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Article de Michel Juvet paru dans Le Temps du 18 juin 2012 Les informations de la présente ont été puisées aux meilleures sources. Toutefois, notre responsabilité ne saurait être engagée. 16, rue de Hollande | CP 5515 | CH-1211 Genève 11 | T. +41 58 258 00 00 | F. +41 58 258 00 40 | [email protected] | www.bordier.com GENÈVE NYON BERNE ZÜRICH PARIS LONDRES MONTEVIDEO SINGAPOUR TURQUES-ET-CAIQUES 1/1 Design ClPa B ORDIER & C IE 18 juin 2012 L a décision prise le 6 septembre 2011 par la Banque Nationale Suisse de fixer un cours plafond à la monnaie helvétique contre l’euro a déjà fait couler beaucoup d’encre…Pourtant un élément est malgré tout passé plutôt inaperçu…. Saviez-vous qu’en prenant cette décision notre banque centrale avait arrimé par ricochet notre devise au Franc CFA, utilisé dans 14 pays de la zone sub-saharienne et aux Comores ? En effet, lors de la création de l’euro, la parité fixe qui liait le Franc CFA au Franc français avait été simplement reportée sur l’euro. En vertu donc des accords de 1998 signés par l’Union Européenne, un euro vaut depuis lors, 655,957 francs CFA. Et désormais, depuis le 6 septembre 2011, un Franc suisse vaut 546,63 francs CFA... Ce détail amusant, presque colonial, permet de sou- lever la question de la pertinence du lien qui unit le franc CFA à l’euro. Depuis la création de l’euro, le commerce (importa- tions et exportations) entre les pays de la zone sub saharienne et l’Union européenne a été multiplié par environ quatre. Superbe ! La stabilité de la parité Franc CFA / euro y est sans doute pour quelque chose. Mais pendant la même période le commerce entre ces pays africains et « BRINCHIA » (Brésil + Inde + Chine) a été multiplié par environ 16 ! Et cela dans des devises différentes de l’euro… Les Africains, inquiets des perspectives de dislocation ou de forte baisse de l’euro, doivent donc logiquement se demander si le Franc CFA ne devrait pas plutôt être fixé sur un panier de monnaies plus représentatives de leurs dynamiques d’échanges commerciaux. Adieu l’euro et la Banque de France ? La question est d’autant plus pointue qu’aujourd’hui ces pays africains ne constituent plus dans leur ensemble le boulet caché de la zone euro, comme certains le répétaient stupidement il y a 15 ans…Depuis, la zone sub-saharienne a en effet enregistré une croissance nettement supérieure à celle de la zone euro, et son endettement public est devenu très « helvétique », proche des 35 % du PIB. Et que dire du commerce bilatéral Suisse – zone sub- saharienne ? La nouvelle parité presque fixe entre le Franc CFA et le FS renversera-t-elle la tendance négative récente de ce dernier ? Non, car la fin d’un franc suisse fort ne permettra malheureusement pas de relancer les exportations africaines vers notre pays. Dommage pour le coup de pouce au développement de ces pays… Notre franc est donc malgré tout un peu africain aujourd’hui. Alors dans la course actuelle aux bonnes idées, qui osera donc demander à notre BNS qu’elle diversifie ses euros en francs CFA… ? Au coeur des marchés Michel Juvet Analyste nancier et Associé de Bordier & Cie Notre franc africain

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Articles de Michel Juvet dans Le Temps, Banque Bordier Genève

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Article de Michel Juvet paru dans Le Temps du 18 juin 2012Les informations de la présente ont été puisées aux meilleures sources. Toutefois, notre responsabilité ne saurait être engagée.

16, rue de Hollande | CP 5515 | CH-1211 Genève 11 | T. +41 58 258 00 00 | F. +41 58 258 00 40 | [email protected] | www.bordier.comGENÈVE NYON BERNE ZÜRICH PARIS LONDRES MONTEVIDEO SINGAPOUR TURQUES-ET-CAIQUES

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La décision prise le 6 septembre 2011 par la Banque Nationale Suisse de fi xer un cours plafond à la monnaie helvétique contre l’euro

a déjà fait couler beaucoup d’encre…Pourtant un élément est malgré tout passé plutôt inaperçu….Saviez-vous qu’en prenant cette décision notre banque centrale avait arrimé par ricochet notre devise au Franc CFA, utilisé dans 14 pays de la zone sub-saharienne et aux Comores ? En effet, lors de la création de l’euro, la parité fi xe qui liait le Franc CFA au Franc français avait été simplement reportée sur l’euro. En vertu donc des accords de 1998 signés par l’Union Européenne, un euro vaut depuis lors, 655,957 francs CFA. Et désormais, depuis le 6 septembre 2011, un Franc suisse vaut 546,63 francs CFA...

Ce détail amusant, presque colonial, permet de sou-lever la question de la pertinence du lien qui unit le franc CFA à l’euro.

Depuis la création de l’euro, le commerce (importa-tions et exportations) entre les pays de la zone sub saharienne et l’Union européenne a été multiplié par environ quatre. Superbe ! La stabilité de la parité Franc CFA / euro y est sans doute pour quelque chose. Mais pendant la même période le commerce entre ces pays africains et « BRINCHIA » (Brésil + Inde + Chine) a été multiplié par environ 16 ! Et cela dans des devises différentes de l’euro… Les

Africains, inquiets des perspectives de dislocation ou de forte baisse de l’euro, doivent donc logiquement se demander si le Franc CFA ne devrait pas plutôt être fi xé sur un panier de monnaies plus représentatives de leurs dynamiques d’échanges commerciaux.

Adieu l’euro et la Banque de France ? La question est d’autant plus pointue qu’aujourd’hui ces pays africains ne constituent plus dans leur ensemble le boulet caché de la zone euro, comme certains le répétaient stupidement il y a 15 ans…Depuis, la zone sub-saharienne a en effet enregistré une croissance nettement supérieure à celle de la zone euro, et son endettement public est devenu très « helvétique », proche des 35 % du PIB.

Et que dire du commerce bilatéral Suisse – zone sub-saharienne ? La nouvelle parité presque fi xe entre le Franc CFA et le FS renversera-t-elle la tendance négative récente de ce dernier ? Non, car la fi n d’un franc suisse fort ne permettra malheureusement pas de relancer les exportations africaines vers notre pays. Dommage pour le coup de pouce au développement de ces pays…

Notre franc est donc malgré tout un peu africain aujourd’hui. Alors dans la course actuelle aux bonnes idées, qui osera donc demander à notre BNS qu’elle diversifi e ses euros en francs CFA… ?

Au coeur des marchés

Michel JuvetAnalyste fi nancier et Associé de Bordier & Cie

Notre franc africain