le nom de Cws arec Libani, s'élève à peu (le. distancede l'embouchure du Nalir eI-l3ared (le fleuve froid), sur la route de Tripoli àliamali , à quatre heures trente minutes de Tripoli, et h vingt-deux heures deliâma],. (A. Jenner, ltisiérni,-c de l'Orient, lb 625.)

8 fln,uaiijii t. Il5:-

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— 68 —-ebréLiens,.il faisait valoir de préférenc l'intérêt: politique et, com-mercial. Les Pi'sans et les Génois avaient pris de ce côté l'avan-tage: les Vénitiens ne pouvaient le souffrir plus Jong(emps. L'as'semblée partagea les vues de son président.. Une flotte iniposantemit à la voile. Elle avait pour amiral Giovanni .Michieli, fils deVitale, et pour chef spirituel Enrico Contarini, fils de Domenico,second prédécesseur du <loge régnant. -.

Lorsque la flotte fut parvenue dans les eaux d'Orient, AlexisCoinnène remplaça son concours effectif par une neutralité svnipathique en -apparence, mais au fond nmtveillante et hostile. il nenégligea rien pour persuhder aux Vénitiens de renoncer à l'entre--prise. Tantôt il leur prodiguait les conseils, affectant de'vouloirleur épargner les mécomptes d'une guerre aventureuse; , ntôt - il-leur suscitait (les obstacles en leur rendant presque impossible leravitaillement de leur flotte. Sa politique fut secondée par lesPisans, qui, jaloux du déploiement des forces vé n itiennes', leurdéclarèrent la guerre. C'est alors qu'eu'I: lieu la première rencontremitre ces deux peuples dans les mers 'd'Orient. Les Vénitienseurent l'avantage à la hauteur de Blindés, 1rirent 20 vaissedux etfireiu 5,boo prisonniers'.- -

Victorieux des inÉrigues byzantines et des armes pisane ceux-ciparvinrent à Jaffa Ils y trouvèrent Godefroi de Bouillon revenantd'une expédition heureuse contre le sultan de Damas, tuais atteint«fine maladie mortelle. L'âmiral lui offrit (les présents au nomde la république. On résolut d'assiéger cii commun le- château deCaïIlh, au pied du Carmel. La flotte était devant cette placc i queles croisés menaçaient par terre, lorsque la mort de Godefroiinierrornpitles opétations et rappela les croisés i Jérusalem. LesVénitiens reprirent bientôt le siég'e, -et l'aide des machines à lancerles traits ou les pierres 2 décida la chiite (le la forteresse,. La flotteretourna triomphante- à Venise-- ---

Peu importait à la république d'achever ses conqiêtes : elle nevoulait que montrer son pavillon sur ces ihers lointaines, où des,rivaux auraient pu la supilanter et s'acquérir un titre aux faveurs(les royaumes cifrétiens dont elle convoitait ic commerce, La poli-tique l'emportait' tellement sut- l'in térét religieux, que les Véni-

Dam, t. t, p. io8. -2 On les appelait nanques! les

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tiens, deux ans plus 'lard, conibttaient Bohémond, prince d'Ant.ioche, soutenu par les Pisans, et sunissaient aux Grecs contreces nouveaux ennemis. Bohémond,'malgré la flotte aliiéè, attaquales îles de Samos et (le Cos', niais il fut contraint de.se retirer de-vant Je feu grégeois; L'empereur d'Orient lui imposa la paix.¶ - En i.iolj, les Véhitiens cèdent à l'invitation du roi de Jérusa-lem, Baudouin. Ils envoient en Asie une flotte de cent voiles, quicontribue à la victoire de Jaffa et à la conquête de . Sidon. Lesvainqueurs purgent la mer des pirates, et rendent le passage libreaux pèlerins.-. -

De toutes ces expéditions de Palestine, la plus glorieuse fut con-duite par Doinenico Michieli (t ï t8-i i3o). Ce fut celle où les dé-fianées des empereurs aboutirent aux hostilités et où les- Vénitienstriomphèrent à, lafois desiuusulùians et (les Grecs. -

Les prières du pipe Calixte II et de Baudouin Il décidèrent ledoge à convoquer une assemblée solennelle dans l'église- Saint-Marc, et de proposer une nouvelle croisade 2 ..Domeuico Miehieliprit lui-mêe le commandement de-la flotte (1123).. A Ban, ilfut informé, des mauvais traitements que souffraient ses compa-triotes dans les Etats du successeur d'Alexis, Jean Comnène 3. Cesnouvelles le -décidèrent à mettre le siége devant Corfou. Au prin-temps, il ravagea les lies grecques: Chios, Lesbos, Rhodes, Cliyjwe;De Chypré, il fit voile vers Ascalon 1 pour y rencontrer les Egyp-tidns.

Micliieli tint, un conseil de guerre. On y résolut de former deuxescadres 'Fuiie se clirige.tait vers Joppé, afln d'attirerae ce côtél'attention de'J'ennemi; 'l'autre prendrait le large et chercherait àSc donner l'air d'une petité -flotte.marchande. Les Sarrasins, à lavue de eelleci, la tdnsidérèrent.comme une proie certaine, et.,joS'eux, coururent à sa rencontre. Les Vénitiens, affectant la-crainte d'eu i'enir aux mains, reculèrent assez pour rejoindre legrosde leurs forces. Le jour se levait et éclairait de ses premiers

Cos, aujourd'hui Co ou Stance, à l'entrée du golfe de Cos . qui plonge dans tapresqnile d'Asie Mineure, au nord de Ritodes

Vot le discours de Michie]i dans ïïlistoù'c de Venise, par Dam , t 1, p. tFils d'Alexis et frère d'Anne Comnène, empereur de 1118 à ' u û3.Ascalon (Askalân) , sur ta côte méridionale de Syrie, cuire JatTe et Gara, pré-

sente encore J Iluposa!Iies ruina ( \ T oy. A. Jenner, p. 852.) Dandolo, 1. IX, e. xiiP- 267275.

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- 70 -

rayons une mer tranquille, ridépi par une brke légère, lorsqueles musulmans virent en face d'eux la puissante flotte des chr&tiens. Alors on entend le, bruit confus des cris qui s'élèvent detoutes parts les ennemis courent aux armes, et se préparént àla bataille, mais dans tout le désordre d'une surprise.r

La galère qui portait le doge, .et qui tenait le premier rang,.alla donner contre celle de l'amiral sarrasin, et la submergeapresque entièrement. Les autres navires vénitiens accoururent, lecombat devint général et si acharné que la mer paraissait, à uneassez grande distance, rouge de sang, et que les cadavres, portésau rivage par l6mouvement des eau, infectaient l'air. La lutte seprolongea de navire à navire, .d'homme à homîhe.- Les- Vénitienstriomphèrent et iflirSt l'ennemi en fuite, après s'être emparés dequatre galères etd'un grand vaisseau.- Ils prirent aussi beaucoupde bâtiments qu'ils rencontrèrent en chemio,, chargés de pré-cieuses marchandises, d'habits de soie, de bois de construction, de-poivrer de drogues et aromes. Ils en brûlèreijtun certain nombre;ils emmenèrent les autres avec eux à Ptolémaïs. Le chef des mu-sulmans périt dans le combat,-et l'aide divine, écrit Guillaume de.Tyr, -donna aux Vénitiens un triomphe d'éternelle mémoire 1.-

A la nouvelle de cette victoire et de l'arrivée du doge -à. Ptolé7maïs, les principaux personnages laïques ou ecclésiastiqies duroyaume de Jérusalem se réunirent en des'ambassadeursfurent chargés de lui offrir leurs félicitations Ils reçurent dc luile meilleur accueil. Domenico leur dit que le constant désir desa vie avait été de visiter avec un profond respect les lieux sanc-tifiés par la rédemption du genre humain, et que rien ne pouvaitlui être plus doux que d'aller accomplir son voeu en compagnied'aussi illustres barons.et seigneurs. Laissant la floue sous un boncommandement, il se rendit à Jérusalem, où le patriarche et lesautres dignitaires lui prodiguèrent les hommages; il s'acquitta deson voeu et célébra en outre la fête de -Noé dans la -ville sainte.Non content d'honorer le tombeau du. Christ, il adopta avec en-thousiasme le projet d'entreprendre une expédition. nouvelle, digne(le 5011 nom et de sa gloire. - .

- Le conseil de guerre qui fut teint à cette occasion hésita long-temps entré te siège dé Tyr et celui d'Ascalon. Les habitants de

Guillaume de Tyr. ap. Ikoinattin., t. .11, j)o.

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- 71 -Jérusalem, de Damas et des pays voisins avaient d'excellentes i-asons pour choisir Ascalon, ville assez voisine, peu fortifiée, dont laprise demanderait moins de temps et (le dépense. Les habitants dePtolémais, de Nazareth et des côtes n'avaient pas de moins bonsarguments pour soutenir la nécessité du siége de Tyr. La chute decette placç Lotte et riche entraînerait la soumission dc toutes leautres, tandis que, si on la négligeait, les ennemis auraient lesmoyens de regagner le terrain perdu.. Le débatprit bientôt unetelle animation, qu'on en vint aux armes. Pour couper court à ccfunestes dissentiments, on remit au sort la décision.

On jeta dans une urne les deux noms de Tyr et d'-Ascalon. Ut)enfant tira le premier.

Tyr, sans êI.rb la cité opulente de la Phénicie, dont Isale com-parait les habitants à autant de princes, occupait néanmoins enSyrie le premier rang par la population et Je commerce: Elles'élevait au milieu d'une riche campagne, arrosée d'eaux abon-dantes et distribuées avec art, renommée avant tout pour sescannes à sure, pour l'industrie du verre .et de la pourpre. Elleétait dans une position très-forte, entourée par mer d'une doublemuraille et de tours nombreuses, défendue du côté de la terre parun triple rang de murs, par un système de tours plus hautes etpar une ligne (le circonvallation. Deux longues jetées s'avançaientau milieu des flots et enfermaient, comme entre deuxbras gigan-tesques, un port à l'abri des tempêtes'.

Les Vénitiens commencèrent l'attaque par nier, afin d'intercep-ter les communications des musulmans avec leurs alliés d'Egypte.En même temps l'armée franque bloquait la ville iar terre. Onemploya toutes les machines (le guerre que le moyen âge avaitpruntées à l'antiquité, sans trop en comprendre l'usage. Du hautd'une tour très-élevée qu'ils avaient construite, les assaillantsjetaient par-dessus les murs d'énormes pierres qui tombaient surles toits (les maisons, écrasaient les habitants. Les Sarrasins répon-daient par une grêle de projectiles, par une nuée de flèches qui,lancées par d'habiles ar&ers et arbalétriers, ne laissaient pis auxFrancs un nionient de répit. L'arrivée des secours qu'amenait lecomte de Tripoli donna un nouveau courage aux chrétiens, et ré-pandit l'abattement chez les musulmans, désolés par la famine,

loinanin, t. I!, P..

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72 -divisés parles discordes, qui éclataient entre les, soldats de Damaset les Egyptiens.

Cependant les Sarrasins d'Ascaion préparaient une diversion quipouvait changer la face des choses. Sachant que le siège de Tyrabsorbait la plus grande partie des 'forces • franques, ils conçurentl'audacieux projet - de prendre, par: un coup de main, la capitaledu royaume chrétien dégarnie de défenseurs. Ils, fondirent à l'im-proviste sur les campagnes voisines deJérusalem, pillère'nt, masèacrènint, emmenèrent un certain, nombre de chrétiens .én capti-vité. Mais les habitants se remirent bientôt de cette terrible alerte;on s'arma dans la ville sainte, on courut à la rencontre des infi-dèles, qui, trompés' dans leurs espérances, durent battre en retraitedevant les soldats clé la croix. -

'Tout à'coup l'on apprit dans le camp des chrétiens que:Damasdirigeait sur Tyr une grande armée musulmane. En même tempsle bruit courait qu'on ne tarderait pas à voir arriver les Egyp-tiens. -

Les affaires (les Francs commençaient à mal tourner, •et,comme il arrive toujouis entre alliés, l'union s'en allait avec labonne fortune. On disait que les Vénitiens se retireraient.ù I'approche de l'ennemi et que, réfugiés sur leurs navires, ils , aban-donneraient leurs frères aux coups redoublés des infidèles. Informéde ces soupçons injurieux, le doge fit porter au camp les 'voiles ettous les agrès de la flotte, déclarant que les Vénitiens se fermaientvolontairement tout retour qui pût ressembler à une fuite ou à unetrahison ., ramenant, par ses paroles magnanimes, le bon accord,la confiance, et ne laissant aux détracteurs de son peuple que lahonte (le leur calomnie.

Les alliés se distribuèrent les rôles clans Id défense commune; Lecomte de Tripoli et Guillaume Buris, connétable, durent 'tenir têteaux troupes qui venaient de Damas. Michieli 'alla chercher la flotteégyptienne, tandis qu'une partie des siens restaient occupés ausiège avec le gros de l'armée franque. Le double mouvement ducomte de Tripoli et du doge suffit pour éloigner le péril qui 'menaçait les assiégeants par 'terre et 'par nier. Le connétable et le comtede Tripoli s'étaient à peine mis -en marche que les Damascèness'arrêtèrent et'etournèrent dhns leur ville. 'De-son côté la flotte-vénitienne parvint en vue cl'Aleiandrie sans avoir rencontré l'en-nez)i. Elle s'empressa, comme l'année du connétable, dc, regagne"

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- 73 -ses positions devant Tyr. Tous les efforts (les chrétiens se concen-trèrent sur cette place.

Le siégè fut repris avec une nouvelle ardeur. Les Tyciens liecomptaient plus que sur quelques sorties désespérées. Dans l'unedes attaques audacieuses qu'ils tentèrent, ils mirent le feu à lagrande tour qui leur causait tant de dommages. Un Français, endépit des piètres et des flammes, se hissa jdsqu'au sommet et putéteindre l'incendie. De nouvelles machines, construites avec plus(l'art par un Arménien; réduisirent les Tyriens à la dernièreextrémité. Une lettre du roi de Damas, placée sous l'aile .d'unecolombe fidèle, leur annonçait (le prochains secours et s'effor-çait de 'leur rendre courage. Mais la messagère ailée tomba aupouvoir des chrétiehs, qui remplacèrent la dépêche par un avistout contraire. La colombe, devenue l'instrument de la ruseennemie, apprenait aux assiégeants clé la part du roi allié, qu'ilne pouvait leur venir en aide, et leur enlevait jusqu'à l'espé1rance. C'est alors que les défenseurs de Tyr, à bout de ressources,pressés par la famine, envoyèrent des ambassadeurs au earn deschrétiens. En rendant la ville aux vainqueurs, ils obtenaient lapermission de se retirer avec la vie et les propriétés sauves. Lessoldats chrétiens qui s'étaient promis (lu pillage un riche butinfurent déçus dans leur coupable attente. Mais les murmures et lesdésordres n'empêchèrent pas l'exécution du traité, et l'on vit bien-tôt flotter sur les murs de Tyr l'étendard royal de Jérusalem et labannière de Saint-Mare'.

Après cette glorieuse campagne, les expéditions en Palesl.inedeviennent rare. Elles ne se renouvellent qu'à des intervalleséloignés; et si ISVénitiens effectuent avec les Pisans et les Génoisle transport des croisés de 11.47, aucune de leurs entreprises nes'élève plus à un très-haut degré d'importance ni d'éclat.

Le refroidissement de cette ardeur guerrière, pendant la secondemoitié du xii' siècle, n'est pas dû seulement à l'hostilité des Pisanset des Génois, qui rendent aux Vénitiens l'accès de la Palestineplds difficile, et à hC.perfidie des empereurs grecs qui les occupentailleuré; si nos marchands se reposent, c'est que leur but estatteint. Le temps des-sacrifices est passé, celui des profits coin-menée.

Dajidolo , p. 27f'.

p

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74 -- -. Les éroisades enrichissaient la' république de dota ihanières.Elles amenaient à Rialto un mouvement continu , de pèlerins et depassagers,. qui alimdntaieiit sa marine; elles établissaient d'une:Fàçon durable' -ses négociants dans les royaumes chrétiens dePalestine, et concentraient dans leurs mains le commerce de cescontrées avec l'Occident.

Venise était, rnêrne:twant les croisades, la principale ville d'eih-barquement pour 'es rares voyageurs qui visitaient l'Orient. C'estde Rialto que Luitprand partit pour Constantinople 311 ix? siècle.Conrad le Salique ( 10 24- 1 °3ô), voulant envoyer Warner, évêqued&Strasbourg, avec nué brillante suite, à l'empereur Miche! IV(io34-i 04 1 ), ne trouvait nulle. pârt ailleurs les moyens .d'cmbar-quertant de passagers de distinctioù. Le nombre des esclaves, deschevaux, des domestiques qui prirent place sur les navire.. deRialto. était tel; qu'ils formaient une petite armée et que le roi deHongrie., justement inquiet, leur avait interdit le • passàge sur sesterres. La marine vénitienne suffit- à une suite assez nombreusepour étonner les contemporains et . pour/aire scandale, au dire desGrecs 1.

Les croisades multiplièrent ces voyages et augmentèrent i'af-fluente des passagers. Il s'établit alors une communication ré-gulière entre l'Adriatiqùe . et les ports de la- Palestine. De tousles points de l'Occident, et même d'une partie de la Grèce,on venait s'embarquer à Venise. Le concours des pèlerins fut telqu'on ordônna une cérémonie religieuse en leur honneur. Dansla f4té 'du- Corps Dornùzi; Fusage--s'établit de mettre, à côtéd'un noble, -oh pèlerin qui recevait de lui un cierge et obtenaitla première place. Plus tard les pèlerinages cessèrent, maistitu Lion. fut conservée un .pauvre à côté du noble représentait lepèlerin.

Une législation bienveillante protégeait et attirait les pieuxvoyageurs. Une classe spéciale d'entrepreneurs, .les sens&i, devaitleur procurer toutes les choses nécessaires. Ces fournisseurs attitrésPrêtaient serment a Je juré sur les saints Évangiles de n'avoiraffaire à aucun marchand, sachant bien que j'ai mission de trali-quer seulement avec les pèlerins, les clercs et les chevaliers; jeprends l'engagement d'être loyal et fidèle à les Conseiller, à les

1 F;! iasi , Memorie storiche lei Venez j prhu e seconcli, t. VI, p. 80.

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conduire, h les aider, etc. 1 o Une magistrature tuté1airees défdn-dait txliux qu'un serment mille fois violé contré lés fraudes (lessensai, leur procurait des logements à 'leur arrivée clims la ville,et, au moment du départ, les mettait en •rapport • avec les capi-taines des navires. L'amende d'un demi-ducat punissait les .scnsalicoupables de grossièreté à leur égard. Voici lesnôbles considérantsde la loi : Nous le faisons poui le respect et la glaire de Dieu,pour I'honneur'de notre république; nous ne voulons pas que -lesprinces et les maîtres (le CC monde aient à se plaindre de nous;nous voulons que les Vénitiens et tous nos sujets, qui tra-fiquent clans les différentes parties du monde, n'aient à subir nichâtiment ni domnïage en expiation des injustices commises;que les pèlerins et passagers, de retour auprès de leurs seigneurset au sein de leur -patrie, puissent rendre t&noignage de la ma-nire dont les Vénitiens les ont-accueillis et embarqués, suivantles intentions et les usages constants de notre république et cianl'esprit où a été écrite la parole divine de lEœodc :' Tu n'opprime-• ras pas l'étranger, te souvenant que, toi aussi, tu fus étranger sur• la terre d'Égypte 2., .

Ces niarchan(is connaissaient les vrais éléments de la richesseet comprenaient la vraie gloire! Dans un âge ixirbare, -ofi l'op,pression du faible par le fort était la toi commune, où l'ignorance

Zorn n Ii santi Evangeli de PSo çlte non andcrù con alcnis mercanto sa-piando Q in lare mercado solo citer, e chienri o cavalieri. E qboit.olli con hoa Tè esen,.a fraude cousiglierb condurb njuIer etc. o (Codrx Porc grieorrjaa, op. Filiasit. V!, P. So.) .

.A (amie e reverensia di Oio, cd 000F dcl Do,ninio rostre, eti o db cisc jprincipi, e signori del monde non bobina cause da lomcatarscnc de n °1; cde,tiam aeciè clic j Venctiani cdi fidcli nostri clic pral.ica '10 per le parti (Ici mondenon babine n partir point Ç e rlctrimonto p01 le cnormitâ predicte. - E perché Jipellegrini e viandanti quando toroano alla presentia di lorosignori o maggiori cdaile loro patrie, possano referir, chea Vcaetia sono stati ben trattati cd cxpoditi,corne ,'è i'intenton del Dominjo nostro, e sernpre fis; - maxime aitendendô -,aile parole de Cristo nell'Exodo dese,itte Advenan, non contristahis... Advdnoet tu foisli in terra Egypti. s (Codex Pet egrinortint, a it. Filiasi , -I. VI, p- 8m)

Une loi de ii o, rapportée dans ce manuscrit, dit pien raison des abus com-mis par les sc,,soli, ' testa ordinado che de cetcrc ressort ardisca, ne presunsaper dents modo, via, e forma, rlirsi villania vol parole disonesle e vergognosel'unit ail nitro e flO (la tresse né da bon Senso .qisando son ccngrogadi insieme. »

Le Codwo di Marina (L. 127) renferme également une lii protectrice (les Chré-tiens de Syrie ('2 5). (Voy. F'i lias i , Moa,oric senric/,c dci Vci,ni priini o seco,,d,,t. VI. p. 8e.)

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- 76 -faisait croire à tous qu'on ne -pouvait s'enrichir qu'du détrimentd'autrui, les Vénitiens étaicn t : ahivés:à entrevoir lésztvantagesdela fraternité humaine, et à pressentir la- solidarité des peuples/Ils s'étaient élevés à. l'intelligence supérieure et à ]amoralité duhaut commerce, qui trouve dans la-confiance ét dans-le respect -desengagements les seules hases d'unu prospérité durable.-

.En terre sainte, chacune de leurs expéditions avait été mar-quée par la conquête d'une garaiitie ou d'un -privilège, par la ces-sïon d'une partie des villes principales, où séjournaient leurs né-gqciants. Dans les royaumes chrétiens de Palestine, comme dansl'empire d'Orient, ils-n'eurent p

as seulement des immunités, niais

des étabhssemehts-fixes,de véritables colonies Les princesd'An-tioche et tes rois dé Jérusalem semblaient rivaliser cl.e coinplai-sauce à leur égard, et ces faibles souverains avaient trop souventbesoin de secours étrangers pour ne pas subir les exigences d'alliéstoujours fidèles, mais jamais désintéressés..--- Les princesd'An-tioche -lbur accordèrent dès le principe plusieurschartes qui sont rappelées dans les actes postérieurs encore existants.l3audouin fer ( l ogBg 9) signa la première 1 .Tanci-ède (t io3-ia 12)2,Bohémond (i 126-1 13 ï) administrateurs du royaume, la renou-velèrent. C'est le premier document de cette nature quinous aitété conservé 4 . - .- -

Le prince accorde une liberté complète de circulation terrestreci maritime dans toute l'étendue de ses Etats. - La sécurité dontjouissent les, marchands vénitiens ne saurait être troublée en aucuncas, quels que soient les méfaits dont leurs compatriotes se rendentcoupables en mer: S'ils échouent sur la terre du prince ou sûr cellede ses barons, ils ne perdront rien (le ICUFS biens, et pourronti-ecueillir en toute sûreté le navire et les débris du naufrage5.

- Omncs consuetodines illas, quas Antiocheni principes. Buharnundus.....liii, condonaverunt et auctoritate .pnvilegsl sui eonflrniavcrunt. » (Acte tic .i53,analysé 1)II!S bas.)

Omnes- consuetudmes illas, quas Autiocheni principes, 1)oharnundsis-pr-mus et Tancreclns iRis cdhdonavcrunt et ouctoritate- privilegii sui - confirmave-runt.(Ibid.)---- - - -

s Bohamundus primes et secundd, Tanctedus etc.» (Ibid.) Raymond, princed'Antioche, suivit l'exemple de Bohémond en 1 ,ho.

Archivio dei Frari , Liber pactorurn, 11, io. --- » On sait que; d'après le droit barbare de tri, et d'épave, Te navire naufri»gé ap-

parteiiait avec le» débris de, la cargaison, au seignem- de in côte où il avâit échoué.

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- 77 -Raymond leur accorde en outre deux chevaux de charge (soma-

iii .) ait d'un chameau dans le.port de Suidin 2 un territoire,un jardin, des maisons en toute propriété. Si les Vénitieu se ren-dent coupables, dans sesterres, d'un délit, qui les amené levant.la justice, ils seront jugés par . des juges vénitiens et d'après la loivénitienne

s: Tous leurs privilèges antérieurs sont confirmés.

Eu ai 53, Rainald, prince, etConstantia, princesse d'Antioche,établissent définitivement une cour dejustice vénitienne dans leureapii.aIe. Les Vénitiens obtiennent en outre une réduction dedroits ( Li p. o/o au lieu de 5 p. o/o) sur les étoffes de soie et delin et (5 p e/o au lieu de 7 p. c/o) sur tous les autres articles. Ala, sortie des portes d'Antioche le droit de i besant 5 et 8 deniersmis sur le somarius est réduit à 1 besant, celui de 2 besants etdemi, sur le chameau, à 2 besants 1.

Bollémond 111 confirme ces concessions (i 67) 1 . Seize ans pinsLard, il en fait de plus grandes. Les . droits établis sur les mar-chandises sont ramenés à un taux unique, et réduits, polir tous lesautres ai'ticles que les Vénitiens vendront dans les États d'An-

Somarius . désigne une tiSe do somme dumne façon générale junieritumsarcinnlc, dit Du Cange. Dans le passage qu opposé les deux somarii è carneIus ils'agit évidemment de Chevaux.

2 Autrefois Sdleucic, aujourd'hui Secidiye/i, près des Louches de lOronte , Afi heures 3o n,. d'Antioche. C'est la' ville de Seleucia Picria, fondée par SéleucosNieller, qui y fut enterré, ancien port d'Antioche, une des quatre villes de lalétrapole Séleucide. Le village de Sueidiycli est à une heure des ruines de Séleu-cie, an 5.-E. Jl s'élève dans une plaine fertile et présente de gracieuses habitationset de délicieux jardins. Les ruines (le Séleucie consistent en une porte occupantangle 5.-E. d'une enceinte qui mesurait environ 6 kilom. de. circuit, en un

vaste' bassin ovale et en deux canaux, dont l'un creuse dans le roc partie è cielouvert, partie en forme de tunnel, mettait la ville en communication avecmer. (À manne . ïuinénuiu'e dc l'Orient, p. 619.) -

i Loge et judieio Venetiarum judicentm'. s•u Preierea.coneedirnusipsis Vcnetir,is tencre curians suam Saneti Marci'in fun-

(lihO 52m in Antiochia, et (acore ludicia sua lihere et quicte sec,,nd,tm legem etstatula Connu, eisdein indicantihtis de quacunque querela , o quibuiscunquse inca,'sarn pi-ovocabuntur nec alicui nostroruni licebut perturbare ont inquietareisos judicantes aut juulicia eorum nec alibi per triant nostrani leu-1m, 1h51

in marin sua Sancti Marci sua respondere cogentur.Le besant est nue monnaie d'or sous valeur fixe. Le mot vient , le Byzance.

oè elle était frappée.° Arehivio dci Frari , Lihro dci Pusui If, 'o. -

Mill. 1, 261:

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- 78 -tiodhe, à i p. o/o. Cette nouvelle fiiveur est acdordée sur: lademande du doge Aurio l Mastropiero et, de son mandataire JacopoGradènigo (ii83).

Assurance et sécurité géuéraie pour leur commerce, liberté décirculation, concession territoriale, juridiction, nationale dans lesÉtats d'un 'prince souverain, réduction des droits qui frappaient lesmarchandises à l'entrée et. à la sortie, tels sont les • priviléges desVénitiens dans la principauté d 'Antioche..

A Jérusalem leurs progrès furent d'autant plus rapides que leursvictoires avaient été plus éclatantes; en i ioo, Godefroy de Bouillonleur accorda des immunités après la prise (le Caïffa 1 . Baudouin 1rr

secouru par eux au siège de Ptolémaïs, les renouvela (i w 1-110/,) .Après la prise de Sidon (t ii o), ce prince les augmentait encore.

Le 1t0j de Jérusalem, dit Andrea Dandolo, reconnaissant leursservices, accorda une église, une place, une rue, des pôids etmesures, les droits de haute et basse justice (rnerunz cl naixtu,n

imperiurn 4 ) pour les Vénitiens résidant à Aclioli 5 -et d'autres im-munités dans son rôyaume°. .Quelques années plus tard (iii i),

On écrit 'aussi Oro. Mais les médailles portent AVIHO DVX.ii Caipham deinde qua alio nomina .l'onphynia dicitur, in littore maris suis

prima parte ni ont Carmeli , quatuor di surnom stadiis et i,oeo usilliario ah Aconconforniiter acceperunt. Postca ,nirnii,iitatcm ôb(cato privilcgio ,. jam snortoo Coli-ficela, Venetias redeunt. (And. Dandolo, Chi-on. p. 258).

C'est du moins cc que les savants éditeurs des Fontes rernin Aust,-iiicarvrninfèrent dito passa ge de Dandolo p. sSq. (Voy. Fontcs etc. t.. XII, r- 66.)

La basse justice donnait le droit de connaître de la flotice, des dégâtscausés, par Tes animaux, des injures légères et d'autres délits qui ne pouvaientêtre punis d'une amende de plus de dix sols parisis. 'l'elie est, du moitis la dé-finition de Claude de Verrière dans soit Dictionnaire de Droit.. La .ltautejusticcajoutait û tons les droits de la basse ledroir de glaive (jus g]adii) o ' , droit depunir 'es malfaiteurs. ( Voy. C héruel Dictionnaire des institutions, moeurs ce cou-turnes de In Fiance, t. I!, p. 638.) L'expression de nieront et mixtion irnperium dé-signe le plus souvent la haute et la basse justice, et quelquefois In justice civileet la justice criminelle, comme le remarque Dit C'est le premier sens quiest le plus féodal et le puis conforme aux institutions du royaume chrétien de 3d-rosaleus.

Action, Arche, Acre, Aco, sur la côte de Syrie, ait de Cailla et deniant Carmel, ville phénicienne, reçut des Lagides le nom de Ptoldnzots., et deschrétiens celui de Saint - Jean - d'Acre. -

tQuorum rex open expertus, ecelcsiam, rugans, plateam, pondéra et men-sortis ac mci'uni et aiiaturn imperim i, inter Vouetos in Achon i'esideiites et aliasun,0 unitntes inliierosolynsi tano regiso psis cosicessit. s (A. Dandolo, Cition. P. 2611.)

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- 70 -l'église Saint - Marc obtenait des faveurs analogues tic Pontino,comte de Tripoli a• Ce prince abandnne ait bienheureux évan-géliste Marc une maison tic -Tripoli appelée Dam, et située prèsdu port dé la: ville.-

Mais la concession la plus avantageuse est celle que le doge Mi-chieli mérita par sa glorieuse expédition et par la prise de Tyr(11 23-1125).

La grandeur du péril qui menaçait l'Etat chrétien 2 , la solennitéMême de Fambassade envoyée -à Venise , la prudence des Vénitiens,quines'éngageaient point dans de si grands hasards sans.des -pro-messes formelles 1, l'importance et l'éclat de la victoire, tout devaitcontribuer à rendre le roi de Jérusaleni générbux envers ses alliés,et il le fut.

Le cioe débattit Iescondilions avec les hauts dignitaires duroyaume avant le siége de Tyr. Ceux-ci les signèrent 5, cii l'absencede Baudouin prisonnier (i 123). Deux ans plus tard, lcroi, rendu àla-liberté, confirme les pr.iviléges accordés en soit nom (i 12 5) 6.Ces deux actes, identiques, sauf dans le préambule, sont cou-

Dandolo, Citron, p. 167. Libro dei Puni, I, P 218.Michaud, iiibliotMqac tics Croisades, t. 1, p. 39.s Quo lcmpore ad papain Calixtun, et ducem Venctiarum , post calamitaten,

qualliogeno pnncipi Antiochiié contigit.in Orientali ecclesia coniinuisTureliortimctSaracenon,m bcllis inqiuctati Aniioclienus et flierosolymilarum patriarcha etBaliluinus, seeundus ccx Ilierusaleni , legatos ,niserc., (A. Dandolo, P. 269.) -Muratori,XIÎ, P. 269. Codez Ans6rosiaans, in margine «Alibi legitur ponti-ficem misisso ad Venetos vesillummcu imagine dlvi Petri ,-in quo dits Vencto-rom inSigna conjiinxit . quod in hostos iturus exjilicarct.

Après -la victoire d'Ascalon lorsqu'on tira .911 sort les noms rI'Ascalon et. deTyr pour savoir quelle ville on assié gerait, les Vénitiens firent signer aux princi-paux barons chrétiens un projet qui fixait par avance leur part dans la ville con-quise, et qui servit de Lise à la concession définitive. (Guillaume de Tyr dans -les Grsa Dai j .cr Francos, éd. Bongars, 1, p. 829.)-

Nos quidem Warrnundus . gratin Dei sanetre civitatis Jerusalem patriarcbacucu nostrrnecelcsne eosifratrihus suffraganeis Domino, Villelmo de Bons cousin-lmlario et pagauo eancehlario , nobiscum totius regni Jerusalem socia barnaummilitia caujuneta Action in ecelesia SancireCrueis conveulentes, ejusdem regbBald u i ni pronnission es seeu ud uni li tteraruni suarnni et n u titi Dru ni probe u tionesquas eidem Veuetieorum dtiei sucs pernûntios-usque Vcneliam ipso -Fox manda-verat, propri8 nostra, et episeoporum sive caucellarii manu - pacisqile osculo,prout ordo nostor esigit, datis;. onces voie barones quarum nomina subscriptamut ..... siatuentes. (Libro dei I'aUi, t. I. P. 31-35.) -

L'engagement quo les barons de Jirusalern avaient pris était irrévocable -même par le roi; les signataires avaient proolis tIc le lui faire signel'. et (l'cnlp&ber

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- 80 -sent à la Bibliothèque-Saint-Marc), à I'Arc/tivio gcncrale (le Ve-nise', et à Vienne 3 Leur importance-a frappé tous les historiens descroisades Andrea Dandolo 1, Marin Sanuto j Guillaume de Tyr 5,Fouleher de Chat-tues 6, les ont eus presque tous sous les yeux, eten - donnent -une analyse Fidèle. Les chroniques arabes' les men-tionnent, et un chapitre des Assises de Jérusalem 1 sert à les coin-monter et à les éclaircir.

Les Vénitiens sont-établis clans toutes-les villes de l'Etat appar-tenant au roi ou à ses barons :,ils y obtiennent les pi-iviléges.qu'i!savaient dans Acbon depuis douze ans. L'acte de 1 1 ii leur avaitouvert une cité; ceux de i-i 23 et de 1 125 leur ouvraient unroyaume..

Dans chaque ville, ils auront à eux une église, une rue.00tièi-e,une place, un lieu pour se baigner, un four, toutes Propriétés héré-ditaires, exemptes de droits, aussi franches que les propriétésroyales °. A Jérusalem ils partageront la place avec le mL Une seuleobligation leur st imposée dans Achôn, c'est de permettre l'usage

d'arriver ait quiconque, parmi ses successeurs, refuserait de renoiiv8ler leprivil6ge.

Urtiversaliter igitur suprndicias conventioncs. ipsnm reg Cru Dco auxiliante-, sialiqunudo egrcssui'us de captivitate est nos Wartnundus 'Jerusalem pairiarcha -confirmat-c per Evange]iiim faciemus; si ver-o alter ad Jerosolirnilanum regnumin regeru pi-omovendus advenerit, ant-superius ordinatas pronussiones, anlequampioriioveatur, sicut auto, dictom est; ipsum firmare faciemus ; alioquin ipsumnulle modo. ad rcgnuin provehi assentiennis.- Similitcr casdem et. -oodcni modoconfirmai unes karoncs successores et novi futuri hamacs- facient. ( Libre dciPatti, t. 1, P. 3i-35. Vo. -aussi ibid. p . 97 CL 570.)

Cod. S. Mord, blini, cl. xlv. Cod. rxsL - -Libro dci Puai, t. 1.46 cl 48.Liber albus, fol. i48-i-5ô.CArde. .'27O.'

Srcrcta fedeham crrtcis, 3, 6, j o, clous les Geste ebi per Francos, M. Bon-gars, t. li, P. bS. Guillaume (le Tyr, 12, 13. 14,-24, dans Bnngars, t. I.

° Me Gratis pci-cg rinantium Frcurcorurn, C. LIV, Bongars, t' I. p 436.Trad. Romand; xi, p 46:Comte IJerignol , t. il . Assisds (le. ha cour des Bbergeois,'Paris, 1843. 1 n(rod.

t p: 100, toi.- ---In oninibus scilicet suprad icti regis cjusqnc succcssoruna suis doniinio nique

oinniuni snoi-ïm baronuin eivitatibcls , ipsi -Venetici ecclesiam et inlegram rogamnnamqoç pl.iieam sive halueuto , nec non et fiirnum liabeani - jure bereditarioin perpetuniis possidcnda, ab drnni oxaciione liber-a, ieut surit i-egis pi-opria.Vo,-, in in pi ai en Jerusalem IaIIII '1m ad propiiiini h boa n t , q n an! ii In mcx h aberesolilos est -( Lih;'o (Ici Priai, 1. 1, rSG.) -

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- Si -

de leur four, de leur moulin, tic leurs balances aux habitants, qui eutiseront comme d'un four, d'un moulin ou de balances royales .Les villes de Tyr, et d.'Ascalon, reconquises sur les infidèles par larépublique, sont divisées avec leur territoire èu trois pat-tics le roien garde deux pour lui; la dernière appartiendra aux Vénitiens entoute souveraineté 2.

- Leurs marchandises, àl'entr&, à la sortie, dans l'intérieur duroyaume, passent librement, sans vexation, sans impôt. Un seulchargement est excepté dccc régime d'immunité absolue. L'hommen'est pas admis en franchie, comme les produits de soitet les pèlerins sont moins favorisés que les marchandises; tes Vé-£itiens qui transportent ces pieux voyageurs devront payer au roi,selon la cout.umé ,- le tiers du prix du passage 3 .-

- En retour de cette concession, celui-ci s'engage à compter audoge la somme de 3oo besants sarrasins'. Le payement aura lieuchaque année à la fête (le saint Pierre et saint Paul..

Les Vénitiens ne seront soumis entre eux qu'à la juridiction (lela cour vénitienne instituée dans chaque ville du royaume. Si titid'eux attaque en justice titi d'une autre nationalité, la courroyale sera-compétente ' . .Les Ashises dc Jérusalem confirment l'acte

Dorique diantre civitatum Tyri et Ascalonjs, In-tian, partem cuni s'ils pci'-tinenciis . et lori ion] partern ton-arum omnium silsi pertinenciom a die sanciPeu-i San-aéenjs Iautuitn scrvient.iufi]-, que non surit in Fraiieoi-t,m Ùsaiiibus , ai-torons -quaruii, vol , si. Deo auxilianlo utramque per corroi a,,x j lii,n, aoL aliquodingeniusn in Chrislianorum poLesi. loin Spiritus Sanctus traders volucrit il lanuquam Lértianlparlem skin diel,ùn est ;Jibere et regaliter, Meut s-ex alias duas

Venctici habitus-i il, perpetuum sine aheujus Conlradictionis impoditionc ,jureIiereditario possideant. s (Libro dci Parti, t. 1, (18.)

Celte parue de Tyr, avec quelques-uns des autres yriviléges,eessa, à la fin d1uxii i siècle, d'appartenir la république vénitienne pour devenir la propriété del'église Saint-Marc. (Acide i uGé, 1167, 1 175, ap. Tafel, t. XII, p iAé, 148.6) -

.Sarraccnali Bywntii.Le besant sori'iisiu désigne la monnaie d'or des sultans.d'lconium mais -ho parait pas avoir de valeur fixe. Nous avons dit plus haut qu'ilen était dé même du besant. -

u Ad turc Veiielici nuullam penitus dalionem vol secunduini usuin vol sceundumiillsoi "a l . ion cul, i , idelicet juil!0 modo in[ ronde, siando, vend end il, eomparandovol inoranulo 0111 exeundo do titilla cnitus. causa aliquam dationem persoheredebout , nui sol uni , quando vin, joui aut ex 011Mt euni suis nayibus peregrinos por.Ianles.'F 'Inc quippe sceund ui,, rogis êous.tetu,dinen, tertiain parlers ipsi regi doredebent.»

s Si vol-- al iquod placituius vol alicujus negouii fitigal innem Veuseticus ergs Vo-

-'-t;

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- 82de 1123-1 125, en reconnaissant aux communes vénitiennes, gé-noises, pisanes, la juridiction commerciale et le droit de condamnerà la confiscation et à la prison. Toutefois ce pouvoir est limité auxcontestations qui s'élèvent entre Vénitiens, et, même dans cecas, h certaines affaires; les communes ne peuvent connaitre descrimes les plus graves, ni porter la peine capitale- Elles sont mômeincompétentes dans les actions immobilières'.

Si un Vénitien meurt sans testament, ses biens seront .dévolus àses compatriotes, à la commune vénitienne. Le Vénitien naufragéne souffrira aucun dommage, et, S 'il périt dans le naufrage, sesbiens passeront à ses héritiers, ou, à leur défaut, àla commune7.

Les échanges entre Vénitiens et étrangers sont soumis .à la mêmerègle que leurs procès. Quand les Vénitiens vendent à des compa-triotes ou même à (les étrangers, on emploie leurs poids et mesures.Mais s'ils achètent à des étrangers, ce sont les mesures Malesqui ont cours'. ---

li y avait dans tes lois favorables les éléments nécessaires à la

neticurn Jiahuerit , in curia 'Veneticorum difflniatnr-, vil si aliq,,is veisus Vene-licun, queeltain ont litigationent se babdrè erediderit , iii cadeaue,,ria detenni,,etur Vernni si Venetiens super qne.nlihet alituil hon,inc,n quamVeneiicwn clamorem fecerit, in citrin regis einendetnr.

Les Assises - de Jérusalem fournissent, à cet égard, nu rapprochement en-riens -

Bien sachés tue unie des coumarines. si couvre sont Voneciens et Cenevés dt-Pisans, no doivent avec unie cort entre laits, se non de leurs gens mcysmes ,quiont contrest e ti senible de vente ou dachu, ni d'aucunes autres convenances qu'ilsont ensemble. Bien tes pevent condasnpner ienr eonceies de Fo yer, ce il le for-font, et moire en lent prison. Mais bien sachés que anle eoniuune ,t'a cort desane, ce est de cap aj,arant, ni rtc nul meurtre ni de larecih ni de trayson ni tehereierie, si coule est patelin (renégat).ou herege, ni tic vente de niaison,oi deterre, ni de vigne, ni île jardin, ni de casse, tuais toutes ces choses se deiventjuger et limer et vendre eu la cort fléau ,et antre part ne se peut faire par droit liepar rassise de iéi-nsatern. Et se nu] clos . eoniunes juget on faiset juger enlie jansailles de ces choses qui sont demis defôndues , si ne dei( riens nier, par dreit nepar l'assise; et le doit tout defaire la cort fléau, et ne doivent scull' ir le tort de lacouronne. , (Conne Bougnat, Assises de Jérusalem, t. il; Assises Jeta cour des Bour-geois, p loo- ,oI ).. --

Insujier, si Venetiens ordinales vel inordinatns (testattis ont intestatus , dansle texte de 1125), quod nos sine lingna dicimns , obierit, res sien in potestatenuVeneticorum redneantur. - Si vero aliqitis Venetieus naufragium passus fuesit,nullum de suis r6bus pritiatur damnant Si natfiagio mortiins ftterit , suis bore-dibus ont alus Venetieis nu suai jemanenles Ieddalll,.lr. t -

! Libre dei Palti, 1, 46.---

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- 83 -constitution de colonies durables, actives, indépendantes clanschaque ville (lu royaume chrétie), une comniune vénitienne avecun quartier ii elle, une cour de justice, une vie propre et libre;dans les principales, le partage de la propriété avec le toi, partoutl'entrée et la sortie franches des marchandises.

La terre sainte réservait à l'activité de nos marins des conquêtes(l'une autre nature. En Û 02, les Vénitiens, vainqueurs (les Pisans,hivernèrent dans les ports de Grèce. Au printemps ils reprirentla mer. En vue de la ville de Myra , l'évêque El nrico Contarini,chef spirituel de la flotte, ordonna de jeter l'ancre: Avant sondépart de Venise, il Savait visité l'église de Sainï-Niccolè du Lido-,demandant la grâce de rapporter le corps (lu saint, à soirLes Vénitiens s'arrêtèrent devant Myra à la voix de l'évêque. Onapprit, par les hommes envoyés . à la découverte, que les dévasta-tions des Turcs avaient presque fait de la ville un désert. Aussitôtl'équipage débarqua. Arrivés à l'église de Sàint-Niccolô, les Vé-nitiens cherchaient avec une ardeur qui n'était pas toujours res-pectueuse ils remuaient, brisaient tout. Dans leur impatience,ils mirent quaûe gardiens à la torture. De guerre lasse, ne vou-lant pas revenir les mains vides, ils recueillirent le corps de deuxautres saints, saint Théodore martyr et saint Niccolè le jeune.A défaut de la relique clé l'oncle, ils emportaient au moins celledu neveu. Cependant l'évêque ne cessait de prier et de pleurer àgenoux il implosait une révélation d'en haut, et commençait h -perdre espoir lorsqu'un doux J)arfum se répandit tout à couguida ses recherches et le conduisit sous un autel. On creusa ciicet endroit et l'on trouva le corps (le saint Niccolè. Dans ],ade cette découverte, les prisonniers pisans furent mis en lihert.Les Vénitiens chargèrent ces précieux restes sur u n de leurs 'na-vires et appareillèrent sans délai. Un véritable triomphe les atten-dait clans leâr patrie. Les reliques (lu saint, reçues avec une pieuseallégresse, furent placées dans le monastère du Lido 2

La flotte qui aida Alexis Comnène à eomhaure Bohémond ne

lt Myra aujourd'hui Dembré, sur ta côte méridionale d'Anatolie, qui s'avanceentre les golfes de Maeri, àlo,iest, et dAdaija, A l'est, et à peu de distance desruines dAié»helIos (Andipltil). On trouve encore à Denibré les ruines (?il

-antique de Myr , et • an sud de Deuibré , le couvent de Saint-jcolas.2 F: Corner, Notirk stôriclic delle cliic,çc Vencec -.-- Alb. Canonicu, , ap. Ho-maul '' , t. Il, p . i5. . .

6.

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-M 84 -

fut pas moins heureuse. L'équipage enleva le corps de saint Étiennesous l'autel dune église byzantine. Les Grecs se lamentaient à lavue de cette fraude qui les dépouillait d'un objet vénéré, maisn'osaient en venir aux mains avec les ravisseurs. Ceux-c i sehâtèrent de transporter sur leurs navires ce butin d'un nouveaugenre. Une voix mystérieuse les ayailt avertis d'un danger proche,ils se retirèrent clans le golfe compris entre les caps Malée et Ma-tapan, se mirent à genoux et se recommandèrent au saint. Sauvéspar l'intercession de lcùi protecteur, ils arrivèrent à Venise. Ledoge vint à leurreuicontre en grand appareil, et soutint lui-mêmela châsse, pendant qu'on la transbordait sur le Bucen taure; Toutesles églisesse disputèrent l'honneur de la posséder. On la déposadans le monastère dé Saint-Georges-Majeur 1, on institua sous levocable dii saint une confrérie et tin oratoire (scuo!a )2, où le chefde l'État dut chaque année éffrir ses hommages, accompagnéde tous les mistràts et entouré de toutes les pompes de la répu-blique 3 (ii ro).

De ses &oi ieuses expéditions, Domenico Michieli rapportait,avec des marbres splendides et de précieuses étoffes, les reliquesde saint Isidore et(le saint Donato. On consacra au unes.une cha-pelle spéciale, aux autres la cathédrale de Murano. Lé, doge futégalement obligé de leur faire une visite annuelle ".

Au moyen ftge tous les peuples avaient la foi, mémo les puiscommerçants et les plus jaloux de leurs intérêts matériels. L'élanunanime des croisades transportait les moins enthousiastes; Aussichaque voyage ramenait-il (la!s la première des cités marchandesun vénérable souvenir des courses lointaines, et un saint trophée;Cependant le caractère national marquait de son empreinte cesreligieuses aventures. Les hommages rendus à d'antiques autels nerestaient pas sans profil., et la ferveur du pèlerinage n'empêchaitpas de rjaaigner. Si d'autres passagers se contentaient de revenir

Saint-Georges-Majeur. jie située en face le palais ducal et l'église Saiul-Marc.

SecaM, ou Confs-otcreila, ou Frare,isra, 01! Con!pagaia !oïcale désignent, descongrégations particulières ou turions de personnes pieuses, sous l'invocation dequelque saintprolecteur. &uola désigne aussi l'oratoire ou la petite église fondéepar cette-congrégal in!! et dédiée ai! saint.. !nCes mon!iel!ts sont I è5..noml,reI ÏVenise le p11is remarquable est la Steak, cli Soin flotta.- ' Ronianin t. Il, p.' f4. ibid.

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- 85 -d'Orient avec la mémoire du saint sépulére et l'image vivanté ditChrist, les Vénitiens tenaient à rapporter, dans leur navire, untrésor tout au moins spirituel. Plus il avait fallu de labeur et d'in-ventio&pour le trouver, -d'audace, au besoin, pour le Iavir, plisgrande était la joie du pieux corsaire, plus vives les acclamationsqui l'accueillaient au retour.

CHAPITRE VI

LUTTE TÉS VÉNITIENS ET DES GRECS Au XII' SIÈCLE.

Les alliances, qui ont pour but de rapprocher les princes et lespeuples, ont sduvent pour effet de les rendre ennemis. Le plusPuissant, ou le plus riche, doit mettre autant de mesure dans sesbons procédés que dans ses exigences. Il arrive tin moment où lacontinuité des Services pèse ait plus faible tout autant que la con-tinuité des injures. L'union dégénère en-protectorat d'un côté, envasselage de l'autre, les secours trop répétés mettent à nulla dé-pendance de Eobligé, et lui coûtent par cela mémé bien au delàde leur valeur. Quand cette heure est venue, il n'y a ik d'alliés.Plus le bienfait est grand, plus l'ingratitude devient éclatante. Car,Si les princes, si les peuples n'aiment jas qu'an £t pu les aider àvaihcre, comment pardonneraient-ils à cêux qui les sauvent? L'his-toire a montré que, pour rester en bons rapports avec une nationétrangère, il vaut souvent mieux s'exposer k la comhatl.re qu'aupérilleux honneur de la défendre, et que certains bienfaits lui sontplus amers qu'un outrage.

Les Vénitiens firent, au XII' siècle, l'expérience de cette véritépolitique. Depuis de longues années, ils étaient les marins, lesauxiliaires des empereurs grecs. Leurs Services, quoique déjà tropgrands, étaient encore de ceux qui peuvent se faire oublier. Mais,à Durazzo, ils passèrent les bornes en devenant tics libérateurs.

L'orgueil •se joignit à l'avidité pour les rendre odieux à leursanciens amis. Après 3es concessions excessives d'Alexis, ils nesurent plus dissimuler leur âpreté commerciale. lis oublièrentqu'en pays étranger, s'il est lion de s'enrichir, il est dangereux des'enrichir trop, et surtout de le paraître; que les peuples paresseuxsouffrent assez volontiers qu'on pi-cime leur place, mais jamaisqu'on s'en fasse gloire aux dépens de leur amour-propre.

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- 86 -Affranchi-par une faveur uniquede tout décime, ils firent

bien vite, dit Cinnamos, des fortunes immenses, ht leur arrogancen'eut plu g de bornes. Ils traitaient les citoyens comme des esclaves,et leur dédain' n'atteignait pas seulement les hommes du peuple,mais les personnages investis de la dignité de vdnéraftles ou desplus hautes dignités romaines. - Ils ne se contentaient plus, dit.Nicétas, d'agir en ennemis des Romains :-ils bravaient les menaceset les édits impériaux 1 . D

Ces plaintes, exagérées sans doute, montrent l'impression que lagrandeur et la richesse des Vénitiens, chaque jour croissantes, pro-duisaient dans les villes impériales. Ii y eut un mouvement généralde jalousie et de haine contre ces.alliés trop heureux ,qui venaientdéposséder les Grecs dans la Grèce même et dont la fortune n'étaitpas seulement immodérée, mais insultante.

Les empereurs, trop clairvoyants pour ne pas pressentir leseffets de . cette pacifique invasion,- et trop faibles pour les conju-rer, songèrent moins à expulser les Vénitiens qu'à leur susciter(les rivaux: Les Pisans et les Génois, prompts à suivre leurs prédé-cesseurs dans les mers d'Orient, et toutpréts à les supplanter,réclamèrent la concession des mêmes faveurs. L'Empire, quel'exemple des Vénitiensn'encourageait guère à se donner de noti-veaux hôtes, n'avait espoir que.dâns la- rivalité des républiquesmaritimes; il accueillait volontiers des demandes qui allaient ug-menterie nombre des amis suspects, mais neutraliser leurs forces.Habitués au privilége, les Vénitiens ne pouvaient souffrir mêmel'idée d'un -partage. Aussi les efforts que fit la politique byzantinepour les contenir n'eurent-ils d'autres résultats que (l'allumer leurressentiment, et d'ajouter aux: excitations de l'orgueil celles de lavengeance. . - .--

Depuis la fin du xi' siècle-, la bonne intelligence ne se-conservait

Mdvos n r&h' drdnt4,v ., iovo -tàç cv' étxopIàv kxdias oivi 1w j2, i& v dbcc/vou -capcovio. 'l'civvv xJ -rà dauçpérpri êvîOev -).ourcTv 12z') ê;VEI&I, ci,rok 4cv. Âv4i (ivToi -,oxit,, x! dvJp2ndJQ -wpoatT-ov, dkÀ'OJX£gs; 763V WOkÂ63,J 7WI ca âo7:x63v 1 A?.& ,dv -n; ê,J ,ec7dtti êpdve:, xiiêri vcîldv n pofrxc -t63v wp9 t¼qnlo:s acrzv'2v. (Cinnanios , VI; 10, éd..Bonn.

P81.)n& zp:GaXÀdevos O.o-iov o?6v aGûdh,dv n ,ca dnlk,2v i-steâk,kov

sôvov dpakcit Pwadoi; dÀ?-à ai 763vIx63v dvsircdlpdÇ&'; dtec)&f,iTC 7(ŒJ êvT463v. (Nic@as Choniata itoni,eI, V, g éd. Bonn. i' 2i3.)-

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- 87 -qu'avec peine 1 . L'empereur Jean Comnène avait renoncé aux nié-nagments que gardait Alexis, et Domenico Michieli, avant d'aborderen terre sainte, avait enlevé aux Grecs "lIe (le Cliios, ravagé celtes(te lihodes et de Lesbos'. Au retour d'Ascalon et de Tyr, la lutte, sus-pendue par les glorieuses victoires de Palestine; fut reprise avec unenouvelle ardeur. Les déprédations des Vénitiens nuisaient beaucoupaux Grecs', habitués depuis longtemps à confier le soin tic leurs ai'menibu Is maritimes au mémepeuple qu'ïlsdevaientaujourd'hui cour-battre (t 125). L'année suivante, le doge repartit de Venise àIa têtede quatorze galées dirigées uniquement contre les Grecs. Il s'ernpanide Céphallénie 4, et croisa dans les eaux voisines. Les négociantsvénitiens étaient en partie chassés de l'empire; les autres ne s'ymaintenaient qu'en subissant mille infractions à leurs priviléges.séculaires. On ne leur épargnait aucun genre de vexations et d'ava-nies. On en vint jusqu'à leur interdire de porter la barbe, et on lesobligeait à se raser'. La république envoyait dans les mers d'Orient(les foLLes nombreuses, dont la présence contenait l'hostilité desGrecs; mais cette protection des intérêts nationaux était aussi oné-reuse que peu efficace. Les Vénitiens souhaitaient donc Je réta-blissement d'une paix si nécessaire à leur cornuidrce. Vivementinquiété par leurs pirateries,et incapable de résister à leur marine,Jean Comnène la désirait également. Une nécessité ômmune rap-procha les deux adversaires 6.

Voyez plus haut eh: V. - --

1- ore xaÂeirilvaç ô aû,Ac-s du Twojoi, Tfis tW(fl/Wv etogdrooaeto -oAiycieç. EvtsOgp dzdvaàOw i'w fzaI ous J,à crovç atroTç )v. ETDos,•ov texrni'4evo, vs&v; TOôtwv hsyÀOov r9 yff dte Jè XI0,, te elÀov, x& I\Jâov ,'aAédou i's5a&-v IeŒtilpupov deoçzŒcl&v. (Cinnamos, toc. taudato.) Jean Comn/jncruSgnade '''8 à ii/.3.-Tiv b .9-sÀdcc, te zeyud,,tes Âtyul de,, 02epiev olxeuoaésoveç dvOpchzrwv

?e'Jc. (Cinnamos, '0G. laodn(o.)« Anno dûcis nono stoins xiv galcarnni contra .Imperatorc,n Constantinopoli-

(coLin, et ail Vonrtori,m tuitiononi egressus, oppidum Ccpha!ooiœ secus Epirumcapit.a (A. Dandolo, J). 273.) Cf. Daru «Jamais homme (I). I\lic}iicli) isoniérilamieux soir TERR0IIGn..4conuM JACET-IiiC. s ('1'. L P- 123.)

u Hnjus astntian Vonctis odicniibus dux reparans galons assidue pro totem«mvi gantin n mini t., nit,tuist, e offcrtsionibus , aucto j am schisme te il ecretu n, fait,ut Veneti qui h Ileusptc nutriverant barbas, de cotai-o im!,erbcs c_fflcia:tiu- (sic).(A. Dandolo, p. 37/,.)

u Tatustern Ai igostiis ail cor rodions J ucem requirit , ut silo legatos mi Il aL Pol -lice, s dii'ysobol i ni Vo ii eti cum Plûmes"s sol ii o con il onare. Jdeoque d tix au n 110115

per site, tiitotios ohiata ohiinuit, et foedu, rodiuicgratur. «s (A. Dandolo, p. 27/1.)

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88 -L'orgueil byzantin voulut déguiser une réconciliation forcée sous

Ies . appareiices du pardon; et afl'eda de recevoir avec cléffience leretour de ses anciens sujets qu'une révolte d'un jour avait égarés.L'cmpereùr.daignait, en considération des services antérieurs, jeterun voile sur le présent, et, sensible à la conversion des coeurs, ou-vrait aux'enfants prodigues des bras paternels. Il voulait bien accep-ter le - serment, des Vénitiens; il rétablissait-, -sur leur demande, leclirysùbulle octroyé par son père, mais justement infirmé parleursfautes ' .- -- --•.- ---• Lesdifférentes stipulations de l'acte de 1082 étaient expressémentrenouvelées. On.abolissait les droits perçus depuis quelques. annéessur -les marchandises vénitiennes, et l'on remettait la franchise envigueur, comme, au temps cUAlexis Comnène 2 Les Vénitiens; deleur côté, juraient .solennellemeal rie rester Mêles à -la paix et à lacause de l'empire (i 126)..-- - Il est plus facile de renouer des relations interrompues que derendre à deux peuples une confiance réciproque. Jusque-là les chry-sohulles impériaux avaient été achetés par des services. Pour la pretmière fois, Venise lés . arrachait par la force. Les armes employéessi longtemps à défendre l'empire, venaient dé le combattre -cl- del'humilier. Le traité laissait lés uns irrités par la défaite, les autres

n Sol et mu1tociens aritiquior 1'.des otjuo i,enivolentia posteriorem malivolen-tiam contegere ac delere, victis dominis et aniicis memoria p.-iois subjectorum etaniicorum bonitatis vclut nun.c, quorue in Veneticos 000tigit. Reminiscens enimimperiuno nieum antiqun.00nnn ]jc.,ivoleotioe et fidci, quam erga semper n'efllO-rabilom Imperatorem et, dilectissimum patrcm ejus ostendenint objicientes sepencuhis toto unimo pro lkomanin, et ciim strenuitnte indubitanter, cet-tantescontra inimicos, qui tenu exercitum ed,,xornnt contra ean) • rurn jmulo antc fi) cismain gesta si,nt • non re1,utavit et eonvcrsioncnl eo,um iiccepit et nutum ois at-tendit bilarem, et accedentes -in aluns suas suscepit,.et.conscquenter quidcm tn-(luigeutia bus dignes ],aboit • ut ncquaquaifl jam lesiot.i eujrisvis subjicerentur,quantumuibet super quibus iniperium et Romauiam offenderunt (ex temoniacasicut videttirviolentia) , sed pèrpetuo-intlnigentiam haberent imperii moi, qnœper presens eltrysobullion donata est, sicut p.'omittcntihus rursusque toto anima,, o ikornania puguare et omni situ i.npel-io naeo eliristiano ordi te. -...( Chrys.fie] 116, cxtr. de celui de j .48, L. .Patii, Ï, gg.)

Defni t per presens cltt-ysobultion nullum eornn, qui sùb potestate imper,ii,ost i G réels itegoeiant.il,iis con Venetieis in omnibus .-egio..ibus Itonianim, volqua 'id o -ci,rl il u,] cos vol qu ami o croit ah n li9 no en m p m dore pro comnioreinqitid 3 il,et vol per altema quasis ekaetione sec! ni- exetiseuttir et ipsi . sictit et liiifia i clin' io.nrnerciis negnciaittuir. n (Ghrycde ii £6, cxtr. de ccliii de.i i48, Lii.Pou ' , 1,99.1

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stimulés parpar la victoire il ne phurfa contenir ni les ressentimentsdes vaincus, ni l'ambition croissante des vainqueur.

Une dernière alliance réunit les deux nations contre • les Nor-inands, alliance fragile et moins durable què le danger commun.

Au milieu du xii 0 siècle, les Normands reprirent lurs projetshardis du xi°. Roger II, fils (lu comte Roger et neveu de RobertGuiscard, suivit les traces de son oncle et-le dépassà. Les côtés deDalmatie, protégées dès le début par les forces vénitiennes, échap-pèrent aux ravages. Mais la Grèce entière.semblait ouverte. Modon 1,Corfou 2 , Céphallénie tombèrent aux 'mains des barbares. Côrinthe,Thèbes, Athènes, Négrepont furent saccagées 3 . Le roi normandrapporta de son expédition d'immenses trésors; denombreuxoù-vriers habiles dans la fabrication des étoffes de soie 4, industrie qu'ilimplanta en Sicile au grand préjudice des Grecs, toute une popu-lation d'hommes, d'enfants, (le femmes, qu'il répartit dans les ré-gions abandonnées de son royaume. La Gréée

se dépeupla au.profit

de la Sicile ( 1 115-1146).Inquiétés en Dalmatie même par- les houes normandes, les

Vénitiens accueillirent favorablement les premières propositionsde Manuel Comnène. -Mais, avant de rien commencer, ils prirent,leurs précautions et leurs gages. Domenico - Morosini et AndreaZeno se rendirent à Céphallénie de là ils devaient négocieret obtenir de nouvelles concessions (ii 47 ). En méifle temps,les colonies vénitiennes de Constantinople -et des autres villes re-cevaient l'ordre de se ranger en toute hâte sous les drapeaux del'empire.- --.

Pietro Polani se mit à la tête de la flotte. Mâis, parvenu àCaorle5,il «tomba malade, et remit le commandement à son frère Jean et à

1 Otho Friuing, Dc Geseis Fret. I. I, e. xxxiii. Ap. Du Gange, in Cinnam,rnnota, (cd. Bonn, P . 336). ----. Voy. id. ibid. la ruse dont se servit Rogcr.ponr tromper les Grecs et eutrcr il

Corfou; il se fit passer pour mort, et les guerriers qui portaient soi' cadavre occu-pèrent la citadelle par surprise. -

Cinnarnos , I. HI, e. ii. &l. Bonn, P. 192. - Nicétas , Manuel, I. 11, C. i-v,.d. Boni', P. q8 et suiv.

e 0 1 ij6 ces clinul r1,ii seiko, pannes texere sol ont. u (Otho Frising , lac. taud do.)- Cf. Nicétas - Moonct, I. II, e. vu'.

Petite ville A /j5 kiioni. N. E. de Venise, à 1 7 kulom. S. de Porto-Gruaro,bâtie s,ii' l'emplacement de la Capruhi des Romains. Elle n 'a aujourd'hui que

,5no I abitani s; unis elle i-ta ii florissante al moyen âge. Sa position Sur uInQ de

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90son fils Renier. Pietro reprit le chemin de Venise, OÙ il -mourutbientôt. Le ralentissement (les opérations laissa le champ libre auxNormands qui avaient poussé jusqu'aux rivages (le Constantinople.Les envahisseurs lançaient des traits enflammés sur lesédifices de l&-capitale'.

L'avènement-de Domenico Morosini (t :t48) donna un nouvelélan à la marine vénitienne. Après avoir -rallié une escadre byzan-tine, Jean et Renier Polani rencontrèrent les Normands en vue ducap Malée. Abandonnés lâchement des Grecs,.ils n'en remportèrentpas moins la victoire après une lutte acharnée. Quarante vaisseauxfurent pris, beaucoup d'autres coulés ou poursuivis jusque sur lescôtes de Sicile 2. A la demande de Manuel, successeur de Jean Com-nène, les vainqueurs appareillèrent sur Corfou, qui restait encoreau pouvoir de l'ennemi-

Le-- -:-

Le siége (le la ville,- entrepris en commun, ne tarda pas àfaire éclater -la mésintelligence des Vénitiens et des Grecs Tout.d'abord, les alliés se montrèrent une si grande déflane, que l'oncrut prudent de les séparcn Les cieux flottes eurent chàèune unmouillage t. On voulait Prévenir l'explosion (Les haines qui dataientde loin, niais que la tràhion de la -dernière bataille avait encoreenvenimées. Toutes les précautions furent inutiles. Les soldats desdeux nations, débarqués - et établis -autour de la - ville, se ren-voyaient les provocatioàs et les injures. On en vint aux mains,et cette guerre nouvelle fit oublier les Normands. Les Vénitienscombattaient les Grecs avec un acharnexent extrême. Leur .fumur, dit. -Nieétas, résistait aux prières, aux menaces des -chefsles plus influents. Cédant au nombre, ils se retirèrént sur leursnavires,- ardents- encore -et altérés -de vengeance. Maîtres de l'ue

basse et malsains du ! rmoul explique en partie sa décadence. Elle est le siégeUni évêché suffragant (]Il ria r-eat de Venise, et son pôrt voil: 1ari r encorequelques navires de pêche. — Sur ces événements,. voy. Iloinaisin . t. Il, p. 62et suiv.

Cinnanios , III, y (éd. Bonn - p: soi) li ajoute qu'ils furent repoussés lire-'leuscillent et qu'ils éprouvèi-entde graciles pertes, -

Fasello, De reh. Ski!. p. Rornanin, t. .11, p. 63.Cinnausos j . 111 , e, y (éd. Butin, P. 98):Nic5tas , Manuel, t. 11, e. fi (éd. Brun , p.. io3 et suiv. )

La ville était sur "n promontoire inaccessible qui plongeait da ,us fille met-fonde cl bordée (le rochers escarpés. Lebeau signale avec raison la ressen,I,la ncevin l:t (lescript il' n vl'Llomère et de celle de Nicétos. ('I. XVI, 1 1 , 32.)

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- Di -d'Astéris 1, ils la mirent à feu et à sang. Une galère romaine, tom-bée en leur pouvoir, ieui- servit à outrager les Grecs et la majestéimpériale. ils étendirent à la poupe des tapis d'une grande finesse,jetèrent le manteau de pourpre sur le dos dun esclave éthiopienlaid et difforme, lui mirent sur la tête une couronne, et prodi-guèrent les railleries les plus cruelles â:cetfe représentationinju-rieuse de l'empereur 2;

Manuel avait encore trop besoin des Vénitiens pour ne pas fer-nier les yeux sur Ieurs insultes. II leur envoya quelques hommesde leur nation restés fidèles et les décida à rejoindre la flotte. Lapolitique byzantine dissimula pour ne compromettre ni ses succèsprésents, ni sa vengeance à venir. ----. Corfou tomba au pouvoir des assiégeants après une longue résis-tance. La flotte grecque, contrariée par le mauvais temps, ne putopérer en Sicile le débarquement projeté. Mais Grecs et Vénitiensrencontrèrent, dans la nier Ionienne, les Normands, qui revenaientdé leur course audacieuse dans la Propontide. Ceux-ci perdirentdix-neuf galères, et Roger se retira dans son lie, où la mort l'attei-gnit peû de temps après (i 154). Les corsaires dalmates étaientprivés de leur allié naturelles vainqueurs les surprirent et lesaccablèrent. La Dalmatie qui avait voulu s'affranchir du protectoratdes Vénitiens, tomba sous leur domination... . -

Avant la victoire, Manuel avait signé deux chrysobulles, l'un enfaveur dé la république, l'autre en faveur des Vénitiens établis àConstantinople et dans tout l'empire (t147-iiâ8). Le premierconsacrait, selon-l'usage, les chrysohulles antérieurs, ceux d'Alexiset de Jean Comnène; il mettait en vigueur le régime de la franchisecommerciale dans la ville deMégaldpolis, et dans les îles tic Chypreou de Crête, où des circonstances particulières l'avaient réduit à

Ni celas Choniata, IL, e. y et sui v. p. ai et suiv. Lite 4'Astéris est situéeoutre les tics d'ltbaquc et de Céphaliénie , dans le détroit qui les sépare. C'estNicétas lui-même qui nous l'apprend h Àalepis aOwn oTsai d&1,v, ijv acu' ol

dÀa, seïcOw Féaov lOdung sa! t57 T&v KcÇa1vaw tcrpairdcws. (Manuel, I. .11,C. y , M. Bonn, P. t. 4.) Cf. Wordswortl, , la Grce pttoresque et Iustorujuc, ta'.Begnault ap. Joanne, Jùnérnire tic ('Orient, p. 252,col. o Vis-4-vis (du portde Polio, soir la côte ,iorduest de Titialci ) est flot de Dascalio; c'est le sci ' i ro-cher qui se rencontre dans le détroit de GéphaiMnie, et par conséquent ce doit(lre Astéris, o4 se cachèrent les prétendants pour sui-prendre Télémaque à saitretour de Pylos. a-

N iertas Choniata - 11, toc. laudalo -

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- 92 -l'état de lettre morte l . Le second 2 cédait à la colonie vénitiennedes terrains considérables à Constantinoi5le, affectant de. voir dansla prise d'armes des sujets vénitiens l'élan spontané de leurs coeurs,et non l'ordre officiel de leur gouvernement.

Si Venise maintenaitencore avec les Grecs une paix incertaineet chancelante; mais nécessaire à son commerce, elle lie Voulaitplus s'exposer pour eux au péril de nouveauxcombats. La dernièreguerre ne -lui- avait pas inspiré moins- d'estime pour ses ennemisque de mépris pour ses perfides alliés. - La monarchie normande,par le lait iûênie de son établissement, avaitchangé de caractère.Ce n'était plus- un nid de pirates incorrigibles, qu'il fallait exter-miner à tout prix; c'était un royaume riche, bien- (lue barbare,à ôonquérirà la- civiliation et au commerce, une mine nouvelle

exploiter, quand l'ancienne menaçait tic ne plus s'ou.'rir-Enfin,contre les Grecs, hostiles, tout prêts à la trahison, Ôn se ménageaitun recours dans les fils. de Robert Guiscard. L'intérêt comraercialet i'intéi-êt politique commandaient aux Vénitiens (le traiter avecles Normands: ils traitèrent.- --- -- Les succès obtenus sur mer et la mort de Roger II Îailitèrentles négociations que Domenico Morosini entama avec le fils de -ceprince, Guillaume l'. Là paix fut rétablie entre les cieux États. Leroi rendait les prisonniers et l6s tenus enlevés -aux Vénitiens de Ra-guse. La république abandonnait ceux deses ujets -qui étaient restésfidèles à l'empereur dans la guerre que continuait Guillaume 16F.

C'était signer une déclaration de neutralité favorable dux Normandsci malveillante pour lés Grecs (t 154). Deux ans plub tard, le suc-cesseur (le Domenico Morosini, Vitale Michieli 11 assistait indifl'éientà la lutte de Guillaume et de Manuel, et restait sourd à l'un de cesappels qui partaient tic Constantinople, et -auxquels Veiise-a'aittoujours répondu (t 156) 5.

- ' Litre (Ici l'uni, t. ii, 107. -

Ce document est extrait do clirysohut le d'isaac l'Ange, -où il est- inséré, iiiextenso. (Libre dei Puai, j , i. te.)-- --

voyez plus loin, eh. iii, p. -,i8.- -iDitx postea . pacis fernidiis, coin Gogiielmo rege acl pacem devenu.. tenasquc

\eoetornm a liagusio mit-a et cos siiniliter, exceptis iliis , quos in flivoren,I iii tin op ni j ta., j Jn,pera tons in venirel. , sec u t-OS mi dit et. hnn,ti ii ita tes p! u ri nias inson rogne negotiatorihus induisit. • (A. Dandolo, Cbroi,, p. 28G.)

E nian oc1 Toperai on Cojislan Li flOp') taillis 51115 FlUO ii S Cil Iii G u g! icI 1110 t-egopaceni composuit , et, vilicu o juranienti M-ai-iatn Oj 15 -gcriitani regi iii 1lxOt-Cl)i pro-

M

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-93—.Le refus de Vitale Michieli fut d'autant plus pénible à l'empe-

i-cm' que ce n'était pas le premier dont ce prince essuyât l'humi-liation. Avant d'implorer les Vénitiens, Manuel s'était adressé auroi des Normands. II n'avait pu lui faire accepter ni son allianceni la main de sa fille. Aussi la colère de l'empereur, s'était-elle ac-crue de sa déôeption mène, et sa vcngeance'avait-eIle à laver undouble échec et une double injure; .1

Délivré (les tnhharras et des périls qui avaient compromis lapremière partie de son règne, Manuel donna libre carrière .àson ressentiment et auïrêves hardis de son ambition. Doué d'uneénergie que l'on ne supposait plus aux maîtres de Byzance, ca-pable de différer l'exécution -de ses plans, mais non de les aban-donner, il.regardait les républiques et les rois de l'Occident dirhautde ce trône oriental, où le prince était ébloui par la profusion (tela pourpre et de l'or, enivré par . les adorations des dourtisans etjar le servilirue d'un empire. Le mépris qu'il avait pour les autreshommes, il t'étendait aux vertus humaines. Souple et patient, ilsavait plier et attencli'e; mais quand l'heure était venue, sa mainn'hésitait pas àfrapper.-Les moyens lui étaient.indifféreifts la hontene coûtait pas plus à son-orgueil que la perFidie ne pesait à saconscience: D'ailleurs, .plus chimérique que pervers, il : voulaitétendre une domination encore trop vaste et depuis longtempschancelante.. .-

Une grande lutte agitait l'Italie cl, la tenait comme suspendueentre . l'émpereui' et le pape, entre le despotisme de Barberousseet les libertés des villes lombardes,. entre la domination germa-nique et l'indépendance. Manuel résolut de prendre part à cescombats de géants que. les Romains de Constantinople ne. con-naissaient plus. Il tourna ses vues du côté de l'Italie orientale,et s'efforça de rétablir la domination grecque dans t'exarchat deRavenne, où elle s'était si -longtemps maintenue. Il encourageala résistance d'Ancône, qui fermait ses portes à Frédéric. Une deses flottes parut dans l'Adriatique, sous le comniandeinent d'unpersonnage qui portait le titre pompeux de domestique de l'Orient

inisit; sed curu desisteret , setiisina i,iI.er COS (1001,0 revivisci t. Tune Ernanuel t eslegnios eue, tribus galei's mittens ducem icquiril., iii solitum subsidiun, pro ini.perii tutela min ei'e velu. Ii,x autein pacem cnn, Guglielmo scrvare cilpiens , ci.niaxime initiiiu Ecclr.sir ici fiicere recusavit pion lLma nu ei grave tei'eus , erga\Tefbto, iva!uni in corde conce1'ii. o (A. 1)andoto , C!oron. IL 2q

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- 94 -et'de l'Occident 1 . La république de Saint-Marc, qui avait déjàfait échouer (t i 2 9) tule première expédition. d'Ancône 2 , para-lysa l'action des Grecs dans cette -mer;; o& elle ne voulait plusvoir d'autrè marine que la sienne (1163-i i66).. Nicéphore Ca-louphos, envoyé par Manuel, paria aux Vénitiens le langage d'un-mattre-superbe et d'un, allié besoigueux. Il affecta une confiance(lue ni son eouvertin ni lui ne pouvaient avoir en leur dévoue-nxnt. II les encouragea en rappelant leurs succès près de Milan.Refusanit Frédéric tout droit'à ce titre d'empereur des Romainsdont Manuel Comnène se montrait si jaloux, il pressa les Véni-liens de s'unir aux Grecs et- de leur -ménager le: concours desvilles lombardes et liguriennes.- Sa harangue, ou celte que luiprête Cinnamos, atteste à la fois l'habileté des Byzantins .et leursprétentions surannées, leur déplorable faiblesse et leurs folles illu-sions. La république écouta leur, beau discours sanscéder à leursinstances. Nicéphore f alouphos n'obtintque -des promessesdérisoires 1... .

Cependant la diplomatie de- Manuel triomphait en DalMatie.Cette province, impatiente -de la domination vénitien-ne, rentrapresque tout entière sous l'autorité de- l'empereur'. En nièmetemps les pirates àncopitains; soudoy& par lui sortaient de lent,'port pour inquiéter la,marine ennemie, et des concessions oppor-tunes rattachaient ait grec les Pisans et les Génois,-rivaux na-turels des Vénitiens 5.- . . -

- La république arMa contre les Anconitains, dont les principauxbâtiments furent- pris et lés chefs ' pendus. Mais'elle ne trouvacontre - Manuel d'autre vengeance que -de suspendre toute relationcommerciale avec les sujets de ce prince 5. C'était frapper l'ennemi, -

- mais se blesser soi-même. Manuel affecta de ressentir le coup Yi-

Dans la hiérarchie hyiantine, lé Grand deatesnqere Occupait Ufl (les premiersrang arès-le.SêbasÉocra1or, le Despote et le César. Cantacuzène, avant son éléva-tion à l'empire gouverna longtemps avec le titre de Grand domesriqne. Le daines-tique de l'Orient et de l'Occident devait être à peu près du manie ordre. Ce titrefut sans doute créé pour la circonstance. (.Voy. cbap. -vii, p- 134.) -

Voy. Cionamos, I. III, cvi (éd. Rouit, p. to3);IV, c. xiv (ib. p. '7')-Cifinamos, IV, c. ix (éd. Bonn; p. 228-230 et 2 3.) ---

- -4 Lucius- (De xcbus- Dairnat. t. HI). Ap. Ron,aui,i t. Il, p . 8 i. Cijinamos , VI,XViI, P. 249.

Romanin . t. 11, p, 82.- - -Croit. Alibi. ap. Rou,aniu ,i.'II, p. 8. - -

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t

—95-vement..Jl fit porter aux Vénitiens de bonnes paroles et leur per-suada de reprendre leurs affaires interrompues.-• La confiance étàit h peine rétablie, que des bruits sinistres coni-inencèrent à transpirer enOrient. Les négociants vénitiens adres-saient à leur 'patrie des rapports empreints des craintes les plusvives; on soupçonnait vaguement l'existence d'un complot tramécontre leurs biens et.leurs.vies. Le (loge envoya deux ambassadeursà Manuel pour lui demander des explications. Amenés en présencede l'empereur, Sebastiano Ziani et Aurio Malipiero s'exprimèrenten ces ternes • Nous avons entendu dire, souverain seigneurque tu avais des intentions hostiles à l'égard des nôtres; mais nousne. le croyons.pas. Manuel les rassura; un édit impérial déclaraque toute offense à un Vénitien serait punie c16 mort-

Cependant les troupes grecques se rassemblaient autour de lacapitale. Des mouvements inaccoutumés se manifestaient dans lesprincipales villes de l'empire. Le 21 mars i 171 , tous les Véni-tiens qui habitaient Constantinople et la .Romanie furent arrêtés etjetés en prison, leurs biens confisqués 2 : des ordres secrets expédiéspal' Manuel avaient permis d'exécuter le même jour cette insignetrahison sur tous les points de ses États. Les victimes furent répar-ties dans les ; prisons ou dans les monastères.

Tel est le célèbre guet - apens dont les causes inspirent auxchroniqueurs vénitiens et grecs une égale préoccupation et desjugements si contraires.. Dandolo accuse l'ambition et les ressenti-ments de Manuel, qui n'avait pardonné aux Vénitiens ni leurneutralité clans la guerre normande, ni lent opposition à sa poli-tique italienne. Nicétas et Cûnaffios vdient dan. cet attentat lesjustes représailles de Manuel contre une race perfide, envahissante,qui s'attaquait aux patents mêmes de l'empereur et osait épouserles lemmes les plus nobles de l'empire, qui bravait jusque dansConstantinople les ordres du roi sùprine et dépouillait les colonsioinbai-ds que celui-ci couvrait de sa protection. Condamnés à

- rebâtir les maisons qu'ilsavaient brûlées,. à rendre le butin quiétait le fruit de leur pillage, ils refusaient d'obéir et menaçaientles Grecs de leur infliger le même traitement qu'aux Lombards3.

Cron. Ahi,,. ap. Roinanin, .11, p. 83.— Ant. Sabelliens, Reg Vcnrtw, I. Vii.2 Cinnamos, L VI, , o (éd. Bonn, p- 280-282). Nicétas, Moire!, IV, g (éd.

Bonn , p- 222 et suiv ; ). I. IX r.. xv (l 29' et snv. LA,' &p. ai 4^5 hi ra?; CpoTépOiS aroùç poa- ix4svo; hi pi).?.ov êeps' d).-

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- 96 -Les auteurs vénitiens ont raison, et les auteurs grecs n'ont pastort. Les ressentiments de Manuel furent l'origine du mal;- maisils trouvèrent un redoutable appui dans la haine que b pros-périté et la hauteur des Vénitiens inspiraient à la Romanie toutentière. -

Cette animosité des Grecs contre les Vénitiens les entraînaitaux plus violentes exagérations, aux insultes les plus grossières.Nicétas et Cinnamos semblent pousser l'expressidn du mépris

ŒIaç x? rÇov. Aiioaeec ydp xarpOos' 3deaa eh d,ndvo,av iépeaOi oTev.ÔOev mai tioÀAoTe Teh, ei5 'eyovdrcav œoeAeT te ,ciO aT1n wpoanxôvtcov o?-17d5 -TeidOeviro ,e& dÂ?.wtiucpd-rate ir' cihoOe G4caav. Aiiyov zéno, ir) roTe etoTç o'J

- tnnu7e nd èi rOz Mavou,)À Ç3actAéwè pdvwv, )-QveIl te f¼ipeieèe &uiroôç auvoexl-ovreç xai oixlaI; txïe ST&V, dicirep d AAe Pwpcioi éew tOc ix paulAiws eJod-

ve oJro?e avaclpeødpevot &erpiÏe.  znxit: Çipezv x°' cOtas Jiue^ i,UTSÛiI-rv dzccpravotévøv aeIaivdrpEto. Totç pévroi dvnr2avrk, enpévoueaJrOvrov'Let' iziropicv pdeAdv-Ta)v 0Oevsé-rwv drote?div oupealoun t AcrIvwn ixdÂéaeÇwvfi, -&olecscJrqi &aeoxdtes cOis e3yvs4toctiv, i'&ijuzéoir&& i.-J tnp4ac:v rà ki-A,ov. 'l'oUio y&p &ppnveôeev cOtais tb vove oî»etai. 00 ou?à rô b ji&ro, xaiOôév'etoj Aaeardpr3osi ftnv&avtes &re >'vhzie droayeTc ,-je aOrop d,a,'ic1cdv-re e'jtoïç ,caè i-de oix!es eh &Y cos ,eTxOe?dv-ree éei Lcylc7oIr cO-,-oO gflskAsaœv. ÔOe'& èri Jbnv edtoôe ,Àéa-, 5 Ô ei,cOiç Aecrdposs iyeipru M.

xclo'.i, dec -ne o ?Iat &tpr&c7o cOi-1cc diro&&Wai. ÀA?4 Ôtidvvetoc odte pdtlo.'o'ir3iv a0rOv ÇOeAov xxi ,jeciÀà'jv ye tw1zc(os5 dv,5geeic Jpdo:v,- dvepiszvilo-xoi.resôh êTi PaaeXéw5 la,dvvan, -rep,dvfos.ipdccivto. TcG,c cvvt&2,v ô Pau0.eO5 rnptéts&cpéÂÂerv €yvrt. Tolvuv cd. eh iv avdypp ro6rous ini rsœJ,-ie .cvflderv Jic-voiûeç )p1tq"" d,ncvreff i-ç f'eopekns iEéineure yjTg, v'roTg tds dp&n iii-'roue' Jflov tàvxpôvov i'roL,, ,c,(f 6v cOroOs XeipisO0evvérote i,a&,eTv éjet. liai

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J,yazv h' cOi-à' xxi Aojrôv ?Jovro dmdi're.Écspe1ô: Jè cieOdevo, uardr:u cO+&vdâieoav, iyytccvtd.s -Te eOtoic, 'ris pi tou Tôt' M0 yeyavdree 'cropû1zàz' 1b1J,,1&j

• 'r'ruè (p)éenv &evoonflo. AAÀ' i,eeipo,, &;e i-0W hqzaTx&r iOd3csdrntn8eujzdiw,,icDouç tivds dEe: -ta p:âei$ certes i-cOi-oie Te--w&a-av -tepceindrss r,)z' vreiv ic1é-

ovro &cp c?.io,.Êcozcio +oIvvziine:3-, z3dvdv'J cclv eizov (rè )'dp -tOp -top pWIiTW,.QV ii-2 t,v pipiv c'xovn: t4evov , i oOJé £4-cusv, , i-cl teÀdcen'roiç -tDo:sdroc7pedpcvov sec0' Ojduov éddvt0 -wsuuv), rpcscroi &ve.ppedz'. (Cinna-tians, W, &1. Bonn, mi l. b yzantine, p . 28 sq.)-.

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- 97 -jusqu'au ridicule. Eustathios, dans uri discours à l'empereur Ma-nuel, les traite de serpents amphibies et leur prodigue les aménitésde ce genre sans parvenir à se montrer aussi rassuré qu'il voudraitbien le paraître. Jl injurie, mais il a peur.-

Cependant le nombre clos captifs ne laissait pas d'être enxbar-rassant. Manuel ne savait comment les garder. Aussi les élargit-ilau bout de quelque temps. Les Grecs eux-mêmes y aidèrent, enconsentant à leur servir de caution. Mais on exigea, en les relâ-chant, qu'iIs se sôumettraient aux ordres de l'empereur. Cetie -cbnditiOn leur pesait beaucoup, et voici comment ils évitèrentde la subir.

Un noble Vénitien, fort riche, établi en Grèce, venait de vendreà la république un navire de dimensions inouïes. Dans la nuit quisuivit le guet-apens, il avertit la colonie de s'embarquer en toutehâte sur cette ville flottante. Il voit bientôt se réunir à lui ses coin-patriotes, qui saisissent avec joie cette chance de salut. On courtau navire le vent favorise-la fuite. Les Grecs leur donnèrent lachasse jusqu'au détroit d'Abydos 2, où ils voulurent brûler le bâti-ment au moyen du feu grégeois. Mais les Vénitiens connaissaient. -les moyens de s'en préserver ils déjouèrent les I.entatives (le l'en-nemi.

La nouvelle, vague et incertaine, était parvenue à Venise. Elley causa d'abord plus (l'étonnement que de colère.. Le peuple necroyait pas, et surtout ne voulait pas croire. Mais l'arrivée desfugitifs dissipa tous les doutes. L'indignation devint générale; descris de vengeance reteptirent sur la place Saint-Marc. Venise en-tière demanda la guerre. Des milliers (le bras s'ai-enèrènt.

Un décret rappela les citoyens absents clans leur patrie. Un autresomma les lstriens et les Dalmates de fournir leurs contifigents detroupes et de navires. L'arsenal et tous les chantiers déployèrent

nOfro çza i àè epà5 zs)atglev d,lynciv ,&* À4iavà odÀut, 4 ép-atiJpo; ôQcc, .4 Tt reMn; Pdtpazo; , 1idÂiala tzèV ov (tua (12) b' -r2s' ivalvxn(zdtoevtpoŒovo(zduaJ Toile s'pas) ôaa tà telpatilcàv ê0voe i-d d À1a'0^, i-à tTrO'JÀOI',tà x&xo'ovÂo,', èouÀeaaro ((dv, Épein Jè sis stpactov- xal dusuu(sdvno-e pdi',O-ix dreXeoÇdpe .4d e))' si; icciJàv Mve, xai ê xav1 aato plu, otj (1d1loi' Jè eiréAc; dEsiGaue, d?,) "ai hri c ai-sa? pa?elaa; aôtTi i-de p,7aild; êOedearo, ra'; ra ê)-

aas atroy; dvtava?pt4ie. (De Thessa/onica rjusque ogre,P. .412, ç. Tafet et 'I'Iiomas, t'- ' Go-) -

2 Abydos, aujourd'b su Na gare- Ilouro un, ccl situé à l' end i-oit Ir p-i u s i-es s erréjdes Banian ci Ies,v s-à-vis de Seus . qui est sur la côte dEs, rope.-

7

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- 98 -

L

une merveilleuse activité. Les routes, les fleuves, les canaux trans-portaient les bois de la province deBellune, et tous les matériauxnécessaires aux constructions navales. En six moiscentgalées' etvingt grands navires furent mis à Bot. Tout un peuple s'était levéau seul mot de vengeance.-• .-

La difficulté était de subvenir dépenses de ces préparatifsimprévus. Le gouvernement eut recours à- un système qui restalongtemps en vigueur. On décréta l'emprunt forcé. -Des inquisi-teurs eurent mission de rechercher la fortune de chacun, et pré-levèrent i P. o/o. L'État se constituait débiteur, et servait un intérêtde 4 p. o/o, hypothéqué sur les rentes de la commune, avecéchéance tous lessix mois, en mars et en septembre: La-C/,amlrodes prêts (Camera jiegli imprestidi) fut instituée à l'effet decueillir les sommes prêtées, et d'en payer les intérêts. Trois col-lecteurs et payeurs, désignés sous le nom d'officiers de la . Cham ebrdes prêts, se transportaient dans les six quartiers (seslieri) quel'on forma à cette occasion , et qui furent1 comme les circonscrip-tions financières de la villè2.

Les litres donnés aux créanciers (le l'État purent s'acheter, sevendre, se négocier comme de nos jours. C'étaient des Obligationsd'Eiat qu'on remboursait au moyen d'amortissements réguliers etdont le cours variait avec les succès ou les revers de la république.Venise, au xii e siècle, était donc amenée à trouver le mode de rem-boursement que les gouvernements et les compagnies . de cheminsde fer ont tant multiplié au ir. Sous le coup des événements

elle inaugurait dune main encore inexpérimentée la puis-sance du crédit publie, et créait une véritable caisse d'amortisse-ment, la première qui fût en Europe.

Au mois de septembre 1171, la flotte vénitienne mit .à la voile.Vitale Miehieli 11 laissa le gouvernement à son fils Leonardo avecle titre de vice-doge, et prit, lui-même le commandement de l'expé-dition. On appareilla sur Nègrepont', et on assiégea la eaptale,Chalcis.

Alors commencèrent de longues négociations, de continuellesambassades. Le doge y montra une indécision, une faiblesse qu'il

- Les Calées étaient de petits bétiments ayant. 'in seul rang de rameurs et très-rapides 'n la course. -

Ronianin,i. If, '• 84.Ciiiu,an,os VI, i o, p. 283. - Nicétas, illannel, V, 9, p. 224.

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expia cruellement plus tard; Manuel, une souplesse, une perlidie -qui lui permirent de jouer quelque temps les Vénitiens, mais qui,en. fin de compte, ne sauvèrent pas l'empire.

Michieli était devant Chalcis, lorsque le commandant de laplace lui fit dire que l'empereur, répugnant à une guerre de cettenature, voulait se réconcilier avec les Vénitiens et les priait -d'en-voyer à Constantinople des ambassadeurs. Le- doge- accueillit cetteinvitation avec la bonhomie naïve qui lui était ordinaire. II -choisitpour représentants Manasse Badoer et l'évêque Pasquale, hommetrèsversé dansla connaissance de la langue grecque. Manuel lesreçut, mais ne leur donna que des paroles.. -

,Cependant Vitale Michieli n'était plus dans les parages de Chal-cis. D'après Cinnamos, il fut repoussé par la forte garnison quel'empereur avait eu soin d'y établir, 1 . Nicétas avoue, au contraire,qu'il parvint à s'emparer d'une partie de l'Euripe, et qu'il mit lefeu aux maisons dont il était maître-°. Dandolo ne donne aucuneraison du départ de la flotte vénitienne s . Mais tous les trois s'ac-cordent à dire qu'elle se dirigea vers Chios.

D'après les chroniqueurs vénitiens .111e se soumit tout entière.Le doge, croyant à la paix, répartit les marins dans leurs quai-tiers d'hiver, et leur défendit de faire aucun dommage aux sujets del'empereur'. Cinnamos nous représente les événements soustout autre jour. Scion lui, les Vénitiens avaient débarqué dansl'île pour la ravager. -Mais ils rencontrèrent, une fois de plus, lesvaleureux soldats que la prévoyance souveraine envoyait sur tousles points dc l'empire. Ils battirent en retraite, et revinrent à- leursnavires5,

È7a Jè dnexpodoûnarzv,e.UfÀiw5 U?ŒTtWTWv 'Çpovp&s droXP,ha.Ç Ta75 tJsvAcv éivai,j,avtaç. (Cinna 'nos, VI, 10, M. Bonn, p. 283.)

'KaTà Jà -rbv ridvr2 j,ncw-rèji cldÀos, xpaSvsvrcs î VIf 00CC eIT4p%OVTO, ehàè TIf z, EGo:ov cic).tdcav-ree hoÀzdpxovv vàv E4nov so fÂépoC T; ro,hou I27ŒOXCTV Jeâvv»évog cp roTç oixoaéoce fl4' y, (Nicétas, Manuel, V, g. éd. Bonn,p.

Voy. C/l,-on, p. 291.

e Exinde dux abiens Cinum navigavit, et urbem coin insola 1e' deditio-nom socepit, ci ibi suorum nuntiorum redittim expectans, hiernare disposuit. Etde pace confidens 5005 a Itesione imperii abstinere fecit. • (A. Dandolo, Chron.p. 291.)

Ibri 14v vif oov?oovro XIov, évreOûd Te -r& q vae dveÀxtnznç ê,rI nct-ra4o.eiç r iTe zcpas êeeav. À).Xû Juv4c,i xGvraOa 'wrpn-vdvrcs 'tp0(h11O€i aciÀécoshi t4i' s'floov 4aGdc,;ç, dn;4Icp etc Xeîpas ÂOov, -uo).Ao,ic te tz3v a?erdpwv

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- 100 —• Cependant Vitale Micliieli attendait le retour de ses envoyés. Le

pauvre doge était aveuglé pal' son humeur paeihque: On n'avait.jamais vit un Vénitien de ce caractère. Le Peuple le plus défiantet le plus politique du monde avait pour chef le plus crédiile et,le plus simple des hommes.-

Connaissant la lon ganimité de son adversaire, Manuel traînaitles négociations de joui' en jour. De gueri'e lasse, Manasse Bactoeret l'évêque Pasquale -s'apprêtaient à partir. Un mesage de Michieliles retint: Manuel consentit à leur acljoindre un plénipotentiairechargé de les suivre à Chio's £t (le porter ses propositions au -doge.C'était un moyen d'ajourner encore, et • de connaître en détaill'état de la flotte vénitienne. Le ministï de Manuel persuada àMichieli de renvoyer ses- ambassadeurs à Constantinople. On croitrêver en vôyart les Vénitiens promenés ainsi du Bosphore à Chios,(leChios au Bosphore; 011 50 demande comment-le doge pouvaitse laisser jouer à ce point par un ennemi dont la ' ruse n'avaitmême pips besoin d'être fine. -.-

Michieli , dans son amour rie la paix, en était venu à toutcroire et -à tout souffrir. li renvoie les premi ers ambassadeui's.assistés (le Filippo - Greco'. Après deux tentatives infructueuses,et la perte d'un temps précieux, sa crédulité stupide attendait cri-core;

L'expiation ne fut pas longue. Une peste terrible se répanditbientôt dans l'armée vénitienne En' quelques jours mille hommespérirent. On attribuait le mal à l'eau empoisonnée par Dit

secret de Manuel. En même temps, i5o navires, commandéspar Andronicos Contostephanos, s'armaient à la hâte, et -af)pa-reillaient sur Chies. Beaucoup mieux préparés que les Grecs, etaidés par les navires auxiliaires des Esclavons, les Vénitiens tirent

drisÂov o?eoneg aè ôIrlaOdppi -To i ,r T&Ç vae êpnuav. (Cinnarnos, VI, 10,

p, 28328/1.) -- -- i Quod !inperator cognos000s Ducales nuncios dolose simulationibus trahehat

in longiim. Sert illi , a Duce admoniti, cutn voilent recedere, de pace fienda ahtmperatore fidociam susceperont. Imperalor quirlem coin legatis redeuntihusnuntiiirn usittit, floTs ail pacem, seil ail mon»), et ut cornU ionem exercitus inte-griter persentiret. Qui fi Di,cent alliciens illi persuasit iii secum legatos renard-tel-et; qui pack avidus pies primo miserat, et Philippin. Greco legatos rernisit. I(Dandolo, p. ig i. )Cf. Codice degli ain(rnsciotori (alla Morciaiia-) -Mariasse

Barl ocr. Pasquak O] ivr]eisse , -Fil ippo Greco. I 171, aU' imperatoic Manuete pertraitai la jmcc.-

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bonne contenance'. Cinnamos attribue leur salut à - la trahisondu consmandant.des Waranges (ax6ÀouOos) 2, Aaron, homme or-gueilleux, accusé de magie, hostile à l'empereur, dont il com-battait les projets et remplissait perfidement les missions., C'estlui qui leur révéla les plans de soit La flotte grecque sein-Hait gouverner sur le cap Malée mais elle voulait surprendreUennemi vaincu danis l'île par les troupes de terré. 'Avertis par letraître, les Vénitiens levèrent l'an&e un soir 'et échappèrent à sapoursuite .' Dandolo leur, attribue une autre station . 4 . Renonçanten fin à ses illusions, Micliieli passa de l'île de Clins dans l'île dePanagia', où il éspérait arrêter par le changement d'air le progrèstic la contagion. il rapportait de Chios des reliques et d'autrestrésors. Le niai ne fut pas moins, meurtrier dans le nouveaumhuiliage. Informé de l'état de ses ennemis, l'empereur refusa.d'écouter les ambassâdeurs, qui attendaient vainement à- sa poite.Il les renvoya avec son ministre et chargea ce plénipotentiaire defaire, sentir la gravité des torts que les Vénitiens avaient commisà son égard 5.-La lettre qu'il y ajoutait était écrite ssfr letoit de lacolère et de .l'instille 6, Comment le (Loge répondit-il à un acte quine laissait plus (le doute, nième aux plus avéugles, sur les inten-

Coin igitur 'nec agerentur, pessima pestis in tantum invaluit, ut, pancis in-terjeciis iliebus, fere mille hommes peroinpt.i siut; qisod creditor adven,sse, exIssu aqlmruns quas lmperator fecerat vencuari.' (Dandolo, lac. cil.)

Axdouoo n'est pas pris ici dans le sens le jilus fréquent de valet où 'bienencore d'acofrsc.. II cldsigne le chef ou préfet des Warangcs , un des corps les pinseélbbres parmi les merccimires qu'entretenait la cour de Byzance et celui quiformait la garde de l'empereur. (Voy. Dueange, l 'a Historin,n Joannis Cinu,uniaolm, éd. Bonn, p. 329.)--

t,e1 Jè SOosto v,ra d a,sÀSg Muvav,P., alé?,cs rbs' séyav o6x«, tàpKov'rooiéavov ÀsJpds'issov, 'tcpl gao -al g êxaràv gai tjevid,snvra tpsspesr loiiŒ

dis pjè vair Bssserlxwv 6 o'loXô g v ' dv&éalepos, i A&S Tà ,laTC,rOuJaCf2é000z"' Nai p,). xariu psGaqzt vos- v &iracs. flpè ydp &ywva 1dyav gal a'vîaywvscids'cojzsIovç &voszacdçzes.os e dravr,Ov s)pjzdOiiaav, gal zaziJas odx d?.iyaspç è in&ovto dtô Tiîs vair 16ÀaGtvwv èxro picOtEras Xdpas tceivots; (iNicétas,toc. cil.) OÂa'is's'v (Sclarismi) désigne les Esclavons et- non les Stlslabinic,is peuplenouveau et imaginaire dont l'existence paraîtrait résulter de la traduction latinede Tafel et Thomas, Famtcs renfla 4 ustrmcnrwn t. Xli ,,p. 150 -et soir.

Cimuiomos , P. 8/s. -Sa version parait confirmée par celle de Nicétas, qui, sans ôtre -aussi précis

que liii, nous les représente. fuyant d'île en île.' fldas pèss yâp d?.rdi gal euvia Jesv&i xdtozos et; r,)p Pwjrniwr cicepponxdre;

...... (Voy. Cii,nainos (oc. laudato, P. 385,)

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tiens de(le Manuel? Qui le croirait? Par une nouvelle ambassadepacifique 1 . -

Enrico Dandolo partit avec Filippo Greco pour Constantinople2.En même temps la flotte abandonnait le mouillage de Pahagia pontceux de Mételin , de Stalimène , et enfin -de Scyros . Malgré tousles soins et tous les déplacements, la peste continuait ses ravages.C'est- en vain qu'on brûlait les navires infectés ou qu'on les coulaità fond 1 . Le niai résistait à tous les efforts. Les plus braves citoyenstombaient sans gloire, en face d'un ennemi perfide que l'imbécillitédu doge ne leur avait point permis de châtier avant de mourir. Desfamilles entières étaient emportées.. Les Giustiniani, qui étaientpartis en masse, au noihbre.d'une centaine, curent le sort de lagcns.antique des Fabius, dont ils avaient imité le dévouement. Lefléau les enleva tous. Aussi le moine Niccoiè Giustinian-, dernierrejeton de la famille, .s'enipressa4-il de quitter le clottre et deprendre femme. Il épousa Aune Michieli, fille du doge, et en eûtplusieurs fils. Après. quoi, voyant son oeuvre patriotique achêvée,il revint au monastère d'où il n'était sorti que pour l'accomplir.Sa femme limita; et tous deux furent récompensés de leur piétépar les honneurs de la canonisation 7... . .

La flotte vénitienne, dans tes parages de Lemisos, voyait périrchaque jour de nouvelles victimes. Les Grecs étaient à sa re-cherche ils l'atteignirent au moment où elle se disposait àprendre la direction de Scyros. Cinnamhs et Nicétàs attestent tous.les deux qu'elle fut vaincue s ; beaucoup de bâtiments pris et coulésavec les équipages. Elle échappa i par une fuite rapide, à un dé-sastre, et parvint à Seyrds. C'est là qu'elle passa les fétes dePàques, clans la consternation et dans le deuil', Le grand-duc An-dronicos Contostephanos. la délogea de cette nouvelle retraite, et

A Dandola,..Chron. toc- cit..Ttmc prudentuni consilio pro obtinenda pacc Ilenricus Dandulo c Phiflppus

Greco cum illo pariter. rc!nittuntur. s (Dandolo, toc. Cil.)

Métdin ou Castro (autrefois Milj-lia), capitale de l'Ue de Mételin (Lcsbos).Stalimène (aiitrefoh M,'rine), capitale de lite de Stalimènc (Lcui nos).Skiro (Scyros), dans,l'ile du mémo nom -h 8 milles à l'est do Négrepoisi.

Syra (Sros) est beaucoup plus au sud, au milieu des Cyclades..Romanin , t. 11, p. 88.Id. ibid. P. 89. .

' Nieétas, toc. cil. Ginnamos, toc, cil.u [bique iuivalescente peste in luctu pascalia lesta pea'cgit. (Dandolo 1 doc. cil.)

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- 103 -lui donna la chasse jusqu'au cap Malée. La supériorité des Véni-tiens-dans l'art de la navigation, la légèreté de leurs navires, lesdérobèrent aux Grecs, q-ui, renonçant à les atteindre, rentrèrent àConstantinople i . Michieli, de son côté, ramenait à Venise uneflotte abattue -par l'inaction et les revers, troublée par la révoltedes équipages, décimée par la. contagion 2 .--

Où était la brillante expédition que la république avait confiéeà son chef suprême? Qu'avait-il fait de sa -mission? Qu'étaientdevenus tant de sacrifices, et les espérances de tout un peu-pie?Jusqu'alors les navires que Venise - envoyait en Orient étaientrevenus avec des dépouilles et des trophées. Michieli ne rappor-tait à sa -patrie que l'humiliation et les horreurs de la peste. Il avaitajouté de nouveaux affronts à celui qu'il devait laver dans Je sangdes Grecs. Il s'était laissé jouer indignement par un prince per-fick; il avait mis la république aux pieds de Manuel en mendiantune paix qu'il n'était plus permis de désirer; il avait montré-laplus grande timidité devant la guerre, la plus triste constance(levant les refus cules outrages. Venise lui demanda compte deson honneur et de sa vengeance. -

Le peuple, exaspéré, s'attroupa dans un grand tumulte. Des cla-meurs redoutables s'élevèrent contre l'auteur (les calamités pu-Niques. Michieli tenta vainement de sejustifler devant l'assembléequ'il avait réunie dans le palais ducal. Les cris etles menaces re-doublaient. L'infortuné doge, se voyant perdu, prit la fuite. Maisles meneurs, furieux, ne lui laissèrent pas gagner le monastère (leS. Zaccâria, où il allait chercher un asile, Ils -l'atteignirent et l'égor-gèrent à peu de distance des murs protecteurs 3 (28 mai i.i 72.).

Ces tristes événements montrèrent la nécessité d'une réformepolitique. Les affaires d'Orient causèrent, comme au temps- des Or-séoli, l'affaiblissement de l'autorité suprême. Mais l'on n'avait pasfflOiIIs à 5e plaindre (tes violences populaires quê de l'omnipotenceducale. Aussi le peuple subit-il, autant que le doge, les effets de laréaction.

On institua 12 électeurs, deux par quartier, qui choisissaientchacun 48.citoyens. Les élus formaient un conseil de 576 mem-bres, qui se renouvelait chaque année à la Saint-Michel et qui

Cinnan,os et Nicétas, jar. ch .Rornanin, I. JE, p. Sq.-Id. -.

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- 104 -aidait te doge à expédier les affaires courantes. S'agissait-il dequestions graves, et surtout de politique. extérieure, le conseildes Pregadi était convoqué et préparait les matières soumises auxdélibérations, du grand conseil. Sous le doge Giacomo Tiepolo(z 229-I 2â9), ces réuhions devibrent permanentes et Mes et don- -nèrent naissance au. sénat vénitien. Quatre nouveaux conseillersfurent adjoints.à ceux qui assistaient - déjà le premier magistrat Ciela république. Celui-ci n'eut plus la -faculté d'insérer dans.les'traités des stipulations personnelles, favorables à sa,famille et -àses affaires. On voulait éviter les transactions capables de créer pourle chef de Pétât des intérêts contraires à l'intérêt public. Afin derendre ces restrictions moins pénibles aux doges, on augmenta lapompe extérieure qui les entourait, et l'on imprima à leur -personneun caractère inviolable et sacré. Ils eurent, pour 'les accompagneren public, non plus leurs serviteurs, mais un cortège de nobles etde bourgeois. Tous les quatre ans le peuple leur jurait fidélité parla bouche des représentants de chaque quartier. Le jour 'de l'élec-tion, on les portait, conformément au -mcéréonial byzantin, surun trône circulaire, d'où ils jetaient de l'argent au 'peuple, en tra-versant la place Saint-Marc 1 -

Les mêmes lois, qui contenaient l'autorité suprême, en rendi-rent.l'origine moins démocratique. Le choix -des doges -fut enleS'éau peuple et protégé contre les désordres et la mobilité dé, la -foule. Onze électeurs, tirés du grand conseil, se réunissaient dansla basilique de Saint-Marc, et procédaient à l'élection, qui restaitpublique comme par le passé.' L'élu (levait ' réunir g suffrages suri j et obtenir l'agrément du peuple. Cette réduction, si modérée'pourtant, de la souveraineté populaire, excita des murmures et-bientôt un soulèvement que les politiques eurent grande peine à'cal-mer; La réforme aristocratiquc.triornpha, et, pende jours après,.Se,bastiano Ziaii était élu dans les formes nouvelles et présenté àla' foule avec.la formule consacrée :' Voici votre Seigneur, si toute-fois vous l'agréez 2

Ziani suivit d'abord les errements de son prédécesseur.' L'at-taque tic Manuel avait pris -Venise au'. dépourvu,' et les mesuresfinancières qui devaient lui procurer des ressources ne donnaient pas

Muazzo ,St. Jet 9otwrno delta Repubblwa J. VCnEZUL - apiid Roman! Il, t Il,

b 929 11.- -2 Muaz',.o ci Sandi - S. civile. apud ,Ilonior,in I. II . p. 93.

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les résultats promis. Le doge, ayant vu revenir sains et saufs I lesambassadeurs précédents, Enrico Dandolo 2 et Filippo Greco, enrenvoya de nouveaux, Manasse Badoer, Vitale Falier, Vitale Dan-dolo. Mais ceux-ci ne furent pas plus heureux que les autrei: Ilsne reçurent même pas de réponse.

Ces échecs tant de fois répétés portèrent enfin leur enseigne-ment. lis forcèrent la république à changer la direction de sa poli-tique et àse tourner du côté des Normands; elle fit après trois âns(le revers ce qu'elle eût dû faire ait de l'attentat. EnricoDandolo, revenu de Constantinople, et Giovanni Badoer partirentpour l'italie méridionale. Ils allaient conclure avec le roi Guillaume IIuneligue offensive contre les Grecs. ils rencontrèrent en Esclavonieleurs collègues, suivis des envoyés impériaux. La diplomatie by-zantine eut encore la force d'imposer aux Vénitiens et de retarderleur alliance avec Guillaume. Eni-ico Dandolo et Manasse Badoerretournèrent à Venise avec leurs collègues et les plénipotentiairesde Manuel. Ceux-ci donnèrent au doge des paroles et des espéran-ces;mais cette paix, tant désirée, ne fut pas conclue: On recom-mença les promenades diplomatiques de Venise à Constantinople,de Constantinople à Venise. Vitale Dandolo et Enriéo Navigaiosofurent encore trompés par Manuel,et revinrent dans leur pairie avecd'autres ministres byzantins'. il semblait que l'impudence de l'em-

Cr. Aitin. Arc!,, storico, t. VIII, p. iSi.t Nous adoptons ici le témoignage de la Chronique dAltino, contrairement à

celui (te Dandolo. Ce dernier prétend (lue son aïeul Enrico excita Id colère del'empereur, devant lequel il défendait fernibmeut l'honneur insulté de abriot qu'il fut aveuglé par un ordre souverain:

o Emanuel itaque, erga Venetos furoreaccensds, 50 005 ad nihuluni redactunimadjurons, in legatos dum ci, quai pacis orant, requirerent , injiiriose prorupit.Cul Henricus Dandolus, pro sainte patriai constanter resistens, visu aliqualiterobtenebratus est. Qui Matant injuriani mb dissimulatione .secretam tenons unecoin Venetias redesiut, » ( A. I)andolo, p' 292.) Ce témoignage est contreditI » par celui de la Chronique d'Aitino que nous avons citée; ? par celui de Ca-rolclo (Ci:. uns, alla Aferciana, Cr. Codicc deqli am&asciatori ai). Itoinanin. t. II,p. 9 /4) . qui attribue à Manuel les mêmes intentions perfides et violentes, niaisqui ajoute qnEnrico Dandolo, i% erti du sort qui l'attendait, cuti e temps de s'éva-der; 3' par le silence de Villehardouin sur la prétendue cruauté de Manuel;A' par celui de Nicétas, qui menlionne ].a de Dandolo, 'nais la considèrecomme naturelle; 5° par le fait même (le l'envoi de nouveaux ambassadeurs, ticla république malgré toute sa longanini lé, t'eût, pas voulu caposer à un sortpareil.

Dandolo, Citron. P- 293. -

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- 106 -pereur ne connût plusdebornes, et voulût faire aux Vénitiens unegrande renommée de patience.

Cependant le doge reprit ses • négociations avçc ic roi des Deux-Siciles, et cette fois les ,conduisit à bonterme. Aurio Mastropieroet Aurio Dam-o se rendirent à la cour du roi Guillaume IL Lesenvoyés impériaux fuiént stupéfaits de cette nouvelle. Venise. étaittombée si bas dans cette malheureuse campagne diplomatique quele réveil de sou énergie devenait un événement. Les Grecs chan-gèrent de ton, et obtinrent le départ d'une nouvelle ambassade coin-posée de Leonardd .Michieli, de Marin Micliieli et de Filippo Greco.Ceux-ci rapportèrent de Constantinople un traité vague et défec-tueux. Mais les négociations ouvertes dans les Deux-Siciles ne fuientpas interrompues Elles aboutirent à un traité de commerce etd'alliance qui fit regagner à Venise le terrain perdu. Le doge ren-voya les ministres grecs, à la grande satisfaction de son peuple'.

Guillaume Il accordait sécurité, protection ,, franchise au dont-merce vénitien dans toute l'étendue de ses Etats. Les droits mo-dérés qui frappaient leurs marchandises à l'entrée et à la sanie,depuis les concessions de Roger et de Guillaume Jûr, étaient encoreréduits de moitié 2• Sont exceptés des bénéfices du traité les cor-saires vénitiens ait service de l'empereur Guillaume II se réserveLotis ses droits de les combattre et Venise les abandonnés.

Les flottes combinées de Guillaume et de la république blo-quèrent Ancône, afin d'enlever cette place importante à Manuel.Des corsaires normands et vénitiens portèrent la désolation dansles villes de l'empire, La marine grecque ne pouvaitréprimer ces brigandages. Après deux ans de guerre, Manuel revintsincèrement, à des idées pacifiques . Sa politique chercha d'abord

A. Dandolo, p. 299-3OO De j(tstitiis, quas teniporibusdomini goriosissimi .regisllogerii ,avi nostri

et domini magnificentissiini regis Ville] mi pat.ris nostri beaee ineinorla, (laresoliti sint, amodo non nisi niedietatem tantum rient de boc, quod hacteuns (laresoliti sont In Messana veto et Panormo et alus terris Sicilim dent n,edictatensdehoc, quod hactehus tiare soliti surit ii. Messaaa; et bec dance pax et amicitiainter nos et ipsos fuerit. s - -

Ces diverses stipulations sont consignées dans deux actes séparés le pre-mier, relatif â la paix et il sécurité des Vénitiens, est inséré dans te Libre deiPot6, t. li, fol, jl y; te second, relatif à l'abaisseMent des droits, s'y leurre égale-nient, t. II, fol. 1 23. -

• Nicétas, flïa,ii,rl, V, g, &l. Bonn. p. 222-529. Dandolo (p. 3oa). L'alliancede li muni servit beaucoup aux Vénitiens, ('ans leur lutte avec Ancône. -

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107 -.à détacher les Vénitiens de l'alliance normande; .mais, voyantl'inutilité de ses efforts, il se contenta de se réconcilier avec lesanciens auxiliaires de Byzance. Les privilèges antérieurs furentexpressément renouvelés, et les Vénitiens obtinrent, en compen-sation des dommages reçus, une indemnité de i5oo livres d'argent(i-- -

La même -année, Frédéric Barberousse traitait également avecVenise et les villes lombardes. Le Lido devenait le centre (lu con-grès, 9ù l'empereur, le papé et les communes allaient débattre lesconditions de -la paix. Alexandre et Barberousse se rencontraientsous les voûtes de Saint-Marc, et le forum de la république véni-tienne voyait la réconciliation solennelle des déux- puissances del'Italie et du moyen âge, la papauté et l'empire 2 .-

Au ix° siècle les pêcheurs des lagunes échappaient- à l'ambitionde l'Occident par leur courage, à celle de l'Orient par leur poli-tique 3. Au xlie, ils imposaient la paix à l'un et à l'autre, aprèsavoir épuisé et Barberousse et Mànuel.

Le Bas-Empire devenait de plus en plus faible et perdait chaquejour-la conscience de sa faiblesse. Il.était en proie à ce vertige quiannonce les grandes chutes. La mort (le Manuel Comnène donna *le signal des malheurs (iiSo). Alexis JI fut proclamé à la mort deson père et lui succéda sous la tutelle de sa mèré frêne et bien-tôt de son parent Andrônicos Comnène. Celui-ci ne tarda pas à -convoiter la place de son pupille. Un matin Alexis fut étranglé parles ordres d'Andronicos. Ne voulant pas-ajouter au danger des ré-volutions intérieures celui d'une guerre étrangère, l'usurpateur nenégligea rien pour s'assurer l'amitié des Vénitiens. Ii délivra lesmarchands qui n'avaient -pas encore eu les bénéfices du traitéde paix, et s'engagea à payer chaque année l'indemnité consentiepar Manuel . .

Andronicos, arrivé par le crime, professa quelque temps la

NieMas, lot. tir. - -' Vov. Rornanin, t. Il p. io5-t I 2. Dandolo,3o ,.3o7,

Voyez plus haut, p . • S et suiv. le rôle tic Venise entre Nicéphore et Char-.lcinagne. -

« Emanuci angiistiatus. conique moriens , Alexiutn Pôrphyrogenitum h6redemn)l)crii tuitioni Audronici commisit; qui, .spreto juramento, postea ilium suffo-

cavit, et imperator foetus esL 111e pro flrtnitate imperil, ut VeneLos sibi favoris-hiles oxhiberet, rnercatoi-es per Etnanuelern captas, requirente Puce, liheravitet sic ' -esor ci cuti it damnis a unuatim son. si t. s ( A . Dandolo; CI, roi, - p; 3og.)-

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justice P°"F s maintenir. Mais' la perversité de s nature eutbientôt.bièntôt. levé toui les msques L'abominable tyran trouva desinstruments terribles dans la troupe . indisciplinée' de Paphiago-nions qui l'avait porté sur: les dègi-és du palais et du trône.Entrés avec lui à Constantinople,*onstaitinople les farouches mercenaires enva-hirent la Corne-d'Or et se jetèrent sur les Latins . C'est alorsqu'eurent lieu les sanglants massacres dont la quatrième croisadedevait être l'expiation.

Au carnage succéda l'incendie. Quelques Latins échappèrent etallèrent implorer l'Occident et mênie l'Orient chrétien. A Antioche,à Jérusalem; à Aix-la-Chapelle, à Paris; à Pestii,à Rome,h Palerme,à Venise; ils appelèrent la vengeance des catlioliqiws sur la sae

d'Andronicos et (le 5C5 soldats. Deux peules seuls répondirent, lesVénitien et les Normands.

Guillaume II fut le premier à se mettre en campagne. il dé-barqua sur les côtes 'd'.Illyrie, prit Durazzo, et poussa jusqu'àThessalonique. En même temps les Vénitiens mettaient à feu et àsang les côtes de la Propontide et de l'Heliespont. Thessàlonique ruttraitée avec autant de barbarie que la Cdrne-d'Or Les Norinand.rivalisèrent (le cruauté, avec les Paplilagoniens: Les Véiiitiens lesimitaient sur les rivages de ],a deMarmara. Grecs d Latinsrevenaient à la barbarie 2.

La capitale fut bientôt menacée par les hordes du roi GuillaumeOn aurait cru jue &en était fait de l'empite. Mais' une nouvellerévolution changea la face des choses. L'avénemeiit d'Andronicosavait mis Constantinople à deux doigts de sa perte la chute dumême prince la sauva3.

IsaacComiiène, plus connu sous le nom (l'isaac l'Ange,pas plus tôt renversé l'usurpateur, qu'il prit des mesures habilespour repousser l'ennemi. Les Latins s'étaient avancés jusqu'auxportes dé la capitale; mais le mépris que leur inspiraient les Grecsleur fit négliger les préca "Utions les plus vu]gaires de la prudence.Ils étaient divisés en plusieur's corps et répandus clans toute la cam-pagne.. Le général grec IL3ranas tomba sur eux et profita de leur (Lé-

Tâfel, Ko,nne,wii p. 97.-Cf. IN icelas . toc. ch. Llns(orien livza Ili; n déplore amèrement eS désordres; il

y voit avec raison l'ori"i ne des malheurs qui plus tard ont frappé sa pat le . et unsutirndiit de vive douleur &Ialc à I ravôrs ses métaphores ambitieuses.-

laum . toc, cit. -

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- 109f-sordre pour les accabler. Thessalonique fut reprise sans tirer l'épée.Les Siciliens périrent ou piirent la fuite.

Isaac ne se laissa pas éblouir par cette victoire. Il saisit l'occasionetc traiter avec les Vénitiens, qui avaient continué leurs ravages,et dont la flotte appuyait les opérations des Normands. De soncôté la république n'avait jamais l'humeur si pacifique qu'aumoment oà elle était forcée de faire la guerre. Le successeur (leSebastiano Ziani, Aurio Mastropiero (1178-11 92), ancien ain-bassadeur à Constantinople, envoya Ottaviano Querini 2,:Pietro etGiovanni Michieli à l'empereur Isaac qui les accueillit avec unegrande bienveillance. Après avoir reçu leurs ce, mpliments 3 , ceprince s'engagea il plus ajourner les réparations.promises Dome-nico Merno, pi'ocurateur de Saint-Marc et-Pietro Corner allèrentrejoindre les précédents et obtinrent pleine satisfaction (1 186).

Les chrysobulles que l'empereur Isaac l'Ange signa en cettecirconstance sont au nombre de quatre (1187-1189). Les cieuxpremiers ne font que renouveler les concessions antérieures l'unen laveur (le la république, l'autre G en faveur des Vénitiens (leConstantinople et de Rornanie ils reproduisent tout ail leschrysobulles d'Alexis, de Jean et de Manuel, et ne s'en distinguentque par le toit.rnoins orgueilléux. du préambule. La chancelleriebyzantine, sans rompre encore avec ses traditions d'arrogance,commençait à ménager la susceptibilité d'un peuple qui avaitfait sentir aux Grecs et le prix de soit et le poids de sa haine.

Les deux autres clirysobulies méritent au plus haut degrél'attention de l'historien. lis sont, de la part des Grecs, l'aveu- leplus éclatant de leur faiblesse, et comme la justification de laconquête vénitienne, q'iis sernhlaienvappeler eux-mêmes. Par icpremier de ces actes, l'empereur se mettait à la merci des Vénitiensen les prenant pour ses marins ordinaires; par le second, il su-bissait toutes leurs réèlamations, et, sous prétexte (le les indem-niser, devenait eh réalité leur tributaire.

Les Vénitiens s'engagent à être les alliés fidèles de l'empire et à

'.flornanin,12€.2 Voy. Codice dey?i runbasciutori. (Bibliothèque Saint-Marc.)

Rornanin , t. li, p. 126.Bornanin,t. II, y ' 26. Cf. Dandolo, p. 3t!,-Libro dci Putt,, 1, tuS,Ilonianin , t. II, n.

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—.110 -prendre sa défense contre tous ses ennemis. Une exception est faiteen faveur du roi de Germanie et du roi des Deux-Siciles jusqu'aumoment où expirera le • traité qui engage la république enversces princes. Si même, dans l'espace de sept ans que dp it durerl'allianée vénitienne, avec les Deux-Siciles, le roi de ce pays atta-quait le premier l'empire, les Vénitiens, quatre mois après lanoti-fication officielle, seraient obligés de fournir à l'empdreur un se-cours de iS salées'.

Dans toutes les guerres qui pourront s'élever entre l'empire etun autre État, la république enverra, dans le délai de six mois,un contingent dont le minimum sera de /o navires, et le maxi-mum.de ioo. Ces bâtiments seront armés à. Venise aux frais dutrésor. impérial. Les équipages seront composés d'hommes ayantl'expérience de la mer. Venise fournira un capitaine pour .Parme-ment de cinq navires 1 . £haque commandant jurera que le navirerenferme iLp hommes, moins les morts ou déserteurs inconnusqui seront remplacés le plus tôt possible.

Les capitaines et officiers vénitiens promettront de conduirel'expédition pour le plus grand avantage de l'empire. Si, avantd'opérer leur jonction avec la flotteimpériale, ils rencontrent laflotte ennemie, ils la combattront do bonne foi'. La jonction faite,ils compteront les hommes dans chaque navire et rempliront lesvides. Ils prèterontdeux nouveaux serments, l'un .clé .fidélité à l'em-pereur, l'autre cl'bbéisance à l'amiral nommé par lui. ils s'enga-geront à poursuivre sincèrement la , flotte énnemie jusqu'au pointoù les impériaux -la poursuivront do bonne foi 4 . ' -

,Ven,n,tamen et contra rege± Sicilia, quandocunque ipse arguipentahitou'eflenderc Iloman,am lulla aimes conventionis inter co q factm, veulent Veneticiinfra quatuor menses post datani de hoc noticiasu Duc1 ah imperio cornai Ve-netine ad adjuvandum Romaniam et defondenduni earn- coin galeis quindecinibons .fide.s

Cum galeis quadragirtta, vol pluribus usque ad centum ....... Hojusmodivero gaea debent Venetiai fieri et parari a Veneticis cum universo apparatucaruin per pecuniam liii, missam ah imperio eornsn, vel inventam ibi n partecelsitudinis eorum, Veneticis dare debentibus hommes aptes, ut unusquisquepresit preparationi quinque galearum..... . s Ces capitaines recevront de l'empe-reur la somme de Go hyperperi.

u Et si siolus noster, antequam imperii connu siob uniatur, ali 1oem stolumInhmici coi-uns invenerit, et euns offenderet vol expugnare voluerit, faeiet sine

fraude el nlQiO 1P9C0W (5h quo.a

Et (((ICI! uni CUti) ,Ç (Q o i (n perli eor',ni j)ers equ en tu r stoluin mini ici tontes-

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- »l1l r

Après la fin de la cai pane oit à Venise autant (lenavires que -le gouvernement vénitien le demandera an Conscience.Mais ils doivent repartir pour Constantinople au premier mot del'empereur, montés par les mêmes hommes qui recevront unepaye proportionnée à la longueur du service, ou bien avec d'autreséquipages. Ils peuvent être également tenus en réserve à Venise,sur la demande de l'empereur et à ses frais I,

Les Vénitiens établis à Constantinople et en Ilomanie prenaientpartit ce service maritime dansdes conditions particulières. L'eni-pereur pouvait les enrôler dans les équipages des ioo navires ré-glementaires, à condition de ne lever que 3 hommes sur h, ayantplus de 20-ans et moins de Go. Cette faculté devenait même undroit toutes les fois que les navires, rappelés de Veniserne reve'naient pas à Constantinopfe dans le délai fixé, ou que l'empereurattriqué par une forcé de plus de 4o navires, ne pouvait demanderle contingent vénitien en temps utile'. Dans ces différentes cir-constances, le gouvernement grec pouvait- enrôler, ,aux conditionsqui précèdent, les Vénitiens habitant -la capitale et les environsjusqu'à Abydos-, Philadelphie et Andrinople3;

mis corun, , 'sive christiani suit, sit'e pagani , et Iodent cC expugnabunt Cutn etexpillent, inferentque ci malum psod polcrunt, banc. Mc, sine f'nuc1e n rnatoi,ujenio , et impngnabunt cnn 9l,OriS,7,,e et sto/ai irn,)erotoriœ subli,niotis cern irnprsg-nobit bonn/ide et sine fraude.- ' u Et si volueril cas Venetia custodiri , c,,stodiehtur ad bonorem Iniperii coron,ne si essont proprhe Venelle, scd larnen cum iuiperinli espcnsa.

2 «item et ' si imperium eorun) volucrit in nusmero liujusmodi cenluin galea-ruin scrvitiu,n Veneticou-um in toto Bomania mventorum , dehet iIl,id haberecern toi scilicet galcis quoi armari paieront de invertis Venetis, ex quatuor tribusin galeas inductis secundum nurnerum inventorum Venetiràmum coin mani-festa regs. Verumtamen non cogentor galeas ingredi vigintiannorum hoùiinesetinfra, neqtte sexaginta annomum et ultra - -

Le texte ne si gnifie donc pas, comme le prétend à tort Romanin (11, p. 127,n. 3), que les Vénitiens de Constantinople, levés à raison (103 sur 4, remplissaientà eux seuls les cadres des 100 navires ce qui constituerait une population (teià,000 hommes en état de porter les armes, mais qu'ils seraient versés dans -autant de navires qu'ils en -pourraient remplir titant levés à raison de 3 sur A,et que ces navires montés par clix seraient compris dans le contingent réglemen-taire des ' oo bâtiments. Le Lotit étant plus grand que la partie, il est évidentque les navires ainsi montés par les Vénitiens de Itomanie étaient d'-u,, 'nombreinférieur à '00, sans qu 'au puisse dire ce qu'il était.

« hem si i mperio Cornu, experlit auxilium ad defensionen, terra cel,itudiniscocon) oh al i qu en, mi nicdr,u na in Romanisai in gressu ni n, cii n, ga leis i1vuad 'a-

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- 112 -

L'empereur se réserve à Venise mme d'autres facilités pour lePassage des troupes de terre qu'il pourrait lever en Occident. Lessoldats qu'il enrôlerait en Lombardie et voudrait transporter enRomanie par Venise auraient droit au passage et à la protectionarmée de la république, si toutefois ils n'étaient pas levés contrecite, et s'il n'y avait pas d'empêchement. majeur 1. -

En récompense de ces services l'empereur donne aux Vdnitiensrecours bontrele fisc 6u les sujets grecs dont ils sont créanciersdepuis l'époque dé Mainte! ;il leur promet la i'estitùtion (les biens(ne l'attentat de 1171 leur a fait perdre, ou le payement d'une iii-demnité équivalente. Il s'engage à maintenir leurs anctns privi-léges, à Les défendre contre l'agression, à ne pas traiter sans euxavec l'ennemi crnnrnun 2 De son côté, les doges de Venise lui,Jureront fidélité, selon la formule du 'serrnent qu'a prêté k dogerégnant Antin Mastropiero, pi-otosevastos impérial (1187)-

Les réparations pécuniaires, admises en principe, devenaientdeux ans plus tard l'objet d'un acte nouveau.

Les Vénitiens n'avaient tuch que ioo livres d'argent sur lesi5oo fixées par le traité de 1178. Le chrysobufle de Y 189 rap-pelle les différents ambassadeurs qui sont venus en réclamer lepayement intégral, d'abord P. et J. Michieli, et OtlavianoQuerinit,ensuite Pietro Corner et Domcnico Mémé, procurateur de Saint-

ginta vel lu1)t1s , et nequiverii Venctiani mittere pi-o adjutorio , dehet impera-torin celsiturlo intincere ad lefensionem terra, imperii enrum contra httjusoiodiininlidum Veueticos, in mâgua urbe iidelicet e( cirea cent existentes versus ortiimet versus occasuin , et ah en osque Abidum et in eadôm civitate similiter inventas,necnon et in terris, qum infra sont usqile ad Pluladelpitianl et in ipsa civitate . etosque Andriassopolim et in en sirniliter existentes . de quatuor tres , dom toi scili'cet galeis qisot armare poteront, inventi seciindum supradictum ordinem, cumet manifesta rogà. - Philadelphie est oc ville de Lydie.

Item, si imperitim cor,, na voluerit hommes art vestiaria \'eztet,affi minci C,gratin condobendi milites n Lomba dia vel ai) dia terra et dispensandi en qunad bonorein et ïnilitaiem tertio spectant celsiturlinis corum , licite fadiet hoc., sihoc nota est contra Veietiam. w -

Voy. la dernière page tin document Libre dei Puici, I. ii3. Tafet a puliliéces différents documents (Fonces, t XII, p. 178-203) apr's Marin (t. 111, fi. 263

vi3 et suiv.).Noliilissimo et imper nos tri lidelissin,o floi Von etia, , At, iagistro PcI.ro

qui digrutate protosevasti n asosi ra s,iblinmiiate decos'at tis est.» ( Clii'vs. (le II 87,préambule Foui, I, 103.) -

4 V.Y. j1los haut, p. 109.

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- lia -Marc ) . Accédant à leurs légitimes 'réclamations" l'empereur leurpromet le payement des i too livre g encore dues an moyen d'un-versement de 200 livres comptant et de six annuités Il y. ajoutetoo . livres comptant. , une indemnité annuelle de Su livres. Unrevehu égal leur-est.assuré sur les Échelles franque et allemandequ'il leur concède à'Constantin'ople. Ils auront recours contré leursdébiteurs, y compris le fisc. Aucun agedt public ne poot-i-a percevoirde droits 'sti.r les revenus nouveaux que l'empereur leur accordedans.saeapitale2.•

Ces derniers traités, qui avaient pour but le rétablissement del'alliance, sont au contraire les signes les plus éclatants d'une lutteinévitable. En promettant aux Vénitiens les plus larges indemnités,Isaac l'Ange prenait un engagement dérisoire ou dangereux. En lesenrôlant clans ses flottes, il mettait Cobstantinople et sa propre per-sonne h leur merci.

Et d'àilleurs ce prince téméraire et p' 'odigue avait-il au moinsl'avantage d'une longue possession et le mérite (le ],aEtiit:il biei assis surie trône d'où il faiaivpleuv'oi:r tant de grâdes?Avait-il foi en ses alliés et en lui-même? -Rien de tout'cela Cher.chant à-tout prix de soutiein; Isaac offrait . ce qu'il n'aurait pu don-ner il i'4tAit libéral que du lien d'autrui. Le jour où il eût réel-leinent poùédé l'empire, il et été le premier à le léfendre contréd'insatiables convoitises.'

L'empereur, pas plus que le doge, , ne croyait à la durée d'uneréconciliation qui pesait aux deux partis. Entre Vénitiens-etGrecs on 'avait ramené la paix'; on ne pouvait rétablir la con-fiance. Une.]-épiilsion invincible paralysait tous les efforts de lapolitique, let la' plus vive • antipathie se cachait sous l'excès mêmedes démonstrations amicalès. Isaac l'Ange avait beau dire que lesVénitiens n'étaient pas pour lui des étrangers, ê qu'il les considéraitcomme des Grecs indigènes, qu'ils souffraient pour la Ilornaniecomme les Roniains eux-mêmes, qu'ils lui étaient dévoués commeà-la mère .patrie, et que ces sentiments leur (lonnàient 'droit àtous les priviléges de Romains'.. \ainenient espérait-il, sous les

Ces ambassadeurs fuient envoyés en I ' 83. Cf. Codin dclii ambasciaeo,-i (alla))farciana).

tibro dei pani; I, uS. Tafet (ouvr.cité,p, 203). -s Quanqoam enim grave nosirat celsitiidini videtur, Iatit,udinen, infra magnam

urbern gentituis exliibàrc; verIIminmn , pila', non ut alienigenas - vernal ni aho-

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lui --

faux dehors de l'aniitié, dissimuler aux autres et .à lui-même- lestristes nécessités de la dépendance. Les Vénitiens n'étaient pas plusque lui dupes de cette illusion volontaire. La crainte de la guerreperçait à travers-tous les articles d'un traité destiné, à conclui'e.uneintime alliance. Les serments se multipliaient avec les mensonges;on faisait jurer aux. Vénitiens la fidélité;, on n'attendaitdeuxquela trahison. Menacé d'une ruine prochaine, - lê Bas-Empirecherchait à prolonger par une lâcheté suprême samisérable exis-tence. Ambitieuse, mais prudènt.c et timide encore dans son aTnbitiùn , Veniséremplissait de ses marins les flottes impériales, avantd'accabler l'empire.---

CHAPITRE VILVil. - -

LES VéNITiENS EN I\OMANIE; LES GRECS ET LEUR INfliJENCEX VENISE--;ERS LA FIN DUfli° SIèCLE. - -

- Depuis l'époqùe de Justinien ,une jncifiquee,t mutuelle invasionavait établi les Vénitièns dans toute l'étendue de la Roinanie i etintroduit à Veniée l'influence, les usages et les- arts de la Grècel)\zantin(-. ...vant de se combattre, les deux peuples avaient apprisàse coniuiître.et à s'imiter; ils s'étaient unit par les mariages, parl'échange des produits ci des idées, par lacommunauté des travauxet des habitudes. Le jouroù une haine réciproque les mit aux.prises, ils dônnèreiit un sanglant démenti-à-une amitié sept fois séculaire, et affrontèrent l'horreur d'une guerre presque fratricide.

Avant de raconter la conquête 'du Bas-Empire par la répu-blique de Saint-Mare, il importe d'exposer -les résultats de ces longsrapports entre les deux Etats les plus civilisés du ffioyen âge. -

Le commerce qui reliait Venisé à Constantinople était de plu--sieurs na t ures. La reine de l'Adriatique ne se conte ntait pas deséchanges directs avec les Byzantins. Elle apportait à ses alliés lesproduits de l'italie et de l'Allemagne, et distribuait à toutes ces 'ré-gions les denrées et les riches travaux de la Romarie-, qui sortaientsouvent (les manufactures vénitiennes, fabriqués par la colonie

ilgines Romanos gcnus .Veneticornm nostra. serenitas reputat tantomque prolVomaiiia quantum et. 4ui flnmani, tantumquc et erga cam habcnt rtovotonern,quantuni et erga terrant, ([11m cos ernisit, non ois tantimquantsim Romanim IdIC

gietirititn esse videIiir q iIaotiImciimqiie ri, largiatar. n (Voici, I 103 )-

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- 115 -

de Péra. Legrand commerce d'Orient alimentait un trabsport très-'actif

, en Europe. Les petits fictives de la Vénétie étaient sillonnéé--par es barques des Vénitiens ., comme l'Adriatique et l'Archipell'étaient par leurs navires. Ces marins infatigables restèrent lesfacteurs univei'sels,-jusqu'au moment où des rivaux sortis de Piseet tic Gènes les forcèrent-au partage.

Les produits nationaux étaient les objets les moins importantsde leur commerce avec l'Orient.-

Le sel, que Venise avait recherché dès les premiers jours de sonexistence et dont elle tendait à- se réserver le monopole, passait ehpremière ligne. Il donnait, naissance à 'un autre genre de trafid, lepoisson salé. On exportait aussi beaucoup' de liû et de chanvre,Quant à l'industrie vénitienné, elle excellait 'dans les travaux debois gros ou fins, destinés au -service des bâtiments otu ii l'usagedomestique

'dans la préparation (les solives, planches, écuelles,

plats, conques, vases et verres. Elle savait fondre certains métaux.Le doge'Orso Partecipazio W (864-88i), à la-demande de l'emperein' Basile ] , lui envoya alors douze- cloches. Celui-ci les fit mettreclans une église nouvellement construite, et c'est dcjsis cetteépoque que les Grecs commèncèrent à a\'6ir (lés cloches 2,-

Venise.lirait de l'italie', de ' la Germanie, de la Hongrie, de l'lllv-rie; (le la Dalmatie et autres contrées; dts marchandises de touteespèce, qu'elle répandait ci) Orient.

C'étaient d'abord lés esclaves, hommes, femmes, enfants; eu- -nuques. Les efforts Communs (les empereurs et des doges pour 'incterdire. ce corni'n'erce témoignent de la faveur dont il jouissait chez-les deux peuples 3 . Les :manufactnres d'Italie -et d'Alkmagne'n'é_taient guère moins recherchées -à Constantinople qué celles del'Orient, ne ]'étaient dans lés réiôns Occidentales. Venaient ensuiteles fruits secs et les salaisons; les métaux h'-nts et travaillés,' fer,cuivre, plomb, étain, vif-argent; les -cordages, les pelleteries detout genre; les bois de cons[ ructjon-soit I ioui- les navires, soit'pourla bâtisse; les travaux clé bois et de terre cuite; les toiles de chanvreet de lin, la laine et les draps de lainè. Toute >s les marchandises,

Basile I-' le Macédonien '-en' pereur en 86 7 . (-Voy. ]ianddo, p. 183.)DandoloQui houons suscepti (protospntiiarju,s effectius) non' j rigralus XI]'-unagni pondori,% campanas impei-atori delegavit , et ex if0 teopore Guu',gi ean,•Jianis titi coejuci-ont, » ( C/iroo. p. .87.)

Voyez Pou ;, f,

8.

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- 1-16--tirées des ports de l'Adriatique ou arrivées de l'Allemagne, par kSave,I'Isonzo, la Brenta, ia.Piave', étaient transpoitées par les Véni-tiens dans les îles et sur les côtes de la mer Ionienne ,-del'Archipel.,de la me,, Noire; en Europe, en Asie, en Afrique.

Si l'empire grec recevait beaucoup, il pouvait rendre.avec-u.sure.Son opulente capitale ., qui avait survécu àtanl de désastres, exerçaitun invincible prestige sur l'Occident, resté barbare. -Ellk était pourcette partie du monde comme pour l'autre la souveraine de lamode-et dugoût. Les pays du Nord et de l'Occident recherchaientpar l'intermédiaire (les. Vénitiens les merveilles de son industrie:habits (le luxe, draps dc soie brodés d'or cl d'argent, riches matin -factures, objets de fantaisie en tout genre. Si Constantinople four-nissait les articles •eu vogue, -la mer Noire donnait le poisson salé,la Tauride les: grains; l'Asie Mineure et les îles.dcj'Archipelles yins précieux, le baume, les drogues et parfums, l'encens, lesdifférentes espèces de gomme, la casse et autres médicaments, lesdenrées ou les manufactures importées de l'Inde, les draps-désoledi de coton, les draps de Damas et de Bagdad,-ies perles ,iè corail,l'or et l'argent monnayés ou bruts, les fantaisies de Phénicie. Lesîles de l'Archipel, ainsi que la Sicile, exportaient l'huile, le vin, lamanne, le mastic. Tous ces produits passaient par les mains desVénitiens, qui en approvisionnaient l'Italie, l'Allemagne méridionaleet les deux rives du Danube. -

Lorsque ces habiles marins allaient trafiquer dans les mers loin-[aines d'Orient, ils •employaient un mode- particulier de navigaelion. Ils formaient un convoi de plusieurs navires destinés- . -lamême échelle. Sous le règne de Giovanni Partetipazio (829u836),un convoi de bâtiments vénitiens, parti des environs de Bénévent,i.omhe aux mains des Slaves. Quelques siècles plus- tard, sous les(loges Gradenighi , il,- utrçs convoi venus de Syrie et-chargés 4emarcbandisps furent pris p' les Sarrasins'. Ce système avait undouble but.. II donnait aux commerçants menacés par les- piratesla. force (le l'association et (lit il permettait en outre dréunir une quantité considérable de marchandises et de répondreaux besoins (le la place que l'on allait servir. Grâce aux corres-pondances entretenues avec elle, on proportionnait l'offre la de-mande et on évitait le risque de ramener le chargement. Tout cet

itarin, t. .11, P. ,oG.

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- 117 -ensemble de dispositions atteste la prévoyance (les marchands vé-nitiens et la continuité des rapports qu'ils conservaient avec ceuxd'Orient..- Au xne siècle, les colonies vénitiennes étaient répandues dans

tout l'empire. Elles l'enveloppaient: d'un vaste réeàu, depuis lesfrontières de Ia.Dalrnatie jusqu'à celles de l'Asie Mineure. Sur tousles rivages et sur tontes les îles flottait où nom du commerce l'éte-darcf de la république, en attendant le jour où elle y régnerait parle droit de la conquéte..

Les chrysobulles qui ohvraidnt ],a aux Vénitiens nefaisaient pas de distinction entre les différentes vills de cette vastecontrée. lis leur avaient conféré un privilége en quelque sorW uni-versel. On peut dire pie tous les ports fréquentés, tous les' centresimportants de l'intérieur recevaient la visite de leurs marchands.Mais, si les actes impériaux ne mettaient aucune limite à cette tuer-veilleuseactivité, ils indiquent d'une façon explicite les points oùelle se déployait avec le plus de eonfianpe. L'étude attentive de cestextes nous donne la géographie politique dès coloniesvénitiennes\(iné des pins considérables était établié sur la rive orientale (lel'Adriatique à Durazzo, assez puissante pont- la ville contreles Norijutnds et pour la revendre aux Grecs après la victoire. Elley possédait, en vertu de la donation d'Alexis, l'église de Saint-Andréet autres édifices impériaux, à l'exception des Iburnitures qui s'ytrouvaient rènfermées. En Épire, Àulon, Bonditia;'en Macédoine,Thessalonique 1 , Chrysopolis; en Thessalie, Aimird (\'olo); dont ilspartageaient la possession avec les Pisans depuis 11 782; dans la,Thrace et la Romanie propre, Pêritheorion , Abydos, Ilodosto,Andrinople, A pron, Héraclée, Sélymbrie; dans la Grèce centrale,Démétrias, Chalcis sur l'EuFipe, Thèbes; Athènes; dans le Pélopo-nèse, Méthane, Coron, Nauplie,•Corintlie Mégalopolis; clans leslies, CTiios et peut-être Pathnios;. en Cilicie Antioche près desbouches du Pyramos, Mamistra, Adatia ou Adana, Tarse; en

Théssalorurpie, située au centre de la /j0 Enaila, avait un port sûr et. trais-quille. Une foire s'y tenait au mois d'octobre, le jour de la fête de saint Din,itri .patron de la ville, et attirait des négociants de tous les points du monde É gyp-tiens, Syriens, Danubiens, Grecs de Constantinople , Français, Espagnols , l'or-ulgais, Italiens. (Tafel, TIics& P . 29.1 .

G. B. Fanrineci , Storm dei ire cctebri popoli-norittini dell' Itou0, Vâneziàni,Genorcsi e I'ùoe, e delle taro :tavigazioni, e rooiincrcio nci ba.tyi steoli, Pis. t 817. -(T. Il, p. ioS.) il confond Volo avec Larisse.

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Éolide, Phocée; en Isaurie, Attalie; en Lycie, Strobilos; en Sy-rie, Latakié (Lçzodicia neâqna ou maritime), sont les villes que lesVénitiens fréquentaient le plus et qui obtiennent une mention spé-.ciale dans les' clirysol)ulfes . D'autres documents nous permettentd'afflnner qu'ils -étaient établis, dès cette époque, dans l'ile'deC)sypre qui devit être l'un des trois royaumes soumis à la répu-blique 2. lis y formèrent cette pas-tic de la population que l'on désignaplus tard sous k nom de Vénitiens blancs. Villehardouin 3 , aucommencement du xnie siècle, signale une nombreuse populationde Latins dans la ville de i'Espigat, en Bithynie. -

Mais c'est clans la capitale même (le l'empire et aux environs(jUe [es Vénitins étaient le mieux établis. Ils y avaient fondé, avecles autres colonies italiennes, une ville ù.patt, qui se perpétua sousla domination turque et qui a donné naissance au quartier euro-péen de Constantinople.

Des rivaux moins habiles les avaient -précédés sur le i3osphore.Les Amalfitains , dont la colonie prospéra jusqu'à la fin du .XI°

siècle, reçurent en Orient le contre-coup de la guerre normande.Cédant àla menace d'ennemis voisins et'edôutables, la républiquecrAmalfI avait renvoyé les dursgrecs dont elle reconnaissait la su-prématie, et s'était donnée aux Normands poûr n'avoir pas à-lescombattre. L'empereur Alexis se vengea de, dette défection en ren-dant les Amaliitains de Remanie tributaires de l'église Saint-Marc,

-ci en aùignanfaux Vénitiens la première place à Constantinople.En vertu du chrysqhu]le de 1082 , - ceux-ci occupaient dmis le

port de la capitale (Perama) tout ce qui s'étendait depuis Vigla.jusqu'à r l'Echelle juive, r et trois Echelies maritimes situées dansla même région. Perama était laCdrne-d'0r 4 , quil. fallait traverserpour aller de la ville à l'autre rive (tpdv) ,ou, comme l'on diraitaujourd'hui',- (le StamliouF à Galata. Vigla s'appelle actuellementZinrlanrKapoussi . Quant à I'Echeile juive, -il- ne faut pas la con-

Voy. TaUd, t. XII, p. i i8-j '9. Lame tition ck Patlirnos, sous le nom de l'ueo-logos, est tout à Lait incerlaine. ----.1 filinsi, t. VI, P. 45;-

- Villehardouin, c. xxv,. L'Espigat, sur la lier de Marmara, A dix lieues envi.ron à 10. de Cyzique. (V. 1 . P. Pâris, notés, p, 307.)

On sait que la Corne-d'Or est ic golfe qui sert de port A Constantinople et quila sépare de ses faubourgs:Péra et Galata.-(voy. Du Cange,. cAris-ihqra, Paris, 1680. P . :)

La Poule drr Priions - -

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— 119 -fondre avec le quartier (les juifs. Les Juifs habitaient hors de laville, à Péra, du côté du Bosphore. Quand ils voulaient se rendredans la ville, ils devaient traverser -la Corne-d'0r dans sa plusgrande largeur, au -point où elle se -confond, avec la mer de.Mar-mara et le Bosphore, c'est-à-dire vis-à-vis de la Pointe du Sérail.C'est à peu de distance de là que le plan d Ile. uondelmonti (i 422)

indique une porte juive sous le -t om de Porta Judta 5; o Aujour-d'hui même oit en face du pont Validé la Pôrte des Juifs(Tck?fout. Kapou) qui occupe encore le môme emplacement. LesVénitiens habitaient donc à Constantinople un quartier dont lasituation, à l'entrée de la Corne-d'Or, était des plus favorables,l'accès facile aux navires, et l'étendue assez grande pour permettreau doge Vitale Falier d'en donfler une partie au couvent de Saint-Georges Majeur 2 ; ---

Cette concessionne tarda pas à devenir insuffisante. Soixante-dix ans plus tard lesréclamàtious des Vénitiens, qui s'y trouvaientà l'étroit; arrachèrent à l'empereur Manuel un chrysobuile quiélargit et fixa d'une façon précise les limites de leur établisse-ment 3 . Isaac l'Ange confirma expressément le décret clé son prédé-cêsseuren 1187. --- ---

La position des Vénitiens n'était pas à l'abri -des attaques ni des-

t Cnnslituitvero imperium Ineum et sanctissimam ecelesiam sanctinpostoii etevangeIist Merci, qui est in Venetia ab unoqooque in magna civi taLe et oipniIloinania tenentium ergastena Ama]pliitanot-uru omnium, qui nuit sub pntestateejns qriideni jmtriciatns, accipere per un'unquemque annnrn nun,imnila tria. M -hoc donat. eis et ergasufrma, qu snnt in embolo Peramatis don solariis suis, qZI(Qhabent introitum et exitum id totiim quod procedit ah Ebraica iisque ad Viglanqua-,que liabitantur et quœ non hahitantnr, et in qnilms Venetici permanent et -(;m-ci aient ergasteriis et maritimas ni sealas que in proedieto s1nitio termi-nantur. (Paui, 1, qq.) Voy. Ou Cange, Cons uzutinopo fis du-isticjia, p. 58. Soninterprélalion -de lEchcllr jnit-c nous n paru contredite par le plan même deBoondelmonti, 951'ii donne an - commencement -du - Constantinopob-i rhrz.s-tzanr,.Zindan-ICaposissi et in Porte des Juifs sont indiquées, sur toutes les cartes deContaniinople, entre la Pointe du Mail cl le-premir pont (Validé) qui traversele -flosphore. - - --T (LévTo: 1r' évôttait -rot edayyc)a7oU (mai dnoaldÀou Mdpxou ùcunaiç ,.o-

e4pouc &srav-ras -rocs dz MéÇts {i. dE Âp). sid),èv Kror,lœv;,rovnd).e, êpyar11pis -i?arixozna%, teioiscc, mal -r&dsr6i-is sAacç Ée95,q exd).as rdpr i-fir naÀoujzd-vnç B(yas Jc4novrs dpya01aps ma

i T&t dvras TwJto 4crcp:sqzéva csdMç a0-

p4aaro. (Anas Comnena, VI, 5, M. Bonn. t. I, p. 285.) -2 Tafel et Thomas, P'onre, rïrw# Austriocarum, t. XII, P. 187. -

M. ibid. p. 1,, 1 tS-.

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n

—'120 -périls. tIlé éxcitrit l'en vie des autres - colonies italiennes, génoiseset pisincs, et celle-des Grecs eux-mêmes. Dès Je commencementdu tiC siècle, lés rivaux maritimes desVénitiens surent obtenu'par les -menacés ou -pal- les prqmésses des concessions de terrainou des p'iviléges comwerciauxl. Les Pisans voulaient avoir au-tant que les Vénitiens, les Génois autant que les Pisans. Les unet -les autres, entrés cil possession de leur quartier respectif; ne- -savàient'jas s'y contenir. En J 162 les Pisans envahissent l'éta-blissement des. Génois, qu&ceux-ci défendent avec courage. Maisles agrdsseurs sont exposés eux .- mêmes à- un grand danger paiela politique de leur métropole, qui conibat celle de Manuèl. enItalie. Ils perdent- leur ancien quartier situé dans. :j'iI)térieur, etear'reçoivent un autre 'en 'face de la ville. On ignore si c'6tait à-Galata ou à Scutari. Dans tous les cas, la positioïiétait moins fa-vorable. Les Génois, au nombre de Soo, avaient bravement ré-sisté le piemier joui , aux forces -pisanes, trois fois spjérienresMais, .le second jour, les Vénitiens et la population grecque firentcause commune avec les Pisans Les Génois durent céder la placeavec une perte dc'io,000 livres : d'argent 2 .- En général, les Véni-tiens 'gardent la neutralité clans ces querelles; mais, lorsqu'ils-yprennent part, c'est pour se déclarer contre les Génois-1 leurs en-nemis naturels, destinés à les supplanter un jour.

Cependant l'activité des V6nitieis -avait Traiithi le Bosphore.Depuisiongtenips ils exerçaient le droit exclusif (lu commerce dansla mer Noire. Leur apparition sur ces rivages remontais . à l'époquedes empereurs Basile et Constantin. Les croisades accrurent leurspiivilégcs et donnèrent 1les plus -grands développements à leursopérations . Mais ces mêmes événcînénts les-forcèrent , à 'par-tager sur ce nouveau théâtre avec les Pisans et les Génois. Lespremiers avaient fondé sousle nom de Portas Pisanus un établis-sement'qui rivalisait avec la colonie génoise 4e Tana4.

-. ' Voy. Tafel et 'l'hornas; Foutes rerù,u A ustriucarwn, t. XII, p. 189.Ambassade de iasilios Mesiineri à -Vise en t ii j . Les Pisans promettcnt de

cesser leurs pirateries et de prendre cl, tonte occasion fait et cause pour Venipe-"eue.Ambassade pisane à Corsstantinopie et ebrysobulle en faveur des Pisans

il 2. Traité de Manuel avec Cônes, ii 55.-G: B. .Fannucci, oinireq'c cité, t. II p. 28 et suiv.--,

' Voy. Marin. 'HI P. 28 et 5t.Pegolot.ti - PioGea dr-lIa niercatu,'o ii. '39. Ap. Pardessus, Lois maritimes,

t, Ii). IX, X.

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-. 121 -La mer Noire ouvrait aux Vénitiens leà lointaines régions que

les liens du commerce rattachaient, depuis Alexandre, à la GrèceCL à l'Europe orientale. lis suivaient les voies que les ' Grecs, lesRomains et les négociants de Byzance avaient prises pour ira-verser J'Aie centrale. L'ïtinérairc. du juif. Benjamin de. Tudela,écrit dans la secondé moitié du xiP siècle, est le document le plusancien qui nous reste -sut' les voyages des Vénitiens et des autrespeuples coimnerçants de 'I'Eur'opt à travers ce vaste pays. .11 . estdouteux que Benjamin ait visité toutes les contrées dont: il parle;mais on peut croire qu'il a recueilli ce que d'autres avaient vu pareux-mêmes et ce qu'ils lui avaient appris; car, à côté de nom-breuses fables, la relation: de ses voyages ofle des notions dont lesvoyageurs.des siècles suivants,ont confirmé 1'exactiIude'

Dans les ports de la mèr Noire affinaient les marchandises de laRussie et de l'Asie;Rsibruquis atteste qu'au xiii' siècle les Russes y.apportaient des fourrures et autres productions nationales, enéclùinge desquelles ilsrecevaient des tissus de coton, de soie, desépiceries. Déjà au kii'.les expéditiods des Vénitiens pour ce paysétaieid très-actives 2 , etl'Europe septentrionale leur était redevablede ses communications avec le Midi et l'orient:

La sécurité et l'indépendance des colotiies vénitiennes étaientdéfendues dans tout l'empire par les bailS ou consuls que la répu-blique avait institués. Dès le xi' siècle le gouvernement, vénitiens'était réservé la faculté d'en envoyer à Constantinople.. Au site,il-en eut à Soudak 3 dans la mer Noire et dans toutes les villes deterre sainte, Théophil6 Zen estle premier consul vénitien qui aitlaissé trace de son existence . dans ces parages (1217). Mais rienn'indique qu'il n'ait pas eu de prédécesseur 4 .-

Les consuls du bailes eurent d'abord pour unique mission dejuger les difFérends entre leurs compatriotes, sans aucune inter-,vention des magistrats impériaux. Mais. leur influence s'étaittellement accrue pendant le xii' siècle, qu'ils en vinrent à con-t

Pardessus, Lois mwitiutes,,t, 11, xi, xii.JcLi&id.p. xxiv.-. .hi. ibid. Marin, t. VI, P. 69.

Ma il faim è aacota pi manifesta in 'J'côfilo. Zeno, clic cosuministrava inSoria qutoufluzio (di console) ne] 1 07, corne si cava da une stromento; ne ivi.si dice che fosse il primo..» (M. Foscarini . Delta leuerae w-e, ùohana, p. aS-) Fosca-ritti s'est irompé ,l'un siècle. L'erreur est aujourd'hui reconnue par les archivistesde Venise.

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- 122 -naître même des contestations que-les: Vénitiens auraient avec dessujets grecs. C'était un privilège inouï dans les annales du droit desgens, et dont la faiblesse d'un empire aux abois peut seule expli-quer la concession.-- -----

-Avant l'établissement de cette -juridiction nationale, les chryso-bulles de qqi et de 1682,confirmés par les suivants, soumettaientles Vénitiens au logothète impérial. Mais ce màgistrat supérieurles jugeait d'après ictus propres lois. C'était ,rester fidèle à l'espritdes institutions romaines, qui laissaieht le proelor peregrinus rendrejustice abx étrangers confonnémeut à leur droit propre ou auxprincipes du droit naturel et des gens. En -outre, toutes les autresjui'idictions étaient -rigoureusement -écartées. il- en était de mômedes droits onéreux qui pesaient sur -le commerce extérieur danstous les port de l'empire et: dont les chrysobulles nous donnentla curieuse éinimération. Les navires payaient une contributionparticulière -(tp EuXox&4sou), un droit -pour séjourner dans leport ()szctsarsx8v),-pour débarquer et transporter les marchandise(optar:xdv), des honorairs -(xavlcxwv), oh impôt de six oholù(ée6XXov), un droit aux -comandants des ports (dpxovrixzov)et , autres tributs qu'ils sont dans-l'usage d'acquitter. Les officiers im-périaux; avec lesquels ils devaient, traiter, n'étaient pas moins nom-breux que les tributs. C'étaient i'éparque du rivage (irapxo. -tapa-.9a),dovso), le -receveur gdnéi'al (ÉXeordpoxo yev:x6), les percepteursdes droits mis sur les marchandises (xoptepxdptos), les rédacteursdes registres (%ŒpTovXdpioz), les vérificateurs de comptes publics (û76-Àoyoz) et tous ceux qui .appartiennent a-cette classé dcjfonetionnaires).Toutes-ces juridictions inférieures, supprimées pour -les Vénitiens, -

Cette énumération est tirée do chry-sobolle d'Alexis et des chrysohuiles pos-tériurs ,'qui le reproduisent. Ce sont, à vrai dire, des données officielles sur les -impôts et offices maritimes de ]'empire grec. kav&a,ov, honoraires (ccnviisruin).Du Cargo: «Sumitiir porro hae vox apud recentiores Gra3culos pro sportula, hono.-rada, doua, psis doua in canistris deferri soient. sVoy. les exemples qu'il donne.Clossariizni ad scriptores media' hftrnw gracitutis, t. I, P. 575. - Éedp0x?0, udroit de six oboles : dAa, dÀ?.a d s,v,fo!lis, obotit. -- Kojtjzepncdpioz, rece-veurs des droits mis sur les marchandises noppéxtov signifie tribut, droit nissur les marchandises. - Xap-rouÀdpiot, ceux qui conservent et rédigent les i'r-gistres. Beaucoup de fonctionnaires portaient cc titre dans l'empire grec, à lacour, à la ville et dans les provinces. Il s'agit ici deszaptouAdpno(rv -&ceït&Gv,selon toute probabilité. (Voy. lit, -Cange.) - t,ndÀoyo,, comptables, mais dansle sens de vérificateurs et d'inspecteurs, car nous avons dàj.\ vu les-percepteurset les receveurs. - .-

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- 123s'effaçaient devant celle du logothète ou du consul national. Tousles droits imposés aux navires étrangers étaient abolis, pour unpeuple qui s'était ménagé, clans un âge de prohibition impitoyable,les priv.Uéges du libre échange.

L'indépendance dont jouissaient les colonies vénitiennes n'étaitpoint compromise par le serment de fidélité et de» dévouementqu'elles prêtaient à l'Empereur. Jamais' la métropole n'avaitrefné cette satisfaction à la vanité des maîtres de [Orient, etjamais sa liberté ii'en avait souffert. Les Vénitiens de Romaniesuivirent cet exemple. Ils acceptèrent même, sous le nom de oup-yéctot 1 (bourgeois, citoyens de l'empire), une sorte d'organisationmoitié féodale, moitié communale, qui les attachait à l'empereurpar les liens d'un vasselage apparent. Quand Jean et ManuelComnène voulurent rendre cette dépendance effective ;ces princess'àtfirèrent une vive• opposition et des guerres désastreuses'. LesVénitiens de Romanie ne sei*aicnt clans les armées impériales qu'à(le longs intervalles, Ils avaient obtenu des conditions presque aussifavorables .que les contingents maritimes fournis par la république -elle-même', Enfin la protection constante de leur gouvernementles accompagnait sur la terre étrangère, et ajoutait à la gatantiequ'ils trouvaient dans leur nombre celle d'une magistrature tuté-laire et d'une juridiction nationale.

A côté des balles et des consu1s,dont la compétence était surtoutcommerciale, les ambassadeurs exerçaient à -Constantinople lersfonctions politiques. Laquantité même (les missions qui leur furentconfiées montre que ces ministres de la république n'étaient pasaccrédités en permanence auprès des empereurs. Les bailes, quiavaient dans les principales villes, et surtout clans la capitale, unerésidence fixe, pourvoyaient aux exigences de la politique couranteet donnaient à leur gouvernement les renseignements nécessaires.Les ambassadeurs, ordinairement au-nombre de trois, n'étaientdépêqhés que pour traiter d'ttne'aWair spéciale; c'étaient desenvoyés extraordinaires, mais si fréquemment employés aux,r ,siècle, que Venise eut en eux -une- représentation'continue.- -

A Constantinople était née. cette 'diplomatie vénitiehnb qui de-

Linnamos ('&L Bonn. p. 282, et commentaire de Du Cange. o,». cii. p 39o). -Voy. lcd,, n, -.Voy. p.- li.

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ait jeter- dé si profonds regards sur toutes les cours de -l'Europe,et laisser aux historiens modernes de -précieux matériaux qui sont)es témoignages durables - de -son génie. Ç'est , - là. qu'elle prit leshabitudes d'une observation pénétrante, d'une activité infatigable,d'une régularité, merveilleuse; -On trouve en vigueur au xii' sièclelesprincipaux usages -qu'elle suivit plus tard avec une si. grand?-exactitude, et auxquels elle , dut à la fois la sûreté de sa marcheet l'abondance de ses-informations.. Déjà, le doge remettait auxambassadeurs -ces •commissions écrites que Je sénat vé'nitieir dictaavec une netteté , et une - force - qui- ne se démentirent pas pen-dant des siècles. Les bailes- et , les ambassadeurs envoyaient -lesrelations et les dépéçiies, où l'on -trouvait à la fois la situatiôngéné-raie d'un pays et son histoire quotidienne. La distinction -entreles deux genres dé communications diplomatiques n'étaitpas aussirigoureusenent-mamquée qu'elle le fut dans la suite; mais déjà lesreprésentants vénitiens acquéraient . les, qualités nécessaires à l'unet à l'autre:

L'incendie déplorable qui a consumé au moyen âge toute l'histoireprimitive de Venise n'a respecté aucune des relations .envoyéespar les ' bailes.de C'onslantinople, au xn siècle. Mais nous avonstrouvé une commission donnée par le doge Enric'o Dandolo (11 198) 1

aux ambassadeurs qu'il envoyait dans la capitale de l'empire.Nous, Henri Dandolo,. par la -grâce de Dieu duc de Venise, de

Dalmatie et de Croatie,Donnons à vous H. Navigaioso et A. Donat', nos ministres, la

commission suivante. .-.Après avoir salué l'empereur, vous lui présenterez nos lettres,

et tirerez le commencement de votre discours des prçmières pa-roles qu'il vous dira, en suivant l'inspiration .de votre sagesse,.Puis-yous en viendrez au. but de votre mission. Sil veut que l'accordsoit juré tel- qu'il a été conclu, soit. Mais, s'il aborcLaitie chapitredu roi de Sicile, qui s'y trouve contenu, s'il disait que le temps fixé

- t.Archjvio dei Prari, com,nissioni,1. Cf. Dandolo, Chron. p. 313-31 9 . . Duxcairn requisilionihus irnperia]ibus assertions, Henricum Navigajoso,- Andrean,Douato, et Benedictum (Jalliono A]exio ,remittit. Et hi non concordes clim. pro-tosevasto Jeanne Monucopulo legato redenut. -

2 Dandolo mentionne t'a troisième ambassadeur, Benott Ç,alliono (,Citron.P. 3,q). Alexis, successeur d'isaac * 'es accueillit froidement. Dandolo constatel'insuccès de leur mission, . -

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estdéjà passé et voulait établir catégoriquement que nous devrionsle secourir contre la Sicile et I'Apulie'; dites que nous-n'avons passongé -à ce point-là et que par suite vous n'avez pas d'instructionsà cet égard cl ne pouvez rien résoudre. S'il consent au traité enfaisant quelque proposition relative à cette-question de Sicile dtd'Apulie, soit; sinon, non. Au cas où il le voudrait k d'autres con'ditions, ayez l'habileté de nus amener ses pIénipotentiairs. S'iléldait quelque objection sur l'article qui regarde l'empereur d'Al-lemagne 2, et voulait le supprimer, vous répondriez que nous vousavons envoyé loyalement, sansarrière-pensée, et que nous n'avonspoint songé à cette difficulté, que' nous ne vous en avonspas ditdavantage et que vous ne pouvez pis faire Autrement qu'on nevous a dit. S'il n'accepte le traité qu'à la condition de supprimercet article, n'y consentez pas, mais efforcez-vous de nous amenerses plénipotentiaires. S'il adopte le traité dans sa teneur, jurez ennotre nom, vous et lés autres envoyés présents; à leur défaut,jurezvous seuls comme il est d'usage de jurer de bonne foi, que nousconclurons l'accord par le moyèn de mandataires autorisés, et quenous I observes ons Cependant, s'il envoie avecvous ses plénipotentiaires, et s'il nous transmet par leur ministère des chrysobullescontenant la sanction de nos droits et relatant les -actes antérieursquireùfermeht nos autres priviléges;s'il vous donne, ou si ses envoyés nous apportent Aoo livres d'hypèrperi 3 qu'il nous doit pourdeux années; si même, ne voulant pas payer toute la somme, il,donne ou envoie au moins 200 livrés, concluez Si même il -refu-sait de donner cette dernière somme, mais accordait les chryso-iuIl'es - qui doivent' sanctionner - nos 'droitè, acceptez encore et nelaissez pa les choses en' sispen.

Henri vi; empereur d'Allemagne. était devenu roi des Deux-Siciles (5 189)For le fait de son mariage avec Constancé, fille de Roger Il. Son -frère, Philippede Souabe, avait épousé la seconde fille d'Isaac l'Ange, que l'empereur régnant,Alexis l'Ange, avait dépossédé et fait aveugler. - Les traités antérieurs obli-geaient les Vénitiens à servir icùipire grec én cas d'attaque du roi des Deux.Siciles. (Voy. la fin du clap. VI.) --

Voy. la note précédente.tnprpov, h2'perperwn déMgnait une monnaie d'or:, ainsi appelée; parce

que le métal avait été lotigtemps passé ais feu (op). D'après Gunthcr (Hist.hier, C. viii) elle valait-le quart due marc, c'est-à-dire la huitième partie ,l'unelivre. La dette dont il est ici question avait été reconnue par un des clsrysobul!csd'isaac; mais ce prince n'en avait acquitté qu'une parue. (Vy. la flndi, ebap.vu.)

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126 -« En outre, voici une autre recommandation. Si Paffaire des

Pisans paraît rendre quelque dépense nécessaire, prenez l'avis deshommes sages qui seront à Constantinople et auront juré deporter à cet égard un jugement sincère et loyal; versez sur- le pro-duit nouveau et ancien des douanes la. somme que vous-jugerezconvenable de concert avec eux. S'il est question d'un arrangemententre les Pisans et nous, réunissez les cApitaines de la flotte quisont eucore,à notre service,.prenez leur avis et celui des notablesqui auront prêté serinent en nombre suffisant, et vous aurez

pouvdir de statuer avec leur concours sur ce qui vous paraîtra

utile et opportun. Mais si les capitaines étaient déjà partis, et qu'onvtnt néanmoins à parier de la paix, décidez avecle seul concoursdes notables qui auront prêté serment1.

Nos, H. Dandolus Dei gratin Venetin, Dalmatin nique Croatiai du;, -com-nuttim.,s vobis Il. Navigiiosù et A. Donato leatis nostris , ni, facto salu(atione. do'minoimperatori ét-nost,'is litteris presentatis, iictoque serinnois vestai iso,'dio deintsoitu ejus .sicut vobis providentia vestra suaserit, coin s'e.neritis ail legatiomradicem , si ipso voluerit quod sicuphonia icut farta fuit jurari debeat, Bat. Sivero de capitulo regis Sicilin qood continetur in en rdrbum moverc{ et diceretquôd tempus illud jam lraniiit et vellet porcré noininaum quiod cohtra Siciliamet Apuliam deberemus eum juvare, (licite quod nos supei'-verbo illo non cogita-vimus et nihul mdc vohis dedunus in commission; onde non possetis in re aliuidfacere; soit si volt eam proposito verbo Hie de, facto Siciiin-. et Àpu,lin, fia-Aliteraniera, non. Et sive aliter 05m vcliet, sapieuter curetis . trai,ere nuntios suos adnos. Si aute,n (le capitula icuperatoris Alamaniai faceret intentinnem , et vélici en-pitulum illud sobtrahere, dicetis quod pure vos inisim,s et sine fraude, nec po-suimos inentem ad ,sta , nec iode vobis nliquid dixinius. Qunre bon Miter possetisfacere nisi sicut dicit,,r,-et sive ennui aliter voila nisi capitulo iII0 ext,'acto non fa-ciatis, soit curais trahere ad nos missos .suos. Si. vero consenserit et oiuerit00m aient est dictum jurate vos ,verbo nostro, et nuntii ai ii si ibi erunt,et sinonvos soli qtiod nos siniphoniam ipsanl per hoinine (meritos) facienius, sicut solejurari bons fide, et observabirnus ilIa,n, Si tarnen ipso misent vobiscum rn,ntiossuos, et misera nobis per cos chrysohula sua ad hue quoi] -en debeatws haherecontinentia en (jUS) alia continent quai linhemus, et dederit vobis vol misent pa-rier per nuntios iiios 5005 qsadningeiaas libras yperperorum , qui nohis dan de-bout pro annis.(uoi)us, et si nolbet ni ttere nul dors quadringentas., si salteni du -renias ulederit vol misent, facitis. Quod si 'nec etiam ipsas d,sce,,tas tiare veliet necn-sittcre, si nohis ehrysol),ibn misent ad hoc quod eadeheamus balsere, nec reins.une proptçr hoc. . .

Preterea'committioius vobis utsi pro facto Fisâiuorsjni appamonit necessaniumaIiquod exponsnre çum consilio prudeulum '-irorum qui craint in Constantine-poli, qni.sacrameusto districti sint super facto illofldcliter et sine-fraude tractart,expeudite de intrbitu -dati s'etenis nique novi qtïod apparuerit vobi, et- iBis, et siverh,,n, fiel et de concordm facienda mien nôs et ipsos stantib,,s capilaneis stoli (sic)

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Ce remarquable document présente déjà tous les caractères qûine cessèrent de distinguer la diplomatie vénitieulie netteté, jii-é-cision,-sentiment juste dé ses proprçs forces, connaissance profondedes hommes et des choses prévoyance de toutes les éventualités,pénétration de l'avenir. L'abondance des reconntandations attestel'activité d'espï-it -du gouvernement qui les diclait et l'attentionmerveilleuse qu'il prêtait non-seulement aux événements, maisaux circonstances probables, aux hypothèses. L'ambassadeur, dd-eue instrument du doge, obéissait à l'impulsion partie du centre, etson action, contenue dans de précises limites n'étaitjamais exposéeà se produire au hasard ou à contre-teMps. La république se défiaitde ses représenlants presque à l'égal de ses alliés, et Venise, parl'effort (le sa vigilance et de sa politique, était à Constantinopleinvisible et présente.

A côté des consuls et des ambassadeurs, les évêques véhiliensjottsieutenRoinanie un rôle considérable. Si les conzrnissions 1 fai-saient des uns les agents -fidèles de la république, une dépendancerigoureuse rattachait les autres à la hiérarchie de la métropole.

Le patriarche de Crado avait reçu air du 1t siècle léspouvoirs les plusétendusdu pape Adrien IV'. Envertu d'une bulle

aclhuc in servitio rosira, cure comme çonsilio et- aliorum prudentum virornmMeut apjiarucrit ' obis 'u quantitate -numeri qui districti sint, sacraSento superfacto illo-potestatem hobeatis faciendum cran ois quod visunifuerit vobis et illis.Si vero eapatasiei ipsi-jamrecessissent et vorhMm,fieret de facienda eoncordia, vossiciithonum vobis videbitur et il]is quos districts habueritis ad consilium , tacite, s

Les Pisans avaient déclaré la gouré aux Vénitiens quelque temps auparaanL.La flotte vénitienne dont il est ici question est probablement celle qui étaitmouillée à Abydos en 1196. A cette 4poque, elle était restée dansces paragesmalgré le gouvernement vénitien, a,1 de protéger la colonie de Constantinople(Je acte, publié par Tafel, Pontes, t. XII, p; 2-i 6., nous en donne le dénombre-ment. - - -' - - -

L'importance de ces documents ne fit que Kaccroitre avec -le temps. Auxxiv' et xv siècles • les relations des bailes vénitiens en permanence à Constan-tinople constituent la plus authentique histoire des derniers jours de l'empiregrec. ---- -

• Voici le texte du document que nous croyons inéditsAdriansis cpiscopmis, sensu servorum Dei, veéerabili fratri Henrico Gradensi

patriarchne, salutem etapostolicam benedictionem. --o luter munis cmli aidera qum ad decorem mundi et risiis hoininum in principio

sapientia div'na formant, solem voluit claritate luminis pruminere, cujus acteset diem terris infunderet etnoctis tenebras propulsaret. Conveniens union fueratquod co-prstantisss cete,Çs sideribus haberet,sr, quo spectautius in ipso ferma-

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- 128 -bbtenuc en uS;, il ordonnait les évêques: vénitien s, non-seule-mentà Constantinople, mais dans toutes les villes di l'empire oùla colonie était assez nombreuse pour donner lien à la créationd'un- diocèse. Cette -importante juridiction ne- supprimait, pas èftprincipe.l'autorité souveraine de l'église-de Rome, mais ne lui lais-sait aucune occasion de s'exercer. L'excommunication pontifieaigarantissait les priviléges extraordinaires du patriarche.-

tionis exordio, ut singulari ter presset dici, de superiors nunere conditoris ac-cepit. Si nimirum redemptor .uoster, coin , vel ut micantes stellas indiverse mundi dimaa latins propagasset sacrosasictas, pnrulu beatus PetrusApostolorum princeps extitit gubernator; tanquam spleùdidiis sol, omnibusvoloit superesse et siiigulc(s in ecclesias utpote membra suo capiti statuiC sub-jacere. Quod-ex jUins verij is manifestius declaratur, quilrns eumdcrn Petrum oitdominus alloentus : Sidiligis rue, pasce oves mess; u et alibi: Tu es Petrus: ett super banc petram edi6csbo ecclesiaun nieama Petra super quam legitur essefundata mullai scissures recepit, nulles patitur sectiones. Hoc idem rursus de-mdnttatur coin dicitur ' QuodcuMque ligaveuissiipei' terrain cri ligatura et ini coelis : et- qoodeumque' solveris super lerram-erit solutum et in coelis, ' Ipsequoique et sufficientiam. proprite et confirmationem suscepit fsdei alientu, quando -n magistro mentit audire: « Ego pro te rogavi, Petre , ut non deficat fuies tuaut et tu alipsando conveNus confirma fratres tuos.0 Jais nuque et allis rationibussaûcta et- apostolica eecicsia quo coelesti privilegio inter crimes bbtinet priuci-patum tajitam ah ipso capitc domino Jesu Christo proerogativam accepit ut erre-oritatern -babeat singularem Ùniversis per orbem terrarum ecclesiià providere, et

disereta in ois consideratrone stal.ùere qtitu cognoverit suttuenda.Nobis igitur, qui, licet insufficientibus mentis , vices a'postolorum pnincipis in

sanetn'ecclesia suscepimus exequendas, proviclendum imminetattentiuset agen-dum ut secundum uhiuscujusque dignitatem et stetutum' -ecclesin honor cidebitus impendatur et cern saline populi fratnibus nostiis provida sollicitudinedeferatur. -

Hac si quidem consideratione, venerabilis in Christo frater, Hennice pat'iareha,inducti justis pottulationihus tais gratum impartimuir a'ssensum et tom devo-tioni tutu uam,1sonori etuutilirati Gradensis eccle5ire cui Deo auctore proesse dig-nosceris defl'erre veloutes, tihi et successonibus tuis, auctoritate apostolica diuxi-mus concedendum, in in Consiantinopolitona uurbe; 'et in obis itidern tivilntibrus inConstan6nopolîuano dentures irnjierio consciouris, ira 9 uribuzs Vcncfi complures hdbentecclesias obi videlicet ipsorurn rnu)tisudo consuevit assidue conveuire, liceal vobis cpi-scopum ordina,e. es abaque al icujus contradictions nones ci corisccrationis iuupendert;

« Ut igitur bac nostra concessio perpetuis temponibos inviolabiliter bbservetis,bain pnasidio roborainus et prœsentis sci'ipti patrocinio Coin-munirons, statueutes ut nulli ornaino hominem liceat banc p&nttm nostrue club-cessionis et conflrmatibnis in{'ningerc, taira- apostolicn serils auctoritate. Quo-cubquc autem ecc]esiastiia seculanise persona scions contra flan ' temere ve-aire tentavenit; secundà tertiove eommouita :uixi rcatnm souri congru cash-gationb correxenit potestahis Iiononisquiè sui digruitate canent, renmqtfe se'diviho

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- :129 -

Alexandre 111, successeur d'Adrien IV I l ' confirma l'acte de souprédécesseur (ii5-i 181). Cette seconde bulle, plus explicite quela première, interdisait à tout évêque toute immixtion et toutefonction religieuse dans l'intérieur des églises qui - dépendaient du

judicio de perpetrata iniquitate cognoscat, eta sacratissifflo corpore-ac sanguineDei et Domini redemptoris nostri Jesu Christi aliena fiai. nique in extremé exa-mine destrictal ultioni subjaceat. Cunetis autem servantihus, bec sit pax Domininostri Jesu Christi, quaternes et bic tructuin bom acionis percipiatit et apiiddistrictum judicem pràmiâ mternm paris inveniaut.

sEgo Adrianùs eatholicm ecclesim episeopus. Amen.

-t-. . Signavi.

Libro dei l'asti, IV. p. 19:.,.)

t l'rivilegium papale pro honorificentiis patriarche Cmdensi.c Cetcruin tutu devotioni tom quam bonori et utilitati Gradetisis ecdesim b coi

auctore domino prmesse dignosceris defferre veloutes, ionn-rnemoriiu Adrianipapale, predecessoris nostri . vnstigiis-ioherentes, tibi et toi5 snceessoribtisaucto,-j-taLe aposthca duximus concedendum ut in Constanrinopofiiana nrbc et allis isiden,civitacibus in Constantinopofltono ins )nerio dunràxac const itutis , in quitus Veneti pluieshabent ecclesias ubi s ' idcti cet coran rnultju4o-consucuit assidue convenire, litent voiLeepLecopurn ordinere et absque alicujas contradiclione ,nbn,is.ei coasecrationjs itflpetidere. . ..

«Statuâmes etiam ut quecumque bona quascumque posscssiones eadem-Cra-denis ecclesia in presentiajuste et canonice possiclet , aut in lulurum justis naodisDeo propitio poterit adipisci, tirant tibi toisque successoribus et illibata perma-neant. Perm ecclesias a religiàsis vins canonice ijsi ceclesim Gradensis chialasper episcopatus tuas institutas, tibi tuisque sueceisoribus lihere confirmamus, iLaut nulli episcopo nbsque tuo .assensu in ois liceat _consecrationes celebrare, antsacerdotibus in eisdem dominio servientibus, don ce in locis ipiis fueris, divinaéfficia prohibes-è. (De) cetertim ergo, utnulli omnino hominum liceat rmfauimecclesiam temere perturbare aut ejus possessiones auferre vol ablatas relisiere,minuere sen quibuslihet vexationibus fatigare, sed omnia integra eonservehtur.eonim pro quorum gubernatione 8C snsteilatione concessa.sunt usibus omni-modis profutura. Salva sedis apostolice auctoritate.

e Si qua igitur in futurum ecclesiastica secularisveperson.a liane nostram consti-tuIonis sciens contra eam temere vendre tentaverit secundà tertiove cosomonita.ii'tsi reatum suum.digna satisfactione corrcxerit,-potestatis honorisque sui digni-tate careat manique se divino judieio existere de perpetrata iniquitate cognoscat eta sacratissimo corpore ac saisguine Dci, et domini redemptoris nostri Juin Christiatiena fiai, atque in extresiso examine divine ultioii subjaceat. Cubetis autemcodem locâ majora servantihus ait pax domini nostri Jesu .Christi Quatenus utbi Gu&ùm bouse actionis percipiant et apud districtiim :Jt,dice,n è ratrnia miernatpaeis inveniant. Amen.

s Ego Alexander catholiem eeclesie episcopus.

(Libo. dei -Pavti.,IY,so,)

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- 130 -patriarche. :Elle. asMiPaità celle-ci là libre •ct-franche joûissancè deleurs biens. -

Sous lajuridictonunique du patriarcheJleGradG,dès églisesvén itiennes : deJiornanie;assimiléesà:clles des !agtinès; épôuv&rent les bienfaits d'une protection constante et bravèrent les périlsde l'élbignenientEn même temps les concessions de -terres qu'elléobtinrent dcs Grets inuitiplièient leurs rapports avec ce peuple etdé{eloppèrent leulir richessi Ainsi, les - églises de Remanie étaientreliées à Venise parla hiérarchie; les églises de-Venise rapprochéesde la Romanie par les intérêtst

Les concessions de ce genre sont assez nombreuses, et conservéespour la plupart dans les archives du patriarcat ou du monastèrede Saint-Georges: -• En%i 136 Michel, -archevêque de Lernnos,.cèkc -au. -monastèrede Saint-Georges-Majeur l'oratoire de-Saùit-Blaise et les dépen-dances, a condition que les moines vénitiens haussent une égliseen! lionneui du saint, et pa eni comme redei ance un tribut d'huile-i larchetuque'

En:t iii 5 ,Pietro Polani avait conféré cèrtains priviléges àl'égliseque le monastère de Saint -Georges -Majeur possédait à Rodisto2.Les Vénitiens itab1is clans cette ville refuseient de payer les taxesp'erçues m nom du prieur. Les amhassadeui s Domeinco Morosini,A.Zeno et autres, furent cha?gés de résoudre . le litige En 1.14citèrent devant -eu, à Constantinople le prieur et -les principauxhégociaits rénitiens de Rodisto L'ab hé alléguait la violation de laharte ducale Les laiques se récriaient contre les abus Les ain'isadeurs purent un

'

arrêté qui obligeait l'église a avoir .des mesures:égulières, et fixait la.somme que les Vénitiens devàient lui payerà chaque vente,-d'après l'estimation du voine vendu. Les droitsétaient doubles pour les Grecs. Toute infraction étaitpuhièd'dnimendL 1nablt îà la tout du doge

En j ,150, Étienne Capcllô déclare avoir reçu du prieur de$àint-

Ai cimes du rnnastèie do Sunt Ceorges M'i j eur -.FI. Cornelins Eccksiwl'encia antt(luis iiionu,neiiLIs fluai citant primum cdtru tllusocam cc in rkauks dutribixue, Venetus Pasqitali 174 9, t XI, 1-l', Xl p post p 259--

flodisto Rndpsto itodosto (Jl/iœdettos Bisantlia Téliu Dagli) sur la mai' (leMinarara, presque à égale distance des Dardanelles et clii L3osclioie,jlp Gal!iioliet de Constantinople.

Qubus iii igantihus mantuji àmbarum partitiin tulimus üt qincqiiidsuper,hoc concorditer dicere vdinus , niraqiic pars ôbedieos foret mciii (nretreta vas

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- 131 -

Mart-à ...Venise une cértaine somme d'argent. lf.luidonne en' paye-ment des-terres situées à:,VoIoen Thcssabe. Le texte de 1'a6te ac-cuse un.intérM exétbitant.;Peu 'après..Capello -vend au prieur.d'autres terres àConstantinople même 1

En1156,NataJis Betani donne àFéglise.et au prieur de SaintLGeorges.Majeur.un édifice qu'il avait fait construire à,Volo2.+.:En '15,7, Ugo, abbé de Sainte-.Marie d'Andrinople, cède aumêtnenionastère l'église de Sainte-Marie à Rodisto, située dans larue 'des Francs, hors les 'murs dé la ville I l 1 .-

En i83, Domeoico .,Jubianoprornet à Enrico D'andolo; pa-triarch&de Grado,-une-. redevance annuelle pour une terre situéeàConstaritinople 4..,.'. r;. 4 ,'.,,.•. ...' .,.

Ah suite des colonies commerçantes I'(cglise:vénitiennè faisait -enRornanie de,lentes.et silencieuses .èonquôtes. Dans la capitàle,dans les provinces, dans les 11es, elle fondait des évéché, des 'inonastères,,.lriomphait' de la'.haine que l'église grecqué nourrissaitcontre elle, et grandissdit sous les yeux d'une implacable rivale.

Commerce, politique religion, tout contribuait doué à favo-

Çit ad menurarn eontiifdos'centiirn etviginti libias aqua vel vini) quibus et r1-•bos ettaterasihi supra scriiita ecdcsahahat, sièill. in eonccssi6nis carte domininostri ducis coutinetur.

.:Ad trne statu entes statuimus, ut Veneticus pro uno-quoque rniliario (n'einpepondue mille libranim) suprascriplo priori, et qui per successiones ibidemfuerint duos stamines (pana moneta enea ) porsolvat et Grœcos quattuor tomdé statera'quam et de ruboetniiliare dci; si vero necessé'fuerii; habdat Ve-neticus medium mdtrum et- ruhuin' apud seet'-cCffi ipsà 'vendat -usqué cdquinquaginta- libres vendue .vôluerit, toilat metrum de prdieta ecelesia et proinoqtloqlle rnotpo .perso]vat ci unum tetarearo (floliflaje de cuivre, quatrièmepartie du dcnier. , tctaprnpdv), et si peusavent . per minutom ultra quinquagiistalibras, dotent de eeelesia suprasdripta toller&ruhum, et daré sicut per radio-acm advenerit, stamines duos per jiiliWre ébsque ornai eo&entiône. » (Tare],t. XII, p-, 108.)-.... ......,r- L'acte est- signé des-ambassadeurs de Venise Dominicos Maurocenus, An-

dreas Geno, flainefius L'utius, Marcus Maurocenus, Otto Contareniis, StephanusPaiIaleo,» eniegiitré par un notaire d'aprèi leur ordre, et daté de Constanti-n'opte ?septenibre 11-47-

1 Archives du monastère de Saint-Georges-Majeur à Venise. - FI. Cornelius,&desiw Vencter, du. XI, p. post. p . 223 sq.

hi, ibicL p . .27. Vole (Paqa.scs. Alrninrt) au fond du golfe circulaire (Page-sdtique) qui porte aujourd 'hui son nom. .

Id. ibid. p:228-339........_.Archives dii patriarcal à. Venise - FI. Cornelius,' ouvrage çiIé, dec 1V,

p.8 ' . 11-.

g

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- 132 -viser la présence des Vénitiens 'en Romanie et à pi ,otéger leuiintértsdahs te vaste 'eiupireRls occupaient un quartier 'da'ns lacapitale', une rue dans les principalesvilles lis formaient une Po-pulation nombreuse, fortement établie le pays par ' sa ri-chésse, par ses hautes alliances, par kw intérêts, énorme par lesaffections pi'ivées; rattachée à la mère pairie parles liens du .cot-merce', pi' la jouissance chine législation nationale par l'autorité(le ses consuls et de ses ambassadeurs; par là juridiction suprêmedu chef de son église; assez hellénisée pour faire une rapide fortuneen GPèée', trop vénitienne pour jamais oublier Veuise• Si de Constantinople nous revenons au milieu- des lagunes;un spectacle non moins curieux frappera nos regards :aprèsles Véniliens' de Ronianie, les Grecs de Veni'se; après la , coloni-sation vénitiénne en 'Grèce la tranforxhation de Venise'par'lesBy-zantins.''

La colonie grecque' de cette ville, si nombreusp encore de nosjours, a une origine très-antienne et qu'il est impossible denéirer. Elle n'a d'bïstoirequ'à partir déla prise de Constantinople(1204); elle doit ses développements et non sa naissance aumalheur même qui frappa la mère. patrie. Mais la présence desGrecs n'etaitrien en comparaison de leur influence. Les Vénitienseux-mémés semblaient presque aussi byzantins que l'es enfants deByzance.

La communauté, d'usages et de costume chezles deux peuplesétoni\ait les Occidentaux, qui ne les distinguaient pas toujours lesuns des autres. Les Vénitiens étaient pris pour des Grecs, et enportaient le nom dans une foule de traités et de doctiments. Il y aun acte ou les Istriens se félicitent davoir, secoue la dominationdes Grecs et se donnent au patriarche d'Aquilée. La suite des faitset (lu texte montre qu'il s'agit des Vénitiens, qui avaient effectivement succédé aux empereurs dans ces régions, eÉ que les habitantsconfondaient avec leurs prédécesseurs dans une commune avèrEsion. Les assimilations de ce genre se reproduisent fréquemmentdu vire au xi? siècle2.

M. Veliado, soàs'directeur de In bibliothèque Saint-Mire à Venise, etVéni-tien d'origine grecque, n écrit avec Leauàrnip de science l'histoire de cette colo-nie, à partir de 1204. ( Vrnezia e te suc laqzù,e, Ve,iezia'in.A, .1 8h6.)

.' 'Jdcopd Filiasi, 11femoric storicj,i! dei Veçieti èrilni e sccondi, Ptidova', -18 112,

in-8', t. VI, P. 32.

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- 133 -Ii méprise, dans le costume même, était facile. Les Vénitiens

s'habillaient à la grecque. Les nobles portaient m manteau agrafépar des bossettes d'or, et un bonnet sur le, devant duquel deuxrubans se coupaient cri forme decroix; les dames de haut rang,une-robe. de .soie descendant jusqu'à 'tSte,décolletée, mais fer-mée à partir., du cou, bien adaptée âu corps, ornée de broderies;aii,dessus de la robe, un large manteau d'or et quelquepeu traînant en forme de queue. Elles se coiffaient, comme leshommes, d'un bonnet, avec bordure' d'or, quilaissait tomber unecheveluit riche et bouclée'. .

L'habillement du doge, que nous avons déjà fait connaUre 2,

était emprunté eu grande partie aux' exarques, aux consuls etmême aux empereurs. ,On priait pour lui, selon la formulegrecque. Une partie du choeur chantait Exauce-nous, 6 Christ,exauce-nous; 6 Christ, ràyne;,6.Chrzsi, triomphe; ô Christ, conintandeEt 'l'autre répondait Au- Sérénissime et Excellentissirne prince etseigneur, par la gréa de Dieu, illustre duc de Venise, salut, 'honneur,vie et victoire perpétuelle. De même, dans les funérailles du magis-trat suprême de' la 'république, on observait un usage imité

es Grecs et 'des Lombards, mais surtout des Grecs. Le doge dé-funt était exposé 'sui-'. un lit de parade, entouré d'une multitudede torches et de cierges allumés; il était veillé par des personnagesde 'distinction, et l'on 'voyait renversés à ses pieds les éperons,l'écu et les autres insignes de la chevalerie militaire8.

- L'adoption du cérémonial byzantin était d'autant plus naturelleque les doges figuraient presque tous parmi les dignitaires de lacour d'Orient. Nous avons indiqué dans l'ordre chronologique lesdifférents titres qu'ils reçurent 'des enipéreurs et expliqué leurssollicitations par un singulier mélange de. vanité et de politiqué.Mais l'une et l'autre eurent-elles raison d'être satisfaites? A quelrang ces faveurs successives plaçaient-elles les chefs du peuplevénitien dans èette hiérarchie que les successeurs de Constantinappelaient divine, et où l'histoire impartiale voit une preuve nou-velle de l'orgueil etdê , la servilité hurnaineP.

'Les doges portèrent les titres suivants , : ikratos, 'wprroo-7r&9d-pas, 'wpc4nocœo1os, .pixso, tpôapos, tpcsrro?rp6eSpos. Les

MutincU j , Del costume Vestcsiu,,o , L I, p. 67.Voy.p. ii.'flon,nnn, I. J, p. 102.

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- 134 -patHàràh'es obtinitit celui de -iJ1!lpT:Lo. À -rtil' duxùe sièdie,le -titre de 'pwrooidOaptog et 'celui de e7repTigoe de'vinrnt- desattributions permanentes du pouvoir ducal et du pktriarcat';

Trrœros est le nom grec des consuls. La république romaine ne- connaissait rien de sup&rie'urà cette :rnagistrature. Les empereurs

n'osèrent jas la supprimer; ils l'abaissèrent cula dolihant à des-candidats indignes- ou en'la prenant pou-r eux-mêine g. Justinienl' abolit. Mais ie fitié survécut à la fonction. On le conf&a d'abord;

• avec quclqù&mdsure,'à desbommeà importants; mais: quelquesiecles plus tard, on n'en faisait plus k moindre cas, et la grau-dciii' passée du consulat ne servait qu'a rendre pins visible sondéplorable avilissement-

Le pàtriciat- avait été institué pr Constantin. Un patriceéthitcensé le père de la chou publique, de l'ernpereur-lui-nidinc -:HarpI--,tsos, olwVel wc1i4p , Toe xotvoL- Paitticii, ut-qui pttes Irnperatorishaberentur et coipeliarentiir. Les roisbarbares et Charlèmagne lui - même 'recherchèrent cettedignité, que l'on devàitprodiguer comme les autres.• La qualiflcal.ion de' vénérable, auyuse-'(&é&o-1o5), réservée auxsouverains, seprit d'abord dans son-véritable sens; elle le-consetvèmême au xii e siècle -chins un traité de Bohémond -et d'AlexisCbm-nène. Mais,-à partir de ce prince, le titre de céŒdlo sra:teIle.ment répandu-parmi les grands.péronnages- qu?il faudra-le-'ek-ver par des superlatifs. HwrocéG4os est asurénient- l'un ' dès

- plus modestes, cai' il i-i'cst que le -preinierdegré d'une échelle quis'élèvera plus tard -jusqu'au tau*EJTO76ŒOlOfltdt&TOEi Dé-lire de lavanité- et de la gi'aiirnairl-

Lés - spaihaires (ciraôdptoi), -sorte d'écuyers -poitani -un loiglaive r avaicnt'aidessus d'euxles premiers des spatha?nls (âpos+o-

irOdp/ov;)- qui occupdient le dernier rangparmi les illdss. ]-idignité dctp64o frifinstituée par Niééphore Phoca k3f'doiiiéeauxgouverneups et juges des provinces Jiés preniiérs de p6èSpdi(piToltp6elpoi) forinient une néilvelle' classe, -supérieure' à, lapremière. Avant Nicéphore -cOE1nt désignàit-surtott les é<équd-:rp6êS01 -rt àviX,o&v.-Enfin le, titré cld-&éprsttàs (Irèsrhn6fa6le)

- -etconfér6n -général ûx'archevêque nitrôpolitaius 2;' ». -

Voy ch.,, p. 64.- --'---.,-, -H., --2 Voy. Ha Cange. G(osiariicrn ad scripiores atc(iiœ et iriJima grtrcilaris Lugduni

' $88, 2 vol. in - fol. --

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- 135 -;f'On yoit que cékdilîérbntes distinctions perdirent- beaucoup deleur vsIeur avec le temps. Les doges les portèrent pendantpl&sieurs iècles en y attachant- le même honneur, et furent quel-quefois dupes clé leur vanité-et .de leur ambitions La chaise doréesur laquelle ils prenaient place annonçait auxVénitiens•un consul-,la longue épée un protospathaire de Byzance. Ces insignes impo-.saientau peuple pendant le xiiê siècIe; malgré la création continuede dignités nouvelles, les pis anciennes conservaient un teste deleur éclât, cula hiérarchie byzantine n'était pas encore la fouleinnombrable dont Codions n'énuméra [pus les rangs qu'à la con-dition d'éèrire un volume'..- Plu d'une coutume domestiquetrappelait aussi l'Orient sur lesrives de l'Adriatique: Les femmes; revêtues du costume byzantin,étaient traitées à l'orientale et ne connaissaient guère la libertéque le christianisme avait appor-tée.à lent--sexe dans les différentspays catholiques. llenfermée- sévèrement dans la maison ,OÙ lesretenait la jalouse surveillance - du père ou de l'époux,elles nesortaient qu'à de rares intervalles-, et couvertes d'un voile qui' de-vait dérober leurs traits aux regards de. tous'. Les Vénitiens dumoyen âge avaient appris à Constabtinople cette maxime quevoir, c'est avoir, et devançaient dans leurs précautions tyranniquesla naïve et brutale jalousie des Turcs.

Une institution qui a toujours été florissante en Orient autemps des Grecs, comme au temps de leurs vainqueurs, .sous laloi du Christ et sous la loi de Mahomet, consacrait la servitudedes femmes. Venise depuis longtemps n'enviait plus les eunuquesde Byzance elle: en avait d'indigènes. Cette' coutume-avait ététransportée par. les Grecs en Occident, où elle obtint quelque -.favéur. La loi. saliqué inflige une amende de:ioo sous d'or à celuiqui mutilera un homme libre. Dans un traité conclu entre l'empereur Lothaire et la république on lit « Quiconque à Favenir,suivaot l'usage-illicite qui est en vigueur, osera faire eunuque unVénitien, sera-condamné à payer une grosse amende ou à subirle même sort., La princesse grecque dontDamien flétritla mol-lesse est servie à table -par des eunuques 3. Des lois postérieures

Au xve siècle. - -' Filiasi, ouvrage cité, '. 68.

« 80(1 ah eirrtucl,is ejes alimenta q\ ' avj ne tuiontius con Cid ebanturT in trusta.(Voy. cli:,v, p. 357, ct. App. ri" III, j). 143.) .r

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- 136 -attestent 'la iiermanence dii- mai qu'élles-s'efforcèrent de com:hzi-ttrè..L.-•- ', ..' -.

L'uage des. noms -de famille-, que les Vénitiens furént les premiers h porter en Italie, était également emprunté aux --Grecs. Lesmonnaies byzantines circulaient chez eux comme ceilesde:la ré-publique. Non contents de donner cours aux besants de cuivre ed'or -qu'ils recévaient des Grecs dans- leuus fréquents échanges, ilseh frappèrent ehx-mêmes dans leur ville, -et l'effigie des empereursd'Orient-supplantait-lem Bonde Saint-Marc jusque la pslèt sallesde la Monnaie vénitienne . . '.

La langue, subissait, tomme tout le-resté, l'influencchyzanline.Lés rapports parfois intimes dq ia langue grecque et du dialectevénitien'sont'plus - diknes -d'attention qu'on ne le croit généra-lêmént.

•Dans cette question philologique nous distinguerons : 1 certains .traits généraux- de ressemblance entre les deux idiomes;-2° des locutions paï'ticuli&es empruntées-au grec $r le dialectevénitien. Les uns sont -eh- quelque sorte des faits - primitifs dus àuhe parenté originelle entre lesdeux races et les deux langues. Lesautres-.proviennènt des relations politiques et commerciales qui sesont établies plus tard et dont nous venons d'exposer l'histoire.

La douteur proverbiale du dialecte vénitien le rapproche-, àpremière vue, de celui- des -dialectes grecs qui se distingue parmitous les autres par le même câractère. li a avec l'ionien une res-semblance évidente, et Ponticus- Virunius- 2, qui florissait au XV0

siècle, en était frappé et l'attribuait aux rappbrls fréquents queles Vénitiens entretenaient avec Smyine. Les deux accentuations -offrent une similitude non moins curieuse. Quiconque a visitél'Italie et la Grèce et a parlé la langue-de l'un- et Lautre pays aété frappé de la diffétence qui règne- entre deux -idiomes presqueégalement hai'monieux-. L'italien, tout en- accentuant' différentes

rllâhes , a cependant -une- préférence - bien marquée pour:- la pé-millième; et une sorte-de répugnance pour la dernière. A part

ertains -classes -de- substantifs tciuà , civiltà, caffè, virtà, etcy) etquelques tem-p&des verbes (farè, dit-è, etc.), la prononciation itabenne passe rapidement sur la dernière syllabe; et, si elle appuie

Fiijasi, P . 55.'---- ---:* Go,nme,uarii alla- grai;u,uaeica gi-cca -dcl Gutv-ino, P. 47 et 97

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- 137 --assez fréqtieinment sur l!antépénultième (rnacliina,Africa, etc.), lagrande majorité des mots sont accentués sur l'avant-dernière. Delà cet éclat, cette soh6rité, mais aussi une certaine monotonie,une modulation moins parfaite que dans le grec. Cette langueoffre, en effet, un système d'accentuation beaucoiip7plus varié, etpar suite beaucoupplus difficile à saisir pour les étrangers. Les.mots s'accentuent àla dernièrcçà la pénultième, à I'antépéntzl-tième dans une proportion presque égale. -beaucoup se terminentpar des consonnes contrairement à l'usage de l'italien. Cette dif-férence, . -nettement marquée, entre Je -grec et l'italien, s'effaceentre la première de ces langues et le dialecte vénitien, qui.sup-prime la voyelle finale dans un grand nombre de substantifs, etmultiplie le nombre des mots se terminant par une consonne ets'accentuant sur la dernière syllabe -mar pour -mare,. par.ort pourpadrone, etc. Il en résulte qu'il perd le trait caractéristique de laprononciation italienne, et se rapproche beaucoup de la physio-nomie de la langue grecque. Il a comme celle-ci moins de .soho-s-ité,.deretentissernent et de majesté que la langue italienne,mais il a une marche plus.vive, une allure plus dégagée . , un. tourplus rapide...-'.-..

A côté de ces, ressemblances générales., on remarque dans levocabulaire des emprunts particuliers qui sont encore -plus cu-rieux. S'il est un mot que l'on entende fréquemment à Venise,c'est le mot niagari'. On l'emploie comme formule de souhait,dans tous les sens d'atinarn. Magari sia vero, plaise k Dieu que cesoit vrai! Cette expression a un antre sens. Elle exprime la pos-sibilité d'une chose et signifie peut-être, à l'occasion. lit flo pa-lazzo ghe podana star magari an principe, dans ce palais un princeau besoin pourrait loger. Magari indique encore l'affirmation etune sorte de serment: ma foi par ma foi. Te guitaro anca mi.magakL:Je t'aiderai, moi aussi, par ma foi. Ce terme, qu'on neretrouve ni en Toscane, ni dans aucune autre partie 4e l'Italie,est tout 'n fait grec d'origine (pŒxa'ptos)..On petit dire,que -ç'est àVenise.undes mots les plus importants de la langue, car les. Né-nitiens l'emploient à bût moment, et -létranger est presque fa-tigué. de l'entendre.

V. G. B0eri6\ .Diziena,-io de? dlerto Venczi,ino, ,'tcjii. venézia-j j861,C. Cecehini, irt-A. - . .-.

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- 138si :Ofttertain'nonjbre dettetxiies:èt de locutiônsr:proviernentdein4mé origine: Ex. piton: fourchette 4 d'où' dérii'edt pir4nada,pfrositv; et l'expression véhihsa la caniadel piron; arriver au nio,ment bpportun ;et qui e&t Ie. même mot qu'e les G'ecè modernesemploient, bnpofn; cogôli (xÀXaE) ,«rosses pierres employées dansia.onstrucion'des routes;èt aussi 'dans les-batailles nvalespouçfairé couler les vaisseaux ennemis.,i. ...... .

Mis on qui est asuréet1e plus -remaruable;ceont-delicutiôns grecques ti'anspciriées tout entières dans le.dialecte vénitiei,avec uhe certaine confusion dans l'ordre des mots et quel-ques ; changeiiients- de tterminaison destinés à leur donner unehyèiononiie italiehn'e..L'inipréctiou greequexardpavpoD w&'

•devint vénitienne en changeant de terminaison, 6t, dans des tuantspopulaires quel !ontentend ênéoreaujoùrd'hui on-retrouve desV'ers' grecs' entiers dbni iâteiniijiaiso èL à peinealtéréeet quisi6niMepetdus daù.Ja suite de vers italiené. '. e 'f-- Les hnalbgies que nous wenoui de signaler ont •deui calisepr :ntipafes fJa : arénté .primftive eiflrè les deux'langnes et kgï'aôrts. 'fréqnts des deux 'peuples ati:ioren âge 'La langueque parlaient les anciens Vénètes, originaires de la Paphlagoni'c;était un idiome dérivé.dugiec, et rtrèsrappraché du 'dialectc'pa-phlag'onien.Modiflée lania conquête rdrnaine,:elle parait cepen:daxit a'o{r tonservé éettains :de ses caractères indigènes. ;liéun"enp&h& qu'ele dialecte -vénitien ,'pàrvehu . à sa formation;.â'itprésenté dccc. l&ge& (Tes ressânibIdices généiales etque- intnieeïiahis rnpts' aient eu,; dans les doux lauigues; uneorigine côni

uh\ne. Md lénerinessp4ciahx ou les locutions toutes faites n'ont'pïétue qud des emprunts postériuis, qui datent du ino'en&géet tle'fféqi.ehtsvoyages des Vénitien sur Je Bd'shoi'e,&'

L'iirduslrie vén{tiehi)e devait sw naissance :àJ'Orient, resté grecnu deu Miistilman.L'art de fabriquerle verre'et lééristél; unedesgiirts dè.h répûblique,tun t des . restes de'sa'grandeur,futeiupiunté'ani3as-Ernpirè.. Pendant Ie rnoyèn'âge, on oit ]Ès Grécsdùne mxxsoifvcrainshctidentwtïtdes'tasses et autres vertdrieEn 68bcaueouj;d'artisd•ns grecs habile dâns c'e 'genre dindus-trie passèrent dans le royaume (les Francs. D'autres sansul doutes'établirent à Venise. Le moine Théophile (xlt siècle) traite duprocédé.à suivre,pour donner au yerre blanc l'apparence du cristalet vante l'habileté des Grecs dans ce genre tic travail. Auxirsiècle;

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139 -eette-indutric &tait'.fiorissante à Venisé, safis-4ùon pui&e :donnSunedate:précie à sa première apparition .1 .j ,,

.Lenombred'arts ùtilès que les provinces de l'empire :grec hvaist.appris aux Vénitiens est véritahlementprodigient C'est à l'Orientqu'ils durent la fabrication: desglaces, la' coiifection des objètd!optiqu'e;:l'horlogerii, les inaflufactures -de soie, 'la pharm'aciela chimie pratique; la parfumerie, la teinturerie, la confisetie ettant d'autres Au xaIe siècle, Venise était ':pleinb de boiithjuesd'horlogers, de teinturiers, de doreuî's-, de pirfuffieûrs-, de-.pharma-ciens, de marchands de bduleuri;-de lacês.1 Ces- différentes es-

-d'indùstriels formaient 4es"c6rpôrations ou'écotes ayadtleurs .lois,' leurs statuts, leurs rnagistrats particuliers 2• ' ..,:.

k Constantinopleque .Gréoire,prêtr vénitien, s'étaiiinitié àla -fabricationdes orgues. Iïrapportacet art nouvéaudansles laguhçs -au coin'snencenient du'i. xe siècle- 4 et l'exerça ivèc unsuccès qui le fit bientôt connaître à l'étrarger.'Balderik,ducdFriouiY'tonnai ssaii t Ebahileié dé Gtégir'e Finvita.à iacor. -LréiuIatidride Grégoire y devint si graide;ue le duéleconduisità:Aix-la-Cha pelle, et -Te préserta ù 'Louis le Débonnhirc.-L'einpd-reur l'a.6cuèil lit -avec -di stinctioi, le retint à.son.service'ût luid.ohna en»Friince une riche abbaye 5. Alloéca (Syrie); les Vnitiens avaient appris la préparation -de l'àluh- à Foschia (Natolie)icelle du boéa'; à'Darnia, telle des étoffeg darnassés;'à-Côadtafflianopk; Alépç AldxaÙdi:ie,celledel'ivoie4rJYautresnuÙufactifrSÉ,gàlemént-fiorissahtés et célèbres- dans toute .lEûrôpe provetiMèiitaussi de POilent-; c'éfaient cclles'de cinal're :;de savon, d&cir àsublinaate L'art de dorer les peaux- et les cuii"sj que ksWniiié6sconhàissaieht depuis iebrs pretiiirs voyages-, s'était développé hceux an point d'alimenter un grand commerce avec -l'Espagne 4ètleLevant s . Tout l'Occident recherchait avec passion leurs étoffesteintes et léurs damas rouges, dont là perfection n'a jamais étésurpassée. Enfin l'Eubée et la Thessalie leur avaient fourni les ar-

Fitiasi, Saggio suit aulico stato drue arii presso t Eeneziani, p . sAS. Cf. For-maleoni , 2' vol. passim.

Filiasi , ouvrage cité, et Forn,aleoni, passim.F'iliasi, ouvrage cité, p. i5.En 998, k doge Orseoto fit présent à ]'empereur Otton d'une chaise d'ivoire

travaillée avec beaucoup d'art.-£ Cc commerce leur donnait '00,000 ducats par an,

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— .lo -

tisans habiles à mêler la soie avec l'argent ou l'or dan des dessinsaussi corrects qu'élégafits. Cette acquisition était due à l'invasionde la :Grèce au xii' siècle. Les Vénitiens-étaient alors en compagniedes Normands. Pendant que ceux-ci dévastaient les' campagnes etpillaient les habitations, leurs alliés avaient fait main basse. sur lesouvriers grecsl capables d'enrichir leur patrie d'un art précieux ets'étaient embarqués avec c ' butin 'd'un nouveau genre.".Arès cesnombreux emprunts dans le domaine des arts .utiIesque dire de l'art lui-même ?,,Venise étaitt..au xne, siècle, : plusencore qu'elle ne. l'est aujourd'hui, riche. en monuments byzan-tins, et Saint-Marc,qui.s'était-élevé lentement depuis trois siècles,était comme une église de -Justinien transportée au milieu deslagunes. Ses gracieuses coupoles, Vues de la mer; rappelaient, avecmoins de. grandeur, la perspective de Sainte-Sophie. .La richesseorientale brillait dans, les mille colônnes où le marbre; lejaspele porphyre étalaient leurs splendeurs. L'art byantinsernontriitdans la variété et l'éclat de loriiementàtion; ilans l.a.perfèctiondes charmants détails, dans l'mrnobHiLé recueillie et contemplativeds figures, dans la naïve expression des mosaïques religieuses,qui., après avoir fait passer. sous les yeux du néophyte. la, repré-sentation vivante de l'ancienne loi, trânsportent le fidèle au milieudes grands mystères de -lanouvelle. Et .:Saint-Marc n'est à Veniseque la première des.églises byzantines. Torcello et Murano ontencore leurs dômes, quelè voyageur, •mollement couché dans sa,gondole, voit avec i-avissement sortir du sein de la nier.Lesmonu-ments épars au milieu des lagunes lui semblent, cornrni ceux dela ville elle-même,.l'appùrition merveilleuse d'un monde lointain.La fantaisie, la couleur, la-vie, là lumière, tout lui rappêlle l'artenchanteur et le beau ciel-de l'Orient, .. -.

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APPENDICE. H. Ç

• La lettre de 1bassiodore, dont nous citons plusieqrs.-passagesdans le premier chapitre, renferme, sur la construction deVeniseet la vie de ses habitants, des détails qui sont très-dignes dintérêtAussi avons-nous jugé convenable dé la reproduire in extenso.Lecomte Daru en a donné la traduction, quelque peu incornpIètdans le premier livre de soit de Venise (30 éd. in-i8, PaxisDidot, 1826, t. 1,'P.21)

TRiBUNIS MAflItIIIOBUMSENATOS PILEFECTUS PnkTOflIO. -.

• Data prima jussione censuirnus, ut Istrin vini et olei species rqUafl.*flpresentianno copia indulta perfruitur,ad Ravennatem feliciter dirigeretmansionem. Sed vos, qui numerosa navigia in ejus confinio possidétis,pari devotionis gratia providet, ut quod illa:parata est traders, vosstudeatis sub celeritate porta?e; similis erit quippe utrisque gratin per-fectionis; quando unum ex bis dissociatum impleri non permittit effec-tum. Estote ergo prornptipsimi ad vicina qui soepe spatia Iransmittitis(peut-être faut-il lire transmealis) infinita. Per hospitia quodammodovestra discurritis, qui per patriam navigatis Accédit etiam commodisvestris, pied vobis aliud iter aperitur peretua securitate tranijiiillûm.Nam cum ventis seviêntibus, mare fuerit clausum via. vobis pzinditurper amoenissima iluviorum. Carinœ vestrae flatus asperos non pavesctdutterrain summa felicitate contingunt; et perire nesciunt, qùœ fre-quenter impingunt Putantur eminus quasi per prata fcrri, coin eorumcontingit alveum non videri. Tractas funibus ambulant quœ stare ruden-tibus eonsueverunt et conditione mutita liedibus jusant hommes navessuas; vectrices sine labore trahunt,et pro favore velorum utuntur passuprosperioi'c nauisrunt Juat referre, quemadmodum habitationes vestrassitns esse prospexinTius. Venetiœ prdicabiles quondam plenœ nohilibus,ab Austro Bavenam Paddmque eontingunt, ah Oriente jueunditate: loniilittoris perfruuntur ubi alternus oestus egrediens modo claudit, tndnaperit faciem rèciprca inundatione camperont. Hic vobis 'aquatliuntaviuni. more .domus est. Nam-quinune terrestris, inodocérnitur insularis; ut illic magis estimes esse Cycladas, obi subito locorum facies

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11j2 -.respicis immutatas. Earutn quippe similittidine per œquoia longe pa-tentia domicilia videntur sparsa, quœt natura protulit, scd hominutncura fundavit. Viininibus eoirn Tilexibilibus . illigatis terrena hile congre-gaLa soliditas aggregatur, et marino fiuctui tain fragilis niunitio non du-bitatur opponi scilicet quando vadosum ittus moles ejicere nescit unda-rum; et sine viribus fertur, quod aliitudinis auxilio non juvatur. Hibi.tatoribus igittir una copia est, ut salis piscibus expleantur. Paupertasibi dum divitibus soli cequalitate cosivivit; nous cibus cannes reficit ha-bitatio similis universa concludit nesciunt de penatibus invidere etûbicin6iiiràadegeht.es eviduit vitium, ciii mondain constat bske'ob-

iôxiiht:1nhlinis aulêm exercendis tata èontentiè st; pro iiràtris,jii'ofdcil$ui'cylistdids -oIviiis iftdc vobM fructus ornais eliaicitur qùaiidôid, ipsis et que hôn.facitis possidetis. Moneta hile quodammoda 1iercu-Utup victua1jArti vestrte omnits fluetus (var. frizctus) addictus est. Pc-

rni!! (nimium) çjuarere; remo est qui saTein nondesideret invenire; merito quando isti (var; debetur qui) debet onuiiscibus, quod (qui) potest esse gratissimus. Proinde naves, pins more ani-mahum vestns panhbus illigastis ddienti cun relicite ut eum vos \irexperientissimis Lsû?eiitiifs,qui ad jirbciirandas sedis directus estcommoner&tenWyer-it, fcstindlisexcuSere, quatenus expenss.ndc6isa-rias iiùl!a diffictihatetardètis 3 qui pro 4uaiitate.neris cosnpendiuinvobiseligere patestis itinens

(Casiodon Vortansm Jib XII, op xxiv Ex editione Joanrns GaretiaBoOEoma, 167, 2 vol.io .fol;tJC P. l 98 et 199.)

:- -•- _• .'...-il.--••.

.rVôiciun extrait de la-seconde-lettre:par laquelle -Cassiodorefait remise aux Vénitiens de -lèurs contributions en- nature et dI'obligatidn &s transporta.•.•• -

i:r PAVLO,Vftb stRENùo, SENATO PRZECTDS PBEÏORIO.

4 : uccarrit.libenter, et gratis Venetis inopiao& anni sterilitatem labo rantibustrsbutarernittendo, •et,annonasconcedendo..--.

-i...,Vcniens itaquei'irvenerabilisAugustinu, vita dams et ïiomine4Venetum nobis necessitates flebili allegatione declarnvit non vint nontntici non panici species apud spsos fuisse procreat-ts asserens ailtfiflt4Tn .pcnuriaiÊ . ProviiYcialihm pervenisse fôrtunas, ùtv5t- peticulaustinere,posint .niM ois 1 -pietas regahis ' solita humahitatepFospeierit.

Quednobis-crudele yisurn, est, aliquid n petentibuspostulare; et .illudpprare, quo provindi eogndscitur indigere; .. .-. Et ideo....... vinuni et

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- 143 -triticuin, quod nos in apparatu exereitus ex Concordiense, Aquilcienseet F'orojullense civitatibus colligere feceramus, proesenti autoritate re-mittimus carnes tantum, sicut brevis vobis dates routine, exinde pro-videntes. Unie eniin clins fuerit, sufficientem tritici speciemdestinerons. Et quoniam in Istria vinum abonde natum esse comperi-mus, exinde, quantum de supraclictis civilatibus speratuin est, postulata.

On payera exactement les Istriens, et les Vénètes n'auront rien à don-ner pour cette grâce qui leur est faite. -

(Casodori Vw'ianin ]ib. XIl.ep.nvi. Éd. citée, t.!, P. 200.201).

III.

Voici le chapitre de saint Pierre Damien , dans son opusculeintitulé Iascitutio Monialis, et qui porte le numéro L.

DE VESETI Ducïs Uxolir, Q(J,E Pales NIMIUSI DELICÂTA, DrMuslTOTO COaPOIIE COMPUTIIUIÎ.

Veracis itaque et honesti viri didici relatione quod narro DuxVeneti.nrum Constantinopolitana urbis civem habebat uxorem, qum ni-luirnin tain tenere, tain delicate vivebat, et non modo superstitiosa sedartificiosa, ut ita loquar, sesejiicunditate mulcebat, ut etiam communibusse aquis dedignaretur abluere; sed ejus servi rorem ccnli satagehantnndecun-ique colligere; ex quo sibi laboriosum salis baineum procura-rent. Clos quoque sons manibus non tangebat, sed ah eunuchis ejusalimenta quque miiiiitius concidebantur in frusta quœ mox illa qui-busclam fuscinulis aurais atque hidentibus cri suo, liguriens, adhibebat.Ejus porro cubieulum tût thyiniamatum, aromatumque generibus redo-lebat, ut et nohis narrare tantum dedecus foeteat, et nuditor forte noncredat. Sed qmnipot.enti Deo quantum hujus feminffl fuerit exosa super-bia, manifesta docuit ulciscendo censura. Vibrato quippe super eamdivini mucrone judicii, corpus ejus omne computruit, ita ut membracorporis undique cuncta marcescerent, toturnque eubiculum intolerabiliprorsus (cetore compteront nec quispiam tantam perferre narium inju-riam.potuit, iloli cosmeta, non Servuiu, vix uns dumtaxat accula, nonsine speciei redolentis auxilio, in ejus obsequii sedulitate permansit.Ladem tamen raptim accedehat; et protinus fugiens abscedebat. Diutiushoc igitur languore decocta, et miserabiliter cruciata, amieis quoqueloetantihus, diem clausit extremum.

(Petrus Damianus, l'ut. ôlonialis, e. xi. Dans ic rcvueil des oeuvrescomplètes, t. HI, P. 340.)

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TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES.

CIJAP lIRE PREMIER.

0E '.5 l'ART QUI REVIENT Aux EMI'EI'EtIflS DE CON.STANTJNOI'I.K DANS LA FONDATION

- ET LES PROGRÈS DE LÀ RLPUBLIQIJii VÉNITIENNE,

Les rapports de Venise avec l'empire d'Orient datent de soi ' Origine môme.- Ttaéodoriek et le siége de Ra yonne. - La lettre de Cassiodore auxtribuns maritimes. - Justinien et la guerre gothique: Crocs et Véni-tiens en contact. Secours fournis par les Vénitiens à Bélisaire et àNarsès. - Narsès à Venise- les Vénitiens et les Padouans,.— Longin h

- Venise et l'acte de dévouement à l'empire grec. - Valeur du récit dela chronique d'Altino. - Pourquoi Venise reco nait la supi-émalie desempereurs grecs ..........................................

Les Lombards Héraclius, Héràcléa. - Institbtibn des (loges empruntsaux Lombards et aux,Grees. - Léon l'Isaurien; reprise de Rayonnesur les Lombards (727). - Immunités eonîmereiales dans l'exarehat;titi-es grecs conférés aux doges. - Décadence de Rayonne 'Venise luisuccède dans l'Adriatique. —Progrès de la population et des construc-tions navales .......................................... ....•.

Deux empirés se partagent la chrétienté au commencement du 'f siècle:Venue théâtre de leur rivalité. -- L6s factioiis à Venise : le parti grec etle parti fraie. Ls Galbaj et.i'exédition contre Crado. Chiite desCalbaj et triomphe du parti frank par l'élection d'Ohelerio (8o4). -Popularité de l'alliance byzantine. - Nicétas h Venise; le doge Obclâriopasse aux Grecs.— , Intrigues dé Fôrtiinato. - Cespherauos à Venise;Pépin propose aux Vénitiens la conquête de la Dalmatie. JJéi'oïqun résis-tance. —La bataille du Grand-Canal. - Le récit de Constantin P6rphy-rogénète. - Traité de 8.o reconnaissance de l'autonomie vénitienne.- Conséquence : Venise ne -sera jamais féodale; c'est 'in monde à part.Ce qui revient.àl;empire grec dans ces résultats. - Fidélité de Veniseà

cette 'alliance pendant cette'longiie pririode'.....................5

CHAPITRE IL

TROIS SIÈCLES D'INTIME At.L1ANCE.

La eivilisatioh gréc-vénitienne.Les ambassades, - Les fil, des dogesà Constantinople. Les titi-es auliques.eonférés aux doges. - Association

de leurs fils né pouvoir: — L'ostracisme de la république vénitienne. .2710

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Marques (jede soumission données par les Vénitiens aux empereurs. —'Quel-pics actes inédits cités è ce siijeL. - Dépendance nominale et influencecroissante des Vénitiens.....................................

Les incursions maritimes des Arabesau ix' siècle. -,Expéditions des Véni!iens!CnSiCilC pour le compte des Grecs. —Prise de, Ban (s)

Premiers témoignages sur le commerce vénitien en Orient Cassiodore, lemoine de Saisit-Gali. - La mission de Luitprand et la cour de Cons-tan t inople au f siècle. - Les clirgsoMilles perdus,_-- Le ebrysol,iillcde 99! reste pour nous 1e plus ancien.

L'esprit mercantile. - Le commerce avec'

les Musulmans. Interdictions.- Décret du doge Pietro' ConditionIV - iit.erdiction du commerce

- des esclaves. L'exagération des peines atteste l'impuissance de la loi. -L'esclavage esfuiie , insti!ution vénitienne. - Interdiction du commerceavec les Mnsulnians par Pietro Candiano IV (qi). - La loi elle-mêmea grand soin de ne pas découriiger lit

Les pieuses acquisitions des Vénitiens en Orient. - Fondation du monas-tère de Saint-macliarie par Léon l'Arménien (8 i/i). — Décret do doge è -cette occasion. Découverte des reliques de saint Marc. à Alexandrie. -Sain! Marc, patrondea république (828) .........................

CHAPITRE III. -

i.LS0RSEOLI (ggi-ao3o).

Alliance de Venise avec - les Grecs-contre Otton Il. La flot! éi! ,u:eai ' siégc de Ban. _AsubassadeTà Cous!autinople. - Le chrysobullçdes empereurs Basile et Constantin (g i). - Juridiction spéciale diilogoth'ete impérial réservée ail' vénitiens. - Etat de la Dalmatie mari-time. - Les Narenlans, P. Orseolo 'propos' e ail Feuille de réponditeà l'appel des Dalmates. - Droits nouveaux surla Dalmatie. - Le dogeduc de Dalmatie. - Les.délégés vénitiens. _.triomphei'Orseolo. -Le mariage de l'Adriatique. -- Résultats économiques de l'acquisition'de la Dalmatie ..........................................

P. Oi'seolo se sert de l'alliance grecque dans un intérêt de famille. -. Ma-.riagede GievanniOrseolo et de la princesse Marie (g). —! Réceptiondes deux époux à Venise. — Mort des cieux époux et de leur enfant. , -

Otton Orseolo, irnopulaire, est renversé et exilé àtenstntinople.Rétablissement d'Ot.!on par l'influence grecque. —Attentat de Dome-nieo Orseolo. - Réaction con tre le pOtIvOi! des doges le conseil desPregadi. - Influence de la politique grecque sur la constitution iné-rielire de Venise ...... -.-.-------''---------''---

CHAPITRE IV.

LES NORMANDS ET I.E CHRY5OBULLE D'ALEXIS.

Les Normands en Italie. - Les Nofmands et le pape Léon IX. —Alliancegréco-véniticnnc. — Ui,c princesse grecque Venise. - Les corsairesnurmaurls dans l'Adriatique. - Acte de soumission imposé 'a la Dalmatie. 1 55

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- 147 -Expéditioh de Robert Guiscard contre l'empire. - Ai exis Conidène. --Ses

-promésses aux Vénitiens.La flotte vénitienne devant Durazzo. - -Dé-faite navale des Normands. - L'année d'Alexis Comnène. -Prise deDurano par Rohert Guiscard. - Défaite rtavale:dcs Vénitiens; héroïsmedes captifs: - Abdication forcée de D. Selvo et avénement de V. Falieri.- Victoires de Corfou. et.de Butrinto; mort de R. Guiscard ..........

Le chryobtIle d'A]exis._— Les Amalfitains de Constantinople tributaires -de Saint-Mare. - Franchise absolue du commerce vénitien - Position -respective des Vénitiens et des Grecs en ,o85 .....................63

CHAPITRE V.

LES CROISADES. - TAnLIS5EMENT5 ors VÉNITIENS

DANS tEs Ï1OYAUSIV.s tItnitIttNS fl'OIUENT. -

Rôle des Vénitiens dans 'es croisades malins et pourvoyeurs.— Premièrecroisade les Vénitiens au château dAreas. - Expédition de Vitale -.Michieli; défection d'Alexis. - Prise do château rie Catifa. - -Grandeexpédition de Domenico .Michieli. - Viewire navale de Joppé. Lesenvoyés dit royaume de Jérusalem félicitent le doge vainqueur; - -D. Michièli à Jérusalem. — Débat entre Tyr et Ascalon Tyr. - Siége -do Tyr. - Efforts des Sarrasins pour la délivrance. - Comment le doge

répond aux soupçons injurieux de ses alliés. - Chute de Ty. ...........6Pourquoi les expéditions des Vénitiens diminuent après 115°...........73Les pèlerins et les passagers à Venise. - institutions protectrices. -

Magistrature tutélaire et loi sublime. - Intelligence par le commerce -de la solidarité des peuples ...................................74

Les immunités commerciales et les, établissements en terre sainte. -Charte de Raymond d'Antioche (s iéo). - Réduction considérable desdroits. - Rainald (s i53) et Bohémond ii! (i 16). - Progrès plus -

-- rapides encore dans le royaume de Jérusalem, sous Godefroi de Deuil.Ion et Baudouin J" (t too- ti t s). -. Importance des concessions obte-nues parD. Michieli (-t • s 2 5 -).--les actes de 1123 et il 25'011vttntaux Vénitiens oa empire. - Franchise ébsolue, excepté pour les Pèle -Fins. - Juridiction vénitienne; assises de Jérusalem, - Droits- rie la -commune vénitienne dans chaque ville ..........................76

Translation du corps de saint Niccolè. de Myra, - de saint Étienne. - -Fondations pieuses à Venise en Ihonneur des saints d'Orient. - In-

fluence du caractère des Vénitiens sur leur religion ................83

CHAPITRE VI..

LUTTE DES VN1TIENS ET DES GRECS ÀO 511' SIÈCT.F..

Que les peuples pardonnent rarement les services. - Âpreté 'etdes Vénitiens. — Les.enspereurs -leur suscitent des rivaux. - Vexationssouffertes par les Vénitiens -ers Romanie. - Le clirysobnlle de JeanComnène (à s,6)..— Fragilité de cette paix nouvelle. H- Alliance contre.

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- 148 -Roger il (t '65).— Mésintelligende des Vénitiens et des Grecs au siégô-.

de Corfou. --- Les denat chi'ysobidtes de Manuel (ii 66— 11 48). - Paixde Venise avec tes Normands. - L'empereur Manuel Comnène ...... . 85

Politique de Manuel en Italie et enflalmatie. Arrestation des Vénitiensdans l'empire (s 17 t). - Jugements des historiens grecs • et vénitienssur cet événement. - Indignation et préparatifs à Venise.— La chambrc.des prêts cules o,bligiitioûs d'Etat. - Expédition de Vitale,Mielsieli IL.Siégede Chalcis. - Les Vénitiens à Chies. —:Man.iel vaine les négo'ciations en longueur. - La peste désole la flotte .vénitienne dans les pa- -rages de Chies. - Simplicité et faiblesse du doge. - Désastreuse re-ii-aile de la flotte vénitienne. - Meurtre de Vitale Michieli II (t t 72)-

- Réaction coutre le doge et contre le pouvoir populaire-. . . . Nouvelle ambassade Eririco Dandolo. - Négociation de la république

avec les Normands. - Traité de pais et de commerce avec Guillaume li(i 573). —y Venise arbitre de l'empire d'Orient et de l'empire d'Occident. 'ok

Usurpation d'Atidronicos Comnène. - Massacre des. Latins dans lit Coi-ne-d'Or. - Avénement (f Isaac Comnène. - Les quatre ébrysobulles de ceprince en faveur des Vénitiens. - Règlement du contingent maritimedes Vénitiens -de..Romanic. - Défiance réciproque des deux partiescontractantes..— Facilités que Fempereur -se réserve à Venise pour lepassage de ses troupes. - Chrysobulle de s 189 indemnités aux Véni-tiens victimes de Manuel. Ruptirrb définitive do l'allinnce.gréco-vé-nitiessue malgré ces traités. - Gue&re et conquête imminentes ----- - '07

t-

CHAPITRE VII.

LES vhN.T,ENs EN tIOMANIE, LES GaEcs ET LEUR tN pi,uExcE À VENISE- VERS LA ION DU XII' SIàCLE.- -

Nature du commerce vénitien aveé l'empire d'Orient,Énumératioi, des

produits orientaux ------------------- -- - - - -------------- - ------ii S

'Jableau des colonies vénitiennes dans l'empire. --Les jwéilicesseurs desVénitiens à Constantinople. - Les Amalfitains. —Quartier con&déauxVénitiens par Alexis Comnèise( id8z).— Rivalité des différentes colo-mes italiennes à Corsslantinople. -. Les colonies vénitiennes dans lamer Noire -------------------------- -------- --------------

Les consuls ou bail es; leur juridiction sur leurs nationaux. - Les Véni-tiens affranchis des juridictions grecques ..... . ................ . . 12

Les ansbassadeurs, les relations, la diplomatie vénitienne. - La commis-

sion inédite d'Enrico Dandolo. - Netteté et précision de ce document.123

Les évêques vénitiens de -l'empire grec;— Adrien IV confre aux pa-triarclies de Crado le di-oit d'ordonner ces évêques (i 1.5 7 ). - Texte dela bulle pontificale, - Seconde bulle, émanée d'Alexandre III. - lus-portauce de cette unité dans la hiérarchie vénitienne. - Concessionsterritoriales obtenues en Remanie par les églises et les monastères vé-nitiens. - Documents nouveaux •ii ce sujet .... . .......... ..... .. j 27

Origiuc..de la colonie, grecque à Venise. .- Influence byzantine dans lesusages et le costume. - Les diguiltés impériales-----------.. i ...... .

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- 149 -

Affinité entre la langue grecque et le dialecte vénitien. - Emprunts faitsau premier de ces idiomes par le second. - Deux points importantsdistinguer dans cette 4nestion philologique, ......................136

Emprunts dans le domaine de l'industrie et des arts utiles. - Énumérationdes principales villes industrielles d'Orient ......................138

L'art byzantin b Venise. - Saint Marc ........................... 140

APPENDICE.

L Lettre de Cassiodore aux tribuns maritimes de Venise........U. Lettre de Cassiodore à Paulus ...........................i4,III. Extrait de S. P. Damien surie luxe de la princesse grecque....su3

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