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Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

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Page 1: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

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Analyse de la situation des enfantsen Tunisie2012

Page 3: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

LISTE DES TABLEAUX ET DES GRAPHIQUES 7LISTE DES ABRÉVIATIONS ET DES ACRONYMES 9AVANT-PROPOS 11RÉSUMÉ 13INTRODUCTION 19

1. LE CONTEXTE GENERAL ET LES POLITIQUES NATIONALES 23

1.1 LE CONTEXTE NATIONAL ET L’ENVIRONNEMENT DE L’ENFANT 231.1.1 Le contexte démographique : l’achèvement de la transition démographique 231.1.2 Le contexte économique et social 241.1.3 Le contexte politique : avancées en matière de législation en faveur de l’enfance 281.2 LA POLITIQUE NATIONALE EN FAVEUR DES ENFANTS ET DES JEUNES 291.2.1 Les acteurs 291.2.2 L’engagement en faveur des conventions et accords internationaux sur les droits de l’enfant 311.2.3 La politique sociale et l’état de la pauvreté et de la vulnérabilité 34

2. LE DROIT A LA SURVIE ET A LA SANTE 39

2.1 LA SANTE DE LA MERE ET DE L’ENFANT, ETAT DES LIEUX 392.1.1 La santé de la mère 392.1.2 La santé des enfants 412.2 L’ENGAGEMENT PUBLIC, L’ACCES AUX SOINS PRIMAIRES 452.2.1 Les stratégies et les programmes nationaux ciblés sur l’enfant 452.2.2 L'accès aux soins et les progrès en infrastructures sanitaires 462.3 LES PROBLEMES ET LES DEFIS 482.3.1 La mortalité néonatale, le handicap et les maladies liées à la nutrition 492.3.2 Les principales analyses causales 502.4 ANALYSE DES ECARTS DE CAPACITES ET RECOMMANDATIONS 522.4.1 Les acteurs publics : Les principaux écarts de capacité 522.4.2 Les ayants droit : les principaux écarts de capacité 542.4.3 Recommandations 56

3. LE DROIT A L’EDUCATION ET AU DEVELOPPEMENT 57

3.1 EVOLUTION ET POLITIQUES PUBLIQUES 573.1.1 Le préscolaire 573.1.2 L’enseignement de base et l’enseignement secondaire 613.1.3 Programmes spécifiques : l’insertion des handicapés et le PNEA 643.2 PROBLEMES ET DEFIS 663.2.1 Accès à une éducation préscolaire de qualité 663.2.2 Efficacité interne du système éducatif 673.2.3 Qualité de l’enseignement 693.3 ANALYSE DES ECARTS DE CAPACITES ET RECOMMANDATIONS 713.3.1 Les principales analyses causales 713.3.2 Les acteurs publics : les principaux écarts de capacité 733.3.3 Les ayants droit : les principaux écarts de capacité 773.3.4 Recommandations 78

4. LE DROIT AUX LOISIRS ET A LA PARTICIPATION 81

4.1 ACCES AUX LOISIRS ET AUX ACTIVITES CULTURELLES 814.1.1 Les moyens matériels et financiers 814.1.2 Les loisirs des enfants en âge préscolaire et scolaire 834.1.3 Loisirs et activités récréatives des adolescents et jeunes 86

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SOMMAIRE

Page 4: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

4.2 SPORT POUR TOUS : UN DEFI 924.2.1 Le sport scolaire et universitaire 924.2.2 Le sport en dehors des structures scolaires 934.3 LE RAPPORT AUX MEDIAS 934.3.1 Le paysage médiatique 944.3.2 Les représentations médiatiques des enfants, des adolescents et des jeunes 964.3.3 La participation des enfants, des adolescents et des jeunes dans les médias 974.3.4 Perception des médias par les enfants 984.4 PARTICIPATION ET CITOYENNETE 994.4.1 Vers une consolidation de la participation chez les enfants et les jeunes 1004.4.2 Participation au sein de la famille 1004.4.3 Participation au sein de l’école 1014.4.4 Participation à la vie associative et politique 1014.5 ANALYSE DES ECARTS DE CAPACITES ET RECOMMANDATIONS 1034.5.1 Analyse causale 1034.5.2 Analyse des écarts des capacités 1054.5.3 Recommandations 107

5. LE DROIT A LA PROTECTION 109

5.1 RAPPEL DE L’ENVIRONNEMENT PROTECTEUR 1095.1.1 Engagement du gouvernement 1095.1.2 Législation et application de la loi 1105.1.3 Poids des traditions 1115.1.4 Discussions ouvertes et débats 1115.1.5 Habilitation des enfants, familles et communautés 1115.1.6 Les services de base 1125.1.7 Les réseaux de protection et le suivi 1135.2 SITUATIONS SPECIFIQUES ET DROITS A LA PROTECTION 1135.2.1 Droit de l’enfant privé de soutien familial 1135.2.2 Situations de maltraitance 1165.2.3 L’enfant en situation de rue 1185.2.4 Situation de l’enfant exploité économiquement et sexuellement 1205.2.5 Situation de l’enfant en conflit avec la loi 1225.2.6 Situation de l’enfant handicapé 1245.3 ANALYSE DES ECARTS DE CAPACITES ET RECOMMANDATIONS 1255.3.1 Analyse des écarts 1255.3.2 Recommandations 131

6. DEFIS ET OPPORTUNITES DE LA TRANSITION : LES JEUNES 133

6.1 LES SIGNES DE LA TRANSITION 1336.2 LES NOUVEAUX COMPORTEMENTS 1346.2.1 La santé des adolescents et des jeunes 1346.2.2 Les comportements à risque 1386.3 LES DIFFICULTES D’INTEGRATION 1426.3.1 La formation professionnelle et l’enseignement supérieur 1436.3.2 Défis de l’insertion dans le marché de l’emploi 1456.3.3 Le chômage et les jeunes 1466.3.4 Analyse causale 150

CONCLUSION : LA NECESSAIRE RENOVATION 153

BIBLIOGRAPHIE 157

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Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

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Tableau 1 : La Tunisie et les conventions internationales dans le domaine du droit humain 32Tableau 2 : Principaux indicateurs de l’état de santé des enfants 41Tableau 3 : Mortalité infantile, détenteurs de droits et détenteurs d’obligations 55Tableau 4 : Mortalité maternelle, détenteurs de droits et détenteurs d’obligations 55Tableau 5 : Principaux indicateurs de l’évolution de l’enseignement primaire 63Tableau 6 : Principaux indicateurs de l’évolution de l’enseignement moyen et secondaire 63Tableau 7 : Le préscolaire : détenteurs de droits et débiteurs d’obligations 72Tableau 8 : Évolution des activités des bibliothèques pour enfants 84Tableau 9 : Évolution de l’éducation physique dans les écoles primaires 92Tableau 10 : Droit aux loisirs, aux activités récréatives et au sport, principaux écarts de capacité par obligataire 105Tableau 11 : Droit à la participation, principaux écarts de capacité par obligataire 106Tableau 12 : Principaux indicateurs de l’état de santé des adolescents et des jeunes 135Tableau 13 : Évolution du nombre des chômeurs et du taux de chômage par niveau d’instruction 147Tableau 14 : L’insertion professionnelle des jeunes : détenteurs de droits et débiteurs d’obligations 151

Graphique 1 : Tunisie : Pyramide des âges (2010) 23Graphique 2 : Projection de la population des enfants, adolescents et jeunes 23Graphique 3 : Projection des poids des populations âgées de moins de 15 ans et de plus de 60 ans 24Graphique 4 : Évolution comparée de la croissance économique et du croît démographique (1980-2010) 24Graphique 5 : Évolution de la population tunisienne et du PIB/tête (1970-2010) 25Graphique 6 : Évolution des réserves en devises (2000-2011) 26Graphique 7 : Évolution des recettes touristiques (2005-2010 et 7 premiers mois 2011) 26Graphique 8 : Évolution des revenus du travail (2005-2010 et 7 premiers mois 2011) 26Graphique 9 : Évolution du taux de croissance 27Graphique 10 : Évolution du déficit public 27Graphique 11 : Évolution du taux de chômage 27Graphique 12 : Taux et seuils de pauvreté (2005) 36Graphique 13 : Taux de mortalité maternelle : Évolution et OMD 39Graphique 14 : Taux de consultation prénatale (2006) 40Graphique 15 : Proportion d’accouchements survenus dans des structures de soins (2006) 40Graphique 16 : Taux de surveillance postnatale (2006) 40Graphique 17 : Prévalence contraceptive 1995 et 2006 41Graphique 18 : Évolution du taux de mortalité infantile et des moins de 5ans 42Graphique 19 : Taux de mortalité des moins de 5 ans : Évolution et OMD 42Graphique 20 : Diminution de la mortalité post néonatale entre 1974 et 2004 42Graphique 21 : Évolution du nombre des handicapés per tranche d’âge entre 1999 et 2003 43Graphique 22 : Taux de couverture des enfants par les principaux vaccins (2009) 47Graphique 23 : Couverture par les principaux vaccins, comparaison internationale (2007) 47Graphique 24 : Évolution du nombre d'habitants par médecin 47Graphique 25 : Évolution du nombre de lits actifs d’hôpitaux pour 1000 habitants 47Graphique 26 : Répartition par gouvernorat du nombre de lits pour 1000 habitants et du nombre des CSB pour 10 000 habitants (2007) 48Graphique 27 : Répartition par gouvernorat de la densité du personnel médical et paramédical (2007) 48Graphique 28 : Causes essentielles de la morbidité infantile et des décès des enfants de moins de 5 ans (2006) 49Graphique 29 : Évolution des dépenses publiques de santé en proportion du PIB et du Budget de l’État 52Graphique 30 : Évolution du nombre des jardins d’enfants (1995-2009) 58Graphique 31 : Évolution du nombre des enfants inscrits dans les jardins d’enfants (1995-2009) 58Graphique 32 : Évolution du taux de couverture par les jardins d’enfants (tranche d’âge 3 à 5 ans) 58Graphique 33 : Évolution du nombre d’écoles intégrant l’année préparatoire 60Graphique 34 : Évolution des élèves inscrits en année préparatoire (secteur public) 60Graphique 35 : Taux de couverture par l’année préparatoire : secteur public 60Graphique 36 : Structure de la répartition des inscriptions en année préparatoire par acteur (2008-2009) 60Graphique 37 : Proportion des filles à l’enseignement de base et secondaire 62Graphique 38 : Évolution des effectifs élèves à l’enseignement primaire 62Graphique 39 : Évolution des effectifs élèves à l’enseignement moyen et secondaire 62Graphique 40 : Évolution de la taille moyenne des divisions pédagogiques et du ratio du nombre d’élèves par enseignant 63Graphique 41 : Taux nets de scolarisation des enfants par tranche d’âge (2009-2010) 64Graphique 42 : Écoles intégrantes et élèves handicapés intégrés par niveau d’enseignement (2008-2009) 64Graphique 43 : Évolution du taux d’analphabétisme des 10 ans et plus 65Graphique 44 : Taux de redoublement et d’abandon à l’enseignement primaire 67Graphique 45 : Taux de redoublement et d’abandon au second cycle de l’enseignement de base 68Graphique 46 : Taux de redoublement et d’abandon à l’enseignement secondaire 68Graphique 47 : TIMSS-Math, scores de la Tunisie 72Graphique 48 : TIMSS-Sciences, scores de la Tunisie 70Graphique 49 : Résultats PISA 2009, positionnement de la Tunisie 70

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Liste des tableaux et des graphiques

Page 6: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

Graphique 50 : Évolution des dépenses publiques d’éducation en proportion du PIB et en pourcentage des dépenses publiques totales (2001-2010) 74Graphique 51 : Dépenses publiques d’éducation en proportion du PIB et des dépenses publiques totales : comparaison internationale 75Graphique 52 : DPA Éducation par décile de dépense en dinars et en % des dépenses totales 75Graphique 53 : Structure des dépenses privées d’éducation 75Graphique 54 : Taux de pénétration des ordinateurs dans les ménages et nombre d’ordinateurs pour 100 habitants 82Graphique 55 : Taux d’équipement des ménages en PC et taux d’utilisateurs d’internet par gouvernorat (2004) 82Graphique 56 : Appréciation des jeunes de leur situation financière (2000) 83Graphique 57 : Taux d’équipement des écoles primaires en bibliothèques et nombre de livres pour 1000 élèves (2007) 84Graphique 58 : Évolution des ratios du nombre d’élèves par ordinateur dans les écoles primaires, les collèges et les lycées (2004-2010) 85Graphique 59 : Clubs d’enfants gérés par le MAF et les clubs existant dans les écoles primaires (2008) 86Graphique 60 : Répartition des bibliothèques publiques nombre de bibliothèques pour 100 000 habitants (2008) 87Graphique 61 : Loisirs préférés par les jeunes (2005) 87Graphique 62 : Taux de pénétration de l’internet dans les ménages et nombre d’abonnés à l’internet pour 100 habitants 88Graphique 63 : Évolution du nombre d’abonnés aux réseaux téléphoniques fixes et mobiles 88Graphique 64 : Clubs dans les collèges et les lycées (2008) 89Graphique 65 : Taux d’équipement des écoles primaires, des collèges et des lycées en terrain de sport (2010) 92Graphique 66 : Durée journalière d’écoute de la télévision en 2005 95Graphique 67 : Évolution du nombre d'unités rédactionnelles par quotidien entre 1998 et 2008 96Graphique 68 : Répartition des unités rédactionnelles par catégorie d'âge 96Graphique 69 : Espaces où les jeunes s’expriment (2005) 101Graphique 70 : Taux de participation des jeunes à la vie politique et publique (2005) 102Graphique 71 : Jeunes et participation aux élections (2005) 102Graphique 72 : Modes d’intégration des enfants 0-6 ans privés de soutien familial (structure moyenne 2007 et 2008) 114Graphique 73 : Motifs d’intégration des enfants 6-18ans dans les complexes de l’enfance et les CIJE pour l’année 2008 115Graphique 74 : Place de l’agriculture dans le PIB (Valeur ajoutée agricole en % du PIB) 133Graphique 75 : Évolution du Revenu National Brut par habitant (méthode Atlas - en $ US courants) 133Graphique 76 : Évolution du positionnement de la Tunisie par rapport aux autres pays en termes d’IDH entre 1980 et 2010 134Graphique 77 : Évolution des infections au VIH/Sida 135Graphique 78 : Modes de transmission du VIH/Sida 135Graphique 79 : Répartition par tranche d’âge de la prévalence du VIH/Sida en Tunisie (2009) 136Graphique 80 : Répartition par âge et sexe de la prévalence du VIH/Sida en Tunisie (2004) 136Graphique 81 : Évolution du nombre d’accidents de circulation et du nombre de blessés et de tués 138Graphique 82 : Évolution des ratios du nombre de blessés et de tués pour 100 accidents de circulation 138Graphique 83 : Taux de consommation des drogues chez les jeunes âgés de 15 à 24 ans (2005) 140Graphique 84 : Évolution des apprenants inscrits dans les centres publics relevant de l’ATFP (1995-2008) 143Graphique 85 : Évolution des effectifs des étudiants et du nombre de diplômés (2000-2010) 144Graphique 86 : Évolution du nombre des diplômés du supérieur parmi les chômeurs 146Graphique 87 : Taux de chômage par tranche d’âge (2010) 146Graphique 88 : Taux de chômage des jeunes (15-24 ans) selon l’ancienne et la nouvelle définition 148Graphique 89 : Évolution des taux de chômage des jeunes (15-24 ans) et des adultes (25 ans et plus) 148Graphique 90 : Taux de chômage par tranche d’âge et par district en 2010 148Graphique 91 : Évolution du taux de chômage des jeunes (15-24 ans) par niveau d’instruction (2010) 149Graphique 92 : Structure des chômeurs par niveau d’instruction (2010) 149

Carte 1 : Taux de chômage par délégation (2004) 35Carte 2 : Proportion des bénéficiaires du PNAFN (2011) 35Carte 3 : Taux de pauvreté par gouvernorat selon les données du MAS (2010 – en %) 38Carte 4 : Indicateur du bien-être des enfants, adolescents et jeunes, répartition par gouvernorat (2004) 38Carte 5 : Répartition des Kouttebs et du nombre d’enfants inscrits aux Kouttebs (2009) 59Carte 6 : Taux de scolarisation des 6-14 ans (2004) 69Carte 7 : Répartition des maisons de jeunes et des maisons de culture par gouvernorat (2008) 91Carte 8: Taux de consommation de tabac auprès des jeunes (2005) 139Carte 9: Taux de consommation de l’alcool auprès des jeunes (2005) 139

Figure 1 : Mortalité infantile, analyse causale 51Figure 2 : Mortalité maternelle, analyse causale 51Figure 3 : L’enseignement préscolaire, analyse causale 71Figure 4 : Équité et qualité de l’enseignement de base, analyse causale 72Figure 5 : Analyse causale du droit aux loisirs, aux activités récréatives et au sport, arbre à problèmes 104Figure 6 : Analyse causale du droit à la participation, arbre à problèmes 104Figure 7 : Analyse de capacités, enfants subissant des situations de maltraitance, de violence, d’exploitation et d’abus 125Figure 8 : Analyse de capacités, enfants vulnérables ne bénéficiant pas d’une protection suffisante de leurs familles 127Figure 9 : Analyse de capacités, enfants en conflit avec la loi 129Figure 10 : Comportements à risque chez les Jeunes et adolescents, Analyse causale 142Figure 11 : Difficulté d’intégration économique des jeunes, analyse causale 150

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Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

Page 7: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

ATFP Agence Tunisienne de Formation Professionnelle

CDE Convention relative aux Droits de l’Enfant

CDIS Centre de Défense et d'Intégration Sociales

CEDAW Convention sur l’Elimination de toutes les formes de Discrimination à l'égard des Femmes

CIJE Centre Intégré de la Jeunesse et de l’Enfance

CNIPRE Centre national d’Innovation Pédagogique et de Recherche en Education

CNSS Caisse Nationale de la Sécurité Sociale

CPE Code de Protection de l’Enfant

CSB Centre de Santé de Base

CSE Conseil Supérieur de l'Enfance

DHMPE Direction de l’Hygiène du Milieu et de la Protection de l’Environnement

DMSU Direction de la Médecine Scolaire et Universitaire

DPE Délégué à la Protection de l’Enfance

DSSB Direction des Soins de Santé de Base

DTCP Diphtérie, Tétanos, Coqueluche, Polio

EPE École à Priorité Educative

EPT Éducation Pour Tous

ESR Enfant en Situation de Rue

FNE Fonds National de l’Emploi

FSN Fonds de Solidarité Nationale

INNTA Institut National de Nutrition et de la Technologie Alimentaire

INPE Institut National de Protection de l'Enfance

INS Institut National de la Statistique

INSP Institut National de la Santé Publique

IST Infections Sexuellement Transmissibles

MAF Ministère des Affaires de la Femme

MAS Ministère des Affaires Sociales

MDCI Ministère du Développement et de la Coopération Internationale

MCSP Ministère de la Culture et de la Sauvegarde du Patrimoine

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Liste des abréviations et des acronymes

Page 8: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

MESRS Ministère de l'Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique

ME Ministère de l’Education

MFPE Ministère de la Formation Professionnelle et de l'Emploi

MI Ministère de l’Intérieur

MICS Multiple Indicators Cluster Survey

MJS Ministère de la Jeunesse et des Sports

MJDH Ministère de la Justice et des Droits de l’Homme

MSP Ministère de la Santé publique

MST Maladies Sexuellement Transmissibles

OMD Objectifs du Millénaire pour le Développement

OMS Organisation Mondiale de la Santé

ODE Observatoire National des Droits de l’Enfant

ONFP Office National de la Famille et de la Population

ONG Organisation Non Gouvernementale

OSC Organisation de la Société Civile

OTEF Organisation Tunisienne pour l'Education et la Famille

PCIME Prise en Charge Intégrée de la Mère et de l'Enfant

PIB Produit Intérieur Brut

PISA Programme for International Student Assessment

PNAFN Programme National d’Aide aux Familles Nécessiteuses

PNA Plan National d’Action

PNEA Programme National d'Enseignement des Adultes

PNLS/IST Programme National de Lutte contre le Sida et les Infections Sexuellement Transmissibles

RGPH Recensement Général de la Population et de l’Habitat

SMIG Salaire Minimum Inter-professionnel Garanti

TIMSS Trends in International Mathematics and Science Study

TND Dinar tunisien

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Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

Page 9: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

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AVANT-PROPOS

Le présent rapport d’analyse dresse l’évolution de la situation des enfants et des jeunes en Tunisiedepuis le dernier rapport réalisé en 2004. Il s’inscrit dans le cadre de la coopération de l’UNICEFavec le Gouvernement tunisien et suit une démarche innovante et participative en consultationavec un large éventail de partenaires gouvernementaux et non-gouvernementaux. Ce partenariata permis de s’assurer que l’analyse s’appuie sur les études, analyses et enquêtes les pluspertinentes et les plus récentes, et qu’elle bénéficie de l’expérience pratique des spécialistes desministères et des organismes concernés.

Dans leurs investigations conduites lors des différentes étapes du processus, les consultants sesont entretenus avec plusieurs hauts responsables des Ministères des Affaires de la Femme et dela Famille, de l’Éducation, de la Santé, de la Jeunesse, des Affaires Sociales, de la Justice ainsiqu’avec des responsables d’organisations non gouvernementales et d’associations. Un comitéde suivi, composé de divers représentants des Ministères et de chargés de programmes del’UNICEF, a régulièrement suivi et supervisé les travaux et les produits de l’équipe de consultants.

Enfin, un comité de lecture a été mis en place sous l’égide du Ministère des Affaires Etrangèresen vue de revoir la première version du document d’analyse de la situation. Ce comité, composéde représentants des principaux ministères concernés et de l’équipe chargée des programmes àl’UNICEF, a remis ses commentaires et suggestions aux consultants qui les ont consolidés dans laversion finale du document.

Tout en examinant l’ampleur des progrès réalisés par le pays sur de nombreux aspects dans lecadre des droits des enfants, cette analyse présente deux particularités. La première tient au faitqu’au cours du processus de son élaboration, la Tunisie a connu la « Révolution des Jasmins »marquée par une série de transformations et de changements historiques avec la chute d’unpouvoir installé depuis plus de 23 ans. La seconde particularité est qu’il s’agit de la premièreanalyse publiée en Tunisie effectuée selon un cadre de référence standard des Droits Humainsqui permet d’identifier les principaux manquements au respect des droits des enfants, d’enanalyser les causes et de dégager par la suite des stratégies adaptées à chaque niveau de nonréalisation de ces droits.

Selon cette méthode d’analyse appliquée à la période 2005-2011, la Tunisie a indéniablementaccompli des progrès notoires en ce qui concerne la situation de l’enfance, fruit des politiques etprogrammes conduits depuis plus de 50 ans. Le Gouvernement tunisien a réussi à mettre en placedes stratégies et programmes visant à assurer un environnement favorable au bien-être desenfants. Ces accomplissements sont visibles dans différents domaines notamment ceux du droità la protection, du droit à l’éducation et du droit à la santé. Ces réalisations ont pu voir le jourgrâce à la mobilisation de tous les acteurs avec à leur tête les différents départements ministérielsen charge du dossier de l’enfant, de la femme et du développement social de manière générale.

Toutefois et en dépit de toutes ces réalisations, force est de constater que sur certains volets lesprogrès n’ont pas été au rendez-vous et de nombreux enfants sont encore privés de leurs droitsfondamentaux tels que stipulés dans la Convention relative aux Droits de l’Enfant adoptée parles Nations Unies en 1989 et ratifiée depuis par 192 nations, dont la Tunisie. De cette analyse

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de situation se dégage un sentiment d’urgence que la révolution tunisienne a révélé au grandjour. Tandis que des régions réalisent des progrès notables en scolarisant, par exemple, la quasi-totalité des enfants dans le cycle primaire, des problèmes majeurs persistent en matière depré-scolarisation, déscolarisation et de qualité de l’enseignement dans les zones défavorisées dupays. Le constat de ces disparités socio-économiques et des obstacles de genre constituent desdéfis majeurs pour permettre à tous les enfants d’accéder à tous leurs droits.

Cette analyse a pour ambition d’alimenter la réflexion des décideurs politiques de la Tunisiedémocratique pour que les intérêts supérieurs de l’enfant soient reflétés dans les politiqueséconomiques et sociales qui seront mises en place dans l’avenir. Un manque d’investissement enfaveur de l’enfant, dès son plus jeune âge, entraîne souvent des situations irréversibles et contribueà accentuer le phénomène de marginalisation. La pauvreté, les mauvaises conditions sanitaireset le manque d’éducation sont autant de facteurs qui privent les enfants de leur dignité, dissipentleurs espoirs et menacent leur vie.

L’UNICEF continue à réaffirmer son soutien auprès des différents acteurs de la société tunisiennepour améliorer la situation de l’enfance. Notre programme de coopération avec le Gouvernementcontinuera à appuyer les efforts de la Tunisie afin de relever le défi de la mise en œuvre de laConvention des Droits de l’Enfant, et dans un cadre plus global, celui de l'atteinte des objectifsdu Millénaire pour le Développement, tout en répondant de façon appropriée aux besoins d’unpays à revenu intermédiaire et en phase de transition démocratique. Il visera en particulier àrenforcer les politiques et les programmes qui permettront aux enfants un accès plus équitable àtous les droits les concernant.

La Tunisie vient de prouver au monde que le changement historique est possible. Tourné versl’avenir, le pays a de grands défis à relever. Je souhaite que cette analyse de situation contribueà définir les priorités en vue de mieux soutenir la santé, le bien-être, le développement et laréussite des enfants et des jeunes en Tunisie.

Maria Luisa FornaraReprésentante de l’UNICEF en Tunisie

Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

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RESUME

La Tunisie vit une transition démographique. En 2011, les enfants de la tranche d’âge de 0 à 18ans étaient au nombre de 3,2 millions représentant environ 30% de la population totale estiméeà 10,7 millions. Le croît démographique se situe depuis une dizaine d’années aux environs de1% alors qu’il dépassait 2% en 1990. La Tunisie commence à connaitre un phénomène devieillissement de la population qui s’accentuera les prochaines années. Si le poids de lapopulation des enfants baissait légèrement pour atteindre moins de 28% en 2020, celui despersonnes âgées de plus de 60 ans doublerait en passant de 10% à 20% au cours des 25prochaines années. Dans ces perspectives, le contexte démographique des cinq prochainesannées demeurera marqué par un allègement de la charge des enfants sans que celle despersonnes âgées ait encore beaucoup augmenté. Ainsi, une fenêtre correspondant à un bonusdémographique s’est ouverte. Elle offre l’opportunité de consolider et d’amplifier les acquis dudéveloppement. Toutefois, cette période connaîtra le maintien de la pression sur le marché del’emploi avec une demande additionnelle de l’ordre de 90 000 par an qui ne manquera pasd’aggraver la situation du chômage qui a déjà atteint des niveaux alarmants depuis 2011.

La Tunisie vit une transition politique et commence une longue marche vers la démocratie. LaTunisie nouvelle veut se libérer des séquelles du passé et cherche à se doter d’une nouvelleconstitution. Les élections de l’Assemblée Constituante du 23 octobre 2011 représentent unepremière étape d’un long processus de transition démocratique dans lequel la Tunisie s’estengagée.

Le contexte économique a été marqué par les contre-performances enregistrées au lendemain dela révolution. Cela concerne l’affaiblissement de l’appareil productif, les pertes d’emplois,l’aggravation du chômage, le désistement des investisseurs et des touristes, l’appauvrissementdes plus vulnérables, l’amenuisement des recettes fiscales et des réserves en devises et lecreusement du déficit public et de celui des opérations courantes. Une récession a été enregistréeen 2011 avec une croissance négative de -1,8% et le niveau de croissance de 2012 s’est situéentre 2% et 3%.

Les conséquences sociales de la récession seront considérables. Le nombre de chômeurs est passéde moins de 500 000 en 2010 à 740 000 en 2012 et le taux de chômage a dépassé le seuilde 18% depuis 2011. Le chômage touche particulièrement les jeunes et notamment les diplômésde l’enseignement supérieur dont le nombre a atteint 240 000, soit un taux de chômage de plusde 33%. Les difficultés économiques et sociales se traduisent par une accentuation de la pauvretéappelant à des interventions sociales plus intensives et des transferts sociaux mieux ciblés enfaveur des catégories vulnérables et des familles démunies durant cette phase transitoire critique.En matière de développement humain, les progrès réalisés par la Tunisie sont notables :l’espérance de vie à la naissance a atteint 74,3 ans en 2008, soit 4 années de plus qu’en 1990.Le taux d’analphabétisme de la population de plus de 10 ans est en nette régression. Il est passéde 31,7% en 1994 à 18,6% en 2011. Toutefois, il reste élevé notamment pour les femmes (26%)et en particulier, pour celles résidant en milieu rural (40%). Le taux de scolarisation combiné desdifférents niveaux d’enseignement a atteint 78%, soit 10% de plus que la moyenne constatéedans les pays arabes en 2009. La pauvreté a fortement reculé selon les chiffres publiés avant2011 par l’INS, le taux de pauvreté passant de près de 6,7% en 1990 à 3,8% en 2005. Leschiffres publiés après la révolution basés sur une approche méthodologique différente montrent

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que la pauvreté était plus répandue avec un taux atteignant 11,6% en 2005.

Le cadre institutionnel régissant les législations et les programmes en faveur des enfants,adolescents et jeunes a connu un développement remarquable. La Tunisie a constamment œuvrépour asseoir une politique volontariste de prise en charge des affaires de l’enfance à tous lesniveaux réaffirmant ainsi l’engagement du pays en faveur du bien-être et du plein épanouissementsocial et culturel de l’enfant. L’enfance jouit d’un intérêt confirmé par le pays et constitue un axetransversal dont plusieurs institutions gouvernementales ont la charge. La Tunisie a ratifié tous lesinstruments internationaux liés à l’enfance ainsi que les conventions de l’OrganisationInternationale du Travail renouvelant ainsi son engagement à œuvrer en faveur de l’enfance. LaTunisie a ratifié la Convention internationale des droits de l’enfant en 1991 et a levé depuis juin2008 toutes les réserves la concernant. Récemment, le 19 Décembre 2011, l'AssembléeGénérale des Nations Unies a approuvé le troisième protocole facultatif sur la procédure decommunication permettant de recevoir les plaintes individuelles des enfants. Des actions deplaidoyer ont été initiées afin que la Tunisie signe et ratifie ce dernier instrument. La Tunisie apromulgué en 1995 un Code de protection de l’Enfant qui constitue un acquis incontestable etune référence en matière de protection de l’enfant et de justice des mineurs pour les pays de larégion ou du même niveau de développement. Toutefois, le décalage entre les textes juridiqueset leur mise en œuvre dans la pratique constitue un défi majeur qui se trouve aggravé parl’inexistence d’un mécanisme indépendant de contrôle et de suivi des droits de l’enfant. Cetteinstitution aurait pour mission de suivre et d'évaluer les progrès accomplis dans l'applicationde la Convention au niveau national et, s'il y a lieu, au niveau local, y compris son applicationpar le secteur privé et les ONG en tant que fournisseurs de services aux enfants. Cette institutiondevrait être habilitée à recevoir les plaintes individuelles relatives à des violations des droits del'enfant et à enquêter à leur sujet, dans le respect de la sensibilité des enfants, et à les traiter demanière efficace.

Le droit à la survie et à la santé figure parmi les premiers droits fondamentaux définis par laConvention Internationale des droits de l’enfant. En Tunisie, le taux de mortalité infantile et letaux de mortalité des moins de 5 ans se réduisent de moitié tous les 15 ans, soit un recul annuelde l’ordre de 4%. En 2008, ils ont été, respectivement, estimés à 18,4‰ et à 22,7‰ contre35,3‰ et 43,6‰ en 1992 et 70,6‰ et 93,9‰ en 1977. La projection de cette tendancepermettra l’atteinte de l’Objectif du Millénaire pour le Développement (OMD) visant à réduirede deux tiers le taux de mortalité des moins de 5 ans entre 1990 et 2015.

L’accès universel et gratuit à l’école pour les filles et les garçons âgés de 6 ans est atteint depuisplus d’une décennie. De même, l’achèvement d’un cycle entier de l’enseignement primaire visépar l’Objectif du Millénaire est considéré comme atteint avec un taux net de scolarisation de97,7% pour la tranche d’âge des 6 et 11 ans. Par ailleurs, il faut souligner que la Tunisie aatteint l’OMD en matière de parité entre les sexes dans le domaine de l’éducation. La proportiondes filles dans l’enseignement primaire et secondaire a dépassé 50% en 2005 et a atteint en2009 près de 52% pour tous les niveaux de l'enseignement. Les niveaux des taux de scolarisationatteints en 2009 témoignent d’un large accès à l’éducation équitable entre filles et garçons pourles différents niveaux d’enseignement scolaire. Cependant, il est à noter que chaque année 60000 à 80 000 enfants en âge de scolarité obligatoire (6 à 16 ans) quittent l’école.

Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

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RESUME

Les jeunes connaissent de réels problèmes d’insertion dans la vie active. En 2008, le taux dechômage des 15-19 ans était de 32,4%, celui des 20-24 ans de 30,9%, dépassant le doublede la moyenne nationale qui était de 14,2%. Le nombre des diplômés de l’enseignementsupérieur au chômage a plus que triplé en cinq ans, passant de 40 700 en 2004 à plus de 128000 en 2008.

L’accès aux loisirs et aux activités récréatives est encouragé, non seulement par le biais de l’écoleà tous les niveaux, mais également grâce à divers mécanismes mis en place par les différentsintervenants qui œuvrent pour l’épanouissement de l’enfance, de l’adolescence et de la jeunesse :clubs, associations, maisons de jeunes, maisons de culture. Diverses manifestations culturelles etsportives témoignent de la volonté politique de donner l’opportunité aux enfants, aux adolescentset aux jeunes de s’exprimer, d’apprendre et de donner libre cours à leur talent et à leurimagination. Cependant, tous les enfants et les jeunes ne semblent pas disposer des mêmesopportunités pour accéder aux loisirs. Ceux qui sont scolarisés peuvent profiter des activitésrécréatives proposées au sein des établissements mais toutes les structures scolaires ne sont pasdotées du même niveau d’équipement entraînant ainsi un inégal accès aux loisirs. Pour les moyensde loisirs situés en dehors du milieu scolaire, ils sont souvent payants et leur accessibilité pour lesenfants reste souvent tributaire des moyens financiers des familles. Les technologies del’information et de la communication connaissent une percée profitable aux enfants et aux jeunes.Le parc d’ordinateurs dans le pays a dépassé le seuil d’un million en 2009, soit un ratio de 10,6ordinateurs pour 100 habitants (contre 2 il ya 10 ans) et plus de 13% des ménages disposentdésormais d’ordinateurs contre moins de 3% en 2000. Cependant, l’accès des enfants et desjeunes aux TIC reste marqué par de fortes disparités sociales et régionales. L’accès pour lesenfants et les jeunes aux infrastructures culturelles et de loisirs est assez limité en raison d’uneinsuffisante couverture et surtout d’une insuffisante fréquentation. Des investissements matérielstrès importants sont réalisés mais les activités proposées demeurent insuffisantes et souffrentsouvent du manque de ressources humaines et financières. Cela se ressent sur l’attractivité deplusieurs structures culturelles ou d’animation vis-à-vis des enfants et des jeunes.

Les activités sportives sont exercées par les enfants et les jeunes en milieu scolaire et en dehorsde l’école. Les établissements scolaires sont actuellement mieux dotés en infrastructures sportives.Le taux de couverture par l’activité physique dans les écoles primaires a fortement progressé enpassant de moins de 16% en 2000 à plus de 64% en 2009. Il atteint 94,4% dans les collègeset 96,8% dans les lycées. Au niveau universitaire, la pratique du sport est beaucoup plus réduiteet ne concerne que 6,3% des étudiants. En dehors du milieu scolaire, l’infrastructure sportive aconnu un développement remarquable. Toutefois, les filles pratiquent moins de sport que lesgarçons.

Au cours de la dernière décennie, le paysage médiatique tunisien a connu des changementsimportants favorisés par le progrès technologique, l’essor de la publicité et l’ouverture del’audiovisuel sur le secteur privé encourageant ainsi une production plus diversifiée destinée auxenfants et aux jeunes. Les médias constituent les loisirs préférés des adolescents et des jeunes :télévision, radio et journaux occupent la plus grande partie du temps libre de cette population.La troisième consultation nationale de la jeunesse de 2005, révèle que 43,7% des enquêtésprivilégient les médias en tant qu’activités de loisirs. Toutefois, l’image des enfants, adolescents

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Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

et jeunes qui se dégage de nombre de productions télévisées et d’articles journalistiques révèleune image stéréotypée de cette population de la part d’une partie des médias, notamment lapresse écrite arabophone. De même si la télévision et la radio focalisent l’attention des enfantset des jeunes, ils n’y participent pas suffisamment. Les programmes destinés aux enfants et auxjeunes sont dominés par les adultes et n’offrent pas d’opportunités pour une participationimpliquant les jeunes dans la conception, la production et la réalisation. De même, l’opinion desenfants, adolescents et jeunes est peu écoutée. Les médias ne valorisent pas assez leurs opinionsqui sont souvent limitées, contrôlées ou mal présentées.

En matière de participation et de citoyenneté, plusieurs mesures ont été prises en Tunisie cesdernières années visant la promotion de la participation chez les enfants, les adolescents et lesjeunes, telles que :

• la création du parlement de l’enfant et la généralisation des conseils municipaux d’enfants ;• l’abaissement à 23 ans de l’âge minimum de candidature à la chambre des députés ; • l’abaissement à 22 ans de l’âge minimum de candidature aux conseils municipaux ;• la création des organes d’information de la jeunesse, Tunisie 21 et Radio Jeunes ;• la réalisation d’une consultation auprès des jeunes à l’occasion de la préparation de chaque Plan de développement quinquennal ; • l’organisation du dialogue avec les jeunes au cours de l’année 2008 ; • l’abaissement à 18 ans du droit de vote aux élections ;• la limitation de l’âge des présidents des associations et organisations de jeunes et

l’adoption du quota de jeunes dans les bureaux directeurs des organisations nongouvernementales et des partis politiques.

Toutefois, la plupart de ces réalisations d’avant 2011 en faveur de la participation desadolescents et jeunes s’inscrivaient dans un contexte politique particulier qui visait à présenter lapromotion de la jeunesse comme une des principales priorités du gouvernement. Dans les faits,il s’avère, d’une part, que la famille n’encourage pas toujours ses enfants à adhérer à la vieassociative, et d’autre part, que les populations juvéniles jugent être plus à l’aise à s’exprimerdans le cadre de la sphère privée que dans celui de la sphère publique. Quant à l’école, ellereste une institution qui a peu œuvré dans l’initiation des enfants, des adolescents et des jeunesà la prise de décision et à la gestion de la vie scolaire et universitaire en dépit des efforts déployéspour la transmission du sens civique et des fondements de la citoyenneté. Ceci confirmel’importance qu’il faut donner à la valorisation du rôle de la famille dans la promotion dudialogue, de l’implication et de la participation des enfants, adolescents et jeunes. Par ailleurs,on constate une implication insuffisante de la société civile dans la mobilisation des adolescentset jeunes. L’adhésion des adolescents et des jeunes tunisiens dans les structures associatives etpolitiques demeure faible. Par ailleurs, les jeunes considèrent le vote comme un devoir plus qu’undroit. Les raisons pour lesquelles les jeunes ne donnent pas leur avis en ce qui les concerne, sontessentiellement d’ordre intergénérationnel, ces derniers ne sont pas autorisés implicitement parles aînés à le faire, mais aussi par manque de confiance en eux-mêmes.

En matière de droit à la protection, les gouvernements tunisiens se sont engagés depuisl’indépendance dans des politiques sociales orientées vers la protection de l’enfance et lapromotion de la justice sociale. Cet engagement s’est traduit notamment par la promulgation duCode de protection de l’enfant en 1995 et la mise en place de manière progressive d’un dispositif

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RESUME

de protection de l’enfance très diversifié. Ce dispositif concerne les enfants privés de soutienfamilial, les porteurs de handicaps, les enfants menacés de rupture scolaire, les enfants vivantdans la grande pauvreté, les enfants exploités économiquement et recouvre les domaines de lasanté, de l’éducation et des loisirs.Concernant l’enfant privé de soutien familial, la Tunisie a mis en place des mécanismes deprotection et d’intégration de l’enfant :

• dans son milieu familial prioritairement ou dans une famille de substitution à travers l’adoption, la Kafela et le placement familial de longue durée • dans des structures de prise en charge. Ces mécanismes fonctionnent selon la situationde l’enfant qui, elle-même, peut être différente à travers le cycle de vie de l’enfant. En2009, le nombre des enfants et des jeunes vivant en institutions (INPE, Unités de vieassociatives, villages SOS, CIJE) a atteint 2 275 dont 33,5% sont âgés de moins de 6 ans.L’INPE et les unités de vie associatives ont accueilli et pris en charge 761 nouveaux nés en2009 contre 603 en 2005. Il s’agit notamment d’enfants nés hors mariage. Leur intégrations’accomplit dans la moitié des cas à travers la reprise par la famille d’origine et pour l’autremoitié par les familles de substitution à travers l’adoption et la Kafela. Les enfants âgés deplus de 6 ans sont pris en charge par les structures du MAFFEPA (23 CIJE et 68 complexesde l’enfance) et par le secteur associatif (villages SOS). En 2008, près de 6 600 enfantsétaient pris en charge par les centres publics. Les causes essentielles de la perte du soutienfamilial tiennent à la perte de l’un ou des deux parents et à leur incapacité physique etfinancière et aussi à la négligence et aux dislocations familiales.

Les situations de maltraitance et de violence vis-à-vis des enfants sont mal appréhendées et malrecensées. Des données partielles existent concernant les actes de violence, de brutalité, decruauté mentale et d’abus sexuels. MICS3 a montré que 73% des enfants de 2 à 14 ans sontfrappés et 26% sont insultés. Un travail limité dans une région a montré qu’en matière d’abussexuel, le taux d’incidence est de 14,7 victimes pour 100 000 habitants par an. Plus de 80%des victimes étaient mineures et près de 60% sont de sexe féminin. Concernant la violence enmilieu scolaire, elle touche selon les enquêtes entre 25% et 58% des élèves. Ces données montrentla nécessité de la mise en place d’un système fiable et exhaustif de collecte et de traitement desdonnées relatives aux situations de maltraitance et de violence vis-à-vis des enfants et des jeunes.En l’absence d’un tel système, l’analyse du phénomène reste partielle et les politiques et mesuresde remédiation ne peuvent avoir l’efficacité requise. La Tunisie a élaboré une stratégied’intervention pour lutter contre la violence ainsi qu’un plan national d’action. Toutefois, il sembleque la problématique de la violence mériterait une attention plus accrue. La violence semble êtreabordée de manière sous-jacente à travers les diverses activités des programmes traditionnelsdes ministères concernés et non de manière systématique et structurelle. Aussi, la non disponibilitéde données désagrégées ne permet pas d’avoir un état clair de la situation permettant de suivreles situations de violence dont sont victimes les enfants et d’intervenir efficacement.

Les situations d’exploitation économiquement de l’enfant demeurent insuffisamment recensées etconnues. La Tunisie a ratifié depuis 1995 la Convention internationale du travail n°138 relativeà l’âge minimum d’admission à l’emploi et en 2000, la Convention internationale du travailn°182 sur les pires formes de travail des enfants. Le code du travail limite l’âge minimum

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Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

d’admission à l’emploi en dehors de la famille à 16 ans. Les données partielles qui sontdisponibles (MICS2) montrent que 2,1% d’enfants âgés de 5 à 15 ans exercent une activitéprofessionnelle. La lutte contre le phénomène de l’exploitation économique de l’enfant devraitbénéficier d’un programme multisectoriel et multidisciplinaire impliquant les départementsconcernés par la protection judiciaire, l’éducation et la santé de l’enfant, le soutien et l’appuisociaux des familles démunies, des ONG, des enseignants chercheurs. Ce programme devraitinclure un axe sur le suivi et l’évaluation qui permettra de mieux appréhender la problématiqueet d’évaluer objectivement les progrès.

En matière de justice des mineurs, la Tunisie s’est engagée sur tous les instruments et standardsinternationaux. Le titre II du Code de Protection de l’Enfant traite en particulier de la justice desmineurs. À titre d’exemple, l’âge de la responsabilité pénale des enfants est de 13 ans et lapeine maximale encourue est un emprisonnement de 10 ans. Le gouvernement tunisien s’estengagé à protéger le droit de l’enfant placé dans une institution éducative de protection ou derééducation ou mis dans un lieu de détention. Des mécanismes spéciaux de protection de l’enfanten conflit avec la loi (juge de l’enfant, tribunal pour enfants…) sont mis en place, la priorité estdonnée aux moyens préventifs et éducatifs ; ainsi tous les crimes sauf ceux entrainant la mortpeuvent être correctionnalisés. En 2009, environ 13 800 enfants ont été présentés devant le jugede l’enfant suite à un délit commis, parmi eux 1 356 purgent une peine de privation de liberté.Il est à noter que les mécanismes d’alternative à la privation de liberté gagneraient à être mis enœuvre ou renforcés. C’est le cas du délégué à la liberté surveillée prévu dans le Code deprotection de l’enfant et non encore mis en place. Par ailleurs, la médiation judicaire déjàappliquée mériterait d’être professionnalisée en vue de constituer un processus éducatif pourl’enfant et être entamée en début de processus pour atteindre l’objectif de déjudiciarisation.

L’engagement de l’État tunisien est fondamental aussi bien dans la protection des enfants privésde soutien familial et particulièrement ceux nés hors mariage, à travers notamment une série deréformes et de mesures visant la consolidation du droit des enfants abandonnés à un nompatronymique et à vivre dans une famille, qu’en ce qui concerne la gestion du problème desenfants en conflit avec la loi, à travers la mise en place de structures de prévention de ladélinquance et d’encadrement. Toutefois, des analyses montrent qu’une attention particulièredevrait être accordée aux aspects suivants :

• le renforcement de la coordination entre les nombreux départements ministériels impliquésdans la protection de l’enfance ;• la reconnaissance de certains phénomènes liés à la protection de l’enfance (tels quel’exploitation sexuelle et économique des enfants, les enfants de la rue, etc..) au-delà dessituations de danger énumérées à l’art 20 du Code de protection de l’enfant ;• le renforcement des systèmes d’information permettant de disposer de données préciseset d’éclairer la décision sur certains domaines de la protection des enfants.

La Tunisie présente les caractéristiques démographiques, économiques et sociales d’un paysémergent en transition. Tout en reflétant les performances atteintes et la maîtrise de la gestiondes problèmes classiques de l’enfance, ce statut d’émergence pose de nouveaux défis et interpelleles décideurs et les partenaires sur des questions plus complexes touchant la population desenfants et des jeunes vivant dans un contexte en pleine mutation.

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RESUME

Dans la perspective de garantir les droits de l’Homme comme but ultime de tout effort dedéveloppement, la pleine réalisation des droits de l’enfant reste le meilleur investissement àengager pour atteindre un développement équitable et durable pour une nation. Si par le passé,les droits liés à la satisfaction des besoins de base de l’enfant ont été largement pris en compte,il est désormais universellement reconnu qu’une approche plus consciente fondée sur les droitsdoit remplacer l’approche fondée sur les besoins.

Lutter contre la vulnérabilité et particulièrement celle des enfants est plus qu’une obligation morale :elle devient une obligation juridique. Cela implique le traitement des enfants en tant que titulairesde droits que l’État et les autres parties prenantes ont le devoir de satisfaire. Pour l’État, celasignifie :

• respecter l’ensemble des droits des enfants ;

• prendre en considération leurs points de vue ;

• définir des normes juridiques appropriées pour leur survie, leur développement et leurprotection ;

• renforcer les systèmes nationaux afin de fournir des services essentiels de qualité etd’assurer l’application des lois de protection ;

• intervenir pour arrêter la violation des droits ;

• mettre les enfants dans la perspective des politiques nationales et des plans, en plus del’élaboration de plans spécifiques et des interventions pour les enfants.

L’originalité de la présente analyse de situation tient au fait qu’elle adopte une approche fondéesur les droits humains. Ce choix traduit la volonté commune de l’UNICEF et du Gouvernementtunisien de répondre aux obligations liées à l’adhésion du pays à la Convention relative auxDroits de l’Enfant (CDE) et à la Convention des Nations Unies pour l’élimination de toutes lesformes de Discrimination à l’Egard des Femmes (CEDAW) et d’assurer le suivi des rapports surles progrès accomplis émanant des différentes commissions compétentes des Nations Unies.

L’approche fondée sur les Droits Humains telle que définie par les Nations Unies s’appuie surdes principes clés :

• tout effort de développement doit impliquer un progrès en matière de respect des DroitsHumains conformément à la Charte des Nations Unies et aux instruments internationauxadoptés depuis 1948 ;

• les Nations Unies doivent renforcer la capacité des Etats à assurer la promotion et laprotection des droits humains ;

• l’action des Nations Unies doit être fondée sur une analyse préliminaire de la capacité

INTRODUCTION

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des sujets de droits à connaître leurs droits et à en revendiquer l’application auprès del’Etat et autres détenteurs d’obligations habilités à veiller à la protection et à l’effectivitédesdits droits ;

• l’action des Nations Unies doit également s’appuyer sur l’évaluation de la capacité desporteurs d’obligations à veiller au respect des droits humains afin que ces derniers soientprogressivement reconnus et pleinement réalisés.

Cette approche articule l’analyse du développement national autour des normes contenues dansle corps d’instruments internationaux relatifs aux droits humains. Elle exige que l’on accorde lamême attention au résultat qu’au processus, en soulignant l’importance de la transparence et dela participation des bénéficiaires. Les principes qui fondent les droits humains doivent désormaisorienter les programmes dans les divers secteurs et aider à la réalisation des Objectifs duMillénaire pour le Développement (OMD). L’approche fondée sur les droits humains accorde unintérêt particulier aux déficits de capacités relevés et aux groupes sociaux exclus ou marginaliséspour opérer les ajustements nécessaires au niveau des politiques et des programmes.

Ainsi, les progrès en matière de développement et de bien-être humains sont évalués à l’aune durespect et de la jouissance effective de ces droits, tels qu’établis par les principaux textesinternationaux.

La CDE comprend quatre grandes catégories de droits interdépendants qui s’appliquentindistinctement à tous les enfants sans discrimination d’aucunes sortes. Ces droits sont en quatrerubriques structurant le présent rapport :

• le droit à la survie et à la santé : les droits à la vie et à la satisfaction des besoins les plusfondamentaux tels qu’un niveau de vie suffisant, un logement décent, une nutrition équilibréeet un accès aux services de santé ;

• le droit à l'éducation et au développement : les droits de base des enfants pour atteindreleur plein potentiel, comme l’éducation, les jeux et les loisirs, l’accès à l’information, les activitésculturelles ainsi que la liberté de pensée, de conscience et de religion ;

• le droit à la protection : les droits à l’identité, la nationalité et la citoyenneté, le droit à lasurvie ainsi que les droits fondamentaux de développement sans négligence, maltraitance,exploitation, exclusion ni discrimination ;

• le droit à la participation : les droits à la liberté de parole, d’expression d’opinions,d’association et de réunion pacifique.

Partant d’un droit de référence pour les enfants, adolescents et jeunes, la présente analysede situation procède à travers les trois étapes suivantes :

• établissement de l’état des lieux sur l’effectivité de ce droit à l’aide d’indicateursappropriés en mettant en relief les évolutions constatées, y compris en matière d’engagement

Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

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public, en termes de choix politiques et de programmes destinés à promouvoir et à réaliser cesdroits ;

• identification des problèmes clés et développement d’une analyse causale basée sur lesdisparités ;

• analyse des écarts de capacités des principaux obligataires ou mandataires et desdétenteurs de droits et formulation de recommandations en termes d’actions et de domaines decoopération à privilégier.

S’appuyant sur le cadre ci-dessus décrit, cette analyse de situation permettra de :

� • fournir la meilleure information possible sur la situation des enfants vivant en Tunisieétayée par une évaluation et une analyse des tendances, disparités et causes immédiates, causessous-jacentes et structurelles ainsi que les lacunes existantes dans le domaine des capacités àdifférents niveaux de la société et identifier les problèmes, les vulnérabilités et les développementspositifs en ce qui concerne les enfants tunisiens âgés de 0-18 ans, l’âge de l’enfance tels quedéfinis par la CDE ;

� • analyser les diverses formes de disparités (de genre ou d’âge, géographiques,économiques, sociales, sanitaires et éducatives) au niveau national et régional ainsi que lescauses et les interdépendances de ces disparités ;

� • entreprendre un examen des politiques passées et présentes et les tendances dudéveloppement en vue d’identifier les principaux obstacles dans la réalisation des droits desenfants et aider les instances gouvernementales à accomplir leurs rôles de coordination et desuivi des politiques en faveur des enfants et des familles ;

� • suggérer les instruments pour réduire les disparités existantes et combler les lacunes decapacités.

Le rapport présentera, préalablement, le contexte général et les politiques nationales en faveurdes enfants, des adolescents et des jeunes et s’achèvera avec un chapitre dédié aux questionsrelatives aux jeunes qui représentent un des principaux défis mais également l’une desopportunités née de ce contexte de transition vécue par la Tunisie après le 14 janvier 2011.

INTRODUCTION

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Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

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1.1 LE CONTEXTE NATIONAL ET L’ENVIRONNEMENT DE L’ENFANT

1.1.1 Le contexte démographique : l’achèvement de la transitiondémographique

En 2010, la population tunisienne a atteint10,550 millions. Les enfants de la tranched’âge de 0 à 18 ans en représentent 31% (3,3millions) et la population jeune âgée de moinsde 25 ans est constituée de 4,5 millionsreprésentant 43% de la population totale. Legraphique ci-contre illustre la structure de lapyramide des âges telle qu’elle a été estiméeen 2010. L’évolution de la populationtunisienne durant ces dernières années a étémarquée par une baisse du croîtdémographique qui est passé à environ 1%depuis le milieu des années 2000 alors qu’ilétait de 1,4% à la fin des années 1990.

Les différentes projections socio-démographiques élaborées par l’InstitutNational de la Statistique (INS) à partir desrésultats du recensement de 2004 montrentune certaine stabilisation du nombre desenfants et des jeunes de moins de 25 ans àenviron 4 millions durant les 25 prochainesannées. Le graphique ci-contre illustrel’évolution de la population des enfants, desadolescents et des jeunes à l’horizon 2034.

LE CONTEXTE GENERAL ET LES POLITIQUES NATIONALES

Graphique 1 : Tunisie : Pyramide des âges(2010)Source : d’après les données de l’INS, ENPE 2010

Graphique 2 : Projection de la population desenfants, adolescents et jeunesSource : élaboration de l’auteur d’après les projections de l’INS

1.

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Ainsi, une fenêtre correspondant à un bonusdémographique s’ouvre, elle sera de courtedurée et il faudra savoir en tirer profit pourconsolider et amplifier les acquis dudéveloppement. Cela s’accompagnera par lemaintien de la pression sur le marché del’emploi avec une demande additionnelle de

L’indice synthétique de la fécondité (ISF) qui aatteint 2,05 en 2009 continuera sa baissetendancielle pour se stabiliser à 1,75 à partirde 2024. La population totale atteindra 12millions en 2024 et 12,7 millions en 2034,soit un taux de croissance de 0,8% durant les25 prochaines années. Le poids de lapopulation des enfants baissera progressivementpour atteindre moins de 28% en 2020 et celuides personnes âgées de plus de 60 ansdoublera passant de 10% à 20% durant les 25prochaines années. Dans ces perspectives, lecontexte démographique des cinq prochainesannées sera marqué par un allègement de lacharge des enfants et une légère augmentationde celle des personnes âgées.

Durant les quinze dernières années, la Tunisiea enregistré des progrès soutenus dans ledomaine économique. La croissanceéconomique a atteint une moyenne de 4,8%entre 1995 et 2010. La baisse du rythme decroissance démographique à partir des années1990 (cf. graphique ci-contre) a permisl’amélioration des revenus et des conditions devie. En 2010, le PIB de la Tunisie a été estiméà environ 45 milliards $ US ; le PIB par tête aainsi dépassé le seuil de 4 000 $ US.

Graphique 3 : Projection des poids despopulations âgées de moins de 15 ans et deplus de 60 ansSource : d’après les projections de l’INS

Graphique 4 : Évolution comparée de lacroissance économique et du croîtdémographique (1980-2010)Source : d’après les données du MDCI

1.1.2 Le contexte économique et social

l’ordre de 88 000 demandes par an quirisque d’aggraver la situation du chômagedans le pays. Le défi à relever durant lesprochaines années consistera à atteindre unnouveau palier de croissance économique plusvigoureuse et plus intensive en emplois.

Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

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Concernant les Objectifs du Millénaire pour leDéveloppement (OMD), la Tunisie se placeparmi les pays les plus avancés du continentafricain dans l’achèvement des OMD. Lesprogrès réalisés dans les différents domainescouverts par les OMD placent la Tunisie sur labonne voie d’atteinte de ces objectifs, àl’exception de l’objectif de réduction de lamortalité maternelle qui ne pourrait pas êtreatteint en l’absence d’une action d’enverguremajeure. Par ailleurs, les analyses effectuéesrelèvent d’importantes disparités régionales etpréconisent un suivi régionalisé des OMD.

Au lendemain de la révolution du 14 janvier2011, plusieurs doutes ont été émis sur ce quecertains appelaient « le miracle économique »tunisien et sur la pertinence de son modèle decroissance qui s’est avéré non générateur dedéveloppement. L’aggravation du chômagedans plusieurs régions du pays etparticulièrement parmi les jeunes et lesdiplômés, la prolifération de la pauvreté et lesentiment généralisé d’injustice sociale ontconstitué les ingrédients de base alimentant lemouvement de révolte.

Les chiffres officiels montrent que la politiqueéconomique adoptée durant ces dernièresannées était prudente et a permis de maintenirla stabilité des équilibres macro-économiques.En 2010, le déficit budgétaire était limité à2,5% du PIB, le taux d’endettement extérieur aatteint moins de 40% et le taux d’inflation a étémaîtrisé à 3%. Le PIB par tête en termes réelsa doublé durant les trente dernières années.Depuis le milieu des années 1990, ils’améliore à un rythme annuel de 3,8%comme l’illustre le graphique ci-contre.

Graphique 5 : Évolution de la populationtunisienne et du PIB/tête (1970-2010)Source : calculs de l’auteur d’après les données du MDCI

Six mois après la chute du régime, lesindicateurs socioéconomiques sont plutôtalarmants. Cela concerne le ralentissement del’appareil productif, les pertes d’emplois,l’aggravation du chômage, le désistement desinvestisseurs et des touristes, l’appauvrissementdes plus vulnérables, l’amenuisement desrecettes fiscales et des réserves en devises et lecreusement du déficit public et de celui desopérations courantes. Les difficultéséconomiques et sociales nées de la révolutionse sont aggravées par la crise libyenne qui aimpacté négativement l’économie tunisienne.En effet, la Libye est le deuxième partenairecommercial de la Tunisie après l’Unioneuropéenne et le flux annuel des deux millionsde Libyens qui visitent la Tunisie pour tourisme,soins de santé ou pour achats divers, génèreun dynamisme économique devenu vital pourplusieurs régions du pays.

LE CONTEXTE GENERAL ET LES POLITIQUES NATIONALES 1.

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La Tunisie vit actuellement une situation deralentissement économique. Le taux decroissance du premier semestre 2011 a éténégatif (-3%). La récession a notammentconcerné le secteur touristique et les industriesextractives. Ainsi, les recettes touristiques et lesrevenus du travail ont baissé respectivement de47,2% et de 9,2% durant les 7 premiers moisde 2011 comparativement aux 7 premiersmois de 2010. Quant aux réserves en devises,elles connaissent une baisse continue et ontatteint un niveau inférieur à 10 milliards DT àfin juillet 2011 couvrant 111 joursd’importation contre plus de 13 milliards DT et147 jours d’importation à fin décembre 2010.

Graphique 6 : Évolution des réserves endevises (2000-2011)Source : Banque Centrale de Tunisie

Graphique 7 : Évolution des recettestouristiques (2005-2010 et 7 premiers mois2011)Source : Banque Centrale de Tunisie

Graphique 8 : Évolution des revenus dutravail (2005-2010 et 7 premiers mois 2011)Source : Banque Centrale de Tunisie

Ainsi, l’année 2011 a été une année difficilesur le plan économique. La crise du premiersemestre a eu un impact négatif sur les résultatsglobaux de l’année. Les prévisions de croissancepour 2011 tablaient sur une stagnation contreune croissance de 5,4% prévue par le cadragemacro-économique initial. La Banque Africainede Développement a élaboré pour 2011 trois

1 Révolution tunisienne : enjeux et perspectives économiques, Banque Africaine de Développement, 11 mars 2011

scénarios1 aboutissant à une croissance variantde -2,5% à 1,1% et à 3,6% selon différenteshypothèses de reprise des activitéséconomiques. Il est prévu une aggravation dudéficit public atteignant 5% (contre 2,5% prévuinitialement) et aussi une aggravation du tauxd’endettement qui pourrait atteindre 47%contre 39% prévu.

Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

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Les conséquences sociales de la récession ontété considérables. Les pertes d’emplois sontestimées durant les premiers mois de 2011 à7 000 emplois par mois qui s’ajoutent au stockdes 500 000 chômeurs, 80 000 diplômés del’enseignement supérieur et 40 000 diplômésde la formation professionnelle en coursd’année, sans compter les primo demandeursd’emplois non diplômés. Au terme de l’année2011, le nombre des chômeurs dépasserait leseuil de 700 000 correspondant à un taux dechômage de l’ordre de 20%, marquant ainsiune forte aggravation par rapport aux niveauxatteints durant la période antérieure.

Graphique 9 : Évolution du taux de croissance Source : d’après les données du MDCI

Graphique 10 : Évolution du déficit publicSource : d’après les données du MDCI et prévisions

Graphique 11 : Évolution du taux dechômage Source : d’après les données du MDCI et prévisions

LE CONTEXTE GENERAL ET LES POLITIQUES NATIONALES 1.

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l’enfance 2002-2011 qui assoit la vision dugouvernement en matière d’enfance et lesdiverses stratégies à mettre en œuvre en vuede la réalisation des droits de l’enfant.

En matière de suivi des droits de l’enfant, laTunisie dispose de plusieurs mécanismes dont :

• Le Conseil supérieur de la jeunesse, del’enfance, du sport, de l’éducation physique etdes loisirs chargé d’analyser la situation,d’étudier les plans nationaux, de suivre leurexécution et de coordonner les programmesdes différents ministères, organismes etinstitutions qui interviennent dans ce domaine ;

• L’Observatoire de l’information, de laformation, de la documentation et de laprotection des droits de l’enfant chargé deconsolider les données sur l’enfance (avec unebase de données, Child Info, comprenant 364indicateurs) et d’initier des études dans ledomaine de l’enfance dont notamment lerapport annuel sur la situation de l’enfance ;

• Le corps des délégués à la protection del’enfance chargés de recevoir les signalementsd’enfants en danger et d’y répondre en liaisonavec les services régionaux. L’instauration dela fonction de délégué général à la protectionde l’enfance permet d’assurer la coordinationet le suivi des délégués régionaux.En matière de justice des mineurs, la Tunisies’est engagée sur tous les instruments etstandards internationaux. Le titre II du Code deprotection de l’enfant accorde un traitementparticulier aux mineurs dans le domaine de lajustice. L’âge de la responsabilité pénale desenfants est de 13 ans et la peine maximaleencourue est un emprisonnement de 10 ans.

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1.1.3 Le contexte politique : avancées en matière de législation enfaveur de l’enfance

La Tunisie est maintenant à la croisée deschemins. Elle a pris son destin en main etcommence une longue marche vers ladémocratie. Rompre avec le passé, bâtir sur lesacquis et éviter les dérapages tels sont lesmaîtres mots guidant son cheminement. LaTunisie nouvelle veut se libérer des séquellesdu passé et cherche à se doter d’une nouvelleconstitution tout en acceptant l’intégralité desrègles du jeu démocratique. Rien ne sembleimmuable, de profondes remises en cause sontproposées et des questions fondamentales sontposées. Les élections de l’AssembléeConstituante du 23 octobre 2011 ont constituéune première étape d’un long processus detransition démocratique dans lequel la Tunisies’est résolument engagée.

Concernant la législation en faveur del’enfance, plusieurs étapes clés ont renforcé laréalisation progressive des droits de l’enfantdepuis la ratification de la CDE en 1992. LaTunisie se prévaut d’un cadre législatiffavorable aux enfants, en particulier par lalégalisation relative à l’adoption plénière,l’attribution du nom patronymique à l’enfant néhors du cadre légal du mariage et l’abolitionde la polygamie. L’entrée en vigueur du Codede protection de l’enfant le 11 janvier 1996 aconstitué une étape importante et un acquis detaille en matière de protection de l’enfant et dejustice des mineurs.

La Tunisie a ratifié tous les instrumentsinternationaux liés à l’enfance ainsi que lesconventions de l’Organisation Internationaledu Travail renouvelant ainsi son engagementà œuvrer en faveur de l’enfance. Elle disposed’une stratégie décennale sur l’enfanceintégrant un Plan National d’action pour

Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

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La Tunisie a œuvré pour mettre en place unepolitique de prise en charge des questions del’enfance à tous les niveaux réaffirmant ainsil’engagement du pays en faveur du bien-êtreet de l’épanouissement de l’enfant. Cet intérêts’est traduit par des investissements importantsà travers un grand nombre d’institutionschacune développant des programmesspécifiques en faveur de l’enfance selon lespréoccupations et mandats respectifs. LeMinistère de l’Éducation (ME), garant de lascolarisation de tous les enfants, est unintervenant de premier ordre dans les affairesde l’enfance ; le Ministère de la Santé Publique(MSP) est le principal opérateur pour garantirla protection et la prévention des enfants contreles maladies ; le Ministère de la Justice (MJ)prend en charge les enfants en conflit avec laloi; le Ministère de l’Intérieur (MI) protège lesenfants contre la délinquance ; le Ministère dela Jeunesse et du Sport (MJS) contribue àassurer les services récréatifs et culturels ; leMinistère des Affaires Sociales (MAS) œuvrequant à lui dans le domaine de la protectiondes enfants sans soutien familial ou menacés.

Le Ministère des Affaires de la Femme (MAF),à travers ses missions intersectorielles, assureen plus de la gestion des institutions de lapetite enfance et de l’animation socioculturelle,le pilotage du système de protection desenfants menacés ou en danger à travers desoutils de coordination qui mettent en harmoniele travail d’autres institutions relevant desautres départements ministériels.

À côté de ces institutions aux missionsexplicites destinées à l’enfance, d’autres

1.2 LA POLITIQUE NATIONALE EN FAVEUR DES ENFANTS ET DES JEUNES

1.2.1 Les acteurs

1.2.1.1 Les acteurs publics

départements ministériels développent desprogrammes ciblés dans le temps poursensibiliser les enfants à des questions quipréoccupent le pays telles que la protection del’environnement, la gestion rationnelle del’énergie et de l’eau, etc.

La Tunisie a mis en place un système decoordination et de concertation entre lesintervenants. Cette concertation se fait dans lecadre du Conseil supérieur de la jeunesse, del’enfance, du sport, de l’éducation physique etdes loisirs. Les recommandations issues desdélibérations de ce Conseil sont prises encharge par chaque département pour êtretraduites en programmes d’actions. Toutefois,l’efficacité réelle de ce système decoordination n’est pas prouvée et il paraîtbeaucoup plus comme un artifice formel qu’unréel outil opérationnel. Un système efficace decoordination nécessite la mise en place d’uneinstitution indépendante chargée decoordonner, de suivre et d’évaluer laréalisation des droits de l’enfant etl’instauration de mécanismes pérennesassurant l’efficacité de la coordination tant auniveau central qu’entre les structures centraleset les structures régionales.

Enfin, la protection des enfants menacés, endanger ou sans soutien familial nécessite lacollaboration de plusieurs intervenants tels queles services du MAS, du MI, les juges de lafamille ou de l’enfant et d’autres servicesrelevant du MJ et des services régionaux dudélégué à la protection de l’enfance relevantdu MAF. Le système de coordination entre ces

LE CONTEXTE GENERAL ET LES POLITIQUES NATIONALES 1.

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Le Comité des Droits de l’Enfant rappelle ses recommandations formulées lors de l’examen du deuxième rapport périodique etqui n’ont pas encore été mises en œuvre ou insuffisamment, dont celles concernant les châtiments corporels, le droit à la libertéd’expression et de réunion pacifique, le droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion, le droit de ne pas être soumisà la torture et à d’autres traitements cruels, inhumains ou dégradants, la collecte de données, en particulier sur la maltraitanceet la négligence, et l’exploitation économique et sexuelle des enfants.

Les observations finales du Comité relatives à l’examen du troisième rapport périodique de la Tunisie de suivi des droits del’enfant soulignent que des efforts supplémentaires doivent être entrepris en dépit des améliorations constatées. Une desrecommandations a concerné la mise en place d’une institution nationale indépendante de suivi des droits de l’enfant. Enmatière d’éducation, des progrès sont attendus sur le taux de préscolarisation, sur la qualité de l'éducation, sur la réductiondes abandons scolaires et sur la réduction des disparités entre les milieux et les régions. En matière de comportement civique,les marges d’amélioration concernent les aspects relatifs aux châtiments corporels, appelant des modifications législatives (dontcertaines, comme l’amendement récent de l’article 319 du Code Pénal, ont été réalisées) et l’application des poursuites judiciairescontre les auteurs de mauvais traitements sur enfant. Enfin, une étude approfondie pour déterminer les causes, la nature etl’ampleur des châtiments corporels devrait être conduite ainsi que des campagnes d’éducation, de mobilisation et desensibilisation sociale sur les effets néfastes des châtiments corporels et de la violence familiale. Le Comité recommande augouvernement tunisien de mener des campagnes de sensibilisation contre la discrimination visant les enfants nés hors mariageet les mères célibataires et à faire en sorte que ces dernières bénéficient d’une aide psychosociale et financière. Il recommandede garantir à ce groupe ainsi qu’aux enfants handicapés un accès équitable aux services de santé.

Les recommandations du Comité concernent aussi la poursuite des efforts tendant à améliorer le système de justice pour mineurset la revue de la législation dans les domaines de l’élargissement du recours aux peines de substitution, de la mise en place dudispositif de délégué à la liberté surveillée et du programme de réadaptation et réinsertion des enfants en fin de procédurejudiciaire, du suivi de la conformité des conditions de détention aux normes internationales et de la mise en place de mécanismesindépendants efficaces pour recueillir les doléances des enfants ayant affaire au système de justice pour mineurs et d’y répondre. Enfin, le Comité recommande la nécessité de disposer de données actualisées sur les enfants vivant en milieu rural, les enfantshandicapés, les enfants vivant dans la pauvreté, les enfants des rues, les enfants travailleurs, les enfants victimes d’exploitationet d’abus sexuels et les autres enfants vulnérables.

Encadré 1 : Observations finales du Comité des droits de l’enfant concernant le troisième rapport périodique de laTunisie : principaux sujets de préoccupation et recommandations (juin 2010)

différents opérateurs devrait permettre derépondre aux situations de menace et de gérerles cas d’enfants menacés signalés auprès dechacun de ces opérateurs intervenants. Piloté

par le délégué à la protection de l’enfance, cesystème devrait permettre de faire face auxproblèmes posés avec plus d’efficacité.

Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

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Les services fournis par les différentesinstitutions publiques aux missions explicites enfaveur de l’enfance sont renforcés par lesefforts de dizaines d’organisations de lasociété civile dont certaines se spécialisentdans la protection de l’enfance menacée, deshandicapés, des pauvres, et d’autres sontplutôt engagées pour faciliter les activitésculturelles et de loisir, ou des activitésd’éducation et d’animation socioculturelle.Toutefois, en raison des blocages politiques quiasphyxiaient la vie associative, les associationsintervenant dans le domaine de l’enfance, dela jeunesse et de l’adolescence sont peunombreuses, de taille et de capacités limitéeset souvent dotées d’une efficacité réduite. Leursinterventions ne répondent que trèspartiellement aux besoins des populationsciblées. Les besoins de ces associations enappui institutionnel émanant des instancesgouvernementales ou des organismesinternationaux semblent importants même siaucune analyse exhaustive n’a été menée pouren évaluer la teneur.

Le cadre d’analyse de la situation des enfants,jeunes et adolescents est fondé sur l’ensembledes engagements internationaux contractéspar la Tunisie qui a ratifié les principalesconventions internationales en matière de droithumain dont la Convention relative aux droitsde l’enfant.

Concernant cette dernière, la Tunisie a levé lesréserves qu’elle avait formulées portant sur lesarticles 2, 6, 7 et 40. En effet, la promulgationdu décret daté du 9 juin 2008 a permis à laTunisie de lever la dernière réserve à la

31

1.2.1.2 La société civile

1.2.2 L’engagement en faveur des conventions et accordsinternationaux sur les droits de l’enfant

Les interférences politiques, la faible assisefinancière et la forte dépendance vis-à-vis dessubventions publiques constituent aussi unelimite objective à l’expansion des associationsqui s’ajoute à leurs déficits en matière debonne gouvernance (transparence, processusde décision, participation, etc.), de capacitémanagériale (personnel, savoir-faire), decommunication, etc. Par ailleurs, le secteurprivé a été jusque-là quasiment absent et peuou pas impliqué dans la promotion del’enfance. Ceci est vrai en ce qui concernel’appui financier qu’apporte le secteur privé ausecteur de l’enfance et qui se résume la plupartdu temps à pourvoir d’une manièreoccasionnelle et ponctuelle les associations enmoyens financiers. Enfin, l’absence duréseautage entre les OSC/ONG et les autresacteurs du développement ne leur permet pasde créer des synergies susceptibles dedesserrer les multiples contraintes auxquelleselles sont soumises.

Convention des droits de l’enfant en laremplaçant par une observation à l’article 6de cette Convention.

La réserve levée porte sur le respect de l’équitémême si en matière d’héritage, la persistancede la loi 103 du code du statut personnelcontinue à donner une assise légale à l’iniquitébasée sur le genre. Il en est de même de la loi2003-51 portant sur le nom patronymique desenfants nés hors mariage et pour lesquels letest ADN a prouvé de manière scientifique etirréfutable la paternité, qui n’accorde pas pour

LE CONTEXTE GENERAL ET LES POLITIQUES NATIONALES 1.

Page 30: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

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Tableau 1 : La Tunisie et les conventions internationales dans le domaine du droit humainSource : d’après les données des Nations Unies (cf. http://treaties.un.org)

Date Date de ratification Non d'adoption ou d'adhésion par la Tunisie signataireconclusion Ratification Adhésion Non partie

1. Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide 09/12/1948 29/11/1956

2. Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale 07/03/1966 13/01/1967

2.a. Amendement à l'article 8 de la Convention internationale (2) 15/01/1992

3. Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels 16/12/1966 18/03/1969

3.a. Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels 10/12/2008

4. Pacte international relatif aux droits civils et politiques 16/12/1966 18/03/1969

5. Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques 16/12/1966

6. Convention sur l'imprescriptibilité des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité 26/11/1968 15/06/1972

7. Convention internationale sur l'élimination et la répression du crime d'apartheid 30/11/1973 21/01/1977

8. Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes 18/12/1979 20/09/1985

8.a. Amendement au premier paragraphe de l'article 20 de la Convention (8) 22/12/1995

8.b. Protocole facultatif à la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes 06/10/1999 23/09/2008

9. Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants 10/12/1984 23/09/1988

9.a. Amendements au paragraphe 7 de l'article 17 et au paragraphe 5) de l'article 18 de la Convention (9) 08/09/1992

9.b. Protocole facultatif se rapportant à la Convention (9) 18/12/2002

10. Convention internationale contre l'apartheid dans les sports 10/12/1985 25/09/1989

11. Convention relative aux droits de l'enfant 20/11/1989 30/01/1992

11.a. Amendement au paragraphe 2 de l'article 43 de la Convention relative aux droits de l'enfant 12/12/1995 29/03/2001

11.b. Protocole facultatif à la Convention (11), concernant l'implication d'enfants dans les conflits armés 25/05/2000 02/01/2003

11.c. Protocole facultatif à la Convention (11) concernant la vente d'enfants, la prostitution des enfants 25/05/2000 02/01/2003et la pornographie mettant en scène des enfants

12. Deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte international (4) visant à abolir la peine de mort 15/12/1989

13. Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille 18/12/1990

14. Accord portant création du Fonds pour le progrès des populations autochtones de l'Amérique latine et des Caraïbes. 24/07/1992

15. Convention relative aux droits des personnes handicapées 13/12/2006 02/04/2008

15.a. Protocole facultatif se rapportant à la Convention relative aux droits des personnes handicapées 13/12/2006 02/04/2008

16. Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées 20/12/2006 06/02/2007

autant la filiation plénière. « L'enfant dont lapaternité est établie, a droit à la pensionalimentaire et au droit de regard dont latutelle et la garde, … ».La loi est silencieuse par rapport au droit àl’héritage alors qu’en matière d’adoptionplénière, il est stipulé que l’enfant jouit de « tous les droits ».

L’engagement international en matière dedroits humains n’a de portée effective quedans la mesure où les dispositions contenues

dans ces conventions internationales sontintégrées dans la législation interne du pays.C’est à ce titre que les gouvernementsengagent leurs responsabilités morale etjuridique et qu’ils deviennent obligataires etmandataires de droits.

L’état de ratification ou d’adhésion de laTunisie aux traités internationaux en matière dedroits de l’homme est présenté dans le tableausuivant :

Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

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La Tunisie a accompli des efforts continus pouradapter et réformer son dispositif législatif demanière à le mettre en phase avec les normeset conventions internationales. Ainsi, nombrede lois, codes, réglementations ont étéintroduits et/ou ajustés en conséquence del’engagement international de la Tunisie.Certains exemples peuvent être cités :

• l’harmonisation des dispositions du code dutravail régissant l'âge d'admission des enfantsau travail avec celles de la conventioninternationale du travail n°138 sur l'âgeminimum: loi n°96-62 du 15 juillet 1996 ;

• la promulgation de la loi n° 1998-0075 du28 octobre 1998, relative à l'attribution d'unnom patronymique aux enfants abandonnésou de filiation inconnue ;

• la promulgation d’une loi sur l’orientation,l’éducation et l’enseignement scolaire : loin°2002-80 du 23 juillet 2002 ;

• la promulgation d’une loi sur la protectiondes enfants nés hors mariage : la loi n°51 du7 juillet 2003 ;

• la promulgation d’une loi sur l’âged’admission des enfants au travail domestique :la loi n°2005-32 du 4 avril 2005 modifiantet complétant la loi n°65 – 25 du 1er juillet1965 ;

Encadré 2 : Le Code de protection de l’enfant

Le Code de protection de l’enfant tunisien est structuré en 123 articles. Il cherche notamment à préserver l’intérêt supérieur del’enfant, une notion qui n’existait pas jusqu’ici dans la législation tunisienne en tenant compte de ses besoins d’ordre moral etphysique et en insistant sur la nécessité de garder l’enfant dans son milieu familial. Le Code institue un régime de protectionspécifique qui revêt à la fois un caractère social et juridique aux enfants vivant des situations difficiles (victimes de négligences,de violences, d’abus ou menacés de déviance). La protection est assurée par le biais du délégué à la protection de l’enfance, uncorps créé dans les 24 gouvernorats du pays pour assurer le suivi des enfants en difficulté et la médiation pénale entre l’enfantet sa famille ou l’enfant et l’institution. Il a également instauré le « devoir de signalement » qui oblige toute personne y compriscelle qui est soumise au secret professionnel à signaler au délégué tout danger menaçant un enfant. Ceci contribue à étendrele système de protection à l’ensemble de la société.Quant à la protection juridique, le Code privilégie dans toutes les situations l’adoption par le juge de moyens de prévention etde recours aux procédures amiables. Le Code propose par ailleurs un traitement spécial pour l’enfant délinquant caractérisépar la non-incrimination de ce dernier à l’exception des assassinats. En cas de sanction pénale, l’enfant doit être placé dans uneinstitution spécialisée ou à défaut dans une aile réservée aux enfants.

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• l’adoption le 9 novembre 1995 du CPE et ladésignation de délégués à la protection del’enfance qui s’en est suivie en vertu du décretn°96-1134, l’introduction d’une obligation designalisation des situations où des enfants sonten danger et la mise en place d’un systèmespécialisé de justice pour mineurs ;

• la promulgation d’une loi sur la promotion etla protection des personnes handicapées : laloi d’orientation n°2005-83 du 15 août 2005 ;

• la promulgation d’une loi sur le droit desgrands-parents à la visite de leurs petits enfants :la loi n°2006-10 du 6 mars 2006 ;

• la promulgation d’une loi sur lagénéralisation des conseils municipaux pourles enfants : la loi n° 2006-48 du 17 juillet2006 ;

• la promulgation d’une loi sur le travail à mi-temps au bénéfice des mères, avec lebénéfice des deux tiers du salaire : la loin° 2006-58 du 28 juillet 2006 et le décretn°2006 – 3230 du 12 décembre 2006 ;

• la promulgation d’une loi portant unificationde l’âge minimum de mariage des filles et desgarçons à 18 ans : loi n°2007-32 du 14 mai2007.

LE CONTEXTE GENERAL ET LES POLITIQUES NATIONALES 1.

Page 32: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

réalité de la pauvreté et de l’exclusion desenfants et des jeunes en Tunisie.

Au-delà du débat sur la crédibilité desstatistiques relatives au chômage et à lapauvreté, les données publiées en Tunisiemontrent d'incontestables disparités régionalesdes performances et des contre-performanceséconomiques et sociales pénalisant les régionsrurales et les régions de l’ouest tunisien d’oùsont parties les premières revendicationssociales qui se sont transformées en unvéritable soulèvement révolutionnaire. À défautde données plus récentes, les deux cartessuivantes, utilisant les données du recensementgénéral de la population de 2004, illustrentces disparités à travers la répartition pardélégation (la Tunisie est subdivisée en 24gouvernorats et 264 délégations) du taux dechômage et de la proportion des famillesnécessiteuses bénéficiaires du PNAFN.

L’État tunisien consacre aux secteurs sociauxplus de la moitié de son budget. En 2007, lesdépenses publiques d’éducation et deformation, d’intervention dans le domaine

Une apparence de fort engagement dans ledomaine social a longtemps constitué unepriorité pour les autorités tunisiennes. Desmalversations ont été relevées dans la gestiondes fonds sociaux ce qui a dénaturé leurvocation et a réduit considérablement leursimpacts en tant que véritable filet social. Larévolution du 14 janvier 2011 a mis enexergue la vulnérabilité du modèleéconomique et social tunisien et sa cohésionsociale. Aujourd’hui, une facette longtempscachée de la Tunisie est apparue. Elle montreles situations critiques des laissés-pour-comptedes stratégies de développement en place. Lescomposantes les plus vulnérables en sont lesenfants, les jeunes, les femmes et les personnesâgées. La question de la pauvreté, del’exclusion et de la justice sociale devient unsujet de débat posant diverses interrogationset interpellant des analyses spécifiques sur la

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1.2.3 La politique sociale et l’état de la pauvreté et de la vulnérabilité

Encadré 3 : Les programmes sociaux en faveur des enfants et des jeunes

Les programmes sociaux en faveur des enfants et des jeunes sont initiés par le Ministère des Affaires Sociales. Ils couvrent :1. La prise en charge des enfants et jeunes menacés d’échec scolaire. Il s’agit du Programme d’action sociale en milieu scolairecogéré par le MSP et le ME.2. La prise en charge des adolescents et jeunes en difficultés (jeunes délinquants et des défaillants scolaires). Elle est assuréedans les centres de défense et d’intégration sociale qui sont au nombre de quinze.3. La lutte contre le phénomène de la pauvreté à travers : i) le système d’aides permanentes : ces aides sont accordéesnotamment dans le cadre du programme national d’aide aux familles nécessiteuses (PNAFN), du programme d’aide auxpersonnes handicapées dans l’incapacité de travailler et du programme d’aide permanente aux personnes âgées sans soutienfamilial ; ii) le système d’aides occasionnelles : ces aides sont accordées aux personnes et familles nécessiteuses afin de leurpermettre de couvrir des dépenses supplémentaires occasionnées par les fêtes religieuses, la rentrée scolaire et universitaire etpendant les périodes difficiles ; iii) l’emploi des jeunes diplômés issus de familles nécessiteuses et les divers autres programmesdestinés à faciliter l’insertion professionnelle des jeunes : Fonds de solidarité nationale, Programmes de promotion des cités àforte densité de population, interventions de la Banque tunisienne de solidarité, etc.4. La protection des personnes handicapées à travers : i) un programme de création de source de revenu à leur profit a étéinstitué depuis 1987 en vue de réduire le chômage des handicapés et leur offrir des opportunités supplémentaires d’emploi. Ceprogramme consiste à financer la création de sources de revenu ; ii) les dispositions de la loi d’orientation du 15 août 2005relative à la promotion et à la protection des personnes handicapées qui stipule que chaque entreprise qui emploie plus de 100personnes doit consacrer 1% de ses postes d’emploi aux handicapés.5. La lutte contre l’analphabétisme par le PNEA.

social, de santé publique et de sécurité sociale,en faveur de l’enfance et de la jeunesse ontatteint 8,432 milliards DT, soit 56% du budgetde l’État.

Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

Page 33: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

La situation de la pauvreté des enfants et desjeunes n’a pas fait l’objet d’analyses précises.Une appréhension de ce phénomène peut,cependant, être effectuée à travers les donnéesrelatives aux familles pauvres et vulnérables etnotamment les données concernant lesinterventions du MAS à travers le Programmenational d’aide aux familles nécessiteuses(PNAFN) qui constitue, selon plusieurs études2,le plus important instrument de suivi de l’étatde la pauvreté en Tunisie. La carte n°2 illustreles disparités en termes de pauvretéappréhendée à travers la proportion desménages bénéficiaires du PNAFN.

35

Carte 1 : Taux de chômage par délégation(2004)Source : élaboration de l’auteur d’après les résultats du RGPH2004, INS

Carte 2 : Proportion des bénéficiaires duPNAFN (2011)Source : élaboration de l’auteur d’après les données de l’INSet du MAS

2 Analyse du phénomène de la pauvreté en Tunisie, PNUD, juillet 2004

Elle montre que le taux des ménagesbénéficiaires du PNAFN est particulièrementélevé dans 29 délégations où il dépasse 15%,soit trois fois la moyenne nationale. Il s’agit desdélégations suivantes : Matmata, Tamaghza,Dhiba, Kalaa Khesba, Menzel Habib,Hazoua, Gafsa Nord, Hidra, Saouef, Bargou,Majel Belabbes, Jendouba Nord, Belkhir, ElAoun, Métouia, Kalaat Sénane, Dégech,Siliana Nord, Gaafour, Jedéliane, Sidi Aïch,Faouar, Kesra, Aïn Draham, Remada, Tozeur,Souk El Ahad, Nefta, Kébili Nord.

LE CONTEXTE GENERAL ET LES POLITIQUES NATIONALES 1.

Page 34: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

Le taux de pauvreté a été estimé par l’INS en2005 à 3,8% correspondant à un seuil depauvreté de 400 TND par personne et par an.Les données non publiées, mais renduesdisponibles après la révolution montrent que leseuil supérieur de pauvreté a été fixé en 2005à 585 TND ce qui correspond à un taux depauvreté de 11,4% et à une population pauvrede 1,144 million. Le manque de transparencedans les statistiques de pauvreté en Tunisie aété signalé depuis 2002 par le système desNations Unies qui a recommandé ledéveloppement de l’outil statistique de mesurede la pauvreté en Tunisie pour s'adapter auxnouvelles réalités et aux nouveaux concepts envue d'une amélioration des méthodes detravail de manière à développer uneinformation précise et fiable.

Les données relatives aux familles nécessiteusesmontrent que le nombre de familles bénéficiairesdu PNAFN s’est stabilisé depuis le début desannées 2000 à environ 115 000 pour atteindreprogressivement 117 249 en 2008, 118 309en 2009 et 185 000 en 2011.

Ces ménages qui représentent 7,3% desménages tunisiens sont formés de près de700 000 personnes. Les bénéficiaires duPNAFN présentent les caractéristiquessuivantes : 23% sont handicapés, 36% sontdes malades chroniques, 69% sont des

36

Encadré 4 : Le Programme national d’aide aux familles nécessiteuses

Le Programme national d’aide aux familles nécessiteuses (PNAFN) a été institué en 1986 pour accompagner le Programmed’ajustement structurel dans le but de fournir une aide permanente au profit des familles nécessiteuses. Le PNAFN consiste àaccorder une allocation sous forme d’aide trimestrielle. En 2009, le montant de l’aide est fixé à 680 DT par an, versé en quatretranches trimestrielles. Les critères retenus par le MAS pour bénéficier du PNAFN sont les suivants :1. Un revenu annuel inférieur au seuil de pauvreté, fixé à 400 DT (2005)2. L’incapacité d’exercer un emploi pour raison de maladie ou de handicap3. La taille de la famille et le nombre de handicaps ou de maladies chroniques au sein de la famille4. L’absence de soutien parmi les descendants ayant un revenu ou l’incapacité de soutien familial de subvenir aux besoinsessentiel de la famille5. La détérioration des conditions de vie, d’habitat et des installations sanitaires.

Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

Graphique 12 : Taux et seuils de pauvreté(2005)Source : élaboration de l’auteur d’après des données obtenuesà partir de l’INS. La taille des bulles est proportionnelle aunombre de pauvres.

personnes âgées, 66% sont analphabètes et51,2% sont de sexe féminin dont 68% sontdivorcées ou veuves.

Par ailleurs, les interventions du MASpermettent de mieux appréhender le nombred'enfants , d'adolescents et de jeunes issus desfamilles nécessiteuses. Concernant les enfantsen âge préscolaire, l’Union Tunisienne deSolidarité Sociale (UTSS) prend en charge lesenfants des familles nécessiteuses dans ses 268jardins d’enfants dont 116 sont situés en milieurural et 152 dans les quartiers populaires àforte densité urbaine.

Page 35: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

membres de sa famille de bénéficier des soinsgratuits. L’absence de couverture socialebasique est au cœur de la très faible résiliencede cette catégorie de ménages. Par ailleurs, unaccès aux soins à tarif réduit est accordé à desfamilles à revenus limités non couvertes par lesystème de la sécurité sociale. L’éligibilité estfondée sur des critères de revenu et decomposition familiale. En 2011, près de558 000 familles à revenu limité disposaientde cartes de soins à tarifs réduits ce quireprésente 2,12 millions de personnes soit plusdu cinquième de la population tunisienne.Cette population correspondrait à lapopulation qui vit dans la précarité et qui seraitdonc économiquement vulnérable. Il s’agit làde situation de vulnérabilité d’intensitévariable. La résilience de ces familles n’est pasidentique face à des événements extrêmestouchant aussi bien les changements du revenuque la taille du ménage ou les conditions devie.

Le MAS a élaboré en 2011 une estimation dela pauvreté en Tunisie en considérant commepauvres les bénéficiaires du PNAFN (185 000ménages constitués de 697 000 personnes),les bénéficiaires des cartes de soins à tarifréduit ayant un revenu inférieur au salaireminimum garanti et une taille de la populationsupérieure ou égale à 5 membres (202 000ménages constitués de 1 291 000 personnes)et les pensionnés des Caisses sociales ayantune pension inférieure au SMIG (412 000ménages, 618 000 personnes).

Ces trois catégories représentent près de800 000 ménages constitués de 2,6 millionsde personnes, soit 24,7% de la population dupays. Ce taux dépasse 40% dans lesgouvernorats de l’ouest du pays : Siliana(50,1%), Kasserine (46,4%), Sidi Bouzid(42,3%), Kef (42,0 %) et Jendouba (41,0%).

37

3 H. Zaafrane : La Tunisie et les objectifs internationaux de développement, PNUD, Tunis, 2002 page 23-24

Le nombre d’enfants pris en charge par l'UTSSa évolué de 10 970 en 2005 à 11 820 en2010. Par ailleurs, les familles bénéficiaires duPNAFN ayant des enfants d’âge scolairebénéficient désormais d’une aide spécifiqued’un montant annuel de 120 DT par enfantscolarisé. Le nombre des familles bénéficiairesdu PNAFN qui profitent de cette aide a été en2009 de 26 503 pour un total de 50 915enfants et en 2010, il a atteint 27 485 famillespour un total de 52 674 enfants. Ainsi, en2010, on compte au total environ 64 500enfants issus des familles nécessiteuses en âgepréscolaire et scolaire. Cela représente 1,7%de la population totale en âge préscolaire etscolaire (tranche d’âge de 3 à 24 ans) estiméeà 3,778 millions en 2010. Il s’agit du noyaudur de la pauvreté infantile et juvénile.

La vulnérabilité pour un ménage reflète sondegré de réactivité ou sa capacité de résilienceface à des chocs et à des événementsinattendus ou imprévus. Elle exprime laprobabilité que le choc ou l’événementconduirait à une détérioration du niveau debien-être c’est-à-dire une dégradation duniveau de vie qui se situerait ainsi au-dessousdu seuil de pauvreté. La vulnérabilité estdifficile à appréhender en Tunisie en raison dumanque de disponibilités des donnéesstatistiques, notamment désagrégées. Toutefois,les données du MAS concernant lesbénéficiaires des cartes de soins sontrévélatrices de l’état de vulnérabilité desménages en matière d’accès aux soins. Lescartes de soins octroyées par le MAS sont dedeux sortes : cartes de soins gratuits et cartesde soins à tarif réduit.

Les bénéficiaires du PNAFN disposent decartes de soins gratuits. La carte de soinsgratuits permet à son titulaire ainsi qu’aux

LE CONTEXTE GENERAL ET LES POLITIQUES NATIONALES 1.

Page 36: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

38

Ces disparités régionales peuvent aussi êtreappréhendées à travers l’élaboration d’unindicateur régional de bien-être des enfants,adolescents et jeunes. Il s’inspire du « ChildDevelopment Index » qui est un indicecomposite constitué de 3 indicateurs : le tauxde mortalité infantile, le taux d’insuffisancepondéral des moins de 5 ans et le taux net descolarisation dans le primaire. Un indicateursimilaire construit à partir du taux de mortalitéinfantile, de la prévalence de l’insuffisancepondérale et du taux de scolarisation des 6 –14 ans calculé pour la Tunisie atteint le scorede 0,685 pour l’ensemble du pays sur uneéchelle de 0 à 1. Trois régions présentent unniveau élevé avec un score supérieur à 0,8. Ils’agit du Grand Tunis, du Centre-est et duNord-est. Le Sud-est présente un score moyenet les trois régions du Nord-ouest, du Sud-ouestet du Centre-ouest présentent des scores plusfaibles (inférieur à 0,5). Par transposition de lamême démarche, un indicateur de bien-êtrepour les enfants, adolescents et jeunes peut êtrecalculé en retenant les indicateurs suivants : le

taux de survie après un an, le taux descolarisation des 6-14 ans et des 15-24 ans etle taux d’emploi des actifs âgés de 15 à 24ans. La moyenne obtenue à l’échelle nationaleest de 0,6. Huit gouvernorats présentent desscores faibles : Kasserine (0,18), Kairouan(0,30), Zaghouan (0,33), Jendouba (0,39),Tataouine (0,40), Siliana (0,42), Mahdia(0,46) et Sidi Bouzid (0,47).

Le phénomène de la pauvreté en Tunisie couvreainsi une réalité complexe et souventinquiétante. Son appréhension par la méthodeclassique de calcul du seuil de pauvretémonétaire à l’échelle du pays connaît deslimites considérables et ne permet ni de cernercette réalité ni d’initier des politiques efficacesde lutte contre la pauvreté. La révolutiontunisienne était essentiellement motivée par uneaspiration vers la dignité. Les chercheurs etdécideurs sont ainsi interpellés pour traduire ladignité en un concept mesurable et enrichir lesanalyses de la pauvreté monétaire par d’autresanalyses non monétaires telles que celles enterme de bien-être.

Carte 3 : Taux de pauvreté par gouvernoratselon les données du MAS (2010 – en %)Source : élaboration de l’auteur d’après les données du MAS

Carte 4 : : Indicateur du bien-être des enfants,adolescents et jeunes, répartition pargouvernorat (2004)Source : élaboration sur la base des données du MSP, ME et de l’INS

Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

Page 37: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

39

2.1 LA SANTE DE LA MERE ET DE L’ENFANT : ETAT DES LIEUX

Le droit de la mère et de l’enfant, del’adolescent et du jeune à la survie et à lasanté figure parmi les droits fondamentauxdéfinis par plusieurs conventionsinternationales et notamment la Conventionrelative aux droits de l’enfant. Les articles 6,24 et 26 se rapportent à l’enfant en général(droit à la vie et au développement, droit de

LE DROIT A LA SURVIE ET A LA SANTE

jouir des meilleurs états de santé possible etdroit de bénéficier de la sécurité sociale);l’article 23 a trait aux porteurs de handicap.Enfin, les articles 33 et 34 concernent le droitde l’enfant à la protection contre laconsommation de drogues et l’exploitationsexuelle.

La mortalité maternelle.Élevée au rang d’objectif de santé prioritaire,la mortalité maternelle a été réduite de 35%ces quinze dernières en passant de 68,9 à44,8 pour 100 000 naissances vivantes entre1994 et 2010. Ces données récentes sontissues du rapport préliminaire (novembre2010) de l’Enquête Nationale sur la MortalitéMaternelle en Tunisie menée par le MSP etl’OMS. Bien que des efforts aient été déployéspour réduire de trois quarts le taux de mortalitématernelle à l’horizon 2015 par rapport à sonniveau de 1990, le rythme actuel deprogression ne permettra pas l’atteinte de cetObjectif du Millénaire. Un décalage importantpersiste comme l’illustre le graphique ci-contre :le taux prévisible (39‰ contre un objectif de18,7‰).

Les résultats de l’enquête nationale sur lamortalité maternelle de 2010 confirment ainsila non atteinte de l’objectif 5 des OMD pourla Tunisie avec une persistance des disparitésrégionales en dépit de leur réduction : le tauxde mortalité maternelle varie de 27,9‰ auNord-est, à 30,5‰ au Centre-est, 56,8‰ auSud-ouest et 67,0‰ au Nord-ouest. Desprogrès conséquents restent à accomplir

2.1.1 La santé de la mère

notamment dans les régions, moyennant unemeilleure qualité des soins à assurer auxfemmes au cours de la grossesse et au momentde l’accouchement en améliorant le niveau deprofessionnalisation des acteurs et unemeilleure fonctionnalité des structureshospitalières régionales et universitaires.Même si l’objectif 5 des OMD ne peut êtreatteint, la réduction de la mortalité maternellereste possible car les analyses menées en1994 ont montré que 87% des décèsmaternels enregistrés étaient évitables.

Graphique 13 : Taux de mortalité maternelle :Évolution et OMDSource : MSP et nos projections

2.

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40

Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

La surveillance de la grossesse, l’assistance àl’accouchement et les soins post-natals. En 2006, plus des deux-tiers (67,5%) desfemmes enceintes ont été couvertes par aumoins quatre consultations au cours de leurgrossesse. Cela représente une progression de10 points de pourcentage par rapport à lasituation en 2000 (le taux était de 57,3%).L’amélioration a concerné l’ensemble desrégions et les écarts régionaux se sont réduits.Le graphique ci-contre montre la répartition dutaux de recours à la consultation prénatale pardistrict en 2006.

En 2006, près de 95% des accouchements sesont déroulés dans des structures de soinspubliques et privées. Ce sont, comme c’est lecas pour la couverture des femmes enceintespar les consultations prénatales, les

gouvernorats du Centre-ouest qui enregistrentles taux les plus faibles. Pour ce qui est de lasurveillance postnatale, l’adhésion des femmesà cette prestation reste encore modeste : 50%au niveau national.

Graphique 14 : Taux de consultation prénatale(2006)Source : Ministère de la Santé Publique

Graphique 15 : Proportion d’accouchementssurvenus dans des structures de soins (2006)Source : Ministère de la Santé Publique

Graphique 16 : Taux de surveillance postnatale(2006)Source : Ministère de la Santé Publique

Page 39: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

41

La contraception. La prévalence de la contraception reste difficileà estimer, les résultats des enquêtes étantdifficilement interprétables. Les enquêtes del’ONFP ont montré une baisse de cetteprévalence, sauf dans les régions de l’Ouest etdu Sud où elle a progressé, alors qu’elle sesituait à un niveau faible. Pour les régionscôtières où une baisse a été enregistrée, cecipourrait s’expliquer du fait d’une duréed’utilisation plus courte des méthodescontraceptives. La prévalence de la contraceptionest passée au niveau national de 65,5% en1993-94 à 60,2% en 2006.

Graphique 17 : Prévalence contraceptive 1995et 2006Source : Ministère de la Santé Publique

Aperçu global. Le tableau suivant récapitule lesprincipaux indicateurs en matière de santé de

La mortalité infantile.La mortalité infantile a connu une baissesensible en Tunisie. Le taux de mortalitéinfantile a baissé de 5,4 points entre 2000 et2008 passant de 23,8 à 18,4 pour 1000naissances. Depuis 1990, le taux de lamortalité infantile a été divisé par plus de deuxen passant de 37,3‰ à 18,4‰, soit un reculannuel de l’ordre de 3,85%. De même, lamortalité des enfants âgés de moins de 5 ansa été réduite de moitié entre 1990 et 2005

passant de 50 à 25 pour 1000 naissances.Selon le rapport de l’UNICEF de la situationdes enfants dans le monde de 2008, le tauxannuel moyen de régression de la mortalitédes enfants de moins de 5 ans a été en Tunisiede 5,3% entre 1990 et 2007, taux nettementsupérieur à la moyenne mondiale (1,8%), àcelle des pays en développement (1,9%) et despays de l’Afrique du Nord et du MoyenOrient (3,2%).

l’enfant selon les données disponibles les plusrécentes :

2.1.2 La santé des enfants

Tableau 2 : Principaux indicateurs de l’état de santé des enfantsSource : MICS 2 – MICS 3 – INS – INN - DSSB

LE DROIT A LA SURVIE ET A LA SANTE 2.

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42

Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

Si l’on considère que la mortalité des enfantsde moins de 5 ans suit le même rythmed’évolution que celui de la mortalité infantile,le taux estimé en 2008 serait de 22,7‰. La

poursuite du même rythme de réductionpermettra d’atteindre l’OMD à l’horizon 2015comme l’illustre le graphique suivant :

La mortalité périnatale. La mortalité périnatale est la somme de lamortalité fœtale tardive (mortinatalité) et de lamortalité néonatale précoce (0 – 6 jours),rapportée à l’ensemble des naissances. Pource qui concerne la mortinatalité, son sous-

enregistrement par l’état civil constitue unobstacle majeur à sa qualification et àl’appréciation de son évolution. Sur la basedes chiffres de l’état civil, le taux demortinatalité est passé de 12,0‰ en 1980 à9,0‰ en 2006.

La baisse de la mortalité infantile est enmajeure partie due à la diminution de lamortalité post néonatale (décès entre les âgesde 29 jours et 364 jours), en rapport avec lesprogrammes nationaux de santé infantile(vaccination, lutte anti-diarrhéique et contre lesIRA, surveillance de la croissance, etc.). Laplupart des décès infantiles sont aujourd’huiconcentrés dans la période néonatale (0-28jours) et surtout néonatale précoce (0-6 jours).Ces décès sont en rapport avec les conditionsde la grossesse et de l’accouchement. Lesdisparités entre les régions se sont réduites :l’écart maximum était de 45,6 points en 1974,il n’est plus que de 11,2 points en 2004.

Graphique 18 : Évolution du taux de mortalitéinfantile et des moins de 5 ansSource : MSP et INS

Graphique 19 : Taux de mortalité des moinsde 5 ans : Perspectives d’évolution et OMDSource : MSP et nos projections

Graphique 20 : Diminution de la mortalitépost néonatale entre 1974 et 2004Source : d’après les données du MSP

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43

Ce modeste recul de la mortinatalité encomparaison à celui enregistré dans ledomaine de la réduction de la mortalitéinfantile peut être expliqué par un meilleurenregistrement des morts nés à l’état civil aucours des 25 dernières années.

Les infections respiratoires aiguës (IRA). En 2006, la prévalence des IRA chez lesenfants âgés de moins de 5 ans était de 6,1%,soit 1,56 épisode par enfant et par an, avectoutefois des disparités régionales : 11,6%dans le Nord-ouest et seulement 3% pour leCentre-est. La disparité entre les régions en2001 a été de 6,8 points (5,5% rapportée à12,3%). Elle s’est accentuée en 2006, 8,6points (3% rapporté à 11,6%). Si au niveaunational, la prévalence des IRA a baissé entre2001 et 2006 de 9,3% à 6,1%, elle aaugmenté dans le District Tunis et dans leNord-ouest en passant respectivement de 8,8%à 10,2% et de 8,8% à 11,6%.

Les maladies diarrhéiques.La prévalence est de 14,6% à l’échellenationale, soit 2,9 épisodes par enfant et paran (MICS 3), avec des disparités allant de9,7% dans le Sud-est à 17,8% dans le Nord-ouest. La prévalence de la diarrhée varie peuavec le sexe et diminue avec l’âge surtoutaprès 3 ans, mais est plus forte en milieu rural.Des enquêtes épidémiologiques ont montré unlien causal entre la prévalence de la diarrhéeet l’hygiène de l’environnement (en milieu ruralen particulier) et l’allaitement maternel. Cedernier constitue une variable causaleimportante dans l’issue de l’épisodediarrhéique.

Le handicap. Le nombre des personnes handicapées estpassé de 53 500 en 1989 à 90 860 en1999, à 151 423 en 2003 et à 152 287 en2004, soit une croissance annuelle de 5,4%entre 1989 et 1999 et de 10,9% entre 1999et 2004. La prévalence du handicap aaugmenté de 0,68% en 1989, à 0,97% en1999 et à 1,54% en 2004.

La population handicapée âgée de moins de20 ans est passée de 20 351 en 1999 à29 441 en 2003. L’augmentation du nombrede handicapés et la prévalence du handicaps’expliquent par une meilleure couverturestatistique de la population des handicapés.De même, en raison de l’évolution dudiagnostic et d’une plus grande exposition auxaccidents, la prévalence du handicapaugmente avec l’âge : 0,2% pour les moins de4 ans ; 0,7% pour la tranche d’âge 5-9 ans ;0,9% pour 10-14 ans ; 1,1% pour 15-19 anset 1,3% pour 20-24 ans. La répartition despersonnes handicapées par type de handicapmontre la prédominance du handicap moteurqui représente 38,8% du nombre deshandicapés recensés en 2004, suivi par lehandicap de type mental qui concerne 28,2%des cas.

Les personnes handicapées de type auditif etvisuel représentent respectivement 13,2% et13,9%. Enfin, le taux de multi-handicap est de5,2%. Près de 2 handicapés sur 3 sontanalphabètes et le nombre moyen d’annéesd’études pour les personnes handicapéesâgées de 10 ans et plus est extrêmementfaible, ce qui a pour conséquence l'existencede difficulté majeure d’insertion dans lemarché du travail.

Graphique 21 : Évolution du nombre deshandicapés par tranche d’âge (1999 -2003)Source : MAS

LE DROIT A LA SURVIE ET A LA SANTE 2.

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Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

La malnutrition.En Tunisie, l’état nutritionnel des enfants en basâge est satisfaisant et en amélioration. Lesindicateurs montrent que la région du Sud-ouest accuse les prévalences les plus fortes tantpour l’insuffisance pondérale que pour leretard de croissance et l’émaciation sévères.

• L’insuffisance pondérale sévère : Laprévalence est faible et en diminution entre2000 et 2006 (0,6% et 0,2% à l’échellenationale). Toutefois, au niveau régional, laprévalence est nulle dans le District de Tunis,le Nord-est et le Centre-est. Elle est de 0,9% etde 0,8% dans le Sud-ouest et le Nord-ouest.

• Le retard de croissance sévère : Laprévalence en 2006 à l’échelle nationale étaitde 1,2%. Elle a fortement baissé depuis 2000où elle était de 3,4%. Au niveau régional, ellea été réduite plus ou moins fortement dans lesrégions, sauf dans le Sud-ouest avec 4,3% en2006 et 5% en 2000. Aussi, la disparité estélevée 0,4% (Centre-est) et 4,3% (Sud-ouest)soit un écart de près de 3,9 points.

• L’émaciation sévère : La prévalence est trèsfaible avec 0,5% en 2000 et 0,3% en 2006.Seul le Sud-ouest affiche 1,6% soit plus de 5fois la moyenne nationale, alors que laprévalence est nulle ou presque dans le Districtde Tunis et le Centre-ouest.

L’allaitement maternel.L’allaitement maternel prémunit le nourrissoncontre les infections microbiennes et lui fournitles meilleurs composants nutritionnels. Selonl’enquête MICS3 réalisée en 2006, il s’avèreque 95,4% des enfants âgés de moins de 6mois ont été allaités au sein. La prévalence del’allaitement maternel exclusif est de 6,2%alors que 48,1% des enfants de moins de 6mois ont bénéficié d’un allaitement maternelavec un apport d’eau de boisson.

Globalement le taux d’allaitement maternel estsatisfaisant, mais sa qualité exclusive jusqu’àl’âge de six mois a nettement baissé depuis2000 (6,2% contre 46,5% en 2000 selonMICS 2). Ce recul s’expliquerait par le fait quel’enquête MICS 2 a été menée en hiver, alorsque l’enquête MICS 3 a été conduite en pleinesaison estivale. Les mères, pensant que le laitmaternel seul ne suffirait pas, donnaient à leursnourrissons de l’eau en plus de l’allaitement.

L’obésité chez les enfants.La prévalence de l’obésité chez les enfants demoins de 5 ans a été de 6,3% en 2006 àl’échelle nationale, avec toutefois desdisparités fortes entre les régions allant de9,8% dans le Nord-est à 3,3% dans le Centre-ouest. Les études et enquêtes épidémiologiquesrécentes montrent qu’il y a une augmentationde la prévalence de l’obésité infantile en milieuscolaire ce qui a tendance à devenir unproblème de santé publique en Tunisie. L’obésité précoce est associée à un risque accrude pathologies chroniques secondaires :complications métaboliques d’apparitionprécoce, atteinte cardiovasculaire etrespiratoire, complications digestives etosseuses, retentissement psychiatrique,néoplasies, etc. Ces complications sont de plusen plus rencontrées chez l’enfant et les jeunes.On cite en particulier : le diabète,l’hypertension, la dyslipidémie.

L’anémie. La prévalence de l’anémie chez les enfants de10 à 59 mois est relativement forte et elle estbien corrélée à l’anémie des femmes 15 – 49ans (0,750). Les enquêtes et analysesépidémiologiques convergent pour considérerque l’anémie par carence de fer continue àêtre un problème de santé publique chez lesfemmes en âge de procréer et les enfantsd’âge préscolaire. Dans les années soixante-dix, l’anémie était déjà considérée comme un

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45

problème de santé publique. Plus de deuxdécennies plus tard, et malgré uneamélioration remarquable des conditions et duniveau de vie, l’anémie continue d’être unproblème de santé publique majeur. L’enquêtenationale de nutrition de 1996-97 a montréque les prévalences n’ont que légèrementbaissé : 23,4% chez les enfants âgés de moinsde 5 ans ; 25,6% chez les femmes de 15 à 49ans ; 32% chez les femmes enceintes et 30%chez les femmes allaitantes.

La santé bucco-dentaire. La carie dentaire constitue la pathologie la plusrépandue en milieu scolaire. La prévention dela carie dentaire prémunit contre descomplications telles que les infections locales,les cardiopathies. À 15 ans, 4% des enfantsont des dents perdues par carie et la fréquencedes poly-caries chez les enfants est élevée. Laprévalence de la carie est également élevéechez l’adulte (75%) ce qui confère une grandeimportance à la prévention dès le jeune âge.

2.2 L’ENGAGEMENT PUBLIC, L’ACCES AUX SOINS PRIMAIRES

Il est incontestable que la Tunisie a enregistrédes progrès importants en matière de survie etde santé de la mère et de l’enfant. Ces progrèssont imputables à l’existence d’une vision

stratégique des acteurs publics en matière desanté de l’enfant, de la mère, de l’adolescentet du jeune, et de programmes nationauxciblés en conséquence.

Dès l’indépendance, le choix stratégique enmatière de santé publique a donné une prioritéau développement de première ligne et doncdes soins de santé de base. Ce choix a permisà la Tunisie d’endiguer les fléaux sociaux telsle paludisme, la bilharziose, le trachome, latuberculose, les diarrhées infectieuses, lapoliomyélite, le tétanos néonatal, etc. De plus,la Tunisie a lutté avec efficience contre nonseulement les maladies transmissibles maisaussi de carence (malnutrition protéino-calorique) tout en étant confrontée compte tenude la transition épidémiologique à denouvelles pathologies dont celles en rapportavec les comportements des jeunes et desadolescents.

Le Plan national d’action pour l’enfance 2002-2011 a précisé et actualisé les orientationsnationales en matière de promotion d’une viesaine et épanouie pour les enfants et

adolescents. La stratégie définie par le Plan estarticulée autour des objectifs suivants :

• Consolider les acquis de la santé de l’enfantet la contribution du secteur de la santé à sondéveloppement au sein de sa famille; • Réduire les écarts en matière d’offre de soinsentre les régions et entre les milieux ;• Promouvoir la qualité des prestations desanté physique, mentale et sociale dispenséesà l’enfant, à l’adolescent et à sa famille; • Renforcer la prévention et la prise en chargedu handicap, de l’incapacité chez l’enfant; • Mettre en œuvre et renforcer les stratégiesde santé adaptées aux adolescents.

2.2.1 Les stratégies et les programmes nationaux ciblés sur l’enfant

LE DROIT A LA SURVIE ET A LA SANTE 2.

Page 44: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

46

Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

De plus, le MSP a initié en 2006 une politiquenationale de santé de l’enfant âgé de moinsde 5 ans en matière de soins de santé de base.Les orientations stratégiques de cette politiquesont déclinées en cinq grands objectifs :

• l’amélioration de l’accès aux soins par unemeilleure organisation du système et enparticulier de l’offre des services de santé debase ;• la promotion de la prévention primaire ;• la réduct ion de la mor tal i té et de lamorbidité infanto-juvénile ;• la lutte contre le handicap ; • la promotion d’un environnement sain.

Plusieurs programmes ont été initiés depuis lesannées 1970 pour lutter contre les principalespathologies affectant les enfants et lesadolescents :

La couverture vaccinale. La vaccination des enfants s’est pratiquementgénéralisée dans l’ensemble du pays ce quisitue la Tunisie parmi les pays les plusperformants dans le monde. Les données del’UNICEF montrent que la moyenne des tauxde couverture par les 5 vaccins (BCG, DTCP1,DTCP3, polio3, rougeole et HepB3) atteintepar la Tunisie est de 98% contre une moyennemondiale de 82% et une moyenne de 89%pour les pays industrialisés.

Cela témoigne de l’engagement publicmanifeste pour les vaccinations et del’importance accordée à la dimension deprévention dans la politique sanitaire. Lesgraphiques suivants montrent les taux decouverture atteints par la Tunisie pour lesprincipaux vaccins en 2009 et unecomparaison internationale de la situationprévalant en 2007 :

• le Programme national de vaccination ; • le Programme national de périnatalité ; • la Stratégie Nationale de prise en chargeintégrée de la santé de la mère et de l’enfantqui comporte :

- la lutte anti – diarrhéique, - la lutte contre les IRA, - la prévention du handicap, - le suivi et la surveillance de la croissance etdu développement psychomoteur des enfantset adolescents,- la prévention des accidents domestiques ; - le Programme national de la santé mentale ; - le Programme national de lutte contre les ISTet Sida.

Ces programmes apportent des réponsesconcrètes aux problèmes de santé des enfantset des adolescents.

2.2.2 L’accès aux soins et les progrès en infrastructures sanitaires

Page 45: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

47

L’infrastructure sanitaire. Les progrès dans le domaine de l’infrastructuresanitaire peuvent être appréhendés par uneplus grande disponibilité des ressourceshumaines et matérielles. Le ratio du nombred’habitants par médecin est en continuellebaisse passant de 1827 en 1990 à 895 en2008. Ainsi, la densité médicale a plus que

doublé entre 1990 et 2008. La disponibilitédes lits d’hôpitaux après avoir enregistré unebaisse, passant de 1,9 lit pour 1000 habitantsen 1990 à 1,7 en 2003, connaît ces dernièresannées une augmentation en atteignant plus de1,8 en 2008. Les deux graphiques suivantsillustrent ces évolutions :

Graphique 22 : Taux de couverture desenfants par les principaux vaccins (2009)Source : d’après les données du Ministère de la SantéPublique

Graphique 23 : Couverture par les principauxvaccins, comparaison internationale (2007)Source : d’après les données de l’UNICEF, moyenne des tauxde couverture par les 5 vaccins : BCG, DTCP1, DTCP3,polio3, rougeole et HepB3

Graphique 24 : Évolution du nombred'habitants par médecin Source : d’après les données du MSP et de l’INS

Graphique 25 : Évolution du nombre de litsactifs d’hôpitaux pour 1000 habitantsSource : d’après les données du MSP et de l’INS

LE DROIT A LA SURVIE ET A LA SANTE 2.

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Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

En 2000, la Tunisie disposait de 167 hôpitauxet de 1 981 Centres de Santé de Base (CSB).En 2007, on comptait 172 hôpitaux et 2 079CSB. Le nombre de lits actifs a augmenté de16 659 en 2000 à 17 998 en 2007. Lenombre de médecins a atteint en 2007 plus de10 000 médecins répartis entre 5 268médecins de santé publique et 4 818 médecinsde libre pratique. La répartition régionale del’infrastructure sanitaire montre une plusgrande présence des structures sanitaires debase du secteur public (CSB) dans les régions

Graphique 26 : Répartition par gouvernoratdu nombre de lits pour 1000 habitants et dunombre des CSB pour 10 000 habitants (2007)Source : d’après les données du MSP et de l’INS

de l’intérieur, mais une concentration desstructures sanitaires publiques et privées ainsique du personnel médical et paramédical dansles gouvernorats du littoral. En 2007, lesgouvernorats du Grand Tunis, de Nabeul, deSousse, Monastir et Sfax qui représententmoins de la moitié de la population du paysregroupent 77% des cabinets dentaires, 72%des cliniques, 76% des cabinets de librepratique, 76% des médecins du secteur publicet 75% des médecins de libre pratique.

Graphique 27 : Répartition par gouvernoratde la densité du personnel médical etparamédical (2007)Source : d’après les données du MSP et de l’INS

En plus de la mortalité maternelle qui demeureune problématique majeure en matière de santématernelle, les principaux problèmes identifiésdans le domaine de la santé de la mère et del’enfant laissent entrevoir des disparités enmatière de droits dans les domaines suivants :

• les af fect ions de la période périnataleavec des conséquences graves en raison de lamortalité et aussi de l’invalidité et du handicap ;

• les maladies liées aux comportements etconditions en matière de nutrition (l’anémie etl’obésité) chez l’enfant ;• les maladies, les affections pathologiques etles traumatismes liés aux comportements àrisque des enfants, des jeunes et desadolescents.

2.3 LES PROBLEMES ET LES DEFIS

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49

2.3.1 La mortalité néonatale, le handicap et les maladies liées à la nutrition

Les affections périnatales constituent les causesprincipales (47%) de la morbidité infantile etdes décès des enfants de moins de 5 ans ; lesinfections respiratoires aiguës (IRA)interviennent pour 14%, les affectionscongénitales pour 11% et les diarrhées pourprès de 10%. Comme déjà précisé, la plupartdes décès infantiles sont concentrés sur lapériode néonatale et précoce en particulier. Legraphique ci-contre montre les principalescauses de morbidité infantile et de décès desenfants de moins de 5 ans.

Sur un plan général, deux causes sous-jacenteset structurelles ressortent :

• les causes liées aux difficultés dansl’accessibilité aux soins, tant en ce quiconcerne l’accessibilité pratique compte tenude la couverture des structures sanitaires et deleurs horaires de travail que l’accessibilitéfinancière relative aux faibles conditionséconomiques des ayants droit ;• les causes liées à l’insuffisance de la qualitédes soins prodigués.

Les enquêtes épidémiologiques montrent queles causes immédiates de mortalité et demorbidité néonatales sont pour une grandepart évitables et relèvent essentiellement de laqualité des soins. La qualité des services offertspar les structures de soins primaires concerneles aspects suivants :

• la qualité de l’accueil : les temps d’attentes,les conditions d’accueil et d’attente, le confortde la salle de consultation ; • la qualité technique : le plateau technique,la démarche thérapeutique et diagnostique ; • la qualité relationnelle.

Plusieurs de ces aspects sont au cœur desinsuffisances généralement constatées. Ellesfont l’objet d’une préoccupation certaine de la

Graphique 28 : Causes essentielles de lamorbidité infantile et des décès des enfants demoins de 5 ans (2006)Source : : Ministère de la Santé Publique

part des pouvoirs publics avec en particulier lagénéralisation des programmes nouveauxgarants de la qualité tels que le Programmenational de développement des circonscriptionssanitaires et la prise en charge intégrée de lamère et de l'enfant.

L’analyse causale des disparités régionalesdans le domaine de la mortalité infantilemontre que plusieurs facteurs interviennentdans l’explication de ces disparités. Ilsconcernent le niveau de vie qui pose leproblème de l’accessibilité financière enparticulier, les conditions propres à la mèrecomme le taux de fécondité chez les femmesâgées et l’accouchement en milieu non assisté,les conditions relevant du système de soins etla densité régionale des médecins, y comprisspécialistes, et du personnel paramédical.

Ainsi, la réduction de ces disparités passe par :

• une amélioration des conditions de vie etune meilleure couverture sociale afin defaciliter l’accessibilité financière aux soins debase combinés;

LE DROIT A LA SURVIE ET A LA SANTE 2.

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Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

• une meilleure sensibilisation et informationdes femmes et des actions en direction desfemmes rurales pour lutter contre la survivancedes résistances notamment en ce qui concernel’accouchement à domicile ;

• une meilleure dotation et répartitionrégionale des médecins spécialistes et dupersonnel paramédical qui est déterminante enmatière de qualité du système de soins.

Près de la moitié des handicaps (47,8%) sonten relation avec les conditions de la naissance.Ainsi, les causes explicatives généralementétablies par les enquêtes épidémiologiquesrelèvent que certaines sont liées à la conditionde la femme : la prévalence de laconsanguinité et le recours insuffisant auxconsultations pré-conceptuelles et prénatales.

Les deux schémas suivants présentent lesconclusions des analyses causales menéespour les deux objectifs du millénaire liées à lasanté de la mère et de l’enfant. Ces

présentations permettent de mieux visualiser lesdroits qui ne sont pas totalement réalisés etleurs causes immédiates, sous-jacentes etprofondes.

2.3.2 Les principales analyses causales

En matière d’anémie, les enquêtesépidémiologiques chez les enfants montrentque le déficit d’apport en fer est l’un desprincipaux déterminants de la carence martialechez les enfants. Concernant l’obésité, lesenquêtes épidémiologiques ont montré que lescinq facteurs suivants constituent les causesprincipales à la prévalence de l’obésité : leniveau socio-économique de la famille, leniveau d’instruction des parents, les habitudesalimentaires, l’activité physique et lasédentarité. Les données régionales relatives àl’anémie montrent que le Sud-ouest et le Centre-ouest sont plus touchés. Alors que pourl’obésité, le Nord est plus particulièrementconcerné par la prévalence de l’obésité chezles enfants de moins de 5 ans.

Page 49: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

51

Figure 1 : Mortalité infantile, analyse causale

Figure 2 : Mortalité maternelle, analyse causale

LE DROIT A LA SURVIE ET A LA SANTE 2.

Page 50: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

52

Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

La capacité d’un acteur qu’il soit détenteur dedroits ou obligataire ou mandataire de droits estune condition essentielle pour que les premiersrevendiquent leurs droits et les seconds soient enmesure de remplir leurs obligations. Laméthodologie d’analyse des capacitéspréconisée par les organismes des NationsUnies repère quatre composantes clés de lacapacité : responsabilité et motivation, autoritéet habilitation, ressources humaines, financièreset organisationnelles et processus de prise dedécision et communication. Sur la base de ces4 axes, ont été analysés les déficits ou écarts decapacité, aussi bien des détenteurs de droits quedes mandataires ou obligataires4.

Les mandataires porteurs d’obligation en matière

de droit à la santé de la mère et de l’enfant sont :l’État au niveau central et local, lesprofessionnels de la santé, le secteur privé, lesONG et les familles. Toutefois, l’État demeure lepremier responsable redevable de la mise enœuvre de ce droit. Les acteurs publics sontnombreux : le MAS, le MSP (ONFP, DSSB,DMSU, DHMPE, INNTA), la CNAM, le MAF, leMinistère de l’Industrie et de la Technologie.Néanmoins, en raison de l’importance crucialedes acteurs publics de la santé de la premièreligne, l’analyse de l’écart de capacité porterasur ces mandataires et cela concerne enparticulier le Ministère de la Santé Publique àtravers la DSSB et la DMSU, principauxresponsables (en plus de l’ONFP) de la premièreligne des soins de santé de base.

Dans le domaine de la santé de la mère et del’enfant, l’engagement et la volonté politique àl’échelle nationale est incontestable. Les choixstratégiques, les politiques nationales, lesprogrammes de santé orientés vers la mère,l’enfant, l’adolescent et le jeune traduisent lamotivation et la responsabilité des acteurspublics concernés. La législation et laréglementation ciblées sur la santé de la mèreet de l’enfant, de l’adolescent et du jeune sontgénéralement adaptées aux évolutions etrévisées en conséquence.

Concernant les capacités financièrespubliques, les données montrent que le secteurde la santé a connu une baisse de prioritédans l’arbitrage de l’affectation des ressourcespubliques. En effet, en dépit du doublement dubudget nominal consacré à la santé entre2000 et 2009 en passant de 560 M DT à907 M DT, le poids du budget de la santé dansle budget de l’État après avoir dépassé 9% àla fin des années 1990 connaît une baisseprogressive pour atteindre 6,5% en 2008. De

même, l’effort public de financement de lasanté publique mesuré en proportion du PIB adiminué dans les mêmes proportions enpassant de plus de 2% durant la décennie1990 à 1,6% en 2008.

2.4 ANALYSE DES ECARTS DE CAPACITES ET RECOMMANDATIONS

2.4.1 Les acteurs publics : Les principaux écarts de capacité

Graphique 29 : Évolution des dépensespubliques de santé en proportion du PIB et du Budget de l’ÉtatSource : d’après les données du MSP et de l’INS

4 Un questionnaire a été dressé à cet effet et selon un processus participatif itératif avec les principaux acteurs publics, les principaux écarts de capacité ont été dégagés et quelques recommandationsont été proposées

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53

Ce repli s’est accompagné par unredéploiement des ressources consacrées auxdifférents programmes de santé. C’est ainsique les ressources accordées au Programmenational de la périnatalité ont doublé entre2000 et 2009 reflétant la priorité accordée àla réduction de la mortalité maternelle.Cependant, d’autres programmes de santé ontvu leurs fonds stagner tout au long de ladécennie. C’est notamment le cas de laMédecine scolaire et universitaire dont le poidsdans le budget de la Santé a décliné de0,15% en 2000 à 0,09% en 2009. Dans unemoindre mesure, ce recul a concerné aussi lefinancement des groupements de santé debase dont le poids proportionnel a baissé.

Cette tendance pose la question de la qualitédu service public et semble orienter une partiede la demande vers les structures privées. Eneffet, si le système de prestation des soins desanté en Tunisie reste principalement public, lesecteur privé des soins de santé se développe :

il représente environ 12% de la capacité totaleen lits et 70% des services technologiques depointe. En termes de ressources humaines, ilemploie 50% des médecins, 73% desdentistes, et 80% des pharmaciens. Lescliniques privées sont concentrées dans lesrégions urbaines, dont la moitié dans lacapitale. Compte tenu des niveaux de latarification des services du secteur privé,l’accès aux soins privés par les ménages decondition économique modeste reste limité. Uncadre réglementaire adéquat, des mesuresincitatives appropriées, des partenariats avecle secteur public seraient de nature à amenerle secteur privé à développer ses activités endirection des régions les plus défavorisées. Ildevient urgent d’éviter le développement d’unecertaine iniquité d’accès aux services de santéde qualité. Cela ne doit pas handicaper ledéveloppement du secteur privé, mais doitpasser nécessairement par le relèvement et lamise à niveau de la qualité du service publicde santé.

L’expérience en cours au niveau de la DSSB montre à la fois les acquis et les limites de la décentralisation en Tunisie en matière de santépublique au niveau de la première ligne.Les acquis : La notion de circonscription sanitaire est apparue depuis plus de 30 ans (début des années 80). Elle a été appuyée par la mise enplace du programme national de développement des circonscriptions sanitaires en 1994 puis consacrée par le décret n°2825 du 27 novembre2000. La circonscription sanitaire marque un véritable tournant dans l’histoire des soins de santé de base en Tunisie. La stratégie de ceprogramme est composée de 5 axes : formation et aide à la recherche ; régionalisation ; développement de la participation communautaire ;accompagnement et suivi et promotion du profil de médecin de famille. Les efforts déployés jusque-là, et fortement soutenus par les organisationsinternationales OMS-UNICEF ont permis : 1 - l’implantation du programme dans toutes régions et circonscriptions du pays ; 2 - la formation des équipes locales et régionales sur les techniques de résolution des problèmes de santé et l'instauration progressive de lanotion de travail en équipe, l’objectif étant de permettre une gestion spécifique proximale des problèmes de santé s’adaptant aux nouveauxproblèmes notamment ceux liés à la transition épidémiologique (santé mentale, tabagisme, gériatrie, soins à domicile) ; 3 - l’élaboration de deux ensembles d’indicateurs : fonctionnalité des circonscriptions, qualité de service des programmes SMI.Les limites sont liées principalement à l’insuffisance des ressources matérielles et humaines. On peut les résumer dans les points suivants : 1 - la régionalisation est un axe à renforcer pour assurer un meilleur suivi des circonscriptions sanitaires ;2 - la certification des circonscriptions n’a pas démarré malgré la préparation des différents outils, le processus en lui-même n’a pas encoreété arrêté ; 3 - la recherche opérationnelle n’est pas encore entrée dans la tradition des équipes de santé;4 - l’instauration de la médecine de famille accuse du retard;5 - la participation communautaire reste le parent pauvre des soins de santé de base ; 6 - l’application de la stratégie qualité reste limitée.

Encadré 5 : Le développement des circonscriptions sanitaires : acquis et limites de la décentralisation

LE DROIT A LA SURVIE ET A LA SANTE 2.

Page 52: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

54

Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

Concernant les ressources humaines du secteurde la santé, les principales insuffisancesconcernent :

• la disponibilité des médecins spécialistes quireste insuffisante dans plusieurs régions del’intérieur du pays ;

• la formation initiale des médecins quiprivilégie fortement la dimension clinique audétriment de la dimension relationnelle etpsychosociale, ce qui rejaillit sur la qualité duservice ;

• la formation continue des médecins et descadres paramédicaux qui demeure insuffisante.

Il s’agit des mères, des enfants, adolescents etjeunes âgés de 0 à 24 ans qui connaissent dessituations de déni partiel ou total de droit. Ilsne jouissent pas, à des degrés divers, en toutou partie, du droit à la survie et au meilleurétat de santé possible ni d'un accès à desservices de soins de qualité. Les principauxécarts de capacité concernent les aspectssuivants :

• les niveaux de prise de conscience, desensibilisation et d’information sont faibles. Ledéficit d’écoute et d’accompagnement estsouvent en relation avec la culture ambiante :tradition de refoulement ( honte et culpabilisationpour le handicap par exemple ) ou destigmatisation pour les comportements àrisque. Les blocages inhérant à la tradition fontque la situation des personnes vivant avec leVIH ou des consommateurs de drogues estmarquée par la peur et le rejet accusant encoreplus leur vulnérabilité et l’exclusion. Le manqued’information sur la maternité à moindre risqueet sur le développement de l’enfant pour lesmères affaiblit aussi leur capacité en termes deresponsabilité ;

• les ONG agissant dans le domaine del’enfance (association de bienfaisance,secours, à caractère social) sont en nombrerelativement faible. Elles représentent 4,7% dunombre total des associations recensées enTunisie par l’UNICEF en 2006. Leurs actionsdans le domaine de la santé sont orientées versles enfants en situation de handicap, la

prévention du VIH et l’appui aux personnesvivant avec le VIH et les consommateurs dedrogues. Ces associations jouent un rôle deplaidoyer auprès des acteurs publics et despopulations et de soutien psychologique etmatériel auprès des ayants droit. Toutefois etpar-delà leur faiblesse en nombre, les ONGaccusent de nombreux déficits en termes decapacités financières (forte dépendance del’État et difficile accès aux financementsextérieurs), humaine et managériale (expertise,formation, savoir-faire, spécialisation). À celas’ajoutent souvent des problèmes degouvernance et une faible tradition à nouerdes partenariats efficaces. Au total, le déficiten ONG, tant en nombre qu’en qualitéd’intervention, n’habilite pas encoresuffisamment les ayants droit à faire valoir leursdroits même si la situation politique actuellelaisse présager un environnement d’ouvertureet de liberté plus favorable au travail del’ensemble des acteurs de la société civile ;

• la communication entre les ayants droit et lesmandataires publics accuse un déficit, ce quialtère entre autre le processus de dépistage etde prise en charge. Il est attendu des médiasplus d’implication pour faire entendre la voixdes ayants droit. Un déficit est là aussi àcombler.

L’analyse des écarts de capacités pour lesdeux objectifs du millénaire liés à la santé dela mère et de l’enfant peut être résumée dansles tableaux suivants :

2.4.2 Les ayants droit : les principaux écarts de capacité

Page 53: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

55

Tableau 3 : Mortalité infantile, détenteurs de droits et détenteurs d’obligations

Tableau 4 : Mortalité maternelle, détenteurs de droits et détenteurs d’obligations

Détenteurs d’Obligations Détenteurs de droits (nouveaux nés dans les zones rurales) Besoins en matière de capacités

Mère / Père

Prestataires

Bénéficier d’un bon examen prénuptial et d’unsuivi prénatal complet

Fournir des services de qualité

Connaissance de ses droits et possibilité de les revendiquer

Équipement, formation

Autorités sanitaires régionales Veiller à la mise en œuvre de l’application des stratégies

Ressources humaines et financières

Autorités sanitaires nationales

• Individualiser la néonatologie en tant que spécialité : formation spécialisée, structures desoins néo-natals• Veiller à la bonne application des règles de la consultation prénuptiale

• Ressources humaines et financières

• Stratégie et politiques appropriées

Média

• Plaidoyer, Sensibilisation pour un changementde comportement sur les questions ayant un rap-port avec la mortalité néo-natale (consanguinité,soins prénatals, etc.)

• Formation

Société civile • Sensibilisation, plaidoyer, réflexion,• Connaissance des droits et possibilité de les revendiquer, • Ressources et formation

Autorités législatives• Révision et amélioration de la législation envue de créer un environnement favorable

• Ressources humaines et financières

Système des Nations-Unies• Plaidoyer, assistance technique, aide à la mobilisation des ressources • Recherches, études

Détenteurs d’Obligations Besoins en matière de capacités

La famille / la femme / le mari• Assurer un environnement favorable à l’utilisation des services existants (protection des droits de la femme)

• Connaissance de ses droits et possibilité de les revendiquer• Renforcement des connaissances endroit des femmes

Prestataires • Fournir des services de qualité • Équipement, formation

• Ressources humaines et financièresAutorités sanitaires régionales

• Assurer l’accessibilité aux services (cartes de soins, transport, routes, etc.,)

Autorités sanitaires nationales

Autres autorités nationales

• Mise à niveau des compétences• Ressources humaines et financières• Suivi des stratégies et des programmes• Plaidoyer

Autres autorités régionales

• Veiller à la mise en œuvre de l’application des stratégies

• Stratégie et politiques appropriées

Société civile

• Révision des politiques et stratégies• Plans de développement• Financement et Budgétisation

• Ressources et formation

• Ressources humaines et financières

• Études, enquêtes et recherches

Autorités législatives

Système des Nations-Unies et Organisations internationales

• Sensibilisation, plaidoyer, réflexion,• Appui à la mise en œuvre

• Révision et amélioration de la législation• Assurer l’application des lois

• Plaidoyer, aide à la mobilisation des ressources, appui technique et financier

LE DROIT A LA SURVIE ET A LA SANTE 2.

Détenteurs de droits ( femmes de l’ouest du pays notamment

des zones rurales et périurbaines )

Page 54: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

2.4.3 Recommandations

56

Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

Sur la base du tableau dressé concernant lesprincipaux écarts de capacité, lesrecommandations suivantes ont été établiesselon un processus participatif impliquant lesacteurs publics :

1 - Domaine de l’information, des statistiques etdes études :

• renforcement des capacités des intervenantspublics en matière d’analyse, d'identificationdes besoins, de planification stratégique et desuivi et évaluation des programmes ;

• appui aux services locaux de santé scolaireet juvénile en matière d’élaboration d’unregistre local contenant toutes les informationset données collectées auprès des enfants et desjeunes se rapportant à leur santé, ces donnéesdevant être organisées selon l’âge, le sexe, lanature de la pathologie et l’historiquepathologique ;

• mise en place de services de statistique desanté et d’hygiène par région et par ville ;

• appui à la diffusion des bonnes pratiques(nationales et internationales) concernant lasanté de l’enfant (de la mère), du jeune et del’adolescent (en particulier des maladiesémergentes et/ou liées aux comportements àrisque en particulier).

2 - Domaine des ressources humaines :

• développement des compétences psycho-sociales des personnels en charge de la santéde l’enfant (de la mère), du jeune et del’adolescent ;

• équité de répartition et important renforcementde la présence dans les régions défavorisées ;

• développement des compétences en matièrede communication ;

• apprentissage de la mise en réseau desdifférents intervenants.

3 - Domaine de l’organisation :

• impérieuse nécessité du renforcement duniveau régional ;

• dynamisation de la participation communautaireet promotion de la participation des ONG dansle domaine de la santé de la mère et des enfants ;

• identification d’un processus de certification/accréditation et démarrage effectif de celle-cien bénéficiant des expériences d’accréditationd’autres pays ;

• instauration de l’exercice de la médecine defamille en profitant des expériences étrangèrestout en l’adaptant au contexte tunisien pourmieux se positionner dans le système de soinssurtout avec l’avènement de la CNAM qui metle médecin de famille dans une positionprivilégiée ;

• plaidoyer auprès des décideurs au niveau duMinistère de la santé et du Ministère del’enseignement supérieur pour institutionnaliserla formation spécifique à la gestion, la qualité,les techniques de communication, etc. ;

• élargissement du domaine d’action de lastratégie qualité en l’harmonisant avec ce quiest pratiqué dans les différents départementschargés de ce dossier.

Page 55: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

57

LE DROIT A L’EDUCATIONET AU DEVELOPPEMENT

Le droit à l’éducation consacré par la CDE estlargement reflété par la législation tunisiennequi instaura ce droit plusieurs décennies avantl’adoption de la CDE. Toutefois, certainsproblèmes et défis restent posés. Ils concernentl’accès à l’éducation préscolaire, l’efficacité

Le système éducatif tunisien est structuré seloncinq paliers ou niveaux :

• l’enseignement préscolaire qui comporte lesjardins d’enfants pour les enfants âgés de 3 à 4ans et l’année préparatoire à l’école de basepour les enfants âgés de 5 ans ;

• l’enseignement de base d’une durée de 9 ans.Il est gratuit et obligatoire et comprend un cycleprimaire de 6 ans et un cycle moyen de 3 ans.Au terme de la 6ème année, les élèves sontorientés soit vers l’enseignement de base

Les jardins d’enfants, les « Kouttebs » et lesclasses préparatoires à l’enseignement debase constituent le cadre dans lequel sedéroule l’éducation préscolaire. Le Ministèredes Affaires de la Femme est chargé de lacoordination entre les divers intervenants. LePlan d’action pour l’enfance 2002-2011confie au MAF la charge de la mise en œuvredes différentes mesures et actions concernantla fréquentation préscolaire. Plusieurs objectifsont été arrêtés dans le cadre de ce Pland’action visant notamment à :

• augmenter le taux de couverture au niveaudes jardins d’enfants pour atteindre 25,5% en2011 et au niveau des « Kouttebs », parvenirà une couverture de 9,5% en 2011 endonnant la priorité à l’action publique dans lesrégions rurales ;

• améliorer la qualité de l’éducation préscolaire ;

• généraliser l’année préparatoire à l’horizon2009 avec la collaboration du secteur public,du secteur associatif et du secteur privé.

3.1 EVOLUTION ET POLITIQUES PUBLIQUES

et la qualité de plusieurs niveauxd’enseignement. Après présentation desévolutions et de l’engagement public enmatière d’éducation des enfants et des jeunes,l’analyse des écarts de capacités permettra deformuler certaines recommandations.

général ou l’enseignement technique et pré-professionnel dans les collèges techniques ;

• l’enseignement secondaire d’une durée de 4ans est réalisé dans les lycées ;

• la formation professionnelle qui comprend, enplus de l’apprentissage, trois niveaux dequalification : CAP, BTP et BTS ;

• l’enseignement supérieur ouvert aux titulairesdu baccalauréat. Sa durée varie de 2 ans à 8ans.

Les jardins d’enfants.Durant les quinze dernières années, le secteurdes jardins d’enfants a connu une évolutionsignificative. Leur nombre a plus que triplé enpassant de 1 042 en 1995 à 3 562 en 2009et le nombre des enfants inscrits a connu uneévolution comparable en passant de 64 490à environ 142 600, soit un accroissementannuel moyen de 5,8%.

Cette évolution s’est accompagnée par ledéveloppement du secteur privé et undésengagement progressif du secteur publicdont le poids a atteint 12% en 2009 contre26% en 2000. En 2009, le nombre de fillesdans les jardins d’enfants dépasse celui desgarçons (72 833 contre 69 768), soit uneproportion des filles de 51%. Cette proportionétait de 48% en 2000. La répartition par âgemontre une augmentation des inscriptions avecl’âge : les enfants âgés de 3, 4 et 5 ansreprésentent respectivement 27%, 35% et 38%des enfants recensés dans les jardins d’enfantsen 2009.

3.1.1 Le préscolaire

3.

Page 56: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

58

Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

Graphique 30 : Évolution du nombre desjardins d’enfants (1995-2009)Source : MAF

Graphique 31 : Évolution du nombre desenfants inscrits dans les jardins d’enfants(1995-2009)Source : MAF

Le taux de couverture par les jardins d’enfantsa presque triplé entre 1995 et 2009 enpassant de moins de 11% à près de 30%.Toutefois, cette évolution est inégalementrépartie, d’une part, entre les régionset, d’autre part, entre les milieux. En effet,la présence des jardins d’enfants estconcentrée dans le milieu urbain et dansles régions du littoral. Le taux de couverturepar les jardins d’enfants dans les régions duDistrict de Tunis, du Nord-est et du Centre-estdépasse du double celui des régions du Nord-ouest et du Centre-ouest. Le graphique ci-contre illustre l’évolution dela couverture par les jardins d’enfants pourla période 1995-2009 :

Graphique 32 : Évolution du taux decouverture par les jardins d’enfants (tranched’âge 3 à 5 ans)Source : d’après les données du MAF et du MPCI

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59

Carte 5 : Répartition des Kouttebs et dunombre d’enfants inscrits aux Kouttebs (2009)Source : élaboration sur la base des données du MS, ME et de l’INS.

Les Kouttebs. Le Koutteb est un mode d’éducation préscolairecoranique surtout présent dans les quartierspopulaires du milieu urbain et périurbainet dans les agglomérations du milieu rural.Le nombre des kouttebs a connu uneaugmentation significative ces dernièresannées. Il est passé de 378 en 1987 à 1 086en 2009. Il est prévu que le taux de couverturepar les kouttebs passe de 7,5% en 2006 à9,5% en 2011. Les kouttebs sont implantésdans les différents gouvernorats avec desdensités différentes comme l’illustre la carteci-contre.

Le nombre des enfants inscrits aux kouttebs aatteint en 2009 près de 25 200 dont 44,2%de filles. Par ailleurs, la présence des femmesdans le corps enseignant exerçant dans leskouttebs est un phénomène récent et typiquequi mérite d’être souligné. En effet, les femmes,souvent diplômées de la Faculté de théologiede Tunis, représentent actuellement plus de30% des meddebs alors qu’elles étaienttotalement absentes il y a dix ans.Cela confirme l’orientation de modernisation,de rationalisation et de restructuration dusecteur introduite par le Ministère des AffairesReligieuses qui assure la tutelle des kouttebs.

L’année préparatoire. L’année préparatoire est intégrée àl’enseignement de base, mais elle n’est pasobligatoire. Toutefois, la loi d’orientation del’éducation précise que « l’État veille àgénéraliser l’année préparatoire qui accueilleles enfants de 5 à 6 ans, et ce dans le cadrede la complémentarité entre l’enseignementscolaire public et les initiatives des collectivitéslocales, des associations et du secteur privé »5 .

Depuis la promulgation de la loi d’orientationde l’éducation et de l’enseignement scolaire,les progrès réalisés n’ont pas permis de

généraliser l’année préparatoire. Dans lesecteur public, le nombre des écoles intégrantl’année préparatoire a significativementaugmenté en passant de 362 en 2002 à2 097 en 2010, soit plus de 46% des écolespubliques. Le nombre des élèves inscrits dansl’année préparatoire a plus que quintuplé enpassant de 7 667 en 2002 à 40 576 en2010. La proportion de filles dans l’annéepréparatoire est comparable à celle de lapremière année de l’enseignement de base,soit plus de 48%, cette proportion est restéestable durant la dernière décennie.

5 Article 17 de la loi n° 2002-80, loi d’orientation de l’éducation et de l’enseignement scolaire

LE DROIT A L’EDUCATIONET AU DEVELOPPEMENT3.

Page 58: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

60

Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

Graphique 33 : Évolution du nombre d’écolesintégrant l’année préparatoireSource : d’après les données du ME

Graphique 34 : Évolution des élèves inscrits enannée préparatoire (secteur public)Source : d’après les données du ME

Graphique 35 : Taux de couverture parl’année préparatoire : secteur publicSource : d’après les données du ME et de l’INS

Graphique 36 : Structure de la répartition desinscriptions en année préparatoire par acteur(2008-2009)Source : MAF et ME

La mise en place de l’année préparatoire dansles écoles publiques a privilégié en priorité lesécoles rurales dans le cadre d’une éventuellecomplémentarité avec le secteur privé qui seraitplus motivé d’investir en milieu urbain. Le tauxde couverture par l’année préparatoireredevable à l’effort du secteur public (ME) a plusque doublé ces cinq dernières années en

passant de 11% en 2004 à près de 23% en2009. Le taux de couverture par l’annéepréparatoire tout secteur confondu est de l’ordrede 63%. Les jardins d’enfants (dont 83% sontprivés) constituent le principal acteur en cettematière en contribuant à hauteur de 45% dansles inscriptions en année préparatoire commel’illustre le graphique suivant :

Ainsi, l’objectif de la généralisation de l’annéepréparatoire n’est pas atteint et d’une manièregénérale, le taux de fréquentation préscolaire

demeure insuffisant en Tunisie au regard del’importance révélée du cycle préscolaire dansl’éducation et le développement de l’enfant.

Page 59: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

61

Les progrès réalisés par la Tunisie dans ledomaine de l’éducation sont redevables auxchoix stratégiques en faveur de ce secteur dèsl’indépendance. Plusieurs grandes réformesont été initiées par les pouvoirs publics et onttouché toutes les composantes du système del’éducation et de la formation. Cettedynamique des réformes est un signe probantde l’engagement public en faveur du droit àl’éducation pour tous. Trois réformesfondamentales ont été mises en place auniveau de l’enseignement scolaire :

• La première réforme remonte à 1958. Elle ajeté les bases d’un système éducatif unifié,moderne, qui s’est assigné, entre autresobjectifs majeurs, la double mission d’ouvrirl’école à tous les enfants tunisiens sansdistinction de sexe, de race ou de religion etde former, dans l’urgence, les cadres dontl’État alors en construction, avait un impérieuxbesoin.

• La seconde réforme, consacrée par la loi du19 juillet 1991, a instauré l’école de base de9 ans gratuite et obligatoire. L’objectif est deconduire le maximum d’une classe d’âge auterme de la 9ème année en visant à minimiserles déperditions scolaires et à améliorerl’efficacité du système éducatif. La réforme atouché en même temps plusieurs plans, dustructurel au pédagogique en passant par lafinalité fixée à chaque cycle éducatif.

• La troisième réforme est initiée par la loid’orientation pour l’éducation et l’enseignementscolaire du 23 juillet 2002. Elle visenotamment à : a. considérer l’éducation comme une prioriténationale absolue et une responsabilitécommune de la collectivité nationale ; b. placer l’élève au centre de l’action

éducative ; c. renforcer le statut de l’institution éducativecomme cellule de base du système éducatif ; d. garantir les principes d’équité et d’égalitéentre les régions et les écoles ; e. rénover le système éducatif et actualiser sescapacités en intégrant les TIC dans le processusd’enseignement et d’apprentissage ; f. introduire dans le système éducatif desdimensions de professionnalisation ;g. rénover le système éducatif afin d’améliorerson rendement et ses capacités à satisfaire lesdemandes sans cesse croissantes de la société ; h. renforcer l’interaction entre l’acte éducatifet l’acte de développement.

Les progrès quantitatifs accomplis dans ledomaine de l’enseignement de base sontincontestables. L’accès universel et gratuit àl’école pour les filles et les garçons âgés de 6ans est atteint depuis plus d’une décennie.

3.1.2 L’enseignement de base et l’enseignement secondaire

LE DROIT A L’EDUCATIONET AU DEVELOPPEMENT3.

Graphique 37 : Proportion de filles àl’enseignement de base et secondaireSource : d’après les données du ME

Page 60: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

62

Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

De même, l’achèvement d’un cycle entier del’enseignement primaire visé par l’objectif dumillénaire est presque atteint avec un taux netde scolarisation de 97,7% pour la tranched’âge des 6 et 11 ans.

Par ailleurs, il faut souligner que la Tunisie aatteint l’OMD en matière de parité entre lessexes dans le domaine de l’éducation qui viseà « éliminer les disparités entre les sexes dansles enseignements primaire et secondaire d'icià 2005, si possible, et à tous les niveaux del'enseignement en 2015, au plus tard ». EnTunisie, la proportion des filles dansl’enseignement primaire et secondaire était de50,2 % en 2005 et de 50,6% en 2010. Pourtous les niveaux d’enseignement (y comprisl’enseignement supérieur), la proportion desfilles a atteint plus de 52% en 2010.

Graphique 38 : Évolution des effectifs élèves àl’enseignement primaireSource : d’après les données du ME

Graphique 39 : Évolution des effectifs élèves àl’enseignement moyen et secondaireSource : d’après les données du ME

L’évolution des effectifs à l’enseignementprimaire durant les deux dernières décenniesmontre une baisse des effectifs amorcée depuisle milieu des années 1990 expliquéeessentiellement par le phénomène démographiquede la baisse des naissances et aussi par laréduction des redoublements. Ces dernièresannées, une tendance à la stabilisation deseffectifs est observée, avec environ un milliond’élèves. Au second cycle de l’enseignementde base et à l’enseignement secondaire, lepalier d’un million a été atteint au milieu desannées 2000 et depuis, une certaine tendanceà la baisse, consécutive à celle enregistréedans le primaire, commence à être observée.Ce phénomène est intimement lié aux effets dela transition démographique en coursd’achèvement et marquée par la réduction dunombre d’enfants par famille. Les graphiquessuivants illustrent ces évolutions :

Page 61: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

63

La baisse des effectifs dans l’enseignementprimaire a permis de dégager des ressourceshumaines et matérielles qui ont été investiesdans l’amélioration des conditions dedéroulement des études. C’est ainsi que le ratiodu nombre d’élèves par enseignant est passéde 22 en 2002 à 17 en 2010 et la taille desdivisions pédagogiques a été réduite à 22 en2010 contre plus de 28 en 2002. Uneévolution comparable a été observée auniveau de l’enseignement moyen et del’enseignement secondaire. C’est ce qu’illustrele graphique ci-contre :

Les tableaux suivants présentent les principauxindicateurs de l’évolution de l’enseignement

primaire et de l’enseignement moyenet secondaire.

Graphique 40 : Évolution de la taille moyennedes divisions pédagogiques et du ratio dunombre d’élèves par enseignantSource : d’après les données du ME

Tableau 5 : Principaux indicateurs de l’évolution de l’enseignement primaire

Nombre d'écoles

Effectif élèves

Divisions pédagogiques

Enseignants

Taille des divisions pédagogiques

Ratio Élèves/enseignant

2001-02

4 476

1 314 836

46 426

59 884

28,3

22,0

2002-03

4 486

1 265 462

46 647

59 245

27,1

21,4

2003-04

4 487

1 215 888

47 532

58 761

25,6

20,7

2004-05

4 494

1 171 019

46 770

58 342

25,0

20,1

2005-06

4 492

1 120 424

46 422

58 281

24,1

19,2

2006-07

4 504

1 053 416

45 337

57 739

23,2

18,2

2007-08

4 507

1 019 421

45 335

58 716

22,5

17,4

2008-09

4 513

1 006 488

45 374

59 011

22,2

17,1

2009-10

4 517

1 008 600

45 677

58 567

22,1

17,2

Tableau 6 : Principaux indicateurs de l’évolution de l’enseignement moyen et secondaire

2001-02

1 065

603 765

424 047

1 027 812

31 146

49 331

33,0

20,8

2002-03

1 117

597 923

459 310

1 057 233

32 300

51 738

32,7

20,4

2003-04

1 161

583 005

493 233

1 076 238

33 103

55 717

32,5

19,3

2004-05

1 191

576 088

508 790

1 084 878

33 811

59 132

32,1

18,3

2005-06

1 232

571 986

503 531

1 075 517

34 612

62 528

31,1

17,2

2006-07

1 257

587 064

501 752

1 088 816

35 704

68 147

30,5

16,0

2007-08

1 384

574 605

499 936

1 074 541

36 458

71 384

29,5

15,1

2008-09

1 414

551 370

475 483

1 026 853

37 100

74 679

27,7

13,8

2009-10

1 438

504 719

481 848

986 567

36 881

75 104

26,8

13,1

LE DROIT A L’EDUCATIONET AU DEVELOPPEMENT3.

Nombre d'établissements

Enseignement moyen

Enseignement secondaire

Total moyen et secondaire

Divisions pédagogiques

Enseignants

Taille des divisions pédagogiques

Ratio Élèves/enseignant

Page 62: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

64

Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

Les niveaux des taux de scolarisation atteintsen 2010 (illustrés par le graphique ci-contre)témoignent d’un large accès à l’éducationéquitable entre filles et garçons pour lesdifférents niveaux d’enseignement scolaire : letaux d’inscription en première année adépassé 99%, le taux de scolarisation auprimaire s’est situé à plus de 98% et le taux descolarisation à l’enseignement moyen etsecondaire a atteint plus de 80% pour les filleset plus de 74% pour les garçons.

Les données publiées par le ME ne permettentpas d’apprécier les disparités existantes entreles régions et les milieux en matière d’accès àl’éducation. Les publications statistiques du MEétaient guidées par l’impératif politique etvisaient essentiellement à mettre en évidenceles indicateurs de succès du système.

Graphique 41 : Taux nets de scolarisation desenfants par tranche d’âge (2009-2010)Source : d’après les données du ME

Graphique 42 : Écoles intégrantes et élèveshandicapés intégrés par niveaud’enseignement (2008-2009)Source : d’après les données du ME

Le programme d’insertion des handicapés.L’intégration scolaire des porteurs de handicapest une préoccupation nationale. Le Ministèrede l’Education a appuyé la mise en placedepuis 1991 d’une politique de scolarisationen école ordinaire des enfants en situation dehandicap. Cette orientation a connu unrenforcement et une dynamisation durant lescinq dernières années : depuis 2003-2004,les effectifs des enfants porteurs de handicapsintégrés dans les écoles ordinaires ont plus quequadruplé. Durant l’année scolaire 2008-2009, leur nombre a atteint 1266 dans 291écoles primaires, 1019 dans 398 collèges et781 dans 296 lycées. Pour l’année scolaire2011-2012, leur nombre a été de 1599 dans324 écoles. Toutefois, cette évolution souffred’un problème d’équité de répartition enraison des prérequis nécessaires pour l’octroidu statut intégrant à l’école concernée.

3.1.3 Programmes spécifiques : l’insertion des handicapés et le PNEA

Page 63: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

65

En dépit de ces progrès, l’intégration scolairedes handicapés accuse encore des faiblesses.En effet, malgré un cadre législatif etréglementaire relatif à l’enseignement et à laformation des handicapés disposant que « lesenfants à besoins spécifiques ont le même droità un encadrement de qualité que les autres … »et que « l’encadrement pédagogique est centrésur l’enfant et doit être capable de répondrede façon pluridisciplinaire à ses difficultés »,des lacunes persistent en matière decollaboration des différents partenaires dansce programme. De même, il y a une grandedifficulté concernant la mise en œuvre d’unmatériel pédagogique spécifique. En outre, ila été constaté un décalage entre la formationthéorique et la réalité pratique dans les classesen l’absence d’une équipe multidisciplinaire.

En plus de ces insuffisances, une étudeconsacrée à l’évaluation de l’expériencetunisienne en matière d’intégration scolaire desenfants handicapés lancée par l’UNICEF6 etayant couvert 13 gouvernorats a mis l’accentsur plusieurs points faibles relevés en cettematière :

• problème de perception : l'intégration scolairen'apparaît pas comme un droit, mais plutôtcomme une tolérance ou une faveur accordée.Cela place les bénéficiaires et leurs parentsdans une situation inconfortable et perturbante.

• insuffisance de formation et deprofessionnalisme tant en ce qui concerne lesenseignants que le personnel de direction etd’encadrement ainsi que les inspecteurs qui nereçoivent pas de formation appropriée etsuffisante pour réaliser convenablement leurmétier dans le contexte spécifique des écolesintégrantes. Les enquêtes menées montrent queplus de 90% de ces enseignants n’ont reçuaucune formation spécifique.

• manque d’information et d’implication desparents qui demeurent non représentés, malinformés et pas conseillés.

• formation et enseignement non appropriésse traduisant par une très faible améliorationdes acquis et souvent par l’abandon de l’élèvehandicapé.

Recul de l’analphabétisme.Le taux d’analphabétisme de la populationâgée de plus de 10 ans a atteint 19% en2010. Il a connu une baisse régulière commel’illustre le graphique ci-après qui retrace sonévolution depuis l’indépendance. Toutefois, lesdisparités entre les hommes et les femmesdemeurent importantes : le taux d’analphabétismedes femmes est plus de deux fois supérieur àcelui des hommes : 26,4% contre 11,5%.

En dépit du fait que plus du quart des femmestunisiennes demeurent analphabètes, onconstate que le rythme de réduction del’analphabétisme reste faible pour les deuxsexes. L’extrapolation du rythme actuel montreque la réduction de moitié du tauxd’analphabétisme nécessitera une vingtained'années.

6 Évaluation de l’expérience tunisienne en matière d’intégration scolaire des enfants porteurs de handicaps, MAS-UNICEF 2010

Graphique 43 : Évolution du tauxd’analphabétisme des 10 ans et plusSource : : INS, Recensements de 1956 à 2004 et EnquêtePopulation-Emploi de 2010

LE DROIT A L’EDUCATIONET AU DEVELOPPEMENT3.

Page 64: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

66

Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

La réduction du taux d’analphabétisme engénéral et la disparité entre les milieux et lessexes sont retenues comme une prioriténationale aboutissant en 2000 à la mise enplace du Programme National del’Enseignement des Adultes (PNEA). Lesobjectifs visés par le PNEA dans le cadre duXIème Plan sont les suivants :

• réduire le taux d’analphabétisme de plus de10% parmi la population active à l’horizon2011, en alphabétisant 350 000 personnes ; • réduire le taux d’analphabétisme parmi lesjeunes de moins de 30 ans de 4,3% en 2006à moins de 1% durant la même période, enalphabétisant 200 000 jeunes analphabètes ; • continuer à accorder la priorité au sexeféminin et au milieu rural et notamment aux 10gouvernorats et aux 58 délégations où le tauxd’analphabétisme est supérieur au tauxnational ; • accorder une attention particulière àl’alphabétisation des populations actives dansles deux secteurs public et privé. Les objectifsvisés par le PNEA dans le cadre du XIème Plan

n’ont pas été atteints. En effet, le tauxd’analphabétisme chez la population activen’a été réduit que de 2,6 points (contre plus de10 points visés) et le taux d’analphabétismechez les moins de 30 ans est resté à 3,3%contre moins de 1% visé.

Les principales réalisations du PNEA durant lapériode 2000-2008 sont les suivantes :

• décuplement de la capacité d’accueil ;• mobilisation d’environ 600 000 apprenants,dont 34% de moins de 30 ans, 79% du sexeféminin et 59% issus du milieu rural ; • alphabétisation de plus de 461 000personnes contre 170 000 lors de la période1958-1999 ;• contribution à la résorption du chômageparmi les jeunes diplômés en mettant à leurdisposition annuellement environ 6 000 postesd’enseignants répartis sur environ 5000centres d’éducation pour adultes.

3.2 PROBLEMES ET DEFIS

3.2.1 Accès à une éducation préscolaire de qualité

L’analyse de la situation des droits des enfantset des jeunes à l’éducation permet de releverles principaux problèmes et défis suivants :• un accès encore faible et inégal à uneéducation préscolaire de qualité ;

• une efficacité interne insuffisante en termes deredoublement et d’abandon précoce ;• une qualité de l’enseignement à améliorermesurée par les faibles scores obtenus lors desévaluations internationales.

Le faible accès à l’éducation préscolairepourrait être expliqué par plusieurs facteurs :

• Les autorités publiques se sont fixé l’objectifde la généralisation de l’année préparatoireen 2009 en escomptant une large contributiondu secteur privé et associatif qui contribueraità hauteur de 70% à la réalisation de cet

objectif. Ainsi, la non-atteinte de l’objectif estofficiellement expliquée par une « défaillance »du secteur privé. Cela pose la question de lapertinence de ce partage des rôles dans lafréquentation préscolaire entre les secteurspublic, privé et associatif.

Page 65: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

67

• Les collectivités locales qui ont initié uneexpérience intéressante dans l’éducationpréscolaire se sont désengagées de manièremassive de ce secteur. Il serait opportun dereposer la question du rôle que pourraientaccomplir les collectivités locales dans ledomaine de l’éducation en général et celui dupréscolaire en particulier.

• Le secteur privé est peu incité à la créationde jardins d’enfants, notamment dans leszones les plus pauvres, en raison d’unerentabilité limitée. Les promoteurs privésévoquent la lourdeur et le caractèrebureaucratique du cahier des charges et lafaiblesse des mesures incitatives.

• Les ONG sont peu présentes, faute desensibilisation et d’incitation et aussi du fait dudéveloppement timide du tissu associatif.

• L’éducation préscolaire, assurée en majoritépar le secteur privé, est payante. Il est évidentque le niveau socio-économique des famillesconditionne pour une grande part l’accès aupréscolaire. Certaines catégories socio-professionnelles se trouvent insuffisammentinformées et motivées pour inscrire leursenfants dans le préscolaire. Ainsi, un problèmed’équité dans l’accès à ce service de base sepose de manière critique.

Plusieurs éléments sont avancés pour expliquerles faiblesses qualitatives de l’éducationpréscolaire :

• le manque ou l’insuffisance d’une formationappropriée de la plupart des éducateurs ;

• le guide pédagogique à la disposition deséducateurs manquerait d’opérationnalité ;

• le programme des activités éducatives n’estpas appliqué, d’où une réduction de l’efficacitédu rendement éducatif de ces programmes ;

• les inspecteurs sont, d’une part, en nombreinsuffisant, et d’autre part, se trouvent obligésde délaisser leur rôle d’encadrementpédagogique au profit du rôle administratifinhérent aux contrôles de la conformité avec lecahier des charges.

L’éducation préscolaire étant une variablecausale déterminante dans la réussite aupremier cycle de l’enseignement de base, ilserait urgent d’en faire une priorité et d’œuvrerefficacement à sa généralisation de manièreéquitable afin de garantir pour tous les enfantsl’accès à une éducation préscolaire de qualité.

3.2.2 Efficacité interne du système éducatif

Les graphiques suivants illustrent l’évolution destaux de redoublement et d’abandon dans lestrois cycles de l’enseignement scolaire durantles 15 dernières années. Leur examen permetde retenir les constats suivants :

• réduction sensible du redoublement et del’abandon au primaire, mais persistance d’un« noyau dur » d’abandon équivalent à 1,3%en 2009 contre 3,4% en 1998 ;

Graphique 44 : Taux de redoublement etd’abandon à l’enseignement primaireSource : d’après les données du ME

LE DROIT A L’EDUCATIONET AU DEVELOPPEMENT3.

Page 66: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

68

Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

• tendance croisée de baisse du redoublementet d’augmentation de l’abandon dans lescollèges. Les taux respectifs de ces deuxindicateurs ont atteint comme le montre legraphique 45 : 16,6% et 10,2% en 2009contre 23,4% et 9,4% en 1998 ;

• pour le secondaire, stagnation, durant ladernière décennie, du redoublement à un tauxdépassant 15% et de l’abandon à environ11%.

Graphique 45 : Taux de redoublement et d’abandon au second cycle del’enseignement de base

Graphique 46 : Taux de redoublement et d’abandon à l’enseignement secondaire

L’amélioration de l’efficacité interne au niveaude l’enseignement primaire ne s’est pasaccompagnée par une améliorationéquivalente de la qualité de l’enseignement.Les cycles post-primaires subissent les impactsde ce phénomène. Ainsi, la faible efficacitéinterne du système s’observe également auniveau des lycées et notamment dans lescollèges et en particulier pour la 7ème année del’enseignement de base où environ un élève sur4 refait l’année d’étude. Exprimée en termesd’effectifs, la problématique de l’abandonscolaire est encore plus frappante puisque,durant l’année 2008, 15 966 cas d’abandonont été enregistrés dans le cycle primaire,65 631 cas dans les collèges et 58 634 casdans le secondaire, soit un total cumulé de

140 231 cas. Cela s’explique notamment parl’hétérogénéité des élèves en raison d’unegrande disparité des niveaux consécutive :

• à l’absence d’une évaluation nationaledonnant accès aux collèges ;

• à l’absence de pédagogie différenciéetenant compte de la disparité des niveaux etdes rythmes différents d’apprentissage ;

• au manque de mécanismes de transition etd’accompagnement atténuant les problèmesd’adaptation que connaissent la majorité desélèves provenant du primaire.

Page 67: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

69

Carte 6 : Taux de scolarisation des 6-14 ans(2004)Source : Carte des priorités régionales dans le domaine del’enfance, MAF, UNICEF, 2007

Le phénomène des abandons scolaires n’a pasfait l’objet d’analyses précises au niveaurégional. Les données du recensement généralde la population et de l’habitat de 2004montrent que 4,9% des enfants âgés de 6 à14 ans ne sont pas scolarisés (4,5% pour lesgarçons et 5,3% pour les filles). Celacorrespond à une population de près de 82 500 enfants en dehors du système scolairedont 43 400 filles. Par ailleurs, la carte despriorités régionales dans le domaine del’enfance établie en 2007 avec l’appui del’UNICEF a permis de montrer que dans ledomaine de l’accès à l’éducation, 26délégations présentent des taux descolarisation inférieurs à 80%. Il s’agit desdélégation suivantes : Hassi El Frid, Errouhia,Fernana, El Aoun, Jelma, Sbikha, Sbiba,Hajeb El Aoun, Nadhour, Bouhajla, GharDimaa, Fériana, Kasserine Sud, MenzelChaker, Sbeitla, Foussana, Sabala OuledAskar, Oueslatia, El Alaa, Chebika, Kesra,Majel Belabbes, Sidi Ali Ben Aoun, Bir El Hfay,Kairouan Sud, Chrarda. En termes absolus, lesenfants âgés entre 6 et 16 ans et qui setrouvaient en dehors du système scolaire sesituent essentiellement dans les délégationssuivantes (plus de 1000 enfants non scolarisés) :Bouhajla (2210), Sbikha (2020), Sbeitla(1970), Ghar Dimaa (1830), Fernana (1780),Kairouan Sud (1590), Sbiba (1540), Fériana(1310), Jelma (1250), Hassi El Frid (1240),Errouhia (1240), Hajeb El Aoun (1120),Foussana (1110).

3.2.3 Qualité de l’enseignement La qualité de l’éducation est un concept difficileà mesurer. Si les examens servent à évaluer leniveau des connaissances acquises auxdifférents stades de l’enseignement, ils nepermettent cependant pas de mesurersignificativement les aptitudes à résoudre lesproblèmes et à instrumentaliser lesconnaissances acquises.

Les évaluations internationales des acquis desélèves, de type TIMSS (Trends in International

Mathematics and Science Study) et PISA(Programme international pour le suivi desacquis des élèves) constituent, d’une part, desréférences de mesure de la qualité desenseignements et, d’autre part, une base solidede comparaison internationale des acquis desélèves dans plusieurs pays. La Tunisie aparticipé à trois reprises aux évaluationsmenées dans le cadre de TIMSS initiées parl’Association internationale pour l’évaluationdes acquis scolaires.

LE DROIT A L’EDUCATIONET AU DEVELOPPEMENT3.

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70

Les évaluations concernaient deux grades (la4ème année et la 8ème année) et deuxdisciplines (mathématiques et sciences).

Les scores moyens réalisés par les élèvestunisiens sont présentés par les graphiquessuivants :

Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

Graphique 47 : TIMSS-Math, scores de laTunisieSource : d’après les données du ME

Graphique 48 : TIMMS - Sciences, scores de laTunisieSource : d’après les données du ME

Graphique 49 : Résultats PISA 2009,positionnement de la TunisieSource : d’après les données du ME

Les scores réalisés en 2007 par la Tunisierestent en deçà de la moyenne de l’échantillon(score 500) puisque le score atteint pour le testdes Sciences a été de 317 alors que pour lesmathématiques ce score s’est élevé à 326. Entermes d’évolution, la situation n’a passignificativement changé entre 1999 et 2007en ce qui concerne les scores moyens de laTunisie qui s’est classée 33ème sur unéchantillon de 36 pays.

Ces résultats montrent des performancesmanifestement limitées des élèves tunisiens,illustrant un certain déficit de qualité del’enseignement. La qualité de l’enseignementrelève en fait des pratiques pédagogiques. Eneffet, une part importante d'élèves tunisiensmaîtrise insuffisamment les compétences derésolution de problèmes, l'analyse, la synthèseet le raisonnement. Cela serait imputable aufait qu'on ne développe chez eux que lescompétences dites de restitution, celles quireposent davantage sur la transmission dessavoirs et leur accumulation. La constructiondes compétences d’analyse suppose unepédagogie active faisant place à laparticipation des élèves dans l'acquisition du

savoir et tenant compte de leurs besoins réelset de leurs rythmes particuliersd'apprentissage. Cette pédagogie nes'improvise pas. Elle s'acquiert par laformation tant initiale que continue. Cela posele problème de la professionnalisation desenseignants tunisiens et leur formation selon lesexigences de la qualité et des standardsinternationaux.

Page 69: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

71

3.3 ANALYSE DES ECARTS DE CAPACITES ET RECOMMANDATIONS

3.3.1 Les principales analyses causales

Les mandataires porteurs d’obligations enmatière du droit à l’éducation sont composéspar le pouvoir public à l’échelle nationale,régionale, en charge de l’ensemble du systèmeéducatif depuis le préscolaire, le corpusd’enseignants et des chefs d’établissement, lesONG et les familles. Toutefois, l’État reste lepremier responsable redevable de la mise enœuvre du droit à l’éducation avec, pour

acteurs principaux, le ME, le MESRS, le MAFet le MAS. Compte tenu de l’importance quel’État accorde à l’accès généralisé àl’éducation, l’analyse de l’écart de capacitéportera sur les mandataires publics qui ontl’obligation de faire valoir d’une manièreeffective le droit à l’éducation, soit le ME et leMAS pour l’intégration sociale des personneshandicapées et l’éducation des adultes.

Les deux principaux problèmes identifiés dansle domaine de l’analyse des droits des enfantsà l’éducation sont les suivants :

• Les jeunes enfants (0-6 ans), notamment deszones rurales ou urbaines défavorisées, n’ontpas suffisamment accès à des opportunités leurassurant un développement harmonieux ;

• les enfants d’âge scolaire (6-16 ans)notamment les jeunes garçons, n’ont pas tousacquis des compétences de base suffisantes.Les deux schémas suivants présentent lesconclusions des analyses causales menéespour ces deux problèmes :

Figure 3 : L’enseignement préscolaire, analyse causale

LE DROIT A L’EDUCATIONET AU DEVELOPPEMENT3.

Page 70: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

Tableau 7 : Le préscolaire : détenteurs de droits et débiteurs d’obligations

Débiteurs d’obligations

Parents • Assurer le développement harmonieux desenfants

• Soutenir les parents dans leur rôle éducatifet de soins

• Soutenir les parents dans leur rôle éducatifet de soins

• Soutenir les parents dans leur rôle éducatif et

de soins aux enfants• Fournir des services sociaux de proximité aux

parents

Familles élargies

Collectivités locales

Associations et secteur privé

• Fournir des services de prise en chargedes jeunes enfants de qualité et soutien scolaire

• Développer des programmes éducatifsadaptés respectueux des besoins de l’enfant

• Informer et plaidoyer les parents sur leur rôle

éducatif

• Mettre en œuvre des politiques nationales• Développer des politiques d’éducationadéquate

• Allouer les ressources suffisantes, politiqueéducative

• Développer des programmes d’éducation paren-

tale de soutien aux parents

• Mettre en place les mécanismes de participation

des parents

• Fournir des services de soutien aux parents (édu-

cation parentale)

Ministères compétentsMAF, ME, MAS

Média

Détenteurs de droits 2 : Parents

Détenteurs de droits 1 : Enfants en âge scolaire et préscolaire

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Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

Figure 4 : Équité et qualité de l’enseignement de base, analyse causale

Le tableau suivant met en relation les détenteurs de droits et les débiteurs d’obligations pour lesdeux problèmes identifiés :

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73

3.3.2 Les acteurs publics : les principaux écarts de capacité

En matière d’engagement, il ne fait pas dedoute que l'éducation demeure un secteurprioritaire pour les acteurs publics. Il y a unevolonté, traduite par de multiples réformes,pour à la fois assurer l’accès universel àl’éducation et rehausser la qualité du systèmeéducatif en vue de permettre aux ressourceshumaines du pays d’avoir les compétences etles qualifications requises.

Le Ministère de l’Education a , depuis 1991,initié une politique de scolarisation en écoleordinaire des enfants handicapés : « la famille,l’État, les associations et les personneshandicapées conjuguent leurs efforts pourconcrétiser cette responsabilité nationale »7 .Le choix de l'intégration scolaire correspondaux objectifs de la politique éducative du payset à l'orientation internationale concernant lalutte contre l'échec scolaire et l'exclusionsociale. Cela témoigne de la motivation et dela responsabilité des acteurs publics et montrequ’il n'y a pas de signes d'un désengagementde la responsabilité publique en matière descolarisation des enfants.

Par contre, l'intérêt accordé à l'éducationpréscolaire n'est pas à la mesure de l'enjeu decette éducation qui concerne les enfants âgésde 3 à 5 ans. D’après les spécialistes de lapsychologie des enfants et de l’éducation, àcet âge l’enfant construit les éléments de sapersonnalité et prend conscience de sesaptitudes intrinsèques. Il est donc importantqu’à cet âge l’enfant puisse bénéficier d’uneforme d’éducation où l’apprentissage et le jeuse relayent pour lui permettre de se découvrird’une part et de consolider les éléments innésde ses compétences intrinsèques. Lepourcentage des enfants d’âge 3 et 5 ans quibénéficient des services du préscolaire netraduit pas l’importance qui doit être accordéeà l’éducation préscolaire. Il est hautementindiqué de reconsidérer le degré de priorité àoctroyer à l’éducation préscolaire et de viser

la généralisation de la couverture commeobjectif prioritaire du système éducatif.

Concernant le cadre institutionnel, la loid'orientation pour l'éducation et l'enseignementscolaire de 2002 a constitué un cadre adéquatpour garantir une éducation pour tous fondéesur le principe d'équité et a offert à l'école deschances réelles pour s'engager sur la voie dela qualité. Les insuffisances observées enmatière de gouvernance du secteur relèventbeaucoup plus d’un manque de volontépolitique que d’une carence des texteslégislatifs.

Concernant le système d’information, lesstatistiques produites par le ME sont, dansl'ensemble, fiables et constamment mises àjour. Toutefois, la mise en cohérence del’ensemble du dispositif statistique existantdans le cadre d’un système d’informationintégré s’appuyant sur une batteried'indicateurs pertinents pourrait assurer lepilotage efficace du système éducatif. Il s’agitnotamment d’indicateurs sur la qualité del’enseignement dispensé et portant sur lesperformances des élèves dans les principalesmatières. On s’attend à ce que les pratiquesde non publication ou de publication partiellede certaines données sensibles disparaissentprogressivement. Cela concerne en particulier,les données sur les abandons scolaires et surles disparités régionales et locales.

Sur un autre plan, le Programme nationald’éducation des adultes (PNEA), qui adéveloppé une approche globale et intégréeconsidérant l’éducation des adultes de moinsde 30 ans comme un mécanisme liantfonctionnellement l’apprentissage audéveloppement intégral, n’est pas doté desystème de contrôle et de suivi régulier desacquis des apprenants. L’absence d’études sur la qualité et la pérennité des acquis et surl’impact global du programme mérite doncd’être signalée. 7 Article 3 de la Loi d’orientation N. 25-83 des personnes handicapées

LE DROIT A L’EDUCATIONET AU DEVELOPPEMENT3.

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Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

Un autre engagement en matière de luttecontre l’échec scolaire est mené par le MASqui a mis en place depuis le début des années1990 une stratégie nationale de défense etd'intégration sociales. L'objectif est laprotection des familles contre les risques dedislocation et de marginalisation et laprévention de ses membres contre l'échecscolaire, la délinquance et les différents fléauxsociaux dus aux inévitables changementssocio-économiques à travers un travail de

prévention et de sensibilisation au profit descatégories vulnérables et menacées et surtout,l'enfant en difficulté (les enfants en danger, lesenfants en rupture scolaire, les enfantsinadaptés...). Les enfants en rupture scolaireconstituent un noyau dur de la populationtouchée par la stratégie nationale de défenseet d'intégration sociales à travers notammentles centres de défense et d'intégration sociales(CDIS) et le programme d'action sociale enmilieu scolaire (PASS).

Les centres de défense et d'intégration sociales sont actuellement au nombre de 15. Ils ont pour mission de contribuer audépistage précoce des conditions et des situations pouvant mener à la délinquance et à l’inadaptation sociale, ainsi qu’àl’encadrement social et éducatif des personnes délinquantes ou menacées de délinquance et des défaillants scolaires et de lesaider par des interventions appropriées visant leur réadaptation et leur réinsertion sociale et d’assurer la coordination entre lesdifférents intervenants en leur faveur.Des programmes de prévention, d’encadrement et d’insertion sont mis en œuvre. Ils ciblent une population vulnérable d’enfantsâgés entre 10-18 ans et qui sont en rupture scolaire avec un niveau scolaire bas ne leur permettant pas d’accéder aux programmesd’apprentissage et de formation ordinaires. Le programme de réhabilitation éducative et professionnelle comporte :1 - des cours d’alphabétisation qui visent la remise à niveau des acquisitions scolaires du jeune ;2 - des ateliers de préparation aux apprentissages professionnels qui permettent au jeune d’acquérir certaines compétences ;3 - une prise en charge psychologique qui permet aux jeunes de reprendre confiance en eux ;4 - le renforcement des habilités de vie des jeunes en vue de prévenir l’acquisition de comportements addictifs.En 2009, les centres de défense et d’intégration sociales ont pris en charge 6577 enfants.

Encadré 6 : Les centres de défense et d'intégration sociales

Graphique 50 : Évolution des dépensespubliques d’éducation en proportion du PIB eten pourcentage des dépenses publiques totales(2001-2010)Source : d’après les données du Ministère de l’éducation et duMinistère du développement et de la coopération internationale

En matière de capacités financières, lesdépenses d’éducation ont connu une haussecontinue. Environ le quart du budget de l’État,soit plus de 7% du PIB sont consacrés àl’éducation et à la formation. Durant lesdernières années, et en dépit de la baisse deseffectifs dans certains niveaux d’enseignement,les dépenses consacrées à l’éducationnationale, tous niveaux confondus, ont évoluéà un rythme comparable à celui de lacroissance du PIB/tête. La dépense par élève(tous cycles confondus) représente environ24% du PIB/tête. Le graphique ci-contreprésente l’évolution des dépenses publiquesd’éducation en proportion du PIB et desdépenses publiques totales durant la décennie2001-2010 :

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Graphique 51 : Dépenses publiques d’éducationen proportion du PIB et des dépenses publiquestotales : comparaison internationaleSource : d’après les données de l’Unesco, année la plus récentede la période 2006-2009

L’effort déployé par l’État tunisien pour lefinancement de l’éducation appréhendé entermes de proportion de PIB et de part dans lebudget de l’État est parmi les plus élevés aumonde comme l’illustre le graphique ci-contrequi reprend les données les plus récentes del’Unesco. Cela confirme la priorité accordéeau secteur de l’éducation qui a toujours figuréparmi les constantes des choix politiques enTunisie depuis son indépendance.

Concernant le financement privé del’éducation, les données de l’enquête nationalesur les dépenses, la consommation et le niveaude vie des ménages de 2005 montrent que ladépense par personne et par an (DPA)consacrée à l’éducation est de l’ordre de 50dinars, soit 2,3% de la DPA totale. Le poidsdes dépenses privées d’éducation est plusimportant chez les ménages les plus pauvres.Le graphique suivant montre que ce poidsatteint 4,4% chez les plus pauvres contre 2%chez les plus riches. Par ailleurs, la structuredes dépenses d’éducation est marquée par la

prépondérance des frais des cours particuliersqui représentent près du tiers de ces dépensescontre le quart pour les frais de la rentréescolaire. Les ménages consacrent 11,6% desdépenses d’éducation au préscolaire et 5,3%pour la formation professionnelle.

Graphique 53 : Structure des dépenses privéesd’éducationSource : Enquête consommation 2005, INS

Graphique 52 : DPA Éducation par décile dedépenses en dinars et en % des dépensestotalesSource : Enquête consommation 2005, INS

LE DROIT A L’EDUCATIONET AU DEVELOPPEMENT3.

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Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

Les dépenses privées d’éducation restentmodestes en Tunisie et leur poids dans lesdépenses totales est assez stable. Celas’explique par la gratuité des services publicsd’éducation et la modestie de la part dusecteur privé dans les différents niveauxd’enseignement.

Même si les pressions financières se font sentirdavantage pour les programmes d’intégrationdes enfants porteurs de handicap étant donnéleur besoin en matériel pédagogiquespécifique (écrans, loupes, équipement desalles de psychomotricité…), c’est le secteur dupréscolaire qui risque de souffrir le plus dumanque de moyens financiers. Il y a uneinadéquation entre les moyens financiers queles familles tunisiennes sont en mesure deconsacrer à l’éducation de leurs enfants dansces jardins d’enfants par rapport au coût réelque nécessite ce type d’éducation enappliquant les clauses du cahier des chargesproposé par le MAF. Les dispositions de cecahier des charges soumettent le jardind’enfants à des exigences de qualité deservices nécessaires pour que ce typed’éducation préscolaire puisse atteindre sesobjectifs. À cet égard, et pour s’ajuster auxpossibilités financières des familles, le secteurprivé tend plutôt à réduire la qualité desservices dans les jardins d’enfants, ce qui serépercutera sur la qualité de l’éducationpréscolaire. À cet effet, il est judicieux detrouver d’autres formes d’encouragements ausecteur privé pour permettre aux jardinsd’enfants de se développer et de couvrir lesdifférentes régions, d’une part, et de pouvoirfournir les services éducationnels requis pourles enfants de cette tranche d’âge, d’autrepart.

Les déficits en matière de ressources humaines.En règle générale, pour le système éducatif, lesdéficits en ressources humaines se résument en :

• une insuffisante motivation du personneléducatif qui gagnerait à être reconsidérée ;• un besoin de renforcement de la«professionnalisation» des enseignants passantpar une bonne formation initiale et continueselon les standards internationaux ;• un besoin de reconsidérer les relationsélèves - familles - administration, souventdifficiles, parfois conflictuelles. A cela vients’ajouter, dans le domaine de l'intégrationscolaire, l’insuffisance des ressources humainespour lesquelles le professionnalisme et lacompétence sont un gage pour l'encadrementpluridisciplinaire des enfants.

Concernant l’enseignement et la formation deshandicapés, un décalage est perceptible entrela formation théorique et la réalité pratiquedans les classes en l’absence d’une équipemultidisciplinaire.

Les défis organisationnels.Le système éducatif reste très centralisé. Lesstructures régionales (IRE) n’arrivent pas à seconstituer en entités pédagogiques autonomesen développant leurs projets éducatifsspécifiques dans le cadre d’objectifs etd’orientations définis à l’échelle nationale. Il enva de même au niveau de l’établissementscolaire où la structure hiérarchisée ne permetni suffisamment de souplesse, ni l’espritd’innovation.

Héritier de la structure organisationnellepyramidale, le processus de décision enmatière d’éducation est hiérarchique, fortementcentralisé où la consultation est fort limitée. Levolet communication est insuffisammentdéveloppé, alors que le rôle sociétal del’enseignement est plus que jamais d’actualité.Le système éducation-formation pour leshandicapés est théoriquement doté depolitiques et de dispositifs plus souples pour une communication ouverte à l'écoute des

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handicapés et de leur famille ( formation defocus groupes des élèves, des enseignants, desparents… élaboration d'une stratégie decommunication et d'information afin dechanger les attitudes et les comportements de

toutes les parties impliquées dans le systèmeéducatif ). Une évaluation serait à cet effetutile. Le système d'organisation actuel devraitdévelopper la souplesse nécessaire àl'adaptation au changement.

La loi d'orientation de l’éducation et del'enseignement scolaire de 2002 plaça l'élèveau centre du système éducatif. Cette loiinstaura le principe que « l'enseignement estun droit fondamental garanti à tous lestunisiens sans discrimination fondée sur lesexe, l'origine sociale, la couleur ou lareligion. C'est aussi un devoir qu'assumentconjointement les individus et la collectivité »(Article1). Or, les enfants ne sont pas en âgede connaître et de défendre leurs droits que lacommunauté via le législateur prend en charge(gratuité, obligation, égalité des chances). Lavigilance est requise quant à l’application dela loi et la jouissance effective de ces droitsmême si la loi prévoit les sanctions auxquelless’expose le tuteur qui empêche son enfant dejouir de son droit à l’éducation. Il y a aussi ledispositif prévu par le Code de protection del’enfant.

En outre, les enfants à risque, en situation denon scolarisation ou d’échec scolaire n’ontaucun moyen de s’auto-organiser ou derevendiquer. C’est à l’école de prendre encharge ces enfants et de leur offrir les moyenset les chances de réussite. Mais jusque-là rienne permet de dire si l’école accomplit cettetâche. À ce titre, l’éducation aux droits d’unefaçon générale et au droit à l’éducation enparticulier, est très insuffisante, voire absente.Par ailleurs, chez les jeunes d’aujourd’hui, lesgarçons notamment, le diplôme n’est plus legarant d’un statut social privilégié pour

l’individu. L’éducation n’est plus une voie desalut car les insuffisances qualitatives del’enseignement et la formation dispenséemettent le jeune adulte en inadéquation avecle marché du travail et génèrent des difficultésd’insertion.

En matière de ressources, les aides publiquesdirectes ou indirectes (bourses, cantines,internats, manuels et fournitures scolaires)soulagent beaucoup de familles nécessiteuses.En revanche, bien d’autres familles se trouventpeut-être surchargées excessivement dufardeau des cours particuliers. Ce phénomèneporte préjudice au droit même à une éducationégale pour tous à travers l’émergence d’unsystème parallèle basé sur des rapportsd’argent entre enseignants et élèves, quientraîne une perte de crédibilité des notes etdes examens et conduira, fatalement, à destensions dans les relations au sein de l’école.

Enfin, il faut signaler l’absence flagrante de lasociété civile dans le domaine de l’éducation.La mainmise d’une organisation rattachée àl’ancien parti au pouvoir (OrganisationTunisienne de l'Education et de la Famille) surla question de représentation des parentsd’élèves a inhibé tout progrès en ce domaine.Il devient urgent de créer une véritablereprésentation des parents d’élèves et unenouvelle dynamique de participation de lasociété civile à la vie de l’école et aux aspectsde l’éducation en général.

3.3.3 Les ayants droit : les principaux écarts de capacité

LE DROIT A L’EDUCATIONET AU DEVELOPPEMENT3.

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L’examen des principaux écarts de capacité apermis de formuler les recommandationssuivantes selon un processus participatifimpliquant les acteurs publics :

1 - Dans le domaine de l’information, desstatistiques et des études :

• renforcer les capacités des intervenants publicsdans le domaine de l’analyse, del’identification des besoins, de la planificationstratégique et du suivi et évaluation desprogrammes ;

• moderniser l’outil statistique du ME etdévelopper une batterie d’indicateurs sur laqualité de l’enseignement dispensé et mettre enplace un système de pilotage et de gestionefficace ;

• définir un plan d’action visant lagénéralisation des services de l’éducation enparticulier dans le cycle crucial du préscolaireen les articulant avec une stratégie nationalecohérente pour la petite enfance ;

• réaliser une série d’études sur lesprogrammes nationaux d’envergure pour enmesurer l’impact : évaluation du PEP et étudeexhaustive sur les trajectoires des enfants ensituation de décrochage scolaire.

2 - Dans le domaine des ressources humaines :

• renforcer la formation initiale et continue desenseignants et du personnel d’éducation etprendre les mesures adéquates pourl’intégration des modules manquant dans laformation initiale et continue dans les parcoursdes enseignants, des directeurs d’écoles, desconseillers pédagogiques et des inspecteurs ;

• développer les compétences du personnel

non qualifié exerçant actuellement dans lesjardins d’enfants dans le cadre d’unprogramme pluriannuel de formation ;

• mettre au point un programme ad hoc pourla professionnalisation des inspecteurs chargésdu préscolaire ;

• renforcer la capacité des enseignants àassurer une prise en charge de qualité desenfants porteurs de handicaps.

3 - Dans le domaine de l’organisation :

• mettre en place un « monitorage » nationalde la qualité de l’enseignement ;

• mettre au point une stratégie decommunication et de sensibilisation destinéeaux jeunes déscolarisés de 15-24 ans au sujetdes programmes de formation du PNEA ;

• mettre au point un partenariat avec lesmédias en vue de sensibiliser l’opinionpublique sur l’importance des institutions /actions ciblant la petite enfance et del’encourager à tirer profit des services offertspar ces institutions ;

• poursuivre l’exécution du programme relatifà l’éducation des parents en vue d’aider cesderniers à l’éducation de leurs enfants et cepar la formation d’animateurs tout en veillantà impliquer l’ensemble des structuresintéressées ;

• assurer une meilleure coordination duprogramme d’intégration scolaire des enfantsporteurs de handicap tant au niveau nationalque régional à travers un partenariat avec lesassociations et une implication des parentsdans ce domaine.

Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

3.3.4 Recommandations

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79

3 - Dans le domaine de la gouvernance :

On constate que deux décennies entières deréformes n’ont pas réussi à résoudre lesproblèmes de fond du système éducatif tunisienet à redresser la qualité de l’enseignement.Cela conduit à conclure que le système« d’injection des moyens » a atteint ses limiteset que d’autres leviers devraient et auraient dûêtre utilisés tels que l’amélioration de lagouvernance du système. Plusieursrecommandations peuvent être formulées dansce domaine :

• fixer des critères transparents et équitablesde fonctionnement du système et de répartitiondes responsabilités ;

• ériger et opérationnaliser les comitésd’établissements dans les écoles, collèges,lycées et centres de formation ;

• fixer des objectifs d’apprentissagecompréhensibles par niveau d’enseignementpour constituer une référence aux évaluationsdes performances ;

• mettre en place un système d’évaluationnormalisé permettant la comparaisongéographique et le suivi temporel desperformances ;

• assurer le droit d’accès à l’information et auxdonnées aux ayants droit et à la société civileet développer une communication destinée auxécoles et au public en général.

Par ailleurs, l’amélioration de la qualité del’éducation et de sa pertinence reste unepréoccupation majeure nécessitant la poursuitedes réformes des programmes, des méthodesd’enseignement, des motivations desenseignants et des modes de gestion desécoles, collèges et lycées dans un sens plusparticipatif et plus redevable vis-à-vis desbénéficiaires des services éducatifs, des partiesprenantes et des ay ants droit.

LE DROIT A L’EDUCATIONET AU DEVELOPPEMENT3.

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Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

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LE DROIT AUX LOISIRS ET A LA PARTICIPATION

81

4.1 ACCES AUX LOISIRS ET AUX ACTIVITES CULTURELLES

4.1.1 Les moyens matériels et financiers

L’enfance est une étape primordiale de la viede l’être humain. Les jeux et les activités deloisirs et culturelles sont essentiels audéveloppement de l’enfant, de l’adolescent etdu jeune sur tous les plans : physique, socialet affectif. En Tunisie, l’enfance fait partie d’undes thèmes prioritaires retenus par lesinstances politiques et les différentesorganisations gouvernementales et nongouvernementales. Une attention particulièreest consacrée à l’accès aux loisirs et auxactivités culturelles et sportives, mais aussi à la

participation des enfants, des adolescents etdes jeunes tunisiens, à la prise de décision età l’exercice de la citoyenneté, sans aucunediscrimination d’âge, de sexe, oud’appartenance géographique. Il conviendraitde dresser un état des lieux de la situation del’enfance permettant de mieux appréhender lesdifférentes possibilités qu’ont les enfants, lesadolescents et les jeunes tunisiens d’accéderaux loisirs et aux activités culturelles, mais ausside saisir leur degré d’implication dans laparticipation et l’exercice de la citoyenneté.

L’accès aux loisirs et aux activités récréatives estencouragé, non seulement par le biais de l’école,mais également grâce à divers mécanismes misen place par les différents intervenants quiœuvrent pour l’épanouissement de l’enfance,de l’adolescence et de la jeunesse :clubs, associations, maisons de jeunes, maisonsde culture... Diverses manifestations culturelleset sportives témoignent de la volonté de donnerl’opportunité aux enfants, aux adolescents etaux jeunes de s’exprimer, d’apprendre et dedonner libre cours à leur talent et à leurimagination.

Pour dresser la situation de l’accès des enfants,

des adolescents et des jeunes tunisiens auxdifférents loisirs et activités récréatives,plusieurs indicateurs pourraient être pris enconsidération afin d’appréhender la manièredont l’enfant se forme et forge sa personnalitéaussi bien au sein des établissements scolaires,qu’à l’extérieur de ces structures. L’analyse desdonnées collectées permet alors de dégagerles tendances relatives à l’accès des enfants,des adolescents et des jeunes aux activités deloisirs tout en montrant les disparités fondéessur l’appartenance géographique, le sexe,l’insuffisance d’espace de loisirs et de moyensfinanciers qui sont autant de facteurs pouvantfreiner ou favoriser l’accès à ces activités.

Tous les enfants, les adolescents et les jeunesne semblent pas avoir les mêmes opportunitéspour accéder aux loisirs. Certes, ceux qui sontscolarisés peuvent dans les limites du possibleprofiter des activités récréatives proposées ausein des établissements, mais toutes lesstructures scolaires ne sont pas dotées dumême niveau d’équipement (ordinateurs,internet, terrains de sport, clubs…) entraînantainsi un inégal accès aux loisirs. Pour lesmoyens de loisirs situés en dehors du milieuscolaire, ils sont souvent payants et leuraccessibilité pour les enfants reste souventtributaire des moyens financiers des familles.Ainsi, les disparités de répartition de revenus

sont déterminantes dans les disparités d’accèsaux loisirs pour les enfants.

Par ailleurs, les dépenses de culture, loisirs et dedivertissement connaissent une diminution deleurs poids dans les dépenses des ménages :5,6% en 2005 contre 6,2% en 2000. De soncôté, l’INS comptabilise la consommation dutabac au sein de ces dépenses. Le tabacreprésente 55% des dépenses de cetterubrique. Ainsi les dépenses de culture nereprésentent que 0,46% des dépenses desménages et les dépenses consacrées auxloisirs, divertissement et vacances se limitent à2,0% des dépenses des ménages.

4.

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82

Graphique 54 : Taux de pénétration desordinateurs dans les ménages et nombred’ordinateurs pour 100 habitants Source : d’après les données du Ministère des Technologies dela Communication, et INS, 2011

Graphique 55 : Taux d’équipement desménages en PC et taux d’utilisateurs d’internetpar gouvernorat (2004)Source : d’après les données de l’INS, RGPH 2004

Les technologies de l’information et de lacommunication font partie des droits desenfants dans la mesure où, au-delà de leuraspect ludique, elles constituent également desoutils d’apprentissage et d’éducation. EnTunisie, l’accès à l’informatique a connu uneévolution significative ces dernières années. Leparc d’ordinateurs dans le pays a dépassé leseuil de 1,4 million en mars 2011, soit un ratiode 13,3 ordinateurs pour 100 habitants(contre 2 il y a 10 ans) et plus de 16% desménages disposent désormais d’un ordinateurcontre moins de 3% en 2000. Ces tauxd’équipement en micro-ordinateurs restent,certes, modestes par rapport aux ratiosenregistrés dans les pays de l’OCDE (environ75%), mais le taux d’équipement des ménagestunisiens pourraient évoluer substantiellementdurant les prochaines années.

Ainsi, aujourd’hui, si l’informatique et l’internetne font donc pas partie des loisirs les plusrépandus chez les enfants, les adolescents etles jeunes au sein de leur domicile, ils sontappelés à occuper une place de plus en plusimportante durant les prochaines années.

Tous les enfants ne jouissent pas du même droitquant à l’accès à l’ordinateur en raison desdisparités régionales. En 2004, le tauxd’équipement des ménages en PC et le tauxd’utilisation de l’internet étaient respectivementde 7% et de 2,8%. Les gouvernorats deKairouan, Sidi Bouzid, Kasserine, Jendouba,Béja, Kef, Zaghouan et Siliana présentaientdes ratios inférieurs à la moitié de la moyennenationale.

L’argent de poche que perçoivent les enfants,les adolescents et les jeunes de la part desaînés est un moyen parmi d’autres leurpermettant d’accéder aux loisirs. Cependant,tous les enfants ne jouissent pas de la mêmemanière du droit d'accès à la consommationde la culture et des loisirs : certains enfants nerecevant pas d’argent de poche de la part de

leurs parents se voient en marge de lapossibilité d’accéder aux activités de loisirs etculturelles payantes, mais peuvent se tournervers celles qui sont gratuites.

Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

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Graphique 56 : Appréciation des jeunes de leursituation financière (2000)Source : MSP, DMSU

En ce qui concerne l’appréciation des jeunesde leur situation financière, l’enquête nationalesur la santé des adolescents scolarisés réaliséeen 2000 montre que 19,2% de la populationenquêtée déclarent avoir des moyens plutôtlimités et 22,1% déclarent manquer debeaucoup de choses. Cette dernièreproportion est plus importante en milieu rural(27,8%) qu’en milieu urbain (19,1%) et pluschez les filles (23,1%) que chez les garçons(19%). Ainsi, ce sont les filles et les jeunes dumilieu rural qui ont moins de moyens financierspour accéder aux activités récréatives parrapport aux garçons en milieu urbain.

La question des jouets pour la petite enfancene semble pas être abordée en Tunisie et lesdonnées à ce sujet sont pratiquementinexistantes. Peu de commerces spécialisés enjouets pour enfants sont accessibles à tous lesménages : les prix sont souvent prohibitifs, etcertains parents se tournent vers des produitsmoins chers, mais dont la qualité n’est pasgarantie et qui présentent parfois un dangerpour les plus petits. Il existe donc des disparités

essentiellement d’ordre financier quant àl’accès des jeunes enfants aux jeux d’éveiladaptés à leurs spécificités. Or, c’est par lebiais de jeux d’éveil adaptés à chaque tranched’âge, permettant de développer lacoordination, la motricité, le mouvement,l’exploration des sens, la stimulation de lacréativité et la découverte du langage que lestous petits construisent leur intelligence.

4.1.2 Les loisirs des enfants en âge préscolaire et scolaire

Les enfants âgés de moins de 6 ansreprésentent une population estimée en 2009à environ un million. La petite enfance est unâge critique et délicat. Il est admis que toutdéveloppement psychomoteur de l’enfant,acquisition du langage, renforcement descapacités intellectuelles et physiques s'opèrentdurant cette période de la vie au cours delaquelle il importe d’aider l’enfant àdévelopper au mieux ses aptitudes et sapersonnalité.

Les indicateurs de la petite enfance présentésplus haut montrent un faible taux de couvertureà tous les niveaux : moins de 1% pour lescrèches, environ 30% pour les jardinsd’enfants et 60% pour l’année préparatoire.Ce déficit quantitatif s’accompagne par une

répartition marquée par des disparitésgéographiques, un manque de moyensmatériels et un faible niveau de la qualitéd’encadrement. Cela montre que nombred’enfants se trouvent exclus de leurs droits depouvoir jouir de diverses activités leurpermettant de développer leur créativité et leursociabilité tout en apprenant.

Concernant les enfants en âge scolaire, lasituation de l’infrastructure dans lesétablissements scolaires pourrait être utiliséecomme un indicateur des différentes activitésrécréatives proposées aux élèves. Les donnéesdisponibles sont relatives à l’existence desinfrastructures dans les différentes institutions,mais ne donnent aucune estimation desactivités qui y ont effectivement lieu.

LE DROIT AUX LOISIRS ET A LA PARTICIPATION 4.

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La lecture.Les écoles primaires sont faiblement équipéesen bibliothèques et le fonds bibliothécaire esttrès limité. En effet, le taux d’équipement desécoles primaires en bibliothèques est limité à3% et on compte 4400 titres pour plus d’unmillion d’élèves, soit 4,2 livres pour 1000élèves. Par ailleurs, dans plusieursgouvernorats, les écoles n’ont ni salle delecture, ni bibliothèque et le nombre des livresà la disposition des élèves est souvent bieninsuffisant. C’est ce qu’illustre le graphique ci-contre qui montre la répartition du tauxd’équipement des écoles en bibliothèques et lenombre de livres de bibliothèque pour 1000élèves.

Afin de pallier cette situation, plusieursstructures comme les bibliothèques pourenfants, relevant du Ministère de la Culture etde la Sauvegarde du Patrimoine, essayentd’attirer ces derniers vers la lecture, en tantqu’activité de loisirs. En dépit del’augmentation du nombre de bibliothèquespour enfants qui est passé de 274 en 2000 à

314 en 2007, on constate une stagnation del’activité tant en matière de fréquentation quede consultation de livres comme le montrent lesdonnées consignées dans le tableau suivant :

Graphique 57 : Taux d’équipement des écolesprimaires en bibliothèques et nombre delivres pour 1000 élèves (2007)Source : d’après les données du ME

Tableau 8 : Evolution des activités des bibliothèques pour enfantsSource : Ministère de la Culture et de la Sauvegarde du Patrimoine

Nombre des bibliothèques

Fonds documentaire

Capacité

Usagers/bénéficiaires

Abonnés

Ouvrages consultés/empruntés

2000

274

1 391 766

10 459

3 245 320

50 757

5 863 625

2003

293

1 668 836

12 362

3 449 790

59 733

6 073 806

2007

314

2 192 667

13 540

3 253 256

75 823

5 864 220

L’informatique.Durant les dernières années, un importanteffort d’équipement des établissementsscolaires en matériel informatique a étédéployé par le ME. On comptait en 2010 unordinateur pour 23 élèves dans les écolesprimaires et autant dans les collèges et unordinateur pour 19 élèves dans les lycées.

Ces ratios étaient respectivement 120, 109 et65 en 2004. Toutefois, l’utilisation de l’outilinformatique dans le processusd’apprentissage reste très limitée. Sonexploitation nécessite l’acquisition et ledéveloppement de programmes spécifiques etun vaste programme de formation desenseignants.

Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

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Afin de promouvoir l’informatique auprès detous les enfants, plusieurs mesures ont étéprises dont notamment la création d’un réseaude centres d’informatique pour l’enfantcomposé de 25 centres, la mise à ladisposition des enfants handicapés d’un centrenational d’informatique et des espacesd’informatique pour handicapés. Par ailleurs,quatre bus itinérants connectés à internet sontcensés se déplacer dans les régionsmontagneuses et désertiques pour permettreaux enfants de ces régions de s’initier àinternet. En 2007, environ 28 000 enfants(dont 100 handicapés) ont bénéficié d’uneformation dans les centres de l’informatiquepour l’enfant. Il serait intéressant de mener uneévaluation de ces formations afin d’apprécierl’impact réel du réseau des centresd’informatique pour l’enfant et définir,éventuellement, les perspectives de sondéveloppement.

démontrent la volonté des institutions quiœuvrent dans le secteur de l’enfance de mettreà la disposition des enfants des espacesadaptés à leurs spécificités.

Des clubs et des ateliers ont été développésdans les écoles primaires afin de permettre auxenfants d’accéder à diverses activitésrécréatives (couture, travaux manuels,jardinage, arts plastiques…). Le taux decouverture par ces clubs est de l’ordre de 24%.En 2008, environ 245 200 élèves ont euaccès à ces clubs sur un total de plus d’unmillion d’élèves inscrits. Les clubs sont aunombre de 14 634, animés par 13 529animateurs. Le taux de couverture connaît unedisparité de répartition entre les régions et onconstate que la présence d’ateliers dans lesécoles primaires ne signifie pas forcémentqu’ils soient exploités en raison d’insuffisancesdiverses : locaux inappropriés, manque depersonnel et emplois du temps chargés.

En ce qui concerne les clubs en dehors desstructures scolaires, le MAF anime 276 clubsqui comptaient en 2009 plus de 31 000adhérents s’adonnant à des activités sportives(17 222 activités en 2009), scientifiques(11 477), dessin (9 188), culturelles (6 347),et autres activités artistiques. Le graphiqueci-après illustre la répartition des clubsd’enfants gérés par le MAF et les clubsexistants dans les écoles primaires.

Par ailleurs, le MAF a mis en place des clubsitinérants depuis 2005 visant la créationd’espace de loisirs pour enfants et depuis mars2007 un programme d’animation pour lesenfants des quartiers à forte densité depopulation, afin de garantir l’égalité deschances entre les enfants dans le domaine del’animation et des loisirs et d’offrir des servicesd’animation éducative et sociale dans lesquartiers qui ne disposent pas de clubsd’enfants.

Les activités culturelles, artistiques etscientifiques. La mise en place de divers clubs destinés àl’enfance et l’organisation d’excursions

Graphique 58 : Évolution des ratios dunombre d’élèves par ordinateur dans lesécoles primaires, les collèges et les lycées(2004-2010)Source : d’après les données du ME

LE DROIT AUX LOISIRS ET A LA PARTICIPATION 4.

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Au sein des maisons de jeunes, les clubs géréspar le MJS étaient au nombre de 1 994 en2009 bénéficiant à 103 300 jeunes dont 28%de moins de 15 ans et 63% âgés entre 15 à29 ans. Les filles y sont majoritaires. Toutefois,cette tendance s’inverse avec l’avancementdans l’âge en raison du contrôle familialexercé davantage sur les filles que sur lesgarçons8.

Les excursions constituent un moyen de loisirset de distraction très indiqué pour l’enfant. Eneffet, permettre aux enfants de s’ouvrir surd’autres paysages, profiter de la nature, maisaussi des régions touristiques, et des sitesarchéologiques, apprendre l’histoire, lagéologie sur le terrain, voire voyager àl’étranger pour découvrir d’autres civilisationssont autant d’activités qui permettent auxenfants de se forger une culture et uneconnaissance autre que théorique. À titred’exemple, l’organisation de colonies devacances au profit des enfants des quartiers àforte densité et des zones d’intervention duFonds National de Solidarité est uneopportunité pour des enfants qui, sans cela, neseraient pas en mesure de sortir de leurquartier de résidence. L’attention vouée audroit des enfants aux loisirs et aux activitésculturelles comprend également desprogrammes pour les enfants résidant àl’étranger : l’Office des Tunisiens à l’Étrangerorganise des voyages d’étude et dedécouverte de différentes régions au profit desnouvelles générations des tunisiens à l’étrangeren vue de leur permettre de connaître leur payset de renforcer leur appartenance à la nation.

Les jeux éducatifs et de société. Le besoin spécifique des enfants en matière dejeux n’est pas toujours respecté aussi bien ausein de la famille que dans les structuresscolaires par le biais d’aires de jeux. Lemanque de données à ce sujet laisse supposerque les jeux pour les enfants et les jeunesadolescents ne font pas partie des priorités ence qui concerne l’accès aux loisirs. Les revenusparfois insuffisants des ménages, et le manquede prise de conscience de l’importance desjeux pourraient être autant de facteurs quiexpliqueraient le manque d’intérêt à laquestion des jeux de société et éducatifs aussibien chez certains parents que chez leséducateurs. Dans ce sens, les disparités qui seprofileraient dans le domaine des jeuxmettraient les enfants issus de milieuxdéfavorisés dans une situation de manque ence qui concerne l’activité ludique.

Graphique 59 : Clubs d’enfants gérés par leMAF et les clubs existant dans les écolesprimaires (2008)Source : d’après les données du ME et du MAF

8 Le focus group réalisé dans un quartier urbain du gouvernorat de l’Ariana a révélé que certaines fillettes étaient freinées dans leur désir de s’ouvrir davantage sur la sphère extrafamiliale. « Ma mèrem’empêche de sortir et d’avoir des activités de loisirs en dehors de la maison toute seule, ce qui n’est pas le cas des garçons qui font ce qu’ils veulent » (collégienne, 12 ans).

4.1.3 Loisirs et activités récréatives des adolescents et jeunes

L’accès des adolescents et des jeunes auxloisirs et aux activités récréatives estappréhendé à travers la revue des opportunitésde loisirs chez les collégiens, les lycéens et les

étudiants dans le milieu scolaire et des activitésauxquelles s’adonnent les adolescents et lesjeunes lorsqu’ils quittent l’école.

Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

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Graphique 60 : Répartition des bibliothèquespubliques nombre de bibliothèques pour 100 000 habitants (2008)Source : d’après les données du MCSP et de l’INS

Graphique 61 : Loisirs préférés par les jeunes(2005)Source : Observatoire National de la Jeunesse (3ème consultationnationale de la jeunesse)

La lecture.Le nombre de bibliothèques recensées enTunisie en 2009 a atteint 381 bibliothèques(dont 31 bibliothèques ambulantes) comptant6,324 millions de livres, soit un ratio de 0,6livre par habitant. Ce ratio reste assez modestepar rapport à ceux observés dans les paysdéveloppés qui dépassent de 5 à 6 fois le ratioobservé en Tunisie. La répartition desbibliothèques par gouvernorat ainsi que leratio du nombre de livres de bibliothèques parhabitant est illustrée par le graphique ci-contrequi montre un certain manque de bibliothèqueset de fonds de livres dans les gouvernorats àhaute densité démographique.

D’après la troisième consultation nationale dela jeunesse de 2005, 11% des jeunesdéclarent que les bibliothèques sont un lieu deloisirs, et près de 9% d’entre eux déclarent quela lecture les intéresse. Ce qui signifie que lalecture ne semble pas être parmi les loisirspréférés des jeunes, puisqu’elle n’est citéequ’en 6ème position, bien après la télévision,la radio, les excursions, la lecture des journauxet les voyages, même si 12,1% des enquêtésdéclarent lire des journaux pendant le tempsimparti aux loisirs. En ce qui concerne le typede lecture des jeunes, l’enquête sur lespratiques culturelles réalisées en 2005 amontré que 67,3% des interrogés déclarent lirela presse contre 32,7% qui lisent des livres. Ilest possible de penser que la lecture de livresserait également relative aux livres scolaires.

Les technologies de l’information et de lacommunication. Au cours des dernières années, l’avènementdes technologies de l’information et de lacommunication semble participer aurenforcement des capacités des individus àtisser des relations et à les cultiver nonseulement à l’échelle nationale mais aussiinternationale, notamment par le biaisd’internet. Malgré les efforts de généraliserl’informatique au profit de tous les jeunes

tunisiens, tous les adolescents et les jeunestunisiens ne jouissent pas des mêmes chancesquant à l’accès à la culture numérique enraison, entre autres, du taux peu élevé depossession d’ordinateur par ménage et deconnexion par au moins une personne dans leménage.

LE DROIT AUX LOISIRS ET A LA PARTICIPATION 4.

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Graphique 62 : Taux de pénétration del’internet dans les ménages et nombred’abonnés à l’internet pour 100 habitants Source : d’après les données du Ministère des Technologies dela Communication et INS, 2011

Graphique 63 : Évolution du nombre d’abonnésaux réseaux téléphoniques fixes et mobiles Source :d’après les données du Ministère des Technologiesde la Communication, 2011

En mars 2011, le nombre d'abonnés auréseau internet a dépassé 553 000, soit 15fois le chiffre de 2000. À fin 2010, le nombred’abonnés était de 543 000, cela représenteun taux de pénétration de 5,2 pour 100habitants. Concernant les établissementsscolaires, tous les établissements universitaires,centres de recherches, les lycées et 70% descollèges sont connectés à internet. Ce fort tauxde connexion des établissements scolairesmérite un examen quant à son impact réel surl’initiation des élèves aux TIC. Par ailleurs, lacommercialisation des lignes à haut débitsemble avoir attiré de nouvelles frangessociales de la jeunesse tunisienne vers internet.En effet, les données disponibles soulignent unengouement des Tunisiens et plusparticulièrement des jeunes pour les réseauxsociaux de la toile.

En juillet 2011, le nombre d’internautestunisiens disposant d’un compte sur Facebooka dépassé les 2,6 millions dont 41,5% defemmes et près de 84% ont moins de 35 ans.La forte pénétration des réseaux sociauxnotamment auprès des jeunes a joué un rôlenon négligeable dans la révolution tunisiennequi mérite d’être étudié et analysé.

Pour nombre d’adolescents et de jeunes, letéléphone portable s’avère être unprolongement de leurs activités de loisirs. Enmars 2011, le nombre d’abonnés aux réseauxtéléphoniques mobiles a dépassé 13 millionsen évoluant à un rythme exponentiel de 29%par an depuis 2003. Le taux de pénétration duGSM a ainsi atteint 107%, taux comparable àceux de plusieurs pays de l’OCDE. Cetteexpansion s’est réalisée au détriment du réseautéléphonique fixe dont le nombre d’abonnésstagne depuis 2004 à 1,2 millions et connaîtmême une diminution depuis 2011. La baissedu prix des appareils et de celui del’abonnement, conjuguée aux différentes offrescommerciales sont autant de facteurs qui ontcontribué à la généralisation de l’usage duportable.

Les jeux vidéo.La question des jeux vidéo est prise enconsidération par certaines institutions œuvrantdans le domaine des activités de loisirs desjeunes. C’est ainsi que la 4ème édition de laCoupe de Tunisie des jeux vidéo, placée sousl’égide du Ministère de la Jeunesse et desSports, a réuni 1 200 joueurs en mars 2008.Cependant, cette activité ne semble pas êtretrès diffusée à l’ensemble des adolescents etdes jeunes tunisiens : le manque dedisponibilité du matériel et des différentslogiciels serait un facteur qui exclurait nombrede jeunes de ces activités ludiques.

Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

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Les activités culturelles, artistiques et scientifiques.En Tunisie, d’importants programmes ont étémis en place pour favoriser l’accès despopulations juvéniles aux activités culturelles,artistiques et scientifiques (création destructures, organisation de diverses activitésdans les quartiers à forte densité, réalisationde rencontres artistiques). Le taux decouverture des délégations par les maisons dela culture est estimé à 65,5% et le tauxprévisionnel atteindra 78,4% à la fin du XIèmeplan. En 2009, cinq complexes de jeunes et30 unités d’animation des quartiers à fortedensité ont été créés. Cela signifie qu’uneattention particulière est consacrée auxadolescents et aux jeunes qui vivent dans lesquartiers défavorisés et qui n’ont pas forcémentl’opportunité d’accéder à des activités deloisirs. En dépit des efforts déployés, cesstructures semblent avoir peu d’attrait pour lesjeunes : les activités culturelles, scientifiques ettechniques sont citées en fin de liste par lesjeunes au cours de la troisième consultationnationale de la jeunesse de 2005. Les activitésculturelles n’intéressent que 7,5% desinterrogés, les activités scientifiques 7,4% et lesactivités techniques 5,8%, ce qui pourraits’expliquer par un manque de diversité desactivités proposées, une faible implication desjeunes dans l’organisation des activités, unemploi du temps scolaire chargé et surtout enraison de l’interférence politique dont étaientvictimes ces établissements.

Durant les dernières années, le Ministère del’Education a mis l’accent sur l’animationculturelle, sociale et sportive en milieu scolaire.En 2008, le nombre des clubs a atteint 4 959dans les collèges et 2 618 dans les lycées, soitun ratio global de 5,4 clubs par établissement.Les activités des clubs semblent être moinsvalorisées que les autres activités et notammentl’informatique, dans les établissementssecondaires. Cependant, la présence delocaux ne signifie pas obligatoirement leurutilisation et leur fréquentation.

En ce qui concerne les clubs culturels dans lesétablissements scolaires, la plupart des élèvesinscrits dans les collèges et les lycées n’ont pasaccès à ces activités récréatives : le taux decouverture des clubs culturels dans les collègeset les lycées est d’environ 14%. Il y aurait doncdes établissements qui n’offrent pas à leursélèves l’opportunité de bénéficier des clubs ouqui ne les valoriseraient pas suffisamment afind’attirer plus d’adolescents et de jeunes versces activités.

Toutefois, le focus group réalisé auprès decertains adolescents scolarisés dans un collèged’un quartier périurbain du gouvernorat deTunis montre que nombre d’entre eux adhèrentaux clubs de leur institution quand ils existent.

Par ailleurs, nombre de structures scolaires ontintégré la formule des clubs de santé au seindes établissements afin d’offrir à la fois desactivités récréatives aux jeunes, mais aussi deleur donner l’opportunité de s’informer en cequi concerne certaines questions de santé.Entre 2002 et 2007, le nombre des clubs desanté dans les établissements publics aaugmenté jusqu’à l’année 2005 pour atteindre995 avant de diminuer à 730 en 2007. Ausein des établissements supérieurs, lacouverture des clubs de santé est de 21% pourl’année 2007, alors que le taux de couverturedes clubs de culture et de loisir est estimé à23%.

Graphique 64 : Clubs dans les collèges et leslycées (2008) Source : d’après les données du ME

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Les maisons de jeunes sont destinées à offriraux jeunes des activités culturelles, artistiqueset scientifiques visant essentiellement àdévelopper les capacités de ces derniers dansl’expression de leurs dons en matière d’art etde sciences. Les maisons de culture sontdestinées à un public beaucoup plus large queles maisons de jeunes. Elles sont ouvertes àtoute personne qui s’intéresse à la culture quelque soit son âge. Les centres d’hébergementdans les maisons de jeunes sont passés de 24en 2002 à 28 à partir de 2007, ce quidonnerait davantage l’opportunité auxadolescents et aux jeunes en excursion ou ensortie d’études de pouvoir se déplacer d’ungouvernorat à un autre. De plus,l’augmentation du nombre des maisons dejeunes itinérantes qui sont passées de 32 en2002 à 40 en 2009 est censée permettre auxadolescents et aux jeunes résidant en milieurural de profiter des activités des maisons dejeunes. Il faut signaler que les clubs ruraux dela jeunesse ont atteint 231 en 2009 et les clubsde jeunes dans les établissements scolaires enmilieu rural ont atteint 398 en 2009. Au-delàde ces chiffres, une analyse de l’état réeld’exploitation de ces structures et de leurprofitabilité aux adolescents et aux jeunesdevrait être menée.

Certes, les maisons de jeunes et les maisons deculture sont implantées dans les différentsgouvernorats du pays, toutefois, le niveaud’équipement tant en matériels qu’enressources humaines est très variable et l’accèsdes jeunes aux activités de loisirs s’en trouveaffecté en conséquence.

Le décret 119 de l’année 2011 a apporté denouvelles orientations en ce qui concerne lesinstitutions de la jeunesse dans le sensd’alléger leur gestion financière etadministrative et de donner un caractèreassociatif à leurs conseils d’administration. Ledécret prévoit également que les maisons dejeunes et les unités régionales d’animation desjeunes soient dirigées par des conseils dedirection à caractère social, suivant un statut

type adopté sur décision du Ministre chargé dela Jeunesse.

La carte suivante donne la répartition pargouvernorat des 300 maisons de jeunes et des214 maisons de culture recensées en 2008.

Selon la troisième consultation nationale de lajeunesse de 2005, plus de 7% des jeunesinterrogés déclarent que les institutions desjeunes constituent pour eux un lieu de pratiquede loisirs et 5% d’entre eux estiment que lesinstitutions de culture sont des endroits deloisirs. Les jeunes tunisiens semblent être peuinitiés à la culture et à l’art, ils privilégientplutôt des activités en dehors des espacesspécialisés (maisons de culture, cinémas,bibliothèques). Nombre de jeunes ne sont pastrès intéressés par les activités de loisirsessentiellement parce qu’ils n’aiment pass’investir dans ces activités. Par contre, certainsjeunes (58,4%) déclarent se sentir exclus desactivités de loisirs par suite du manque demoyens financiers. Là encore, il existerait desdisparités d’ordre financier qui empêcheraientcertains jeunes d’accéder aux activités deloisirs et culturelles : un faible revenu au seindu ménage, peu d’argent de poche à leurdisposition, une situation de chômage.

Fréquentation des lieux publics. Le café et la rue sont des espaces publics,autres que les structures culturelles et lesmaisons de jeunes qui semblent attirer nombrede jeunes, car ces endroits permettent plus deliberté et sont nettement moins contraignantsque les espaces où existent des règles plusrigides. La troisième consultation nationale dela jeunesse de 2005 a montré que le café estl’endroit de loisir préféré des jeunes pour25,2% d’entre eux et le parcours de santéattire moins de 9% des jeunes. Il est tout demême à remarquer que 20,7% des interrogésdéclarent privilégier d’autres endroits pourleurs loisirs : il s’agirait peut-être de la rue, dela plage ou de la nature… quoi qu’il en soit, ilest possible de supposer qu’il s’agit d’endroitsqui ne sont pas payants.

Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

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Carte 7 : Répartition des maisons de jeunes et des maisons de culture par gouvernorat (2008)Source: d’après les données du Ministère de la Culture et de la Sauvegarde du Patrimoine

En ce qui concerne le cinéma, les disparitésrégionales semblent être les plus marquées,puisque sur 24 gouvernorats, il n’y en a quesept qui ont au moins une salle de cinéma.Tous les jeunes n’ont donc pas l’opportunitéd’aller voir un film au cinéma. Certainsendroits de loisirs cités par les jeunes coûtentrelativement chers. Par ailleurs, la prévalencedu chômage chez la population active jeune

(taux de chômage de 31,3% en 2008 chez lesmoins de 25 ans) réduit les disponibilitésfinancières et par conséquent les opportunitéspour s’adonner à certaines activités et àcertains loisirs, relativement coûteux (cinéma,concerts, festivals…). A cela viennent s’ajouterdes disparités géographiques concernant ladisponibilité de certaines infrastructures.

LE DROIT AUX LOISIRS ET A LA PARTICIPATION 4.

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4.2 SPORT POUR TOUS : UN DEFI

4.2.1 Le sport scolaire et universitaire

Le Ministère de l’Éducation, le Ministère del’Enseignement Supérieur et le Ministère de laJeunesse et des Sports accordent une attentionparticulière aux activités sportives et auxinfrastructures qui permettraient aux enfants,

aux adolescents et aux jeunes de s’investir dansles activités sportives. Cependant, ces effortsdemeurent insuffisants puisque nombred’institutions scolaires ne disposent pasd’infrastructures sportives.

En 2010, le taux d’équipement des écolesprimaires en terrains de sport était de 36%(variant de 22% à Ben Arous à 63% à Tozeur)et celui des collèges et lycées de 83% avecmoins de disparité entre les gouvernoratscomme le montre le graphique ci-contre.Concernant les salles de sport couvertes dansles collèges et les lycées, elles sont au nombrede 341, soit un taux d’équipement de 25%variant de moins de 9% à Tataouine à plus de36% à Sfax. Concernant les établissementsprivés, ils semblent souffrir du manqued’infrastructures sportives plus que lesétablissements publics.

Cet état de fait exclurait certains enfants de lapratique de l’éducation physique et les priveraitd’accéder à cette activité. Mais, la présence deterrains de sport ne signifie pas obligatoirementque les enfants en profitent. Toutefois, onenregistre une progression significative du tauxde couverture par l’éducation physique durantla dernière décennie.

Dans les écoles primaires, ce taux mesuré entermes de nombre de classes est passé de moinsde 16% en 2001 à 55% en 2009. Le tableausuivant présente cette évolution :

Graphique 65 : Taux d’équipement des écolesprimaires, des collèges et des lycées enterrain de sport (2010) Source : d’après les données du ME

Tableau 9 : Évolution de l’éducation physique dans les écoles primaires

2000-2001

2001-2002

2002-2003

2003-2004

2004-2005

2005-2006

2006-2007

2007-2008

2008-2009

2009-2010

Au niveau des écolesNombre

totalPratiquant

l’EPSTaux de

couvertureNombre

totalPratiquant

l’EPSTaux de

couverture

Au niveau des classes

4 465

4 476

4 486

4 487

4 494

4 500

4 504

4 507

4 513

4 517

591

681

675

664

793

1 096

1 360

1 635

2 224

2 803

13,2%

15,2%

15,0%

14,8%

17,6%

24,4%

30,2%

36,3%

49,3%

62,1%

47 055

46 526

46 647

47 532

46 770

46 422

45 337

45 335

45 374

45 677

7 485

8 681

8 532

10 102

10 349

16 156

18 283

20 257

24 953

29 342

15,9%

18,7%

18,3%

21,3%

22,1%

34,8%

40,3%

44,7%

55,0%

64,2%

Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

Page 91: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

93

Durant les deux dernières décennies, uneattention particulière a été accordée àl’infrastructure sportive : le nombre de salles desport a augmenté dans pratiquement tous lesgouvernorats en passant de 7 salles en 1987à 155 salles en 2009 dont 85 pour les sportscollectifs et 77 pour le sport de spécialité. Demême les parcours de santé connaissent uneévolution significative : leur nombre est passéde 17 en 2001 à 110 en 2006. Maiscertaines disparités régionales demeurentquant à la qualité de l’infrastructure et del’équipement des salles de sport. Les pistessynthétiques, les centres de stages des sportifset les piscines couvertes sont peu nombreux etlocalisés dans certaines grandes villes.Concernant le secteur privé, le nombre desalles privées recensées en 2009 a atteint 577comptant 37 657 adhérents.

Les filles pratiquent moins de sport que lesgarçons. Elles sont moins présentes dans lesassociations sportives et dans les clubs. En2009, le Ministère de la Jeunesse et des Sportsa recensé 725 clubs et associations sportivesregroupant plus de 124 000 licenciés dont 29 500 filles, soit 24%.

Les sports de rue demeurent l’apanage desgarçons, notamment quand il s’agit de sportscollectifs organisés ou non organisés. Le focusgroup réalisé dans un quartier du gouvernoratde l’Ariana confirme cette tendance. « Avanton jouait au ballon d’une manière nonorganisée… parfois on veut jouer mais on n’apas de ballon adéquat… Depuis quel’association est intervenue auprès de lamunicipalité, les choses se sont améliorées…On a un entraîneur et on joue d’une manièreplus organisée avec plus de respect entre lesjoueurs… » (collégien, 14 ans).

Par ailleurs, pour ce qui est de l’enseignementsupérieur, 22 402 étudiants pratiquent un sportau sein des 992 clubs sportifs universitaires,

soit 6,3% des étudiants qui s’adonnent ausport dans le cadre de l’université.

4.2.2 Le sport en dehors des structures scolaires

Le contexte actuel est fortement marqué par ledéveloppement rapide des technologies del’information et de la communication. Latélévision, l’ordinateur, la téléphonie mobile etl’internet constituent des élémentsfondamentaux de l’environnement descontemporains. Jeunes et moins jeunes utilisentde plus en plus ces moyens pour leurs études,leur travail et leurs distractions. Mais, c’est latélévision qui semble être le média qui attire leplus grand nombre d’enfants, d’adolescents etde jeunes pendant leur temps libre. D’autressupports plus anciens comme la radio ou lapresse écrite semblent regagner du terraindans un contexte marqué par des stratégiescommerciales dans l’élaboration des contenusmédiatiques.

En Tunisie, comme dans plusieurs autres pays,les médias occupent un statut paradoxal. À cetitre, des études et recherches révèlent que lesmédias :

• participent, d’une part, à la socialisation desenfants, des adolescents et des jeunes à traversla famille, l’école ou les groupes de pairs ;

• continuent, d’autre part, à alimenter lescraintes et les soupçons au sein de la sociétédans la mesure où ils détourneraient lesnouvelles générations de la lecture,encourageraient à la consommation,inciteraient à la violence et seraient à l’originede plusieurs types d’addictions.

4.3 LE RAPPORT AUX MEDIAS

LE DROIT AUX LOISIRS ET A LA PARTICIPATION 4.

Page 92: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

94

Au cours de la dernière décennie, le paysagemédiatique tunisien a connu des changementsimportants tels que le progrès technologique,l’essor de la publicité et l’ouverture del’audiovisuel sur le secteur privé favorisantainsi une production plus diversifiée destinéeaux enfants, aux adolescents et aux jeunes.Depuis la révolution du 14 janvier 2011, lepaysage médiatique tunisien commence àconnaître une profonde mutation qui mérited’être analysée.

Les acteurs du paysage médiatique. Jusqu'à 2010, le paysage télévisuel tunisienétait composé de deux chaînes publiques,Tunis 7 (créée en 1966) et Tunisie 21 (1994),et deux chaînes privées, Hannibal TV (2005)et Nessma TV (2009), dans un contextemarqué par une diversification croissante del’offre des chaînes satellitaires arabophones etautres. Suivant le même mouvement, lepaysage radiophonique est composé de 3chaînes privées : Mosaïque FM (2003)couvrant le Grand-Tunis et tout le Nord-est,Jawhara FM (2005) diffusant sur la région duSahel et Radio Zitouna (2007) bénéficiantd’une couverture nationale. Cette offre deradios privées relativement limitée contrasteavec l’offre publique qui propose 9 chaînes deradios : la chaîne nationale, RTCI (Radio-TunisChaîne Internationale), Radio Jeunes, RTCC(Radio Tunis Chaîne Culturelle) et les 5 radiosrégionales de Gafsa, Kef, Monastir, Sfax etTataouine. Les autorisations et les fréquencesétaient accordées par les responsables del’ancien régime sur une base de favoritisme.Après la chute de l’ancien régime, uneInstance nationale indépendante pourl'information et la communication a été miseen place à titre provisoire. Plusieurs projets dechaînes de TV et stations de radio privées ontété retenus. Le paysage audiovisuel tunisiendevrait certainement connaître des changementsprofonds dans le futur.

En ce qui concerne la presse écrite, l’offre estplus diversifiée au niveau des titres. Pourl’année 2009, il a été recensé :

• neuf quotidiens dont deux gouvernementaux(Essahafa et La Presse), deux quotidiens del’ex-parti au pouvoir (Al Horriya et leRenouveau) qui ont disparu depuis le 14janvier 2011 et 5 appartenant à des groupesprivés (Assabah, Le Temps, Achourouk, LeQuotidien et Assarih) ;

• quinze journaux hebdomadaires et 13magazines appartenant quasi-exclusivement àdes sociétés privées éditant un seul titre et plusrarement à des groupes : Al Osboui et SabahAl Kheïr détenus par le Groupe Assabah et AlAnouar et Al Osbou Al Moussawar édités parDar Al Anouar.

À l’instar des autres médias, la presse écriteest appelée à connaître une évolutionremarquable après le changement de régime.Plus d’une centaine de nouvelles autorisationsont été accordées pour des publications quicommencent d’ores et déjà à marquerle paysage de la presse en Tunisie.

Les publications pour enfants et jeunescomptaient en 2007 une dizaine de titres dontle plus ancien « Irfane » remonte aux années1960. Mais, la diversité des titres contrasteavec la précarité du secteur : irrégularité de laparution, faibles tirages, etc. Cette précarités’explique en partie par l’émergence et ladiffusion à grande échelle des industriesculturelles destinées à l’enfance (programmesaudiovisuels et produits vidéo-ludiques) et parla concurrence de la presse étrangère. En effet,la presse nationale pour enfants et jeunescoexiste avec nombre de titres arabophones etfrancophones édités à l’étranger etcommercialisés en Tunisie. Le ciblage descontenus par tranches d’âge, la qualitéd’impression, les chartes graphiquesattrayantes et une régularité des parutions destitres étrangers placent la presse enfantinenationale dans une situation fortementconcurrentielle. Pour répondre à des impératifscommerciaux ou d’encouragement despouvoirs publics, nombre de journauxconsacrent des rubriques plus ou moinspermanentes aux jeunes.

4.3.1 Le paysage médiatique

Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

Page 93: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

95

L’audience des différents supports. Les médias constituent désormais les loisirspréférés des adolescents et des jeunes :télévision, radio et journaux occupent la plusgrande partie du temps libre de cettepopulation. La troisième consultation nationalede la jeunesse de 2005 a révélé que 43,7%des enquêtés privilégient les médias en tantqu’activités de loisirs. La radio est citée justederrière la télévision. Cette préférence n’est passans rapport avec l’émergence de MosaïqueFM, qui détient depuis son lancement lepremier rang avec plus de la moitié del’audience générale et près de 70% chez lesjeunes du Grand-Tunis. Facile d’accès,notamment grâce aux téléphones portables quipermettent de plus en plus l’écoute de la radio,ce média semble avoir gagné plus de terrainces dernières années. La volonté d’instaurerune proximité aussi bien par le biais dulangage que par les sujets abordés où desjeunes peuvent s’exprimer et donner leur avis,semble avoir permis à la radio et plusparticulièrement aux nouvelles radios privéesde retenir l’attention de cette population.

Quant à la lecture des journaux, 12,1% desjeunes interrogés lors de la troisièmeconsultation nationale de la jeunesse déclarents’adonner à cette activité qui se place avant lalecture d’ouvrages, et après la télévision et laradio. Les stratégies commerciales des titresprivés semblent avoir trouvé des échos auprèsde certaines franges de la jeunesse.

Pour ce qui est de la télévision, l’écrasantemajorité des ménages tunisiens possèdent untéléviseur (95,4% en 2008). Ce média est doncl’un des moyens de loisirs les plus répandus ausein des ménages et celui qui souffre le moinsdes disparités socioéconomiques ourégionales. La possession des antennesparaboliques semble suivre la même tendanceà la généralisation puisque le taux desménages équipés est passé de 55,4% en 2005à 75,4% en 2008. Très peu de jeunesinterrogés dans le cadre de l’Enquête sur lesPratiques Culturelles de 2005 déclarent ne pasregarder la télévision (1,7% d’entre eux). Laplupart des jeunes enquêtés (54%) déclarent

regarder la télévision plus de 3 heures par jourdont 26% plus de 5 heures par jour.

Cette forte audience TV chez les jeunes duGrand Tunis révèle que cette populationurbaine ayant à disposition des salles decinéma, des salles de théâtre, des concerts, etc.privilégie dans une certaine mesure la télévisionaux autres activités culturelles. Il serait alors aiséde supposer que les adolescents et les jeunesdes milieux ruraux, qui manquentd’infrastructures de loisirs, passent plus detemps devant le petit écran. À la lumière de cesdonnées, il se dégage que ce loisir est un desrares qui ne présente pas de disparités entre lesadolescents et les jeunes.

Par ailleurs, des enquêtes plus récentes menéesdans d’autres pays montrent que le nombred’heures passées devant la télévision décroît enfonction de l’augmentation du tauxd’équipement en ordinateurs et de connexionà internet. Ce phénomène semble plusparticulièrement toucher les jeunes de 15 – 24ans que les autres classes d’âge. Mais au-delàde cet effet de conjoncture de transitiontechnologique, la sociologie des publicsdistingue toujours entre le succès d’audience etl’appréciation des médias. Autrement dit,l’exposition, voire une certaine forme dedépendance à la télévision dans le cas présent,n’est pas toujours synonyme d’une adhésionsans réserve aux programmes regardés.

Graphique 66 : Durée journalière d’écoute dela télévision en 2005Source : Observatoire National de la Jeunesse (Enquête sur lespratiques culturelles)

LE DROIT AUX LOISIRS ET A LA PARTICIPATION 4.

Page 94: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

96

L’UNICEF a réalisé en 2010 une étude sur lesreprésentations de l’enfant, de l’adolescent etdu jeune dans les médias tunisiens. Elle aconcerné plus particulièrement la presse écriteet les médias audiovisuels. Elle a porté autantsur les représentations que sur les formes departicipation des enfants, des adolescents etdes jeunes dans les médias, et s’est baséeessentiellement sur des articles de presse écrite(2601 unités rédactionnelles dont 2316publiées par 6 quotidiens et 285 unitéspubliées par 3 hebdomadaires entre 1998 et2008) et sur un échantillon de programmesdiffusés sur Tunis 7, Hannibal TV et RadioMosaïque FM. Les conclusions de ces étudesen matière de représentation médiatique et deperception des médias par les enfants, lesadolescents et les jeunes sont synthétiséesci-après.

Le premier constat qui se dégage dudépouillement de la presse quotidienne estcelui de l’augmentation générale du volumedes unités rédactionnelles relatives à laquestion de représentation médiatique desenfants, des adolescents et des jeunes. Levolume des unités rédactionnelles des titresgouvernementaux semble suivre une évolutionlente, alors que celui de la presse privée estexponentiel, particulièrement pour les deuxtitres arabophones : Assabah qui arrivait déjàen tête de classement en 1998 a multiplié par4,5 le nombre des unités consacrées au sujetde notre étude, passant ainsi de 111 à 467unités, suivi par Achourouk qui passe de 50 à387 unités. Ce dernier titre enregistre laprogression la plus forte puisque le nombre deces unités a été multiplié par 7,5. Le Temps quiarrive en troisième position pour l’année2008, passe de 51 à 181 unités soit unemultiplication par 3,5.

Cependant, la ligne de partage qui sépare lesquotidiens privés des autres titres tient à uneseule variable : celle de la montée enpuissance des faits divers comme un choixéditorial dominant pour traiter des problèmes

de société et plus particulièrement ceux relatifsaux enfants, aux adolescents et aux jeunes.Cette tendance met la presse quotidienneprivée et la presse hebdomadaire au diapasondans la mesure où l’une comme l’autre sontmues par des logiques de captation desaudiences et des annonceurs. La distinctionentre les catégories enfants, adolescents etjeunes n’a pas été facile à réaliser dans lamesure où les classifications journalistiquescorrespondent peu au découpage adopté parla démographie ou la sociologie.

4.3.2 Les représentations médiatiques des enfants, des adolescentset des jeunes

Graphique 67 : Évolution du nombre d'unitésrédactionnelles par quotidien entre 1998 et 2008Source : UNICEF, étude sur les représentations de l’enfant, del’adolescent et du jeune dans les médias tunisiens

Graphique 68 : Répartition des unitésrédactionnelles par catégorie d'âgeSource : UNICEF, étude sur les représentations de l’enfant, del’adolescent et du jeune dans les médias tunisiens

Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

Page 95: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

97

La catégorie « jeunes » obéit ainsi à unedéfinition extensive qui prend son point dedépart à l’adolescence, voire à l’enfance et quipeut se prolonger au-delà de la quarantaine.Il se dégage des unités rédactionnelles unedifficulté à désigner les adolescents en tant quetels. Ils sont associés soit à l’enfance, soit à lajeunesse. Certaines unités rédactionnellestraitent des enfants, adolescents et jeunesséparément, d’autres associent nommémentdans le même article deux ou l’ensemble deces catégories. Ces représentations extensivesdes différentes catégories d’âge peuventexpliquer l’écart observé entre le nombre desunités rédactionnelles et le nombre total desoccurrences des catégories d’âge.

L’étude a montré que la constructionjournalistique de l’actualité relative à l’enfanceet à la jeunesse est souvent en rapport avec lesmanières dont les différents médias traitent le

social dans son ensemble. Trois grandestendances ressortent de l’analyse des différentscorpus :

- les journaux privés accordent un espacerédactionnel croissant aux faits divers audétriment des genres journalistiques de terrain ;

- certaines questions qui sont loin d’être desphénomènes sociaux, sont construites en tantque problèmes publics en dépit de leursingularité ;

- nombres d’articles ont tendance à traiter unphénomène social sous le seul angle d’unepolitique publique : les enfants et les jeunessont le plus souvent l’objet de déclarationspubliques, d’abstractions chiffrées et/ou lapreuve de la justesse des choix politiques quiles concernent.

La participation est définie comme étant unprocessus continu permettant aux enfants etaux jeunes de s'exprimer et d’être efficacementimpliqués dans la prise de décisions àdifférents niveaux dans les questionsd'importance pour eux. Les définitions de laparticipation sont diverses et nombreuses,cependant il existe un concept fondamentalcommun qui se résume de la manière suivante :

• les hommes sont libres de s'enrôler dans lesprocessus sociaux et de développement. Cetenrôlement individuel est efficace, volontaire etéclairé ;

• le dialogue et l’échange d'informations entreles enfants et les jeunes d'une part et lesadultes d'autre part requièrent le respectmutuel et le partage du pouvoir et de laresponsabilité ;

• les capacités évolutives des enfants sontrespectées ainsi que leurs expériences et leurs

intérêts dans la détermination de la nature dela participation. La participation est un droitfondamental qui est au cœur de la Conventiondes droits de l’enfant. Ainsi, l’article 12, stipulenotamment que : « Les États partiesgarantissent à l’enfant (…) le droit d’exprimerlibrement son opinion sur toute questionl’intéressant, les opinions de l’enfant étantdûment prises en considération eu égard à sonâge et à son degré de maturité ».

L’analyse du degré de participation desenfants, des adolescents et des jeunes dans lesdifférents supports analysés par l’étude del’UNICEF a révélé une réalité contrastée maisconvergente sur un certain nombre de points.La presse écrite n’accorde que très rarementl’occasion aux enfants de s’exprimer sur lessujets qui les concernent. Cette raretés’explique, d’une part, par les interconnectionsentre les représentations médiatiques et lesreprésentations sociales qui privilégient lesimages d’enfants victimes/ou exemplaires

4.3.3 La participation des enfants, des adolescents et des jeunesdans les médias

LE DROIT AUX LOISIRS ET A LA PARTICIPATION 4.

Page 96: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

98

objets d’attention plutôt que sujets ayants droit,et d’autre part, par les conditions de travail surle terrain et le modèle économique de la pressequi repose sur le recours aux rédacteurs nonprofessionnels, peu préparés aux principes dela collecte des témoignages des enfants. Dansles médias audiovisuels, la participation desenfants est confinée dans les programmes pourenfants qui reproduisent le modèle de la classed’école ou dans la tendance plus récente àutiliser les enfants comme un élément centrald’un spectacle pour adultes. S’agissant de laparticipation des jeunes, elle peut être

appréhendée dans la presse écrite sous desformes multiples :

• les rubriques ou suppléments spécialementdédiés aux jeunes ou rédigés par les jeuneseux-mêmes tendent à river leur expression auxattentes de l’agenda médiatique, maisn’excluent pas totalement les opinionsdissonantes ;

• le caractère prépondérant du micro-trottoircomme forme de participation des jeunes.

4.3.4 Perception des médias par les enfants

Dans le cadre de l’étude de l’UNICEF sur lesreprésentations de l’enfant, de l’adolescent etdu jeune dans les médias tunisiens, cinq focusgroups ont été réalisés auxquels ont participédes groupes d’enfants, d’adolescents et dejeunes, des deux sexes, âgés de 11 à 25 ans,issus de milieux socio-économiques variés ethabitant le Grand Tunis. Certes, les résultats deces focus groupes comportent des biais enparticulier l’absence d’enfants, adolescents etjeunes résidant dans le milieu rural et àl’intérieur du pays, mais ils ont apporté unéclairage sur les perceptions des enfants,adolescents et jeunes quant à leurs rapportsaux médias. Plusieurs aspects de cette questionont été soulevés, lors des entretiens collectifs àsavoir l’usage des médias, l’opinion de cettepopulation à l’égard des médias et de leurscontenus.

Pour ce qui est de l’usage des médias, les focusgroups ont révélé une tendance à un usagemixte de la télévision, radio et internet et unetendance plus prononcée vers un usage plusextensif de certains médias, en particulierinternet. Par ailleurs, les participants aux focusgroups ont souligné la nécessité pour les

médias d’accorder une attention particulièreau vécu des enfants, adolescents et jeunes etpas seulement à leurs difficultés. Ils affirmentégalement l’importance d’intégrer l’éducationaux médias dans les programmes scolaires.Les médias publics spécialisés dans la jeunessesont très peu perçus par les interviewés commeétant des « médias jeunes ». Les participantsjugent ainsi ces médias peu attractifs, peuparticipatifs et encore moins compétitifs avecle reste du paysage médiatique. Ce sont lesmédias privés qui sont davantage perçuscomme des « médias jeunes ».

Il se dégage également des entretiens collectifsque les enfants, les adolescents et les jeunes nesont pas dans une logique de revendicationmais dans un effort d’adaptation continu enfonction des contraintes et de l’environnement.Ils ne semblent pas déconnectés du paysagemédiatique national, mais leur attention estsélective. Ils font des comparaisons avecd’autres produits médiatiques, sélectionnentleurs émissions et programmes en fonction deleurs attentes, mais la marge de manœuvrereste cependant très réduite pour les groupesissus de milieux défavorisés.

Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

Page 97: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

99

Pour ce qui est de l’opinion des enfants et desjeunes sur les médias tunisiens, il ressort desfocus groups un avis nuancé : ils ont soulignécertains progrès réalisés comme lamultiplication des chaînes, les scénarios decertaines fictions, les programmes sportifsaudacieux et les émissions de télé réalité, maisrestent majoritairement convaincus quel’absence de diversité du paysage médiatiquepourrait être à l’origine d’un certain désintérêtde leur part.

Le profil d’un média « ami des jeunes » tel qu’ilse dégage de leurs déclarations devraitcomporter l’innovation, l’audace, la crédibilité,l’interactivité et la participation. Ce profil restepour le moment réduit à quelques émissionssportives citées souvent en exemple ou àquelques émissions radiophoniques issues desmédias privés. Dans leurs déclarations, lesenfants, les adolescents et les jeunes ontégalement exprimé que l’usage de l’arabelittéraire dans certaines émissions peut aboutirà l’exclusion des jeunes analphabètes. S’ilsestiment que les fictions participent à élargir lareprésentativité et les débats de société, ilsconsidèrent en revanche que la diversité desjeunes dans les débats et les informations estassez faible.

En ce qui concerne l’image des jeunes reflétéepar les médias, les participants aux focusgroups ont estimé qu’elle est plutôt négativedans les médias écrits et plus particulièrement

dans la presse arabophone. Par ailleurs,l’image véhiculée par la télévision, surtoutpublique, est une image jugée en décalageavec le vécu des jeunes et nourrit plutôt desstéréotypes négatifs de la société vis-à-vis desjeunes perçus comme immatures etinconsistants. Cette population a égalementrelevé une faible représentation à la télévisiondes catégories défavorisées, des jeunes desquartiers périurbains et des jeunes endifficultés.

Pour ce qui est de la participation des enfants,adolescents et jeunes dans les médias, l’étudea confirmé leur faible participation et le refusd’une participation symbolique. Lesparticipants ont soulevé la question de ladomination des adultes même dans lesprogrammes destinés aux jeunes et le manqued’opportunités pour une participationimpliquant les jeunes dans la conception, laproduction et la réalisation des programmes.L’opinion des enfants, adolescents et jeunes estpeu écoutée, c’est la perception de tous lesparticipants. Ils ont relevé la valorisation de laparole des adultes (parents, experts etprofessionnels) et la marginalisation del’opinion des intéressés. Les médias nevalorisent pas assez leurs opinions qui sontsouvent limitées, contrôlées ou mal présentées.Ils proposent que les professionnels dialoguentavec eux, s’imprègnent de leur style de vie etpuissent se déplacer là où vivent les enfants,les adolescents et les jeunes.

4.4 PARTICIPATION ET CITOYENNETE

Impliquer les enfants, les adolescents et lesjeunes dans l’identification, la mise en œuvre,l’évaluation des politiques, des programmes etdes actions favorise la construction d’unprésent et d’un avenir tenant compte des

besoins et des attentes de chacun. Aujourd’hui,la question de la participation des adultes dedemain interpelle, en dépit des jugements quiremettent parfois en question les potentialitéset les capacités des enfants et des jeunes.

LE DROIT AUX LOISIRS ET A LA PARTICIPATION 4.

Page 98: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

100

4.4.1 Vers une consolidation de la participation chez les enfantset les jeunesEn Tunisie, au cours des dernières années,plusieurs initiatives et mesures ont été prises,sous le label de la promotion de laparticipation chez les enfants, les adolescentset les jeunes, telles que :

• la création du parlement de l’enfant ;

• la création et la généralisation des conseilsmunicipaux d’enfants;

• l’abaissement à 23 ans de l’âge minimumde candidature à la chambre des députés ;

• l’abaissement à 22 ans de l’âge minimumde candidature aux conseils municipaux ;

• la création des organes d’information de lajeunesse, Tunisie 21 et Radio Jeunes ;

• la réalisation d’une consultation auprès desjeunes lors de la préparation de chaque Plande développement quinquennal ;

• l’organisation du dialogue avec les jeunesau cours de l’année 2008 ;

• l’abaissement à 18 ans du droit de vote auxélections ;

• la limitation de l’âge des présidents desassociations et organisations de jeunes etl’adoption du quota de jeunes dans lesbureaux directeurs des organisations nongouvernementales et des partis politiques ;

• la création en 2010 d’un parlement pour lesjeunes (18-21 ans).

En absence d’une réelle vie politique, lesstructures et les initiatives créées par cesmesures étaient utilisées par l’ancien pouvoirpolitique en place pour créer une apparencede participation, sans aucun impact réel sur lavie des jeunes.

La Tunisie réalise une consultation nationaleauprès des jeunes tous les cinq ans, et ce dansle cadre de la préparation des Plansquinquennaux de développement économiqueet social. Les quatre consultations nationaleseffectuées ont permis d’appréhender lesattitudes et positions des jeunes à l’égard d’uncertain nombre de questions comme la famille,l’école, l’emploi, la culture, l’environnement, laparticipation, etc. Les informations collectéesdevraient servir à aider les décideurs et lesplanificateurs à élaborer des politiques, desprogrammes et des actions plus appropriés àl’intention des adolescents et jeunes. Lesrésultats de ces consultations ont souffert de lacensure politique. Aucun résultat « dérangeant »ou susceptible de déranger n’a été publié. Lesrésultats de la quatrième consultation ne sontpas encore publiés. Un plein accès auxrésultats détaillés de cette consultation ainsiqu’à ceux des trois précédentes doit êtreassuré afin d’en tirer les analyses pertinenteset intéressantes en matière de situation desjeunes en Tunisie.

4.4.2 Participation au sein de la famille

Les Tunisiens restent attachés à la famille, endépit des transformations profondes qui necessent de la traverser. Les deux consultationsnationales de la jeunesse de 1996 et de 2000révèlent que la famille constitue une valeur« sûre » à laquelle la plupart des adolescents

et jeunes tiennent. Selon les données de ladeuxième consultation nationale de lajeunesse, la famille est considérée comme lepremier groupe d’appartenance pour 86,2%des jeunes.

Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

Page 99: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

101

La consultation nationale de la jeunesse de2005 révèle aussi que la famille est l’espaceprivilégié pour la majorité des adolescents etdes jeunes pour s’exprimer : 81,5% déclarents’exprimer dans ce cadre. Les adolescents etles jeunes sont donc plus à l’aise à s’exprimerdans le cadre de la sphère privée que danscelui de la sphère publique. Selon l’enquêtenationale sur la santé des adolescentsscolarisés de 2000, la famille apparaît commeun lieu d’échange et de discussion pour lesadolescents. Cependant, 16% des adolescentsne trouvent aucun membre de la famille avecqui discuter.

Certains adolescents sont donc livrés à eux-mêmes et vivent une situation de solitude :évoluer dans un environnement où le dialogueau sein de la famille est inexistant risquerait decompromettre la capacité d’échange et dedialogue chez ces adolescents et jeunes carl’exercice de la participation et de la prise dedécision au sein de la famille est unapprentissage progressif. Cependant, il ressort

des focus groups réalisés auprès desadolescents et des jeunes que la famillen’encourage pas toujours ses enfants àadhérer à la vie associative. La famille sembleaccorder plus de valeur au cursus scolaire desenfants qu’aux activités extrascolaires, danscertains cas, par crainte de l’engagementpolitique de ces derniers.

Graphique 69 : Espaces où les jeuness’expriment (2005)Source : Observatoire National de la Jeunesse, Troisièmeconsultation nationale de la jeunesse

4.4.3 Participation au sein de l’écoleSi les scolarisés bénéficient en classed’instruction civique et d’une formation dans ledomaine de la citoyenneté, ceux qui sont ensituation d’abandon scolaire ont plusdifficilement accès à ces informations. L’écolea peu œuvré dans l’initiation des enfants, desadolescents et des jeunes à la prise de décisionet à la gestion de la vie scolaire et universitaireen dépit des efforts déployés pour latransmission du sens civique et des fondementsde la citoyenneté. L’enseignement proposédans ce sens demeure théorique et abstrait : ilest souvent perçu par les adolescents et les

jeunes comme déconnecté de la réalité. Parailleurs, en ce qui concerne les problèmesexprimés par les adolescents, il ressort del’enquête nationale sur la santé desadolescents scolarisés de 2000 que lesproblèmes de relation avec l’administration etles enseignants sont les plus cités par lesinterrogés (24,5%), ce qui montre que ledialogue au sein des établissements scolairesavec les élèves rencontre certaines difficultés.Cette situation est exprimée beaucoup plus parles garçons (39,3%) que par les filles (12,9%).

4.4.4 Participation à la vie associative et politique

Dans le champ politique, la participationenglobe la majorité des pratiques permises parle fonctionnement démocratique. D’unemanière générale, il est fait référence auxactions électorales et aux organisationspolitiques, syndicales et associatives

auxquelles le citoyen est invité à participer.Avant la révolution, la jeunesse semblaitconnaître une véritable crise de citoyenneté.Les jeunes préféraient ne pas s’impliquer dansla vie publique sans, toutefois, romprecomplètement avec leurs attitudes contestataires.

LE DROIT AUX LOISIRS ET A LA PARTICIPATION 4.

Page 100: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

102

Concernant la présence des adolescents etjeunes dans les structures de la société civile,les résultats publiés de la troisième consultationnationale de la jeunesse révèlent une faibleadhésion des adolescents et des jeunes dansles structures associatives, politiques etsyndicales : 16,7% seulement des jeunes(16,4% des filles et 18,9% des garçons)déclarent appartenir à ces structures. Cerésultat corrobore les données de l’enquêtenationale sur la santé des adolescentsscolarisés de 2000 de la DMSU et celles del’étude régionale sur les pratiques culturelles etles nouvelles formes d’expression chez lesjeunes menée en 2005 par l’ObservatoireNational de la Jeunesse. Ce manqued’adhésion à la vie associative n’était paspropre aux adolescents et aux jeunes, maisconcernait l’ensemble des catégories d’âge enraison du climat politique qui régnait dans lepays et qui inhibait toute vie politique etassociative.

Il ressort également des résultats publiés de laconsultation nationale de la jeunesse de 2005que les structures dans lesquelles les jeunessont plus présents sont les partis politiques(6,5%) et les associations sportives (3%).Cependant, les focus groups ont révélé l’intérêtde certains jeunes actifs à la vie associative,témoignant ainsi une certaine prédispositionau bénévolat et au volontariat. Il est importantde noter qu’en dépit de leur faible présencedans les structures de la société civile, lesjeunes enquêtés, dans le cadre de laconsu l ta t ion nat ionale de 2005,revendiquaient déjà une consolidation de lapratique démocratique (64,4%), des libertésplus importantes (60,5%) et une attention plusimportante au bénévolat (55,2%).

Ces données révèlent que les jeunes semblentêtre plus familiarisés avec la notion de devoirque de droits et qu’ils auraient intériorisédavantage le sens du devoir inculqué par laculture dominante que celui de larevendication de leurs droits. Cet état de faitse répercuterait sur l’exercice de leurcitoyenneté. Cette perception de « devoir »

vis-à-vis des élections présidentielles traduit unecaractéristique importante de ces élections quin’étaient pas l’expression d’un droit, mais undevoir obligatoire d’allégeance à l’égard dupouvoir. De même, l’indifférence à l’égard desélections locales témoignerait, d’une part, desdifficultés rencontrées par les collectivitéslocales pour jouer un rôle plus important dansla vie des adolescents et des jeunes et leurmanque d’investissement dans ledéveloppement de la citoyenneté chez lesadultes de demain, et d’autre part, d’unmanque d’enjeu véritable à ces élections (àl’instar des présidentielles et des législatives)qui étaient réalisées pour conforter la positiondu parti dominant.

Graphique 70 : Taux de participation desjeunes à la vie politique et publique (2005)Source : Observatoire National de la Jeunesse

Graphique 71 : Jeunes et participation auxélections (2005)Source : Observatoire National de la Jeunesse

Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

Page 101: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

103

Concernant les raisons pour lesquelles lesjeunes ne donnent pas leur avis en ce qui lesconcerne, les interrogés, dans le cadre de laconsultation nationale de la jeunesse de 2005,semblent se référer au manque de libertés. Eneffet, 63% déclarent que le jeune ne donnepas son avis en ce qui le concerne parce qu’iln’est pas autorisé, implicitement par les aînés,contre 17% parce qu’il n’est pas convaincu et9% parce qu’il n’a pas confiance en lui. Pourles jeunes, les entraves à une expression plusimportante dans leur vie émaneraient del’environnement dans lequel ils évoluent.

En ce qui concerne les moyens d’expressionsusceptibles d’être utilisés, les adolescents etles jeunes interrogés, dans le cadre de la

consultation nationale de la jeunesse de 2005,privilégient les médias comme la radio(76,8%), la télévision (74,4%) et la presseécrite (70,7%) par rapport aux cadrestraditionnels tels que les structures de la sociétécivile (45,4%) et la participation à la viepolitique (42,8%). Certains jeunes préfèrents’investir dans des affinités « apolitiques »comme le cercle des pairs où la convivialité estsouvent au rendez-vous. Cette attitude révèlenon seulement le malaise de certains jeunestunisiens à l’égard de la question de laparticipation mais aussi leur manque deconviction dans la politique comme moyend’infléchir les orientations, les choix, lesdécisions, etc.

L’analyse de la situation des enfants, desadolescents et des jeunes concernant leursdroits aux loisirs, aux activités culturelles etsportives et à l’exercice de la citoyennetémontre un intérêt accru accordé par lesdifférents intervenants, qui reconnaissent etintègrent de plus en plus ces questions dans

leurs politiques et programmes visant lapromotion de la condition des enfants, desadolescents et des jeunes. Mais, des effortsrestent à poursuivre afin de permettre auxpopulations juvéniles une meilleure garantie deleurs droits et un meilleur épanouissementpersonnel.

Certains écarts de capacités persistent chezplusieurs mandataires porteurs d’obligationsen matière du droit des enfants et jeunes auxloisirs, aux activités culturelles et sportives et àla participation. Les deux principauxproblèmes identifiés dans ce domaine serésument comme suit :

• les enfants, adolescents et jeunes (6-24 ans),notamment les jeunes filles, n’ont passuffisamment accès à des activités récréatives,de sport et de loisirs en rapport avec leursattentes ;

• les enfants, adolescents et jeunes (6-24 ans)ne participent pas suffisamment à la viepubl ique e t n ’ont pas su f f i sammentd’opportunités de faire valoir leurs opinions,notamment à travers les associations, lesmédias ou les activités culturelles.

Les deux figures présentent de manièreschématique les arbres à problèmes relatifs àces deux aspects :

4.5 ANALYSE DES ECARTS DE CAPACITES ET RECOMMANDATIONS

4.5.1 Analyse causale

LE DROIT AUX LOISIRS ET A LA PARTICIPATION 4.

Page 102: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

104

Figure 5 : Analyse causale du droit aux loisirs, aux activités récréatives et au sport, arbre à problèmes

Figure 6 : Analyse causale du droit à la participation, arbre à problèmes

Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

Page 103: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

105

Deux principaux écarts de capacités sontidentifiés dans le domaine des droits desenfants, adolescents et jeunes aux loisirs et àla participation :

• droit aux loisirs, aux activités récréatives etau sport : les enfants, les adolescents et lesjeunes n’ont pas les mêmes possibilités d’accèsaux loisirs, aux activités récréatives et au sport

en rapport avec leurs attentes ;

• droit à la participation : Non-respect du droità la participation effective.

Les tableaux suivants regroupent par catégoried’obligataires et d’obligations les principauxécarts de capacités identifiés en cette matière :

4.5.2 Analyse des écarts de capacités

Tableau 10 : Droit aux loisirs, aux activités récréatives et au sport, principaux écarts de capacités par obligataire

Obligataires

Famille Assurer l’accès des enfants, des adolescents et des jeunes aux loisirs

Contribuer à l’offre de loisirs adaptésaux EAJ

Assurer l’accès aux activités récréatives,aux loisirs et à la culture pour tous lesEAJ

Garantir les meilleures conditions d’accès aux loisirs aux EAJ dans les établissements scolaires

Assurer la participation des EAJ

Informer, promouvoir l’importance dujeu, des loisirs et des activités récréatives pour le développement, lastimulation, la socialisation et l’épanouissement des EAJ

• Manque de conviction des familles del’importance de l’apport des loisirs pourle développement des EAJ• Capacités financières limitées de certaines familles (démunies, rurales)

Déficit de ressources et de motivation

Manque d’intégration des besoins spécifiques, des EAJ en matière de culture

Déficit de ressources

Manque de conviction par rapport àl’intérêt de mise en place des mécanismes d’intégration des attentesdes EAJ

• Manque d’intérêt/ conviction sur l’importance du jeu, des activités récréatives et culturelles pour les EAJ• Traitement superficiel ou émotionnelde ces aspects

Organisations locales et associations/Secteur privé

Ministères chargésde la Culture et de la Jeunesse

Ministère de l’Éducation

Associations

Médias

Obligations Écarts de capacités

LE DROIT AUX LOISIRS ET A LA PARTICIPATION 4.

Page 104: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

106

Tableau 11 : Droit à la participation, principaux écarts de capacités par obligataire

Obligataires

FamilleGarantir les conditions d’une participation effective des EAJ

Favoriser la participation des EAJ et fournir les compétences nécessaires

Assurer l’accès aux activités récréatives,aux loisirs et à la culture pour tous lesEAJ

Assurer l’accès aux activités récréatives,aux loisirs et à la culture pour tous lesEAJ

• Décalage entre le sens effectif de la participation et sa mise en œuvre. • Crainte de la perte du pouvoir

Renforcer les capacités des associations

Informer, promouvoir la participationdes EAJ et assurer la participation effective des EAJ

Assurer l’implication des EAJ dans lesactivités et les structures locales et garantir leur participation

Méconnaissance de l’intérêt de la participation et réticence à partager le pouvoir

Méconnaissance de l’intérêt de la participation et résistance par crainte de perdre du pouvoir

Manque d’intégration des besoins spécifiques, des EAJ en matière de culture

• Manque de ressources et de motivation. • Résistance de la part des adultes à partager l’espace de décision avec lesEAJ par crainte de perdre du pouvoir

• Manque de motivation et méconnaissance de l’intérêt de la participation des EAJ • Autocensure et crainte de « dérapage »des EAJ

• Les adultes monopolisent la responsabilité. • Absence de cadre juridique favorableà la participation des EAJ

École

Ministères

Structures d’appui aux associations

Associations

Médias

Collectivités

locales

Obligations Écarts de capacités

Disparités de revenus des ménages et accèsinégal aux loisirs. Des disparités fondées sur la région, le milieu,le sexe et les moyens financiers persistent dansle domaine de l’accès des enfants et des jeunesaux loisirs et aux activités sportives etculturelles. De même, des disparitésessentiellement d’ordre financier demeurentquant à l’accès des jeunes enfants aux jeuxd’éveil. Les enfants évoluant dans des milieuxfavorisés ont plus de chances d’avoir accès àdes jouets adaptés à leurs spécificités. Lesmoyens financiers des ménages sont souventdéterminants quant à la disponibilité des

moyens de divertissement, de loisirs et aussides technologies de l’information et de lacommunication qui restent peu présentes dansles ménages tunisiens qui consacrent encoreuniquement 2% aux dépenses de loisirs.

Répartition non équitable des ressources et desinfrastructures entre les régions et les milieux.Les équipements des écoles, des collèges etdes lycées publics varient d’une région à uneautre et ne permettent pas un accès équitableaux activités culturelles récréatives et sportives.

Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

Page 105: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

107

En effet, certaines écoles, collèges et lycéesne sont dotés ni de bibliothèques, ni de sallesde lecture, et le nombre de livres à ladisposition des élèves est souvent insuffisant.En outre, les activités de club n’existent pasdans certains établissements en raison delocaux inappropriés, du manque de personnelou des emplois du temps chargés. Par ailleurs,certains élèves du primaire n’ont pasl’opportunité d’accéder à l’éducation physiqueen raison du manque d’infrastructures sportiveset la pratique du sport peut varier dans lescollèges et les lycées en raison des dotationsdifférenciées en équipements. En dehors desétablissements scolaires et en dépit d’une largecouverture territoriale des maisons de jeunes etde culture, l’accès effectif aux activitésculturelles et récréatives demeure inégal. Deplus, la tarification de certaines manifestationspeut freiner l'accès de la culture de la part desjeunes qui vivent dans des conditionsprécaires. Concernant l’attractivité des lieuxpublics pour les adolescents et les jeunes, ils’avère que le café est nettement plus attractifque les structures culturelles et les maisons dejeunes.

Adoption de modèles d’éducation basés surl’inégalité entre les sexes par la famille.Les distances séparant les textes de loi quirespectent le principe de l’égalité entre lessexes, d’une part, et les représentations et lespratiques sociales, parfois sexistes, d’autrepart, entravent encore l’égalité entre femmeset hommes. En effet, des disparités fondées surle genre freineraient les filles dans l’accès auxloisirs et aux différentes activités récréatives,culturelles et sportives, notamment cellesproposées en dehors du cadre scolaire, enraison de la persistance d’un modèled’éducation basé sur l’inégalité entre les sexes.

Faible réponse de la production médiatique auxbesoins, attentes et spécificités des jeunes.Les médias constituent la majorité des loisirspréférés par les adolescents et jeunes :télévision, radio et journaux occupent la plusgrande partie du temps libre des adolescentset des jeunes. Toutefois, une image stéréotypéedes enfants, adolescents et jeunes se dégagede plusieurs productions télévisées et articlesjournalistiques notamment dans la presse écritearabophone.

Faible engagement de la famille, de l’école et dela société civile dans le développement de laparticipation et de la prise de décision desjeunes. En dépit des initiatives prises ces dernièresannées visant la promotion de la participationet de la citoyenneté chez les enfants et lesjeunes, leur participation reste limitée. D’unepart, la famille n’encourage pas toujours sesenfants à adhérer à la vie associative, etd’autre part, les populations juvéniles jugentêtre plus à l’aise à s’exprimer dans le cadre dela sphère privée que dans celui de la sphèrepublique. Quant à l’école, elle reste uneinstitution qui a peu œuvré à l’initiation desenfants et des jeunes à la prise de décision etla gestion de la vie scolaire et universitaire endépit des efforts déployés pour la transmissiondu sens civique et des fondements de lacitoyenneté. Par ailleurs, l’adhésion desadolescents et des jeunes tunisiens dans lesstructures associatives et politiques demeurefaible. L’absence de stratégie decommunication, de mobilisation etd’encadrement de la part de ces structuresexplique cet état de fait.

4.5.3 RecommandationsLes opportunités et pistes d’action futureidentifiées par l’analyse des droits des enfants,des adolescents et des jeunes en matièred’accès aux loisirs et aux activités récréativeset culturelles concernent les aspects suivants :

• améliorer la qualité des services offerts parles structures chargées des loisirs, de la culture,du sport en vue de mieux répondre aux droitset besoins des enfants, des adolescents et desjeunes (espace amis des jeunes) ;

LE DROIT AUX LOISIRS ET A LA PARTICIPATION 4.

Page 106: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

108

• renforcer les compétences des différentsporteurs d’obligations en vue d’une meilleureréponse aux besoins des enfants, adolescentset jeunes sur ces questions ;

• élaborer et mettre en œuvre une stratégie depromotion de la lecture chez les enfants,adolescents et jeunes (lecture pour tous) ;

• réduire les disparités (géographiques, milieuxet selon le sexe) pour améliorer l’accès auxloisirs, à la culture et au sport ;

• impliquer davantage la société civile et lesecteur privé dans l’organisation des activitésculturelles et de loisirs pour les enfants, lesadolescents et les jeunes là où elles manquentle plus, notamment dans les zones défavoriséesen leur accordant plus de ressources et demotivation ;

• plaider pour la mise en place d’une politiquenationale multisectorielle (impliquantnotamment les ministères de la jeunesse, de laculture et de l’éducation) pour assurer l’accèsde tous les enfants, adolescents et jeunes,notamment les plus défavorisés, aux loisirs,activités récréatives et culturelles.

Par rapport au droit à la participation et àl’exercice de la citoyenneté, il seraitsouhaitable de prendre en considération lesaspects suivants :

• renforcer les compétences des adolescents etdes jeunes dans la prise de parole et dedécision par la formation et l’encadrement, ledialogue au sein de la famille, la participationactive aux activités culturelles et médiatiques,la responsabilisation à la gestion des activitésscolaires, associatives et des collectivitéslocales ;

• impliquer davantage l’école dans l’initiationdes enfants, des adolescents et des jeunes à laprise de décision et à la gestion de la viescolaire et universitaire et à la promotion dubénévolat et du volontariat ;

• mettre en place une stratégie decommunication et de recrutement en directiondes enfants, adolescents et jeunes par cesstructures associatives, pour accroître leuradhésion en leur sein ;

• valoriser le rôle de la famille comme espaceprivilégié pour le dialogue et l’expression del’enfant dès le jeune âge ;

• renforcer les capacités des journalistes afind’améliorer leurs connaissances de l’ensembledes aspects qui touchent à l’enfance,l’adolescence et la jeunesse ;

• plaider auprès des ministères concernés pourmettre en place des programmes d’éducationaux médias y compris les TIC pour les enfantset les adolescents en vue d’une utilisationsaine, positive et rationnelle de ces médias etde les intégrer de manière précoce dans lesprogrammes scolaires ;

• inciter les médias à développer uneinformation destinée à la fois aux enfants etjeunes et aux parents qui sera plus « amie desenfants et jeunes», dégagée de tout sentimentréducteur ou « paternaliste » et qui accorderaune attention particulière au vécu des enfants,adolescents et jeunes et pas seulement à leursdifficultés ;

• plaider auprès des professionnels desmédias pour prendre en compte les besoins,attentes, spécificités et droits des enfants,adolescents et jeunes dans la productionmédiatique et pour améliorer l’image desjeunes qui fait souvent l’objet de stéréotypes oude clichés ou même d’une utilisation abusive.

• réviser le mode de fonctionnement et degestion de certains établissements de jeunesse,de façon à créer des conditions favorables àla participation des jeunes à tous les niveaux.Le rayonnement des établissements de jeunessesur la communauté et l’articulation de leuraction avec celle de la société civile sontégalement des éléments à renforcer.

Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

Page 107: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

109

LE DROIT A LA PROTECTION

Les nations ont l’obligation de protéger lesdroits de leurs enfants et de protéger leur milieude vie dans une approche globale, appliquantle principe de l’universalité et la non divisibilitédes droits. Elles leur assurent un environnementprotecteur tant législatif, scolaire, social,psychologique, éducationnel que culturel. LaTunisie garantit à ses enfants cet environnementprotecteur leur permettant de s’épanouir, sedévelopper d’une manière saine et se préparerpour l’avenir. Une attention particulière estapportée aux catégories vulnérables : l’enfantprivé de soutien familial, l’enfant victime deviolence intra et extra familiale, d’abus sexuels,de cruauté mentale, l’enfant exploitééconomiquement et sexuellement, l’enfant ensituation de rue ou encore l’enfant en conflitavec la loi.

L’analyse de situation des enfants en Tunisieréalisée par l’UNICEF en 2004 a fait ressortirles principales causes qui sont sources d’écartsentre les droits sollicités et les réalités et aformulé des recommandations en termes deprotection de l’enfance se résumantprincipalement dans les points suivants :

• pérenniser la réussite du corps des DPE eninstitutionnalisant le travail en réseau et enaméliorant la coordination entre les membresdu réseau que sont les travailleurs sociaux, lesprofessionnels de l’enfance, les médecins et lesservices de la justice et du ministère del’intérieur ;

• renforcer les capacités d’intervention desporteurs d’obligations impliqués dans laprotection de l’enfant ;

• investir dans les études et recherches pourmieux connaître les situations des enfants endanger ;

• développer un système d’information fiable.

Sept ans plus tard, il convient de faire le pointde cette situation en termes de réalités,réalisations, écarts persistants, d’en analyserles causes pour arriver à des recommandationspermettant d’assurer un environnementprotecteur aux enfants dont les droits ne sontpas respectés.

5.1 RAPPEL DE L’ENVIRONNEMENT PROTECTEUR

5.1.1 Engagement du gouvernement

Depuis l’indépendance, le gouvernementtunisien s’est engagé dans une politiquesociale orientée vers la protection de l’enfanceet la promotion de la justice sociale. Cetengagement s’est traduit notamment par lapublication du Code de la Protection del'Enfant (CPE) en 1995 et la mise en placed’une manière progressive d’un dispositif deprotection de l’enfance très diversifié. Cedispositif concerne les enfants privés de soutienfamilial, les porteurs de handicaps, les enfantsmenacés de rupture scolaire, les enfants vivantdans la grande pauvreté, les enfants exploitéséconomiquement et recouvre les domaines dela santé, l’éducation et les loisirs.

Aussi, a-t-on assisté progressivement à une plusgrande ouverture dans le traitement de certainsproblèmes comme la violence, les enfants en

conflit avec la loi, les enfants abandonnés ouencore les enfants maltraités, même si cesproblèmes étaient abordés avec prudence ausein de cercles restreints de spécialistes et depraticiens. En effet, dans la gestion duproblème des enfants en conflit avec la loi, legouvernement a mis en place des structures deprévention de la délinquance et d’encadrementcomme les CDIS, deux structures d’accueil etd’actions urgentes comme les Centresd’Encadrement et d’Orientation et un centre deprotection sociale de l’enfance. Par ailleurs leCentre social d’observation des enfantsaccueille des enfants en conflit avec la loi,avant leur jugement, pour une périoded’observation psychosociale. Cette gestion aété développée dans une logique deprévention du phénomène de marginalisation.

5.

Page 108: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

110

5.1.2 Législation et application de la loi

Concernant les enfants privés de soutienfamilial et particulièrement ceux nés horsmariage, l’engagement du gouvernement s’esttraduit par une série de réformes et de mesuresvisant la consolidation du droit des enfantsabandonnés à un nom patronymique et à unefamille. Il est à signaler que la Tunisie faitpartie des rares pays arabes, avec le Liban,qui ont légalisé l’adoption plénière.

Toutefois, le rapport d’analyse de situation dela protection de l’enfance en Tunisie élaborépar l’UNICEF en 2007 relève quelques

insuffisances nécessitant une attentionparticulière dans la protection de l’enfancedont notamment : i) l’insuffisante coordinationentre les nombreux départements ministérielsimpliqués dans la protection de l’enfance(MAS, MAF, ME, MI, MJDH etc.), ii) lareconnaissance lente et prudente desproblèmes d’abus des droits de l’enfant dansle sens où les textes juridiques (article 20 duCPE) parlent plutôt « d’enfant en danger », iii)l’absence de données en matièred’exploitation économique des enfants.

La Tunisie a ratifié en 1991 la CDE et a prisun certain nombre de mesures en faveur del’enfance dont :

• l’élaboration du plan national d’action pourla survie, la protection et le développement del’enfant en 1992 ;

• la promulgation du CPE en 1995, qui aconstitué un pilier central de l’environnementprotecteur de l’enfant ;

• la promulgation d’amendements à lalégislation visant une réduction des peinesencourues par l’enfant délinquant.

En outre, la Tunisie a adhéré aux deuxprotocoles facultatifs relatifs, pour l’un à lavente d’enfants, la prostitution des enfants, lapornographie mettant en scène l’enfant, etpour l’autre à l’implication d’enfants dans lesconflits armés. Il est à signaler que le CPE aentre autres instauré deux mécanismes deprotection importants : l’institution du corps desDélégués à la Protection de l'Enfance (DPE) et« le devoir de signalement » à toute personneayant constaté des situations de dangercompromettant la santé physique ou mentale

de l’enfant. Cependant, afin d’améliorer ledispositif apporté par le CPE dans le domainede la protection de l’enfant, des actionsd’appui méritent être menées : plaidoyer,actions d’information et de communicationpour un changement de comportements desacteurs, renforcement des capacités matérielleset humaines. En outre, l’article 20 du CPEmérite d’être clarifié par un guided’interprétation des situations de menace oude danger qui mettra en exergue sonexhaustivité et aidera les acteurs à uniformiserleur compréhension de ces situations.

Concernant les DPE, ils sont présents dans tousles gouvernorats du pays ; quelques-uns sontdésormais secondés d’un assistant mais lacharge de travail semble dépasser lescapacités du DPE et les moyens mis à sadisposition sont insuffisants. En effet, alors qu’ilest chargé de la promotion, la prévention et laprotection, le DPE n’intervient pratiquementque pour régler des situations de danger. Demême, le travail en réseau présente quelquesinsuffisances et son efficacité gagnerait à êtrerenforcée.

Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

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111

5.1.3 Poids des traditions

5.1.4 Discussions ouvertes et débats

5.1.5 Habilitation des enfants, familles et communautés

Les transformations socio-économiques dans laTunisie moderne, devançant le processusd’évolution et d’adaptation des mentalités,induisent ainsi un écart entre la réalité matériellede la vie moderne et les mentalités encoreattachées aux valeurs traditionnelles.Ceci estencore plus visible chez certaines familles quicontinuent à socialiser leurs enfants de manièretraditionnelle, en déphasage et parfois en conflitavec les formes de socialisation fournies àl’école ou présentées par les médias. Ainsi, lesrelations parent/enfant, adulte/enfant et

communauté/enfant subissent des tensionspouvant être bouleversantes.

La persistance de certaines pratiques a deseffets sur la protection de l’enfant en termes detolérance vis-à-vis de celles-ci, comme l’usagedu châtiment corporel pour réprimander oupunir un enfant ou le fait de faire travailler unenfant à un âge précoce. Également, desattitudes négatives et stigmatisantes continuentd’exister vis-à-vis des enfants en situationspécifique (fille délinquante, enfant né horsmariage, etc.).

La Tunisie a accompli des progrès dans la luttecontre certains tabous qui privent les enfantsd’une protection efficace. Dans ce cadre, lesmédias se sont ouverts sur des sujets sensiblescomme l’infection au VIH/Sida, la violenceintrafamiliale, la violence fondée sur le genre,l’enfance abandonnée ou encore le problèmedes aides ménagères. Toutefois, cet effortd’ouverture reste insuffisant car il s’agitessentiellement d’actions médiatiquesoccasionnelles.

Les enfants ont droit à des espaces de parole,de discussions et de débats conviviaux,ouverts et tolérants pour pouvoir aborder desquestions relatives à leur droit à la protection.Ces espaces comprennent, notamment, lafamille, les médias, l’école, la communauté, lesclubs de jeunes, les cellules d’écoute en milieuscolaire, et ce moyennant une meilleureformation des prestataires de services.

Il est connu que l’enfant qui est conscient deses droits, devient agent de sa propreprotection et est moins vulnérable surtout sicette prise de conscience s’accompagne d’unecapacité de la famille et de la communauté àvenir assurer leurs obligations envers cetenfant. Ainsi, concernant l’habilitation desenfants, elle passe par trois conditions : lareconnaissance des capacités de l’enfant, laprésence d’opportunités appropriées à leurdéveloppement et à leur valorisation etl’apprentissage à l'acquisition d’habilités àtravers les débats, les dynamiques de groupeet les jeux de rôle.

Concernant l’habilitation des familles, elle serévèle importante et nécessaire compte tenud’un certain nombre de facteurs : la faiblecapacité de protection des parents, le manque

de disponibilité des parents à discuter avecleurs enfants, la vulnérabilité socioéconomique.De ce fait, de nombreuses familles ont desbesoins réels d’aide et de soutien.

Enfin, concernant la communauté, les structuresgouvernementales sont redevables de :

• fournir à l’enfant l’accès aux soins, àl’éducation, aux loisirs et de l’aider àdévelopper ses compétences sociales ;

• soutenir les parents et les accompagner dansleurs efforts ;

• développer dans les quartiers les plusdémunis l’infrastructure de base permettantl’accès aux soins, à l’éducation, aux loisirs etc.

LE DROIT A LA PROTECTION5.

Page 110: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

112

5.1.6 Les services de baseLes services de santé maternelle et infantile sesont bien développés et ont contribué à labaisse de la mortalité des enfants de moins de5 ans et de la mortalité maternelle. Toutefois,le bilan des services de santé mentale orientésvers les jeunes et adolescents paraît plusmodeste.

Concernant les services éducatifs, lephénomène de l’abandon et de l’échecscolaire continue de constituer unepréoccupation. Le nombre d’enfantsabandonnant l’école entre 6 et 16 ansdépasse en moyenne 75 000 élèves parannée scolaire. Les milieux rural et périurbainsont les plus touchés. L’abandon scolairefavorise le passage à la délinquance et exposel’enfant à d’autres dangers. Des réformes ontété mises en place pour favoriser l’équité etpromouvoir la qualité comme l’approche parcompétence, le programme d’éducationprioritaire et l’école inclusive visantl’intégration des enfants porteurs dehandicaps. Les études menées sur le thème dela violence en milieu scolaire ont montré quela violence entre élèves est faiblecomparativement à celle observée entreenseignants et élèves. Elle serait liée à desfacteurs comme le sentiment d’injustice et defrustration, l’exclusion scolaire, le manque derespect et d’écoute par les adultes, les relationsdifficiles entre l’école et les familles ou encorela faible capacité des enseignants à gérer lesproblèmes de violence.

Le programme d’action sociale en milieuscolaire a démarré en 1991 avec commeobjectif de lutter contre l’échec et l’abandonscolaire. Ce programme initié par le MAS, encollaboration avec le ME et le MSP, consiste enla mise en place dans les établissements

scolaires de cellules d’action socialecomposées d’une équipe pluridisciplinairecomportant un travailleur social, unpsychologue, un médecin et le directeur del’établissement scolaire. Ce programme a pourbut d'intervenir d’une part pour prévenir lesdifficultés d’adaptation sociale scolaire et lesproblèmes de comportements conséquents àl’échec scolaire et d’autre part pour assurer laprise en charge des élèves qui présentent desdifficultés d’apprentissages scolaires et/ou quivivent des situations pouvant entraver oualtérer leur cursus scolaire. Pendant l’année2008-2009, le nombre de cellules d’actionsociale scolaire a atteint 2384 qui couvrentplus de 40% des établissements scolaires. Lescellules d’action sociale scolaire sontintervenues auprès de 36 679 élèves, dont23 589 ont été pris en charge, ce qui équivautà 64,3% de l’effectif général. D’autresdispositifs ont été mis en place afin deremédier à la problématique relative auxélèves qui n’ont pas rejoint les établissementsscolaires à la rentrée scolaire ou au cours del’année. Parmi 7 007 cas détectés, lesintervenants sociaux ont pris contact avec 4536 élèves, (soit 65% des cas) ce qui a permisà 1 181 élèves de rejoindre les établissementsscolaires (26%) et à 979 élèves de s’inscriredans divers centres de formation et deréhabilitation (21,5%).

Souvent, les enfants en décrochage scolairene sont pas immédiatement suivis. Le fluxd’information passe lentement entre lesservices du Ministère de l’Education et ceux duMinistère des Affaires Sociales pour retrouverl’enfant en situation de décrochage et leréintégrer dans son école. Des mois peuvents’écouler entre les deux moments ce qui rendla réinsertion scolaire difficile.

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5.1.7 Les réseaux de protection et le suivi Le réseau de protection apparaît plutôt commeune structure fonctionnant de manièreinformelle ce qui pose problème quant à laqualité des informations collectées et le suivides dossiers. En outre, la notion de l’intérêtsupérieur de l’enfant n’est pas comprise de lamême manière par tous les membres duréseau. On assiste encore, par exemple, à desréticences vis-à-vis du devoir de signalement,ou à des procédures administratives bloquantune intervention simple et de proximité ouencore à des tendances à faire porter toutesles obligations par le DPE ce qui est contraireà l’esprit du travail en réseau qui nécessite unrenforcement important pour constituer unepratique adaptée aux différents intervenants.

Concernant le suivi et la supervision, ladisponibilité, la collecte et l’analyse desdonnées relatives aux situations spécifiques del’enfant en danger sont insuffisantes. Le rapportnational sur la situation de l’enfance que publieannuellement le MAF constitue un acquisimportant qui mérite d’être consolidé etrenforcé. La création de l’Observatoire del’information, de la formation, de ladocumentation et des études sur la protectiondes droits de l’enfant vise à améliorer ladisponibilité, l’analyse et la qualité desdonnées ainsi que l’évaluation. La mise enplace de la base des données sur l’enfant« Child info » est une réalisation importantequi a cependant besoin de la reconnaissancedes autres partenaires gouvernementauxpourvoyeurs d’information.

5.2 SITUATIONS SPECIFIQUES ET DROITS A LA PROTECTION

Selon l’article 20 de la CDE, « tout enfant quiest temporairement privé de son milieu familial,ou qui dans son propre intérêt ne peut êtrelaissé dans ce milieu, a droit à une protectionet une aide spéciale de l’État ». La Tunisie quia ratifié la CDE9 , a concrétisé cette ratificationpar la publication du CPE10 et a pris une sériede mesures dont notamment la promulgationen 1998 de la loi qui a instauré le droit del’enfant, dont l’un ou les deux parents sontinconnus, à un nom patronymique (loiamendée en 2003). Il faut signaler que depuisplus d’un demi-siècle, la Tunisie a légalisél’adoption de l’enfant abandonné (en plus dela Kafela)11 .

En application de ces mesures législatives, laTunisie a mis en place des mécanismes deprotection en faveur de l’intégration de l’enfant :

• dans son mil ieu famil ial prioritairementou dans une famille de substitution à traversl’adoption, la Kafela et le placement familialde longue durée ;

• dans des structures de prise en charge :INPE, CIJE, villages SOS, Centre socio-éducatifEssanad pour enfants de plus de 6 ansabandonnés et porteurs de handicaps. Cesmécanismes fonctionnent selon la situation del’enfant qui, elle-même, peut être différente àtravers le cycle de vie de l’enfant.

Enfant âgé de 0 à 6 ans.Selon le rapport national sur la situation del’enfance en Tunisie de 2009, environ 900enfants de moins de 6 ans étaient privés desoutien familial. Un enfant sur cinq a été reprispar sa famille d’origine et 50% ont été intégrésdéfinitivement dans des familles de substitutionà travers l’adoption (43,5%) et la Kafela(6,5%). Il s’agit essentiellement d’enfants néshors mariage dans un contexte socioculturel entransition qui marginalise et stigmatise l’enfantet sa mère et décharge le père de sesresponsabilités.

5.2.1 Droit de l’enfant privé de soutien familial

9 Loi n°91-29 du 29 novembre 1991 relative à la ratification de la CDE par la Tunisie10 Loi n° 95- 92 du 9 novembre 1995 relative à la publication du CPE11 Loi n ° 58-27 du 4 mars 1958 relative à la Kafela et l’adoption

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D’après les résultats de l’étude menée parl’UNICEF en 2009 à propos de 298 mèrescélibataires12, 60% étaient d’un niveaud’instruction élémentaire (analphabètes ouniveau primaire) et 57,5% sans professioncontre 31,6% qui travaillaient sans préciser letype de travail. Le père exerçait une professiondans 65,2% des cas et était célibataire dans66,1% des cas. Les familles ont été informéesde la grossesse dans 50% des cas dont 49%ont renvoyé la fille enceinte de la maison.

La conception et la naissance de l’enfantarrivent dans des conditions le privant déjàd’un bon départ dans la vie. En effet, dans leventre de sa mère, il bénéficie rarement d’unesurveillance prénatale régulière et de qualité.D’ailleurs, la même étude a montré que 55%des filles n’avaient pas consulté les services desanté au cours de leur grossesse. En fin degrossesse, la mère dont la famille n’était pasinformée fuit souvent la maison familialecherchant refuge à la maternité où elle vapasser de quelques jours à quelques semainesavant l’accouchement. A la maternité, elle nebénéficie pas toujours de ses droits au respectet aux soins convenables.

Après la naissance, un enfant sur cinq estrepris par sa mère non mariée s’exposant ainsià la vie dans des conditions de précarité et degrande vulnérabilité sociale, psychologique etéconomique. Le droit à un congé de maternitén'est pas accordé à la mère. Par ailleurs, dansle cas où le père assume ses responsabilités etrécupère son enfant, la loi prive ce dernier deson droit à l’équité avec ses frères et sœurs nésd’une liaison de mariage puisque cet enfantn’a pas le droit à l’héritage vu que le nompatronymique prouvé à travers le testgénétique n’est pas équivalent à une filiationplénière.

L’adoption est prononcée par le juge cantonalsur la base d’une enquête psychologique etsociale. Par ailleurs, l’adoption directe pararrangement entre famille ou mère non mariée

« donatrice » d’une part et la famille adoptived’autre part est autorisée par la loi. Cettepratique ne tient pas nécessairement comptede l’intérêt supérieur de l’enfant : privation deson milieu familial naturel, aucunaccompagnement des familles donatrice etadoptive. En outre, il n’est jamais aisé dedétecter et de prouver l’existence d’éventuelsarrangements sournois, financiers ou autresnotamment entre la mère de l’enfant adopté etla famille adoptive.

Toutefois, des efforts tangibles sont déployéspour aider les mères à réintégrer le milieufamilial avec l’enfant et en cas d’impossibilité,les aider à l’autonomie et à la réinsertionsocioéconomique. L’INPE, les services dedéfense et de promotion sociale du MAS, lesDPE et des ONG comme les associationsAmal, Voix de l’enfant ou Amis de l’INPEmettent en œuvre des interventions de soutienpsychologique, social, économique oud’orientation juridique. De même, cesinstitutions œuvrent pour garantir à l’enfant sondroit à un nom patronymique et le cas échéantà un nom fictif. Ces efforts sont appelés à êtreplus efficients à travers, notamment, unemeilleure coordination entre les différentsorganismes en charge de protéger les droitsde ces enfants, une meilleure formation desintervenants, une description claire des tâchesdes intervenants et un renforcement descapacités.

Graphique 72 : Modes d’intégration desenfants 0-6 ans privés de soutien familial(structure moyenne 2007 et 2008)Source : Rapport national sur l’enfance en Tunisie 2009; MAF

12 UNICEF. Étude sur le profil des mères célibataires en Tunisie ; 2009

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L'effort de désinstitutionalisation des enfantsinitié en 2002 au niveau de l’INPE a permisde réaliser des résultats positifs à travers :

• l’augmentation du nombre des famillesd'accueil depuis 2003 ;

• l’augmentation du nombre des unités de vie :de 5 unités de vie en 2002 à 14 unitésassociatives en 2010, œuvrant en matière deprise en charge des enfants sans soutienfamilial ;

• la mise en place d'une stratégie depromotion du placement familial dans le butd'élargir le nombre des familles d'accueil dansles différents gouvernorats.

Toutefois, le processus de désinstitutionalisationdu placement des enfants ne s’est pas fait à lavitesse souhaitée et les efforts doivent êtreconsolidés, notamment en ce qui concerne leplacement des enfants dans un milieu familialdans l’attente d’une solution de placementstable et définitive.

Étant donné le nombre relativement faibled’enfants en institution, le pays dispose desressources humaines et financières nécessaireslui permettant de s’orienter vers le renforcementdu travail de suivi auprès des familles plutôtque la prise en charge institutionnelle del’enfant. Les efforts devraient être orientés versle travail avec les enfants et les familles par uneapproche participative permettant d’éviter larupture avec la famille et favoriser laréintégration de l'enfant dans un milieufamilial, en évitant l’institutionnalisation quin’est pas dans le meilleur intérêt de l’enfant.

Enfant âgé de 6 à 18 ans.Dans le cas des enfants âgés de 6 à 18 ans,la perte du droit à la protection et au soutienfamiliaux est due dans plus de 75% des cas àla perte de l’un ou des deux parents ou àl’incapacité physique et financière des parentstandis qu’environ 20% des pertes de soutiensont imputables à la négligence et aux

dislocations familiales. Bien que provisoire, laperte de soutien familial débouche dans biendes cas sur une prise en charge de l’enfantpouvant s’étaler sur plusieurs années.

Ces enfants sont pris en charge principalementpar les structures du MAF, telles que les CIJEau nombre de 23 et les complexes del’enfance au nombre de 68, ainsi que par lesvillages SOS (structure associative). Durantl’année 2008, 6588 enfants âgés de 6 à 18ans étaient pris en charge par les centresouverts (CIJE et complexes de l’enfance) soit enaccueil de jour ou en hébergement complet.Parmi les 3068 enfants intégrés dans les CIJE,15% étaient âgés de 6 à 9 ans et 65% de 10à 18 ans. Environ 1000 enfants résident dansles CIJE dont 42% sont des filles.

Entre 2006 et 2008, les CIJE ont réussi àréintégrer 750 enfants dans leur milieufamilial. Cependant, aucune action n’estprévue pour un placement provisoire dans unefamille de substitution en cas d’impossibilité deréintégration de l’enfant dans sa famille. Enrevanche, les complexes de l’enfanceproposent un accueil de jour qui permet uneprise en charge des enfants en termes descolarité, nutrition, habillement etaccompagnement mais uniquement pendant lajournée. Les enfants rentrent le soir dans leurmilieu familial.

Graphique 73 : Motifs d’intégration desenfants 6-18ans dans les complexes del’enfance et les CIJE pour l’année 2008Source : Rapport national sur l’enfance en Tunisie2009; MAF

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Certains problèmes persistent quant à laprivation des enfants de leur droit à laprotection, au développement psychologiqueharmonieux et à la participation. Ils concernent :

• la perte de l’attachement à la familleinterpellant ainsi les parties en charge desoutenir les familles démunies, pauvres etprivées à leur tour de leurs enfants à revoir letype, l’adéquation et la qualité du soutien ;

• l’absence de participation des enfants etadolescents dans le choix de leurs colocatairesde chambres, de leurs habits, etc ;

• la stigmatisation par les pairs ou autresintervenants à l’école et dans la rue ;

• l’existence de formes de violence soit entreenfants, soit exercées par les adultes.

Enfin, les professionnels exerçant dans les CIJEont besoin de formation, d’un encadrementprofessionnel, d’accompagnement et d’uneredéfinition des responsabilités et des tâches.

Par ailleurs, il serait judicieux de développerla mission des CIJE et des autres structures envue de les rendre de véritables espacesd’accueil pour tous les enfants privés de leurdroit à la protection et nécessitant un retraittemporaire de leur milieu familial, qu’ils soientscolarisés ou non scolarisés, en difficultéd’insertion familiale ou sociale, ou en situation

de danger, comme défini par l’article 20 duCPE. Ainsi, cette extension des missions et lerenforcement des capacités contribuerontsensiblement à faire de ces structures « desespaces amis des enfants en danger » sansdiscrimination aucune, en privilégiant l’accueiltemporaire des enfants.

Il faut signaler que dans le cadre de laprotection et de l'encadrement des enfants endifficultés et en vue d'améliorer la qualité dela prise en charge, de l'encadrement et del'intégration socioprofessionnelle de cettepopulation, le MAS a créé le Centre deprotection sociale des enfants de Tunis, dotéd’une capacité de 72 enfants répartis sur 6unités de vie. Ce centre est destiné à accueillirles enfants, orientés par les juges de la familleou les délégués à la protection de l’enfance,qui connaissent des situations difficiles ou ceuxqui sont en danger au sens de l'article 20 duCode de protection de l'enfant, à leur assurerl'hébergement, les besoins essentiels etl'encadrement social, sanitaire, psychologiqueet éducatif appropriés. Le centre définit lesprogrammes individualisés adaptés auxenfants pris en charge afin de garantir leurréintégration familiale, éducative etprofessionnelle et assure le suivi ultérieur desenfants en coordination avec les différentesparties concernées. Depuis sa création enjuillet 2008 et jusqu’à fin 2009, le centre apris en charge 152 enfants en danger.

5.2.2 Situations de maltraitance

Abus intrafamilial : violence, abus sexuels etcruauté.Selon l’article 24 du CPE, « le mauvaistraitement habituel signifie la soumission del’enfant à la torture, à des violations répétéesde son intégrité physique, ou sa détention, oul’habitude de le priver de nourriture, ou decommettre tout acte de brutalité qui estsusceptible d’affecter l’équilibre affectif oupsychologique de l’enfant ». La notion demaltraitance pourrait aussi couvrir la

négligence délibérément adoptée, dans lamesure où elle constitue une « mise en dangerde l’intégrité mentale ou psychologique ouphysique de l’enfant (…) par le refus de lesoigner et de veiller à son bon traitement »c'est-à-dire par sa privation de soinsappropriés ou de réponse aux besoinsessentiels de son développement physique,affectif, mental ou psychologique. (Article 21du CPE).

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Selon l’article 224 du code pénal, lamaltraitance habituelle d’un enfant est passibled’un emprisonnement de 5 ans et d’uneamende. Dans le cas où la mort résulte de lamaltraitance, la peine est portée àl’emprisonnement à vie. Selon les articles 228,228 bis et 229 du code pénal, est puni d’unemprisonnement pendant six ans l’attentat à lapudeur, commis sur une personne de l’un oude l’autre sexe sans son consentement. Lapeine est portée à douze ans de prison si lavictime est âgée de moins de 18 ansaccomplis. La peine est le double de la peineencourue si les coupables des infractions sontles ascendants de la victime, s’ils ont dequelque manière que ce soit autorité sur elle,s’ils sont instituteurs, serviteurs, médecins,chirurgiens-dentistes, ou si l’attentat a étécommis avec l’aide de plusieurs personnes.

Les données sur la maltraitance sont rares parmanque d’études et de recherches, d’une part,et par difficulté d’accessibilité, d’autre part. Lesobstacles à l’accessibilité sont multiples :

• la maltraitance, surtout dans sa forme deviolence physique, morale ou sexuelle, estexercée en milieu fermé, sur des enfantsincapables de la dénoncer et dépendants del’auteur de la maltraitance comme les parentsou l’employeur des aides ménagères ouencore l’enseignant et le cadre administratif del’école ;

• sur le plan socioculturel, certaines formes demaltraitance sont considérées comme sujettabou ou ne sont pas du tout perçues commetelle car la lisière entre la correction infligée àun enfant sous le titre de l’éducation et lapratique de la violence en tant que forme demaltraitance est assez fine et souventindécelable.

Les données publiées dans le rapport annuelsur la situation de l’enfance montrent que lessituations de maltraitance concernent près de57% des enfants pris en charge par le DPE en

2007 contre 63,1% en 2008 et 86,4% deceux pris en charge par le juge de la familleen 2007 contre 87% en 2008. Il ne semblepas y avoir de distinction en termes demaltraitance entre les filles et les garçons.Cependant, ces données ne renseignent passur les situations d’abus sexuels, de violence,de brutalité et de cruauté mentale ni sur lemilieu de survenue de la maltraitance (intra ouextra familiale).

Concernant la violence intrafamiliale, lesrésultats de l’enquête MICS3 montrent que94% des enfants de 2 à 14 ans subissentdifférentes formes de violence verbale,physique, psychique, etc. Près des trois quarts(73%) sont frappés, 26% insultés, 30% privésd’un droit et cela sans différence significativeentre les milieux ni entre les régions.

Concernant l’abus sexuel, selon une étuderétrospective13 réalisée à partir de registresjuridiques dans la région du Centre-est, 629affaires ont été recensées entre 1993 et 1998correspondant à une incidence de 14,7victimes pour 100 000 habitants par an. 81%des victimes de ces actes étaient mineures et58% de sexe féminin. 38% des agresseurs quiétaient quasi exclusivement de sexe masculinsont des mineurs. Alors que les victimes desagresseurs mineurs sont surtout de sexemasculin, celles des agresseurs adultes sont desexe féminin. Pour les mineurs de sexemasculin, le viol représentait 53% des casd’abus.

Les conséquences sur la personnalité del’enfant sont d’autant plus graves que l’enfantest jeune et que l’agresseur est un proche,connu et censé le sécuriser. Le droit à une priseen charge globale, multidisciplinaire,psychologique, médicale, sociale et juridique,englobant la famille devrait être assuré.L’enfant « agresseur » doi t auss iimpérativement être pris en charge car l’actequ'il vient de commettre dénote trèsprobablement une violence antérieure subie.

13 Gaddour N. & al. Profil épidémiologique et criminologique des abus sexuels dans une région du centre-est tunisien. Journal de médecine légale droit médical. vol. 46, no7-8, p.517-523 ; 2003

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14 CNIPRE : Étude des comportements anti-vie scolaire en Tunisie. Mahjoub A. &al, 200515 Payet J.P. Violence à l’école: un regard ethnographique sur l’école défavorisée à Tunis. SPIRALE- Revue de recherche en éducation- N°37 ; p73-82 ; 2006

De toute évidence, l’appréciation de l’ampleurdu problème et l’identification des sous-typesde maltraitance ne peuvent être apportées parun système de collecte de données de routineseulement mais aussi à travers des enquêtes etétudes appropriées. Ainsi les décideurs et leschercheurs sont redevables de quantifierl’ampleur du problème, d’identifierobjectivement et clairement ses déterminants etson impact sur le développement et lapersonnalité de l’enfant et de proposer desactions concrètes et efficaces permettant auxenfants de jouir de leur droit à la protection.Les perceptions socioculturelles de l’éducation,la pauvreté, la précarité des conditions de vie,l’ignorance des pratiques familiales favorablesau développement sain et harmonieux del’enfant, les faibles capacités d’intervention desprofessionnels en charge de la protection desdroits de l’enfant ainsi que le faible niveau decoordination entre les différents organismessemblent offrir des marges de progressioncertaines. Par ailleurs, sur ce sujet le cadrelégal qui n'était pas un élément de promotiondes usages sociaux puisqu’il donnait un largeespace à l’interprétation et à la permissivité dela violence perpétrée sur les enfants quel quesoit leur tuteur a été ajusté le 30 juillet 2010par l'amendement de l'article 319 du codepénal. En effet, le paragraphe 2 de la loi 319qui stipulait « Toutefois, la correction infligée àun enfant par les personnes ayant autorité surlui n'est pas punissable » a été éliminé dans lenouvel article.

La mise en place d’un système d’informationfonctionnel, fiable et exploitable basé sur lestrois mécanismes suivants aidera à mieuxappréhender ces déterminants :

• un mécanisme de collecte de données deroutine et d’acheminement clair dont le rythmeserait fonction du type d’indicateurs relevés,avec définition des responsabilités de chaqueacteur porteur d’obligations ;

• des enquêtes périodiques d’évaluation derésultats, d’impact ou encore de comportementset de déterminants de comportements ;

• un programme de supervision raisonnée.

Les acteurs porteurs d’obligations devraients’entendre sur un paquet d’indicateurs cléspour lesquels ils seraient redevables d’enrendre compte au rythme convenu et un paquetd’indicateurs complémentaires qui seraientutiles à suivre sans qu’ils soient déterminantsdans la protection de l’enfant. L’ODE qui esten charge de l’élaboration du rapport annuelsur l’enfance, pourrait continuer de coordonnerla mise en œuvre du système d’informationmoyennant un renforcement en ressourceshumaines et matérielles.

Violence en milieu scolaire.Selon l’enquête sur la santé des adolescentsscolarisés réalisée par la DMSU en 2005, unadolescent sur quatre déclare avoir été victimede violence et 17% déclarent en avoir eux-mêmes exercé. Les garçons seraient plus queles filles victimes de violence: 39,4% contre13,1% et auraient exercé plus de violence :27,5% contre 7,3%.

Selon l’enquête sur la violence en milieuscolaire14 , 58,2% des élèves déclarent avoirété victimes de violence sous toutes ses formes ;3,3% déclarent avoir été victimes de violencesexuelle et 11,5% se sont plaints de négligenceparentale qu’ils ont considérée comme uneforme de violence15. Selon la même enquête,les élèves les plus à même d’exercer laviolence auraient les caractéristiques suivantes :ils sont plutôt de sexe masculin, âgés de 15 à18 ans, connaissent des difficultés scolairesallant jusqu’au redoublement et sont issus defamilles à revenus modestes.

Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

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D’une manière générale, l’enquête a révélél’existence d’une tension réelle au sein del’établissement scolaire qui accueille desadolescents, tandis que les enseignants et lepersonnel administratif ne sont ni préparés niformés pour gérer de telles difficultéscomportementales. L’élève se trouvant humiliépar l’enseignant ou par un cadre administratif,réagit par une incivilité qui génère des mesurespunitives allant jusqu’à l’exclusion scolairedéfinitive.

Une étude sur la violence à l’école menée dansdes établissements secondaires de zonesdéfavorisées du Grand Tunis a présenté lesprocessus scolaires qui conduisent à laviolence sachant qu’ils sont interdépendants deprocessus plus généraux. Ce sont : l’exclusion

scolaire, le sentiment d’injustice et d’abus depouvoir de l’adulte, l’absence de respect del’élève, l’absence d’écoute de l’adolescent, lesdifficultés du métier de l’enseignant et ladifficile relation entre l’école et la famille dansces quartiers pauvres.

Il apparaît donc clair que la lutte contre laviolence en milieu scolaire passe par le droitde l’élève au respect, à la participation et àl’équité, par la prévention de l’échec scolaire,l’habilitation des enseignants et des cadresadministratifs à gérer des groupesd’adolescents, par l’appui aux familles les pluspauvres et les plus défavorisées, notammentcelles ayant migré de la campagne vers lesgrandes agglomérations urbaines.

5.2.3 L’enfant en situation de rue L’enfant en situation de rue (ESR) est un enfantpour qui la rue est devenue une considérationmajeure en l’absence de protection familiale etcommunautaire. Dans ce cas, la rue est pourl’enfant soit son domicile permanent et certainsparlent alors d’enfant de rue, soit un refugedans lequel il passe ses journées mais rentre lesoir chez les siens (famille, parents…) et l’onparle d’enfant dans la rue.

Le CPE n’évoque pas l’ESR mais seulement lasituation de vagabondage (article 22). De cefait, les données sur l’ESR ne sont pasrecensées. Le rapport national sur l’enfancecomporte quelques données sur levagabondage et la négligence. À ce titre, levagabondage et la négligence ont été de loinla première cause d’intervention aussi bien duDPE (35,3%) que du juge de la famille (65,7%)pour l’année 2008.

Le MAS a réalisé, en collaboration avecl’UNICEF, une étude sur les caractéristiquespsychologiques et sociales des enfants dans larue16 . Cette étude a porté sur un échantillonde 587 ESR âgés de 5 à 18 ans. Plus de 97%d’entre eux étaient des enfants dans la rue et

86% de sexe masculin. Cette prédominancemasculine pourrait être expliquée par lapossibilité plus grande chez le garçon maltraité à fuir le domicile familial que chez lafille.

Les ESR vivent surtout dans les grandes villes.Ces enfants s’adonnent à des activités devagabondage, de mendicité, de vente de petitsarticles ou encore au vol, à des pratiquesd’addiction et à d’autres comportementsdélinquants. En outre, près de 71% de cesenfants sont en échec scolaire et plus de 60%se plaignent de la promiscuité chez eux. Cesrésultats rejoignent les indicateurs deprotection préconisés par la Carte des prioritésrégionales dans le domaine de l’enfance17pour suivre la tendance de protection del’enfant à savoir :

• le nombre d’enfants chômeurs (nonscolarisés) pour 1000 enfants de la tranched’âge 15-17 ans en tant qu’enfants exposés aurisque de la délinquance ; cet indicateur étaitde 53,2 enfants chômeurs pour 1000 enfantsâgés de 15 à 17 ans d’après le RGPH de2004 ;

16 UNICEF. Caractéristiques psychologiques et sociales des enfants dans la rue ; 200717 Zaafrane H. Carte des priorités régionales dans le domaine de l’enfance, ODE, UNICEF, 2007

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• le nombre de personnes du ménage parrapport au nombre de pièces du logement entant qu’indicateur sur la situation depromiscuité et les conditions de vie desménages qui sont souvent déterminantes enmatière d’éducation et de protection de

l’enfant. Cet indicateur était de 1,48 personnepar pièce de logement en 2004 avec desextrêmes allant de 1,23 pour le gouvernoratde l’Ariana à 1,88 pour Kairouan. Il est ànoter que cet indicateur compte toutes lespièces sans distinction.

5.2.4 Situation de l’enfant exploité économiquement et sexuellement

L’enfant exploité économiquement.En 1995, la Tunisie a ratifié la conventioninternationale du travail n°138 relative à l’âgeminimum d’admission à l’emploi18 et en 2000,la convention internationale du travail n°182sur les pires formes de travail des enfants19. Enoutre, s’inscrivant dans l’esprit de l’article 32de la CDE, le CPE de la Tunisie, dans sonarticle 26, définit l’exploitation économique del’enfant comme étant l’exposition de ce dernierà « la mendicité ou son emploi dans desconditions contraires à la loi, ou le fait de lecharger d’un travail susceptible de le priver desa scolarité, ou qui soit nuisible à sa santé ouson intégrité physique ou morale ».

Le code du travail a fixé l'âge minimumd'admission au travail à 16 ans dans toutes lesactivités régies par le code du travail (article53). Toutefois, et conformément auxdérogations prévues par la conventioninternationale du travail n°138, le code dutravail a prévu dans son article 54, lapossibilité d'employer des enfants âgés demoins de 16 ans seulement dans lesétablissements où exercent les membres de lafamille sous l'autorité du père, de la mère oudu tuteur à condition que l'emploi de cesenfants n'ait aucun effet négatif sur leur santé,leur développement physique et mental et leurscolarité.

Les résultats de l’enquête MICS2 réalisée en2000 font ressortir que 2,1% d’enfants âgésde 5 à 15 ans exercent une activitéprofessionnelle. Pour le Nord-Est, ce taux estde 3,5%, chez les enfants âgés de 10 à 15

ans. Plus de 71% de ces enfants travaillent plusde 4 heures par jour et plus de la moitiétravaillent durant les heures d’école, ce quiaugmente le risque d’échec scolaire. La moitiédes enfants qui travaillent dépensent l’argentgagné pour subvenir aux besoins de leurfamille.

Par ailleurs, dans une étude menée auprès de200 enfants âgés de 9 à 15 ans et exerçantun travail dans le Grand Tunis20 , les résultatsmontrent que 46,8% de ces enfantstravaillaient dans le secteur du commerce,22,3% dans le secteur des services, 19,1%dans le secteur industriel et 11,7% dans desateliers. Le nombre moyen d’heures de travailpar jour était de 8 heures. Les résultats ontmontré également que 50% des enfants autravail étaient exposés à de grands ou de trèsgrands dangers sur leur santé physique commeles blessures profondes, les contusions, lesplaies oculaires graves par projection deproduits etc., à des risques psychologiques dedélinquance par sentiment d’injustice et demarginalisation, à l’échec scolaire et auxharcèlements sexuels notamment pour les filles.Les causes majeures qui ont amené les enfantsà travailler étaient les accidents de la vie dontprincipalement la perte du chef du ménage etla pauvreté insupportable de la famille.

Concernant les filles employées de maison,une étude menée auprès de 99 employées demaison21, a montré que l’âge moyen à lapremière activité était de 14 ans dans 30% descas et de 15-19 ans dans plus de 50% des cas.

18 Loi n° 95-62 du 10 juillet 1995, portant ratification de la convention internationale du travail n°138 concernant l’âge minimum d’admission à l’emploi19 Loi n°2000-1 du 24 janvier 2000, portant ratification de la convention internationale du travail n°182 sur les pires formes de travail des enfants20 Ben Hmida M. & M. Yaacoubi. Le travail des enfants en Tunisie entre protection législative et réalité sociale ; 2008.21 A. Sahbeni & al. Étude sur les aides ménagères à plein temps ; AFTURD Tunis ; 2009

Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

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Plus de 90% des femmes employées étaientanalphabètes ou d’un niveau d’instructionprimaire. 90% de leurs parents étaientanalphabètes également et près de 95% nebénéficiaient d’aucune couverture sociale. Ceconstat rejoint celui décrit dans le rapportd’analyse de la situation de la protection del’enfance en Tunisie réalisé par l’UNICEF en2007 qui avance un nombre approximatif de40 000 employées de maisons en Tunisie. Cesfilles sont recrutées surtout en milieu rural etsont issues de familles pauvres. Elles travaillentsouvent dans des conditions difficiles sansprotection sociale et sont souvent victimes deviolence sous différentes formes au sein duménage employeur autrement dit à l’intérieurd’un milieu fermé et privé. Le salaire perçu estgénéralement versé directement au père qui endispose entièrement.

À propos de l’enfant en situation de mendicité,les seules données disponibles proviennent desrapports annuels sur la situation de l’enfance.Le rapport de 2007 fait état d’une prise encharge de 51 enfants en situation de mendicitédans le Grand Tunis en 2007 par les brigadesmixtes (sur la base du programme conjointentre le MI et le MAS) et 144 enfants pour toutle territoire en 2008. Cette prise en charge sefait en partenariat avec les services sociaux duMAS et peut englober la réintégration del’enfant dans sa région d’origine, un suivisocial ou encore des mesures juridiques.Quant au nombre d’enfants en situation demendicité pris en charge par les DPE, il aatteint 74 enfants en 2007 et 144 enfants en2008 soit 1% et 2% du total d’enfants pris encharge par le corps des DPE.

À partir de ces constats, il s’avère qu’il existeun hiatus entre la législation tunisienne envigueur à propos du travail des enfants et sonapplication. Les causes sont multiples : lapauvreté de la famille, les accidents de la viecomme la perte d’emploi du chef de ménageou le décès de celui-ci, le faible niveaud’instruction des parents, l’ignorance de la

famille et de l’enfant des dangers du travail del’enfant sur sa santé physique et mentale,l’échec scolaire avec tous ses déterminants, lefaible niveau d’inspection et de contrôle de cephénomène.

La lutte contre le phénomène de l’exploitationéconomique de l’enfant devrait bénéficier d’unprogramme multisectoriel et multidisciplinaireimpliquant les départements concernés par laprotection judiciaire, l’éducation et la santé del’enfant, le soutien et l’appui sociaux desfamilles démunies, des ONG, des enseignantschercheurs. Ce programme devrait inclure unaxe sur le suivi et l’évaluation qui permettra demieux appréhender la problématique etd’évaluer objectivement les progrès. Il estimportant de savoir que l’amélioration desconnaissances sur les situations privant l’enfantde ses droits fait partie intégrante de son droità un environnement protecteur.

L’enfant exploité sexuellement.Selon l’article 34 de la CDE, « les États partiess’engagent à protéger l’enfant contre toutes lesformes d’exploitation sexuelle et de violencesexuelle ». Par ailleurs, la Tunisie a adhéré auxdeux protocoles facultatifs annexés à la CDEdont celui relatif à la prostitution des enfants etla pornographie mettant en scène desenfants22. Dans son rapport initial surl’application de ce protocole, le gouvernementtunisien présente en détail les mesuresjuridiques et institutionnelles qui ont été prisesdans « une approche globale des droits del’Homme et considérant le développement del’enfant comme la base du projet de sociétémis en œuvre par l’État tunisien dans le strictcadre du respect des engagementsinternationaux ».

L’article 25 du CPE définit l’exploitationsexuelle de l’enfant qu’il soit garçon ou fillecomme « sa soumission à des actes deprostitution soit à titre onéreux ou gratuit,directement ou indirectement ».

22 Loi n° 2002-42 du 7 mai 2002 : adhésion de la Tunisie aux deux protocoles facultatifs annexés à la CDE et relatifs à l’implication de l’enfant dans les conflits armés et celui concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants

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Depuis la promulgation du CPE, les DPE sontchargés d’intervenir en cas de signalement pourapporter les réponses permettant la protectionde l’enfant à travers leurs prérogativesstatutaires. Ces interventions se font sous latutelle du juge de la famille. Les DPE ont pris encharge 100 enfants victimes d’exploitationsexuelle en 2008 et 127 en 2007. Les juges dela famille ont pris en charge 8 enfants dont 7filles en 2008 ainsi qu’en 2007.

D’autre part, selon une étude comportementalequi a été réalisée auprès de 462 travailleusesdu sexe clandestines en 2009, trois ont subi lepremier rapport sexuel avant l’âge de 10 anssoit 0,6%, 34 entre 10 et 14 ans (7,4%) et 228entre 15 et 19 ans (49,4%). Plus de 30% onteu le premier rapport sexuel payant entre10 et 19 ans.

La prise en charge des enfants exploitéssexuellement doit reposer sur une approcheintégrée et multidisciplinaire pratiquée par desprofessionnels formés (travailleurs sociaux,professionnels de l’enfance, corps médical etparamédical) et conscients de l’hostilité ducontexte socioculturel à la réintégration socialede ces enfants surtout quand il s’agit de filles.Les ONG peuvent jouer un rôle important dansla mesure où elles sont censées avoir moins dedifficultés à accéder à ces groupes que lesstructures gouvernementales. Tous ces effortsseront vains si des actions ne sont pas prisespour établir et mettre à la disposition del’ensemble des acteurs opérant dans cedomaine, des données fiables et actualisées surce phénomène dont on ignore réellementl’envergure.

La Tunisie s’est engagée sur tous les instrumentset standards internationaux en matière dejustice des mineurs23. Le titre II du Code deProtection de l’Enfant traite en particulier de lajustice des mineurs. Selon l’article 68 du CPE,l’enfant de moins de 13 ans n’est paspénalement responsable. La Tunisie envisageaussi la création d’un régime pénal spécifiquepour les jeunes âgés de 18 à 21 anspermettant de passer progressivement du statutd’enfant à celui d’adulte.

Selon le rapport annuel 2008 sur la situationde l ’enfance, le nombre d’af fa i rescorrectionnelles impliquant des enfants était de10 623 en 2007-2008. Le sexe ratio est de8,6 marquant une large prédominance dusexe masculin. Le nombre de crimes a atteint345, soit 3,2% des affaires. Les motifs deconflits avec la loi étaient classés par ordredécroissant en : atteintes aux biens ; atteintesaux personnes ; atteintes aux mœurs ; atteintesà l’autorité et à l’ordre public. Seul 10%purgent une peine de privation de liberté. Il està noter que les mécanismes d’alternative à laprivation de liberté gagneraient à être mis enœuvre ou renforcés. C’est le cas du délégué à

la liberté surveillée prévu dans le code deprotection de l’enfant et non encore mis enplace. Par ailleurs la médiation judiciaire déjàappliquée mériterait d’être professionnaliséeen vue de constituer un processus éducatif pourl’enfant et être entamée en début de processuspour atteindre l’objectif de déjudiciarisation.Dans cette optique, les conseillers de l’enfancedonnant un éclairage psychosocial aux jugesde l’enfant pourraient voir leur rôle renforcé.

Le gouvernement tunisien s’est engagé àprotéger le droit de l’enfant à la protectionsanitaire, physique et morale et à l’assistancesociale et éducative lorsque celui-ci est placédans une institution éducative de protection oude rééducation ou mis dans un lieu dedétention. L’enfant en conflit avec la loi est prisen charge par le juge de l’enfant qui appliquele principe de la correctionnalisation de tousles crimes à l’exception de ceux liés à unmeurtre. Avant le jugement, le juge peut garderl’enfant dans son milieu familial notamment s’ils’agit d’une fille ou le placer dans le Centresocial d’observation des enfants dans le casnotamment où la famille est jugée être unesource de danger pour lui.

23 Règles de Pékin adoptées le 29/11/1985, règles de Riyad et de la Havane adoptées le 14/12/1990

5.2.5 Situation de l’enfant en conflit avec la loi

Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

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Le Centre social d’observation des enfantsaccueille seulement des garçons qu’ils soientprimo délinquants ou récidivistes. La capacitéd’accueil de ce centre est de 60 enfants. Ladurée de séjour est fixée à 30 joursrenouvelables une fois.

Le juge des enfants peut prononcer un non-lieuou se contenter d’une simple admonestationavec maintien de l’enfant dans sa famille. Ilpeut, le cas échéant, ordonner le placement del’enfant dans l’un des centres de réhabilitationqui sont au nombre de six dont un est réservéaux jeunes filles mineures. Dans ces centres, ladurée de séjour ne dépasse pas généralement6 mois. Le jugement est revu par le juge del’enfant tous les six mois en vue d’évaluer lescapacités et risques de réintégration de l’enfantdans sa famille.

Durant la période de détention dans les centresde rééducation, les enfants disposent deservices de santé et socio psychologiques. Desprogrammes scolaires établis en coordinationavec le Ministère de l’éducation sont proposésaussi aux enfants en cours de scolarisation ainsique des ateliers de formation professionnelle quipeuvent être validés par un certificat d’aptitude.C’est ainsi que durant 2008, 205 enfants ontobtenu un certificat de formation professionnelleet 23 un certificat de formation agricole.Toutefois, il y a lieu de noter qu’il arrive que lejuge de l’enfant décide de placer des enfantsdans des prisons pour adultes. Ce placement esttrès rare et concerne un nombre très limitéd’enfants dont les comportements très agressifset dangereux révèlent leur incapacitéd’intégration dans les centres réservés auxenfants.

Certains enfants ayant commis des crimesgraves sont placés par le juge de l’enfant dansles prisons pour adultes et non dans les centresde rééducation. Ceci représente un écart grave(violation) des droits de l’enfant.

D’après les spécialistes en sociologie etpsychologie sociale, le phénomène dedélinquance juvénile serait déterminé parl’immigration intérieure, l’abandon scolaire, larupture de la vie au sein de la famille, la

maltraitance intrafamiliale, l’incompétenceéducative des parents, la pauvreté, lapromiscuité, l’influence négative des pairs et desmédias. Cependant, il est vrai que lesévènements et traumatismes subis dans la vielaissent leurs empreintes sur le développementde la personnalité de l’enfant, mais ce quel’enfant va faire de ce vécu est encore plusdéterminant dans l’apparition decomportements de délinquance. Ainsi, laprotection commence par l’habilitation del’enfant lui-même à connaître ses droits et à faireface aux risques potentiels ou réels dedélinquance.

Les familles sont appelées à assumer leursresponsabilités et quand elles sont dansl’incapacité de répondre à leurs obligations,elles doivent bénéficier d’un programmed’habilitation aux bonnes pratiques d’éducationet de dialogue avec leurs enfants, d’unprogramme de soutien social et psychologique.Le gouvernement et la société civile sontredevables de la mise en œuvre de cesprogrammes.

En prévention de l’échec scolaire, l’école doitêtre attractive pour l’enfant. Elle doit le respecteret le faire participer dans les décisions prises ausein de l’école. Les enseignants doivent êtrehabilités à gérer des groupes d’adolescents. Lesétudes ont montré que les comportementsdélinquants débutaient vers l’âge de 12 ans. Àcet effet, la mise en œuvre de programmes desoutien et de prévention doit démarrer tôt depuisl’école de base.

Face à un taux de récidive estimé à 27%, ilparaît nécessaire de réviser et réajuster lesprogrammes d’accompagnement de l’enfantayant commis un délit en direction de laprévention de la récidive notamment par ledéveloppement et la mise en œuvre de mesuresalternatives à la détention. Les professionnelsdes centres de rééducation ainsi que lestravailleurs sociaux opérant dans les structuressociales régionales et locales seraient desacteurs clés pour la mise en œuvre de projetsde réintégration sociale et familialeindividualisés élaborés de manière participativeavec les enfants concernés.

LE DROIT A LA PROTECTION5.

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5.2.6 Situation de l’enfant handicapé Selon l’article 23 de la CDE, les États parties« reconnaissent que les enfants mentalementou physiquement handicapés doivent menerune vie pleine et décente, dans des conditionsqui garantissent leur dignité, favorisent leurautonomie et facilitent leur participation activeà la vie de la collectivité ». Au niveau législatif,plusieurs lois ont été promulguées pourconfirmer le droit de la personne handicapéeà une éducation, une rééducation et uneformation professionnelle appropriées. En1991, une nouvelle loi a été promulguéefaisant de l’éducation des handicapés unepartie intégrante du système générald’enseignement24 .

L’engagement du gouvernement à garantir ledroit de la personne handicapée à laprotection, aux soins médicaux et à l’éducations’est traduit par l’adoption d’une politiquebasée sur : l’intégration de l’enfant handicapéà la vie scolaire ordinaire moyennant unsoutien spécifique, l’application de la loirelative à l’obligation scolaire aux enfantshandicapés au même titre qu’aux autresenfants, la gratuité de l’enseignement et dessoins médicaux, la prise en charge précoce etla participation active de la société civileimpliquant les parents d’enfants handicapés.Cet engagement s’est traduit par la mise enœuvre d’une stratégie d’intégration des enfantshandicapés dans le système scolaire. Cettestratégie a été adoptée lors d’un conseilministériel restreint le 28 mai 2003.

Les données sur l’intégration scolaire desenfants handicapés sont présentées plus haut(section 3.1.3.). Des préoccupations persistentconcernant les enfants porteurs de handicapset abandonnés. Ceux-ci n’ont aucune chanced’être adoptés ou intégrés par la Kafela dansdes familles de substitution. Généralement, ilssont placés à l’INPE où l’une des deux issuessuivantes les attend :

• soi t i ls sont placés selon le mode de« placement familial à long terme» dans desfamilles qui dans la plupart des cas sontmodestes et ont un besoin d’accompagnementet d’habilitation pour prendre soin d’un enfanthandicapé. Une subvention mensuelle estversée à la famille par l’INPE qui assure laprise en charge intégrale des soins dispensésà l’enfant ;

• soit ils sont gardés à l’INPE où ils vont vivreen institution, dans des unités de vie,théoriquement jusqu’à l’âge de 6 ans. Par lasuite, ils sont placés au centre socio-éducatifEssaned de Sidi Thabet qui accueille desadultes et des enfants de plus de 6 ans,abandonnés et porteurs de handicaps.

Par ailleurs, les réponses apportées auxsituations de danger n’accordent pas uneattention claire aux enfants handicapés. Cettethématique gagnerait à être étudiée dans lecadre d’une analyse de situation approfondieenglobant des enquêtes de prévalence et desenquêtes CAP (Connaissances, Attitudes etPratiques) auprès des enfants handicapésmoteurs, sensoriels et mentaux légers, de leursfamilles, des enseignants travaillant dans desécoles intégrantes et non intégrantes ainsiqu’auprès des professionnels travaillant dansles centres spécialisés. Cette analyse desituation devra aboutir à la mise en place d’unprogramme de protection de l’enfanthandicapé englobant l’habilitation desfamilles, la formation et le renforcement descapacités des enseignants travaillant dans desécoles intégrantes ainsi que les professionnelstravaillant dans les centres spécialisés,l’implication des médias et le renforcement desONG.

24 Loi n° 81-46 du 29 mai 1981, relative au droit de la personne handicapée à une éducation appropriée ; loi n° 89-52 du 14 mars 1989, modifiant la loi n° 81-46 du 29 mai 1981 portant sur ledroit de la personne handicapée à une rééducation et une formation professionnelle appropriées et Loi n°91-65 du 29 juillet 1991 faisant de l’éducation des handicapés partie intégrante du systèmegénéral d’enseignement

Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

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5.3 ANALYSE DES ECARTS DE CAPACITES ET RECOMMANDATIONS

5.3.1 Analyse des écartsL’analyse de la situation des enfants, jeunes etadolescents du point de vue de leur droit à laprotection fait ressortir trois problèmes majeursqui peuvent être présentés comme suit :

• certains enfants subissent des situations demaltraitance, de violence, d’exploitation etd’abus ;

• les enfants vulnérables ne bénéficient pasd’une bonne prise en charge et d’uneprotection suffisante de la part de la famille.Cela concerne notamment l’enfant privé deprotection parentale suite à l’abandon, à la

rupture du lien, à la perte d’un des deuxparents ou des deux parents ou à l’incapacitédes parents de prendre en charge l’enfant etaussi les enfants victimes d’abus sexuel ou demaltraitance ;

• les procédures relatives à la situation desenfants en conflit avec la loi ne sont passuffisamment connues et appliquées dans leurconformité avec les droits de l'enfant.

Les analyses causales de ces problèmesprésentées sous forme d’arbre à problèmessont illustrées par la figure suivante :

Figure 7 : Analyse de capacités, enfants subissant des situations de maltraitances, de violences, d’exploitation et d’abus

LE DROIT A LA PROTECTION5.

Page 124: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

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Les principaux écarts de capacités qui existentdans le pays en matière de respect des droitsdes enfants subissant des situations demaltraitances, de violences, d’exploitation etd’abus concernent les aspects suivants :

• manque de clarté du cadre juridique (article20 du CPE) ;

• faiblesse de la désagrégation des donnéessur la maltraitance rendant l’analyse difficile etdonc la mise en place de programmes deprévention non ciblés ;

• insuffisance des mesures de dépistageprécoce de la maltraitance ;

• insuffisance de la sensibilisation et de laformation des intervenants médico-sociauxdirects sur l’identification et la prise en chargede la maltraitance ;

• faible recours au signalement par lescitoyens et les professionnels ;

• inadaptation des modalités de prise encharge des enfants compte tenu de la situationdont ils sont victimes (en particulier en matièred’abus sexuel) ;

• réponse exclusivement gouvernementale etfaiblesse du tissu associatif pour traiter cesproblématiques ;

• absence de sensibilisation communautaire dansles lieux de regroupement des parents et familles ;

• faible utilisation des média et des modèles(grands sportifs, etc.) comme porteurs demessages positifs ;

• absence de programmes sociaux spécifiquespour les familles à risque.

Les principales actions préconisées pourremédier à ces écarts de capacité sont lessuivantes :

• permettre à l’enfant de revendiquer son droità être traité avec dignité et lui garantir la

sécurité pour le faire : établir un mécanismeclair et des procédures spécifiques pour laprotection et le recours ;

• favoriser l’écoute des enfants ;

• promouvoir et informer sur la protection del’anonymat en cas de signalement (école,garderie, jardin d’enfant, clinique, etc.) ;

• clarifier la notion d’abus intra-familial :sensibilisation des différents acteurs et créationd’un consensus sur la définition ;

• développer des prises en charge spécifiques :structures de soins spécialisées, sensibilisationdes médecins de première ligne, sensibilisationdes services de pédiatrie et de santé mentale ;

• habiliter les institutions sociales à la pratiquede prises en charge spécialisées ;

• favoriser le placement familial temporaire etle travail d’appui en éducation parentale à lafamille ;

• soutenir les familles en difficulté ;

• habiliter les familles sur les bonnes pratiqueséducatives ;

• développer la prévention précoce : cibler lesfamilles à risques par des programmesspécifiques ;

• renforcer et réviser les programmes deprévention et de lutte contre l’échec scolaire ;

• développer une prévention communautaire :campagnes médiatiques contre la maltraitance(lutter contre l’intolérance culturelle et lestabous) ;

• encourager les débats sur les questions demaltraitance ;

• impliquer les associations dans le plaidoyeret renforcer leurs capacités ;

Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

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• développer des mécanismes de dépistageet de prise en charge précoce ;

• renforcer le travail en réseau ;

• diffuser la culture de participation des élèvesdans la prise de décisions ;

• renforcer les capacités du cadre éducatifdans la gestion de groupes d’adolescents ;

• réaliser des études sur le phénomène del’échec scolaire et ses déterminants ;

• instaurer un système d’information performantet fiable.

Figure 8 : Analyse de capacités, enfants vulnérables ne bénéficiant pas d’une protectionsuffisante de leurs familles

(*) Les enfants vulnérables concernent notamment les enfants privés de protection parentale suite à l’abandon, à la rupture du lien, à la perte d’un des deux parents ou des deux parents ou à l’incapacitédes parents à prendre en charge l’enfant et aussi les enfants victimes d’abus sexuel ou de maltraitance.

LE DROIT A LA PROTECTION5.

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Les principaux écarts de capacités relatifs à laprotection des enfants vulnérables concernentles aspects suivants :

• persistance de l’approche administrative dansla gestion de la situation des enfants chez certainsprofessionnels ;

• absence/ Insuffisance de politiques et deprogrammes d’information, d’éducation et decommunication en matière de sexualitédestinés aux enfants et aux jeunes ;

• manque ou insuffisance des programmes de« repêchage » socio-éducatif des enfants ;

• manque ou insuffisance des programmes desoutien économique et socio-éducatif desfamilles ;

• manque de coordination entre lesintervenants directs dans les problématiques del’enfance ;

• faibles capacités d’intervention des ONG.

Les principales actions préconisées pourremédier à ces écarts de capacités sont lessuivantes :

• mise en place d’une stratégie decommunication pour un changementd’attitudes et de comportements des famillesvis-à-vis de la mère célibataire et de son enfantet des familles pour promouvoir laresponsabilisation des pères ;

• appui et accompagnement de la mère pourune autonomie socio-économique et affective ;

• renforcement du soutien adapté et effectifaux familles en difficulté financière ;

• formation des intervenants dans la protectionde l’enfance en vue de consolider leprofessionnalisme et les aider à mieux gérer enréseaux les situations d’enfants abandonnés ;

• renforcement de la supervision technique desintervenants directs auprès des enfants et desfamilles ;

• organisation de campagnes de plaidoyerpar les ONG pour impliquer des personnalitésinfluentes et motivées dans la protection del’enfance et pour promouvoir le placementfamilial ;

• promotion des appuis individualisés à lafamille en gardant l’enfant dans son milieufamilial ;

• mise en œuvre des politiques dedésinstitutionalisation à travers la promotiond’autres alternatives de protection et desubstitution par rapport à la voix institutionnelle ;

• promotion, dans toutes les situations, de laparticipation active des enfants et des famillesdans leur projet de vie ;

• renforcement des programmes de soutiensocial et psychologique des familles endifficultés.

Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

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Figure 9 : Analyse de capacités, enfants en conflit avec la loi

Les actions de remédiation préconisées dans cedomaine sont les suivantes :

• habilitation de l’enfant lui-même à connaître sesdroits et à faire face aux risques potentiels ou réelsde délinquance ;

• accompagnement des familles ;

• consolidation du professionnalisme chez lesintervenants par la formation et la supervision ;

• programme d’habilitation des familles auxbonnes pratiques d’éducation positive et dedialogue avec leurs enfants ;

• programme de soutien social et psychologiqueaux enfants et aux familles ;

• mise en œuvre de programmes de soutien etde prévention à démarrer tôt à partir de l’écolede base ;

• programme d’accompagnement desprofessionnels exerçant dans les centres deréhabilitation ;

• évaluation du système actuel de la justice desmineurs et du programme spécifique deréintégration des enfants ayant commis uneinfraction et jugés.

LE DROIT A LA PROTECTION5.

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Ainsi, en guise de conclusion pour cette partiedu rapport, on peut signaler que la Tunisie s’estbien inscrite dans la politique mondiale deprotection de l’enfance. L’engagement dugouvernement s’est affirmé par la ratificationde la CDE, des protocoles facultatifs relatifs àl’exploitation sexuelle de l’enfant et aux conflitsarmés et la ratification des conventions n° 138et 182 relatives au travail des enfants. Elle amis en place des mécanismes de protection del’enfant : la publication du CPE, la création ducorps des DPE, l’instauration des tribunauxpour enfants etc. Elle a en parallèle créé etrenforcé des structures de prise en charged’enfants en perte de leurs droits.

Pour améliorer encore plus ce système, laTunisie a tout intérêt à mener périodiquementdes évaluations des étapes franchies et desécarts enregistrés en matière de protection del’enfance afin de mettre en place les actionscorrectrices et réductrices de ces écarts, enfaveur de l’enfance privée de ses droits.

Les principales causes des écarts de capacitéspersistants concernent les aspects suivants,classés par catégorie de droits :

1 - Droit de l’enfant à une identité dès sanaissance et à la protection au sein de sa famille

• mère célibataire pauvre et sans qualificationprofessionnelle ;

• père déchargé de sa responsabilité ;

• rejet socio-culturel de la mère et de l’enfantpar la famille ;

• manque de coordination des différentsintervenants et des professionnels de l’enfance ;

• faibles capacités d’intervention des ONG ;

• insuffisance des campagnes d’information et desensibilisation ;

• manque de familles de placement ;• pauvreté, dislocations familiales, conflits intra-familiaux ;

• persistance de l’approche administrative dansla gestion de la situation des enfants chez certainsprofessionnels ;

• existence de disparités sociales.

2 - Droit de l’enfant à la protection contre toutesformes de violence, abus sexuel ou cruautémentale

• échec scolaire et incompétence éducative desparents ;

• certaines formes de maltraitance considéréescomme tabous ;

• insuffisance des signalements ;

• surcharge de travail chez les DPE ;

• manque d’informations et de données surl’ampleur du problème ;

• insuffisance des mesures de dépistageprécoce de la maltraitance ;

• gestion conservatrice de la relation cadreéducatif/élève ;

• existence de maltraitance intrafamiliale.

3 - Droit de l’enfant à la protection contrel’exploitation économique nuisible à sa santé, àson intégrité physique ou morale :

• pauvreté insupportable des familles ;

• échec scolaire ;

• incapacité des enfants à réclamer leurs droits ;

• manque d’informations et de données ;

• non reconnaissance de certaines formes detravail des enfants ;

• tolérance socioculturelle vis-à-vis du travaildes enfants surtout dans l’entreprise familiale.

Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

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4 - Droit de l’enfant à la protection contrel’exploitation sexuelle :

• manque d’informations et de données sur lephénomène ;

• pauvreté de la famille ;

• échec scolaire ;

• vécu de maltraitance ;

• faibles capacités des ONG à travailler avecles travailleurs du sexe clandestins.

5 - Droit de l’enfant en conflit avec la loi àtoutes les mesures de protection, à l’atténuationdes peines et si possible au maintien dans sonmilieu familial :

• conflits intrafamiliaux ;

• incompétence parentale ;

• faiblesse dans le contrôle de soi ;

• manque de professionnalisme chez certainsintervenants dans les centres de réhabilitation ;

• absence d’alternatives à la détention ;

• absence de projet individualisé de réintégration ;

• manque d’accompagnement psychosocialadapté.

Les recommandations suivantes émanent duconstat établi au cours de cette analyse aussibien au niveau législatif que structurel etopérationnel :

1 - Législation et additifs de clarification

• assurer le droit à l’héritage à l’enfant né horsmariage, dont l’identité complète est prouvéepar le test génétique, tout comme ses frères etsœurs nés dans le cadre du mariage ;

• élaborer un guide d’interprétation dessituations de danger afin de définir desrubriques claires, adoptées par tous lesintervenants ;

• clarifier par un guide d’interprétation lesnotions d’enfant en apprentissageprofessionnel informel et d’enfant travaillantdans l’entreprise familiale et renforcer lesmécanismes de contrôle et d’inspection auniveau des employeurs afin de limiterl’exploitation économique de l’enfant .

2 - Mise en place d’un mécanisme de suivi etévaluation

• avoir un système d’information performant etfiable focalisant sur le suivi d’indicateurs cléset coordonné par l’ODE ;

• réviser l’élaboration du rapport annuel sur lasituation de l’enfance en s’aidant du guided’interprétation des situations de danger quisera élaboré ;

• encourager les enquêtes et travaux derecherche sur les situations d’enfants en dangeret notamment celles qui sont très peudocumentées telles que l’exploitationéconomique et sexuelle des enfants, endéveloppant le partenariat avec les institutionsuniversitaires et de recherche;

• améliorer le système d'information pourtoutes les situations de protection y compris enmatière de justice des enfants.

5.3.2 Recommandations

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3 - Mise en place et adaptation desprogrammes sociaux et éducatifs

• établissement de plans d’actions à travers lesenseignements tirés des évaluations duprogramme de prévention de l’échec scolaire ;

• mise en place d’une stratégie de préventionde la violence en milieu scolaire ;

• évaluations périodiques menant à des plansd’actions concernant le programme d’appuiaux familles nécessiteuses ;

• renforcement de la désinstitutionalisation etadaptation du programme d’intégration desenfants privés de soutien familial dans leursfamilles ou dans des familles de placement ;

• mise en place d’une stratégie d’habilitationdes enfants en termes de connaissance de leursdroits et de reconnaissance des risques dedanger.

4 - Renforcement des capacités des porteursd’obligations

• promouvoir la réintégration familiale desenfants sans soutien familial et en situation dehandicap ;

• redynamiser la stratégie d’habilitation desfamilles sur les bonnes pratiques éducativesorientées vers la protection des droits del’enfant ;

• consolider le professionnalisme desintervenants dans la protection de l’enfance parla formation, la supervision et la motivation ;

• formaliser le travail en réseau et structurer lacoordination entre ses membres ;

• promouvoir un environnement incitatif auxONG et leur faciliter l’accès aux populationsdémunies et le dépistage précoce dessituations de danger en vue de fournir leservice de proximité efficient ;

• promouvoir et mettre en œuvre lesalternatives à la privation de liberté ;

• renforcer l'intégration et le suivi psychosocialdes enfants dès leur contact avec la justice ;

• renforcer le rapprochement des mécanismeset la pratique en matière de justice des enfantsen accord avec les standards internationaux.

5 - Organisation de campagnes d’information etde communication (médiatiques et hors média)ciblant le grand public

• informer sur les droits de l’enfant ;

• informer sur les situations qui compromettentles droits de l’enfant ;

• sensibiliser sur le devoir de signalement ;

• sensibiliser sur le placement familial ;

• assurer une meilleure visibilité aux enfants ensituation de handicap et de danger.

Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

Page 131: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

133

DEFIS ET OPPORTUNITES DE LA TRANSITION : LES JEUNES

6.1 LES SIGNES DE LA TRANSITION

La Tunisie a accompli plusieurs étapes detransition sur le plan démographique etéconomique et dernièrement, elle s’estengagée dans une phase de transitionpolitique. Elle se positionne maintenant en tantque pays émergent et ambitionne de rallier lesrangs des pays développés durant lesprochaines décennies. Pour y parvenir, uneréussite du processus de la constructiondémocratique, une accélération de lacroissance, un approfondissement desréformes et une consolidation de la cohésionsociale seront nécessaires.

Les signes de cette transition sont détectablesà plusieurs niveaux :

• Accomplissement de la transitiondémographique : la Tunisie a atteint la phasede post-transition qui est caractérisée par labaisse des trois principaux indicateursdémographiques : faible taux de natalité (17,7pour 1000 habitants), faible taux de mortalité

(5,8 pour 1000 habitants) et faible croîtdémographique (1,19%) ;

• Transformation économique : l’économietunisienne a connu une transformationprofonde marquée par une tertiarisation del’économie et de l’emploi. En effet, le secteurtertiaire représente actuellement près de 60%de la richesse nationale contre environ 30%quarante ans plus tôt. Cette transformation s’estopérée avec une régression de la part dusecteur agricole qui est passée de plus de 20%au début des années 1970 à moins de 10%actuellement.

• La Tunisie est considérée comme un pays àrevenu intermédiaire : le PIB par tête en termesréels a doublé durant les trente dernièresannées et le seuil de 6000 DT par habitant aété atteint en 2010. Comparée à ses voisins,la progression de l’état des revenus en Tunisiea été plus régulière et plus rapide commel’illustre le graphique suivant :

Graphique 74 : Place de l’agriculture dans lePIB (Valeur ajoutée agricole en % du PIB)Source : Banque mondiale

Graphique 75 : Évolution du Revenu NationalBrut par habitant (méthode Atlas - en $ UScourants) Source : Banque mondiale

6.

Page 132: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

134

• La révolution du 14 janvier 2011 place laTunisie sur la voie de la transitiondémocratique. Une rupture complète avec lespratiques anciennes a été opérée et deschangements profonds sont attendus. Leprocessus de construction démocratique aretenu l’option de commencer parl’élaboration d’une nouvelle constitution pourle pays à travers l’élection d’une AssembléeConstituante. La Tunisie a connu le 23octobre 2011pour la première fois de sonhistoire des élections libres, démocratiques ettransparentes.

En 2010, la Tunisie a accédé au rang despays présentant un niveau de développementhumain élevé au sens du PNUD. Elle estclassée en 7ème position en termes desperformances réalisées dans ce domainedurant les 40 dernières années. Le graphiquesuivant présente l’évolution du positionnementde la Tunisie par rapport aux autres pays entermes d’IDH ( Indice de DéveloppementHumain) entre 1980 et 2010.

Le contexte actuel de transition que vit le payschange la donne en matière d’appréhension

des questions des adolescents et des jeunes.De nouvelles préoccupations émergentesdeviennent désormais les cibles prioritaires despolitiques initiées dans ce domaine. Celaconcerne en particulier les implications duesaux nouveaux comportements et aux difficultésd’insertion économique et sociale querencontrent de nombreux jeunes notammentdans les gouvernorats de l’intérieur et dans lesrégions rurales.

La transition démographique qu’a vécue laTunisie a généré une transitionépidémiologique caractérisée par larégression des maladies transmissibles etpérinatales et l’accroissement des maladiesnon transmissibles. Cela s’est accompagné parun changement des modes de vie de la

population et l’émergence de nouveauxcomportements aboutissant à de nouveauxproblèmes de santé devenant plus complexesà maîtriser. Dans ce contexte de transitionépidémiologique, la réorientation desstratégies visant les adolescents et les jeunesdevient une grande priorité.

Aperçu global.Le tableau suivant présente la répartitionrégionale de quelques indicateurs relatifs à la

population à risque parmi les adolescents etles jeunes et les addictions :

Graphique 76 : Évolution du positionnementde la Tunisie par rapport aux autres pays entermes d’IDH entre 1980 et 2010 Source : D’après les données du PNUD, 2010

6.2 LES NOUVEAUX COMPORTEMENTS

6.2.1 La santé des adolescents et des jeunes

Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

Page 133: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

135

Population à risque

Morbidité liée au risque*chez les jeunes 15 à 24 ans (2004)

Les addictions (jeunes âgés de 15 à 19 ans)

Taux de consommation du tabac (2005)

Taux de consommation de l'alcool (2005)

Districtde TunisNord Est Nord

OuestCentre

EstCentreOuest Sud Est Sud

Ouest National

16,2%

22,5%

8,0%

26,6%

17,7%

8,5%

27,9%

14,4%

8,4%

22,2%

19,7%

10,7%

16,5%

16,6%

8,4%

22,8%

16,3%

1,4%

19,5%

14,8%

4,6%

20,9%

18,2%

7,9%

Tableau 12 : Principaux indicateurs de l’état de santé des adolescents et des jeunes

Le VIH/Sida. Le premier cas de VIH/Sida estapparu en Tunisie en 1985. Depuis cette dateet jusqu’à fin 2010, 1 633 cas ont étéenregistrés (1083 hommes et 440 femmes)parmi lesquels 513 sont décédés. Le nombrede nouveaux cas par an est relativement stabledepuis 1997 et se situe autour de 67. À fin2010, le nombre de personnes vivant avec leVIH était de 1 120, soit une proportion deprévalence de 1 cas pour 10 000 habitants.Le nombre de cas fait augmenterprogressivement les taux de prévalence aucours du temps, principalement en raison del’amélioration du pronostic vital grâce autraitement antirétroviral.

Parmi les cas cumulés d’infections âgés de plusde 15 ans, 26% sont de sexe féminin, soit unsexe ratio de 2,84. L’analyse du sexe ratiodepuis le début de l’épidémie montre unetendance à la diminution en passant de 3,0entre 1986 et 1999 à 1,86 entre 2005 et2009. Cette tendance à la féminisation del’épidémie traduirait la fréquence de plus enplus croissante de la contaminationhétérosexuelle et montre un lien possible avecune vulnérabilité accrue des femmes quidevrait être prise en considération en termesde recherche et d’action. Les principauxmodes de transmission restent les transmissionshétérosexuelles (38%) et l’usage de droguesinjectables (27%). Le contrôle du sang instaurédepuis 1987 a mis fin au risque decontamination par le sang.

Graphique 77 : Évolution des infections auVIH/Sida Source : MSP

Graphique 78 : Modes de transmission duVIH/SidaSource : MSP

(*) Les pathologies liées aux risques regroupant les accidents, la grossesse et l'interruption de la grossesse, les tentatives de suicides et l'usage de toxiques

DEFIS ET OPPORTUNITES DE LA TRANSITION : LES JEUNES6.

Page 134: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

136

Graphique 79 : Répartition par tranche d’âgede la prévalence du VIH/Sida en Tunisie(2009)Source : D’après les données du MSP, DSSB

Graphique 80 : Répartition par âge et sexede la prévalence du VIH/Sida en Tunisie(2004) Source : D’après les données du MSP, DSSB

La répartition par âge des personnes vivantavec le VIH/Sida montre que les infections àVIH affectent davantage les jeunes : près de58% des infections, cumulées jusqu’à 2009,ont concerné des personnes âgées entre 25 à39 ans. Parmi l’ensemble des cas d’infectionsà VIH notifiés, 92,5% sont âgés de plus de 15ans et 7,5% sont des enfants âgés de moinsde 15 ans, dont 29 hémophiles, ayant étécontaminés avant 1987, à travers

l’administration de dérivés du sang importés et75 contaminés par leur mère. Les données dela répartition par âge et par sexe despersonnes vivant avec le VIH datant de 2004montrent que la population féminine touchéepar le VIH/Sida est plus jeune : plus du quartest âgé de moins de 15 ans contre 3% pourles hommes. Cette particularité mérite uneanalyse plus approfondie.

La transmission du VIH de la mère à l’enfantreprésente la principale cause d’infection àVIH chez les enfants âgés de moins de 15 ans.La transmission mère-enfant représente 6% desmodes de transmission. Le nombre detransmissions mère-enfant est relativementfaible, avec une moyenne de 4 enfants par an.Au 31 mai 2010, le nombre d’enfants infectéspar le VIH était de 108. Parmi les 25 enfantsnotifiés depuis 2004, 5 sont décédés, les 20autres sont âgés de 3 mois à 15 ans, dont 12sont âgés de moins de 5 ans.

La vulnérabilité des jeunes est importante àconsidérer au niveau de la riposte. En effet, lesjeunes sont en général vulnérables à l’infectiondu VIH à cause de nombreux facteurs,principalement en raison de l’insuffisance dedéveloppement des compétences à la viequotidienne, mais aussi des comportementssexuels à risque, de la consommation de

drogues (y compris l’injection de drogues) etde la fausse perception due au manqued’information que le VIH ne constitue pas unemenace pour eux.

La Tunisie a réussi à maintenir une prévalencebasse de l’épidémie du VIH/Sida qui est restéepeu répandue et stable dans le temps avec unetrès faible prévalence pour la tranche d’âgedes 0-24 ans. Par-delà le contexte culturel,cette situation est imputable à une politiquepublique active, matérialisée par le lancementen 1987 du Programme National de Luttecontre le Sida (PNLS), devenu en 1998PNLS/IST. À côté d’un comité technique mis enplace en 1992 par le MSP et comprenant despartenaires de divers secteurs et directions, unsystème de surveillance épidémiologique duVIH/Sida a été installé et son efficacité a étéprouvée. De plus, la trithérapie antirétroviralegratuite a été généralisée en 2000.

Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

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137

Depuis 2006, la Tunisie s’est dotée d’un planstratégique national multisectoriel de luttecontre le VIH/Sida, qui prévoit notamment ledéveloppement de la surveillanceépidémiologique de deuxième génération et lerenforcement de la prise en charge et del’appui psychosocial en faveur des personnesvivant avec le VIH.

La morbidité, liée au risque, des jeunes et desadolescents de 15 à 24 ans.L’Enquête nationale sur la morbidité etmortalité hospitalières, menée par l’InstitutNational de Santé Publique en 2005 (la seuledisponible), donne une idée assez précise surles motifs d’hospitalisation des adolescents etdes jeunes selon le genre. L’enquête aconcerné 18676 dossiers de patients âgés de15 à 24 ans, hospitalisés durant la période del’étude. 48,2% sont des garçons et 42% sontâgés de 15 à 19 ans. À partir des motifsd’hospitalisation recensés, un groupe decauses a été constitué sous le nom de« pathologies liées aux risques » regroupantles accidents, la grossesse et l’interruption degrossesse, les tentatives de suicide et l’usagede toxiques. La mortalité des jeunes etadolescents est relativement très faible. Pourles 15-19 ans, elle est de 0,33% pour les filleset sans évolution entre 1999 et 2003. Elle estsupérieure chez les garçons et en relativeprogression : 0,59% en 1999 et 0,72% en2003. Pour les 20-24 ans, les taux demortalité sont respectivement de 0,46% chezles filles et de 0,35% chez les garçons en1999 avec une augmentation en 2003 :1,04% pour les filles et 1% pour les garçons.Au plan national, la prévalence de lamorbidité liée aux risques est de 20,9%. LeNord-ouest et le Nord-est affichent les plus fortstaux, 27,9% et 26,5% respectivement. LeNord-ouest cumule les plus fortes prévalencesde comportements à risque et de morbidité desjeunes et adolescents liée au risque.

Problèmes liés à la santé mentale. L’enquête sur la santé des adolescents de2005 a montré que :

• près de 40% des adolescents ont cumuléplus de trois items reflétant un mal êtrepsychologique (se sentir rarement bien dansson corps, se sentir rarement bien dans sa tête,se sentir rarement heureux, se sentirfréquemment isolé et se sentir fréquemment maldans sa tête). Ce sentiment de mal êtreaugmente avec l’âge et est plus ressenti par lesfilles, les ruraux et les enfants de parentsdivorcés ;

• parmi les jeunes scolarisés âgés de 12 – 20ans, 15% ont cumulé onze symptômesdépressifs. Près des deux tiers ont présenté, defaçon fréquente, de 1 à 4 symptômesdépressifs et près du cinquième plus de 5symptômes.

Le suicide.Les données disponibles en Tunisie sur lesuicide des adolescents et des jeunes sontparcellaires et limitées à des périodes, desrégions ou à des statistiques hospitalières.Depuis la fin des années 1990, la médecinescolaire et universitaire a pu mettre en placeun système de recueil des informationsconcernant certains troubles et en particulierles conduites suicidaires. Durant la période2004-2006, neuf cas de suicide ont étérecensés chez les adolescents et jeunesscolarisés. Ces cas constituent un groupe réduitet aucune conclusion ne peut être tirée demanière certaine. On peut toutefois noter quele suicide semble concerner autant les filles queles garçons, et la cause la plus fréquenteconcerne des conflits familiaux. Il est à noterque le nombre de cas de suicides et detentatives de suicide a augmenté depuis le 14janvier 2011, et que les suicides parimmolation sont devenus plus fréquents.

DEFIS ET OPPORTUNITES DE LA TRANSITION : LES JEUNES6.

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138

6.2.2 Les comportements à risqueLes accidents.Les accidents de la circulation constituentencore un facteur de risque important. En effet,les données montrent une baisse de l’ordre de20% du nombre des accidents de circulationdurant la dernière décennie après uneaugmentation de près de 28% durant laseconde moitié des années 1990.

Toutefois, les accidents deviennent de plus enplus dangereux : le nombre de blessés pour100 accidents atteint plus de 140 contre moinsde 130 en 1995, de même, le nombre de tuéspour 100 accidents est passé de 13 à 15durant la même période. Les deux graphiquessuivants illustrent ces données :

Concernant les conduites dangereuses desadolescents et jeunes, l’enquête sur la santédes adolescents (2005) montre que le tiers desadolescents déclare avoir fait, au cours des sixsemaines précédant l’enquête, quelque chosede risqué. Il s’agit surtout d’une conduite decyclomoteur sans casque, ou une conduite devoiture sans permis (situation délictueuse). Lesstatistiques du Ministère de l’Intérieur pour2004 ont comptabilisé pour la tranche d’âge10 – 24 ans 328 accidents de la circulationdont 85% pour les garçons. Le taux demortalité est de 18% en moyenne pour lesgarçons. Il est plus faible pour les filles tout enaugmentant avec l’âge (1,9% pour les 10 – 14ans, 3,3% pour les 15 – 19 ans et 5,5% pourles 20 – 24 ans). La prévalence du handicaprelativement plus élevée chez les 15 – 19 anset 20 – 24 ans est à mettre en relation avec lafréquence des accidents.

Le tabagisme. Le tabagisme est reconnu depuis plusieursannées comme un important problème desanté à l’origine de plusieurs maladies commele cancer des poumons et les maladiescardiovasculaires. Le tabagisme augmentechez les jeunes, et pour une part nonnégligeable chez l’enfant dès l’âge de 13 ans.La prévalence du tabagisme chez les jeunesde 13-15 ans : Le Global Youth TobaccoSurvey (GYTS), réalisé en 2001, a montré que25,3% des enfants tunisiens de 13-15 ans ontfumé la cigarette : 39% parmi les garçons et11,8% parmi les filles. 18% fument d’unemanière régulière, 13,7% fument la cigaretteet 8,6% la chicha et 20,6% comptent fumerl’année d’après. Selon le GYTS réalisé en2007, 24% des élèves ont essayé de fumer.

Graphique 81 : Évolution du nombred’accidents de circulation et du nombre deblessés et de tuésSource : INS

Graphique 82 : Évolution des ratios dunombre de blessés et de tués pour 100accidents de circulationSource : Calculs de l’auteur d’après les données de l’INS

Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

Page 137: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

139

Cette proportion est plus élevée chez lesgarçons (31,8%) que chez les filles (9,4%).Selon l’enquête du GYTS, l’âge de la premièrecigarette est précoce, il se situe entre 13 et 14ans.

Les principales caractéristiques de laprévalence du tabagisme chez les jeunes âgésde 15-19 ans telles que relevées en 2005 seprésentent comme suit :

• près du tiers des adolescents a déjà fumé aumoins une cigarette dans sa vie ;

• pour la moitié des garçons et le cinquièmedes filles, l’âge de la première cigarette sesituant plutôt à 13 ans ;

• près d’un adolescent sur dix fumequotidiennement, les garçons fument plus queles filles (21% contre 3%) et de manière plusrégulière ;

• la prévalence tabagique augmente avecl’âge pour les deux sexes. Pour le sexemasculin, cette prévalence passe de près de10% pour les 12-14 ans à près de 40% pourles 18-20 ans. Pour le sexe féminin, laprévalence passe de 8,3% à 11,2% ;

• parallèlement, avec l’âge de l’adolescencel’habitude tabagique s’installe, la proportiondes fumeurs réguliers passant avec l’âge dutiers à 70% des adolescents « fumeurs » ;

• enfin, la prévalence du tabagisme était de18,2% au niveau national. Elle est relativementélevée dans le District de Tunis pour 22,5%,alors qu’elle est de 14,4% et de 14,8% dansle Nord-ouest et le Sud-ouest.

Carte 8: Taux de consommation du tabacauprès des jeunes (2005)Source : : D’après les résultats de l’Enquête Nationale auprèsde jeunes âgés de 15 à 19 ans, Tunisie, INSP, UNICEF, 2005

Carte 9: Taux de consommation de l’alcoolauprès des jeunes (2005)Source : : D’après les résultats de l’Enquête Nationale auprèsde jeunes âgés de 15 à 19 ans, Tunisie, INSP, UNICEF, 2005

DEFIS ET OPPORTUNITES DE LA TRANSITION : LES JEUNES6.

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140

La consommation d’alcool.L’enquête nationale auprès de jeunes âgés de15 à 19 ans menée en 2005 montre que 7,9%des jeunes consomment de l’alcool avec unedifférence significative entre les filles et lesgarçons : 0,3% pour les filles et 15,2% pourles garçons. Cette consommation est plusfréquente en milieu urbain. Le Centre-estaffiche la plus forte prévalence : 10,5%. Lesrégions du Nord-ouest, du Centre-ouest et duDistrict de Tunis ont une prévalence de 8% à8,5%. Seules les régions du Sud, le Sud-ouestet surtout le Sud-est ont des prévalencesrelativement faibles (4,5% et 1,4%).

La consommation de drogues.L’initiation aux substances toxiques coïncideavec une phase critique du développement del’individu, caractérisée par le passage d’uneattitude absolutiste et moraliste de l’enfance àune attitude de relativisme et de plus grandetolérance de l’adolescence, ce qui favorisel’adoption de nouveaux comportementsauparavant rejetés, comme le tabac, l’alcoolet la drogue. Si les données épidémiologiquesdisponibles ne permettent pas d’appréhenderavec précision le phénomène de laconsommation de drogues en Tunisie, il estressenti comme un problème important par lesprofessionnels, les ONG, les adolescents et lesjeunes eux-mêmes et leurs parents. Leschangements perceptibles au niveau de lacirculation des produits et l’apparition desdrogues dures en plus des dérivéscannabiques et des médicamentspsychotropes, témoignent d’une certaineaggravation de la situation.

Une enquête réalisée en 2005 par l’InstitutNational de Santé Publique auprès d’unéchantillon formé de 2 953 jeunes âgés de 15à 24 ans par le biais d’un questionnaire auto-administré, a montré que près de 10% desjeunes ont consommé de la drogue et 3,3%continuent à en consommer au moment de

l’enquête. Les taux de consommation de ladrogue sont environ 4 fois plus élevés chez lesgarçons que chez les filles (15,2% contre3,8%). Les substances consommées sont trèsvariées : Cannabis (ou Zatla), cocaïne,héroïne, médicaments psychotropes (Rivotril,Artane), colles, solvants, etc.

Les pratiques sexuelles à risque.Il est difficile d’appréhender quantitativementla pratique sexuelle des adolescents et desjeunes, les principales enquêtes ayant abordécette question de manière indirecte. En effet,les questions ont porté sur ce que pensent lespersonnes enquêtées de la sexualité despersonnes de leur âge et non sur leur proprecomportement. Il en ressort qu’environ les troisquarts des adolescents scolarisés pensent queles jeunes de leur âge ont déjà eu des rapportssexuels (83% des garçons et 70% des filles).Ils pensent, dans leur majorité, que cesrapports sont avec des partenaires différentset qu’ils ne sont pas protégés. Pour certainsjeunes, les rapports sexuels intervenant à unâge relativement précoce sont acceptés. Quantà l’utilisation du préservatif, environ 55% desjeunes pensent qu’il n’est pas utilisé ou très peuutilisé et qu’il demeure peu disponible etd’accès difficile.

Graphique 83 : Taux de consommation desdrogues chez les jeunes âgés de 15 à 24 ans(2005)Source : Ministère de la Santé publique

Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

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141

Concernant les MST, elles continuent à êtreconsidérées comme maladies honteuses pourlesquelles on hésite à consulter un médecin.Pour des raisons de confidentialité et dediscrétion, les jeunes hésitent à consulter lesservices du secteur public et recourent auxservices du pharmacien quand ils n’ont pas lesmoyens de consulter un médecin de librepratique. Plusieurs aspects des structuressanitaires découragent les jeunes à consulter :des locaux non adaptés, l’absence deconfidentialité, le coût de la consultation,l’inadéquation des moyens matériels ethumains. Les données des CSB montrent queles MST constituent 1% des consultations. Lesjeunes âgées de 15 à 29 ans représentent2,4% des consultants et ceux âgés entre 20 et29 ans représentent 28% des consultants. Lesenquêtes ont aussi montré que le niveau deconnaissance et d’information concernant lesMST et le VIH/Sida demeure insuffisant pourplusieurs catégories d’adolescents et dejeunes.

Les problèmes de santé liés aux comportementsà risque chez les jeunes et adolescents n’ontpas fait l’objet d’analyses causales précises.Toutefois, plusieurs facteurs sont souventassociés à ces problèmes sans pour autantétablir un lien de causalité probant. Ilsconcernent les aspects suivants :

1 - Les groupes à comportements à risque pourle VIH :

• utilisateurs de drogues injectables, droguesavec échanges de seringues ;

• professionnelles du sexe ;

• hommes ayant des rapports sexuels avecdes hommes.

2 - Pour les principales pathologies concernantla morbidité liée au risque :

• la toxicomanie : les facteurs qui lui sontsouvent associés sont les suivants : le faibleniveau socioéconomique, le tabagisme et laconsommation d’alcool, les conduites violenteset les situations conflictuelles avec les parents.Ainsi, quoique la toxicomanie touche lesdifférentes catégories sociales, il n’en demeurepas moins que les jeunes issus des milieuxsocioéconomiques défavorisés seraient plustouchés ;

• les tendances suicidaires en particulier chezles adolescents et jeunes sont souventassociées à l’échec scolaire, aux situationsfamiliales conflictuelles et aussi à l’existenced’un terrain personnel favorable. L’addiction(tabac, alcool, drogue) est aussi un facteur derisque associé à la conduite suicidaire. Enfin,le niveau socioéconomique précaire serait unfacteur favorisant les tentatives de suicide,notamment pour les moins jeunes ;

3 - Les addictions :

• le tabagisme : les jeunes fumeurs sontsouvent de sexe masculin et du milieu urbain.L’analyse causale basée sur les disparitésrégionales montre une corrélation entre letabagisme, le niveau de vie et le niveaud’instruction ;

• la consommation d’alcool : comme déjàsouligné, le sexe masculin et le milieu urbainsont plus concernés. L’analyse causale amontré une corrélation moyenne entre laconsommation d’alcool, l’abandon scolaire, lechômage (tranche d’âge des 15-24 ans) et lasituation familiale conflictuelle.

La figure suivante présente de manièreschématique l’arbre à problèmes de l’analysecausale relative aux comportements à risquechez les adolescents et les jeunes.

DEFIS ET OPPORTUNITES DE LA TRANSITION : LES JEUNES6.

Page 140: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

142

Figure 10 : Comportements à risque chez les Jeunes et Adolescents, Analyse causale

différents

6.3 LES DIFFICULTES D’INTEGRATION

Les jeunes connaissent de plus en plus dedifficultés d’intégration durant la phasepostscolaire et préprofessionnelle, dont ladurée s’allonge en raison des inéquations etdes déséquilibres existants entre le système deformation et les besoins de l’économie. Cettesituation risque de s’accentuer durant lesannées à venir mais elle présente aussi desopportunités qu’il faudrait saisir et mettre àprofit. En effet, le niveau d’instruction de lapopulation en âge de travailler va continuer àcroître en même temps que la demande pourdes emplois spécialisés requérant des individusayant acquis une éducation supérieure ou des

aptitudes professionnelles va augmentersensiblement du fait de l’avancéetechnologique rapide de la Tunisie qui s’estengagée dans une compétition mondiale. Celava imposer de lourdes responsabilités auxinstituts d’enseignement supérieur et deformation professionnelle qui devront s’assurerqu’ils pourront, d’une part, satisfaire demanière adéquate la demande en expansionet, d’autre part, former des diplômés dotésd’un haut niveau d’employabilité par unemeilleure adaptation des réformes del’enseignement et de la formation aux besoinsde l’économie nationale.

Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

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143

6.3.1 La formation professionnelle et l’enseignement supérieurLa formation professionnelle a connu, au débutdes années 1990, une réforme importante(MANFORME) qui a marqué un tournantdécisif dans la relation entre le monde del’entreprise et celui de la formation enaccompagnement de la politique de mise àniveau de l’économie tunisienne. Plusieursréalisations sont à mettre à l’actif de cetteréforme :

• l’instauration de la démarche qualité dans ledispositif national de la formationprofessionnelle,

• l’instauration de la formation par alternance,

• l’homologation des diplômes de la formation,le développement et la mise en place deprogrammes de formation et de formation desformateurs basés sur l’approche parcompétences.

Le dispositif de la formation professionnelle estassuré par un secteur public et un secteur privé.Le secteur public comporte cinq intervenants :le Ministère de la formation professionnelle etde l'emploi (MFPE) à travers l’AgenceTunisienne de Formation Professionnelle, leMinistère de l’agriculture, des ressourceshydrauliques et de la pêche à travers l’Agencede vulgarisation et de formation agricole, leMinistère du tourisme à travers l’Officenational du tourisme tunisien, le Ministère dela Défense nationale et le Ministère de la santépublique. Le MFPE demeure l’acteur majeur dela formation professionnelle.

Fin 2008, plus de 134 500 jeunes étaientinscrits dans les centres de formationprofessionnelle. Le secteur privé dispose de prèsde 140 centres offrant une capacité de l’ordrede 12 000 postes mais qui demeure sous-exploitée : avec moins de 3 670 inscrits, lesecteur privé ne présente que 4,1% de l’offre deformation normalisée. Le dispositif public deformation professionnelle a connu undéveloppement remarquable depuis la mise enplace de MANFORME. Le nombre des

apprenants inscrits dans les centres relevant del’ATFP a connu une croissance annuellemoyenne de 7,8% entre 1995 et 2008 enpassant de moins de 40 000 à près de103 000comme illustré par le graphique ci-après.

Cette évolution s’est accompagnée par unerestructuration de la formation qui s’oriente deplus en plus vers un cursus diplômant (horsapprentissage). En effet, les proportions se sontinversées depuis 1995 : la formation normaliséeprésente désormais plus des trois quarts de laformation contre environ le quart en 1995. Lenombre des diplômés de la formationprofessionnelle a connu une évolutioncomparable à celle des effectifs en formation.Il a atteint en 2009 près de 50 000 diplômésdans le secteur public. Les diplômés du secteurprivé sont estimés à environ 1 600. Durant lesprochaines années, les orientations retenuestablent sur l’atteinte d’un effectif de 150 000apprenants en formation professionnelle àl’horizon 2014, soit une augmentation de 50%en l’espace de 5 ans. Si l’atteinte de cetobjectif est facilitée par les mesures prises enmatière d’introduction de l’enseignementtechnique au niveau de l’enseignement moyenet secondaire drainant une demandesupplémentaire d’orientation vers la formationprofessionnelle, cela ne manquera pas de

Graphique 84 : Évolution des apprenantsinscrits dans les centres publics relevant del’ATFP (1995-2008)Source : d’après les données du MFPE

DEFIS ET OPPORTUNITES DE LA TRANSITION : LES JEUNES6.

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144

poser un véritable défi pour le secteur del’emploi qui sera appelé à résorber un nombrecroissant de diplômés de la formationprofessionnelle.

L’enseignement supérieur a connu plusieursreformes. La dernière réforme, dite LMD(Licence, Master, Doctorat) a été introduite en2006 et vise plusieurs objectifs :

• mettre en place un système de formationcaractérisé par la flexibilité et la comparabilitéinternationale ;

• réformer les programmes et diversifier lesparcours dans les créneaux porteurs ;

• créer des parcours de formation souples etefficients, à caractère académique appliqué,offrant à l’étudiant, à tous les niveaux, despossibilités d’insertion professionnelle ;

• favoriser la mobilité de l’étudiant à l’échellenationale et internationale ;

• offrir à l’étudiant la possibilité de restructurerson parcours en cours de formation ;

• faciliter l’équivalence des diplômes ;

• créer une nouvelle génération de diplôméspolyvalents aptes à s’adapter à un contextemondial changeant ;

• assurer pour toutes les parties concernéesune meilleure lisibilité des grades de formationet des paliers d’insertion professionnelle.

Dans le cadre de cette réforme, les principalespriorités retenues par les pouvoirs publics pourle secteur de l’enseignement supérieurconcernent les aspects suivants :

• le renforcement de l’employabilité desdiplômés de l’enseignement supérieur etl’approfondissement dans les universités de laculture de la création d’entreprise et la mise enplace de plus de licences à viséesprofessionnelles ;

• la poursuite et la consolidation duprogramme d’appui à la qualité engagé dès2006 aussi bien au niveau des programmesd’enseignement que de la gestion universitaire ;

• le développement de l’enseignement dans lesdomaines porteurs et à haute employabilité :langues appliquées, informatique, sciences ettechnologies, humanités appliquées, arts etmétiers.

L’enseignement supérieur en Tunisie estfondamentalement public. La contribution dusecteur privé est limitée à environ 3% entermes d’effectifs étudiants. En 2010, ledispositif public d’enseignement supérieur estconstitué de 13 universités regroupant 193établissements d’enseignement en plus d’unréseau de 24 Instituts Supérieurs d'EtudesTechnologiques. Le secteur de l’enseignementsupérieur a connu une croissance exceptionnelledurant les dernières décennies. Entre 1980 et2000, les effectifs ont été multipliés par 7 etdepuis 2000, ils ont plus que doublé enatteignant 360 000 correspondant à un tauxde scolarisation tertiaire de 37,2%, soit ledouble du taux enregistré en 1997.

Graphique 85 : Évolution des effectifs desétudiants et du nombre de diplômés (2000-2010)Source : d’après les données du MESRS

Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

Page 143: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

145

Le nombre de diplômés de l’enseignementsupérieur a atteint plus de 65 00025 en 2009en évoluant à un rythme annuel de 12,6%dépassant largement le taux de croissance des

offres d’emplois destinées à cette catégorie dequalifiants, aggravant ainsi de manièresérieuse le chômage des diplômés del’enseignement supérieur.

Les jeunes vivent difficilement la transition entrel’école et le monde du travail. Les compétencesacquises à l’école par les jeunes ne sont pasnécessairement celles requises par le marchédu travail, comme le souligne l’augmentationmanifeste du taux élevé de chômage avecl’avancement du niveau d’instruction. Celainterpelle, d’une part, sur l’efficacité externe dusystème d’éducation et de formation et montre,d’autre part, l’inadéquation de l’offre et de lademande d’emplois sur le marché du travail,dont les victimes les plus directes sont lesjeunes diplômés.

Les travaux menés ces dernières années dansle domaine du suivi des diplômés de laformation professionnelle et de l’enseignementsupérieur montrent des résultats mitigés quantà l’efficacité externe de ces formations. Dansle domaine de la formation professionnelle,l’enquête menée par le Ministère de laFormation Professionnelle et de l’Emploi, en2006, auprès d’un échantillon de 3 200jeunes, a montré que le système de laformation professionnelle ne semble pasfonctionner en tant que mécanisme quifaciliterait l’insertion dans le marché du travail.En effet, trois ans après avoir quitté l’école,42% des individus non-inscrits en formationprofessionnelle ont trouvé un emploi stablecontre 30% pour ceux qui étaient inscrits enformation professionnelle. Ainsi, les diplômésde la formation professionnelle mettent pluslongtemps à trouver un emploi stable.

Concernant l’enseignement supérieur,l’enquête menée en 2006 par le MFPE auprèsd’un échantillon composé de 4 763 jeunesdiplômés de l’année 2004 des divers niveauxet spécialités d’enseignement répartis surl’ensemble du territoire national a montré que

46% des jeunes actifs n’arrivent pas à trouverun emploi 18 mois après l’obtention dudiplôme. Le phénomène est encore plus aiguchez les filles : le taux de chômage lesconcernant se situe à plus de 51% contre 38%pour les garçons. Le chômage n’épargneaucune catégorie de diplômés mais il affecte,toutefois, d’une façon plus particulière lestechniciens supérieurs et les maîtrisards dontles taux de chômage avoisinent les 50%. Lesdiplômés des filières courtes supposésposséder une plus forte employabilité sont enfait les plus exposés au chômage. Tous niveauxde diplôme confondus, les taux de chômagesont plus élevés chez les diplômés appartenantaux filières du tertiaire (gestion, finances, droit)atteignant plus de 68% pour les maîtrisardsdes spécialités juridiques.

Par ailleurs, un rapport émanant de laConsultation Nationale sur l’emploi, menée en2008-2009, a établi un diagnostic intéressantsur la question. Trois conclusions méritentd’être soulignées :

• les jeunes, y compris les diplômés del’enseignement supérieur, ont de graveslacunes linguistiques et de communication quece soit en arabe, en français et encore plusdans les autres langues. Ce fait constitue unhandicap évident pour l’insertion sur le marchénational et bien évidemment sur le marchéinternational ;

• la non insertion s’explique pour un grandnombre de demandeurs d’emploi par un profilde formation qui ne correspond pas ou necorrespond plus à un besoin du marché. Pourplusieurs catégories de diplômés du supérieur,les compétences réelles ne correspondent pasà celles qui sont annoncées ;

6.3.2 Défis de l’insertion dans le marché de l’emploi

25 Compte tenu des diplômés du troisième cycle qui sont au nombre de 6 242 pour l’année universitaire 2008-2009

DEFIS ET OPPORTUNITES DE LA TRANSITION : LES JEUNES6.

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146

décalage quantitatif profond entre offre etdemande. Une formation qui insère est uneformation en relation directe avec l’entreprise.

• le diplôme perd sa fonction de signalprédicateur des compétences maîtrisées par lecandidat à l’emploi. Le mode de formationdominant de type scolaire est responsable du

6.3.3 Le chômage et les jeunesdu taux de chômage par tranche d’âge en2010. Il ressort clairement que le chômageaffecte particulièrement les jeunes de 15 à 24ans dont le taux de chômage atteint 29%, soitplus du double du taux national qui se situe à13,1%. Par ailleurs, le phénomène duchômage des diplômés de l’enseignementsupérieur devient inquiétant de par sonampleur et sa profondeur. En effet, en l’espacede 5 ans, le poids des diplômés du supérieuren situation de chômage dans l’ensemble deschômeurs est passé de moins de 10% à prèsde 25%. Leur taux de chômage a atteint22,9% en 2010 contre 10,2% en 2004 et3,8% en 1994.

Le chômage touche particulièrement lacatégorie jeune de la population active âgéede 16 à 24 ans, tous niveaux d’éducationconfondus. En 2010, les jeunes de 15-24 ansreprésentaient 16,4% de la population activeet 13,4% de la population active occupéed’où leur poids parmi les chômeurs quidépassait 36%, soit plus de deux fois leurpoids dans la population active. Ainsi, plus dutiers des chômeurs sont des jeunes âgés de 15-24 ans.

Les deux graphiques suivant présententl’évolution du nombre des diplômés dusupérieur parmi les chômeurs et la répartition

le taux de chômage recalculé selon la nouvelleméthode est de 12,4% pour 2008 contre14,2% selon l’ancienne méthode. En 2009 etselon la nouvelle méthode, le taux de chômagese situe à 13,3% soit une augmentation de7,6% par rapport à 2008 et le nombre dechômeurs a atteint 490 300 contre 448 400en 2008, soit une augmentation de 9,3%. En2010, le nombre de chômeurs ayant le niveau

Depuis 2009, l’INS a adopté une nouvelledéfinition du chômage dans le sens d’unmeilleur rapprochement par rapport auxdéfinitions internationales préconisées parl’Organisation Internationale du Travail. Ainsi,l’adoption de la nouvelle définition s’esttraduite par une diminution du nombre dechômeurs de l’ordre de 13% et une réductiondu taux de chômage de près de 12%. En effet,

Graphique 86 : Évolution du nombre desdiplômés du supérieur parmi les chômeurs Source : INS

Graphique 87 : Taux de chômage par tranched’âge (2010)Source : INS, Enquête Population-Emploi, 2010

Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

Page 145: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

147

Le tableau suivant présente l’évolution dunombre des chômeurs et du taux de chômagepar niveau d’instruction selon l’ancienne et lanouvelle définition du chômage adoptées parl’INS :

d’enseignement supérieur (ayant au moinspassé avec succès la première annéed’enseignement supérieur) a atteint, selon lanouvelle définition, près de 160 000 dont140 000 diplômés composés de près de deuxtiers de filles.

trois fois celui des adultes âgés de 25 ans.Cela confirme la juvénilité du chômage enTunisie qui mérite d'être au cœur despréoccupations des politiques d'emploi. Lesdeux graphiques suivants illustrent, d’une part,l’évolution du taux de chômage des jeunesselon les définitions retenues par l’INS, etd’autre part, l’évolution comparée du taux dechômage des jeunes âgés de 15 à 24 ans etdes adultes âgés de 25 ans et plus durant lescinq dernières années :

D’après l’Institut National de la Statistique(INS), le taux de chômage en Tunisie s’estélevé à 18,9% en 2011 avec un nombre dechômeurs estimé à 738.000 personnes. Quelque soit le mode de calcul retenu, le taux dechômage des jeunes demeure élevé et il s’estaggravé durant les dernières années enatteignant près de 31% en 2009 (selon lanouvelle définition du chômage) et plus de34% selon nos estimations basées surl’ancienne définition. Le taux de chômage desjeunes âgés de 15 à 24 ans dépasse plus de

Tableau 13 : Évolution du nombre des chômeurs et du taux de chômage par niveau d’instructionselon l’ancienne et la nouvelle définition du chômage adoptées par l’INSSource : INS, Recensements 1994 et 2004 et Enquête emploi de 2005 à 2009

Chômeurs (1000)

Néant

Primaire

Secondaire

Supérieur

Non déclaré

Total

Taux de chômage

Néant

Primaire

Secondaire

Supérieur

Total

Selon l'ancienne définition

1994 2004 2005 2006 2007 2008 2005 2006 2007 2008 2009 2010

Selon la nouvelle définition

92,1

180,4

98,9

6,3

0,7

378,4

17,6%

18,3%

13,1%

3,8%

15,6%

52,4

179,6

159,3

40,7

0,9

432,9

13,8%

15,1%

14,1%

10,2%

13,9%

35,3

201,5

183,2

66,2

0,2

486,4

7,8%

15,7%

14,9%

14,8%

14,2%

35,3

197,8

181,8

86,1

0,2

501,2

8,0%

15,2%

14,3%

17,5%

14,3%

24,5

177,7

203,4

102,3

0,2

508,1

5,9%

13,5%

15,4%

19,0%

14,1%

22,7

162,1

208,9

128,1

0,2

522,0

5,7%

12,3%

15,3%

21,6%

14,2%

26,8

181,6

161,6

62,3

0,1

432,4

6,3%

14,3%

13,3%

14,0%

12,9%

27,7

164,1

155,1

82,6

0,2

429,7

6,4%

13,0%

12,5%

16,9%

12,5%

18,2

147,5

173,6

97,0

0,1

436,4

4,4%

11,5%

13,5%

18,2%

12,4%

16,3

136,0

179,6

116,1

0,4

448,4

4,2%

10,6%

13,4%

20,0%

12,4%

21,9

118,5

193,6

157,3

0,5

491,8

6,1%

10,4%

14,0%

21,9%

13,3%

23,7

132,0

194,5

139,4

0,7

490,3

5,7%

9,2%

13,7%

22,9%

13,0%

DEFIS ET OPPORTUNITES DE LA TRANSITION : LES JEUNES6.

Page 146: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

148

Le graphique suivant illustre la répartition dutaux de chômage par tranche d’âge et pardistrict en 2010. Il illustre la « fracture »existante entre le chômage des jeunes et desmoins jeunes et ceci dans l’ensemble desrégions du pays avec une acuité moinsprononcée au Nord-est et au Centre-est.

Par ailleurs, le chômage des jeunes âgés de15-24 ans a une dimension régionalemanifeste. En 2007, il a touchéparticulièrement le Nord-ouest 46,2%, le Sud-ouest 39,7% et le Sud-est 35,5%. Il n’est quede 22,2% dans le Nord-est et de 25,2% dansle Centre-est. Les trois gouvernorats suivants ontun taux de chômage pour la tranche d’âge 15-24 ans supérieur à 50% : Jendouba 57,8% ;Tozeur 52,2% et Siliana 51,2%.

Graphique 88 : Taux de chômage des jeunes(15-24 ans) selon l’ancienne et la nouvelledéfinitionSource :INS, Recensements 1994 et 2004 et Enquête emploide 2005 à 2009

Graphique 90 : Taux de chômage par tranche d’âge et par district en 2010Source : d’après les résultats de l’enquête population emploi de 2010, INS

Graphique 89 : Évolution des taux dechômage des jeunes (15-24 ans) et desadultes (25 ans et plus)Source : calculs d’après les données de l’INS

Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

Page 147: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

149

Le phénomène du chômage des jeunes et desdiplômés est devenu une réalité fortpréoccupante en Tunisie. Il a été à la base del’éclatement de la bulle socio-économique quis’est transformée par la suite en une véritablerévolution. Le graphique ci-contre montre quele taux de chômage des jeunes diplômés dusupérieur dépasse 54% chez les garçons et62% chez les filles. Le graphique suivantmontre que la moitié des femmes en situationde chômage sont diplômées de l’enseignementsupérieur. Cette proportion est de 21% chezles hommes.

le primaire jusqu’au supérieur, qui estinterpellée ici en termes d’analyse causale.

Comment remédier à l’inexistence d’uneculture de l’interface formation – emploi toutau long des cycles de formation ? Ceci est unautre défi qui appelle à une action globale tantau niveau du contenu des cursus que del’information et de l’orientation des jeunes.Ainsi, au plan sectoriel, la politique de l’emploin’est pas ou peu articulée à la politiqued’éducation et de formation. L’absenced’articulation logique, de cohérence entreelles, accentue le déficit de l’employabilité desses jeunes.

Graphique 91 : Évolution du taux de chômagedes jeunes (15-24 ans) par niveaud’instruction (2010)Source : d’après les données du MESRS

Graphique 92 : Structure des chômeurs par niveau d’instruction (2010)Source : d’après les résultats de l’enquête population emploi de 2010, INS

Le gouvernement a pris un certain nombre demesures pour atténuer cette pression sociale àtravers l’ouverture du recrutement à la fonctionpublique et la mise en place de programmesd’aide aux diplômés chômeurs. Dans uneperspective à court terme de récessionéconomique, cette situation risque d’empirerdurant les mois à venir. Toutefois, la questiondu chômage reste tributaire d’une forte etdurable reprise économique, d’une part, etd’une amélioration en profondeur de la qualitéde l’enseignement, de la formation et del’apprentissage en Tunisie, d’autre part. Eneffet, en matière d’intégration économique desjeunes, c’est la qualité des formations, depuis

DEFIS ET OPPORTUNITES DE LA TRANSITION : LES JEUNES6.

Page 148: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

150

6.3.4 Analyse causaleprofessionnelles suffisantes pour leur assurerune insertion socio-économique réussie. Lafigure suivante en présente l’analyse causalesous forme d’arbre à problèmes :

Le problème majeur de la difficultéd’intégration des jeunes peut se présenter dansles termes suivants : les adolescents et jeunes(16-24 ans), notamment les jeunes filles et lesdiplômés, n’ont pas des compétences

Figure 11 : Difficulté d’intégration économique des jeunes, analyse causale

Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

Page 149: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

151

Tableau 14 : L'insertion professionnelle des jeunes : détenteurs de droits et débiteurs d'obligations

Le tableau suivant présente la mise en relation entre les débiteurs d’obligations et les détenteursde droits concernant ce problème d’intégration des jeunes :

Débiteurs d’obligations Détenteurs de droits : jeunes et adolescents (16-24 ans)

Parents/familles

Éducateurs

Ministères compétents : Ministèrede l’Éducation, Ministère del’enseignement supérieur,Ministère de l’emploi et de laformation

Secteur privé

Média

Agence de l’emploi

Associations

Soutenir les jeunes dans l’acquisition des compétences psycho-sociales leur facilitant une intégration socio-économique

Aider à construire des parcours professionnels et assurer un rôled’orientation des jeunes dans leur parcours professionnel.

Développer un enseignement secondaire et universitaire et uneformation professionnelle de qualité en prenant en compte dansune vision prospective et stratégique les besoins du marché del’emploi en partenariat avec le secteur privé

• Offrir des emplois de qualité de manière non discriminatoire • Apporter un encadrement/ apprentissage aux jeunes sans expérience…

• Informer sur : 1) les politiques, programmes et dispositifs d’aide et d’appui, 2) les expériences réussies d’insertion

• Donner la parole aux jeunes : forums et espaces de dialoguepour apprécier leur perception et leurs expériences.

Assurer une intermédiation entre l’offre et la demande de l’emploi

Encadrement, Appui, Mise en contact

DEFIS ET OPPORTUNITES DE LA TRANSITION : LES JEUNES6.

Page 150: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

152

Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

Page 151: Analyse de la situation des enfants en tunisie 2012

153

L'analyse de la situation des enfants en Tunisie présente une certaine originalité qui mérite d'êtresoulignée. En effet, dans un contexte en pleine mutation, les questions classiques s'estompent etde nouvelles préoccupations émergent. La Tunisie présente un cas singulièrement illustratif de cenouveau paradigme qui se pose dans le domaine de l'enfance et qui interpelle doublementl’UNICEF pour une rénovation, d’une part, dans l’approche d’appréhension des questions del'enfance, et d'autre part, dans les réponses à apporter en la matière.

L'analyse de la situation des enfants en Tunisie de 2012 a montré que des progrès importantsont été réalisés dans le domaine du développement, de l'éducation, de la santé des enfants etde la disponibilité des services et infrastructures publics dans le pays. Les questions d'accès sontdevenues presque anachroniques et les préoccupations classiques d’équité de genre sont enmajorité dépassées. La Tunisie présente, certes, les caractéristiques d'un pays en développementmais qui a atteint des niveaux de développement économique et social permettant de le classerparmi les pays au développement humain élevé. Cela nécessite de reconsidérer autrement lespriorités de développement en général et celles qui concernent l’enfance en particulier.

Dans ce contexte, analyser la situation des enfants en Tunisie en termes d'atteinte d'objectifsquantitatifs, comme les Objectifs du Millénaire pour le Développement, ne serait pas unedémarche suffisante et manquerait certainement de profondeur et de pertinence. Les questionsinhérentes aux adolescents et aux jeunes constituent désormais des préoccupations fondamentalesqui méritent qu’une priorité particulière leur soit accordée. Loin des stéréotypes négatifscantonnant la question des adolescents et des jeunes aux problèmes de délinquance, de violenceet de comportements à risque, cette catégorie de la population représente une véritableopportunité pour le pays. Ils sont dotés d’un esprit innovant, d’une vaste imagination et d’uneénergie considérable qui constituent une force positive pour la prospérité, la paix et ladémocratie. C’est un capital humain d’une importance primordiale pour le développement et unfacteur déterminant du changement social, de l'essor économique et du progrès technique. Leurrôle durant cette période critique de transition démocratique est appelé à s’accroître et à devenirdéterminant quant à la réussite et la durabilité du processus de construction démocratique.

Toutefois, l’analyse de la situation en Tunisie a montré que cette catégorie de la populationdemeure fortement vulnérable et confrontée à un avenir incertain. Les jeunes vivent ainsi unedifficile période de transition qui s’étend sur plusieurs années entre le moment où ils obtiennentleur diplôme et celui où ils décrochent un emploi permanent. Le manque d’options les amène àdes emplois précaires dans le secteur informel et surtout à vivre une pénible période de chômagequi peut laisser des impacts à plus long terme et souvent à vie.

Ainsi, il est paru fondamental de ne pas limiter la présente analyse de la situation des enfants enTunisie aux aspects classiques de ce type d’analyse qui concernent le domaine strict des enfantset de leurs droits. Pour le cas de la Tunisie, et éventuellement des pays qui vivent des situationssimilaires, il a été plus opportun d’élargir le champ d’analyse en englobant les questions propresaux adolescents et aux jeunes.

Il est effectivement plus pertinent de parler d’enfants et de jeunes couvrant ainsi un concept pluslarge et une réalité plus vaste qui englobe les différentes questions inhérentes à cette catégoriede population de la tranche d’âge des 0-24 ans.

CONCLUSION : LA NECESSAIRE RENOVATION

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154

L’analyse a montré que dans le domaine de l’éducation des enfants, la Tunisie a réalisé desprogrès remarquables en y consacrant 7% du PIB et plus du quart des ressources publiques. Celas’est traduit par une généralisation de l’accès à l’enseignement primaire et par un élargissementconsidérable de l’accès au post-obligatoire tout en modernisant les méthodes d’enseignement.Toutefois, le système éducatif demeure confronté à plusieurs défis qui concernent l’améliorationde la qualité, la réduction des disparités et le renforcement de l’efficacité externe. Relever cesdéfis passe par une plus grande prise en compte de la diversité des aptitudes des enfants et desjeunes à tous les niveaux d’enseignement, plus de mobilisation et de motivation des enseignants,plus de décentralisation et d’autonomie de fonctionnement des structures éducatives et plus deréactivité et d’adaptabilité par rapport à un environnement socioéconomique en pleine mutation.L’amélioration de la qualité de l’éducation passe aussi par des interventions en amont du systèmeéducatif classique.

En effet, l’investissement au niveau de la petite enfance et du préscolaire est considéré trèsrentable en matière d’amélioration des performances des élèves quand ils appréhendentl’enseignement primaire. En Tunisie, la couverture du préscolaire reste insuffisante et l’orientationpolitique devrait viser un développement considérable du préscolaire durant les prochainesannées.

Les services de santé destinés aux adolescents et jeunes ont aussi connu un développementremarquable à travers la mise en place de plusieurs programmes orientés vers cette population.Cela a permis d’améliorer sensiblement la disponibilité des services de santé qui demeurenttoutefois sous-utilisés par les adolescents et jeunes en raison des barrières psychologiques et aussiéconomiques. Les comportements à risque liés au tabagisme, à l’alcool, aux drogues, auxpratiques sexuelles et au phénomène de la violence ont généré une transition épidémiologiqueet de nouveaux problèmes interpellant les politiques sanitaires pour une meilleure écoute et unemeilleure adaptabilité des moyens d’intervention et d’information par rapport aux spécificitésdes besoins des adolescents et jeunes.

En matière de droit de l’enfant à la protection, la présente analyse de situation a fait ressortirl’engagement de la Tunisie dans une politique sociale orientée vers la protection de l’enfance.Cet engagement s’est traduit notamment par la ratification de la CDE, la promulgation du CPEet bien d’autres traités internationaux et nationaux. Ces instruments représentent un référentielthéorique important et une base pour développer des actions d’opérationnalisation. Une attentionparticulière est apportée aux catégories les plus vulnérables comme les enfants sans soutienfamilial, les porteurs de handicaps, les enfants menacés de rupture scolaire, les enfants vivantdans la rue, les enfants victimes d’exploitation économique ou sexuelle. Ceci nécessite l’adoptiond’une approche globale de l’ensemble des intervenants, la mise en place et l’adaptation deprogrammes sociaux éducatifs et le développement d’un mécanisme de suivi et d’évaluation.

Le niveau de participation des enfants et des jeunes à la prise de décision et à la société civileen général demeure largement insuffisant. Il est communément admis que la participation activedes enfants et des jeunes dans la vie en société et aux processus de décision aux niveauxnational, régional et local constitue un aspect fondamental de leur intégration et de leur promotionet un moyen important de valorisation et d’intégration de leurs préoccupations et intérêts dansles différentes politiques publiques. Les enquêtes réalisées ont montré un manque de participation

Analyse de la situation des enfants en Tunisie 2012

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155

CONCLUSION : LA NECESSAIRE RENOVATION

dans le choix des priorités, l’exécution et l’évaluation des programmes dont ils sont les principauxbénéficiaires. Les tentatives visant une plus grande participation des enfants et des jeunes enTunisie demeurent jusque-là limitées à quelques « effets de parade » comme le conseil municipaldes enfants, le parlement des enfants ou encore le parlement des jeunes.

Un effort considérable reste à déployer afin d’améliorer la participation effective et active desenfants et des jeunes en Tunisie. Cela concerne plusieurs domaines d’intervention : au niveau de la famille, à l’école, au niveau des associations et partis politiques et au niveau des organismesd’encadrement, de soutien, de recherches et d’études.

Le contexte actuel en Tunisie est propice pour lancer de vastes et ambitieux programmes visantl’amélioration de la participation des enfants, des adolescents et des jeunes à la vie de la sociétéà travers une réelle contribution et une large participation à la vie politique et aux activités de lasociété civile. Les acquis qui peuvent être réalisés dans ce domaine seraient certainementconséquents et durables.

Dans le domaine de l’enfance, le défi majeur pour un pays comme la Tunisie n’est plusl’universalisation de l’éducation ni la généralisation des vaccins de base, ni l’accès à l’eaupotable et à une nutrition équilibrée. Les questions fondamentales concernent désormais la qualitédes services publics, leur pertinence, la redevabilité vis-à-vis des bénéficiaires, les modes degestion et la participation des parties prenantes.

L'analyse du cas de la Tunisie a ainsi montré que de nouvelles questions émergentes sontinévitables et se posent en des termes inhabituels et complexes appellant à plus d’innovation età plus d’ingéniosité dans les réponses à apporter. Il s’agit de problématiques propres à uncontexte de transition porteur de nouveaux défis mais aussi de nouvelles opportunités. Commentaccompagner ce nouveau contexte en réduisant les risques et en valorisant les atouts, c’est toutel’ampleur de la question qui se pose pour l’UNICEF en tant que partenaire de la Tunisie dans lespolitiques qui visent l’enfance en général.

Concernant les domaines de coopération avec l’UNICEF, ce nouveau contexte que vit la Tunisieimplique nécessairement une rénovation des modalités et des domaines de coopération etd’appui. Les axes classiques de formation, d’acquisition de biens et de prestations de certainsservices ne sont plus pertinents pour un pays émergent à revenu intermédiaire et à un niveau dedéveloppement humain élevé. Il s’agit dorénavant du développement des capacités, de la miseen œuvre de réformes et de politiques complexes nécessitant de l’assistance technique, de larecherche, des services spécifiques et un accompagnement particulier pour améliorer lesperformances d’identification, de développement, de suivi et d’évaluation d’impacts dansplusieurs domaines relatifs aux politiques sociales. Ces nouveaux besoins deviennent pluspressants et plus déterminants durant cette période de transition démocratique engagée par laTunisie dans le sillage du tournant historique né de la révolution.

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