EN PARTENARIAT
U.F.R. Psychologie, Sciences de l’éducation Institut de Formation des Cadres de Santé Département des Sciences de l’éducation de Montpellier
Université de Provence Section rééducation Aix � Marseille 1 Diplôme de Cadre de Santé et MASTER professionnel Education et Formation 1ère année
Année Universitaire 2006 � 2007
Une vision globale de la santé pour la
personne en situation de handicap
- L'apprentissage du handisport -
MOYSOULIER Philippe
Sous la direction de Monsieur Jean Luc GERARDI
Sous la direction administrat ive de Monsieur Olivier PLISSON
REMERCIEMENTS
A Monsieur Jean Luc Gérardi , qui a dirigé ce travail de recherche, pour ses
précieux conseils et ses encouragements dans une ambiance de travail cordiale.
Au Docteur Francis Lemoine , pour m'avoir permis d'effectuer cette année de
formation.
A mes parents , à mon fils Laurent et à Christine pour leur soutien, leur patience et
leurs précieux conseils.
A toutes les personnes qui m’ont reçu lors de mes stages, qui ont répondu à mes
questionnaires de recherche, qui ont apporté d'une manière ou d'une autre leur
contribution à ce mémoire et ainsi permis de le mener à bien.
SOMMAIRE
Introduction....................................... .....................................................................1
1. Problématique pratique ........................ .................................................. ..3
1.1 Sport et Handicap .........................................................................................3
1.1.1. Le handicap ..................................................................................................3
1.1.2. Le sport.........................................................................................................5
1.1.3. Le Handisport ...............................................................................................6
1.2. Loi du 4 mars 2002 .....................................................................................11
1.3. L’annonce du handicap...............................................................................13
2. Enquête exploratoire ..................... ...........................................................16
2.1. Objectif de l’enquête ...................................................................................16
2.2. Pertinence de l’enquête (fonction de cadre / projet professionnel) ............................. 16
2.3. Choix de la population et lieu d’investigation ..............................................16
2.4. Choix de l’outil.............................................................................................17
2.5. Traitement des données .............................................................................17
2.6. Interprétation des résultats .........................................................................17
2.7. Objet d'étude...............................................................................................18
3. Problématique théorique .................. .......................................................18
3.1 Le concept de qualité de vie .......................................................................19
3.1.1. L’autonomie ................................................................................................20
3.1.2. L’identité, estime de soi ..............................................................................20
3.1.3. La socialisation ...........................................................................................23
3.2. L’approche systémique ...............................................................................25
3.3. Les modèles de la communication..............................................................27
3.4. Les modèles de la santé .............................................................................28
3.5. Matrice théorique ........................................................................................31
3.6. Hypothèse...................................................................................................35
4. Méthodologie de recherche .................... .................................................36
4.1. Choix de la méthode...................................................................................36
4.2. Choix de l’outil ............................................................................................36
4.3. La population de référence .........................................................................37
4.4. Détermination des variables .......................................................................37
4.5. Protocole de l’enquête ................................................................................37
4.6. Description du questionnaire ......................................................................38
4.8 Recueil et traitement des données...............................................................46
4.8.1. Méthodologie de traitement des données...................................................46
4.8.2. Recueil et analyse des résultats .................................................................47
5. Discussion ..................................... .................................................................52
Conclusion ......................................... ..................................................................53
Références bibliographiques .................................................................................55
Annexe 1 ...............................................................................................................58
Annexe 2 ...............................................................................................................62
Annexe 3 ...............................................................................................................96
Annexe 4 .............................................................................................................176
Annexe 5 .............................................................................................................178
1
INTRODUCTION
J'exerce depuis 1992 le métier de kinésithérapeute dans un centre de rééducation et
de réadaptation fonctionnelle, le Centre Hélio-Marin de Vallauris, qui a pour mission
de traiter des adultes et des adolescents présentant des affections traumatologiques,
neurologiques, orthopédiques et vasculaires.
Dans le cadre de mon activité professionnelle, je me suis plus précisément consacré
à deux domaines: la rééducation des patients amputés et plus récemment la
pratique du handisport.
La rééducation des patients amputés m’a permis de réaliser l’importance des
groupes de pairs, hospitalisés ou non, pour se reforger une identité avec le partage
d’expériences communes, tant extérieures qu’intérieures. Pour un patient en centre
de rééducation, le fait de pouvoir observer une personne amputée se déplacer
librement et mener une vie ‘’normale’’, apporte plus que ne le ferait une simple prise
en charge individuelle. Cela s’explique probablement par les mécanismes de
défense des patients (déni) et par leur méconnaissance des possibilités existantes.
J’ai souvent pu observer le développement d’attitudes préjudiciables au patient chez
les proches ou dans l’environnement familial : soit des attitudes de surprotection
favorisant la régression et la dépendance, soit des attitudes de rejet qui amplifient le
sentiment de désarroi. Ainsi, souvent, les facteurs familiaux, psycho-sociaux, et
environnementaux étaient aussi importants que le handicap physique. J’ai aussi pu
observer l’importance que revêtait la prise en compte de l’histoire personnelle, de la
personnalité, du fonctionnement psychique, des projets de chaque patient.
Plus tard, un jeu de rencontre m’a fait découvrir l’intérêt que pouvait présenter pour
des patients en centre de rééducation la découverte et la pratique du handisport et à
quel point cette découverte pouvait participer au processus de reconstruction
2
physique et psychique. J’ai aussi constaté que, bien souvent ces patients ignoraient
les possibilités offertes dans ce domaine et que cette découverte pouvait, pour
certains d’entre eux, transformer leur perspective d'avenir et leur moral. J'ai enfin
noté, chez certains d'entre eux, une réticence à pratiquer cette activité, pour diverses
raisons qui leur sont propres.
L'expérience professionnelle m'a donc conforté dans l'idée que l'on ne peut pas
appliquer à chaque patient une rééducation stéréotypée, qu'il faut tenir compte des
savoirs et vécus préexistants « je ne pourrai plus jamais faire de sport.. », de
l'environnement, des interactions. Que d’autre part la communication d'annonce du
handicap et de ses conséquences conditionnait bien souvent la réaction du patient
et le bon déroulement de sa rééducation.
« Les personnes handicapées attendent une relation de confiance et ne souhaitent
pas que les préoccupations portent uniquement sur l'état de leur peau, de leur
vessie, et de leur fauteuil roulant. », Hamonet cite ensuite Murphy qui indique dans
son témoignage "Le corps silencieux, un voyage à l'intérieur de la paralysie"(1987),
que ce qu'il a toujours attendu de ses médecins, c'est que l'un d'eux lui dise:
« qu'est-ce que ça vous fait d'être tétraplégique? ».
Le thème de mon mémoire porte sur cette vision globale, systémique de la santé.
Et, dans cet esprit, sur l'intérêt que présente la pratique du sport pour les personnes
handicapées, en termes de qualité de vie, en prenant en considération les facteurs
physiques, psychologiques et environnementaux.
Il portera aussi, et particulièrement, sur l’intérêt qu’il y a à débuter une pratique du
handisport en centre de rééducation, et dans cette perspective, sur l’évaluation des
méthodes pédagogiques les mieux adaptées.
3
1. PROBLEMATIQUE PRATIQUE
1.1. Sport et handicap
1.1.1. Le handicap
Le mot handicap vient de l'expression anglaise "hand in cap", qui signifie "la main
dans le chapeau". Il s'agissait d'un jeu de hasard, les joueurs disposaient leurs paris
dans un chapeau. L'expression est transformée en mot et appliquée au domaine
sportif au XVIIIº siècle.
Le mot "Handicap" apparaît pour la première dans le droit français avec la loi du 23
novembre 1957 relative au reclassement des travailleurs handicapés, le handicap se
définissant par opposition à la maladie. Le patient était malade tant que son
problème pouvait être pris en charge médicalement, il était réputé handicapé une fois
devenu incurable.
Le terme ‘’handicap’’ est repris par la loi du 30 juin 1975 (annexe 1) puis par la loi du
10 juillet 1987 qui oblige les entreprises de 20 salariés et plus à employer des
personnes reconnues handicapées dans une proportion de 6% de leur effectif total.
La loi d’orientation en faveur des personnes handicapées du 30 juin 1975 n’énonçait
pas, volontairement, de définition de la notion de handicap ou de personne
handicapée. D’après la cour des comptes (2003), « Au regard de cette loi, la
personne handicapée est toute personne reconnue telle par les commissions
départementales crées par la loi. Cette approche empirique ménageait souplesse et
possibilité d’évolution mais créait le risque d’appréciations hétérogènes ». Dans son
Art.1°,1° alinéa, cette loi mentionne : « l’intégration sociale et l’accès aux sports et
aux loisirs du mineur et de l’adulte handicapés physiques, sensoriels ou mentaux
constituent une obligation nationale ».
Enfin la loi du 11 février 2005 (annexe 2), dite "loi handicap", redéfinit le handicap
en s'appuyant sur une approche plus pratique et notamment sur la prise en compte
de l'environnement de vie de la personne; elle renforce les programmes de
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recherche, et améliore encore l'accès à la pratique sportive des personnes en
situation de handicap.
Devant la pluralité des handicaps, l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS) qui
était à la recherche d’une approche conceptuelle et de la mise à disposition d’un
langage commun, a élaboré en 1980 la 1ère Classification Internationale des
Handicaps (CIH-1). Cette classification, proposée par Wood, « approche le domaine
des conséquences des maladies, lorsqu’elles ont dépassé leur état le plus aigu et le
plus évolutif, en définissant trois domaines : la déficience, l’incapacité, le handicap ou
le désavantage. » (Eberson, 1997) ; elle est basée sur un modèle bio-médical
mécaniste de la santé. Charpentier (2000), définit ces trois dimensions « la
déficience (impairment), qui décrit les atteintes des organes ou des systèmes
organiques, l’incapacité (disability), qui décrit les limitations susceptibles d’être
rencontrées dans la réalisation des activités de la vie quotidienne, et le désavantage
(handicap en anglais) qui décrit les éventuelles conséquences négatives en matière
d’insertion sociale ».
En 2001, la Classification Internationale du Fonctionnement, du Handicap et de la
Santé (CIF) en prenant en considération les besoins et les progrès de la recherche
en Sciences Humaines et Sociales (Minaire, 1983 ; Kielhofner, 1985 ; Fougeyrolles,
1991) a permis de recentrer ces définitions dans le sens de la fonctionnalité, en
considérant l'aspect pluridimensionnel du handicap:« Le handicap est la
conséquence d'une déficience liée au problème de fonctionnement organique ou
psychique ou d'absence partielle ou totale d'une partie anatomique du corps. La
déficience peut conduire à une limitation partielle ou totale dans la réalisation d'une
tâche : on parlera alors d'incapacité, dans un environnement normalisé. La limitation
d'activité conduit ainsi à une restriction de participation en termes de performance,
dans un environnement donné. La participation ou la performance sera d'autant
moins limitée que les conditions d'environnement prendront en considération la
nature des tâches à réaliser ainsi que la nature de la déficience. » Le handicap est le
résultat de l'interaction entre une déficience et le milieu dans lequel évolue la
personne.
Au schéma de Wood (1980), trop linéaire (Déficience » Incapacité »
Désavantage), d’inspiration biomédical, succède un schéma répondant à un modèle
global ou systémique de la santé. En effet, la CIF regroupe les différents domaines
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(définis comme un ensemble pratique et signifiant comprenant des fonctions
physiologiques, des structures anatomiques, des actions et des tâches ou des
aspects de la vie) dans lesquels évolue toute personne ayant un problème de santé
particulier. Par exemple, ce qu’une personne fait effectivement ou est capable de
faire compte tenu d’une déficience. Chaque individu est considéré individuellement.
Le terme ‘’fonctionnement’’ se rapporte aux fonctions organiques, aux activités de la
personne, et à sa participation au sein de la société. Pour permettre d’étudier les
déterminants de la santé ou les facteurs de risque, la CIF comprend une liste de
facteurs environnementaux qui permettent de décrire le contexte dans lequel vit
chaque individu.
L’emploi en France du terme ‘’Handicap’’ est différent de celui que lui donnent les
pays anglo-saxons. Il désigne en français l’ensemble des trois niveaux – déficiences,
incapacités, désavantages – de la CIH-1, alors qu’en anglais il ne recouvre, nous
l’avons vu, que le troisième niveau, le désavantage, qui est l’aspect social du
handicap (Cour des comptes, 2003). Ainsi, on distingue classiquement trois types de
handicaps: les handicaps moteurs, sensoriels et mentaux. Toutefois, il arrive
également que les handicaps se cumulent, s'associent, ou se chargent de difficultés
supplémentaires ; on parle alors de situation de polyhandicap.
1.1.2. Le sport
Une revue de la littérature spécialisée montre qu'aucune définition savante du sport
ne s'est clairement imposée. Le concept du sport, ses limites et domaines, s’avérant
malaisé à cerner (Thomas, 2002) ; d'ailleurs est-ce bien nécessaire? d'après
J.Defrance (2006) « Quels sont les enjeux d'une définition du sport? Dans un
domaine pragmatique comme le sport, ne pourrait-on pas se passer d'un exercice
aussi formel? » Il nous fait part de l'affirmation de sociologues de l'Institut national du
sport et de l'éducation physique «Le sport, c'est ce que font les gens quand ils
pensent qu'ils font du sport » (Louveau et Métoudi, 1988), position radicale qui
consiste à laisser aux individus, face aux hésitations des spécialistes, la
responsabilité de juger si ce qu'ils font est du sport. Il considère néanmoins qu'un des
énoncés les plus adéquats, bien que composite, pour servir de définition opératoire
dans un travail sociologique ou historique est celui de Magnane (1964) pour qui le
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sport est une « activité de loisir dont la dominante est l'effort physique, participant à
la fois du jeu et du travail, pratiqué de façon compétitive, comportant des règlements
et des institutions spécifiques, et susceptible de se transformer en activité
professionnelle ».
La psychologie du sport est une science appliquée à part entière qui couvre des
domaines variés. Selon la FEPSAC (1979), « Elle se préoccupe, aux différents
niveaux génériques, des conséquences formatrices de ces activités sur l’individu et
le groupe, sur l’être handicapé comme sur l’être le plus doué, dans tous les
domaines de la psychomotricité et de l’éducation physique et sportive. […] elle
conduit à une compréhension plus profonde et multilatérale de l’homme ainsi qu’à la
découverte de lois qui régissent la performance physique et sportive. »
L’apport de la sociologie du sport est plus tardif, cette discipline semblant moins
cruciale que la biologie ou la psychologie (Thomas, 2002), elle n’a véritablement pris
son essor qu’à partir des années soixante. Parmi les nombreux thèmes du champ de
la sociologie du sport, la fonction d’intégration nous intéresse particulièrement.
1.1.3. Le "Handisport"
Le terme ‘’handisport’’a été créé par la Fédération Française Handisport en 1977. Il
formalise des pratiques sportives dont les supports nécessitent l’adaptation de
matériaux spécifiques (fauteuil de sport, prothèse, ..) Il est à distinguer du terme
‘’sport adapté’’ créé par la fédération Française de Sport Adapté en 1983, qui, lui,
formalise l’ensemble des activités physiques et/ou sportives proposées aux
personnes présentant une déficience intellectuelle ou des troubles psychiques
stabilisés.
Depuis ces trente dernières années les pratiques sportives proposées aux personnes
handicapées se sont diversifiées. Une grande partie relève du champ fédéral
spécialisé et est organisée par les trois fédérations suivantes : la Fédération
Française du Sport Adapté (FFSA), la Fédération Française Handisport (FFH) et la
Fédération Sportive des Sourds de France (FSSF). A l'heure actuelle, on observe un
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rapprochement entre les fédérations handisports et les fédérations sportives valides,
par exemple au niveau de l'athlétisme ou encore du tennis en fauteuil.
Pratiquement tous les sports sont accessibles aux personnes en situation de
handicap, avec des aménagements et du matériel adaptés à chaque cas. Je
distinguerai globalement trois catégories et donnerai quelques exemples.
Tout d'abord les sports pratiqués debout, appareillés ou non:
- L'athlétisme : Les courses se déroulent debout jusqu'au 400 mètres, au-delà,
utilisation d'un fauteuil. La course appareillée nécessite du matériel prothétique
adapté avec en particulier des pieds à lame en fibre de carbone à haute restitution
d'énergie pour l'impulsion. Une bonne technique de course, surtout pour un sportif
amputé fémoral, nécessite un apprentissage progressif pour assimiler le maniement
et les réactions de la prothèse.
- Le ski : Pour la pratique du ski, le matériel utilisé est diversifié en fonction du
handicap, il peut s'agir d'un ensemble coque – châssis – amortisseurs montés sur
skis pour les sportifs les plus durement touchés ou du matériel strictement normal
pour un amputé fémoral qui skiera non appareillé. Celui-ci pourra aussi utiliser deux
stabilos (canne anglaise montée sur un petit ski pour l'équilibration et le
déclenchement des virages).
- L'escalade : Avec différents types de prothèses en fonction du handicap.
Ensuite, les sports pratiqués en fauteuil :
- Le tennis en fauteuil : Utilisation d'un fauteuil de sport caréné allégé avec une ou
deux petites roues à l'avant pour faciliter les rotations. La dimension du siège est
déterminée sur mesure. Mêmes règles que pour la pratique du tennis joué debout
mais avec deux rebonds autorisés. Les compétitions, organisées sur le plan national
ou international, différencient deux catégories: la catégorie "Quad" regroupant les
joueurs ayant une atteinte fonctionnelle aux membres inférieurs et supérieurs et une
catégorie qui rassemble tous les autres joueurs.
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- Le basket en fauteuil : Utilisation d'un fauteuil de sport protégé à l'avant pour
supporter les chocs. Un nombre de points est attribué en fonction du handicap à
chaque joueur (de 1 à 5); plus le handicap est important, moins il possède de points
et le nombre total des points des 5 joueurs d'une équipe ne doit pas dépasser 14 (un
joueur valide est autorisé à jouer en fauteuil) Lorsqu'un joueur progresse avec le
ballon sur les cuisses, il ne peut effectuer plus de deux poussées de roues sans
dribbler au moins une fois. Mais la reprise de dribble est autorisée.
Enfin les autres types de sports :
- Le cyclisme : Appareillé pour les patients amputés tibiaux. Les amputés fémoraux
peuvent courir avec ou sans prothèse ; cette dernière favorise l'équilibre sur le vélo
plutôt que les performances.
- La plongée et la natation : Sports procurant un véritable sentiment de liberté et de
bien–être pour les patients amputés ou traumatisés médullaires. L'eau chaude d'une
piscine en centre de rééducation n'est malheureusement pas propice au processus
de stabilisation d'un moignon récent.
Les bienfaits physiques de la pratique d'un handisport sont les mêmes que pour
tous les sports : bienfait cardiaque et plus grande résistance à la fatigue, gain de
force musculaire, meilleure coordination gestuelle. Piera et C° (2002) souligne
l’intérêt fonctionnel associé « Ces activités permettent d’assumer au mieux les
activités quotidiennes, et toutes les taches physiques de travail. Le gain de force aux
membres supérieurs et au tronc est particulièrement utile pour tous ceux qui se
voient dans l’obligation d’utiliser des cannes ou un fauteuil roulant, et d’effectuer
leurs transferts à la force de leurs bras. » Chez certains patients cette dépense
physique était une nécessité absolue avant l'accident. Ils se retrouvent dans un état
de manque physiologique qu'il faut combler au plus vite.
Les conséquences du handicap sur l'image de soi et sur le regard des autres
entraînent d'un point de vue psychologique une blessure narcissique. La pratique du
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sport semble apporter des bénéfices dans la prise de conscience des nouvelles
capacités physiques.
Il faut prévenir, dans la mesure du possible, les complications liées à la pratique
sportive qui peuvent avoir de graves conséquences sur le psychisme d'une
personne handicapée et sur son vécu quotidien.
Les complications physiques sont nombreuses. Sans vouloir être exhaustif, je verrai
tout d’abord celles qui sont associées au sport proprement dit : Nécessité d'un
échauffement adapté à l'activité, d'une bonne diététique, d'un travail d'endurance, …
Je verrai aussi celles qui sont associées au maniement du fauteuil de sport:
L'utilisation du fauteuil sollicite fortement les articulations des épaules, des coudes et
des poignets ainsi que les muscles qui s'y rattachent car aux gestes sportifs, s'ajoute
le déplacement du fauteuil qui doit être rapide et permanent (un sportif en fauteuil est
toujours en mouvement pour éviter la perte de temps d'un démarrage) Une
précaution importante pour éviter le risque de blessures (tendinites, claquages, …)
consiste à veiller à faire des étirements à chaque séance pendant l'échauffement
comme à la fin de l'entraînement ou du match. Les muscles étirés sont les dorsaux,
les pectoraux, les muscles de l'épaule et du cou et tous ceux du bras et de l'avant
bras.
Une des pathologies les plus invalidantes pour ce sport est l'escarre fessière. Celle-ci
survient lorsque le fauteuil n'est pas adapté à la personne (mauvais réglages, assise
et/ou coussin mal adaptés). Elle est bien évidemment associée à la position assise
permanente mais aussi à la sudation et aux frottements résultant de l'activité
sportive. La prévention est primordiale: utilisation d'un coussin de qualité, gestion des
positions par mise en décharge fréquente à l'aide des bras, position allongée, auto
inspection avec palpation des zones d'appui Le traitement de l'escarre est d'autant
plus facile que la lésion est débutante. Lorsque celle-ci est constituée, la première
mesure est la suppression de l'appui sur la zone concernée et donc l'arrêt total de
l'activité sportive.
Je verrai enfin les mesures associées au port d'une prothèse: Le plus grand risque
encouru lors d'un sport appareillé est la blessure du moignon; les principales
précautions à prendre sont une bonne adaptation de la prothèse, un choix adéquat
10
du matériel et une bonne hygiène. Une mauvaise adaptation engendrera un effet de
piston susceptible de provoquer une érosion cutanée.
En général, l'entraînement à la course ne peut être débuté dans les centres de
rééducation car le moignon ne peut encore subir les contraintes et l'absorption des
chocs lors de la phase d'appui. Au cours d'un simple jogging, le moignon, qui au
départ n'est pas conçu pour supporter le poids du corps pendant la marche normale,
doit supporter trois fois celui-ci. Il s'agira donc, pour les patients intéressés, de leur
faire découvrir le sport par des démonstrations et de leur proposer un travail
d'athlétisation indispensable.
Certaines précautions d’ordre psychologique peuvent aussi être nécessaires. En
effet le sport est un des moyens de dépasser son handicap, que ce soit en s'y
consacrant entièrement ou en loisir. Le patient y trouve souvent son équilibre. Il faut
toutefois bien faire attention au début de l'initiation à ne pas mettre celui-ci en
situation d'échec ou à l’amener à pratiquer contre son grès. Car pour lui les
performances passées deviennent des références à retrouver. Il ne pourra pas
toujours retrouver ses possibilités anciennes. De plus un travail de deuil doit
s'accomplir une fois la prise de conscience des conséquences fonctionnelles de son
handicap. L’adaptation au handicap qui « correspond à la façon dont chaque sujet
va composer avec une nouvelle réalité qui lui est imposée et sur laquelle il ne peut
totalement influer » (Wirotius et Pétrissans, 2005), est une situation qui évolue dans
le temps, classiquement en trois phases : une phase aréactive, une phase dite de
‘’deuil’’, et enfin une phase d’acceptation et de réinvestissement dans l’avenir.
La phase de deuil comprend elle-même plusieurs phases dont une, la phase de déni,
est particulièrement importante ; il y a déni de la réalité.
Du point de vu de la psychologie cognitive, on peut décrire ces mécanismes de
protection contre l’annonce en termes de stratégie positive d’ajustement, le
‘’coping’’ (Malandin et C°, 1995). Il existe, toujo urs selon les auteurs, deux catégories
de stratégies de ‘’coping’’, des stratégies cognitives qui sont des « opérations
mentales destinées à se réassurer en altérant ‘’la signification subjective de
l’événement ‘’ (mécanisme de déni) », et des stratégies comportementales qui
« visent à essayer de réduire la tension en agissant sur des données concrètes
(prise de médicaments, rééducation) ». C’est lors de cette période de déni que le
11
patient peut refuser toute pratique handisportive et se surinvestir dans la
rééducation, le temps pour lui d’intégrer la représentation de son handicap. Il faut
alors respecter son choix tout en continuant à l’accompagner vers l’acceptation du
handicap « C’est pourquoi, l’encouragement que l’on peut apporter au patient ne
consiste pas à le convaincre d’une réalité qu’il chercherait à fuir, mais à l’aider à
assumer les images que cette réalité suscite » (Malandin et C°, 1995). C’est aussi
l’avis de Wirotius et Pétrissans (2005), « Il est habituel de rappeler qu’au début, de
nombreux sujets sont dans le déni et espèrent une récupération complète. C’est un
mécanisme protecteur et il n’est pas souhaitable d’entrer en conflit d’opposition. Il est
préférable de se focaliser sur des objectifs à court terme qui ont des effets de
renforcement positifs ».
Le patient doit accepter sa différence et obtenir des satisfactions dans les limites
imposées par son handicap. Lorsqu'il aura accepté de découvrir, en quelque sorte,
un autre sport (ce sont ses propres termes), même si celui-ci est apparenté au
précédent, avec ses contraintes, il peut retrouver le même plaisir qu'avant à
progresser et bénéficier des avantages physiques et psychosociaux que peut
procurer la pratique sportive.
1.2. Loi du 4 mars 2002
La loi du 4 Mars 2002 (annexe 3) relative aux droits du malade dite loi "B.
Kouchner", ou de "Démocratie sanitaire", introduit dans le domaine de la santé et des
soins des mesures et des règlements qui placent le patient au centre du dispositif de
soin.
Dans son chapitre premier, elle consacre le droit du patient à l'information
concernant sa santé et à plus d'autonomie dans la gestion de celle-ci. Le patient
devient co-décideur, il développe un esprit critique grâce à une démarche réflexive, il
apprend à gérer ses activités en fonction de ses indicateurs bio-médicaux, il acquiert
l’aptitude à donner des informations pertinentes sur son état de santé. Les
professionnels de la santé doivent tenir compte de l'émotion, des demandes et du
savoir du patient.
12
Concernant l'information, l'article L.1111-2 stipule: « Toute personne a le droit d'être
informée sur son état de santé; cette information porte sur les différentes
investigations, traitements ou action de prévention qui sont proposés, leur utilité, leur
urgence éventuelle, leurs conséquences, les risques fréquents ou graves
normalement prévisibles qu'ils comportent ainsi que les autres solutions possibles et
sur les conséquences en cas de refus. […] Cette information est délivrée au cours
d'un entretien individuel. »
Cette loi confère aux patients le droit de pouvoir participer aux décisions
thérapeutiques qui les concernent. En effet, elle permet une éducation à la santé
liée au modèle global de la santé en tenant compte des savoirs préexistants, des
aspects émotionnel et affectif comme l'a décrit Deccache : « L'éducation du patient
est un processus continu, intégré aux soins, et centré sur le patient. Il comprend des
activités organisées de sensibilisation, d'information, d'apprentissage et
d'accompagnement psychosocial concernant la maladie, le traitement prescrit, les
soins, […] Il vise à aider le patient et ses proches à comprendre la maladie et le
traitement, coopérer avec les soignants, et maintenir ou améliorer la qualité de vie ».
Parmi les nombreux facteurs intervenant sur la santé, la confiance en soi, l’estime
de soi, les loisirs et les modes de vie ont un impact positif très important, les soins
curatifs ne constituant qu’un déterminant parmi d’autres. L’immuno-endocrino-
neurologie a mis en évidence l’action négative du stress et des souffrances morales
sur les défenses immunitaires et la résistance du sujet (Gatto, 2005). Une mauvaise
connaissance de la maladie et de ses conséquences, en particulier sur les
aptitudes restantes dans le domaine des activités sportives n'est donc plus
légalement admissible.
1.3. L’annonce du handicap
La transmission au patient de la vérité médicale objective concernant son état
pathologique et les conséquences va bien au-delà, nous allons le voir, d'une simple
information diagnostique « L’annonce du handicap est un sujet très sensible et
13
toujours très présent dans la mémoire émotionnelle des personnes concernées par
un handicap. Cette annonce est très souvent présentée comme cristallisant la
douleur révélant le handicap et les professionnels de santé vont prendre part à ces
situations de violence » (Wirotius et Pétrissans, 2005). Le problème de l’annonce se
présente d’abord comme un problème d’éthique médicale. Doit-on informer le patient
de toutes les conséquences de son accident dès que l’on possède les éléments de
certitude suffisants, ou moduler les informations en fonction de l’évolution physique
et psychologique de celui-ci ? Ainsi posé, le problème de l’annonce devient un
problème de communication (Malandin et C°, 1995).
La communication dans les services de soins, devrait être d'un type systémique car
elle tient compte de l'environnement, des feed-back, de l'émotion, des gestes, des
silences et de l'expression verbale… Selon Gatto, (2005) « Il semble donc pertinent
pour l'émetteur d'adapter, de transformer, de transposer et de réguler le message en
fonction du récepteur pour que celui-ci comprenne mieux. […] Pour réaliser une
communication optimale, il paraît utile de connaître et d'évaluer les filtres, les savoirs
préexistants du récepteur et d'en tenir compte au cours des moments de
transmission de messages verbaux et non verbaux adressés au récepteur ». La
communication doit aussi prendre en considération certains paramètres : la
temporalité, la localisation, le contexte, le protocole.
C'est plus une révélation qu'une annonce des conséquences du handicap si l'on
considère qu'une annonce « porte à la connaissance, exprime à autrui une
information nouvelle, la révélation désigne la découverte brutale d'une vérité cachée
qui vient confirmer le sens d'une attente sourde; révéler, c'est retirer le voile d'un
savoir préexistant sous la forme d'un doute » (handicap et inadaptation – les cahiers
du CTNERHI – n° 63 – 1994).
Quand le processus d'annonce s'engage, le doute est déjà présent chez le patient : il
est dans une situation particulière de l'attente d'une vérité qu'il redoute.
Ce processus comporte, toujours selon le « Centre Technique National d'Etude et de
Recherches sur les Handicaps et les Inadaptations», la présence de trois fonctions :
tout d'abord la fonction d'assertion, qui consiste à avancer une proposition que l'on
tient comme vraie, la fonction apocrytique qui consiste à relativiser l'effet de vérité
14
produit par l'assertion, et à réduire le caractère inexorable de la vérité médicale, et
enfin la fonction performative qui fait naître ou renforce le sentiment de compétence
du patient.
D’après Malandain et C° (1995), le problème de l’ annonce ne se réduit pas à une
simple question de technique de communication, « le problème est moins que le
médecin dise correctement la vérité » que la nécessité « que cette vérité puisse être
entendue, qu’elle s’insère naturellement dans un soutien thérapeutique continu,
qu’elle puisse constituer un facteur positif dans le processus de restauration qui suit
l’accident ».
L'éventail des professions concernées par l'annonce est large, c'est donc bien un
processus interdisciplinaire.
L'annonce devrait permettre à la personne reçue et/ou à son entourage, l'expression
de ses sentiments et de ses émotions. Il ne s'agit pas de rechercher cette expression
mais d'ouvrir un espace où elle est possible. Un temps de maturation est nécessaire,
car le choc émotionnel lié à l'annonce ne permet pas toujours au patient d'assimiler
toutes les informations, et un éventuel blocage affectivo-cognitif de sa part
diminuerait les possibilités d'apprentissage. Certains travaux (Gatto et Favre, 1997)
expliquent que l'effet inhibiteur d'une forte émotion sur l'apprentissage peut avoir
une origine physiologique (les lobes frontaux pourraient être inhibés durablement en
ce qui concerne leur capacité de dessaisie d'un savoir préexistant).
Le patient passera généralement par différentes phases de réactions
psychologiques, que nous avons déjà vues, au cours desquelles son désir
d'information et d'accompagnement évoluera. De nouveaux temps de discussion et
d'explication sur son état permettront alors de diffuser une information adaptée,
progressive, respectueuse du sujet et de sa demande Les informations transmises
doivent être, pour le patient, l’occasion d’une éducation prenant en compte dans leur
globalité les facteurs concernant la santé. Elles consistent à réévaluer les
connaissances des patients en s'assurant que les informations reçues sont bien
comprises afin que soient corrigées les inexactitudes. Ces informations
supplémentaires seront données au rythme souhaité par chaque patient, en fonction
15
de l'importance du choc émotionnel de la découverte des conséquences de son
handicap et de sa capacité à assimiler toutes les informations.
D’Ivernois et Ganayre (1995) signalent l’importance, dans le processus rééducatif,
de la motivation du patient : «A l’annonce du diagnostic, le patient voit sa vie
basculer […]. Il est alors essentiel d’identifier dans son discours quelque chose qui
peut ressembler à un projet, à un but de vie, […] Ce projet doit véhiculer pour le
patient une charge émotionnelle (motivation), et être visible, c'est-à-dire que sa
réalisation doit être observable par le patient et son entourage, assurant un éventuel
renforcement positif ».
La découverte du handisport peut faire partie de ce type de projet et donc du
processus de rééducation. Sortir du modèle bio-médical comme système exclusif de
santé (traitement curatif de la maladie qui a pour unique objectif de corriger la
déficience) pour aller vers un modèle de santé global, d'approche systémique, axé
sur l'équilibre et les interactions entre l'individu et son environnement peut sembler
bénéfique. C’est d’ailleurs un modèle qui englobe le modèle précédent (Gatto, 2005).
Par ailleurs, l'annonce du handicap place souvent le patient dans une relation
dissymétrique dans le sens où il subit ce qui lui est dit. La forme donnée à l'entretien
par le soignant et la posture qu'il adopte, doivent permettre au patient de devenir au
moins acteur si ce n'est co-auteur dans le processus de soins qui se met en route.
La présentation des capacités sportives restantes s’inscrit dans ce processus
d’annonce et peut nécessiter, de la part du patient, au-delà d’une simple
compréhension cognitive, l’acceptation des conséquences de son handicap et d’une
remise en cause de son avenir et de son identité.
Toute la difficulté est de faire prendre conscience que le sport en fauteuil ou
appareillé peut procurer les mêmes sensations et avantages que les sports "valides"
et que découvrir cette pratique ne signifie pas qu'il n'y a aucun espoir de
rétablissement.
16
2. ENQUETE EXPLORATOIRE
2.1. Objectif de l’enquête
D’après Eymard (2004), « l’enquête exploratoire permet de recentrer l’objet de
recherche, de dépasser le stade du thème, de réduire l’investigation. Elle permet
aussi de tester la pertinence de l’objet de recherche au terrain des pratiques […]
d’évaluer l’intérêt socioprofessionnel de cette recherche, de nous distancer de nos
a priori, de nos certitudes de sens commun sur l’objet ».
2.2. Pertinence de l’enquête
Le sujet de cette enquête s’inscrit bien dans le contexte de formation à la fonction de
cadre, ainsi que de la réalisation de mon projet professionnel.
En particulier sur les points suivants :
- Organisation de réunions d’annonce selon le modèle du Plan Individuel
d’Intervention Interdisciplinaire (évaluation personnalisée du handicap).
- Organisation du bon fonctionnement de l’espace multisports nouvellement créé,
accessible en fauteuil, pour la pratique handisportive.
2.3. Choix de la population et lieu d'investigatio n
- Six sportifs en situation de handicap au sein de leur structure sportive et six
patients en centre de rééducation (4 paraplégiques et 2 amputés).
- Entretien individuel au centre de rééducation et au club de sport
2.4. Choix de l'outil d’enquête
Mon choix s’est porté, comme outil d’enquête, sur l’ entretien ; « Les entretiens se
différencient d'une part sur leur degré de directivité et d'autre part sur les
caractéristiques de la situation d'entretien » (Eymard, 2003).
17
J'ai utilisé pour l'enquête exploratoire des entretiens principalement de type directif
qui se définissent comme un ensemble de questions ouvertes, préconstruites,
identiques pour tous les sujets d'une même catégorie et posées dans un ordre établi
à l'avance et immuable.
La fin de chaque entretien s'est déroulée sur un mode semi-directif ou la personne
interviewée est libre d'approfondir un sous-thème qui se présente dans le discours.
2.5. Traitement des données
Traitement à plat, analyse du contenu par unités de sens, quantification du qualitatif.
2.6. Interprétation des résultats
Toutes les personnes interviewées dans un club de sport considèrent cette pratique
comme bénéfique soit d'un point de vue occupationnel (trois réponses), physique
(quatre réponses), social (trois réponses), pour la confiance en soi et l’image de soi
(deux réponses). Trois n'ont pas pu la découvrir en centre et le regrettent. Deux l’ont
ensuite découverte à distance de leur accident, pour le premier en se rendant dans
un autre centre, et pour le deuxième grâce au milieu associatif. La troisième
personne en prenant sur elle de se rendre dans une section handisportive.
Parmi celles qui ont découvert cette activité en centre, l’une d’entre elles a
maintenant complètement récupéré mais elle continue à pratiquer le basket en
fauteuil par plaisir, une autre refusait cette activité, son seul but était alors de
remarcher et l’usage d’un fauteuil dans le sport lui semblait être un début de
renoncement. Elle admet maintenant que cela lui aurait fait gagner du temps pour le
maniement du fauteuil.
Les personnes encore hospitalisées considèrent cette pratique comme ludique et
globalement bénéfique pour la rééducation (équilibre, vélocité, résistance physique).
Une d'entre elles ne connaissait pas l'existence du handisport avant son accident,
elle compte continuer à la sortie du centre mais uniquement pour l'attrait du sport
(basket en fauteuil), et n'y voit aucune utilité dans le domaine de la re-socialisation,
qui ne semble pas l'inquiéter.
18
Une autre ne compte pas continuer à la sortie car elle habite trop loin de tout club
possédant une section handisport. Une autre encore refuse les séances de ping-
pong car considérées comme peu valorisantes (c'est de la baballe), mais se montre
assidue à celles de basket et voudrait essayer le tennis en fauteuil.
Cinq patients hospitalisés ont mis en avant l'intérêt majeur de pouvoir rencontrer
d'autres personnes en fauteuil (d'anciens patients) qui participent aux entrainements,
c'est à leur contact qu'ils ont commencé à se reconstruire (trois réponses).
L'étude de ces différents cas laisse apparaître la diversité des réponses ; si la
pratique handisportive semble en général bénéfique, c’est pour des raisons souvent
différentes (le verbe ‘’se défouler’’ revient le plus souvent pour les patients
hospitalisés), cette pratique peut aussi être perçue, rarement, comme un
positionnement définitif dans une position d’handicapé, voire une perte de temps.
2.7. Objet de l’étude
Incidence du modèle d’apprentissage du handisport utilisé en centre de rééducation
sur l’intérêt que perçoivent les patients à pratiquer cette discipline.
3. PROBLEMATIQUE THEORIQUE
Dans ce qui suit, j’aborderai les concepts et modèles susceptibles de m’aider à
mettre au point ma méthode d’enquête.
3.1. Le concept de qualité de vie
Le concept de santé a considérablement évolué ses dernières années (loi du 4
mars 2002), le concept d'un état de bien-être physique, mental et social (prôné par
l’OMS dans les années 50), s'enrichit de nouvelles notions comme l'autonomie,
l'indépendance fonctionnelle, la qualité de vie.
19
Définition du Petit Larousse : « Epanouissement harmonieux de la personne dans
son environnement selon une échelle qui lui est propre ».
La définition donnée par l'OMS (1993) est la suivante: "La qualité de vie est définie
comme la perception qu'a un individu de sa place dans son existence, de sa situation
personnelle, dans le contexte de la culture et du système de valeurs dans lesquelles
il vit en relation avec ses objectifs, ses attentes, ses normes et ses inquiétudes. C'est
un concept très large influencé de manière complexe par la santé physique du sujet,
son état psychologique, son niveau d'indépendance, ses relations sociales ainsi que
sa relation aux éléments essentiels de son environnement"
C’est donc un concept très large, « concept multidimensionnel dont les différentes
composantes varient dans le temps » (Gatto, 2001), proche de celui du ‘’bien-
être’’, « Le bien être peut être défini comme l’atteinte du niveau de performance dans
les activités, les rôles sociaux que les individus se sont fixés et les satisfactions
produites » (Gatto, 2001) et qui dans son approche multidimensionnelle rassemble
de nombreux domaines.
Barbin (1999), en accord avec Aaronson (1989), Launois (1992), Auquier et
Macquart-Moulin (1995), Fletcher (1995), considère qu'une mesure de qualité de vie
doit conceptuellement prendre en compte les dimensions physique, psychologique et
sociale. Gatto (2005) englobe dans ce processus fonctionnel les facteurs suivants :
« la santé, les temps de loisir, l’intérêt du travail, la satisfaction familiale, l’estime de
soi, la fonction sociale et le sens donnée à la vie ». Rizzo et Spitz (2005) signalent le
coté subjectif et propre à chaque individu « Dans le domaine de la santé, la mesure
de la qualité de vie s'adresse plus particulièrement aux sujets en souffrance physique
et/ou psychique. Cette mesure suppose une prise de conscience par l'équipe
soignante de l'échec relatif des hétéro-évaluations conventionnelles et du rôle actif
du patient dans la prise en considération de son vécu subjectif ».
3.1.1. L’autonomie
Une approche conceptuelle permet de distinguer "indépendance" et "autonomie".
20
« Evaluer l'autonomie n'est pas facile, les outils permettent plutôt de mesurer l'état
d'indépendance fonctionnelle, c.a.d. l'ensemble des capacités d'un individu à réaliser
les actes ou les tâches de la vie quotidienne. Connaître les degrés de dépendance
d'une personne est une étape préliminaire et nécessaire à l'appréciation de
l'autonomie relative de cette personne. Cette appréciation nécessite non seulement
d'analyser son niveau de dépendance mais aussi d'apprécier sa qualité de réponse
et de contrôle par rapport au processus de désavantage. On définit alors des
niveaux d'autonomie en fonction de l'autonomie de décision et d'organisation, et de
l'indépendance de réalisation. L’autonomie est un processus individuel lié à un choix,
dont la variabilité ne permet pas d’inscrire l’évaluation dans un processus normatif ».
(Le Gall et Ruet 1996)
A cet égard, la pratique du sport semble bénéfique."Le sport permet aussi de
développer l'autonomie de la personne dans la réalisation des actes quotidiens.
Ainsi, les capacités biopsychosociales doivent être sollicitées afin de compenser les
conséquences de la situation de handicap comme la sédentarité, les limitations de la
mobilité et ses effets pathogènes, la restriction de la communication et de
l'environnement relationnel" (Maïano et C°, 2004)
3.1.2. L’Identité, l’estime de soi.
D'après Goffman (1975) et Murphy (1990), l'handicapé devra naviguer entre trois
types d'identité. Tout d'abord l'identité sociale, qui correspond à la cohérence des
différents rôles qu'un même individu doit tenir, marquée pour l'essentiel par le
stigmate; ensuite l'identité personnelle, qui correspond aux différents éléments qui
font d'un individu un être unique et qui le renvoie à ses capacités de contrôle des
informations à propos du stigmate, et enfin l'identité pour soi, qui renvoie aux
sensations de l'individu et à son propre regard sur son handicap.
Le terme de "stigmate" était utilisé par les Grecs pour désigner des marques
corporelles destinées à exposer ce qu'avait d'inhabituel et de détestable le statut
moral de la personne ainsi désignée. Pour Tap et C°, (2002), « stigmatiser, c'est
imposer des attributs négatifs à certaines personnes, leur jeter un discrédit, leur
21
donner une image d'elles-mêmes négative »E. Goffman(1975) considère que le mot
de stigmate « servira donc à désigner un attribut qui jette un discrédit profond » mais
souligne la relativité du concept, « en réalité c'est en terme de relation et non
d'attribut qu'il convient de parler. L'attribut qui stigmatise tel possesseur peut
confirmer la banalité de tel autre, et par conséquent, ne porte par lui-même ni crédit
ni discrédit » Il distingue trois grandes catégories de stigmates, tout d'abord les
stigmates corporels: les handicaps physiques, les défauts du visage et du corps, etc.
Puis les stigmates tenant à la personnalité et/ou au passé de l'individu, et enfin les
stigmates "tribaux". Toujours selon Goffman, les stigmates peuvent être visibles
(infirmité), l'individu est alors dit "discrédité", et son problème sera de contrôler
correctement l'interaction troublée par l'existence de ce stigmate. Les stigmates
peuvent aussi être invisibles, l'individu est alors "discréditable" et son problème
devient celui du contrôle de l'information à propos de son stigmate. Goffman va
s'intéresser à la mise en place des interactions entre ce qu'il appelle par terminologie
"stigmatisés" et "normaux". Il faut rappeler la relativité du phénomène et que la
situation de stigmatisé et de "normal" est spécifique à une interaction, et qu'un
"normal" dans une situation peut être stigmatisé dans un autre type d'interaction.
Foucault (2001, œuvre posthume) considère que si l’on n’est pas respecté dans son
identité, on ne peut que tomber malade ; que la maladie n’est que le symptôme dans
le rapport au social, c’est l’identité qui n’est pas reconnue. Pour ne pas stigmatiser
les personnes porteuses d’un handicap, il préconise un système de ‘’santé
communautaire’’ qui fonctionne sur des ‘’groupes d’auto-supports’’. On peut parler de
‘’santé communautaire’’ quand les membres d’une collectivité géographique ou
sociale, conscients de leur appartenance à un même groupe, réfléchissent en
commun aux problèmes de leur santé, expriment leurs besoins prioritaires et
participent activement à la mise en place, au déroulement, et à l’évaluation des
activités les plus aptes à répondre à ces priorités.
Dans ce système interne d’identité multiple, un des facteurs les plus importants
semble être l’estime de soi : « l’estime de soi, dimension au fondement de l’image de
soi, joue un rôle essentiel dans ce processus de réalisation de soi, permettant alors
un équilibre psychologique, un bien être psychologique » (Tap et C°, 2002).
22
L'estime de soi désigne l'attitude plus ou moins favorable qu'a chaque individu
envers lui-même, la considération et le respect qu'il se porte, le sentiment qu'il a de
sa propre valeur en tant que personne (Rosenberg, 1979). Murphy (1990) souligne
l'effet du handicap sur l'estime de soi, « De tous les symptômes psychologiques
associés à l'invalidité, le plus envahissant et le plus destructeur c'est la perte radicale
de l'estime que l'on a de soi même….L'existence retirée n'est qu'un compromis par
rapport aux sentiments subjectifs de détérioration et de perte de valeur que ressent
l'invalide et qui se manifeste sous forme de honte et de culpabilité. » En effet, la
notion de handicap reste dans l'esprit du public volontiers liée à la notion de laideur,
d'infériorité, de difficultés. Bien souvent, la personne handicapée est persuadée que
son handicap lui interdit toutes possibilités d'épanouissement dans les activités
physiques et qu'elle ne possède plus aucun pouvoir de séduction. Le sport peut alors
l’aider à se défaire de cette image et peut au contraire la valoriser en mettant en
évidence la beauté du geste. Dans certains cas, la personne peut développer des
performances qui forcent l'admiration et expriment une esthétique forte. Dans le
champ du handisport, Barbin (1999) qui s'appuie sur les travaux de Sonstroem et
Morgan (1989), écrit : « les modèles théoriques traitant de l'exercice physique et de
l'estime de soi se fondent sur deux aspects fondamentaux, la compétence physique
perçue et l'acceptation de soi. Ces deux dimensions influenceraient de manière
significative l'estime de soi globale […]. Ces modèles axés sur la notion de
compétence physique perçue en corrélation avec l'estime de soi globale ouvrent des
perspectives fort intéressantes du point de vue des effets de l'exercice physique et
sportif sur l'amélioration du sentiment de soi, en particulier auprès d'individus au
handicap récent » Il cite ensuite les études de Szyman (1980) , de Hopper (1986) et
de Bilard (1991) qui tendent toutes à montrer des relations significatives entre la
participation au sport et l'amélioration de l'estime de soi chez des athlètes adultes en
fauteuil roulant. Le travail de Bilard est particulièrement intéressant, car il porte sur
des blessés médullaires en centre de rééducation; Il montre, par une étude
différentielle, et à partir du test de Coopersmith, que pendant la phase de
rééducation active (sur une période de six mois), l'estime de soi de paraplégiques
pratiquant un sport rejoint le niveau d'une population non-handicapée, alors que celui
des "non sportifs" s'effondre.
23
3.1.3. La socialisation
Intégration et insertion sociale sont souvent confondues, or une personne insérée
n'est pas nécessairement intégrée, et l'intégration sociale ou culturelle concerne
toute personne dans sa relation avec la société, avec ses groupes d'appartenance et
de référence. L'intégration implique une adaptation réciproque entre les structures
d'accueil et les personnes ou groupes à accueillir. (Tap, 1988).
Pour Murphy (1990), l'analyse des handicapés permet de corroborer l'hypothèse
selon laquelle l'individu est avant tout le produit d'intégrations sociales. La présence
du handicap modifie le fonctionnement de l'ensemble des interactions de l'individu
avec son environnement ainsi que son identité personnelle.
Marcellini (2005) a confirmé l'hypothèse suivant laquelle les personnes stigmatisées
par une déficience utilisent le sport comme support de stratégie de déstigmatisation
pour accéder à une identité sociale positive et à une intégration sociale
satisfaisante. « Faire du sport, pour une personne handicapée se pose comme acte
de lutte contre un système d'images tellement puissant qu'elle l'a souvent elle-même
intégré ». Pour elle, le regroupement avec d'autres personnes handicapées au sein
d'une structure sportive n'est pas néfaste au début. Au contraire, les plus anciens
vont offrir de véritables modèles identificatoires à ceux qui rejoignent le groupe « La
rencontre dans l'espace sportif ouvre la voie à des relations facilitant l'ouverture et la
participation sociale, le développement d'activités et la sortie de l'isolement social ».
Ce regroupement peut ainsi assurer une meilleure insertion dans la vie active et il
limite l'isolement consécutif à l'accident. « Ces modèles sont le plus souvent
représentatifs d'une participation sociale normative…et s'affiche comme preuves
vivantes de la possibilité effective d'un retour normalisé à la vie sociale et d'un accès
au bonheur. Ils jouent un rôle de catalyseurs de l'engagement des autres dans
l'action, à tous les niveaux ».
Cette activité sportive offre aussi lors de compétitions organisées la possibilité de
déplacements collectifs, ou individuels, qui sont sécurisants, et qui permettent une
expérimentation concrète de la mobilité et de l'autonomie. Avec cette première étape
24
de regroupement, que Marcellini(2005) considère comme généralement défensive, le
groupe se construit une identité positive dans une logique de déstigmatisation
interne. C'est à partir d'un premier regroupement de pairs centré sur la rencontre, le
soutien mutuel, et la remise en cause du stigmate que peut émerger l'aspiration à
rencontrer les autres, et enfin aboutir à une dernière étape caractérisée par « une
situation d'acceptation du groupe qui est reconnu dans sa différence et dans ses
spécificités ».
Le sport limite donc l'isolement du handicapé consécutif à l'accident. Il ouvre la porte
à de nouvelles relations, alors que, malheureusement, les anciennes relations se
détournent souvent. Il permet au patient de lutter contre la sédentarité.
Maïano et C°(2004) mentionnent eux aussi l'importa nce du groupe sportif avec
l'exemple que représentent les plus performants pour les débutants, « Le sentiment
d'appartenance à un groupe sportif et le développement de représentations sociales
communes favorisent l'accès aux formes les plus poussées de l'intégration sociétale
et à de la citoyenneté. Cet accès se construit au fil du temps, non seulement par
l'expérience personnelle, l'échange avec des pratiquants partageant les mêmes
valeurs, mais également par l'évolution des représentations des sportifs valides et
des mentalités du mouvement sportif ordinaire à l'égard des sportifs handicapés ».
Ils mentionnent aussi l'ouverture bénéfique vers les joueurs valides et le
développement des pratiques sportives mixtes « La pratique mixte de loisir en
fauteuil roulant qui réunit valides et handicapés comme le basket, le tennis en
fauteuil et la danse en fauteuil, tend à se développer. La rencontre sociale, au moyen
d'une pratique sportive parmi les valides quand cela est possible (comme s'entraîner
en piscine avec les autres nageurs) dans les mêmes structures, au même moment,
en famille ou entre amis, durant les temps d'apprentissage, d'entraînement, de loisir
ponctuel ou régulier, de compétition fait l'objet d'une demande de plus en plus
grande pour être entendue et trouver des réponses positives. »
25
3.2. L’approche systémique
Comme le rappelle de Rosnay dans "Le Macroscope"(1975), un système peut être
considéré comme « un ensemble d’éléments en interaction ».
Fontanet (1977) précise dans Le Social et le Vivant : « La théorie des systèmes
s'intéresse aux choses dont les éléments se tiennent ensemble par des processus
dynamiques et non pas par des attaches prédéterminées et rigides; et qui
entretiennent généralement avec leur environnement d'autres relations dynamiques,
par lesquelles elles conservent leurs caractéristiques par rapport à lui, tout en étant
capable de s'adapter, dans certaines limites, à ces modifications ».
Cette approche concerne en particulier l'individu « le corps humain est un système,
car avec lui, on passe de l'ordre où les parties conditionnent le tout à celui où le tout
conditionne les parties » et son environnement « l'être humain est un composant
d'une famille, elle-même un composant d'une commune, elle-même un composant
d'une nation ». Il souligne l'importance de l'autorégulation: « L'apport irremplaçable
de la théorie des systèmes est de relever que l'existence et le fonctionnement
d'entités complexes, faites d'un entrelacement de relation internes et externes, à
première vue inextricable, relève en réalité de certaines lois de composition et de
certains processus d'autorégulation et d'auto-organisation grâce auquel le monde
naturel n'est pas un chaos ».
Ce paradigme systémique s'applique donc à l'être humain, mais aussi à d'autres
modèles et théories tels que les modèles de santé, d'évaluation, de communication.
Kielhofner (1985) propose d’analyser l’activité humaine selon une approche
systémique. Il propose de celle-ci une nouvelle formulation :’’ le comportement
occupationnel’’, et il définit ce modèle en partant de l’hypothèse que l’occupation
humaine est indispensable à la survie de l’individu. Cette occupation repose sur des
activités signifiantes (par rapport à l’individu) et significatives (par rapport à la
société) : c’est l’ensemble des activités que va réaliser la personne pour remplir son
rôle. Cette activité humaine se divise en trois groupes : les soins personnels, les
loisirs, et les activités de production. Elle peut être représentée comme l’inter relation
26
dynamique d’un individu avec l’environnement. Toujours selon Kielhofner (1985), il
est nécessaire d’utiliser une approche systémique et holistique pour l’observation de
ces phénomènes actifs.
Dans un système de santé global, la personne est le système central en interaction
avec les trois sous-systèmes : humain, activité (occupationnel) et environnement eux
même interconnectés. Chacun de ces sous systèmes est lui-même formé de sous
sous-systèmes, par exemple le système humain se définit par la volition (motivation,
‘’je veux’’), par l’habituation (l’ensemble des procédures d’organisation, ‘’je sais’’) et
par la performance (ensemble des aptitudes, ‘’je peux’’). Ces paramètres peuvent
eux même se décliner, la performance en fonctions cognitives, relationnelles,
motrices, sensitives ; la volition en valeurs ou intérêt ; l’habitus en rôle ou habitudes
de vie…. Cette approche systémique permet de comprendre que si un de ces
paramètres dysfonctionne ou se trouve modifié le comportement occupationnel peut
ne plus être en adéquation avec le système de normes de la personne, avec son
rôle ; en terme général, elle permet de comprendre le retentissement d’une
perturbation sur une personne.
Ce qui permet à Castelein (1991) de considérer que le handicap peut ne plus être
perçu uniquement en terme de maladie mais bien en terme de rapport différent à
l’environnement. Il apparaît quand l’un ou plusieurs des trois sous-systèmes
présentent un dysfonctionnement qui perturbe les relations de l’individu à son
environnement en générant chez ce dernier des situations de dépendance,
d’incompétence, d’inefficacité.
D’Ivernois et Gagnayre (1995) signalent que « L’approche systémique est
particulièrement adaptée aux éducations finalisées aboutissant à des compétences
objectivables chez les apprenants, ce qui est le cas de l’éducation des patients ». Il
permet de mieux comprendre la logique d'installation dans le handicap. A ce sujet,
Bui-Xuân et C° considèrent que « Le développement des modélisations systémiques
[…] amène aujourd'hui à penser différemment les processus d'émergence et de
renforcement du handicap. L'intérêt porté dans cette logique aux interactions et en
particulier à l'idée de réciprocité (feed-back) a donné lieu à la modélisation de ce que
l'on peut nommer "cercle vicieux", ou "effet en spirale’’ » Ils déclinent cette
modélisation sur différents plans: « physique (hypokinésie/hypodynamie qui aboutit
27
au déconditionnement physique) , cognitif (échec répétitif/sentiment d'incompétence
qui s'aggrave et qui génère de l'échec), social ou psychosocial (dépendance/prise en
charge du sujet qui aggrave sa dépendance; identité négative/sentiment d'inutilité qui
renforce la connotation négative de l'identité) et affective (souffrance
affective/désorganisation affective qui contribue à la souffrance affective). Cette
logique d'installation dans le handicap est en outre complexifiée par le fait que ces
différents plans d'analyse sont évidemment eux-mêmes en interaction réciproque
dans le système que constitue chaque sujet humain. »
3.3. Les modèles de la communication
Le mot "communication"(du latin: communicare : mettre en commun) « peut
désigner des réalités aussi différentes […] qu'un dialogue entre deux personnes, une
discussion de groupe, l'activité des médias, ou encore la circulation de l'information
dans l'entreprise », (dictionnaire des sciences humaines, éd. sciences humaines,
2004),
La communication se définit à travers plusieurs modèles et écoles, nous retiendrons :
- Le modèle de Shannon : il ajoute à un schéma purement linéaire de la
communication, la notion de codage et de décodage. La communication repose sur
la mise en relation d'un émetteur et d'un destinataire. L'émetteur souhaitant donner
une information va devoir la traduire en un langage compréhensible pour le
destinataire et compatible avec les moyens de communication utilisés : c'est le
codage. Le message ainsi élaboré va alors être émis et véhiculé grâce au canal de
la communication. Il parvient alors au destinataire, le récepteur, qui, grâce à une
activité de décodage, va pouvoir s'approprier et comprendre le message.
- Le modèle de Wiener : il énonce le principe du "feed-back ‘’, c'est-à-dire
l'information en retour qui crée une boucle de rétroaction du récepteur vers
l'émetteur. Le "feed-back" est une modalité de contrôle, de régulation et de
traitement des erreurs.
28
- L'école de Palo Alto : elle analyse la communication au travers de l'approche
systémique et en particulier du modèle interactionniste et systémique, «elle est
envisagée comme la participation d’un individu à un système d’interactions qui le
relie aux autres » (Mucchielli, 2005). Comme on l’a vu, l'approche systémique
appliquée aux communications humaines considère l'individu comme un élément
d'un ensemble vaste qui constitue le système. C’est ainsi que sur cet individu vont
intervenir des facteurs psychologiques, des contraintes sociales, des systèmes de
normes, de valeurs. Pour cette école, et en particulier pour Watzlawick (1972), il est
impossible de ne pas communiquer. Ce postulat suppose que l'on prenne le terme
de communication au sens large, il ne s'agit pas uniquement d'une communication
verbale, mais d'un système à canaux multiples : les gestes, les mimiques, la position
corporelle, le silence sont des actes de communication. Selon Abric, (2006) « ces
actes véhiculent en effet une signification, ils témoignent de la nature du lien social
existant. »
3.4. Les modèles de santé
D’après Eymard (2004), «De tout temps, la notion de santé a été l’objet de débats
positionnant des approches conceptuelles différentes ».
La santé est tout d'abord définie comme une absence de maladie, « La santé, c'est la
vie dans le silence des organes » (Leriche, 1937). En 1946, l'OMS sort du champ
uniquement sanitaire et propose comme définition: « La santé est un état de complet
bien-être physique, mental et social et pas seulement l'absence de maladie ou
d'infirmité (Art. de la constitution de 1946) ». Cette définition, jugée un peu utopique
et trop statique, a été complétée en 1882 par la notion d’adaptation du sujet. La
santé est alors définie comme « la capacité pour un individu à fonctionner de
manière optimale dans son propre environnement » ; cette adaptation doit se faire
« en y puisant des possibilités nouvelles pour son propre développement ». La loi du
4 mars 2002 ira encore plus loin, nous l'avons vu, en introduisant de nouvelles
notions comme par exemple la ’’qualité de vie’’.
29
Plusieurs modèles de santé existent actuellement, on peut en distinguer trois (Gatto,
2006) :
- Tout d'abord le système bio-médical, selon lequel la maladie peut être expliquée
comme une déviation du système de variables biologiques mesurables. Il existe une
cause biologique primaire, objectivement identifiable, à toute maladie. Ce système
encourage le patient à adopter une position passive (Zani, 2005). D'après Bruchon-
Schweitzer(2005), « Pour le modèle bio-médical, encore prédominant dans la
médecine contemporaine, la maladie concerne le corps et correspond à un
dysfonctionnement organique, dû à l'effet de divers agents pathogènes (infections,
traumatismes, lésions, tumeurs, substances toxiques, etc.…) ». L'auteur convient
que si cette approche a été par exemple: « extrêmement utile pour combattre les
maladies infectieuses, et développer les vaccins et les antibiotiques » […] elle « ne
suffit pas à comprendre la genèse de certaines pathologies (dont les maladies
cardio-vasculaires et les cancers, principales causes de morbidité et de mortalité
dans les pays développés) ». Pour Gatto (2005), un tel système place les
professionnels de santé « dans une logique positiviste à la fois dans les soins et
dans l'évaluation ». Le modèle "bio-médical" de la santé est, selon lui, «le traitement
curatif de la maladie qui a pour unique objectif de corriger la déficience».
- Le deuxième modèle est le modèle social, c'est le traitement social de la maladie et
du handicap, telle que l’illustre la création de la sécurité sociale, ou de la COTEREP.
- Le troisième modèle est le modèle de santé global qui englobe les deux précédents
et permet leur articulation et leur coordination. Il est axé sur l'équilibre entre l'individu
et son environnement, cet équilibre étant dynamique et évolutif (Gatto, 1999). Ce
modèle est basé sur la théorie générale des systèmes et met en évidence
l'interaction dynamique de multiples facteurs qui sont à la base des dégradations de
la santé, facteurs biologiques, psychologiques et sociaux (Zani, 2005).Il se
caractérise donc par une orientation vers la santé globale de la personne dans son
environnement.
0n peut considérer qu’introduire la pratique handisportive dans un processus de
rééducation va au-delà de la possibilité offerte au patient de s’exprimer
30
physiquement. Après une période de doute faisant suite à une hospitalisation dans
un environnement protégé et une modification de son statut de valide, elle semble
propice à développer des systèmes complémentaires suppléant à son déficit, à
améliorer sa motricité et son autonomie dans l’environnement extérieur, ainsi que
son insertion sociale. On peut aussi penser que son équilibre psychologique sera
meilleur grâce aux relations établies entre joueurs. Cette pratique s’inscrit bien dans
une vision globale du soin, qui n’est pas uniquement centrée sur l’organe malade.
Il existe deux conceptions différentes d'éducation à la santé,
- Tout d'abord l'éducation liée au modèle « bio-médical » de la santé :
L'éducation est liée au traitement, l'adhésion du sujet est recherchée par
transmission de savoirs. Les démarches clinique et pédagogique sont centrées sur
l’organe malade, sur le symptôme et « l’évaluation mesurée ». Cet approche curative
est donc prescriptive, fondée sur la faute et la culpabilité; les pratiques sont
protocolisées et systématisées.
- Ensuite l'éducation liée au modèle" global" de la santé :
Le modèle "global" de la santé considère donc que la maladie résulte de facteurs
organiques, psychosociaux et environnementaux. « le modèle global propose
d'évaluer, de tracer et de mettre en place des dispositifs thérapeutiques, éducatifs, et
sociaux pour permettre à la personne malade, à la personne handicapée et à la
personne exclue de s'impliquer et de s'engager au niveau sociétal pour prendre une
position de participant en fonction de ses demandes et de ses besoins »
(Gatto,2004) L'action éducative et donc thérapeutique tient compte de ces facteurs
depuis la prévention jusqu'à l'accompagnement du malade, « L'éducation à la santé
ne se réduit pas à la délivrance d'une bonne information mais elle vise à
problématiser les comportements individuels et collectifs, tout en garantissant le
respect de la personne humaine et son libre choix » (Gatto, 2004). Le thérapeute va
évaluer les savoirs préexistants des patients (par exemple la déficience fonctionnelle
signifie la fin de toute activité sportive), leurs demandes spécifiques, et va construire
avec eux un projet thérapeutique contextuel qui sera susceptible d’être réorganisé et
réorienté si la situation le nécessite. Selon Deccache (2001) : « l'éducation du patient
est un processus continu, intégré aux soins, et centré sur le patient. Il comprend des
31
activités organisées de sensibilisation, d'information, d'apprentissages et
d'accompagnement psychosocial concernant la maladie, le traitement prescrit, les
soins, … Il vise à aider le patient et ses proches à comprendre la maladie et le
traitement, coopérer avec les soignants, et maintenir ou améliorer la qualité de vie.
L'éducation devrait rendre le patient capable d'acquérir et maintenir les ressources
nécessaires pour gérer optimalement sa vie avec sa maladie ».
L'éducation a pour fonction essentielle d'aider à la socialisation et à l'autonomie
des patients. Ses effets sont mesurables par le gain d'autonomie des individus
(mesure du degré d'autonomie).
Ces deux modèles d’éducation à la santé répondent à deux paradigmes de pensée
et d’action, tout d’abord le paradigme positiviste qui s’appuie sur les théories de
l’apprentissage dites ‘’behavioristes’’, et le paradigme phénoménologique qui
s’appuie plutôt sur les théories constructivistes, socioconstructivistes et néo-
socioconstructivistes (Gatto, 2007).
A ces modèles correspondent deux logiques d'apprentissage selon le cadre
théorique et le paradigme de référence : « On peut distinguer deux groupes de
théories concernant l'apprentissage: celles qui font appel au conditionnement et
celles qui retiennent la compréhension et le raisonnement comme mode de
construction de réponse ». (Berbaum, 1984).
3.5. Matrice théorique
Trois variables issues de la problématique théorique, deux dans le champ de
l’éducation à la santé et un dans celui du concept de qualité de vie, constituent la
base de la matrice. A partir de cette base, les critères issus des champs théoriques
convoqués seront ensuite déclinés en indicateurs et indices.
32
Variables Critères Indicateurs Indices
Statut du programme : - protocole - répétitif
- Application du protocole - Non prise en compte des besoins et des demandes du patient
- Pas de modification du projet programmatique - Passivité du patient - Adhésion à la prescription sans réflexion.
Statut de l’erreur : - défaut de conformité
- Culpabilisation - Peur - Frustration
- La conséquence d’une erreur est vécue comme une sanction
- Pédagogie traditionnelle -Conditionnement
- Renforcement positif et négatif - Non prise en compte des savoirs préexistants - Transmission de savoirs savants
- Blocages cognitifs - Patient incapable de gérer une situation imprévue - Cours magistral - Programme pré établi à l’avance - Abstraction de l’environnement du patient
Education selon un
modèle bio-
médical
de la santé :
paradigme
positiviste
(Pavlov, Skinner,
Watson, Taylor)
- Posture d’agent, exécutant du patient
- Pédagogie frontale centrée sur l’enseignant
- Patient soumis
33
Statut du programme: - processus.
- Prise en considération des savoirs expérientiels et des demandes spécifiques. - Adaptation de la procédure en fonction de la situation.
- Le patient participe à l’élaboration du projet thérapeutique contextuel spécifique. - Diagnostic éducatif à partir d’une communication interactive systémique. - Réunion de synthèse interprofessionnelle avec le patient et ses proches. - Acquisition de compétence pour gérer sa maladie. - Contrat d’éducation entre l’équipe soignante et le patient. - Engagement mutuel. - Contrat non figé
Statut de l’erreur: - analyse - auto-analyse de l’écart. - permet de discuter et réorienter le programme
- Prise de conscience dirigée du différenciel.
- Régulation : l’erreur est travaillée sous forme de mise en questionnement.
- Auto-questionnement du patient.
- Analyse et auto-régulation.
- Modification du comportement. - Accompagnement au changement.
Education selon
un modèle global
de la santé :
paradigme
phénoménologique
(Piaget, Wygotski,
Giordan, Gatto)
- Prise en compte des émotions et du projet du patient.
- Patient au centre du dispositif. - Son vécu, sa réalité, ses représentations sont pris en considération.
- Construction par le groupe. - Prise en compte de la manière dont le patient vit la situation, du stade d’acceptation de la maladie. - Adaptation par les mots et les idées du message de l’éducation aux possibilités d’assimilation.
34
- Patient considéré dans son environnement bio-socio-économique.
- Analyse et régulation.
- Recherche d’autonomie pour le patient. - Prise en compte de son contexte de vie familiale et sociale, ses possibilités d’apprentissage.
- Mobilité - Autonomie de déplacement
- Gestes quotidiens - Gestion de ses fonctions biologiques. - Indépendance fonctionnelle.
- Physiques
- Santé physique - Douleurs - Perception générale de la santé
- Sens donné à la vie - Bonheur
- Dépression, anxiété - Performances cognitives - Maîtrise de son environnement - Niveau de revenus -Equilibre mental
- temps de loisir - activités occupationnelles, sportives
Qualité de vie perçue
- Psychologiques
- Estime de soi - Sentiment qu’a le patient de sa propre valeur. (En rapport avec une certaine conformité sociale). - Sentiment de compétence - Aptitude à gérer une situation complexe, à s’auto réguler.
35
- Travail - Intégration
- Satisfaction professionnelle - Implication bénévole - Contacts sociaux - Amis - Vie familiale - Satisfaction dans les relations d’échange
- Sociaux
- Sociabilité - Engagement social
- Perception de sa place dans le système de valeur dans lequel il vit en relation avec ses objectifs. - Participation à des événements sociaux, contribution sociale. - Relation chaleureuse, satisfaisante et de confiance avec les autres.
3.6. Hypothèse.
Il semble que la pratique handisportive apporte des bénéfices variés, et qu’une
découverte de celle-ci dès le centre de rééducation facilite le processus de
reconstruction identitaire et sociale si elle se déroule dans des conditions
d’immersion, et pas uniquement sous une forme behaviouriste de son
apprentissage. En effet seule une initiation permettrait de faire vraiment prendre
conscience de l'intérêt du handisport; une présentation théorique ne serait pas
suffisante.
Mais il faut prendre en considération les problèmes du refus de se mêler à d'autres
handicapés, du refus d'utiliser un fauteuil de sport, et aussi la difficulté de croiser le
regard des joueurs valides. Une fois ce premier pas franchi, (avec dans l’idéal la
rencontre d’autres personnes handicapées s’étant reconstruit une identité et une vie
‘’normale’’), les a priori s'estompent et laissent le joueur découvrir une activité
réellement bénéfique et enrichissante.
36
Ces éléments semblent prouver qu'un apprentissage répondant à un paradigme
phénoménologique est recommandé, issu d’une théorie néo-socioconstructiviste.
Cette théorie prenant en compte les émotions, l’environnement, et favorisant
l’apprentissage entre pairs (Zone Proximale D’apprentissage). En définitive, on se
propose de vérifier l’hypothèse suivante : seul un apprentissage qui allie théorie,
pratique, et immersion permette d’amener une personne en situation de handicap à
pratiquer une activité handisportive et à en apprécier les bénéfices.
4. METHODOLOGIE DE RECHERCHE
4.1. Choix de la méthode
La méthode utilisée pour cette étude sera la méthode différentielle. Pour Eymard
(2003), « La méthode différentielle s’intéresse aux facteurs de différenciation des
individus. Elle étudie les variations de réponses des sujets sur un phénomène. Le
chercheur identifie les caractéristiques individuelles explicatives de variations
comportementales du sujet, ainsi que l’existence ou non de corrélations entre ces
caractéristiques. » Les éventuelles corrélations étudiées dans ma recherche
concerneront la découverte ou non de la pratique handisportive en centre de
rééducation, sous quelle forme elle s’opère, et l’apport de celle-ci dans le domaine
de la qualité de vie « La qualité de vie est un processus fonctionnel mesurable et
évaluable dans le temps, basé sur une approche qui tient compte du sujet lui-même
et qui est évalué en grande partie par celui-ci. » (Gatto, 2005)
4.2. Choix de l'outil
L’outil me servant à mener à bien mes recherches sera un questionnaire dont le
contenu sera déterminé par mon objet d’étude et par les variables à observer. J’ai
choisi cet outil car l’objet de mon étude est cerné et précis. De plus, il permettra
aisément les traitements statistiques. Les questions seront principalement de forme
fermée, elles proposeront des réponses préformées. La plupart de ces réponses
37
offriront une hiérarchisation de qualificatifs sous la forme d’échelles de fréquence
propice à un questionnaire de qualité de vie (Gatto, 2007). Une question ouverte à la
fin permettra à chacun d’exprimer ce qu’il aurait souhaité comme moyens
supplémentaires pour pratiquer le handisport, et quelle type de relation il aurait
souhaité entretenir avec l’équipe soignante.
4.3. La population de référence
Sportifs en situation de handicap en centre de rééducation et en club sportif.
4.4. Détermination des variables
D’après Eymard (2003), qui se réfère à Reuchlin (1984), les variables différentielles
peuvent se regrouper en trois catégories : les variables interindividuelles,
intergroupes et intra-individuelles. Mon étude comportera des variables
interindividuelles qui correspondent « aux variables observées sur un ensemble
d’individus de façon telle que chacun des individus puisse être affecté à l’une des
valeurs possibles de la variable » (Eymard, 2003) et des variables intergroupes « Les
variables intergroupes différencient des groupes de sujets sur des variables
contextuelles ou situationnelles, […] elles sont toujours invoquées » (Eymard, 2003).
Dans cette recherche, le type de démarche éducative incluant ou non la pratique
handisportive est une variable intergroupe. Une variable interindividuelle sera, par
exemple, la perception de l’apport que peut présenter la pratique du handisport dans
la qualité de vie, en fonction de son mode d’apprentissage.
4.5. Protocole de l'enquête
Questionnaires remis à des patients en centre de rééducation pratiquant ou non un
handisport, ainsi qu’à des sportifs handicapés en club de sport.
Les critères d’exclusion concerneront les patients non sportifs avant la survenue du
handicap.
38
4.6. Description du questionnaire
Les différentes questions sont établies à partir de la matrice théorique pour obtenir le
questionnaire théorisé. Celui-ci comporte trois parties : une première partie relève
l’identification de la population, les deux autres reprennent les concepts théoriques
convoqués. La deuxième partie a pour objectif de mettre en évidence le type
d’éducation à la santé reçu par les patients en centre de rééducation et en particulier
si celle-ci comprenait la possibilité de pratiquer un ou plusieurs handisports et sous
quelle forme. Enfin, la troisième partie renseignera sur la relation entre la perception
de qualité de vie selon des critères physiques, psychologiques et d’intégration
sociale et les conditions d’apprentissage et de pratique handisportive. Les items du
questionnaire concernant la qualité de vie s’inspireront de différents outils validés
utilisés pour évaluer la qualité de vie d’un sujet (en les adaptant à la pratique
sportive). Je n’ai pas utilisé un seul de ces outils pris isolément car aucun d’entre
eux ne s’appliquait vraiment, dans sa globalité, à la population questionnée.
Les items s’inspirent des outils de collecte des données suivants :
- Le SIP (Sikness Impact Profile), test développé aux Etats-Unis puis adapté en
langue française en 1992.
- Le SEI (Self –Esteem Inventory) de Coopersmith, inventaire d’estime de soi.
- Le SF36 (Short From Health Survey) mesure du fonctionnement social,
physique, de la limitation d’activité et de la perception générale de la santé.
- L’EMMBEP (Echelle de Mesure des Manifestations de Bien-Être
Psychologique) de R.Massé.
Ce questionnaire a pour but d’évaluer ce que le handisport peut apporter à des
personnes handicapées en terme de qualité de vie, de socialisation, et de quelle
manière il est souhaitable, qu’en centre de rééducation, la sensibilisation à sa
pratique soit associée aux soins .
39
Il s’adresse :
1 - aux patients(tes) en centres de rééducation :
- ceux qui ne se sont pas sentis concerné(e)s, quelle qu’en soit la raison,
- ceux qui ayant été sensibilisé(e)s ou initié(e)s, y pratiquent le handisport.
2 - aux personnes qui, étant sorties de centre de rééducation, pratiquent
actuellement le handisport dans un club.
Première partie : identification de la population
Question n° 1: Etes-vous :
□ Un homme □ Une femme
Question n° 2: Quel est votre tranche d’âge ?
□ 15 - 25 ans □ 25 - 35 ans □ 35 - 45 ans □ 45 ans et plus
Question n° 3: Quel est votre handicap ?
□ Paraplégie □ Amputation □ Autres : _ _ _ _ _ _ _ _ Question n° 4: Étiez-vous sportif (ve) avant la survenue du handic ap ?
□ Oui □ Non
Question n° 5: Si oui quel(s) sport(s) pratiquiez-vous ?
_ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ Question n° 6: Si vous pratiquez actuellement, quel handisport pr atiquez vous ?
_ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _
40
Question n° 7: (ne concerne que les pratiquants en club) Comment avez-vous été
amené(e) au handisport?
□ Par une initiation en centre de rééducation □ Par les medias (presse, TV, jeux para-olympiques etc.) □ Par des connaissances □ Autre (s) moyen (s)
_ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ Question n° 8 : (ne concerne que les patients en centre de rééducation) Si vous ne pratiquez pas, c’est pour quelles raisons ? □ Je n’ai pas été sensibilisé(e) ou initié(e)
□ Je n’ai jamais été intéressé(e) par le sport
□ Je ne m’en sens pas capable
□ Cela m’installerait dans un statut de handicapé(e)
□ Je n’aurais pas le loisir de poursuivre
□ Je n’aurai pas les possibilités pratiques de continuer
□ Cela prendrait du temps sur ma rééducation
□ Je suis trop âgé(e)
□ Autre raison
_ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _
41
Deuxième partie : éducation à la santé
Question n° 9: Au centre de rééducation, comment a été faite votr e
rééducation ? (une ou plusieurs réponses)
□ Votre rééducation a été définie à l’avance en fonction de votre pathologie Modèle
bio-médical de santé, apprentissage de type béhavioriste
□ Votre rééducation a tenu compte de vos souhaits, de vos besoins, de vos
connaissances concernant votre pathologie. Modèle global de santé,
apprentissage de type constructiviste
□ Votre rééducation a aussi tenu compte de votre environnement. Modèle global
de santé, apprentissage de type socioconstructiviste
□ Votre rééducation a tenu également compte des conséquences émotionnelles
engendrées par votre état. Modèle global de santé, apprentissage de type néo-
socioconstructiviste
Question n° 10: Si vous avez été sensibilisé(e) en centre de rééducation à la
pratique handisportive, par quelle approche cela s’ est c’est-il fait ? (une ou
plusieurs réponses)
□ On m’en a parlé en restant exclusivement théorique. Théorie béhavioriste
□ Par l’intermédiaire d’une présentation théorique (orale, vidéo) suivie d’un débat
portant sur mes projets. Théorie constructiviste
□ Par l’intermédiaire d’une démonstration pratique avec un professeur et d’autres
patients(tes), à laquelle vous avez participé. Théorie socioconstructiviste
□ Par l’intermédiaire de petits matchs réunissant les patients(tes), d’anciens(nes)
patients(tes), et des joueurs (ses) valides, tous en fauteuil de sport. Théorie néo-
socio-constructiviste
42
Question n° 11: Concernant le handisport au centre de rééducation , pensez-
vous qu'il est préférable : (une ou plusieurs répon ses)
□ D’en parler en restant exclusivement théorique. Théorie béhavioriste
□ De le découvrir par l’intermédiaire d’une présentation théorique (orale, vidéo)
suivie d’un débat portant sur mes projets. Théorie constructiviste
□ De le découvrir par l’intermédiaire d’une démonstration pratique avec un
professeur et d’autres patients(tes), à laquelle vous participiez. Théorie
socioconstructiviste
□ De le découvrir par l’intermédiaire de petits matchs réunissant les patients,
d’anciens patients, et des joueurs valides, tous en fauteuil de sport. Théorie
néo-socio-constructiviste
Troisième partie : La qualité de vie
Question n° 12 (Ne concerne que les personnes qui, en centre ou en club, pratiquent
le handisport) Si vous avez été initié(e) au handisport en centre de rééducation,
parmi les avantages suivants, quels sont ceux que v ous y avez trouvés :
Question n° 12.1. : …avoir été sollicité(e) dans un environnement porteur (champ
psychologique)
□ accord total □ accord partiel □ désaccord partiel □ désaccord total
43
Question n° 12.2. : …avoir pu commencer à pratiquer dans un environneme nt
protecteur (champ psychologique)
□ accord total □ accord partiel □ désaccord partiel □ désaccord total
Question n° 12.3. : …avoir pu communiquer avec des patients(tes) dans la même
situation que moi (champ social)
□ accord total □ accord partiel □ désaccord partiel □ désaccord total
Question n° 12.4. :…avoir pu prendre contact avec les clubs handispor tifs de
votre région (champ social)
□ accord total □ accord partiel □ désaccord partiel □ désaccord total
Question n° 12.5. : …avoir trouvé dans le handisport un complément à ma
rééducation (champ physique)
□ accord total □ accord partiel □ désaccord partiel □ désaccord total
Question n° 12.6. : …avoir permis de me "défouler" physiquement (champ
physique)
□ accord total □ accord partiel □ désaccord partiel □ désaccord total
Question n° 13 : (ne concerne que les personnes en centre de rééducation)
Quel avantage trouvez vous à pratiquer un ou plusie urs handisports, lors
même de votre séjour en centre de rééducation:
Question n° 13.1 .: Cela rend le séjour en centre de rééducation plus facile à
supporter (champ psychologique)
□ accord total □ accord partiel □ désaccord partiel □ désaccord total
Question n° 13.2. : Cela favorise un regard plus optimiste sur l’aveni r (champ
psychologique)
□ accord total □ accord partiel □ désaccord partiel □ désaccord total
Question n° 13.3. : Cela permet de se "défouler" (champ physique)
□ accord total □ accord partiel □ désaccord partiel □ désaccord total
44
Question n° 13.4. : Cela constitue un complément à la rééducation (champ
physique)
□ accord total □ accord partiel □ désaccord partiel □ désaccord total
Question n° 13.5. :Cela permet de rencontrer d’autres personnes (champ social)
□ accord total □ accord partiel □ désaccord partiel □ désaccord total
Question n° 13.6. : Cela occupe les moments de solitude (champ social)
□ accord total □ accord partiel □ désaccord partiel □ désaccord total
Question n°14 : D’une façon générale, la pratique du handisport a, selon vous,
pour effet de permettre: (champ physique)
Question n° 14.1.: … d’accéder à une meilleure forme physique
□ accord total □ accord partiel □ désaccord partiel □ désaccord total
Question n°14. 2.: … de compenser son handicap en contournant les di fficultés
fonctionnelles
□ accord total □ accord partiel □ désaccord partiel □ désaccord total
Question n°14.3.: … d’éprouver de nouvelles sensations corporelles
gratifiantes
□ accord total □ accord partiel □ désaccord partiel □ désaccord total
Question n° 15.: De façon générale, la pratique du handisport a selon vous,
pour effet de permettre : (champ social)
Question 15.1.: …. de mieux se réadapter à son environnement
□ accord total □ accord partiel □ désaccord partiel □ désaccord total
Question n° 15. 2. : … d’accéder à de nouvelles responsabilités
□ accord total □ accord partiel □ désaccord partiel □ désaccord total
Question n° 15.3.: … de se trouver valorisé(e) dans le regard des autr es
□ accord total □ accord partiel □ désaccord partie □ désaccord total
45
Question n° 15.4.: … de faciliter un engagement dans le milieu assoc iatif
□ accord total □ accord partiel □ désaccord partiel □ désaccord total
Question n° 15.5.: … d’être plus apte à s’ouvrir aux autres et à leur être utile
□ accord total □ accord partiel □ désaccord partiel □ désaccord total
Question n° 15.6. : … de favoriser la création de nouvelles relations s ociales
□ accord total □ accord partiel □ désaccord partiel □ désaccord total
Question n° 15.7.: … de favoriser une plus grande mobilité dans le ca dre de
sorties éventuelles □ accord total □ accord partiel □ désaccord partiel □ désaccord total
Question n°16 : D’une façon générale, dans le domaine personnel, la pratique
du handisport a, selon vous, pour effet de permettr e: (champ psychologique)
Question 16.1.: … de voir l’avenir différemment
□ accord total □ accord partiel □ désaccord partiel □ désaccord total
Question n°16.2. : ... de redonner un sens à la vie
□ accord total □ accord partiel □ désaccord partiel □ désaccord total
Question n°16.3. : … de donner la possibilité de compenser son handica p par
de nouveaux acquis
□ accord total □ accord partiel □ désaccord partiel □ désaccord total
Question n16.4. : … d’améliorer le sentiment de sa propre valeur
□ accord total □ accord partiel □ désaccord partiel □ désaccord total
Question n°16.5. : … d’améliorer son aptitude à se contrôler
□ accord total □ accord partiel □ désaccord partiel □ désaccord total
Question n°16.6. : … d’être moins sujet(e) à l’anxiété
□ accord total □ accord partiel □ désaccord partiel □ désaccord total
46
En conclusion, qu’auriez vous souhaité comme moyens supplémentaires pour
pratiquer le handisport, et quelle type de relation auriez vous souhaité entretenir
avec l’équipe soignante dans ce domaine.
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4.8. Recueil et traitement des données
4.8.1. Méthodologie de traitement des données
« La phase de traitement des données est une phase de décodage, d’encodage des
informations et des calculs statistiques » (Eymard et C°, 2004).
La phase d’encodage d’un questionnaire est donc incontournable pour assurer le
traitement des données.
Les questions relatives à l’évaluation du niveau de qualité de vie perçue, qui
représente la partie la plus importante de l’étude statistique, ont chacune une valeur
équivalente à un point maximum ; 1 point est accordé à la réponse « accord total »,
0,66 point est accordé à la réponse « accord partiel », 0,33 point à la réponse
« désaccord partiel », et 0 point à la réponse « désaccord total ».
Pour toutes les questions à 2 choix, 1 point est accordé à la première réponse et 2 à
la seconde.
Pour les questions concernant l’éducation à la santé, les unités de sens des
réponses permettent de discerner quatre critères. Dans le cas où la découverte du
handisport répond à un apprentissage s’inspirant d’une théorie béhavioriste, cette
47
question prend la valeur de 1 ; 2 points lui sont attribué si cette théorie est de type
constructiviste, 3 points si elle est de type socio-constructiviste, et 4 points si elle est
de type néo socio-constructiviste.
Toutes ces réponses sont inscrites dans un tableau Excel. Ce logiciel rend possible
l’analyse statistique.
4.8.2. Recueil et analyse des résultats
Au préalable, le questionnaire a été testé auprès de 4 personnes, deux patients en
centre de rééducation, et deux sportifs en club. Cette enquête préalable n’a pas
foncièrement modifié le questionnaire ; seule la question concernant l’âge des
personnes sondées, qui demandait l’âge exact, a été transformée pour s’en tenir à la
tranche d’âge. Ce type de réponse améliore la confidentialité du questionnaire.
La population étudiée pour l'enquête définitive est composée de 26 hommes et 12
femmes se répartissant en trois groupes (annexe 4) : le premier, celui des patients
en centre de rééducation ne pratiquant pas d'handisport, le second, celui des
patients en centre de rééducation pratiquant un handisport et enfin le troisième, celui
des sportifs pratiquant un handisport en club.
0
2
4
6
8
10
12
Répartition des effectifs en fonction du sexe
Hommes 4 12 10
Femmes 3 3 6
1 2 3Groupe
48
La répartition par tranche d'âge ci-dessous est la suivante, 2 individus sont situés
entre 15 et 25 ans, 11 entre 25 et 35 ans, 18 entre 35 et 45 ans, et 7 au delà de 45
ans.
0
1
2
3
4
5
6
7
8
Répartition des effectifs selon la tranche d'âge
15 à 25 0 2 0
25 à 35 3 4 4
35 à 45 3 7 8
45 et"+" 1 2 4
1 2 3Groupe
En ce qui concerne la déficience, 21 sont paraplégiques, 7 sont amputés, et 10
présentent d'autres pathologies.
0
2
4
6
8
10
12
Répartition des effectifs selon les pathologies
Paraplégie 5 5 11
Amputation 1 4 2
Autres 1 6 3
1 2 3Groupe
49 Dans le champ de l'éducation à la santé, 10 d'entre eux considèrent qu'ils ont été
soignés selon un modèle bio médical de santé (en général d'anciens patients), 28
selon un modèle global.
0
1
2
3
4
5
6
7
Répartition selon le modèle d'éducation à la santé
Béhavioriste 0 5 5
Constructiviste 0 2 3
Socio-Constructiviste 2 1 1
Néo Socio-Constructiviste 5 7 7
1 2 3Groupe
Pour le mode d'apprentissage au handisport, 2 personnes n'ont jamais été
sensibilisées en centre de rééducation (groupe des sportifs en club). 4 personnes ont
été initiées selon un modèle béhavioriste (2 pratiquent en club et 2 en centre mais ne
sont pas pratiquants)
0
1
2
3
4
5
6
7
8
Répartition selon le modèle d'apprentissage au hand isport
Béhavioriste 2 0 2
Constructiviste 5 0 2
Socio-Constructiviste 0 7 2
Néo Socio-Constructiviste 0 8 8
1 2 3Groupe
50
Concernant le mode de découverte souhaitée pour l’initiation handisportive, 29
pratiquants prône un apprentissage de type socio-constructiviste ou néo socio-
constructiviste, ce qui représente la grande majorité. Par ailleurs, les non pratiquants
sont plus partagés, ceux qui ne pratiquent pas pour des raisons médicales y sont
plutôt favorables (3 sur 3).
0
2
4
6
8
10
12
14
16
Répartition selon le souhait émis d'un modèle d'apprentissage au handisport
Béhavioriste 1 0 0
Constructiviste 2 1 0
Socio-Constructiviste 0 4 1
Néo Socio-Constructiviste 4 10 15
1 2 3Groupe
Les questions ouvertes ou semi ouvertes nous renseignent d’une part sur le type de
sport pratiqué et sur les suggestions concernant les moyens supplémentaires à
mettre en œuvre pour pratiquer le handisport, et d’autre part sur le type de relation
souhaité avec l'équipe soignante. Pour les sportifs en club, les sports pratiqués
actuellement (outre le basket et le tennis en fauteuil, qui sont les sports pratiqués
dans les clubs où se déroule l'enquête) correspondent souvent à ceux pratiqués
auparavant; on peut noter des sports d'eau, de l'athlétisme, du ski, de la boxe ... Ces
réponses tendent à montrer qu’au prix d'un matériel adapté, peu de sports ne sont
pas accessibles aux personnes présentant une déficience. Les patients en centre
pratiquent les sports qui leur sont proposés : basket, tennis, tennis de table, parcours
de santé en fauteuil, mais aussi canoë, voile, avec des bateaux aménagés.
51
Concernant les propositions des personnes interrogées, les sportifs en club
souhaitent en général plus de moyens financiers pour subvenir à leur activité, mais
aussi être reconnus comme des sportifs à part entière. Certains réclament également
la possibilité de s’entraîner prés de chez eux, et donc des structures d'accueil plus
nombreuses.
Les patients pratiquant en centre sont en général très satisfaits de leur relation avec
le personnel soignant et du déroulement des entraînements; leur revendication porte
souvent sur un investissement plus important (achat de nouveaux fauteuils de sport,
matériel...). Certains réclament aussi un effectif plus important pour augmenter le
nombre de séances, et rendre les professeurs de gymnastique plus disponibles. Une
personne sondée a même souhaité plus de théorie dans le processus
d'apprentissage.
L'étude des caractères quantitatifs continus nous amène à étudier l'analyse des
réponses aux questions concernant l'apport perceptif de la pratique handisportive en
matière de qualité de vie (annexe 5) . Cette analyse est réalisée grâce au test de
Student. "Ce test, d'un emploi très général, permet de comparer deux moyennes
observées. Il s'applique notamment pour des effectifs inferieurs à 30 par groupe ou
distribution. Son calcul fait entrer en ligne de compte la variance de chaque groupe
et l'effectif." (Eymard, 2003)
Les trois groupes sont dissociés; le premier groupe n'a donc bénéficié que d'un
enseignement théorique, le second a bénéficié en plus d'une mise en situation, de la
rencontre de pairs et d’une pratique handisportive en centre de rééducation; enfin le
troisième groupe est formé de sportifs hors centre de rééducation et évoluant en
club. Le test t de Student permet de comparer les moyennes des réponses de
chaque groupe à des questions communes portant sur l'apport du handisport en
matière de qualité de vie.
La comparaison des deux premiers groupes par le test de Student laisse apparaitre
un t de Student égal à 7,78 et donc supérieur à celui lu dans la table du t de Student
pour un risque p = 0,001 (3,85 pour un ddl de 20). On prend un risque inférieur à
1/1000 de rejeter l'hypothèse nulle et d'énoncer qu'il existe une différence
52
statistiquement significative entre ces deux groupes. En comparant la moyenne de
chacun de ces deux groupes à celle des deux groupes réunis, il semblerait donc que
les patients en centre de rééducation ne pratiquant pas de handisport aient le
sentiment que l'intérêt du handisport pour améliorer la qualité de vie est nettement
moins important que ne le ressentent les patient qui ont découvert cette activité par
un apprentissage de type socio ou néo socio-constructiviste.
La comparaison des deux derniers groupes laisse apparaître un t de Student égal à
1,82 et donc supérieur à celui lu dans la table du t de Student pour un risque p = 0,1
(1,70 pour un ddl de 29). On prend un risque inférieur à 1/10 de rejeter l'hypothèse
nulle et d'énoncer qu'il existe une différence statistiquement significative (bien que
beaucoup moins importante que la précédente) entre ces deux groupes. Il semblerait
donc que l'importance accordée au handisport par les sportifs en club pour améliorer
leur qualité de vie soit légèrement supérieure à celle accordée par les patients en
centre de rééducation ayant découvert la pratique du handisport.
5. DISCUSSION
Au vu des résultats, l'option d'un apprentissage qui ne soit pas purement théorique
semble s'imposer pour franchir l'obstacle que présente bien souvent la mise en
fauteuil roulant et sa représentation pour les patients. La perception de ce que peut
apporter la pratique handisportive en matière de qualité de vie est en effet bien
supérieure chez les pratiquants qui oublient la présence du fauteuil pour réaliser
qu'ils peuvent à nouveau ressentir les plaisirs du sport et bénéficier des avantages
que procure cette activité : la liberté de mouvement comme si le handicap n’existait
plus.
Evidemment, l'étude porte sur une petite population, ce qui limite sa représentativité.
Le questionnaire semble être un outil d'enquête approprié qui permet en particulier
des réponses perceptives " Un questionnaire n'a pas pour but de renseigner sur ce
que les gens font, mais plutôt sur ce qu'ils déclarent faire ou sur ce qu'ils pensent
53
faire. C’est un outil qui appréhende la perception des sujets sur leur faire et non le
faire directement " (Eymard, 2003). Néanmoins, cet outil présente plusieurs limites,
en particulier en ce qui concerne la spontanéité et la subjectivité des réponses. Par
exemple, certaines personnes me connaissant, et connaissant mon engagement
dans le milieu du handisport, ont peut être cherché à faciliter mon enquête en
surévaluant les réponses. A l'inverse, des patients refusant la pratique du handisport
peuvent avoir, dans leurs réponses, accentué leurs préjugés pour justifier leur refus.
J'ai cherché dans ce mémoire à montrer qu' une mise en situation pratique, si
possible avec d'anciens patients qui sont des références et des exemples de vies
reconstruites en partie grâce au sport, est souvent nécessaire pour réaliser les
bénéfices que l'on peut attendre du handisport en matière de qualité de vie. Les
réponses semblent aller dans ce sens mais nécessiteraient une étude à plus grande
échelle.
CONCLUSION
Les réflexions récentes sur le handicap conduisent à le considérer non plus comme
une réalité autonome, mais comme un état devant prendre en compte ses
interactions avec les facteurs environnementaux.
Car le handicap est abordé maintenant en ayant à l’esprit les facteurs physiques,
psychologiques et sociaux environnants qui affectent les personnes concernées.
Certains de ces facteurs peuvent jouer un rôle favorable, en rendant plus facile des
gestes de la vie quotidienne, alors que d’autres facteurs constituent au contraire des
obstacles.
Au plan psychologique l’acceptation de la situation par la personne handicapée
passe par des facteurs qui sont en relation avec le regard porté par les autres, .et qui
ont un impact sur la qualité de vie, le stress, l’estime de soi, etc.
Enfin le rôle de l’insertion sociale est évidemment aussi déterminant pour le bon
équilibre des personnes concernées.
54
Sur tous ces aspects du problème la pratique handisportive peut jouer un rôle
important
Ma recherche a consisté à savoir dans quelle mesure, et sous quelle forme,
l’apprentissage du handisport pourrait être une réponse à ces besoins de mieux-être
et de réinsertion: affronter plus facilement les obstacles matériels, être « mieux dans
sa peau », être socialement réintégré.
Dès le centre de rééducation, la peur de ne plus pouvoir reprendre une activité
physique et sportive peut être pour un patient une cause de souffrance. Il semble,
d'après les résultats de l’enquête, que seule une initiation pratique permette aux
patients de percevoir l'apport de cette activité pour améliorer la qualité de vie, et ceci
en particulier par un apprentissage de type néo-socio constructiviste.
Mettre en place un apprentissage au handisport dans un centre de rééducation
s'inscrit dans l’esprit de la loi du 4 mars 2002, ainsi que dans celui d’un modèle
global de la santé : le patient est alors placé au centre du dispositif de rééducation,
avec la prise en compte de ses savoirs préexistants, de son projet, de ses émotions,
et donc en l’impliquant dans le processus de rééducation.
Cette mise en place relève donc du champ des sciences de l’éducation, comme de
celui de l’éducation à la santé. Elle relève aussi des fonctions d’encadrement par la
mise en place et le bon fonctionnement des consultations d’annonce, par
l’organisation et l’intégration de cette activité sportive dans le programme de
rééducation, et par la sensibilisation de l’équipe, des nouveaux agents, des
stagiaires à l’intérêt de cette pratique.
Dans un modèle de santé centré sur chaque patient et non sur sa pathologie,
chaque individu élaborera son propre projet de vie. Diverses activités pourront
répondre à ses objectifs. Le handisport pourra ou non trouver sa place, seul ou en
complément, parmi ces dernières.
Il ne s’agit donc pas d’imposer le handisport dans le processus de rééducation, mais
de permettre à chaque patient d’être en mesure de juger par lui-même, et sans a
priori, si cette pratique a des chances de lui être bénéfique.
55
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EN PARTENARIAT
U.F.R. Psychologie, Sciences de l’éducation Institut de Formation des Cadres de Santé Département des Sciences de l’éducation de Montpellier
Université de Provence Section rééducation Aix � Marseille 1
Diplôme de Cadre de Santé et MASTER professionnel Education et Formation 1ère année
Année Universitaire 2006 � 2007
Une vision globale de la santé pour la personne en situation de handicap
- L'apprentissage du handisport -
MOYSOULIER Philippe
Sous la direction de Monsieur Jean Luc GERARDI
Sous la direction administrative de Monsieur Olivier PLISSON
Résumé : Pour une personne en situation de handicap, l'objectif du rééducateur est de lui faire atteindre le meilleur niveau possible de qualité de vie perçue. Il doit donc aller au delà du traitement purement curatif de la déficience, et l’aider à développer ses aptitudes et à trouver des réponses à ses attentes, que celles-ci soient latentes ou exprimées. Cette approche thérapeutique est d’ailleurs conforme à un modèle global de santé et à la loi du 4 mars 2002. Dans cette perspective, il semble, d'après les résultats de mon enquête, que l'apprentissage du handisport, effectué en centre de rééducation, et selon des principes interactionnistes d’apprentissage, permette chez certains patients d'améliorer sensiblement leur niveau de qualité de vie perçue. Mots clés : Handicap – Handisport – Apprentissage – Qualité de vie – Savoirs expérientiels – Santé globale. Summary : For a handicapped person, the aim of the reeducator is to make him (her) reach the best possible level of perceived quality of life. Therefore he must go beyond the solely curative treatment of the deficiency, and help him (her) develop his (her) aptitudes and find answers to his (her) expectations, latent or expressed. This therapeutic approach is consistent with a global model of health, and with the law of March 4, 2002. According to the outcomes of my survey, it appears that handisport, when approached in a reeducation center, and in line with the interactionnist learning principles, may lead some patients to a better level of perceived quality of life. Keywords : Handicap – Handisport – Learning - Quality of life – Experience based knowledge - Global health.
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