« La Psychologie clinique à l'Université Paris 7 : histoire, Sciences

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« La Psychologie clinique à l'Université Paris 7 : histoire, enjeux et perspectives des Sciences Humaines Cliniques dans la conjoncture du PRES»

Intervention de Paul-Laurent ASSOUN

Mon propos est de présenter les grandes lignes de la spécificité de la formation en psychologie clinique de l'UFR à laquelle j'appartiens comme enseignant-chercheur et dont j'assure la direction depuis 1997 .J e le fais simultanément au titre de membre du Conseil scientifique de l'Université .J'ai déjà eu l'occasion de présenter les objectifs de la formation devant le CS précédent et même au CA lors de sa visite sur le site Saint Lazare .Il est toujours utile de revenir à la spécificité de cette formation car au fond le travail d'information réciproque sur les composantes est toujours à refaire. Toutefois intervient ici un contexte nouveau ,celui de la restructuration des formations dans le contexte européen ainsi que tout ce qui tourne autour du PRES .Il s'agit de savoir comment répondre à ces demandes tout en assurant la continuité des tâches de formation et de recherche. Je partirai du rappel des éléments de l'histoire de l'UFR SHC qui permettent

de situer sa spécificité ,afin de situer son projet de formation,la signification des différences - et éventuels différends - avec telle autre formation de psychologie puis les possibilités d'échanges et les enjeux de cette question pour le secteur LSH.

1.0RIGINE ET HISTOIRE DE L'UFR SCIENCES HUMAINES CLINIQUES

L'UFR tient à sa formation ,qui est unique en France Je m'explique: l'UER Sciences Humaines Cliniques (devenue UFR en 1985) a été créée en 1969 à la demande d'un groupe d'enseignants de la Faculté des Lettres de la Sorbonne (Section Philosophie - Psychologie) constitué autour de Juliette Favez-Boutonier. Ce groupe comprenait aussi Jacques Gagey, Claude Prévost et Pierre Fédida, l'une des futures figures marquantes de l'UFR, où il enseigna jusqu'en 2002, année de sa mort. Ainsi fut obtenue, pour la première fois en France, la reconnaissance du titre national universitaire de psychologue clinicien.

En 1970, lors de la création de l'Université Paris 7 - Denis Diderot à laquelle elle fut rattachée, l'UER Sciences Humaines Cliniques resta fixée au Centre Censier de la rue Santeuil. Jean Laplanche,professeur à l'UER, contribua à fixer son orientation

psychanalytique en créant un "DEA de psychanalyse" et un "Centre de Recherches en Psychanalyse et Psychopathologie", la psychanalyse devant ainsi le "noyau dur" des études de psychologie. Cette introduction officielle et pionnière de la "psychanalyse à l'université" - nom de la revue qu'il créa en 1975 -­ a dès lors défini l'axe central de la recherche à l'UFR Sciences Humaines Cliniques, qui est progressivement devenue un lieu internationalement reconnu pour son travail en psychopathologie et en psychanalyse.

Cette orientation a ensuite été soutenue par le "Laboratoire de psychopathologie fondamentale et psychanalyse" créé et dirigé par Pierre Fédida. L'événement majeur fut ensuite la création originale et unique en France de l'Ecole Doctorale Recherches en Psychopathologie et Psychanalyse (2001) actuellement dirigée par Sophie de Mijolla-Mellor .

L'UFR a connu plusieurs déménagements dans des conditions particulièrement difficiles depuis son départ des locaux historiques de Censier. Elle s'est fixée dans les locaux de l'ancien hôpital Saint Lazare,puis au 26 rue de Paradis (Gare de l'Est) en attendant son transfert définitif sur le site de Paris Rive Gauche qui devrait avoir lieu en 2009.

2- ETAT DE LA FORMATION ET OBJECTIFS

Il n'est donc pas exagéré de dire que l'UFR marque un moment de l'histoire de la psychologie clinique en France ,qu'elle y a eu un rôle pionnier et constitue l'un des groupes « proto-historiques» de l'Université Paris-Denis-Diderot .C'est ce qui fait sa spécificité reconnue,aux plans national et international (une trentaine de nationalités d'étudiants européennes, sud-américaines,asiatiques,africaines sont représentées dans la formation doctorale) . Il s'agit d'une psychologie fondée sur l'écoute,la subjectivité du patient dans

le rapport à la souffrance psychique - en contraste,pour le dire rapidement,avec une psychologie objectivante.Elle a à rester fidèle à cette vocation,soit répondre à la demande d'enseignement en psychologie clinique -- qui fait son indéniable attraction qui a résisté aux diverses épreuves subies. D'une part,il s'agit de maintenir cette exigence; d'autre part,il convient de

tenir compte du contexte nouveau.Ne pas perdre l'âme de la formation,sans se fermer aux échanges justement pour en garantir la perdurance . L'UFR qui dispose des trois cycles de formation (LMD) accueille quelque

2000 étudiants pour 10 professeurs et une trentaine de maîtres de conférences (chiffre qui traduit assez éloquemment le problème de sous-encadrement chronique de ces dernières années)

La formation-recherche comporte deux volets: 11 l'un de formation professionnelle - production de «psychologues

cliniciens» :partout où il y a des pratiques cliniques .soit les diverses institutions et établissements où la présence du psychologue clinicien est requise ,du monde de la santé à celui du travail, des institutions publiques aux associations ,le psychologue clinicien a sa place ,la formation de l'UFR étant généralement particulièrement appréciée; 2 Il 'autre de formation théorique avec les deux axes ,psychopathologique et

psychanalytique. Nous ne formons pas de psychanalystes - ce qui est réservé notamment aux

diverses institutions d'analystes --,mais d'une part la psychanalyse est centrale dans le savoir de formation ;d'autre part beaucoup de psychologues cliniciens ont une expérience personnelle de la psychanalyse , déterminante dans leur appréhension du symptôme ,ce qui est cohérent avec leur démarche. Le master pro forme chaque année quelque 250 étudiants. Cette polarisation de la formation psychologique sur la dimension clinique

suppose en complément: .une dimension critique et épistémologique apte à situer le « champ» dans les

sciences de l'homme d'une part (cf.l'expression « sciences humaines cliniques» . une dynamique d'échanges transdisciplinaires d'autre part - en rapport avec

électif avec les « sciences de la vie» et les « sciences sociales ». D'où la structure de l'école doctorale « Recherches en psychanalyse» -- la

seule en France à ce jour -- qui comporte trois équipes d'accueil .l'une de psychopathologie fondamentale.les deux autres de psychopathologie et médecine scientifique et d'anthropologie psychanalytique -- avec la psychanalyse comme problématique focale. Nous avons aussi un master pro et un mas ter recherche avec 4 spécialités

correspondant aux axes définis . Cela représente de 250 thésards et une promotion de master recherche de

quelque 140 étudiants par an Il s'agit donc de former des étudiants aptes à assumer l'acte clinique tout en

disposant d'une formation très systématique soutenue par une conscience critique du champ considéré.

3. ENJEUX ACTUELS FORMATION

DE LA RECHERCHE ET DE LA

Quels sont les enjeux actuels ,sur les deux plans principaux,de la psychologie clinique d'une part, de la recherche d'autre?

AI C'est la formation,voire le « formatage» du psychologue aux plans national et européen.

On a là la vaste question de la formation du psychothérapeute .Actuellement l'Université n'a pas le monopole de cette formation .La réglementation de la profession,depuis le fameux amendement Acoyer,a posé le problème et ouvert un débat déterminant .L'Université est sollicitée pour assurer la garantie des compétences.Exigence légitime,mais à double tranchant :d'un côté,l'Université voit s'ouvrir un champ de compétences nouveau de portée sociale qui devrait augmenter encore la résonance de l'UFR ;de l'autre,cela est susceptible d'infléchir ses tâches de formation .Il n'est pas question que les départements de psychopathologie deviennent des instituts de formation ou ,pour le dire de façon provocatrice ,des IUT de psychologues cliniciens .D'où l'importance de la dimension de la recherche. D'autre part on assiste à la montée de types de thérapies d'inspiration

cognitiviste et comportementaliste qui non seulement entrent en concurrence avec les thérapies d'inspiration analytique,mais tendent à en contester la légitimité. Enfin l'évolution de la formation psychiatrique,de plus en plus coupée de la

psychopathologie fondamentale, laisse à l'Université ,notamment à notre formation, la tâche d'en assurer la continuité.

BIL' autre question est celle de l'Ecole doctorale et son avenir. Celle-ci,avec son centre « psychanalyse et psychopathologie »(J.André) et

ses deux «ailes» ,l'une en rapport avec la médecine scientifique (A.Vanier),I'autre avec les sciences sociales (M.Zafiropoulos) , a vocation à s'insérer dans une dynamique scientifique ouverte. La présence du CNRS ajoué un rôle important ,au moment de l'habilitation de

l'ED, pour renforcer cette dimension transdisciplinaire dans cette exigence de qualité de recherche et d'ouverture interdisciplinaire ,avec l'arrivée à Paris 7 de l'UMR « Psychanalyse et pratiques sociales» (M.Zafiropoulos,P .-L.Assoun)

4 .LES PRES :ENJEUX INSTITUTIONNELS ET SCIENTIFIQUES

Là intervient la conjoncture des « pôles de recherche et d'enseignement supérieur» (PRES) .lIs sont présentés comme « un outil de mutualisation d'activités et de moyens d'établissements et organismes de recherche ou d'enseignement supérieur et de recherche, publics ou privés, relativement proches géographiquement, visant, dans une logique de site, à renforcer l'efficacité, la visibilité et l'attractivité du système d'enseignement supérieur et de recherche français », Le raisonnement est le suivant: « dans un contexte de forte compétition

internationale, une meilleure visibilité, et donc une plus grande attractivité des établissements français d'enseignement supérieur, passe par l'acquisition d'une certaine taille critique. Les PRES permettront aux établissements de fédérer localement les principales activités d'enseignement supérieur et de recherche pour ainsi renforcer leur attractivité».

Il me paraît essentiel que ce rapprochement éventuel se fasse dans une logique scientifique.Opportunité de développement à saisir et non unification artificielle aboutissement à un nivellement des logiques scientifiques. Nous trouvons des éléments intéressants dans ce projet ,par exemple « renforcer

les approches communes d'enjeux partagés», ainsi que les partenariats académiques et/ou de recherche, en particulier autour des écoles doctorales.

S .DIFFÉRENCES DE FORMATION D'ÉCHANGES PARIS S/PARIS 7

ET PERSPECTIVES

En ce qui concerne le PRES .la psychologie Paris 7 est susceptible d'échanger au premier chef avec l'Université Paris 5 .Pour comprendre la position de l'UFR,il convient de rappeler sommairement les différences historiques et scientifiques .La psychologie à l'Université Paris 5 a une autre histoire,d'autres contenus. L'Institut de Psychologie de l'Université Paris 5 est l'héritier direct de l'Institut

de psychologie de l'Université de Paris, créé par Henri Piéron en 1920 et qui délivrait un "Diplôme d'études psychologiques Il (mention Psychologie, Pédagogie ou Psychologie Appliquée) Puis en 1948 à la Sorbonne, Daniel Lagache créa la Licence de Psychologie, En 1968,avant la création de l'UFR SHC Paris -7, le berceau de la psychologie française restait la rue Serpente. L'orientation diversifiée comporte aussi une dimension psychopathologique, la polarisation clinique et psychanalytique se trouvant par là même moins marquée qu'à Paris-7.Une réflexion ultérieure sur le contenu et le sens de ces différends serait au reste souhaitable.

En quoi est-il possible d'agir ensemble dans le contexte rappelé Cl­

dessus ,notamment avec le secteur psychopathologie de la formation Paris 5? Aucune décision globale n'a été prise en ce sens .En attendant le débat

prochain dans les institutions de l'UFR - Conseil scientifique et Conseil de l'UFR--, je me contenterai d'évoquer quelques pistes qui sont apparues à partir de quelques échanges personnels (voir aussi les réunions interconseils des Universités Paris 1,5 et 7).

Cela s'adresse essentiellement au volet de psychopathologie ,notamment au Laboratoire de psychologie clinique et psychopathologie de Paris 5. Le contexte implique qu'aucune forme de fusion n'est envisageable ni souhaitable .

En revanche apparaissent envisageables: a/la co-organisation de colloques de façon à renforcer et étendre les actions actuelles existantes (colloques communs J.André/C. Chabert, par exemple) ainsi que les doubles appartenances aux labos de PS et P 7 -­ comme c'est le cas actuellement pour Bernard Golse, par exemple,avec l'équipe de recherche de médecine scientifique d'A.Vanier de Paris 7 b/coüeborauon à des projets de recherche, sur d'autres thèmes de

recherche à définir c/posslbilité d'inscrire dans nos programmes d'enseignement respectifs des unités d'enseignement optionnels que les étudiants pourraient choisir dans l'autre université que celle dans laquelle ils sont régulièrement inscrits d/accuell de thésards et de stagiaires postdoctorants dans nos laboratoires pour des stages de durée variable el programmes communs de recherche et d'enseignement vers l'international.

En ce qui me concerne, je voudrais souligner l'importance d'un thème inter-universitaire spécialement porteur pour le secteur LSH ,soit la dimension de la ville: la Fédération de recherches Sciences de la ville habilitée (direction P.-L.Assoun SHC ;Evelyne Cohen,GHSS) actuellement à mi-parcours travaille dans cette direction ,tendant à promouvoir une pratique multi-disciplinaire concrète sur cet objet-carrefour autour d'un « observatoire du changement urbain ».D'une part,des contacts ont été établis avec le programme« Ville» du CNRS,d'autre part avec l'unité de recherche de Pascal Ory (Paris 1).

Conclusion

Je voulais terminer en insistant sur l'importance de mettre à profit cette conjoncture d'échange pour accroître la conscience identitaire du secteur LSH. Au niveau interne ,afin de développer les « ponts» entre disciplines: le

transfert de l'Université sur le site Paris Rive Gauche ne saurait perdre de vue cet enjeu de « refondation » qui implique la politique scientifique pour les 3 secteurs de l'Université. Au niveau externe, afin de s'ouvrir aux échanges, sans abdiquer la

spécificité PARIS-7 précieuse à ses acteurs et appréciée de l'extérieur,si l'on en juge par la demande soutenue et l'image de marque scientifique. Plus une discipline est consciente de sa spécificité ,plus elle est

susceptible de s'ouvrir à une telle dynamique.Au-delà du discours­ transdisciplinaire,le travail concret sur des objets communs apparaît comme déterminant pour la communauté d'enseignement de recherche Paris-7. Nous espérons en ce sens que la psychologie clinique puisse inspirer

d'autres secteurs des sciences de l'homme engagés dans une réflexion parallèle et bénéficier d'échanges sur les politiques scientifiques des composantes du secteur LSH.

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