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Vie desCollections

Acquisitions

RestAuRAtions

esPAces MuséoGRAPHiques

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Vie des collections

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Antiquités orientales

Aucune œuvre susceptible d’enrichir les collections de manière significative tout en répondant aux critères déontologiques du musée du Louvre n’a pu être acquise. Cependant, un tableau important pour l’histoire des collections du département des Antiquités orientales, La Visite du pacha de Mossoul aux fouilles de Khorsabad de Félix Thomas (Nantes, 1815-1875), a été acquis à notre demande par le département des Peintures. Il sera exposé dans les salles assyriennes.

B. André-salvini

 no acquisition was made of any work that would significantly enrich the collections and meet the conditions in the Museum’s code of practice. However, upon our request a painting of historical importance for the collections in the Department of near eastern Antiquities was acquired by the Department of Paintings, and will be exhibited in the Assyrian rooms.

Antiquités égyptiennes

Du fait de notre extrême vigilance sur les chapitres de la provenance archéologique, du mode d’acquisition et de la date d’arrivée en Europe des œuvres susceptibles d’être acquises pour le département, nous avons été amenés à renoncer à enrichir notre collection en 2010. Il existait bien une œuvre correspondant à nos exigences et d’un intérêt majeur à nos yeux, mais elle n’a pu être acquise ; elle a depuis été classée « trésor national ».

G. Andreu-Lanoë

 extreme caution concerning the archaeological provenance, purchase method, and the date of arrival in europe of works liable to be acquired by the Department led us to abandon the idea of enriching our collection in 2010, and were therefore unable to acquire a work of great interest that does meet our requirements, which has since been classified as a national treasure.

Antiquités grecques, étrusques et romaines

Riche d’une importante collection de sculptures romaines, de la plus remarquable collec-tion d’art étrusque conservée hors d’Italie et de la plus belle collection de vases et de figu-rines de terre cuite du monde grec, le département des Antiquités grecques, étrusques et romaines s’attache à mieux montrer la diversité des productions du bassin méditerra-néen à l’époque classique. La politique d’acquisition, pour un marché quasi inexistant, consiste donc à combler certaines lacunes (protohistoire, civilisations de l’Italie préro-maine, provinces occidentales de l’Empire romain…) tout en renforçant certains pans de la collection déjà importants mais lacunaires (sculpture grecque archaïque et classique, peintures et mosaïques romaines). Les collections du département se sont enrichies en 2010 grâce au don d’un ensemble de cent cinquante bronzes du Picenum (Italie) pro-

Acquisitions

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Acquisitions

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venant de la collection réunie par Julien Bessoneau (1842-1916) à Angers, et aussi grâce à l’acquisition en vente publique, en décembre 2010, de trois panneaux de mosaïques permettant d’illustrer les productions des ateliers de Gaule romaine.

J.-L. Martinez

 the Department of Greek, etruscan, and Roman Antiquities holds a large collection of Roman sculptures, the most remarkable collection of etruscan art held outside italy, and the finest collection of vases and terracotta figurines from the Greek world; the Department would like to broaden the diversity of the antique objects produced in the Mediterranean Basin in the classical era. the acquisition policy—in a practically inexistent market—therefore consists of adding certain missing elements (from proto-history, the civilisations of pre-Roman italy, the Roman empire’s western provinces, etc.), while adding to certain areas of the collection that are already extensive but are missing certain elements (archaic and classical Greek sculpture; Roman paintings and mosaics). the Department’s collections were enriched in 2010 by the donation of an ensemble of 150 bronzes from Picenum (italy) from the collection assembled by Julien Bessoneau (1842–1916) at Angers, and the acquisition in a public auction in December 2010 of three panels of mosaics that illustrate Gallic-Roman workshop productions.

Chasse de Méléagre contre le sanglier de Calydon, département des Antiquités grecques, étrusques et romaines

(Mne 1337)

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Vie des collections

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Trois panneaux d’un pavement de mosaïque de Vienne (Isère) au musée du Louvre

Chasse de Méléagre contre le sanglier de Calydonentre 175 et 225 après J.-c.Panneau de mosaïque : marbre et calcaire. H. 92 cm ; l. 92 cmVienne (isère) Découvert en 1881 lors des travaux de fondation d’un immeuble rue Peyron à Vienne ; conservé sur place jusqu’à la mise en vente Acquis en vente publique à Paris, hôtel Drouot, maison de vente Pierre Bergé et associés, le 5 décembre 2010Département des Antiquités grecques, étrusques et romaines (Mne 1337)

Couple de canards au milieu d’une couronne végétaleentre 175 et 225 après J.-c.Panneau de mosaïque : marbre et calcaire. H. 92 cm ; l. 92 cmVienne (isère) Découvert en 1881 lors des travaux de fondation d’un immeuble rue Peyron à Vienne ; conservé sur place jusqu’à la mise en venteAcquis en vente publique à Paris, hôtel Drouot, maison de vente Pierre Bergé et associés, le 5 décembre 2010Département des Antiquités grecques, étrusques et romaines (Mne 1338)

Buste masculin au milieu d’une couronne entre 175 et 225 après J.-c.Panneau de mosaïque : marbre et calcaire. H. 92 cm ; l. 92 cmVienne (isère) Découvert en 1881 lors des travaux de fondation d’un immeuble rue Peyron à Vienne ; conservé sur place jusqu’à la mise en venteAcquis en vente publique à Paris, hôtel Drouot, maison de vente Pierre Bergé et associés, le 5 décembre 2010Département des Antiquités grecques, étrusques et romaines (Mne 1339)

Alors qu’elle comptait déjà soixante-trois pavements ou élé-ments de pavement d’Afrique du Nord ou du Proche-Orient, la collection de mosaïques du département des Antiquités grecques, étrusques et romaines s’est encore enrichie, lors de la vente publique du 5 décembre 2010 organisée par la maison de vente Pierre Bergé et associés à Drouot Montaigne, d’un remar-quable ensemble de trois panneaux provenant d’un pavement de domus de l’antique Vienne.

Ces trois panneaux étaient connus et répertoriés depuis longtemps. Exhumés en 1881 lors des travaux de fondation d’un immeuble au 5, rue Peyron, à Vienne, ils appartenaient à un pavement plus vaste dont on ignore l’état de conservation et les dimensions au moment de la découverte. Vraisemblable-ment déposés pendant les fouilles pour pouvoir être conservés, ils ont tous trois été montés sur un support de ciment carré, de 92 cm de côté, ceint d’un encadrement métallique. Publiés dès 1890, ils furent classés monuments historiques par un arrêté du 2 mars 1937. En 1981, ils furent de nouveau publiés par Janine Lancha dans son Recueil général des mosaïques de la Gaule. III. Province de Narbonnaise. 2. Vienne, où il est précisé qu’ils étaient alors « accrochés au mur dans la cage d’escalier du nu-méro 5 de la rue Peyron, au rez-de-chaussée et au 1er étage ; le propriétaire de l’immeuble et des mosaïques est Me Frécon ». Ils sont restés dans l’immeuble sous lequel ils avaient été décou-verts jusqu’à leur mise en vente publique en 2010.

Ces trois panneaux sont constitués de petits cubes de marbre et de calcaire, appelés tesselles, dont les dimensions varient de 1

à 0,2 cm de côté entre le fond et les figures. Le premier montre une scène de chasse : accompagné de trois chiens, le chasseur simplement vêtu du manteau des cavaliers, la chlamyde, me-nace de sa lance un sanglier qui lui fait face dans un paysage ro-cailleux. Il s’agit là de la représentation de la chasse de Méléagre contre le sanglier de Calydon, un thème classique de la peinture murale à l’époque romaine, souvent repris en mosaïque sous forme d’emblema (décor central d’un pavement) ou intégré à des scènes de chasse plus vastes, inspiré en effet par une com-position célèbre notamment pour la représentation de la grotte et des arbres et attribué au peintre grec Polygnote de Thasos ;

Buste masculin au milieu d’une couronne, département des Antiquités grecques,

étrusques et romaines (Mne 1339)

Couple de canards au milieu d’une couronne végétale, département des Anti-

quités grecques, étrusques et romaines (Mne 1338)

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Acquisitions

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la scène de la chasse de Calydon se retrouve par exemple dans une mosaïque d’Oudna (Tunisie) ou encore de Cos (Grèce). Le deuxième panneau montre un couple de canards nageant au centre d’un médaillon décoré d’une épaisse couronne de feuilles de lierre chargées de fruits. D’autres volatiles, perdrix ou faisan, occupent les écoinçons. Le thème du canard est fréquent dans les mosaïques de Vienne, où on le trouve souvent traité dans les parties secondaires des pavements, comme les écoinçons. Le troisième panneau reprend la même organisation : un buste masculin portant une couronne de lierre et un manteau s’inscrit dans un large médaillon orné de feuilles de chêne ; quatre paons et paonnes remplissent les écoinçons. Diverses identifications ont été proposées pour le personnage masculin : peut-être faut-il y voir un philosophe ou un poète, en raison du manteau qu’il porte et du bandeau qui ceint son front. Les sujets traités sur ces trois panneaux sont donc sans relation les uns avec les autres ; à l’exception du canard, ils ne sont pas courants à Vienne.

Ces panneaux appartenaient à un pavement constitué d’un quadrillage de cases carrées à décor multiple, type de composi-tion bien attesté dans la production de mosaïques viennoises et notamment représenté par un pavement découvert en 1857 et illustré en son centre par l’ivresse d’Hercule.

Capitale du peuple allobroge au iie siècle avant J.-C., pro-mue colonie latine par Jules César en 50 avant J.-C. (« colonia Iulia Augusta Florentia Vienna »), Vienne constitue la limite septentrionale de la province de Narbonnaise fortement roma-nisée. Avec ses faubourgs, Sainte-Colombe et Saint-Romain-en-Gal, elle a livré un très vaste ensemble de mosaïques (cent quarante-deux pavements ou fragments de pavements de mo-saïque mis au jour d’après la publication de Janine Lancha) qui témoignent de l’activité intense des ateliers viennois, sans équivalent dans aucune autre ville de Gaule, voire de l’Occi-dent romain. Influencée en partie par les ateliers italiques, cette production se caractérise par la variété des techniques mises en œuvre, par la constitution d’un répertoire de canevas (décor tapissant selon une organisation géométrique), dont font partie les compositions en quadrillage à décor multiple, et par un répertoire végétal riche et d’une grande variété, mar-qué notamment par le souci d’adapter l’ornement à son cadre géométrique, et la réalisation conjointe de mosaïques figu-ratives, conservées en grand nombre et portant souvent des sujets mythologiques, et de mosaïques décoratives noires et blanches. Ainsi, les trois panneaux de la rue Peyron, du fait de leurs sujets et de leur composition, s’inscrivent parfaitement dans la production des ateliers de mosaïstes viennois. Chrono-logiquement, ils sont datés entre 175 et 225 et appartiennent à un corpus réparti en quatre groupes situés entre le ier siècle avant J.-C. et le iiie siècle après J.-C.

Au musée du Louvre, les trois mosaïques de Vienne re-joignent une collection de référence dans ce domaine. En effet, au sein du département des Antiquités grecques, étrusques et romaines s’est constituée depuis 1840 une importante collec-tion de mosaïques d’époque romaine (soixante-trois numéros) composée de deux ensembles. Le premier d’entre eux regroupe les mosaïques d’Afrique du Nord – provenant d’Utique et de Carthage en Tunisie, et de Constantine en Algérie –, compo-sées de trente-sept panneaux ou fragments comprenant des décors de villa, des mosaïques funéraires chrétiennes, ainsi que des fragments de pavement d’église, dont la pièce maîtresse est le Triomphe de Neptune et Amphitrite de Constantine. Le se-cond ensemble provient du Proche-Orient et se divise en trois

groupes : le pavement de l’église Saint-Christophe de Qabr Hiram (Liban actuel), découvert lors de la mission d’Ernest Renan en Phénicie en 1862 ; les dix mosaïques d’Antioche issues du partage effectué lors des fouilles menées par la mis-sion franco-américaine entre 1934 et 1939, avec comme pièces maîtresses la mosaïque du Jugement de Pâris, la mosaïque des Saisons de la villa constantinienne et le Phénix ; enfin, les mo-saïques chrétiennes de Syrie acquises à partir des années 1970.

Les aléas de l’histoire des collections nous ont privés, ou presque, de mosaïques provenant des autres provinces de l’Em-pire romain. Seuls le pavement géométrique de la via Nomen-tana à Rome, intégré dans le sol de l’une des salles romaines, et trois petits fragments de Véies illustrent la production pourtant essentielle des ateliers italiques ; celle des ateliers de la pénin-sule Ibérique est tout à fait absente. La Gaule n’était, jusqu’à cette acquisition, représentée que par quelques fragments d’une mosaïque de Saint-Romain-en-Gal trouvés en 1826.

Or, le département des Antiquités grecques, étrusques et romaines a pour vocation de refléter l’ensemble du monde romain. Le musée du Louvre souhaite donc combler ses la-cunes en présentant les principaux ateliers de production de mosaïque. L’acquisition des trois panneaux de la rue Peyron à Vienne permettra de montrer un ensemble caractéristique d’un atelier de Gaule romaine. Ces trois panneaux trouveront naturellement leur place dans les futures salles romaines, dans une section consacrée à l’étendue et à la diversité de l’Empire. En Gaule, le phénomène de « romanisation » est en effet parti-culièrement sensible dans le domaine de la mosaïque.

c. Giroire

BibliographieLancha (J.), Recueil général des mosaïques de la Gaule. III. Province de Nar-

bonnaise. 2. Vienne, Paris, CNRS, 1981, no 245, p. 44-47, pl. VII et VIII.

 the Museum has recently acquired a remarkable set of three mosaics from an ancient domus in Vienne (south-eastern France), which were excavated in 1881 during building foundation works. they remained in the building under which they were discovered until they were put up for auction in 2010.

the mosaic pavings belonged to a pavement comprised of chequering inside square borders—a composition that is very common in the mosaics of Vienne: the first represents Meleager’s boar hunt; the second shows a pair of ducks swimming; and on the third there is a male bust wearing a crown of ivy. these three themes, with the exception of the duck, are not common in Vienne.

A large number of mosaics attesting to the intense activity of the workshops have been found in Vienne, which was located at the northern border of narbonensis. Partially influenced by the italic workshops, the mosaics are characterised by the variety of the techniques, the establishment of a repertoire of framing outlines, a rich vegetal repertoire, figurative mosaics (most often depicting mythological subjects), and, finally, black and white decorative mosaics.

the subjects and compositions of the three mosaic pavings, which date from between 175 and 225 ad, are typical of the mosaics produced in the workshops of Vienne.

since 1840, a large collection of mosaics from the Roman period—mainly from north Africa and the near east—has been built up in the department. this acquisition will enable the Museum to exhibit a set of mosaics that are characteristic of the production in a Gallo-Roman workshop.

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Vie des collections

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Arts de l’Islam

L’année 2010 a été essentiellement marquée par la finalisation administrative de la donation très généreuse consentie par Emanuele Pantanella et Letizia Signorini, deux collectionneurs romains passionnés par le monde islamique, amateurs de cal-ligraphie et francophiles. Leur libéralité fait entrer au Louvre plus de cent vingt objets et s’inscrit comme la donation la plus importante depuis le legs Chandon de Briailles en 1955. Outre cette heureuse conclusion, un rapide bilan de l’année 2010 montre un intérêt soutenu pour l’art du sous-continent indien, trop longtemps peu représenté dans les collections islamiques du Louvre. L’achat d’un grand relief de grès rouge est le point d’orgue d’une série d’acquisitions qui ont permis d’illustrer le décor architectural moghol dans toute sa somptuosité. Une rare plaquette d’ivoire et le don d’une bouteille viennent renforcer ce versant indien des enrichissements de l’année, malgré un marché de l’art particulièrement à la hausse.

Pour autant, le département ne se détourne pas des terres centrales du monde islamique et a acheté deux pièces iraniennes médiévales, faisant entrer un rare et précoce exemple du métal du Khurasan signé par l’un de ses premiers maîtres di-nandiers, Shazi al-naqqash ; la pièce était jusqu’alors inédite. L’achat d’une coupe issue de la prestigieuse collection Parish-Watson, publiée en 1922, nous procure le bel exemple de céramique haft-rang à iconographie souveraine qui manquait encore à la collection. Le don d’un moule signé, datable de la fin du xiie siècle ou des premières décennies du xiiie siècle, nous ramène à nouveau vers l’est de l’Iran et nous conduit à une intéressante réflexion sur l’utilisation du moulage et la diffusion esthétique et culturelle que permet cette technique.

Enfin, pour ce qui est de l’extrémité occidentale du monde islamique, l’achat d’une rare stèle funéraire almohade constitue un apport d’une importance majeure pour les trop rares collections « ifriqiyyennes » du Louvre et un atout pour sa collec-tion épigraphique.

s. Makariou

 the year 2010 saw the satisfactory incorporation of the generous donation from emanuele Pantanella and Letizia signorini—two Francophile Roman collectors who are passionately interested in the islamic world and calligraphy. their endowment to the Louvre includes more than 120 objects, and is the biggest donation since that of chandon de Briailles in 1955. in addition to this welcome supplement, exhibitions held in 2010 indicate continued public interest in the art of the indian subcontinent, which has long been under-represented in the Louvre’s islamic collections. the acquisition of a large red sandstone relief is the highlight of a series of investments that have enabled the Department to present Mughal architectural decoration in all its splendour. A rare ivory plate and the donation of a bottle have complemented the year’s additions to the indian collection, despite sharply rising prices on the art market.

Meanwhile, the Department is not turning its back on the major countries in the islamic world, and has acquired two very fine medieval iranian pieces, one an early example of inlaid metalwork from Khorasan signed by one of the first master inlayer, shazi al-naqqash (the piece was previously unknown); and a bowl from the prestigious Parish-Watson collection (published in 1922), thereby enriching the Department with an example of haftrang (seven-colour) ceramics bearing royal iconography, a fine example of which was lacking in the collection. Furthermore, the donation of a signed mould dating from the late twelfth or early thirteenth century, has led us back to eastern iran and to an interesting exploration of the use of moulds and the aesthetic and cultural diffusion facilitated by this technique.

Lastly, and as regards the westernmost regions of the islamic world, the acquisition of a rare Almohad funerary stela is a major addition to the Louvre’s otherwise meagre “ifriqiyan” collection, and a real asset for its epigraphic corpus.

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Acquisitions

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Relief architectural à décor végétalinde du nord, vers 1700Grès rouge sculpté. H. 1,70 m ; l. 94 cm ; ép. 13 cmAncienne collection Peter Marks ; achat à Londres, galerie sam Fogg, janvier 2010Département des Arts de l’islam (MAo 2099)

Ce grand panneau de grès rouge, matériau caractéristique de la région de Mathura employé dès la période Gupta, vient com-pléter, dans nos collections, un ensemble de quelques œuvres architecturales mogholes qui retrace l’évolution du décor du xvie au xviiie siècle. Le décor, d’une qualité plastique remarquable, montre un buisson de lis, dont les efflorescences sont fixées sur de longues tiges grimpantes et ondulantes. Elles jaillissent d’un calice aux feuilles agitées par le vent, se retournant de gauche et de droite. Ce calice est pris dans un motif engainant qui repose sur un vase de feuilles renversées. Un rinceau ondulant, chargé de pavots, orne les bordures encadrant le champ central.

La superposition des plans, l’aspect gonflé des pétales et des feuilles confèrent une forte présence à une composition tota-lement irréaliste. Le relief, tronqué mais très impressionnant, illustre la tendance la plus sensualiste, la plus inspirée par la nature, de l’art moghol ; elle se développe particulièrement à partir du règne de Shah Jahan (1627-1657). L’imaginaire des artistes s’est nourri de la lecture d’ouvrages européens, notam-ment de botanique, tel celui de Crispin de Passe. Même si cer-tains éléments comme les lis sont aisément identifiables, ils sont soumis à une rigoureuse organisation géométrique et à un traitement presque métallique des détails qui font de cette œuvre une belle quintessence du décor architectural dans l’Inde des Grands Moghols.

Ce relief a son pendant exact au Minneapolis Institute of Art ; il formait avec lui une paire provenant d’un monument non identifié. Les grandes dalles décoratives de grès rouge pou-vaient être employées très loin de leur lieu d’exécution et l’on connaît des exemples précis de « prélèvement » de ces éléments lors de pillages et d’actes de guerre.

s. Makariou

 this large slab of red sandstone—a material that is characteristic of the Mathura region of india—complements a series of Mughal architectural works that illustrate the various phases in Mughal architectural decoration between the sixteenth and eighteenth century. the carved decorative work, which is of exceptional quality, shows a bush of lilies, whose flowers are attached to long climbing and undulating stems spilling out of a chalice, with the leaves fluttering in the wind and the stems swaying left and right. the chalice is enveloped in a motif that rests on a vase of inverted leaves. An undulating tendril laden with poppies adorns the borders around the central section. An exact companion piece to this relief is held in the Minneapolis institute of Art, and together they formed a pair from an unidentified monument.

Matrice secondaire de moule signé Abd al-Jabbar al-Samarqandixiie-xiiie siècle, iran ou Asie centrale terre réfractaire moulée. H. 7,8 cm ; D. 12,7 cmDon d’Annie et corine Kevorkian, galerie Kevorkian, octobre 2010Département des Arts de l’islam (MAo 2232)

Ce petit moule en terre réfractaire est particulièrement intéres-sant par la finesse de son décor et la signature du potier. Son nom contient une nisba (indication géographique d’origine) signalant la ville de Samarcande.

Outre la finesse de son décor, qui en fait une pièce esthéti-quement très réussie, cette œuvre présente un intérêt particu-lier en ce qu’elle vient appuyer un discours technique sur la création des céramiques médiévales iraniennes ou centre-asia-tiques. La couture que l’on peut y voir indique en effet qu’il s’agit d’un moule tiré à partir d’une matrice. La fabrication de céramique moulée ne relève pas d’une logique de série, mais d’une adaptation à une fonction précise : pour les vases à eau,

Relief architectural à décor végétal, département des Arts de l’islam

(MAo 2099)

Matrice secondaire de moule signé Abd al-Jabbar al-samarqandi, département

des Arts de l’islam (MAo 2232)

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Vie des collections

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la pièce demeurait toujours sans glaçure afin que son évapo-ration à travers la paroi ait pour effet de rafraîchir le liquide. La fabrication de moules à partir d’une matrice permettait la diffusion d’un style élaboré portant parfois, comme ici, une maxime à l’usage des élites.

Celle-ci est identique à celle d’un célèbre plat inscrit du Louvre. L’inscription contient une sentence : « La magnanimi-té est d’abord amère, mais son goût est finalement plus doux que le miel. »

Il est peut-être possible de rapprocher l’auteur de ce moule d’un potier dont on connaît une matrice de moule dans la col-lection al-Sabah (Koweit), matrice à partir de laquelle furent faites une pièce conservée au Tamashagah-è Tarikh à Téhéran, une autre au musée Reza-è Abbasi également à Téhéran et une pièce inédite du musée de la collection David à Copenhague.

s. Makariou

 this small refractory clay mould boasts some particularly fine decorative work, along with the potter’s signature, which contains a nisbah, or indication of the man’s geographical origin, indicating samarkand.

the purpose of moulded ceramics was to produce not series but individual pieces for a specific function, such as water vessels without glaze, by which the steady evaporation on the surface kept the contents cool. the production of moulds from a matrix facilitated the diffusion of an elaborate decorative style that sometimes bore a motto for an educated elite, as in this case, where the inscription reads: “Patience is bitter, but is ultimately sweeter than honey”.

Bouteille surahiinde du nord, xviiie sièclePâte argileuse rouge, décor d’engobe et d’émaux sous glaçure transparente incolore. H. 20,5 cmDon d’Alexis Renard, décembre 2010Département des Arts de l’islam (MAo 2233)

Cette bouteille ou surahi appartient à un groupe mal identifié de céramiques du nord de l’Inde. En effet, pour des raisons religieuses, les hindouistes ont toujours condamné l’utilisation de vaisselles de céramique, si bien que cette production atteste l’existence d’un contexte islamique en Inde. Elle demeure toute-fois extrêmement mal connue et est souvent confon-due avec celle de Multan (actuel Pakistan), plus tardive, avec laquelle elle entretient des rapports stylistiques. Le décor, flo-ral dans les deux cas, est cependant plus enlevé sur ces rares pièces. Techniquement, la pièce présentée ici se distingue de celles de Multan par une pâte très rouge et argileuse ainsi qu’une glaçure différente, adhérant mal à l’objet. Elle se rap-proche d’une belle bouteille surahi acquise par le Louvre en 1999 (MAO 1244), de dimension bien supérieure (H. 44,5 cm), au parti pris ornemental plus ambitieux, et d’un carreau du musée du Louvre (MAO 2054). Elle amorce ainsi la création d’un petit groupe qui demeure rare dans les musées, en dehors d’une belle pièce comparable dans les collections du Victoria and Albert Museum à Londres.

s. Makariou

 this surahi bottle belongs to a group of frequently misidentified ceramics from northern india. Given that for religious reasons the Hindus refuse to use ceramic dishes, these ceramics are a strong indication of islamic presence in india. Little is known about this production, and it is sometimes

confused with the ceramics produced in Multan (present-day Pakistan), but the piece here is technically different from Multan production: it is made of a red clay body and its glaze uneasily adhere on the piece. it is similar to a beautiful surahi bottle acquired by the Louvre in 1999 (MAo 1244).

Stèle au nom de Shaykh Abu al-‘Abbas Ahmad ibn Muhammad tunisie, 583 H / 1187Marbre sculpté. H. 76,5 cm ; l. 53,5 cmAchat à Paris, galerie Alexis Renard, novembre 2010Département des Arts de l’islam (MAo 2230)

Cette stèle présente une très belle inscription en kufique à col de cygne, qui comprend la sourate III al-Umran, ainsi que le nom du défunt et la date de sa mort. Il s’agit d’un remploi d’époque romaine. Avec elle, c’est un exemple unique de stèle d’époque almohade qui entre dans les collections du Louvre.

L’inscription dit : « Au nom de Dieu, le compatissant, le miséricordieux, que

la bénédiction de Dieu soit sur le Prophète Muhammad, sa famille et ses compagnons, (que Dieu) les bénisse avec tout le respect.

« Toute âme goûtera la mort. Seulement vos salaires vous seront acquittés au Jour de la résurrection. Qui échappe au Feu et sera introduit au Paradis sera bienheureux, car la vie ici-bas n’est qu’une jouissance éphémère et trompeuse.

« Ceci est la tombe du Shaykh Abu al-‘Abbas Ahmad ibn Muhammad, connu sous le nom d’al-Zallaj I, mort le lundi,

Bouteille surahi, département des Arts de l’islam (MAo 2233)

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Acquisitions

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quinzième jour de Sha‘aban de l’année 583 (20 octobre 1187) et en martyr. »

1187 est une année essentielle car elle coïncide avec la tentative des Almohades visant à regagner le terrain perdu en Ifriqiyya (Tunisie actuelle et Constantinois). La mention du martyr à la dernière ligne pourrait inciter à penser que le shaykh en question fit partie des troupes almohades qui se lancèrent à l’assaut de Tunis, mais son nom n’apparaît pas

dans les dictionnaires biographiques de notabilités compilés à l’époque almohade. Elle relève donc de la pure formule. La stèle n’en demeure pas moins un très bel exemple d’inscription kufique à col de cygne, assez archaïsante, alors que des stèles avec un même effet de cadre à la modénature soignée, datant de la même époque, portent des inscriptions en graphie cursive, signe d’un renouveau esthétique intervenu en premier lieu en Orient. La stèle du Louvre appartient à un petit groupe, exclusivement ifriqiyyien, sur lequel une étude complète reste à faire.

s. Makariou

 this reused stela from the Roman era comprises the Ali imran surah (chapter iii of the qur’an) and bears a very beautiful inscription in “swan-neck” Kufic letters, which reads: “in the name of Allah, the compassionate, the Merciful, may Allah bestow His blessing upon Muhammad, his family and his companions, may Allah bless them in every way. every soul will taste death. And ye will be paid on the Day of Resurrection only that which ye have fairly earned. Whoso is removed from the Fire and is made to enter paradise, he indeed is triumphant. the life of this world is but comfort of illusion.” it ends with the name of the deceased and date of death: “this is the tomb of sheikh Abu al-’Abbas Ahmad ibn Muhammad, known by the name of al-Zallaj i, who died in martyrdom on Monday, the 15th day of sha’aban of the year 583 [20 october 1187].”

this addition to the Louvre collections is a unique example of a stela from the Almohad era.

Couvercle d’écritoire à décor de personnagesinde, Deccan ou Bengale (?), xviie siècleivoire sculpté. H. 8,5 cm ; L. 25 cmAchat à Paris, galerie Alexis Renard, novembre 2010Département des Arts de l’islam (MAo 2231)

Cette plaquette d’ivoire est identifiée comme un couvercle d’écritoire, appartenant au même groupe que deux autres conservés à Los Angeles (Lacma). Les coffrets d’ivoire indiens sont dominés par un décor floral ; aussi le décor figuratif de cet élément en fait-il toute la saveur.

Ce très petit groupe a été diversement attribué, au Deccan ou au Bengale. Une base de coffret longitudinal conservé dans

stèle au nom de shaykh Abu al-‘Abbas Ahmad ibn Muhammad, département

des Arts de l’islam (MAo 2230)

couvercle d’écritoire à décor de personnages, département des Arts de l’islam (MAo 2231)

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Vie des collections

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les collections de S. M. Elizabeth II présente la même disposi-tion du décor en quadrilobes, mais seulement chargé de bou-quets floraux. À l’inverse, les couvercles de Los Angeles portent également un décor de personnages, en l’occurrence faisant alterner femmes et hommes. Dans tous les cas, les personnages sont montrés identiquement de profil, assis et tenant dans la main une fleur, ou au poing un perroquet, sans que l’on ait pu se risquer jusqu’à présent à proposer une interprétation convaincante.

s. Makariou

 this ivory plaque has been identified as the lid of a writing-case. it is part of a very small group of such objects (two others are held in Los Angeles), variously attributed to the Deccan plateau or Bengal. the figures are represented in profile; they are seated and are holding a flower or a parrot, but no one has yet ventured a convincing interpretation for this.

Coupe au personnage en trôneiran, vers 1200Pâte siliceuse, décor de barbotine, d’émaux de petit feu, feuille d’or. H. 9,6 cm ; D. 21,1 cm Ancienne collection Parish-Watson, Londres ; achat à Paris, galerie Kevorkian, septembre 2010Département des Arts de l’islam (MAo 2229)

De forme hémisphérique sur piédouche, la pièce présente une belle surface ornementale sur laquelle se déploie la scène centrale. Un prince est assis sur un trône bas (sarir) supporté par des volatiles (détail d’ailleurs peu fréquent) et tient, à hauteur de buste, une coupe, « miroir du monde », classique emblème de souveraineté dans l’Orient du monde islamique médiéval. De part et d’autre des montants du trône se trouvent deux desservants. Ce rondeau est ceint d’une frise de cavaliers

passants qui se détache sur des rinceaux alternés, traités à la barbotine et rehaussés d’or. L’extérieur de la coupe porte, dans un réseau de mandorles, des palmettes et des nœuds pseudo épigraphiques.

L’iconographie est clairement le signe de la qualité du réci-piendaire, lequel n’est pas nommé ici, comme le plus fréquem-ment. Hors un comblement parfaitement délimité dont la réintégration – ancienne – est de belle qualité, la pièce apparaît à l’identique dans la publication de la prestigieuse collection Parish-Watson en 1922. Cette coupe est parfaitement cohé-rente, fait très rare parmi les pièces exécutées suivant la tech-nique dite « haft-rang » ou « Minaï ». Particulièrement appré-ciées des amateurs, la plupart d’entre elles furent en effet l’objet de très lourdes « restaurations ». Rare par la qualité de sa conservation, issue d’une collection prestigieuse, cette coupe présente en outre une iconographie essentielle, qui n’était re-présentée – dans cette production – que par des tessons dans les collections du musée du Louvre. On a voulu y voir une image symbolique du souverain. Il convient cependant de souligner qu’à cette date il n’existe aucune iconographie du « prince en trône » sur les objets de luxe par excellence que sont les objets de métal incrusté. Ce sont les planètes trônantes qui sont alors représentées, en ronde autour du soleil, lui-même en position centrale. On peut supposer qu’au tournant des xiie et xiiie siècles s’opère une mutation iconographique et qu’émerge, à la lumière des élaborations astrologiques, une iconographie du souverain « maître du monde ». L’image symbolique du prince tenant la coupe paraît ici déjà parfaitement consti-tuée ; elle est entourée de deux desservants qui reparaîtront, flanquant le souverain presque invariablement, sur les métaux incrustés du monde iranien, lequel ne tarde pas à s’emparer de ce nouveau thème.

s. Makariou

 in the centre of this hemispherical bowl with a raised foot is represented an enthroned figure, surrounded by attendants. He is holding a cup—the “mirror of the world”—a classic symbol of sovereignty in the medieval islamic world in the east. the scene is enclosed in a frieze of horsemen that stand out from alternating tendrils, enhanced with gold.

it is rare to find a piece in such an excellent state of conservation. it was made using the haftrang (seven-colour) or minai technique, and bears a classical iconography. interpreted as a symbolic representation of the sovereign, the iconography representing “a prince seated on a throne: did not exist; instead they are representations of the planets around a central sun. it is possible that an iconographic transformation occurred at the turn of the twelfth and thirteenth centuries, and that—in the light of developments in astrology—an iconography representing the sovereign as “master of the universe” emerged.

Plumier à décor d’entrelacs signé par Shazi al-naqqashHérat, Afghanistan, vers 1200Alliage cuivreux, décor incrusté d’argent. L. 21,5 cmcollection allemande formée dans les années 1960 à Kaboul ; acquis en vente publique à stuttgart, nagel Auktionen, mars 2010Département des Arts de l’islam (MAo 2228)

Ce plumier porte la très rare signature d’un maître dinandier ou « peintre » (sur métal), comme il se qualifie lui-même par le terme de naqqash. Seules trois œuvres de ce dinandier sont connues, dont l’une, conservée à la Freer Gallery à Washington, coupe au personnage en trône, département des Arts de l’islam (MAo 2229)

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Acquisitions

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permet, grâce à l’identité du commanditaire, de situer son activité autour de 1200. Cet artiste travaillait pour les milieux du pouvoir. La forme particulière de cette écritoire est propre au Khurasan (Iran oriental et actuel Afghanistan). On connaît un objet presque identique dû au même artiste, conservé dans une collection privée au Luxembourg. En outre, il s’agit là d’un rare exemple d’objet indubitablement produit à Hérat, premier centre de création des métaux incrustés dans l’Orient islamique, dont les collections du Louvre ne possédaient jusqu’alors aucun témoignage important. L’objet présente en outre l’avantage d’avoir été conservé en Orient ; il n’a donc subi aucun nettoyage et n’a pas fait l’objet de réincrustation, comme cela fut assez souvent le cas sur des métaux parvenus au xixe siècle en Europe. Dans un simple compartiment, il porte sur la face la signature du maître, ‘Amal Shazi al-naqqash

(œuvre de Shazi, le peintre), en caractères kufiques ornementés d’une boucle sur le ya final de Shazi. Les côtés portent une suite de vœux caractéristiques du Khurasan tandis que la face est ornée d’un rinceau animé de têtes de lapin et de canard, que l’on a parfois analysées comme appartenant à l’iconographie astrologique.

s. Makariou

 this writing-case bears the very rare signature of a master inlayer of whom only three other works are known. its unusual form is characteristic of Khorasan (eastern iran and present-day Afghanistan), and it is a rare example of an object undisputedly fashioned in Herat, the primary centre for the production of inlaid metalwork in the islamic east. the sides bear an inscription of good wishes characteristic of Khorasan. the upper part is adorned with tendrils interwoven with heads of rabbits and ducks, which have sometimes been interpreted as belonging to astrological iconography.

Plumier à décor d’entrelacs signé shazi al-naqqash, département des Arts de l’islam (MAo 2228)

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Vie des collections

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Sculptures

Huit sculptures sont entrées au département en 2010. Ces mouvements s’inscrivent dans les deux axes de la politique d’acquisition : d’une part renforcer la collection des chefs-d’œuvre de l’art français, d’autre part étoffer une collection de sculptures étrangères encore lacunaire, en particulier pour des pays peu représentés, tels l’Espagne ou l’Angleterre.

Le département se doit d’assurer la mise en valeur du patrimoine français en ac-quérant des œuvres représentatives de sculpteurs de premier plan, ou au contraire en faisant entrer au Louvre des sculpteurs provinciaux, ce qui n’a pu être le cas cette année. En revanche, deux belles statuettes en terre cuite confirment l’importance de Guillaume Ier Coustou et de Joseph Chinard. Du premier, la Minerve, pendant du Mars acquis en 2002, est un rare exemple de modèle préparatoire, ici particulière-ment insigne, car destiné au portail de l’hôtel des Invalides. Du second, la Phryné sortant du bain a été l’une des pièces majeures de l’exposition « L’Antiquité rêvée » qui s’est tenue récemment au Louvre.

Le domaine étranger s’est enrichi de quatre nouvelles œuvres. Deux gisants cas-tillans du xve siècle permettent de montrer l’art funéraire de façon spectaculaire, alors que la collection espagnole, assez mince, est principalement religieuse. Cela inaugure la politique transversale d’étude, de présentation et d’acquisition des col-lections espagnoles que met en place Guillaume Kientz, conservateur nouvellement nommé au musée.

Le buste de lord Chesterfield par Roubiliac a été une autre pièce importante de l’exposition « L’Antiquité rêvée ». Cette acquisition représente l’art du portrait, un art majeur en Angleterre, ici incarné par cet artiste d’origine lyonnaise dont le Louvre désirait depuis des années exposer une œuvre.

De même, ce fut une chance de retrouver la très grande Vierge du Maître H. L. – désigné ainsi d’après les initiales qu’il a gravées sur ses estampes –, un maître d’une originalité extraordinaire par la force de ses volumes et la tournoyante composition de ses drapés et de ses chevelures.

G. Bresc-Bautier

 in 2010 the Department acquired eight sculptures as part of the twofold objective of augmenting the number of French masterpieces while expanding the collection of foreign works, which is still lacking in certain categories of sculpture, particularly in examples from otherwise poorly represented countries like spain and england.

the Department is constantly striving to boost the quota of works by major French sculptors, while ensuring that the works of provincial sculptors also enter the Louvre collections, which was not the case in 2010. Recent acquisitions include two fine terracotta statuettes by Guillaume i coustou and Joseph chinard, respectively, along with coustou’s Minerve, a pendant to the Mars acquired in 2002 and a rare example of a preparatory model—in this case superbly crafted—that was created for the sculpture adorning the entrance to the Hôtel des invalides. chinard’s Phryne Emerging from her Bath was one of the most important pieces in the exhibition held at the Louvre, “Antiquité rêvée” (Antiquity Revived).

Meanwhile, the foreign collections were augmented with four new pieces: two fifteenth-century recumbent statues from castile provide a spectacular representation of funerary art—the rest of the spanish collection, which is quite limited, is primarily religious in nature. this has given further impetus to the Louvre’s recent policy of interdepartmental study, presentation, and acquisition on spanish art, to be run by a new curator, Guillaume Kientz.

the Bust of Lord Chesterfield by Roubiliac was another major piece in the “Antiquité rêvée” exhibition. this acquisition is an excellent example of portraiture—which was a major art form in england—spearheaded by this artist who was originally from Lyon, in France; the Louvre had long aimed to exhibit one of Roubiliac’s works.

Likewise, it was also an opportunity to discover the large wood polychrome sculpture of the Virgin Mary by Master H.L.—designated thus from the initials he inscribed in his engravings—a master of extraordinary originality in his three-dimensional handling of the work and the spiralling composition of the drapery and the hair.

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Acquisitions

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Attribuée au Maître H. L. (actif dans le Brisgau, Allemagne, de 1511 à 1526 environ)Vierge à l’Enfant Vers 1520-1525 Bois (tilleul) polychromé. H. 1,53 m ; l. 64 cm ; pr. 28 cmAncienne collection Joseph claer, Mulhouse, 1912-1924. Paris, galerie Mathieu sismann, 2009 ; achat, 2010Département des sculptures (R.F. 2010-01)

Mentionnée en 1914 et 1924 dans la collection Joseph Claer de Mulhouse, mais non localisée depuis, la Vierge à l’Enfant a ressurgi en 2009 dans le commerce d’art parisien et a pu être acquise en janvier 2010. Cette figure de retable, célèbre et admirée dès sa découverte en 1914, a toujours été considé-rée comme une œuvre majeure du Maître H. L., l’un des plus grands artistes du gothique tardif allemand.

Graveur et sculpteur, cet artiste n’est connu que par son mono-gramme H. L. apposé sur ses gravures datées de 1511 à 1522 et sur son chef-d’œuvre, exécuté de 1523 à 1526, le retable de la collégiale de Brisach, en Allemagne, près de Fribourg-en-Bris-gau. Le Maître H. L. est contemporain de Matthias Grünewald et de Hans Baldung Grien, et ses œuvres puissamment expres-sives appartiennent au même monde formel germanique des premières décennies du xvie siècle. L’animation irréelle des dra-pés et des chevelures, la vibration maniériste des formes, l’in-vention de types humains étranges et la fantaisie des détails sont les composantes de son langage virtuose très original, qui exacerbe les valeurs traditionnelles du gothique tardif.

De haute qualité, la Vierge à l’Enfant est parfaitement repré-sentative du style personnel du Maître H. L. Son visage charnu interprète le type féminin de la Vierge couronnée placée au centre du retable de Brisach. Le modelé se fait ici plus insistant, comme sur le visage de saint Jean à la prédelle du même retable. L’opulente chevelure coulant en beaux méandres rappelle aussi les épaisses mèches de plusieurs figures de Brisach. Le magni-fique mouvement courbe de la grosse mèche enroulée qui en-châsse le buste féminin, selon une formule typique de l’artiste, est traité avec un art exceptionnel. Cette vision sensible et char-nelle de la figure humaine trouve d’évidents parallèles dans les œuvres de Baldung Grien sans doute connues du Maître H. L., tel Le Couronnement de la Vierge de Fribourg (1512-1514).

Spécifique du style des gravures et des sculptures du maître, le drapé s’anime d’un enchevêtrement de plis froissés au rythme savamment organisé. À la courbe dessinée par la mèche sur le buste répondent le mouvement du voile plissé et l’envol du pan du manteau, comme si un même souffle emportait cheveux et vêtements dans la même direction, tandis que l’Enfant Jésus s’élance vers le côté opposé. Drapé et attitude évoquent la Vierge à l’Enfant dessinée sur un projet de retable attribué à l’entourage du Maître H. L. (Ulm, Stadtarchiv). Plus dynamique sur notre sculpture, l’Enfant se tourne complètement vers l’extérieur et son pied gauche devait être soutenu par la main droite de sa mère, comme sur une sculpture du musée de Bâle probablement inspirée d’un modèle de H. L. Malgré ses mutilations, le corps grassouillet de l’Enfant peut être aisément rapproché des ange-lots sculptés ou des putti gravés par le Maître H. L.

La Vierge à l’Enfant, bien que peu épaisse, dégage une im-pression d’ampleur et de puissance. Cette plénitude plastique donnée à la figure humaine s’accorde aussi à l’iconographie mariale, qui souligne la prééminence de la Vierge immaculée avec le croissant de lune à ses pieds. Statue grandeur nature, la

Vierge à l’Enfant a été conçue pour être présentée dans la caisse d’un retable d’autel, placée en position centrale et sans doute entourée de figures de saints.

Sculpteur d’exception, qui n’était évoqué dans les musées français que par deux reliefs du musée d’Unterlinden à Colmar attribués à son entourage, le Maître H. L. est désormais repré-senté au Louvre par cette figure mariale, image magistrale du dernier épanouissement de la sculpture gothique tardive alle-mande du Rhin supérieur.

s. Guillot de suduiraut

Bibliographie Münzel (G.), « Der Mutter Anna-Altar im Freiburger Münster und sein

Meister », Freiburger Münsterblätter, 10, 1914, p. 65-66, fig. 11.

Schmitt (O.), Oberrheinische Plastik im ausgehenden Mittelalter, Fribourg-

en-Brisgau, 1924, p. 16, 52, pl. 133.

Attribué au Maître H. L., Vierge à l’Enfant, département des sculptures

(R.F. 2010-01)

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Vie des collections

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Sommer (C.), « Der Meister des Breisacher Hochaltars », Zeitschrift des

deutschen Vereins für Kunstwissenschaft, 3, 1936, p. 263.

Spätgotik am Oberrhein. Meisterwerke der Plastik und des Kunsthandwerks

1450-1530, catalogue de l’exposition (Karlsruhe, Badisches Landes-

museum im Karlsruher Schloß, 1970), Karlsruhe, Icom, 1970, p. 208

(E. Zimmermann).

Krummer-Schroth (I.), « Der Schnitzaltar in Niederrotweil a.K. », Jahr-

buch der Staatlichen Kunstsammlungen in Baden-Württemberg, 8, 1971,

p. 77, 80, 82-83, 88, 90, fig. 18b.

Schindler (H.), Der Meister HL = Hans Loy? Werk und Wiederentdeckung,

Königstein im Taunus, 1981, p. 56-57, fig. 45.

La Vierge à l’Enfant d’Issenheim. Un chef-d’œuvre bâlois de la fin du Moyen

Âge, catalogue de l’exposition (Paris, musée du Louvre, 1998), Paris,

RMN, 1998, p. 89 (S. Guillot de Suduiraut).

Guillot de Suduiraut (S.), « Une Vierge à l’Enfant attribuée au Maître

H. L. est retrouvée », La Revue des musées de France. Revue du Louvre,

2010-3, p. 8-9, fig. 1-3.

 Mentioned in 1914 and 1924 as present in the Joseph claer de Mulhouse collection, but then cited as whereabouts unknown, in 2009 the Virgin and Child resurfaced on the Parisian art market. Greatly admired since its discovery in 1914, this celebrated figure from an altarpiece has always been considered a major work of the so-called Master H.L., one of the finest artists of the late German Gothic period.

An engraver and sculptor, this craftsman is known only by his monogram H.L., inscribed on engravings dating from 1511 to 1522, and on his masterpiece: the retable (1523–26) in the collegiate church in Breisach near Freiburg im Breisgau. the fantastical folds of the drapery and locks of hair, the Mannerist repetition of the forms, the invention of humans with a strange appearance, and the imaginative details, are all components of his very original virtuoso language, which intensified traditional late Gothic values.

this superbly crafted Virgin and Child encapsulates the personal style of Master H.L. the mother’s full features and mane of hair flowing down in beautiful cascades, are reminiscent of several Breisach altarpieces. the drapery’s tangle of crumpled folds, and the child’s plump body is found in many of the Master’s engravings and sculptures.

Joseph Chinard (Lyon, 1756-1813)Phryné sortant du bainVers 1787statuette, terre cuite. H. 71,8 cm ; l. 26,7 cm ; pr. 21,6 cm inscription, estampée dans la terre : cHinARD scuLPteuRLyon, collection M. Villard (avant 1897). 1974, Londres, Heim Gallery ; acheté en 1977 par Arthur M. sackler (1913-1987), puis ses héritiers ; acquis en vente publique à new York, sotheby’s, le 29 janvier 2010, no 512Département des sculptures (R.F. 2010-02)

Joseph Chinard, l’un des artistes favoris du régime impérial, montra au Salon de 1810 une petite rétrospective de son œuvre. Deux sculptures notamment étaient présentées : une « Andro-mède, groupe en plâtre » (no 939) et une « Phriné sortant du bain » (no 945). La première est une version d’une de ses œuvres les plus célèbres, Persée délivrant Andromède, et la seconde peut être identifiée – grâce au sujet – avec la terre cuite du Louvre. Ces deux sculptures ont été conçues par Chinard durant sa jeunesse : le groupe en terre cuite de Persée délivrant Andromède obtint le premier prix au concours Balestra de l’Académie de Saint-Luc à Rome en 1786 ; et Phryné porte le nom de l’artiste, « CHINARD SCULPTEUR », en lettres capitales estampées dans

la terre. L’usage de cette sorte de cachet est attesté sur quelques œuvres. Il est probable que cette pratique du « cachet » a été abandonnée dès le retour en France de Chinard, en 1787, car il semble qu’on ne le retrouve pas sur les œuvres postérieures.

Chinard, après avoir suivi des études à l’école de dessin de Lyon et exécuté quelques travaux dans sa ville natale, fit le voyage d’Italie grâce à la protection d’un amateur, le chevalier de La Font de Juis. Il arriva à Rome en 1784, est cité en 1786 parmi les étudiants de l’Accademia del Nudo du Capitole et obtint cette même année le prix, très convoité, de l’Académie de Saint-Luc. Il retourna en France dès 1787. En dehors du Persée et Andromède, l’activité de Chinard à Rome est connue par des copies d’après l’antique (il en envoya trois au Salon des arts de Lyon en août 1786).

Phryné était une courtisane grecque vivant au ive siècle avant J.-C. Originaire de Thespies, en Béotie, elle se rendit à Athènes après la destruction de la ville par les Thébains. Maîtresse du grand sculpteur Praxitèle, elle aurait servi de modèle pour la Vénus de Cnide et pour deux portraits qu’elle aurait offerts l’un à sa ville natale, l’autre à Delphes. L’une des statues du type de la Vénus de Cnide est la Vénus du Belvédère au Vatican, une œuvre célèbre à Rome depuis la Renaissance, qui figure dans les anthologies gravées les plus répandues (Perrier, 1638 ; Maffei, 1704) et qui a été commentée par Falconet et Mengs. Cette Vénus est pudique, comme celle du Capitole admirée par Winckelmann, mais d’une seule main : la main gauche laisse la poitrine découverte pour tenir une longue draperie ; les deux marbres antiques ont un vase posé à côté des jambes de la déesse.

L’histoire de la courtisane aimée et inspiratrice du sculpteur était bien connue, à l’aune de sa proverbiale beauté. Deux anecdotes la concernant peuvent avoir inspiré notre sculpteur. La première décrit Phryné allant se baigner à Éleusis devant une foule d’admirateurs : l’apparition de sa nudité suscita la création de deux chefs-d’œuvre, la Vénus anadyomène peinte par Apelle et la Vénus de Cnide sculptée par Praxitèle. La se-conde met en scène la courtisane accusée d’impiété et traînée au tribunal de l’Aréopage : le seul aspect de sa nudité, qu’elle dévoila elle-même théâtralement, selon la version donnée par Quintilien, l’innocenta de toute charge, sa beauté hors du commun étant le reflet de la déesse elle-même. Ce dernier épi-sode était le plus connu au xviiie siècle.

C’est le premier récit qui est la source directe de notre sta-tuette en terre cuite. Phryné « sort du bain », comme l’indique le livret du Salon de 1810 ; elle s’apprête à se couvrir de la dra-perie pour s’essuyer, ce que semble suggérer le mouvement des mains. Elle est montrée dans une nudité complète, avec un vase à côté d’elle comme la Vénus de Cnide : Chinard s’est subs-titué en quelque sorte à Praxitèle en sculptant ce grand corps épanoui avec un regard d’amant.

Le sculpteur exhibe la beauté de Phryné dans une représen-tation somptueuse et de grande taille, nous offrant une trans-cription personnelle de sa vision de l’Antiquité. Si l’on com-pare la terre cuite avec le marbre du Belvédère, on remarque que les proportions du canon féminin ne sont pas éloignées : le corps est bien en chair, les hanches et les cuisses larges. Le visage en revanche appartient au monde de Chinard : Phryné est sœur d’Andromède, avec son nez droit et ses cheveux fri-sés. La trouvaille de la composition est bien entendu le grand drapé élégamment frangé que notre héroïne soulève au-des-sus de sa tête, faisant descendre autour d’elle une cascade de

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Acquisitions

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plis. Le revers est coquin : notre Phryné est callipyge et dévoile ses fesses, ce qui nous ramène d’ailleurs (était-ce volontaire de la part de Chinard ?) à une anecdote supplémentaire selon laquelle le postérieur de la Vénus de Cnide suscita une adora-tion passionnée de la part d’un admirateur… Il est piquant de constater que strictement à la même période Houdon conçut un autre chef-d’œuvre callipyge, sa célèbre Frileuse (marbre, Montpellier, musée Fabre) : les deux œuvres cependant sont d’un esprit tout à fait différent. Il est d’ailleurs peu probable que Chinard ait connu la composition de Houdon à l’époque où il exécuta sa Phryné, c’est-à-dire vers 1786-1787, entre la fin de son séjour romain et son retour à Lyon (son premier séjour parisien ne date que de la fin 1795 – janvier 1796).

G. scherf

BibliographieLa Chapelle (S. de), « Catalogue des œuvres de Chinard », Revue du Lyon-

nais, février 1897, p. 143 (« Galatée »).

Finger Prints of the Artist, European Terra-Cotta Sculpture from the

Arthur M. Sackler Collections, catalogue de l’exposition (Washington,

The National Gallery of Art ; New York, The Metropolitan Museum

of Art ; Cambridge, The Fogg Art Museum, 1979-1982), sous la dir.

de Avery (Ch.) et Laing (A.), Cambridge, Harvard University Press,

1981, p. 198-201, no 87, repr. (notice A. Laing).

European Terra-Cotta Sculpture from the Arthur M. Sackler Collections, cata-

logue de l’exposition (New York, The Metropolitan Museum of Art,

1981), sous la dir. de Draper (J. D.), New York, The Metropolitan

Museum of Art, 1981, p. 24-25, no 51, repr.

European Terracotta Sculpture from the Arthur M. Sackler Collections, cata-

logue de l’exposition (Chicago, The Art Institute, 1987-1988), sous la

dir. de Wardropper (I.), Chicago, The Art Institute, 1987 no 23.

L’Esprit créateur, de Pigalle à Canova. Terres cuites européennes 1740-1840,

catalogue de l’exposition (Paris, musée du Louvre ; New York, The

Metropolitan Museum of Art ; Stockholm, Nationalmuseum, 2003-

2004), sous la dir. de Draper (J. D.) et Scherf (G.), Paris, RMN, 2003,

p. 230-232, no 102, repr. (notice J. D. Draper).

L’Antiquité rêvée. Innovations et résistances au xviiie siècle, catalogue de

l’exposition (Paris, musée du Louvre ; Houston, The Museum of

Fine Arts, 2010-2011), sous la dir. de Faroult (G.), Leribault (Ch.)

et Scherf (G.), Paris, Musée du Louvre éditions et Gallimard, 2010,

p. 454, no 154, repr. (notice G. Scherf).

Scherf (G.), dans La Revue des musées de France. Revue du Louvre, 2011-2,

p. 60-61, repr.

 contemporary records show that when chinard presented a retrospective of his work at the salon of 1810, he exhibited a Phryné sortant du bain (Phryne emerging from her Bath), no. 945), which is very likely to be the statuette acquired by the Louvre. the artist’s name is stamped in capital letters in the clay. the use of this kind of stamp has been attested on several works chinard executed before 1787—the year he returned from italy—and does not occur on later works.

Phryne was a Greek courtesan who lived in the fourth century bc. Mistress of the great sculptor Praxiteles, she is believed to have modelled for his Aphrodite of Cnidus. chinard may have been inspired by two anecdotes about Phryne, the first relating how she bathed at eleusis in front of a crowd of admiring onlookers; the second in which the courtesan was accused of contempt of court by disrobing before the judges, who, at the sight of her nude body, were however moved to acquit her, as she was as beautiful as the goddess herself. the Louvre statuette was clearly inspired by the first story: Phryne is emerging from her bath and in the act of drawing a towel around herself. she is naked, and standing next to a vase, like the cnidian Aphrodite: chinard was substituting himself for Praxiteles as the model’s lover when he sculpted her generous and radiant body. the sculptor’s sumptuous representation of Phryne’s beauty offers his own vision of Antiquity.

Deux gisantscastille (région de tolède ?), fin du xve siècleAlbâtre Gisant : H. 37,4 cm ; L. 1,954 m ; l. 65,4 cmGisante : H. 34,3 cm ; L. 1,714 m ; l. 64,8 cmAntiquaire [Raoul] Heilbronner, Paris ; collection William Randolph Hearst, new York ; Joseph Brummer († 1947) ; vente Joseph Brummer collection, new York, Brummer Gallery, Parke-Bernet Galleries, 8-9 juin 1949, nos 646-647 ; achetés par le columbus Museum of Art (ohio), Howald Fund, 1949, et vendus par lui en vente publique ; acquis à cette vente, à new York, christie’s, le 23 novembre 2010, no 473, repr.Département des sculptures (R.F. 2010-12 et R.F. 2010-13)

Les deux gisants sont ceux d’un couple, l’homme étant carac-térisé par un costume de lettré, la femme par la guimpe et

Joseph chinard, Phryné sortant du bain, département des sculptures

(R.F. 2010-02)

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Vie des collections

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le voile des femmes âgées. Tandis que la tête de son épouse repose sur deux coussins superposés, l’homme dispose d’un seul coussin, mais celui-ci est posé sur de grands in-folio. Ce motif des « livres-coussins » plonge ses racines dans l’art sep-tentrional, mais a connu un développement particulier dans les tombeaux de la péninsule Ibérique. Les deux gisants repré-sentent donc un bel exemple de l’ambition des classes aisées dans la Castille de la fin du xve siècle, à la fois par la rareté de leur iconographie et par leur exécution fouillée et puissante.

P.-Y. Le Pogam

Bibliographie Classical and Medieval Stone Sculpture Including Pieces Suitable for Garden

and Patio, Furniture and Works of Art, part III Final of the Joseph Brum-

mer Collection, New York, Parke-Bernet, 1949, Colombus Gallery of

Fine Arts, « Annual report », Bulletin, 20, 1949, p. 7, 13.

Alamo (C. de) et Valdez del Alamo (E.), dans Gothic Sculpture in America.

II. The Museums of the Midwest, sous la dir. de Gillerman (D.), Turn-

hout, Brepols, 2001, no 261, p. 358-361.

Le Pogam (P.-Y.), dans La Revue des musées de France. Revue du Louvre,

2011-2, p. 50, fig. 10, repr.

 the two recumbent statues represent a married couple; the man is dressed as a scholar, and the woman wears the wimple and veil of an old woman. the wife’s head is resting on two superposed cushions, whereas the man has only one cushion, which in turn rests on large folio books. the “book/cushion” motif has its roots in northern art, but was also particularly developed on tombs in the iberian peninsula. the two recumbent statues are a fine illustration of the ambitions of the wealthy classes in castile at the end of the fifteenth century, in terms both of their rare iconography and of their detailed and powerful execution.

Attribué à Matthieu Jacquet (Avon, vers 1545 – Paris, vers 1611)Christ en CroixDébut du xviie siècleMarbre. christ : H. 87 cm ; l. 51 cm ; pr. 12 cm. sur plaque de marbre noir (moderne) : H. totale 1,10 m ; l. 63 cm ; pr. 15 cmVente publique à Paris, hôtel Drouot, dans les années 1930. commerce d’art, tours, 1985 ; collection Guy Ladrière, 1990 ; don de M. Guy Ladrière, 2010Département des sculptures (R.F. 2010-4)

Au dos, une étiquette ancienne : « Christ attribué à Germain Pilon, trouvé dans l’église des Célestins sur la tombe des Ville-roy ». L’œuvre est d’une belle qualité. La provenance n’est pas attestée aux Célestins de Paris. Mais le lien avec la famille de Villeroy est vraisemblable. Matthieu Jacquet était le sculpteur attitré des Villeroy. Il a aussi sculpté un Christ en Croix au tym-pan du tombeau de Jean Baudoin à Péronne (1584), qui a mal-heureusement été endommagé pendant la guerre de 1914-1918.

G. Bresc-Bautier

BibliographieBresc-Bautier (G.), dans La Revue des musées de France. Revue du Louvre,

2011-2, p. 6-7, fig. 4, repr.

 An old label on the back reads: “christ attribué à Germain Pilon, trouvé dans l’église des célestins sur la tombe des Villeroy” (christ attributed to Germain Pilon, found in the church of the celestines on the tomb of the Villeroys). the entire piece is very finely wrought, and although its provenance from the said church of the celestine order in Paris has not been verified, the link with the Villeroys is very probable, given that Matthieu Jacquet was the Villeroy family’s official sculptor. He also sculpted a Christ on the Cross on the tympanum of Jean Baudoin’s tomb in Péronne (1584), which was unfortunately damaged during World War i.

Deux gisants, castille, fin du xve siècle, département des sculptures (R.F. 2010-12 et R.F. 2010-13)

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Acquisitions

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Guillaume Ier Coustou (Lyon, 1677 – Paris, 1746)MinerveVers 1733statuette, terre cuite. H. 58 cm ; l. 40 cm ; pr. 21 cm citée par coustou dans son mémoire de l’exécution du groupe de pierre ; attestée depuis 1974 dans la collection des descendants directs du sculpteur ; acquis par préemption en vente publique à Paris, hôtel Drouot, Brissonneau et Daguerre, le 4 juin 2010, no 22, repr.Département des sculptures (R.F. 2010-07)

Le musée du Louvre a eu la bonne fortune de préempter à l’hôtel Drouot une œuvre dont il exposait le pendant (Mars, acquis en 2002). Les deux sculptures sont les petits modèles pour les statues ornant le grand portail de la façade de l’hôtel des Invalides donnant sur l’esplanade. Elles sont citées dans un mémoire de l’artiste de 1733-1734. Les deux terres cuites sont des pendants exacts : mêmes proportions, même technique de façonnage (revers très évidé), même style empreint du grand classicisme louis-quatorzien. Minerve arbore un animal comme emblème (la chouette), et Mars un loup. Tous les deux, ample-ment casqués, présentent un bouclier et se regardent. L’icono-graphie martiale est évidente à l’entrée d’un bâtiment militaire, et les deux compositions se répondent symétriquement. Cette paire est une image parfaite pour évoquer l’un des monuments parisiens les plus célèbres (les Invalides) et un artiste parmi les plus importants du xviiie siècle, Guillaume Coustou. Les deux

statues en pierre, aujourd’hui remplacées par des copies, ont été gravées. Sur les estampes, Minerve tient une lance. Celle-ci a été brisée sur le modèle en terre cuite à une date inconnue.

G. scherf

BibliographieSouchal (F.), « Les Coustou aux Invalides », Gazette des beaux-arts, 1974,

p. 281, repr.

Souchal (F.), avec la collaboration de La Moureyre (F. de) et Dumuis

(H.), French Sculptors of the 17th and 18th Centuries. The Reign of

Louis XIV, Oxford, Cassirer, 1977, p. 146-148, no 69b.

Souchal (F.), Les Frères Coustou, Nicolas (1658-1733), Guillaume (1677-

1746), et l’évolution de la sculpture française du dôme des Invalides aux

chevaux de Marly, Paris, De Boccard, 1980, pl. 44d, no 69b.

Scherf (G.), dans La Revue des musées de France. Revue du Louvre, 2011-2,

p. 60-61, no 42, repr.

 the Musée du Louvre has recently acquired this Minerva, which is the pendant of a Mars acquired in 2002. Both sculptures are small models of the statues adorning the façade of the Hôtel des invalides that faces the esplanade. the two terracotta pieces are exact pendants, having identical proportions and the same fabrication technique (the backs are hollowed out), and the same style influenced by the grand classicism of Louis XiV. the martial iconography is evident at the entrance to the military building, and both compositions are arranged symmetrically.

Attribué à Matthieu Jacquet, Christ en Croix, département des sculptures

(R.F. 2010-4)

Guillaume ier coustou, Minerve, département des sculptures (R.F. 2010-07)

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Vie des collections

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Louis François Roubiliac (Lyon, 1702 – Londres, 1762)Philip Dormer Stanhope, quatrième comte de Chesterfield (1694-1773)1745Buste, bronze, sur piédouche en marbre, avec ses armoiries en bronze et la devise ADeo et ReGe. H. 48,2 cm (avec le piédouche 63 cm) ; l. 37,5 cm ; pr. 28 cmAncienne collection nathaniel clements. Acquis en vente publique à Londres, sotheby’s, le 14 juillet 2010, no 132Département des sculptures (R.F. 2010-09)

Roubiliac fit toute sa carrière à Londres, où il est documenté dès 1730. Il connut le comte de Chesterfield en 1745. Celui-ci était une personnalité considérable, membre d’une grande famille de l’aristocratie anglaise, homme politique influent du parti whig, plusieurs fois ambassadeur. De juillet 1745 à juillet 1746, il fut chargé du gouvernement de l’Irlande. Intellectuel et éminent francophile – il séjourna plusieurs fois en France et correspondit avec Montesquieu et Voltaire –, il a laissé des lettres à son fils qui sont restées célèbres et respirent l’idéal de vertu morale et de raffinement d’un homme pétri de réfé-rences antiques. Chesterfield en effet portait une admiration sincère aux grands hommes de l’Antiquité : dans une lettre datée du 17 mai 1745, il annonce qu’il vient d’acquérir pour sa bibliothèque un buste de Cicéron. Roubiliac représenta ce haut personnage selon la tradition antique : le visage sévère aux cheveux courts repose sur un buste à la découpe large jusqu’aux épaules, sans aucun vêtement. Le marbre, daté de 1745 (Londres, National Portrait Gallery), porte une inscrip-tion spécifiant que le portrait a été fait « ad vivum ». Trois bronzes ont été exécutés, dont deux ont des provenances irlan-daises : il s’agit de toute évidence de dons faits par Chesterfield à des Irlandais dans le contexte de sa mission sur l’île. Celui du Louvre fit partie de la collection de Nathaniel Clements, responsable de Phoenix Park à Dublin, dont la restauration et l’ouverture au public furent un des grands projets du comte.

G. scherf

BibliographieBaker (M.), « The production and viewing of bronze sculpture in eight-

eenth-century England », La scultura II. Studi in onore di Andrew Cie-

chanowiecki, Antologia di belle arti, nouvelle série, Torino, Umberto

Allemandi, 1996, no 52-55, p. 152-153, fig. 10.

Dawson (A.), Portrait Sculpture. A Catalogue of British Museum Collection

c. 1675-1975, Londres, British Museum Press, 1999, p. 65, note 11,

et p. 68, note 16.

Kennedy (R.), Dublin Castle Art. The Historical and Contemporary Collec-

tion, Dublin, Office of the Public Works, 1999, p. 94.

Bilbey (D.) et Trusted (M.), British Sculpture 1470 to 2000. A Concise

Catalogue of the Collection at the Victoria and Albert Museum, Londres,

V. and A. Publications, 2002, p. 116.

Roscoe (I.), avec Hardy (E.) et Sullivan (M. G.), A Biographical Dictionary

of Sculptors in Britain 1660-1851, New Haven et Londres, Yale Univer-

sity Press, 2009, p. 1067, no 72 (notice M. Baker).

L’Antiquité rêvée. Innovations et résistances au xviiie siècle, catalogue de

l’exposition (Paris, musée du Louvre ; Houston, The Museum of

Fine Arts, 2010-2011), sous la dir. de Faroult (G.), Leribault (Ch.)

et Scherf (G.), Paris, Musée du Louvre éditions et Gallimard, 2010,

p. 398-399, no 132, repr. (notice Guilhem Scherf).

Scherf (G.), dans La Revue des musées de France. Revue du Louvre, 2011-2,

p. 60-61, repr.

 Roubiliac pursued his entire career in London, where he was first documented in 1730. in 1745, he met the earl of chesterfield, an aristocrat and aesthete, who was an influential politician in the Whig party and was appointed ambassador several times. Roubiliac represented this influential figure in the antique manner: the face is severe, the hair cut short, there is no clothing, and the bust has been radically trimmed, tapering from the chest all the way up to the shoulders. the magnificent marble (London, national Portrait Gallery), dating to 1745, bears an inscription that specifies that the portrait was executed ad vivum. this bronze is one of the three busts in the same material given by chesterfield to irish people when he was Governor General of ireland.

Pierre Jean David, dit David d’Angers (Angers, 1788 – Paris, 1856)L’ArchitectureMédaillon, terre cuite recouverte d’un léger engobe non cuit. D. 26,1 cm ; ép. 2 cmsigné et daté : David / 1838Galerie talabardon et Gautier, Paris 2009 ; acquis de la galerie en 2010Département des sculptures (R.F. 2010-06)

Ce « mini-monument » fut exécuté à la mémoire de l’architecte du Louvre, Charles Percier (1764-1838), membre de l’Institut

Louis François Roubiliac, Philip Dormer Stanhope, quatrième comte de Chester-

field (1694-1773), département des sculptures (R.F. 2010-09)

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Acquisitions

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comme David d’Angers lui-même. Il représente une figure de l’Architecture en deuil, coiffée d’une branche de cyprès et re-connaissable au plan dans sa main, au compas et au niveau à ses pieds. Ce médaillon, avec la graphie fautive du prénom « Charle », est bien une première esquisse, émouvante et ins-pirée, exaltée par la technique virtuose du travail de la terre, en particulier dans le traitement des différentes textures et des larges plis du vêtement.

i. Leroy-Jay-Lemaistre

BibliographieLe xixe Siècle, catalogue de l’exposition (Paris, galerie Talabardon &

Gautier, 2009), no 17.

Leroy-Jay-Lemaistre (I.), dans Grande Galerie. Le Journal du Louvre, 13,

septembre-octobre-novembre 2010, p. 80.

 this “mini-monument” was made to commemorate the Louvre’s architect, charles Percier (1764–1838), who—like David d’Angers—was a member of the Royal Academy. it represents a figure of Architecture in mourning, with a cypress branch on her head, distinguished by the plan she is holding, the compass, and the spirit-level lying beside the chair. though an initial version in rough, the medallion (with its inaccurate spelling of the first name “charle”) is actually both moving and inspiring, and evinces a virtuoso skill at working the clay that is particularly evident in the handling of the various textures and the generous folds of the cloth.

David d’Angers, L’Architecture, département des sculptures (R.F. 2010-06)

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Vie des collections

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Objets d’art

L’année 2010 a été surtout marquée par l’entrée d’une œuvre extraordinaire de la fin du Moyen Âge, le dosseret d’un dais en tapisserie à l’emblématique de Charles VII, œuvre classée « trésor national » qui n’aurait pu être acquise sans le soutien enthou-siaste des Amis du Louvre.

Dans le domaine des objets d’art des xviie et xviiie siècles, le département conser-vant essentiellement des exemples de la production d’artistes et artisans français, les achats effectués en vente publique à Londres de rares flambeaux en filigrane et des grands miroirs d’applique du château de Stowe traduisent une volonté nouvelle d’élargir ces collections à d’autres pays européens, en particulier à l’Angleterre.

La section la plus récente du département, celle concernant les arts décoratifs de la première moitié du xixe siècle, a bénéficié elle aussi de beaux achats en vente publique, incluant notamment un morceau de bravoure de l’orfèvrerie néo-Renais-sance, le vase de Goodwood, qui est l’une des toutes dernières commandes du duc d’Orléans.

M. Bascou

 the most noteworthy addition to the Louvre collections in 2010 was an extraordinary tapestry from the end of the Middle Ages: the “dossal” from a royal canopy bearing the emblem of charles Vii, an item classified as a national treasure, whose acquisition was only made possible thanks to the enthusiastic support of the Amis du Louvre (Friends of the Louvre).

Most of the Department’s collection of seventeenth- and eighteenth-century decorative arts consists of works by French artists and craftsmen, so the purchase of rare filigree candlesticks and monumental mirrors from stowe castle in a London public auction illustrate a new policy of broadening the collections to include other european countries, particularly england.

the most recent section in the Department, which covers the decorative arts from the first half of the nineteenth century, also benefited from purchases at public auctions, including the so-called Goodwood Vase, a bravura piece of neo-Renaissance goldsmithing—which was one of the Duke of orléans’ last commissions.

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Acquisitions

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Jacob de Littemont (?)Dais de Charles VIIDeuxième quart du xve siècletapisserie, laine et soie. H. 2,92 m ; l. 2,85 mAcquis à Paris de la maison Machault, en mai 2009Département des objets d’art (oA 12 281)

Grâce à la générosité de la Société des Amis du Louvre, au Fonds du patrimoine et aux fonds d’acquisition propres au musée, le département des Objets d’art s’est enrichi en 2010 d’une tapisserie exceptionnelle, déclarée « trésor national » : un dais ou plus précisément un dosseret, c’est-à-dire la par-tie verticale du dais, qui surmontait un trône de Charles VII. Seul vestige d’un dais royal médiéval, l’œuvre est d’autant plus surprenante qu’elle était jusqu’alors totalement inédite et que l’on ne connaissait ces éléments de mise en scène du pouvoir royal que par les mentions dans les sources écrites, ou par leurs représentations dans des manuscrits enluminés datant de la même époque.

La composition du dais est extrêmement sobre : sur un fond rouge vermeil se détache un grand soleil à douze branches, dont les faisceaux de rayons sont chargés d’une multitude d’astres, tandis que deux anges en vol, vêtus de tuniques fleurdelisées, tiennent une couronne. L’analyse de l’embléma-tique a permis d’assurer la provenance royale de cette œuvre : le soleil d’or sur fond vermeil fit en effet partie des devises adoptées par les rois de France au xve siècle. Si Charles VI – roi de France de 1380 à 1422 – fut le premier à l’utiliser, le style de la tapis-serie, en particulier les plis cassés des aubes des anges, ne correspond pas à l’époque de son règne. En revanche, cette devise caractérise les débuts du règne de son fils Charles VII (1422-1461), dit « le Victorieux », datation qui correspond à l’émergence d’un style nouveau, où perce l’influence flamande.

Lorsque le dais était en place, les deux anges sem-blaient descendre du ciel pour couronner le roi assis sur son trône. Ce dais, affir-mant ainsi l’origine divine du pouvoir de Charles VII, roi de France, face à l’occupation anglaise et aux années encore proches de la régence du duc de Bedford (1422-1435), avait donc une très forte valeur symbolique. Il faut souligner le caractère surnaturel de la présence de ces deux anges, vêtus d’une dalmatique sur leur aube blanche et, fait très

rare, figurés à échelle humaine. Loin d’être des anges « héral-diques », porteurs d’armoiries, ils apparaissent ici comme de véritables acteurs du couronnement, messagers de la grâce divine ; peut-être peut-on y reconnaître les archanges Michel et Gabriel, devenus sous Charles VII les saints protecteurs du roi et du royaume de France.

Le patron de ce véritable manifeste politique fut confié à un artiste au talent exceptionnel, qui allie la rigueur dans la repré-sentation de l’espace à la fantaisie dans la mise en page. Tandis que le soleil et ses rayons donnent sa profondeur à la tapisse-rie, inspirant un sentiment de tourbillon et de rayonnement, les deux anges s’élançant au-dessus du roi s’inscrivent dans une parabole. Le groupe des deux anges, tête en bas, surprend par l’audace de la composition. Les figures des anges offrent aussi une étonnante alliance de contrastes : sobriété et pureté de la ligne dans le dessin des ailes, bouillonnement de formes tumultueuses dans les drapés autour des pieds des anges ou dans la cascade de boucles blondes encadrant leur visage.

L’artiste, au service du roi, connaît l’œuvre de Jan van Eyck, tout particulièrement le retable de l’Agneau mystique (1432, Gand, cathédrale Saint-Bavon), dont l’influence se fait sentir ici. Il partage le goût de Van Eyck pour le rendu de l’éclat des perles et des pierres précieuses, visible ici par la figuration des ombres portées des gemmes sur le bandeau d’or de la couronne,

Dais de charles Vii, vue d’ensemble, département des objets d’art (oA 12 281)

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Vie des collections

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ou l’effet de reflet métallique à l’intérieur de la couronne (cou-ronne dont la partie supérieure avait été découpée et maladroi-tement restaurée à une époque antérieure).

Par l’audace de sa mise en page, son sens du volume, son traitement des visages et des chevelures bouclées, son goût pour les perles et l’orfèvrerie, l’auteur du petit patron et proba-blement du carton de cette tapisserie semble ne pouvoir être que le mystérieux Maître de la verrière de l’Annonciation – nommé ainsi d’après le vitrail offert par Jacques Cœur à la ca-thédrale de Bourges vers 1450. Il est également l’auteur du dé-cor de la chapelle de l’hôtel Jacques-Cœur, malheureusement très repeint au xixe siècle. Louis Grodecki identifia cet artiste avec Jacob de Littemont, peintre de Charles VII, d’origine fla-mande. L’attribution du dais de Charles VII à cet artiste encore mal connu ouvre de passionnantes perspectives. Si, comme semblent l’indiquer les coiffures des anges – leur cercle de tête orné de troches de perles est encore très proche du gothique international –, le dais se situe dans les années 1440, celles de la reconquête du royaume et de l’affirmation du pouvoir de Charles VII, c’est une nouvelle vision de cet artiste, connu d’après les sources écrites seulement à partir des années 1450, que nous propose le dais. Une étude plus approfondie de cette tapisserie, véritable chef-d’œuvre de la peinture médiévale, jet-tera donc un jour nouveau sur ce grand peintre, contemporain de Jean Fouquet (vers 1420 – 1477-1481), et sur l’art au début du règne de Charles VII.

é. Antoine

 in 2010, thanks to the generosity of the société des Amis du Louvre (society of Friends of the Louvre), the Fonds du Patrimoine (French heritage fund), and the Louvre’s own acquisition fund, the Department of Decorative Arts acquired an exceptional tapestry, which has been classified as a national treasure: a canopy, or more specifically the “dosseret”, that is the vertical part of the canopy that surmounted the throne of charles Vii. As the only remnant of a medieval royal canopy, the work is even more exceptional, as, until now, it was completely unknown and information about these components of the presentation of royal power was only available in written descriptions or in representations in contemporary illuminated manuscripts.

on a red vermeil background, over which shines a large golden sun surrounded by a multitude of stars (smaller suns), are two angels in flight, wearing clothes decorated with fleurs-de-lis and holding a gem-encrusted crown. everything indicates that the tapestry was woven for a French king. the motto refers to the beginning of the reign of charles Vii (1422–61), called the “Victorious”.

Given the boldness of the canopy’s design and sense of depth, the treatment of the faces and the curly hair, and the focus on pearls and goldwork, the author of the design, and probably of the tapestry’s cartoon, would appear to be no other than the mysterious Master of the stained-glass window of the Annunciation, identified by the name of Jacob de Littemont, Flemish court painter to charles Vii. the attribution of charles Vii’s canopy to this still relatively unknown artist will provide some fascinating prospects for future study.

Dais de charles Vii, détail d’un des anges, département des objets d’art

(oA 12 281)

Dais de charles Vii, détail d’un des anges, département des objets d’art

(oA 12 281)

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Acquisitions

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Paire de miroirs monumentauxLondres, vers 1759Bois sculpté et doré. H. 2,85 m ; l. 1,31 m collection des comte temple, marquis, puis duc de Buckingham et chandos, jusqu’en 1889 ; collection Morgan-Grenville jusqu’en 1921 ; vente Jackson-stops, 4-28 juillet 1921, lot 2758 ; collection Moss Harris, Londres ; collection particulière, Londres ; acquis en vente publique à Londres, sotheby’s, « treasure Aristocratic Heirlooms », le 6 juillet 2010, no 17, repr. p. 137-139Département des objets d’art (oA 12 318/1-2)

La décoration et l’ameublement de la chambre d’apparat amé-nagée pour Richard Grenville, 2nd Earl Temple, au château de Stowe, comptent parmi les premiers exemples du retour au classicisme en Angleterre dans les années 1759-1760. Deux paires de miroirs d’applique de dimensions monumentales (Louvre et collection particulière) constituaient, avec la che-minée ornée, les principaux éléments de décor fixe accompa-gnant un grand lit doré (Liverpool, Lady Lever Art Gallery). Les miroirs découpés en forme d’écu et sommés d’une console por-tant une urne antique paraissent suspendus à des guirlandes de feuilles de chêne nouées de rubans. Un principe de décor suggérant un effet de broderie et de passementerie appliquées sur l’étoffe murale qui sera repris par Robert Adam dans les grandes demeures qu’il aménage dans les années suivantes.

Ce décor impressionnant est dû à un architecte d’origine piémontaise, Giovanni Battista Bora (1713-1770), qui a voyagé

en Grèce et en Asie Mineure à la recherche des sites antiques. Installé en Angleterre, Bora travaille à Stowe dès 1752. Les or-nements de bois doré en fort relief sont attribués à un artiste français, Jean Antoine Cuenot, lui aussi venu à Londres, où il s’est fait une spécialité de ces sculptures décoratives.

Cette acquisition viendra souligner dans les salles du mobi-lier du xviiie siècle, en cours de rénovation, l’importance des échanges entre les milieux artistiques italien, anglais et fran-çais en pleine réaction néoclassique.

M. Bascou

 the decorations and furnishings in the state bedroom created for Richard Grenville, 2nd earl temple, at stowe, are amongst the first examples of the english classical revival during the period 1759–60. two pairs of monumental wall mirrors and the ornate fireplace were the main components of the fixed decorations that complemented a large gilt bed. these impressive decorations was the work of an architect from Piedmont, Giovanni Battista Borra (1713–70), who, after an archaeological expedition that took him to antique sites in Greece and Asia Minor, settled in england and started working in stowe in 1752. the high-relief gilt wood decorations are attributed to a French artist, Jean-Antoine cuenot, who also settled in London, where he established a reputation for specialising in these decorative carvings.

François Durand (Paris, 1792 – Paris ?, vers 1874), orfèvreD’après Jean-Baptiste Jules Klagmann (Paris, 1810-1867)Prix de courseParis, 1840-1841Argent doré. H. 70 cm ; l. 31 cm ; pr. 25 cm ; poids 10,267 kgsignature sur la base : KLAGMAnn scuLP., DuRAnD oRF. ; sur le socle : MoRtiMeR & Huntcollection charles Gordon Lennox, 5e duc de Richmond (1791-1860) ; vente Londres, sotheby’s, 5-9 juillet 1984, no 299 ; collection Al tajir ; acquis en vente publique à Londres, christie’s, « centuries of style », le 16 novembre 2010, no 327, repr. p. 135Département des objets d’art (oA 12 320)

En 1840, un cheval du duc d’Orléans, grand amateur de courses hippiques, ayant remporté la course de Goodwood, celui-ci s’engage à envoyer un prix pour l’année suivante. Il s’adresse au sculpteur Klagmann, qui est payé trois mille cinq cents francs pour ses modèles en cire et en plâtre, qu’il présen-tera au Salon de 1844 : « un cadre de médaillons contenant deux modèles de médailles et quatre cavaliers provenant d’un vase exécuté pour feu S. A. R. Mgr le duc d’Orléans ». L’exécu-tion est confiée à l’orfèvre François Durand, qui reçoit pour cette tâche huit mille deux cent dix francs, en juillet 1841.

Le 27 juillet 1841, le prix est gagné par le cheval Mus, appartenant au 5e duc de Richmond. Ce dernier demande aux orfèvres londoniens Hunt et Mortimer d’ajouter un socle avec une inscription commémorative et de dorer le vase par élec-trolyse.

Tout le décor de ce vase, de style néo-Renaissance, est consa-cré au cheval. Sur le pied sont assis deux hommes d’armes, tenant un cartouche au chiffre du duc d’Orléans. Sur le corps du vase, deux frises en bas relief montrent le tournoi de Lyon et le carrousel de 1662. En dessous, quatre médaillons ovales illustrent divers types d’équitation : un cheval de race limou-sine monté par un cavalier français, un cavalier arabe au pas, un jockey anglais et un cavalier allemand. Sur chaque face, une grande Victoire ailée en ronde bosse tient une extrémité Miroir monumental, département des objets d’art (oA 12 318/1)

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Vie des collections

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de chacune des anses. Au-dessus de chaque anse, un cheval cabré est retenu par deux pages en costume médiéval.

Ce prix jouit d’une incontestable célébrité dès l’époque de sa création, puisque, annoncé par le journal L’Artiste dès 1840, il fait en 1841 l’objet d’un article du Magasin pittoresque, illustré d’une gravure. Le vase est présenté par Durand à l’Exposition des produits de l’industrie de 1849, puis réexposé à Londres en 1851. Un critique français, Arnoux, s’indigne de retrouver ce vase, auparavant en argent oxydé, entièrement doré. Le vase est également montré à l’exposition artistique « Art Treasures Exhibition » de Manchester en 1857.

A. Dion-tenenbaum

BibliographieUn âge d’or des arts décoratifs, catalogue de l’exposition (Paris, Galeries

nationales du Grand Palais, 1991), no 181.

 the Duke of orléans was passionate about horse-racing, and when one of his horses won the 1840 Goodwood race he decided to submit a prize for the 1841 race. He commissioned the sculptor Klagmann to create the wax and plaster models of the design, and entrusted the goldsmith François Durand with the production of the finished piece. the decorations on this neo-Renaissance style vase are entirely composed of figures and bas-reliefs with an equestrian theme. the vase won by the 5th Duke of Richmond during the races of 27 July 1841 was completed by the London goldsmiths Hunt and Mortimer, who added a gold-electroplated plinth bearing a commemorative inscription.

this prize attracted great attention, and was featured in newspaper articles and displayed in a number of exhibitions.

Crosseronitalie, xive siècleivoire (?) et os polychromés. H. 27 cm ; l. volute 14 cm ; pr. 3 cminscription (Jean, i, 29) : ecce AGnus Dei ecce qui toLLis PeccAtA MunDi Vente cologne chez Lempertz, 6-12 novembre 1974, no 1377 ; collection du Pr Robert courbier (Marseille, † 2010) ; acquis par préemption en vente publique à Paris, hôtel Drouot, Robert & Baille, « succession du Professeur Robert courbier », no 39, repr. p. 60, le 8 octobre 2010Département des objets d’art (oA 12 319)

Le crosseron se présente sous la forme d’un dragon tenant dans sa gueule une volute et portant sur ses deux faces la même ins-cription en lettres d’or rehaussées de noir. La volute s’achève en tête de serpent. Elle comportait à l’origine un décor ajouré au centre, figurant vraisemblablement l’Agneau de Dieu. Des perles de corail ont été insérées à l’emplacement où se trou-vaient des feuillages formant le décor de la crête.

Malgré ces lacunes, la pièce est extrêmement intéressante : elle fait partie d’un groupe d’une vingtaine d’exemplaires connus de crosses en ivoire produites en Italie à l’époque gothique, caractérisées par leur aspect monumental, la richesse de leur décor et la vivacité de leur polychromie. Aucun exem-plaire de ces crosses n’était jusque-là conservé dans les collec-tions publiques françaises.

é. Antoine

François Durand d’après Jean-Baptiste Jules Klagmann, Prix de course, dépar-

tement des objets d’art (oA 12 320)

crosseron, italie, xive siècle, département des objets d’art (oA 12 319)

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Acquisitions

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 the crozier head is in the form of a dragon holding the spiral scroll in its mouth, with the same inscription—in gold letters enhanced with black—on both sides. the spiral scroll terminates in a serpent’s head. originally it had openwork central decorations that probably represented the Agnus Dei. coral pearls have been inserted in place of the decorative leaf work that occupied the crest.

Despite these missing elements, the piece is extremely interesting. it belongs to a group of twenty known examples of ivory croziers produced in italy during the Gothic period, which are distinguished by their monumental appearance, rich decorations, and lively polychromy. until this point, no example of these croziers was held in a state French collection.

Paire de flambeaux Londres, vers 1680Filigrane d’argent. H. 16,5 cm ; l. 12,3 cmAcquis en vente publique à Londres, christie’s, « centuries of style », le 16 novembre 2010, no 408, repr. p. 197Département des objets d’art (oA 12 321/1-2)

L’engouement pour les objets en filigrane d’or ou d’argent at-teint un degré sans précédent à la cour de Louis XIV dans les an-nées 1660-1690. Au printemps de 1665, le roi déploie l’énorme collection de près de huit cents pièces qu’il a assemblée dans un spectaculaire cabinet des Filigranes à Versailles. Ce trésor, réinstallé dans la Petite Galerie et le cabinet des Médailles amé-nagés en 1684-1686, disparaît dans les fontes massives de 1690 et 1709.

Du fait de leur faible poids de métal précieux et de leur struc-ture en résille, les rares objets subsistants ne portent pas, pour la plupart, de poinçons ni de marques d’orfèvre et demeurent anonymes. Cette paire de flambeaux est attribuée à un ate-lier d’orfèvre anglais, mais ce modèle à balustre court et base carrée, souvent associé à des toilettes d’argent ou vermeil, est proche de flambeaux également faits à Paris.

M. Bascou

 the popularity of gold and silver filigree objects reached unprecedented heights in Louis XiV’s court during the period 1660–1690. in the spring of 1665, the King displayed the enormous collection of almost 800 pieces that he had assembled in a spectacular cabinet of filigree work at Versailles. this treasure, which was then installed in the small gallery and the cabinet of medals that were reorganised in 1684–86, disappeared in the widespread meltdowns of 1690 and 1709.

owing to the lightweight precious metals and their net-like structure, the rare surviving objects do not bear hallmarks or goldsmith’s marks, and remain anonymous. this pair of candlesticks has been attributed to an english goldsmith, but the design, with its short baluster stem and square base—often associated with silver or vermeil toilet-sets—is similar to candlesticks that were also produced in Paris.

Paire de flambeaux, département des objets d’art (oA 12 321/1-2)

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Vie des collections

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Éloi Guérin (actif à Paris de 1727 à 1760)Série de six couverts et six couteaux à dessertParis, 1755Vermeil. L. cuiller 19,3 cm ; L. fourchette 18,8 cm ; L. couteau 21 cmDon de M. claude sere, 2010Département des objets d’art (oA 12 316)

Ce bel ensemble de couverts à manches de forme violonée et décor de filets, agrafes et coquilles, porte le poinçon d’un maître orfèvre parisien reconnu dont la production abondante s’étendant sur une trentaine d’années correspond à l’épanouis-sement du style rocaille. Ces couverts garniront une table dressée pour le dessert dans les salles rénovées du mobilier du xviiie siècle, dont la réouverture est prévue pour janvier 2013.

M. Bascou

 this fine set of cutlery with violin-shaped handles and fiddle, thread, and shell pattern, bears the hallmark of a well-known Parisian master goldsmith, whose abundant production extended over thirty years and corresponded to the blossoming of the Rocaille style. these knives, forks, and spoons will eventually adorn a table laid for dessert in the eighteenth-century furniture rooms, which are currently being renovated and are scheduled to reopen in January 2013.

Pierre Antoine Bellangé (Paris, 1758-1827)Paire de chaises 1812Bois sculpté et doré. H. 93 cm ; l. 50 cmAcquis par préemption en vente publique à Paris, hôtel Drouot, étude o. Doutrebente, le 11 juin 2010, no 307, repr. p. 77Département des objets d’art (oA 12 317)

Ces deux chaises sont fournies en 1812 par le tapissier Alexandre Maigret pour la chambre du roi de Rome aux Tuile-ries, au premier étage du pavillon de Marsan. La commande est passée par l’intermédiaire du tapissier, mais l’estampille per-met d’identifier leur véritable auteur, Pierre Antoine Bellangé, connu pour avoir fourni le mobilier du salon d’exercice du roi de Rome aux Tuileries, et pour avoir participé à l’ameublement du palais de Meudon, résidence officielle du petit roi.

A. Dion-tenenbaum

 these two chairs were supplied in 1812 by the upholsterer Alexandre

Maigret for the King of Rome’s (son of napoleon) bedroom at the tuileries,

on the first floor of the Pavillon de Marsan. the commission was made

through the intermediary of the upholsterer, but the stamp identifies the real

author—Pierre-Antoine Bellangé—who was known for having supplied the

furniture for the King of Rome’s salon d’exercice at the tuileries, and for

having contributed to the furnishing of the palace of Meudon, the little

king’s official residence.

éloi Guérin, série de couverts et couteaux à dessert, département des objets d’art (oA 12 316)

Pierre Antoine Bellangé, chaises, département des objets d’art (oA 12 317)

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Acquisitions

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Peintures

L’année 2010 a de fait constitué une année de transition dans le domaine des acqui-sitions, le département des Peintures ayant effectué durant les trois années précé-dentes des acquisitions de chefs-d’œuvre particulièrement importants et onéreux, tels que le Portrait du comte Molé d’Ingres ou Le Reniement de saint Pierre des frères Le Nain – pour ne citer que deux d’entre eux.

Mais, en dépit de ce choix d’une période de pause relative, le département a pu concrétiser en 2010, grâce aux héritiers d’Eudoxe Marcille et à la Société des Amis du Louvre, l’entrée dans les collections de deux natures mortes essentielles de Char-din, une acquisition préparée depuis plusieurs années. Plusieurs dons ou achats en ventes publiques sont venus en outre compléter la « moisson » de l’année 2010.

Le département des Peintures poursuit bien sûr sa quête de tableaux provenant des trois grandes écoles « traditionnelles » – école italienne, école française, écoles flamande et hollandaise – et il a constitué pour cela une liste informelle de possibles « trésors nationaux » ou « biens patrimoniaux majeurs » dont il prépare les acquisi-tions sur le moyen ou le long terme.

Bien évidemment, le comblement des lacunes persistantes au sein de ces écoles demeure plus que jamais d’actualité.

Cependant, le département des Peintures a développé depuis le début du xxe siècle une politique d’acquisition d’œuvres d’écoles moins bien représentées, comme l’école anglaise et l’école espagnole. L’école allemande a quant à elle toujours fait l’objet d’une réelle vigilance dans ce domaine, tandis que les écoles scandinaves ont fait leur entrée au Louvre à partir des années 1980.

Tout en poursuivant, et même en renforçant cette politique d’acquisition, il convient aujourd’hui de s’intéresser également aux écoles d’Amérique du Nord et d’Amérique latine, quasi absentes de nos collections, ainsi qu’aux écoles slaves mo-dernes, qui ont si peu intéressé nos prédécesseurs.

Le maintien de l’équilibre entre les achats effectués pour les trois grandes écoles et ceux orientés vers les écoles encore trop peu ou pas représentées au Louvre condition-nera bien sûr la réussite de la politique d’acquisition du département des Peintures.

V. Pomarède

 in 2010 the Department of Paintings largely suspended its acquisitions in light of the particularly onerous and major works purchased during the previous three years, which included the Portrait du comte Molé by ingres, and Le reniement de Saint-Pierre (st Peter’s Denial), by the Le nain brothers.

However, despite the decision to keep acquisitions to a minimum, thanks to the support of the Amis du Louvre (Friends of the Louvre), in 2010 the Department went ahead with the purchase of two very fine still-lifes by chardin, planned several years ago. the harvest for 2010 furthermore included several donations, and assorted purchases at public auctions.

in a bid to fill the gaps in its collection, the Department of Paintings is constantly looking to acquire works from the three major schools of painting—the italian, French, and the Flemish and Dutch schools—and it has compiled a provisional list of potential national treasures or major heritage property that the Department might purchase in the medium or long term.

in parallel, however, since the early 1900s the Department of Paintings has also pursued a policy of acquiring works of less-represented schools, including the english and spanish, but particularly the German school, whereas works of the scandinavian schools did not begin to enter the Louvre collections until as late as the 1980s.

Alongside this acquisitions policy, the Department is meanwhile taking an interest in the north- and south-American schools, which are virtually absent from our collections, as well as the modern slavic schools, which were largely ignored by our predecessors.

the Department’s principal aim is to keep a balance between acquisitions of works from the three major schools, and smaller acquisitions oriented to the schools that are still not properly represented, or which have so far been overlooked altogether.

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Vie des collections

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Jean Siméon Chardin (Paris, 1699-1779)Les Instruments de la musique civile1767Huile ; composition ovale, autrefois chantournée, transposée sur une toile rectangulaire. H. 1,12 m ; l. 1,44 mPeint pour le château royal de BellevueDon de la société des Amis du Louvre et des descendants d’eudoxe Marcille, 2010Département des Peintures (R.F. 2010-12)

Jean Siméon Chardin (Paris, 1699-1779)Les Instruments de la musique militaire1767Huile ; composition ovale, autrefois chantournée, transposée sur une toile rectangulaire. H. 1,12 m ; l. 1,44 mPeint pour le château royal de BellevueDon de la société des Amis du Louvre et des descendants d’eudoxe Marcille, 2010Département des Peintures (R.F. 2010-13)

Peints en 1767 pour le château royal de Bellevue, commentés avec enthousiasme par Diderot au Salon de la même année, ces célèbres Instruments de musique comptent parmi les ultimes tableaux de Chardin, qui sont également les plus accomplis. Ils

ont été donnés par la Société des Amis du Louvre et les descen-dants d’Eudoxe Marcille.

Établi sur le plateau de Meudon et offrant un point de vue remarquable sur la Seine et Paris, Bellevue, château au-jourd’hui disparu, avait été aménagé par Mme de Pompadour pour y recevoir Louis XV hors des contraintes de la cour. En 1757, sept ans seulement après l’achèvement de la construc-tion, Mme de Pompadour, liquidant quelques-uns de ses biens immobiliers après l’attentat de Damiens, cédait le château à Louis XV, qui y fit aménager des appartements pour ses enfants. Mme de Pompadour ayant emporté dans ses autres résidences les tableaux qu’elle avait commandés pour Bellevue, de nou-velles toiles furent ordonnées par la direction des Bâtiments du Roi pour prendre place dans les lambris sculptés par Jacques Verberckt. C’est à cette occasion que Chardin exécuta les deux natures mortes d’instruments destinées à orner le salon de musique, au rez-de-chaussée de l’édifice. Aujourd’hui tendues sur des châssis rectangulaires, les compositions gardent, sous les cadres à vue ovale du xixe siècle, la trace de leur chantour-nement d’origine.

Les toiles occupaient une position en surplomb au-dessus des portes. Représentés en équilibre sur le bord de tables de pierre, les instruments, douze au total, sont répartis selon deux

Jean siméon chardin, Les Instruments de la musique civile, département des Peintures (R.F. 2010-12)

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Acquisitions

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thématiques : la musique « civile » et la musique « militaire ». Sous ces qualificatifs d’époque, on retrouve, d’après Florence Gétreau, l’opposition entre deux formations, la Musique de la Chambre du Roi et la Musique de la Grande Écurie.

Les musiciens de la Chambre jouaient pour tous les diver-tissements de la cour mais aussi dans l’intimité de la famille royale. Il était donc naturel d’associer au tableau de la mu-sique « civile » le tambourin de Provence, instrument utilisé au xviiie siècle autant à l’Opéra que dans les bals royaux et publics. Chardin a montré le laçage particulier de la peau tendue sur le fût, son « timbre » (corde de boyau qui doit être frappée) et ses habituels rubans décoratifs. Sur la gauche sont disposés une flûte traversière en buis et un pardessus de viole avec son ar-chet. Au centre de la composition, on distingue un tambourin à sonnailles et grelots et une vielle à roue, instrument popu-laire adopté par l’aristocratie et la cour à partir de 1730. La cla-rinette ainsi que le cor, avec ses trois enroulements gainés de tissu vert, avaient fait leur entrée dans les orchestres parisiens à partir de 1762. Ils sont le signe que Chardin était parfaitement informé de l’actualité instrumentale.

Les musiciens de l’Écurie jouaient dans tous les déplace-ments du roi et dans la musique des régiments. Certains cavaliers avaient des timbales. Dans la musique « militaire »,

Chardin en a représenté une paire, sans oublier ni les ba-guettes, ni le cerclage et les vis qui permettaient de tendre les peaux, ni le tablier de soie rouge richement ornementé. Il leur a associé une trompette avec son bandereau à pompons et une paire de cymbales. Le basson et le hautbois contribuaient tou-jours à cette musique d’apparat et de service de guerre. Au pre-mier plan, un étendard bleu et rouge exhibe les armes du roi de France et de Navarre ainsi que la croix du Saint-Esprit, manière pour Chardin de souligner le caractère royal de la commande.

On sent que, chez l’artiste, l’étrange géométrie des formes a déterminé l’agencement des instruments autant que la per-tinence fonctionnelle de leur amoncellement. Des accessoires vivement colorés – tapis de velours rouge, garnitures, rubans roses et bleus, livres de musique reliés de vert (la couleur du roi en ce domaine) – relèvent de leur éclat puissant la tona-lité assourdie des bois, des peaux et des cuivres, tandis que d’autres éléments – partitions, pompons et boutons d’ivoire – apportent la clarté de leur matière.

Au Salon de 1767, les tableaux suscitèrent une nouvelle fois l’admiration de Diderot à l’égard du grand maître de la nature morte : « C’est une vigueur de couleur incroyable, une harmonie générale, un effet piquant et vrai, de belles masses, une magie de faire à désespérer, un ragoût dans l’assortiment

Jean siméon chardin, Les Instruments de la musique militaire, département des Peintures (R.F. 2010-13)

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Vie des collections

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et l’ordonnance. Éloignez-vous, approchez-vous, même illusion, point de confusion, point de symétrie non plus, point de papillotage ; l’œil est toujours récréé, parce qu’il y a calme et repos. »

Œuvres d’intérêt histo-rique, œuvres de délectation, les Instruments de Bellevue présentent un avantage sup-plémentaire : ils ont fait partie depuis le milieu du xixe siècle de la collection des Marcille, redécouvreurs de l’œuvre de Chardin et pos-sesseurs, un temps, du plus bel ensemble jamais réuni de tableaux du maître.

M.-c. sahut

BibliographieRosenberg (P.), Chardin 1699-

1779, catalogue de l’expo-

sition (Paris, Galeries natio-

nales du Grand Palais, 1979),

nos 126-127.

Rosenberg (P.) et Temperini (R.), Chardin, suivi du Catalogue des œuvres,

Paris, 1999, nos 182-183.

Sahut (M.-C.), « Paris, musée du Louvre. Deux chefs-d’œuvre de

Chardin en provenance du château de Bellevue », La Revue des musées

de France. Revue du Louvre, 2010-5, p. 13-15.

Sahut (M.-C.), « Les Instruments de la musique civile et Les Instruments de

la musique militaire de Jean Siméon Chardin. Un don de la Société des

Amis du Louvre et des descendants d’Eudoxe Marcille », Le Tableau

du mois, 173, décembre 2010 – janvier 2011.

 Painted in 1767 for the château of Bellevue, and enthusiastically praised by Diderot at that year’s salon, these famous Instruments de musique (Two Paintings Representing Various Musical Instruments) are some of chardin’s last and finest paintings. the canvases were hung over the music room doors on the ground floor of the chateau that Louis XV had bought from the Marquise de Pompadour. the paintings depict a total of twelve instruments that relate to two royal corps, the Musique de la chambre du Roi (Music of the King’s chamber) and the Musique de la Grande écurie (Music of the Great stable). Represented in the first painting are: a Provençal tambourin (a two-headed drum), a flute, a pardessus de viole, a bell tambourine, a wheel fiddle (hurdy-gurdy), a clarinet, and a horn. the last two instruments were introduced to Parisian orchestras in 1762, demonstrating that chardin was well informed about developments in contemporary instruments.

in the second painting chardin has depicted a pair of kettledrums, a trumpet, and a pair of cymbals. the bassoon and the oboe were still used for ceremonial and military music. in the foreground, a blue and red standard bears the arms of the King of France and navarre and the cross of the Holy spirit, which chardin included to underline the commission’s royal nature.

the Bellevue Instruments are delightful works of great historical interest, and from the mid-nineteenth century they were held in the collection of the Marcilles, who rediscovered chardin’s work after its disappearance and for a while possessed one of the finest collections ever of the master’s paintings.

Attribué à Toussaint Dubreuil (Paris, 1561-1602)Léda et le cygneHuile sur toile. H. 1,50 m ; l. 2,01 mAcquis par préemption en vente publique à Paris, hôtel Drouot, salle 6, étude Boisgirard et associés, le 24 septembre 2010, no 1Département des Peintures (R.F. 2010-16)

L’acquisition de Léda et le cygne, tableau singulier qui porte l’empreinte de l’art bolonais d’un Ludovico Carracci, per-mettra bientôt à cette toile attribuée à Toussaint Dubreuil de rejoindre son pendant Angélique et Médor, donné au Louvre en 1951 par sir Bruce Ingram. L’œuvre est en cours d’examen en vue de sa restauration.

c. scailliérez

 the acquisition of this Leda and the Swan—a unique painting clearly influenced by the Bolognese artist Ludovico carracci—will soon enable it to join its pendant Angelica and Medoro, donated to the Louvre in 1951 by sir Bruce ingram. the work is currently being examined for possible restoration.

Juan Correa de Vivar (Mascaraque, vers 1510 – tolède, 1566)La Visitation La NativitéVers 1530Huile sur bois. H. 1,47 m ; l. 1,175 m (chacun)Acquis par préemption en vente publique à Paris, hôtel Drouot, salle 6, étude Boisgirard et associés, le 24 septembre 2010, no 4Département des Peintures (R.F. 2010-17 et R.F. 2010-18)

Formé auprès de Juan de Borgoña, Juan Correa de Vivar fut la figure dominante de la peinture à Tolède au milieu du

Attribué à toussaint Dubreuil, Léda et le cygne, département des Peintures (R.F. 2010-16)

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Acquisitions

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xvie siècle. Nourries de l’italianisme que son maître († 1536) introduisit en Nouvelle-Castille, La Visitation et La Nativité ap-partiennent aux débuts de sa carrière. Les deux panneaux pro-viendraient, selon Isabel Mateo Gomez, d’un retable monu-mental de Salamanque, dont elle rapproche une Annonciation et une Adoration des Mages. Les formules utilisées par l’artiste dans les deux compositions du Louvre lui servirent quelques années plus tard dans le Triptyque de la Nativité du Prado, amor-çant par là même son évolution vers un romanisme plus froid, plus nerveux. Artiste important du xvie siècle espagnol, Juan Correa de Vivar était absent des collections publiques, si l’on excepte une Agonie au mont des Oliviers (Bordeaux, cathédrale Saint-Jean) qui lui est parfois attribuée.

G. Kientz

 Juan correa de Vivar was trained by Juan de Borgoña, and was mid-sixteenth-century toledo’s most important painter. He was greatly influenced by the italianate style his master (d.1536) introduced to new castile, and he painted The Visitation and The Adoration of the Shepherds early in his career. According to isabel Mateo Gomez, both panels come from a painted altarpiece in salamanca, which also displayed an Annunciation and an Adoration of the Magi. the formulas used by the artist in the two Louvre compositions were reused by him several years later in the Prado’s Nativity Triptych, with which he began his development towards a colder, more vigorous Romanism. Although Juan correa de Vivar was a major sixteenth-century spanish artist, none of his work was held in French public collections, with the possible exception of an Agony in the Garden (cathedral of st-Jean, Bordeaux) which is sometimes attributed to him.

Juste d’Egmont (Leyde, 1601 – Anvers, 1674) Louis XIII accueillant le Dauphin et sa nourrice au palais de Saint-Germain-en-Laye Huile sur bois. H. 27 cm ; l. 37 cmMarque M B (Melchior de Bouts) au revers du panneauAcquis par préemption en vente publique à Paris, hôtel Drouot, salle 10, étude David Kahn, Kahn-Dumousset, le 27 octobre 2010, no 41, repr. coul. : « Jean de saint-igny (vers 1595/1600-1647) (attribué à). Louis Xiii accueillant la reine Anne d’Autriche et le Dauphin de France Louis dans le parc »Département des Peintures (R.F. 2010-19)

Ce petit panneau, où le futur Louis XIV, né en 1638, semble âgé de trois à cinq ans, a été gravé en sens inverse par François de Poilly sous le titre Le Matin. C’est la première planche d’une série de quatre Heures du jour publiée chez Montcornet et figu-rant la vie quotidienne de la famille royale. Le nom du peintre n’y figure pas, mais le tableau appartient à un groupe d’œuvres autrefois données à Jean de Saint-Igny, et rendues depuis à Juste d’Egmont. Ce collaborateur de Rubens l’accompagna en 1625 pour installer la galerie de Médicis à Paris, ville où il se fixa de 1628 à 1653. Portraitiste de la famille royale, il fut membre fon-dateur de l’Académie de peinture en 1648.

s. Laveissière

 this small panel, in which the future King Louis XiV, born in 1638, appears to be three to five years old, was etched in reverse by François de Poilly and given the title Le Matin. it is the first panel of a series of four Heures du jour (Times of the Day) published by Montcornet that depicted the daily life of the royal family. Although the painting is not signed, it belongs among a group of works once attributed to Jean de saint-igny, and since reattributed to Juste d’egmont. As one of Rubens’s collaborators, d’egmont joined the

Juan correa de Vivar, La Visitation, département des Peintures (R.F. 2010-17) Juan correa de Vivar, La Nativité, département des Peintures (R.F. 2010-18)

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Vie des collections

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master in 1625 to finalise the project for the Galerie de Médicis in Paris, the city where he settled from 1628 to 1653. As portraitist to the royal family, he was a founding member of the Paris Académie de Peinture in 1648.

Francisque Millet (Anvers, 1642 – Paris, 1679) Paysage avec Mercure découvrant Hersé au retour d’une fête de MinerveHuile sur toile. H. 75 cm ; l. 1,20 mDon sous réserve d’usufruit de M. Antoine BéalDépartement des Peintures (R.F. 2010-1)

Grand paysagiste français, et actif en France au contraire de Poussin, du Lorrain et de Dughet, Millet n’était repré-senté au Louvre que par des œuvres mineures. La généro-sité de M. Béal permet, une nouvelle fois, de combler cette lacune avec une toile prestigieuse, dans la lignée

Juste d’egmont, Louis XIII accueillant le Dauphin et sa nourrice au palais de Saint-Germain-en-Laye, département des

Peintures (R.F. 2010-19)

Francisque Millet, Paysage avec Mercure découvrant Hersé au retour d’une fête de Minerve, département des Peintures (R.F. 2010-1)

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Acquisitions

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des paysages classiques de Poussin, et, comme nombre de ceux-ci, conservée pendant longtemps en Angleterre.

s. Laveissière

 Millet was an important French landscape artist who worked mainly in France (unlike Poussin, Lorrain, and Dughet), and previously the Louvre held only some of his minor works. M. Béal’s generosity has enabled the Louvre once again to rectify the situation with this prestigious canvas in the tradition of Poussin’s classical landscapes, which—like many of the latter’s works—remained in england for many years.

Félix Thomas (nantes, 1815-1875)La Visite du pacha de Mossoul aux fouilles de Khorsabad (1853)Huile sur toile. H. 1,00 m ; l. 1,60 mexposé au salon de 1863, no 1791. Réapparu sur le marché de l’art parisien en 1989 ; acheté par un collectionneur privé ; acquis de la galerie Poligono de Marbella, 2010Département des Peintures (R.F. 2010-2)

Le site de Khorsabad (Irak), ancienne Dur Sharrukên, capitale fondée à la fin du viiie siècle avant J.-C. par le roi assyrien Sar-gon II, a été exploré entre 1843 et 1855 par les consuls de France à Mossoul, Paul Émile Botta, puis Victor Place. Ces fouilles sont à l’origine de la création au Louvre du premier musée assyrien au monde et de fait du département des Antiquités orientales. Ce tableau montre le dégagement d’une des portes de l’en-ceinte de la ville au moment où émergent les têtes des taureaux androcéphales ailés. Un arc en briques à glaçure surmonte la voûte. Félix Thomas, architecte, a travaillé à Khorsabad en 1853

pour lever les plans des monuments découverts par Victor Place. Il est l’auteur des planches de la publication Ninive et l’Assyrie, dont l’une est reprise sur ce tableau. Le taureau de droite ainsi que le génie que l’on aperçoit dans le passage à gauche sont aujourd’hui exposés au Louvre. La fantasia de cavaliers permet d’identifier cette toile avec la peinture intitulée La Visite du pa-cha de Mossoul aux fouilles de Khorsabad, ancienne Ninive, exposée au Salon de 1863 (no 1791). La date qui figure dans l’inscription, « Khorsabad (Ninive) / Félix Thomas / 1853 », n’est pas celle de l’exécution du tableau, mais celle de l’événement représenté.

é. Fontan

BibliographieFontan (É.), « Félix Thomas, l’architecte providentiel », dans De Khor-

sabad à Paris. La découverte des Assyriens, catalogue de l’exposition

(Paris, musée du Louvre, département des Antiquités orientales,

1994), sous la dir de Fontan (É.), avec la collaboration de Cheva-

lier (N.), p. 102-115 (repr. fig. 3 p. 109)

Fontan (É.), « Le musée assyrien. Une galerie unique au monde », Grande

Galerie. Le Journal du Louvre, 14, décembre 2010 – février 2011, p. 78-

89 (en particulier p. 88-89).

 this painting shows the excavation of one of the city gates and the newly uncovered heads of the androcephalic winged bulls. the architect Félix thomas worked at Khorsabad in 1853, and produced drawings of the monuments discovered by Victor Place. the fantasia of cavaliers identifies it as the work entitled La visite du Pacha de Mossoul aux fouilles de Khorsabad, ancienne Ninive (the Pasha of Mosul’s Visit to the Khorsabad excavations, Ancient nineveh), exhibited at the salon of 1863 (no. 1791). the bull on the right, and the genie visible on the left in the passage, are currently on display in the Louvre.

Félix thomas, La Visite du pacha de Mossoul aux fouilles de Khorsabad, département des Peintures (R.F. 2010-2)

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Vie des collections

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Arts graphiques

Le département poursuit une politique d’enrichissement des collections selon dif-férents axes. Il cherche à compléter le panorama de l’école française par l’acquisi-tion – par achat ou don – de feuilles caractéristiques de certaines périodes ou de certains maîtres faiblement représentés (dessins du xvie siècle hormis l’école de Fontainebleau ; maîtres jadis considérés comme « mineurs », principalement de la période 1780-1850). En 2010, des dessins de Louis Gauffier, Alexandre Isidore Leroy de Barde, Savinien Petit sont ainsi venus enrichir les portefeuilles. Concernant les écoles étrangères, la politique d’acquisition privilégie les écoles jusqu’ici peu ou pas représentées, comme le sont les écoles scandinave, anglaise (Richard Westall, L’Enfant Jésus chassant les dieux de l’Égypte), américaine, allemande après 1600 (Cas-par Wolf, Cascade dans la montagne ; Wilhelm von Kaulbach, Scène maritime), belge (œuvres de Henri van der Haert et Eugène van Maldeghem) et espagnole (Paysage, d’Eugenio Lucas). Plus ponctuellement, les acquisitions peuvent concerner des œuvres importantes dans le contexte du musée (Percier et Fontaine, Élévation géomé-trale d’un projet d’arc de triomphe ; Fontaine, Entrée triomphale sous l’arc du Carrousel ; Léon Cogniet, Jeune dessinateur et un Égyptien assis), ainsi que des renforcements de la Chalcographie (cuivres de Maleuvre, Demarne, Naudin et Leroy).

Le département cherche également à acquérir, dans la mesure du possible, des pièces considérées comme de haute importance patrimoniale, indépendamment des écoles et des époques. Ainsi, un dessin de Primatice, Diane et Actéon, est venu enrichir les collections, ainsi qu’une feuille de Théodore Géricault (Diane chasse-resse ; Deux chevaux) et le magnifique Taches-planètes de Victor Hugo. Par dation, La Jeunesse et la Vertu présentant deux princesses à la France de Charles Natoire est entré dans les collections. Un don par l’intermédiaire des Amis du Louvre a fait entrer la Pietà copiée par Edgar Degas d’après Rosso.

Pour la Chalcographie du Louvre, la politique de commande d’œuvres contempo-raines est poursuivie, avec une commande annuelle à trois artistes différents.

c. van tuyll van serooskerken

 the Department of Graphic Arts pursues an active policy of enriching its collections in different areas. it aims to complete the panorama of the French school and acquire—through purchases or donations—drawings that characterise certain periods, or masters who are at present poorly represented (sixteenth-century drawings, other than the school of Fontainebleau; and masters previously considered as “minor”, mainly from the period 1780–1850). in 2010, drawings by Louis Gauffier, Alexandre-isidore Leroy de Barde, and savinien Petit were added to the portfolios. As far as the foreign schools are concerned, the acquisition policy prioritises schools which, until now, have not been well represented: the scandinavian, english (Richard Westall, The Infant Jesus Chasing the Idols), American, post-1600 Germanic (caspar Wolf, Mountain Waterfall; Wilhem von Kaulbach, Seascape), Belgian (works by Henri van der Haert and eugène van Maldeghem), and spanish schools (Landscape by eugenio Lucas). occasionally, the acquisitions may relate to works that have a special significance for the Museum: Percier and Fontaine, The Arc de triomphe du Carrousel; Léon cogniet, Young man drawing and seated Egyptian, as well as additions to the chalcography (engraved copper plates by Maleuvre, Demarne, naudin, and Leroy).

the Department is always interested in acquiring—wherever possible—pieces considered to be of great cultural importance, quite independently of schools or periods. Hence, a drawing by Primaticcio, Diana and Actaeon, was added to the collections, as well as a sheet by théodore Géricault, Diana the Huntress/Study of Horses), and the magnificent Taches-planètes by Victor Hugo. charles natoire’s Youth and Virtue presenting two princesses to France entered the collections by “payment in kind”. A donation through the intermediary of the Amis du Louvre enabled the addition of edgar Degas’s Pietà, a copy after Rosso.

the Louvre’s chalcography pursues its policy of acquiring contemporary works by means of an annual commission to three different artists.

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Acquisitions

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Charles Joseph Natoire (nîmes, 1700 – castel Gandolfo, 1777)La Jeunesse et la Vertu présentant deux princesses à la FrancePierre noire, aquarelle, sanguine, rehauts de gouache blanche, sur papier bleu vergé. H. 29,9 cm ; l. 33,1 cmJean Denis Lempereur (L. 1740) ; sa vente, Paris, 24 mai 1773, no 572 ; adjugé 78 livres. collection particulière, Paris. Dation au musée du Louvre 8 avril 2010Département des Arts graphiques (R.F. 54 774)

Le dessin a été découvert et publié par Pierre Rosenberg (« Deux dessins pour Versailles », Antologia di belle arti, 1991-1992, nos 39-42, p. 126-128). Il prépare un dessus-de-porte que Natoire a exécuté en 1734 pour orner la chambre à coucher de la reine Marie Leszczynska à Versailles. La personnification de la France, cuirassée et empanachée, cou-verte d’un manteau d’hermine, un bouclier fleurdelisé à ses côtés, accueille à bras ou-verts deux petites filles, qu’il faut identifier comme les dernières-nées du couple royal, Marie-Adélaïde, née en 1732, et Victoire, née en 1733. Victoire est présentée par une jeune femme couronnée d’or, richement vêtue, qui répond à la description de la Jeu-nesse donnée par Cesare Ripa dans l’édition italienne de sa célèbre Iconologia (Rome, 1593, p. 104). Si Ripa lui attribue une branche d’amandier fleurie, gage des fruits à venir, le dessina-teur, Charles Joseph Natoire, a judicieusement placé ce rameau entre les mains de l’enfant, tandis que des fleurs ornent la che-velure de l’aînée et la gorge de la Jeunesse. À l’arrière-plan à droite, une femme ailée, un soleil sur la poitrine, tenant une lance, s’apparente à l’une des Vertus décrites et illustrées dans les éditions italiennes et françaises de Ripa. Toutefois, Natoire a omis de lui confier une couronne de laurier, eu égard sans doute au jeune âge des enfants, et placé la lance dans la main gauche de la Vertu, et non dans la droite, afin de mieux équi-librer sa composition.

Le tableau exécuté par Natoire d’après ce dessin fait pendant à une toile commandée à Jean François de Troy, où la Gloire des princes s’empare du Dauphin, né en 1729, et de ses deux sœurs aînées, Louise Élisabeth et Anne Henriette, nées en 1727. C’est donc l’ensemble des enfants vivants du couple royal qui sont glorifiés dans la chambre de la reine. Signés et datés de 1734, les deux tableaux ont dû être exécutés avant le 27 juillet 1734, jour de naissance de Sophie, Madame Cinquième. Ils furent payés mille huit cents livres à leurs auteurs l’année suivante. Le dessin de Natoire figura à la vente de Jean Denis Lempereur en 1773, où il fut vendu pour la somme élevée de soixante-dix-huit livres, puis à celle de l’architecte Debesse en 1786.

Outre ce dessin d’ensemble, on connaît deux études de figures, l’une pour la France (galerie Artesepia, 2007 ; au-jourd’hui Paris, collection particulière), l’autre pour la Jeunesse et la Vertu (Moscou, musée Pouchkine).

B. Gady

 this is a preparatory drawing executed by natoire in 1734 for a painting that was hung over a door in queen Marie Leszczynska’s bedroom at Versailles. the painting natoire based on this drawing is a pendant to the canvas commissioned from Jean-François de troy. the two pictures were painted in honour of all of the royal couple’s living children. signed and dated in 1734, both paintings must have been completed before 27 July 1734, the birth of sophie, “Madame cinquième”. Apart from this composition drawing, two figure studies exist, one for the figure of France (private collection, Paris), the other for Youth and Virtue (Pushkin Museum, Moscow).

Victor Marie Hugo (Besançon, 1802 – Paris, 1885)Taches-planètesPlume et encre brune, lavis brun, sur papier brun clair marouflé sur toile et monté sur châssis. H. 45 cm ; l. 58,5 cmGeorges Hugo. Valentine Hugo ; don à Georges et Janine Herscher, 1964. collection particulière, Paris ; acquis en vente publique à Paris, christie’s, le 23 juillet 2010, no 170Département des Arts graphiques (R.F. 54 787)

Un petit groupe de dessins de Hugo, à première vue confinant à l’abstraction, dont une autre Taches-planètes de la collection Granville à Dijon, a d’abord été daté de la période de l’exil, avant que Marie-Laure Prévost ne fasse observer (Victor Hugo. Du chaos dans le pinceau, catalogue de l’exposition, Madrid, Museo Thyssen-Bornemisza, et Paris, Maison de Victor Hugo, 2000-2001, no 235, repr. coul.) que le papier de support était semblable à celui utilisé par Hugo lorsqu’il avait aménagé un atelier de fortune dans l’appartement de sa maîtresse, Juliette Drouet, au cours du second semestre de 1850, alors qu’il n’écri-

charles Joseph natoire, La Jeunesse et la Vertu présentant deux princesses à la France, département des

Arts graphiques (R.F. 54 774)

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Vie des collections

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vait pratiquement plus, mais se consacrait à la création de des-sins de grandes dimensions, comme La Salière ou le fameux Burg à la Croix. Utilisant les procédés qu’il aime entremêler (coulures, applications de papiers découpés ou encore de po-choirs), le dessinateur semble ici transcrire l’une des rêveries métaphysiques du poète, en une sorte de compte rendu cos-mique qui se poursuivra, et dont l’expression ira s’accentuant pendant l’exil dans les îles Anglo-Normandes (1852-1870). C’est sans doute le grand charme de cette vision démiurgique que de laisser ici sa place au hasard des épanchements de lavis brun, au sein desquels deux planètes, l’une sombre et l’autre claire, émergent, tels des points de repère dans l’infini.

L.-A. Prat

 A small group of Hugo’s drawings, which at first sight border on abstraction, date to the second half of 1850, when he had practically stopped writing. in these drawings the draughtsman enjoyed combining different techniques, such as leaving inks to run and applying cut papers and stencils, to render what might be described as one of the poet’s metaphysical dreams.

Francesco Primaticcio, dit Primatice (Bologne, 1503 – Paris ou Fontainebleau, 1570)Diane et Actéon1548Plume et encre brune, rehauts et repentirs à la gouache blanche, en partie oxydés. H. 53,6 cm ; l. 39 cmJean François Gigoux (1806-1894), sa marque (L. 1164), sa vente Paris, hôtel Drouot, salle 5, 20-23 mars 1882, no 135, p. 38 (Primaticcio Francesco, Diane et ses nymphes surprises par Actéon, plume et sépia). collection privée, France. s. V. V. nordmann ; acquis par préemption en vente publique à Paris, hôtel Drouot, étude Ader, le 7 décembre 2010, no 7Département des Arts graphiques (R.F. 54 794)

Cette grande feuille apporte un témoignage nouveau sur l’activité de Primatice comme cartonnier de vitraux pour le château d’Anet. En 1548, la grande salle du château de Diane de Poitiers fut ornée de « fenêtres peintes » exécutées en grisaille par le peintre-ver-rier Nicolas Beaurain. Dépo-sés au xviiie siècle, ces vitraux ne peuvent être connus que par les dessins préparatoires de la main de Primatice, dont un petit groupe subsiste. La série traite de l’histoire de Diane d’après les Métamor-phoses d’Ovide.

D. cordellier

 this large sheet provides fresh evidence of Primaticcio’s activity as the draughtsman of the cartoons for the stained-glass windows in the château of Anet. in 1548, the great hall in Diane de Poitiers’ château was adorned with grisaille “painted windows” by the stained-glass artist

Victor Marie Hugo, Taches-planètes, département des Arts graphiques (R.F. 54 787)

Francesco Primaticcio, dit Primatice, Diane et Actéon, département des Arts

graphiques (R.F. 54 794)

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Acquisitions

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nicolas Beaurain. Removed in the eighteenth century, the only available information about these stained-glass windows is provided by Primaticcio’s preparatory drawings, of which there remains a small group. this series depicts the story of Diana according to ovid’s Metamorphoses.

Anonyme français Le Portement de CroixVers 1600-1620Plume et encre brune, lavis gris, rehauts de blanc. H. 29 cm ; l. 19,3 cminscription plume et encre brune : 1686 et paraphe de Dezallier d’Argenville. inscription illisible dans l’architecture, à la plume et encre rouge. inscription au centre : P. Champagne l’oncleAntoine Joseph Dezallier d’Argenville ; vente à Paris, christie’s ?Lise Bicart-sée (marque en bas à droite) ; don au musée du Louvre ; commission des acquisitions du 4 février 2010 ; décision du 4 février 2010Département des Arts graphiques (R.F. 54 770)

Passé en vente publique à Paris comme une œuvre française du début du xviie siècle, et récemment donné au Louvre par Mme Lise Bicart-Sée, ce dessin provient du célèbre amateur A. J. Dezallier d’Argenville (1680-1765). Il porte une inscrip-tion ancienne qui le donne à Philippe de Champaigne, attri-bution qui n’a pas d’autre fondement que la technique de lavis gris souvent utilisée par Champaigne. C’est plutôt dans la suite

d’Antoine Caron que s’inscrit cette feuille, que l’on peut pro-poser de dater vers 1600-1620.

D. cordellier

 Presented in a public auction in Paris as a French work from the beginning of the seventeenth century, and recently donated to the Louvre by Mme Lise Bicart-sée, the drawing was at one time owned by the famous collector A.-J. Dezallier d’Argenville (1680–1765). it bears an ancient inscription ascribing the work to Philippe de champaigne, an attribution that seems based on the fact that the grey-wash technique was often used by champaigne. the sheet is more logically attributable to the period that immediately followed Antoine caron’s death, and is likely to date to 1600–20.

Attribué à Louis Testelin Soldats dans un intérieur (Corps de garde)Vers 1640-1650Pierre noire, lavis orange. H. 24,7 cm ; l. 35,9 cmMarquet de Vasselot (marque L. 2499, effacée). Lise Bicart-sée (marque en bas à droite) ; don au musée du Louvre ; commission des acquisitions du 4 février 2010 ; décision du 4 février 2010Département des Arts graphiques (R.F. 54 771)

Ce retour de garde dans un intérieur rustique évoque la gra-vure de genre hollandaise tout autant que son pendant fran-çais, la scène de genre facétieuse et bouffonne qui se répand dans les années 1630-1650. L’analyse des vêtements conforte cette datation, mais ne permet pas de mieux situer géographi-quement le dessin. Pierre Rosenberg et Louis-Antoine Prat ont proposé indépendamment et prudemment une attribution à Louis Testelin, l’un des fondateurs de l’Académie royale de peinture et de sculpture.

B. Gady

 this scene of guards on duty in a rustic interior evokes both Dutch genre etchings and their French equivalent—the facetious and farcical genre works that developed during the period 1630–50. the analysis of the clothing supports the attribution to this period, although it does not shed any light on the drawing’s geographical location. Pierre Rosenberg and Louis-Antoine Prat have independently and cautiously suggested an attribution to Louis testelin, one of the founders of the Académie Royale de Peinture et de sculpture.

Anonyme français, Le Portement de Croix, département des Arts graphiques

(R.F. 54 770)

Attribué à Louis testelin, Soldats dans un intérieur, département des Arts

graphiques (R.F. 54 771)

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Vie des collections

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Louis Gauffier (Poitiers, 1762 – Florence, 1801)L’Apparition des anges à Abraham1793Pierre noire, encre et lavis brun, rehauts de blanc. H. 26 cm ; l. 34 cmAcquis en vente publique à new York, sotheby’s, le 27 janvier 2010, no 110Département des Arts graphiques (R.F. 54 769)

Grand Prix en 1784, Louis Gauffier ne revint de son séjour romain qu’en 1789 pour quelques mois : confronté aux débuts de la Révolution, il choisit de retourner en Italie. D’abord établi à Rome, il s’installa à Florence à partir de 1793, où il fréquenta le milieu anglophile et contre-révolutionnaire. Caractéristique de son style élégant, voire précieux, cette feuille prépare, avec diverses variantes, une toile située et datée « Romae 1793 », conservée au château de Fontainebleau.

ch. Leribault

 Winner of the Grand Prix in 1784, Louis Gauffier briefly returned from his Roman sojourn in 1789 for several months: this coincided with the beginning of the French Revolution, so he decided to return to italy. He initially lived in Rome and then settled in Florence in 1793, where he moved in counter-revolutionary and Anglophone circles. characteristic of his elegant—even precious—style, this sheet was a preparation (with various differences) for a canvas located and dated as Romae 1793, which is held in the château of Fontainebleau.

Michel François Dandré-Bardon (Aix-en-Provence, 1700 – Paris, 1783)Académie d’hommesanguine. H. 28,1 cm ; l. 40,1 cmnicolas schwed ; don au musée du Louvre ; commission du 10 novembre 2010Département des Arts graphiques (R.F. 54 792)

Dessinateur, graveur, peintre, théoricien, poète à ses heures, Dandré-Bardon est un artiste original qui forme avec Boucher, Natoire ou Bouchardon la « génération de 1700 ». Si l’étude du modèle vivant correspond à l’exercice académique par excel-lence et, à ce titre, a retenu l’attention de tous les peintres d’his-toire des xviie et xviiie siècles, Dandré-Bardon lui a néanmoins

accordé un intérêt tout particulier. Cette belle académie permet de rendre justice au talent et au rôle pédagogique de l’artiste.

B. Gady

 A draughtsman, engraver, painter, theoretician, and poet in his spare time, Dandré-Bardon was an original artist, who, with Boucher, natoire, and Bouchardon, was part of the “génération de 1700”. While life drawing was the academic exercise par excellence and consequently practised by all the seventeenth- and eighteenth-century history painters, Dandré-Bardon was particularly interested in mastering this skill. this fine académie does justice to the artist’s talent and to his pedagogical role.

Alexandre Isidore Leroy de Barde (Montreuil-sur-Mer, 1777 – Paris, 1828)Nature morte avec prunes, pêches et un chardonneretVers 1795 ?Aquarelle et gouache sur papier collé sur un carton fin. H. 41,1 cm ; l. 50,9 cmsignéDon anonyme par l’intermédiaire de la société des Amis du Louvre ; commission du 9 septembre 2010 ; décision du 10 septembre 2010Département des Arts graphiques (R.F. 54 788)

On connaît la spectaculaire série de gouaches aquarellées de grand format exécutée en Angleterre par le chevalier de Barde et acquise par Louis XVIII en 1817. Sur une période de dix-sept ans, Barde avait travaillé à ces aquarelles qui montrent, avec un naturalisme extraordinaire, des spécimens d’histoire naturelle ainsi que des vases grecs, reproduits grandeur nature. Cette Nature morte signée, vraisemblablement une œuvre de jeunesse, semble être le seul autre témoignage jusqu’ici repéré de la main de cet artiste.

c. van tuyll van serooskerken

 the spectacular series of large-format watercolour and gouache drawings that the “chevalier de Barde” created in england, which were acquired by Louis XViii in 1817, are well known. He worked on these watercolours over a period of seventeen years, and they are extraordinarily naturalistic illustrations of natural history specimens, as well as full-scale representations of Greek vases. this signed Still Life, which is probably a youthful work, appears to be the only other evidence of this artist’s work identified to date.

Michel François Dandré-Bardon, Académie d’homme, département des Arts

graphiques (R.F. 54 792) Louis Gauffier, L’Apparition des anges à Abraham, département des Arts

graphiques (R.F. 54 769)

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Acquisitions

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Caspar Wolf (Muri, 1735 – Heidelberg, 1783)Cascade dans la montagneVers 1770-1780Lavis brun. H. 10,9 cm ; l. 14,2 cmcollection particulière. Jérôme Montcouquiol ; don au musée du Louvre ; commission du 9 septembre 2010 ; décision du 10 septembre 2010Département des Arts graphiques (R.F. 54 790)

Wolf compte parmi les plus grands peintres préromantiques suisses et fait figure de pionnier de la représentation picturale de la haute montagne. Ses œuvres principales sont les paysages de montagne commandés dans les années 1774-1778 par le milieu intellectuel gravitant autour du naturaliste Albrecht Haller. Il représente ici une cascade en vue rapprochée. Deux petits personnages – témoins du tourisme naissant ? – mettent en évidence le gigantisme d’une nature sauvage.

H. Grollemund

 Wolf was one of the greatest pre-Romantic swiss painters and was a pioneering figure in the representation of high mountains. His main works are mountainous landscapes commissioned in the period 1774–78 by the intellectual circles that gravitated around the naturalist Albrecht Haller. Here, he depicts the close-up view of a waterfall. two small figures—perhaps representative of the beginnings of tourism—highlight the gigantic scale of nature in the wild.

Richard Westall (Reepham, 1765 – Londres, 1836)L’Enfant Jésus chassant les dieux de l’ÉgypteAquarelle, plume et encre noire, lavis d’encre noire et d’encre brune, graphite, rehauts de blanc, grattages. H. 60,9 cm ; l. 48,2 cmsir Gregory osborne Page-turner, 4th Baronet. P. et D. colnaghi, Londres. Ray Livingston Murphy, new York ; vente à Londres, christie’s, le 19 novembre 1985, no 118. P. et D. colnaghi, Londres, 1986. collection particulière, Angleterre. W. M. Brady & co., inc., new York ; présenté à Paris, salon du dessin, 2010. commission du 8 avril 2010.Département des Arts graphiques (R.F. 54 775)

Westall est connu surtout pour ses illustrations d’épisodes tirés de la littérature anglaise. Entre 1794 et 1797, les frères Boydell publièrent The Poetical Works of John Milton en trois volumes illustrés par Westall. C’est dans le troisième volume que nous retrouvons l’image du dessin acquis par le Louvre, illustrant l’Hymne sur la Nativité de 1629. L’apparition de l’Enfant fait crouler les idoles, rend muets les anciens oracles et chasse les dieux de l’ancienne Égypte.

c. van tuyll van serooskerken

Alexandre isidore Leroy de Barde, Nature morte avec prunes, pêches et un char-

donneret, département des Arts graphiques (R.F. 54 788)

caspar Wolf, Cascade dans la montagne, département des Arts graphiques

(R.F. 54 790)

Richard Westall, L’Enfant Jésus chassant les dieux de l’Égypte, département des

Arts graphiques (R.F. 54 775)

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Vie des collections

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 Westall is particularly well known for his illustrations of episodes from english literature. Between 1794 and 1797, the Boydell brothers published The Poetical Works of John Milton in three volumes, illustrated by Westall. the image based on the drawing acquired by the Louvre occurs in the third volume, and illustrates Milton’s “nativity ode” of 1629. the infant’s presence causes the destruction of the idols, silences the ancient oracles, and evicts the gods of ancient egypt.

Charles Percier et Pierre François Léonard Fontaine (atelier de)Élévation géométrale d’un projet d’arc de triomphe1806Graphite, plume et lavis d’encre noire, aquarelle sur papier vélin. H. 40 cm ; l. 50,5 cmAcquis par préemption en vente publique à Paris, hôtel Drouot, le 16 mars 2010, no 51, pour la section Histoire du LouvreDépartement des Arts graphiques (R.F. 54 772)

Ce dessin anonyme est lié aux recherches de Percier et Fon-taine en vue de l’édification de l’arc de triomphe du Carrousel, commandé par Napoléon en 1806 pour la gloire de ses armées et pour servir d’entrée monumentale à la cour des Tuileries. Le rapprochement, soutenu par des analogies dans les propor-tions et dans le détail décoratif, ne permet pas une attribution aux deux architectes, étant donné la qualité médiocre du ren-du, mais plaide en faveur d’un travail d’atelier, peut-être par l’un des élèves qui y étaient formés par Percier.

G. Fonkenell

 this anonymous drawing is related to the research carried out by Percier and Fontaine for the construction of the Arc du triomphe du carrousel, which was commissioned by napoleon in 1806 to commemorate his military victories, and to act as a monumental gateway to the tuileries courtyard. Despite the connection with the project, as attested by the similarities in the proportions and decorative details, the work cannot be directly attributed to these architects, because of the relatively poor quality of the rendering; it is more likely to have been produced in the workshop of charles Percier—perhaps executed by one of his pupils.

Pierre François Léonard Fontaine (Pontoise, 1762 – Paris, 1853)Entrée triomphale sous l’arc du CarrouselVers 1812-1815Au crayon, au verso : Ce dessin est de Percier ? / Il portait en marge l’annotation / « Le char et la fig. de l’emp. / les chevaux trop grands » Graphite, plume et encre noire, aquarelle sur papier vélin. H. 8,7 cm ; l. 23,9 cmAcquis par préemption en vente publique à Paris, hôtel Drouot, le 16 mars 2010, no 51, pour la section Histoire du LouvreDépartement des Arts graphiques (R.F. 54 773)

Ce dessin, attribué à Fontaine par analogie avec les vues per-spectives à main levée dont il est l’auteur, se présente comme une scène sur le vif, mais montre en réalité le projet d’achè-vement du Carrousel, fermé par une grande aile au nord et orné au centre d’une fontaine monumentale qui ne fut jamais exécutée (ici à droite du dessin). La datation proposée s’appuie sur l’analyse du décor sculpté représenté, mis en place en 1812 et partiellement déposé avec la Restauration en 1815.

G. Fonkenell

charles Percier et Pierre François Léonard Fontaine, Élévation géométrale d’un

projet d’arc de triomphe, département des Arts graphiques (R.F. 54 772)

Pierre François Léonard Fontaine, Entrée triomphale sous l’arc du Carrousel, département des Arts graphiques (R.F. 54 773)

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Acquisitions

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 this drawing has been attributed to Fontaine because of similarities with his freehand perspective views, and appears as though it were drawn from life; in reality, it is a project to complete the carrousel area, closed by a large wing in the north, and adorned in the centre with a monumental fountain that was never created (here on the right of the drawing). the suggested date is based on the analysis of the carved decorations depicted, completed in 1812, and partly removed during the 1815 Restauration.

Léon Cogniet (Paris, 1794-1880)Jeune dessinateur et un Égyptien assisVers 1833Pierre noire. H. 24,7 cm ; l. 28 cmcharles Moffett ; don au musée du Louvre ; commission du 3 juin 2010 ; décision du 7 juin 2010Département des Arts graphiques (R.F. 54 779)

Ce dessin finement élaboré est en rapport avec la décoration du plafond d’une salle du musée Charles X située au premier étage de l’aile méridionale de la cour Carrée. Le sujet traité par Cogniet fut L’Expédition d’Égypte sous les ordres de Bonaparte, également connu comme Les Savants français en Égypte. Expo-sée au Salon de 1833, la toile fut installée en 1835. Plusieurs études et esquisses peintes sont connues ; ce dessin très achevé semble plutôt une reprise d’un détail particulièrement réussi.

ch. Leribault

 this finely executed drawing is related to the ceiling decorations of a room in the Musée charles X on the first floor of the southern wing of the cour carrée. the subject tackled by cogniet was L’Expédition d’Egypte sous les ordres de Bonaparte (the egyptian expedition under the command of Bonaparte), also called Les savants français en Egypte (French scholars in egypt); exhibited in the salon of 1833, the canvas was installed in 1835. several studies and sketches exist; this highly finished drawing appears to be the repetition of a particularly successful detail.

Savinien Petit (trémilly, 1815-1878)Entrée des catacombes de la voie Latine, RomeVers 1848Mine de plomb et rehauts de gouache blanche sur papier bleu. H. 46 cm ; l. 29,5 cmsigné et annotéAcquis de la galerie Daniel Greiner, ParisDépartement des Arts graphiques (R.F. 54 791)

Savinien Petit séjourna de 1845 à 1850 à Rome, où il effectua les relevés des catacombes destinés à illustrer, en chromolitho-graphie, l’ouvrage de L. Perret Catacombes de Rome, qui devait paraître en 1851. L’artiste s’acquitta avec dévotion de cette tâche, qui lui permit de se familiariser avec l’art paléochrétien ; en même temps, il découvrit Raphaël, les « primitifs » italiens et les nazaréens. Ces influences marquèrent le reste de sa car-rière, consacrée essentiellement à la peinture religieuse.

ch. Leribault

 savinien Petit sojourned in Rome between 1845 and 1850, and spent his time drawing in the catacombs for his chromolithographic illustrations of L. Perret’s book, Catacombes de Rome, published in 1851. the artist was devoted to his task, and he became very familiar with early christian art; at the same time, he discovered the work of Raphael, the italian Primitives, and the nazarenes. these influences had a lasting effect on his career, which was mainly consecrated to religious painting.

Léon cogniet, Jeune dessinateur et un Égyptien assis, département des Arts

graphiques (R.F. 54 779)

savinien Petit, Entrée des catacombes de la voie Latine, Rome, département des

Arts graphiques (R.F. 54 791)

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Théodore Géricault (Rouen, 1791 – Paris, 1824)Diane chasseresse (recto) ; Deux chevaux (verso)crayon noir, plume et encre brune, lavis brun (recto) ; plume et encre brune, aquarelle, taches de vernis (verso). H. 28 cm ; l. 21 cmcoutan-Hauguet (L. 464) ; sa vente en 1899. collection particulière, France ; acquis par préemption en vente publique à Lyons-la-Forêt, étude Pillet et Lot, le 28 novembre 2010, no 11Département des Arts graphiques (R.F. 54 793)

Cette feuille inédite nous livre un étonnant dialogue recto-verso entre un marbre antique et un cheval de cire. D’un côté, le jeune Géricault, au génie forgé au contact des chefs-d’œuvre du Louvre, campe la fameuse Diane de Versailles, animée de forts rehauts de lavis brun qui laissent penser qu’il est peut-être parti d’une copie en bronze. Sur l’autre face, le Géricault sculpteur met en scène son modèle le plus célèbre : un cheval écorché dont ses disciples et admirateurs garderont le souvenir dans leurs ateliers sous la forme d’un plâtre d’édition.

ch. Leribault

 this previously unknown sheet provides a remarkable double-sided dialogue between an antique marble and a wax horse. on the recto, the young Géricault, whose genius was forged through contact with the Louvre’s masterpieces, portrayed the famous Diana of Versailles, animated with strong highlights of brown wash that suggest that it is perhaps based on a bronze version. on the verso, Géricault the sculptor represents his most famous model: a flayed horse in wax, plaster copies of which the artist’s disciples and admirers kept in their workshops.

théodore Géricault, Deux chevaux, département des Arts graphiques (R.F. 54 793, verso)

théodore Géricault, Diane chasseresse, département des Arts graphiques (R.F. 54 793,

recto)

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Acquisitions

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Edgar Degas (Paris, 1834-1917)Pietà (d’après Rosso)Vers 1859Pierre noire. H. 16 cm ; l. 23 cmGalerie Georges Petit, Paris, 4e vente de l’atelier Degas, 2-4 juillet 1919, no 81 b, repr. p. 16 ; timbre de la vente en bas à droite. Vente à Paris, hôtel Drouot, le 11 décembre 1978, no 21. nicole Wilk-Brocard ; don par l’intermédiaire de la société des Amis du Louvre ; commission du 6 mai 2010 ; décision du 7 juin 2010Département des Arts graphiques (R.F. 54 780)

C’est à son retour d’Italie, vers 1859, que l’artiste aurait exécuté cette copie d’après la Pietà de Rosso. L’influence sur la peinture française du xixe siècle du fameux tableau de Rosso, peint vers 1530-1540 pour Écouen et transféré au Louvre à la Révolution, a été soulignée à plusieurs reprises. Cette belle copie par Degas a été présentée à l’exposition « Degas et l’Italie » à la Villa Médicis en 1984, puis en 2000 à l’exposition « D’après l’Antique », au Louvre, institution où elle revient définitivement grâce à la générosité d’une grande amie du musée.

ch. Leribault

 the artist is believed to have executed this copy after Rosso’s Pieta when he returned from italy ca.1859. it has often been observed that Rosso’s famous picture (painted ca.1530–40 for écouen and transferred to the Louvre during the Revolution) greatly influenced nineteenth-century French painting. this fine copy by Degas was displayed at the exhibition “Degas and italy” at the Villa Médicis in 1984, then in the Louvre’s

exhibition “D’après l’Antique” (After the Antique) in 2000; thanks to the generosity of one of the Museum’s friends, the work has now found a permanent place in the institution’s collections.

Henri van der Haert (Louvain, 1794 – Gand, 1846) Homme assis1837Pierre noire sur papier brun. H. 47,6 cm ; l. 38 cmGuy Grieten ; don au musée du Louvre ; commission du 3 juin 2010 ; décision du 7 juin 2010Département des Arts graphiques (R.F. 54 777)

Après un voyage à Paris en 1817, Van der Haert s’installe en 1818 à Bruxelles et entre dans l’atelier de David exilé. Il se lie d’amitié avec François Rude, autre artiste exilé, dont il épou-sera la belle-sœur, Victorine Frémiet. C’est comme portraitiste de la haute société belge que Van der Haert devait obtenir ses plus grands succès, mais il était réputé également pour ses des-sins. Il dirigea une académie privée du dessin dans son atelier bruxellois. La feuille du Louvre, qui date de 1837, illustre son talent dans ce domaine.

c. van tuyll van serooskerken

 After visiting Paris in 1817, Van der Haert settled in Brussels in 1818 and entered the workshop of the exiled David. He became friends with François Rude, another exiled artist, whose sister-in-law he married. Van

edgar Degas, Pietà, département des Arts graphiques (R.F. 54 780)

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Vie des collections

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der Haert’s portraits of Belgian high society were his greatest achievement, but he was also known for his drawings. He ran a private drawing academy in his Brussels workshop. the Louvre sheet, which dates to 1837, demonstrates his talents as a draughtsman.

Eugène Romain van Maldeghem (Dentergem, 1813 – ixelles, 1867)Étude d’homme debout (recto) ; Étude de soldat en costume du xviie siècle (verso) Pierre noire, rehauts de craie blanche, sur papier gris. H. 34,7 cm ; l. 29,5 cmGuy Grieten ; don au musée du Louvre ; commission du 3 juin 2010 ; décision du 7 juin 2010Département des Arts graphiques (R.F. 54 778)

Depuis plusieurs années, le département cherche à renforcer la représentation du dessin belge de l’époque romantique dans ses portefeuilles. Élève de Gustave Wappers à l’Académie d’Anvers, Van Maldeghem a exécuté des portraits, mais c’est surtout comme peintre de tableaux religieux qu’il s’est fait connaître. Les études à la pierre noire sur les deux faces de la feuille récemment entrée au Louvre pourraient être destinées à une scène historique non encore identifiée.

c. van tuyll van serooskerken

 For some years, the Department has been actively seeking to add works to its portfolios of Belgian drawings from the Romantic era. After studying under Gustave Wappers at the Academy of Antwerp, van Maldeghem painted portraits, but was best known for his religious paintings. the black chalk drawing studies on both sides of the sheet that

was recently given to the Museum may relate to a historical scene that has not yet been identified.

Wilhelm von Kaulbach (Arolsen, 1805 – Munich, 1875)Scène maritime (Sur le lac de Génésareth ?)Plume et encre brune sur traits de graphite. H. 49,2 cm ; l. 64,8 cmWilhelm Koenig, Vienne (L. 2653 b). collection particulière, Allemagne. Laura Pécheur ; don au musée du Louvre ; commission du 9 septembre 2010 ; décision du 10 septembre 2010Département des Arts graphiques (R.F. 54 789)

Élève de Cornelius à l’Académie de Düsseldorf, Kaulbach connaîtra une glorieuse carrière officielle à Munich et à Berlin.

Wilhelm von Kaulbach, Scène maritime, département des Arts graphiques

(R.F. 54 789)

Henri van der Haert, Homme assis, département des Arts graphiques

(R.F. 54 777)

eugène Romain van Maldeghem, Étude d’homme debout, département des

Arts graphiques (R.F. 54 778, recto)

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Acquisitions

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Le peintre aspire à rénover l’art allemand par l’exemple des anciens maîtres, italiens et allemands. Avec un trait d’une grande précision, il campe au recto de cette grande feuille une composition maritime, qui pourrait être religieuse ; elle évoque l’appel des apôtres Simon et André (Marc, I, 16-18). L’étude ne semble pas avoir abouti à une composi-tion peinte.

H. Grollemund

 A pupil of cornelius at the Academy of Düsseldorf, Kaulbach pursued a glorious official career at Munich and Berlin. the painter as-pired to regenerate German art by following the example of the italian and German old masters. He por-trayed a maritime composition on this large sheet with extraordinary precision. the scene may be a reli-gious one: it evokes the calling of the apostles simon and Andrew (Mark 1:16–18). the study does not appear to have resulted in a painted composition.

Eugenio Lucas Velázquez (Madrid, 1817-1870)Paysage rocheuxAquarelle sur papier beige. H. 27,3 cm ; l. 22 cmArtur Ramon, Barcelone ; salon du dessin, 2010, Paris ; commission du 8 avril 2010 Département des Arts graphiques (R.F. 54 776)

Cette feuille correspond à une technique très particulière adop-tée au xixe siècle par plusieurs peintres en Europe. L’art de la tache était alors une pratique habituelle ; le traité d’Alexandre Cozens, paru en 1786, a certainement contribué à lui confé-rer une assise théorique. Eugenio Lucas Velázquez participait à ce mouvement et représentait, après Goya, l’artiste le plus important et le plus novateur d’Espagne. Son admiration pour Vélasquez le poussa à adopter son nom dans son patronyme.

L. Boubli

 this sheet provides an example of a very special technique that was practised by various nineteenth-century painters. the art of blotting was widely practised; Alexander cozens’s treatise, published in 1786 provided the technique with a theoretical foundation. eugenio Lucas Velázquez was, after Goya, spain’s most important and innovative artist. He admired Diego Velázquez so greatly that he adopted his surname.

eugenio Lucas Velázquez, Paysage rocheux, département des Arts graphiques (R.F. 54 776)

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Vie des collections

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Musée Delacroix

Le musée Delacroix est né de l’initiative, dans les années 1930, d’une association d’artistes et d’amateurs créée pour sauver l’atelier du maître de la pioche des démo-lisseurs. Contrairement à nombre de musées-ateliers, il n’a donc pas bénéficié de l’apport initial d’un legs de l’artiste ou de sa famille. Constituée très progressive-ment, la collection a encore besoin d’être renforcée en fonction des opportunités du marché. Sans chercher à rivaliser avec l’ensemble de toiles phares conservé au Louvre ni avec les dessins du fonds Moreau-Nélaton du département des Arts gra-phiques, le choix des acquisitions se concentre sur les esquisses et les travaux pré-paratoires, et sur ce qui relève de la biographie de l’artiste. Après l’effort important consenti l’année précédente pour faire entrer les émouvants portraits de Delacroix par Thales Fielding et de Fielding par Eugène Delacroix, le budget d’acquisition du musée du Louvre n’a pas été sollicité en 2010, afin de réserver son intervention pour un achat conséquent en 2011. La générosité de quelques donateurs et surtout le soutien constant de la Société des Amis du musée Delacroix ont néanmoins per-mis l’acquisition d’une dizaine de dessins et estampes d’un grand intérêt pour la connaissance de l’artiste et indispensables au renouvellement périodique de l’accro-chage thématique des salles. On signalera particulièrement la grande lithographie de Nadar, dite Panthéon Nadar, et une fort belle aquarelle d’après un cavalier médié-val, copié par Delacroix lors de son séjour à Londres en 1825.

ch. Leribault

 the Musée Delacroix was founded in the 1930s on the initiative of an association of artists and collectors, who were committed to saving the master’s former home and atelier from demolition. unlike many museum-workshops, it never benefited from an initial bequest from the artist or his family. the collection was built up very gradually, and still needs to be expanded, although this depends on market opportunities. the Museum does not intend to compete with the collection of major masterpieces in the Louvre, or with the drawings of the Moreau-nélaton collection in the Department of Graphic Arts; instead, the Museum’s acquisitions focus on sketches and preparatory works, and anything related to the artist’s biography. in 2009 great efforts were made to acquire the affecting portraits of Delacroix by thales Fielding, and of Fielding by eugène Delacroix, so the Musée du Louvre’s acquisition budget was not solicited in 2010, in order to allow for a significant purchase in 2011. nevertheless, the generosity of several donors and, above all, the constant support of the société des Amis du Musée Delacroix enabled the museum to acquire ten drawings and prints of great interest; these works contribute to improving our knowledge of the artist, and provide indispensable additional material for the thematic renewal of works in the exhibition rooms. Most noteworthy of these acquisitions was a large lithograph by nadar, known as The Nadar Panthéon, and a very fine watercolour of a medieval knight, copied by Delacroix during his sojourn in London in 1825.

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Acquisitions

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Félix Tournachon, dit Nadar (Paris, 1820-1910)Panthéon Nadar1858Lithographie. H. 80 m ; l. 1,13 cmVente publique à Paris, hôtel Drouot, étude Piasa, le 30 avril 2009, no 318, repr.Don de la société des Amis du musée eugène DelacroixMusée Delacroix (MD 2010-1)

En 1851, Nadar, encore dans sa première carrière de caricatu-riste, imagine de rassembler les portraits de plus de un millier de célébrités de son temps, réparties en quatre planches lithogra-phiques. Il adopte le format dit « grand aigle », réservé jusque-là aux cartes géographiques. L’entreprise, qui mobilise toute une équipe de dessinateurs recrutés pour l’aider, aboutit en 1854 à la publication de la première planche, qui rassemble les écrivains et les journalistes. En dépit de grands efforts de promotion et d’un succès journalistique et public, la lithographie ne fut guère achetée par les amateurs tant elle était encombrante et coûteuse. L’échec commercial de cette planche orienta son auteur, ruiné, vers l’activité photo-graphique qui allait faire sa gloire.

En 1858, le propriétaire du Figaro, Hippo-lyte de Villemessant, lui racheta les droits de la pierre lithographique pour en distribuer des tirages en cadeau aux nouveaux abonnés du journal. Mais il demanda à Nadar d’intégrer dans cette nouvelle édition les personnalités les plus connues qui auraient dû figurer dans les trois planches non exécutées. Ainsi, Nadar y intercala notamment les portraits de Rossini, de Berlioz et celui de Delacroix.

Cette sorte de grande parade, conduite par Victor Hugo, aux côtés du buste de George Sand, permet au musée Delacroix de présenter les amis et les détracteurs de l’artiste. On ne saurait, enfin, évoquer l’acquisition de cette rare planche à l’hôtel Drouot sans signaler la dédi-

cace de l’auteur inscrite sur un panonceau : « Au Monsieur que je regrette assurément d’avance de ne pas connaître et qui le deu-xième jour de la troisième lune de l’an 3607, courra les ventes comme un chien perdu pour acheter à prix d’or cet exemplaire devenu in-trouvable et dont il ne pourra se passer pour son grand travail historique du xixe siècle. »

ch. Leribault

 At the time a caricaturist, in 1851 nadar decided to create four lithographic plates representing portraits of contemporary celebrities. in 1854 he produced the first plate, which represented writers and journalists. Few copies of the lithograph were sold, and the ruined nadar turned instead to photography, which would make him famous. in 1858 the owner of the Figaro newspaper bought the rights to the stone plate, and asked nadar to integrate the other famous people he had planned to represent in the plates but were not completed. Most notably, nadar inserted the portraits of Rossini, Berlioz, and Delacroix.

Eugène Delacroix (charenton-saint-Maurice, 1798 – Paris, 1863)Trilobe architectural avec un chevalier1825Aquarelle et rehauts d’huile sur papier, traces de crayon. H. 11,5 cm ; l. 16 cm cachet de la vente Delacroix en bas à droiteParis, vente de l’atelier de l’artiste, hôtel Drouot, les 17-29 février 1864 (cachet ED en bas à droite) ; Paris, collection Alfred Robaut ; Londres, galerie Hazlitt-Gooden & Fox ; collection particulière ; vente publique à Paris, sotheby’s, le 22 juin 2010, no 72, repr. ; don de la société des Amis du musée eugène Delacroix Musée Delacroix (MD 2010-2)

Probablement exécutée lors du séjour décisif de Delacroix à Londres en 1825, cette aquarelle est très proche d’une autre,

Félix tournachon, nadar, Panthéon Nadar, musée Delacroix (MD 2010-1)

eugène Delacroix, Trilobe architectural avec un chevalier, musée Delacroix (MD 2010-2)

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Vie des collections

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acquise en 2008, représentant des figures du tombeau du comte de Pembroke à l’abbaye de Westminster. Compte tenu de l’importance du fonds de dessins de l’artiste conservé au Louvre, le musée Delacroix ne vise dans ce domaine que des feuilles susceptibles de compléter cet ensemble, comme c’est le cas de cette rare aquarelle, qui est dans un remarquable état de conservation.

ch. Leribault

 Probably executed during Delacroix’s decisive sojourn in London in 1825, this watercolour is similar to another acquired in 2008 that represents figures on the tomb of the count of Pembroke in Westminster Abbey. Given the large number of the artist’s drawings held in the Louvre, the Musée Delacroix is only interested in acquiring sheets that complete this ensemble, such as this rare watercolour, which is in remarkably good condition.

Eugène Delacroix (charenton-saint-Maurice, 1798 – Paris, 1863)Juive d’Alger et Une rue à Alger1838 Lithographie. H. 49 cm ; l. 37 cm (feuille)Paris, galerie Paul Prouté, cat. 124, juin 2004, no 407 ; collection particulière ; vente publique à Paris, hôtel Drouot, étude Ader, le 10 février 2010, no 197, repr. ; don de la société des Amis du musée eugène DelacroixMusée Delacroix (MD 2010-6)

Cette planche regroupe deux compositions de Delacroix, encadrant, avec des motifs d’arabesque, la reproduction en fac-similé d’une page manuscrite de Lamartine (Jocelyn, IX,

1836). Elle est issue d’un recueil publié en 1838 par Marie- Élisabeth Cavé, Le Livre d’or des contemporains, qui rassemblait de cette façon décorative des textes et des croquis demandés aux figures en vue de l’époque.

ch. Leribault

 this plate contains two of Delacroix’s compositions, framing a facsimile reproduction of a manuscript page by Lamartine with arabesque motifs. it comes from a volume published in 1838 by Marie-elisabeth cavé, Le Livre d’or des Contemporains, which contained decorative texts and sketches commissioned from the era’s most prominent people.

Achille Devéria (Paris, 1800-1857)Frontispice pour Faust1828Lithographie. H. 47,6 cm ; l. 32,4 cm (feuille)Paris, galerie Julie MaillardDon de la société des Amis du musée eugène DelacroixMusée Delacroix (MD 2010-4)

Delacroix s’attela à partir de 1825 aux illustrations du Faust de Goethe. Le musée possédait un exemplaire du volume publié en 1828, mais pas ce frontispice, qui servait en fait de couverture à la livraison des épreuves non reliées, tâche confiée par l’éditeur Charles Motte à son beau-frère Achille Devéria. L’artiste déve-loppe ici un imaginaire romantique débridé, avec son cortège de squelettes et de hiboux encadrant un portrait de l’écrivain.

ch. Leribault

eugène Delacroix, Juive d’Alger, musée Delacroix (MD 2010-6) Achille Devéria, Frontispice pour Faust, musée Delacroix (MD 2010-4)

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Acquisitions

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 From 1825 onward Delacroix concentrated on completing the illustra-tions for Goethe’s Faust. the Museum already possessed a copy of the vol-ume published in 1828, but this lacked the frontispiece, which essentially served as a cover for the delivery of the unbound proofs, a task the editor charles Motte entrusted to his brother-in-law Achille Devéria. Here, the artist lets his imagination run wild, depicting a cortege of skeletons and owls fram-ing the writer’s portrait.

Hippolyte Poterlet (Paris, 1803-1835)Copie d’après le portrait de Charles Louis Ier, électeur palatin, par Antoon van Dyckencre. H. 35,5 cm ; l. 22,5 cm Don de M. edwart Vignot Musée Delacroix (MD 2010-3)

Delacroix rencontra Poterlet en octobre 1818 alors que le jeune artiste, âgé de quinze ans, était occupé à copier un tableau ita-lien dans les salles du Louvre. En 1825, ils partirent tous deux pour Londres. Une mort précoce, à trente-deux ans, empêcha cet ami proche de Delacroix d’affirmer ses talents de peintre.

ch. Leribault

 Delacroix met Poterlet in october 1818, when the fifteen-year old artist was copying paintings in the Louvre. in 1825 they both left for London. Delacroix’s close friend died prematurely at the age of thirty-two, and never had the chance to fully develop his talents as a painter.

Edmond Hédouin (Hambourg, 1820 – Paris, 1889)Cour intérieure au Maghreb1848Gouache. H. 35 cm ; l. 36 cm signé, dédicacé et daté en bas à droite : A mon ami / L. Flameng – 1848 – E. HédouinDon de M. Jacques-Paul DauriacMusée Delacroix (MD 2010-5)

Sans être un familier de l’artiste, Edmond Hédouin compte parmi ses graveurs. Également connu pour ses sujets espagnols et ses thèmes agricoles, il figure parmi les premiers artistes à avoir suivi le sillage de Delacroix au Maghreb. Il parcourut le Maroc et l’Algérie à partir de 1847, ce qui nous vaut cette belle représentation de costumes pittoresques dans une cour inté-rieure qui n’est pas sans évoquer l’art du maître et celui de Chassériau, artiste auquel il enseigna la gravure.

ch. Leribault

 Although he was not a close friend of the artist, edmond Hédouin became one of Delacroix’s regular engravers. Known for his spanish subjects and agricultural themes, Hédouin was also one of the first artists to go to the Maghreb in the wake of Delacroix. His travels in Morocco and Algeria began in 1847, and this fine representation of picturesque costumes in an interior courtyard dates to this period; the work is clearly influenced by Delacroix and chassériau, an artist to whom he taught engraving.

Hippolyte Poterlet, Copie d’après le portrait de Charles Louis Ier, électeur

palatin, par Antoon van Dyck, musée Delacroix (MD 2010-3) edmond Hédouin, Cour intérieure au Maghreb, musée Delacroix (MD 2010-5)