Acoustique Present 3

Embed Size (px)

Citation preview

  • Philippe Nika Professeur Univ. Franche-Comt_ Acoustique

    60

    3. ACOUSTIQUE PHYSIOLOGIQUE ET PSYCHOACOUSTIQUE

    3.1 Introduction

    Limpression de gne que produit un bruit dpend de nombreux facteurs, physiques et psycho-

    physiologiques, et pas seulement de son intensit physique .

    Les multiples causes de la gne impute au bruit peuvent tre:

    * lintensit sonore,

    * le spectre du bruit,

    * sa dure,

    * la vitesse daccroissement du niveau lors dun bruit impulsionnel,

    Mais la gne sonore est due bien dautres causes :

    * physiologiques (tat de sant, anxit, fragilit, ),

    * psychologiques (tat mental, intro ou extraversion, connaissance, acceptation ou non de lactivit

    professionnelle produisant ce bruit, )

    * sociologique (milieu socio-culturel, relations affectives avec le voisinage, ).

    Il est donc vident quaucune chelle de niveau sonore objective, ne peut donner une indication de

    gne ressentie, dans ces conditions, il est trs difficile de prciser le niveau de bruit admissible

    dans une situation dexposition sonore donne.

  • Philippe Nika Professeur Univ. Franche-Comt_ Acoustique

    61

    3.2 Loreille humaine

    3.2.1 Donnes physiologiques

    Comme le montre la figure 3.1, loreille est compose de trois parties :

    - loreille externe (pavillon et conduit auditif) ;

    - loreille moyenne (tympan et chane des osselets) ;

    - loreille interne (appareil vestibulaire et la cochle).

    Figure 3.1 : L'oreille humaine.

    Loreille externe , constitue du lobe ou pavillon et du canal auditif, reoit les ondes sonores qui

    excitent le tympan ; organe de jonction avec loreille moyenne .

    Loreille moyenne possde trois petits os (chane des osselets) agissant comme des bielles et un

    piston. Ces osselets transmettent les variations de pression acoustique vers loreille interne

    qui est constitue de deux systmes spars : les canaux semi-circulaires pour lquilibrage et la

    cochle ou limaon, spirale osseuse qui contient lorgane de laudition : lorgane de Corti. La

  • Philippe Nika Professeur Univ. Franche-Comt_ Acoustique

    62

    cochle en forme descargot, remplie de liquide et spare longitudinalement en deux par la

    membrane basilaire.

    En rponse un stimulus acoustique, le liquide dans le limaon actionne la membrane basilaire

    sur la surface suprieure de laquelle se trouvent 15000 20000 cellules cilies. Celles-ci

    enregistrent le mouvement et le transforment en impulsions nerveuses qui sont transmises au cerveau

    par le nerf cochlaire.

    Du point de vue de la scurit, les dangers concernant loreille externe sont trs faibles

    Au niveau de l'oreille moyenne contenant la cavit tympanique de frquence de rsonance situe

    vers 1300 1500 Hz, les risques de dchirure du tympan ou de lsions de la chane des

    osselets sont rels sous contraintes sonores leves et prolonges.

    Il existe au niveau de loreille moyenne des muscles commands par le cerveau qui, par tension,

    permettent dattnuer lintensit du bruit reu sur certaines frquences. Ce rflexe stapdien

    d'autoprotection fait partie de cette crispation qui est cre lorsque l'on est, par exemple, devant

    une presse emboutir en action.

    Lors de l'exposition des bruits intenses transitoires, on observe une destruction

    irrversible dune partie des cellules cilies sensorielles de loreille interne .

    A cette destruction correspond une diminution progressive de lacuit auditive. Plus il y a de cellules

    dtruites, moins le cerveau est capable de compenser cette perte dinformation. Cette perte est

    normalement plus importante aux frquences voisines de 4 6 kHz auxquelles loreille est plus

    sensible.

    Les bruits impulsionnels ou transitoires et de chocs sont cet gard les plus dangereux, de

    par leur brivet tels que tir, choc dun marteau-pilon sur la pice, qui occulte l'efficacit du rflexe

    stapdien. On conoit aisment qu'en l'absence d'information d'avertissement le rflexe stapdien

    n'tant pas mis en uvre, le risque de traumatisme et de surdit soit beaucoup plus grand.

  • Philippe Nika Professeur Univ. Franche-Comt_ Acoustique

    63

    3.2.2 Les principales sensations sonores

    La sensation auditive associe la frquence dun son est la hauteur tonale ou tonie. Pour

    lchelle musicale, elle stend du grave laigu. La tonie dpend principalement de la frquence du

    son, mais aussi de son intensit et de sa composition spectrale.

    Le timbre ou richesse du son dpend des harmoniques accompagnant le fondamental, parfois

    de leurs phases respectives.

    Un son harmonique ou pur au sens physique (vibration sinusodale) nest pas agrable loreille. Au

    contraire, un son riche en harmoniques (instruments de musique) parat agrable et sa composition

    spectrale caractrise le timbre de chaque instrument.

    Loreille apprcie aussi la vitesse de variation dun bruit, elle est sensible aux transitoires et

    les variations rapides de niveau perturbent plus ou moins la perception.

    3.2.3 Les lois de l'audition : courbes isosoniques de Fletcher

    Malgr son extraordinaire qualit, l'oreille humaine nest pas un transducteur acoustique

    linaire et ses capacits sont limites en amplitude et en frquence.

    Pour une personne jeune et otologiquement saine, le systme auditif humain n'analyse qu'une partie

    des bruits qui lui parvient dans la gamme de frquence audible allant de 16 Hz 20 kHz.

    L'oreille est plus sensible aux sons entre 2 et 5 kHz pour ltre moins aux plus hautes et plus

    basses frquences dans des proportions diffrentes

    - le seuil d'audition, fix 20 mPa 1000 Hz (soit 0 dB) en onde plane harmonique se

    diffusant librement ;

  • Philippe Nika Professeur Univ. Franche-Comt_ Acoustique

    64

    - le seuil de douleur, situ au-dessus de 130 dB.

    Bien qu'une augmentation de 6 dB reprsente un doublement du niveau de pression

    acoustique, une augmentation d'environ 10 dB est ncessaire pour que, subjectivement, le

    son nous paraisse deux fois plus fort

    Le plus petit changement perceptible est d'environ 3 dB.

    Courbes d'gales sensations sonores ou isosoniques de Fletcher et Munson pour des sons

    harmoniques, et ce pour des niveaux de rfrence choisis 1000 Hz.

    La courbe de sensibilit de l'oreille est l'inverse des courbes de pression provoquant l'isosonie.

    Figure 3.2 : Courbes d'isosonie ou d'gale intensit acoustique.

    (d'aprs Fletcher et Munson)

  • Philippe Nika Professeur Univ. Franche-Comt_ Acoustique

    65

    3.2.4 Rseau de pondrations physiologiques

    Les sonomtres autorisent la mesure de la sensation sonore rellement ressentie par l'oreille en

    fonction de la frquence ils peuvent simuler les courbes isosoniques de Fletcher.

    Il rsulte de ceci quatre caractristiques internationalement reconnues modifiant le signal de faon

    inverse aux courbes isosoniques de Fletcher, appeles : pondrations A, B, C et D

    - la pondration A sera utilise pour les niveaux sonores infrieurs 55 dB ;

    - la pondration B sera utilise pour les niveaux compris entre 44 et 85 dB ;

    - la pondration C sera utilise pour les niveaux suprieurs 85 dB ;

    - la pondration D sera rserve aux bruits d'avion.

    Les mesures en pondration physiologiques seront notes en dB(A), dB(B), dB(C) et dB(D). Sans

    pondration, la notation sera dB ou dB(lin) (linaire).

    Figure 3.3 : Filtres de pondrations physiologiques. (affaiblissement

    sonore appliquer au dB lin).

  • Philippe Nika Professeur Univ. Franche-Comt_ Acoustique

    66

    3.2.5 Courbes NR d'valuation du bruit (Noise Rating)

    Les courbes isosoniques d'gales sensation d'intensit acoustique de Fletcher et Munson, ont t

    tablies pour des sons purs .

    Un trac du mme genre a t refait avec des sons de bandes d'octave de l'analyse en frquence

    pour obtenir les courbes NR donnes par la recommandation ISO R 1996 [3] et la norme NF S

    30-010 [4].

    La frquence de 1000 Hz est toujours la rfrence. On constate toujours une sensibilit de l'oreille

    beaucoup plus faible aux basses frquences qu'aux aigus.

    Utilisation des courbes NR :

    - on fait l'analyse en frquence du bruit par bandes d'octave ;

    - on reporte le spectre trouv sur le rseau de courbes NR ;

    - on dtermine la courbe immdiatement suprieure tous les points relevs. Le numro de

    cette courbe est le rsultat de l'valuation sonore.

    -

  • Philippe Nika Professeur Univ. Franche-Comt_ Acoustique

    67

    Figure 3.4: exemple de report sur les courbes NR

    N.B.

    Si l'analyse a t effectue par 1/3 d'octave, on ajoutera 5 dB (10 log 3 = 4,77 dB).

  • Philippe Nika Professeur Univ. Franche-Comt_ Acoustique

    68

    Corrections apporter la suite de l'utilisation des courbes NR :

    - Son pur aisment perceptible : + 5 dB ;

    - Son transitoire ou intermittent et de chocs : + 5 dB ;

    - Bruit limit aux heures de travail : - 5 dB ;

    - Bruit pendant 25 % du temps de travail : - 5 dB ;

    - 6 % : - 10 dB ;

    - 1,5 % : - 15 dB ;

    - 0,4 % : - 20 dB ;

    - 0,1 % : - 25 dB ;

    - Campagne trs tranquille : + 5 dB ;

    - Campagne : 0 dB ;

    - Zone urbaine rsidentielle : - 5 dB ;

    - Zone urbaine industrielle : + 10 dB ;

    - Zone industrielle : + 15 dB.

  • Philippe Nika Professeur Univ. Franche-Comt_ Acoustique

    69

    3.3 Les effets du bruit

    3.3.1 Les effets physiologiques du bruit

    Le bruit a pour consquence :

    - un effet de masque .

    De la mme faon qu'une odeur en masque d'autres, une ambiance sonore va perturber la

    transmission dautres sons. Le bruit masquant peut tre dans la zone de frquence

    conversationnelle (difficile de se dpartir du masque) ou, en gnral, plus haut (utilisation de

    moyens de protection individuel comme les casques ou bouchons d'oreilles).

    On notera que l'agressivit des sons purs et leur raret font que de nombreuses alarmes les

    utilisent pour mieux se dtacher du bruit ambiant ;

    - une difficult de localisation spatiale.

    Normalement, le processus de captation sonore est trs peu directif dans de bonnes

    conditions d'coute ; et l'on n'a pas besoin de faire face la source pour la dcouvrir.

    Cette facult disparat progressivement quand le masque augmente.

    - une adaptation auditive.

    C'est une sorte d'accommodation un bruit prolong qui diminue la sensibilit auditive par une

    modification essentiellement musculaire, au niveau de l'oreille moyenne. Elle ne prsente pas de

    caractre pathologique, et elle disparat rapidement quand le bruit cesse ;

    - une gne pour raliser un travail.

    Par exemple, les exigences mentales dun travail de plus en plus informatis semblent rendre les

    oprateurs plus sensibles des bruits considrs habituellement comme non traumatisants

    (infrieurs 85 dB pondration A ) ;

    - la fatigue auditive.

  • Philippe Nika Professeur Univ. Franche-Comt_ Acoustique

    70

    Au point de vue physiologique, la fatigue auditive consiste essentiellement en une diminution

    passagre de lactivit du rcepteur de loreille aprs une diminution sonore (on rcupre une

    audition normale aprs une priode plus ou moins longue de repos en ambiance calme) ;

    3.3.2 Les effets pathologiques du bruit

    On peut les classer en trois catgories :

    - le traumatisme ;

    - la surdit professionnelle ;

    - les effets divers.

    Le traumatisme acoustique

    Le traumatisme acoustique est une lsion apporte par un phnomne physique extrieur

    soudain, et de courte dure, sur le systme auditif. Il possde un caractre transitoire , par

    opposition l'action de longue dure du bruit provocant la surdit. Le rsultat sur le plan auditif reste

    le mme, savoir perte de sensibilit partiellement ou sur toute l'tendue du spectre.

    On fera la distinction entre le traumatisme qui est considr comme accident du travail, alors

    que la surdit est une maladie professionnelle

    La surdit professionnelle

    Lexposition un bruit intense et prolong provoque des pertes auditives qui se dveloppent en

    gnral en trois phases :

    - on constate, dabord, une perte daudition de 30 40 dB, dans les frquences comprises

    entre 4000 et 6000 Hz. Cela ne provoque pas de gne pour la conversation, et nest donc

    repr que par lexamen audiomtrique ;

    - par la suite, la perte daudition stend des frquences plus basses (3000, 2000 et

    1000 Hz), et la personne ne comprend plus les paroles puis nentend plus les voix, en

    commenant par les voix aigus. Cest une phase dinstallation de la surdit ;

  • Philippe Nika Professeur Univ. Franche-Comt_ Acoustique

    71

    - la troisime tape comporte une perte gnrale daudition, atteignant 100 110 dB. Il sagit

    dune phase dinfirmit.

    La surdit professionnelle est la seconde maladie professionnelle en nombre de cas reconnus (1

    maladie professionnelle sur 4 en France) et en cot financier : les surdits professionnelles

    reprsentent 50 % des indemnisations de maladies professionnelles.

    (Ce cot est rpercut sur les cotisations de l'entreprise et reprsente en moyenne 100 000 euros

    par surdit reconnue professionnelle. )

    Les effets divers du bruit

    Les bruits ont galement dautres effets. Ils aggravent les situations de stress : manifestations

    cardio-vasculaires, digestives, glycmiques, sur le sommeil (augmentation de la fatigue

    gnrale, fatigue nerveuse), sur les comportements (agressivit, anxit), sur le systme oculaire

    (dilatation de la pupille, rtrcissement du champ de vision), sur le mtabolisme basal, etc .

    Remarque

    Quand on traite du bruit dans un souci scuritaire, on ne doit pas ignorer les effets des infrasons et

    notamment des ultrasons utiliss, par exemple, en soudage dans lindustrie du plastique. Des

    tudes en cours montrent que des expositions prolonges dans un champ intensif dultrasons

    peuvent altrer gravement les cellules nerveuses du cerveau et de la moelle pinire . La

    protection auditive est souvent inutile car ces vibrations sont transmises par conductibilit

    osseuse.

    Dans le domaine des infrasons, les risques sont aussi trs grands . En effet, cette gamme

    englobe des frquences mises par de nombreuses partie du corps (par exemple, le cerveau a une

    sensibilit particulire autour de 7 Hz). Si une source extrieure les fait vibrer leur propre

    frquence de rsonance, leur mouvement risque dtre dangereusement amplifi, et l encore des

  • Philippe Nika Professeur Univ. Franche-Comt_ Acoustique

    72

    expositions rptes et prolonges dans un champ intensif peuvent tre lorigine dhmorragies

    internes.