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THEME 5 : REVOLUTIONS, LIBERTES, NATIONS, A L’AUBE DE L’EPOQUE CONTEMPORAINE Question 1 : La Révolution française : l’affirmation d’un nouvel univers politique. I. Contestations, révoltes et révolutions au XVIIIème siècle en Europe et en Amérique. Comment naît la Révolution française ? 1) Les philosophes ont-ils préparé la Révolution ? Les philosophes des Lumières critiquent la société d’ordres dans sa globalité : monarchie absolue, place de l’Eglise et intolérance religieuse, ordres privilégiés. Au XVIIIème siècle, L’importance et la place de chacun dans la société sont déterminées par la naissance . Le clergé et la noblesse constituent les ordres privilégiés qui occupent les plus hautes fonctions et prélèvent des impôts sans en payer. Les philosophes des Lumière affirment au contraire que la place de chacun doit être déterminée par le talent et que tous les hommes possèdent des droits naturels (liberté et égalité à la naissance). Les Lumières sont favorables à la séparation des pouvoirs car la concentration de tous les pouvoirs dans les seules mains du roi ne peut conduire qu’à des abus. Ils prennent comme modèle la monarchie anglaise, au sein de laquelle le pouvoir du roi est limité par le Parlement et la loi, ce qui limite les décisions arbitraires envers les individus et permet de garantir les libertés individuelles => doc 2 p 235 (Habeas Corpus et Bill of Rights). L’intolérance religieuse est également dénoncée. Les philosophes des Lumières défendent au contraire e droit au blasphème, la libre-conscience, le sens critique et la liberté religieuse. La lecture des textes philosophiques est très répandue, dans tous les milieux sociaux. Phénomène de diffusion et de laïcisation de la lecture. Part des livres de religion dans la production en 1730 : 1/3. En 1780 : 1/10. Notion d’opinion publique naît en France au XVIIIème siècle => multiplication des salons et sociétés littéraires. Politisation de l’opinion publique. Le sens critique commence à s’exercer à l’égard de la société et plus encore de la monarchie absolue Nuance : est-ce les philosophes qui ont fait la Révolution ou la Révolution qui a fait les philosophes. Ne pas oublier que notre vision des Lumières est influencée par la manière dont la Révolution les a utilisés (Voltaire et Rousseau au Panthéon…)

Cours révolution

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Page 1: Cours révolution

THEME 5 :

REVOLUTIONS, LIBERTES, NATIONS, A L’AUBE DE L’EPOQUE

CONTEMPORAINE

Question 1 :

La Révolution française : l’affirmation d’un nouvel univers politique.

I. Contestations, révoltes et révolutions au XVIIIème siècle en Europe et en Amérique.

Comment naît la Révolution française ?

1) Les philosophes ont-ils préparé la Révolution ?

Les philosophes des Lumières critiquent la société d’ordres dans sa globalité : monarchie absolue, place de l’Eglise et

intolérance religieuse, ordres privilégiés.

Au XVIIIème siècle, L’importance et la place de chacun dans la société sont déterminées par la naissance. Le clergé et la

noblesse constituent les ordres privilégiés qui occupent les plus hautes fonctions et prélèvent des impôts sans en payer. Les

philosophes des Lumière affirment au contraire que la place de chacun doit être déterminée par le talent et que tous les

hommes possèdent des droits naturels (liberté et égalité à la naissance).

Les Lumières sont favorables à la séparation des pouvoirs car la concentration de tous les pouvoirs dans les seules mains du roi

ne peut conduire qu’à des abus.

Ils prennent comme modèle la monarchie anglaise, au sein de laquelle le pouvoir du roi est limité par le Parlement et la loi, ce

qui limite les décisions arbitraires envers les individus et permet de garantir les libertés individuelles => doc 2 p 235 (Habeas

Corpus et Bill of Rights).

L’intolérance religieuse est également dénoncée. Les philosophes des Lumières défendent au contraire e droit au blasphème,

la libre-conscience, le sens critique et la liberté religieuse.

La lecture des textes philosophiques est très répandue, dans tous les milieux sociaux. Phénomène de diffusion et de laïcisation

de la lecture. Part des livres de religion dans la production en 1730 : 1/3. En 1780 : 1/10.

Notion d’opinion publique naît en France au XVIIIème siècle => multiplication des salons et sociétés littéraires. Politisation de

l’opinion publique. Le sens critique commence à s’exercer à l’égard de la société et plus encore de la monarchie absolue

Nuance : est-ce les philosophes qui ont fait la Révolution ou la Révolution qui a fait les philosophes. Ne pas oublier que notre

vision des Lumières est influencée par la manière dont la Révolution les a utilisés (Voltaire et Rousseau au Panthéon…)

Page 2: Cours révolution

2) L’influence de la Révolution américaine.

La Révolution américaine présente 2 faces :

- D’abord une guerre d’indépendance contre l’Angleterre gagnée en 1783.

- Puis une révolution politique avec la mise ne place d’institutions nouvelles.

Inspirée par les idées des Lumières, la déclaration d’indépendance américaine met en avant officiellement les libertés

individuelles. Les Etats-Unis sont les premiers au monde à proclamer des droits de l’homme et du citoyen d’une portée

universelle. Ils inventent à partir de 1787 la démocratie représentative, avec une Constitution qui met en place une

République où la séparation des pouvoirs est appliquée.

L’évènement a un grand retentissement en Europe et particulièrement en France car, paradoxalement, c’est le roi de France,

monarque absolu, qui a permis aux Américains de gagner leur indépendance et de faire leur révolution. En effet, pour

s’opposer à son vieil ennemi anglais, Louis XVI décide d’envoyer le marquis de La Fayette, proclamé « défenseur de la liberté »

se battre aux côtés des Américains révoltés.

En France, l’exemple américain suscite beaucoup d’espoir et engendre de nouvelles aspirations du peuple français qui réclame

les mêmes libertés. Pour les élites, les Etats-Unis deviennent un modèle à imiter et pour le peuple, La Fayette ne pouvait être

que le défenseur de la liberté.

En intervenant aux côtés des Américains et en contribuant à l’édification d’un pays libre inspiré par les idées des Lumières,

Louis XVI n’a fait qu’accentuer les contestations et le désir de réforme.

3) Les difficultés de la monarchie.

Au début de l’année 1789, la France est confrontée à 3 crises majeures : - Crise politique et budgétaire : la France connaît un grave déficit budgétaire (la guerre pour aider les Américains a

coûté cher), les dépenses de la Cour sont toujours aussi importantes : soit 7 % de la richesse du Royaume. Il est

nécessaire de réformer la fiscalité, mais les réformateurs se heurtent à l’opposition de la noblesse qui refuse la remise

en cause de ses privilèges fiscaux. De plus,

- Crise agricole : depuis 1785 les conditions climatiques sont rigoureuses (sécheresse, pluies diluviennes, hiver

1788/1789 très froid), si bien que les récoltes sont insuffisantes et celle de 1788 calamiteuses. Les petits paysans ne peuvent plus approvisionner les villes. On assiste à une flambée brutale des prix des grains plongeant le pays dans une disette. On voit à cette époque une augmentation des émeutes, des pillages devant cette crise de subsistances. L’agitation populaire est vive dans les villes et les campagnes.

- Crise sociale : face à la crise, les nobles ont tendance à demander encore plus de redevances à leurs paysans ce qui

engendre là aussi des émeutes. La bourgeoisie conteste de plus en plus les privilèges de la noblesse. La bourgeoisie réclame plus de reconnaissance et un accès au pouvoir (réservé à la noblesse).

De même, l’influence des idées des Lumières ainsi que les espérances nées de la révolution américaine accentuent les

contestations.

On assiste également à une baisse de la sacralité liée à la personne du roi. Louis XVI est considéré comme un roi faible

entraînant une crise d’autorité. On n’hésite plus à critiquer le roi.

Il y a également un phénomène de déchristianisation qui entraîne une baisse du sentiment religieux et donc une

soumission moins importante au clergé.

Page 3: Cours révolution

II. La dynamique révolutionnaire entre 1789 et 1804.

Que nous apprennent quelques journées révolutionnaires sur les grands enjeux politiques de la période ?

1) La fuite de Varennes (21 juin 1791)

Pourquoi le roi prend-il la décision de fuir le royaume ?

Les faits :

Le roi Louis XVI s’enfuit du château des Tuileries le 20 juin 1791. Son objectif est de rejoindre l’armée des émigrés (Nobles et

monarchistes qui se sont enfuit du royaume depuis 1789) pour reconquérir son trône car il n’accepte pas la limitation de son

pouvoir par l’Assemblée nationale. Cependant sa tentative échoue car il est arrêté à Varennes dans la Meuse le lendemain et

ramené à Paris.

Le contexte :

Depuis 1789 les pouvoirs du roi ont été fortement limités par l’Assemblée nationale.

Rappel : Le 17 juin 1789, les députés du tiers-état + quelques députés des ordres privilégiés aux Etats généraux se proclament

« Assemblée nationale » pour protester contre l’attitude du roi et son refus de réformer le royaume. L’Assemblée nationale

affirme représenter la Nation et détenir la souveraineté nationale.

Le 20 juin 1789, les députés font le serment, dans la salle du Jeu de Paume, de donner une Constitution à la France, comme

aux Etats-Unis. L’Assemblée devient Assemblée nationale constituante.

Face à l’intransigeance du roi, des révoltes ont lieu pendant l’été : prise de la Bastille le 14 juillet et attaques de châteaux dans

les campagnes.

Le 4 août, l’Assemblée vote l’abolition des privilèges. C’est la fin de la société d’ordres.

Le 26 août, les députés proclament la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen => égalité devant la loi.

Lors des journées d’Octobre, le peuple de Paris envahit le château de Versailles et ramène le roi à Paris, au château des

Tuileries où il se sent prisonnier.

Le 14 juillet 1790, pour célébrer le 1er anniversaire de la prise de la Bastille, le roi est contraint de participer à la Fête de la

Fédération. La Révolution semble terminée car le roi accepte la limitation de son pouvoir et l’établissement d’une monarchie

constitutionnelle. A cette occasion, il promet de maintenir la Constitution et de faire respecter les lois. Il n’est plus « roi de

France » mais « roi des Français ».

Les conséquences :

La fuite de Varennes révèle le double-jeu du roi qui n’accepte qu’en apparence la Révolution. Les positions se radicalisent : de

nombreux débats ont lieu à l’Assemblée et dans les clubs, comme celui des Jacobins, sur la place à réserver au roi. Alors que la

Constitution est adoptée en septembre 1791, l’Assemblée refuse de traiter le roi en coupable (en essayant de faire croire que

le roi a été enlevé) alors que d’autres députés réclament désormais une République.

Le roi perd la confiance de la Nation et ses liens de connivence avec les monarchies étrangères et le pape Pie VI, très hostile à

la Révolution, sont révélés. Le roi apparaît comme un traître à la Nation.

Parallèlement, la radicalisation alimente la Contre-Révolution (Vendée, Bretagne, Sud-est).

La fuite du roi révèle également le danger que représentent les aristocrates émigrés, soutenus par l’Autriche, qui menacent

d’envahir le royaume pour rétablir la monarchie absolue.

Paradoxalement, le 20 avril 1792, l’Assemblée déclare la guerre à l’Autriche et à la Prusse, sur proposition de Louis XVI :

l’Assemblée espère éloigner le danger, souder la Nation contre un ennemi commun (propagande révolutionnaire) et libérer les

peuples européens de leurs « tyrans », alors que le roi espère une défaite rapide pour retrouver son pouvoir.

Page 4: Cours révolution

2) La mort du roi (21 janvier 1793)

Les faits :

Le 19 janvier 1793, la Convention nationale vote la mort du roi. Le 21 janvier 1793, Louis XVI est décapité en place publique,

sur l’actuelle place de la Concorde à Paris.

Le contexte :

Depuis la fuite de Varennes, le roi a perdu la confiance des Français.

Le 27 août 1791, par la déclaration de Pillnitz, l’Autriche et la Prusse présentent la France comme un danger pour l’Europe.

Le 20 avril 1792, l’Assemblée déclare la guerre à l’Autriche. C’est une déroute pour les armées françaises et une partie du

territoire est envahi par les Autrichiens. Le roi, qui joue un double-jeu, use de son droit de veto pour bloquer les décisions de

l’Assemblée visant à organiser la défense nationale.

La publication du manifeste de Brunswick provoque la colère du peuple parisien qui attaque le château des Tuileries le 10 août

1792. Le roi est enfermé à la prison du Temple et l’Assemblée vote sa déchéance : c’est la fin effective de la monarchie.

Les positions se radicalisent dans un contexte de panique face à l’invasion austro-prussienne et de rumeurs de complot

monarchiste => massacres de septembre (1300 morts, soit la moitié de la population carcérale).

Le 20 septembre, les armées révolutionnaires remportent la bataille de Valmy.

Le lendemain, une nouvelle Assemblée, la Convention nationale, abolit officiellement la monarchie et proclame la République.

La question se pose alors de ce que l’on va faire du roi => Vidéo

Les conséquences :

- Pour les députés Montagnards (favorables à la mort du roi), l’exécution du roi doit être un sacrifice fondateur, la

réponse à l’inviolabilité du corps sacré du roi. Pour eux, le roi doit mourir pour que s’établisse l’égalité entre les

citoyens d’un peuple régénéré. D’ailleurs, le roi est exécuté par la guillotine, la machine de l’égalité républicaine.

- L’exécution du roi réactive la guerre avec les monarchies d’Europe => l’Angleterre, les Provinces-Unies et l’Espagne

rejoignent la coalition contre la France.

- La Contre-Révolution s’accentue, notamment dans l’Ouest, avec l’insurrection des Vendéens. Insurrection

monarchique et catholique. On estime que la guerre de Vendée fit 200 000 morts.

- Septembre 1793 : Robespierre, chef de file des Montagnards et président de la Convention met « la terreur à l’ordre

du jour » => loi des suspects. Mise en place de tribunaux révolutionnaires qui deviennent l’instrument de la Terreur.

Radicalisation politique : affrontements violents entre députés montagnards et girondins à l’Assemblée. Les Girondins,

qui ont été hostiles à l’exécution du roi, sont accusés d’être des ennemis du peuple. Une trentaine sont guillotinés en

octobre-novembre.

Bilan : 17 000 condamnés à mort, 23 000 exécutées sans jugement.

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3) Le coup d’Etat du 18 Brumaire (9 novembre 1799)

Les faits :

Le 18 Brumaire an VIII (9 novembre 1799), le général Bonaparte met fin au Directoire par un coup d’Etat : il arrête les députés

et dissous le Conseil des Cinq-Cents. Il met en place un régime autoritaire, le Consulat et se nomme Premier Consul.

Par plébiscite, le peuple légitime son pouvoir.

Le contexte :

- Après la chute de Robespierre le 9 Thermidor an II (27 juillet 1794) et la fin de la Terreur, une nouvelle Constitution

met en place le Directoire.

- Le Directoire est un régime de compromis, faible, instable, qui ne parvient pas à réconcilier les Français.

- Cependant, sous le Directoire les armées françaises sont désormais victorieuses sur les champs de bataille. La France

annexe la Belgique et le Nord de l’Italie et forme un glacis protecteur de « Républiques-sœurs ». Les historiens

pensent aujourd’hui que la volonté du Directoire n’était pas de républicaniser l’Europe ou de libérer les peuples de

l’Europe de leurs monarques mais au contraire de pacifier l’Europe. Pour obtenir la paix, il faut d’abord être en

position de force et donc gagner la guerre.

- Parmi les généraux qui ont permis ces victoires, le général Bonaparte devient très populaire à la suite des campagnes

d’Italie et de l’expédition d’Egypte. A son retour, il estime que les conditions d’un coup d’Etat sont réunies.

Les conséquences :

- Bonaparte met en place un régime autoritaire, avec un exécutif fort, pour « terminer la Révolution ».

- Certains principes de 1789 sont remis en cause : séparation des pouvoirs (car le Premier Consul concentre l’essentiel

des pouvoirs), liberté d’expression avec le rétablissement de la censure, égalité avec le rétablissement de l’esclavage

dans les colonies. Cependant, Bonaparte exprime officiellement son attachement aux acquis de la Révolution (par

exemple, il continue de signer ses actes au nom de la République qui n’est pas officiellement abolie).

- Il parvient à apaiser les divisions des Français : retour des émigrés, mise en place du Concordat qui reconnait le

catholicisme comme religion « majoritaire » (et non d’Etat) des Français, du Code civil qui fournit un socle juridique à

la société.

- Il réorganise profondément la Nation : Code civil, Concordat, création des préfets, de la Légion d’honneur, des lycées,

de la Banque de France, du Franc germinal

- Rétablissement d’une nouvelle forme de monarchie : l’Empire => Bonaparte se fait sacrer empereur des Français le 2

décembre 1804.

Page 6: Cours révolution

III. Profondeur et limites de la rupture révolutionnaire.

Quels sont les bouleversements opérés par la Révolution française ?

1) Un nouveau cadre sociétal.

Votée le 26 août 1789, la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen met en place de nouveaux principes de base de la

société : libertés individuelles (expression, culte, propriété…), égalité devant la loi (et la justice), et souveraineté nationale (le

peuple gouverne via l’Assemblée). Les Juifs et les Protestants sont intégrés à la Nation.

L’esclavage est supprimé (mais rétabli en 1802 par Bonaparte).

La DDHC entérine la suppression de la société d’ordres (abolition des privilèges le 4 août 1789).

La Révolution a permis l’ascension de la bourgeoisie. C’est elle qui gouverne le pays entre 1789 et 1792 et sous le Directoire.

Cependant, la noblesse conserve ses richesses et son prestige social, notamment dans les campagnes, où les paysans restent

attachés au petit clergé et à la petite noblesse.

Les circonscriptions d’Ancien régime sont remplacées par une nouvelle hiérarchie administrative : création des communes,

cantons, districts, départements. Elles sont dirigées par des fonctionnaires élus.

Napoléon Bonaparte achève cette réorganisation en mettant en place un Etat centralisé avec des fonctionnaires nommés,

comme les préfets.

Le Code civil unifie le droit (cf EDC pp 276-277) et une monnaie unique est créée.

2) La place de l’Eglise.

Tout au long du XVIIIème siècle, l’Eglise est critiquée, notamment par les philosophes des Lumières qui dénoncent les abus du

clergé (dîme…) et l’intolérance religieuse (affaire Calas, affaire du chevalier de La Barre…)

Avec la Révolution, l’Eglise perd sont statut de 1er ordre de la société française. Le 4 août 1789, elle perd ses privilèges. En

novembre, les biens de l’Eglise sont confisqués et deviennent biens nationaux.

En juillet 1790, la Constitution civile du clergé prévoit que les prêtres et les évêques prêtent un serment de fidélité à la Nation

et à la loi et respectent la Constitution. Par ailleurs, le clergé ne sera plus nommé par l’Eglise mais élu. Le pape Pie VI

condamne ce texte.

1 prêtre sur 2 refuse de prêter serment : ce sont les « prêtres réfractaires » qui alimentent les révoltes contre-

révolutionnaires, notamment dans l’Ouest et participent à la guerre de Vendée à partir de 1793.

Sous la Terreur, la République tente de déchristianiser le pays en fermant les églises et en créant une nouvelle religion d’Etat :

le culte de l’Etre suprême.

Pour rétablir la paix religieuse, Bonaparte signe en 1801 un Concordat avec le pape Pie VII. Il garantit à l'Eglise le libre exercice

du culte.

Les évêques et les curés reçoivent un salaire de l'Etat et prêtent serment de fidélité au Premier Consul.

L’exercice des autres cultes est autorisé.

La place de l’Eglise divise les Français durant tout le XIXème siècle, au gré des successions de régimes politiques, jusqu’à la loi

de séparation des Eglises et de l’Etat de 1905 qui met en place la laïcité.

Page 7: Cours révolution

3) La politisation de la population.

En 1795, à la veille de la rédaction de la Constitution de l’an III (Constitution dite « bourgeoise ») qui doit tourner la page de la

Terreur, le peuple (la populace) est désigné comme responsable des débordements et des horreurs de la Terreur. Par

opposition aux « honnêtes gens », le peuple est qualifié de barbare, composé de brutes. Comme le dit Boissy d’Anglas, « il faut

mettre à l’abri de la populace assoiffée de vin et de sang la République des meilleurs ».

Cette image d’un peuple violent par nature doit être nuancée car les revendications du peuple, de plus en plus nombreuses

tout au long du XVIIIème siècle, s’expriment le plus souvent dans le cadre judicaire plutôt que par la violence (même si les

révoltes, notamment paysannes, sont nombreuses).

Durant la Révolution émerge une nouvelle figure populaire : le militant sans-culotte. Il est acteur des journées

révolutionnaires, se mobilise sur les questions concrètes de la vie chère, de la défense du pain et du vin pour tous, de la

taxation des loyers, de la limitation du droit de propriété… Il prône une égalité de fait, le tutoiement, la prise de parole

démocratique dans les sections révolutionnaires. (cf texte anonyme)

Ce peuple politisé se soucie avant tout de sa vie matérielle : inflation du prix des produits de première nécessité (pain, savon,

sucre…).

C’est aussi un peuple qui écoute et commente quasiment en direct les discussions de l’Assemblée.

En 1793, 62 % des chefs-lieux de canton disposent de sociétés politiques : on y discute des pétitions à envoyer à l’Assemblée,

on y lit la presse, on échange des idées, on dénonce les agissements contre-révolutionnaires, on critique l’Eglise…

De commentateur, le peuple devient parfois acteur de la Révolution (cf Daniel Roche). Ces actions témoignent d’un véritable

apprentissage politique. C’est ce qui se passe le 20 juin 1792 aux Tuileries ou le 13 novembre 1790 (la foule parisienne détruit

l’hôtel du duc de Castries qui a blessé en duel le patriote Lameth. A l’Assemblée, Mirabeau critique ces élites peu

respectueuses de la loi, car le duel était interdit, et approuve le peuple qui, en se réappropriant la puissance juridique, juge par

lui-même « comme le faisaient les peuples de l’Antiquité, les Romains, les Grecs et les Hébreux ».)

Le peuple est acteur des grandes journées révolutionnaires :

- Prise de la Bastille : peuple mécontent du renvoi de Necker par le roi + crise agricole à son apogée. Le peuple s’en

prends à cette prison-forteresse car elle contient des armes mais aussi parce qu’elle est un symbole de l’arbitraire

royal.

- Journées d’octobre 1789 : Une foule, essentiellement féminine, quitte Paris pour Versailles afin de réclamer du roi la

ratification des décrets du 4 août et de la DDHC et se plaindre du prix du pain. Elles contraignent Louis XVI à quitter

Versailles pour les Tuileries.

- Le 20 juin 1792, les sans-culottes, inquiets des défaites militaires qui s’accumulent contre les Prussiens (la guerre est

déclarée depuis le 20 avril), envahissent les Tuileries car le roi s’est opposé à des décisions de l’Assemblée nationale.

Ils contraignent le roi à porter le bonnet phrygien et de lever son verre à la patrie.

- Le 10 août 1792 : Les sans-culottes, qui ont pris connaissance du manifeste de Brunswick, prennent d’assaut le palais

des Tuileries. L’Assemblée vote la suspension du roi et l’emprisonne. Là encore, l’action populaire a précédé et a

accéléré les décisions politiques.

- 31 mai 1793, le peuple en armes pénètre à la Convention et obtient l’arrestation des chefs girondins dont la plupart

seront guillotinés.

- Le 20 mai 1795, après la chute de Robespierre, la foule pénètre de nouveau à la Convention pour réclamer

l’application de la Constitution de 1793.

Les femmes ont également été actrices de la Révolution. Elles sont pris part aux grandes journées révolutionnaires

(notamment celles d’octobre 1789). Des clubs de femmes, où l’on parle politique, sont fondés partout en France. Les femmes

sont nombreuses dans les tribunes de l’Assemblée, de la Convention ou pour assister aux séances du Tribunal révolutionnaire.

Olympe de Gouges ou Madame Roland jouent un grand rôle politique.

Après la Révolution, le peuple est une entité politique. Il ne sera plus jamais comparable à la masse des sujets de 1789.

Page 8: Cours révolution

4) Les débats sur le droit de vote et l’éducation.

La question du peuple souverain, donc du droit de vote, se pose dès 1789, et plus précisément depuis le vote de la DDHC qui

introduit l’idée d’une égalité de tous les citoyens. Cependant, dans un pays de 27 millions d’habitants, la démocratie directe

(modèle antique) est impossible. Se pose alors la question du système représentatif. Sièyes affirme qu’il est possible de

concilier la souveraineté de la Nation avec le système représentatif. L’idée est que le peuple possède le pouvoir constituant,

les représentants possèdent le pouvoir législatif.

Ainsi il est reconnu que le peuple possède le pouvoir constituant, mais tout est fait pour qu’il ne l’exerce pas car c’est une

source de révolution. Or la Révolution, il faut la terminer et non pas la recommencer.

C’est la raison pour laquelle en 1790, le suffrage censitaire indirect est établi : seuls les hommes qui payent une contribution

de 3 jours de travail peuvent voter, c'est-à-dire 4 millions d’électeurs.

Le vote est considéré comme une fonction, non comme un droit. Or pour exercer une fonction, il faut disposer de certaines

qualités et compétences, notamment la capacité de décider de son propre destin, d’être indépendant, donc de disposer d’un

certain bien.

L’idée des Constituants, qui se méfient du peuple et de sa violence, est que la Constitution est trop compliquée pour que le

peuple puisse comprendre toutes ses nuances. Le peuple est certes souverain, mais il est considéré d’une certaines manière

comme un mineur dont les représentants seraient les tuteurs.

Paradoxalement, malgré la proclamation de l’universalité des droits de l’homme, les femmes sont exclues de la vie politique,

alors que c’est de la Révolution que date leur émancipation avec la naissance du féminisme.

Les arguments utilisés pour justifier l’exclusion des femmes de la vie politique tiennent à la misogynie => texte du député

Chaumette.

En 1790, les congrégations religieuses sont interdites et la Constitution civile du clergé écarte les prêtres réfractaires de

l’enseignement => Décret du 22 mars 1791

Une instruction publique élémentaire gratuite est mise en place, mais pas obligatoire => Rapport sur l’Instruction publique,

1791.

La Constitution de 1791 insiste sur la nécessité de l'instruction universelle et gratuite.

A l’initiative de Condorcet, un débat s'engage sur plusieurs points, notamment autour de la laïcité des programmes qui est

finalement adopté => texte Condorcet.

Condorcet est également favorable à la cause des femmes, notamment en matière d’éducation de vote

Le 10 août 1792, le suffrage universel masculin est proclamé pour l’élection des députés de la Convention. Cependant, la

participation est faible. Pourquoi cette abstention massive ? => l’essentiel de la population française baigne encore largement

dans un environnement culturel et sociologique traditionnel et n’est pas « éduquée » à la démocratie.

En 1795, le suffrage censitaire est rétabli. Désormais, il faut aussi savoir lire et écrire.

Sous le Consulat et l’Empire, Napoléon Bonaparte rétablit le suffrage universel masculin mais ne l’utilise que pour le plébiscite.

En matière de droits des femmes, le Code civil est une régression. Il place la femme sous l’autorité de son mari et cantonne

son action dans la sphère domestique.

Le suffrage universel masculin n’est rétabli qu’en 1848, notamment pour l’élection du président de la République, puis

fortement limité sous le Second Empire

Il est véritablement rétabli en 1870, et appliqué pour les femmes en 1944.

Les lois Ferry de 1881-1882 mettent en place l’école obligatoire, gratuite et laïque => Texte Jules Barni.

L’objectif est triple :

- Unifier la Nation et développer le sentiment national

- Diffuser les valeurs républicaines

- Favoriser la méritocratie.