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© Société Psychanalytique de Paris page 1 | 24 https://www.spp.asso.fr/cdl_annee_article/2021/ ÉCRITS INTIMES DE PSYCHANALYSTES PENDANT LA PANDÉMIE – Journal de voyage en Confinia Auteur(s) : Mots clés : Sous la direction de Monica Horovitz et Piotr Krzakowski et avec la participation de Janine Puget Préface de Yolanda Gampel Ce témoignage est né de la pandémie de Covid-19 et de l’initiative de Monica Horovitz, rejointe dans le projet par Janine Puget, en mars 2020. Ces deux psychanalystes, intéressées par la clinique de l’excès, répondaient à la nécessité de penser les effets d’une société néolibérale piégée dans la temporalité d’une vie subitement à l’arrêt. L’inédite situation a donc rassemblé quatorze psychanalystes, ayant donné lieu à un journal, dévoilant au jour le jour l’impératif éthique de maintenir le travail engagé auprès des patients, par temps de crise majeure. Cet ouvrage se lit aussi comme une forme spontanée de recherche, d’interrogation du processus analytique étendu à la pratique de la téléconsultation.

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ÉCRITS INTIMES DEPSYCHANALYSTESPENDANT LA PANDÉMIE –Journal de voyage enConfinia

Auteur(s) :Mots clés :

Sous la direction de Monica Horovitz et PiotrKrzakowski et avec la participation de JaninePugetPréface de Yolanda GampelCe témoignage est né de la pandémie de Covid-19 et de l’initiativede Monica Horovitz, rejointe dans le projet par Janine Puget, enmars 2020. Ces deux psychanalystes, intéressées par la cliniquede l’excès, répondaient à la nécessité de penser les effets d’unesociété néolibérale piégée dans la temporalité d’une viesubitement à l’arrêt. L’inédite situation a donc rassemblé quatorzepsychanalystes, ayant donné lieu à un journal, dévoilant au jour lejour l’impératif éthique de maintenir le travail engagé auprès despatients, par temps de crise majeure. Cet ouvrage se lit aussicomme une forme spontanée de recherche, d’interrogation duprocessus analytique étendu à la pratique de la téléconsultation.

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Monica Horovitz est médecin, membre titulaire de la S.P.P. et dela société italienne S.P.I., fondatrice des rencontresinternationales « Bion In Marrakech.Piotr Krzakowski est docteur en psychologie clinique, membre dela S.P.P. et de l’IPP de Varsovie, lauréat de l’International Journalof Psychoanalysis Awards 2020.Janine Puget, psychiatre et psychanalyste argentine, est connuepour son enseignement et ses publications dans le champ de larecherche clinique, de la psychanalyse du lien, des situationstraumatiques, des psychothérapies de groupe et de famille.

Données éditoriales L’Harmattan, Collection Étudespsychanalytiques – Broché – format : 13,5 x 21,5 cm • 278 pagesISBN : 978-2-343-24516-4 – Prix : 28€

Jacqueline Schaeffer –Entretien

Auteur(s) : Jacqueline SchaefferMots clés : féminin – masochisme féminin – sexualité (féminine)

Psychanalyste et aussi linguiste, sémioticienne, romancière,philosophe, le « multivers » de Julia Kristeva, comme elle-mêmenomme son champ d’intérêts, se caractérise par l’ouverture auxinfluences croisées de différents domaines de la pensée et de la

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créativité. Dans cet entretien, elle montre comment cesdifférentes approches de l’écriture et du langage l’ont préparée àl’abord de la pensée théorique de la Psychanalyse et nourrissenttoujours sa réflexion, ses écrits et sa pratique.

Elle évoque son expérience du déracinement et du statutd’étrangère, à la fois épreuve et chance qui lui ont donné le goûtde la recherche, le besoin de connaissance et de partage, quecondensent les valeurs de « singularité, étrangeté, altérité » quipourraient être sa devise et sa définition de la liberté créatrice.Au sujet du « Féminin », thème qu’elle développe dans la trilogie« Le Génie Féminin » consacrée à Hannah Arendt, Mélanie Kleinet Colette, elle montre comment ces femmes se sont construites àtravers leur vie et leur œuvre, concluant comme pour elle même :« On ne nait pas femme, je le deviens ».Marianne Persine Mai 2021

Jacqueline Schaeffer –Entretien

Auteur(s) : Jacqueline SchaefferMots clés : féminin – masochisme féminin – sexualité (féminine)

Psychanalyste et aussi linguiste, sémioticienne, romancière,philosophe, le « multivers » de Julia Kristeva, comme elle-même

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nomme son champ d’intérêts, se caractérise par l’ouverture auxinfluences croisées de différents domaines de la pensée et de lacréativité. Dans cet entretien, elle montre comment cesdifférentes approches de l’écriture et du langage l’ont préparée àl’abord de la pensée théorique de la Psychanalyse et nourrissenttoujours sa réflexion, ses écrits et sa pratique.

Elle évoque son expérience du déracinement et du statutd’étrangère, à la fois épreuve et chance qui lui ont donné le goûtde la recherche, le besoin de connaissance et de partage, quecondensent les valeurs de « singularité, étrangeté, altérité » quipourraient être sa devise et sa définition de la liberté créatrice.Au sujet du « Féminin », thème qu’elle développe dans la trilogie« Le Génie Féminin » consacrée à Hannah Arendt, Mélanie Kleinet Colette, elle montre comment ces femmes se sont construites àtravers leur vie et leur œuvre, concluant comme pour elle même :« On ne nait pas femme, je le deviens ».Marianne Persine Mai 2021

Texte d’introduction à la/les video(s) Jacqueline Schaeffer,membre formateur de la SPP, poursuit depuis les débuts de sacarrière d’analyste, des recherches et des publications sur lethème de la sexualité de la femme et de la différence des sexes,fondement de ses prises de position.Son ouvrage princeps : « le refus du féminin » et de trèsnombreux articles, exposent ses conceptions et au delà de lathéorie freudienne, la construction du couple masculin-féminin surla base de l’altérité et de la réciprocité, ce qu’elle qualifie de « co-construction de la relation amoureuse ».Dans cet entretien (en deux parties) elle expose et précise sapensée, sur ce sujet essentiel et controversé.

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Marianne Persine, décembre 2021

Video 1 Vimeo URL https://vimeo.com/656968064/62dd972336

Texte Video 1 1ère partie : De l’organisation phallique de lasexualité à la co-construction de la relation amoureuse

00:10:01 Théories sexuelles infantiles00:11:48 La différence des sexes00:13:14 Le couple masculin féminin : un travail psychique00:14:14 L’amant de jouissance00:14:56 Plaisir ou jouissance00:15:56 Le refus du Féminin00:18:26 La violence de la pulsion sexuelle00:22:18 La mère ne transmet pas le Féminin00:23:52 Au delà du phallique, le féminin00:25:57 Triple conflit entre érotique, maternel et réalisationsociale00:25:54 La censure de l’amante00:29:13 La mère messagère de l’attente00:30:27 Masochisme érogène et masochisme érotique féminin00:31:58 L’Œdipe féminin00:33:00 Les liaisons non dangereuses00:38:22 L’autre c’est le féminin00:44:05 Que veut la femme ?00:49:08 La perte amoureuse

Time code Video 1 2ème partie : Les tabous du féminin. Lesexe féminin, un sexe autre

00:52:03 La sexualité infantile00:54:38 Les fantasmes originaires

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00:58:15 La troisième voie « royale » de l’interprétation01:00:24 Le phallique nie le féminin01:01:25 L’angoisse de castration chez la femme01:03:18 La maternité source d’envie chez l’homme01:06:41 Le tabou du féminin01:11:05 Le sexe de la mère, tabou des tabous01:14:26 Janine Chasseguet : « la sexualité féminine »01:18:52 Clés pour le Féminin

Bibliographie de l’invité BIBLIOGRAPHIE DE L’ENTRETIEN1) Ouvrages

– Le refus du féminin collection Quadrige PUF réédition janvier2022– Qu’est la sexualité devenue ? De Freud à aujourd’hui (encollaboration) In Press 2019

2) Quelques Articles

– Le tabou du féminin 2006– D’une possible co-création du masculin et du féminin 2007– Au-delà du phallique : le sexe féminin 2008– Entre féminin et maternel 2010– Le maternel et le féminin 2011– Le tabou de la frigidité. Le silence des alcôves 2012– Au-delà du phallique : le féminin 2016– Le sexe féminin, entre tabou et interdit 2019– Le masochisme érotique féminin 2019

La plupart de ces articles (et d’autres) sont proposés par CAIRN

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Décès du Professeur DanielWidlöcher (1929-2021)

Auteur(s) :Mots clés :

Nous apprenons avectristesse le décès de DanielWidlöcher le 14 décembre2021. Il était une des trèsgrandes f igures de lapsychanalyse française,réputé et respecté dans lemonde entier. À propos delui , Alain Braconnieré c r i v a i t : « S a v i es ’ i d e n t i f i e à l apsychanalyse telle qu’il

aime la définir : tout autant une pratique culturelle qu’unepratique thérapeutique, elle ne donne pas une vérité, elle ouvreune voie. »

Daniel Widlöcher est né en 1929 à Paris. Il était psychiatre,professeur des universités-praticien hospitalier en psychiatrie,psychologue et psychanalyste.

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Il est devenu psychanalyste, tout en poursuivant sa carrièreuniversitaire, en s’appuyant notamment sur son intérêt pour ledéveloppement de l’enfant. Nommé assistant des hôpitaux à laSalpêtrière, il met en place un département de psychothérapie del’enfant au sein duquel il propose à Annie Anzieu le premier posted’orthophoniste créé à l’hôpital en 1958.

Il a occupé différentes fonctions au CNRS (membre de la sectionde psychologie puis président de la section « Psychologie etpsychophysiologie). Il a été conseiller auprès du ministre de laSanté Edmond Hervé, en 1983-1984.

Il se reconnaît moins dans une filiation avec Lacan qui a été sonanalyste qu’avec Daniel Lagache à qui il a demandé de superviserles activités psychanalytiques mises en place à la Salpêtrière.

Il a été membre fondateur de l’Association psychanalytique deFrance en 1964 dont il a été le président à deux reprises. Il aprésidé l’Association Psychanalytique Internationale de 2002 à2005.

Très éclectique, il a aussi présidé l’Association française dethérapie comportementale et cognitive de 1979 à 1980, ainsi quele comité de l’enseignement de l’Association psychanalyse etpsychothérapies — Recherches expérimentales et cliniques surl’application de la psychanalyse aux psychothérapies.

Daniel Widlöcher a été lauréat du prix Sigourney Award en 1998.

Daniel Widlöcher a marqué la psychanalyse française etinternationale par une œuvre remarquable d’originalité, depuissance d’élaboration théorique et d’acuité dans les descriptionscliniques. Tout au long de son parcours, il a revisité les principaux

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concepts de la métapsychologie : la pulsion, l’inconscient, le statutde la représentation, l’affect, la sexualité infantile et a aussiœuvré à conceptualiser la notion d’attachement. La confrontationdes points de vue était appréhendée par lui comme un facteurd’évolution de la psychanalyse.

Il a toujours considéré très favorablement le recours àl’interdisciplinarité. Il a proposé une métapsychologie de l’écoute,en lien avec sa théorie de la co-pensée, qui souligne l’interactionentre deux activités psychiques.

Sa vie et son œuvre attestent, comme le souligne CatherineChabert, de l’intensité d’une curiosité immense, presqueinsatiable, du refus d’immobilisme et du rejet de tout impérialismede pensée dans les traitements psychiques.

Hommage de Marilia Aisenstein à Daniel Widlöcher

Daniel Widlocher nous a quitté le 14 Décembre, c’est uneimmense perte pour toute la communauté psychanalytiqueinternationale.

Président de l’IPA de 2001à 2005, il avait succédé à OttoKernberg et a précédé Claudio Eizirik. Il a été l’initiateur dumouvement des « Trois Modèles de Formation » qui ont étédéfinitivement adoptés en 2007 lors du Congrès de Berlin sous laprésidence de Claudio Eizirik. Pour ce faire Daniel Widlocher afait preuve d’un subtil mélange de courage, de diplomatie et defermeté. En effet cela ne fut pas facile.

Travaillant avec lui au sein du Comité Exécutif je l’avaissurnommé « la force tranquille » car il ne perdait jamais soncalme et restait toujours amène et respectueux de l’autre même si

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ce dernier l’attaquait.

En dehors d’avoir été un grand président de l’API DanielWidlôcher était une figure unanimement admirée et respectée dupaysage psychanalytique Français.

Professeur de psychiatrie et pédopsychiatrie il avait créé, au seinde l’hôpital La Salpêtrière, un service de psychothérapie d’enfantsencore renommé aujourd’hui.

Au cours d’une brillante carrière hospitalière Daniel Widlochers’est très tôt intéressé à la psychanalyse. Il avait entamé unepsychanalyse personnelle avec Jacques Lacan, alors directeur del’Institut de la Société Psychanalytique de Paris.

Daniel Widlocher avait été très touché par la fameuse scission de1953-54* qui a bouleversé la communauté psychanalytiqueFrançaise et fut suivie de l’exclusion de son analyste de l’API. Cessouvenirs restaient encore douloureux des années plus tard.

Sans renier sa filiation il ne s’est pourtant jamais identifié aumodèle Lacanien. En 1964 il a été un des membres fondateurs del’Association Psychanalytique de France dont il a été deux foisprésident.

Grand clinicien Daniel Widlôcher était aussi un remarquablethéoricien et chercheur, il nous laisse une œuvre diversifiée etoriginale où l’on retrouve ses centres d’intérêt : l’affect, l’enfant,la psychothérapie, la métapsychologie de l’écoute et sa conceptionpersonnelle de la « co-pensée ».

Ses ouvrages, entre autres : Métapsychologie du sens, Lepsychodrame chez l’enfant, Sexualité infantile et attachement,

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Traité de psychopathologie, Les nouvelles cartes de lapsychanalyse, témoignent de l’ampleur de son engagement.

Pour terminer je veux aussi évoquer ici son humanité. DanielWidlôcher était « bon » au sens noble du terme, c’était unepersonnalité rayonnante. Fin lettrée, et pas seulement dans ledomaine de la psychanalyse, toujours intéressant, aimable etaccueillant, travailler et converser avec lui était un vrai bonheur.

* En 1953, un conflit éclate au sein la Société psychanalytique de Paris (S.P.P.) Jacques

Lacan qui venait d’être élu président quitte la SPP. Il fonde la Société française de

psychanalyse (S.F.P.) qui est exclue de l’International Psychoanalytic Association (I.P.A.).

En 1964, la S.F.P. est dissoute, l’Association psychanalytique de France, dirigée par

Lagache, est reconnue par l’I.P.A. et Lacan fonde l’École freudienne de Paris (E.F.P.).

Communiqué du Groupe deContact – 02/12/2021

Auteur(s) :Mots clés :

La Société Psychanalytique de Paris vous transmet unecommunication émanant du Groupe de Contact, composé de 12associations reconnues de psychanalystes, qui s’inquiètent desremises en cause de la place de la psychanalyste dans le système

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de soin et les universités.

Elles lancent aujourd’hui un cri d’alarme pour défendrel’importance de la dimension relationnelle dans la construction dusujet et dans les propositions thérapeutiques de prise en chargede la souffrance psychique.

Communique_Groupe_de_Contact_Decembre_2021

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Le temps : Une création duPréconscient ?

Auteur(s) : Clarisse BaruchMots clés : temps

Compte rendu de Jeanne Ortiz

Clarisse Baruch, Présidente de la Société Psychanalytique deParis, a inauguré le nouveau cycle des Conférences d’Introductionà la Psychanalyse 2021. Lors de sa conférence intitulée Le temps :Une création du Préconscient ? elle a conduit son auditoire sur cechemin qui mène l’analyste de l’instant clinique à la recherched’outils métapsychologiques rendant possible son élaboration.

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Au départ, un constat : l’arrêt du temps et les amnésiesrétroactives que vivent les personnes ayant subi une commotioncérébrale sans perte de connaissance, temporalité singulière oùtout semble se remettre en ordre, dans une « coïncidencetroublante » entre le temps, la mémoire et l’identité. Un constatqui invite Clarisse Baruch à redessiner les contours de cesnotions, les préciser et les articuler.

Il convient d’abord de distinguer ce que l’homme se représenteconsciemment sous la forme d’une flèche du temps articulant unpassé un présent et un futur, de ce que Freud a découvert desprocessus inconscients dans Métapsychologie, à savoir qu’ils sontintemporels et non modifiables par l’écoulement du temps. Maisdes mécanismes inconscients peuvent agir sur le temps de laconscience qui peut vaciller, lorsque par exemple des mécanismesde clivage du Moi génèrent des parties clivées, certainesreconnaissant l’écoulement du temps, et d’autres déniant cetteréalité. L’« imparfait de l’indicatif » nous aide à nous lereprésenter, en ce qu’il renvoie à un procès non accompli, à unechose qui n’a pas été jugée et ne peut donc participer à laconstruction d’un passé. L’individu pour qui le temps s’est figé,comme souvent les patients organisés sur un mode psychotique,est condamné à un éternel présent, confronté à desreprésentations de choses traumatiques toujours d’actualité :défense drastique qui consiste à rester sur un pointunidimensionnel, éternel plutôt que de risquer la mort psychiquesi le temps reprenait son cours. En contrepoint, les cauchemarsdes névrosés traumatiques rejouent, nuit après nuit, un traumaqui se revit sans s’inscrire dans une temporalité.

Toute autre est cette curieuse atemporalité de l’inconscient qui

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vient colorer nos rêves : « Le rêve, tout à la fois régresse versl’amont et galope vers l’aval. Il mêle les temps ; les parcourt entous sens, fait advenir des simultanéités étranges, coexister desrythmes différents – il procède en accéléré ou dans un ralenti quipeut glacer », nous dit Pontalis (1997). La chronologie n’estréintroduite que lors de la mise en récit. Tout comme peutémerger, de la répétition des cauchemars de la névrosetraumatique, d’infimes variations qui vont à nouveau permettre letravail d’élaboration propre au rêve. Le temps se remet à couler,et la sublimation, la création, redeviennent possibles.

Cette notion de temps s’articule avec celle de mémoire. ClarisseBaruch se ressaisit de la trouvaille Freudienne du Bloc-notemagique présentée dans le texte éponyme de 1925 : à sa surface,une feuille, assimilée au système perception-conscience, et enarrière-plan un tableau de cire, assimilé aux systèmesinconscients : les excitations seraient perçues par la feuille maisn’y laisseraient aucune trace durable. Si l’inconscient n’a« aucune relation avec le temps » (Métapsychologie, op.cit.), etbien que Freud ne l’explicite pas, la pensée d’un systèmepréconscient s’impose comme une nécessité : il serait un lieu destockage et d’indexation de la mémoire, où s’élabore laconstruction temporelle. Clarisse Baruch rappelle que Freudconçoit le préconscient comme interface de l’inconscient et dusystème perception-conscience, « lieu de l’élaboration du travaildu rêve dans sa valence de mise en récit, et donc lieu del’organisation de la mémoire, de la création psychique du temps,de la chronologie ». Elle considère ce lieu intermédiaire qu’est lepréconscient comme un élément central du fonctionnementpsychique et comme un levier du travail psychanalytique. C’est làen effet que se joue l’exigence faite au psychisme de retarder la

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satisfaction du plaisir, d’inhiber la décharge, donc d’introduirel’attente, la durée qui inscrivent le sujet dans une temporalité.

Freud disait dans l’Abrégé (1938) qu’il s’efforcerait « plus tardd’aborder le problème de la véritable nature » du préconscient. Ilest conçu par l’Ecole de Psychosomatique de Paris commeinterface qui côtoie « l’inconscient, le soma, les instincts et lespulsions » d’une part, et « le conscient d’autre part » (P. Marty,Que sais-je, La psychosomatique de l’adulte).

Dans la clinique de la psychose, Clarisse Baruch souligne qu’il estmoins question d’un manque d’épaisseur du préconscient, commechez les patients psychosomatiques, que de l’extrême rigidité desparois entre inconscient et préconscient d’une part, et entreconscience et préconscient d’autre part, ou bien à l’inverse de leurextrême porosité. Le modèle de l’acte prévaut et le fantasme s’entrouve écrasé. Le discours du patient ne laisse alors plus aucuneplace au jeu, à l’ambiguïté, à la créativité ludique de l’humour. Nereste que l’attaque en règle de l’objet, et du sujet lui-même, par lesarcasme ou l’ironie mordante.

Mais comment penser le temps sans la mise en tension entrecontinuité et discontinuité ? Dans ses Notes sur le Bloc-notemagique, Freud pense le temps psychique comme le résultat d’uninvestissement, par le Moi, de stimuli extérieurs, parintermittence, sur le modèle d’une alternance de présence etd’absence. Ainsi pulsion et pulsation jouent-elles de concert dansla construction de la perception du temps. « Ainsi contrôlée par lemoi, et, à l’intérieur de celui-ci, par le préconscient, l’activitépulsatile de la pulsion (permet) donc d’aller à la rencontre dumonde environnant » (Baruch, 2016). Aux confins du somatique etdu psychique, le rythme est donc un facteur de la continuité du

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Moi. Du côté des processus secondaires, Freud avait déjà montrécomment l’alternance de la présence et de l’absence de l’objetpermettait la constitution de l’objet. Le modèle du Fort/Da engageun jeu sur la discontinuité qui rend le retour de l’objet anticipable.Par le déplacement et le fantasme, l’enfant peut acquérir lamaîtrise du retour de l’objet, plus efficacement que la réalisationhallucinatoire de désir. On trouve ainsi de la discontinuité à labase de l’ensemble des processus psychiques, primaires commesecondaires.

Et pourtant, la perte du sentiment continu d’exister dans laclinique des psychoses par exemple, nous invite à penser quel’intégration de la discontinuité est conditionnée par l’efficienced’un mécanisme psychique spécifique qui lie entre eux leséléments perçus au fil du temps en construisant une continuité,une forme de « liage temporel ». Pour A. Green (2000)« paradoxalement, on peut affirmer que ce qui permetl’objectalisation transformant le fonctionnement pulsionnel, c’estl’intervention de l’objet dans sa relation au temps » (p.103) quirend tolérable la suspension de la décharge, le délai. Un objetperçu comme secourable qui conditionne souvent cette« revégétalisation » du sujet figé, signe que l’accès à la sourcepulsionnelle est désormais possible.

À la base du temps, de la mémoire et de l’identité, il y aurait doncun seul mouvement psychique intégratif permettant de lier lesévénements dans le temps, à la mémoire d’engranger dessouvenirs, de sorte que des images successives puissent s’inscrireet un récit interne se mettre en mots, rendant possible lesentiment continu d’exister.

Jeanne Ortiz

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Née quelque part

Auteur(s) :Mots clés :

C’est à reconstruire une histoire absente, une histoire à trous, àzones d’ombres, dont toute mémoire ou presque semble dissoute,celle de la jeunesse polonaise de son père, que MichèleHalberstad s’emploie en suivant les traces d’un autre Halberstad,Max, le ci-devant gendre de Freud, l’époux en premières noces deSophie la deuxième fille de Freud.

L’entreprise de Michèle Halberstad n’est ni tout à fait unebiographie, ni un roman. On dirait plutôt une errance (qui la mèned’ailleurs jusqu’en Afrique du sud), une rêverie, un travail quiévoque ces reconstitutions d’un passé énigmatique par dessensations et des rencontres, par leurs récits fictifs, que produitrépétitivement Patrick Modiano. L’entour d’un traumairreprésentable que la répétition vise à faire surgir, ou bien, àdéfaut, à cerner.

Au-delà de la tentative littéraire, le récit de Michèle Halberstadreconstitue une histoire mal connue des psychanalystes et qui

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pourtant éclaire la vie et l’entourage de Freud dans un quotidienfamilier : ses joies et ses douleurs, ses espoirs, ses aveuglementsaussi (devant le rouleau compresseur nazi) qui rompent avec lehiératisme de la figure prométhéenne.

La famille de l’autrice, originaire de Pologne n’a aucuneconnexion, aucun lien généalogique avec les Halberstad deHambourg, la ville où Max s’était installé comme photographe.

Max épouse Sophie, la fille « préférée » de Freud, en 1912. C’estcouple qui semble heureux et plein d’espoir dans un avenir quisemble leur sourire. Très vite le travail de Max sera reconnu etson atelier prospérera devenant un portraitiste prisé de la bonnesociété mais aussi un photographe talentueux qui rend compte desréalités de son temps en particulier de sa ville de Hambourg. Sontravail, d’une grande valeur documentaire, sera malheureusementpréempté par les nazis au moment de son émigration en 1938.L’autrice ne nous dit pas ce qu’il est devenu. Freud témoigne debeaucoup d’affection pour son gendre, lui réservant l’exclusivitéde ses portraits officiels, et l’aidant financièrement au-delà mêmede son émigration.

Leur premier fils, Ernst, nait juste avant la première guerremondiale. Le futur « enfant à la bobine », l’inventeur du jeu duFor-da ! dans l’Au-delà du principe de plaisir(paru en mars 1923),un jeu qui lui permet de symboliser l’absence de sa mère, aurajustement fort à faire avec les séparations, les pertes et les deuils.

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C’est d’abord son père qui part à la guerre, et qui pendant 3 ansne sera pour lui qu’une présence en pointillé, un dérangementinopportun, justifiant l’hostilité farouche du petit Ernst, laquellese maintiendra jusque tard dans sa vie d’homme. Car Max blessé àla tête et très affecté par la guerre est réaffecté à l’arrière dans unservice de photographies aériennes.

Un deuxième fils nait en décembre 1918, Heinele. Un enfant quitrès vite sera investi passionnément par son grand-père. Freud estséduit par l’intelligence précoce et le mélange de lucidité etd’espièglerie de ce bambin. Mais en 1920 catastrophe, Sophiedécède brutalement d’une « fièvre » alors qu’elle est à nouveauenceinte. La correspondance ne laisse guère de doute Sophie estdécédée des suites d’un avortement qui a mal tourné. Peu detemps après, alors que Max est effondré et débordé par la chargede ses deux enfants, Freud s’inquiète de la santé fragile deHeinele et le fait venir à Vienne où l’on détecte une tuberculosemiliaire. Le pronostic est malheureusement sans appel et l’enfantdécèdera en juin 1923, peu de temps après les premièresopérations de Freud pour son cancer de la, mâchoire. Après cedécès il confiera avoir aimé cet enfant plus que tout être aumonde et ne plus travailler que contraint et forcé. Il conclue :« tout m’est devenu indifférent ».

Cet arrière-fond historique de la vie de Freud est fascinant auregard de la production intellectuelle et théorique qui, malgré sonévident ralentissement, trouve néanmoins à se poursuivre : en1924 parait ce texte fondamental qu’estLe problème économique

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du masochisme, lequel explore le jeu des intrications etdésintrications du sadisme et du masochisme primitifs, ceux-làmême qui commandent à la destinée économique des affectsmélancoliques. Le deuil, impossible pour Freud, de son petit-filsbien aimé aurait-il trouvé là sa métabolisation dans la théorie ?

Indépendamment des qualités de la quête personnelle émouvantede Michèle Halberstad dans ce livre, ses explorations en directionde son histoire, et elle-même marquée du deuil d’un enfant, cesemboitements en « poupée russe » du livre permettent aussi auxpsychanalystes un regard bien venu sur un pan méconnu del’histoire non seulement de la famille Freud mais de sonintrication avec l’œuvre freudienne elle-même.

Martin Joubert. Décembre 2021.

Familles

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« Je suis rien j’inexiste dit-il. Mon esprit est tué ». Avec ce textecourt et intense, écrit dans une langue directe, au rasoir, et donton entend les achoppements, Lydie Salvayre nous plonge dans unhuis clos étouffant, celui d’un jeune homme schizophrène et de sesdeux parents. Elle fait du lecteur l’observateur fasciné ou horrifiéd’une situation incestueuse de laquelle il ne peut que se sentirpartie prenante. Subtilement, au détour d’une situation, elle laissepercevoir combien la symptomatologie schizophrénique du fils, sestroubles du langage, ses ruptures émotionnelles, son aboulie, sontimbriquées aux projections idéalisantes, positives pour la mère,négatives pour le père ; lesquelles nourrissent en retour le délirede grandeur du fils. Délire des grandeurs dont Freud faisait lamarque narcissique de la pathologie schizophrénique.

Alors que le jeune homme est la proie d’angoisses dissociatives etd’un automatisme mental effrayant, sa mère y répond par lelangage de la banalité d’un quotidien absurde, tandis qu’elles’échauffe passionnément des mésaventures sentimentales de« Cœurs brisés », le feuilleton télévisuel à l’eau de rose quelle nemanquerait pour aucun empire ! Les tourments et les affres deBradley, Jessica et Kimberley s’entremêlent ainsi aux divagationshallucinées du fils, reprises dans le discours même de la mère àson fils. Le contraste entre ces deux textes enchainés sanstransition, et qui marquent en quelque sorte l’unité psychiquefolle de la mère et du fils, est une des grandes réussites du livre :« Rien ne remplace l’amour d’une maman commente la mère. Etsurtout pas celui de cette petite de Jessica. Casse-toi pouffiasse !crie la mère en direction de la télé. Quelle fatigue gémit le fils. Jeme sens vidé de mes forces mentales. Je me sens vidé de ma

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moelle et comme mangé du dedans ». L’effet d’engrènement despsychés, faisant sauter leur séparation, alimente un automatismemental envahissant chez le fils : « Mes ennemis dit-il se sont àprésent introduits par des stratagèmes infernaux au cœur de latélévision d’où ils violent ma pensée par le biais d’ondesélectroniques et dissèquent ma conscience à grands coups decutter. »

Lydie Salvayre a saisi avec une perspicacité surprenantel’économie des liens incestueux qui règlent les rapports entre lesmembres de cette famille affolante. Le désaveu permanent dupère et de sa propre famille dans le discours de la mère estaussitôt contredit par un accord parfait des parents sur lanécessité de maintenir la vie de leur famille dans un total huisclos, retranchés du monde pour s’éviter la honte d’un fils vécucomme un « déchet sublime ». Le « double lien » et la« paradoxalité » qui enserrent les protagonistes transpirent àtoutes les pages du livre.

L’auteur nous fait ainsi entrer, comme de plain-pied, dans un vécudélirant qui n’est que la transposition à peu près acceptable par lapsyché du fils des conflits d’ambivalence incestueux. Lorsque lamère, lui donnant son traitement neuroleptique, avertit le fils de laprochaine consultation psychiatrique, c’est pour le mettre engarde de ne rien révéler à ce représentant d’une extérioritémenaçante. Mais elle se trouve aussitôt transposée ironiquementdans le délire du fils en une revendeuse de drogue qu’il s’agirait« d’aller buter », puisque s’attache à elle dans le délire le thème

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incestueux : « Et c’est toi ma femme qui deale cette merde ! hurle-t-il à sa mère. C’est toi ma femme qui deale le Haldol ! »Incestualité encore, et banalisée (« La mère n’a aucun secret pourson biquet… »), dans ces confidences maternelles insupportablessur la sexualité du couple parental. La vision crue qui en résultepour son fils (« … me voir englouti dans ta chatte à rapports medonne la nausée. ») alimente d’un mélange, étrange, d’affectsincompatibles : dégoût, excitation, représentations fantasmée etpartialisée du corps maternel, desquels seuls, la rupture ou lepassage à l’acte violent offrent une voie de sortie.

Quelle issue en effet pour ce trio infernal ? nous en laisserons lasurprise au lecteur. Il suffit de saluer la performance de l’autricepour faire saisir l’intensité du malaise « anteoedipien » desprotagonistes comme avait su si bien le faire Wolfson en sontemps, dans son célèbre Le schizo et les langues et dont retrouveici quelque chose du climat délétère.

Martin Joubert .Décembre 2021.