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Page 1: L’internationale situationniste (5/10)

Luxemburger WortDonnerstag, den 10. Februar 2011

Luxemburger WortDonnerstag, den 10. Februar 2011LUXEMBURGER WORT@MUDAM AKADEMIE LUXEMBURGER WORT@MUDAM AKADEMIE14 15

Guy Debord et la critique de la «société du spectacle»

L’internationale situationniste

Extrait du film de Guy Debord de 1973. Le commentaire de ce film est entièrementcomposé d'extraits de la première édition du livre «La Société du spectacle» etl'emploi des images est orienté par le principe du détournement.

P A R C H R I S T I A N M O S A R

«La poésie doit être faite par tous».Les situationnistes entendaient fairede cette idée de Lautréamont uneréalité. Ils ne souhaitaient ni révolu-tionner les formes et les modes d'ex-pression, ni saboter de l'intérieurl'art estimé moribond, ils projetaientde le dissoudre dans une révolutionpermanente de la vie quotidiennefondée sur la «construction de situa-tions».

L'internationale situationniste,dont Guy Debord a été le fondateuret le principal animateur, a existé de1957 à 1971, année de son auto-disso-lution. Les situationnistes dévelop-paient des techniques comme la dé-rive et le détournement qui devaientproposer une alternative à la sociétédu spectacle. C'est à celle-ci queDebord consacre en 1967 son célèbrelivre «La Société du spectacle». Al'époque de Mai-68, c'est un best-seller qui accompagne de nombreuxcombats et de nombreuses ré-flexions.

Debord articule son essai autourde 221 thèses. En voici des extraits:«Quand l’art devenu indépendantreprésente son monde avec descouleurs éclatantes, un moment dela vie a vieilli, et il ne se laisse pasrajeunir avec des couleurs éclatan-tes. Il se laisse seulement évoquerdans le souvenir. La grandeur del’art ne commence à paraître qu’à laretombée de la vie.» (thèse 188)

«L’art à son époque de dissolu-tion, en tant que mouvement négatif

qui poursuit le dépassement de l’artdans une société historique où l’his-toire n’est pas encore vécue, est à lafois un art du changement et l’ex-pression pure du changement im-possible. Plus son exigence est gran-diose, plus sa véritable réalisationest au delà de lui. Cet art est forcé-ment d’avant-garde, et il n’est pas.Son avant-garde est sa disparition.»(thèse 190)

«Le dadaïsme et le surréalismesont les deux courants qui marquè-rent la fin de l’art moderne. Ils sont,quoique seulement d’une manièrerelativement consciente, contem-porains du dernier grand assaut dumouvement révolutionnaire prolé-tarien; et l’échec de ce mouvement,qui les laissait enfermés dans lechamp artistique même dont ilsavaient proclamé la caducité, est laraison fondamentale de leur immo-bilisation. Le dadaïsme et le surréa-lisme sont à la fois historiquementliés et en opposition. Dans cetteopposition, qui constitue aussi pourchacun la part la plus conséquenteet radicale de son apport, apparaîtl’insuffisance interne de leur criti-que, développée par l’un commepar l’autre d’un seul côté. Le da-daïsme a voulu supprimer l’art sansle réaliser ; et le surréalisme a vouluréaliser l’art sans le supprimer. Laposition critique élaborée par lessituationnistes a montré que la sup-pression et la réalisation de l’artsont les aspects inséparables d’unmême dépassement de l’art». (thèse191)

L'art du XXe siècle (5/10)Le Mudam a organisé un cycle de coursd'Histoire de l'art du XXe siècle afin depermettre au public de mieux compren-dre la création contemporaine. Le «Lu-xemburger Wort» s'est associé à cetteaction pédagogique en offrant à ses

lecteurs de larges aperçus de ces cours.Dans ces deux pages le lecteur trou-vera la substance du cinquième cours,tel qu'il sera donné aujourd'hui mêmeau Musée d'art moderne Grand-DucJean.

L'après-guerre et l'émergence de l'Ecole de New York

L'art dans le monde moderneLe déplacement du centre artistique de Paris à New York

Jackson Pollock dans son atelier, photographié par Hans Namuth en 1950. (PHOTO: HANS NAMUTH ESTATE)

Jackson Pollock, The She-Wolf, 1943, huile, gouache et plâtre sur toile (TheMuseum of Modern Art, New York). (PHOTO: POLLOCK-KRASNER FOUNDATION / ARS)

Mark Rothko, no 3/no 13., 1949,Huile sur toile(Museum ofModern Art,New York).(PHOTO: KATEROTHKO PRIZEL &CHRISTOPHERROTHKO / ARTISTSRIGHTS SOCIETY(ARS), NEW YORK)

PAR CLAUDE MOYEN

«Vous comprendrez, quand vousverrez l'Amérique, qu'un jour ils auront des peintres, parce que cen'est pas possible, dans un pays pa-reil, qui offre des spectacles visuelsaussi éblouissants, qu'il n'y ait pasde peintres un jour» (Propos deHenri Matisse, rapportés par AndréMasson1).

L'émigration aux Etats-Unis, et no-tamment à New York entre 1933 et1942, d'intellectuels, d'architecteset d'artistes européens fuyant lenazisme a une influence détermi-nante sur les artistes américainsdont elle secoue l'isolement ou ledécouragement face à la guerre etconsécutif à la crise. Il suffit deciter, entre autres, l'anthropologueet ethnologue Claude Lévy-Strauss,l'historien d'art Erwin Panofsky, lephilosophe T.W. Adorno, le poèteet dramaturge Bertolt Brecht, lesarchitectes Ludwig Mies Van derRohe et Walter Gropius, le compo-siteur Arnold Schönberg, le poèteet fondateur du surréalisme AndréBreton, les artistes Max Ernst, An-dré Masson, Salvador Dalí, MarcelDuchamp et Piet Mondrian, pourcomprendre les résonances specta-culaires sur le tissu culturel qui lesaccueille.

Ces Européens célèbres, d'untempérament énergique et résolu-ment optimiste, apportent quelquechose de nouveau: ils infusent à lascène artistique new-yorkaise lapleine conscience de son rôle àjouer dans le modernité. Les jeunesartistes américains souffrent en ef-fet de l'absence d'un art américainindépendant. Ils se sentent écrasés,pour certains, par l'héritage res-senti comme insurmontable demonstres sacrés comme Matisse ouPicasso, et sont partagés, pour d'au-tres, entre une immédiate expres-sion de soi du surréalisme et uneconstruction rigoureuse de l'abs-traction géométrique.

Dès 1940, de jeunes peintresaméricains – Jackson Pollock, Ro-bert Motherwell, Mark Rothko,Willem de Kooning, Clyfford Still,encore inconnus en 1942 – com-mencent à formuler leur propreprojet artistique. De l'abstractiongéométrique, ils conservent l'indé-pendance des moyens picturauxcomme éléments de constructiondu processus créatif. Du surréalis-me, ils mettent en avant «l'écritureautomatique» ou l'automatismepsychique et se débarrassent pro-gressivement de la figure. Ainsi, lemotif du rêve freudien est remplacépar l'archétype de l'inconscient col-lectif de Carl Jung, qui à son tour estévacué au profit du seul événementpictural, débarrassé de touteanecdote. Leurs tableaux sont con-çus comme le résultat d'un proces-sus qui n'est pas planifié. L'arrêt dece processus correspond à l'ac-complissement du tableau. Cette«fin» est ressentie de manière in-tuitive par le peintre. Le gestepictural, la performance de l'acte depeindre, le corps du peintre, la réa-lité des matériaux et leur résistancephysique font une entrée spectacu-laire sur le devant de la scène. Enmême temps, ces jeunes peintres

s'intéressent à l'art des Indiensd'Amérique. En quête d'une iden-tité culturelle propre, imperméableaux références étrangères, les artis-tes américains tentent de retrouverdans l'inconscient et dans le mytheune énergie originale et fondatrice.

Le retour aux sources primitives,son expression artistique à traversl'automatisme se conjuguent dansun contexte de crise et de guerremondiale où la confiance en uneraison qui domine la nature a mani-festement été ébranlée. La quête

des jeunes peintres donne nais-sance à l'Ecole de New York et àson programme: l'expressionismeabstrait. La figure emblématique dumythe fondateur de cette nouvellepeinture américaine sera le peintreJackson Pollock.

«J'ai besoin de la résistanced'une surface dure»

«Je ne fais pas une peinture dechevalet. Je ne tends pratiquementjamais ma toile avant de peindre. Je

préfère clouer ma toile non tenduesur le mur ou le plancher. J'ai besoinde la résistance d'une surface dure.Sur le plancher je me sens plus àl'aise. Je me sens plus proche de lapeinture, je m'y intègre davantagepuisque je peux ainsi en faire letour, travailler à partir des quatrecôtés et littéralement être dans lapeinture. Cette méthode s'appa-rente à celle des Indiens de l'Ouestdes Etats-Unis qui créent des for-mes sur le sol avec des sables decouleur. De plus en plus, j'aban-donne les instruments de la pein-ture traditionnelle tels que le cheva-let, la palette, les pinceaux etc. Jepréfère les bâtons, les truelles, lescouteaux, faire couler (NDLR: ,drip-ping‘) de la peinture liquide ou bienune pâte épaisse mélangée de sable,verre pilé et d'autres matières.»2

Dans ses tableaux révolutionnai-res de la fin des années quarante,Jackson Pollock fait couler la pein-ture sur le tableau en créant desconfigurations de plus en plus com-plexes, rythmées par les gestes etles mouvements tantôt contrôléstantôt extatiques sur la toile.Comme l'écrit le critique américainHarold Rosenberg, la toile devient«une arène offerte à son actionplutôt qu'un espace où reproduire,recréer, analyser ou exprimer unobjet réel ou imaginaire.» Une telledéfinition met en valeur non seule-ment la performance de l'activité etl'exploit physique mais aussi l'au-teur, qui devient une sorte d'hérosau centre de son arène. La nouvelleimage héroïque du peintre améri-cain est à l'image de la nation triom-phante. La victoire américaine de1945 euphorise la vie artistique ne-w-yorkaise et impose l'expressio-nisme abstrait avec une puissanced'impact qui fait de New York lenouveau centre artistique mondial.

Cet impact est autant formel, quethéorique, social et économique. Ilva surtout devenir le produit d'unsystème redoutablement efficacede promotion, de spéculation et dediffusion de l'art, organisé et déve-loppé à une échelle jusque-là incon-nue.

1 Henri Matisse, Ecrits et propos sur l'art, Editions

Hermann, Paris, 19722 Jackson Pollock dans Possibilities n°1, New York,

Wittenborn (Motherwell, Rosenberg, Chareau et

Cage éd.), hiver 1947-1948

Kunst und Skandale

Jean Dubuffet und die Kunst der GeisteskrankenAntikultureller Impuls und Suche nach dem Ursprünglichen

Adolf Wölfli, Heilanstalt Waldau, 1921.

Jean Dubuffet,Bertelé bouquetfleuri, portrait deparade, 1947,huile sur toile,National Galleryof Art, Wa-shington.

V O N M A R K U S P I L G R A M

Nach der Katastrophe des ZweitenWeltkriegs entwickelte sich in Pa-ris recht schnell ein Konsens unterKulturschaffenden, dass die franzö-sische Hauptstadt als internationalmaßgebliches Zentrum der Avant-garde seine Rolle wiedereinneh-men würde. Das Projekt der Moder-ne, das seinen Ausgangspunkt imspäten 19. Jahrhundert genommenhatte, sollte sich trotz des Bruchsdes Krieges fortsetzen und in einerzur „Weltsprache“ hochstilisiertengegenstandslosen Malerei vollen-den.

Gegen diese fast einhellig ge-teilte Meinung positionierte sichein Quereinsteiger in die Kunst,dessen absichtlich antikulturelleMalerei Verwirrung und Skandalerzeugte. Jean Dubuffet (1901-1985),der zunächst als Künstler dilettierthatte, bevor er sich dem väterlichenWeinhandel zuwandte, beschloss1944 ernsthaft, Künstler zu werden.Als Außenseiter stellte er sich ab-sichtlich und wohlüberlegt dem da-maligen Zeitgeist und der Elite der,wie er sie nannte, „intellectuels decarrière“, entgegen, indem er sichder Abstraktion verweigerte undfigürlich malte und darüber hinausmit vollkommen „unwürdigen“ Ma-terialien arbeitete.

Die kräftig gestalteten Oberflä-chen seiner Gemälde, die er mit alsunästhetisch geltenden Stoffen wieTeer, Kohle, Kieselsteinen, Kor-deln, Sand, Zement und Haaren rea-lisierte, empörten und fasziniertenKritiker und Publikum zugleich.Seine ersten in den Jahren 1944, '46und '47 in der Pariser Galerie RenéDrouin und die nur wenig später inNew York durch Pierre Matisseorganisierten Ausstellungen löstenharsche Kritiken aus, hatten aber inihrer Unangepasstheit einen nichtzu unterschätzenden Einfluss aufseine Zeitgenossen, für die sich mitseinem geistigen Konzept einer ab-soluten Freiheit gegenüber denTraditionen ungekannte Türen öff-neten.

„Eine künstlerisch Sackgasse.Die Bilder aus Dreck und Abfallwürdigen die Moderne zu einerFarce herab“ war zu lesen, währendandere meinten: „Dubuffets Arbei-ten sind von brutaler Aggressivitätund erinnern an das Gekritzel vonKindern.“

„All das ist tief ernst zu nehmen“

Die Kritiker hatten nicht völlig Un-recht, hatte sich doch Dubuffets an-tikultureller Impuls an Kunstformenorientiert, die früher bereits durchihre Andersartigkeit eine romanti-sche Faszination ausgeübt hatten.Volkskunst, „primitive“ Kunst, Kin-derkunst und die von Dubuffet soge-nannte „Art Brut“, hatten immerwieder beeindruckt. Bereits 1912hatte Paul Klee hier die Uranfängevon Kunst gesehen, als er schrieb:„All das ist tief ernst zu nehmen,ernster als sämtliche Pinakotheken.“

Doch was Dubuffet als kalkulier-ten Skandal geplant hatte, alsKampfbegriff gegen die „arts offi-ciels“, wurde bald ebenso schnellvon der Kunst und ihren Denkerneingehegt wie die meisten anderenAusbruchsversuche. Dubuffet, hattevon der „Bildnerei der Geisteskran-

ken“, wie sie in dem epochemachen-den Buch des Arztes Hans Prinzhornschon 1922 beschrieben wurde, be-reits eine Vorstellung, als er sich1945 bei einer Reise in die Schweizin mehreren psychiatrischen Klini-ken Bilder von Patienten zeigen ließ,die ihn veranlassten, Werke dieser„rohen“ Künstler zu sammeln.

Seine im Lauf der Zeit stark ange-wachsene Sammlung ist heute imMusée de l’Art Brut in Lausanne zusehen. Doch während Jean Dubuf-fet mit dem Begriff der „RohenKunst“ einen scheinbar so verein-heitlichenden Begriff schuf, derheute oft als ein „Stil“ neben ande-ren begriffen wird, zeigt ein ge-naueres Hinsehen, dass die Künst-ler der Art Brut, ob sie nun AdolfWölfli, Aloïse Corbaz oder LouisSoutter hießen, kaum über einenKamm zu scheren waren, und dassdas Etikett, das ihnen mit dem Be-griff der Art Brut angeheftet wurde,einerseits zwar eine Blicköffnunghin zu Werken dieser gesellschaftli-chen Außenseiter ermöglicht hat.Andererseits behindert aber genaudieses Etikett auch einen vorbehalt-losen Blick auf Kunstwerke, dierein ästhetischen Kriterien absolutstandhalten.

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