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8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 1/144
IF
langue
M
JI
X
M.
A-J
i?-
istoire
.ÇA
m
VALES
M
X
M.
A-J
histoire
I
.ÇA
X
M.
A-J
histoire
.ÇA
ŠL'AN Rythmes et
MIL
Rythmes et acteurs ['¿t
d'une croissance
f<£>*'
Revueubliéevec econcoursuC.N.L. mJļevueubliéevec econcoursuC.N.L. Jļ
.
jj
:
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 2/144
MÉDIÉVALES
Langue
Textes Histoire
NUMÉROS PARUS
1
Mass-media t
Moyen
Age.
1982).
Épuisé
2
Gautier
de
Coinci
le
textedu
Miracle.
1982)
3
Trajectoire
du sens.
1983)
4
Ordres
et
désordres. Études dédiées à
Jacques
Le
Goff.
1983).
Épuisé.
5 Nourritures.1983). Épuisé.6 Au
pays
d'Arthur.
1984)
7
Moyen
Age,
mode
d'emploi.
1984)
8
Le souci du
corps.
1985).
Épuisé
9
Langues.
1985).
Épuisé
10
Moyen
Age
et histoire
politique.
Mots,
modes,
symboles,
truc-
tures.
Avant-propos
e
GeorgesDuby.
1986).
Épuisé
11 A
l'école de la lettre.
1986)
12 Tous les
chemins mènent
à
Byzance.
Études
dédiées à Michel
Mollat.
1987)
13
Apprendre
e
MoyenAge aujourd'hui.
Épuisé
14
La culture
ur
le
marché.
1988)
15 Le premierMoyenAge. 1988)
16/17
Plantes,
mets t mots
dialogues
vec
A.-G.
Haudricourt.
1989)
18
Espaces
du
Moyen
Age.
1990)
19
Liens
de
famille.
Vivreet choisir
a
parenté.
1990)
20
Sagas
et
chroniques
u Nord.
1991)
A
paraître
22/23Pour
l'image.
©
PUV,
Saint-Denis,
1991
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 3/144
MÉDIÉVALES
Revue semestrielle
ubliée par
les Presses Universitaires
de Vincennes-Paris
VIII
avec
le
concours
du
Centre National des Lettres
DanîellePREGNIER-BOHLER
1
Bernard
ROSENBERGER
jļ
^
Simonn^ABRAHAM-THISSE
I
^
•
Geneviève
BÜHRER-THIERRY
BS/ II
Jj|KÍ||^^Í
François
JACQUESSON
V
Laurence
MOULINIER
CporptariQt PvrKMfnl ' r * I*
Lada HORDYNSKY-CAILLAT
-,
.
j
Les
manuscrits,
actylographiés
ux normes
habituelles,
insi
que
les
ouvrages pour comptes
rendus,
doivent être
envoyés
à :
MÉDIÉVALES
Presses Universitaires de
Vincennes
Université Paris
VIII
2,
rue de la
Liberté,
93526 Saint-Denis Cedex
02
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
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SOMMAIRE
N°
21 AUTOMNE 1991
L'AN
MIL
:
RYTHMES
ET
ACTEURS
D'UNE CROISSANCE
L'an mil
continuité,
tournant ou révolution
Discussions
autour d'un livre controversé
Monique
BOURIN
5
Le lit de Procuste de
Guy
Bois
Barbara H. ROSENWEIN 11
Essor
démographique,
roissance
agraire
et
archéologie
Elisabeth
ZADORA-RIO 17
À la recherche e
personnesperdues...
Maria HILLEBRANDT et Franz NEISKE 21
Mutations
et
révolutions
ux
environs
de l'an mil
Chris WICKHAM 27
Méconnais,
terre féconde
Pierre BONNASSIE 39
Un
regard périphérique
ur La mutationde l'an
mil
Lluis
TO FIGUERAS
47
Europe carolingienne t Europe méridionale le point de vue
d'Adriaan VERHULST
Propos
recueillis
par Monique
BOURIN 55
Réflexionsd'un historien
aponais
sur le livre de
Guy
Bois
Yoshiki MORIMOTO
63
L'Antiquité
se
poursuit-elleusqu'à
l'an mil ?
Nancy
GAUTHIER
69
Réflexion ur
un
«
modèle
»
RobertFOSSIER 77
C'est arrivé
à Lournand
Bernard
LEPETIT
81
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4
Réponse
Guy
BOIS
91
Postface
109
Repères
bibliographiques
113
ESSAIS
ET
RECHERCHES
Réflexions ur l'aristocratie uédoise au MoyenAge : l'exemple
d'un
lignage
noble entre 1250 et 1350
Jean-Marie
MAILLEFER
115
Notes de lecture
133
Martin
Aurell,
La vielle
et
l'épée.
Troubadourset
politi-
que
en Provence au
xnie
siècle
(V.
Serverat)
;
Gloria
K.
Fiero,
Wendy
Pfeiffer,
Mathé
Allain,
Three Medie-
val Views
of
Women La contenance
des
fames
Le
bien
des
fames
Le
blasme
des
fames
(L.
Hordynsky-Caillat)
;
Roland Carron, Enfantet parentédans la France médié-
vale
xe-xnie
iècles
(D. Lett).
Livres
reçus
138
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Médiévales
1,
automne
991,
p.
5-10
Monique
BOURIN
L'AN MIL : CONTINUITÉ, TOURNANT OU RÉVOLUTION ?
DISCUSSIONS AUTOUR D'UN LIVRE
CONTROVERSÉ
Lorsque
l'hiver
dernier,
Guy
Bois
fit
paraître
on dernier
uvrage
sous
le
titre,
ttirant
our
tous
publics,
de
«
la
mutation e l'an
mil
»,
le succès de librairie utvite
acquis
;
les
premiers omptes
rendus
qui
n'étaient
pas
destinés
à la
corporation
des historiens niversitaires
furent latteurs. armi es médiévistes,es réactions 'embléemitigées.
Mais
on ne
peut
nier
qu'il
en fut
parlé.
Dans
un
second
temps,
cer-
tains
ugèrent ue
cet
ouvrage
ne
justifiait as qu'on
en
parlât.
Much
ado
about
nothing.
À
bien
des
égards,
l me
semble au contraire
ue
la vivacité des réactions
premières u'il
suscita mérite
que
le débat
soit
repris.
l me
paraît
incontestable
ue Guy
Bois a touché l'his-
toire médiévale n
un
point
sensible.
Reparlons
donc de
ce
livre,
une
fois
passée
l'irritation
remière u'il
a fait naître chez
quelques-uns
(dont je
suis,
je
l'avoue).
Ce numéro de Médiévales
a
plusieurs
buts,
reprendre
es
analy-
ses présentées ar Guy Bois, mais aussi permettre e rapprocheres
opinions,
plus
ou moins
divergentes,
e
spécialistes
u
thème,
ou des
thèmes,
qui
font
'objet
de la Mutation de l'an mil
Que
tous
ceux
qui
ont
accepté
de collaborer ce numéro rouvent ci mes remercie-
ments.Je voudrais associer à ces remerciements
'équipe
de la rédac-
tion de Médiévales et tout
particulièrement
idier Lett
qui
m'a sans
cesse
aidée au cours de la constitution e ce numéro.
Tous ont
admis
et
respecté
es
règles
du
jeu qui
les ont contraints
exprimer
es
opi-
nions
complexes
sur
un
problème
difficile n
un
petit
nombre de
pages.
J'ai conscience
de la frustration
ui peut
en
provenir our
le
lecteur.Du moins
ai-je l'espoir que
cetteforme
brève
ui rendra
plus
éclatants es pointsde rencontre t les oppositions.Aussi bien dans
la lecture
ue
ces divershistoriens nt faitede
l'ouvrage
de
Guy
Bois
que
dans l'énoncé
de leurs thèses
personnelles.
Je
tiensà
associer à ces remerciements
uy
Bois lui-même. our
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que
le fasciculene soit
pas
seulement a
juxtaposition
de
thèses,
ou-
vent ssez
différentes,
t
que
la discussion
uisse s'engager
plus
avant,
j'ai
demandé à
Guy
Bois de bien vouloir
répondre
ux
argumenta-
tions
présentées
ontre
es siennes
ou
à côté.
Ces
joutes
ne
sont
pas pour
lui
déplaire. Guy
Bois a visiblement
pris plaisir,
dans
son
livre,
à
jouer
les enfants
ageurs
t
mal
élevés
qui
lancent
un
pavé
dans une mare
pour
éclabousser es
«
grands
.
Mais
par
moments
e
pamphlétaire
aisse la
place
au
maître
qui
dis-
tribue ses
élèves les bons et les mauvais
points. Dépassons
ce
pro-
blème
de
forme t de ton et
reprenons
e débat. Le
problème
raité
dans la Mutationde l'an milestde ceuxqui méritent 'êtresans cesse
remis ur le métier t il a
suscitérécemment e
nouvelles
discussions.
Les
quelques
titres éunis
à
la
fin
de ce volume
sont le
signe
de ce
regain
d'intérêt et
des avancées récemment
cquises.
Le titre du
tome
X
des
Congrès
de Fiaran en
résume une
part
essentielle
«
la
croissance
gricole
u Haut
Moyen
Age
». C'est à cette
mmense
ues-
tion
que
Guy
Bois s'est
attaqué.
Le
Congrès
de
Fiaran,
en
1988,
fut
déjà
l'occasion
de
juxtaposer
es
points
de
vue. J'ai
souhaité
qu'ici,
le débat
soit
un
peu
différent t
qu'il
s'ordonne autour d'un
point
de
départ l'acceptation
ou la
réfutation es thèses
auxquelles Guy
Bois vient de donner une certaineampleuréditoriale.
C'est donc
essentiellement e la
signification
e l'an
mil
pour
l'économie et la
société
européenne
u'il
est débattudans ce numéro.
Ce
point
de
vue
est,
bien
entendu,
oin
d'épuiser
l'histoirede
cette
période.
Les
récents
uvragespubliés
à l'occasion du
millénaire
apé-
tien ont montré ombien
pouvaient
être
diverses es
approches
de
ce
temps pour
le seul
royaume
de
France.
Dans La mutation e l'an Mil
Guy
Bois a fait
une étude
mono-
graphique
d'un terroir
u
Mâconnais
et à
partir
de cette
monogra-
phie
a
construit n modèle
abstrait
yantpour objet
de rendre
ompte
de l'histoire e l'Europe entre a finde l'Empireromainet le XIIe iè-
cle. Cette
construction
envoie,
bien au-delà même du
cadre chrono-
logique qu'il
s'est
fixé,
à une
théorie de
l'histoire,
de ses
rythmes,
de ses
acteurs.
l
me
paraît
normal
qu'aucun
historien e
reste ndif-
férent un tel
programme.
Même
sans m'aventurer
ur le terrain e
plus
audacieux,
celui d'une
théorisation e
l'histoire,
e
crois
que
le
livre de
Guy
Bois introduit une
triple
discussion
l'une concerne
l'étude
monographique
lle-même,
elle
que
Guy
Bois l'a
conduite
partir
des documents
lunisiens la
seconde,
le
schéma
global
qu'il
construit
our
l'histoire
u Haut
Moyen
Age européen
la
troisième,
la méthode
par laquelle
il
est
ustifié
d'aller
du
particulier
u
global,de la monographie l'histoiregénérale.
A
priori
n
ne
peut qu'applaudir
la
démarche
ui prend
omme
point
de
départ
'étude
monographique
'un
finage
nous
savons tous
qu'après
les
études
régionales ui
ont fait a
gloire
des
historiens ran-
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http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 14/144
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8
aux abords
de
Cluny
sont universellement
pératoires,
l
y
a un
pas
que
tous les historiens
ui s'expriment
ans ce numéro de Médiéva-
les ont
vu franchi vec
effroi.Robert Fossier et Chris Wickham
ont
rappelé
dans
leur article es
règles
élémentaires e la
généralisation
des
modèles. Tous
les
historiens,
as
seulement es
médiévistes,
ont
confrontés
ces
problèmes
t nous avons choisi de l'aborder
égale-
ment,
partir
u livrede
Guy
Bois,
par
une réflexion
héorique,
ndé-
pendante
es
problèmes
e traitement
pécifiques
u Haut
Moyen Age.
Le
modernisteBernard
Lepetit
avait
présenté
es réflexions
ue
lui
suggérait
a méthode
de
Guy
Bois au cours de
journées
de
discussion
interdisciplinairee la Maison des Sciences de l'Homme. Il a accepté
de
reprendre
on
argumentation
our
ce numéro
de
Médiévales
Monographie
discutable,
généralisation
mprudente.
l
reste
que
l'ouvrage
de
Guy
Bois
propose
une
synthèse
onstruite e l'histoire
du
Haut
Moyen
Age
et
qu'il
faut
en
mesurer
'apport,
essentiel
our
certains,
banal
pour
d'autres,
très
partiel pour
d'autres encore.
Naturellement out
effort e
généralisation
mplique
un mouve-
ment de
retour vers la réalité d'autres
régions,
pour
vérification.
Autant
dire
qu'il
n'y
a
pas
d'histoire
ans
comparaison.
Truisme,
er-
tes,
mais
moins facile
à
appliquer qu'on
ne
pourrait 'espérer
déale-
ment. Aussi attentifue l'on soit aux résultats 'autrui,rien ne rem-
place
le contact
de
première
main avec
les sources. C'est
pourquoi
il
m'a
paru
essentiel
ue participent
ce fascicule e Médiévales
pour
présenter
eur
propre
vision
du Haut
Moyen Age,
des historiens
yant
fréquenté
es sources
de diverses
égions.
ur le versantméditerranéen
et
dans
l'espace
de
l'Europe
du
Nord. Les
«
polypticomaniaques
,
et les
autres. La
contribution e Chris
Wickham,
après
les
travaux
de
Pierre
Toubert,
nvited'ailleurs à ne
pas
considérer
e
monde
de
la Méditerranée
ccidentale
comme
parfaitement
omogène.
Autant
que
des sources
étudiées,
a
problématique
e l'historien
dépend
de sa culture
t de
sa
formation nitiale.
Je
souhaitais
donc
que des historiens e traditions t de nationalitésdifférentesxpri-
ment eur
opinion
devant
'ouvrage
de
Guy
Bois,
même si son auteur
ne
peut pas
passer pour
incarner l'école
historique
française
en
une
parfaite
rthodoxie.Les articlesdes
collègues
«
étranger
»
révè-
lent l'intérêt
qu'ils portent
ux travaux
historiquesqui
se font en
France,
mais aussi
leur irritation evant
notre
gnorance
de ce
qui
se
fait ailleurs. Est-ce
exact ?
Du
moins est-ce
'impression
ue
don-
nent les historiens
rançais
hors de France
et le livre de
Guy
Bois
ne
peut que l'aggraver
ant
il
passe
sous silence
des travaux
mpor-
tants écrits
dans une autre
langue que
le
français.
Manque
d'ouverture
des historiens
français,
du
moins sur les
ouvragesd'historiens trangers Le mal ne leur est pas particulier.
J'aurais
aimé
qu'un juriste
et
un
sociologue pussent oindre,
à celle
des
historiens,
eur réaction
devant e
type
de raisonnement
ue pré-
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9
sente
Guy
Bois.
Je n'ai
pas pu
obtenir eur concours.
En
revanche,
je
tiens
à remercier out
particulièrement ancy
Gauthier t Bernard
Lepetit qui
ont bien voulu franchir es bornes
habituellesdes
pério-
des dont ils sont
spécialistes our
venir
ur
le
terrain es
médiévistes
apporter
a richesse
de leur
réflexion.
Or,
à en
juger
par
le
portrait
que Guy
Bois fait du monde
romain,
et
pour reprendre
a
critique
de
Nancy
Gauthier ou de
Chris
Wickham,
l
serait souhaitable
que
les historiens assent
plus
souvent cet effort.
J'ai
essayé également ue
non seulement es
nationalités,
es
éco-
les
et
les
spécialités hronologiques
oient
différentes,
ais aussi les
générations. eut-être urais-jepu demander quelques étudiants e
réunir eurs
réflexions e lecture. Du
moins,
ont
pris
la
plume,
des
moins
eunes
et des
plus jeunes,
comme Lluis To
Figueras, exemple
de la brillante movida
»
ibérique.
Au-delà des réflexions
uelque peu scolastiques
ur la
persistance
de
l'Antiquité près
le Vème
sicle,
es discussions
ortent
videmment
sur les
rythmes
t
les
acteurs de la
croissance
et renvoient
'ailleurs
à une réflexion
lobale
sur le sens du mot
«
croissance
pour
cette
haute
époque.
J'ai eu le sentimentue la discussion 'était, l'origine, ropcon-
centrée ur
a
place
de
l'esclavage
dans
le
schéma
que propose
e livre
de
Guy
Bois. C'est en effet 'un des
aspects
provocants,
mais aussi
facilement iscutablesdu livre.
En
fait,
e débat ne
se
réduit
pas
à
évaluer a
part
de
l'esclavage
dans l'économie du Haut
Moyen
Age.
Chris Wickham
propose
la vision d'une économie dominée
par
une
exploitation aysanne
de subsistance u lendemain
des invasions
et
discute,
me
semble-t-il,
e
concept
de
croissance
our
ce
type
d'éco-
nomie.
À
quel
moment t
pourquoi l'impulsion
vers une intensifica-
tion de
la
mise
en valeur ?
À
l'époque carolingienne,
ans une stra-
tégie aristocratique
'accroissement es revenus
fonciers,
rchestrée
par le pouvoirroyal et les établissements eligieux Dans la longue
durée,
mais dans
le
dynamisme
'une
société
paysanne qui
se
dégage
d'un
esclavage
d'une absurde
nefficacité,
uivant e
que je
crois être
la
proposition
e
Pierre
Bonnassie
? Ou
bien aussi dans celui du
petit
domaine,
comme
'ajoute Guy
Bois
?
Dans
un
cas
la mutation féo-
dale
»
s'inscrit ans le
prolongement
e l'ordre
carolingien.
Dans les
autres,
elle est une
ruptureplus
ou
moins radicale.
Adriaan Verhulst ouhaitevivement
ue
les
«
Méridionaux cher-
chent es traces de
l'impulsion aristocratique
u
royale
autour de la
Méditerranée ccidentale.
l
faut
reprendre
outes es sortesde docu-
ments
et lui
répondre.
Mais le
dynamisme
de l'initiative
paysanneserait-ile propredes rivagesde la Méditerranéeu de ses historiens
Pourquoi
ne
pas proposer
aux
historiensdes
plaines
du
Nord de
reprendre'enquête
aussi en ces termes Pour en arriver
ans
doutq
à
proposer
deux ou trois modèles
(ou plus),
où
se combinentdans
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10
des
proportions
ariables et des
chronologies
différentes'action de
plusieurs
ynamiques
ociales. Même si
plusieurs hénomènes,
els
que
l'extinction
e
l'esclavage,
raversentoute
'Europe
occidentale n une
durée très
étirée,
l
me
paraît
peu plausible qu'un
seul
schéma
puisse
rendre
compte
de toute
son histoire ntre
e
Ve
et le
XIe
iècles.
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Médiévales
1,
automne
991,
p.
11-16
Barbara
H. ROSENWEIN
LE LIT DE PROCUSTE DE GUY BOIS
Dans
La Mutation de
l'an mil
Guy
Bois
présente
une thèse
d'ensemble
qui
a de
l'élégance
mais
il
l'appuie
sur le mince roseau
d'une
argumentation
iscutable.Dans
un
discourshardi et révolution-
naire,
il
rejette
a
plus grande
part
de l'érudition ntérieure
pour-
tant
il n'a
guère
pris
en considération es travaux
récents,
urtout
quand
ils
ne
sont
pas
écrits en
français1.
Cela donne un livre exu-
bérant, audacieux, séduisant,mais qui manque de substance.
La
thèse de La
Mutation est une variante du schéma
hégélo-
marxiste u
changement istorique,
ù les
contradictionsnternes
e
la société induisent
une
dialectique qui
engendre
un nouvel ordre
social.
En
bref,
Bois
prétendqu'un
monde
antique,
certes
décrépit,
mais
encore
intact,
s'est maintenu
usqu'aux
dernières écenniesdu
Xe
iècle. Dans
ce
monde,
«
emprisonnée
(c'est
une
métaphore
de
Bois),
une nouvelle société
féodale
s'est
développée, presque
invisi-
blement.Dans les
vingt
ou trente ernières nnées du
Xe
iècle,
sous
l'influence e dominations
eigneuriales,
ommecelle de
Cluny,
e nou-
vel ordre vu le jour, violemment,pectculair ment irrévocablement.Le trait
aractéristique
e
l'Antiquité ue
retient ois - « une société
esclavagiste
et une économie
qui
obéit aux
demandes de la ville
-
est
emprunté
Moses
Finley.
Mais c'est Bois lui-même
ui
définit
les
caractéristiques
u
«
féodalisme
,
en
invoquant
surtout a
rup-
1. Parmies
tudes
ue
n'a
apparemment
as
consultées
ois, oir,
ur 'histoire
sociale e
Cluny, ui,
dansune
arge
mesure,
st e
sujet
u livre J.
Wollasch,
«
Werwaren
ieMöncheon
Cluny
om 0.bis um 2.Jahrhundert
»,
dansMélan-
ges
J.Stiennon
Liège,
982,
p.
663-678sur 'économieR. Hodges
t D.
White-
house,
Mohammed
Charlemagne
nd he
OriginsfEurope
Ithaca, .Y.,
1983 sur
la Paixde Dieu
H.-W.
Goetz,
Kirchenschutz,
echtswahrung
nd
Reformzu den
Zielen nd umWesen erfrühenottesfriedensbewegungnFrankreich, Francia
11,1983,
p.
193-240sur a violence
W. Davies
t P.
Fouracre, ds.,
The
ettle-
ment
fDisputes
n
Early
Medieval
urope
Cambridge,
986 t
P.J.
Geary,
Vivre
en onflitans ne rance
ans tat
typologie
esmécanismese
règlement
es onflits
(1050-1200)»,
nnalesE.S.C.
XLI, 1986,
p.
1107-1133.
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 19/144
12
turede
la
distinction
uridique
entre sclave et
libre,
'essor
d'une éco-
nomie de marché fondée sur
l'interdépendance
ntre
les secteurs
urbains et
ruraux,
a formation
'une classe
dominante
eigneuriale,
et le
développement
'une
paysannerieproductive.
Cette théorie st
claire,
même
passionnante,
mais elle
n'explique
ni
n'éclaire
a réalité.Elle
construit
n lit
de
Procuste
où
les données
du
Xe
iècle
doivent rouver eur
place.
Ceci
apparaît
clairement
ors-
que
Bois commenceà
éprouver
a théorie
par
la
«
micro-analyse
d'une
petite
région
du
Mâconnais
:
Lournand et
quelques
villae voi-
sinesde Vagerde Merzé. La documentation rovient rincipalement
des chartes
de
Cluny.
Bois
voudrait
nous
faire
dmettre
ue
ces
char-
tes constituente
gisement déquat
des données sur a
sociétéet l'éco-
nomie du
Xe
siècle.
Il
n'en
est
rien
ces
chartes,
quelques excep-
tions
près,
ne
sont
que
des documents ressés
par
et
pour
les moines
de
Cluny.
Elles
ne
représentent as
un
échantillonnage
léatoire des
transactions ffectuées ans
la
région.
Elles révèlent vant
tout ce
que
le monastère
t
les auteurs
de
donations
ou
de
ventes,
ou d'échan-
ges)
le concernant ouhaitaient
onnaître
t faire onnaître
leurscon-
temporains
u
sujet
des interactions ntreces
partenaires.
Beaucoup
de ces chartes ont datéesde façonpeu sûre certainsnomsde lieuxsont mal identifiés2.
Bois use
ingénument
e ces chartes.
Prenons,
par
exemple,
on
graphique
des
«
ventes,
échanges
et donations
»
(graphique 1).
Pour
Bois,
ce
diagramme
démontre
es
points
suivants
1)
Les
échanges, caractéristiques
'une économie ancienne
sans
marché,
onstituent
8
°7odes transactions ans la
région
considérée.
Puis leur
proportion
baisse extraordinairementurant la
période
920-950,
usqu'à
moins de
10
.
2)
En
même
temps,
es
ventes,
aractéristiques
'une société féo-
dale de marché, roissent apidement, assantde 20 °/o plusde 40 °7o
du
total des transactions.
3)
Par
conséquent,
cette orientation
ignale
une
rupture
rutale
de l'ordre ancien et la naissance oudaine d'un féodalisme
rienté ers
le marché.
2. Pour es noms e
lieux,
M.
Chaume,
es
Origines
u
duché e
Bourgogne
part.
I,
fase.
,
Dijon,
931
pour
es
dates,
d.,
«
Observationsur
a
chronologie
des hartese
'abbaye
e
Cluny
,
Revue
abillont.
16,
926,
p.
4-48
t.
29,1939,
pp.81-89, p.
133-142t.
31, 1941, p.14-19, p.42-45, p.
69-82
t.
32, 1942,pp.15-20, p.133-136t.38, 1948, p.1-6 t.39, 1949, p.41-43 t.42, 1952,
pp.
1-4. es ncertitudesbondent.ur
Lournand,
ar xemple
dans ne harteur
une
ropriété
ituée
in Rornanno
,
faut-ilire in
Lornanto
(à
Lournand)
Voir
A.
Bernard t A. Bruel
sous
a direction
e),
Recueil es
chartes
e
l'abbaye
e
Cluny
6
vol.,Paris,
876-1903,
ol.
,
p.
141,
n° 1920.
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 20/144
13
Graphique
Donations
50
-
'
40
-
'
✓' / Ventes
30
-
*
'i
20
-
4
'
'
Échanges
^
10
7o
V
I I I
920-50
950-80 980-1000
Diagramme
es ventes
échanges
t
donations
en
)
(dans
a
Mutation
p. 79)
Cependant
ce
graphique
est
trompeur,
ar
:
1)
Les intervalles e
temps
choisis sont
artificiels,
uisque
nom-
bre de chartesne peuvent tredatéesque par référence ux abbatiats.
2)
Bois
n'indique pas
le nombre des
chartes
qu'il
utilise
pour
le
Mâconnais,
on
trouve,
durant la
période
920-1000,
environ
1500 chartesde
Cluny.
Et nous
constatons
ue
Bois
n'utilise
qu'une
petite
fractionde ce lot3.
3)
Bois
n'indique
pas quels
lieux
il
a
pris
en
considération
our
construire on
diagramme.
l
a dû
inclure
Lournand,
son
point
de
référence
mais,
dans
sa
démonstration,
l
ajoute,
parfois,
certaines
villae
prises
dans
Yager
de Merzé
Chavagny,
Collonge,
Cotte, Merzé,
Varanges,
Cortambert
t
Sous-Lourdon
p. 28).
De
temps
à
autre,
l
ajoute
Mailly p.
71,
p. 162).
Or
nous ne
connaissons
pas
les
critères
3.
Sur e
point
t
pour
es alculs
uivants,
'ai
utilisée
programme
.A.
.
(Sta-
tistical
nalysisystem)
ù
j'ai
enregistré
es
donnéesssues es
chartese
Cluny
jusqu'en
'an 1049. ur e
programme,
oir .H.
Rosenwein,
o be the
Neighborf
Saint
eter the ocial
Meaningf
Cluny's
roperty
909-1049
Ithaca,
.Y.,
1989.
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
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15
On
peut
tirerdu
graphique
quelques
observations
mportantes
1)
Les
échanges
ont
oin d'avoir
amais
constitué
rès
de la moi-
tié
des transactions
ans
l'ensemble de
Yager6.
2)
La
proportion
des
échanges
a relativement
eu
décliné
pen-
dant
la
première
période
considérée.
3)
Les
ventes,
qui
se
sont
accrues
légèrement
urant es trente
premières
nnées,
ont
quelque peu
décliné durant a seconde
période.
4)
L'affaiblissement
lobal
de la
part
des
échanges
et
des
ven-
tes,
mis
en
regard
de
l'augmentation
e la
part
des
donations,
ren-
voie à
une modification es
relations
ntre
Cluny
et ses
voisins,
plu-
tôt qu'à une transformation'ordre économique. Le fait vraiment
important
st
constitué
par
les donations.
Après
l'an
mil,
ou à
peu
près,
le nombre
total des chartes
qui
concernaient
Vager
de
Merzé
diminua
nettement,
arce
que Cluny
avait alors consolidé
son assise
territoriale
ans la
région.
5)
Les
ventes,
es donations
et les
échanges
constituaient
es ins-
truments
ouples,
utiles
à la fois dans des économies
de marché et
dans des
économies sans
marché
mais
selon
des modes
différents)7.
La focalisation
de Bois sur
Lournand
et
sur
quelques
autres v/7-
lae prises dans le voisinage donne donc une vue trompeusede la
région.
Ce n'est
pas
le
lieu, ici,
de
procéder
une
critique
détaillée
de
la
méthodologie
e
Bois,
mais
il
faut
marquer
clairement
u'elle
le rend
nsensible
nombre
de
tendances,
e corrélations
éterminantes
et de
continuités.
En
fait,
'est son
insistance
ur a discontinuité
rutale
ui
donne
un air de
nouveauté
aux
propos
de
Bois.
Pourtant,
débarrassées
de
leur
apparence
révolutionnaire,
ien
des affirmations
e l'auteur sont
reçues
depuis
longtemps.
Aucun
historien,
ar exemple,
ne
nie
l'exis-
tence de
l'esclavage
au
Xe
siècle. Mais
rares sont ceux
qui
ont vu là
une
preuve
de la
persistance
e
l'Antiquité.
De
même,
a
plupart
des
historiens 'accordent sur les transformationsécisivesqui ont lieu
dans
les dernières
écennies
du
Xe
siècle,
lorsque
le
pouvoir
comtal
futréellement
emplacé ar
celui des
châtelains ocaux.
Certes,
e
pou-
voir
seigneurial
'un nouveau
genre
marqué
e début de ce
que
l'on
appelle,
dans
l'historiographie
rançaise
e
«
féodalisme 8.
Mais la
plupart
des historiens
nt
décritun lent
processus
de transformation
qui
conduit à ces
«
mutations
.
6.
Dans e
pagus
e Mâcon
ris
ans
on
nsemble,
es
échanges
e constituent
que
14
destransactions
our
a
période
20-949,
uis
hutent
10
(950-979)
puis
8
(980-1000).
esventesnt
écru
égèrement
ais onstammenturant
oute
la
période
20
, puis
19 et
17
du total estransactions.
7. Sur e point,npeutireRosenwein,p. cit. note ).
8. Les
historiens
méricains
raignent
arfois
e
parler
'un
oncept
ommeelui
de féodalisme
omme
'ilexistaitéellement
illeurs
ue
dans a tête es
historienslas-
siques
voir .A.R.
Brown,
The
Tyranny
f a Construct
Feudalismnd
Histo-
rians f Medieval
urope
,
American
istorical
eviewt.
79,
1974,
p.
1063-1088.
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 23/144
16
Est-ce
que,
du
moins,
La Mutation susciteun débat
important
La
question que
le livre
pose
est
classique
:
à
quel
moment e monde
antique
a-t-il essé d'exister
t le
Moyen Age
a-t-il
ommencé Mais
le
problème
n'a
plus guère
d'intérêt
ujourd'hui,
alors
que
les histo-
riens es
plus
en
pointe
en ce domaine tentent e
comprendre
es
épo-
ques
non
plus par
leurs
rapports
des modèles réifiés e
l'Antiquité
ou
du
féodalisme,
mais
comme des moments
pécifiques.
Le livrede
R.I.
Moore,
La
Formation
d'une société
persécutrice
1987,
trad,
franç.
1991),
ne
dit rien
sur
le
féodalisme,
mais donne une vue iné-
dite de la nature de
la
société
du
XIIe
et du
xinc
siècle.
L'ouvrage
d'HeinrichFichtenau,Lebensordnungen es 10. Jahrhunderts1984),
nous
plonge
dans les mentalités
u
Xe
siècle
sans s'embarrasserde
démêler
1'«
antique
»
du
«
féodal
».
Comparés
à ces
synthèses
ar-
dies,
les modèles obsolètes
de Bois contribuent
eu
au
développement
de notre
compréhension
e la
réalité
historique.
Traduit de
l'anglais
par
Alain Boureau
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 24/144
Médiévales
1,
automne
991,
p.
17-20
Elisabeth ZADORA-RIO
ESSOR DÉMOGRAPHIQUE, CROISSANCE AGRAIRE
ET
ARCHÉOLOGIE
Les données
rchéologiques
'occupent
uèreplus
d'une
quinzaine
de
pages
dans le
livre
de
Guy
Bois1 mais elles
jouent
un
rôle cen-
tral dans
l'argumentation
e l'auteur
c'est sur elles
-
et
sur elles
seules
-
que reposent
es deux
hypothèses
ui
sous-tendent
'ensem-
ble de la constructioncelle d'un doublement e la densité e la popu-
lation rurale entre e
VIe
et le
Xe
iècle
qui permet
l'auteur d'affir-
mer
que
«
le
gros
de la croissance
démographique
fut réalisé avant
l'an
mil,
alors
que
de 1000 à 1300
la
progression
erait de l'ordre
de 50 % seulement
(p. 165)
;
celle
d'une mise en
place
du
paysage
agraire
ntérieure
u
Xe
iècle,
qui
l'autorise à
«
balayer, pour
le
cas
qui
nous
occupe
ici,
l'idée selon
aquelle
a
croissance
graire
ut vant
tout
l'apanage
du
"Moyen Age"
central. Dès l'an
mil,
les terroirs
étaient
proches
de leur
point
d'achèvement
(p. 178).
La croissancedémographique
À
partir
de
l'analyse
des
chartes,
Guy
Bois conclut à
une den-
sité de
40
habitants u
km2
au début du
Xe
siècle
pour
la
période
du
VIe
au
Xe
iècle,
l
constate
ue
les sources
textuelles ont
d'un
fai-
ble secours et
que
«
seule
l'archéologie
est
susceptible
de
jeter
une
certaine umière ur
a
situation
émographique our
la
période
a
plus
reculée
»
(p. 163).
C'est dans
l'ouvrage
de H.
Gaillard de
Sémainville2
ue
Guy
Bois
va chercher
es données
archéologiques
1. La mutatione l'an mil.
ournand,
illage
âconnaise
l'Antiquité
u
féo-
dalismeParis, 989, p.161-175.espages ndiquéesntrearenthèsesans e texte
renvoientce livre.
2. H. Gaillard
de
Semainville,
es
cimetières
érovingiens
e la cote
halon-
naise
t de
a
côte
mâconnaiseRevue
rchéologique
e
'Est,
e
upplément,
ijon,
1980.
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 25/144
18
dont
il
a besoin.
Nul doute
que
l'auteur
n'ait
été
le
premier
urpris
de la
manièredont son
travail a été détourné.
Son livreest consacré
presqu'entièrement,
n
effet,
une
typologie
es
plaques-boucles
méro-
vingiennes.
Ce n'est
qu'en
conclusion
qu'il
se hasarde à écrire
deux
pages
(sur
un total
de
250)
sur
a densité t la
répartition
e la
popu-
lation. Elles sont
bien
imprudentes
n
dépit
des
précautions
ratoires
dont
il
s'entoure
ainsi
lorsqu'il
évalue
à
150
habitants
a
population
desservie
par
le cimetière
e Curtil-sous-Burnand
ntre e début du
VIe
et
le milieu du
viie
siècle.
L'argumentation,
ue
Guy
Bois
juge
«
convaincante
,
se réduit
la note
340
3
que je
cite
intégralement
« ce chiffre quivautà la populationactuelle de toutela population
de Curtil.
Le
calcul,
discutable,
nous en
convenons,
st
fondé sur les
données
suivantes
700
tombes,
150
ans
d'utilisation,
0
ans
d'espé-
rance
de
vie,
avec correction
orrespondant
l'absence
de restes
d'enfants
de moins de
5-6 ans
».
Il
ne convient
ertainement
as
de
donner cette valuation
plus
de
poids que
ne
lui en accorde son
auteur.
Dans la notice
qu'il
con-
sacre
au
cimetière
e Curtil dans le
même
volume
pp. 26-27),
celui-
ci nous
indique
toutes es
raisons
de la mettre n
doute : la
fouille,
effectuée
ntre
1948 et
1959
par
le
Spéléo-Club
Archéologique
de
Bourgogne, 'a jamais étépubliée seulesdes notesde quelquespagesont
paru.
L'estimationde la duréed'utilisationdu cimetière st fon-
dée
uniquement
ur
les
159
sépultures ui
ont
pu
être datées
parce
qu'elles
contenaient
u mobilier
funéraire.
'étude
anthropologique
n'a
porté que
sur
quelques
squelettes
résentant
es
traces de
patho-
logie
osseuse
le reste
du
matérielosseux semble
avoir été
perdu4.
L'estimation
de
l'espérance
de
vie à
partir
e l'étude
exhaustive 'une
population
inhumée
représente
un
problème
délicat
pour
les
anthropologues
en raison
de la
sous-représentation
abituelle
des
jeunes
enfants.
Que
dire
orsqu'il
n'y
a même
pas
eu d'étude anthro-
pologique
?
Quant
au calcul
du nombre
d'habitants,
l
repose
entiè-
rementsur l'hypothèse nverseà celle que Guy Bois cherchera
démontrer
n
l'utilisant,
puisqu'il
est
fondé sur le
postulat
que
la
population
reste tationnaire6
dans
la
proposition
e H. Gaillard
de
Sémain
ille,
e nombre
de
150 habitants aut
pour
toute a durée
d'uti-
lisation
du
cimetière,
u début
du
VIe
au
milieu
du
VIIe
iècle.
3.
Ibid.,
p.
245.
4.
Ibid.,
p.
27.
5. Cf. C.
Masset,
La
démographie
es
populations
nhumées,ssai
de
paléo-
démographie
,
L'Homme
XIII
4),
1973,
p.
95-131 J.-P.
ocquet
t C.
Masset,
«
Estimateurs
n
paléodémographie
,
L'Homme
XVII
4),
1977,
p.
65-90 C.
Mas-
set,
B.
Parzysz, Démographie
es imetières
Incertitude
tatistique
es stimateurs
enpaléodémographie, L'HommeXXV 2),1985, p.147-154.esanthropologues
sont oinde
partager
es certitudes
e
Guy
Bois
pour
ui 'anthropologie
ermet
e
déterminer
vec
précision
'âge
u
décès
p.
161).
6. C'est
d'ailleurs,
emble-t-il,
n
postulat
névitablen
paléodémographie.
f.
C.
Masset,
La
démographie...
,
art.
it.,
pp.
95-96.
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http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 26/144
19
En
dépit
de la
fragilité
vidente e
l'argumentation
t
du
peu
de
crédit
que
lui
accorde
son
auteur
lui-même,
Guy
Bois la
reprend
son
compte
et franchit n
degré supplémentaire
ans l'escalade : il
passe
insensiblement u nombre
qui
est censé
représenter
a
popula-
tion
desservie
ar
le cimetière e Curtil
une
densitéde
20
habitants
au
km2
p. 165)
sans
paraître oupçonner
Pénormité es deux
postu-
lats
sous-jacents
ce calcul
suppose
en
effet,
'une
part,
que
les limites
de la communede Curtil u
XIXe
iècle sont
directement
éritées 'une
circonscription
erritoriale u
VIe
iècle d'autre
part,
que
toute la
population
de celle-ci
a été inhumée
dans le seul
cimetière ouillé
H. Gaillard de Sémain ille précise pourtantque dans la régionétu-
diée,
comme
c'est le cas
fréquemment
illeurs,
la
plupart
des com-
munes ont
plusieursnécropoles
7.
L'extension des
terres ultivées
À
l'aide des
photographies
ériennes,
Guy
Bois a décelé
quatre
ensemblesde
parcelles
à Lournand.
L'ensemble serait
d'origine protohistorique.
rois
arguments
sont
invoqués
à
l'appui
de
cette
hypothèse
la
présence
de
topony-
mes
pré-romains
le
maillage
des
champs
constitué
de
parcelles
de
formes rrégulièresssembléessans lignesdirectrices ue Guy Bois
compare
aux
champs celtiques
les muretsd'«
âge protohistorique
qui
délimitent es
champs.
Le
premier rgument
e vaut
pas grand
chose. Même
si les
phi-
lologues
retrouvent
es
étymons ré-romains
ans les
toponymes
ités
par Guy
Bois
(«
en boulemin
,
«
en
pertuis-sandon
,
«
en doua
»,
p. 169),
cela ne
signifie
ullement
ue
les
toponymes
ux-mêmes ont
aussi anciens
on
ignore
combiende
temps
un
mot
d'origine eltique
a
pu
être
conservédans la
langue
parlée,
et
donc
engendrer
e
nou-
veaux
toponymes
les
dictionnaires
e
patois
contemporains
ontien-
nentdes exemplesnombreux e tellessurvivances. n admettant ue
l'origine pré-romaine
e ces
toponymes uisse
être
prouvée,
l reste-
rait de toutes
façons
à
établir
eur lien
avec le
parcellaire.
Le second
argument
n'est
guère probant,
et
la
photographie
aérienne
ui
illustre
e
parcellaire
e
type
couvreune
superficie
eau-
coup trop
réduite
pour qu'on puisse
se
faire
une
idée. Contrairement
à ce
qu'écrit Guy
Bois,
les ensemblesde
champs
dits
celtiques qui
ont été
identifiés
nt le
plus
souvent une orientation
t une trame
orthogonale
ssez
régulières8.
uant
à
1'«
âge
protohistorique
des
muretsde
Lournand,
il
reste
à
démontrer.
7. Gaillardde Semainville,p. cit.,p. 174.
8. C.C.
Taylor,
ields n the
nglish
andscape
London,
975
J.
Brongers,
Air
hotography
nd eltic
ields
esearchn the
NetherlandsBerichten
OB,
Neder-
landse
udheden
, Amersfort,
976 F.
Audouze,
.
Buchsenschutz,illes,
illa-
ges
et
campagnes
e
I*
urope eltique
Paris,
988.
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 27/144
20
L'ensemble
I,
constitué e
parcelles
rès
étendues,
ésulterait u
remembrement
édiévalréalisé
par
les moines.
L'absence
d'argument
évite tout
commentaire.
L'ensemble
II,
dans la vallée
de la
Grosne,
serait
gallo-romain
en
raison,
d'une
part,
de son tracé
orthogonal
«
on
y pressent
a main
de
l'arpenteur
omain
»,
p. 172)
et d'autre
part,
de la
présence,
ur
son
emprise,
de deux villae
gallo-romaines.
e
premier rgument
st
insuffisant9.
ans
le
cas
de
Lournand,
en l'absence de
recherches
archéologiques,
bien
d'autres
hypothèses
ont tout aussi
plausibles
les
parcellaires
ssus des
partages
de communaux
l'époque
moderne
sont également rthogonaux t Guy Bois signaleprécisément'exis-
tencede
pâturages
ommunaux
prairies nondables)
de
part
et d'autre
de la Grosne
(p. 73).
Quant
aux
villae
gallo-romaines,Guy
Bois
ne
nous
donne aucune indication ur
leur orientation
i
sur
la
manière
dont elle s'inscrivent
ans le
parcellaire,
eules informations
ui per-
mettraient
'étayer
on
hypothèse.
i la
présence
e villae ur
'emprise
d'un
parcellaire
suffisait
pour
faire remonter elui-ci à
l'époque
romaine,
l
faudrait dmettre
ne
fois
pour
toutes
ue
l'histoire
graire
s'est
arrêtée la
fin
de
l'Antiquité
et
jeter
l'œuvre de Marc Bloch
à la
poubelle.
L'ensemble V est constituéde « clairièresentamant a masseforestièreituéeà l'est de la voie
romaine,
mais il est hautement
ro-
bable
que
l'essentiel
de
l'aménagement sur
des terres
pécialement
lourdes)
soit
à mettre u
compte
des
nouveaux venus
d'origine ger-
manique
»
(p. 173).
Comme
pour
l'ensemble
I,
l'absence
d'argument
rend tout
commentaire nutile.
La seule chose
qui
paraisse
établie,
à
la
suite
de
l'analyse
de
Guy
Bois,
est
que
l'ensemble est antérieur l'ensemble
I,
puisque
es
tra-
ces fossiles
du
premier
ont
visibles
l'intérieur es
grandesparcelles
du second. Cela
ne nous donne aucune ndication
e
chronologie
bso-
lue
: on croit
avoir,
en
effet,
ue
la
pratique
des remembrements
'a
pas prisfin u Xesiècle. Il n'y a donc rien à qui permette e soutenir,
comme e fait
Guy
Bois,
que
«
pour
l'essentiel,
l'ouest
de la Grosne
du
moins,
ce
paysage
est construit
vant le
IIIe
siècle. De
Chevagny
Collonge,
c'est
Rome
que
nous avons sous
les
yeux,
et dans le vallon
qui
s'étire
du
bourg
de Lournand
usqu'à
la
Chaume,
c'est
la
campa-
gne
gauloise
telle
que
la vit César
»
(p. 174).
Rien non
plus qui per-
mette 'infirmer
ni, d'ailleurs,
de confirmer
«
le
modèle
général
(élaboré
e
plus
souvent
partir
e modèles
eptentrionaux)
selon
equel
les
grands
défrichements
t la construction
u
paysage agraire
eraient
l'affaire
de la
période
centraledu
Moyen Age
»
(p. 174).
9. Les recherches
enées
ar
V
quipe
e
Besançonepuis
n certain ombre
d'annéesntmontréue a mise n évidenceescadastresomainstaitmoins ne
affairee
pressentiment
ue
de
filtrageptique.
f. Cadastres
t
Espace
ural ous
la directione
M.
Clavel-Lévêque,aris,
983 G.
Chouquer,
Le
Finage
ntique
et médiéval
,
Gallia
46, 1989,
p.
261-297. oir ussiA.
Ferdiere,
es
campagnes
en Gaule omaine
Paris,
988.
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 28/144
Médiévales
1,
automne
991,
p.
21-25
Maria HILLEBRANDT et Franz
NEISKE
À LA RECHERCHE DE PERSONNES PERDUES...*
L'an
mil
fascine 'humanité.
Raoul Glaber
voyait
en une baleine
un
présage pour
l'an mil
et au
temps
du
millénaire e la
passion
du
Christ
maginait
n tout
événement e
doigt
de Dieu
:
«
Anno
a
pas-
sione Domini millesimo
..
sedatis
nimborum
mbribus,
espectu
ivine
bonitatis
et
misericordie
cepit
leía
faciès
celi ciar
scere.
1
».
Aujourd'hui
es historiens emblent
e la même manière
voir les
yeuxfixés ur le changement e millénaireorsqu'ilsdécriventes rela-
tions sociales et les modèles
historiques.
i
l'on
pense
trouver a clef
des transformationsociales dans une
interprétation
hiliastique,
l
est
légitime
de chercher ne
démonstration
récise
de
la
«
mutationde
l'an
mil
»
dans une démarche
d'historiographie ritique.
Mais si la
preuve
fait
défaut,
a valeur
symbolique
u chiffre
st,
pour
des
pro-
cessus
complexes,
une
explication
ussi
peu
satisfaisante
u'une
apai-
sante
théorie
médiévalede
l'Histoire
qui repose
exclusivementur la
foi chrétienne.
Ainsi
qu'il
a
déjà
été montré
par
Alain
Guerreau2,
Guy
Bois
dans son livre urLournand, méconnu es nouvelles echerchesnter-nationales concernant
Cluny, apporté
des
interprétations
autives t
dénuées
de
preuves
ce
faisant,
l
a
demandé à la
communauté
des
historiens
médiévistes
e croire en
ses
affirmations t ne lui
a
pas
donné les
moyens
de les vérifier.
Les chartes
de
l'abbaye
de
Cluny
constituent
our
Bois une
«
mine d'informations
(p.
20)
dans
laquelle
il
a
choisi,
visiblement
au
hasard,
quelques
individus
et
quelques
familles,
pour
construire
*
Les
pages ndiquées
ntre
arenthèses
ans e texte
envoientu livre e
Guy
Bois, a mutatione l'an mil.
1.
Rodulfl
labri istoriarum
ibri
uinqué
édité t
traduit
ar
John rance
(Oxford
edieval
exts),
xford,989,
ib.
I, 2,
p.
50 . et
ib.
V, 14,
p.
194.
2. Alain
Guerreau,
Lournandu
Xe
iècle histoiret fiction
,
Le
Moyen
Age,
96, 1990,
p.
519-537.
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 29/144
22
de nouvelles thèses concernant
e
développement
de la
société
en
Mâconnais. Ce
procédé
sélectif
e
prend pas
en
considération a
spé-
cificité
e la tradition es chartes.
Bois
n'entre
pas
dans les
problè-
mes
que pose
la rédaction es
cartulaires,
ans
lesquels
un mêmeacte
a été
copié
à
plusieurs eprises.
l
ne connaît
pparemment as
le
pro-
blème de la datation
de
ces
actes,
ni
des corrections
ue
M. Chaume
y
a
apportées3.
On doit donc
poser
la
question
ses tableaux et
ses
diagrammes
ont-ils
raiment
xacts Personnene
peut
e vérifier
uis-
que
Bois
ne donne aucune information ur
les bases
de
ses
«
résul-
tats ».
Sur
quoi repose, par exemple,
'affirmation
ue
les
«
éléments
hostilesà la poussée monastique sont plus forts près 980 qu'aux
autres
époques
(p.
228)
? Un
regard
sur
les
analyses
de l'édition de
Bernard et Bruel montre
u'au temps
de Maïeul
(28)
il
y
a à
peine
plus
d'actes de
werpitio
que pendant
l'abbatiat d'Odilon
(22)
ou
d'Hugues (21).
Si l'on
compare
ces chiffres
la
somme totale des
donations,
on ne constate
aux
environsde
980
aucune montée
des
contestations e
propriété4.
L'identification es individusest
plus compliquée que
Bois ne
semble
e
penser.
Certainesfamilles
nt
trèsconsciemment
ntretenu,
en même
temps,
des contacts troits ussi bien avec
l'évêque
de Mâcon
qu'avec l'abbaye de Cluny,alors que pour Bois ce sont des pouvoirs
opposés,
fondéschacunsurleur
propreentourage
il ne connaît
pas
la
bibliographie
ui
constate,
pour
cette
époque,
la bonne
qualité
des
relations ntre
Cluny
et les
évêques
de Mâcon5. Le
Sendelenus
que
mentionne
Guy
Bois
(p.
103)
n'était
pas
un
simple
clerc,
mais
à la
fois
chanoinedu
chapitre
e Mâcon et moine de
Cluny6
il
est ainsi
un bon
exemple
de la
coopération
entre
l'abbaye
et le
chapitre
cathédral.
Dans
la
partie
du livre
consacrée
à
l'étude
démographique,
ois
essaie d'évaluer le nombre de
«
propriétaires
ur
le territoire e
3. Mauricehaume, Observationsur a chronologieescharteseCluny,
RevueMabillon
t.29, 939,
p.
41-61, 1-89,
33-142
t.31, 941,
p.
14-19,2-45,
69-82
t.32, 942,
p.
15-20,
33-136
t.38,
948,
p.
1-6
t.39, 949,
p.
1-43 Maria
Hillebrandt,
Neudatierungen
on
Urkunden
er
Abtei
Cluny
Münstersche
Mittelalter-Schriften
sous
presse).
4. Barbara .
Rosenwein,
o be the
neighbor
f
Saint eter.
he
ocialmea-
ning f
Cluny
s
property
909-1049
Ithaca, ondres,989,
p.
68.
5.
Hermann
iener,
Das Verhältnis
lunys
u den
Bischöfen,
or llem
n
der
Zeit
eines
btes
ugo 1049-1109)
,
inNeue
orschungen
ber
luny
nd ieClu
niacenser
Joachim
ollasch,
Hans-Erich
ager,
Hermann
iener
coll.),
dité
ar
Gerd
ellenbach,
ribourg,
959,
p.
219-352
Joachim
ehne,
Cluniacenserbis-
chöfe
,
Frühmittelalterlichetudien
11,1977,
p.
241-287
Ulrich
Winzer,
Cluny
et Mâcon u
xe
iècle
,
Frühmittelalterlichetudien
23, 1989, p.
154-202.
6. FranzNeiske, DerKonventesKlosterslunyurZeit esAbtesMaiolus.
Die Namen erMönche
n
Urkunden
nd
Necrologien
in
Vinculumocietatis.
oa-
chimWollasch
um
0.
Geburtstag
edité
ar
Franz
eiske,
ietrich
oeck
t Mech-
tild
andmann,
igmaringendorf,
991,
p.
118-156,
.
150.
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http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 30/144
23
l'actuellecommunede Lournand
»
(p.
161)
et
compte
u
total,
de
915
à
950,
77
«
noms ». Pour le lieu de
Lournand,
l
obtient 9
«
noms
»
ou
«
familles
(p.
162
;
le
sens de ce mot n'est
d'ailleurs
pas
pré-
cisé).
Comme les indications
manquaient
ur la méthodede
décompte
qu'il
a
utilisée,
nous
avons
essayé
de chercher
es bases de ce calcul
et de
vérifier es résultats. Ainsi se sont
dégagées
les
réflexions
suivantes
1) L'espace
chronologique
hoisi
est
arbitraire t
conduità faus-
ser les
résultats,
ar
les chartes
de
Cluny
sont souvent
datées
exclusi-
vement
d'après
le
nom des
abbés,
lesquels
ont exercé
ces fonctions
très longtemps.
2) Compte
tenu de la datation
mprécise
igurant
ans les char-
tes,
il
faut
corriger
a date de deux
chartes
de
cette
poque,
où Lour-
nand
est nommé
la
charte
n°
226,
datée de
«
920
environ a
été
redatée des environs
de l'an mil
par
Chaume et la
charte
n°
947,
datée,
par
Bernard et
Bruel,
de l'abbatiat de
Maïeul,
appartient
n
fait aux
environs
de 950
7
.
3)
Il
n'est
pas
toujours
sûr
que
les
individus
comptés
comme
«
propriétaires
e terres
voisines soient encore
vivants u moment
où
l'acte est
passé.
4) De nombreux ndividusn'apparaissentpas dans les chartes ntant
qu'auteurs,
mais seulement
pour
donner leur consentement.
Appartiennent-ils
ussi au
groupe
des
propriétaires
5)
Pour mieux
compter
e nombre
des
habitants
de
Lournand,
il
n'aurait
pas
fallu
se contenter es chartesde
Cluny,
mais utiliser
aussi les noms du cartulairede Saint-Vincent e
Mâcon.
6)
Qui
est
propriétaire
Lournand,
n'y
habite
pas
nécessairement.
D'ailleurs,
Bois ne
peut pas
établir i
«
maître
Arleiushabite Merzé
ou
Collonges (p. 97).
En
outre,
l
faudrait
prendre
n
considération
si leurs biens consistent n
terres ultivéesou
incultes8.
7)
Sur
la base des données
établies,
à
Münster t à
Dijon,
pour
l'index de l'éditiondes chartesde Cluny9,ont été analysées es char-
tes
suivantes,
ui
mentionnent
es biens sis
à
Lournand
n°
166, 171,
193, 194, 220, 393, 477, 485, 506, 598,
762
et 947. Si
l'on fait le
décompte
des noms des
auteurs
qui
sont de
Lournand,
on
trouve
23
individus.
l
y
a
14
autres
ndividus,
ui apparaissent
omme con-
fronts Lournand d'eux on ne
peut pas
affirmer
u'ils
vivaient
encore entre 915 et 950.
Dans
7
cas,
des
couples
ou un
groupe
de
parents
ont
ndiqués
omme
propriétaires
ndivis Lournand
n°
144,
7. Chaume
cf.
note
)
n° 226
et
n°
947.
8. André
eléage,
La
vie
conomique
t
ociale
e
la
Bourgogne
ans e Haut
Moyen ge Mâcon, 941.
9.
Au
centre
eorges
hevner
our
histoire
u droit
Faculte
e
Droit,
niver-
sité e
Bourgogne,ijon)
t à l'Institut
ür
rühmittelalterforschung
Université
e
Münster),
n
prépare
n ndex
es
ieux,
es
matièrestdesnoms e
personnes
ités
dans
'édition
es chartese
Cluny.
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 31/144
24
194,
393, 477, 485,
506, 598,
762).
Si Ton fait
e
compte
des
familles
(famille
tant
pris
dans
e sensde famille
troite),
n n'en trouve
ue
14.
Aucun
de ces chiffres
ne
correspond
à celui des
29
familles
décomptéespar
Bois.
Et
il
manque
encore une étude des
possibles
relations
de
parenté
ntre es
groupes
d'individus,
tude
qui
pourrait
réduire
u accroître
e nombre
de
«
feux ». De
nombreux
ropriétai-
res ont
des biens
dans d'autres
lieux
on ne
sait
pas
dans
lequel
ils
habitent
cf.
n°
193, 194,
393 et
506).
Ces
réflexions
montrent
quel
point
Bois s'est
peu
soucié de
l'identificationes individus t des groupes.À cette« insouciance ,
il
faut
ajouter
des
erreurs
philologiques10.
ois
pense
ainsi
pouvoir
tenir
pour quantité
négligeable
es
possibles homonymiesp.
162)
;
en
revanche,
il
ne
s'aperçoit
pas
dans
le
décompte
des
«
maîtres
qu'Arleius
et Arleus
(p.
97)
sont
deux
personnes
différentes11.es
méthodes
de travail
révèlentune
totale confusion entre
ndividu et
famille.
D'où
l'impossibilité
our
lui
d'apprécier
es statuts
ociaux
et les
relations
de
parenté.
Ses résultats ont
donc bien
inférieursu
tableau de
la
société
du
Mâconnais,
dressé,
dès
1953,
par Duby12.
Encore un
exemple
pour plaider
la nécessité
d'employer
des
méthodesde travailappropriées la famillede Robertus,sa femmeElena et ses filsAcardus et
Eldeart,
n'a
pas,
comme Bois le
pense
(p.
95),
disparu
de la documentation
près
953 : on la retrouve
lus
tard dans
la même
«
constellation
,
ainsi
qu'on peut
'établir l'aide
des méthodes
développées
à
Münster
pour
la
recherche es mêmes
groupes
d'individus
à travers es
chartes13.
a famille
ppartient
n
effet un
groupe
de
voisins,
qui
habitent
bien dans les environs
de
Lournand
et
que
l'on rencontre
n des combinaisons
hangeantesus-
que
vers
975 14.C'est seulement
n tel contexte
de relations ociales
qui
permet
de
juger
des intentions
t des motivations
ui
inspirent,
lors
de donations
faites
à
l'abbaye
de
Cluny15,
elle
personne
ou tel
10.
Synopse
er luniacensischen
ecrologie/ ,
olf-Dieter
eim,
oachim
ehne,
Franz
Neiske t Dietrich
oeck
(coll.),
éd. Joachim
Wollasch,
Münstersche
Mittelalter-Schriften
9,
Munich,982,
vol Dieter
euenich,
Problemeiner
ro-
sopographie
ufgrund
rüh
undhochmittelalterlicher
uellen
,
in
nformatique
t
Prosopographie
edité
ar
Hélène
Millet,Paris,
985,
p.
76-84
du
même,
Fors-
chungsfelder
ufgrund
er
emmatisierung
,
in
nternational
orkshop
n the rea-
tion
linkage
nd
usage f
arge-scalenterdisciplinary
ourcebanks
nthe istoricalis-
ciplinesGöttingen,
985,
p.
153-161.
11.
Rosenwein,
cf.
note
) pp.
69-72
t
226-228.
12.
Georges
uby,
a sociétéux
xi*
t
xw
iècles ans
a
région
âconnaise
Paris,
971
2e
dition).
13. Cf. es
chartes
°
849,
1202,
286.
14. Cf. es chartes°477,1012, 217, 316.
15. Joachim
ollasch,
Prosopographie
t
nformatique.'exemple
es Clu-
nisiens
tde eur
ntourage
aïque
,
in
nformatique
t
prosopographie,
dité
ar
Hélène
Millet,Paris,
985,
p.
209-218Ulrich
Winzer,
Zum
Einzugsbereich
lunys
m
10.Jahrhundert.
ine allstudie
,
Frühmittelalterliche
tudien
22, 1988,
p.
241-265.
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 32/144
25
groupe,
sans laisser
de
côté les
problèmes
de nature
uridique,
tels
que
ceux du droit à
disposer
de
ses biens16.
Revenons des
problèmes omplexes
de
la
recherche
rosopogra-
phique
à
l'historiographie
e Raoul
Glaber,
dont
'interprétation
'est
pas
sans susciter ussi
des difficultés Bois. Le célèbre
saint confes-
seur Ulrich n'est
pas
originaire
e
Bayeux
(p.
232),
mais de Bavière
(Ulrich,
vêque
d'Augsbourg,
mort n
973).
Le mouvement e la
Paix
de Dieu
peut
sans
doute être
considéré
comme une
«
révolution
quand
on
n'en
prend
connaissance
qu'à
travers
a
phrase
de
Raoul
Glaber citée
par
Bois
:
«
Par toute la
Bourgogne,
les
grands,
les
moyens, es petits s'y rendaient... a voici, la révolution (p. 233).
Pourtant
a
phrase
suivante,
dans le texte de
Raoul,
éclaire ce
que
Bois
appelle
un
«
paradoxe
banal
»
:
«
letanter diere
maximi,
medio-
cres ac
minimi,
arati
cuncti
bedire
uicquidpreceptum uisset
pas
-
toribusecclesie
»17. Ce n'était
pas
la révolution
ue
l'on
cherchait,
mais
l'aide de
l'Église.
Traduit de l'allemand
par
Monique
Bourin
16. MariaHillebrandt,Stiftungenum eelenheilurch rauenndenUrkun-
den esKlosters
luny
,
in
Vinculumocietatis.oachim ollasch
um
0.
Geburts-
tag,
dité
ar
Franz
Neiske,
ietrich
oeck
t Mechthild
andmann,
igmaringen-
dorf,
991,
p.
58-67.
17.
Raoul
Glaber,
Historiaédit. itée
note ),
ib.
V, 14,
p.
194.
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 33/144
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28
de
l'analyse
communément
aite de cette
période
la
dernière
artie
de cet article oncerne
e
problème
e l'économie
du Haut
Moyen Age
et,
à la lumièredes
propositions
vancées
par
Guy
Bois,
je
cherche-
rai à déterminer
uels
ont
été les
changements
éels à
la fin
du
pre-
mier millénairedans
l'Occident latin.
L'esclavage
Premièrement,
'esclavage.
Bois
indique que
les esclaves
qu'il
trouve Lournand au Xe iècle,bien que « casati », installés urune
terre n
groupes
familiaux,
ne sont
pas
des serfsmais
de
vrais escla-
ves
;
ils
étaiententièrement
oumis à la volonté
de leur maîtreet à
ce titre
ppartenaient
la
société
antique, pas
à la société féodale.
Il
ne faut
pas
les
ranger
dans
la même
catégorie conomique que
les
tenanciers
pp. 31-61).
Il tire cette
argumentation
e l'article bien
connu de
Pierre Bonnassie
à
propos
de
l'esclavage
du Haut
Moyen
Age, qui
a eu le
mérite ertaind'insister ur
l'effroyable
raitement
que
subissaient
es esclaves
de cette
poque
et d'en réaffirmer
'impor-
tance dans
leur condition.
Mais Pierre Bonnassie
ne traite
guère
de
leurrôle économique.Sans aucun doute, il y a trèspeu en communentre es
troupes
d'esclavesde l'Italie romaine t les
exploitations
ami-
liales
du Mâconnais
du
Xe
iècle.
Il
y
a eu
de nombreuxdébats entre
les
spécialistes
e
l'histoire
omaine,
es
dernières
nnées,
pour
déter-
miner
quelle époque
les
troupes
d'esclaves
(le
mode
de
production
esclavagiste)
ont cessé
d'être un élément
mportant
de l'économie
romaine. ls
tendent situer
e moment u
plus
tard dans le courant
du
IIIe
siècle.
Ensuite,
ce furent es servi casati
et
des colons
libres
qui
cultivèrent
a
plupart
des domaines de
l'empire
un
gouffre
co-
nomique
ne les
séparait
pas.
Au bout du
compte,après plusieurs
iè-
cles,
les distinctions
égales
entre
ux
s'étaient
encore affaiblies
t
ils
formaient ne vastecatégoriede tenanciers ssujettis, ui peuvent n
quelques
cas
être
appelés
serfs3.
Bien
sûr,
Bois connaît
cet
argument
ondamental
bien qu'il
ne
fasse
pas
allusion au
débat concernant
e monde
romain),
mais
pour
lui des servi
casati sont
essentiellement
ifférents es
tenanciers,
u
IIIe
siècle
comme
au
Xe,
parce qu'ils
n'ont aucun
droit,
du
moins
si
l'on en
juge d'après
les
textes
uridiques.
Je ne
partage
pas
son
point
3. P.
Bonnassie,
Survie
t extinctionu
régime
sclavagiste
ans 'Occident
u
Haut
Moyen
ge
ive-xie
iècles)
,
Cahiers
e
Civilisation
édiévale
XXVIII
1985),
pp.
307-43sur e
débat,
oir
a revueatalane
'Avenç
CXXXI
nov. 989), p.
32-49.
Pouresdiscussionsoncernant'esclavageomain,oir abibliographieans .Wick-
ham,
Marx,
herlockolmes
nd ate
Romanommerce
,
Journal
f
Roman tu-
dies
LXXVIII
1988), p.
183-93
t,
pour
es ervi t es
oloniL. Capogrossiolo-
gnesi
t D.
Vera,
dans
A. Giardina
éd.),
ocietà omana
impero
ardoantico,
,
Rome-Bari,986,
p.
325-447.
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 35/144
29
de vue. Les coutumes ocales
et
les
rythmes
e travail
quotidien
ont
plus
de
sens
que
les normes
égales
abstraites,
out
particulièrement
dans
la relative
écentralisation u
Haut
Moyen
Age.
Bois
ne
prouve
ni
l'absence
de coutume
pour
les tenures
ni
de
facto
celle de
stabilité
pour
les esclaves.
Les
polyptiques arolingiens ndiquent
vec certi-
tude
que
sur les
grands
domaines du
IXe
iècle,
les
tenanciers ibres
et non-libres
vaient
des
types
d'obligations
assez voisins et
que
les
familles
e non-libres taient
ssez stables. Bois
ne
pense pas que
cette
similitude
eut
être
généralisée
ors du cas
spécifique
es terres
oyales
ou
(ex-fiscales)
cclésiastiques cf. pp.
22-3, 37,
41).
Il
en
est
peut-
être ainsi en Bourgogne,bien que ce soit assez difficile savoir. En
tous cas
en
Italie,
aussi bien sur es domainesde
l'Église que
sur ceux
des
laïcs,
y compris
ceux des
petits
notables,
es
plaids
et baux
des
viiic
et
IXe
iècles
montrent lairement
ue
souvent,
les tenanciers
libres
et non-libres
e
peuvent
être
différenciés
ar
leurs
obligations
économiques
la seule distinction enaitde ce
que
les
seconds
étaient
totalementoumis
à la
justice
de leur maître.La différence
ntre ibres
et non-libres
estait
mportante
n
termes la fois
d'idéologie
et de
condition
politique
du libre mais
il
me
paraît
dénué de
sens
de ne
pas
considérer es non-libres
taliens ommedes
tenanciers c'est
pour-
quoi j'ai quelque difficulté admettre 'argumentation e Bois con-cernant a
Bourgogne4.
Bois insiste bondamment ur
e caractère
antique
»
de la Bour-
gogne
du
Xe
iècle.
L'un des
aspects
est
précisément'importance
es
esclaves
par
opposition
aux tenanciers ibres
je
viens de mettre n
doute
que
ce fait
puisse
être
analysé
dans le sens où Bois le souhaite.
Mais
en tout état
de cause
l'importance
es esclaves ne
peut
êtreuti-
lisée comme
le
signe
d'une société
«
antique
»
:
la Gaule du
IVe
iè-
cle,
prise
dans son
ensemble,
comptait
certainement
lus
de tenan-
ciers ibres
coloni) que
le Lournand du
Xe
iècle
dans la
description
qu'en
fait
Guy
Bois,
sans cesser
pour
autant
d'appartenir
u monde
antique. Et que dire de l'Islande du Xe iècle, qui était entièrement
mise en
valeur
par
des
paysans
libres et leurs esclaves5?
Il
y
a là
des
problèmes
vidents
ue
Bois ne résoud
pas.
Les
autres éléments
de son modèle
antique
sont tout aussi
problématiques.
ls incluent
l'idée
de la
ville-parasite ui
se
contentede
prendre
la
campagne
sans
stimuler
e
moins
du monde l'économie rurale la
suprématie
du
système
iscal sur toute autre
relation
conomique
la
suprématie
du
politique,
ui produit
une éliteromaine
n'ayant
d'autre ntérêt
ue
les
gains qui
résultent
e
ses situations
publiques,
et
n'ayant
aucune
4. Voir es
référencesansC.
Wickham,
arly
Medieval
taly
Londres,981,
pp.110-11B. Andreolli t M.Montanari,'aziendaurtensen talia, ologne,
1983 voir ussi
A.
Verhulst,
rticleiténote
.
5. R.M.
Karras,
lavery
nd
ociety
nmedievalcandinaviaNew
Haven, 988,
pp.
80-3.
out
e ivre stunexcellent
xposé
e a
problématique
oncernant
'escla-
vage
médiéval.
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 36/144
30
attention
pour
ses
propriétés
urales
pp.
65-6, 77-8, 126-8,
196-8).
C'est,
il
faut
le
dire,
une
parodie
du monde romain.
Rien
n'y
est
exact,
si ce n'est
l'importance
du
système
iscal ce n'est
même
pas
une
présentation
idèle
des théories e Moses
Finley,
pratiquement
a
seule
source
de
Guy
Bois à ce
sujet.
Rome était
pleine
de
propriétai-
res
fonciers
nthousiastes,
ui,
comme es aristocrates es
temps
féo-
daux,
ne
perdaientpas
tout intérêt
our
leurs
domaines
du
simple
fait
qu'ils
désiraient
ussi
les
avantages
du
pouvoir politique.
Sans
doute n'étaient-ils
as
tous
des
«
managers
très attentifs
e
leurs
domaines
bien
que
certains
'aient
été)
;
mais tous tiraient
rofit
de
leursrentes t certainsmettaient les vendre n réelesprit e système.
Le commerce
omain
était,
out à
la
fois,
complexe
t
ramifié,
'éten-
dant certainement
usqu'aux
paysans,
même
s'il
était
étroitementié
aux
exactions
fiscales,
et même si
peut-être
n définitive
l
en était
dépendant
. Bois
peut qualifier d'antique
le Lournand du
Xe
siècle
s'il
le
souhaite
nous
pouvons
tous
désigner
notre
déal-type
notre
gré.
Mais s'il le
fait,
il faut
appeler
le monde
méditerranéen
e
l'empire
romain
d'un
autre
qualificatif.
La
seconde
remarqueque je
voudrais faire concerne a relation
que Bois établit entre la prédominancede la propriétépaysanne,l'absence de tenanciers
libres)
et la faiblessede l'économied'échan-
ges
du Haut
Moyen
Age
d'une
part
et d'autre
part
a
rapidité
vec
laquelle
la
paysannerie
ibre cesse d'exister
près
l'an
mil.
Bois voit
dans
les libres de
Lournand essentiellement
e
petits
t
moyenspro-
priétaires.
n
général,
l
me semble
avoir
raison
et
les discussions
ui
concernent
ce
point
sont
parmi
les meilleures
pages
du livre
(pp.
63-114).
Elles
s'ajoutent
utilement u
groupe, qui
s'accroît len-
tement,
d'études
concernant
a
paysannerie
t
les notables
de
rang
modeste,
au Haut
Moyen Age.
Mais
il
va
trop
loin. Dans son désir
d'établir
eur
allodialité,
l
soutient
ue presque
aucun n'était tenan-
cier pp. 46-9) et que, d'ailleurs, enure t pouvoirpolitiquefort ont
de
pair,
lequel pouvoir
n'existait
pas
à Lournand au
Xe
iècle.
Inévi-
tablement,
ette
position
ui crée de
graves
difficultés
orsqu'il
cher-
che
à
expliquer
le mode
d'exploitation
des domaines de
Cluny
(pp.
86-9).
Mais
il
suffit
e
remarquer ue
l'exclusion
éciproque
ntre
alleutiers t
tenanciers
n'était
sans
doute
pas
aussi
marquée que
le
prétend
Bois. Dans
l'Italie du
IXe
au
XIIe
iècle,
les
paysans proprié-
taires
pouvaient
aussi
tenir des
terres
d'autrui et louer certainesde
leurs terres
de tierces
personnes
aussi bien
près
des villes
que
loin
6. Il yauraitrop e références
citerci. Pour es
bibliographies,
oir
Vera
etWickham,ote . Dans esthèseslassiques,nclure. GraccoRuggini,cono-
mia società
ell' Italia nnonaria
,
Milan,
961. a
quantité
e
céramique
e
grande
production
ont
ispose
haque
amille
ans ertaines
égions l'époque
u
Moyen
Empire
st nelle-même
e
signe
e a
capillarité
e ce commerce
voir,
ar xemple,
C.
Panella,
dans
Giardina,
ocietà omana
III,
pp.
431-539.
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 37/144
31
à l'intérieur es
montagnes c'est-à-direplus
loin du
pouvoir public
qu'à Lournand)
e
mélange
des alleux
et
des tenures
ouvait
êtred'une
grande
complexité
ans affaiblir a
position
des
paysans
ibres n tant
que
classe7.
Le
lien
que
Bois
fait entre a
survie
de la
paysannerie
ibre et
l'absence
de marché
pp.
75-83,
142-3)
n'est
pas plus opératoire,
du
moins
comme
proposition
ondamentale e la
logique économique
du
Haut
Moyen Age
: encoreune
fois,
en
Italie,
e
«
marchéde la terre
pouvait
être extrêmement
omplexe,
au
XIe
iècle et
assurément
lus
tôt,
sans
conduire e moins
du
monde à
l'expropriation
es libres.
Il est important e reconnaître ue, dans un petitvillage,où que ce
soit dans
l'Europe
de l'an
mil,
l'existencede relationsfondéesexclu-
sivement ur
le
«
marché
,
que
ce soit
pour
les denrées
limentaires
ou sur le terrain rès
différent e la
propriété
oncière,
st
à
peu près
inconcevable.
Tout le monde connaîttout le monde toute vente
ou
échange
-
dans un
tel
cadre,
la différence ntre
es deux est
mince,
comme est
mince celle entre es ventes
en
argent
t en
nature)
com-
porte
un
élément ocial
autant
qu'une
valeur
économique.
Si
les libres
ne
sont
pas
menacés,
aucune ventene viendra ffaiblir eur
position,
car ils
n'ont aucune raison de
réduire,
contre eur
gré,
le fond de
terresdont ils disposent. ls peuventvendre un champ à un ami etutiliser e
l'argent ou
d'autres
ressources) our
en acheterun autre
en
Italie,
ils
le font visiblement vec désinvolture8.
Mais,
d'un
autre
côté,
s'ils sont sous
une
menace,
économique
ou
politique,
ls vont
finir
ar perdre
eur
terre,
de toutes
façons,
par
recommandation,
i
ce n'est
pas
par
vente. Les discussionsde Bois sur l'effet
dissolvant
de l'introduction
e la vente ne me
convainquent
ni
par
les
pièces
à conviction
u'il
apporte
ni
par
raisonnement les
ventes
ne
sont
probablement as
une nouveauté à la
fin
du
Xe
iècle et
elles
n'ont
pas
non
plus
dû
affaiblir
es libres.
Par
l'effet
globalisant
de tout son
argumentairé propos
de
l'oppositionentre antique» et « féodal», Bois est conduit à affir-
mer
que
les environs
e l'an mil
constituente moment ù a
disparu
de toute
l'Europe
la
propriété
ibre
cf. pp.
64,
209-10,
244-6).
Sui-
vant es
arguments ue je
viens de
développer,
l
ne
peut pas
en avoir
été ainsi.
En
Toscane,
la
paysannerie
llodiale
survit rès
générale-
ment,
pendant
toute la
période
centraledu
Moyen Age,
à côté
des
domaines
de l'aristocratie
lesquels
sont eux-mêmes
éographiquement
très
morcelés).
Ce ne fut
pas
le
cas
partout,
bien
sûr ainsi
dans
la
majeure
partie
du Latium de
Toubert,
par exemple,
a cassure fut
beaucoup plus aiguë.
Dans les formesde
répartition
e la
propriété,
7. E. Conti, a formazioneella trutturagraria odernael ontadoioren-
tino
I, Rome,
965
C.J.
Wickham,
hemountainsnd the
ity
Oxford,988,
pp.
225-68.
8.
Conti,
ormazione
pp.
142-9,
12-7
Wickham,
Venditei
terra mercato
della erra
n
Toscana
el
ecolo
XI
»,
Quaderni
toriciXXII
1987),
p.
355-77.
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 38/144
32
les différences
égionales
ont
immenses,
n
Italie comme en France.
L'introduction es taxes
banales,
exigées
de
tous les habitants
d'un
territoire autre
aspect
de
l'image
que
Bois donne de la
«
mutation
féodale
(sur
ce
point,
u
moins,
l
n'est
pas
iconoclaste)
fut
beau-
coup plus générale,
n France comme en Italie
ici,
elle
apparut
dans
la
plupart
des cas aux environs
de l'an mil
(bien
que
dans
certaines
zones,
comme a
Toscane,
il
faille retarder e
changementusqu'aux
alentoursde
1100).
Mais
il
s'agit
là
d'un
phénomène
out à fait dif-
férent
u destinde
la
petitepropriété
t
il
n'est
pas incompatible
vec
un réseau
complexe
du
mode
de détentiondu
sol9. Bois
glisse
trop
facilement e l'un à l'autre comme d'autres déjà l'ont remarqué,
si la
petitepropriété isparaît
Lournand,
ce
n'est
probablement
as
à
cause
de la mutationféodale et d'un
système
ocial
associé
à la
seigneurie
anale et à l'aristocratie
militaire,
mais
plutôtpar
suite
de
l'attraction
emarquable
t
atypique qu'exerçait
'un
des
plus presti-
gieux
monastères
e toute
l'Europe,
monastère
ui
se trouvait itué
à deux kilomètres.
On voit ci
apparaître
'une
des faiblesses
majeures
de la méthode
de Bois : l'absence de tout élément
de
comparaison.
l
ne cite
prati-
quement
rien
à
l'exception
de
quelques
travaux oncernant a
France,
et encore bien peu. Je m'étonneque l'auteur d'un livre aussi nuancé
que
celui
qu'il
a consacréà la Normandiedu Bas
Moyen
Age
ait
pu
être ussi insouciant
es différences
égionales.
l
est
parfaitement
égi-
time de vouloir
généraliser partir
d'un seul
exemple
étudié en
pro-
fondeur c'est
même
trop
rarement e
cas. Mais la seule voie
pour
le faire
demeure a
comparaison
vec d'autres
analyses, par exemple
celle de Fournier sur la
proche
Auvergne
ou celle de
Davies sur
la
marche
bretonne
l'une et l'autre eussent
été très
profitables
Bois
pour
la
généralisation
de ses
idées,
mais
il
ne cite ni
l'une
ni
l'autre10.
Cependant
la restriction es
perspectives
la France est
encore
plus grave
Bois
pousse
ici à l'extrême a
croyance
apparem-
ment)communeà de nombreuxhistoriens rançaisque l'histoirede
l'Europe
est
en
réalité
une histoirede la France et
que
rien d'autre
ne mérite
'être étudié.
À
la
page
270,
l'Angleterre
t la Flandre sont
simplement
itées
pour
être exclues
de l'une
des
propositions lobali-
santes,
à
titrede
contre-exemples
c'est l'une des
rares fois
où
quel-
que pays
extérieur
la France est mentionné.
ans
ce
domaine,
Bois
9.
Voir,
ar
exemple,
.
Tabacco,
Egemonie
ociali
struttureel
potere
el
medioevo
taliano
Turin, 979,
p.
196-204,
40-5
H.
Keller,
Adelsherrschaft
nd
städtische
esellschaft
n
Oberitalien
9-12
ahrhundert
Tübingen,
979,
p.
147-96
C.
Violante,
La
signoria
'territorialeome
uadro
elle trutture
rganizzative
el
contado ella ombardiael ecolo II», dansW. ParavicinitK.F.Wernereds),
Histoire
omparée
e l'administration
iv'-x
ili*
iècles)
Munich,980,
p.
333-44.
10.
W.
Davies,
mallworlds
Londres,
988 G.
Fournier,
e
peuplement
ural
en
Basse-Auvergne
urante Haut
Moyen-
ge,
Paris,
962 voir ussi esréférences
dans
Verhulst,
rt.
it.,
note .
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 39/144
33
est du même bord
que
les
historiens
raditionnels u
régime
doma-
nial,
historiens
u'il
ne
cesse
de
critiquer
ils
font a
même erreur
celle de
prendre
eur
propre
space,
sans autre
discussion,
omme
typi-
que
de
la moitié du continent.
Le Haut
Moyen
Age
La
manière
dont Bois situe a fracture ux
environs
de
l'an
mil
me
semble
exagérée.
Plus
précisément,
e
besoin de
placer,
autour de
cettedate, une mutation, u une révolution, ui bouleverse ous les
aspects
des relations
conomiques,
sociales et
politiques,
me
semble
excessif.
Le Haut
Moyen Age
est difficile
caractériser à tous les
points
de vue
il
n'est évidemment
as
analogue
au monde
«
féodal
»
d'entre
le
XIe
et le
xnic
siècles.
Récemment,
iversestentatives nt
voulu
reconstruire
ne théoriede cette
période,
certaines
out
à fait
iconoclastes,
comme
celle
des théoriciens llemands des
Königsfreie
selon
lesquels
l
n'existait
as
de
paysan
libre ou bien
l'affirmation,
par
le
groupe
d'historiens
ui
gravite
utour de Durliat et
de
Magnou-
Nortier,
ue
le
système
iscal de
l'Empire
romain a
survécu la
fin
du mondecarolingien, omme 'esclavagisme elon la théoriede Bois.
Ces révisionsradicales
sont d'autant
plus
tentantes
ue
les
preuves
manquentpour
cette
période
à l'intérieur e
certaines
imites,
ha-
cun
peut
affirmere
qu'il
veut. Il
n'est
pas
sans
significationue
cer-
taines
de
ces
théories herchent étendre e monde
antique usqu'en
900
ou
mil cet incommodeHaut
Moyen
Age peut
ainsi tout à fait
cesser
d'exister. Je dois avouer
que lorsque j'observe
des iconoclas-
mes de
ce
type, e
me
sens,
à
l'
encontre e
mes
opinions
nstinctives,
de
plus
en
plus
convaincude la valeur des historiens
raditionnelsels
qu'Alfons Dopsch, qui,
somme
toute,
connaissait fort
bien
cette
période.
Je ne vois aucune raison
de
changer
mon
point
de vue :
pour
moi, le mondemédiéval, t notammente « mode de production éo-
dal
»,
a commencé dominer n
Europe
Occidentale
à
partir
de la
chute de
l'Empire
romain. Mais
que
le
Haut
Moyen
Age
soit diffé-
rent
et
qu'il
doive être
compris
dans
ses
propres
termes,
différents
de ceux du
XIe
ou du
xiiie
siècle,
ne fait aucun doute
et
je
suis sûr
que
sur ce
point Guy
Bois
a tout à fait
raison cette
période
a une
logique
économique
et
politique
différente e celle
qui
l'a
suivie. Ce
ne fut
pas
seulement
e
parent
pauvre
du
Moyen Age
central,
une
époque
où on aurait
essayé
de mettre u
point
le
féodalisme
ans
y
parvenirparfaitement.
ien
plutôt
cet
âge
s'est
développé pendant
longtemps,
uivant
ses
propres ignes
de force.
Il
ne faut ni
abolir
le Haut Moyen Age ni le redéfiniromme non médiéval mais il a
assurément esoin
que
soit
rebâtie une
théorie
qui
le
définissedans
des
termes
propres.
Peut-êtrea meilleure oie
d'approche
erait-elle e
séparer
e
poli-
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34
tique
de
l'économique.
Il
est évident
que
les deux
sont étroitement
liés mais
il
n'est
pas indispensable
e
les considérer omme
une seule
et même
chose. Dans
le domaine
politique,
s'est
produite
ncontesta-
blement
une transformation l'échelle de toute
'Europe
occidentale
au cours du
XIe
iècle, ou,
dans
quelques
cas,
un
peu auparavant
ou
un
peu plus
tard. Le
phénomène
été
largement
iscuté,
notamment
parmi
es historiens
rançais,
uivant es traces de Marc
Bloch.
C'est
peut-être
ans
l'articlede Pierre
Bonnassie
concernanta
France méri-
dionale et
l'Espagne qu'on
en
trouve
'analyse
a
plus
précise11.
our
l'essentiel,
cette transformationéside en la
fin
de
l'ordre universel
carolingien ui s'exprimait n un réseau de droitspublicset d'enga-
gements
ui
liaiententre
ux tous les niveaux de la
société
ibre,
des
paysans usqu'aux
aristocrates
et qui
était,
du
moins en ce
qui
con-
cerne
'idéologie,
en
partie
héritédu monde
antique,
non
sans avoir
des racines
tout
aussi fortesdans
l'idéologie germanique).
Cet ordre
universel
fut
remplacé par
un
réseau,
de
nature
beaucoup plus pri-
vée,
de liens de
dépendance
et des
pouvoirs
ocaux
dominés
par
une
strate
ristocratique
militarisée,
ui
était
désormaisnettement
éparée
de la classe
sujette
des rustici.
Ce
monde nouveau de
dominations
locales et
privées
tait,
bien
sûr,
celui des
relations
féodo-vassaliques
et de la seigneurie anale, ce qui expliquecomment ette ransforma-tion a été
transposée ar beaucoup
d'historiens n un début du « féo-
dalisme
». L'État dont
les
vestiges
en tant
qu'institution
ublique
avaient à
peu près disparu,
allait devoir être
reconstruit ur
la
base
de ces nouvelles relations
privées.
En
gros, j'accepte
volontiers
ce
modèle.
Il
provient
surtout
d'exemples
français,
mais on le rencontre
ussi en
Espagne
(comme
Bonnassie 'a
montré)
t en
Angleterre
bien
que
l'État,
malgré
a
pri-
vatisation,
soit
demeuré
ort)
t certainementussi en
Italie.
En
Ita-
lie,
la transformation été moins soudaine et
moins violente elle
a
pris
deux
siècles,
de 900 à
1100,
pour
s'accomplir
et,
comme
e
l'ai déjà dit plus haut, a rarement ntraînéune expropriation e la
paysannerie,
omme ce fut e
cas souvent de l'autre
côté des
Alpes
(la
discussion
emblématique
st,
sur ce
point,
celle de
Bonnassie
à
propos
de la
Catalogne).
En
Italie,
l'importance
e
la vie urbaine se
prolongeait,
t
elle
agit
comme un élément
médiat,
qui
contribua
maintenir
lus
d'éléments
de
continuité
peut-être ue
dans aucune
autre
région
de
l'Europe
à
l'exception
e
l'Angleterre.
n
fait,
n
Ita-
lie,
la relative
enteurde la transformation e
conduit à éviter
des
termes els
que
mutation,
t encore
plus
révolution,
our
décrire e
phénomène
il
n'a
pas
été aussi brutalet n'a
pas
entraîné es
mêmes
ruptures u'en
France. Il
y
a d'autre
part
un
autre élémentde conti-
nuité,qui, bienconnu,ne doitpourtant as être ous-estimé la poli-
li. P.
Bonnassie,
Du
Rhône la Galice
genèse
t
modalitésu
régime
éo-
dal
,
dans tructures
éodales
t
éodalisme
ans 'Occident
éditerranéen
x'-xiw
iè-
cles),
Rome, 980,
p.
17-44.
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36
IVe
iècle
(par
exemple).
La chute de
l'Empire
romain au
Ve
et au
VIe
iècles
mporta,
'ailleurs,
vec elle la forme a
plus
vaste d'extrac-
tion à
grande
échelle des excédents c'est-à-dire
'impôt
foncier.
De
nombreux
aysans
demeurèrent es
tenanciers,
épendants
du
maître
de la
terre,
et bien souvent
même
assujettis
à lui
;
mais
beaucoup
d'autres
réussirent,
ors des crises
politiques que
furent es invasions
germaniques,
quitter
eurs anciens maîtres
t à maintenir
ne cer-
taine
ndépendance
is-à-vis es nouveaux. ls conservèrenteursexcé-
dents,
au lieu
de
les abandonner
entre es mains des aristocrates u
de
l'État.
Mais
le
système
omplexe d'échanges
du
monde romain
dépendait n définitivee la demande de l'aristocratie t du fisc,non
de
celle des
paysans.
Les nouvelles
onditions
ui régnaient
irent is-
paraître
e
système
n de nombreuses
égions.
Habituellement,
es
pay-
sans,
bien
que
désormais
plus prospères,
ne
purentplus acquérir,
en
échange
de leurs
excédents,
des
produits
rtisanaux,
inon de fabri-
cation
très
ocale.
Que
pouvaient-ils
aire? Mieux
manger,
u
moins
travailler. ster
Boserup,
économiste
u
développement,
faitremar-
quer
en
1965
que
les rotations
iennale ou triennale
xigent
es
pay-
sans
beaucoup plus
de travail
qu'une
économie
extensive
longues
jachères c'est-à-dire
n
défrichement
ériodique
du boisement u du
maquis, souventpar le feu,suivi de deux ou trois saisons de culture
intensive,
uis
d'un
long abandon).
Elle
remarqua que lorsque
cesse
sur
une
paysannerie,
ù
que
ce
soit
dans le
monde,
le
poids
de la
pression
émographique,
l
peut
arriver
ue
soient
omplètement
ban-
données
es formes raditionnelles
e rotationdes cultures. es
argu-
ments
valent tout aussi bien
pour
la
pression
exercée
par
le maître.
Bien
que
l'on ne
puisse pas,
autant
que je
sache,
prouver
ue
les
pay-
sans
du Haut
Moyen Age
ont abandonné les rotationsde
culture,
l
n'en
est
pas
moins clair
-
il
y
a
longtemps
ue
des historiens 'ont
remarqué
-
que
le Haut
Moyen Age
a connu un lien
particulière-
ment
profond
et
organique
entre
'agriculture
t les
espaces
boisés
omniprésents des espaces boisés qui se sont étendus dans certaines
régions,
sinon dans
toutes,
depuis l'époque
de
l'Empire
romain13.
Cette bestiale
Arcadie était une
authentique
ivilisation
e
paysans,
bien
que probablement
euls les
propriétaires
ibres,
ou bien
les
pay-
sans ne connaissant
ue
des liens
de
dépendance
ssez limités
du type
de
ceux
qui
existaient ur certaines
erres
oyales)
aient
pu
en
profi-
ter les
tenanciers,
ibresou
serviles,
vaient été condamnés
la
sim-
plicité
matérielle e
l'économie du Haut
Moyen Age
et avaient dans
le même
temps
perdu
aussi leurs excédents.
13. E.
Boserup,
he onditions
fagriculturalrowth
Londres,
965. es
argu-
mentsece
paragraphe
ont
ris our artie
ans
European
orests
n
he
arly
iddle
ages landscapend and learance,SettimaneistudioXXXVII, 990,p.479-548.
Je iens
ompte
e la discussionvec
Miquel
arceló.
'affaiblissement
rès
marqué
desrelations
aître-tenanciereconstitue
as
une lternative
la
croyance
ommune
d'un croulement
émographique
ux alentoursu
vie
iècle mais
l
rend
eut-être
l'argument
émographique
oins
écessaire.
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
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37
J'essaie
de
construire ne
argumentationogique
mais,
bien
sûr,
en l'absence
de
preuve
solide et dans le court
espace
dont
e
dispose,
ce
qui
veut être
concision
peut apparaître
chématisme
u
lecteur,
n
particulier
u lecteur
qui
ne
partage
pas
mes axiomes.
(C'est
d'ail-
leurs
l'expérience
de
Bois
: on ne
peut apprécier
a
rigueur
de
son
analyse,
si on
n'accepte pas
ses
points
de
départ).
Mais
il
faut
qu'il
soit
clair au
moins,
que
même un monde
caractérisé
ar
une
appa-
rente
pauvreté
matérielle
eut
avoir
sa
propre ogique
économique
et le
plus
plausible
est
que
cette
ogique
soit
celle de l'autosubsistance
des familles
paysannesprises
ndividuellement,
u des
communautés
paysannes, ssezmal (ou peut-êtremêmepas du tout)reliées d'autres
groupes
ociaux dans leurs
échanges conomiques.
Ce schéma
est sou-
vent
nterprété
omme a
preuve
de la
décadence
économique
du Haut
Moyen Age
;
je préférerais
e
voir
comme
onctionnel
ans
un
monde
de
paysans
subsistant
n
(relative)
ndépendance
et ne
signifiant
n
aucun
cas nécessairement
une
condamnation de leurs
modes
d'existence.
Cette fonctionnalité
ose
cependant
n
problème que peut
signi-
fierdans une telle société a croissance
conomique
Nous nous heur-
tons ici à de plus grandesdifficultés. ois voit la croissanceagraire
comme le
produit
direct de cette société de
paysans indépendants
libérés
e leur
sujétion,
es
paysansproduisent
lus,
a
population
dou-
ble,
défriche
pp. 161-93).
Il
me semble
manquer
de
preuves pour
étayer
ussi bien l'accroissement
émographique ue
le défrichement
mais
-
c'est encore
plus important je
ne suis
pas
sûr
que
ce soit
ce
que
les
paysans
vont
penser
d'eux-mêmes omme la solution
qui
leur
apporte
es
plus
grands vantages.
l
faut
poser
a
question pour
qui
la
croissance
Après
une
période
nitiale
pionnière
,
le défri-
chementde la terre c'est-à-dire a réduction
permanente
es res-
sources
des bois
qu'implique
a
culture,
plus grande
chelle,
de
zones
arables ou de vignobles ne constituepas une croissancequi pro-
fite aux
paysans, qui
devront ravailler
lus
dur tout en
voyant
se
réduire 'éventail
de
leurs ressources limentaires c'est aux
seigneurs
qu'elle profite.
A
priori
on
pourra
arguerque
le
défrichement
ysté-
matique
est
le
signe
du
retour e la
pression eigneuriale
ur es famil-
les
paysannes
t
qu'il représente,
on
pas
tant une
croissance cono-
mique, qu'un
renforcemente l'insistance vec
laquelle
furent rra-
chés les
produits
des terroirs ultivés
il
était ainsi
plus
facile
de cal-
culer et
d'exproprier
es excédents.On
pourrait
outenir
ue
l'essor
économique
réél
qu'a
connu
le
Moyen
Age
central,
e ne fut
pas
le
mouvement
es
défrichements,
ais
l'étape qui
le
suivit,
e
retourde
l'échange interrégionales produits gricoles et ceci a constitué n
processus
ent et
hésitant,
ommençant
peine
à la
période
carolin-
gienne
et
qui
ne s'auto-entretint
as jusqu'au
xiie
siècle
et
même
au-delà.
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 44/144
38
C'est au cours
de la
période
carolingienne,
me
semble-t-il,
ue
le
sort
se
retourna ontre a
paysannerie ndépendante.
lus
précisé-
ment,
a croissancedu
commercemontre
u'aux
environs e 800
des
excédents
ommencent
êtreentraînés
lus
loin et ce futcertainement
le faitdes
seigneurs, as
celui
des
paysans
la demande
royale
t aris-
tocratiquepermit
e
développement
e
grands
ports
tels
que
Dores-
tadt ou les industries
e la
poterie
dans les
pays
rhénans14. a
légis-
lation
royale
montre
ue
les libres taientdésormais ur
a
défensive
les rois cherchèrent
ainement les
protéger
e l'aristocratie. récisé-
ment,
a
stabilité
u
système olitique arolingien,
ien
que
«
public
»
etreposant ur es obligations es libres, utorisait'aristocratieycom-
pris,
naturellement,
'Église)
à accroître es
terres ux
dépens
de la
paysannerie
ans
granddanger.
l ne faut
pas
en avoir
une vision
po-
calyptique
il
ne
s'agit
que
des
prémices
d'un
processus,qui,
même
en
France,
n'atteint on
plein développement u'après
l'an mil.
Mais,
me semble-t-il
lausible,
c'est vers
800
au
plus
tard
que
l'on
peut
de
nouveau
parler
d'une
logique aristocratique
ans l'ensemble
de
l'éco-
nomie
européenne
ccidentale d'un
système
conomique ui
n'est
pas
dominé
par
la subsistancedes
paysans
mais
par
la
rentefournie
par
l'agriculture
t
par
un ensemblede relations
politiques
fondées ur
le
partage ntre es aristocrates e cetterente. Ce système évidemmentco-existé vec l'économie
paysanne
u vncsiècletoutaussi
bien,
mais
il
n'avait
pas
encore
l'hégémonie
ur
elle.)
À
la lumièrede la nou-
velle
logique
que je
viens
d'indiquer,
e
défrichemente terresdeve-
nait
avantageux
et
l'échange
commercial
onstituait ne croissance.
Résultat
de cette ente
transformation,
'aristocratie
ouvait
atteindre,
après
'an
mil,
une
position conomique
t
politique
elle
qu'elle
n'avait
plus
besoin
de l'ordre universel
arolingien.
Il
s'agit
naturellement
'hypothèses,
rièvement
xprimées
t
que
je
ne
puis développer
ci.
Malgré quelques points
ommuns,
lles diver-
gent
quelque
peu
de celles de
Bois,
même
si elles sont
exprimées
ous
la même forme bstraite. l faudra encorebeaucoup de travaux t de
nombreuses
ynthèses
microrégionales our
pouvoir
passer
du schéma
abstrait la situation oncrètedes années 500-1000.
Jusqu'alors,
es
généralisationsconomiques,
elles de Bois commecellesde tout
autre,
seront
rovisoires.
'est le réelmérite e Bois d'avoir
nsisté ur 'auto-
nomie
économique
de la
paysannerie
u Haut
Moyen
Age. Cependant
son besoin de
repousser
ous les
changements
ociaux de cette
poque
à la
période
de la
«
mutationféodale
»
l'a
laissé,
pour reprendre
a
proprephrase,
u
«
milieudu
gué
»
(p.
275).
Il
lui faudra
rompre lus
fermementvec
le
pouvoirglobalisant
e cettemutation
vant
qu'il
ne
réussisse tenir n maintoutes es
complexités
u
mondehaut médiéval.
Traduit de
l'anglais par
Monique
Bourin
14.
Voir,
par exemple,
.
Hodges,
Dark
age
economics
Londres, 982,
pp.
151-61J. .
Devroey,
Réflexions
ur 'économiees
premiersemps
arolingiens
(769-877)
, Francia, II, 1986,
p.
475-88.
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 45/144
Médiévales
1,
automne
991,
p.
39-46
Pierre BONNASSIE
MÂCONNAIS,
TERRE
FÉCONDE
*
La
mutationde l'an
mil
Un livre
neuf,
mportant,onique.
Meurtrier
our
les idées
reçues,
fécond
pour
la recherche
raie. J'ai
déjà
dit à
Guy
Bois
tout le bien
que je pensais
de son travail
il
attend sans doute
aujourd'hui
de
moi autre chose
qu'une répétition
'éloges. Ayant
donc très claire-
ment affirmémon accord sur sa démarche, a méthode et - pour
l'essentiel
ses
conclusions,
e préfère
ci,
en
suivant
point par point
son
livre,
soulever
es
problèmes ui
méritent,
mon
sens,
une dis-
cussion
de fond.
L'observatoire
Lournand
Il est
excellent,
xceptionnel
même
par
certains
spects,
médio-
cre
par
d'autres.
Voici un terroir clairé
dès le
Xe
iècle
par
une
pro-
fusion
de chartes.
L'auteur a
pu apprendre
en connaître
presque
un à un les habitants s'ils se présentaient lui, il pourrait es saluer
de
leur
nom,
s'enquérir
des nouvelles
de
leurs
proches,
eur deman-
der
quel
champ
ils
vont
bêcher,
quelle vigne
vendanger.
Familiarité
rarissime.
Mais
voilà le hic
:
cette
extrême bondance de
la
documentation
ne
s'explique
que par
la
proximité
mmédiated'un monastère
t de
quel
monastère
Cluny
est
à
quatre
kilomètres. ournand n'est
donc
pas
«
un
village
presque
anonyme...
qu'aucune
particularité
e dis-
tingue
(p.
14).
La
présence
massive
de
Cluny
en a forcémentnflé-
chi l'histoire
Guy
Bois
en est conscient
p. 215),
mais
il
ne mesure
pas toujours combien,
au moins sur certains
points,
sa
documenta-
tion est biaisée. Un seul exemple celui du château de Lourdon qui
*
Les
pages
itées
ntre
arenthèses
envoient
u
livre e
Guy
Bois,
La muta-
tion e l'an
mil.
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40
domine
le terroir.On le
voit,
impressionnant,
ur
la
couverture u
livre,
mais
il
ne
réapparaît u'au chapitre
V,
et
seulement
our quel-
ques pages.
Ce silence a
une
raison c'est
que
le
rapport
château-
village
n'a
pas
été
ici,
comme
partout
ailleurs,
e
rapport premier,
brutal,
mmédiat.La forteresse
ppartient
ux moines et les milites
qu'ils
y
installent emblent
ens
bien corrects
semblent,
mais
qu'en
savons-nous
Cluny
éclaire
Lournand,
mais occulte Lourdon
pourquoi
?
Une société esclavagiste
Oui,
cent fois
oui,
les
servi de Lournand
sont
bien
des esclaves.
Guy
Bois a raison
d'enfoncer e clou :
il
ne faut
pas
tricher vec les
mots. Toutes les thèses
récentes
onfirment,
égion par
région,
cette
longue
survie
de
la servitude
ntique pendant
tout le Haut
Moyen
Age1.
Ceci
dit
-
et c'est
l'un
des
problèmes
fondamentaux est-on
pour
autant
encoreen
présence,
n l'an
mil,
d'un
régime sclavagiste
L'esclavage
est-il
oujours
cettedate le
«
pilier
du
système
ocial
»
?
Guy Bois croitpouvoir e démontrer,e suis beaucoup plus réservé.
Certes,
es esclaves
représentent
n
peu plus
de 15 % de la
popula-
tion active de
Lournand,
certes ls
jouent
sur certainsdomaines
sur-
tout les
propriétés
moyennes )
un rôle encore
important.
Malgré
tout,
le déclin de
l'institution,
ue
Bois semble
mettre n
doute,
me
paraît
au
Xe
siècle
bien avancé.
L'esclavagisme, depuis plusieurs
iè-
cles,
a subi de sérieux
coups
de boutoir des
crises
profondes je
crois l'avoir
dit d'ailleurs
-
l'ont
gravement
ffecté diverses
po-
ques
(aux
ive-ve
iècles,
au
vne
et au début du
vnie
et à nouveau à
partir
du dernier iers
du
IXe
iècle).
De
rafistolage
n
rafistolage,
l
a survécu
mais
il
n'est
plus
que
l'ombre
de lui-même.
À
partir
de
950, c'est l'agonie : si en l'an mil il se maintient ncoretant bienque
mal en
Mâconnais,
il
a
disparu,
totalement u
quasi
totalement,
u
Latium,
de la
Lombardie,
de
l'Auvergne,
u
Languedoc
et de
la
Cata-
logne.
Le fait
capital
me
paraît
être,
à
l'inverse,
'émergence com-
bien
fragile,
mais
spectaculaire)
'une société
paysanne
ibre ce
que
Giovanni Tabacco
appelle, pour
l'Italie,
un
«
mouvement e libéra-
tion
spontanée
. S'il
y
a 15
%
d'esclaves
à
Lournand,
'est
que
85
%
des
paysans
sont libres ils
le sont
presque
à
100 °/o
ur
les
rivesde
la Méditerranée.
On
s'achemine
à
grande
vitesse vers un
régime
de
liberté
paysanne généralisée.
Évolution
nacceptable,
candale intolé-
rable
pour
la classe dominante
Adalbéron
nous
parle
d'un
monde
à l'envers).Les grandsvont remettre e l'ordre et de quelle façon
1.
Il
faudrait
outeses iter. titre
'exemplearactéristique,
oir
elle e Chris-
tian
auranson-Rosaz,
'Auvergne
t ses
marges
u
vm
à
la
fin
du xi'
iècle la
fin
du
monde
ntique
Le
Puy-en-Velay,
987
en particulier,p.389-396).
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41
Il ne leur faudra
guère
plus
de
trente
ns
pour
inventer e
servage
et
y
soumettre
ne
grandepartie
de ceux
-
pauvres
nnocents
qui
avaient
pu
se
croire ibres. Un hiatus dans l'histoirede la servitude
peut
sembler
nvraisemblable
il
explique
seul à
mon
sens
mais Duby
l'a
déjà
dit mieux
que moi)
le déchaînementde la révolution
féodale2.
Mais
qu'on
ne se
méprenne as.
Même
si
on ne suit
pas
exacte-
ment
Guy
Bois dans sa
chronologie
e la
fin
de
l'esclavagisme,
l
faut
lire et relire
e
chapitre.
On
y
trouverabien des
éclairages
nouveaux
sur
ce
que
Marc
Bloch
appelait
«
l'essence
profonde
e la servitude .
Et aussi sur a place des esclavesdans le processusd'expansion graire
du
Haut
Moyen
Age.
Je
relève à
ce
sujet
(p.
40)
une
observation
importante.
u strict
ontrôle xercé
par
les maîtres ur les
familles
serviles
découle
qu'on
ne trouve
amais
qu'un
seul
couple
d'esclaves
par
tenure.
Or,
contrairement
une idée
courante,
ces
ménages
sont
féconds trois enfants
urvivants n
moyennepar
couple.
Si
un
seul
de ceux-ci reste sur
la
tenure,
que
deviennent es autres?
Vraisem-
blablement hassés
par
le
maître,
qui
n'a
que
faire de
bouches sur-
numéraires,
ls
vont
grossir
a
population
des miséreux
ue
décime
chaque
famine.
À
moins
que,
pour
survivre,
ls
n'aillent s'installer
ailleurs,en des espaces-refugesla forêtbressane toute proche, par
exemple),
y
aménageant
es
clairières,
créantdes
exploitations ion-
nières...
Il
y
a
longtemps
ue je
crois au rôle
joué
par
les esclaves
fugitifs
ans les
premières
manifestations
e
l'expansion
agricole j'y
ajoute
désormais
es exclus
de la tenure familiale.
La
charpente
ociale
Bien
sûr,
usqu'à
l'an
mil,
les vieux
schémas
demeurent t
Guy
Bois n'a
pas
tortde
définir,
la
romaine,
es hommes ibrescomme
des « citoyens : est juridiquementibre celui qui a la capacité de
participer
la vie
publique,
c'est-à-dire
'aller au
plaid
et de
porter
les
armes. Par
ailleurs,
'exercicede cette iberté
mplique
toujours
à la romaine
-
un minimum
e
propriété.
Or,
et
j'ai plaisir
à en
trouver
ci la
confirmation,
'alleu
paysan
existe à
Lournand,
tout
comme
l
existe
en
Catalogne,
en
Auvergne
u
dans les
pays
charen-
tais
:
il
y représente
même
-
proportion
out à fait vraisemblable
-
à
peu près
les deux tiers des terres
privées.
Cette
micro-propriété
2. G.
Duby,
a Sociétéux
xî<
t
xw
iècles ans a
région
âconnaise2e
dit.,
Paris, 971,
p.
127-128,
45-260
Id.,
L'économieurale
t
a
vie es
ampagnes
ans
l'Occident
édiéval
Paris, 962,
.
I,
pp.
403-404,
84-487. obert
outruche,
is-
cutantes dées eDuby st deux oigts 'admettreehiatus,uis inalemente
trouve
rop ênantour
'espritSeigneurie
t
éodalité
t.
I, Paris, 968,
p.75-76).
J'ai
repris
ansma
thèse e débat
uby-Boutruche,'exemple
atalan llant
leine-
ment ans e sens
es
propositions
e
Duby La
Catalogne
u milieu
u
Xe
la
fin
du xi'
siècle,
oulouse, 975-1976,
.
I,
pp.828-829).
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42
a-t-elle
une
origine
ussi ancienne
que
le
pense
l'auteur
?
J'en
doute,
mais
peu importe.
L'essentiel est de constater
que,
les
acquisitions
compensant
es
pertes,
ette
ssise
allodiale
est solide. Tout au
moins
jusqu'aux approches
de l'an
mil,
époque
à
laquelle
l'accélérationdes
échanges
déstabilise 'alleu
paysan
le marchéde la terre
'active,
es
prix
flambent. e
phénomène
'inflation vait
été décelé
dès
1953
par
Cinzio Violante en Milanais
(où
les
prix
de
la terre
quintuplent
u
cours
du
Xe
iècle) je
l'avais
moi-même
bservé utour de
Barcelone
(où
ils
quadruplent
ntre
980
et
1020)
et
Reyna
Pastor,
se
fondant,
elle,
sur les
prix
du
bétail
(qui triplent
u
quatruplent
ntre 950
et
1050 environ) 'avait décriten Castille3 Guy Bois apportedonc là
une nouvelle
pièce,
fort
mportante,
u
dossier.
Est-ce
à dire
que
cette ouverture u
marché,
conditionnée
ar
une
production
ccrue des
ateliers
monétaires,
st un
fait
radicale-
ment nouveau ? Peut-être Lournand.
Plus
au
sud,
il
y
a,
en l'an
mil,
beau
temps que
se
dessine,
à
travers
lle,
un
processus
de con-
centration oncière
ui
a
déjà
entraîné ien des
enrichissements
t
aussi
bien des détresses.Mais
il
est vrai
que, partout,
usqu'aux
années
980-1020, 'alleu,
dans
l'ensemble,
résiste
bien.
Si
les
petits ropriétaires
ommencent
pâtir
de
l'appétit
des
gros,
ceux-ci ont atteints 'une autrefaçon par l'effondrementes struc-tures
politiques.
ls ne
peuventplus compter
ur les
multiples
vanta-
ges
que
leur
procurait
a
fréquentation
u
comte,
ui-même
rès
ffai-
bli :
la
rupture
du lien ombilical
qui
les
unissait
à Mâcon est
pour
eux lourdede menaces.
Analysepertinente,
auf
peut-être
ur
un
point.
Ces
sept
riches familles
qui
dominent e terroir ont-ellesvraiment
représentatives
e la classe des
«
maîtres ? Je ne le crois
guère sauf
pour
les
Merzé).
Ce
sont
en
vérité
de
bien
piètres
maîtres : deux
d'entreeux ne
possèdent
guère que cinq
manses
au
temps
de Char-
lemagne
on
les
eût classés
parmi
es
pauperes
Je me demande
plutôt
s'il
ne
s'agit pas
là
de la
frange upérieure
e la
paysannerie
lleu-
tière celle-làmêmequi, capable de procurer ses fils des chevaux
et des
armes,
fournira
e
gros
de la
troupe
des milites autrement it
des
guerriers
montés
qui
iront se
placer
au
servicedes
grands.
Des
vrais
«
grands
:
je
veux
parler
des
illustrissimi
des ciar
ssimi,
des
magnats,
des barons
qui
dominentde très haut toute la masse dés
alleutiers.
l
s'agit,
on l'a
compris,
des maîtresdes châteaux.
Le nouveau
rapport
ville-campagne
Voici
arrivé
ans
doute le moment
écisifde la réflexion e
Bois.
3. C.
Violante,
a sociétà
milaneseeir tà
pre-comunale
Bari,
953
nou
.
édit.
1974),
oir h.
V P.
Bonnassie,
p.
cit.,
.
,
pp.
409-414
Reyna
astor,
«
Ganadería
precios
n León
y
Castilla
siglos
i-xiii)
,
Cuadernos
e
Historiae
España
1962,
p.
40-42,
8,
53-54.
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
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43
Que
faut-il
penser
de
«
l'étrange
destinéedu
phénomène
urbain
»
?
Au termede
cinq
ou
six siècles
de
déclin,
a ville
antique
est
quasi-
ment ombée n état de coma
dépassé.
Or soudainementa
vie urbaine
renaît t fait
preuve
out de suited'un
dynamisme
tonnant. es
piren-
nistes
ux
marxistes,
ien des
explications
nt été
tentées
t de
l'ago-
nie et du renouveau toutes sont
parcellaires,
ertaines
ndigentes.
C'est
qu'il
faut
repenser
e
problème
en
termes
de
système
t c'est
ce
que
fait Bois
magnifiquement.
La
primauté
de
la ville
antique
était d'ordre
politique
elle
était
le lieu où s'investissaientes revenus
drainés
par
l'État,
elle
prospé-
rait des ponctions péréespar l'impôtsur es campagnes.L'État affai-
bli,
la ville
décline. Certes
'Église, relayant
'État,
peut
la
maintenir
en état de
survie,
mais ceci ne fait
que
retarder
'échéance.
Alors
pour-
quoi
le
«
renouveau
(terme
vrai
dire
mpropre, uisqu'il
s'agit
de
la naissance d'une nouvelle
structure)
Il
tire
ses
origines
du
déclin
lui-même.La
fin
du
parasitisme
urbain
soulage
les
campagnes,
es
libère
elle
est
l'un
des facteurs
rincipaux
de l'essor de
l'économie
rurale. Et de celui-ci naît
la
ville nouvelle
qui
est
aux
antipodes
de
la ville
antique petite
mais
omniprésente,
lle
vit
en
symbiose
vec
sa
campagne
qui
l'enrichit
ertes,
mais
qu'en
retour lle
irrigue éné-
reusement es produitsde son artisanat t de ses ateliersmonétaires.Le
rapport
ville-campagne
cessé d'être à sens
unique
;
il est désor-
mais
un
rapport
de
couple,
fécond.
Non seulement e modèle
proposé par
Bois est
convaincant,
mais
il
pourrait
trouver une confirmation
contrario dans
les
régions
d'Europe
où s'est maintenue
'antique
relation
tributaire.On
pense
aux
campagnes
byzantines
t à leur
«
splendide
mmobilisme bien
décrit
par
Michel
Kaplan
:
«
nous
pouvons,
dit-il,
n
tracer e même
tableau au
vic,
au
IXe,
au
XIe
ou au
xivc
siècle
l'absence totale de
progrès
echnique
st une donnée fondamentale
e
l'agriculture yzan-
tine,
qui
demanderait
d'ailleurs une
explication
4. Elle
est
toute
trouvée.
La
croissance
agraire
Guy
Bois
prolonge
ci
une
réflexion morcée
-
par
lui-même t
par
d'autres
-
lors du
Xe
Colloque
de Fiaran5.
Je
passe
sur
quel-
ques prises
de
position
trèscontestables
sur
la
fixité e
l'habitat,
par
exemple,
ou sur
les
origines
mmémoriales
e la
communauté
e vil-
lage)
et
sur
quelques paradoxes
difficilement
outenables
p.
190
:
«
c'est l'instauration e la
seigneurie
anale ou
châtelaine...
qui
allait
4. Dans
Byzance
t le
monde rthodoxe
sous
a dir.
ďA.
Ducellier),
Paris,
1986,
.
186.
5.
La croissance
gricole
u
Haut
Moyen
ge
chronologie
modalités
géogra-
phie
Fiaran
0,Auch,
990.
es ctes ece
colloque
ont
ondamentauxur a
question.
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44
décloisonner
e monde rural
»).
J'en viens aux deux idées de
base,
énergiquement résentées 1)
la croissance s'inscrit dans la
longue
durée,
2) l'impulsion
vient
d'en
bas.
Comment
ne
pas y
souscrire
Il
m'a
toujours paru
très
clair
que
la
croissance
n'avait
pas
été décré-
tée,
mais
qu'elle
était e fruit e
plusieurs
iècles
trois, uatre,cinq ?)
de travail
et
d'initiatives
paysannes.
Son
point
de
départ Guy
Bois
opte
pour
une date
très
précoce,
situant
'étiage
dans le dernier
uart
du
IIIe
iècle,
époque
d'incursions
barbares,
de
graves
convulsions
ociales,
de destruction e nombreu-
ses
villae.
Dès
600,
pense-t-il,
es
plaies
sont cicatrisées t
l'expansionpeut démarrer.Je suis moinsoptimiste l'an 600 me sembleplutôt
marquer
e creux de
la
dépression avec
tout son
cortège
de
pestes,
guerres,
famines)
et
c'est
donc des
vnc-viiie
iècles
que j'aurais
ten-
dance
à dater es débuts
du
décollage.
Mais
ceci
reste ncorede l'ordre
de la
conjecture.
L'essentiel est de constater
que
dès l'an
mil,
en
Mâconnais
comme en
Catalogne,
«
la
plus grande partie
de
l'espace
cultivable
st
déjà
mise en
valeur ». Ici
comme
à,
«
les terroirs ont
proches
de leur
point
d'achèvement . La
croissance,
dans sa
phase
la
plus
intense,
st donc bien
antérieure la Révolutionféodale elle
la
conditionne,
oin d'être
provoquée par
elle. Ce
renversement
e
perspectivesme semblepersonnellementller de soi. Quant aux cadres
socio-économiques
dans
lesquels
s'est
déroulée cette
expansion,
ils
m'apparaissent
out aussi évidents
u'à Guy
Bois
: la famille
onju-
gale,
la
petite
exploitation,
a communauté de hameau.
Et,
avec
l'auteur
qui
apporte
sur
ce
point
de forts
rguments,e
suis
prêt
à
ajouter
le
«
petit
domaine
».
Une révolution
Oui,
la
mutation éodale est bien une révolution.
lle en
présente
tous les traits.Elle estgénérale du Milanais à la Galice, il n'est pas
de
région
qui
ne soit
touchée. Elle est soudaine tout se
passe
en
l'espace
d'une
génération,
ci
plus
tôt
en
Mâconnais,
Auvergne,
Aqui-
taine entre
90
et
1030),
là
plus
tard
en
Biterrois,
n
Catalogne
entre
1030
et
1060),
mais ces
décalages chronologiques
d'ailleurs aisé-
ment
explicables
-
ne
changent
rien au
phénomène.
Elle est enfin
d'une brutalité
ffrayante
à
lire
Guy
Bois
et en
dépit
des
sévices
u'il
cite,
'ai
même
'impression
ue
le
Mâconnais
a été relativement
par-
gné
;
on est
loin de la
sauvagerie ignalée
en d'autres lieux.
En
tout
cas,
comme
en
89,
ce sont bien
les
privilégiés
ui
ont commencé
«
le
signal
des hostilités
ut ancé
par
les tenantsdu
passé, par
cette
aristocratieocale, guerrièret esclavagiste, ui formait a base sociale
du
système arolingien,
mais
voyait
ses
positions
s'effriter.
On ne
saurait
mieux
dire.
Il
est sûr
en tout cas
que parfois
a
paysannerie courageuse-
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http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 51/144
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http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 52/144
46
Ce
bouleversement,
ous avons
appris aujourd'hui
à le dater
pré-
cisément,
ous
pouvons
en décrire es
facteurs,
es
modalités,
es con-
séquences.
Dans ce
progrès
décisif
de la
connaissance
historique
e
Mâconnais
a
joué
un rôle
pionnier.
À lui
l'honneur d'avoir
donné
naissance
à
la
thèse
de
Georges Duby,
matricede
toutes es
œuvres
majeures
de
l'école
française
depuis
1953. Parti
du
Mâconnais,
un
voyage
au
long
cours
a
été
entrepris,
ont les
étapes
se sont situées
en
Latium,
en
Provence,
en
Biterrois,
n
Catalogne,
au
Portugal,
en
pays
charentais,
n
Auvergne.
Voici
qu'avec
le
retour Lournand a
boucle est
bouclée,
et de belle manière.Vraiment
ouclée
?
Sûrement
pas. Nous attendons a suite, et d'abord de Guy Bois.
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 53/144
Médiévales
1,
automne
991,
p.
47-53
Lluis
TO FIGUERAS
UN
REGARD
PÉRIPHÉRIQUE
SUR
LA
MUTATION
DE L'AN MIL*
Guy
Bois est sans
doute un
des
plus remarquable
médiévistes ran-
çais
par
sa
capacité
à
combiner
la
fois recherche
mpirique,
igueur
méthodologique
t création
théorique.
Un
peu
de tout cela
apparaît
dans son dernier
uvrage
consacré
à
Lournand. Un
livre
plein
d'idées
nouvelles,
qui
sont
autant de
sujets
de réflexion
entrale dans la
recherche istorique ctuelle. Son mérite st d'autantplus grand que
comme lui-même e
rappelle,
ses sources avaient
déjà
été
exploitées
par
d'éminents
médiévistes.
e
souci de se
placer
dans
l'explication
globale
de la mutation
féodale,
rend souvent un
peu
étroit e cadre
local
et
par conséquent
ne
critique
e
l'ouvragepeut
êtrefaite
par-
tir d'autres
sources,
d'autres
régions,
dans une
sorte de vérification
périphérique.Périphériquepour
ceux
qui
verraient
luny
au
centre
d'une économie-monde
u
XIe
iècle.
Ce commentaire
ortera
ur
quelques
éléments
pars
du
raison-
nementde
Guy
Bois à la lumièrede sources
contemporaines
t com-
parables
des fonds d'archives de la
péninsule bérique qui
ont fait
l'objet d'étudesplus ou moins récentes. es sujetsenfin ui ont occa-
sionné
des débats
parmi
les médiévistes
spagnols1.
On
essayera
de
revoir
insi
: la
persistance
e
l'esclavage antique,
e
poids
de la
pay-
sannerie
ibre,
les
spécificités
amiliales,
a réalité du marché
de la
terre,
a croissance
agraire,
la
conceptualisation
de la
société
du
Xe
siècle.
*
Les
pages
itéesntre
arenthèses
envoientu livre e
Guy
ois,
a mutation
de
l'an mil.
1. Unétat e a rechercheistoriqueécentenEspagneeuttrepprochépartir
des rticles
u
volume
I
de Studia istóricaHistoriaedieval
publié ar
'Univer-
sité e
Salamanque
n 1988.
u encore ans
es ctes
u
colloque
n tornol
feuda-
lismo
ispánico.Congreso
e Estudios edievales
tenu l'Université
e
Léon,
t
publié
n
1989
ar
a Fundación
anchez-
lbornoz.
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 54/144
48
1.
Sans
aucun doute
la forceavec
laquelle
Guy
Bois
revendique
la
persistance
e
l'esclavage antique
usqu'à
la
veille de l'an
mil
est
une nouveauté.
En
Catalogne,
es esclaves
ppparaissent armi
es
legs
testamentaires
es
puissants.
On a encore des
exemples
de
réduction
en servitude
n
933
ou
987 et même un
jugementpour
démontrera
conditon
serviled'un
homme en
874 avec un vocabulaire similaire
celui
employé
en
Mâconnais2.
Néanmoins,
n
Catalogne
ou en Castille es esclaves
n'étaient
pas
si nombreux
u seuil
du
XIe
iècle. Et les dernières
mentions ont
à
retrouver ans les
grands
domaines
ecclésiastiques,
omtaux
ou fis-
caux, parfoisen tantque domestiques.Peut-être a proximité e la
frontière
vec l'Islam
et
l'histoire
nterne
du
royaume wisigothique
expliqueraient-elles
ette
faiblesse
de
l'esclavage
autour
de l'an
mil,
et
l'esclavage
aurait-il
déjà
subi
une crise
profonde
la veille
de la
conquête
musulmane3.
Du
point
de vue
théorique,Guy
Bois
remarque
es
différences
entre
es esclaves
des
grands
et des
petits
domaines. Si le
premier
st
souvent
déjà
un
colon,
un
tenancier,
e second reste
en
général
un
esclave
non-tenancier.
Même si les esclaves
des
petits
domaines ont
été
installés
dans des
exploitations gricoles
en
remplaçant
l'escla-
vageen chiourme ratiqué ur es grandsdomaines par la petite ro-ductionde caractèrefamilial
p.
38).
Ce « chasement
d'après Guy
Bois
n'implique
pas
le féodalisme
u la
formation
'une
société
féo-
dale
(p.
39).
Or,
l'argument
entral
pour distinguer
es esclaves
cha-
sés
des
tenanciers
st l'absence
de
droits héréditaires
ur les
petites
exploitations
gricoles
ù ils
étaient
nstallés
p. 40).
Leur maître
ou-
vait les
marier
loisir,
es installer
illeurs
p.
41)
;
ils
n'avaient
pas
à
payer
une
redevance
fixe
»,
mais toute
eur
production
tait
con-
fisquée
par
leur
maître
pp.
33-34 et
37).
Malheureusement
es
preuves
ont
surtout
ndirectes.
n n'a
pas
d'exemples
d'expulsions
d'esclaves,
de
mariages
forcés,
et la non-
apparitionde nouveaux noyaux familiaux sur la terre des familles
esclaves
vant
a mortdes
parents p.
40) peut
être
due aussi au
«
néo-
localisme
»,
c'est-à-dire
la coutume
familiale
de s'installer
illeurs
lors
du
mariage.
l
faut
se demander
i le
comportement
es esclaves
était
mposé
par
les maîtres
t s'il
était
vraiment i différent
e celui
des libres.
D'ailleurs
Guy
Bois
avoue
que
certains sclaves
étaient ais-
sés sur
la terre
de leurs
parents
p.
42).
En
outre si
l'exclusion des
2.
Exemple
e
ugement
ar
Marca
Hispanica,p.
34,
. 874.La
persistance
e
Pesclavage
e
type
ntique
été
oulignéear
P.
Bonnassien
Catalogne
ans a
Catalogne
u
milieuu
x<
la
fin
du
xv
iècle.
roissance
tmutations
'une
ociété
Toulouse,
975-1976
tdans
on rticle
ur e
sujet
«
Surviet
extinctionu
régime
esclavagisteansPOccidentu hautMoyenge ive-xieiècle), CahierseCivilisa-
tion
Médiévale
1985,
,
pp.
307-343.
3.
P.
Bonnassie,
rt.
it. t
J.M.
Minguez
«
Ruptura
ocial
implantación
el
feudalismo
n
el nordeste
eninsular
siglos
III-X)
,
Studia istórica
vol.
II,
n°
2,
1985,
p.
7-32.
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 55/144
49
esclaves de
la vie
publique
est bien connue à
travers es sources
égis-
latives,
l
est moins
évidentde la
décrire
partir
des
preuves
offertes
par
les sources
de la
pratique.
2.
L'importance
de la
petite propriété paysanne
et des
petits
alleutiers
qui
assuraient
'exploitation
d'une
large partie
du terroir
(pp.
23,
45,
71,
91-92)
est encore une
caractéristique
majeure
de la
société catalane ou castillanedu
Xe
iècle. Dans
les sources
bériques
on
peut
même rencontrer
es
exemples
d'activité ollectivede la
part
des communautés
de
paysans
alleutiers,
omme vient de
le montrer
pour l'Aragon J.J. Larrea4. Ce qu'apparemmentne rencontre as
Guy
Bois
dans
les sources du
Mâconnais,
même
s'il
peut
supposer
des solidaritésnouées
par
les
pratiques
communautaires t la
posses-
sion
commune de bois et de
pâtures.
Par contre
l
est
plus problématique
'identifier
a stratification
sociale
décrite,
ui oppose
les maîtresd'esclaves aux
petits
lleutiers
(p.
96).
Les cas de différenciationociale à
travers 'accumulationde
terres
peuvent
être
retrouvés
n
Catalogne
au
Xe
siècle et
probable-
ment ailleurs
au nord de la
Péninsule
bérique.
En
Mâconnais,
mal-
gré
sa
faiblesse,
a tenureexiste
déjà
et elle fait
des
progrès
«
À
côté du vieux rapportservile,en concurrencemême avec lui, nous
voyons
ainsi
apparaître
t
grandir
e nouveau
rapport
de
production
fondé sur le
régime
de la
tenure,
prêt
à
s'élancer,
à
se
généraliser
(p.
87).
Les mécanismes ont comme d'habitude
l'endettement,
es
donations
p.
89).
Si,
comme
e
le
crois,
l'esclavage
était moins
pré-
sent dans les communautés urales de la Péninsule
bérique,
surtout
à
proximité
e la
frontière,
ans les
régions
de
«
re-peuplement
,
la
tenure
y
était souvent
plus développée.
Au niveau
plus
élémentaire
la différenciation
ntre
manouvriers t laboureurs est évidente
dans
les sources catalanes de la même
époque.
En
revanche l
est beau-
coup plus
difficile e
savoir s'il existait
du
travail aisonnier u
sala-
rié comme on l'affirmepour Lournand (pp. 90-91).
3.
Guy
Bois insiste ur les
spécificités
e
la
famille,
qui
consti-
tuaient
une
des clés
pour
distinguer
es esclaves des
petits
domaines
du reste. Car
chez
les esclaves
«
le
célibat
y
était
imité
par
l'absence
d'autres
perspectives
ociales,
'âge
au
mariage
ans doute modelé
par
les besoins
économiques
du
maître,
a fécondité
ébridée
par
l'absence
de frein d'ordre
patrimonial (p.
56
;
voir
aussi
p. 167).
Mais la
fécondité
devrait être
comptabiliséepar rapport
à
l'âge
au
mariage
et le taux de célibataires
pour
en
tirerdes conclusions
démographi-
ques
réelles
(la
mortalité tant
probablement
imilaire
pour tous).
Autrement it, si l'âge au mariage y étaitplus tardif, ela explique-
4. J.J.
arrea,
Moines
t
paysans
à
l'origine
e la croissance
graire
ans
le Haut
Aragon
ix-xeiècle)
,
Cahiers
e
Civilisation édiévale
1990,
n°
3,
pp.
219-239.
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 56/144
50
rait
un
nombre
de
fils
par couple plus
élevé dans
les
textesmais non
dans
la réalité.
Encore
une fois les
sources
du Xe
siècle
ne
permet-
tent
pas
d'avoir des
connaissances
précises
sur
l'âge
au
mariage).
La
forme
des unités familiales
tait
la
même
pour
les
paysans
libres
et
les esclaves la
famille
nucléaire
p. 56).
En
accord
avec ce
modèle,
les fils en se mariant
quittaient
e
foyer
familial ou atten-
daient la mort des
parentspour
se
marier.
La création
de
nouvelles
unités
était
toujours
conditionnée
ar
la
disponibilité
n
terre.Seule-
mentdans le cas où la
pression
émograpique
amiliale
tait rès
forte,
les
parents
pouvaient
détacher
une
partie
de leur
terroir
our
y
ins-
taller eurs fils mariés.Et encore fallait-il voir dans ce cas un large
surplus
de
terres u les
moyens
d'en
acquérir
pour
ne
pas compro-
mettre
e
développement
e
l'exploitation gricole.
En
tout
cas
cette
coutume familiale de
transmission e
la
terre ne
présupposait
pas
l'absence de droits
héréditaires.
Même si
les maîtres
parvenaient
forcerdes
mariages
ou
des
transferts,
a
logique
étaitaussi
d'adapter
a main
d'œuvre aux
exploi-
tations
disponibles.
Ainsi l'évolutionde tout
le
village,
esclaves com-
pris,
était liée au
stock
de
terres
disponibles
p. 168).
Seulement
i
par exemple
on
pouvait
démontrer
ue
les
paysans
alleutiers
taient
plus actifsque les maîtresdans les défrichementst dans la créationde nouvelles
exploitations,
n
pourrait xpliquer
un taux de
mariage
plus
élevé,
un
âge
au
mariage plus précoce
ou
encore une
croissance
démographique lus poussée5.
Surtout i
l'on
reste
toujours
dans
le
cadre du modèle de la famille nucléaire.
Une autre
question
concerne es
origines
t l'évolution de
cette
famille ucléaire. ci
Guy
Bois semble e
rapprocher
es thèsesde
Jack
Goody,
en
soulignant
e
rôle de
l'Église
dans la diffusionde
ce
modèle6
(p. 252).
Mais
apparemment
le
modèle
de
la famille
nucléaire est
déjà
bien établi en
Mâconnais
au Xe
iècle. Par
contre
les historiens
e la
Péninsule
bérique,
depuis
A. Barbero
et M.
Vigil,
ont cru retrouveres tracesd'anciens clans ou familles arges,soumis
à un
processus
de
désintégration
nterne7.José M.
Minguez
croit
que
la diffusion
du
modèle de la famille nucléaire
et la
disparition
des
anciennes structures amiliales sont
liées
à la
croissance
agraire8.
Il
rejoint
Guy
Bois
pour qui
«
la
cohésion
de
la cellule de
pro-
5. Les
34
célibatairescôtéde 135
ménages
ecensés
armi
es esclaves
p. 53),
s'ils
ne sont
as
en réalité
es
veufs,
onstitueraientn taux e
célibat
articulière-
ment levé.
6. Jack
oody,
he
developmentf
the
amily
nd
marriage
n
Europe
Cam-
bridge
niversity
ress,
983
traduction
rançaise
rmand
olin,
985).
7. A. Barbero M. Vigil La
formación
el
feudalismo
n
a Peninsulàbé-
ricaBarcelone,978.Voir ussiJ.A.GarciadeCortazar, a sociedadural n a
España
medieval
Madrid,
988.
8. J.M.
Minguez,
Antecedentes
primeras
anifestacioneselfeudalismo
stur-
leonés
,
dans
n torno
l
feudalismoispánico.Congreso
e
Estudios
edievales
pp.
87-120
spécial, p.95-97).
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 57/144
51
duction
domestique
evient acteur e croissance
graire (pp.
191-192
et
252).
La dernière
pécificité
st
celle
des maîtres d'esclaves ou
gros
alleutiers
P
on retrouve es
«
prolongements
ardifs e la
Sippe ger-
manique
»
(pp. 99-100),
mais en fait
Guy
Bois ne
signale que
des cas
de
familles
comportantplusieurs noyaux conjugaux
et la
laudatio
parentorum
ans les transferts
e
propriété
p.
97).
De même
'argu-
mentde l'existence
des
rapports
de
parenté
dans les
villages p. 216)
reste
un
peu vague
si l'on ne
peut préciser
a
fonction
e
ces réseaux
de
parenté9.
4.
Si
en Mâconnais
il
n'y
a
pas trop d'exemples
d'achats
ou ven-
tes
de terres vant
950,
en
Catalogne
et en
Castille es
exemples
ont
nombreuxmême
avant cettedate. Par contre es sources utilisées
par
Guy
Bois montrent
'importance
e
la
mobilité
arcellaire.
Aux
trans-
ferts
des terres
par
la voie
des
héritages
vec
«
partibilité
,
dots et
douaires,
il
faut
ajouter
un
large
mouvement
d'échanges
mutuels
(pp.
76-78) qui, d'après
l'auteur,
auraient
pour
fonction e rationali-
ser
géographiquement
es
patrimoines
aits d'éléments
trop
épars.
Les différences
ntre a
Catalogne
et le
Mâconnais,
de ce
point
de vue, sont peut-être ues aux sources conservées.En outre il nefaut
pas
déduire
trop
vite des achats-ventes'existenced'un marché
de la terre omme c'était
le
cas sans
doute
pour
la
région proche
de
Barcelone
nalyséepar
P. Bonnassie. Ailleurs es achats-ventes e ter-
res
pouvaient
acherdes
adaptations
des familles
la taille des
exploi-
tations
agricoles
ou d'autres
stratégies
amiliales10.
5. La croissance
graire
st l'un
des
sujets
où
exceptionnellement
l'ouvrage
reste assez
proche
des idées
classiques. Après
avoir avoué
qu'il s'agit
d'un
phénomène
ans
«
réponse simple
ou
«
détermina-
tion unilatérale
,
Guy
Bois
reprend
es
références
lassiques
aux
pro-
grès techniques p. 154). Mais il accorde aussi un certain rôle à la
disparition
e
la fiscalité
d'État,
le
«
desserrement
e
l'étau fiscal
»
(pp. 187-252),
ou à la
diffusionde la
petite
exploitation
familiale.
Sur la
chronologie
e cette
croissance,
es données sont
plus
ava-
res. Les
progrès
echniques
ont
«
un
acquis
de la
période franque
(p. 182)
ou
«
s'étalent
dans
la
longue
durée
»
(p. 180).
Il
est assez
surprenant ue
cette croissance
lente
(avec
la création de
surplus)
9.
Les
anthropologues
nt émontré
ue
a
parenté
st
un
phénomène
ulturelt
non naturel. La
parenté
,
en
effet,
'importance
ue
ui accordea société. a
parenté
n soi n'a
pas
de
fonctionsociales u
économiques.10. Desstratégiesamilialeseréciprocitétaient'explicationesachats-ventes
de terre ans e cas étudié
ar
Giovanni
evi
dansL'ereditàmmateriale
Torino,
Einaudi
ditore,
985,
p.
83-121.
rgumentepris
ar
C.
Wickhamans
Vendite
di terra
mercatoella erra
n
Toscana
el
ecolo
I
»,
Quaderni
torici
5, 1987,
pp.
355-377t dans
Themountainsnd the
ity
Oxford,
987.
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 58/144
52
n'entraîne
pas
un lent
développement
u
marché.
Par
contre,
Guy
Bois
retrouveune
brusque
irruption
u
marché dans
un
très court
espace
de
temps,
970-980
pp.
81 et
257-258)
et une
brusque
muta-
tion
du
rapport
ville/campagne
p.
141)
assez difficile vérifier
empiriquement.
Les acteurs
de la croissanceà
Lournand
sont
à la
fois les
pay-
sans
alleutiers t les maîtres
ossédant
des esclaves
«
Si,
du côté des
communautés,
'essentielrésida
sans doute dans l'intensification u
travail,
du
côté des
maîtres a dominante
fut
dans le
progrès
echni-
que
et
les
gains
en
productivité
u travail
(p.
194), par exemple
la
diffusion u moulin eau » (p. 204). Si P. Bonnassie vaitbienmon-
tré la
capacité
innovatricedes communautéscatalanes en matière
hydraulique,
J.J.
Larrea a
pu
établir e rôle actif des
paysans arago-
nais dans
la croissance
ntérieure l'an mil.
D'après
J.J. Larrea la
pression paysanne
sur le
terroirn'aurait
pas
été sans
conséquences
dans
la créationde
nouveaux
sites
de
peuplement,
e nouveaux
fina-
ges.
Paradoxalement n
Mâconnais la croissancene se traduit
as par
une altération
uelconque
du
peuplement
p.
174),
mais seulement
ne
«
densification es
terroirs,
nciennement
ccupés
sans en
créer
de
nouveaux
»
(p.
190).
6. Les conclusions
e
l'ouvrage
donnent 'idée d'un
système
nti-
que
cohérent une
société
esclavagiste
t
tributaire
la
fois,
dans
laquelle
les maîtres irent eur
forcede leur
domaines
esclavagistes
t
des ressources
de
l'État. Un État
qui
a été
remplacé par
l'Eglise
et
ses
ressources ù
la dîme
occupe
la
place
de l'ancien
impôt
romain
(pp.
102-103).
Si on se référé
la
Catalogne
il
est
difficile
e savoir
usqu'à
quel point
a dîme
étaitune ressource ssentielle e
l'Église.
En
général
les institutions
cclésiastiques,paroisses comprises,possédaient
des
domaines vec
en
particulier
es tenanciers
ui
fournissaientes
reve-
nus. Des débrisdes anciens mpôtsapparaissentun peu partoutmais
apparemment
ls sont
négligables.
Par
contre
a terre
fiscale,
et en
particulier
a terre
nculte,
tait une
source
de revenusdans
un con-
texte de
défrichements,
ans
la mesure où les
pouvoirs
de
l'époque
parvenaient
faire reconaîtrede tels droits
par
les communautés
paysannes.
Dans
le contexte u
nord de la Péninsule
bérique
n devrait
aire
une
plus
large place
aux
paysans
ibres e situant n dehors
du cadre
esclavagiste-tributaire.
a faible
capacité d'exploitation
de la
paysan-
nerie
p.
219)
décrite
par Guy
Bois
devait être
plus marquée
dans ces
territoires
roches
de
la frontière vec l'Islam.
Cette différencee structureociale au Xe iècledoit nuancerun
peu
le bilan de la
révolutionféodale dans cette
périphérie
méridio-
nale. Si à Lournand elle
a
pu
être
ibératrice
t
dirigée
par
une frac-
tion de l'aristocratie
vec l'intervention es masses
(pp.
233-235),
en
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 59/144
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 60/144
Médiévales
1,
automne
991,
p.
55-61
EUROPE CAROLINGIENNE
ET
EUROPE
MÉRIDIONALE :
LE POINT DE VUE
D'ADRIAAN
VERHULST
Propos
recueillis
par
Monique
BOURIN
Pour
les
raisons
que j'ai déjà
indiquées
en
avant-propos,
nous
souhaitions
rèsvivement
u'
Adriaan
Verhulst
onfie
à
ce
numéro
de
Médiévales
ses
points
de vue sur la
«
mutationde l'an
Mil ». Diver-
ses revues ont eu la même
dée
que
nous,
notamment
ast and Pre-
sent et les Annales
Et Adriaan Verhulst
aussi
consacré
au
régime
domanial
à
l'époque carolingienne
n
rapport aru
dans le
volume
10
des
colloques
de Fiaran
Il
y
rejoint
naturellement
e thèmedes
for-
meset des rythmese la croissance vant 'an Mil Aussi ne souhaitait-
il
pas
exposer
lui-même
une nouvelle
fois
ses
arguments.
En
revanche,
l a
accepté
de
nous
confier
es
réactionsd'histo-
rien
des
pays carolingiens
evant es thèses
roposées
récemment
our
des
régions
méridionales
ar
Chris
Wickham,
ierreBonnassie et
Guy
Bois
et de les
confronter
sa
propre expérience
es
régions
epten-
trionale
. Nous
publions
donc avec son accord
une
synthèse
e ses
points
de vue
Adriaan Verhulst
ntroduit a réflexion
ritique
sur les travaux
de Wickham,Bonnassieet Bois en remarquant u'ils se situent ous
les trois
dans la tradition
marxiste
ui
définit e féodalisme
omme
le
mode de
production
où des
paysans
dépendants,
emi-libres
mais
non
plus
esclaves,
doivent
u
seigneur
une
renteen
travail,
en
pres-
tations
en nature
et en
argentpour
les terres
u'ils
tiennent
e lui.
Et
il
remarque
'intérêt
ue
l'historiographie
arxiste
toujours
porté
au
problème
de
la transition 'un mode
de
production
un
autre,
en l'occurrence
de
l'esclavagisme
au
féodalisme.
Il
lui semble
que
jusqu'à
ces
travaux,
ce
problème
été abordé
plutôt par
des
écono-
mistes
ravaillant e seconde
main
que
par
des historiensmédiévistes.
Selon
Verhulst,
'est
l'un des
points
communs
ces recherches isto-
riques proprementdites que d'offrirpour la premièrefois des
réflexions
ur
le Haut
Moyen Age
se réclamant
du marxisme.
Au-delà
de cette
perspective
héorique, globalement
ommune,
Chris
Wickham,
Pierre Bonnassie
et
Guy
Bois offrent
ourtant
rois
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 61/144
56
visions rèsdifférentes
u
passage
de
l'Antiquité
u
féodalisme,
otam-
ment dans leur
chronologie.
D'emblée,
apparaît
la
spécificité
e la
périodisation
doptée
par
Wickham,
la
foistrès
haute
puisque
'évolution
st
engagée
dès avant
la
fin
de
l'Empire
romain,
es esclaves devenant
très tôt
des tenan-
ciers
payant impôts
et
loyers
et
accélérée
à
l'époque
carolingienne
lorsque
sont
exigées
ces
nouveautés,
es
corvées de travail.
En
revanche,
pour Guy
Bois,
il
n'est
pas
légitime 'employer
e
termede
Moyen Age
avant la
mutationde l'an mil.
Jusqu'alors
es
permanences ntiques sont dominantes,notamment ans la réparti-tion de la
propriété,
onstituéede
petitesexploitations
lleutières t
de
domaines,
majoritairement
e
petite
taille
permanences
urtout
dans le mode
d'exploitation
de ces
petits
domaines,
exploitation ar-
tout assurée
par
des esclaves non chasés.
Des travaux de Pierre Bonnassie sur
l'esclavage,
il
faut
retenir
le
concept
de restauration
arolingienne
t
l'idée
que
la
seigneurie
banale est issue
d'une réaction
ristocratique
ontre
'extinction,
ar-
dive,
de
l'esclavage.
Avant
de discuter es
interprétations,
driaan
Verhulst
xprime
un premiernsemble e critiques proposd'affirmationsu'il lit,sous
la
plume
des trois
auteurs,
concernant
es
régions septentrionales.
Il
ne
peut
faire sienne 'idée de
Chris
Wickham,
que
le
système
des corvées se serait d'abord établi
en
Italie où
il
aurait été
organisé
dès le milieu du
vie
siècle,
pour gagner
ensuite
'Allemagne
méridio-
nale au début du
vme
siècle
et le
Nord de la
France à la
fin
du vme
et au début du
IXe
iècle. Cette
hypothèse
n'est nullement
ompati-
ble
avec les données des textesd'entre
Loire et Rhin. La
chronologie
de
l'apparition
des corvées
-
l'époque
carolingienne
est celle
que
reprend
A.
Verhulst,
mais
pas
sa
géographie.
L'hypothèse e PierreBonnassie elon aquelle es esclaves eraient
nombreux
n Germanie orientaleau
IXe
iècle
parce
que
l'esclavage
y
serait
plus
récent
qu'ailleurs
est fortement
uancée
par
Verhulst.
S'il
confirme
e
nombre
mportant,
l
y
voit
des raisons
toutes diffé-
rentes.
En
revanche,
l
s'accorde avec Bonnassie
sur
la
persistance
e
l'esclavage pendant
la
«
restauration
arolingienne
.
Les
caractéristiques
es
petits
omainesmâconnais
rappellent rop
celles de l'Est du
Rhin
à la même
époque pour accepter
'idée,
pro-
posée par Guy
Bois,
que
ce domaine
mâconnais du
Xe
siècle est une
survivance e
l'Antiquité.
S'ils sont
uridiquement
sclaves,
ces hom-
mes et
femmes
ui
le
cultivent,
mariés,
chasés même
très médiocre-
ment,n'ont pas le statutsocial des esclaves de l'Antiquité.
Si
Verhulst
ne
partage pas
les vues de
Guy
Bois concernant a
permanence, l'identique
u
presque,
de
l'esclavage ntique
au
Xe
iè-
cle,
il
discute
également
a
chronologie
de l'extinction e
l'esclavage
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 62/144
57
proposée par
C. Wickham comment
concevoir la
création du
domaine
biparti
si
Pesclavage
a
déjà
disparu
?
Les
remarques
es
plus
fondamentales
ortent
ur
les mécanismes
de la croissance
gricole
à
l'époque
«
franque
,
sur
laquelle
actuel-
lement
presque
tout le monde
s'accorde,
même si cette
période
est
définie
plus
ou
moins
précisément
t s'étend
plus
ou moins suivant
les
auteurs.
En
premier
ieu,
toute
l'interprétation, résentéepar Guy
Bois
commeexemplaire, e l'évolutionde la sociétémâconnaise ux appro-ches de l'an mil dans les environs e
Cluny paraît
tout à fait ncom-
patible
avec les résultats
des
recherches
e Barbara Rosenwein la
constitution
'une
seigneurie
e
grande
dimension
erturbe rop pro-
fondémentes mécanismes
normaux de l'évolution
conomique
et
sociale.
Si l'on met à
part
cette
critique
méthodologique
concernant
l'exemplarité
u
cas
«
Lournand
»,
P. Bonnassie est sans doute celui
dont les thèses
sont les
plus opposées,
dans
l'analyse
des formes t
des moteurs
e
la
croissance,
celles d'A. Verhulst.
.
Bonnassie
tig-
matise
a
rigidité
u
grand
domaine,
obstacle
ux
défrichements,
'iner-
tie des corvées, esponsables e la faiblesse es rendementst du man-
que
d'innovation
echnique
lors
qu'il
faut en faire e lieu même de
la croissance.
Mais Chris
Wickham et
Guy
Bois aussi
mettent
'accent sur un
développement
é au sein de la
petitepaysannerie
llodiale,
faitd'ini-
tiatives
ndividuelles,
e
solidarités
t de division du travail.
Certes,
Guy
Bois ne nie
pas, pour
les
régions
où
il
existe
-
pas
le Mâcon-
nais
-
la
participation
es
grands
domaines à l'accroissement
e la
production gricole,
notamment
ar
le biais de
la
créationdes
petites
tenures
our
les
paysans
ibres t
non-libres,
mais
il
n'én fait e méca-
nisme moteurni de la croissanceni de l'évolution sociale.
Verhulstne souscrit
donc
pas
à
l'interprétation,
onnée
par
ces
trois
auteurs,
de la
persistance
e
l'esclavage
dans les
régions
epten-
trionales
il
y
relève
également
ne insuffisante
ttention u
rôle
du
système
omanial dans les transformations
t la
disparition
inalede
l'esclavage.
En
effet,
'est au sein
du
grand
domaine et
par
la créa-
tion du
régime
domanial
qu'il
faut
comprendre
t la
disparition
e
l'esclavage
et la croissancede la
production.
Les domaines des Caro-
lingiens
t de
l'Église,
entre a Seine et le
Rhin
ont eu les
moyens
politiques
et
économiques
de
procéder,
en même
temps
et
dans
un
même
mouvement,
de
grands
défrichements
ui
accroissaient a
superficie e la réserve, la constitution e tenurespour les paysans
libres
et non-libres
t à
l'obligationpour
les uns
et les
autres
de tra-
vailler
par
corvées es
parcelles
de la réserve.A. Verhulst oit a crois-
sance
du Haut
Moyen
Age
suivantd'autres mécanismes
t le
passage
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 63/144
58
de
PAntiquité
u féodalisme
uivantune autre
chronologie ue Guy
Bois,
Pierre
Bonnassie et Chris
Wickham.
Divers
travaux récents oncernant es
régions
situées à l'Est du
Rhin
révèlent
e
poids
crucial,
au Haut
Moyen
Age,
des domaines
du
roi et de
l'Église,
pour
la condition ociale et
juridique
de
la
pay-
sannerie
vivant sur ces domaines
et
son évolution.
Il
est
bien
probable qu'au
Nord de la Loire et
des
Alpes,
40
%
au moins
de la
population
vivaient
ntégrés
des domaines. Deux
typesprincipauxde travailobligatoire, i l'on simplifie, esaientsurcette
paysannerie,
'un évalué en semaines
ar
année et l'autreen
jours
par
semaine.
Et en
général
chaque type correspondait
une
catégo-
rie de
tenanciers,
'un côté les libres
ou
demi-libres
coloni,
lidi et
de l'autre
es tenanciers on-libres
servi,
mancipio).
l
est donc
justi-
fié d'établir
un
lien
entre
e statut
uridique
des
tenanciers
u de
leur
tenure
et celles de leurs
obligations
de
travail.
La corrélation
ntre es deux
est
au
VIIIe
et au
IXe
iècles
parti-
culièrement
orte
l'Est
du Rhin. Dans nombrede
régions
l'Ouest
du
Rhin et au Nord de la Loire
elle
disparaît
rogressivement
u cours
du
IXe
iècle.
En mêmetemps,à l'Est du Rhin, se produitune autre évolu-
tion
l'aggravation
des servicesde travail
pour
les tenanciers
non-
libres.
À
côté
de la
corvée
de 3
jours
par
semaine,
aractéristique
es
non-libres,
a culturede toute une
pièce
de terrede la
réserve,
ui
était
usqu'alors
exclusivement
mposée
aux
libres,
eur
est
étendue.
Une
évolution
nalogue,
c'est-à-dire
ne
aggravation
es servicesde
travail,
e
produit
ussi à l'Ouest
du
Rhin,
notamment ur es domai-
nes
du monastère
e Prüm
dans
l'Eifel
ou,
près
de la côte de
la Man-
che,
sur les domaines
de Saint-Bertin.
Mais,
à
la différence e ce
qui
se
passe
à l'Est
du
Rhin,
ce sont es libreset les tenanciers ffranchis
à qui l'on imposedésormais e travail ervile, ypiquedes non-libres,
de deux
ou
trois
ours par
semaine.
Et
cette nouvelle
obligation
ne
pèse pas
sur
eux
seulement
ans le cas où
ils
tiennent n manse
ser-
vile,
pour
lequel
ce
type
de service
est
requis.
Il
s'agit
clairement
d'innovations,
u'on peut interpréter
omme es
signes
d'une restau-
ration
carolingienne,
omme
le font Pierre
Bonnassie,
à
propos
de
l'esclavage
et Chris Wickham
pour
tous les tenanciers.
Dans
un
premier emps
de telles
aggravations
nt
pu
conduire
à
un
abaissement
de la
paysannerie
ibre.
Dans
une
seconde
phase,
en
revanche,
'installationd'esclaves
comme
tenanciers,
arfois
même sur des manses
libres,
a contribué
à leurprogression conomiqueet sociale. L'acquisition qui en résulte
pour
eux,
d'outils,
de charrue t
de
bœufs
a
pu
inciter
eurs maîtres
à leur
demander es travaux
pécifiques,
els
que
la culture 'une
par-
celle
de la
réserve.
l
est
probable,
en
effet,
ue
ce
type
de travail
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 64/144
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60
diversesmanières
et en nombre croissantdans les
liens
du
système
domanial.
Pour les
régions
ù les sources
ne donnent
pas
de
renseignements
directsdatant
des
vinc
et
IXe
iècles,
la
validité de cette
hypothèse
émise
à
partir
es
régions
'entreSeine et Loire
est
appuyéepar
nom-
bre
d'exemples
d'une évolution
nalogue
un
peu
postérieure,
évélés
par
les sources écrites
du
IXe
iècle.
Exception
faite de
quelques
domaines situés
dans des
régions
forestières
t
pionnières
de l'Occi-
dent,
telles
que quelques-unes
des
propriétés
e
l'abbaye
de Montie-
renderdans les régionsde la Marne, il s'agit d'exemplesvenantdes
régions
situéesà l'Est du Rhin.
Là,
la
petite
dimension es terres rables
de la
plupart
des réser-
ves de l'aristocratie
quelques
douzaines
d'hectares
eulement) xploi-
tées la
plupart
du
temps par
un
petit
nombre de
familles serviles
signale
e
caractèremoins achevé
du
régime
omanial.
Les fiscs enus
dans
les mains
du roi ou les domaines
ecclésiastiques,
enus souvent
d'un
don
royal,
étaient
n revanche
beaucoup plus
vastes et
géogra-
phiquement
oncentrés.La taille
de
leur réserve tait
également,
n
comparaison
de
la
superficie
otale des
tenures,
lus
vaste
qu'il
n'en
allait sur les
domaines
plus petits
de l'aristocratie.
t
les services
de
travail sur ces domainesroyauxet ecclésiastiques taientplus lourds
et
pesaient
a
plupart
du
temps
sur des esclaves
qui
avaient été cha-
sés sur
des mansi
ou
hobae
serviles
n
bien
plus grand
nombre
que
sur les
petits
domaines
de
l'aristocratie.
Dans de
nombreux
as,
des
services
e travail
aractéristiques
es tenanciers
ibres,
els
que
la cul-
ture d'une
pièce
de terre
de la
réserve,
eur
étaient
mposés.
Ainsi,
de
part
et d'autre
du
Rhin,
la
comparaison
ne révèle
pas
de
différence
ssentielle ans
le
régime
omanial,
simplement
n déca-
lage
de
quelques
dizaines
d'années. Le sens de l'évolution est le
même le
passage
d'une
exploitation ar
travail
ervile
ur
des domai-
nes de petitetaille (certainsn'ont pas encore de structure ipartite)
à une
exploitation
e
grands
domaines
bipartispar
des esclaves
cha-
sés
ou des
paysans
ibres
ncorporés
u domaine.
Il
y
a derrière ette
évolution
'expansion
du
pouvoir
royal
francet de
l'Église,
d'abord
dans
la France du
Nord
(aujourd'hui
la
Belgique
et la rive
gauche
du
Rhin)
dès
le
viie
siècle,
et un
peu
plus
tard
-
à
partir
du
début
du
VIIIe
iècle
-
à l'Est du
Rhin.
Entrece
développement
u
pouvoirpolitique
t
ecclésiastique, ui
culmine
vec la
«
Restauration
carolingienne
'un côté et
l'expan-
sion
économique
t
démographique
e
l'Europe
du Nord-Ouest
epuis
la findu VIIe iècle, Adriaan Verhulst uppose une relation.
Dans cette
perspective,
'an
mil
n'est
pas,
dans ces
régions
du
Nord et de
l'Est,
comme
pour
Wickham,
Bonnassieou
Guy
Bois,
plus
au
Sud,
le
temps
d'une brutalerévolution
éodale,
mais d'une évolu-
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 66/144
61
tion
qui
naît dans la croissancede la restauration
arolingienne, ar
une
politique
conscientedes
milieux
dirigeants.
Entre
es thèses
des historiens méridionaux
que
sont Bonnas-
sie
et
Wickham,
insi
que,
occasionnellement
ette
fois,
Guy
Bois et
les
siennes,
l
est
évidemmententant
'opposer
terres
u Nord
et
espa-
ces
du Midi. Mais Adriaan Verhulst
fait
remarquer
a
convergence
entre es
analyses
t celles
de PierreToubert
pour
l'Italie,
qui
démon-
trent
galement
ne certaine orrélation ntre
a
progression
u
pou-
voir
franc et celle du
régime
domanial
classique.
Il
conclut donc en
appelant
de ses vœux une
étude de la France
méridionale u Haut
Moyen Age qui réexamine es documents la lumièredes thèses for-
mulées à
partir
des zones
plus septentrionales
en
reprenant
'idée
de
l'influence
oyale
ou
seigneuriale
ans la
disparition
e
l'esclavage
et
le
poids
de
son
absence.
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 67/144
Médiévales
1,
automne
991,
p.
63-68
Yoshiki
MORIMOTO
RÉFLEXIONS
D'UN
HISTORIEN JAPONAIS
SUR
LE
LIVRE
DE
GUY BOIS
1.
Dans
son
ouvrage,
G.
Bois
propose
une
conceptionoriginale
et très
personnelle
du Haut
Moyen Age
occidental
qui
semble en
exclure
toute autre.
Il m'a
ainsi
obligé
à
réfléchir érieusement ux
concepts
dont
je
me
suis
servi
pour
mes études de l'histoire
graire
de
cette
époque,
d'autant
plus que
mon
estimeest
grande
à
l'égard
de son travail novateur ur la crisedu féodalisme.Ma contribution
se limitera
ci à la
caractérisation
u Haut
Moyen
Age
en tant
que
période,
et,
en
particulier,
celle de
l'époque carolingienne.
Je fais
ce
choix,
parce que
ce
problème
été
depuis
longtemps
n
des sou-
cis
majeurs
des historiens
aponais
:
j'avais
dû
donc
l'envisager
ou-
vent et
m'y
voilà
engagé grâce
à mon
collègue
français.
Je
voudrais
expliquer
a raison
historiographique, our laquelle
je
ne
peux
pas
me rallier
à la
thèse
de
Bois,
tout en
présentant
ux
lecteurs uro-
péens
un
aspect
des recherches
aponaises
sur le
Moyen Age
occiden-
tal.
Malgré
les
critiques
dressées
par
l'auteur à la
polyptycoma-
nie
», je
continue soutenir 'utilité normede ces documents.
Faute
de place, ce volet de mon argumentationera publié ailleurs,proba-
blement dans
une
suite
à mon article
sur
les
polyptyques
arolin-
giens
.
2. G. Bois est
catégorique
quand
il
bannit e Haut
Moyen
Age
de
la
période
du
féodalisme.
ndépendamment
e
ses éléments ons-
titutifs
ue
l'on
peut déjà qualifier
e
féodaux,
e
système
ocial caro-
lingien
est
totalement
ntique, parce que
fondé sur
un
esclavage
et
dominé
par
un
État.
Il a
fallu une révolution
ui
s'est
passée
autour
de l'an
mil
pour qu'un système
ocial féodal
s'installe,
bolissant
défi-
nitivement'esclavage et mettant n place la seigneurie anale. Cette
façon
de
voir
apparaît
rès
française,
n ce
qu'elle prolonge
t
amplifie
1.
Y.
Morimoto,
État
t
perspectives
esrecherchesur es
polyptyques
aro-
lingiens
,
Annales
e
l'Est
5-40-2, 988,
p.
99-149.
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 68/144
64
une
tendance,
marquée
chez
les médiévistes
français,
à
souligner
l'importance
u
changement pporté
vers
'an mil
par
l'avènement e
la
seigneurie
banale. Bois lui-mêmecite G.
Duby
et P.
Bonnassie
comme ses devanciers
R.
Fossier,
qu'il critique
à maintes
reprises,
s'intègre
ussi
parfaitement
ans cette
igne.
Naturellement ois ne
manque pas d'originalité,
urtout
orsqu'il
met en relief ne croissance
agraire
vant e
XIe
iècle,
la différencee
ses
prédécesseursui
vou-
laient réduire
e niveau du
développement ocio-économique
arolin-
gien.
Pour
lui,
la société
carolingienne,omportant
ne infra-structure
déjà largement
éodale,
est
antique parce que
sa
supra-structure
st
déterminée ar un étatisme rchaïque. Cette convictionde la survie
de
l'État
antique
à
l'époque carolingienne
mprime
son
ouvrage
une
autre llure
française
dans les étudesrécentes ur
es institutions
aro-
lingiennes,
ertainshistoriens
rançais,
notamment .
Magnou-Nortier
et
J. Durliat en font eur
point
de
départ2.
Or,
cette
pensée
française
très
tôt exercé une
grande
nfluence
auprès
des historiens
aponais
intéressés,
ans une
perspective
om-
parative,
par
la
périodisation
du
Moyen
Age européen.
Confrontés
avec la
périodisation
e leur
propre
histoire,
ans
laquelle
un
Moyen
Age
ou une
période
féodalene se
présente
as
commeune
unité
ppa-
rente, ls voulaient n effet hercher es jalons sûrsde rapprochementdans l'histoirede l'Occident. Le
point
de
départ, près
la
guerre,
es
études
japonaises
sur
le
Moyen
Age
européen
a été
donné
par
K. Takahashi sous
la forme d'une
périodisation ystématique,
ans
laquelle l'époque carolingienne
tait considérée omme
'âge classique
du féodalisme.Connu
pour
sa
participation
ctive
au débat interna-
tional sur
la transition u féodalismeau
capitalisme3
t
préoccupé
presque
exclusivement
e la
problématique
e
l'élimination u féoda-
lisme
par
les
forces
socio-économiques
de
petits
et
moyens
produc-
teurs,
Takahashi
a naturellement
ensé que
la
situation
ncore
très
précaire
des
paysans
et des artisans
pouvait
servirde
preuve
décisive
pour fixer cetteépoque la positionla plus stable du féodalisme.
Dès
la deuxièmemoitié des années
50,
cette
façon
de voir a été
fort
ritiquée,
n sorte
qu'une
idée totalement
pposée,
consistant
qualifier
a
société
carolingienne
e
pré-féodale
'est
répandue4.
C'est
ici
que
l'œuvredes médiévistes
rançais
été mise à contribution.our
exclure
'époque
carolingienne
u
temps
féodal,
mes
prédécesseurs
e
sont
servi de deux
arguments
majeurs présence
massive
d'esclaves,
2. Voir n dernier
ieu,
J.
Durliat,
Les
financesubliques
e
Dioclétienux
Carolingiens
284-889),igmaringen,
990.
3. Ses
principaux
crits
n
français
ont éunis ansK.
Takahashi,
u
féoda-
lisme u
capitalisme.
roblèmese la transitionParis 982.
4. Parmies travauxaponais e cettepoquementionnésci, e seul ccessible
dans ne
angue
uropéenne
st e résumé
nglais
«
Formationf feudal ominion
and he ural
ommunity
n
Dijonnais
ndMâconnaisde T. S
b t
,
Hokensihaio
seirituo
onrakukyodotaiTokyo,
962. our e
reste,
oir e
Japon
u
XIe
ongrès
des ciences
istoriques
Stockholm
Tokyo,
960,
II-3.
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 69/144
65
d'une
part,
et absence
d'un
pouvoir seigneurial
ien
enraciné,
d'autre
part.
Certains
ont
essayé
de démontrer
ue
la
majorité
de la main-
d'œuvre
jusqu'à
la
fin
du
Xe
siècle était
composée
d'esclaves. Ils
se
sont certainement
nspirés
es efforts emblables
ui
se
faisaient lors
dans les
recherches ur l'histoire
graire
du
Japon
bien
que
l'escla-
vage
n'y
ait
jamais
été
patent, quelques spécialistes
nt
cru
pouvoir
établir
qu'un
esclavage
domestique
était une
composante
essentielle
de la
société
aponaise jusqu'à
la
fin
du
xvie
siècle. Mais
l'impact
des
travaux
français
été
plus
direct
ur les historiens
aponais qui
vou-
laient
mettre
n
relief
'importance
de
l'esclavage
au cours du
Haut
MoyenAge européen le célèbrearticlede M. Bloch sur l'esclavage
finissant
eur a servi de
point
de
départ5
l'ouvrage
de Ph.
Dollin-
ger
sur
les
classes
ruralesen
Bavière,
ayant
mis l'accent
sur
l'impor-
tance des
éléments
sclaves
usqu'à
la
décomposition
u
régime
oma-
nial,
es
a
convaincus
u'une
recherche
ur
es
esclaves
du
Haut
Moyen
Age
vaudrait a
peine
d'être tentée6 ils ont travaillé
ur
le
polypty-
que
d'Irminon,
renant
ci
exemple
ur
l'analyse
minutieuse e ce
célè-
bre document
par
Ch. Ed. Perrin7.Cette dernière émarche
abouti
à la
constatation
ue
la main-d'œuvre
ecensée
omme
attachée
une
tenurene
suffit
énéralement
as,
tant s'en
faut,
à sa mise en valeur
et, de là, à la conclusionqu'il existaitun nombre très important
d'esclaves,
remplissant
e vide sans être nscrits ans le
polyptyque.
D'autres médiévistes
aponais
ont
soutenu,
en
s
opposant
à
la
périodisationproposée par
Takahashi,
que
la
société
carolingienne,
où
les
institutions 'étaient
pas
du tout
ordonnées autour de la
féo-
dalité fondée sur un
pouvoir seigneurial
bien
constitué,
devait être
située en dehors de la
période
féodale. Pour
eux,
seul le
grand
mou-
vement ocial
de la fin du Xe
siècle,
provoqué
par
l'installation e la
seigneurie
anale,
marque
le
commencement e cette
période.
En,
se
servant
utilement u livre
de G.
Duby qui
venait
d'être
publié8,
ils
ont donné à
penser
qu'une
«
révolution
gricole
»
autour
de l'an
mil
a favorisé la concentration 'habitat qui, à son tour, a renforcé
l'arrangement
erritorial
t
l'intensification e la
domination
eigneu-
riale. Pour
souligner
e
contraste ntredeux
époques séparées
par
l'an
mil,
ces historiens nt
opposé
deux
institutions
espectivement
epré-
sentatives d'une
part,
e
régime
omanial,
disparate
omme
unité
de
domination t
très
peu
diffusé
géographiquement
t,
d'autre
part,
a
seigneurie
anale couvrant a
plus grandepartie
des
campagnes
omme
5. M.
Bloch,
Commentt
pourquoi
init
'esclavage
ntique
»,
Annales-ESC
1947,
p.
30-43,
61-170.
6.
Ph.
Dollinger,
'évolutiones classes uralesn
Bavière
epuis
a
fin
de
l'époque arolingienneusqu'aumilieu uxw iècle, aris, 949.
7.
Ch.
Ed.
Perrin,
Observationsur e
manse ans a
régionarisienne
u début
du
ixe
iècle
,
Annales-ESC
1945, p.
39-52.
8. G.
Duby,
a sociétéux
xie
t
xw
iècles ans a
région
âconnaise
Paris,
1953 2e
d.,
1971.
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 70/144
66
entité
erritoriale.
ls
ont
été
aidés,
dans
ce
dernier
ropos, par
la lec-
ture de
l'ouvrage
de R. Latouche9.
3. La
critique
du
système
e
Takahashi a
beaucoup
contribué
établir u
Japon
des études
du
Moyen Age
occidental
part
entière.
Cette
opération
s'est
certesréalisée à
partir
d'une
lecture ssez
limi-
tée des
publications
françaises.L'analyse
des
documentsmédiévaux
était
encorerare. Mais les travauxmenésdans ce cadre
visaient met-
tre en
relief
des
aspects positifs
t
progressistes
u
féodalisme u du
Moyen Age,
ce
qui
les
éloignait
ensiblement
u
point
de
vue,
à
par-
tirduquelon avait usqu'alors regardée féodalou le médiéval omme
des obstacles
au
progrès.
La nouvelle
vision
plus
favorable u
Moyen
Age
a suscité chez nous
un intérêt
pour l'Europe
médiévale,
telle
qu'elle
était,
avec toutes ses lumières
t
toutes ses ombres.
Mais
cet
intérêt,
rienté ussi vers
e Haut
Moyen
Age,
a
conduit à
examiner,
d'une
façon
critique
ette
fois,
a nouvelle
position
consistant
faire
commencer
a société féodale
à l'an mil.
Curieusement,
ette
position
s'était
vue
encore
renforcée
ar
l'influence urable de H. Pirenne
ur
certains historiens
aponais
: en lisant
son Histoire
économique
du
Moyen Age
qui
débute
effectivement
ar
la
«
renaissance du com-
merce», on a été impressionné ar l'importancede la coupure quiaurait existévers l'an mil10.C'était avant tout une attitude
atégo-
riquementnégative
vis-à-vis
de
l'époque
carolingienne, ui
a
provo-
qué
une sorte
de
scrupule.
À
ce
propos
deux
conditions
propres
au
Japon
me semblent
voir
été
des facteursutiles dans ce travail de
révision.
D'une
part,
on
était
habitué à
envisager
ne
société,
où des
élé-
ments nciens
t nouveaux ont nextricablementêlés.
On devait
ussi
essayer,
dans un
deuxième
temps,
de caractériser
lobalement
ette
société.
Cela était
dû essentiellement
ux
études
sur a structureocio-
économique11
u
Japon après
la Restauration
de
Meiji
en
1868,
qui
obligeait envisager n largespectre 'institutions,llant de la grande
entreprise apitaliste
ux
paysans
presque
serviles.
l
était
important
de définir
ette tructure
fin d'orienter e mouvement
olitico-social
féodalisme
u
pouvoir
concentré, emi-féodalisme,
ociété
capitaliste
9. R.
Latouche,
es
origines
e 'économie
ccidentale
iv-xi'
iècle),
aris,
956.
10. Sur
historiographieaponaise
elative
l
influence
e
Pirenne,
oir
. Mori-
moto,
Towards new
onception
fthe rban
istory
f
theWesterniddle
ges.
Some
historiographical
emarks
,
dans
Urbanism
n
slam.The
roceedingsf
the
international
onference
n
urbanism
n
slam
ICUIT),
Oct.
2-28/1989
Tokyo,
989,
pp.
145-167.
11. Pour
es dées
rincipales
oncernanta structure
ocio-économique
u
Japonaprès 868, oir .Toyoda, Révolutionrançaiset RévolutioneMeiji. tude ri-
tique
es
nterprétations
e Kosa
t de Rono
,
Annales
istoriques
e a Révolution
française
1963-1,
p.
10-24 Y.
Yamanouchi,
Japan
,
dans G. G.
Iggers-
H.
T.
Parker
éd.),
International
andbook
f
historicaltudies.
ontemporary
research
nd
theory
New
York, 979,
p.
253-278
ch.
14).
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 71/144
67
au
pouvoir
absolutiste,
ociété
capitaliste
vec des
survivances éoda-
les
etc.,
autant
de
formules llustrant a difficulté e la
tâche.
Il
est
intéressant e constater
ue
deux
approches opposées
se
sont
esquis-
sées
:
certains
'en
tenaient urtout la nature
du
pouvoir
en tant
que
facteurdéfinissant a société
entière,
t
d'autres voulaient
esti-
mer en
premier
ieu les réalisations
u
niveau du fondement
cono-
mique
de la
société.
l
était
visible
que
les
premiers
endaient
quali-
fier a société
aponaise d'après
1868
de
féodale,
alors
que
les
seconds
croyaient lutôt
à
sa nature essentiellement
apitaliste.
Èn
tout
cas,
de ce débat
presque
nterminable,
ous avons tiré a
leçorï
u'une
sou-
plesseesttoujours requisesi nous voulons caractériser ne société ou
une
époque
aux
composantes multiples,
voire
contradictoires.
D'autre
part,
es médiévistes
aponais
avaient
'avantage
de
pou-
voir
suivre
en même
temps
es résultats es
recherchesmenées dans
les différents
ays
d'Europe.
Certes
rares
parmi
mes
compatriotes
ont
ceux
qui s'occupent
du
Moyen
Age
italien
ou
espagnol,
t
encore
plus
scandinave
ou
slave-occidental.
Mais
quand
nous
envisageons
el ou
tel
problème
du
Moyen Age
occidental,
nous
pensons
habituellement
à des
publications
rançaises,
llemandesou
anglaises.
Probablement
la distance
nous
séparant
e
l'Europe
fait
que
l'unité
européenne
ous
paraît être une donnée plus naturelle u'aux Européens eux-mêmes.Il arrive
arfois ue
certains istoriens
aponais,
individuellementtta-
chés à
un
seul
pays européen,
présentent
n
peu
unilatéralementux
lecteurs
aponais
une idée
«
nationale
.
Même dans ce
cas nous
pou-
vons avoir accès
à
des idées
opposées
ou
complémentaires
enantdes
divers
pays européens.
Naturellement ela est
particulièrement
rai
dans les études
du Haut
Moyen
Age
où la France et
l'Allemagne
n'étaient
pas
encore
séparées.
Ainsi nous avons
pu tempérer
e
pessi-
misme
français
u
sujet
du
niveaude
développement
ocio-économique
à l'aide des données
procurées
par
des médiévistes
llemands,
chez
qui
un certain
optimisme
st
plutôt
de
règle.
4.
J'appartiens
la
génération
ui
s'est
proposée
de revoir a
sous-estimation
u
niveau
carolingien
2
et cela
explique,
au
moins
en
partie,
pourquoi je
ne
peux pas
maintenant
dhérer
à la
thèse de
G.
Bois.
Il
faudrait
un
long développement our
examiner
es
argu-
ments.
ci
je
devrai me contenter
e faire deux
remarques,
n
fonc-
tion des
deux
points
venant d'être
indiqués
sur
l'historiographie
japonaise.
Premièrement,
ans
sa
caractérisation e la société
carolingienne,
Bois
me semble
trop
attaché à définir
a naturedu
pouvoir,
tout en
négligeant
ans cette
âche
es
réalisationsmatérielles e
l'époque,
dont
il soulignepourtant ui-même 'importance.On a l'impression ue,
12.Pour
es
grandesignes
e
ce travaile
révision,
oire résumé
rançais
«
Pro-
blèmes
e a
formatione 'économie édiévale
n Occidentde Y.
Morimoto,
eio
Chusei
eizai
Keiseikateio
Shomondai,
okyo,
978.
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 72/144
68
en
se
séparant
du
déterminisme
conomique
dont
les défautsétaient
apparents,
l
tombe
dans
un
déterminisme
olitique.
Il
m'est difficile
de croire
que
l'État
carolingien
tait
totalement
ntique
et
esclava-
giste
pour
la
simple
raison
que
cet État était en
possession,
comme
le
reconnaîtnotre
collègue
français
ui-même,
de
grands
domaines,
basés
sur les
exploitations
amiliales
paysannes
de
type
féodal
et,
à
ce
titre,
représentant
l'époque
les entitésrurales es
plus
dévelop-
pées.
Si
une
croissance
graire
aussi
remarquable ue
celle
que
Bois
essaie
de décrire
été achevée sous
cet État et si les masses de
l'épo-
que
en ont
effectivement
énéficié,
pourquoi
vouloir à tout
prix
ui
appliquer une étiquette ussi archaïsante
Deuxièmement,
'ouvrage
de Bois aurait
gagné
à
tenir
ompte
vec
un
peu plus
d'attention
des études en cours dans les
pays
voisins.
Même si
les travaux
anglais
voulant montrer
n niveau
élevé écono-
mique pour
le Haut
Moyen Age,
en
particulier partir
des données
archéologiques
t
numismatiques, euvent
tre aissés de côté dans la
mesure
ù ils ne
concernent
as
directement
e
royaume
ranc,
es tra-
vaux
allemands
uraient
u
être rès
utilement iscutés. a
longue
érie
des études
sur le
manse,
culminant
avec
les
articles de
W.
Schlesinger13,
e montre-t-elle
as
que
le chasementd'esclaves
avait un effetbeaucoup plus important ue Bois ne le pense, parce
qu'un
attachement ffectif e non-libres ux
lopins qu'ils
cultivent
pouvait
être
uridiquement
econnu dans
le cadre du mansus servi-
lis ? Au
sujet
des nouveaux
rapports
villes/campagnes ue
Bois veut
fairedébuter
la fin du
Xe
iècle,
'œuvre de M.
Mitterauer,
W. Blei-
ber etc.
14,
ne réunit-elle
as
des
indices de
leur
propagation
dès
le
très
Haut
Moyen Age
? Plutôt
que
de lire ses
critiques
ur es anciens
marxistes
ui
n'auraient
pas
réussi
intégrer
a
question
urbaine
dans
le
système
éodal,
on
aimerait
mieux savoir ce
que
Bois
pense
du
tra-
vail récent
de E. Müller-Mertens
5
visant
à
définir
a formeurbaine
spécifique
au Haut
Moyen Age.
Les expériencesaponaisesme permettentonc de direque ce sera
dans une discussion
sereine,
où les
participants
e montreront ou-
ples
et ouverts
ue
la
grande
contribution
e G. Bois sera
pleinement
mise
en valeur.
13. Le dernier
t e
plus ynthétique
stW.
Schlesinger,
Die Hufe
m
Fran-
kenreich
,
dans
H. Beck- .
Denecke- . Jankuhn
éd.),Untersuchungen
ur
isen-
zeitlichen
nd
rühmittelalterlichen
lur n
Mitteleuropa
nd hre
utzung
I,
Göttin-
gen,
979,
p.
41-70.
14. M.
Mitterauer,
arkt
nd tadt
mMittelalter.
eiträge
ur
historischen
Zentralitätsforschungy
tuttgart,
980 W.
Bleiber,
Grundherrschaft
ndMarkt
wi-
schen oire
ndRhein
ährendes
9. Jahrhunderts.
ntersuchungen
u hrem ech-
selseitigenerhältnis, Jahrbuchür Wirtschaftsgeschichte1982-3,p.105-131.
15.
E.
Müller-Mertens,
Frühformen
ermittelalterlichen
tadt der tädte
eigener
rt
m
Frühmittelalter
Reflexionufdie
fränkische
eutsche
tadtentwick-
lung
or
derJahrtausend
ende
,
Zeitschriftür
Geschichtswissenschaft
1987, 5,
pp.
997-1008.
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 73/144
Médiévales
1,
automne
991,
p.
69-76
Nancy
GAUTHIER
L'ANTIQUITÉ SE POURSUIT-ELLE JUSQU'À L'AN MIL ?
Une
spécialiste
de
l'Antiquité
et du Haut
Moyen Age qui
par-
court
les siècles
d'amont en
aval est
toujours
inquiète
de voir si sa
vision
globale
de
l'évolution
historique
e
raccorde à celle de ses
col-
lègues
médiévistes
orsqu'eux-mêmes
es remontent
'aval en amont.
À
ce
titre,
e livre de
Guy
Bois est
le bienvenu dans
la
mesure
où
il
essaie
moins de
décrire
ue
de
comprendre.
omme le dit l'auteur
(p. 14) le petitvillagede Lournand n'est qu'un « point d'appui au
service
d'une
réflexion
lus
large
»,
laquelle englobe
plusieurs
iècles
et une
bonne
partie
de la
France
actuelle,
au moins. Le
«
point
d'appui
»
est-il
udicieusement
hoisi ? D'autres sauront
e dire. Mais
puisque
l'exemple proposé
est
censé avoir valeur
de
modèle,
il
n'est
pas
nécessaire
d'être
spécialiste
de
Cluny
ni
du
Xe
siècle
pour
se
sen-
tir invitéà
la réflexion...
et,
pourquoi pas,
à la discussion
puisque
tel est
le but
explicitement
ssigné
ce livre-manifeste
ar
son auteur
G. Bois cherche n
renouvellement
e la
problématique
abituelle
dans un
renversementes
perspectives
t,
au lieu de
décrire
a
société
en partantdes classes dirigeantes arce qu'elles sont mieux- ou un
peu
moins mal
-
connues,
l tentede
l'appréhender
partir
du
bas,
en
commençant,
de manière
significative,
ar
l'étude des
esclaves.
Assurément,
'expérience
alait
d'être tentée ar c'est bien de la masse
paysanne
ue
l'infime ouche de notables
ire
a
forcevive.
À
ce
titre,
je
seraisassez
tentée
e croireG. Bois
lorsqu'il
dit
p.
233) que
«
l'élé-
ment décisif
du
triomphemonastique
,
qui impose
sa vision
tripar-
titede la
société,
ratores,
milites
labor
t r
s,
se trouvedans
«
l'inter-
ventiondes
masses ». Mais
peut-on
fairemieux
que
croire,
passer
de
la
simpleopinion
à
la démonstration Pour
cela,
il
faudrait es docu-
ments
que
cette sombre
époque
a
négligé
de nous laisser.
Là gît la principaleperplexité uscitéepar le livre.Les quelques
1. Les
pages
ndiquées
ntre
arenthèses
envoient
u
ivre e
Guy
ois,
a muta-
tion e l'an
mil
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 74/144
70
dizaines
de chartesde
Cluny
utilisées
ar
G. Bois
constituent-ellesne
base de données suffisamment
arge pour
fournir
es clés
permettant
d'accéder
à
l'explicationglobale
de
«
la mutation e
l'an
mil
»,
pour
reprendre
e titrede
l'ouvrage
?
Certes,
l'auteur
multiplie
usqu'au
bout
les
précautions
e
langage
ses conclusions s'inscrivent
vant
tout sous
le
signe
du
questionnement.
n
sondage
effectué
si
petite
échelle
n'autorise de conclusion
définitive i
sur le
plan
local ni
sur
un
plan global
...
Il ne
peut
déboucher
que
sur
une démarche de
caractère
prospectif
indication de
pistes
à
explorer,
formulation
d'hypothèses
tester,
nvitation
une relecture e la
genèse
de la
société féodale» (p. 240). Et, par ailleurs,on sentbien tout ce que
sa lecture des
quelques
documents concernant
Lournand doit à
l'ensemble de sa
culture
historique.
Il
n'empêche.
Cette
prudence
st
parfois
oubliée
dans
le
feu de
l'exposé.
Prenons
'exemple
des
évaluations
démographiques.
l
s'agit
de savoir si
la
population
s'est accrue au cours des
périodes
méro-
vingienne
t
carolingienne.
e lecteur uit avec une
fascination
ngois-
sée l'édification
'un château de cartes
plusieurs
tages pp. 161-165).
Les fondations
e
l'édifice
reposent
ur
deux
terrains e naturetota-
lement
différente,
e
qui
n'est
déjà pas
une
garantie
de stabilité
les
chartesde Clunyd'un côté, les fouilles du cimetière e Curtil-sous-
Burnand de l'autre.
Sur le terrain
Cluny
»,
G.
Bois établitun
pre-
mier
étage d'hypothèses cf.
graphique ci-contre)
-
Il ne retiendra
ue
les chartesde
915
à 950
(rappelons que,
pp.
43-44,
il
a
justement isqualifié
es chartesde la
période
935-980
comme
non
représentatives
our
déterminera
proportion
'esclaves
dans l'ensemble
de la
population).
-
L'espérance
de vie est d'environ
35
ans,
ce
que
rien
par
ail-
leurs
ne lui a
permis
de déterminer.
-
Pratiquement
ous les
propriétaires
onciers
nt eu
l'occasion
d'être
nommés ans es chartes u cours
de leur ie
90
%,
dit-il
la
p. 43).
- Chacun de ces propriétairesorrespond une familleG. Bois
a
pourtant
dit ailleurs
que
les
noms ne se transmettaient
as
;
on
ne
saurait
donc exclure
que
la même famille
pparaisse
sous
deux
noms
différents
i,
dans
l'intervalle,
e
fils
a
succédé
au
père).
-
Au cours de la
période
980-1022
une coquille
lui
fait dire
930-1022),
il
y
avait au minimum
15 %
d'esclaves,
la
plupart
con-
centrés ur
le terroir e Merzé
(pp.
43-44).
-
À
la même
époque,
il
y
avait
plus
de
5 %
de
colons
;
cela
correspond-il
l'évaluation
de la
p.
47
:
«
le recours au
chasement
de
4
'libres"
(ou
"colons"
pour employer
e terme
générique
classi-
que)
reste
exceptionnel
un cas sur
dix,
tout au
plus
»
?
Sur cet ensemble
d'hypothèses,
désormais
tenu
pour
résultat
acquis malgré
la
fragilité
de chacune
d'elles,
G. Bois
dresse son
deuxième
étage
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http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 75/144
71
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http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 76/144
72
-
Puisqu'il
a retenu
es chartes
orrespondant
une
période
de
trente-cinq
nnées,
ce
qui correspond
la
durée
moyenne
d'une
vie,
le nombre de
propriétaires
onnus
77)
donne le
nombrede
familles
occupant
simultanémente terroir.
-
En
ajoutant
20
à
25 %
pour
les esclaves et
les
colons,
on
obtient
plus
de 90
familles.
-
Dans
l'ignorance
de l'étendueexacte du
terroir
orrespondant
à celui
que
couvrent
es
chartes,
on
ne retiendra
ue
les 1150 ha
de
l'actuelle commune de
Lournand,
auxquels
on
affectera u
moins
85
familles
une
partie
du
finage
de
Merzé,
qui
fournissait lui seul
plus de la moitié des esclaves (p. 44), est exclue la proportionde
15 %
d'esclaves
peut-elle
ependant
être
encore retenue
Apparem-
ment
oui,
mais l'auteur ne dit
pas
pourquoi.
-
«
Rien ne nous
autorise
à avancer un
coefficient
u
"feu"
fondé sur
l'importance
moyenne
de la famille
(l'auteur
ne
précise
pas
comment
l
a contourné ette
difficulté).
Troisième
étage
de l'édifice
-
«
Sur les collines
calcaires
du
Clunisois,
nous sommes
pro-
ches,
en ce début du
Xe
iècle,
d'une
densité e
40
habitants u km2.
Passons maintenant l'autre
partie
de la
construction,
elle
qui
est bâtie sur e terrain
Curtil-sous-Burnand. G.
Bois l'étudié
par-
tir de la thèse d'Henri
Gaillard de
Sémainville,
es
cimetièresméro-
vingiens
e la
Côte
chalonnaise t de la
Côte
mâconnaise.
Mais,
depuis
qu'il
a
rédigé
cette
partie
de son
travail,
a fouille
de ce
cimetière,
déjà
ancienne
1948-1959) quoique
remarquablepour
son
époque,
a
été
publiée
avec
beaucoup
de soin
par
J.
Ajot (La
nécropole
méro-
vingienne
de la
Croix
de
Munot à
Curtil-sous-Burnand
Saône-et-
Loire).
Fouilles
du
docteur
Lafond
Mémoiresde
l'AFAM, 1,
1985).
Voici les hypothèses 'abord retenuespar G. Bois :
-
Il
y
avait
700
tombes et
elles s'échelonnaient u
début du
vic
au milieu du
VIIe
iècle
(J.
Ajot,
toutefois,
n'en a identifié
t étudié
que
402
qu'il
échelonne
ur les
deux
siècles
entiers
cf.
sa
prudence,
p.
2 :
«
Les
emprunts
es séries
ypologiques,
e
dangerqu'il y
a tou-
jours
de
généraliser
une
région
des
découvertes
faites
en un
seul
point
du territoire onnent cette
hronologie
n
caractère
rovisoire
qu'il
ne faudra
amais
utiliser
n
texto
mais vérifier ès
que
faire
e
peut »).
-
La fouilledu
cimetière été exhaustive
mais
J.
Ajot, p.
17,
se dit
«
certain
que
des
tombes
furent
étruites
et
signale qu'unebande de terrain ierge, u milieu de la nécropole,n'a pas été fouil-
lée,
pour
en faire une réserve
rchéologique).
-
On
peut distinguer
vec suffisamment e
précision
es tom-
bes du
vic
de celles du
vnc
siècle
J. Ajot, p.
54,
a
cependant
retenu
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74
à la veille
de l'an
mil,
e
l'admets
donc au
moins
à titre
d'hypothèse
de travail.
Pour en faire
un facteur
xplicatif
e la
croissance
graire
à
l'époque
franque à supposer
que
celle-ci soit
confirmée),
l
fau-
drait être sûr
que
cettecellule
conjugale
et cet habitat
groupé
n'exis-
taient
pas
déjà
au
Bas-Empire.
Or la vérité
blige
à dire
qu'en
l'état
actuel
des
recherches,
ul n'en sait rien.
En
dehorsde
quelques
gran-
des
villae on
ne connaît
pratiquement as
l'habitat rural du
IVe
iè-
cle.
Ne
serait-ce
pas parce
qu'il
se trouvait
déjà
à
l'emplacement
e
nos
villages
actuels
qui
l'auraient occulté
?
C'est ce
que
certains e
sont
précisément
emandé.
Quant
à la structure amiliale es
paysansgallo-romainse l'Antiquité ardive,e ne voispas sur a base de quels
documents
n
pourrait
vancer
'ombre d'une
hypothèse. upposons
un instant
ue
le
Bas-Empire,
urant
equel
G.
Bois
(p.
174-175)
ma-
gine
une contraction
e
l'espace
cultivé,
it
déjà
connu 'habitat
groupé
et
la cellule
conjugale,
toute
son
argumentation
our
en faire
des
fac-
teurs
explicatifs
e croissance
agraire
tombe.
«
On ne
saurait
donc
surestimer
e rôle
des structures
'encadrement
spécialement
u cou-
ple
famille
conjugale/communauté)
omme levier de la croissance
agraire
çt
comme
déterminant 'un
certain
type
de croissance
(p.
194).
Peut-être
'a-t-il
as
tort
mais,
pour
l'instant,
e modèle
qu'il
a construit ttendsa vérificationxpérimentale.
On ne saurait
tenirG. Bois
pour
responsable
de la
pauvreté
de
ses
sources,
si bien
que j'ai
l'impression
'ouvrir
un
débat sans issue
quand
je
suis
tentée
d'opposer
à sa vision de
l'esclavage
ma
propre
vision
tout aussi
arbitraire.
On
ignore
quasiment
out du nombreet
du
statut
des esclaves
rurauxdans
la Gaule
du
Bas-Empire.
On doute
même
de
plus
en
plus qu'ait jamais
existé en Gaule
«
l'esclavage
de
chiourme
que
G. Bois
(p.
54) imagine
sur
«
les
domaines de
type
colonial
créés
par
Rome un
peu partout
. Dans ces
conditions,
om-
ment avoir
si celui
de l'an
mil
était
en continuité vec
celui de l'Anti-
quité
?
Après
Marc
Bloch,
P. Bonnassie
dans
Cahiers de civilisation
médiévale 1985, pp. 307-343) a insistésur le renouveau de l'escla-
vage
avec
les
grandes
nvasions
contrairement
ce
que pense
G.
Bois,
pp.
54-55)
et la
place
qu'il
tientdans les Codes
germaniques.
Peut-
être
y
a-t-il
eu,
comme
en tant d'autres
domaines,
des
changements
dus
à
l'influencebarbare
?
En
ce
qui
concerne
'an
mil,
je
ne
suis
pas
sûre
qu'il
y
ait eu
une
«
frontière ociale
majeure
»
entre
ervi
et
hommes ibres
G.
Bois,
p. 64).
Certes,
'esclave
«
ne
participe
n
rien à la
vie
publique
»
(p.
34),
mais
voit-ildans ses chartes
beau-
coup
de
petitspaysans
libres
y participer
«
Il
est exclu
de la
pro-
priété (p.
35)
mais
il
suffit
u'il
soit
servus
le
mot est
conservé)
de l'abbkye pour posséder
des biens
fonciers,
e cas échéant.
À
tra-
vers es exemples ités, l sembleque la cellule familialedes esclaves
soit
respectée
ar
on ne voit
amais
une terre
édée avec
une
partie
seulement
e
la famille
qui
y
est chasée
(l'auteur
le reconnaîtd'ail-
leurs,
p. 56).
Nulle
mention
non
plus
de
païens
ou de
convertis,
e
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75
qui suppose qu'on
leur
reconnaisse 'accès aux
sacrements,
onc une
âme,
élémentfondamental e la nature
proprement
umaine.
Quant
à la
«
simplicité
nfantine
(p.
41)
de la solution
mise en
œuvre
pour
éviter
que
la
prolifération
es esclaves
aboutisse
à
des
«
groupes
humains
trop
nombreux ur de
trop petites xploitations
,
à savoir
«
le strict ontrôle exercé
par
le maître
sur la famille
servile
,
la
sophistication
es
moyens
laborés
pour
assurerde nos
jours
le con-
trôle des naissances est de natureà
nous rassurer ur
l'indépendance
de fait dont
jouissaient
les esclaves de l'an mil
en matière
de
pro-
création
cf.
p.
167
: du maître
dépendaient l'importance
du céli-
bat, l'âge au mariage et par conséquent a durée de la périodede
fécondité
;
G.
Bois
ignorerait-il u'on peut
avoir
des enfants
hors
mariage
?).
Enfin,
si
«
l'esclavage
restebien le
rapportd'exploitation
dominant
(p. 48), peut-on
raisonnablement outenir
u'une
société
où
85 % de la
population échappent
ce
rapport
d'exploitation
doit
être
cependant
aractérisée
ar
lui
(cf.
le
titrede ce
chapitre
«
une
société
¿fcclavagiste)
? Ne
serait-ce
as plutôt
'importance
e la
pay-
sannerie
ndépendante,
i vraiment lle
est aussi
indépendante ue
le
laisse
entendreG. Bois
(pp. 65-83), qui
serait a véritable
riginalité
de cette
période, parenthèse
ntre es formesde
servitude e l'Anti-
quité et du haut Moyen-Ageet celles de la féodalité
En
revanche,
e partagerais
volontiers on
analyse
sur
d'autres
points,
tels
que
celui-ci
pp.
185-186)
«
Dans
le
double
processus
de
décomposition/recomposition
aractérisant
e
passage
des structures
antiques
aux structures
éodales,
a
décomposition
'est
développée
du
haut vers
e
bas
(en
partant
de la crise de
l'État),
et la
recomposition
s'est
développée
du
bas vers
le
haut.
»
D'accord
aussi
pour
penser
que
la
disparition
e
l'impôt
a
été un facteur
mportant
e
dévelop-
pementpour
la
paysannerie p. 187),
tant
les
moralistesdu
vc
siècle
(Salvien, pour
la
Gaule,
et
bien d'autres
dans toutes les
régions
de
l'Empire)ontdénoncé e poidset l'iniquitédu fardeaufiscalqui pesait
sur les humiliores.Peut-être
outefois st-il
un
peu rapide
d'y
voir
la cause de la chute de
l'Empire
(p. 187),
de
même
que
cette
nsup-
portablepression
fiscale
propre
u
Bas-Empire
ne
sauraitêtre
assimi-
lée
(toujours p. 187)
à
«
un
transfertmassifde
revenusde la
campa-
gne
vers la ville
»
qui
est
plutôt
un
phénomène
caractéristique
u
Haut-Empire.
Si,
comme
'auteur,
e pense que
«
l'affaiblissementt
le fractionnement
rogressifs
e l'Etat
sont e
fil
directeur e
la décom-
position
du
système
ntique
»
(p. 205), je
ne
placerais
pas
le début
du
phénomène après
les invasions
germaniques
. Dès le
IVe
iècle,
l'État romain a souffert 'être
plus
ou
moins
confisquépar
la
classe
despotentiores t cela n'a rien à voir avec une quelconque « emprise
de la ville ».
Ce
livre se veut
percutant,
t
il
l'est. Cela
supposait
sans doute
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 80/144
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 81/144
Médiévales
1,
automne
991,
p.
77-79
Robert FOSSIER
RÉFLEXION SUR UN « MODÈLE »
Invité à fournir n avis sur le
petit
ivre de
Guy
Bois,
autour
duquel
l'auteur
a
pris
soin
de
faire
grand
bruit,
e
ne
cacherai
pas
dès l'abord
que
cet
ouvrage,
xtrêmement
écevant t
fautif,
e
mérite
certainement
as
l'attention
u'on
veut ui
porter.
D'ailleurs une lec-
tureentre es
lignes
de la
préface
obtenue
de
Georges
Duby
montrera
les réserves e ce savant.
Pour faire
bonne
justice, e
diviseraimon
brefpropos en troispoints l'inspirationgénérale, a théorie avan-
cée,
l'habit du livre.
C'est
un
travers rès
actuel,
et
qui
me
paraît, paradoxalement,
une
preuved'impuissance
la
synthèse
ue
de
choisirun
cas
présumé
«
représentatif pour
en faireun
«
modèle
»
étendu
l'Europe
;
c'est
en
outre une
grave
faute
à
rencontrede tout ce
qui
est le
Moyen
Age,
nuances et variétés
qui
la commet ne voit
pas
loin. De
sur-
croît e
petit
village
maçonnais d'où
s'élève
ce
château de
cartes est
par
sa
position,
son
peuplement
t
son statut rien
moins
qu'exem-
plaire.
Le deuxièmedéfaut de
conception
st le recours la
théorie,
à la « problématique , ici plus ou moinsmarxisante, e qui est un
détail voir dans la mutationde l'an
mil
un
glissement
u
politique
à
l'économique
comme facteur ominant
boutit,
urieusement,
voir
des notions
abstraites,
u mieux
uridiques, gouverner
e monde
con-
cret,
parce que
le veut la théorie
fantasmes
Quant
au
troisième
vice du
livre,
l confine la
caricature enfin
Monsieur Bois vint
qui
le
premier
n France... découvrit
a
cassure du
Xe
siècle,
en
démonta
les
étapes
et
procéda
à une
«
rupture
adicale avec la
ou les
problé-
matiques
dominantes . S'étant ainsi
attribué es mérites
'autrui,
de
Boutruche,
de
Duby,
de
Toubert,
de Le
Goff,
de
Bonnassie,
et de
bien
d'autres,
croyez-moi,Guy
Bois,
tel un
guerrier ntique,
couvre
d'insultes t de mépris es victimes battues.Avec une arrogance uto-
satisfaite,
ui agace
un
peu,
il
enfonce la
hussarde
des
portes
dont
plusieurs
taient ouvertes
depuis cinquante
ans.
Ce
n'est
pas
là
une
attitude
d'historien.
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 82/144
78
Non
qu'il
n'y
ait rien
examiner
ui
soit
ntéressant
ans le
livre,
mais
à conditionde
faire
a
part majoritaire
ux
emprunts.
inq
pro-
positions
soutiennent
'argument,
xaminons-les.Avant
l'an mil la
société reste
sclavagiste Pierre
Bonnassie
le
seul
qui
échappe
d'ail-
leurs à
la
vindicte
e
l'auteur,
'heureux
homme
)
;
cette
proposition
peut
être
admise,
mais on ne voit
pas
très bien son
intérêt
uisque,
dit
l'auteur,
elle
se
dissoudra
après
l'an mil
-
ce
qui
est
d'ailleurs
faux en
Mâconnais
(Georges Duby).
Les autres
classes
sociales
sont
réparties
n
colons,
en
alleutiers évidents
,
en
maîtres les
libres
sont
propriétaires,
es
maîtres
ont
cavaliers
je
m'en
réjouis,
car
j'ai
lu cela en 1953 sous la plumede Georges Duby. Le neufseraitque
ces hommes sont
groupés
en
forteset
anciennes
communautésde
hameaux,
que
la
structure amiliale st
conjugale
Pierre
Toubert), ue
l'armature
politique
et fiscale tient
bon
(E.
Magnou-Nortier).
l
est
vrai
que
l'extraordinaire areté des
exemples,
la
confusion
entre
«
homme et
«
famille
,
l'inexistence
'un terme
pécifique
our
ces
«
hameaux
»,
sapent
quelque
peu
les
propositions.
Après
970
les maî-
tres
deviennent es
seigneurs
u milieu
d'une
«
flambée
des
prix
»,
et resserrenteur
emprise.
Pour
les
prix
c'est une
pure
vue de
l'esprit
en raison de la
quasi
nullité es
renseignements
e
cet ordre
Cluny
quant aux « seigneurs , négligeantes schémasde Duby, ne compre-nant
pas
les démonstrations e F.
Bange, ignorant
es travaux de
Münster u
de
Tours,
Guy
Bois commetde
piquantes
bévues.
Toute-
fois ces deux
premiers
oints
pourraient
outenir
'examen.
Les cho-
ses se
gâtent
ensuite.
En
effet,
a
troisième
proposition
de
l'auteur
sur
l'apparition
du
marché dès l'an
mil,
avec
tous les
effets
u'on
peut
en
attendre,
st une
notion certes
ntéressante
R.S.
Lopez
et
J. Le
Goff,
entre
utres),
mais
parfaitement
nadmissible vant 1100
en cette
région,
où la
«
circulation
apide
»
du
numéraire
st
pure
imagination,
toute
la
numismatique
et
tous
les
textes
prouvant
l'inverse.
Quant
à la
«
croissance
agraire
,
complète
dès le
Xe
iè-
cle, comme 'occupationhumaine d'ailleurs squissée antparnos voi-
sins
belges
et
allemands
que par
M.
Rouche,
P.
Riché,
P.
Bonnassie
ou P. Toubert chez
nous),
je
n'en
crois rien et
quand
bien même
me
tromperai-jeme
voici
d'ailleursdéchiré
belles
dents),
a
démons-
tration st vicieuse le chiffre e
population
repose
sur une
confu-
sion entrefamille t
individu,
es
nuances du
parcellaire
emblent
out
ignorer
de la
géologie,
et le
remodelage
des xiic-xnie
iècles est
soi-
gneusement ommé
reste a
conclusion,
a
«
Révolution
du
Xe
iè-
cle
;
Guy
Bois la découvre et
s'y complaît.
Sans excès de
modestie,
il
me
semblait
voir,
l
y
a
quelques
années,
employé
e mot
ui-même
et décrit a
chose
;
mais
je
m'illusionne ans
doute
?
On
accordera
à Bois qu'il place le mouvement ès 970-80,mais c'est ce qu'ont éta-
bli
tous les historiens u
sud
de
l'Europe,
et
qu'il y
voit
«
l'interven-
tion des masses ». Et
finalement
'est sur
ce
dernier,
ur ce seul
point,
que l'ouvrage
a
son
originalité.
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 83/144
79
Malheureusement e
maigre
butin lui-même
est
altéré
par
un
détestable
mépris
de la
recherche rudite.
Pas
de
bibliographie,
es
titres ités à l'occasion
ayant
en
général
vieilli
Bois
ignore
K.F. Wer-
ner,
B.
Rosenwein,
P.
Grierson,
C.
Bouchard,
F.
Cogniot,
et
j'en
passe
;
il
n'use sérieusement
i
de la
géographie
qu'il
maltraite,
ni
de
la
géologie
qu'il
ignore,
ni
de
l'archéologie
u'il
dédaigne.
Les réfé-
rences
manquent
u moment
ù
il
faudrait
es
fournir
omme
preuve
les
individus
ne
sont
pas
toujours
identifiés,
es bourdes
abondent.
Tout cela ne
serait
pas grave,
voire
serait
excusable même
chez un
historien
éjà âgé,
si le livre ne se
prétendait
as
de
premier
plan.
Finalement n effet e travailme paraît secondaire.
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 84/144
Médiévales
1,
automne
991,
p.
81-89
Bernard
LEPETIT
C EST
ARRIVÉ
À
LOURNAND
«
Toute forme oit être
onçue
n vue de
dimensions
t
doit,
ntre
ertaines
imites,
or-
ter
témoignage
e l échelle
ui
convient son
exécution.
Léonce
Reynaud,
Traité
architecture
Paris,
1858
Dans sa
fraîcheur
nitiale,
a
Méthode sociale de Le
Play propo-
sait,
pour l analyse monographique,
ne
méthodologie
n
trois
par-
ties
d abord,
au cours
d un travail de
terrain,
bserver es faits
puis,
une
fois
achevée étude
ocale,
essayer
d en tirer es indications
générales
enfin,
oumettrees conclusions
u
jugement experts ua-
lifiés
pour
leur
expérience ratique1.
C est
à un
exercice
de
ce
type
que je
souhaiterais
me
livrer,
outes
proportions ardées,pour
cerner
la manièredontla questiondu cas se pose aux historiens. Trois rai-
sons
m ont conduit à choisir un
ouvrage
de
Guy
Bois
publié
il
y
a
peu3.
Le
livre d abord est
explicite
sur ses ambitions et sur ses
méthodes
utiliser n observatoire
articulier our
rendre
ompte
des
mutations
d un
système
e société.
Ensuite,
même si ses conclusions
ont été
discutées,
e livre été
reçu
les
premiers omptes
rendusdes-
tinéscomme
à l accoutumée un
public plus large
de
non-spécialistes
1. F.
Le
Play,
La méthodeociale.
brégé
es
Ouvriers
uropéens
. Présen-
tation Antoine
avoye, aris,
Méridiens,lincksieck,989, 1, XIV,
652
p.
2. Ce texte st
ssud un
xposé
ral,
résenté
ors e la Deuxième
ournée
e
discussionnterdisciplinairerganiséela Maison es ciencese Hommee23mars
1990
par
Vivi
Perraki
«
Le cas et
l exemple
ans a
méthodologie
es sciences
sociales.
3. G.
Bois,
a
mutation
e
anmil.
ournand,
illage
açonnaisde
Antiquité
au
féodalisme
Paris,
Arthème
ayard,
989,
84
p.
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 85/144
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83
grès
de la
production gricole,
un renouveau e
l échange,
de
l irrup-
tion
du
marché la base même de la société dès le
Xe
iècle. Le
pas-
sage
de l un à
l autre
des
deux
systèmes opère
selon deux
chronolo-
gies.
La
première
st
une
chronologie ongue
les fils
directeurs
u
processus
sont constitués
ar
des faits
de
longue
durée
qui
affectent
la totalitédes
sphères
l économique,
e
politique,
e
social,
l idéo-
logique.
Mais la transition est
pas progressive.
n
n a
pas
à
peser
à
chaque
moment a
part
du
système ntique
et celle du
système
éo-
dal
;
le
passage
de
l un à l autre
s opère
d une
manière
brusque,
bru-
tale,
dans un
laps
de
temps qui
ne
dépasse pas
la
durée d une
géné-ration.Dans l ordreéconomique,par exemple, toutse passe comme
si
l échange
et le marché
explosaient
brutalement
ans
la décennie
970-980
»
(p. 258).
De la méthode
Or,
comme le sous-titre
u livre
l indique,
ce
modèle macro-
analytique,
ont
ai
essayé
de
préciser
es
ambitions,
es articulations
et les
sphères
de
développement,
st
rapporté
à une
pointe
d épin-
gle : Lournand est un villagedu Mâconnais et si l on admet es éva-
luations
de l auteur fondées sur
l onomastique,
ce
village,
entre e
Ve
iècle
et le
Xe
iècle
comptait
u mieux350 habitants.
ourquoi Guy
Bois a-t-il fait ce
choix
méthodologique
«
de la
micro-histoire
(P.
16)
?
Le
livre le mérite être très
explicite
la fois sur sa méthodo-
logie
affichée t sur ses
conclusions,
t
plusieurs
rguments
ont avan-
cés.
Le
premier
st celui
de la
nécessité
de l observation
ntensive
«
s agissant
de
diagnostiquer
état
d un
tissu
social,
il
fallait
mpéra-
tivement
ousser investigation
ussi
loin
que possible,
et
par
consé-
quent
resserrer u
maximum e
champ
d observation. L historien st
en faitplacé devant es mêmes xigences ue le biologiste u le physi-
cien
l infiniment
etit
ou
la cellule
élémentaire
evient
oujours plus
indispensable
son
analyse
»
(p. 19).
La
métaphore ui
renvoie
ans
autre discussion
vers les
pratiques
des sciences
dures,
le discours de
l évidence
et la
rhétorique
e
l injonction
iennent ieu de
l argumen-
tation
qu elles
ne sont
pas.
Le deuxièmemotif st
le
souci d inverser
le
regard
porté
sur
une
société,
en orientant e
projecteur
u bas vers
le haut. La convenance
u
modèle
particulier xplique
e renversement
de
perspective
c est
par
le
bas
que
s opère
la construction u
système
féodal.
Mais
il
existeaussi
une raison
généralisable, u il
est intéres-
sant
de
souligner
«
le
général
n est
pas
saisissable
par simple
addi-
tion ou juxtaposition e situations articulières (p. 239). Le troisième
motif
de ce choix tient
dans le rôle
particulier
u terrain
le
mot
est
de
moi)
vis-à-vis
e la théorie.
L observation
ocale,
dit
Bois,
permet
«
d infirmer u de
confirmer es résultats
roduits
ntérieurement
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http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 87/144
84
(p.
240)
et incite
à
recomposer
différemmenta matière
historique
le cas
oblige
à
un
déplacement
de la théorie. Mais en même
temps
l observation
ocale
joue
un rôle de
garde-fou
face aux
risques
de
«
schématisation
busive
»,
car
«
on ne s arrache
pas
à
l empirisme
sans
risque
de décoller du
réel
»
(p. 241).
On
aura noté
que
ces
motifs envoient des traditions t
à
des
pratiques
qui
ne s articulent
as
aisément.
Le local
apparaît
en même
temps
comme
le miroirdu
tout,
une
sorte
de modèle réduit d une
dynamiquegénérale,
t comme
la
part
constitutive,
fficiente t ori-
ginale,
d un
processus
d ensemble
il
a donc deux
statutsdifférents.
Du côté des méthodes, observationntensive laquelleBois faitréfé-
rence renvoieà
la
«
thick
description
et à la science
nterprétative
chère
à Clifford
Geertz et à
tout un courant de
l anthropologie
culturelle6.
Au
contraire,
a
mise
à
l épreuve
de l observation
mpi-
rique
des
hypothèses
héoriques
nous conduit dans une tout autre
direction,
u
côté du
positivismeogique7.
On
pourrait
jouter
à ces
traditions
ifférentes
e vieilles races
du
réalisme
historique
le local
est
assimilé
au réel et le
réel
est
un
garde-fou
ontretoute tentation
par
trop
théorisante.
en déduirai
deux
choses,
a
seconde
plus impor-
tante
que
la
première.
D abord,
il
n est
pas possible
de
préjuger,
la lecturede l exposé des motifs, e qu est la méthode effective e
Bois,
dans la mesureoù ces contradictions xistent.
urtout,
es his-
toriens
paraissent,
u moins
actuellement,
ans une situationd incer-
titudeforte
face à
l approche monographique
our pouvoir
entendre
-
et le livre a été
lu et entendu
à
peu
de
lignes
d intervalle es
propositions
i
peu
compatibles.
L analyse
des
raisons
du choix
particulier
e Lournand confirme
cette
première
nalyse. Guy
Bois avance troismotifs. e
premier,
las-
sique
-
vous le
retrouvez n introduction
e
toutes es
grandes
thè-
ses
d histoire
régionale
française
est un motifd utilité. Lournand
est à
4
kilomètres e
Cluny
et les moines
qui
s installent
n 909 ou
910 ont gardé la tracede toutes es chartesqui enregistrentes tran-
sactions
qui
leur
permettent
accroître
eur
patrimoine
oncier on
dispose
ainsi d une
source
exceptionnelle,
ailleurséditée au
xixe
siè-
cle et
déjà
abondamment tilisée
par
les médiévistes. es deux motifs
suivants
ont
contradictoires.
ois
plaide
d un côté
pour
la
représen-
tativité
de l échantillon
8
: la
situation
du
village
loin des
villes,
sa
position
imite nte
la France du Nord et
la
France du
Sud mar-
quées
par
des
traditions
ifférentes,
e fait
que
des traces de
peuple-
ments successifs
depuis
la
préhistoire
usqu aux
Germains
aient
été
6. C.
Geertz,
avoirocal
savoir
lobal.
es
lieux
u
savoir
1933),
rad,
r.,
Paris, .U.F., 1986, 93 .
7. K.
Popper,
a
logique
e la découverte
cientifique
1959),
rad,
r., aris,
1978.
8. G.
Bois,
op.
cit.,
p.
21
par
exemple.
e terme e
«
sondage
est utilisé
ailleurs.
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 88/144
85
retrouvées ur
le
terroir ont de Lournand
un
village représentatif
«
en
bref,
l
s agit
avant
tout d une illustration
e la France
centrale
(p.
25).
D un autre
côté,
et
deux
paragraphes lus
loin,
l auteur
plaide
pour l exceptionnalité
e Lournand.
Celle-ci tient au
rôle
joué par
Cluny
dans la mutation
féodale,
dont
les moines furent
es
protago-
nistes
rincipaux
ur
e double
plan
de l action et de
l idéologie
Geor-
ges Duby encourage
d ailleurs,
dans une
préface qui
est
un
bijou
d ambiguïté,
«
porter
un
regard
plus
aigu
à
l intérieur e
l énorme
organisme
tout
proche qu était
le
monastère
9. Il
est à
nouveau
impossible
de
préjuger
de la contribution e
l analyse
de la
situation
de Lournand à l élaboration du modèle de la genèsedu féodalisme.
Il
faut donc
juger
sur
pièces.
Je
m y
suis efforcé ur un
seul exem-
ple,
sur
lequel je
suis
un
peu
moins
incompétent ue
sur
tous les
autres le
brusque
éveil
du
marché entre 970 et
980.
De la
pratique
La
faiblessedes bases
empiriques
ur
lesquelles
a
démonstration
s appuie frappe
d abord,
moins
parce que
les sourcesn offrent
u une
maigreprovendede faits j imagine que les médiévistes onttoujours,
particulièrement
our
les
époques
anciennes,
confrontés de telles
situations
e rareté
documentaire) ue parce que
ceux-ci ont
très
peu
discutés.
Un
diagramme
es
ventes,
changes
et
donations
qui
ont
permis
au
monastère accroître on
patrimoine
ntre 20
et 1000
sertde
point
de
départ
(p.
79).
Neuf
points
y figurent ui
expriment our
trois
périodes
920-950
950-980
980-1000)
es
pourcentages espectifs
es
échanges,
des
donations
et
des ventes.
On
y
lit à la
fois
l augmenta-
tion du nombre
des donations
t
l inversion u
rapport
ntre
es échan-
ges
et les ventes.
L absence
de toute
ndication
oncernant e
nombre
de cas sur lequel repose le calcul empêchetoute appréciationde la
signification
es résultats. auteur conclut
ous forme
nterrogative
«
quant
à l inversion u
rapport changes/ventes,
est-elle
as
la
pré-
somption
d un éveil du marché de la terre
»
(p. 80).
On doit trouver ans la
cohérencedes
prix,
signe
d une rationa-
lité
économique,
la confirmation
une telle
présomption.
C est la
fonctiond un second
diagramme
p.
81) qui
représente
4
prix
de
vignes, xprimés ar
l auteur en
sous
par
unitéde 10
perches
arrées,
échelonnésdans le
temps
de
940
à
1010,
que
de
donner à
voir cette
cohérence.
L auteur
y
découvre
une
«
brusque
tension,
pour
ne
pas
dire flamblée
des
prix après
970,
alors
précisément
ue
les
ventesde
terre e multiplient. ommentne pas y voir l irruption un phéno-
mène de marché
»
(p.
81).
Je
soulignerai
ependant
rois
objections
9. G.
Duby n
G.
Bois,
op.
cit.,
p.
11.
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
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86
-
la
première
st
factuelle.
D autres
travaux d historiens
ndi-
quent
également,
our
à
peu près
a
même
période,
des
prix
de
vignes,
également
ssus
du
cartulaire
e
Cluny.
Aucune
tendance
n y
semble
perceptible
près
950.
Guy
Bois ne discute
pas
ces
données
contra-
dictoires
uxquelles
il
ne fait
pas
référence,
i
d ailleurs
les données
établies
par
Barbara Rosenwein
qui
ne confirment
as
la
dynamique
des
types
de
transaction
u il
avait
cru reconnaître10.
-
la seconde
est
d ordre
métrologique.
On
peut
supposer que
la
longueur
de
la
perche
varie dans
le
temps puisque
Guy
Bois
choi-
sit
dans
une note discrète
reportée
en
fin
d ouvrage,
d ignorer
a
question11.Peut-on le faire sans argumenter, t sans apprécier es
incidences
ur
le résultat
des
calculs
?
-
la dernière
ient au
fonctionnement
u
marché.
Quelle
peut
être
a
signification
conomique
du
prix
par
unité
de
surface
i,
aux
alentours
de
l an
mil une
pièce
de
vigne
de
dix
perches
carrées
est
vendue
2 deniers
quand
une
pièce
de cent
perches
est
vendue
48
deniers
La
question
n est
pas
simplement
e
proportion
elle tou-
che aux
principes
e fonctionnement
ême
du marché
et
plutôt que
de
tenter
de réduire es
différences,
l convenait
sans doute
davan-
tage
de
tenter e les
expliquer.
Une étude
historique
écente
vance,
pourrendre omptedu fonctionnementu marchéfoncier, roishypo-
thèses
iées
a)
les
équivalences
ntrebiens
que
traduisentes niveaux
des
prix
sont
partiellement
éterminées
ar
la
position
ociale des
co-
échangistes,
t contribuent
u maintien
e ces
positions
elatives
b)
au
sein
de
chaque
opération
d échange,
e
prix
prend
en
compte
a
situa-
tion sociale
concrète
dans
laquelle
s insère
échange
c)
les
équiva-
lences
entre
biens
n ont
pas
la
même
signification
our
tous
les mem-
bres
d une
même
société,
si bien
qu il
existe
dans un
même ieu
plu-
sieurs
circuits
ifférenciés.
es
hypothèses,
ui
remettent
n
cause la
logique
économique
des
marchés,
e
vérifient
ans
les
campagnes
pro-
ches
de
Turin au
xviie
siècle
12. Peut-on
croire
à
une
régression
e
l économiede marchédepuis le Xe iècle? Guy Bois aperçoit objec-
tion d ailleurs
-
«
il ne
s agit
évidemment
as
de
prix
du
marché
à l état
pur
»
-
,
admet
un facteur
ocial
-
«
très
perceptible
-,
l illustre
d un
exemple
-
«
voici
Arleins...
on
imagine
aisément
l âpreté
de
la
négociation
préalable
»
-
mais
il
conclut
en
reprenant
la
rhétorique
e
l injonction
laquelle
le
lecteur st
sommé
de se sou-
10.A.
Deléage,
a
vie urale
n
Bourgogne
usqu au
ébut
u
xi*
iècle,
âcon,
1942.B.
Rosenwein,
o be
the
Neighbor
f
Saint
eter.
heSocial
Meaningf
Cluny
s
Property
909-1049
Ithaca-
ondres,
ornell
niversity
ress, 989,
58
p.
Je
reprends
ci
A. Guerre
u,
«
Lournand
u
xe iècle
histoiret
fiction
,
Le
Moyen
Age 1990, -4,pp.519-539,
ont a
compétence
st
plus
vidente
ue
a
mienne.
11.« Je aisse olontairementecoté, our instant,irritantrooiemeose ar
la
longueur
e a
perche
(n.
13,
p. 267).
Le
«
pour
instant
nedoit
as
tromper
sauf
rreur
e ma
part
abandon
stdéfinitif.
12. G.
Levi,
Le
pouvoir
u
village.
istoire
un exorciste
ans
e Piémont
u
XVII
iècle
1985),
rad,
r.,
aris,
Gallimard,
989,
30
p.
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 90/144
87
mettre
«
cela
dit,
le
fait
économique
demeure
patent
et
ses effets
sur a mobilité es
possessions
oncières e
peuvent
tre ous-estimés
(p. 81).
D autres
exemples
permettraiente
crois sans
risque
de
générali-
ser. Trois traits
me semblent aractériser
a
pratique
à
l œuvre dans
l ouvrage.
Le
premier
st
la
fréquence
de ce
qu on peut appeler
les
«
surbouclages
théoriques
. Une
grille
d analyse, exposée
à
titre
d hypothèse,
ommande
ce
qui
est
représenté
omme
une
description
de
la
situation
ocale,
dont sont
tiréesdes conclusions
nalytiques ui
viennent ien
évidemment onfirmeres
hypothèses
ui
présidaient
la constructione la grille, ui sont alorsprésentéesommedes acquis
à
l étape
suivante
du raisonnement.
On
lira
par exemple
dans ce sens
le
chapitre
sur les destinées
e
l échange).
Le deuxième rait
signa-
ler est
le faible soin
apporté
à l établissement
mpirique
des données
cruciales absence
de
référence,
e
qui pour
un
médiéviste st
au
moins une
surprise
absence
de
discussion
des données factuelles on-
tradictoires
absence
d examen des
hypothèses pposées qui
abouti-
raient remettre
n cause ou à nuancer
a lecture
proposée
des
don-
nées. On
notera,
plus
généralement,
absence de tentative
our
met-
tre en
difficulté,
u
pour
essayer
a
résistance,
es chaînons
explica-
tifs vancés à aucun stadede la démonstrationn ne trouvede don-née
empirique ui
vienne démentir et non
pas
confirmer l une
ou
l autre des
hypothèses
d abord avancées
par
l auteur. Celles-ci
apparaissent
insi
comme des
interprétations
xtraites
e
l examen des
données. Je
n en tirerai ucune conclusion ur
a
pertinence
u
modèle
proposé
par Guy
Bois
:
mon
projet
n est
pas
là. Je me contenterai
pour
l instant
e noter e trèsconsidérable
écalage
entre a
place
cen-
trale accordée
au cas dans
la
méthodologie,
t la
négligence pportée
à son traitement
ffectif.
Le modèle et le cas
Je renverrai
d abord
l interprétation
e ce
décalage pour
un
détour,
destiné
à
souligner
n
quoi
le livre de
Guy
Bois s inscrit
n
rupture
vec les
traditions istoriennesominantes oncernanta
ques-
tion
monographique.
l
s inscritd une
part
en
rupture
vec la
socio-
logie
durkheimienne.
oyez
la
phrase
bien connue de Simiandextraite
de
«
Méthode
historique
t
sciences ociales
»
:
«
Je
dis
que
resserrer
l étude
à une seule société
pour dégager
e
Zusammenhang
ocial est
justement
e condamner
d avance à ne
jamais
l établir.
Il
n y
a
rap-
port
causal
que
s il
y
a
régularité
e
liaison,
que
s il
y
a renouvelle-
mentidentiquede la relation constatée. Le cas unique n a pas de
cause,
n est
pas
scientifiquementxplicable13.
Contre la tradition
13. F.
Simiand,
Méthode
istorique
t scienceociale
,
Revue e
Synthèse
is-
torique,
903,
p.
1-22
t
129-157.
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 91/144
88
durkheimienne,
ois
met en
œuvre un cas
unique.
Mais
il
s inscrit
aussi
d autre
part
en
rupture
vec la tradition
e la
géographie
ida-
lienne
reprisepar
toute l école
historique
des
monographies égiona-
les,
et
qu on
trouve
expriméepar
Lucien
Febvre
dès
1922
dans La
terre t
l évolution
humaine
qui imagine
e savoir
global progressant
par
simple
accumulation
de connaissances ocales
:
«
Lorsque
nous
posséderons
ncore
quelques
bonnes
monographies égionales
nouvel-
les, alors,
mais
alors
seulement,
n
groupant
eurs
données,
en les
comparant,
n les confrontant
minutieusement,
n
pourra
reprendre
la
question
d ensemble,
lui faire faire
un
pas
nouveau
et
décisif,
aboutir14. Contre a tradition idalienne,Bois proposeune synthèse
immédiate.
En
rapprochant
insi
un modèle
et un
cas,
le livre
oue
en fait
à la fois sur
l exemplarité
t sur
l exceptionnalité
u cas. Mais
il
se
heurte
ux
deux difficultés
ui
sont liées
à
ces
deux statuts.Dans
le
cadre
de la démarche
xpérimentale,
analyse monographique
emble
se
contenter
de
vérifier,
son échelle
propre,
des
règles
macro-
historiques ui
ont
été élaborées
par
ailleurs.
L exemple
n a
qu une
simple
vertu
llustrative,
e
statut
d une
vignette u on
va coller
ici
et là
dans
le livre. Dans
le cadre
de la démarche
nterprétative,
e
modèlevientachoppercontre insoutenable xcès de sens du singu-lier et contre a clôturecirculaire une
interprétationui
commande
la
description
t
qui
ne trouve ses critères
de
validité
qu en
elle-
même15.
De
cela,
Bois est
trop
fin
historien
pour qu on puisse
le
soupçonner
de ne
pas
s être
aperçu.
Mais
je
crois
que
le
souligner,
et
rapprocher
e fait
du traitement
ffectif éservé
Lournand,
per-
met
de
suggérer
u à
vrai dire dans
le
livre,
e modèle
et
l exemple
ne
communiquent
as,
le cas
et la théorie sont
sans relation.
À la
limite
on
pourrait,
ans
dommage pour
la construction
ntellectuelle
-
et sans
doute au
contraire
biffer
ystématiquement
outes es
références
u cas.
Alors, pourquoi lui avoir réservéune place ? J avanceraiune
hypothèse
nterprétative
our
finir.
Chacun se souvient
des
analyses
de
Roland
Barthesconsacrées
u discours
de
l histoire
t à
l effetde
réel
16. L histoire
narrative,
ouligne-t-il,
uise
sa
«
vérité
dans
le
soin
même de sa
narration,
dans l architecture
e ses
articulations,
dans
l abondance
des
détails
concrets
u elle
fournit.Oubliant
qu il
n y
a
pas
de
fait en
soi,
le discours
historique,
n ne cessant
de
répé-
ter
«
c est
arrivé
,
croit e
contenter
exprimer
e réel. C est ce
pro-
14. L.
Febvre,
a
terret évolution
umaine.ntroduction
éographique
l his-
toire
Paris,
Albin
Michel,
922.
15. J.-C. asseron, Biographie,lux,tinéraire,rajectoire, Revuerançaise
de
Sociologie
1990,
p.
3-22.G.
Levi,
Herméneutique
t
rationalité
,
Philosophie
et histoire
Paris,
p.
67-89.
16. R.
Barthes,
Le discourse
l histoire
(1967),
e bruissement
e
la lan-
gue.
Essais
ritiques
V
Paris,
e
Seuil,
984,
p.
153-166.
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 92/144
89
cédé
que
Barthes
appelle
«
l effetde réel ».
Lournand,
dans le livre
que j analyse,
semble bien
produire
e même effetde réel.
«
C est
arrivé
Lournand
»,
nous
rappellepériodiquement uy
Bois
en reve-
nant au
village.
Masquant qu au
bout du livre e
modèle
interprétatif
hypothétique
ubsiste
à l état
d hypothèse,
l
nous
signifie
insi
que
son modèle
a
quelque
chose
à voir avec la
réalité.
L analyse
du
cas
risque
alors
d occuper
une
position symétrique
à celle de la
statistique escriptive
ans
une
histoire érielle
radition-
nelle. Comme les tableaux
et
graphiques,
a
présentation
es données
locales est
réduite
un
usage symbolique,
une
sorte de convention
dont le rapport vec l argumentairest faible,mais dont la fonction
est
d afficher a validité de la recherche.
e
risque
n est
pas
mince
à un
momentoù la
discipline
spère
trouverdans la
micro-histoire
une
solution
ux difficultés e
l analyse
des structurest des
conjonc-
tures
massives,
et où
l on croit
parfois qu il
suffit
e
choisir
un
épi-
sode minuscule
u un horizon borné
pour
se voir décerner n brevet
de micro-historien.
a
question
n est
pas
seulement échelle et
il
est
urgent
e
réfléchir, nsemble,
ux
types
de vérification t
d exempli-
fication
ue
nous
menons,
aux modalités
d interprétation
t de
géné-
ralisation
ue
nous mettons
n œuvre. Une
pratique plus productive
du métiernaîtra d une connaissanceplus explicitedes formes uoti-diennesdu raisonnement
istorique.
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 93/144
Médiévales
1,
automne
991,
p.
91-108
Guy
BOIS
RÉPONSE
La
thèse défenduedans
ce
livre est celle d'une
mutationhistori-
que
décisive ux
alentours
de l'an mil.
De
quoi
s'agit-il
D'un
chan-
gement
de
système
ocial. Je
crois nécessaire
d'y
revenir n
instant
pour dissiper
d'évidents
et inutiles
malentendus.Une telle
mutation
n'implique pas que
du
jour
au lendemain
es
populations
concernées
vivent,
ensent
u
produisent
ifféremment,
ue
les
élites
dirigeantes
se renouvellent rusquement, ue l'habitat rural ou urbain soit bou-
leversé,
ue
l'économie de marché
nvahisse
out...
Bien au
contraire,
si l'on devait
se
placer
dans une
perspective urement
escriptive,
es
continuités,
e
part
et d'autre
de cette
charnière,
'emporteraient
e
beaucoup
sur les
changements.
ue
ceux-ci
soient
presque
impercep-
tibles
dans le court terme et
qu'ils
ne
prennent
orps qu'à
travers
l'accumulation e
phénomènes
éitératifs e semble ller de
soi.
Parler
d'un
changement
e
système
ocial
revient
donc à
souligner
e
pas-
sage
d'un
mode
d'organisation
de la
société
à un
autre mode
(phé-
nomène mmédiatement
isible)
et
à
rechercher
nsuite es
incidences
de ce passage sur le développement long terme de la société end'autres
termes,
déchiffrert
distinguer
es
logiques
de
développe-
ment
propres
à l'un et l'autre
système.
l
s'agissait par
conséquent
d'une
approche
résolument
héorique,
ma conviction
étant
qu'une
approche
théorique,
i
périlleuse
oit-elle,
st
indispensable
la
com-
préhension
e
l'émergence
e la
société
«
médiévale
.
Je
souhaitais,
sans
trop y
croire,
un débat sur la tentative
héorique.
Je le souhai-
tais d'autant
plus
vivement
ue
je
savais n'avoir
livré
qu'une
ébau-
che
incomplète, mparfaite
t certainement autive
bien
des
égards
et
que je
mesurais a distance norme
ui
nous reste
parcourir
ans
cette direction.
Malheureusement,
e
débat,
le vrai
débat,
n'est
pas
ouvert dans ce numérode Médiévales Pourquoi ?
La
première
aisonest
que
les
prémisses
noncées ci
étaient tran-
gères
à l'universmental de la
plupart
de mes
interlocuteurs.
'avais
pourtant ris
soin de
m'expliquer
ur
la
notion de
«
système
ocial
»,
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 94/144
92
à la confluence
'un certain
marxisme t
d'un certain tructuralisme
d'évoquer
le réseau
de cohérences
ui
le
fonde,
a
dynamique
ui
le
caractérise...
Mises
à
part
les
observations
de P. Bonnassie
et de
Ch. Wickham
tous
deux,
avec leursvues
propres, artageant
a même
exigence
ntellectuelle),
n cherchera
n vain le
moindreécho à ces
propositions,
e
serait-ce
ue pour
les
contester. .
Lepetit
ui-même,
qui
affecte
ependant
de
prendre
une certaine
hauteur
épistémologi-
que,
oublie
tout
simplementet,
de
sa
part,
l'omission
est
délibérée,
j'y
reviendrai)
e nous confier
on sentiment
ur la mise
en œuvre
de la
notion de
système
ocial.
Mais il y a plus : ce type d'approche dérange.Le mot est d'ail-
leurs
faible
pour
beaucoup,
l
est
insupportable.
nsupportable
ceux
qui
restent
es tenants
d'une
histoire
purement escriptive
t,
peut-
être
plus
encore,
à ceux
qui
ont
espéré échapper
à la
grisaille
de
l'empirisme
ar
le recours
systématique
une
lecture
nthropologi-
que.
Les uns
et les autres
voientdans
la démarche
héorique
ne
atti-
tude hautaine
qui
viserait
démonétiser
eurs travaux. Ils
se trom-
pent
comme
se
trompe
M. Bourin
quand
elle
me
prête
'intention
e
«
jeter
un
pavé
dans
la mare
»
pour
«
éclabousser es
grands
. Pour-
quoi
rapetisser
insi
les choses
en les
ramenant
u niveau
d'enjeux
médiocres elsque la défensefrileuse e la réputationcientifiquees
uns
ou des
autres
?
N'y
a-t-il
plus place
pour
une confrontation
d'idées
entre
hommes
de convictions
ans
y
mêler
des considérations
subalternes
Si tel
était e
cas
-
et,
pour
être
franc,
e
ne suis
pas
loin de
le
penser
quelle
débâcle
intellectuelle,
uel
déclin
du ratio-
nalisme
en
perspective
Voilà
pourquoi,
me
semble-t-il,
es
problèmes
de
fond,
à
quel-
ques
exceptions
rès,
ne
sont
pas
abordés.
Chez la
majorité
des con-
tributeurs
et
leur
choix
n'était
pas
innocent)
'intention
st claire
il
s'agit
de
démolir
e
livre
ou,
plutôt,
de
le
déconsidérer.
près
tout,
c'est
de bonne
guerre
quand
on
veut éluder
les
questions gênantes.
Ceci dit, je n'en remerciepas moins les animateursde Médiévales
d'avoir
organisé
cette
confrontation
uisqu'ils
m'accordent
un droit
de
réponse.
Je
m'efforcerai
'en user
en restant
ur
e terrain es
idées
à
l'exclusion
de toute
attaque personnelle,
l'égard
des
«
grands
ou des
«
petits
(ces
derniers
tant
d'ailleurs,
on
le
remarquera,
és
plus
venimeux).
l
me
faudra
aussi
-
réponse
oblige
-
être
parfois
très
terre
à terre.
Que
le lecteur
m'en
excuse.
Une
contribution
ignificative
À tout seigneur,tout honneur la contribution e R. Fossier
mérite
un sort
particulier,
ne
réplique
distincte.
L'homme
a
long-
temps
présidé
aux destinées
de la confrérie
es médiévistes
rançais
et
il la
représente
ncore
au
C.N.U. On
aurait
attendude son
inter-
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 95/144
93
venton un
minimumde
qualité
intellectuelle. hacun
aura
pu
en
juger
ses nerfs
'ont
trahi.
Dès les
premiers
mots
(«
ce
petit
ivre
autour
duquel
l'auteur a
pris
soin de
faire
grand
bruit
),
c'est
l'attaque
ad
hominem
Tradui-
sons : voici un
«
fils de
pub...
».
D'un bout à
l'autre
du texte
une
seule
stratégie attaquer
l'homme
pour
affaiblir e
livre
sans avoir
à en
débattre.
J'éprouve
uelque
nausée
à
devoir
répondre
cet indi-
vidu dans
lequel
M. Bourin
a sans doute
vu un
«
grand
»
que j'aurais
éclaboussé. Mais comment
ester ilencieux evant
de
tels
procédés
?
À
propos
de ce
«
grand
bruit
qu'il
sache
que
je n'appartiens
pasà ce réseau bien connuqui s'autocongratule ans quelques hebdoma-
daires et
quotidiens
sans parler
de la
télévision)
traversun
subtil
échange
de
services
destiné cultiver es
apparences.
Mon éditeur
simplement
ait on travail
ui
consiste faire
onnaître
n
livre.D'où
une
cinquantaine
de
comptes
rendus
presque
tous
favorables deux
prix
décernés ma
plus grande
surprise
un
prix
Sully
et un
prix
de
l'Académie
française) quatre
traductions
sans
le
financement
'aucun
organisme public).
Rien
de
plus.
L'émission sur
France
Culture
Aurais-je
dû
refuser 'aimable invitation
e J. Le
Goff
dès
la
sortie
du livre La
préface
de G.
Duby,
sortede
bénédiction
ue
plus
d'un
supporte rèsmal ? Je ne l'ai pas sollicitée. G. Duby me l'a propo-
sée
quand
il
a
appris que
la
publication,
prévue primitivement
hez
un autre
éditeur,
tait remise n
question
et
je
l'ai
acceptée
avec
un
grand plaisir
en
raison
de
l'estime
que je porte
à un
historien
apa-
ble
de remettre
ur
le
chantier
es
propres
conclusions,
e
qui
est la
marque
véritable
du
savant.
Songez-y,
Monsieur Fossier. Et
sachez
que
votre
nterpellation
st d'autant
plus déplacée
que,
à
maintes
epri-
ses,
je
me
suis
exprimé
ur l'effet
orrupteur
xercé
par
l'environne-
ment
médiatique
sur les sciences
sociales
:
j'y
vois
le
danger
majeur
pour
ces
disciplines
ar
il
introduit n
pilotage
de la
science,
en
aval,
par
le
jeu
d'une sorte de
«
demande sociale ».
Que dire sur le fond ? Le reste des observationsde R. Fossier
étant
du
même
tonneau,
le
dialogue
est
difficile
nouer. Sa
colère
est telle
qu'il
en
perd
tout
entendement. e
résultat
st
ahurissant.
Un
exemple quand
j'évoque
des
processus
oncrets
raversante Haut
Moyen Age
(crise
des structures
'encadrement ur le
plan
politique,
renforcement e l'initiative
ndividuelle u
paysan
et
du maître
sur
le
plan
économique)
R.
Fossier
a
une lecture
ui
vaut
son
pesant
d'or
(«
voir dans la mutation
e l'an
mil
un
glissement
u
politique
l'éco-
nomique
comme facteurdominant
boutit,
curieusement,
voir
des
notions
abstraites,
u
mieux
uridiques, gouverner
e monde
concret,
parce que
le veut a
théorie
fantasmes
»).
Me voici
donc,
fait
né-
dit,devenuplatonicien ar la grâcede R. Fossier un record stbattu.
Quant
à
l'interprétation
onnée de
la
rupture
du
Xe
siècle,
elle
n'est
pas
même
entrevue
par
mon
honorable
censeur.
Comment e
serait-elle
Il
n'a
pas
la
moindre dée de
ce
que
pourrait
être un
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94
système
ocial,
son
empirisme
aricatural t massif ui
interdisantout
effort
'abstraction
t
l'obligeant
se
cramponner
cette
pensée
dont
on mesurera
a
portée
et la
profondeur
«
tout est nuances et
varié-
tés
»
dans
la société médiévale
au
fait,
dans
quelle
société es faites-
vous
disparaître,
es nuances et ces variétés
). Ayant
ainsi
ignoré
e
contenu
systémique
e
la
thèse avancée
il
constate,
sans
sourciller,
que
l'emploi
des mots
«
rupture
,
«
mutation
,
«
révolution est
déjà
ancien
(qui
le contestera
)
pour
affirmer
ue
tout avait
été dit
depuis
longtemps
et
que
je
m'attribue
par conséquent
les
mérites
d'autrui. Admirable
eçon
de
rigueur
ntellectuelle
ont
je
sourirais
si je n'y voyais l'un des symptômes nquiétantsde la débâcle évo-
quée plus
haut. Un derniermot sur cette très
significative
nterven-
tion elle est
précieuse
ar elle
révèle
que
le
coup,
en matière
'idées,
a
porté
et
que
la
direction st bonne.
Merci
donc,
Robert
Fossier.
À
propos
de la
rigueur
Ce livre
manquerait
de
rigueur,
me dit-on
absence
de
critique
des
sources,
références
nsuffisantes,
acunes
bibliographiques...
Nous
voici devantl'angle d'attaque principal à quoi bon débattrede lathéoriesi celle-ci est construite ur du sable. C'est évidemment a
méthode a
plus expéditive
condition d'être en mesure
d'instruire
le
procès.
Or,
certains e sont
engagés
dans cette voie avec
quelque
imprudence,
me semble-t-il. n en
jugera.
Il
est bien vrai
que
la
Mutation
de l'an mil
ne se
présentepas
sous
la forme d'une thèse de doctorat
munie
de
l'appareil critique
répondant
ux
normes
anoniques
ou
académiques.
Je e
concède très
volontiers
ar
il
s'agissait
d'un choix
délibéré,
mûrement
éfléchi,
ont
je
dois
m'expliquer.
Ce choix
a été dicté
par
une
expérience
ntérieure.
n
1976,
'ai
publiéune thèsede doctorat,Criseduféodalisme muniede son appa-
reil
critique,
t
qui
avait en commun avec mon dernier ivre de
pro-
poser
une
interprétationystémique
e la
crise
agraire
du
XIVe
iècle.
Pour cette raison là
il
dérangeait
a nomenklatura niversitaire. n
lui
fitdonc le
sort
qu'il
est
aisé de faire un
ouvrage
de cette
nature,
à diffusion estreinte
l'étouffement
ar
le silence.
Fantasme
?
Que
le lecteur onsulte
e
rapport
onsacré
au bilan de
l'histoiredes
cam-
pagnes
médiévales
pour
les
vingt
dernières nnées
(dans
l'Histoire
médiévale
en France
*),
il
n'y
verra
pas
la moindre allusion à cette
interprétation
le
rapporteur,
otons-le n
passant,
a nom R.
Fossier).
Qu'il
se
reporte
nsuite la Nouvelle Clio consacréeaux
aspects
éco-
nomiqueset sociaux de l'Occident aux XIVe t XVe iècles collection
1. L'Histoiremédiévale
n
France Bilans
t
perspectives
textes
éunis
ar
M.
Balard,
Le
Seuil,
991.
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 97/144
95
dont
la
fonction,
omme chacun
sait,
est
d'établirdes états des
ques-
tions
et des
bibliographies) parmi
environ
700
titres
d'ouvrages
ou
d'articles,
pas
la
moindre race de mon livre. Je
ne
commenterai
as
ces faits mais
j'en
ai tiré
une
conclusion
simple pour
briser
e
mur
du silence
il
fallait
viser
une diffusion
lus large, adopter
le mode
d'exposition
e
plus
clair
possible,
ne
pas
noyer
e raisonnement ous
une accumulation
de données
de
pure
érudition.Si
j'avais
choisi de
publier
toutes es
étapes préliminaires
e
la
recherche,
n
matière
de
toponymie,
d'onomastique
ou
de
métrologie,
a confidentialité e
l'ouvrage
eût été assurée
et ce
«
débat
»
lui-mêmen'aurait
pas
lieu.
Ceci dit, qui m'aura cru assez naïfpour ne pas avoir prévuce type
d'attaques
et ne
pas
avoir
«
bétonné
,
comme on le
dit,
de
façon
très
expressive,
ans le
langage
sportif.
Que
mes
collègues
de
Müns-
ter et
B.
Rosenwein
se rassurent
j'ai
passé
des années
à
résoudre,
dans
la
mesure
du
possible,
es
principales
ifficultés e la documen-
tation
chronologie
rronée
ou
imprécise
'un
grand
nombre
d'actes,
incertitudes ur
les limitesde certaines
villae flottements e l'ono-
mastique).
Ils
le savaient
d'ailleurs fort
bien
puisque
nous avions
échangé
une
correspondance
ce
sujet,
il
y
a
déjà cinq
ans,
et
que
je
leur
exprimai
lors
mon
scepticisme
ur
la
possibilité
de
les résou-
dre,même munid'un ordinateur, l'échelleglobale du cartulaire, t
ma
préférence
our
un
traitementminutieux
l'échelle d'un ou deux
villages.
Je les attends
donc d'un
pied
ferme.
Mais sans
attendre,
prenons
'exemple
du
diagramme
des
prix,
vivement ontesté
par plusieurs,
dont
R. Fossier et B.
Lepetit,
sous
prétexte
ue
les références
e sont
pas
produites.Remarquons
d'abord
qu'il
ne fallait
guère
plus
d'une heure
à un
étudiant
de maîtrise
a
fortiori
B.
Lepetit
ou ses
collaborateurs)
our
s'assurer
de
sa
vali-
dité en se
reportant
ux seules
analyses
des actes dans le
cartulaire
(elles
mentionnent vente
de
vigne
dans telle localité
»)
à
partir
des
dates
repérables
ur le
diagramme
t
qu'il
ne
s'agissait
donc
pas
de
donnéesdisperséest incontrôlables.uisquevous les voulez, es voici
actes
n°
549,
954, 1202,
1273, 1282, 1436, 1631, 1699, 1730, 1737,
2297, 2614,
2681.
Cependant,
'attaque, significativement,
e
se
limite
pas
aux seules références
ocumentaires.
es
prix,
me
fait-on
docte-
ment observer
B.
Rosenwein
et
d'autres),
ne
concernent
u'une
fai-
ble
part
des transactions
ffectives
c'est
l'évidence
)
;
ils
portent
ussi
la
marque
des relations ociales
et des
rapports
e force ntre es inter-
venants
autre
évidence
que
l'on
pourrait
d'ailleurs aussi
bien
appli-
quer
au
prix
du
pétrole,
de nos
jours).
L'exercice
d'hypercritique
e
poursuit B.
Lepetit) par
la mise en doute
de la stabilité e la
perche
dans
la
période
considérée.
Bref,
on fait
flèchede tout
bois,
au ris-
que de mettre n évidence e caractère ystématique e la volontéde
dénigrement.
e
pouvant
fournir e mercuriale
our
le
Xe
iècle,
e
me limiterai
trois observations
1)
Il
était
difficile e s'entourer
e
plus
de
garanties,
otamment
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96
en matière
de
métrologie,
n ne relevant es
prix que
dans
une aire
restreinte,
oumise une même autorité t sans
rupture
olitique
dans
la
période
concernée.
2)
Je
persiste penserque
les données relevées
eflètent,
lus
ou
moins
grossièrement,
ne tendance de fond car la
pente
des
prix
est
très forte
un
quadruplement).
3)
Je constate enfin
sans
en
faire un
argument
'autorité) que
le
résultat
obtenu est en concordance
remarquable,
ant en
rythme
qu'en
chronologie,
vec ceux
obtenus
à
Barcelone et à Milan
par
P.
Bonnassie
et C. Violante
résultats
ui,
à ma
connaissance,
n'ont
nullement té contestés).Voilà qui devraitdonnermatière reflexion
à
ceux
qui
ne veulentvoir dans les
prix
du cartulaire
ue l'expres-
sion
du
rapport
particulier
ntre
'abbaye
et
«
ses voisins
»,
ou
à
R. Fossier
quand
il
a le front
'écrire
propos
de ma
«
flambée
des
prix
»
:
«
c'est
une
pure
vue de
l'esprit
en
raison
de
la
quasi
nullité
des
renseignements
e cet ordre à
Cluny
».
Voici donc un
premier xemple
de
mauvaise
querelle,
nourriede
toutes les ficelles
de
l'hypercritique
t,
au
demeurant,
gratuite
puisqu'elle
ne mettait
pas
en
cause un résultatbouleversant u iné-
dit. Le but recherché tait de
jeter
le trouble sur la
qualité
du tra-
vail. Muni des piècesdu dossier, e lecteur e feraaisémentune opi-
nion sur la
qualité
de la
critique
et la
bonne
foi
de ses auteurs.
Le deuxième
exemple
n'est
pas
moins
significatif.
l
s'agit
du
reproche ui
m'est
fait de confondre ndividu t famille t de
cons-
truire
'approche
démographique
ur cette
confusion.
Rien de
moins.
Le
reproche urprendra eut-être
eux
qui
ont lu
ma thèse et observé
la
place
donnéeà la
critique
e la
notionde
«
feu
»
à la
fin
du
Moyen
Age.
Mais
de
quoi s'agit-il
ci
?
Tout
simplement
u fait
que pour
avoir une idée
plus précise
du
nombredes habitantsde Lournand et
des hameaux voisins
'utilise
les
renseignements
ournis
par
les actes
relatifs ux transactions oncières,esquels précisent, our définir es
confins
d'une
parcelle
elle touche à
la
terrede
X,
Y
ou Z. Formel-
lement
X,
Y et Z
sont,
e
le reconnais
olontiers,
es
individus.
Aucun
de
ces actes
ne dit
que
telle
parcelle
ouche à la terre e
X,
sa femme
et
ses
trois enfants.
Cependant,
nous connaissons suffisammentes
structures amiliales
en Mâconnais au
Xe
iècle
pour
affirmer,
ans
l'ombre
d'un
doute,
que
la cellule
conjugale
est
la norme
absolue
et
pour
en déduire
que
derrière
X,
Y
et
Z
se
profilent
es
foyers,
e
dimensions
variables,
évidemment
des
célibataires,
des
couples
sans
enfant,
des
couples
avec
plus
ou moins
d'enfants...).
Il
va de soi
que
la
solution
déale
pour passer
de l'individu u
foyer
onsisterait
pro-céderà des reconstitutionse familles.Mais pointn'est besoin d'être
expert
n
démographie
médiévale
pour
savoir
que
cette méthode
est
rigoureusement
mpossible
vant
'apparition
des
registres
aroissiaux,
avant le milieu du
xvie
(à
Lournand,
début
xvne).
On
est
donc con-
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100
l'une d'elles.
Le terme
désigne
dès
900
à la fois
un
habitat
hameau
ou
village)
et son
finage,
ux limites onnues
de tous. La
perception
de
l'espace
est encore
de caractère
rigoureusement
ublic.
Le contresens
erait
un détail s'il
n'entraînait
sa suite
une iné-
vitable
cascade
d'erreurs.
Tel
personnage
vend un
champ
dans
telle
villa
Avec
une
conception
domaniale
de la
villa,
il
devientnécessai-
rement
un
grand propriétaire
t
il
ne reste
plus qu'à
s'interroger
(comme
le fait d'ailleurs
M.
Bourin)
sur les raisons
qui
l'ont
poussé
à aliéner
une
si
modeste
part
de son
patrimoine.
Tout
est
brouillé
et la boucle
est bouclée.
Par
définition,
n ne
perçoit plus que
des
domaines, l'alleu s'évanouissantaux yeuxde l'historien,par le jeu
de cette
ecture. ur
le
plan
social,
on
multiplie
a
puissance
de l'aris-
tocratie,
andis
que
les alleutiers
assent
à la
trappe.
Quant
à
l'habi-
tat,
il
apparaît
alors
dispersé
aux
quatre
vents
du territoire t
il
ne
reste
plus
qu'à
théoriser
ur
son subit
regroupement.
Vérité à
Cluny,
erreur
u-delà ? L'ennui est
que
l'on a montré
récemment
ue
le même emboîtement
e
circonscriptions
e
retrou-
vait,
sous
des
formes
dentiques en
dépit
des
«
nuances
et
variétés
de
la
société
médiévale)
dans
de
grands
nsembles,
el
que
le
royaume
de Bourgogne.Voici, on le comprendramieuxmaintenant, ourquoi
j'ai
délibérément
carté es
comparaisonsrégionales
la
fréquence
u
contresens
uffit
invalider,
dans l'état
actuel
des
choses,
un
grand
nombrede ces
comparaisons,
auf à
passer
au crible hacune
des
étu-
des locales.
Mais dès
que
cette
question
sera
pleinement
larifiée,
a
confrontation
es situations
articulières
eviendra on seulement tile
mais
indispensable.
Regrettons,
our
terminer,
ue,
sur
ce
point
non
négligeable,
un
échange
de vues n'ait
pas pris place
dans
ce
débat.
C'est sans
doute
partie
remise...
L'acception
du terme
de
manse
mériterait es
développements
analogues.
C'est
à tort
que
l'on
y
a vu nécessairement
a tenure 'une
famille. l s'agitd'une exploitation omplète doncd'une catégorie co-
nomique)
mise en
valeur
par
une
famille,
ndépendamment
u statut
de
la terre
alleu
ou
tenure).
Sur ce
point
encore,
silence
de mes cri-
tiques.
Pourquoi
?
Ne voit-on
pas que
le
dérapage
sur
ce terme
brouille
un
peu plus
l'analyse
sociale
en faisant
disparaître
e nou-
veaux
contingents
'alleutiers
Quant
aux
termes e
servus,
ncilla
et
mancipio le
collectif
eu-
tre), 'en
ai suffisamment
arlé pour
ne
pas y
revenir
onguement.
Quelle
discrétion
ncore Une
non
médiéviste,
N.
Gauthier,
'aven-
ture
sur ce terrain
«
je
ne suis
pas
sûre,
nous
dit-elle,
u'il y
ait
une
frontièreociale
majeure
entre erviet hommes
ibres .
Mais
j'ai
proposé des critères récis double exclusion,de la vie publique et
de la
propriété)
les
accepte-t-on
Il
suffisait,
our
démolirmes con-
clusions,
de
produire
à
partir
des
milliersde transactions
oncières
dont nous
disposons
pour
le
Xe,
un
acte dans
lequel
un
servus
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101
«
privé
donne,
vend
ou
échange
une
parcelle
ui
appartenant.
our-
quoi
ne
répond-on
pas
à cette
nvitation,
ormulée
plusieursrepri-
ses
déjà
?
Évidemment,
i
d'un côté
on fait
disparaître
es alleutiers
et de
l'autre on détourne
on
regard
de la condition
ervile,
a
fron-
tièresociale
a toute
chance d'être
estompée.
Sur ce
point,
on
devine
cependant
isément e
que
sera
l'échappatoire
elle consistera dénier
toute
valeur au vocabulaire
au
profit
d'une lecture
plus performante
et sous
couvert
d'une
plongée
d'avant-garde
ans les mentalités
ocia-
les.
Bref,
la fuite en
avant.
Sur tous ces
problèmes,
e lecteur
un
peu
distant
ttendrait ne
discussioncourtoise t sereine omme devrait 'être tout débat scien-
tifique.
Or
il ne voit
que blocages
et
exaspérations. ourquoi
? N'est-
ce
pas
une vraie
question
?
Elle met
en
jeu
non
pas
les hommes et
leur caractère
plus
ou
moins
facile,
mais
un mode de fonctionnement
universitaire.
e
petit
monde des
médiévistes
rançais
st structuré
ar
des
réseaux
de
pouvoir,
fortement
entralisés,
ont le C.N.U. consti-
tue le
noyau
central.
l
en résulte
une
logique
implacable.
Pour la
plupart,
es
perspectives
e carrière
mpliquent'allégeance
ce
noyau.
Inversement,
e
noyau,
à défaut
de
prestige
cientifiqueon
est
loin
du
despotisme
clairé
de E.
Perroy
ou
de
J.
Schneider),
ne doit sa
prééminence u'à un strict xercicede ce pouvoir. Dans ces condi-
tions,
la moindre
nterpellation
'ordre
scientifique
menace le fonc-
tionnement
u
microsystème,
n
risquant
de déchirer
es
apparences,
pour
les dominants
t les
dominés.La suite est
facile à
comprendre...
La seule
règle
de
comportement laquelle je
me
tiens,
a
seule
con-
forme
une
éthique
démocratique
t
scientifique,
st de ne
pas
entrer
dans
cette
ogique
génératrice
e
médiocrité
tous les
niveaux,
quoi
qu'il
en
coûte,
y compris
sur le
plan
financier.
Parlons maintenant es vrais
problèmes
Fort
heureusement,
e
dialogue
est
plus
facile en
règle générale,
avec les
collègues étrangers.
'est donc avec eux
et
avec P. Bonnas-
sie
qu'il
sera
repris,
en suivant
un ordre
thématique.
1)
Sur
la croissance
agraire
Le débat sur
la
réalité
de la croissance
du Haut
Moyen
Age
est
aujourd'hui
dépassé (Cf.
Colloque
de
Fiaran).
Deux mots suffiront
donc.
S'agissant
du
Mâconnais,
je
ne fonde
pas
le
diagnostic
ur tel
ou tel indicateur, achant 'inévitablefragilité 'une approche quan-
titative ur
laquelle
on
pourrait
débattre l'infini.Je la fonde essen-
tiellement ur
la
convergence
es
signes
le
maillage
serré des
com-
munautés
urales,
es
signes
manifestes
e
densités
levées,
'extension
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
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102
des
cultures,
a
preuve
des
progrès
echniques
moulins,
otations).
e
telles
corrélations
n'ont de sens
que
dans un
climat de
croissance.
Plus ouverte
st la
question
des
origines
du
dynamisme graire
P.
Bonnassie
met en avant
le rôle des
paysans
libres tandis
que
A. Verhulst
et
P.
Toubert)
insiste
sur
le rôle moteur du
grand
domaine.
Je maintiendrai
ci
mon
point
de
vue,
à savoir
que
le take
off il
suppose
une
énergie
ociale
immense) 'explique
par
la
conju-
gaison
des efforts
es
différentes orces sociales
(maîtres,paysans,
esclaves),
une
conjugaison
de caractère
xceptionnel
ar elle s'inscrit
dans un état
donné de la
société,
dans
lequel pour
chacune de ces
forces l
y
a non seulement ntérêtmais obligationde produirecet
effort.
L'esclave
parce qu'il
est
proche
de
l'intégration
le
maître,
en raison
du
dépérissement
u
cordon ombilical
qui
le
liait
au
pou-
voir
le
paysan
parce que
libéré des
contraintes
tatiques.
Mais
il
se
pourrait
fort bien
que
la
part
des uns
et
des
autres soit différente
ici
et là et
que
Bonnassie
et Verhulst
ient
'un
et l'autre raison dans
leur domaine
respectif.
a
question
renvoiedonc au
diagnostic
ocial
et
à
l'opportunité
de
distinguer
es sous-ensembles ans
la
société
européenne
2) Sur le diagnostic ocial
«
Société
esclavagiste
? N. Gauthier
s'étonne
de la formule
quand
les esclaves
ne
représenteraient
ue
15 % de la
population
et
quand
les
paysans
sont
plus
nombreux.
Relisez,
chère
madame,
de
manière
plus
attentive
t vous
verrez
que j'exclus,
pour
cette
raison,
l'idée
d'un
«
mode
de
production
sclavagiste
,
lui
préférant
a notion
de
«
système
e
type
ntique
». Et
permettez-moi
e vous
faire
obser-
ver
(car
vous
semblez,
avec
d'autres,
ne
pas
l'avoir
compris) que
le
terme
antique
»
est
pris
ci dans un sens
structurelt non dans
une
acception purement
hronologique.
Vous
ne me ferez
pas
dire
que
l'Antiquité e prolonge usqu'en l'an mil, pour la raison trèssimple
que je
ne
sais
ce
qu'est
1'«
Antiquité (même
observation
pour
le
«
Moyen Age
»).
Par société
de
type
ntique,
entendez eulement ne
société
fondéesur
la
trilogie
ociale
suivante
aristocratie e
pouvoir
et de
fortune,
aysannerie
n
majorité
ibreet
alleutière,
sclaves.
Est-
ce
clair ?
Étant bien
entendu
ue
cettecombinaison
originalepeut
se
présenter
ous
les
formes es
plus
diverses t
que
le
puissant
Franc
du
IXe
est
loin d'avoir
le
profil
de
votre aristocratie
omaine du Bas
Empire.
Laissons
donc les
querelles
colastiquespour
en venir
la diffi-
cultéprincipale.
Elle
tient la
difficulté
ue
nous
éprouvons
ous
à
saisir à la fois l'unité et les diversités es sociétésconsidérées.Car
nous
avons sous
les
yeux,
es
uns et les
autres,
des sociétésconcrètes
dont
aucune n'est
identique
l'autre.
Le Mâconnais
n'est
ni la Lom-
bardie,
ni la
Catalogne,
ni
la
Germanie,
ela va de soi.
La
question,
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 105/144
103
dès
lors,
est
de savoir si
l'historien
oit se
satisfaire
u
seul constat
des
différences,
i
sa
tâche s'arrête
à,
avec des ambitions
ui paraî-
tront
tous,
ou
presque,
assez limitées ou
si,
au
contraire,
u-delà
des
diversités,
l
se donne
pour
tâche la recherche 'une éventuelle
unité structurelle.
n
d'autres
termes,
y-a-t-il
es cohérences
tructu-
relles
usceptibles
'avoir une
portéegénérale
On aura
peut-être
om-
pris que
dans la
monographie
ur
Lournand
'objectifprioritaire
tait
la recherche
e
ces
cohérences u de ces
ligatures
ociales sans
pour
autant
prétendre ue
les formes oncrètes e la société lunisoise ons-
tituent
un modèle
de
portée générale.Tentons d'avancer dans cettedirectionla recherche es cohéren-
ces).
La
pierre
ngulaire
du
débat,
me
semble-t-il,
st
la
question
de
la
paysannerie
ndépendante,
e
sa
place
voire de
son existence
même.
Mesurons
d'ailleurs cet
égard
e chemin
parcouru
il
y
a trente
ns,
on en
soupçonnait peine
l'existence.
l
est
clair,
cependant,
ue
ce
point
fait encore
'objet
d'appréciations
rès
divergentes.
'idée selon
laquelle
la masse des
paysans
a été
réduite
très tôt
(bien
avant le
XIe
iècle)
dans une
quasi
servitude st à l'évidence
présente
ans
beau-
coup d'esprits.
Quand
les historiens
e
Münster
évoquent
mes
pro-
priétaires,
ls
y
mettent
es
guillemets
ubitatifs. t l'on
devine aisé-
ment ue les contresensvoqués plushaut ne facilitentas une appré-
ciation correcte
u rôle centraldes
petits
lleutiers.
Pourtant,
'ai
le
sentiment
ue
nous
n'en
sommes
plus
très loin.
«
L'importance
de
la
petitepropriété
aysanne...
est
encore
une
caractéristique
majeure
de
la société catalane ou castillane du
Xe
siècle
»
nous dit Lluis To
Figueras.
P. Bonnassie va
même
beaucoup plus
loin
en
parlant
de
l'émergence
ur les
rives de la Méditerranée 'un
«
régime
de liberté
paysanne
généralisée
,
analogue
au
«
mouvement e libération
pon-
tanée
»
dont
parlait
G. Tabacco
à
propos
de l'Italie.
L'hypothèse,
assurément,
st du
plus
haut ntérêt
our
la
compréhension
e la révo-
lution
féodale. Avec
A.
Verhulst
a distance est moins
grande
qu'il
ne paraît ce qu'il voit au-delà du Rhin ne diffère uèredu Mâcon-
nais
;
et entre Seine
et
Rhin,
il
attribue
40
% de la
population
à
l'encadrement
omanial,
ce
qui
laisse 60
%
à la
paysannerie,
à où
sa
position
est
réputée
a
plus
faible
devant une aristocratie omina-
trice.
La société
anglo-saxonne
ne contredirait
as davantage
cette
hypothèse.
ar
conséquent,
nous serionsbien devant un socle social
de
première
mportance
l'échelle
de
l'Europe.
Le
basculementde
ce
socle dans
un
régime
e
dépendancegénéralisée le régime eigneu-
rial)
ne
peut
donc
pas
être saisi comme un
phénomène
mineur,
ou
un
simple
petit pas
dans le
cours
d'une évolution au
rythme
imperceptible.
C'est
ici
qu'interviennent
es
objections
de
Chris Wickham.
Elles
méritent
a
plus grande
ttention
ar
l'homme n'est
pas
seulement n
érudit
au-delà de toutes
contingences,
l
défend des
convictions,
n
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104
véritable ntellectuel
u'il
est.
L'opposition
alleu/tenure,
ous
dit-il
d'abord,
n'était
pas
totale
avant la mutation.
l
a
raison et
nombre
d'alleutiers mâconnais devaient
aussi cultiver
quelques parcelles
en
«
précaire
ou
autre formede tenure.
l
relève
en outre
a
présence
de nombreux lleux
paysans
dans la Toscane
des
xie-xne
iècles,
bser-
vation
qui
se vérifie ans doute
ailleurs.
En
quoi
ceci contredit-ila
thèse
du
basculement Dans une
dialectique
de
l'ancien et
du nou-
veau,
l'émergence
du nouveau au
sein
de
l'ancien,
la
persistance
e
l'ancien au
sein
du
nouveau,
seraient-elles evenues
nconcevables
Et
ne
peut-on
dmettre
ue
la
cassure
ne
soit
pas partout
ussi fran-
che, sans nier a réalitéde cettecassure ? Il n'est pas surprenant ue
l'objection s'appuie
sur
e
cas
italien.
Nous voici en
effet,
ci,
au cœur
de l'ancien
système ntique,
en un lieu où
l'effondrement
es struc-
tures
publiques
a été fortementtténué
par
la
vigueur
de
l'héritage
urbain.
Que
le
passage
au
système
éodal
y
ait
pris
des
formes
arti-
culières,
et
à certains
égards incomplètes
n'a rien
pour
surprendre.
Je serai
plus
réservé ur a distinction
u'il
introduit ntre
e che-
minement conomico-social t le cheminement
olitique
césure
ociale
du
VIIIe
t
césure
politique
du
x-xie).
Le
raisonnement
e semble
pro-
longer
une dichotomie
eigneurie
oncière/seigneurie
anale
que
l'ensei-
gnementuniversitaire, ans un souci pédagogique, a accentuée àl'excès. En
outre,
derrière ette dée se
profile
celle
d'un
étagement
de
structures
structures,
uperstructures...)
ont le
caractère
opéra-
toire
pour l'analyse
des sociétés n'est
pas
évident. Enfin
et
surtout,
il
sous-estime
e rôle
décisif
de
l'effondrement es
structures
ubli-
ques
dans
la mise au monde de la
seigneurie tout
court).
Certes,
Ch. Wickham
conserve-t-il inalement on
point
de vue
initial
(«
le mode de
production
féodal a
commencé à dominer
l'Europe
à
partir
e
la
chutede
l'Empire
romain
)
mais
quand,
quel-
ques
lignes
plus
loin,
parlant
du Haut
Moyen
Age,
il
écrit
«
je
suis
sûr
que
sur
ce
point Guy
Bois
à
tout à fait
raison
cette
période
a
une logique économique et politiquedifférente e celle qui l'a sui-
vie
»,
non
seulement
l
amorce un
mouvement,
mais
il
fait
'essentiel
du chemin
vers
a
reconnaissance
u
passage
d'un
«
système
ocial
»
à
un
autre
(ou
d'une
logique
à une
autre).
Il
est
un autre
point
du
diagnostic
ocial sur
lequel
des conver-
gences
e
précisent
le rôle
capital
d'une
petite
ristocratieocale
dont
la
cohésion
repose
sur un
réseau serré
d'alliances,
qui
vit du
pouvoir
autant
que
de la
terre,
ans constituer ncore une
classe
seigneuriale
malgré
a
tentation
randissante 'imposer
son autorité la
paysan-
nerie. Ch. Wickham me faisait observer
qu'il
m'avait
précédé
dans
l'identification e ce
groupe
à travers es
«
notables
»
toscans. Je lui
en donne volontiers cte, aussi bien qu'à Davies pour la marchebre-
tonne ou
qu'à
Claudie Amado
pour
les environs
de
Béziers. Même
similitude vec les détenteurs e ces
«
petits
domaines
»
décrits
par
Verhulst
pour l'époque mérovingienne.
out
se
passe
ici comme
si
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 107/144
105
ce
groupe
avait été
bousculé,
à
l'époque carolingienne, ar l'expan-
sion des
Francs et
de
l'Église.
Voilà
qui
confirmerait'idée d'une
maturation ociale
plus précoce
entre
Loire et
Rhin,
surtout i
on
relie
ce
phénomène
à la faiblesse
relativede
l'esclavage
dans
cette aire.
Notons
cependant
une
divergence
vec mon ami
Bonfrassie
uand
il
voit dans ces
«
maîtres
«
une couche
supérieure
e la
paysannerie
.
Ne doit-on
pas
réserver trictement
e termede
«
paysan
»
à ceux
qui
travaillentux-mêmes
eurterre
Il met
cependant
e
doigt
ur e
genre
de vie très modeste
des maîtres
t
rejoint
insi les observations umi-
neuses
de Wickham
sur la
pauvreté
matérielle
de l'aristocratiedu
« Haut Moyen Age ». N'est-cepas là le problème entralposé, à des
degrés
divers,
par
le délabrement
e la machine fiscale et l'affaiblis-
sement
des structures
'encadrement On
y porte
remède,
grâce
au
pouvoir
franc
et
dans
une aire
géographique
imitée,
par
une
politi-
que d'expansion
et la créationvolontariste
e
grands
domaines. Mais
ailleurs
Quand
et comment
e
tissu social
ancien se serait-ilmodi-
fié
? La
petite
ristocratie
'est-elle
as
dans une sorte
d'impasse
dont
elle
tenterade sortir
n
se
rebellant Considérée sous
cet
angle,
la
géographie
de la
mutationféodale
pourrait
'éclairer
d'un
jour
nou-
veau. Elle serait
plus
graduelle
dans
un
espace septentrional
ù des
solutionsnouvelles e sontpeu à peu acclimatées si j'ose cette com-
paraison,
à la
manièrede
l'Angleterre
uand
elle
s'engagera
dans la
voie de la société
bourgeoise
-
ou
capitaliste).
Elle se ferait ussi
(mais
pour
une raison
inverse)
sans
rupture
clatante,
sans
guerre
civile,
dans un
espace
méridional
Italie
surtout)
sans
«
hiatus
»
(Wickham),
par compromis
uccessifs
u
sein
d'armatures
publiques
gardant
eur consistance.
La zone intermédiaire
erait celle des tem-
pêtes
ou
du
séisme
social,
la maturation
u
processus
social
y
étant
à la fois
trop
et
pas
assez
avancée
pour
que
la
mutation
oit
maîtri-
sée
;
celle aussi
où,
en raison
de la radicalisation es
conflits,
e
para-
chèvent
es formes
déologiques
et institutionnelles
u nouvel ordre
social. Simples conjectures, videmment, ue je n'aurais mêmepas
évoquées
ci si
certains e m'avaient
prêté
'intention
e
faire
de Lour-
nand un
modèle
applicable
en tous lieux.
Et
l'esclavage
? Ne
séparons pas davantage
'unité
et
les diversi-
tés.
L'unité réside
dans le
maintien
plus
ou moins
général, plus
ou
moins
ferme,
de
l'esclavage usqu'à
la
fin
du
Xe,
et
parfois
au-delà.
Ceci
dit,
la
chronologie
de son déclin
doit être
précisée
et P. Bon-
nassie
reste
e
pionnier
ur cette
voie. Sa
géographie
ussi,
rienn'inter-
disant
de
penser
d'ailleurs
qu'ici
ou
là,
à la faveur
d'une
crise,
l
n'ait
pas
disparu plus
tôt.
Enfin,
tout
en
persistant, 'esclavage
se trans-
forme.Wickham
a mille fois
raison d'insister ur
l'importance
e la
condition ociale réelle,au-delà du statut uridique. L'esclave tendà
devenir
un
tenancier,
l
se
rapproche
du
tenancier
ibre. Et
pourtant,
une frontière ubsiste
sur
laquelle
je
ne
reviens
pas.
Quant
au
marché,
onsidéré
ommeun mécanisme
ropre
u nou-
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 108/144
106
vel ordre
féodal,
que
de
malentendus
On confond
ommerce t mar-
ché,
on ne
s'interroge
as
sur les
dynamiques
de
l'échange,
fonda-
mentalement ifférentes
vant
et
après
l'an
mil,
même si les
signes
annonciateurs
u nouveau
marché
se
manifestent
ien
plus
tôt dans
l'espace septentrional.
'essentiel
ou
l'unité
de ce
marché
appelons-
le
«
marché féodal
»
pour
éviter oute
confusion)
tientà deux cho-
ses : l'entrée
en
scène,
sur une
large
échelle,
des
petits producteurs
individuels ans la
sphère
de
l'échange
la
large
autonomiede
déve-
loppement
cquise
par l'échange
ocal
(ville/campagne).
videmment,
le
phénomène
st
progressif
t
la
campagne
n'est
pas
aussitôt
non-
dée d'argent.Le processusse heurtemêmeà de multiples bstacles
qu'il
surmontera
ar étapes
successives.
Faute de
place
et
convaincu,
par
ailleurs,
que,
dans
une
perspective
e
synthèse,
a
difficulté
e
viendra
pas
de
là,
je
n'en
dirai
pas
davantage.
De ce
tour
d'horizon,
si
incomplet
oit-il,
e garde
le sentiment
que
les voies
d'une
synthèse
ont ouvertes
pour peu qu'on
le veuille
et
que
l'on ne confonde
as
débat
scientifique
t
règlement
e
compte.
Oui,
les
historiens e
l'espace
méridional oivent
prendre
n
compte
les
problématiques
eptentrionales,
omme
e recommande .
Verhulst
(et
réciproquement).
ui,
les
participants
oivent se montrer sou-
ples et ouverts selon la formulede Y. Morimoto,dans une inter-
vention
mpreinte
e
sagesse
et de courtoisie.
Oui,
il
faut savoir aussi
revenir ur
des erreurs
uand
elles sont devenues manifestes.
Réponse
à un
« observateur
xtérieur
Voici donc l'éminent
nimateurdes Annales entrant
n
lice.
En
«
non
spécialiste
,
en
«
observateur
xtérieur
et,
on le
devine,
en
toute
mpartialité.
vec une
grande
hauteurde vue
puisque
son
pro-
pos
sera,
pour
l'essentiel,
pistémologique.
Avec
aussi
un
regret
mal
dissimulé « ce livre a été reçu») et l'intention ort laired'y mettre
bon
ordre,
c'est-à-dire
de clore au
plus
vite
le débat. Y.
Morimoto
n'aura
donc
pas
faitécole du côté du boulevard
Raspail.
Peu
importe.
Attachons-nous
lutôt
à suivre
le commentet le
pourquoi
de son
intervention.
Pour Bernard
Lepetit,
a cause est
entendue le modèle et l'exem-
ple
ne
communiquent
as,
le
cas
et la
théorie
ont sans relation.
À
la limite
n
pourrait,
ans
dommagepour
la constructionntellectuelle
-
et sans doute
au contraire biffer
ystématiquement
outes es
références
u cas.
Et
d'ajouter
:
«
la
présentation
es données est
réduite un usage symbolique
dont la fonction
st d'« afficher a
validitéde la recherche . Autrement it rassurez-vous,a construc-
tion est
purement
péculative
t elle se dissimule ous les
pâles
ori-
peaux
de
Lournand.
Après
la
conclusion,
voyons
les
arguments
ui
la
justifient.
D'abord,
«
la faiblesse
des données
empiriques
et
il
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 109/144
107
en
prend
pour
exemple sur
plusieurs ages)
mon
diagramme
es
prix
et
le
problème
du
marché.
Non
pas qu'il
se soit
plongé
dans
le
car-
tulaire
ce
n'était
pas
de sa
compétence)
mais,
nous confie-t-il
n
note,
il
reprend
ci
les
résultats
Pun
de
ses
collaborateurs
ont
«
la
com-
pétence
est
plus
évidente
que
la
mienne
(sic).
Résultat
«
aucune
tendance
n'y (dans
le
prix
des
vignes)
emble
perceptible
près
950
».
J'ai
répondu
dans
la
première
artie
de
cet articleen
produisant
es
références
orrespondantes.
'attends es
vôtres
ou
celles
de votre ol-
laborateur)
ar,
à
défaut,
votre
ntégrité
ntellectuelle
isque
fortd'être
quelque peu
mise à mal
(ou,
dans
la meilleure
hypothèse,
n
excès
de confiance dans la compétencedu premiervenu). Pas d'ancrage,
dites-vous
ncore,
de la théoriedans
le réel
?
Autrement
it,
les
dif-
férentes
orrections
émantiques
villa,
servus,
mansus...)
sur
quoi
cha-
cun
peut
voir
que
le livreest
construit,
ous les
attribuez
mes
qua-
lités
spéculatives
Merci,
mais
l'hommage
serait mmérité.
n
fait,
vous
n'en soufflez
mot
car,
sans
doute,
n'était-ce
pas
de
votre
com-
pétence
ni
de celle
de votre
collaborateur
).
Et,
mal à l'aise sur ce
terrain,
ous
passez
au deuxième
volet
de
l'argumentation,
lus
abs-
trait mais
aussi
plus
personnel.
L'exemple
local aurait
deux statuts
ontradictoires
il
serait
la
foisexemplairet exceptionnel. ontradictionui renverrait une con-
tradiction
e méthode. J'userais
la
fois
d'une démarche
nterpréta-
tive
(observation
ntensive
d'un cas
pour
construire
n
modèle)
et
d'une démarche
xpérimentale
élaboration
'hypothèses ue
l'on véri-
fie ensuite
mpiriquement).
'usage
simultané
es
deux
méthodes
on-
duisant,
par
une sorte
de raisonnement
irculaire,
à
un
tour de
passe-passe.
Oui,
Monsieur
Lepetit,
ournand st à la fois
exemplaire
t
excep-
tionnel.
Et
j'en
dirais
autant de
tout autre échantillon ocal. Car
je
pars (et
c'est sans
doute
ce
qui
nous
sépare
fondamentalement)
'un
postulat
rationaliste
celui de la cohérence
profonde
du
tissu
social.
Cela signifie ue dans n'importe uel villagemédiéval,pour peu que
l'on
dispose
des
sources
suffisantes,
n doit
retrouver
es
principes
de fonctionnement
e la société
globale
à
partir
'une
«
tête
d'épin-
gle
»,
comme
vous
le
dites
si bien.
Le critère u
choix,
l'exemplarité
du
cas,
découlentdonc
en
premier
ieu
des conditions
'accès.
Quand
celles-ci
ont
réalisées,
'observation
ntensive
'impose pour
saisir
au
mieux es
articulations tructurelles.
e momentdécisifde la recher-
che s'inscritdans
cette
microanalyse ui
ne fonctionne
ue
dans un
sens,
du concret
vers l'abstrait.
Ceci
dit,
e
ne me
privepas pour
autant de
la
méthode
expéri-
mentale . Des hypothèses héoriques yant
été
esquissées, pourquoime
priver
is-e de la possibilité e les tester, lus ou moins sommai-
rement,
à
où
les
sources
ne
m'autorisent
as
une observation
nten-
sive
? Cette
dialectique
constante
ntre théorisation t
expérimenta-
tion,
entre
microanalyse
t
macroanalyse
n'a rien de circulaire.Elle
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 110/144
108
se
justifie
si,
et
seulement
i,
vous admettezau
départ que chaque
cellule sociale
de
base
(le village, par exemple)
est à la
fois exem-
plaire
et
unique.
Si au contraire ous
partez
d'un
principe
de
discon-
tinuité
ociale,
il
vous
faudra
étudier
haque
élément n
lui-même
t,
pour
cela,
choisir
ntre 'une et l'autre
méthode.Cette
alternative st
votre affaire elle ne me concerne
pas.
Sans
doute,
votre
question-
nement
pistémologique
méritait-il ne
réponseplus
ample
mais vous
la trouverez
rochainement
ans
une autre
publication ui
lui
est
entiè-
rement onsacrée.
Après
la
manière,
omme
toute bien
artificielle,
e
m'interroge-
rai sur le pourquoi de cette ntervention extérieure et détachée.
Précédemment,
ous avons
vu
réagir
e
vieil
establishment
voici,
avec
B.
Lepetit, l'expression
du nouvel
establishment La réaction
est
d'apparence
plus
élégante,
lus sophistiquée,
mais
l'irritation
st
égale.
Au
sujet
de la vision de l'an
mil ?
Ne
plaisantonspas.
L'irritant st
le
reproche
ait aux Annales et
explicite
ans mon
livre,
d'avoir
jeté
par
dessus bord l'histoire
sociale,
de s'être
éloigné, par
une
lente
dérive,
de la
grande
tradition
ationaliste e Marc Bloch à Fernand
Braudel et
Georges
Duby.
Ce
reproche
fait mal.
Il
est difficile e
répondre
ur le fond. Pas
un
mot sous la
plume
de
B.
Lepetit
sur
l'usage du conceptde système ocial ; n'est-cepas significatifansune interventione caractère
pistémologique
A-t-ondu mal à
accep-
ter le
principe
de
cohérence ociale sur
quoi
se
fonde
ce
concept
?
Ouvrir e débat sur ces
questions
comporte rop
de
risques
pour que
l'on ne veille
pas soigneusement
u
grain.
B.
Lepetit
remplit
a fonc-
tion en
essayant
de se
placer
en
amont,
pour
mieux
y couper
court.
J'ose
espérer que
ce
type
de
parade
sera couronné d'échec.
N.B.
Que
Madame Zadora-Rio veuillebien
m'excuser
e
pas
avoir
trouvé
place
dans ce
texte une
réponse
à
ces
observations,
mais
ni
le ton de
son
intervention,
i
son
contenu,
ne
m'ont ncité lui accor-
der
un
caractère
prioritaire.
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 111/144
Médiévales
1,
automne
991,
p.
109-112
POSTFACE
Comme
il
est
d'usage
et
plus
encore,
la rédaction aisse
aux auteurs
l'entière
responsabilité
e
leurs
propos.
Il
nous vient à
l'esprit
le
mot
d'Armando
Sapori,
cité ici
de
mémoire onc
approximativement
si
quelque
ingénupense que
la cul-
ture rend
aisées les
relations
humaines,
qu'il
assiste,
pour
prendre
a
mesure
de
son
illusion,
à une
réunion
universitaire
Avons-nous té
ingénus
n
imaginant u'un
débat
équilibré
pour-
rait
sortir
d'un livre
provocateur
Les
critiques
ont
dures les
louanges
sont suivant
es cas
mesu-
rées ou
chaleureuses.
La
réponse,
annoncée
«
sur le terrain
es
idées,
à
l'exclusion de
toute attaque personnelle , salue les laudateurs,envers les autresmanie
l'invective elle
dénature es
propos
de ceux
qui
ont
opposé
des
critiques,
ronque
es citationsde leur
texte u
point
d'en défor-
mer le
sens1,
renvoie à une
lecture
endancieusede
leurs
autres tra-
vaux.
Nous avons hésitéà la
publier,
mais
nous
avions
promis
droit
de
réponse.
Au
dernier
moment,
nous
avons
cependant
dû
changer
a forme
de cette
réponse,
puisque Guy
Bois devait
pour
conclure
dialoguer
avec un
interviewer,
equel
s'est
in
extremis
écusé.
Attention
hamp
miné
Le lecteur
ugera.
Les auteurs voudrontpeut-être épondre.Médiévales ne saurait
évidemment evenir e lieu d'une
polémique prolongée
ur
«
la muta-
tion de l'an
mil
»
mais,
compte
tenu
du
caractère
exceptionnel
es
provocations,
a
revue donnera un
ultime
«
droit de
réponse
»
aux
auteurs
qui
souhaiteraient
réciser
eur
position...
dans
le
calme,
la
sérénité,
a
brièveté.D'ores
et
déjà
nous remercions
ous ceux
qui
ont
accepté
de
participer
ci au débat.
Nous
ne
regrettons as l'expérience
-
Il
est réaliste t
juste
de considérer
ue
l'écriture e
l'histoire
n'est
pas
indépendante
es
formes ariées
d'establishment
niversitaire,
ni
des
équilibres
nstables ntre es
exigences
de la
science,
es
soucis
de la diffusion t les nécessités conomiquesdes éditeurs.
1.
ExempleMonique
ourinans
on
ntroduction
arlait
es
grands
,
écla-
boussés
ar
es
petits
nfants
ui ettent
es
pavés
ans a
mare
Guy
Bois
reprend
l'expression
n traduisant
ar
«
grands
et
«
petits
de
l'Histoire.
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http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 112/144
110
-
Mais le débat
scientifique
xiste,
u
delà des
querelles
de
per-
sonnes
et
des
intérêts
e carrière t de
prestige.
t
nous
considérons
que,
dans
ce
numéro,
a
critique
du
livrede
Guy
Bois a
fait aborder
à
plusieurs
hèmes
majeurs
de l'histoire
médiévale
et
de la
méthode
historique.
Elle nous
permet
de mesurer
'avancée
récentedes con-
naissances
ur le Xe
siècle,
d'évaluer certaines
ypothèses
ur ce
qu'on
appelle
«
le
Haut
Moyen
âge
»,
de
suggérer
es
lignes
d'approfon-
dissement.
Suggestions.Réalité, modes et tempsde la croissance
1)
Il
est
temps
maintenant
'établir
des
comparaisons
sémanti-
ques
entre
régions
et
entre
types
de source
sur
certains
mots.
Mansus,
déjà
depuis
longtemps
bjet
de
réinterprétation,
'a
pas
eu
dans
ce
débat
la
place
qu'il
faudrait ans doute lui faire.
Villa
on reconnaît
depuis
plus
de
quinze
ans,
au
moins
pour
la
partie
méridionale
de
l'Europe,
que
ce
terme
peut
avoir,
à
côté
du
sens
domanial
classique,
un
sens
territorial,
t
même
se limiter
ce
seul sens2.
L'ambiguïté,
déjà
évidente
u
IXe
siècle,
se
complique
encore d'une évolutiontardive,dans le sens d'habitat.Il faudra
repérer
a
fréquence
régionale
des différentsens.
A.
Verhulst
ppelle
à en confronter
'usage
entre
pays germaniques
et
pays
méditerranéens.
es
questions
sont
les suivantes
qui
exerce
l'autorité ur
la villa
en
tant
qu'espace),
dans
quelle
confusion ntre
autorité
publique
et
puissanceprivée
avant même
a
généralisation
de la
seigneurie
anale
?
Quelle
est
la
place
de l'alleu
dans la villa
?
la frontière
ntre
alleutiers
t
tenanciers
Ajoutons
qu'il
faudrait
codifier
es
termes
français domaine,
grande
propriété,
tc.)
dont
on
use
pour
traduire
illa afin
de
réduire
les
incompréhensions
t d'arrêter
a
petite guerre
des
contresens.
Servus Guy Bois, dans sa réponse,pose une bonne question
trouve-t-on
u
Xe
siècle
un servus
qui
vende une terre Autre
ques-
tion,
servus est-ilutilisé omme
mancipio
dans l'énumération es
élé-
ments
de
ventes
Une fois défini
e sens
dans une
région
donnée,
il
faut
compter
t
apprécier
our
chaque
génération
e
poids
de l'escla-
vage
et
du
servage
ans
le
système
conomique
t social
de
cette
égion
et
comparer
aux autres
régions.
Cette
enquête
est
indispensable
our répondre
la
question
cen-
trale de
la
dynamique
de la croissance. Croissance
carolingienne,
ar
la
substitution
u
régime
domanial
à
l'esclavage
ou
croissance
plus
tardive
avec
disparition
de
l'alleu,
au
temps
de
la
seigneurie
ou
encore croissancepar la libérationpaysanne
2.
Depuis
otamment
es ravaux
e
Pierre onnassie
ur a
Catalogne
td'Elisa-
beth
Magnou-Nortier
ur e
Languedoc,
ersonne
'a
remis
n
cause
'existencee ces
deux
ens.
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 113/144
Ill
2)
Le débat sur
a
«
réalité e
la
croissance
u
Haut
Moyen
âge
»
n'est
pas
«
dépassé
».
Le
volume
du
colloque
de
Fiaran
montrait
ien
qu'entre
es historiens a
perception
es
rythmes
e
la
croissance
est
différente,
omme
est différente
'analyse
des
moyens
de
cette crois-
sance,
l'une et l'autre
renvoyant
des
schémas
explicatifs
eut-être
incompatibles.
À
ce
débat,
le
numéro de
Médiévales
ajoute
des éléments.
D'abord
méthodologiques.
our
ces
hautes
périodes,
'il est
indispen-
sable
de tenter
a
quantification
de
la croissance
démographique
d'après
les
résultats
e
l'anthropologie
unéraire
u le
décompte
pro-
sopographique, l est tout aussi indispensable 'évaluer,pour chaque
opération,
a
validité t
la
marge
d'incertitude. e même
pour
l'éva-
luation
de
l'espace
mis en culture de
même
aussi
pour
l'établisse-
ment
de courbes
des
prix
de la
terre,
puisque
ces
prix
étaient tablis
suivantdes mécanismes
omplexes
ù
l'économique
n'est
pas toujours
déterminant.
Surtout
a
discussion,
nourrie
par l'apport
des
disciplines
voisi-
nes,
conduit
à
réviser
e
concept
de
croissance
ppliqué
à
la
période
du
Haut
Moyen Age.
Un
exemple
les défrichements
xpriment-ils
la
liberté
paysanne
ou une
pression ristocratique
t la mainmise
ei-
gneuriale ur les espaces incultes Toutes les formesdu phénomènedoiventêtrediscutéessi l'on veut
comprendre
a
logique.
3)
La mutation
de
l'an
mil
est
reconnue,
même si
A.
Verhulst
et C. Wickham
soulignent
ue
la
dynamique
de croissance
est
anté-
rieure
l'an
mil.
Les
partisans
de la continuité
éajustée
n'affrontent
pas
directement
es tenantsde
la
révolution
et
les tenants
de la con-
tinuité
out-court,
ans doute minoritaires
ans la
profession,
e
sont
certainement
ans ce
numéro,
à cause
peut-être
e nos choix
mais
aussi
des refus et défections.
Retenons
ependant our
les débats
futurs,
a
suggestion
e
Chris
Wickham l'économiqueet le politiquene marchent as toujoursdu
même
pas.
Réflexions.
L'envol de la
pensée
et
le
labour du document
Il
y
aurait en Histoire es constructeurs
e modèles dans les hau-
teurs
umineuses
t en bas les
empiristes
ris.
Mais c'est
à
regarder
de
trop
haut
que
s'effacent
es couleurs et
la
pensée
se
met en
branle
dès
la lecturedu
premier
ocument. Le
problème
est de distance
et
d'échelle plus que de hiérarchie.
Le travailde
l'historien,
médiéviste n
particulier,
alance
de tou-
tes
façons
entre 'observation
du détail
et
l'organisation
de la con-
naissance,
dans un sens
et/ou dans
l'autre,
et
par l'interposition
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 114/144
112
d'hypothèses
t/ou
de
systèmes.
'il faut
distinguer
ntre
es
histo-
riens
ystémiques
t
empiriques
comme entre e
peintre
mpression-
niste
qui
décomposait
la
vision
et le cubiste
qui
la
construisait
saluant
'audace
du
systémique,
econnaissons
l'empiriste
a couleur.
La Rédaction
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 115/144
Médiévales
1,
automne
991,
p.
113-114
REPÈRES
BIBLIOGRAPHIQUES
Il
nous a
paru
utile de
rappeler
es
références
ibliographiques
de
quelques-uns
des
ouvrages parus
récemment
propos
des thèmes
auxquels est consacréce numérode Médiévales Certains uteurs em-
font
plus
ou moins
explicitement
éférence.C est seulement
parce
qu ils
constituent ésormaisdes
«
classiques
»
que
n ont
pas
été
ajou-
tés
à cette
iste
le
«
Guerriers
t
paysans
»
de
Georges
Duby
ou
le
recueil de travaux de
Charles
Parain
«
Outils,
ethnies t
développe-
ment
historique
.
Monique
BOURIN
Astma
H.
éd.,
La
Neustrie. Les
pays
au Nord de la
Loire
de
650
à 850 Beihefte
der
Francia,
16/1 et
2,
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der Francia 11.
Kuchenbuch
L.,
«
Probleme der
Rentenentwicklung
n
den
klöster-
lichen
Grundherrschaften des frühen
Mittelalters
»
in
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 116/144
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Médiévales
1,
automne
991,
p.
115-132
Jean-MarieMAILLEFER
RÉFLEXIONS SUR L'ARISTOCRATIE SUÉDOISE
AU MOYEN AGE :
L'EXEMPLE D'UN
LIGNAGE NOBLE ENTRE
125« ET
1350*
Le
problème
de
la noblesse
médiévale
-
ses
origines,
a défini-
tion,
sa
composition,
on évolution
reste,
malgré
es
avancées
igni-
ficatives,
ne
question
irritante
our
l'historien.
L'objectif
essentiel
de cet essai sur l'aristocratie uédoise aux xnic et xivesiècles est de
faire
progresser
es recherches
omparatives
ans ce
domaine,
car
il
reste confondantde
constater
que
la
plupart
des
synthèses,
même
récentes,
onsacrées au
Moyen
Age
font
une
impasse
parfois
totale
sur
les
royaumes
candinaves
qui
constituèrent
ourtant
la fin du
XIVe
iècle,
au
temps
de la reine
Marguerite,
e
plus
vaste ensemble
territorial
e
l'Europe
médiévale.
Une telle
recherche st d'autant
plus possible
que
l'aristocratie
laïque
est
la
catégorie
a
plus
facilement
ccessibledu
Moyen
Age
sué-
dois. La documentation notre
disposition
omporte
des milliers e
chartes,actes privéset royaux,donations,testaments, ransactionsmobilières t immobilières1.Grâce à ces
sources,
nous sommes au
premier
hef
renseignés
ur a
composition
es
patrimoines
t
les liens
de
parenté.
À
partir
de la seconde
moitié
du
xiiie
siècle,
il
est
per-
mis
de construire
es
généalogies
t
d'appréhender
es
stratégies
ami-
liales. La
période
retenue
1250-1350)
correspond
un net
accroisse-
ment
uantitatif
es sources
elle
marque
aussi
une
étape
cruciale
dans
l'histoire
e la
noblesse
uédoise,
étape
sur
aquelle
il
est utile
de faire
le
point
avant
d'étudier e cas concret d'un
lignage
noble.
En
effet,
'est avec le document
connu sous le
nom de
Statut
d'Alsnö,
édicté
par
le roi
Magnus Birgersson
adulâs
(1275-1290)
ntre
*
Nous vons
élibérémentimitées références
ibliographiques
n
suédois.
1.
Diplomatarium
uecanum
Svensktiplomatarium
, Stockholm,
829,
0
vol.,
couvrea
période
es
originesjuin
1374
vecune
acune ntre
uillet
368 t
1371
(cité
orénavant
S).
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 118/144
116
mai 1279 et
septembre
1281
(vraisemblablement
la
fin
septembre
1280), que
l'aristocratie uédoise
apparaît
pour
la
première
fois
en
tant
que corps
constitué
privilégié.
Dans ce
texte2,
n constate
ue
la
première
aractéristique
e
la
noblesse est
l'exemption
iscale
pour
les hommesdu
roi,
des
évêques
et
pour
tous
ceux
qui
sont sur des domaines ibres de
toutes
charges
dues au souverain.
Ce
privilège
st motivé
par
la
nécessitéde recon-
naître à ceux
qui
suivent
t
assistent e roi une
plus
grande
dignité.
Le décretd'Alsnö
légitime
n
réalitéune situation ociale
acquise,
la
transforme
n
statut
uridique
mais
il
fait aussi
davantage
il
étend
ces prérogatives tous les hommesqui serventmedhörs c'est-à-dire
à
cheval,
«
quels que
soient ceux
qu'ils
servent .
Ce
qui
fait la
noblesse,
c'est donc
l'exemption
accordée en
(
échange
du coûteux servicemilitaire
cheval. Mais
il
faut
souligner
l'importance
du vocabulaire. Le mot
germanique pour
désigner
a
noblesse,
adel,
n'est
pas
utilisé au
Moyen
Age
en Suède.
Le terme
usuel est
frälse vieux
norrois
reisi qui
a la
signification énérale
de
«
liberté
.
Dans les codes
de
lois
et
les textes
slandais
et
norvégiens,
le
frelsingi
st l'homme ibre
par
opposition
l'esclave,
thraell. reisi
caractérise
l'origine
a conditionde l'homme
libre,
e contraire e
la servitude,naud. Ensuite e terme désigné 'exemptiond'impôtset de
charges
vis-à-visde la Couronne et finalementes
groupes
aï-
ques
ou
religieux ui jouissent
de ces
privilèges.
On
peut
lire
parfois que
le Statut
d'Alsnö est l'acte officielde
naissance
de la noblesse
suédoise. Étaient nobles ceux
qui remplis-
saient les critères noncés à Alsnö.
Il
faut
toutefois
remarquer ue
ce document un lien direct vec
les événements
ontemporains
n
Suède
:
transformations
e l'art de
la
guerre
et
luttes
pour
le
pou-
voir. Au cours du
XIIIe
iècle,
s'est
opéré
le
passage
de
l'ancien
ledung,
convocation saisonnièrede tous
les hommes ibres3
institu-
tion militaire evenue
nadaptée),
à une armée de
chevaliers,
onvo-
cables à tout moment.
L'expression
riddari
qui
sert à les
désigner
montre
l'évidence
l'influencede
l'Europe
continentale,
otamment
ar
l'intermédiaire
de
l'Allemagne
et du Danemark. Ce
terme
qui signifie
cavalier
»
a la connotationde métier
homme
d'armes à
cheval)
et
également
de service.
Il
traduit
e latin
médiéval miles4.
En
Suède,
le riddari
est
cependant
vant tout l'homme au
service
d'un
prince,
et
dans
le
Statutd'Alsnö
il
fautd'abord
comprendre
iddari
pl. riddarar)
omme
«
l'homme
du
roi ».
C'est d'ailleurs
e
sens
qu'il
faut en
général
don-
ner
à
miles dans les
plus
anciennes
hartes uédoises
rédigées
n
latin.
2. DS 1,p.650-654,° 799 la datationst rronée).
3.
Régis
oyer,
La notion e
leidangr
t
sonévolution
,
Inter-nord
°
12,
décembre
972,
p.
271-281.
4.
Exemple
ans lucidariusn oldNorse
ranslationéd.
Evelyn
cherabon
ir-
chow
t Kaaren
rimstad,
eykjavikStofnun
rna
Magnússonar),
989,
.
108.
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 119/144
117
Ce
vocabulaire
nouveau
correspond-t-il
un
statut nouveau ?
Rien
n'est
moins
sûr
car les mots riddari/miles e
se sont
imposés
que
lentement. ans les
diplômes,
n continue
utiliser
e
terme omi-
nus
(vieux
suédois
haerra).
Le titre ert à
désigner
es membresde
la haute
aristocratie
andis
que
riddari
n'implique
pas
forcément ne
situation ociale
noble,
mais des
qualités
hevaleresques.
ans une
saga
de chevaliers n
rencontre ette formule
aractéristique
thessi karl
var bóndi at
nafnbot
n riddari t
tign,
cet hommeétait un
paysan
libre en titremais chevalier
en valeur5».
L'existence
'une
suite
guerrièreccompagnant
e roi est aussi une
réalité ancienne dans le Nord, attestéedepuis l'époque viking la
hird
ou
les
house-carles des rois
norvégiens
t danois. Le
Statut
d'Alsnö n'a donc
pas
créé
une
aristocratiemilitaire n
Suède,
sans
doute faut-il
plutôt
y
voir l'institutionnalisation'une aristocratie e
service.
Cependant
es
domini,
'est-à-direes
grandspropriétaires
on-
ciers,
eurent es
premiers
a
capacité
d'assurer
le service militaire
cheval
pour
le roi. Ainsi
la nouvelle
définition
e la
noblesse
s'appli-
quait
à eux en
premier
ieu.
Leur
prestige eposait
non
seulement ur
la
richessemais aussi
sur la
naissance,
d'autant
plus que
cette
aristocratie e
sang
est,
en
Suède, caractérisée ar les liens familiaux troits ui, de longuedate,la rattachent ux
dynasties égnantes.
Le Statut d'Alsnö aboutissait
donc à la reconnaissance
d'une
prépondérance
cquise
:
les Grands
du
Royaume,
iés
par
le
sang
à
la famille
oyale,
euls
capables
d'assu-
mer es
charges
nouvelles
mposéespar
l'évolution
militaire,
ecevaient
des
exemptions
iscales ce
privilège, ue l'Église
se
voyait
confirmer
parallèlement,
es
plaçait
définitivementu-dessusdes autreshommes.
Toutefois,
en
même
temps,
d'autres
se
voyaient
uvrir
a
possi-
bilité
d'intégrer
a noblesse ancienne en
échange
de
liens
spécifiques
de
service
vis-à-visdu
souverain,
à un
moment où le roi
Magnus
Ladulâs se trouvait ans
une situation
ifficile,
onfronté une révolte
aristocratique1278-1280)et à l'hostilitéde son frèreWaldemar. Le
roi
éprouvait
e besoin non seulement e consolider es anciennes
oli-
darités,
mais aussi de s'attacher
de
nouveaux fidèles. Plusieurs élé-
ments
viennent orroborer ette
nalyse.
D'une
part,
on
peut
consta-
ter 'installation
'une
première ague
de
lignages
nobles venus d'Alle-
magne
du nord
Holstein,
Mecklembourg,
oméranie).
Le cas est
par-
ticulièrement
et dans la
province
du
Smâland,
une marche
méridio-
nale face au Danemark6.
D'autre
part,
un
des traits
aractéristiques
de l'aristocratie uédoise
-
et le fait est d'autant
plus surprenant
quand
on
pense
à l'étendue du
pays
-
est
qu'un
nombre
mportant
de familles vait des
possessions
ans
plusieurs rovinces
u
Royaume.
5.
Cité
n
Johan
ritzner,
rdbog
ver
et
gamie
orské
prog,
rt.riddari
Kristiania
Oslo),
1886
2e d.).
6. LarsOlof
Larsson,
mâlândsk
edeltid,
tockholm,986,
.
123.
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
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118
L'existencede
tels
complexes,
dont
les divers
léments taient
parfois
distantsde
centaines
de
kilomètres,
peut-être
a
principale
xplica-
tion
dans
le fait
que
ces
lignages
ont
reçu
des terres n
échange
d'un
service erritorial e
garde
ou de défense. Le roi
y
trouvait n
outre
l'avantage
de
disperser
es centres
d'intérêts
e
l'aristocratie t d'évi-
ter la formation e
principautés
erritoriales.
À
l'époque
où
fut
rédigé
e Statut
d'Alsnö,
les
liens d'homme
à homme n'étaient
pas
une
nouveauté
en
Suède. Le texte
mentionne
explicitementu'ils
existaient is-à-vis u
roi,
mais aussi du frère u
roi et
des
dignitaires
e
l'Église.
Le document
ouligne également
a
présence 'autres iensde dépendance.L'expression quels que soient
ceux
qu'ils
servent atteste
ue
d'autres
disposaient
e
suites
de
guer-
riers. Dans les
sources,
on rencontre n effet
des termes connota-
tion de service t de
dépendance
armigersuédois väpnare), uer (sué-
dois
sven)
et
famulus ce
dernier
mot
toujours
bien distinct e
servus).
La loi
provinciale
de
l'Östergötland,
dont
la
rédaction est
contemporaine
u Statut
d'Alsnö,
stipule que
l'amende d'honneur
(thukkabot)
pour
le meurtre 'un homme du roi
est de
40
marks,
de
9
marks
pour
un hommedu comte ou de
l'évêque
et de 6
marks
pour
l'homme
d'un
seigneur
ntretenant
ses frais
palefrenier
stallare),
cuisinier stekare)et 40 rameurs7.Le même documentnous apprend
que
le montant e cette mende avait été
augmenté
e 12 à 40 marks
à
l'époque
du
régentBirger
Jarl
1250-1266).
Ceci
souligne 'aggrava-
tion
des différences ociales durant a seconde moitié du
xili<
siècle
au
profit
de ceux
qui
se
mettaient u
service
du roi. La
somme de
40
marks
correspond
d'ailleurs
à l'amende
payée
en
Norvègepour
le
meurtred'un hirâmaâr membre de la suite armée du souverain.
Tous
les hommes u servicede la
Royauté
virent insi leur sort assi-
milé à
celui des
proches compagnons
du roi.
On
peut
donc
dégager
uelques
grands
raits inon
originaux
out
au
moins
spécifiques
de la noblesse suédoise à la
fin du
xiii*
siècle.
En premier ieu, la situationprivilégiée e l'ancienne aristocratie e
sang
est devenue
permanente,
nstitutionnellentre 1250 et 1280,
Cependant,
comme
ailleurs,
l
n'y
a
pas
de définition
héorique
de
la noblesse. Celle-ci
repose
sur un faisceau d'éléments variés
le
lignage,
e service
militaire
cheval,
les
exemptions
iscales.
Ce
qili
compte
c'est
l'hérédité,
a
richesse,
es offices.
Sa
puissance dépend
de
son
prestige,
u
patrimoine,
e la
capacité
guerrière.
omme dans
d'autres
régions,
notamment
ermaniques,
n
peut distinguer
eux
strates
d'un
côté,
les
grandes
familles e la haute aristocratie
ossé-
dant de
vastes
domaines
répartis
dans tout le
Royaume, ouant
un
rôle
politique
de
premier lan,
rattachées
ar
le
sang
et les alliances
matrimoniales la dynastie oyale de l'autre,unepetitenoblessedont
7.
Svenska
andskapslagar,
d. Âke
Holmback
t
Elias
Wessén,
orst serien
Ostgötalagen
ch
Upplandslagen,
tockholm,979,
p.
62-63 t note
0,
p.
71.
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119
l'implantation
t la vocation
demeurent vant tout locales et subal-
ternes.
Enfin
'aristocratie este
directementoumise au
pouvoir
cen-
tral car elle est
très
argement
son service.
Ses
pouvoirs
dministra-
tifs et
judiciaires,
certaines
de
ses
terres,
ne sont
acquis que par
délégation.
La
connaissancedétailléedes
lignages
ristocratiques
st une con-
dition essentielle
pour
la
compréhension
u fait nobiliaire.
À
titre
d'illustration ous
prendrons
'exemple
d'une familledont
l'appari-
tion dans les sources
est
quasiment ontemporaine
u Statutd'Alsnö.
RörikBirgersson, itépour la première ois en 1276,est le représen-
tant
d'une famille
blason
tiercé n
bande)
que
l'on
peut
ranger
armi
la
haute aristocratie uédoise
puisqu'elle
est
proche
des
plus impor-
tants
ignages
du
Royaume
et
que
certainsde ses membres nt fait
partie
du
Conseil
du Roi.
Apparue
dans la seconde moitié
du
xinc
siè-
cle,
cette famille 'éteint
une centained'années
plus
tard.
Dans
notre
étude nous
laisseronsde côté
les
aspects politiques
de ses activités
ui
ont été examinés
par
ailleurs8
pour
nous
concentrer
ur les relations
familiales
t la
connaissance
du
patrimoine
foncier.
Le
21
septembre
276,
Rörik
Birgersson =
fils de
Birger)
ort
de l'ombre il est témoind'un acte du roi Magnus Ladulàs destinéaux monialesde Skokloster ans
l'Uppland.
D'emblée on
peut
e con-
sidérer
omme
un individude haut
rang
car non
seulement
l
appa-
raîtdans
l'entourage oyal
mais
il
est
qualifié
de
dominus t cité
parmi
les
majores regni9.
L'analyse
des titulatures onnées à Rörik dans
l'ensemble des
chartesoù
il
est
nommé montre a
prédominance
u
titre
dominus,
soit
simple
1276,
1291, 1310, 1313,
1320),
soit sous
la formediscretus ominus
1293)
ou
honorabilis
ir
dominus
1299)
;
il
est
considéré trois
reprises
omme nobīlis vir
1289,
1315,
1318)
ou classé
au
sein
ďaliorum
nobilium
1306,
1310).
Deux fois seule-
ment
l
est
appelé
miles
(1312, 1318)
dans des actes émanant de la
Chancellerieroyale.
Après
1276,
Rörik
disparaît
des sources
pendant
treize
années.
Paradoxalement
cette
longue éclipse
est sans doute
significative
e
l'importance
u
personnage.
En
effet n retrouve
a
trace en
décem-
bre
1289
dans un
documentoù le
pape
Nicolas
IV
accorde une
dis-
pense
pour
le
mariage
de Rörik et de
Helga
Anundadotter,
malgré
leur
parenté
au
4e
degré,
en
application
des décisions
du concile de
Latran
V
(1215)
sur es
empêchements
u
mariage
ntre
onsanguins.
Ce texte
est
intéressant
plusieurs
itres.D'une
part,
l
jette
un
éclairage
particulier
ur l'aristocratie
uédoise. Une
des raisons
avan-
8. Ceux-ciont éveloppésansJerkerosén, triden ellanirger agnusson
ochhans roder.tudier
nordisk
olitisk
istoria
302-1319,
und,
939,
t
Bjarne
Beckman,
atts ettilmundssonchhans
idt
-H
Kungl
Vitterhetshistoriech ntik-
vitetskademiens
andlingar
4-85),
tockholm,
953-1954.
9. DS
1,
pp.
512-513,
°
618.
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 122/144
120
cées
pour
motiver
a demande
du
couple
est
la
rareté
des
partis
nobles
qui
s'offrent
Helga
10
:
«
dans
le
Royaume
de
Suède,
il
est
diffi-
cile
de trouver
acilement
uelqu'un
qui
soit
à la fois
digne
de
cette
union,
étant
donnée
a conditionnoble
de cette
femme,
t
qui
ne
soit
pas proche
d'elle
par quelque
degré
de
parenté
u
par
alliance ou
par
le
sang
». Un
tel
argument
llustre a conscience
aiguë
de caste
au
sein
de
l'aristocratie
t amène
à
s'interroger
ur son étroitesse
umé-
rique
en
Suède,
car
cette
dispense
n'en constitue
as
le
seul
exemple.
En
1284,
le
pape
Martin
V
avait autorisé
e
mariage
d'une
nièce
du
roi de
Suède avec
un
parent
au
4e
degré, Holmger
Ulfsson11.
Au
termede la périoderetenuepour notreenquête,en 1347,Elof Elofs-
son
reçoit
'autorisation
'épouser
Girda
Erlingsdotter
ar
«
sine scan-
dalo
sui
generis
non
possit
contrahere
n
toto
ipso Regno
secundum
natales
suos
nisi cum
hiis
que
sunt in
propinquiorigradu
consangui-
nitatisastricti
12
.
Il est d'autre
part
remarquable
de constater
'intervention
er-
sonnelle
du roi
Magnus
Ladulâs
auprès
des autorités
eligieuses
our
permettre
e
mariage
de
Helga
même
s'il
s'agit
d'une
parente
eius-
dem
Regis
consanguinea).
La
préoccupation
royale
s'explique parce
que
cette
union a
visiblement
u
pour objectif
de mettreun terme
à un climatde vengeanceet de scellerune réconciliation la suitede la
participation
e Rörik au soulèvement e 1278-1280contre e
roi,
comme
e montrent
es termes
u document
«
idem Roricus
qui-
busdam
capitalibus
nimicisdicti
Regis
adheret
...), gravia...
scan-
dalo et
guerrarum
ericula
suscitari
...), speretur uod
per
coniunc-
tionem
Rorici
et
Helghe
predictorum
omes
odii et rancoris
huiusmodi
extinguetur
t
pax
et
tranquillitas roveniet
psi Regno
»
Ainsi
Rörik
Birger
son
a
disparu
des
sources,
sans
doute
parti
en
exil,
parce
qu'il
s'était
rangé
dans le
camp
des
révoltés,
ppelés
Folkungar
dans
les textes
ontemporains
annalçs
suédoises
et danoi-
ses,
Hákonar
saga
Hákonarsónar,
Erikskrönika
. Aujourd'hui,
l'expressionFolkungar est malheureusementmbiguë car elle sert
depuis
le
xvic
siècle
à
qualifier
a famille
du
régentBirger
Jarl.
Or
les sources
médiévales
font
de celui-ci t
de
son
fils
Magnus
Ladulâs
des ennemis
charnés
des
«
vrais
Folkungar
au
xine
siècle,
e terme
désignait
n
effetun
clan
aristocratique egroupant
artisans
t des-
cendants
du duc
Folke mort
en
121013.
Rörik
Birgersson
ppartenait
probablement
la
parentèle
de
Folke.
Bien
que
nous ne
disposions
d'aucune
preuve
absolue,
trois
élé-
ments
orroborent
ette
hypothèse.
ne
longue
série
de
prénoms
om-
muns aux
deux
familles
ermet
e
postuler
'existence
d'un lien entre
10. DS 2, pp.87-88, ° 1009.
11.
DS
1,
pp.
641-642,
° 784.
12. DS
5,
p.
708,
n° 4226.
13.
Sten
arlsson,
Folkungarna,
n släktkonfederation
,
Personhistorisk
ids-
krift,
953,
p.
73-103.
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 123/144
121
les
deux
lignages Birger,
Folke,
Holmger,
Benedicta/Benedictus
(= Bengt),
Brigitta,Margareta.
Une autre ndication e
parenté
nous
est fournie
par
l'intervention e Rörik
Birgersson
n 1313
dans une
querelle qui
opposa
les
paroissiens
de
Skrukeby
t
l'évêque
de Lin-
köping
à
propos
des revenus
d'un
chanoine14.
l
en
ressort
que
Rörik
partage
alors
le
patronage
de cette
église
avec des descendan-
tes du duc
Folke,
Ingrid
et
Ingegerd vantepolksdotter
insi
qu'avec
leur
sœur
Catherine,
bbesse de Vreta.
D'où Rörik tenait-il es droits ur
'église
de
Skrukeby
En
1300,
le testament 'un chanoinede Linköping uggère éjà l'existence 'une
relation
ntreRöriket cette
glise.Cependant
n
1275 c'étaitun
parent
de
Birger
Jarl,
e
legifer
'Östergötland
engtMagnusson, qui possé-
dait le
patronage
de
Skrukeby
il
en fit
don,
avec un
domaine,
à
la cathédrale e
Linköping
pour
la fondation 'un
canonicat15. our
expliquer
qu'on
le retrouve ntre es mains de Rörik en
1300/1313,
il faut
supposer que
ce
jus patronatusappartenait
l'origine
u duc
Folke et à ses
descendants,
t
qu'il
leur fut
confisqué
la
suite d'une
révolte,
par exemple
celle de
1251,
puis
restitué,
eut-être
l'occa-
sion
du
pardon
accordé
par
le roi à
Rörik en
1289
au
momentde
son
mariage.
Un document
plus
ancien
apporte
un indice
supplémentaire
e
cette
parenté.
Le
11
uin
1250,
a reine Catherine
unesdotter,
etite-
fille du duc Folke et tante des sœurs
Svantepolksdotter
itées
précé-
demment,
ange parmi
es bénéficiaires e son
testamentes
fils
d'un
certain Rörik
16
:
ils
reçoivent
e domaine de
Strand
qui,
au
siècle
suivant,
sera le manoir
principal
d'un
parent
de
Rörik
Birgersson,
Holmger
Jonsson
de
Strand.
Il
s'agit
donc de
l'ancêtre de
notre
lignage
celui-ciétait
un
personnage
mportant
e
l'entourage
de la
reine.
Il
porte
e titrede dominus
il
est nommé en tête
des
parents
de
Catherine.
Les historiens uédois
ont
avancé
qu'il
aurait
épousé
une des fillesdu duc Folke. Pour probablequ'il soit, ce lienmatri-
monial n'est toutefois
pas
suffisant
our
motiver
'importance
de
l'individu on voit mal en effet e duc
Folke,
dont la
mère était
fille
de roi
(Harald gilli
de
Norvège),
donner a main
de
sa
propre
fille
à un homme de
peu.
On
aborde ici un des
problèmes
majeurs que pose
l'aristocratie,
celui
des
origines.
n
Suède,
où les
documents crits
raditionnelsont
défaut
usqu'à
la
fin
du
XIIe
iècle a
question
st
particulièrement
éli-
cate.
Il
n'est
cependant
pas
interdit
d'estimer
que
l'aristocratie
anciennedescendde ces chefsdont 'existence
st attestée
ar
l'archéo-
logie au moinsdepuis l'époque viking.Les inscriptionsuniquespeu-
14. DS
3,
pp.
103-104,
° 1891
cf.
nos
912, 915,
917,
923).
15. DS
1,
p.
494,
n°
592.
16. DS
1,
pp.
345-346,
° 377.
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 124/144
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http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 125/144
123
notre ttention st attirée
galement ar
la
pierre
de
Ramsundberget,
près
d'Eskilstuna,
ù Ton
peut
lire
«
Sigrid,
a mère
d'Alrik,
a fille
d'Orm,
fit
construire
e
pont pour
l'âme de son
mari
Holmger,
e
père
de
Sigröd.
»
On sait
que
le fonctionnemente
l'onomastiqueger-
manique repose
sur
la
transmission
éréditaire
es
prénoms
t
sur
le
jeu
des
préfixes
t des suffixes
uUes composent.
Une des combinai-
sons
possibles
à
partir
des noms
Al
rik et
Sig
öd
est
Rö(d)rik,
tandis
que Holmger
appartient
u
stock
anthroponymique
e la famille tu-
diée
: or cette
nscription
st située dans
la
paroisse
de
Sundby
où
les descendants
e
Rorik auront
des
terres.L'attention st donc foca-
lisée par l'onomastiqueancienne sur des zones où ce lignageeut des
intérêts
ux
XIIIeet XIVe
iècles.
Cette constatation st corroborée
ar
l'analyse
du cercle des relations de
parenté
et
par
l'étude du
patrimoine.
Grâce
à
son
mariage,
Rörik
Birgersson
vait
contracté ne
alliance
non seulement
vec la
dynastie égnante
mais
encore avec une
puis-
sante famille
de
Suède
centrale
Västmanland,
Södermanland).
l
est
possible
que
les
deux
lignages
ient
possédé
des liens de
longue
date.
Lorsqu'en
1276,
Rörik
apparaît pour
la
première
ois,
l
souscritune
charte aux côtés
d'Anund
Haraldsson,
son futur
beau-père.
Dans le
testamentnon daté) de la sœurd'Anund, celle-ci aisse un legs à uncertain
Birger
il n'est
pas
exclu
d'y
voir e
père
de Rörik
Birgersson
car
il
s'agit
d'un domaine
proche
d'une
propriété
endue
par Birger,
le fils de
Rörik,
en
1325
9.
Anund Haraldsson
futune
personnalitémportante
u
Royaume
conseillerdu
roi,
legifer
de la
province
du
Södermanland,
l
avait
épousé
une
parente
du
régent irger
Jarl. La lecture e
son testament
montre
u'il
fut de
ceux
auxquels s'appliquaient
à
l'époque
les dis-
positions
du
Statut d'Alsnö dont
il
fut d'ailleurs un des témoins.
l
disposait
de
plusieurs amuli,
ans
doute
des
milites
uisqu'il
eur
ègue
terres u chevaux ob
servicium
Il
est lui-même n
guerrier
cheval
comme 'atteste a mention,dans son testament, dextrariummeum
cum totali armatura
;
il
laisse en outre son
épée
à son neveu.
En
s'intégrant
cette
famille,
Rörik
devenait
aussi
parent par
alliance
d'un autre
lignage
mportant,
Hama,
dont
un membre vait
épousé
une des sœurs
d'Anund
(cf.
tableau
généalogique).
Rörik
Birgersson
ait
également
partie
du milieu au sein
duquel
furent assemblés es
miracles
ttribués
saint Éric. On a
pu
mon-
trer
par
ailleurs a
percée contemporaine
u culte de
saint
Éric,
un
saint
dynastique
mis en
avant à
l'époque
du roi
BirgerMagnusson
par
les
grandes
familles
qui
le
soutenaient
0
. Au début du
XIVe
iè-
19. DS
2,
p.
660,
n° 1722 DS
3,
p.
663,
n°
2492.
20. Jean-Marie
aillefer,
Saint ricde Suède une
mythologieolitique
t
dynastique,
tude
ritique
'une
agiographie
oyale
,
Razo,
Cahiersu Centre'Étu-
des médiévales
e Nice
n°
8, 1988,
p.
87-101.
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 126/144
124
cle,
un recueilde miracles été
compilé pour
l'essentiel
ar
un
prieur
dominicainde
Sigtuna,
sraël
Erlendsson
famille
Finsta), qui occupa
le
siège épiscopal
de Vâsteràs
(1311-1328)
où l'un des
fils
de
Rörik,
Folke,
sera chanoine
ntre1322 et 1329. Rörik
apparaît
ui-même ans
les
Miracles de saint Éric
:
sa
femme
Helga,
«
uxor Domini Rorici
Byrgirsson
um
bis
..
conceptum
bortisset
,
a
pu
miraculeusement
donner naissance
à une fille21.
l
est
encore
plus frappant
de
cons-
tater
que
Rörik est
un
proche
de la
plupart
des
lignages
nobles cités
dans ces miracles.
Ainsi le miracle
n°
17,
daté de
1305,
raconte comment ne fille
de Ragnborgrevint la vie grâce à l'intervention e saint Éric : en
1299 Rörik avait assisté
au
mariage
de
Ragnborg
vec Folke
Jonsson
de Fânô22
et en
1328
Ragnborg appelle
geņer
un fils de
Rörik,
Anund Röriksson23.
e
miracle
n° 28
daté de
1294,
concerne Léo-
nard Ödesson
(fam.
Örnfot)
t
sa
femme
Margareta
en
1312,
Rörik
agit expressément
n tant
que
représentant
e ce
dernier,
«
pro
Domino Leonardo bone
memorie
ubrogatus
24. Le miracle
n°
52,
daté de
1310,
intéresse
Kristina,
fille de Harald
Älg qui
a
épousé
en
secondes
noces une
fille de
Rörik,
Margareta
Röriksdotter. e com-
pilateur
des
miracles,
sraël
Erlendsson,
est
présenté
omme
le
con
sobrinusde cetteKristina ainsi, par le jeu des alliances, Rörik setrouve-t-iln affinitévec la famille e
Finsta,
cellede sainte
Brigitte.
D'autres
éléments
ermettent 'élargir
encore e cercle des
rami-
fications
amiliales.
Le
23
février
293,
Rörik souscritune
charte
qui
règle
un
partage
successoral
ntredeux
parentes, ngeborg
t
Marga-
reta,
la mère et la
tante de sa
femme.
l
intervient
our représenter
les
intérêts es héritiers
uisqu'il
est
présent
ux côtés de son beau-
frère
ars et du
gendre
de
celui-ci,
Algot
Johansson
fam. Hjorthorn).
Au travers
e son
beau-frère,
örik était
parent
d'un des
lignages
es
plus
anciens
de
Suède,
les
Böberg,
dont l'essentieldes
domaines se
trouvait
dans les
régions
méridionales t occidentales
du
Royaume
(Östergötland t Västergötland).
L'étude
des
stratégies
matrimoniales
éveloppéespour
ses enfants
montre
'approfondissement
e ces liens
au
sein
de la haute aristo-
cratie
du
pays.
Après
avoir
épousé
un
membred'une
grande
famille
de
l'Uppland,
Harald
Älg,
Margareta
Röriksdotter
ontracta ne
unioh
avec
Tord
Petersson
Bonde
: l'un de ses descendants
montera au
xve
siècle
sur
le trône
de Suède.
De son
côté,
Birger
Röriksson
a
épousé
Ramfrid,
fille du
legifer
e
Västergötland engt
Hafridsson,
un
lignage
probablement
pparenté
à la famille
royale.
L'autre
fils
de
Rörik resté
à l'état
laïque,
Anund,
s'est marié
à deux
reprises
21.« Miracula. Ericis (n°27) nScriptoreserumuecicarumSRS) d.Fant,
Uppsala,
818-1876,
ome
I,
pp.
296-298.
22.
DS
2,
pp.
283-284,
° 1267.
23. DS
4,
p.
43,
n° 2649.
24. DS
3,
p.
47,
n° 1836.
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 127/144
125
Carte2. Domaines
t lieuxoù
apparaissent olmger irgersson
t ses descendants
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 128/144
126
Carte 3. Domaines
t lieuxoù
apparaissent
örik
Birgersson
et ses
descendants
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 129/144
127
ce fut
à
chaque
fois l'occasion
de renforcer es intérêts nciens.
Autour
de
1325,
il
a
épousé
une fille
Brigitta )
de Folke
Jonsson
de Fânô dont son
père
était un
proche.
Devenu
veuf,
l
convole avec
Cecilia,
fille
d'Ingrid (fam.
Sparre
de
Tofta)
et
de
Magnus
Nilsson
(fam.
Ivar
Nilsson,
essentiellement
entrée ur
le
Södermanland).
Un autre
trait
caractéristique
e ce
lignage
est
qu'autour
de
lui
s'articule
un
des
principaux
groupes
de
donateurs
u couvent
cister-
cien de Julita
Södermanland)
sur les rives du
lac
Hjälmaren.
Ce
monastère
en outre
largement
onctionné omme
nécropole
fami-
liale.
La tradition n
remonte
pparemment
Anund Haraldsson.
En
1291, celui-ci faisaitsavoir qu'il voulait être enterré Julitaauprès
de ses
parents,
monasterio
e Saba
(=
Julita) uxta parentes
meos
sepulturam
ligo
»25. Le fait est
confirmédans le testament e sa
sœur
Helga
:
«
parentes
mei
ibi
plurimi
sunt humati
26
.
La dévotion
d'un
petit-fils
Anund,
Birger
Röriksson,
envers
Julita emble
avoir été
particulièrement
orte ses
dispositions
esta-
mentaires,
ù
il
appelle
'abbé
Henrik amicus meus dilectus
,
mon-
trent
u'il
a
fondé à
Julitaun autel consacré au
Saint-Esprit uprès
duquel
il
désire
être nhumé
ux côtés de ses
parents
«
monasterio
de
juluttum
ubi
uxta parentes
meos
ad altare
quod erigendum
ecre
veram epulturammeameligo »27. Bien que remariée Karl Tukae-son
(fam.
Lāma) qui
dispensa
ses
générosités
nversun autre cloître
cistercien
Nydala),
sa
veuve
Ramfrid mit aussi le vœu d'être
enter-
rée à Julita28.
uant
aux
autres enfantsde
Rörik,
on
peut supposer
que Margareta
qui
fut une bienfaitrice
e
Julita,
fit e même
choix,
d'autant
plus que
son
filsPeter
Bonde
prit
la
fin
de ses
jours
l'habit
monastique
à
Julita avec sa
femme29.
nfin
Anund
Röriksson,
en
épousant
une fille de
Magnus
Nilsson,
restaitfidèle
aux
Cisterciens
de Julita
puisque
Magnus
Nilsson,
sa femme
et au moins deux de
ses
fils,
Âbjôrn
et
Arnvid,
y
élirent
épulture
t
y
firent es donations.
La mise
en évidencede
cette
politiquereligieuse rivilégiant
ulita
permet e constater ue l'autrebranchede la famille, es descendants
de
HolmgerBirgersson,
ut un
comportement
ifférent.
e n'est
plus
vers Julita
que
se
porte
l'essentieldes donations
pieuses
ou
les
sou-
haits
d'inhumation,
mais
vers d'autres établissements
cclésiastiques
du Södermanland.
ls se
concentrentn
particulier
utour de la cathé-
drale de
Strängnäs
ù Jon
Holmgersson
e
fit nterrert avec
laquelle
il
existait
es
liens
privilégiés
ar
l'intermédiairee deux
parents
con-
sanguinei),
Nils
et
Ingevald
Magnusson
(fam. Magnus Marinason),
tous
deux chanoines
de
Strängnäs.
es libéralités e cettebranche
llè-
rent ussi
aux couvents
proches Fogdö,
Vârfruberga
t Eskilstuna
25. DS 2, p. 114,n° 1041.
26.
DS
2, D. 660,
n° 1722.
27. DS
4,
pp.
104-105,
°
2715.
28. DS
5,
pp.
537-539,
° 4039.
29. DS
8,
p.
113,
n°
6568.
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 130/144
128
Birgitta olmgersdotter
rit
e voile à
Riseberga,
ans la
province
oi-
sine de
Närke mais
toujours
dans le diocèse
de
Strängnäs.
Ce n'est
pas
seulement
ur le
plan
de la dévotion
que
se diffé-
rencient es
deux rameaux
de
ce
lignage.
Alors
que
le
titre ristocra-
tique
dominus
est
porté par
Rörik et ses
fils,
ni
Holmger
ni
ses des-
cendants
ne
sont
qualifiés
ainsi. Sans doute sont-ils
distingués
armi
les nobles
(Holmer Birgersson,
engt
Holmgersson
t
Birger
Holm-
gersson
ont
appelés
nobilis
vir)
mais ils
ne
semblent
as
avoir
compté
dans les
rangs
de
la haute
aristocratie,
malgré
es liens certainsde
consanguinité
vec les
grands
ignages
u
Royaume,
t bien
qu'ils
aient
utilisé e même blason que Rörik Birgersson tiercéen bande).
Autant
que
l'on
puisse
la
percer,
'assise
territoriale
araît
elle
aussi dissemblable.
e dossier st
fragmentaire
ais
il
permet,
notre
avis,
un
sondage significatif râce
notamment
plusieurs
estaments
(Birger
Röriksson,
Ramfrid
engtsdotter, argareta
Röriksdotter,
on
Holmgersson).
Dans le cas des descendants
de
Holmger Birgersson,
on
remarque
ne concentration
resque
exclusive e leurs ntérêts ans
le
Södermanland
d'une
façon
générale
eurs activités
y
sont circons-
crites.
En
effet,
orsqu'il
est
possible
de les
localiser,
eurs interven-
tionsconcernent
e diocèse de
Strängnäs
ù ils
résident,
ont
des
dona-
tionsou souscrivent es chartes, ormisHolmgerBirgersson ui appa-raît une fois à
Heisingborg
n 1310 0. C'est entre eurs mains
qu'est
passé
le domaine
de Strand
paroisse
Jäder,
Södermanland),premier
témoignage
de l'existence
du
lignage
en
1250
(cf.
carte
2).
En
revanche,
Rörik et
ses descendants
directs ont un
rayon
d'action
beaucoup plus
large,
même s'il reste axé sur
le
Söderman-
land. D'une
part,
ils
sillonnent
avantage
le
Royaume
Rörik
Bir-
gersson
éjourne
deux ou troisfois
au Danemark
1310,
1312,
1318)
on le
rencontre ans
l'Uppland (1276, 1299),
le Vastmanland
1291)
et
l'Östergötland
1312,
1313,
1315).
Cela est
dû
au
plus grand
relief
de cette branche
dont certainsmembres
ppartiennent
u
Conseil
du
Roi, commeRörikBirgersson t AnundRöriksson.Ce dernier ppa-
raît à
plusieurs
reprises Uppsala
et à Stockholm. Son frèreFolke
Röriksson
est chanoine
de Västeräs
(Västmanland).
Leur richessefoncière
st
également
lus
étendueet
plus disper-
sée.
On
perçoit
cependantplusieurs
oncentrations omaniales. Une
première
érie se
trouvede
part
et d'autre du lac
Mälar,
à
l'intérieur
d'un
triangleArboga
-
Västeräs
-
Strängnäs.
Une
grande
partie
provient
e
l'héritage
'Anund
Haraldsson,
car un certainnombrede
ses
domaines
réapparaissent
n
rapport
vec
les descendants
e Rörik
ainsi Anund Haraldsson
avait une curia dans l'île de
Ridön où Folke
Röriksson st
présent
n
1316.
En
1331 Anund Röriksson chète des
terresdans les paroissesde Säterbo et de Västermodéjà citées dans
le testament
'Anund Haraldsson.
30.
Sveriges
raktater
ed
rämmande
akter
ST),
Stockholm,877,
.
,
p.
372.
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 131/144
129
Un deuxième
groupe
est centré ur
la
partie
orientaledu
Söder-
manland entre
Julitaet
Nyköping
cet
ensembleest essentiellement
connu
grâce
au testament e
Birger
Röriksson.
l
représente roba-
blement
es contours
de
sa
part d'héritage.
Au cœur de
cette
région
se trouvait
e domaine
principal
de
Birger Sundby
dans la
paroisse
de
Forssa,
église
dont il
était
le
patron.
Nous savons
que
Rörik et
Anund
Röriksson
faisaientaussi
partie
des
grands propriétaires
u
Södermanland
en
1317,
Rörik fut menacé d'excommunication
our
avoir refusé
de verser a
part
de la dîme
qui
revenait
l'évêque31.
En 1327 Anund est cité
parmi
es Grands
qui possédaient
des terres
dans cetteprovince32.
Une troisième one est située dans
le nord de
l'Östergötland
e
part
et d'autre
de
Linköping.
Une
partie
de ces domaines
provient
vraisemblablement
e
l'héritage
de Tord Bonde :
l'époux
de
Marga-
reta Röriksdotter
vait dans cette
région
son manoir
principal
à
Orbäck
(paroisse
Klockrike).
À
l'est
de
Linköping,
sa femme vait
des terres Valstad
(paroisse
Klockrite)
t sa fille
Ingeborg
à
Sjö-
kumla
paroisse
Västra
Stenby)
ainsi
qu'à
Skrikstad
paroisse Varv).
Cependant,
ertains
iens relevaient
u
patrimoine
e Rörik
qui
exer-
çait
un
patronage
partiel
ur
l'église
toute
proche
d'Östra
Skrukeby.
Près de Linköping,Anund Rörikssonpossédaitun domaine à Linka-lösa
(paroisse
Västerlösa)
tandis
que
son frère
Birger
itdon de
Vrig-
stad,
non
identifiémais situé
in
osgocia.
Plus
caractéristique
ncore
est
la
série
de domaines sis
autour de
Söderköping.Birger
Röriksson
y
était
propriétaire
Restad
et
sa nièce
Ingeborg
y
avait une curia
à
Liljestad (paroisse Skönberga)
la
mère de
celle-ci,
Margareta
Röriksdotter,
mit
en 1330 une charte
depuis
a
paroisse
voisine,
käll-
vik,
où
avait
séjourné
Rörik en 1312 de
passage
à
la
forteresse
oyale
de
Stegeborg.
Autant de faits
que
l'on ne
peut manquer
de
rappro-
cherde la
présence,
une dizaine
de
kilomètres e
Söderköping,
'une
des rares
nscriptions
uniques
mentionnant
'existence
'un Rörik
dans
la régionvers le milieu du XIe iècle33.
Pour
clore le tour
d'horizon de ce
patrimoine,
orce
est
de cons-
tater a
faiblessedes indications
oncernant
'Uppland
: on sait
seule-
ment
qu'Anund
Röriksson
voulut
y
échanger
une terre
située
à
Sparrsätra34
t
que
son frère
Birger
souscrivit
une charte
à
Garn
dans cette
province.
Le
paradoxe
est
surprenant uisqu'en
1289 Rörik
était
signalé
comme
relevantdu diocèse
d'Uppsala, qu'il appartenait
aux milieux
aristocratiques
pplandais
à
l'origine
du
culte
de
saint
Éric,
et
qu'il
maria deux de ses enfantsdans deux illustres amilles
de la
région.
l
serait étonnantdans ces conditions
u'il
n'y
ait
pas
eu
quelques
domaines
Sans doute faut-il oir à soit une
volontédéli-
31. Ds
3,
pp.
328-329,
os2111 t
2112,
.
331,
n°
2116.
32. DS
4,
p.
21,
n° 2624.
33.
SR,
op.
cit.,
note
8,
Ostergotland,
°
153
Styrstad).
34. DS
6,
pp.
177-178,
°
4549.
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 132/144
130
bérée
d'épargner
le
noyau
dur
»
du
patrimoine,
n effectuant es
donations
à
partir
de domaines
périphériques,
oit le résultatd'une
confiscation
e ses biens
en
Uppland
après
sa
participation
la
révolte
de 1278-1280.
n
tous
cas,
on met ci en évidence
un
phénomène ar-
ticulièrement
ignificatif
e la haute noblesse suédoise la
dispersion
territoriale es
patrimoines
u
point qu'il
est trèsdifficile 'identifier
avec
certitude a
région d'origine
de
ces
lignages.
Tant sur le
plan
des institutions
ue
des
comportements,
'étude
du
Moyen Age
suédois
ne doit
pas
être laissée à l'écart des
recher-
chesqui désormais 'ontplusseulement our objet la Francedu Nord,
mais
englobent
a totalitéde
l'Europe
médiévaledans
sa
diversité t
ses contrastes.
La
composition
des
archives uédoises
qui
conservent
n
grand
nombre des actes
privés
ou à caractère
familial
nous
incite à nous
intéresser
la structure es
lignages
aristocratiques.
n
premier
ieu
il
faut
souligner
a diversité es relations
de
parenté.
La
complexité
des
cousinages
et des alliances reste
toujours
étonnante nos
yeux
en raison des
remariages
t de
l'importance
ue gardent
u
xiv*
siè-
cle les
liens
cognatiques.
Cependant
e
mariage
demeure
une affaire
qui se traite ntrepairs (et entrepères ) : une famillenoble ne peut
marier es
enfants
u'avec
ceux
issus
d'un
rang
égal.
Éviter
a con-
sanguinité
evient lors une
gageure
et cette tendance
l'endogamie
explique
en
partie
es
innombrables ontestations
t
les
épineux par-
tages d'héritage
ui
rebondissent
arfois
sur
plusieursgénérations
t
voient ntervenir e
multiples
cteurs souvent difficiles
identifier.
Derrière a sécheresse
es
sources,
on
sent
donc une
société
qui
palpite,
car,
bien
que
disposant
d'une situation
meilleure,
'aristocra-
tie
est
aussi
frappéepar
la
fragilité
es
conditionsde vie.
En
moins
d'un
siècle,
u sein des
familles
tudiées,
n relève
as
moinsde
quatre
veuves
qui
se sont
remariées,
ont au minimum eux ont survécu
deux époux successifs. l est également rappant e constater ue ce
lignage
'éteint
utour
de 1350. Au moment e la Grande
Peste,
trois
représentants
âles
de la
génération
ée vers
1325-1330
disparaissent
des
documents
Magnus
Anundasonn'est
plus
cité
après
1344,
Holm-
ger
Jonsson
près
le 30
juin
1350,
Rörik
I
Birgersson
st
mort vant
1359.
Sur
le
plan
de l'histoire ociale
enfin,
on
remarquequ'en
Suède
dominus
et même miles restent es titres
ssentiellementéservés
la
haute aristocratie
ncore au
milieudu
XIVe
iècle.
Il
est notable
qu'au
sein d'un
lignage,
deux branches
ont
pu
coexister,
'une
appartenant
à la
haute
noblesse,
l'autre
cantonnéeà un niveau visiblement
nfé-
rieur, lorsqu'elles possédaient es biens dans la mêmerégion t dans
des
paroisses
voisines
et
que
se maintenaient es
contacts entre ses
membres
Birger
Holmgersson
st
présent
la rédaction u testament
de
Birger
Röriksson
qui,
à son
tour,
a souscritune donation
de Jon
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 133/144
131
Holmgersson). Quelle
est
l'origine
d'une telle
différence e statut
La richesse ans
doute,
notamment
râce
à de beaux
mariages
omme
celui
que
fit Rörik
Birgersson.
Ainsi,
lorsqu'on compare
deux
testa-
ments
ontemporains,
elui de
Birger
Röriksson
1329)
et celui de Jon
Holmgersson 1332),
on
remarqueque
les donations en
argent
t en
nature du
premier eprésentent lus
du double de celles du second.
L'explication
n'est certes
pas
suffisante ant
l
est vrai
qu'une
union
avantageuse
est d'autant
plus
facile à réaliser
que
le
rang
est élevé.
Il semble en
définitive
robable que
le facteur
prépondérant our
appartenir
la haute aristocratie oit
demeuré,
out au
long
de
cette
période, la faculté d'être considéréparmi les prochesdu monarque
grâce
aux liens de
parenté
et au service
royal.
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 134/144
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8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 135/144
Médiévales
1,
automne
991,
p.
133-137
NOTES
DE
LECTURE
Martin
Aurell,
La vielle t
l épée.
Troubadourst
politique
n
Provence
au
XIIIe
iècle,Paris, Aubier, 989,
379
p.
Périodiquement,
n vient
appeler urgence u il y
a à
rapprocher
es
disciplinesistoriques
t
littéraires.
i cela ne reste
as
un
vœu
pieux,
est
grâce
des chercheurs
ui,
comme et historien
e
la
Provence,
nt e
goût
et les
moyens onceptuels
e la double
ppartenance.
e
sujet,
l
est
vrai,
semblaitxigerette oubledémarche,uisqu il agissait étudieresirventes
politique.
L auteurnous offre n
premier
ieu un
ouvrage
e
synthèse
ans
un
domaine alisé
ar quelques
ares
monographies
Ch.
Camproux
t R. Lavaud
pour
Peire
Cardenal,
. de
Riquerpour
es troubadours
éfugiés
n
Catalo-
gne,
tc.
Certes,
a Provencee trouve
argement
avorisée,
ais
ela n exclut
pas quelques
xcursions
patiales
vers e
Languedoc
ar
e biaisdes
guerres
albigeoises
vers Italie t a
Catalogne
ans a mouvance e
l expansion
nge-
vine u détriment
e
l Empire.
e
champ
insidélimité
orrespond
unecen-
tainede
compositions
urun
corpus ui
en
compte inq-cents,
e
qui
consti-
tue un échantillonrès
représentatif
u
genre. ouvrageReut
e lireaussi
comme n nstrumente travail
ar
a
richesse e son
appareil
cientifique
cinquante agesde notes sources nédites cartes index e personnes,e
lieuxet de matières.
L éclairage
istorique
e révèle
récieux,
out
d abord,
pour
élucidere
sens
ittéral es
poèmes
l auteur
pporte
u rectifie
ci
de nombreusesndi-
cations ur
a
date,
e contexte
olitique,
e cadre
événementiel,
tc.
Cette
méthode evientussi à nous
présenter
es
poèmes
en situation
,
en
nous
restituant
e bruit t la
fureur,
a
chair,
e
leur
naissance
istorique.
ette
histoire e l événemente
prolonge ar
une
approche
outaussi
classique,
les
biographies
e troubadoursans a traditiones vidas la
rigueur
istori-
que
en
plus.
Tout en maîtrisanthistoire
vénementielle,
auteur
pplique
es
grilles
plusnovatricesl ethnologie,histoire esmentalités,a sociologie) uimet-tent
jour
des structurese civilisationle statut u chevalier
uvenis
dans
le
portrait
rès ttachante l infant
nrique,
e déclin es
seigneuries
u béné-
ficede la centralisation
rincière,
a monétarisationes
liens
féodaux,
tc.
Le mérite
rincipal
e cet
ouvrage
ous emble enir
un
équilibre
rès éussi
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 136/144
134
entre événement
t
a
structure,
a
biographie
ndividuellet e
modèle ocial
où s insère
haque
troubadour.
ans le
domaine
e la
sociologie ittéraire,
l auteur
perçoit
ne
loi
de
déclassement
u
troubadour,
abord
seigneur
(Boniface
e
Castellane),
nsuite
ministériele
la cour
Bertran
e
Lamanon),
et
enfin
ongleur
gages
Paulet
de
Marseille),
e
qui
tendrait
relativiser
la
validité
es
thèses
E.
Koehler ur
extraction
ocialedes
troubadours,
les
limitantu seul xii«
iècle.
Au
filde son
texte,
auteur
e
dédaigne as
d établir
arfois
uelques
parallèles
vec
histoirea
plus
contemporaine
ces
notationsontribuent
donner
son
ouvrage
ne très
uggestive
mpression
e vie
et de
proximité
culturelle, ême i l on peutpenser u ellesnemanquerontas de déconte-nancer
uelques
puristes.
Du
point
e
vue
ittéraire,
n
peut
regretterue
l auteur
ait
pas
entre-
pris
une véritable
ypologie
u
genre
partir
es
analyses
parses
u il
pro-
digue
i
et
là
dans
ouvrage
le
sirventes
omme
ontrafactum
e la chan-
son,
es
fonctions
pposées
u senhal
t du
sobriquet,
es
formes
une voix
ou
parties
deux
voix,
tc. Cela
dit,
n est-il
as
fécond
e définir n
genre
par
une fonction
ociale
t
culturelleutant
ue
par
des
traits
tylistiques
ui
en
sontbien ouvente corollaireu
niveau
u
langage
Il
nous
emble
ue
les conditions
istoriques
euvent
tre
ussi
pertinentes
ue
les ois
de la créa-
tion
ittéraire
uand
l
s agit
d éclairer
es
processus
e
genèse
u d extinc-
tion
d un
genre.
Fort de sa double compétence,n histoire t en littératuresoc,
M. Aureli ient e surmonter
ette orte
«
hémiplégie
qui frappait
es étu-
des sur
a
poésie
des
troubadours,
n ce
sens
ue
la
place
d honneur
ui
était
réservée la
poétique
e l amour achaitmal une
certaine
ésestimeu volet
politique
t social.
Le
mérite e
l auteur
std avoir
ccompli
on
programme
d un seul
élan,
en assumant
es
difficultés,
ais
aussi les
richesses,
une
«
polyphonie
des
troubadours
rovençaux
u
xnie
iècle.
Vincent erverat
GloriaK. Fiero,Wendy feffer,MathéAllain, ThreeMedievalViews fWomen. a contenancees
fames
Le biendes
fames
Le blasme es
fames
New Haven and
London,
Yale
University
ress, 1989,
168
p.
ill.
Les trois
its
présentés
ci et dont e thème st
a
femme,
atent e la
fin
xiiie,
ébut ive iècle t sont
nclus ans douze
manuscritsu
total.Les
auteurs nt choiside
publier our
a
première
ois a version
u
«
Blasme
des fames contenue ans le
manuscrite
Cambridge.
La
première
artie
u livre st
consacrée la
traditioncrite e ces
poè-
mes
qui
ont
oui
d une
grande
opularité
u
xiiie
iècle.Tout en
présentant
des affinitésvec es fabliaux t la
poésie
ourtoise,
es
dits en
distinguent
essentiellement
ar
eurvocation l oralité. ls
étaient n effet estinés
être
racontés e vivevoix, être, n somme, its. L oralité st manifesteans
les trois its
proposés
ci on la
repère
la
langue, arlée
t
directe,
acile-
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 137/144
135
ment ccessibleu
public
e
l époque
t
au
style, escriptif,épétitif
t
rythmé.
La deuxième
artie
itue
a femme
ans e
contexte
istorique
t
social,
surtout rbain. a
troisième
artie
nfin st édition es trois
its,
vec en
regard
a traduction
nglaise,omplétéear
des notes
xplicatives
t es varian-
tes
des
textes. a
présentation
st
d une
grande
larté t
rend
e
livre acile-
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tilisable.
Quant
à
la
teneur
t
à
l esprit
e ces
poèmes,
isons-le outde
suite,
deux d entre
ux s inscrivent
ans une
longue
radition
ittéraire
isogyne.
Même
Le
biendes
famés
renâcle n
peu
à énuméreres vertus émininest
ne
manque as
d exalter
elles,
masculines,
e la
courtoisie
t de la
généro-
sité,
ui
veulent
u on
ne
médise
as
de
la femme. n
passe
du ton amusé
etcondescendanteLa contenanceesfames la hargnetmême la haine
du
Blasme es
fames
Miroirs
éformants,
ù
la femme est
pas
sauvée
ar
la
Vierge,
modèle
oujours résent ui
la
protège
ertes
e
l infamiemais
qui
reste naccessible.
Cela
dit,
ces
trois
oèmes
nous
ivrent,
une
façon
ouvent
laisante,
maints
étails
ur
a vie
quotidienne,
es
habits,
es
coiffures,
es
atours
e
la
femme,
insi
que
sur a
perception,
aite
d amusement,
inquiétude
u
d exaspération,
u avaient
elle les hommes.
Il faut aluer
e
travail
e
traductionn
anglais
des trois uteurs
ui,
touten
suivant
e texte aussi
près
que
possible,
nt su
garder
e
rythme
et
la
fraîcheur
e ces
poèmes.
Ce
petit
ivre
oncis st une bonne ntroduc-
tion u
dit médiéval
t il
rend ccessible
un
public eu
formé la
languefrançaise,t moins ncore ses formesnciennes,ngenreittéraireui a
peut-être
té
trop
ouvent
égligé.
Lada
Hordynsky-Caillat
Roland
Carron,
Enfant
t
parenté
ans a Francemédiévalexe-xuie
iècles
Genève,
Droz, 1989,
189
p.
Le
caractère
ragmentaire
t très
ispersé
es sources elatives
l enfant
rend oute
ynthèse
ifficile.
ussi et
ouvrage,
ssu d une
thèse e
doctorat
de 3ecycle outenuen juin 1983,représente-t-iln travailminutieuxort
appréciable.
R.
Carron
lu
et
étudié
e
trèsnombreux ocumentse
nature
iplo-
matique,uridique,
ittéraire,
eligieuse,
tc.,
es
recoupant
anscesse finde
nous
permettre
e saisir
a
réalité
istorique
e l enfant t de
l adolescent.
Ces
sources,
épertoriées
la fin e
l étude,
roviennent
es
régions
e France
les
plus
diverses.ertaines
ont rès onnues els e
Registre
es visites
Études
Rigaud
u
les Coutumes e Beauvaisis e
Philippe
e
Beaumanoir,
autres
beaucoup
moins
coutumes
t chartes
ocales).
Selon
R.
Carron,
Pour bien connaître
enfant,
l
faut étudier a
parenté (introduction. 1).
Aussi on
objet
d étude e définit-ilomme n
êtreen état de
dépendance
arentale
acception
rès
arge qui permet
l auteur étudier utant es enfantsue des adolescentsux âges quelque-
foisfort
vancés,
t es relations
u ils
entretiennent
vec
eurfamille t
eur
lignage.
es deux derniers
ont,
pour
enfant,
out la
foiscontraintet
protection.
ls se
complètent
t
s opposent our
ncadreres
ndividus. est
pourquoi
R.
Carron
intéresse
articulièrement
ux communautésamiliales
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 138/144
136
pour
esquelles
l dresse ne
typologie.
es
regroupements
rès
nombreux,
autant
par
souci
de
protection
ue pour
éviter e morcellement
es
terres,
prennent
es
formes
uridiques
ifférenteselon es
régions
simple
ommu-
nauté
egroupant
arents
t
enfants, rarêche,
arage, rérage...
ette
ypo-
logie
très
précise ermet
e saisir a
variété t la
complexité
es situations
du domaine
rançais.
L auteur
onsacre
nsuite eux
ongs
hapitres
ux statuts es
orphelins,
des
bâtards,
rop
ouvent
élaissés
ar
es médiévistes.ans es
grandes
amil-
les
aristocratiques,
l
existe u
xie
iècle ne
véritable
écupérationar
e sei-
gneur
es
orphelins
e vassaux
ux
dépens
de la
veuve/mère,
ar les liens
d homme
homme ont
i forts
ue
l éducation e l enfant
pparaît
u sei-
gneur omme neobligationmorale.Mais ce procédé e voitpeu dans e
Sud moins
éodalisé,
t
décline ettementans es
deux iècles uivants.
lors,
le bail
gestion
es biens
noblesd un mineur
oble)
ou la tutelle ont
arge-
ment onfiés
la
mère/veuve,
ar on estime
ue
c est elle
qui
est a mieux
placée
pour apporter
mour,
ducation
t aide à
son enfant. e
coutumier
d Artois
ar
exemplefin
xiiie
iècle)
déclare
«
... nus ne le
[l enfant]
oit
ni ne
peut
mieux
imer,
ne
garder
lus soigneusement
omme
i
pères
ou
li
mères...
C est a
faculté aimer
lusque
la
capacité gérer
ui importe.
La
tutelle,
ui
dure
resque
artout
n France
usqu à
a maturité
hysio-
logique 12
ans
pour
es
filles,
4
ans
pour
es
garçons)
st
quelquefois
ro-
longée
ar
a curatelle
ui permet
l adolescent
oblede bénéficierun con-
seiller
ui agit
à côté
de lui et non
plus,
comme e
tuteur,
sa
place.Entree Xe t le xiiie iècle, es bâtards assent e l intégrationans a
famille u
rejet
de
plus
en
plus
affirmé.
usqu au
dernier
uart
du
xie
iè-
cle,
es
bâtards
ivent,
emble-t-il,
e
façon
ssez
paisible.
Aucune
nterdic-
tion
particulière
e
pèse
sur
eux.
À
partir
e la réforme
régorienne
t avec
la lutte ontre
e
nicolaïsme,
a simonie
t e
concubinage
es
aïcs,
es bâtards
sont xclus
es
héritages
t des
charges
cclésiastiques.
. Carronnotefort
justement
ue
cette xclusion
est
pas
seulement
ue à la lutte
ue l Église
mène
pour
récupérer
t
imposer
e
mariage,
mais
également
ux
aspirations
de la société
aïque
qui,
dans
une
période
e forte
oussée
démographique,
a tendance
favoriser
e droit aînesse
t à exclure e
l héritage
e nom-
breux
nfants,
fin d éviter
e morcellementu
patrimoine.
Finalement,e que veut montrer . Carron c est l importanceuxine iècle ans a naissance e l individualisationt doncde l essor unsen-
timent
e la réalité
ropre
e
l enfant ans la famillemédiévale.
est un
siècle
ui
voitun souci
évident e
protéger
es enfantsur e
plan uridique.
Certes,
ertaines
ffirmations
ériteraient
uelquefoislus
de nuance. auteur
écrit
ar exemple
«
La lutte
ontree
concubinage
vu
commee
signe
une
volonté
e ne
pas
s engager
ans
des iens
urables]
ouvait pparaître
omme
une
lutte
pour
la
défense
e
l enfant,
our
son
droit l éducation t à
l amour
(p. 133).
On
sait,
grâce
n
particulier
ux travaux e J.
Goody,
que
la lutte
menée
ar
es
autorités
cclésiastiques
ontre e
concubinage
t
pour
indissolubilité
u
mariage
comme ouci
premier,
oins a
protec-
tionde l enfance
ue
la défense es intérêts
inancierse
l Église
t
la
pré-
servationunmonopole ans e domainematrimonial.ecrois ourmapart
que,
même i les
eunes
gens
peuvent
énéficier
à
et là de mesures
uridi-
ques qui permettent
améliorer
eur
ituation,
ls ne sont
ue
des
enjeux
ans
la lutte
ue
se livrentes
autorités
emporelles
t
spirituelles,
t
que
dans a
mentalité
édiévale u
xine
iècle,
ls
restent es êtres mineurs
.
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
http://slidepdf.com/reader/full/medievales-num-21-automne-1991 139/144
137
Il
n en demeure
as
moins
ue l ouvrage
e R.
Carron
ffre ne excel-
lente
ynthèse
e la
position
e l enfantt de
l adolescentu seinde
sa
parenté
et
permet
e
saisir,
traverses sources
uridiques,
a
plus
grande
ttention
apportée
l enfance
ntre e
Xe
et le
xine
iècle.
DidierLett
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
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LIVRES
REÇUS
Michel
BALARD,
Jean-Philippe
GENET,
Michel
ROUCHE,
Le
Moyen Age
en Occident. Des Barbares
à ¡a
Renaissance
Paris,
Hachette
(Histoire Université),
990.
Carla CASAGRANDE et Silvana
VECCHIO,
Les
péchés
de la lan-
gue.
Discipline
et
éthique
de
la
parole
dans la culture
médiévale,
préf.
de
Jacques
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Cerf
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Les contes de Cantorbéry ar Geoffroy HAUCER, sélect.,traduct.
et introd. de Juliette
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Francis
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la littérature arrative
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L Autre, l Ailleurs,
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Autrefois
2
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Georges
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ChristianeKLAPISCH-
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Jean-Philippe ENET, Le monde au Moyen Age. Espaces,pouvoirs,
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Ivan
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Du lisible au
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Pierre
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Champion (Traductions
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Jourdainde Blaye, chanson de geste, nouv. édit. Peter F. DEM-
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Raymond
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Le roman de
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trad, en fr. moderne
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Champion
(Traductions
des
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Moyen Age,
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Rutebeuf
et les
frères
mendiants. Poèmes
satiriques,
trad,
en fr.
moderne
par
Jean
DUFOURNET, Paris,
Champion
Traductions
des
Classiques
Français
du
Moyen Age,
XL
VI),
1991.
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
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Les
XIIIe Journées d Histoire
du Droit médiéval
auront
lieu
à
Limoges
dans
la
semaine
du 23 au 27
mars
1992.
Les thèmes
retenus
pour
cette session
seront
:
-
La
superstition
-
Les
fondateurs d ordres
-
Les
aspects
institutionnels
des
règles
monastiques
(contenu, application, évolution...)- Le
Moyen Age
vu
par
les hommes du xviii* siècle
et de la Révolution
(suite)
Par
ailleurs,
sont
au
programme
chaque
année :
-
L histoire
du droit
pénal
-
Le
droit
et les institutions du
Limousin
-
L iconologie
juridique
Pour tous
renseignements,
adresser à Pierre
BRAUN,
professeurà la Faculté de Droit et des Sciences Économi-
ques,
87031
Limoges
Cedex.
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ESSAIS
ET
RECHERCHES
Réflexions ur aristocratieuédoise u
Moyen
Age
:
l exemple
un
lignage
noble ntre
250 et
1350
Jean-Marie
AILLEFER
115
Notesde lecture
133
Martin
AURELL,
La
vielle t
épée.
Troubadourst
politique
en
Provence au XIIIe
iècle
(V.
SERVERAT)
;
Gloria K.
FIERO,
Wendy
PFEIFFER,
Mathé
ALLAIN,
Three
Medieval
Views
f
Women.
a contenance
es
fames.
e
biendes
fames.
Le
blasmedes
fames
L.
HORD
YNSKY-C
AILLAT)
;
Roland
CARRON,
Enfant
t
parenté
dans la
France
médiévale
Xe-
xilfsiècles D. LETT).
Livres
eçus
138
8/9/2019 Medievales - Num 21 - Automne 1991
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ISSN 0751-2708
SOMMAIRE
N°
21
AUTOMNE 1991
L AN MIL
:
RYTHMES
ET ACTEURS D UNE CROISSANCE
L an
mil :
continuité,
ournant u révolution
Discussions autour
d un
ivre ontroversé
Monique
BOURIN
5
Le litde Procuste eGuyBoisBarbaraH. ROSENWEIN 11
Essor
démographique,
roissance
graire
t
achéologie
Elisabeth ADORA-RIO
17
Á
la recherche
e
personnes erdues...
MariaHILLEBRANDT et
FranzNEISKE
21
Mutations
t révolutionsux environs e
l an mil
ChrisWICKHAM
27
Mâconnais, erre éconde
Pierre
ONNASSIE
39
Un
regard ériphérique
urLa
mutatione l an mil
Lluis TO FIGUERAS
47
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