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RÉGION MOYEN-ORIENT ET AFRIQUE DU NORD DE LA BANQUE MONDIALE RAPPORT DE SUIVI ÉCONOMIQUE DE LA RÉGION MENA Vers un Nouveau Contrat Social 9565 0

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RÉGION MOYEN-ORIENT ET AFRIQUE DU NORD DE LA BANQUE MONDIALE

RAPPORT DE SUIVI ÉCONOMIQUE DE LA RÉGION MENA

Vers un Nouveau Contrat Social

GROUPE DE LA BANQUE MONDIALE

Avril 2015

95650

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RAPPORT DE SUIVI ÉCONOMIQUE DE LA RÉGION MENA

Vers un Nouveau Contrat Social

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© 2015 Banque internationale pour la reconstruction et le développement/Banque mondiale1818 H Street NW, Washington DC 20433Téléphone : 202-473-1000 ; Internet: www.worldbank.org

Certains droits réservés

1 2 3 4 17 16 15 14

Cet ouvrage a été établi par les services de la Banque mondiale avec la contribution de collaborateurs extérieurs. Les observations, interprétations et opinions qui sont exprimées dans cet ouvrage ne reflètent pas nécessairement les vues de la Banque mondiale, de son Conseil des Administrateurs ou des pays que ceux-ci représentent. La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données citées dans cet ouvrage. Les frontières, les couleurs, les dénominations et toute autre information figurant sur les cartes du présent ouvrage n’impliquent de la part de la Banque mondiale aucun jugement quant au statut juridique d’un territoire quelconque et ne signifient nullement que l’institution reconnaît ou accepte ces frontières.

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Droits et licences

L’utilisation de cet ouvrage est soumise aux conditions de la licence Creative Commons Attribution 3.0 Unported license (CC BY 3.0) http://creativecommons.org/licenses/by/3.0/igo. Conformément aux termes de la licence Creative Commons Attribution (mention de la source), il est possible de copier, distribuer, transmettre et adapter le contenu de l’ouvrage, notamment à des fins commerciales, sous réserve du respect des conditions suivantes :

Mention de la source— L’ouvrage doit être cité de la manière suivante : Shanta Devarajan, Lili Mottaghi 2015 « Vers un nouveau contrat social » Rapport de suivi de la situation économique au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, (avril 2015), Banque mondiale, Washington, DC.Doi : 10.1596/978-1-4648-0608-7 License: Creative Commons Attribution CC BY 3.0 IGOTraductions— Si une traduction de cet ouvrage est produite, veuillez ajouter à la mention de la source, le déni de responsabilité suivant : Cette traduction n’a pas été réalisée par la Banque mondiale et ne doit pas être considérée comme une traduction officielle de cette dernière. La Banque ne saurait être tenue responsable du contenu de la traduction ni des erreurs qu’elle pourrait contenir.

Adaptations— Si une adaptation de cet ouvrage est produite, veuillez ajouter à la mention de la source le déni de responsabilité suivant : Cet ouvrage est une adaptation d’une œuvre originale de la Banque mondiale. Les idées et opinions exprimées dans cette adaptation n’engagent que l’auteur ou les auteurs de l’adaptation et ne sont pas validées par la Banque mondiale.

Contenu tiers— La Banque mondiale n’est pas nécessairement propriétaire de chaque composante du contenu de cet ouvrage. Elle ne garantit donc pas que l’utilisation d’une composante ou d’une partie quelconque du contenu de l’ouvrage ne porte pas atteinte aux droits des tierces parties concernées. L’utilisateur du contenu assume seul le risque de réclamations ou de plaintes pour violation desdits droits. Pour réutiliser une composante de cet ouvrage, il vous appartient de juger si une autorisation est requise et de l’obtenir le cas échéant auprès du détenteur des droits d’auteur. Parmi les composantes, on citera, à titre d’exemple, les tableaux, les graphiques et les images.

Pour tous renseignements sur les droits et licences, s’adresser au service des publications et de la diffusion des connaissances de la Banque mondiale : Publishing and Knowledge Division, The World Bank, 1818 H Street NW, Washington, DC 20433, États-Unis ; télécopie : 202-522-2625 ; courriel : [email protected].

ISBN (électronique) : 978-1-4648-0608-7DOI : 10.1596/978-1-4648-0608-7

Photo de couverture : © SHUTTERSTOCK

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La date butoir pour les données utilisées dans le présent rapport était le 15 mars 2015.

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Table des matières

Évolution économique récente et perspectives..................................................................................................1Perspectives de l’économie mondiale........................................................................................................................1Perspectives régionales au Moyen-Orient et en Afrique du Nord.............................................................................2

Vers un nouveau contrat social au Moyen-Orient et en Afrique du Nord...........................................................11Emplois du secteur privé............................................................................................................................................16Services publics de qualité.........................................................................................................................................20Que faut-il faire ?.......................................................................................................................................................21

Figures

1.1 Projection entendue...................................................................................................................................11.2 Prévisions de la Banque mondiale et de Projection entendue pour la région MENA..................................31.3 Situation économique régionale, avant et après la baisse des prix du pétrole............................................42.1 Taux de croissance du PIB (%)......................................................................................................................112.1 Solde budgétaire (% du PIB, (-) déficit).........................................................................................................112.1 Chômage des jeunes (% du total de la population active, âgés de 15 à 24 ans) 11......................................2.2 Indice de concentration................................................................................................................................122.3a. Situation de l’emploi (dernières données disponibles, pourcentage...........................................................122.3b. Voix et responsabilité...................................................................................................................................122.4a. Années d’instruction des femmes................................................................................................................132.4b. Taux de mortalité infantile...........................................................................................................................132.4c. Inégalité dans la région MENA et à travers le monde (pourcentage)...........................................................132.5 Taux de participation des femmes au marché du travail (pourcentage)......................................................142.6 Résultats en math au PISA ..........................................................................................................................152.7 Absentéisme des médecins par district au Maroc........................................................................................152.8 Coupures d’électricité...................................................................................................................................152.8 Ressources en eau renouvelables.................................................................................................................152.9 Création nette d’emploi, par taille de l’entreprise et âge............................................................................162.10a. Taux des entrées et des sorties (en pourcentage de toutes les entreprises)...............................................172.10b. Densité des entrées du secteur structuré....................................................................................................172.10c. Âge médian des entreprises manufacturières (années)...............................................................................172.11 Obstacles à l’exercice de l’activité économique...........................................................................................18B1a. PIB réel par habitant ...................................................................................................................................8B1b. Ratio du PIB par habitant de Gaza à celui de la Cisjordanie.........................................................................8

Encadré1.1 Les effets à long terme sur Gaza des blocus imposés par Israël et de ses attaques militaires.....................8

TableauxB1 PIB par habitant à Gaza et dans les pays, régions et groupes servant de comparaison (constant 2005,

USD) .............................................................................................................................................................81.1 Perspectives macroéconomiques.................................................................................................................92.1 Matrices des transitions à long terme (transitions décennales)...................................................................18Annex Projection entendue...................................................................................................................................10

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RAPPORT DE SUIVI ÉCONOMIQUE DE LA RÉGION MENA

Vers un Nouveau Contrat Social

REMERCIEMENTS

Ce rapport est produit par le bureau de l’économiste en chef de la Banque mondiale pour la région Moyen-Orient et Afrique du Nord.

Le rapport a été établi par une équipe dirigée par Shanta Devarajan et comprenant Lili Mottaghi, Farrukh Iqbal, Youssouf Kiendrebeogo et Isabelle Chaal Dabi. Les notes de pays se fondent sur les rapports établis par les économistes pays ci-après, dirigés par Auguste Tano Kouame : Ibrahim Al-Ghelaiqah, Dalia Al-Kadi, Jean-Luc Bernasconi, Jose Lopez Calix, Jean-Pierre Chauffour, Khalid El-Massnaoui, Shahrzad Mobasher Fard, Lea Hakim, Wissam Hirake, Ahmed Kouchouk, Sibel Kulaksiz, Eric Le Borgne, Raj Nallari, Nur Nasser Eddin, Guido Rurangwa et Abdoulaye Sy. Nous remercions Hana Brixi, Elena Ianchovichina et Abdoulaye Sy pour leurs observations utiles.

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Évolution économique récente et perspectives

Perspectives de l’économie mondiale

L’économie mondiale enregistrera cette année un taux de croissance de 3 à 3.5 percent, soit environ un demi-point de pourcentage de plus que le taux de 2.6 percent atteint l’année dernière, et un niveau supérieur au taux de croissance moyen de 3.1 percent enregistré sur la période 2000-2008, avant la crise financière (Figure 1.1). La récente reprise a été essentiellement induite par une croissance plus élevée que prévu aux États-Unis, au Royaume-Uni et dans certains pays de la zone euro, et surtout par la chute sensible des prix internationaux du pétrole. Les faibles prix du pétrole ont contribué en termes nets à la reprise mondiale, mais les effets varient considérablement entre les pays, plus particulièrement entre les pays exportateurs et importateurs de pétrole. La baisse des prix du pétrole a renforcé la croissance du PIB réel des pays importateurs de pétrole, amélioré les balances commerciales et, dans la mesure où ces pays subventionnent le carburant, atténué leurs pressions budgétaires. Toutefois, l’ampleur des gains sera fonction, entre autres facteurs, de la part des importations de pétrole dans le PIB. Les pays exportateurs de pétrole (notamment la Russie) pourraient subir une baisse sensible de leurs taux de croissance ; leurs soldes budgétaires vont se dégrader, entraînant des conséquences régionales considérables (Mottaghi, 2015).

Le PIB mondial devrait augmenter entre 3.3 et 3.7 percent (Figure 1.1). La plupart des prévisionnistes internationaux tablent sur la poursuite de la reprise aux États-Unis, et une reprise plus lente dans la zone euro en 2016. Les pays à revenu élevé du G7 devraient enregistrer une croissance de 2.3 percent en 2015 et 2016 contre 1.2 et 1.6 percent pour la zone euro durant ces mêmes années. Dans les économies en développement, la croissance devrait augmenter à 4.8 et 5.3 percent en 2015 et 2016, respectivement. Mais les risques continuent d’être orientés à la baisse.

Figure 1.1 Projection entendue

IMF

World Bank

Consensus

3.3

2.6

2.8

Taux de croissance, % 2014

RAPPORT DE SUIVI ÉCONOMIQUE DE LA RÉGION MENA AVRIL 2015 1

3.5

3.0

3.1

2015

3.7

3.3

3.4

2016

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US

EU

China

India

Brazil

Russia

3.1

1.2

7.0

6.5

-0.1

T a u x d e c r o i s s a n c e d e 2 0 1 5 , %Pro

jection

enten

due

0.6

0.0

1.9

5.8

6.7

12.4

I n fl a ti o n , %

-2.6

-2.4

-2.4

-4.0

-4.6

-2.2

S o l d e b u d g é t a i r e ( % d u P I B )

-2.2

2.7

2.7

-1.2

-3.8

3.8

C o m p t e c o u r a n t ( % d u P I B )

Source : Banque mondiale, FMI et FocusEconomics mars 2015. Note : Projection entendue est la moyenne des indicateurs économiques des principaux prévisionnistes internationaux.

Entretemps, après avoir chuté de plus de 60 percent depuis leur niveau de pointe atteint en juin 2014, les prix du pétrole brut (Brent) fluctuaient autour de $50 le baril à la fin de mars1. Les prix du pétrole sont particulièrement instables et notoirement difficiles à prédire, mais le marché à terme semble indiquer un prix du pétrole brut de type Brent de l’ordre de $61 pour livraison en décembre 2015, passant à $67 pour décembre 2016. Le rythme de croissance des prix du pétrole est tellement lent qu’il est peu probable qu’ils remontent de sitôt à $100 ou plus. En raison de la faible reprise économique dans la zone euro et de la croissance modérée en Chine et en Inde, la demande n’augmente pas suffisamment vite pour absorber une offre continuellement excédentaire.

Perspectives régionales au Moyen-Orient et en Afrique du Nord

Si l’économie mondiale est bien partie pour enregistrer une reprise progressive, les perspectives économiques au Moyen-Orient et en Afrique du Nord (MENA) restent limitées. La croissance dans la région MENA devrait ralentir en 2015, s’établissant entre 3.1 et 3.3 percent d’après les prévisions de la Banque mondiale et celles de Projection entendue respectivement, et continuer au même rythme en 2016 (Figure 1.2). Si la situation sécuritaire en Libye s’améliore et que les exportations de pétrole augmentent, le taux de croissance moyen de la région pourrait grimper à un niveau de 4 à 5 percent en 2016. La persistance de la croissance molle tient essentiellement aux facteurs suivants : le conflit prolongé et l’instabilité politique en Syrie, en Iraq, en Libye et au Yémen ; les faibles prix du pétrole qui freinent la croissance dans les pays exportateurs de pétrole ; et le rythme lent des réformes qui entrave la reprise des investissements. La persistance de cette situation aggravera considérablement le taux de chômage global, se situant actuellement à 12 percent, et la pauvreté dans la région. Les déficits budgétaires augmentent, au point que le déficit régional est de 8 percent du PIB en 2015, après 4 années d’excédent. Les perspectives économiques globales de la région demeurent actuellement médiocres. Toutefois, si les conflits régionaux diminuent et que les réformes sont mises en œuvre, les prévisions à plus long terme pourraient être plus optimistes.

1 Les prix du pétrole brut (Brent) ont baissé de $2 pour atteindre $49 le baril suite à l’accord-cadre conclu le 2 avril entre le P5+1 et l’Iran.

RAPPORT DE SUIVI ÉCONOMIQUE DE LA RÉGION MENA AVRIL 2015 2

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Figure 1.2 Prévisions de la Banque mondiale et de Projection entendue pour la région MENA

Consensus

World Bank

3.3

3.1

3.9

3.6

Taux de croissance, %

2016p 2015p

-5.8

-8.0

-4.4

-6.5

Solde budgétaire (% du PIB)

-1.7

-5.3

-0.6

-2.9

Solde du compte courant (% du PIB)

Source : Banque mondiale et FocusEconomics (mars 2015). Note : Projection entendue est la moyenne des indicateurs économiques des principaux prévisionnistes internationaux.

La croissance pour le groupe des exportateurs devrait être de l’ordre de 2.8 percent en 2015, et devrait stagner à moins de 1 percent dans les pays en développement exportateurs de pétrole. Pour le groupe des exportateurs de pétrole à revenu élevé membres du Conseil de coopération du Golfe (CCG) la croissance devrait s’échelonner entre 3.2 et 3.8 percent en 2015, d’après les prévisions de la Banque mondiale et de Projection entendue respectivement, soit près d’un demi-point de pourcentage de moins que l’année dernière (Figure 1.3 et Tableau annexe). La Banque mondiale estime que la croissance dans les pays en développement exportateurs de pétrole de la région MENA, freinée par les faibles prix du pétrole, devrait chuter à 0.9 percent contre 6.3 percent avant l’effondrement des prix (Figure 1.3, panneau de gauche). L’impact de l’effondrement des prix du pétrole sur les économies budgétaires a contrebalancé la hausse de la consommation découlant de l’augmentation des dépenses.

La croissance dans les pays de la région MENA dans l’ensemble restera à 2 percent en 2015. Tout en étant encore faible, ce chiffre est supérieur de près d’un point de pourcentage à celui de l’année précédente, en raison d’une croissance plus importante que prévu dans les pays importateurs de pétrole, estimée à 3.9 et 4.1 percent en 2015 et 2016, respectivement, soit un niveau supérieur de l’ordre d’un point de pourcentage et demi au chiffre de l’année précédente. Par ailleurs, les déficits budgétaires devraient s’améliorer en 2015 dans le groupe des pays importateurs de pétrole, partiellement en raison des économies budgétaires découlant des faibles prix du pétrole (Figure 1.3, panneau de droite).

RAPPORT DE SUIVI ÉCONOMIQUE DE LA RÉGION MENA AVRIL 2015 3

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Figure 1.3. Situation économique régionale, avant et après la baisse des prix du pétrole

MENA GCC Developing Oil Exporters Oil Importers0

2

4

6

8

5.2 5.1

6.3

3.43.1

3.8

0.9

3.9

Taux de croissance, %

2015 (before falling oil) 2015 (after falling oil)

MENA GCC Developing Oil Exporters Oil Importers-12

-8

-4

0

4

8

0.1

5.3

-2.7

-8.9

-8.0

-7.0

-9.3

-8.7

Solde budgétraire, en % du PIB((-), déficit)

2015 (before falling oil) 2015 (after falling oil)

Source : Banque mondiale

La croissance économique dans tous les pays exportateurs de pétrole de la région MENA est en chute libre2. Après avoir dépassé 8 percent en 2011, la croissance en Arabie saoudite devrait décliner à 4.6 percent en 2015 (Tableau 1.1). La Banque mondiale estime que les pays du Golfe pourraient perdre en 2015 près de $215 billion en recettes pétrolières, soit l’équivalent de 14 percent de leur PIB combiné. L’Arabie saoudite, les EAU, le Koweït et le Qatar ont réussi, grâce à leurs vastes réserves, à résister aux pires effets des faibles prix du pétrole, alors que le Bahreïn et Oman ont moins de réserves pour amortir le choc. Même les pays qui ont des réserves importantes commencent à ressentir la pression sur leurs soldes budgétaires. Les vastes excédents budgétaires de l’Arabie saoudite s’épuisent, entrainant des déficits à deux chiffres en 2015 et l’année suivante, pour la première fois en une décennie. L’Arabie saoudite et le Koweït poursuivent leurs politiques budgétaires expansionnistes, financées en partie par leurs vastes avoirs extérieurs. Le fonds souverain d’Abu Dhabi, qui serait d’une valeur de $800 billion, pourrait amortir les impacts des faibles prix du pétrole sur l’économie du pays. Mais ces moyens de recours ne peuvent pas durer éternellement, car les déficits budgétaires augmentent. Rien qu’en décembre 2014, les bourses du Golfe ont chuté, avec les prix du pétrole, perdant $16 billion en l’espace de trois semaines.

Si les prix du pétrole restent faibles pendant longtemps, et que la situation budgétaire dans les États du Golfe se détériore, la croissance des envois de fonds à partir des pays du CCG au reste de la région pourrait ralentir, surtout dans le cas de l’Égypte, du Yémen et de la Jordanie (où ces fonds représentent une importante source de revenus). D’après les estimations de la Banque mondiale, les envois de fonds

2 La croissance au Koweït devrait augmenter légèrement en 2015 du fait d’une augmentation modérée de la production de pétrole et de l’accélération de la croissance dans le secteur non pétrolier.

RAPPORT DE SUIVI ÉCONOMIQUE DE LA RÉGION MENA AVRIL 2015 4

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devraient augmenter, mais les taux de croissance pourraient ralentir. Les flux d’aide du CCG au reste de la MENA pourraient aussi décliner en raison des faibles prix du pétrole.

Parmi les pays en développement exportateurs de pétrole, les perspectives économiques de l’Iran sont fonction du calendrier de la levée des sanctions après la conclusion d’un accord-cadre sur le nucléaire au début du mois d’avril, ainsi que des fluctuations des prix du pétrole. Dans le cadre de cet accord, qui devrait être finalisé vers la fin du mois de juin, une levée globale des sanctions est envisagée. Cette mesure pourrait stimuler considérablement l’activité économique et accélérer la croissance à environ 5 percent en 201 6 3 , tout en améliorant les conditions de vie des Iraniens. La croissance devrait rester sur la même trajectoire l’année suivante. Toutefois, dans ce cas, l’économie iranienne bénéficiera d’une énorme manne pétrolière qui, si elle n’était pas gérée judicieusement, pourrait entraîner un taux de change surévalué et une perte de compétitivité du secteur non pétrolier, une source importante de recettes en devises. Elle pourrait aussi se traduire par une aggravation du chômage dans les secteurs des biens échangeables, dans la mesure où le secteur pétrolier ne crée pas beaucoup d’emplois. Si le statu quo se maintenait, la croissance de l’économie iranienne ralentirait à 0.6 percent en 2015 avec des répercussions sur le chômage, les déficits budgétaires et l’inflation. Dans ce contexte, le gouvernement a adopté une politique contradictoire des finances publiques qui est prise en compte dans le nouveau budget. La priorité est accordée aux dépenses d’équipement, les riches sont exclus de l’actuel système de transferts monétaires et une augmentation de 5 percent des prix de l’essence devrait maintenir le déficit budgétaire à 3.4 percent en 2015 et 2016 (Tableau 1.1).

En Algérie, la croissance devrait chuter à la moitié de son taux en 2015, à 2.6 percent. Le pays fait face à un doublement de son déficit budgétaire (les subventions à elles seules représentent 18 percent du PIB) en pourcentage du PIB en 2015 et un déficit du compte courant qui se creuse, passant de 4.2 percent du PIB en 2014 à 18.6 percent en 2015. Le ralentissement de l’activité économique pèse sur le taux du chômage, qui devrait augmenter de 9.8 percent en 2013 à 10.6 et 11 percent en 2015 et 2016 respectivement.

Les perspectives économiques sont sombres pour les pays qui sont déjà en conflit, à savoir l’Iraq, la Libye, le Yémen et la Syrie. L’économie irakienne a été frappée de plein fouet par la rébellion de l’État islamique et les vastes dépenses militaires. La croissance devrait devenir négative en 2015 après une contraction de 0.5 percent en 2014, imputable à la baisse de l’activité économique dans les zones occupées par l’État islamique. Le déficit budgétaire en pourcentage du PIB devrait doubler et atteindre 10.6 percent en raison des dépenses militaires élevées et de la récente décision du gouvernement de maintenir intactes les subventions du pétrole, avec les faibles prix du pétrole4. Le niveau actuel des dépenses est élevé, les salaires et subventions (plus particulièrement pour le secteur de l’énergie) représentant près de 70 percent des dépenses du gouvernement. Le secteur public constitue plus de 50 percent des emplois en Iraq, ce qui ne laisse guère de place pour les dépenses d’équipement. Les

3 Le P5+1 et l’Iran ont publié, le 2 avril, une déclaration commune sur les points généraux de l’accord. Toutes les parties poursuivront les négociations visant à réaliser un accord global en juin.4 L’essence fournie par l’État est actuellement vendue à Dinar 450 ($0.387/le litre) à Bagdad, contre Dinar 1,000/le litre dans les stations privées.

RAPPORT DE SUIVI ÉCONOMIQUE DE LA RÉGION MENA AVRIL 2015 5

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investissements publics sont en baisse et la plupart des dépenses d’équipement sont perturbées à cause du choc budgétaire.

La Libye est en récession. Outre l’impact des faibles prix du pétrole, le conflit violent a interrompu les exportations de pétrole, qui représentent une source importante de recettes extérieures pour le gouvernement. Selon les estimations, l’économie s’est contractée de 24 % en 2014, après une contraction de l’ordre de 14 % en 2013. Il existe des signes d’une atténuation du conflit politique et deux ports pétroliers ont rouvert, mais une reprise rapide de la fourniture de pétrole brut est peu probable et la croissance restera faible en 2015. Le déficit budgétaire est estimé à plus de 40 percent du PIB en 2014 et en 2015. Les principaux facteurs déterminants de ce déficit budgétaire alarmant sont, en plus de la baisse des recettes imputables aux faibles prix du pétrole, la masse salariale et les subventions actuelles estimées à 70 percent des dépenses. Les dépenses d’équipement ont chuté à un cinquième de leur niveau d’avant la révolution. La Libye compte sur ses vastes réserves de change, qui ont considérablement diminué. Les estimations de la Banque centrale de Libye montrent que les réserves de change se chiffraient à $85.5 milliards en décembre 2014, en baisse de 40 percent par rapport au niveau de 2013.

Au Yémen, le conflit entre une multitude de forces qui luttent pour gouverner le pays pèse lourdement sur l’économie, réduisant la croissance à zero percent en 2014, contre 4.8 percent l’année précédente. En plus de l’instabilité politique, l’activité économique est entravée par le sabotage des champs pétroliers et la faiblesse des infrastructures, qui entraînent de graves pénuries de carburant et des coupures de courant. L’économie devrait se contracter de 2.8 percent en 2015, en raison de l’accroissement des risques politiques et sécuritaires. Selon les estimations, les exportations de pétrole baisseront de 10 percent en 2015 après une autre baisse de 11 percent en 2014, pour se situer à 140 mille barils par jour en moyenne. Le déficit budgétaire a augmenté à 8.7 percent du PIB en 2014, car les réformes des subventions ont été annulées et des économies n’ont pas été réalisées. La tendance devrait se poursuivre en 2015. En Syrie, la guerre civile a entraîné une baisse brutale des recettes publiques en même temps qu’une augmentation des dépenses militaires, ce qui a considérablement aggravé le déficit budgétaire. En dépit de la rareté des données, certains prévisionnistes tablent sur un prochain ralentissement du taux de contraction économique. Le Service d’information économique, en particulier, prévoit un taux de croissance positif de l’ordre de 2 percent en 2015, induit en grande partie par la relocalisation des principales entreprises dans des régions côtières plus stables d’une zone industrielle élargie. Les exportations ont commencé d’augmenter pour la première fois depuis 2011, mais l’investissement reste au point mort, du fait de la persistance de la violence et de l’instabilité politique.

Les faibles prix du pétrole et certaines réformes des politiques, en particulier en Égypte et au Maroc, ont permis aux économies des pays importateurs de pétrole de se redresser, quoique lentement. En fait, ce groupe de pays contribue à maintenir la croissance globale de la région MENA à 3 percent. En Égypte, les faibles prix du pétrole ont permis de contenir les pressions inflationnistes intérieures induites par les réformes des subventions introduites en juillet 2014. Certaines estimations montrent que les faibles prix du pétrole pourraient réduire le déficit budgétaire de près de 2 percent du PIB en 2016. À la Conférence

RAPPORT DE SUIVI ÉCONOMIQUE DE LA RÉGION MENA AVRIL 2015 6

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sur le développement économique tenue à la mi-mars, l’Égypte a levé $36.5 billion, les pays du Golfe annonçant un programme de contributions d’une valeur de $12.5 billion. Tous ces facteurs pourraient contribuer à stimuler la croissance au cours des prochaines années, bien qu’avec certains retards si les engagements ne se concrétisent pas tous. Le tourisme et les industries manufacturières ont affiché des taux de croissance à deux chiffres en 2014. Le Canal de Suez, la construction et le bâtiment ont aussi réalisé, en 2014, une solide performance qui devrait se maintenir en 2015. D’après les estimations, la croissance dépassera les 4 percent en 2016, avoisinant les taux enregistrés durant la période antérieure à la révolution.

La reprise économique en Tunisie a été lente en partie du fait de la faible demande extérieure émanant de la zone euro caractérisée par une situation économique difficile et le ralentissement de la demande intérieure. La Banque mondiale prévoit une augmentation modérée de la croissance, de l’ordre d’un demi-point de pourcentage en 2015, passant à 2.6 percent et remontant progressivement pour atteindre 3.4 percent l’année suivante. Cette amélioration devrait se produire à la suite d’une reprise modérée dans les secteurs des industries manufacturières et du tourisme (bien que l’attaque récente du Musée du Bardo ait eu des répercussions sur les arrivées de touristes 5). Les faibles prix du pétrole conjugués à l’assainissement des finances publiques, ont contribué à réduire le déficit budgétaire, de 6.8 percent en 2013 à 4.2 percent en 2016, ce qui permettra de limiter l’inflation à environ 4 percent.

Les économies de la Jordanie et du Liban se redressent lentement, mais régulièrement, bien qu’elles soient marquées par les guerres civiles dans les pays voisins. L’économie jordanienne devrait enregistrer une croissance supérieure à 3 percent en 2015, soit une légère amélioration par rapport à la croissance observée depuis 2010. L’accélération de la croissance tient essentiellement à une augmentation de l’investissement public à la suite des dons accordés par le CCG et d’une contraction du déficit commercial. Au Liban, en dépit d’une impasse politique et des retombées du conflit de l’État islamique, les faibles prix du pétrole ont permis la reprise de l’activité économique, même si la croissance devait se maintenir au faible taux d’environ 2.5 percent en 2015 et en 2016. Mais une reprise de la croissance, similaire à celle qui a été observée au cours des années 2000, pourrait se produire si le pays sortait de l’impasse politique et procédait à un certain assainissement des finances publiques.

Les Territoires palestiniens (Cisjordanie et Gaza) se ressentent encore des effets de la guerre de Gaza de 2014 et de la précarité de la situation politique et sécuritaire. Après 7 années de croissance ininterrompue, l’économie palestinienne a subi une contraction de 0.8 percent en 2014, avec une forte contraction de 15 percent de l’économie de Gaza. La guerre de Gaza de juillet-août 2014, non seulement a causé des dégâts physiques estimés à près de $2.5 billion, mais elle a aussi eu des répercussions considérables sur l’économie gazaouie (Encadré 1.1). L’économie de la Cisjordanie, en revanche, a enregistré une croissance de 4.4 percent, en grande partie induite par les investissements dans la construction. Dans l’ensemble, l’économie palestinienne devrait réaliser une croissance inférieure à 1 percent en 2015. Le rythme du processus de reconstruction à Gaza est plus lent que prévu, en raison de l’insuffisance des financements des bailleurs de fonds et des restrictions imposées par Israël à

5 Le ministère tunisien du Tourisme a signalé que près de 3,000 réservations ont été annulées depuis l’attaque du Musée du Bardo le 18 mars 2015. L’industrie du tourisme représente plus de 12 percent du PIB.

RAPPORT DE SUIVI ÉCONOMIQUE DE LA RÉGION MENA AVRIL 2015 7

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l’importation des matériaux de construction à Gaza. Près de 70,000 ménages sont toujours déplacés dans le pays, ce qui crée un environnement particulièrement fragile, qui pourrait entraîner davantage de conflit. Le chômage a augmenté à 27 percent en 2014 (43 percent à Gaza et 17 percent en Cisjordanie). Le chômage des jeunes à Gaza, qui a grimpé à environ 60 percent en 2014, est particulièrement alarmant. Les estimations préliminaires indiquent que le taux de pauvreté à Gaza a progressé de 28 percent en 2013 à 39 percent en 2014.

RAPPORT DE SUIVI ÉCONOMIQUE DE LA RÉGION MENA AVRIL 2015 8

Encadré 1.1 Les effets à long terme sur Gaza des blocus imposés par Israël et de ses attaques militaires

En 2005, un an avant l’élection du Hamas et l’imposition par Israël du blocus commercial total sur Gaza, le PIB par habitant à Gaza était égal à celui de la Cisjordanie, à $1304, soit un niveau supérieur à celui de nombreux autres pays et régions en développement (Tableau B1). Au cours des 7 années suivantes, plus particulièrement après 2007, le PIB par habitant à Gaza a régressé de 2.3 percent par an, alors qu’en Cisjordanie il augmentait de 8.1 percent par an, et dans les autres régions les taux de croissance s’échelonnaient entre 2.2 et 10.8 percent, excepté au Yémen.

Depuis 2007, la population de Gaza a subi un blocus commercial total et trois attaques militaires destructrices, en 2008-2009, 2012 et 2014. Les dégâts causés par chacun de ces événements à l’économie gazaouie sont considérables. En prenant la Cisjordanie (qui n’a pas été soumise à un blocus) comme le cas « contrefactuel » et en recourant à diverses techniques de rapprochement et de lissage des données, on peut voir que l’écart du revenu par habitant entre la Cisjordanie et Gaza s’est considérablement creusé après 2006. L’écart s’est creusé même davantage après l’opération « Plomb durci », et a continué de s’élargir jusqu’à la fin de 2012 (Figure B1). Les tendances lissées montrent qu’en 2006, l’année avant que le Hamas ne prenne le contrôle de Gaza, le PIB par habitant à long terme estimatif à Gaza représentait 71.5 percent de celui en Cisjordanie (Figure B1(b)). Après 2006, l’écart s’est creusé encore plus. Le graphique montre la perte annuelle pour l’économie gazaouie en termes de PIB par habitant du fait du blocus imposé par Israël et de l’opération « Plomb durci » qu’il a menée en 2008, telle qu’elle est représentée par la distance verticale entre le ratio réel (la ligne bleue) et le ratio du cas « contrefactuel » (la ligne rouge). La perte annuelle estimative subie par le PIB par habitant à Gaza par rapport à son niveau potentiel entre 2006 et 2008 est de 5 percent. Après l’attaque militaire israélienne de 2008, cet écart s’est accru à 8.3 percent, atteignant 15.2 percent en 2012. De 2007 à 2012, la perte totale s’est chiffrée à 51.6 percent du PIB par habitant potentiel. Les résultats montrent qu’en plus des dégâts à court terme qu’ils causent, les attaques militaires momentanées et les blocus israéliens ont des répercussions destructrices sur l’économie gazaouie.

Tableau B1. PIB par habitant à Gaza et dans les pays, régions et groupes servant de comparaison (constant 2005, USD) Bande

de GazaCisjordanie Égypte Yémen Afrique

sub-saharienne

Asie de l’Est et Pacifique (en

développement)

MENA (pays en développement)

Pays à revenu intermédiaire

2005 1304 1304 1249 832 870 1623 2180 19382012 1097 2041 1560 729 1005 2855 2553 2729Croissance% -2.3 8.1 3.5 -1.8 2.2 10.8 2.4 5.8

Figure B1a. PIB réel par habitant Figure B1b. Ratio du PIB par habitant de Gaza à celui de la Cisjordanie

1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 20120

500

1,000

1,500

2,000

2,500

West-Bank Gaza-Strip

US$

$US

1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 201240

60

80

100

Actual Ratio Estimated Counterfactual Ratio

The Loss at a specific year is the distance between the red and blue line in that year

Source: Abu-Bader, S., 2015. The Effects of Israeli Blockades and Assaults on the Economy of Gaza. Mimeo, Banque mondiale.

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Tableau 1.1 Perspectives macroéconomiques Croissance du PIB réel

%Solde budgétaire

% du PIBSolde du compte courant

% du PIB 2011 2012 2013 2014e 2015p 2016p 2011 2012 2013 2014e 2015p 2016p 2011 2012 2013 2014

e2015p 2016p

MENA 4.8 5.8 2.9 3.2 3.1 5.2 3.9 5.9 2.7 0.3 -8.0 -6.5 13.0 12.3 9.1 5.8 -5.3 -2.9

MENA en développement 1.1 5.0 0.2 1.6 2.0 6.7 -3.6 -2.9 -6.2 -7.4 -9.1 -6.7 4.5 2.1 0.0 -3.1 -6.8 -4.0

Exportateurs de pétrole 5.2 6.3 2.8 3.3 2.8 5.3 6.4 8.9 5.5 2.5 -7.8 -6.0 16.8 16.2 12.4 8.0 -5.1 -2.3

MENA revenu élevé (CCG) 7.8 6.3 4.9 4.3 3.8 3.8 12.4 14.7 11.3 7.4 -7.0 -6.2 22.6 22.4 17.8 14.0 -3.8 -1.9

Bahreïn 1.9 3.6 5.3 4.0 3.0 3.5 -0.1 -2.6 -3.8 -4.9 -11.9 -11.0 19.2 14.3 14.2 12.9 8.5 7.7

Koweït 10.4 7.5 2.2 1.6 2.1 2.4 34.4 36.0 31.4 21.1 9.0 15.6 40.9 46.4 41.7 35.6 16.9 22.7

Oman -1.1 7.1 3.9 4.1 3.7 3.6 7.5 2.5 4.2 -1.0 -16.7 -14.4 16.0 12.6 8.6 2.2 -10.0 -9.5

Qatar 13.0 6.2 6.1 5.9 3.0 3.7 15.4 16.8 14.2 9.7 6.5 0.4 38.9 33.2 25.8 21.2 2.3 5.5

Arabie saoudite 8.5 6.8 5.1 4.3 4.6 4.1 8.3 13.2 8.7 5.7 -16.2 -15.1 19.9 19.9 16.2 12.4 -11.8 -9.8

Émirats arabes unis 4.9 4.8 5.2 4.7 3.1 4.0 9.3 9.9 7.2 5.7 -6.2 -4.4 12.2 12.4 7.4 5.7 -5.1 -4.0

En développement exportateurs de pétrole

0.4 6.3 -1.3 1.1 0.9 8.1 -1.5 0.2 -3.7 -5.9 -9.3 -5.6 9.2 7.0 3.7 -2.0 -7.4 -3.0

Libye -62.1 104.5 -13.6 -24.0 2.0 52.0 -15.4 27.8 -4.0 -43.5 -42.8 2.6 9.2 29.1 13.6 -32.8 -47.3 -1.0

Yémen -12.7 2.4 4.8 0.0 -2.8 2.8 -5.7 -12.4 -7.8 -8.7 -6.5 -6.4 -2.8 -1.6 -2.9 -1.3 -0.8 -0.4

Algérie 2.8 3.3 2.8 4.1 2.6 3.9 -1.5 -5.0 -1.4 -6.8 -14.9 -11.6 9.9 6.0 0.4 -4.2 -18.6 -15.4

Iran 3.0 -6.6 -1.9 3.0 0.6 1.3 -1.4 -1.9 -2.2 -1.4 -3.4 -3.4 11.0 6.3 7.2 3.6 1.6 1.9 Iraq 10.2 10.3 4.2 -0.5 -1.0 5.5 4.7 4.1 -5.9 -4.9 -10.6 -6.0 12.0 6.7 2.1 -2.8 -8.3 -1.8

Syrie -3.4 -19.5 -20.6 0.5 1.9 … -12.1 -17.0 -12.9 -10.7 -9.2 … -14.7 -15.3 -12.6 -12.4 -12.4 …

Importateurs de pétrole 2.4 2.7 2.7 2.3 3.9 4.1 -8.5 -9.4 -11.0 -10.1 -8.7 -8.3 -6.1 -7.9 -7.0 -5.0 -6.0 -5.4

Égypte 1.8 2.2 2.1 2.2 4.3 4.3 -9.8 -10.6 -13.7 -12.8 -11.3 -10.5 -2.6 -3.1 -2.1 -0.8 -3.3 -3.1

Tunisie -1.9 3.7 2.3 2.2 2.6 3.4 -3.3 -5.5 -6.8 -4.8 -4.5 -4.2 -7.4 -8.2 -8.4 -8.9 -8.5 -7.1

Djibouti 4.5 4.8 5.0 6.0 6.5 7.0 -0.7 -2.7 -5.9 -12.0 -14.1 -12.5 -14.1 -20.3 -23.3 -27.4 -27.7 -21.8

Jordanie 2.6 2.7 3.0 3.1 3.5 3.9 -12.7 -10.5 -14.1 -13.5 -5.4 -5.1 -10.2 -15.2 -10.3 -7.1 -6.6 -5.2

Liban 2.0 2.2 0.9 2.0 2.5 2.5 -6.4 -8.7 -9.5 -7.0 -7.2 -10.1 -10.9 -22.7 -26.6 -22.2 -16.7 -16.1

Maroc 5.0 2.7 4.4 2.6 4.6 4.8 -6.7 -7.4 -5.4 -5.0 -4.5 -3.7 -8.0 -9.7 -7.6 -5.8 -5.0 -4.3

Cisjordanie et Gaza 12.4 6.3 2.2 -0.8 0.9 4.3 -16.9 -15.1 -12.5 -12.1 -14.9 -13.8 -32.0 -23.1 -23.0 -27.7 -26.0 -27.8

Source : Banque mondiale et Economist Intelligence Unit.

RAPPORT DE SUIVI ÉCONOMIQUE DE LA RÉGION MENA AVRIL 2015 9

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Tableau annexe : Projection entendue

Croissance du PIB réel %

Solde budgétaire% du PIB

Inflation %

Compte courant% du PIB

2015 2016 2015 2016 2015 2016 2015 2016

MENA 3.3 3.9 -5.8 -4.4 3.5 3.8 -1.7 -0.6

CCG 3.2 3.6 -4.8 -2.6 2.6 3.0 1.7 3.9

MENA en développement 3.5 4.1 -7.1 -6.5 4.3 4.6 -5.2 -5.1

En développement exportateurs de pétrole

3.2 4.3 -7.2 -6.4 4.4 4.9 -0.1 0.5

En développement importateurs de pétrole

3.6 4.0 -7.1 -6.5 4.3 4.4 -6.2 -6.2

Algérie 3.0 3.1 -7.2 -6.4 4.3 4.2 … …

Bahreïn 2.8 3.1 -11.2 -8.4 2.4 2.7 -3.1 -1.9

Égypte 3.9 4.4 -11.1 -9.8 10.2 9.2 -1.7 -2.5

Iraq 3.4 5.5 … … 4.5 5.6 -0.1 0.5

Jordanie 3.6 3.9 -4.3 -3.9 2.6 3.2 -4.7 -4.5

Koweït 2.1 2.6 4.9 5.3 2.9 3.2 12.4 16.9

Liban 2.2 2.9 -8.8 -8.7 2.6 3.2 -14.3 -14.5

Maroc 4.5 4.6 -4.2 -3.7 1.1 1.7 -3.1 -2.8

Oman 2.5 2.9 -11.0 -6.5 1.7 2.2 -7.5 -4.3

Qatar 5.9 6.1 5.0 3.5 3.4 3.7 8.4 8.3

Arabie saoudite 2.4 3.2 -12.4 -8.1 2.7 3.1 -3.7 0.2

Tunisie 3. 4.0 … … 4.8 4.9 -7.2 -6.5

EAU 3.4 3.9 -4.1 -1.6 2.7 3.0 3.8 4.5

Source : FocusEconomics, mars 2015.

RAPPORT DE SUIVI ÉCONOMIQUE DE LA RÉGION MENA AVRIL 2015 10

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Vers un nouveau contrat social au Moyen-Orient et en Afrique du Nord

Figure 2.1 Taux de croissance du PIB (%) Solde budgétaire (% du PIB, (-) déficit)

Un instantané du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord (MENA) à ce jour montre l’image d’une région diverse et décourageante. La Syrie, l’Iraq, la Libye et maintenant le Yémen sont plongés dans des conflits violents qui dévastent les vies des populations, les infrastructures et les économies nationales, avec des retombées sur les pays voisins, comme le Liban, la Jordanie et la Tunisie. Rien que le coût de la guerre en Syrie et de l’expansion de l’État islamique a été estimé à $35 billion en termes de pertes de production entre le milieu de 2011 et le milieu de 2014 (Ianchovichina et Ivanic, 2014). Les pays en transition — Maroc, Tunisie, Égypte et Jordanie — réforment lentement mais régulièrement leurs économies, bien que dans un contexte de croissance anémique, de déficits élevés des finances publiques et de chômage croissant des jeunes (Figure 2.1).

2000-10 11 12 13 14e-2

0

2

4

6

-120

0

120

Jordan Lebanon Egypt Morocco TunisiaLibya (RHS)

Jordan Egypt Libya Lebanon Tunisia Morocco-18

-12

-6

0

2011 12 13 14e

Chômage des jeunes (% du total de la population active, âgés de 15 à 24 ans)

Source : Banque mondiale

Dans le même temps, les pays en développement riches en ressources —Algérie, Iran et Iraq— ont des problèmes chroniques de chômage et de manque de diversification, ce dernier se manifestant par la forte concentration des exportations sur un petit nombre de produits de base (Figure 2.2). La récente

RAPPORT DE SUIVI ÉCONOMIQUE DE LA RÉGION MENA AVRIL 2015 11

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baisse des prix du pétrole exerce des pressions sur leurs budgets, ainsi que sur les budgets des pays à revenu élevé du CCG, qui sont tous dominés par la masse salariale du secteur public.

Figure 2.2 Indice de concentration

Source : CNUCED. NB : L’indice de concentration est l’indice de Herfindahl-Hirschmann compris entre 0 et 1. Un indice voisin de 1 dénote un marché plus concentré. Le nombre de produits se fonde sur la classification des produits de la CTCI, Révision 3, au niveau du groupe à trois chiffres. Ce nombre ne comprend que les produits qui sont supérieurs à 100,000 dollars ou représentent plus de 0.3 per cent du total des exportations ou des importations du pays ou groupe de pays. Le nombre maximum de produits est de 261.

Mais une perspective à long terme — un film plutôt qu’un instantané — indique une région plus homogène et un avenir plus prometteur. En dépit de leurs différences actuelles, les pays du MENA suivent depuis l’indépendance plus ou moins le même modèle de développement. L’État offre des services gratuits de santé et d’éducation pour tous. Les denrées alimentaires et le carburant étaient subventionnés, à hauteur de 10 percent du PIB récemment. L’État était le principal employeur du secteur structuré (Figure 2.3a). Il se peut qu’en retour des largesses de l’État, la participation citoyenne était limitée. D’après les données comparables au plan international, tous les pays de la région MENA étaient situés en dessous de la ligne de régression reliant « voix et responsabilité » avec le revenu par habitant (Figure 2.3b). Certaines personnes ont présenté ce modèle de développement comme étant un « arrangement autoritaire » (Yousef, 2004) ou un contrat social.

Jordan Egypt Iraq Tunisia Yemen Morocco0

20

40

60

80

100

Public Formal private Informal private Self Employed & unpaid5 6 7 8 9 10 11 12

-3

-2

-1

0

1

2

-1.29

0.04

-0.89

-1.12

0.65

0.24

-0.60

1.441.46

-1.35

0.91

-1.32

1.31

0.63

0.93

0.50

1.10

-0.82

-1.22

-0.24

0.820.69

-0.27

-0.65-0.57

-1.59

0.74

-0.44

-0.83

1.22

0.41

0.02-0.13

0.04-0.01

0.97 1.04

0.66

-0.86

0.29

-1.01-1.18

0.47

0.11

-1.82

0.03

0.29

0.01

-0.39

0.06

0.94 0.98

-0.02

0.58

-1.41

0.97

-0.62

1.141.181.05

-1.78

0.31

-1.16

1.67 1.65

-1.48

-0.23-0.43

-0.98

0.51 0.44

-0.11-0.26

-2.17

-0.55-0.33

-1.03

1.32

1.081.07

-1.94

0.51

-0.95

-1.34-1.35

-0.11

-1.39

Natural log GDP per capita

Voice

and a

ccou

ntab

ility

Figure 2.3a Situation de l’emploi (dernières données disponibles, pourcentage) Figure 2.3b Voix et responsabilité

RAPPORT DE SUIVI ÉCONOMIQUE DE LA RÉGION MENA AVRIL 2015 12

1995 20130.0

0.3

0.5

0.8

1.0

Iraq

Libya

Saudi Arabia

Kuwait

Oman

Iran

Yemen

Algeria

Qatar

United Arab Emi-rates

Bahrain

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Ce contrat social commun a obtenu des résultats relativement satisfaisants au plan économique comme social. Dans les années 2000, la croissance économique était de 4-5 percent en moyenne par an 6. Les taux de pauvreté étaient faibles et décroissaient. Presque tout le monde terminait le cycle de l’enseignement primaire, et les taux d’inscription dans l’enseignement secondaire et supérieur —en particulier pour les filles— étaient élevés et augmentaient (Figure 2.4a). La région MENA affichait la baisse la plus rapide des taux de mortalité infantile au monde (Figure 2.4b). Contrairement aux perceptions, l’inégalité — mesurée par les indicateurs classiques comme le coefficient de Gini—était plus faible que dans les pays comparables ailleurs et était constante ou en baisse (Figure 2.4c).

Figure 2.4a Années d’instruction des femmes Figure 2.4b Taux de mortalité infantile

1970 20100

2

4

6

8

10

East Asia & Pacific Europe & Central Asia Latin America & Caribbean Middle East & North Africa

South Asia Sub-Saharan Africa

years

of ed

ucatio

n com

pleted

ove

r 15

Source : Banque mondiale

1970 20100

50

100

150

200

250

East Asia & Pacific Europe & Central Asia Latin America & Caribbean Middle East & North Africa

South Asia Sub-Saharan Africa

morta

lity ra

te, inf

ant (pe

r 1,00

0 live

births

)

Figure 2.4c Inégalité dans la région MENA et à travers le monde (pourcentage)

Source : Données utilisées dans Lakner et Milanovic, 2013). Note : DZA signifie l’Algérie, MAR le Maroc et PSE la Palestine. Le coefficient de Gini est un nombre compris entre 0 et 1, 0 correspondant à la situation d’égalité parfaite (où chacun a le même revenu) et 1 à la situation d’inégalité parfaite (où une personne a tout le revenu —et toute autre personne a zéro revenu).

6 Par contre, la croissance du revenu par habitant était plus lente et la croissance de la productivité assez faible (Schiffbauer et coll., 2015).

RAPPORT DE SUIVI ÉCONOMIQUE DE LA RÉGION MENA AVRIL 2015 13

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Cependant, vers la fin des années 2000, certains signes montraient que ce modèle de développement, qui avait tant accompli, commençait à sombrer. La combinaison des niveaux élevés des subventions et d’importantes masses salariales du secteur public était trop lourde pour les budgets publics. Les déficits budgétaires ont commencé à augmenter et, pour éviter qu’ils n’augmentent même davantage, l’emploi du secteur public a ralenti et la part du secteur public dans l’emploi total a commencé à diminuer. Mais le secteur privé structuré ne s’est pas développé suffisamment vite pour absorber le grand nombre de jeunes instruits entrant sur le marché du travail. Les taux de chômage ont grimpé aux niveaux les plus élevés du monde en développement. L’emploi informel s’est développé, dominé en grande partie par les hommes. En partie du fait de l’insécurité associée au secteur informel, les femmes ont été découragées d’intégrer le marché du travail. Leur participation au marché du travail est actuellement plus faible dans la région MENA que partout ailleurs au monde (Figure 2.5).

Figure 2.5 Taux de participation des femmes au marché du travail (pourcentage)

Source : Banque mondiale. Note : AFR signifie l’Afrique subsaharienne ; EAP l’Asie de l’Est et Pacifique ; LAC l’Amérique latine et Caraïbes ; ECA l’Europe de l’Est et Asie centrale ; et SAR l’Asie du Sud.

Entretemps, tout en continuant de financer et de fournir des services de santé et d’éducation, le secteur public n’atteignait pas ses objectifs en matière de qualité et d’équité. Les élèves de l’enseignement secondaire, y compris ceux des pays à revenu élevé comme le Qatar et les EAU, obtenaient des résultats médiocres aux tests internationaux standardisés (Figure 2.6). En réaction à la faible qualité, les gens avaient recours au secteur privé, ce qui a compromis l’équité. En Égypte, plus de 70 percent des élèves utilisaient des cours privés (private tutoring (Dang et Rogers, 2008)) , ce qui désavantageait encore plus les élèves pauvres qui ne pouvaient pas se les offrir. Face à des taux d’absentéisme des médecins de 20-30 percent dans les centres de santé publics en Égypte, au Maroc et au Yémen (Brixi et coll., 2015), les malades recherchant désespérément les soins se tournaient vers les centres de santé privés, en payant souvent des tarifs exorbitants. Comme l’a fait remarquer une femme en Égypte, « Vous pouvez aller au centre de santé privé et perdre votre argent, ou aller au centre de santé public et perdre votre vie »

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MENA

SAR

ECA

LAC

EAP

AFR

0 10 20 30 40 50 60 70

21.6

30.5

50.8

53.6

61.3

63.6

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(Banque mondiale, 2013). Au sein des pays, la qualité de la prestation de services varie considérablement, les zones plus pauvres étant les plus défavorisées (Figure 2.7).

Figure 2.6 Résultats en math au PISA Figure 2.7 Absentéisme des médecins par district au Maroc

7 8 9 10 11 12350

400

450

500

550

600

Jordan Qatar

Singapore

Tunisia

UAE

Vietnam

Natural Log GDP per capita

PISA m

ath 20

12

Source : PISA, 2012. Source : Enquête de suivi des dépenses publiques Maroc 2013.

Les services d’infrastructure, également, se dégradaient, avec les pannes d’électricité qui étaient de plus en plus fréquentes et les ressources en eau renouvelables qui s’amenuisaient à un rythme alarmant (Figure 2.8).

Figure 2.8 Coupures d’électricité Ressources en eau renouvelables

MENA SA SSA EAP LAC ECA0

5

10

15

20

25

0

1

2

3

4

5

6

76.1

4 4.9

1.61.3 1.2

# of electrical outages in a typical month Losses due to electrical outages (% of annual sale, RHS)

Nomb

re de

change

ments

électr

iques

en un

mois

type

1992 1993 19941995 1996 19971998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 20100

1000

2000

3000

4000

956

656

MENA Developing Water stress Water scarcity

Mètres

cubse

par ha

bitant

Source : Banque mondiale

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Rabat-Salé-Zemmour-Zaer

Grand Casablanca

Souss-Massa-Drâa

Marrakech-Tensift-El Haouz

Oriental

Hoceima Taza Taounate

Meknès-Tafilalet

Tangier-Tétouan

Chaouia-Ouardigha

Doukkala-Abda

Tadla-Azilal

Fès-Boulemane

21%

23%

31%

34%

35%

38%

51%

53%

55%

58%

73%

81%

% Absent of All Doctors Employed

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Les signes les plus évidents des défaillances du contrat social étaient peut-être les révolutions du « Printemps arabe » en Tunisie, en Égypte, en Libye et au Yémen, qui ont été suivies des protestations politiques au Bahreïn, au Maroc et en Jordanie. Les populations étaient descendues dans la rue pour exiger des emplois, de meilleurs services publics et la dignité. Même dans des pays qui n’avaient pas été le théâtre de protestations populaires, comme l’Algérie, le Koweït et l’Arabie saoudite, des préoccupations similaires au sujet du chômage et de la qualité de l’éducation étaient soulevées dans de multiples enceintes.

Les lendemains du Printemps arabe ont été si turbulents, et dans certains cas si violents, que les problèmes de fond demeurent. L’investissement et partant les taux de croissance ont ralenti. Les taux de chômage, plus particulièrement chez les jeunes et les femmes, ont augmenté. Et des données provenant des observations sur le terrain, comme le fait que les ordures ne sont pas enlevées à Tunis, montrent que les services publics se sont dégradés.

Afin de proposer des solutions à ces problèmes, il importe de bien comprendre les raisons pour lesquelles le contrat social initial atteignait ses limites. Pourquoi, au moment où le secteur public se réduisait, le secteur privé n’a-t-il pas créé suffisamment d’emplois ? À quoi tient la défaillance des services publics au plan de la qualité et de l’équité, alors qu’ils avaient obtenu de si bons résultats dans un premier temps ?

Emplois du secteur privé

Dans la région MENA, tout comme dans les économies à forte croissance, les jeunes entreprises et les startups créent le plus d’emplois, comme le montre la Figure 2.9 ci-dessous. Pratiquement toutes les créations nettes d’emplois au Liban et en Tunisie étaient le fait des jeunes entreprises à leur période de démarrage, c’est-à-dire au cours des quatre premières années suivant leur établissement. Par exemple, en Tunisie, les microstartups ont créé 580,000 emplois entre 1996 et 2010, soit 92 percent de toutes les créations nettes d’emplois. Au Liban, les petites startups ont créé quelque 66,000 emplois entre 2005 et 2010, ce qui représente 177 percent des créations nettes d’emplois. Venaient ensuite les jeunes grandes entreprises avec 200–999 salariés qui ont créé 12,000 emplois (Schiffbauer et coll., 2015).

Figure 2.9 Création nette d’emploi, par taille de l’entreprise et âge

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Source : Schiffbauer, et coll, 2015.

Le problème qui se pose dans la région MENA est de deux ordres. Tout d’abord, il ne se crée pas un nombre suffisant de jeunes entreprises. Un nombre suffisant d’entreprises ne « meurent » pas afin de laisser la place aux nouvelles entreprises pour entrer sur le marché (Figure 2.10a). La région MENA a l’un des plus faibles taux de nouvelles entreprises entrant sur le marché (Figure 2.10b). Dans l’ensemble, l’âge médian des entreprises est le plus élevé du monde en développement (Figure 2.10c).

Figure 2.10a Taux des entrées et des sorties (en pourcentage de toutes les entreprises)

Figure 2.10b Densité des entrées du secteur structuré

Bulgaria Chile

Croatia Brazil SerbiaOman

ColombiaTunisia Turkey

Morocco GhanaMexico Jordan

Thailand

Algeria

Sri Lanka Iraq Egyp

t Syria0.0

0.5

1.0

1.5

2.0

2.5

3.0

3.5

4.0 Nombre de nouvelles sociétés à responsabilité limitée par 1,000 habitants en âge de travailler

Moyenne de tous les 128 pays

Moyenne de tous les 91 pays non membres de l'OCDE

Europe & Central Asia East Asia & Pacific South Asia Africa Latin America & the Caribbean

Middle East & North Africa

OECD0

5

10

15

20

Source : Schiffbauer, Marc ; et coll., 2015.

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Figure 2.10c Âge médian des entreprises manufacturières (années)

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Ensuite, la plupart des petites entreprises restent petites ou disparaissent. Au Maroc et en Tunisie, seule une infime fraction de microentreprises ou de petites entreprises à une personne étaient passées à la catégorie des entreprises plus grandes, en dix ans (Tableau 2.1).

Tableau 2.1 Matrices des transitions à long terme (transitions décennales)

Tunisie – Toutes les entreprises confondues (situation à l’année t+10) Maroc – Industries manufacturières (situation à l’année t+10)

Situation à l’année t

Sorties 1-personne

Micros Petites

Grandes

Situation année t Sorties Micros Petites Grandes

1-personne 30.8% 65.5% 3.4% 0.3% 0.0%

Micros 19.0% 41.2% 37.0% 2.8% 0.1% Micros 52.1% 36.5% 11.3% 0.1%

Petites 14.8% 28.4% 14.0% 39.5%

3.3% Petites 44.6% 9.5% 41.2% 4.8%

Grandes 15.8% 23.3% 2.9% 15.2%

42.7% Grandes 40.7% 0.6% 12.9% 45.9%

Source : Schiffbauer, et coll., 2015.

Pourquoi existe-t-il si peu de jeunes entreprises et pourquoi ne se développent-elles pas ? D’après les enquêtes auprès des entreprises, les quatre premières raisons sont l’incertitude au plan macroéconomique et de la réglementation, l’instabilité politique et la corruption (Figure 2.11). Il est intéressant de noter qu’un obstacle fréquemment cité dans la littérature populaire — l’accès à la finance — ne figure pas parmi les 10 premiers. Le rôle de l’instabilité macroéconomique et politique est bien connu. C’est ainsi que Burger et coll. (2015) montrent que l’instabilité détourne l’investissement étranger des entreprises du secteur manufacturier, qui pourraient créer des emplois et transférer les technologies, vers l’immobilier et les industries extractives.

Figure 2.11 Obstacles à l’exercice de l’activité économique

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Source : World Bank Enterprise Surveys 2006-2010.

En ce qui concerne l’incertitude au plan de la réglementation et la corruption, il existe de nombreuses voies par lesquelles ces obstacles entravent le développement des entreprises et, par conséquent, la croissance des emplois. Des éléments de preuve récents sur les entreprises proches des milieux politiques en Tunisie (sous Ben Ali) et en Égypte (sous Mubarak) révèlent que ces entreprises bénéficiaient d’un traitement préférentiel, qui comprenait la protection contre la concurrence intérieure et extérieure (Rijkers et coll., 2014). De ce fait, les secteurs qui étaient proches des milieux politiques n’étaient pas compétitifs, ce qui rendait leur accès difficile pour les nouvelles entreprises. Parfois, les entreprises proches des milieux politiques recevaient plus rapidement les permis de construction ; et elles étaient inspectées moins fréquemment par les agents du fisc. La dispersion du nombre d’inspections est plus élevée dans les secteurs qui ont des entreprises proches des milieux politiques, ce qui laisse croire que les entreprises non proches des milieux politiques soutenant la concurrence avec celles qui étaient proches de milieux politiques faisaient l’objet de plus d’inspections.

Les nouvelles entreprises avaient du mal à entrer dans les secteurs qui avaient des entreprises proches des milieux politiques. En outre, ces secteurs, du fait de leur pouvoir de monopole (incluant, en Tunisie, le transport, les télécommunications et les banques) appliquaient des prix qui étaient élevés au point de rendre peu compétitives les entreprises exportatrices qui leur achetaient ces services. Étant donné que les exportations représentent un moyen par lequel les entreprises se développent, cette voie était effectivement bouchée en Tunisie.

Il est également établi que les subventions de l’énergie, qui sont encore répandues dans la plupart des pays de la région MENA, favorisaient les entreprises plus grandes, plus vieilles et à forte intensité de capital (parce qu’elles étaient aussi des entreprises à forte intensité d’énergie), ce qui, une fois de plus, ne permettait guère aux entreprises de se développer et de créer des emplois. La raison pour laquelle il a été si difficile de supprimer ces subventions est peut-être le fait qu’elles bénéficiaient également aux entreprises proches des milieux politiques.

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Il convient de noter que cette combinaison d’entreprises proches des milieux politiques, de branches de production monopolistiques et d’un grand nombre de petites entreprises stagnantes constitue un équilibre, en ce sens que le système n’a aucun désir intrinsèque de changement. Les milieux politiques et leurs entreprises alliées peuvent continuer d’obtenir les profits des monopoles, alors qu’un grand nombre de petites entreprises restent petites et le secteur privé ne crée pas un grand nombre d’emplois.

Cependant, cet équilibre de bas niveau a d’énormes conséquences. Les jeunes gens qui ont terminé leurs études ne peuvent pas trouver un emploi dans le secteur public ou dans le secteur privé structuré. Ceux qui peuvent se le permettre attendront que s’ouvre un poste dans le secteur public, parce que la combinaison du salaire, des avantages et de la sécurité peut rendre un tel poste intéressant. C’est la raison pour laquelle un si grand nombre de chômeurs sont des diplômés de l’université. La survivance des salaires intéressants du secteur public pousse également à la hausse le salaire d’acceptation dans le secteur privé, ce qui fait qu’il est souvent difficile pour le secteur privé d’être compétitif au plan international. Un cas particulier peut s’observer dans les pays du CCG, celui du Koweït où 95 percent des hommes koweïtiens sont employés dans le secteur public, de sorte que le secteur privé, pour être compétitif, recrute des travailleurs expatriés.

Les jeunes qui ne peuvent pas se permettre d’attendre une ouverture dans le secteur public se tournent vers le secteur privé, qui offre des emplois précaires et peu rémunérés. La part de la main-d’œuvre dans le secteur informel a considérablement augmenté au cours des dix dernières années, atteignant 67 percent (Angel-Urdinola et Tanabe, 2012). L’insécurité (à plus d’un sens du mot) du secteur informel décourage les femmes d’y accéder. Il s’ensuit que les possibilités étant limitées dans le secteur privé structuré et le secteur public, un grand nombre de femmes se retirent complètement du marché du travail. Dans la mesure où la plupart de ces femmes sont instruites (et certaines ayant un niveau d’instruction élevé), il est tragique que leur instruction ne soit pas mise à profit.

S’il ne fait pas de doute que l’ancien contrat social, dans lequel le gouvernement était le principal employeur, est rompu, il est moins évident que le gouvernement a été en mesure de le remplacer par un nouveau contrat dans lequel le gouvernement appuie un secteur privé dynamique qui crée des emplois. Pour ce faire, les gouvernements devront apporter des changements de grande envergure à leurs politiques et pratiques concernant le secteur privé. Parmi ces changements, les plus importants consisteront à promouvoir la concurrence parmi les branches de production nationales, afin que les jeunes entreprises puissent se développer et créer des emplois productifs.

Services publics de qualité

Le deuxième domaine dans lequel le contrat social semble avoir été rompu est celui de la prestation des services publics de qualité. Pour quelle raison la qualité des services publics est-elle devenue si médiocre ? Le précédent système hiérarchisé pouvait atteindre les objectifs visés en matière de scolarisation ou de prévention des maladies de l’enfance, parce que ces objectifs étaient faciles à mesurer et à contrôler et nécessitaient des apports uniformes, comme l’enseignement des rudiments de la lecture et de l’écriture, et la vaccination. L’éducation et les soins de santé de qualité, plus

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particulièrement s’ils doivent répondre aux besoins du marché mondial, exigent des solutions plus personnalisées. Les élèves veulent apprendre des choses différentes. Ils apprennent à des rythmes différents. Dès lors que les maladies de l’enfance ont été éliminées, les problèmes de santé des populations sont les maladies non transmissibles comme le diabète, l’hypertension et le cancer, qui affectent les individus de manière idiosyncrasique.

Pour régler ces problèmes de deuxième génération concernant l’éducation de qualité et les maladies non transmissibles, le prestataire de service, en l’occurrence l’enseignant et le médecin, doit connaître les besoins individuels de l’élève ou du malade, et être prêt et désireux d’y répondre. En un mot, le prestataire de service doit être responsable à l’égard du client (Banque mondiale, 2003).

Tout prouve que dans la région MENA, l’éthique de responsabilité entre les prestataires de services et les citoyens n’est pas respectée, en particulier pour les pauvres. L’absentéisme des enseignants est aussi élevé que dans les pays à faible revenu ; l’absentéisme des médecins est plus faible dans la capitale et les zones avoisinantes et plus élevé dans les régions reculées. Les élèves suivent des cours privés parce que les enseignants des établissements scolaires publics ne leur enseignent pas ce qu’ils veulent apprendre (et les élèves pauvres, qui ne peuvent pas s’offrir des cours privés, sont pénalisés). La proportion élevée de médecins en pratique privée ou « double » pratique représente un autre exemple du fait que le système de services courants de santé publique est défaillant, en particulier vis-à-vis de pauvres.

Lorsque le niveau de responsabilisation est faible, les services ne répondent pas aux besoins des citoyens qui, à leur tour, perdent confiance envers le gouvernement (Brixi et coll., 2015). Dans l’enquête du Baromètre arabe, les deux tiers des personnes interrogées ont indiqué que les résultats du gouvernement en matière d’amélioration des services de santé de base étaient « mauvais » ou « très mauvais ». Les citoyens finissent par faire appel aux réseaux informels et aux paiements informels, ce qui réduit davantage la responsabilisation dans le secteur public et les normes de service public. Et en l’absence de la participation des citoyens, il est très difficile pour l’État de rebâtir ces institutions.

L’analyse s’applique également aux secteurs de l’énergie et de l’eau, où de vastes subventions ont entraîné la dégradation des services (coupures de courant, etc.) et la faible productivité agricole. Les subventions augmentent la demande, mais étant donné les décalages dans la production de biens et services offerts, les pénuries se créent. Par ailleurs, si la compagnie nationale d’électricité ne reçoit pas les transferts du gouvernement, elle consacre des dépenses insuffisantes à l’entretien, ce qui dégrade davantage le réseau. Les citoyens à revenu élevé abandonnent le système et, tout comme au Liban, utilisent des groupes électrogènes coûteux, dont les fournisseurs deviennent alors un groupe de pression contre le raccordement au réseau. Concrètement, à cause des subventions, les consommateurs ont du mal à demander des comptes aux prestataires de services, comme les entreprises de services publics. Entretemps, les subventions de diesel ont contribué à épuiser la nappe phréatique du Yémen (Devarajan, 2014). Parallèlement, la hausse des prix (réduction des subventions) est considérée politiquement délicate, en particulier si les citoyens ne font plus confiance au gouvernement.

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Bref, les services publics se trouvent aussi dans une situation d’équilibre de faible niveau, dans laquelle les citoyens, ne pouvant pas demander des comptes aux prestataires, se retirent du système public pour s’orienter vers des systèmes axés sur le marché, comme les cours privés, les médecins privés et les groupes électrogènes. Et les prestataires fournissent ces services pour compléter leurs revenus du secteur public. Et la perte de confiance des citoyens à l’égard du gouvernement est confirmée par son incapacité à les servir.

L’avantage d’un système axé sur le marché réside dans le fait que le consommateur est en mesure de demander des comptes au prestataire (si l’enseignant est absent, il n’est pas rémunéré). Dans le cas de l’enseignement supérieur, ce système peut aussi permettre une meilleure concordance entre les compétences requises sur le marché du travail et les connaissances qu’acquièrent les étudiants. L’inconvénient est que le système défavorise les personnes pauvres, qui ne peuvent pas payer les prix du marché. La réforme des services publics doit donc viser avant tout à mettre en place un système permettant au consommateur ou client de demander des comptes aux fournisseurs tout en garantissant que les pauvres puissent avoir accès aux services de qualité dont jouissent généralement les non-pauvres.

Que faut-il faire ?

Dans cette situation, que peut-on faire ? De toute évidence, l’ancien contrat social, bien qu’ayant obtenu des résultats dans le passé, n’est pas adapté aux besoins de l’actuelle génération des citoyens. Le secteur public ne peut plus être le principal employeur. Le secteur privé a été, dans certains cas, pris en otage par des entités proches des milieux politiques qui résistent à la concurrence nationale et internationale, bien que celle-ci soit nécessaire à la création d’emplois. Et la prestation des services publics n’est pas organisée d’une manière qui permet aux citoyens de demander des comptes aux fournisseurs.

En outre, étant donné que ces équilibres sont de bas niveau, des réformes progressives dans un domaine pourraient ne pas suffire pour changer le système. Par exemple, en améliorant la qualité de l’éducation mais sans que la création d’emplois augmente, on risque de rester bloqué. La solution consiste donc à procéder à une série de changements à tous les niveaux, ce qui n’implique ni une autre révolution ni même une « thérapie de choc ». Elle suggère plutôt des changements dans l’ensemble des relations économiques entre les citoyens et l’État ; en d’autres termes, un nouveau contrat social.

À quoi devrait ressembler un tel nouveau contrat social ? Tout d’abord, l’État, au lieu de fournir des emplois dans le secteur public, favorise la concurrence dans le secteur privé et une plus grande égalité des chances pour tous les entrepreneurs. À noter que cette réorientation prélude à un rôle très différent pour l’État comme pour le secteur privé. Ensuite, l’État, au lieu de fournir des services publics de faible qualité gratuits ou subventionnés, remplace les subventions par des transferts monétaires (ciblés), tout le monde payant les prix du marché. Ainsi, les pauvres peuvent se permettre d’accéder aux services privés qui ne sont actuellement utilisés que par les non-pauvres. Et les dépenses publiques sont consacrées au financement des biens publics, comme l’infrastructure, et des transferts monétaires (voir ci-dessus).

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Il est certain que ces changements ne peuvent pas, n’ont pas besoin et probablement ne devraient pas se produire du jour au lendemain. Et ils ne s’appliquent pas non plus de la même manière à tous les pays. Les pays en situation de conflit doivent d’abord en sortir. En même temps, la stratégie de la « sécurité à tout prix » a ses limites—le pays peut finir par se retrouver dans une autre situation d’équilibre de bas niveau de sécurité avec une faible croissance. Les pays en transition doivent moduler les changements pour composer avec les forces politiques qui pourraient autrement déstabiliser le pays. Dans certains de ces pays également, la sécurité et la stabilité pourraient être des priorités à court terme. Quoi qu’il en soit, la nécessité de répondre aux demandes inexorables d’emplois et de meilleurs services publics demeurera primordiale. Enfin, les réserves des pays riches en pétrole leur offrent une protection pouvant leur permettre de planifier les changements sur une période plus longue.

L’objectif ne sera pas facile à atteindre. De nombreux groupes d’intérêts dans la situation de statu quo résisteront au changement. Comme il a été mentionné plus haut, la confiance des citoyens est limitée. Les défenseurs de la réforme auront à forger des coalitions pour le changement. Mais les populations de la région exigent des emplois et une meilleure prestation de services ; elles exigent le changement. Et le Printemps arabe nous a enseigné qu’elles veulent faire entendre leurs voix.

L’ancien contrat social a fait son temps. Il est difficile de voir comment la région MENA peut régler ses problèmes de longue date en l’absence d’un nouveau contrat social. Dans la mesure où les pays de la région ont montré qu’avec l’ancien contrat ils ont été en mesure de réaliser des progrès substantiels au profit de leurs citoyens, ils peuvent en faire de même avec le nouveau contrat social.

Références

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