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SHAMIR

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Charles ENDERLIN

S H A M I R

Olivier Orban

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© Olivier Orban, 1991 ISBN 2.85565.524.2

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A Danièle

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GLOSSAIRE

Agence juive (pour la Palestine). Organisation inter- nationale reconnue par la Société des nations en 1922 et dont le rôle était l 'établissement du Foyer national juif en Palestine. L'A.J. a dirigé la coloni- sation des terres achetées par le Fonds national juif. Après la création de l'État d'Israël en 1948, l'Agence juive a continué d 'œuvrer pour l'émigra- tion des Juifs de la Diaspora.

Bétar. Acronyme de « Brit Trumpeldor » (alliance Trumpeldor), mouvement de jeunesse révision- niste créé à Riga en 1923. Activiste, paramilitaire. Également nom de la localité où Bar Kochba a mené sa dernière bataille contre les Romains après la chute de Jérusalem en l'an 135.

CID. Initiales de « Criminal Investigations Depart- ment » ; brigade criminelle de la police britannique.

Etzel. Acronyme de Irgoun Tsvaï Leoumi. Organisa- tion militaire nationale. Mouvement armé clan- destin issu du Bétar et du parti révisionniste.

Etzel Be Israel. Mouvement qui, sous la direction d'Avraham Stern, s'est détaché du Etzel. Égale- ment, groupe Stern.

Haganah. En hébreu, « Défense » ; organisation mili- taire clandestine dépendant de l'Agence juive, proche du mouvement sioniste travailliste.

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Haganah Bet. Mouvement armé clandestin qui s'est détaché de la Haganah et deviendra l'Etzel.

Hashomer Ha Tsaïr. « Le Jeune Gardien » ; mouve- ment de jeunesse sioniste socialiste.

Irgoun. Voir Etzel. Lehi. Initiales de Lohamei Herout Israël : Combat-

tants pour la liberté d'Israël. Nom du Etzel Be Israel (groupe Stern) après la mor t de son fonda- teur, Avraham Stern.

Mapaï. Parti travailliste juif (social-démocrate) fondé par David Ben Gourion en 1930.

Mossad. Service des renseignements extérieurs.

Mouvement de résistance hébreu. Nom adopté par le comité de coordinat ion des trois mouvements clandestins, l 'Irgoun, le Lehi et la Haganah.

Palmakh. Acronyme de « Plougot Hamahatz » ; compagnies d'assaut, unités d'élite de la Haganah.

Shin Bet. Service de sécurité intérieure.

Sionisme révisionniste. Mouvement sioniste maxima- liste fondé par Jabotinsky à la fin des années 20. Principale opposition aux instances du mouve- ment sioniste dirigé par Haïm Weizmann et David Ben Gourion.

Joseph Trumpeldor. Officier juif tsariste, héros de la guerre russo-japonaise et fondateur avec Jabo- tinsky du corps des muletiers juifs qui avaient combat tu aux côtés des Britanniques en Palestine en 1917.

Tsahal. Acronyme de Tsava Haganah le Israel; armée de défense d'Israël.

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INTRODUCTION

Yitzhak Shamir est le dernier représentant de la génération de dirigeants politiques israéliens formée par la lutte pour la création de l'État d'Israël et dont les racines sont restées dans Europe de l'Est d'avant la Shoah. C'est son seul point commun avec ses pré- décesseurs à la tête du gouvernement israélien. Ora- teur-né, meneur d 'hommes, David Ben Gourion venait de la formidable école du syndicalisme sio- niste. Très jeune il est devenu un des responsables de la communauté juive en Palestine. Moshe Sharett et Levy Eshkol ont fait leurs classes dans l'anti- chambre du pouvoir qu'était le Mapaï, le parti ouvrier. Golda Meir en a gravi les échelons un à un avant d 'assumer la responsabilité des relations exté- rieures du mouvement sioniste, puis de l'État d'Israël. Menahem Begin était déjà, avant d 'émigrer en Palestine, le chef d 'un grand mouvement sioniste nationaliste. Il n'est arrivé à la présidence du Conseil qu'après une traversée du désert qui a duré presque deux décennies.

Combattant de l 'ombre, Shamir a été formé dans la clandestinité. Des trois chefs du groupe Stern, Shamir ne s 'occupait ni de l'idéologie ni de la propa- gande, mais de l'action. Ses activités au Mossad sont, en 1991, encore interdites à la publication par la censure militaire israélienne. Lorsqu'il s'est lancé

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dans la politique à l'âge de cinquante-cinq ans, c'était un inconnu pour l'immense majorité des Israéliens. L'habitude du secret en a fait un homme discret, mal à l'aise devant les caméras, devant une foule. Pour un homme politique, ce sont des handi- caps sérieux qu'il a appris à surmonter tant bien que mal.

Le même flou entoure sa vie politique. Ses dis- cours sont circonstanciels. Il s'adapte à son public. Des intellectuels juifs français ont été critiqués par la gauche israélienne pour avoir relevé de la modéra- tion dans les propos de Shamir au cours d'une ren- contre à Paris. Un soir, à Jérusalem, devant des rab- bins, il proclame son attachement indéfectible au maintien de la terre d'Israël biblique sous la souve- raineté de l'État juif, avant d'annoncer, quelques minutes plus tard dans une interview télévisée, qu'il a rencontré un leader palestinien de Cisjordanie « parce qu'il faut parler avec l'ennemi ».

Un jour de 1986 - il était ministre des Affaires étrangères -, Shamir m'a surpris. Je venais de recueillir sa réaction à une série d'attentats anti-juifs commis à l'étranger par des Palestiniens. Hors micro, il m'a lancé : « Le mouvement national pales- tinien vient de commettre une nouvelle erreur. » C'était curieux, le chef du Likoud reconnaissait l'existence du mouvement palestinien, alors que Begin, quelques années plus tôt, les qualifiait de « bêtes à deux pattes ». Intrigué et voulant en savoir plus sur cet homme, j'ai découvert, deuxième sur- prise, que rien n'avait été publié sur lui ; aucune bio- graphie en hébreu ou en anglais. Le curriculum dif- fusé par son porte-parole faisait à peine une page! Ses conseillers ne connaissaient que les dernières années de sa carrière politique, presque rien sur son passé au groupe Stern ou au Mossad. Shamir lui- même n'a évoqué sa vie personnelle qu'au cours de cinq interviews. Ce n'est que cinquante ans après avoir quitté la Pologne qu'il a révélé quelques détails sur sa famille, sur son enfance.

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Jamais il n'a donné sa version sur certaines affaires du groupe Stern, l'exécution de son compa- gnon d'évasion, Eliahou Giladi, ou l'assassinat du comte Folke Bernadotte. Il faudra attendre, pour connaître celle-ci, qu'il publie l'autobiographie dont il a, paraît-il, commencé la rédaction. Lié par un contrat avec son éditeur, Shamir garde le silence sur ces zones obscures de sa vie. Au cours des entretiens qu'il a accepté de m'accorder ces dernières années, il a refusé d'évoquer son passé, sachant que j'écrivais son histoire. Quelques amis journalistes et écrivains ont bien voulu, en inter- viewant Shamir, « insérer » des questions dont les réponses m'étaient en fait destinées. Par ailleurs, en l'absence d'archives - le groupe Stern détruisait tous les documents au fur et à mesure par crainte de la police britannique -, il m'a fallu, quarante- cinq ans après les faits, retrouver des « clandes- tins », des témoins dont la mémoire était souvent défaillante, ou qui ne voulaient plus se souvenir. Ma tâche a fini par ressembler à une enquête policière à la recherche de « Michael ».

Au moment où ces lignes sont écrites, un proces- sus de paix semble sur le point de débuter au Proche-Orient. Yitzhak Shamir une fois de plus a de la chance. Il est à la tête du gouvernement israélien alors que l'histoire connaît un tournant qu'il n'a ni suscité ni recherché. Il s'y engage avec ce curieux mélange de pragmatisme et d'intransigeance qui chez lui rend difficile toute prise de décision. L'ancien militant du Bétar, l'ex-chef du groupe Stern devenu agent secret puis Premier ministre, presque par défaut sera-t-il le négociateur qui amè- nera la paix à Israël? Lui-même ne le croit pas per- sonnellement. A soixante-seize ans, il a conservé une vision pessimiste de l'histoire et c'est avec une extrême méfiance qu'il s'engagera sur la voie des pourparlers, ne progressant que si l'autre partie donne des preuves de sa bonne volonté. Son objectif

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sera la mise en place d'une solution intérimaire qui permettrait à son successeur de tester les intentions des pays arabes avant de déterminer le tracé futur de la frontière orientale d'Israël. Le tout est de savoir si les circonstances, l'administration américaine, la communauté internationale n'amèneront pas Sha- mir dans la position de Michael Collins, le fondateur de l'IRA qui avait fini par accepter le partage de l'Irlande, et dont, par admiration, il avait adopté le prénom pour en faire son nom de guerre.

Jérusalem, août 1991.

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1. Ytsel

D E R O Z H N O Ï À Y A F F O

« Notre but consiste à faire de la Pales- tine la mère patrie du judaïsme mondial, les communautés juives de la Diaspora devenant ses colonies et non l'inverse... »

Aharon David GORDON (1856-1922).

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Swislocz, 1905. Un shtetel, bourgade juive d'Europe centrale, de 2 500 habitants dans la zone de résidence juive en Biélorussie. Les Juifs se consacrent aux métiers qui leurs sont permis : cor- donniers, menuisiers, tailleurs, boulangers, auber- gistes, forgerons et surtout tanneurs. Le travail du cuir avait été développé dans la région dès la fin du siècle précédent grâce à des experts allemands employés par quelques Juifs entreprenants dans les tanneries de Swislocz. Plusieurs centaines d'ouvriers y travaillent dans des conditions souvent difficiles. Les départs sont nombreux, vers d'autres pays du vieux continent et surtout vers l'Amérique et ses libertés. Quelques-uns sont partis pour la Palestine afin d'y créer une nouvelle société juive. L'Empire russe, ébranlé par ses défaites de la guerre contre le Japon est à la merci de ses faiblesses, les récoltes sont catastrophiques. La paralysie s'étend. La révolu- tion est aux portes. Pour les Juifs, c'est peut-être l'occasion historique d'obtenir des droits individuels et nationaux. Le tsar Nicolas II, au pied du mur, accorde quelques réformes politiques et sociales. Il réunit la Douma.

Les Juifs aussi présentent leurs revendications. Sans grand espoir. Ils sont nombreux à militer dans les organisations révolutionnaires surtout dans la

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« zone » de résidence juive, ces territoires de la Rus- sie tsariste où ils ne sont pas interdits de séjour. La Pologne, la Bessarabie, une partie de la Biélorussie. Les Juifs y représentent plus de 11 % de la popula- tion. Le Bund, le mouvement socialiste juif, y tient le haut du pavé. Le sionisme naissant est en pleine crise. Il n'a pas encore de projet qui semble réali- sable. Son fondateur, Theodor Herzl, décédé l'année précédente à quarante-quatre ans n'a pas obtenu du sultan l'autorisation de l'immigration juive en Pales- tine. Seule une poignée parmi les centaines de mil- liers de jeunes Juifs qui quittent la Russie et la Pologne vont en terre promise. Et les sionistes se remettent à peine de la controverse sur l'installation d'un Foyer national juif en Ouganda qui avait divisé le congrès sioniste de Bâle en 1903. Herzl, voulant sauver le judaïsme russe des pogromes, avait accepté cette proposition britannique. Les délégués venus de Russie s'y étaient opposés avec violence. L'État juif, disaient-ils, ne peut voir le jour qu'en Palestine, là où est né le judaïsme. Le verset, « l'an prochain à Jérusalem », n'est pas qu'une prière, c'est aussi un slogan libératoire.

Mais dans la zone, en 1905, c'est de révolution qu'on parle. Ici, et tout de suite. Le Bund se consi- dère comme un élément à part entière du mouve- ment social-démocrate russe, déclenche des grèves, organise des manifestations de masse. Le mouve- ment est largement suivi surtout à Lodz et à Bialys- tok. Un jeune tanneur, Shlomo Yzernitsky, milite clandestinement dans les partis anti-tsaristes. Un jour, passant par Swislocz où les usines sont occupées par des piquets de grève, il va loger chez la famille de sa tante et tombe amoureux de sa cousine Perl Szawzien, la troisième d'une famille de neuf enfants. Le mariage a lieu 1 la même année. Le gou- vernement tsariste reprend le contrôle de la situa- tion en quelques semaines. Le grand changement n'a pas lieu, pas encore, et Shlomo renonce à ses

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activités politiques. Il conservera des amis au sein de ce qui deviendra le parti bolchevique. Le couple décide de s'installer dans un shtetel voisin, Rozhnoï, où la moitié des 4 000 habitants sont juifs et où habite une partie de la famille de Shlomo.

Le couple a deux filles, Myriam et Rifka, puis, le 15 octobre 1915, un fils: Yitzhak. Les affaires de Shlomo, sa tannerie, ne vont pas trop mal. Le cuir est une matière stratégique. La vie est relativement aisée pour la famille mais pas pour les autres habi- tants du village. Les Allemands occupent Rozhnoï depuis l'année précédente. Les champs ne sont plus cultivés, des centaines d'hommes avant été envoyés au travail obligatoire en Allemagne d'où ils ne reviendront que quelques années plus tard, souvent tuberculeux. La petite communauté juive s'adapte. Un jardin d'enfants juifs voit le jour, on y enseigne le yiddish et l'allemand. Une chorale est créée. Pour l'occupant elle s'appelle : « Kansum Verein » et en hébreu, «Zamir», le Rossignol. En fait, l'organisa- teur est un militant communiste qui tente de recru- ter parmi les jeunes Juifs pour faire pièce au mouve- ment sioniste naissant à Rozhnoï2. Après la découverte du pot aux roses, l'association est dis- soute. Shlomo prend sa part de responsabilité, il par- ticipe à la gestion du petit hôpital juif.

En 1917, le projet du Retour à Sion semble sur le point de se concrétiser. A Londres, le 2 novembre, Lord Balfour, Secrétaire au Foreign Office, écrit à Lord Lionel Walter Rothschild pour lui annoncer que la politique britannique entend désormais facili- ter et encourager l'établissement d'un foyer national pour le peuple juif en Palestine. Cette déclaration sera approuvée par la conférence des Alliés à San Remo en 1922 et incorporée dans le mandat sur la Palestine accordé à la Grande-Bretagne en 1922.

Après l'effondrement de l'armée allemande en 1918, l'influence bolchevique gagne Rozhnoï. Un comité révolutionnaire y organise des meetings, pré-

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sidés par des Juifs qui proclament le soutien du shte- tel à la Russie des Soviets. L'armée Rouge occupe la ville voisine de Slonim, elle avancera en 1919 vers Varsovie. Des unités de légionnaires polonais commandées par Zambrovsky rôdent dans la région. A défaut de combattre l'ennemi communiste, ils s'adonnent à leur activité favorite : le pogrome. Un matin, plusieurs centaines de cavaliers polonais font irruption dans Rozhnoï. Ils rencontrent des Juifs qui se rendent à la synagogue, les alignent devant un mur et ouvrent le feu. Il y a six morts et six blessés. Durant toute la journée, les légionnaires pillent les maisons juives. Quelques habitants chrétiens de la ville se joignent aux légionnaires. Yitzhak a quatre ans. Selon certaines estimations, 30 000 Juifs auraient été massacrés par les forces polonaises lors de la conquête de ces territoires.

Le village restera sur la ligne de front jusqu'à son intégration définitive à la République polonaise créée par le traité de Versailles en 1921. A six ans, le petit Yitzhak - sa famille l'appelle « Ytsel » - va au « nouveau Heder », une école maternelle où les cours sont en hébreu et en polonais. Dans l'autre Heder, orthodoxe, l'étude est exclusivement consa- crée à la Thora et les langues obligatoires sont le yid- dish et l'hébreu. Shlomo a choisi : son fils recevra un enseignement sioniste. L'année suivante, en dépit de son très jeune âge, il le fait entrer au lycée de l'orga- nisation « Tarbout » qui avait ouvert ses portes à Rozhnoï. Shlomo fait partie du comité de direction. Pour les autorités polonaises, cette institution n'est qu'une école primaire. Pas question de reconnaître ce lycée juif. Chaque fois qu'un inspecteur vient de Varsovie ou de Bialystok, professeurs et élèves s'empressent de cacher tous les manuels d'études secondaires. En l'absence de subventions gouverne- mentales, le problème du salaire des enseignants est un casse-tête permanent. Les solutions sont dis- cutées par le comité réuni chez les Yzernitsky.

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Yitzhak Shamir évoque cette période de son enfance avec c h a l e u r Il raconte le bataillon de sapeurs-pompiers volontaires qui défilait dans les rues du shtetel. Composé en majeure partie de Juifs, son rôle était important. De grandes forêts entou- raient Rozhnoï et les incendies menaçaient régu- lièrement la ville. Shlomo, statut oblige, faisait acte de présence à la synagogue, emmenant son fils. Les vacances, les fins de semaine étaient l'occasion de visites chez la famille à Dereczyn ou à Swislocz. Yitzhak Shamir affirme que le village natal de son père s'appelait Draczan, mais toutes les recherches auprès de personnes ayant vécu dans la région n'ont pas permis de retrouver une localité de ce nom. Il s'agit apparemment d'un nom usuel de Dereczyn. Le détail a son importance car c'est là que Shlomo ten- tera de se réfugier après avoir échappé aux nazis en 1942. Yitzhak se souvient de longues promenades en forêt. La marche restera son activité physique favo- rite.

Cependant, la situation économique des 3 000 000 de Juifs polonais se détériore rapidement. Sur la crise nationale vient se greffer une politique gouvernementale résolument antisémite. Réduction considérable de l'aide au système éducatif et social juif et surtout élimination des Juifs de secteurs entiers de l'économie polonaise. A Varsovie, par exemple, 2 560 échoppes de tailleurs juifs parmi les 3 000 que compte la capitale doivent fermer leurs portes 4 Cet antisémitisme ne sauvera pas la Pologne d'une inflation galopante qui mènera le régime au bord de la banqueroute. En 1926, le vieux maréchal Pilsudski qui avait quitté la vie politique reprend le pouvoir. Le dictateur, en dépit des massacres commis par ses légionnaires lors des pogromes de 1919 et 1920, n'est pas personnellement antisémite et réalise très vite que la politique anti-juive de ses prédécesseurs corrompt les institutions de l'État. Il interdit l'antisémitisme officiel, ce dont les Juifs lui

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seront reconnaissants. Mais c'est trop tard. Le nume- rus clausus économique les a marginalisés.

Dans les shtetels, on a faim. Selon une étude effec- tuée dans la province de Grodno par TOZ, l'Associa- tion juive pour la santé, 48 % des garçons juifs souffrent de malnutrition, 21 % sont anémiques. Trois années plus tard, la grande crise mondiale atteint la Pologne. A Rozhnoï en 1927, Shlomo fait le bilan. Les affaires sont catastrophiques. Il ferme la tannerie et part avec sa famille s'installer à Vol- kovysk, le chef-lieu voisin, une ville de 20 000 habi- tants qui compte 11 000 Juifs. Là aussi, le commerce du cuir est devenu inexistant. Il faut faire autre chose. Perl a l'idée d'ouvrir une auberge. Les Yzer- nitsky s'installent dans une maison à deux étages, le rez-de-chaussée servant à recevoir les consomma- teurs. La clientèle est surtout composée de mar- chands et d'ouvriers de passage, en général non juifs. Ytsel est inscrit au lycée Herzlyah, affilié égale- ment au système Tarbout et reconnu par les auto- rités. Les cours se déroulent en hébreu.

Si la pauvreté est omniprésente, Volkovysk est riche d'un humus qui n'existe guère dans les petits shtetels comme Rozhnoï : une vie politique, un bouillonnement idéologique permanents. Le ventre souvent creux, on décortique les événements, on reconstruit le monde. Crypto-communistes occupés à mettre en place des cellules clandestines, socia- listes juifs et non juifs, sionistes de toutes tendances tentent constamment de recruter, chez les jeunes et les adultes. Ytsel trouve sa place à gauche, au Gor- donnia, un mouvement de jeunesse sioniste socia- liste qui prêche l'avènement « d'un nouvel homme juif par le retour au travail de la terre, seul capable de libérer les Juifs des tares aliénantes du ghe t t o ». Le choix ne déplaît pas à Shlomo et à Yitzhak Szkar- lat qui enseigne les matières les plus importantes à la classe de quatrième du lycée Herzlyah : l'histoire et la littérature. Personnage charismatique, adoré

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par ses élèves, il consacre sa vie de célibataire à ce qui est pour lui l'avenir du peuple juif, l'enseigne- ment. Pendant les vacances scolaires il se plonge dans la politique aux côtés d'Yitzhak Gruenbaum, le leader sioniste socialiste polonais dont il est un des collaborateurs.

En Palestine, l'utopie sioniste est devenue une réa- lité avec l'arrivée, entre 1919 et 1923, de 37 000 immi- grants. La plupart sont venus, habités par l'idéal col- lectiviste, créer les premiers kibboutzim, poursuivre l'œuvre des pionniers établis là après la faillite de la révolution de 1905. « Pendant des générations, ces hommes et ces femmes auront pour objectif la créa- tion en Palestine d'une société juste et égalitaire, incompatible avec le système capitaliste oppressif et a l i é n a n t »

Ytsel qui avait acquis une solide connaissance de l'hébreu à Rozhnoï se fait très vite remarquer. Un jour, Szkarlat analyse le style de ses trois meilleurs élèves : Yehoshouah Givoni - qui deviendra un des fondateurs du kibboutz Alonim en Israël - est un esprit logique, David Niv, qui restera proche d'Yitzhak Shamir - il sera membre de l'Irgoun et plus tard le rédacteur en chef des protocoles de la Knesset -, fait preuve d'imagination alors qu'Yitzhak Yzernitsky privilégie l'affectivité. La classe analysait les écrivains polonais mais aussi la littérature hébraïque contemporaine. D'anciens élèves de Szkarlat se souvienent avoir planché sur des traduc- tions de polonais en hébreu, des sujets comme « l'amour de Sion ». Le sionisme est inscrit en fili- grane dans tous les cours donnés au lycée Herzlyah. L'abondante presse juive qui parvient à Volkovysk de Varsovie apporte matière à devoirs et à discussion.

C'est par ces journaux sionistes qu'Ytsel apprend en 1929 qu'une catastrophe vient d'avoir lieu en Palestine. Des Juifs ont été massacrés par des irrégu- liers arabes, presque tous les membres de la commu- nauté de Hébron sont morts. L'émotion est profonde

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parmi les Juifs polonais. « Même en Palestine, les Juifs sont sans défense! C'est de mauvais augure pour l'État que les sionistes veulent créer », dit-on dans les shtetels. Les responsables du mouvement sioniste socialiste estimaient jusqu'alors que le nationalisme arabe palestinien trouverait sa réponse dans les bénéfices économiques de la colonisation juive. Berl Katznelson affirme que les « fellahin » (paysans arabes) exploités par « une ploutocratie féodale » finiront par comprendre la nécessité d'une solidarité avec le mouvement révolutionnaire juif. La population arabe palestinienne croissait rapide- ment en raison du développement économique sus- cité par l'administration britannique et les inves- tissements j u i f s En fait, les chefs de la communauté arabe éprouvent une inquiétude gran- dissante devant l'immigration juive et la politique sioniste d'achat de terres. Ils craignent également une atteinte aux lieux saints musulmans de Jérusa- lem. La violence finit par éclater le 23 août 1929; des groupes arabes armés partent à l'assaut des quar- tiers juifs à Jérusalem et à Hébron. L'ordre ne sera rétabli que cinq jours plus tard. Le bilan : 133 morts et 399 blessés juifs, 87 tués et 91 blessés arabes.

Ces événements apportent de l'eau au moulin de celui qui est considéré comme l'enfant terrible du mouvement sioniste : Zeev Jabotinsky, le fondateur avec le légendaire Joseph Trumpeldor (héros juif de l'armée tsariste lors de la guerre russso-japonaise) des bataillons juifs qui avaient participé, avec l'armée britannique, à la conquête de la Palestine en 1918. Théoricien de la « nation absolue, fondée par l'unicité d'une race », « la race juive, écrivait-il dès 1913, ne sera jamais subjuguée », il avait formé en 1925 un nouveau mouvement, l'« Union des sio- nistes révisionnistes » (en hébreu, Zohar), indépen- dant des instances existantes dominées par les socia- listes. Son idéologie est résolument activiste. Jabotinsky écrivait dans le bulletin de son organisa-

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tion : « L'objectif du sionisme est la transformation graduelle de la Palestine - pour lui cela signifiait également la Transjordanie, les territoires situés à l'est du Jourdain - en un commonwealth juif qui s'autogouvernerait sous les auspices d'une majorité juive. » Plus question de révolution socialiste, son programme est d'abord politique. Il s'agit ni plus ni moins que d'œuvrer contre les principes mêmes du mandat britannique en Palestine, la création de la Transjordanie, de revoir et corriger la déclaration Balfour.

Les révisionnistes réclament une immigration de masse en Eretz Israel (terre d'Israël), l'annulation de la séparation entre la Palestine cisjordanienne et la Transjordanie (décidée en 1922 par les Britan- niques), l'établissement d'un régime colonial britan- nique en Palestine qui favoriserait la confiscation de terres pour permettre l'implantation des immigrants juifs, tout en dédommageant largement les proprié- taires arabes. La formation d'une légion juive en Eretz I s r a e l Toutes choses allant à l'encontre des théories néo-marxistes des sionistes socialistes qui tenaient le haut du pavé dans la Diaspora mais aussi au sein de la communauté juive de Palestine.

La création du mouvement révisionniste vient ren- forcer une organisation de jeunes, le Bétar, né des idées de Zeev Jabotinsky et du mythe romantique de Joseph Trumpeldor tué les armes à la main en défen- dant Tel-Haï en Galilée. La première cellule a vu le jour à Riga en 1923. Ses activités sont consacrées à l'étude de la langue et de la culture hébraïques, à l'autodéfense. Les militants s'engagent à émigrer en Palestine par tous les moyens, à œuvrer pour la créa- tion d'un État juif sur les deux rives du Jourdain. Vêtus d'un uniforme brun et rouge, les bétaristes défilent souvent au pas, ce qui leur vaut de la part de leurs adversaires socialistes les épithètes de « milita- ristes » et de « fascistes ».

Pour la plupart des élèves de la classe de qua-

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trième du lycée Herzlyah, la cause est entendue. Seul l'activisme révisionniste donnera aux Juifs de Palestine les moyens de se défendre. Ils s'inscrivent au Bétar. Mais pas Ytsel, du moins pas tout de suite. Pendant trois mois, il réfléchit, hésite, pèse le pour et le contre. Ses camarades affirment qu'il passait des nuits blanches à réfléchir au problème. Difficile d'abandonner les idéaux socialistes pour lesquels son père, Shlomo, a combattu. Un jour il fait irrup- tion chez Gotlieb Rosenblum, un des responsables du Gordonnia à Volkovysk. Celui-ci se souvient du discours que lui fit le gamin de quatorze a n s : « Comment voulez-vous construire l'État juif? Encore une vache, encore un cheval, une chèvre, encore une ferme? C'est ainsi que vous voulez construire un État? Ce n'est pas réaliste! Un pays, cela se conquiert ! Qui veut un pays doit combattre ! Il faut se battre pour son pays ! Acheter encore une vache, encore une chèvre, construire encore une ferme [en Palestine] ne vous mènera à rien. Ce n'est pas pour moi! Je ne pourrais pas construire Eretz Israel ainsi ! » Et Ytsel part rejoindre ses camarades au Bétar. Shlomo respectera le choix de son fils non sans le critiquer. « Je suis contre le plan de Jabo- tinsky d'évacuer les Juifs de Pologne, dira-t-il à son fils en ajoutant : « Je veux bien quitter la Pologne mais j'ai le droit de vivre ici. Et puis, comment peux-tu être l'adversaire d'un homme comme Haïm Weizmann qui est respecté par les grands de ce monde 10 ? »

Président de l'Organisation sioniste mondiale, savant de renom, Weizmann est en 1929 une person- nalité de premier plan. Il soutient l'action pionnière des kibboutzim. Une nouvelle société juive en Pales- tine ne peut être créée, dit-il, que « maison par mai- son, dounam par dounam ». Il accorde également une importance particulière à la question arabe. Pour lui, « la Palestine doit être construite [par les sionistes] sans violer les intérêts légitimes des

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Arabes. Il ne faut pas toucher un seul cheveu de leur tête ».

Des paroles courageuses au moment où les rela- tions judéo-arabes se détériorent en Palestine et que l'attitude du gouvernement britannique n'est pas favorable au mouvement sioniste. En 1930, Londres publiera un rapport sur les émeutes de l'année pré- cédente, un « Livre blanc » qui, tout en reconnais- sant la responsabilité des Arabes, en attribue la cause fondamentale au « sentiment de frustration qu'éprouvent ces populations arabes à l'égard de leurs aspirations nationales et politiques, et la crainte qu'elles éprouvent quant à leur avenir économique » ; il propose donc de réduire l'immi- gration juive en Palestine. Le gouvernement britan- nique fera marche arrière au début de 1931, mais l'atmosphère n'est plus à la confiance réciproque surtout chez Jabotinsky et les révisionnistes.

Yitzhak Szkarlat est profondément déçu par la décision de ses élèves. Un matin lors d'une prome- nade, il a la mauvaise surprise d'entendre sa classe lui chanter l'hymne du Bétar. Pour un enseignant affilié au mouvement sioniste socialiste, c'est le signe d'un échec. Ytsel devient un des responsables du Bétar à Volkovysk. Il participe activement aux manifestations de l'organisation et se fait une réputa- tion de jeune orateur talentueux. En 1929, lors de vacances chez un oncle à Rozhnoï, il fonde la pre- mière cellule du Bétar.

Mais il faut penser au baccalauréat. Le lycée Herz- lyah ne comporte pas de classes terminales et, munis d'un petit pécule, David Niv et Yitzhak Yzemitsky prennent le train pour la grande ville : Bialystok, située à cent kilomètres. Les parents leur avaient loué une chambre chez un rabbin. Le lycée hébraïque où les deux adolescents doivent pour- suivre leurs études est une institution de renom, relativement chère. Tous les mouvements de jeu- nesse sionistes y sont représentés dans un bouil-

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lonnement idéologique permanent. Régulièrement, des débats opposent la gauche et la droite, en dehors des cours qui sont totalement apolitiques. Car on ne badine pas avec la discipline. Dans le vestiaire à l'entrée du bâtiment, les lycéens doivent enlever leurs chaussures et mettre des pantoufles pour ne pas abîmer les tapis des couloirs. En certaines occa- sions, les élèves défilent derrière la bannière de l'ins- titution, chantant, en latin : « Nous sommes heureux car nous sommes jeunes. » Bien entendu, ils portent l'uniforme du lycée.

Il y a aussi les « élégants » qui préfèrent les thés dansants aux activités politiques. Des militantes du très socialiste Hashomer Hatsaïr critiquent vivement leurs consœurs qui en ces temps difficiles dansent le tango et la valse plutôt que de se consacrer aux choses vraiment sérieuses... Ytsel n'est pas de cette jeunesse dorée. Il se contente, lorsqu'il en a les moyens, d'un bon repas un peu arrosé. Ses cama- rades le considèrent comme un adolescent plutôt modeste, parfois un peu trop sérieux, et ne se sou- viennent pas l'avoir rencontré en compagnie fémi- nine. Ses moments de liberté sont consacrés au Bétar où il dirige un groupe d'une dizaine d'écoliers.

L'élève Yzernitsky est sérieux, bon en hébreu et en littérature, faible en mathématiques. En 1932, le grand écrivain Bialik visite Bialystok; il est reçu au lycée. Les enseignants choisissent un élève pour saluer le grand homme : Ytsel, qui prononce un petit discours en un hébreu impeccable. Sous l'uniforme du lycée, la chemise porte l'insigne du Bétar, il n'a pas encore dix-sept ans.

Au début de l'automne, les autorités polonaises annoncent que les élèves du lycée hébraïque pour- ront se présenter aux épreuves du baccalauréat national : un geste du gouvernement de Varsovie envers les Juifs à l'occasion des prochaines élections législatives. Plus que trois mois avant l'examen, il faut bachoter. Ytsel et son copain David Niv doivent

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rattraper les matières qu'ils avaient peu étudiées à Volkovysk et dans lesquelles ils ne brillaient pas à Bialystok : les mathématiques et la physique. Niv échoue, Yzernitsky réussit, au grand dam de Rad- kowsky, son professeur de mathématiques, qui demande à l 'examinateur polonais de lui mettre une mauvaise note : « Je découvre qu'il peut quand il veut! Il ne doit pas recevoir un prix parce qu'il n 'a rien fait en mathématiques pendant deux ans » ! Le professeur d 'al lemand qui fait partie du jury s 'énerve et interpelle Radkowsky en hébreu : « Tu es un idiot. Le Polonais apprécie les connaissances de l'élève et toi tu vas le faire échouer » ! Ytsel obtient de bonnes notes en mathématiques é g a l e m e n t

Entre-temps, Shlomo a décidé de revenir à sa pro- fession, la tannerie. Avec sa famille, il est retourné à Rozhnoï afin d'y créer avec ses anciens employés une entreprise d'un genre entièrement nouveau : une coopérative de cuirs et peaux. Il apporte son expérience et les ouvriers leur travail. « Garkov », pour « Garber Kooperativ », c'est le nom de la société, démarre avec du crédit. Certains employés sont payés avec des bons d'achat pour l 'épicerie du gendre de Shlomo, Yaacov Pitkowsky qui a épousé Rifka pendant le séjour de la famille à Volkovysk. Le couple a un fils. Myriam, l 'autre sœur, a convolé avec un homme à la situation aisée, Moutel Szklere- witz, le propriétaire d 'une usine de térébenthine, qui a la concession d 'une grande forêt de la région. Son contremaître est un Polonais d'origine ukrai- nienne. Le détail a son importance, on verra pour- quoi. Ils ont deux enfants. En quelques mois, Garkov commence à dégager des bénéfices, pas assez cepen- dant pour financer les études du fils. Ytsel passe donc l 'année à Rozhnoï en donnant des cours privés afin de réunir le pécule qui lui permettra l 'année sui- vante de s'inscrire à l'université de Varsovie. En attendant, il lit la littérature d'Eretz Israel mais aussi des auteurs socialistes et communistes. A-t-il eu des

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discussions avec quelques-uns des jeunes Juifs communistes qui animaient la cellule clandestine de Rozhnoï ? Le contraire serait surprenant.

Pour le judaïsme européen, 1933 est une année cruciale. Le 30 janvier, Adolf Hitler devient chance- lier de l'Allemagne. Fin février, après l'incendie du Reichstag, il suspend les libertés constitutionnelles et, en avril, les Juifs sont exclus du service public. En mai commencent les autodafés des livres consi- dérés comme décadents par les nazis. Les œuvres de Thomas Mann, Albert Einstein, Stefan Zweig, Sig- mund Freud... Ces premières manifestations du nazisme suscitent le dégoût dans le monde et l'inquiétude parmi les pays voisins de l'Allemagne, notamment la France et la Pologne. Le maréchal Pil- sudski envisage même une guerre préventive. Il expédie quelques-uns de ses plus proches conseillers sonder les intentions des Français et des Britan- niques. Devant leur réaction il décide d'y renoncer. Beck, qui succédera à Pilsudski quatre années plus tard, raconte dans ses Mémoires : « La faiblesse de nos alliés éventuels à cette époque nous fit abandon- ner l'idée d'une guerre préventive 12 »

La politique antisémite des nazis a pour les Juifs de Palestine une première conséquence positive. Des immigrants commencent à arriver d'Allemagne. D'abord peu nombreux, leur nombre ira croissant au fil des années. Ils apporteront une culture, des technologies et parfois des investissements. Plu- sieurs savants de renom s'installeront, encouragés par Weizmann, dans les universités palestiniennes. Toutes choses qui, dans l'esprit des dirigeants sio- nistes confirment la raison d'être d'un Foyer natio- nal juif. Ils concluront un accord avec les nazis, per- mettant aux Juifs émigrant en Palestine d'exporter leurs capitaux convertis en denrées allemandes, revendues ensuite contre des devises britanniques. Le SS Adolf Eichmann était chargé de ces contacts avec les représentants sionistes! Une collusion qui,

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tout en permettant de sauver des Juifs, ne plaisait pas à de nombreux militants du mouvement sioniste.

Diplomatiquement, le Reich est isolé; militaire- ment, il est encore impuissant. Hitler lance un for- midable bluff : prêcher la paix et le désarmement. Il s'agit de débarrasser l'Allemagne du carcan du traité de Versailles sans provoquer de sanctions inter- nationales, réarmer sans risquer la guerre. Le 17 mai 1933, le Führer prononce son fameux « discours de la Paix », acceptant une proposition du président Roosevelt d'un désarmement général, la destruction de toutes les armes offensives, les bombardiers, les chars, l'artillerie mobile... sur la base d'une récipro- cité entre tous les pays d'Europe. Hitler se taille un beau succès de propagande tant à Londres qu'à Washington. Mais en octobre, puisque les alliés exigent un délai de huit ans pour ramener leur arse- naux au niveau de l'Allemagne, il proclame que son pays n'est pas considéré sur un pied d'égalité avec les autres puissances. Berlin quitte la Société des nations et la Conférence sur le désarmement. Le 4 novembre, le peuple allemand plébiscite le retrait de Genève et approuve la liste unique présen- tée par les nazis aux élections pour le Reichstag. Le score veut tout dire des préférences de l'électorat allemand : 95 et 92 % des votants. Le 7, Hitler sur- prend à nouveau les chancelleries. Il convoque l'ambassadeur de Pologne à Berlin pour lui proposer des négociations directes, « étant entendu que les deux pays renoncent à l'usage de la force dans leurs relations pour consolider la paix en Europe ». Le 26 janvier 1934, l'Allemagne et la Pologne concluent un pacte de non-agression 13.

Ce rapprochement et la politique anti-juive de Hitler encouragent les organisations fascistes para- militaires polonaises, les Endeks et les Naras qui réclament l'exclusion des Juifs de la vie économique du pays, attaquant parfois les synagogues, profanant les cimetières juifs... Goebbels vient, le 13 juin 1934,

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donner un cours de national-socialisme à l'univer- sité de Varsovie devant 1000 étudiants et profes- seurs. Le lendemain il est reçu par Pilsudski pour un entretien de cinquante minutes.

Yitzhak Shamir se souvient du sentiment de dégoût qu'il a ressenti en découvrant les titres des journaux polonais : « Goebbels à Varsovie ». C'est vers cette époque qu'il décide de partir pour la Palestine 14 Il se sent de plus en plus mal à l'aise en Pologne et le seul endroit vers lequel le poussent toute son éducation et ses activités politiques est Eretz Israel. Le problème est de savoir comment et quand émigrer. Les autorités britanniques ne distri- buent que parcimonieusement les visas. Ytsel va donc d'abord poursuivre quelques études à Varso- vie. En compagnie de David Niv, il loue une chambre dans l'appartement d'une veuve juive. La formule n'est pas particulièrement confortable. Par- fois, pour ne pas déranger la propriétaire, les deux compères quittent leurs pénates en passant par la fenêtre, en général ce n'était pas pour se rendre à l'université où ils ne font qu'acte de présence mais pour se consacrer à leur activité principale : le Bétar. Au siège du mouvement, ils rencontrent un jeune homme qui en est l'étoile montante : Mena- hem Begin.

Le 16 juin 1933, les révisionnistes sont entrés dans une zone de turbulence. Un meurtre a secoué la communauté juive de Palestine et le monde sioniste. Près d'une plage de Tel-Aviv, Haïm Arlozoroff, diri- geant travailliste et directeur du département poli- tique de l'Agence juive, a été abattu à coups de revol- ver par un inconnu. Il était un des responsables de l'accord avec les nazis. Le 19, un suspect est appré- hendé : Avraham Stavsky, un militant de la « ligue des Biryonim » (terme hébraïque signifiant voyou), une organisation clandestine anti-britannique. Il est originaire de Brisk en Pologne, la ville natale de

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Menahem Begin, le dirigeant du Bétar dont il est l'ami. Trois mois plus tard, il sera libéré par la jus- tice mandataire en raison du manque de preuves. Le seul témoin de l'accusation est l'épouse d'Arlozoroff. Mais le chef des Biryonim, Abba Ahimeir, soup- çonné d'avoir organisé l'assassinat, restera sous les verrous pendant vingt et un mois, et sera condamné pour ses activités contre la politique des autorités mandataires.

Ahimeir est un curieux personnage. Né en Biélo- russie en 1898, il a fait ses études secondaires à Tel- Aviv, retournant ensuite en Russie pour militer dans une organisation sioniste. Après la Première Guerre mondiale, fuyant les bolcheviques il se rend à Vienne terminer un doctorat d'histoire consacré à Spengler et à Nietzsche. En 1928, il quitte le mouve- ment sioniste socialiste, dont il n'apprécie ni le néo- marxisme ni les tendances pacifistes, et rejoint les révisionnistes. Il devient un des responsables du Bétar palestinien et, en 1931, se lance dans l'acti- visme anti-britannique, organisant le boycottage d'un recensement qu'il juge discriminatoire pour les Juifs. En 1932, il dirige un journal violemment natio- naliste, Hazit Ha Am (Le Front de la nation) en compagnie d'un écrivain révisionniste, Yehoshouah Yevin, dont les œuvres glorifient l'héroïsme juif.

En février 1932, les Biryonim encouragent les associations d'étudiants révisionnistes de l'univer- sité hébraïque de Jérusalem à manifester contre la création d'une chaire consacrée à l'étude de la « paix internationale ». Le premier cours est sérieu- sement perturbé par un chahut agrémenté de boules puantes. Quinze étudiants sont expulsés, parmi les- quels David Raziel et Avraham Stern, deux jeunes militants qui plus tard dirigeront une autre organisa- tion militaire clandestine, l'Irgoun Tsvaï Leoumi dont la graine vient d'être plantée en Palestine.

Hazit Ha Am tire à boulets rouges sur les dirigeants sionistes socialistes, prenant plus particulièrement

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pour cible Haïm Arlozoroff et ses contacts avec l 'Allemagne nazie. Pour les Biryonim qui organisent quelques attentats contre les consulats allemands de Jérusalem et de Jaffa, « les dictateurs marxistes de l'Agence juive se livrent au culte du veau d 'or en abandonnant les droits du peuple juif »...

Après l'assassinat d'Arlozoroff, le Mapaï accuse les révisionnistes d 'être les instigateurs du crime, par leur violence verbale et leur idéologie militariste. Jabotinsky réalise les dangers que cette affaire repré- sente pour son mouvement . Il monte au créneau et publie une série d'articles réfutant les accusations contre Stavsky, Ahimeir, les Biryonim et le Bétar. En fin de compte, tous les accusés seront libérés. L'organisation d'Ahimeir est interdite et Hazit Ha Am doit in terrompre sa publication. Seuls quelques-uns parmi ces militants reprendront une activité poli- tique. Les chefs, no tamment Yevin et Ahimeir ont pe rdu toute influence politique. Mais les idées qu'ils ont semées ne vont pas tarder à germer.

En Pologne, le Bétar, à c o m m e n c e r par son jeune leader, Menahem Begin, a pris fait et cause pour les Biryonim et Stavsky. Lorsqu'il sera Premier ministre de l'État d'Israël en 1980, Begin créera une commis- sion d 'enquête judiciaire pour faire la lumière sur le meur t re d'Arlozoroff. Ses conclusions ne seront pas plus claires que celles des policiers de 1933. Cet assassinat a creusé un fossé insurmontable entre le Mapaï et les révisionnistes, empêchant toute réconciliation entre les deux mouvements. Aux yeux de l 'opinion publique juive, il marquera le révision- nisme du sceau de la violence irresponsable. Ce n'est qu 'en 1967 que les héritiers de Jabotinsky retrouveront une légitimité politique en Israël.

Yitzhak Yzernitsky n 'a pas le moindre doute. Le véritable combat politique est en Palestine. Il emprunte de l 'argent et se rend chez M. Poznansky, le représentant de l 'université hébraïque de Jérusa- lem à Varsovie, pour obtenir un certificat de séjour

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en Palestine. De sa plus belle écriture, en hébreu, Ytsel rédige son curriculum vitae, explique les rai- sons pour lesquelles il a interrompu ses études de droit. « Mes parents voulaient que j'aie une profes- sion " utile " mais, après quelques mois d'études à Varsovie, je me suis rendu compte du peu d'intérêt que j'éprouvais pour ces matières juridiques. Je m'intéresse en fait à la littérature hébraïque que je ne pourrais vraiment étudier qu'à l'Institut des sciences du judaïsme de l'université hébraïque de Jérusalem... » Et pour terminer ce texte, daté du 23 avril 1935, Ytsel explique que son père est pro- priétaire d'une grande usine à Rozhnoï. Le 6 juin, dans une lettre marquée « secret », M. Poznansky donne son avis aux institutions de l'université à Jéru- salem : « Élève du lycée hébraïque Tarbout, a étudié le droit pendant un an à Varsovie; nous n'avons pas d'information sur son intention d'étudier - ses parents sont apparemment fortunés 15 » C'est ce der- nier argument qui a certainement emporté la déci- sion. L'université préférait admettre des étudiants brillants ou qui avaient les moyens de payer les frais d'études. Et, qui sait? les parents pourraient devenir des bienfaiteurs de l'institution qui en avait bien besoin. Yitzhak Yzernitsky s'était - déjà - préparé une bonne « couverture » !

Ytsel reçoit un de ces fameux certificats d'immi- gration en Palestine. Il prend congé de ses parents. Shlomo envisage lui aussi de partir lorsqu'il en aura les moyens. Un matin de novembre 1935, Yitzhak monte dans le train de Varsovie pour Constanza en Roumanie, d'où le bateau Polonia le conduit à Jaffa, en compagnie de dizaines d'autres immigrants en fête. C'est le premier voyage à l'étranger pour le jeune homme. Le second, il l'effectuera en 1946, menottes au poignets dans la soute à bombes d'un avion britannique, avant d'atterir dans un camp de détention en Erythrée.

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2. Nissan

D E L ' U N I V E R S I T É À L ' I R G O U N

« Est-ce trop demander que de considé- rer la solution à nos problèmes locaux au terme de quelques générations et non pas à celui de la durée d 'une vie? Je pense que le temps historique est ici plus pertinent que les quelques minutes nécessaires à la cuisson d 'un œuf... »

Discours radiodiffusé du haut-commissaire bri tannique

en Palestine, à l 'occasion du nouvel an 1943.

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Le 11 novembre 1935, Yitzhak Yzernitsky débarque dans le port de Jaffa. Il fait un soleil d'hiver méditerranéen, surprenant pour qui vient de la Pologne grise et froide. Après avoir passé la douane et les services d'immigration, Ytsel se dirige vers la station de taxis. Les chauffeurs accueillent les immigrants en ricanant; l'un d'eux lui lance : « De nouvelles victimes arrivent! Qui vous a dit de venir en Eretz Israel? » Le jeune homme hausse les épaules. Shlomo avait recommandé son fils à un ami de Rozhnoï, installé à Tel-Aviv. Il accueille Ytsel durant ses premiers jours en Palestine. Le jeune homme explore la ville. A vingt ans il découvre un nouveau monde, se promène, s'émerveille devant les kiosques qui vendent du soda, rencontre des amis d'enfance arrivés les années précédentes, admire les policiers juifs. En Pologne, la profession, symbole de pouvoir, est interdite aux Juifs. Cette admiration lui passera très vite.

La Palestine connaît la prospérité économique. Le secteur agricole est en pleine expansion. Les agrumes se vendent bien à l'étranger. Depuis le début du siècle, l'immigration juive n'a pas été aussi importante. 66 000 nouveaux venus en 1935 pour une population juive de moins de 500 000 habitants ! Ils étaient 37 000 en 1933. Une industrie est en train

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Cet ouvrage a été composé et réalisé par la SOCIÉTÉ NOUVELLE FIRMIN-DIDOT (Mesnil-sur-l'Estrée)

pour le compte des Éditions Olivier Orban, 12, avenue d'Italie, 75627 Paris Cedex 13

Achevé d'imprimer en septembre 1991

Imprimé en France N° d'impression : 18564

Dépôt légal : septembre 1991

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Il est Premier ministre depuis septembre 1983 et personne ne sait rien de lui. Son enfance en Pologne reste mystérieuse, ses liens avec le groupe Stern et le Mossad obscurs et son ascension politique surprend encore les spécialistes.

Shamir a en charge des questions vitales pour la survie et l'avenir d'Israël, mais il reste discret sur son rôle dans le bombardement de la centrale nucléaire irakienne d'Osirak, son soutien à l'invasion du Liban par les troupes de Tsahal en 1982 ou la teneur d e s engagements conclus par Bush dans la guerre du Golfe. Sur tous ces points, on se perdait en conjectures, jusqu'à la parution de ce livre.

Charles Enderlin, correspondant de la télévision fran- çaise en Israël depuis 1981, a interrogé les rares témoins, déjoué les pièges de la censure et retrouvé la piste de Shamir: homme des services secrets mais idéologue improvisé, chef d'entreprise médiocre mais politicien retors devenu aujourd'hui un des personnages clefs du Moyen-Orient. Après trois ans d'une enquête méticuleuse, voici la première biographie jamais écrite sur "l'homme aux sept visages".