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Digues Maritimes et Fluviales de Protection contre les Submersions, 2013 Communication 3.20 soumise

AD Isère Drac Romanche : Surveillance et entretien des digues au jour le jour

V. Platz1 , M. Pinhas2, 1 AD Isère Drac Romanche, Grenoble, [email protected]

2 AD Isère Drac Romanche, Grenoble, [email protected]

Résumé

L’AD Isère Drac Romanche gère 220 km de digues dans le département de l’Isère en France. Elle dispose de moyens techniques et humains qui lui permettent d’assurer au quotidien la surveillance des ouvrages de protection contre les inondations. Elle réalise aussi leur entretien courant ainsi que les travaux de grosses réparations lorsque cela s’avère nécessaire. L’AD Isère Drac Romanche est structurée et organisée de manière à réaliser en interne une partie de ses missions : surveillance en crue et hors crue, entretien manuel de la végétation, gestion des données relatives aux endiguements. Elle fait aussi appel à des prestataires extérieurs pour les tâches très spécialisées : topographie, sondages géotechniques et géophysiques, études hydrauliques, travaux de confortement de digues et gros entretien de la végétation. Après plus de 75 ans d’activités dédiées uniquement à la gestion des digues, elle a su développer au fil du temps une véritable technicité et elle contribue à la professionalisation de la filière.

Abstract

AD Isère Drac Romanche manages 220 km of dikes in the department of Isère in France. It has technical and human resources that enable it to provide daily monitoring of protective structures against flooding. It also performs its routine maintenance as well as major repairs when necessary. AD Isère Drac Romanche is structured and organized in order to realize by it-self a part of its missions: monitoring during –and out- flood, manual maintenance of vegetation, management of embankments data. It also makes use of external providers for highly specialized tasks like topography, geotechnical and geophysical studies, hydraulic studies, major repairs and vegetation maintenance. After more than 75 years of activities dedicated exclusively to the dike management, it has developed over the years a real technicality and contributes to the professionalization of the sector.

Introduction

L’AD Isère Drac Romanche est un établissement public administratif créé en 1936. Elle regroupe le département de l’Isère, 68 communes et 14 associations syndicales (regroupées en union) de propriétaires riverains. La liste des ouvrages endigués gérés par l’AD Isère Drac Romanche est établie par arrêté préfectoral. Elle peut évoluer si de nouvelles digues sont construites par des entités publiques à l’intérieur de son périmètre de compétence. L’AD Isère Drac Romanche n’est que très peu propriétaire des digues qu’elle gère. Elle en assure l’entretien et la surveillance suite à une procédure spécifique de remise en gestion des ouvrages qui lui confère toutes les prérogatives du propriétaire sauf celle d’aliéner le bien. Elle gère aujourd’hui des digues propriétés de l’Etat et d’associations syndicales. Le département de l’Isère prend en charge la moitié des dépenses de l’AD. L’autre moitié est répartie à égalité entre les communes membres et l’union des associations syndicales. Le budget annuel de l’AD est d’environ 3 millions d’euros pour 220 km de digues gérées. Le paiement des contributions constitue une dépense obligatoire pour ses membres. L’AD Isère Drac Romanche emploie une dizaine de salariés permanents organisés pour assurer l’ensemble des missions afférentes à la surveillance et à l’entretien des digues de protection contre les inondations sur les cours d’eau de l’Isère, du Drac et de la Romanche. Elle dispose depuis novembre 2011, et pour une durée de cinq ans, de l’agrément « digues et petits barrages - études, diagnostics et suivi des travaux ». Cela lui permet notamment de continuer à assurer la maîtrise d’œuvre d’une partie de ses chantiers de réparation et de pouvoir, le cas échéant, réaliser en interne une part des études réglementaires liées au classement des digues.

Surveillance des endiguements

La surveillance des digues est au cœur des missions de l’AD Isère Drac Romanche. Elle fait l’objet d’une tournée bimensuelle effectuée par deux gardes digues. Ces visites de surveillance sont effectuées en voiture depuis la crête de digue qui est en tous lieux circulable. Des points de passage

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obligatoires sont marqués par la prise de points GPS pour garantir l’effectivité et la traçabilité de la tournée. Le repérage des observations s’effectue par rapport à des bornes de repères implantées sur les digues (au droit de profils en travers historiques) ou à l’aide d’un GPS. Lors de ces tournées, le garde digue doit :

- s’assurer de la bonne accessibilité à la digue (fonctionnement des portails mis en place à chaque entrée) ;

- garantir le libre passage d’un véhicule en crête (absence d’obstacles tels que chute d’arbres) ;

- vérifier l’absence de travaux non autorisés sur la digue ou à proximité pouvant conduire à une dégradation de l’ouvrage (débardage, terrassements dans le corps de digue ou à proximité, …) ;

- relever tous nouveaux désordres (glissement, fontis, terriers, fissures etc..) non référencés dans la base de données SIRS Digues.

Ces tournées en véhicule permettent de faire remonter mensuellement de nouveaux désordres repérés sur la crête et en dans le talus de digue. L’observation des endiguements dans leur ensemble et le repérage des désordres potentiels se fait aussi lors des travaux d’entretien manuel des talus réalisés tout au long de l’année par les garde digues (196 jours en 2012) et lors des métrés effectués à pied par les techniciens (13 jours en 2012) en préalable aux travaux d’entretien de la végétation réalisé par les entreprises. SIRS Digues SIRS Digues est un système d’informations à références spatiales dédié à la gestion des digues. Cet outil informatique, qui couple un SIG à une base de données, permet de gérer le patrimoine d’informations relatif aux différents composants du système « digue » : structure et géométrie de la digue, ouvrages hydrauliques, réseaux de communication, de flux et d’énergie, désordres, historique des crues, travaux et études, végétation. SIRS Digues a été conceptualisé par l’Irstea (ex Cemagref) en 1998 et a fait l’objet d’un développement logiciel en 2004 réalisé en collaboration avec l’AD Isère Drac Romanche et le Symadrem (Syndicat Mixte Interrégional d’Aménagement des digues du Delta du Rhône et de la Mer). Aujourd’hui la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL) Centre finance et utilise aussi l’outil, ce qui représente 1200 km de digues gérées via SIRS Digues. Cet outil facilite et optimise les tâches quotidiennes du gestionnaire en termes de diagnostic, de surveillance, de programmation des travaux, et de communication. Il est aussi devenu indispensable pour la réalisation des études réglementaires (dossier d’ouvrage, visite de surveillance programmée, visite technique approfondie…). Cet outil est en cours de refonte afin d’en favoriser,

notamment, une diffusion plus large auprès des autres gestionnaires de digues en France. Suivi des désordres L’observation et le relevé des nouveaux désordres est fait à la fois lors des visites de surveillance bimensuelle mais aussi lors de la visite technique approfondie (VTA) imposée par la réglementation (moyenne de 4.5 km/jour parcouru à pied lors des VTA). Le suivi de l’évolution des désordres déjà recensés se fait spécifiquement lors d’une tournée trimestrielle dédiée aux désordres mais aussi à l’occasion de la visite technique approfondie. Cette visite trimestrielle est consacrée à l’observation des désordres recensés dans la base de données SIRS Digues. Elle est effectuée par un garde digue ou un technicien de l’AD Isère Drac Romanche à l’aide de fiches de suivi des désordres extraites de SIRS Digues ainsi que d’une cartographie recensant les désordres en cours. Cette visite peut-être programmée sur plusieurs jours. Les désordres relevés sont classées en quatre catégories (0 à 3) :

- n'affectant pas la stabilité de l'ouvrage et n'étant pas susceptible d'évoluer (0) ;

- n'affectant pas la stabilité de l'ouvrage mais étant susceptible d'évoluer (1) ;

- risquant d'affecter la stabilité de l'ouvrage (2); - déstabilisant l'ouvrage (3).

Les désordres classés 0 sont principalement du vandalisme sur les ouvrages de voiries (portails, bornes) et des décharges sauvages. Ce type de désordres est traité lors de campagnes régulières. Les désordres classés 1 correspondent à des glissements de faible envergure, des petits fontis, des érosions fluviales en cours de création etc.. Ces désordres font uniquement l’objet d’une surveillance pour suivre leur évolution. Les désordres de type 2 peuvent êtres des terriers de blaireaux, des fontis plus grands, des glissements, des affaissements de plus grande importance. Ils font l’objet de diagnostic afin d’en mesurer l’ampleur et de voir quelle est le type de traitement le plus adapté. Des sondages géophysiques et géotechniques, des levés topographiques peuvent être mis en œuvre dans cet objectif. Ces désordres sont surveillés prioritairement lors de la tournée trimestrielle. Les désordres classés en 3 sont des érosions, des glissements, des terriers, des fontis etc.… menaçant directement l’ouvrage de par leur localisation et leur importance. Ils font l’objet de programmation de travaux dans l’urgence ou non selon les cas. Ces désordres font l’objet d’une surveillance prioritaire lors de la tournée trimestrielle.

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Suivi des ouvrages traversants Une visite annuelle est programmée pour vérifier le bon fonctionnement des vannes manuelles ou automatiques présentes dans les digues ainsi que l’état du génie civil des ouvrages . Ces visites sont réalisées soit par le personnel de l’AD Isère Drac Romanche soit par des entreprises spécialisées. L’examen des autres types d’ouvrages traversants (buses, dalots, rejets pluviaux…) a lieu lors de la visite technique approfondie.

Gestion de la végétation

Un plan de gestion de la végétation Les digues gérées par l’AD Isère Drac Romanche présentent une végétation arborée dynamique. Cette végétation a des intérêts écologiques, paysagers et récréatifs, mais est en totale contradiction avec les règles de sécurité à respecter pour les digues. La végétation sur les digues présente quatre inconvénients :

- les grands arbres créent un risque d’arrachement et de détérioration de la digue. Les chablis (arbres tombés par le vent) créent des tourbillons en crue provoquant des érosions locales. Les arbres génèrent aussi un risque pour les usagers des digues en cas de chute ;

- les racines favorisent le risque d’érosion interne ; - la végétation dense est une gêne à la surveillance des

ouvrages ; - les arbres emportés lors des crues risquent de

s’accumuler contre les piles de ponts et les îlots, et ainsi de créer des embâcles.

L’Association Départementale consciente de cette situation a travaillé, dès les années 2000, à une gestion rationnelle de la végétation. L’AD Isère Drac Romanche est passée d’un entretien au coup par coup à une gestion raisonnée, planifiée et basée sur des consignes de sylviculture compatibles avec une sécurisation des digues. Elle a donc demandé à l’Irstea (ex Cemagref) d’Aix en Provence, associé aux universités des sciences de Grenoble et de Clermont Ferrand, d’élaborer un plan de gestion. Ce plan de gestion est basé sur le principe que le couvert forestier ne peut être totalement éradiqué d’une part à cause de la présence des racines dans le corps de digue qui, en pourrissant, favorisent le risque de renard hydraulique, et d’autre part pour des raisons environnementales. L’objectif est donc de diminuer la densité du boisement, de rajeunir ce dernier pour éviter les gros massifs racinaires et limiter le risque de chute d’arbre, de garder vivantes les racines pour éviter leur pourrissement et enfin de gagner de la visibilité sur les talus. Pour des raisons écologiques, chaque linéaire d’intervention n’excède jamais 500 m en contigüe.

L’importance des dépenses a conduit à répartir sur dix ans le traitement de l’ensemble du linéaire (220 km). Ainsi, le plan de gestion conduit à traiter annuellement 10% du linéaire, ce qui représente un budget annuel d’environ 700 k€ à 800 k€ pour une vingtaine de kilomètres traités. Les consignes de gestion de la végétation sont différentes selon la partie de la digue à traiter :

- sur la digue : on conserve le boisement existant en limitant les préjudices à l’ouvrage (gestion de type jardinatoire avec des coupes d’éclaircies tous les 5 à 10 ans) ;

- sur le franc-bord (entre pied de digue et berge) : on peut conserver des essences arborées mais on diminue la densité et on limite la hauteur ;

- sur la berge : les grands arbres sont à proscrire ; seule une végétation souple et basse est autorisée.

On distingue ensuite deux cas :

- Cas n°1 : en milieu rural, où il n’y pas d’enjeu environnemental sur la digue : on effectue une coupe rase sur le corps de digue et en pied. Les petites souches sont broyées car leur développement racinaire étant faible, le pourrissement des racines est sans conséquences. Les grosses souches sont conservées pour qu’elles rejettent en cépées. Chaque année, on tond et on broie, excepté les cépées. A l’issue de 10 ans, on coupe les cépées de 10 ans d’âge. En berge, on repasse tous les 5 ans, de façon à éviter la croissance d’arbres pouvant alimenter les embâcles lors des crues.

- Cas n°2 : en milieu péri urbain avec enjeux environnementaux et présence d’invasives conduisant à limiter l’exposition à la lumière. On effectue une coupe dite « jardinatoire » ; le but est de répartir les coupes d’arbres de façon à toujours conserver un couvert boisé. La coupe intervient tous les 5 ans : La première année, on procède au débroussaillage, à l’abattage des arbres malades, penchés, isolés, ou inadaptés (acacias, peupliers hybrides). On abat également les arbres trop minces pour leur taille (D<15cm dans l’exemple, mais ceci dépend de l’espèce), ainsi que 30% des arbres restants (les plus âgés). On conserve les très grands arbres sains : en effet, en cas de coupe, ils sont trop âgés pour repartir en cépée, La cinquième année, on prélève encore 30% des arbres. Pendant ce temps, les arbres prélevés l’année 1 sont repartis en cépée, La dixième année, on prélève les derniers 30%, Puis tous les cinq ans, on coupe les cépées de 15 ans d’âge.

Pour la mise en œuvre de ce plan de végétation, il existe trois

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types de travaux : - les travaux d’entretien mécanique de la végétation

(i.e. fauchage réalisés via un marché à bons de commande);

- les travaux forestiers (réalisés via un marché à bons de commande);

- les travaux d’entretien manuel de la végétation réalisés par les agents de l’AD.

L’entretien mécanique de la végétation Les travaux d’entretien mécanique de la végétation consistent en du fauchage, du débroussaillage, de l’élagage. Ces travaux sont réalisés à deux périodes: en été du 15 juin au 15 août et en automne/hiver du 15 octobre au 15 décembre. Le fauchage mécanique est une fauche par broyage mécanique, à 5 centimètres de hauteur maximum de tout type de végétation herbacée ou des rejets ligneux de l’année rencontrés sur les berges, digues et talus des cours d’eau.

FIGURE 2: ENTRETIEN PAR EPAREUSE DU TALUS DE DIGUE

Le débroussaillage mécanique est un broyage mécanique des ronces, lianes, arbustes (buddleia), baliveaux et des jeunes arbres de diamètre inférieur à 15 cm. Il est réalisé au ras du sol de manière que ne subsiste aucune saillie. L’élagage mécanique est réalisé lors de la campagne d’hiver. Il concerne la taille de branches basses ou la suppression d’une partie du houppier afin de limiter le volume et de refaçonner certains sujets (traitement jusqu’à 6 m de hauteur depuis la crête de digue). Les travaux forestiers Les travaux forestiers consistent à réaliser des élagages, des démontages d’arbres, de l’abattage d’arbres et de la destruction mécanique de souches. Ils incluent aussi les interventions d’urgence de dégagement des embâcles et dégagement d’arbres basculés.

L’entretien manuel de la végétation Ces travaux sont réalisés en régie par l’AD qui dispose d’une équipe d’entretien permanente de 4 personnes. Pour réaliser ces travaux, les agents sont équipés de débroussailleuses à dos et de tronçonneuses. L’équipe réalise, sur la base d’un planning mensuel, l’entretien régulier de la végétation après le passage des entreprises dans le cadre du plan de gestion. Les interventions portent sur la végétation buissonnante et herbacée. L’équipe effectue également les interventions d’urgence pour des arbres tombés sur les chemins d’exploitation qui ne nécessitent pas l’intervention d’engins forestiers. Afin d’assurer la sécurité de nos équipes, des formations spécifiques leur sont dispensées (exercice annuel d'utilisation des équipements de sécurité, formation SST) et des visites trimestrielles par un coordonateur sécurité sont effectuées de façon inopinée. Du matériel adapté est fourni : équipement de protection individuel (gants, lunettes de sécurité, casque avec visière et protèges oreilles, vêtements anti-coupure...), stop chute, harnais individuel, corde…. Le premier plan de gestion va s’achever en 2015. Le retour d’expérience nous montre qu’il est difficile de faire des coupes rases car cela est très mal accepté par les usagers et les riverains. La gestion a donc souvent été faite en coupe sélective. L’entretien et la visibilité ont été grandement améliorés. Les coûts d’entretien diminuent après la période de 10 ans nécessaire à la mise en œuvre du plan de gestion sur tout le linéaire. Par contre, la lumière a favorisé l’apparition de plantes invasives, qu’il faut combattre par des fauches fréquentes. De plus, la coupe répétée des cépées conduira à terme à la mort de l’arbre, ce qui posera à nouveau le problème du pourrissement des racines. Il faudra alors se poser la question de refaire la digue, de mettre une étanchéité dans le corps de digue, ou d’épaissir le remblai côté terre. La lutte contre les invasives Sur les digues de l’Isère, du Drac et de la Romanche, la renouée du Japon est l’espèce la plus visible et la plus problématique, mais on y rencontre également une dizaine d’autres espèces toutes aussi invasives : buddleia, robinier faux acacia, ailante, érable négundo, ambroisie, solidage géant, aster américain, impatiente de l’Himalaya. La plupart ont un fort impact négatif sur la biodiversité végétale indigène. Pour lutter contre la renouée du Japon, l’AD Isère Drac Romanche expérimente, sur une période de 5 ans (de 2008 à 2013), différentes techniques de lutte. Ont notamment été testés l’arrachage manuel des rhizomes, la plantation d’espèces compétitrices, le fauchage répété. L’arrachage des jeunes plantules est efficace mais, pour

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obtenir de meilleurs résultats, il doit être fait à l’aide d’un outil de jardinage de type piochon. En effet, un simple arrachage laisse les rhizomes intacts et n’altère donc pas le potentiel de reproduction végétative de la plante. C’est l’ensemble du rhizome qui doit être enlevé puis évacué. Les fauches répétées réduisent significativement le diamètre et la hauteur des renouées. Par contre, leur influence sur la densité n’est pas manifeste. L’idéal parait être six fauches mensuelles par an : la première mi-avril et la dernière mi-septembre. L’exportation des produits de fauche ne s’avère pas nécessaire. Au fil des années, si les peuplements fauchés régressent, le nombre de fauches peut être réduit. Pour les massifs de renouées situés au bord de l’eau, il faut éviter toute dissémination des tiges coupées vers l’aval : l’eau favorisant le bouturage des parties aériennes de la plante, les fauches doivent donc être réalisées avec précaution. Les tentatives de plantations réalisées n’ont pas connu un franc succès : la plupart des arbres et des arbustes sont morts, sans doute à cause des composés allélopathiques produits par les renouées. Seuls quelques individus de saule des vanniers et de saule faux daphné ont survécu.

Gestion des usages et des accès

Une circulation réglementée Par arrêté préfectoral, la circulation des véhicules à moteur de toute nature est interdite sur les chemins de digues inclus dans le périmètre d’intervention de l’AD Isère Drac Romanche. La circulation des piétons, cyclistes et cavaliers est tolérée aux risques et périls des usagers (excepté sur les voies vertes et voiries communales implantées sur les digues où elle est autorisée). Ces dispositions ne sont pas applicables au gestionnaire des digues, aux agents des forces de police ou de gendarmerie, aux pompiers et services de secours d’urgence, aux agents du conseil supérieur de la pêche et de la fédération départementale de la pêche et de ses associations, aux agents du service de la prévision des crues, ainsi qu’à ceux des prestataires et entreprises qu’ils désignent. A titre gratuit, des autorisations de circulation permanentes sont données aux agriculteurs et aux riverains enclavés ne disposant pas d’autre accès à leurs parcelles, bâtiments ou habitations et aux gestionnaires de réseaux enterrés ou aériens, afin d’accéder à leurs ouvrages (EDF, GDF, oléoducs). Des autorisations temporaires peuvent être octroyées, sur demande, à des entreprises en cas de travaux sur les digues, ou à des organisateurs de manifestations sportives pour leurs véhicules d’encadrement. Fermeture des accès Les accès à la digue sont équipés de portails fermés à clé de manière à limiter la circulation des véhicules à moteur et des

panneaux rappelant les interdictions d’accès à la digue (arrêté préfectoral) ont été posés. Le coût de fourniture et de pose d’un portail équipé d’une signalisation est de 2 k€ TTC. Les portails sont régulièrement la cible de vandalisme par des usagers non autorisés souhaitant accéder à la digue. Tous les ans, 25 % de portails doivent être réparés ce qui représente un coût annuel de 15 k€ TTC. Superposition de gestion Le conseil général de l’Isère a développé un réseau de voies vertes sur une partie des chemins de digue gérés par l’AD Isère Drac Romanche. Une convention de superposition de gestion à donc été signée avec le conseil général. Elle détaille les missions et prérogatives de chacun. Par le biais de ce type de convention, l’AD, au-delà de la définition des responsabilités de chacun, indique qu’aucun coût supplémentaire d’entretien ne pourra lui être imputé du fait de la présence d’un usage autre que celui de la lutte contre les inondations. C’est donc au département de mettre en conformité la voie verte avec les contraintes des ouvrages qui la supportent afin de permettre la circulation des usagers (cyclistes, piétons et assimilés). Ceci concerne le ramassage des déchets, le fauchage des abords immédiats de la piste (le premier mètre), le balayage mécanique, les dégagements des limons sur les sections inondables et la réfection des enrobés en cas de dégradation. Sur d’autres secteurs de digues, où des voiries communales sont implantées, là aussi des conventions de superposition de gestion ont été signées. Ces conventions définissent les missions et prérogatives de chacun. Sur les secteurs de superposition de gestion, la circulation est limitée aux deux-roues sur les voies vertes ou au faible tonnage sur les voies communales afin de ne pas porter préjudice à la sécurité de l'ouvrage. A noter que la présence d’enrobé en crête de digue est plus souvent une source de désagrément pour le gestionnaire de digues plutôt qu’un avantage. En effet, il favorise développement de la fréquentation et notamment celles des cyclo-sportifs, dont la cohabitation avec nos véhicules peut s’avérer problématique.

Réparation des digues

Réfection des chemins de digue La circulation des véhicules de service et des engins de chantier s’effectue en crête de digue. Cette dernière doit donc être circulable en tous lieux et par tous temps. L’AD Isère Drac Romanche consacre ainsi un budget régulier et spécifique à la réfection des chemins de digue. Les zones d’intervention sont déterminées en fonction du niveau de dégradation de la piste et de leur fréquentation par les véhicules autorisés.

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La pathologie des pistes la plus courante est la formation de fontis, d’ornières ou de nids de poules. Lorsque la piste n’est pas très abimée et que les matériaux sont de bonne qualité - de type "tout-venant" et de granulométrie variable – la réfection est simple et rapide car elle ne nécessite pas d’apport supplémentaire de matériaux.

FIGURE 2: REFECTION D’UNE PISTE EN FRAISAT RECYCLE

Par contre, en cas d’ornières ou de nids de poules plus nombreux, le « grader » met en œuvre du matériau concassé 0/31,5 mm. Il s’agit du cas de figure le plus fréquent et ce type de mise en œuvre représente la moitié du linéaire traité par l’AD (45 km de digue refaite au total depuis 2001). Le troisième type de réfection concerne les pistes où les désordres sont plus importants (piste impraticable par temps humide) à cause de la présence de matériaux sensibles à l’eau – par exemple des limons argileux - qu’il convient de purger. Ce type de réfection nécessite un décaissement plus profond (50 cm au lieu de 15 cm) puis un apport de matériaux concassés. Afin d’éviter leur pollution par une remontée des limons, un géotextile est d’abord posé en fond de décaissement. Selon le type de réfection, le coût HT au m2 varie de 0,90 € à 10,60 € pour des pistes non revêtues et de 3,60 € à 16,90 € pour des pistes en enrobé. Travaux de réparation L’AD Isère Drac Romanche effectue uniquement des travaux de réparation sur les endiguements existants c'est-à-dire qu’elle ne modifie pas le fonctionnement du système d’endiguement existant en créant par exemple de nouvelles digues. Pour cette dernière mission, il existe un syndicat mixte, le SYMBHI (Syndicat Mixte des Bassins Hydrauliques de l’Isère) qui assure la maîtrise d’ouvrage de travaux neufs aboutissant à une refonte du système de protection. L’AD, pour ses travaux de réparation, dispose d’un marché à bons de commande reconductible sur 3 ans. Cette organisation lui permet de travailler dans la continuité avec

des entreprises formées aux techniques particulières de confortement des digues, d’assurer une stabilité des prix et de garantir une bonne réactivité. L’AD réalise aussi la maîtrise d’œuvre interne pour les petites opérations de réparation, ce qui permet de raccourcir les délais de réalisation des chantiers.

FIGURE 3: REPARATION D’UN GLISSEMENT PONCTUEL

Pour les travaux nécessitant une technicité particulière en matière de conception d’ouvrages, il est fait appel à des bureaux d’étude. Le budget consacré annuellement à la réparation des endiguements est de 600 k€ à 1000 k€ HT.

Suivi de la géométrie des ouvrages

Relevés topographiques L’AD Isère Drac Romanche consacre, via un marché à bons de commande, environ 20 k€ TTC de levés topographiques par an sous la forme de profils en travers, profils en long, plans topographiques et bathymétriques. Il s’agit à la fois de levés de récolement suite à des chantiers mais aussi de campagnes visant à avoir des données régulières sur la géométrie des endiguements (cote en crête, largeur de la digue, présence de risbermes ou de francs-bords). Le suivi de l’évolution du lit est aussi une problématique à laquelle l’AD Isère Drac Romanche réfléchit car elle aura bientôt en gestion des plages de dépôt qui vont être créées par le Symbhi (Syndicat mixte des bassins hydrauliques de l’Isère) dans le lit de l’Isère. L’objectif est de pouvoir détecter des changements, tout en minimisant le rapport coût/précision des résultats. Plusieurs techniques de mesure ont été comparées et une réflexion sur les paramètres significatifs à prendre en compte a été menée. Le protocole finalisé comporte deux étapes. La première consiste en une analyse préalable en vue d’évaluer régulièrement l’intensité des changements. Elle repose sur la

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comparaison des fils d’eau : une approche peu coûteuse, facile à mettre en œuvre et restituant une information globale sur l’évolution du lit. Les résultats obtenus permettent ensuite de mettre en place un suivi morphologique approfondi. Cette seconde étape distingue deux approches parallèles : l’analyse des processus de surface et le suivi bathymétrique.

L’analyse des processus de surface est réalisée par comparaison d’orthophotos. Elle est indispensable à l’interprétation de la variation du stock sédimentaire. Elle permet de distinguer les changements profonds à surveiller, des modifications cycliques liées à la respiration de la rivière. On peut apprécier, de cette façon, la dynamique des bancs vifs et l’évolution de la végétation sur les atterrissements.

Le suivi bathymétrique vise, lui, à mesurer la variation du stock sédimentaire. On l’obtient en superposant deux modèles numériques de terrain (MNT) bathymétriques. Le résultat permet de cartographier l’évolution verticale du lit (érosion ou dépôt). Dans le cas où les mesures bathymétriques sont obtenues sous formes de profils en travers, une méthode de construction d’un MNT à partir de profils en travers a été mise point.

Dispositions en cas de crue

L’alerte est donnée par le service de prévision des crues de la Direction Départementale des Territoires de l’Isère ou par les communes. L’AD a mis en place différents niveaux d’alerte en fonction de l’annonce de crue ou des niveaux réellement observés. Pour chaque niveau d’alerte, les secteurs à surveiller par le personnel de l’AD Isère Drac Romanche ont été définis. Une cellule de coordination interne est mise en place. Elle a les missions suivantes :

- veille internet sur l’évolution de la pluviométrie sur le bassin versant ;

- liaison avec le SPC et le SIDPC ; - liaison avec les équipes de surveillance ; - tenue des mains courantes ; - mise en alerte des entreprises.

Dès le niveau d’alerte de niveau 1, les équipes de surveillance doivent prendre contact avec la cellule de coordination à leur arrivée sur les secteurs de surveillance afin de lui indiquer leur position de départ et l’itinéraire prévu. A partir du niveau d’alerte de niveau 2, les équipes de surveillance doivent appeler toutes les heures la cellule de coordination, même si aucun désordre n’est relevé, et doivent indiquer leur position et leur itinéraire prévu. La surveillance des ouvrages ne sera plus assurée par le personnel de l’AD lorsque :

- la hauteur de charge est supérieure à 2 m (risque de rupture) ;

- la revanche inférieure à 0.5 m (risque de rupture) ; - la vitesse du vent est supérieure à 90 km/h (risque de

basculement d’arbre). La réalisation de tournée de surveillance des ouvrages la nuit, dans le but de prévenir une défaillance des ouvrages, n’est pas possible du fait d’un total manque de visibilité. Aucune équipe de surveillance n’est donc envoyé sur le terrain de nuit dans ce but. Par contre, en cas de désordres graves détectés en période diurne et nécessitant l’intervention d’une entreprise, la surveillance est prolongée pendant la période nocturne jusqu’à l’achèvement de l’intervention. En cas de désordre repéré en période diurne mais ne nécessitant pas de travaux d’urgence, une surveillance nocturne est assurée, en tant que de besoin, par une ou plusieurs équipes de l’AD laissées à demeure afin de surveiller l’évolution du ou des désordres. Les entreprises sont mobilisées dans le cadre d’un marché à bon de commande pour travaux d’urgence. Au premier niveau d’alerte, les entreprises doivent commencer à ramener le matériel de travaux publics au voisinage des digues et s’assurer de pouvoir rapidement mobiliser des matériaux. En alerte de niveau 2, les entreprises doivent se tenir prêtes à intervenir dans les plus brefs délais.

Lors des tournées de surveillance en crue, le personnel de l’AD Isère Drac Romanche doit vérifier :

- le comportement des talus côté rivière ; - la stabilité générale du remblai ; - l’état d’ouverture des vannages ; - la formation d’embâcles au droit des ponts ; - la présence d’arbres basculés entraînant une partie

de la digue ; - l’apparition de fuite éventuelle côté terre sur les

tronçons en charge.

Lorsqu’un désordre est repéré, l’information est transmise à la cellule de coordination qui l’enregistre sur une main courante et en assure la transmission auprès du responsable de la cellule. Pour des raisons de sécurité, La surveillance se fait depuis la crête et lorsque cela est possible en pied du talus côté terre. Aucun agent n’est autorisé à descendre dans le talus de digue côté rivière. Des travaux d’urgence peuvent, le cas échéant, être mis en œuvre. Il s’agit de mesures provisoires de confortement ou de remblaiement (mise en œuvre en dehors des contraintes usuelles des règles de l’art et des garanties après réalisation).

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8 AD Isère Drac Romanche : Surveillance et entretien des digues au jour le jour

Il peut s’agir de: - confortements de digues en urgence par

enrochements ou par mise en œuvre de remblais contre le talus de digue ou aux abords de ce dernier ;

- renforcement et/ou création de pistes, rampes, plateformes d’accès aux zones d’intervention ;

- travaux préparatoires sur les zones d’intervention (déboisement, dessouchage, décapage …) ;

- mise en place de busage provisoire de chantier ; curage et dégagement d’ouvrages

- remise en état des accès et abords

Conclusion

L’AD Isère Drac Romanche est gestionnaire de digue depuis 1936. Elle a su se doter d’outils spécifiques pour mener à biens ses missions de surveillance et d’entretien des systèmes de protection contre les inondations. Elle fait aussi appel à des entreprises extérieures, via des marchés à bons de commande, pour réaliser les travaux d’entretien courant nécessitant du matériel lourd (faucardage, élagage, débroussaillage mécanique) et pour les travaux de grosse réparation (terrassement, confortement…). Cette procédure lui permet d’être plus réactive et de disposer d’une certaine souplesse dans la gestion au jour le jour. Par ailleurs, l’AD Isère Drac Romanche a développé, via SIRS Digues, un petit réseau d’échanges et de partage d’expériences avec deux autres gestionnaires de digues (Symadrem et Dreal Centre). L’objectif est, aujourd’hui, d’élargir cette coopération. C’est ainsi qu’est née l’idée de la création d’une structure dédiée aux exploitants d’ouvrages de protection contre les inondations et submersions : France Digues. Cette démarche est soutenue par le ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie. Elle devrait aboutir en 2013.