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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Remerciements
Je tiens à remercier Monsieur le Professeur Jacques Barrat pour le temps qu’il m’a
consacré et pour l’aide précieuse qu’il m’a apportée dans la réalisation de ce travail.
Je remercie vivement Monsieur le Professeur Francis Balle pour sa grande
disponibilité et pour les conseils avisés qu’il m’a prodigués tout au long de cette
année universitaire.
Je tiens également à adresser mes sincères remerciements à Monsieur Philippe
Quéau, Directeur de la division Information et Informatique de l’UNESCO, pour avoir
accepté de participer au jury de soutenance de ce mémoire.
Emmanuel Lacroix Page 1
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Sommaire
REMERCIEMENTS SOMMAIRE INTRODUCTION
I. La situation de l’Internet au Burkina Faso en 2002
A. LE PAYS, SON INFORMATISATION ET SES INFRASTRUCTURES DE TELECOMMUNICATION
B. L’INTERNET : ACCES, UTILISATION, COMPETENCES ET PRODUCTION DE CONTENU
C. STRUCTURES NATIONALES ET ACTIONS INTERNATIONALES DE DEVELOPPEMENT
II. Entre culture orale et nécessité d’une maîtrise des nouvelles formes de
l’information : incidences et enjeux de l’internet en Afrique Francophone
A. CULTURE ORALE ET MEDIAS
B. LES INCIDENCES SOCIO-CULTURELLES DES NOUVEAUX MOYENS DE COMMUNICATION
C. ENJEUX DE L’INTERNET ET PLACE DE L’AFRIQUE FRANCOPHONE DANS LA SOCIETE DE
L’INFORMATION
III. Quelles perspectives pour l’internet au Burkina ?
A. L’ENTREE DU BURKINA FASO DANS LA SOCIETE DE L’INFORMATION : COMMENT
ASSURER L’ACCES A L’INTERNET ET LE DEVELOPPEMENT DES COMPETENCES
« UTILISATEUR » ?
B. ENTRE FRANCOPHONIE ET PRESENCE DU BURKINA DANS LA SOCIETE DE
L’INFORMATION : COMMENT FAVORISER LA CREATION DE CONTENU BURKINABE SUR LE
WEB ?
C. AU DELA DES ENJEUX LIES A LA SOCIETE DE L’INFORMATION, LES NTIC SONT
PORTEUSES EN ELLES-MEMES D’OPPORTUNITES ECONOMIQUES POUR LE BURKINA FASO
CONCLUSION BIBLIOGRAPHIE ANNEXES
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Introduction
Le rapport mondial sur le développement humain de 20021 souligne que le revenu
des 5% de personnes les plus riches au monde reste 114 fois supérieur à celui des 5
% les plus pauvres. Il ajoute qu’au cours des années quatre-vingt-dix, le nombre de
personnes vivant dans l’extrême pauvreté en Afrique subsaharienne est passé de
242 à 300 millions
A la rupture économique, traditionnelle, entre Nord et Sud, s’ajoute une nouvelle
coupure, celle de l’information et des transports. Un monde global se crée
progressivement qui rapproche Paris de Niamey ou de Tokyo mais aussi du plus
petit village Sénoufo de Côte d’Ivoire ou Bissa du Burkina Faso. Cette proximité se
construit principalement sur une base unilatérale qui autorise la plupart des habitants
des pays riches à profiter de tous les nouveaux outils de communication et de la
rapidité des transports mais qui ne permet que dans une faible mesure aux habitants
des pays pauvres d’avoir accès à ces nouveaux outils.
Pascal Renaud souligne2 ainsi qu’un habitant de la planète sur deux n’a jamais
téléphoné. Le rapport mondial sur le développement humain 2001 note que 72%
des internautes vivent dans les pays de l ’OCDE qui regroupent pourtant seulement
14 % de la population mondiale. Mike Jensen3 renchérit en remarquant que sur les
770 millions d’africains :
- 1 sur 13 a un poste de télévision (50 millions)
- 1 sur 40 a une ligne téléphonique fixe (20 millions)
- 1 sur 40 a un téléphone cellulaire (20 millions)
- 1 sur 130 a un ordinateur (5,9 millions)
- 1 sur 150 utilise Internet (5,5 millions)
- 1 sur 400 dispose d’un service de télévision à péage (2 millions)
1 PNUD, Rapport mondial sur le développement humain 2002, 2002 2 Pascal Renaud, quand la high-tech réduit le fossé nord-sud, Revue Futur(e)s numéro 4, mars 2001
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Les inégalités dans l’accès à l’information entre le Nord et le Sud sont flagrantes et
elles aggravent une rupture économique déjà considérable. Cette corrélation conduit
Philippe Quéau, à évoquer ainsi le web4 comme le standard « qui exclut les 2
milliards d’humains qui n’ont pas l’électricité, les 3 milliards d’humain qui n’ont pas
les 2 dollars par jours nécessaires pour survivre, et les 95% qui n’ont pas accès au
web ».
La société de l’information profite à ceux qui disposaient déjà de structures
industrielles et commerciales élaborées ; l’information exprimant souvent son
potentiel considérable en complément d’un savoir-faire. Philippe Quéau ajoute que
« les navigateurs du cybermonde maîtrisent des codes nouveaux aux avantages
comparatifs indéniables. Mais surtout ils se dotent de clés d'intelligibilité nouvelles,
dont sont cruellement exclus les nouveaux prolétaires du virtuel, ainsi dépossédés
des moyens de production cognitive et d'analyse symbolique qui leur permettraient
de se doter d'un point de vue efficace sur le monde ». A ces divergences entre Nord
et Sud viennent s’ajouter des divergences au sein même des pays entre élites
aisées, info-riches, et populations défavorisées, info-pauvres.
Le village global annoncé par Mc Luhan en 1969 apparaît progressivement et
marque les limites d’une organisation mondiale dominée par l’égoïsme des pays du
Nord. La société de l’information aggrave soudainement la rupture économique
entre le Nord et le Sud et provoque, par là même, le franchissement d’une ligne de
l’inacceptable. Parallèlement les entreprises multinationales échappent à tout
contrôle et amplifient encore le phénomène. Philippe Quéau remarque5 qu’elles
« utilisent au mieux les contradictions entre les lois, les règles nationales ainsi que
les échappatoires pour tirer leur épingle du jeu, en maximisant leurs profits, mais
sans aucune considération pour la responsabilité sociale planétaire que leur
puissance économique devrait leur faire assumer ». Dans ce concept, nombreux
sont ceux qui demandent une révision de l’ordre mondial et la mise en place de
nouveaux mécanismes de régulations.
3 Mike Jensen, L’Internet Africain : un état des lieux, www.africanti.org, février 2002 4 Philippe Quéau, Le paradigme de la baleine, du cafard et du lapin, http://www.educ-pop.org 5 Philippe Quéau, La planète des esprits, pour une politique du cyberespace, Odile Jacob, 2000
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Quelles seront les relations entre Nord et Sud dans un contexte d’accroissement des
déséquilibres mondiaux ? L’entrée dans la société de l’information n’oblige-t-elle pas
à redéfinir les relations internationales et les modes de vie de certains pays ?
Philippe Quéau répondant aux questions de l’association des Humains associés6
insistait sur la nécessité de développer un discours de rupture devant le constat de
l’état réel du monde. « Ce n'est pas parce que 10% des gens seulement produiraient
de la richesse, qu'il faudrait exclure les 90% restants. Sinon nous ne sommes plus
des hommes et cela revient à dire : "il y a 90% d'inutiles, exterminons-les !" Il faut
prendre un autre raisonnement : il y a 10 % de gens qui produiront la richesse
matérielle et 90 % qui pourront devenir peintres, formateurs, éducateurs, qui
produiront la richesse "virtuelle", immatérielle, sinon on ne tiendra pas le choc. »
Crise du capitalisme ? De nombreux journaux titrent dans cet esprit. Les inquiétudes
sont il est vrai, nombreuses : inquiétudes face à l’industrie alimentaire et à
l’agriculture productiviste qui s’étendent au détriment des pays pauvres et qui
nourrissent de plus en plus de personnes mais de plus en plus mal ; inquiétudes face
aux atteintes à l’environnement et aux incidences sur la planète du mode de vie des
pays industrialisés ; inquiétudes face au progrès scientifique et aux limites de ses
évolutions : bases de données génétiques peu contrôlées, brevetabilité de l’essence
humaine (le gène), prise en compte de données génétiques personnelles par les
assurances… ; inquiétudes face à la dérive du « tout juridique » et à ces
conséquences sur les systèmes de santé et aux relations humaines ; inquiétudes
face aux puissances financières et à la virtualité de la bourse et de ses excès.
Plus modérément, nous assistons sans conteste à une crise d’une conception
égoïste du capitalisme. L’avènement d’un monde global multiplie les effets des
comportements unilatéraux et égoïstes et les pays pauvres ne peuvent plus admettre
sans réagir ces abus des pays riches. Or, comme le note le Journal du Jeudi,
hebdomadaire burkinabé, en évoquant la terre et les enjeux écologiques du sommet
de Johannesburg, « ceux qui en profitent le plus, au point de la mettre en péril,
6 Entrevue avec Philippe Quéau, Cyberespace ou le jeu vertigineux du virtuel, les humains associé, revue intemporelle N°7 : Bonne nouvelle pour des temps difficiles, 1995
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
refusent de consentir des sacrifices à hauteur de leur profit. Mais le drame, c’est
qu’en dehors des coups de gueule, le reste de l’humanité est impuissante. La
fameuse théorie du pollueur payeur ne peut pas s’appliquer ici, parce que celui qui
pollue est aussi le plus fort ».
Face à l’impuissance des pays pauvres et à la surdité des pays riches, le risque est
grand de voir apparaître une violence dans les revendications du Sud. Les attentats
du 11 septembre, ont avec une violence peu commune, attiré l’attention sur la
divergence grandissante entre les pays industrialisés et le reste du monde. Loin de
nous l’idée de tenter d’attribuer à ces attentats une signification quelconque, mais
derrière cet évènement, le constat a pu être effectué que les populations de
nombreux pays pauvres se sont réjouis du malheur américain. Le général Myers,
chef d’état major de l’armée américaine à San Francisco évoquant le 11 septembre,
ne prédisait-il pas récemment7 que « le terrorisme est la première guerre mondiale
de l’âge de l’information » ? Doit-on y voir un premier pas vers l’avènement de la
violence dans les revendications du Sud ? Un an après, les Etats-Unis mènent une
politique plus frileuse et unilatérale que jamais et partout dans le monde, les
intellectuels et les journaux s’inquiètent de leur attitude. Quand The Monitor de
Kampala, un grand quotidien ougandais8, incite les pays les moins avancés à agiter
la menace d’une destruction des ressources forestières africaines comme moyen de
pression contre les occidentaux, on peut s’interroger sur l’état des relations futures
entre Nord et Sud, notamment si ce dernier est laissé à l’écart de la société de
l’information.
Cette constatation conduit à s’interroger sur le socle même de nos sociétés et sur les
modalités de gouvernance du monde dans les prochaines décennies. Mais elle
amène en premier lieu à conclure à l’urgence impérative d’inclure les pays du Sud
dans la société de l’information afin de ne pas fermer définitivement la porte à toute
opportunité de développement économique des pays les moins avancés. Il en va de
l’intérêt des pays pauvres comme de celui des pays riches, faute de quoi la
divergence entre Nord et Sud, sera si exacerbée qu’elle risquera d’engendrer des
relations de plus en plus violentes, contraires aux intérêts de chacun.
7 Jacques Isnard, L’armée américaine face au défi terroriste, in Le Monde, 5 septembre 2002, page 17 8 Johannesburg vu par la presse africaine, Le Monde, mardi 3 septembre 2002, page 16
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Parallèlement, la globalisation de l’information et de la culture induit une
uniformisation progressive des valeurs et des modes de vies. Les phénomènes
d’acculturation et de déculturation peuvent être constatés partout dans le monde.
Cette perte de culture profite principalement aux Etats-Unis qui, en diffusant les
produits de son industrie culturelle, ont su créer ce que Jacques Barrat qualifie de
« sous-culture coca-cola » et qui ouvre la voie à une domination plus générale et
notamment économique. Production cinématographique anglo-saxonne et boissons
soda ont depuis longtemps ouvert la voie à une industrie américaine florissante.
L’anglais s’est également imposé comme la langue internationale de référence et il
devient inconcevable de ne pas la maîtriser.
Derrière cette uniformisation culturelle et linguistique apparaissent donc des enjeux
économiques et politiques. Or, Internet est d’ores et déjà un espace constitué très
majoritairement de contenu anglophone. Le Burkina Faso, dont le français est la
langue officielle, doit, avec les autres pays de la zone francophone, tenter de faire
vivre et de conserver ses acquis linguistiques et culturels. Le Fespaco, festival du
cinéma africain de Ouagadougou représente un exemple réussi de la préservation
d’une culture africaine par le biais d’un média audiovisuel.
L’édition de contenus burkinabé sur le web s’avère difficile car le Burkina Faso est
confronté à une double barrière : d’une part la nécessaire maîtrise de la technologie
et d’autre part, l’adaptation d’une culture orale et sociale à un média écrit et
individuel.
Le Burkina Faso est donc confronté à un double défi afin de ne pas rester au bord de
la société de l’information et de ses enjeux économiques et politiques. Le premier
consiste à donner accès et à permettre l’appropriation des Nouvelles Techniques de
l’Information et de la Communication (NTIC) par sa population afin que cette dernière
maîtrise les outils de base de la nouvelle société de l’information. En second lieu, le
Burkina Faso doit faire vivre sa culture et sa langue en produisant du contenu
numérique sur le web. Cela dans un double objectif : préserver une culture qui
présente un intérêt en elle même et lutter contre une domination économique et
culturelle anglophone qui l’exclurait à terme de l’accès à l’information et qui
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
conditionnerait progressivement sa population à une relation économique de plus en
plus unilatérale consistant principalement en la consommation de produits anglo-
saxons.
Le choix du Burkina Faso comme objet d’étude peut enfin être éclairé par un triple
intérêt :
- Ancien Coopérant du Service National dans ce pays, j’ai assisté en 1997 à
l’arrivée de l’Internet à Bobo-Dioulasso et j’ai contribué en tant que responsable
informatique d’un centre de recherche médicale à l’informatisation et à la mise
en place d’une connexion aux inforoutes puis à la réalisation du site web du
Centre Muraz. Je suis resté très attaché à ce pays et aux questions liées au
développement des nouvelles technologies de l’information et de la
communication. J’ai dans cette logique réalisé plusieurs sites en relation avec
le Burkina Faso et milité au sein de plusieurs associations oeuvrant pour le
développement des NTIC et l’accès à l’éducation pour tous.
- Cet intérêt particulier m’a permis de bénéficier d’un réseau de relations à
Ouagadougou et Bobo-Dioulasso qui me semblait indispensable à une étude
sérieuse.
- Enfin, le Burkina représentait a priori des spécificités notables et avait été peu
étudié, à l’inverse de ses voisins. Le Mali, le Bénin et le Sénégal notamment,
bénéficiaient tous trois de nombreux rapports et études qui fournissaient une
image assez fiable de leur situation. Le Burkina, pays enclavé, apparaissant
presque en dernière position du classement du PNUD sur le niveau de
développement humain, souffre d’handicaps non négligeables dans son
insertion au sein de la société de l’information.
Après avoir examiné la situation de l’Internet au Burkina Faso en 2002, nous nous
pencherons sur les enjeux culturels, économiques et politiques liés à l’Internet en
Afrique et au Burkina Faso en particulier. Nous nous interrogerons enfin sur les
mesures à adopter pour faciliter l’utilisation de l’Internet et l’édition de contenu
numérique, ce qui nous permettra d’envisager les perspectives prochaines ouvertes
par l’utilisation de l’Internet et l’apparition d’un savoir-faire en conception web au
Burkina Faso.
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
I. La situation de l’Internet au Burkina Faso en 2002
Un point sur la situation de l’internet au Burkina Faso en 2002 passe, tout d’abord,
par une présentation du pays et un état des lieux de son informatisation et de ses
infrastructures de télécommunications. Matériels informatiques et systèmes de
télécommunications sont en effet actuellement les deux préalables à toute utilisation
de l’internet. L’examen de l’accès à l’internet, des utilisations qui sont faites de ce
média et des compétences techniques dans le pays, nous permettra ensuite
d’obtenir une idée précise de la réalité de l’internet au Burkina Faso. Enfin, nous
détaillerons les structures nationales, internationales et associatives qui encadrent le
développement des NTIC au « pays des hommes intègres ».
A. Le pays, son informatisation et ses infrastructures de télécommunication
Commençons par une présentation du pays et de l’histoire de son informatisation et
de ses télécommunications ; ce préalable nous permettra de mieux cerner la
situation humaine, géographique, politique et économique de l’ancienne Haute-Volta.
Le cadre de cette étude est en effet très éloigné des standards européens et mérite
d’être examiné soigneusement afin de bien saisir les enjeux du développement des
NTIC au Burkina Faso. Ce tableau sera ensuite complété par un panorama de la
situation actuelle de l’informatisation et des télécommunications.
11.. PPrréésseennttaattiioonn dduu BBuurrkkiinnaa FFaassoo
a) Le pays, ses richesses, sa population
(1) Histoire politique
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
(a) La période précoloniale
Le Burkina Faso actuel est principalement issu des anciens royaumes Mossi qui se
sont constitués au XIe et au XIIe siècle : le Gourma, le Mamprousi, le Dagomba, le
Yatenga et le royaume de Ouagadougou. Ce dernier dirigé par le Mogho Naba devint
rapidement le plus influent.
Aux XIIIe et XIVe siècles, ces royaumes s'opposèrent aux grands empires de la
boucle du Niger (Mali et Songhay) qu’ils attaquaient fréquemment. La puissance de
leurs armées permit aux royaumes Mossis de préserver l'essentiel de leur
indépendance. Mais, à la fin du XVe siècle, l'Empire Songhay établit sa suprématie
sur la boucle du Niger, mettant fin aux chevauchées des Mossis.
Ces royaumes Mossi présentaient une remarquable cohésion sociale et religieuse et
une stabilité politique exceptionnelle : ils se maintinrent jusqu'à la conquête
française, à la fin du XIXe siècle.
Les Mossis participèrent peu au commerce transsaharien: les grands flux d'échanges
contournaient la région. Aussi l'islam ne s'implanta-t-il pas et les Mossis furent
beaucoup moins touchés que leurs voisins par la traite des esclaves. À la veille de la
colonisation française, le centre du territoire était contrôlé par la confédération des
royaumes Mossis regroupant trois ensembles politiques, le Yatenga, le Wogodogo et
le Tenkudogo. À l'est avait été édifié le royaume de Gurma, et l'ouest, dominé par les
souverains dioulas de Kong au XVIIIe siècle, était disputé entre plusieurs royaumes.9
(b) La période coloniale
La période coloniale débuta à la fin du 19ième siècle et prit fin en 1960 avec l’accès à
l’indépendance du pays.
Sur ordre du gouverneur du Soudan (le Mali actuel), une colonne française
commandée par le capitaine Destenave se rendit à Ouahigouya en 1895 et signa un
traité de protectorat avec le Yatenga. En 1896, l'armée française prit Ouagadougou.
9 www.francophonie.org
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
L'ensemble du pays était occupé en 1897. Il fut d'abord intégré au Haut-Sénégal-
Niger, avant d'être institué en colonie indépendante sous le nom de Haute-Volta en
1919, avec Ouagadougou pour chef-lieu. En 1932, la colonie fut partagée entre le
Niger, le Soudan (Mali) et la Côte-d'Ivoire. Durant toute la colonisation, la résistance
se poursuivit. Le Mogho Naba demeura dans l'opposition. Les recrutements militaires
et le prélèvement de l'impôt suscitèrent de violentes révoltes (notamment
l'insurrection de Dédougou en 1915).
Le Burkina Faso profita finalement du mouvement de décolonisation des années 50-
60 pour accéder à l’indépendance qui fut proclamée le 5 août 1960. Cette dernière
fut accompagnée par des accords de coopération avec la France. Ces accords,
signés le 24 avril 1961 ont permis à la France de conserver une présence culturelle
et politique forte en Afrique de l’ouest et au Burkina en particulier.
(c) 1960 à 1983
(i) 1960-1966 : Maurice Yaméogo et la
première république
Maurice Yaméogo fut le premier président du pays.
En 1962, la Haute-Volta prit part à la constitution de l'Union Monétaire Ouest-
Africaine (UMOA). Elle participa également le 26 mai 1963 à la création de
l'Organisation de l'Unité Africaine (OUA).
En 1966, le premier président de la Haute Volta fut renversé après plusieurs mois de
tensions. Le commandant Sangoulé Lamizana10 prit le pouvoir.
(ii) 1966-1980 : Sangoulé Lamizana
La présidence de Sangoulé Lamizana fut ponctuée de nombreux revirements
constitutionnels et d’une recherche de la démocratie un peu balbutiante. Ainsi
s’enchaînèrent les périodes suivantes :
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
• 1966-1970 : Gouvernement militaire provisoire
• 1971-1974 : Ilième République
• 1974-1976 : Gouvernement de renouveau national
• 1976-1978 : Gouvernement "de transition" et Gouvernement "d'union
nationale"
• 1978-1980 : Illième République
(iii) Le Comité Militaire de Redressement
pour le Progrès National : 1980-1982
En 1980, un coup d’Etat militaire mit fin à la longue présidence de Sangoulé
Lamizana. Saye Zerbo, ancien ministre des Affaires Etrangères du gouvernement de
transition lui succéda. Le groupe de militaire au pouvoir prit le nom de Comité
Militaire de Redressement pour le Progrés National. Thomas Sankara fit sa première
apparition politique dans ce comité. Ce nouveau régime fut rapidement renversé par
un groupe de jeunes officiers qui en faisaient pourtant partie.
(iv) Le Conseil du Salut du Peuple (CSP) :
1982-1983
Deux personnages émergent de ce nouveau coup d’Etat : Jean Baptiste Ouédraogo
qui prit la fonction de Chef de l’Etat, et Thomas Sankara qui confirma ses ambitions
politiques en accédant au poste de premier ministre. Les relations houleuses entre
les deux hommes et leur différences de vues sur le type de régime devant être établi
conduisit le CSP a une succession de crises et à l’arrestation de Thomas Sankara
finalement libéré sous la pression populaire.
Blaise Campaoré, allié de Sankara et réfugié à Pô pendant la crise, marcha
finalement sur Ouagadougou avec les militaires du Centre d'entraînement
10 Sous la direction de Pascal Boniface, Atlas des relations internationales, éditions Hatier, septembre 1997
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
commando (CNEC) le 4 août 1983. Le Conseil National de la Révolution (CNR) fut
alors proclamé.
(d) 1983-1987 : Thomas Sankara et le Conseil National de la Révolution
Thomas Sankara accéda alors au pouvoir et instaura le Conseil National de la
Révolution.
Thomas Sankara a profondément marqué le pays par sa politique d’inspiration
marxiste et anti-coloniale. La légende de Sankara est encore très présente dans les
esprits et les anecdotes sur ses coups d’éclats affluent abondamment dès lors qu’on
demande quelques précisions.
Le Burkina Faso lui doit son nom actuel qu’il a donné à l’ancienne Haute Volta le 4
août 198411. Ce nom qui signifie « pays des hommes intègres », correspondait à
l’affirmation par Sankara d’une volonté de lutter contre la corruption. Nous avons
recueilli de nombreux témoignages qui confirment que la corruption avait
considérablement diminué à la fin de la présidence de Sankara. Si en 2002, le
Burkina Faso souffre à nouveau de ce fléau, il semble du moins en apparence que le
pays soit moins touché que ses voisins maliens et ivoiriens.
La présidence de Thomas Sankara a pris fin en 1987 par un coup d’Etat qui lui a
coûté la vie. La mort de cet homme politique tantôt adoré, tantôt controversé, marque
le début d’une remarquable ère de stabilité politique au Burkina Faso.
(e) 1987 à aujourd’hui : Blaise Campaoré
En 1987 Blaise Campaoré accède au pouvoir. Avec lui commence la « rectification »
qui évolue vers l’avènement de la quatrième République.
11 Sous la direction de René Otayek, Filiga Michel Sawadogo et Jean-Pierre Guingané, Le Burkina entre révolution et démocratie (1983-1993), éditions Karthala, 1996
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
L’homme politique est relativement contesté au début de sa présidence, les
sankaristes ne lui pardonnent pas la mort de leur leader et une tentative de coup
d’Etat manque de peu d’aboutir quelques années après son accession au pouvoir.
La mort du journaliste Norbert Zongo à la fin des années 90 est à l’origine d’une
nouvelle contestation populaire. Le journaliste enquêtait sur le décès suspect d’un
employé du frère du président. Son assassinat dans son véhicule provoque une série
d’émeutes qui ne prend fin qu’après l’ouverture d’une commission d’enquête
internationale.
Pour ces raisons des réserves sont parfois exprimées sur Blaise Campaoré, mais le
Burkina Faso profite objectivement depuis près de quinze ans, d’une stabilité
politique peu commune en Afrique de l’Ouest. La démocratie y est effective quoi que
pratiquée de manière relativement autoritaire, le président de la république est élu au
suffrage universel direct et la situation de la presse et de la liberté d’informer est
qualifiée de sensible12 par l’association Reporter Sans Frontières (RSF), ce qui
correspond, au vu de la carte des libertés établie par l’association, à un mal
raisonnable pour la sous-région.
Cette stabilité a permis au Burkina Faso d’acquérir progressivement un statut
particulier en Afrique et au sein de l’OUA. Cette place l’autorise à intervenir en
médiation de certains conflits et l’influence politique du Burkina est considérable en
comparaison de son faible poids économique.
(2) Situation géographique et démographique
Le Burkina Faso est un pays sahélien enclavé en Afrique de l’Ouest, sa superficie
est de 274 000 km2 13. Il est encadré, au nord et à l’ouest par le Mali, à l’est par le
Niger. Au sud, ses frontières longent le Bénin, le Togo, le Ghana et la Côte d’Ivoire.
Le climat du pays est très chaud et sec, les pluies sont rares et mal réparties (350
mm au nord contre 1000 mm au sud-ouest).
12 www.rsf.org 13 Géographica, Atlas mondial illustré, édition Könemann, 1999
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Le rapport mondial sur le développement humain 2002, estime la population
burkinabé à approximativement 11,5 millions d’habitants en 2001. Les projections sur
2015 prévoient une population de 18,5 millions d’habitants. La population du Burkina
Faso est urbaine à 16,5%. On estime habituellement que la ville de Ouagadougou
regroupe près de 2 millions d’habitants et la ville de Bobo-Dioulasso environ 500
000. Notons également que 48,7% de la population a moins de 15 ans.
Le Burkina Faso est composé d’une multitude d’ethnies. On compte une soixantaine
de langues appartenant généralement à la famille nigéro-congolaise. Le Mossi est
parlé par 53 % de la population et constitue la langue ayant le plus grand nombre de
locuteurs. On peut citer aussi le bissa (38 %), le lobi (2,7 %), le peul (2,4 %), le lyélé
(2,1 %) et le marka (1,9 %).
L’ethnie principale est celle des Mossi. Ce peuple traditionnellement très attaché à la
hiérarchie, parle le moré. Il occupe une zone importante et notamment la ville de
Ouagadougou.
La langue française fédère officiellement les relations entre ethnies mais le moré est
très utilisé dans la région de Ouagadougou et le dioula dans la région de Bobo-
Dioulasso.
(3) Niveau de développement humain (selon les critères retenus par le PNUD)
L’indicateur de développement humain (IDH), mesure le niveau atteint par un pays
en termes d’espérance de vie, d’instruction et de revenu réel corrigé. Cet indicateur,
utilisé par le Programme des Nations Unis pour le Développement (PNUD) a permis
de classer en 2002, 173 pays suivant leur niveau de progrès sanitaire et social.
Le rapport mondial sur le développement humain 2002 positionne le Burkina Faso au
169ième rang. Seuls le Burundi, le Niger et la Sierra Leone sont moins bien classés.
L’épidémie de SIDA qui touchait en 2000 333 000 adultes, a fait chuter l’espérance
de vie de 8 ans. Ceci alors que le Burkina n’est classé qu’en vingtième position sur la
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
liste des pays les plus touchés. Un burkinabé peut ainsi actuellement espérer vivre
46,7 ans. 6,5% de la population adulte est actuellement infectée par le virus HIV. La
mortalité infantile est également importante puisqu’elle atteint un niveau de 105
décès pour mille naissances. 24% de la population souffrait de malnutrition en 1999.
Le PIB du Burkina était, selon le rapport, de 2,2 milliards de dollars en 2000 (soit
environ 2,2 milliards d’euros). La croissance moyenne de ce dernier entre 1990 et
2000 est de 2.4% ; ceci alors que la variation annuelle de l’indice des prix à la
consommation est devenue négative entre 1999 et 2000 (-0.3).
Le budget du Burkina Faso était de 69 millions de dollars en 2001.
Le rapport mondial sur le développement humain indique que le Burkina consacre
3,6% de son PNB à l’éducation, 1,5% à la santé et 2,5% au service de la dette.
23.9% de la population était alphabétisée en 2000. Le taux d’alphabétisation des
jeunes adultes est plus inquiétant encore puisqu’il est seulement de 34,6% en 2000.
Ce chiffre est faible comparé à ceux de ses voisins malien, ivoirien ou béninois qui
sont tous proches de 60%.
Le SMIG est fixé à 26 000 francs CFA (environ 39,6 euros) et le salaire moyen d’un
fonctionnaire tourne autour de 75 000 francs CFA (environ 114 euros).
b) Histoire des technologies de la communication au Burkina
(1) histoire de l’informatisation et des télécommunications
(a) Les télécommunications
Le Burkina Faso disposait à son accession à l’indépendance, d’un réseau de
télécommunication essentiellement composé de lignes aériennes et de liaisons radio
à ondes décamétriques. L’exploitation de la partie internationale était assurée par
France Câble et Radio (FCR).
Emmanuel Lacroix Page 17
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Le pays s’est doté en 1968 d’une structure chargée de gérer le réseau et les services
de télécommunication ainsi que d’exploiter une partie de la chaîne internationale ;
ceci bien que l'exploitation d'une partie de la chaîne internationale (télex, radio) soit
réalisée par FCR jusqu'en 1982 date à partir de laquelle le réseau était totalement
sous gestion de l'OPT.
Cette période a vu naître des centraux automatiques ainsi qu’une station terrienne
des télécommunications par satellite. Des liaisons hertziennes interurbaines et
internationales ont également été déployées parallèlement à la construction de
réseaux aéro-souterrains.
En 1987, l’OPT a été séparé en deux entités distinctes, l’ONP, gérant les activités
postales et l’ONATEL, assurant la poursuite des activités de télécommunication. Ces
deux entreprises continuant à bénéficier d’un monopole d’Etat.
La mise en place en 1988 d’un plan Directeur de Développement des
Télécommunications a permis l’essor important du réseau au cours de la fin des
années 80 et du début des années 90. Cette période a notamment permis de
développer la desserte automatique de plusieurs zones rurales et d'étendre le réseau
international.
En 1994 l'ONATEL a été transformé en société d'état. Cette transformation qui
s’inscrivait dans le cadre des mesures d'accompagnement au Programme
d'Ajustement Structurel signé entre l'Etat et les Institutions de Bretton Wood conférait
à l'ONATEL un monopole jusqu'en décembre 1998 date à laquelle un nouveau cadre
juridique et réglementaire portant réforme du secteur et une loi autorisant la
privatisation partielle de l'ONATEL ont été adoptés.
(b) L’informatisation
Le Burkina Faso a très tôt pris conscience de l’enjeu que représentait pour le pays la
maîtrise de l’outil informatique. Dès 1970, la création du Centre National de
Traitement de l’Information (CENATRIN) répondait à cette préoccupation.
Emmanuel Lacroix Page 18
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Le développement de la micro-informatique sous sa forme actuelle a ensuite été
accompagné par les plans nationaux successifs. Le premier plan directeur
informatique national, plan quinquennal débutant en 1990, a permis un
accroissement important du niveau d’informatisation du pays. Selon Mahamoudou
Ouedraogo et Johachim Tankoano14, de 1990 à 1995, le taux de croissance annuel
des investissements en matériel informatique a été de 16,1%.
Pour les cinq années de ce plan, les investissements informatiques ont été estimés à
7 milliards de francs CFA, soit 1,67% des investissements globaux du pays.
Le parc informatique a quasiment triplé de volume entre 1990 et 1995, passant de
1000 à 2700 ordinateurs. Le rapport entre valeur du parc informatique et le PIB du
Burkina Faso, qui était de 0,68% en 1990, a atteint 1% en 1995. Selon Mahamoudou
Ouedraogo et Johachim Tankoano, ce taux correspond au seuil à partir duquel
l’impact de l’informatique sur l’économie du pays peut devenir significatif.
(2) Du Réseau Intertropical d’Ordinateur (RIO) développé par l’ORSTOM à l’internet « grand public » en Afrique
(a) Le RIO : embryon d’Internet en Afrique
Le Burkina Faso a été l’un des premiers pays d’Afrique à profiter d’un accès à
Internet. En effet, en juin 1989, des chercheurs de l’ORSTOM ont installé à
Ouagadougou un serveur UNIX et un réseau local TCP/IP de 5 ordinateurs. La
liaison de cet embryon d’Internet Burkinabé au reste du réseau mondial s’effectuait
par modem. Pascal Renaud15, chercheur à l’Institut français de la recherche
scientifique pour le développement en coopération (IRD, anciennement ORSTOM)
signale néanmoins que cette première connexion est restée très sous-employée
dans les premiers temps. Ce mini-réseau a donné progressivement naissance au
Réseau Intertropical d’Ordinateur (RIO), ancêtre de l’internet africain.
14 Mahamoudou Ouédraogo, Joachim Tankoano, Internet au Burkina Faso : réalités et utopies, éditions l’Harmattan, 2001 15 Pacal Renaud, Rompre l’isolement grâce au réseau des réseaux, un exemple burkinabé, le monde diplomatique, page 25, février 1996
Emmanuel Lacroix Page 19
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
En 1991, la mise en place par l’ONATEL d’un service de transmission de données
fiable, Fasopac, équivalent au Transpac français, a permis le développement de
l’utilisation de la messagerie électronique à l’ORSTOM. Mais c’est surtout la
préparation de la conférence de Rio en 1992 qui a donné une nouvelle ampleur au
réseau. Celui-ci, mise à la disposition de toutes les ONG participant au Sommet de la
Terre a donné ainsi la première impulsion à une collaboration technologique de la
recherche au Burkina Faso.
L’ORSTOM a créé alors le domaine « .bf » en collaboration avec l’Ecole Supérieur
d'Informatique (ESI) fondée par Johachim Tankoano.
En 1992, la ville de Bobo-Dioulasso fut également reliée au réseau. En 1994, à
l’occasion du deuxième colloque africain de recherche informatique, l’état du réseau
lui a permis de mettre à la disposition des chercheurs une salle reliée à Internet.
(b) Le Burkina Faso, exclu de l’initiative Leland
En 1996, l’USAID (United States Agency for International Development) lance
l’initiative Leland. Ce programme de la Coopération américaine a pour objectif de
sortir l’Internet de son cadre universitaire. Il propose à une vingtaine de pays
africains l’installation de liaisons spécialisées à haut débit (64 à 128 Kbs) entre
l’Internet américain et l’opérateur national de télécommunications.
Ce programme qui inclut l’installation des infrastructures et la formation de
techniciens, impose néanmoins une condition aux pays bénéficiaires : ces derniers
doivent engager une procédure de libéralisation du marché des télécommunications.
Le Burkina Faso, dont le marché des télécommunications n’a sans doute pas été
jugé suffisamment prometteur par les groupes de communications américains, n’a
pas bénéficié de cette proposition.
Le Burkina Faso, à l’instar du Cameroun, a donc choisi de s’équiper sur ses propres
fonds dans le même temps.
Emmanuel Lacroix Page 20
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
(c) L’ouverture d’Internet au public en 1997
Le Burkina Faso a donc mis en place un service d’accès Internet à l’attention du
grand public à peu près au même moment que ses voisins. Le service a ouvert
officiellement à Ouagadougou le 19 mars 199716.
Le fournisseur d’accès international choisi, afin de relier l’ONATEL de Ouagadougou
au reste du réseau mondial, est l’opérateur canadien Téléglobe. Le nœud Internet
du Burkina, appelé Fasonet, initialement à 64 Kbps, est passé 256 Kbps puis à 1
Mbps.
(d) Les grandes dates : récapitulatif
L’IRD sur son site rio.net17 propose le récapitulatif suivant des grandes dates de
l’Internet au Burkina Faso :
1989 Démarrage des connexions Internet pour la messagerie à partir du noeud
central de l'Orstom à Ouagadougou
de 90 à 96 Ouverture aux sites Recherche-Universités, en particulier avec l'ESI
(Ecole Supérieure en Informatique); partenariat avec Joachim Tankoano,
directeur de l'ESI à cette époque.
93 Création du domaine national BF auprès de l'Internic; la gestion est
attribuée à l'ESI; la base est accueillie provisoirement par l'Orstom à MPL
Oct 94 "Déclaration de Ouagadougou" signée lors de CARI 94 par 65 participants
de 22 pays dont 18 pays africains pour promouvoir l'Internet en Afrique
Juillet 95 L'ESI présente un projet à la coopération française pour créer le Réseau
National de l'Education et de la Recherche (RENER) avec le soutien
technique de l'Orstom (formation, transfert des connaissances ...)
96 80 organismes autour du RIO, 400 utilisateurs, 40 MO de messages
échangés par mois
Oct 96 L'Orstom organise un séminaire de formation aux techniques de l'Internet
16 Emmanuel Guigma, L’Internet au Burkina Faso, www.itu.int/africainternet2000/countryreports/bfa_f.htm 17 http://www.rio.net/datecle-bis.html
Emmanuel Lacroix Page 21
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
destiné aux informaticiens de l'ESI, de la FAST (Faculté des Sciences) et
de la DELGI (Délégation à l'Informatique )
97 Installation d'une liaison internationale à partir de l'opérateur national
ONATEL
Mars 97 Transfert de la base BF de MPL vers Ouagadougou; le TLD est toujours
géré par Joachim Tankoano, la base est accueillie à l'Onatel
97 Création de l'ABUU, l'association Burkinabé des Utilisateurs d'Unix et des
Systèmes ouverts à l'initiative de Sylvain Zongo de l'Orstom
Mars 98 Une liaison spécialisée est installée entre l'Onatel et la Fast d'une part,
entre la Fast et l'Orstom d'autre part; les autres centres de recherche se
connectent aussi en cascade derrière la Fast, initiant ainsi le réseau
RENER
Décembre 98 Le réseau RENER est reconnu au niveau national
Après cet aperçu de l’histoire de l’informatisation et de la mise en place des
infrastructures de télécommunications, penchons nous maintenant sur le niveau
d’informatisation actuel du Burkina Faso et sur les difficultés auxquelles est confronté
le pays dans ce domaine.
22.. IInnffoorrmmaattiiqquuee :: ééqquuiippeemmeenntt dduu ppaayyss eett pprriixx pprraattiiqquuééss
a) Le niveau d’informatisation actuel
Au cours des dernières années, l’informatisation du pays a continué avec une
vigueur identique à celle des années 90. Ainsi, le recensement effectué dans le
cadre de l’élaboration d’un plan national d’action pour la résolution du bug de l’an
2000, a révélé que le parc informatique atteignait environ 10 000 machines à la fin
des années 90. Cet équipement correspond à un taux de croissance annuel moyen
de 35% entre 1995 et 2000.
Emmanuel Lacroix Page 22
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Le passage à l’an 2000 et le développement de l’usage d’Internet ont conduit, selon
Charlemagne Zannou18, à un renouvellement fondamental du parc informatique,
notamment au sein des grandes entreprises et des organismes internationaux.
L’apparition depuis le début de l’année 2000, de filières de matériel d’occasion,
favorisent également l’informatisation des petites entreprises et des particuliers.
Le parc informatique burkinabé reste en 2002 relativement hétérogène mais sa
modernisation est bien avancée. La majorité du parc est constituée de Pentiums
même si ceux-ci continuent à cohabiter avec quelques 386, des 486 et même de très
rares 286.
Le Burkina Faso comprend actuellement selon l’Union International des
Télécommunications (ITU)19 :
- 0,21 téléphones portables pour 100 habitants.
- 8,38 internautes pour 10 000 habitants
- 0,1 PC pour 100 habitants
b) Un matériel informatique importé en totalité
Le Burkina Faso ne dispose d’aucun centre de production de matériel informatique.
L’ensemble du matériel utilisé dans le pays est donc importé.
L’importation du matériel informatique implique non seulement des coûts de transit et
des frais de douanes mais également des délais importants avant la réception des
commandes.
Afin d’illustrer les délais et les coûts nécessaires aux achats informatiques au
Burkina, nous avons servi d’intermédiaire pour une entreprise d’informatique de
Bobo-dioulasso. Voici le détail de la procédure et des coûts constatés :
18 Charlemagne Zannou, RIFOD, L’Internet au Burkina Faso, www.anais.org 2000 19 http://www.itu.int/home/index.html
Emmanuel Lacroix Page 23
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Un ordinateur était mis en vente sur le site web de l’entreprise Dell. Il ouvrait donc
logiquement la possibilité d’une commande électronique partout dans le monde. Or,
l’entreprise Dell précise sur le site20 dans les conditions de vente, que le matériel ne
peut être acheté qu’en France. Nous avons donc servi d’intermédiaire pour acheter
un ordinateur Pentium IV mis en vente au prix de 889 euros (frais de port en France
compris). A ce prix devait être ajouté 174 euros de TVA, normalement récupérable
puisque l’ordinateur était destiné à l’exportation.
Nous avons fait appel à une société de transit qui nous a facturé l’acheminement du
matériel jusqu’à Bobo-Dioulasso à 192 euros.
Avant même le paiement des droits de douanes au Burkina Faso et la marge
appliquée par le revendeur local, le coût de l’ordinateur est donc déjà plus élevé que
celui que supporte un français qui voudrait s’équiper du même matériel.
Effectivement, le français paye l’ordinateur en question 1063 euros (889 + 174). Le
burkinabé doit donc déjà supporter pour le même ordinateur 1081 euros (889+192)
de frais d’achat et d’acheminement.
En outre, les délais d’acheminement ont été particulièrement longs. L’opération
d’achat, pratiquée au début du mois de Juin 2002 n’a permis la réception du matériel
par l’entreprise au Burkina Faso qu’en Septembre 2002. Le transit par bateau,
s’effectuant par Abidjan, les seuls délais d’acheminement étaient supérieurs à un
mois.
c) Taxes et procédures
(1) Des taxes élevées sur les produits informatiques
Les droits de douanes et TVA applicables aux produits informatiques en 2001 sont
les suivants :
- 31,5% pour les équipements informatiques (y compris les logiciels fournis avec
les équipements)
20 http://www.dell.fr
Emmanuel Lacroix Page 24
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
- 56,65% pour les logiciels importés séparément du matériel
- 31,35% pour les composants et pièces de rechange
- 31,35% pour les fournitures informatiques (à l’exception du papier, des
supports magnétiques et des rubans, qui sont soumis au taux de 56,65%)
- Les prestations de services informatiques (formation comprise) sont soumises
à une TVA de 18%.
Au final, après la marge du revendeur local, l’ordinateur en question a été vendu au
prix de 1 230 000 francs CFA ttc, soit 1875 euros. Rappelons que l’acheteur français
du même ordinateur peut l’acquérir pour 1063 euros.
Si l’on rapporte le coût de l’ordinateur au pouvoir d’achat dans chacun des deux
pays, l’on peut constater que l’effort consenti par un burkinabé pour acheter un
ordinateur est théoriquement 30 fois supérieur à celui d’un français. Il n’est donc pas
imaginable dans ces conditions d’envisager un mode de consommation comparable
à celui des pays européens.
(2) Des procédures d’importations allégées mais encore handicapantes pour les non ouagalais
L’autorisation préalable d’importation a été remplacée par la demande préalable
d’importation qui représente une procédure plus légère.
La procédure de contrôle SGS avant leur embarquement dans le pays d’importation,
reste cependant nécessaire pour les importations de matériels informatiques d’un
montant supérieur ou égal à trois millions de francs CFA.
Parallèlement, dans le cadre de ce travail, nous avons eu l’occasion d’interroger des
revendeurs de matériels informatiques : la majorité d’entre eux témoigne de la
difficulté de faire « sortir de douane » le matériel importé.
Les revendeurs de Bobo-dioulasso notamment, évoquent la difficulté d’obtenir le
matériel sans se rendre à Ouagadougou et les coûts parasitaires liés à ces
nombreux voyages.
Emmanuel Lacroix Page 25
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Les séjours de quelques jours à Ouagadougou dans l’unique but d’obtenir du
matériel sont fréquents et il est souvent nécessaire d’en effectuer plusieurs pour
obtenir le matériel concerné.
Ainsi, malgré les nombreux efforts et les réformes pertinentes lancées par
l’administration, la réalité de l’importation reste handicapante pour l’informatisation du
pays, ces difficultés touchent particulièrement les fournisseurs de services
informatiques, les entreprises et les organismes n’exerçant pas à Ouagadougou.
Un panorama de l’état du réseau téléphonique et des infrastructures de l’internet va
maintenant nous permettre de finaliser cet aperçu du pays.
33.. TTééllééccoommmmuunniiccaattiioonnss,, iinnffrraassttrruuccttuurreess eett pprriixx pprraattiiqquuééss
a) Le réseau téléphonique
(1) Etat des lieux
Le réseau téléphonique comptait en 2000, 15 commutateurs d’abonnés dont 12 sont
numériques. La capacité totale était de 77 212 lignes21.
Le parc de télécommunication est de 54 286 lignes22, dont 49 250 fixes et 5 036
clients mobiles. La densité téléphonique est de 0,4 téléphone pour 100 habitants.
Cette faible densité est en outre essentiellement concentrée dans les zones urbaines
puisque le raccordement des abonnés ruraux ne représente que 5,6% de la capacité
totale de raccordement installée dans tout le réseau du Burkina.
Quelques chiffres sont donnés par l’ONATEL dans l’idée d’illustrer les efforts
effectués par l’office pour le développement des télécommunications : 216 cabines
publiques sont en service, le réseau de télécommunication est essentiellement
numérique (87,5%), le taux d'efficacité en communications locales et interurbaines
21 Charlemagne Zannou, Internet au Burkina Faso, www.anais.org, 2000
Emmanuel Lacroix Page 26
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
est de 56,6%, le taux moyen de disponibilité des grandes liaisons de transmission
est de 99,5%, le chiffre d'affaires de l’ONATEL est passé en 10 ans de 6.750 millions
de franc CFA (environ 10 millions d’euros) à 33.153 millions de francs CFA (environ
50 millions d’euros) ; parallèlement, les investissements moyens annuels sont de 11
milliards de francs CFA (environ 16 millions d’euros) ; soit 4,34% des
investissements du pays.
Selon l’ONATEL, ces chiffres positionnent le Burkina Faso au quatrième rang de
performance en matière de réseaux téléphoniques en Afrique de l’Ouest.
(2) Un réseau téléphonique de mauvaise qualité
Malgré ces quelques éléments encourageants, le bilan de la situation des
télécommunications au Burkina Faso en 2002 ne peut pas être qualifié de succès.
Les communications téléphoniques sont chères et de mauvaise qualité. Il est par
exemple fréquent pour les usagers de supporter de multiples coupures ou une
« friture » sur la ligne pendant la saison des pluies qui s’étale d’avril à octobre. Les
délais nécessaires pour obtenir une ligne téléphonique peuvent également être très
longs.
Le succès de la téléphonie mobile à partir de 1996 est révélateur des difficultés
d’obtenir un service fiable par la téléphonie filaire. L’équipement du pays a été
extrêmement rapide et reflète l’attente d’une solution alternative au médiocre et
onéreux service de télécommunication fixe offert par l’ONATEL.
Il est néanmoins utile de rappeler que la mise en place et la gestion d’un réseau de
télécommunication sont deux services très coûteux. Par ailleurs, les sources de
revenus de l’état burkinabé ne sont pas nombreuses ce qui justifie en partie le niveau
des prix pratiqués par l’ONATEL qui est une entreprise d’Etat. Rappelons également
que ce pays est l’un des plus pauvres du monde, il apparaissait en 2001 dans les
trois derniers pays du classement IDH du PNUD. Enfin, le Burkina Faso est
régulièrement touché par de grandes endémies, l’espérance de vie y est donc très
réduite. Le pays porte donc l’essentiel de ses efforts sur le secteur de la santé qui
22 Site web de l’ONATEL, www.onatel.bf, 2002
Emmanuel Lacroix Page 27
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
semble effectivement prioritaire. Ces différents éléments expliquent partiellement la
qualité médiocre des services offerts par l’ONATEL.
(3) Un coût élevé des télécommunications
Les communications téléphoniques locales sont facturées par l’ONATEL 60 francs
CFA par tranche de six minutes. Une heure de connexion à Internet, hors frais
d’abonnement coûte donc 600 francs CFA, soit pratiquement un euro.
Le coût des télécommunications interurbaines et internationales est très élevé. A titre
d’illustration, le site web de l’ONATEL indique un coût de 840 francs CFA pour trois
minutes de conversation entre Bobo-Dioulasso et Ouagadougou. Une conversation
de même durée entre Ouagadougou et Paris est facturée 2250 francs CFA.
Les télécommunications par téléphone mobile sont en revanche très appréciées des
burkinabé puisqu’elles sont facturées 180 francs CFA par minute. Il est donc
préférable de téléphoner de Ouagadougou à Bobo-Dioulasso avec un téléphone
mobile qu’avec une ligne fixe. Notons cependant que bien que moins onéreux pour
les communications interurbaines, le téléphone mobile reste très cher pour un
burkinabé.
b) Infrastructures Internet
(1) Le service de transmission de données par paquets X25 (FASOPAC)
Un service équivalent au Transpac français a été lancé en 1992 par l’ONATEL :
FASOPAC. L’accès au réseau est possible par le biais du réseau téléphonique
commuté (RTC) depuis les principales grandes villes du pays. Il offre des débits
variant entre 9,6 Kbps et 64 Kbps. L’objet de Fasopac est principalement de fournir
aux opérateurs économiques des services de messageries par UUCP (Unix to Unix
Copy Programm).
(2) Réseaux locaux et liaisons spécialisées
Emmanuel Lacroix Page 28
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Des réseaux locaux ont été mis en place depuis une dizaine d’années. Les liaisons
spécialisées permettent également à certains organismes de fournir un accès
privilégié à Internet sous certaines conditions.
Le détail de ces accès est présenté dans le chapitre consacré aux accès à Internet
dans le pays.
(3) Etat du réseau public
Le point d’accès du Burkina Faso est de 2 Mbps. Il existe un serveur d’accès de 112
modems à Ouagadougou et un serveur d’accès de 32 modems à Bobo-Dioulasso.
Le serveur de Bobo-Dioulasso est relié à celui de Ouagadougou par une liaison
spécialisée à 2 Mbps. Notons qu’un nœud secondaire est en cours d’installation.
Des connexions permanentes TCP/IP de LAN sont possibles pour des débits allant
de 32 Kbps jusqu’à 128 Kbps. Le réseau distant est directement connecté sur le
Router Cisco de l’ONATEL. Le nœud national du Burkina Faso (Fasonet) compte
une dizaines de liaisons spécialisées installées au profit des fournisseurs d’accès, de
certains organismes et des structures de l’Etat.
La connexion par le réseau téléphonique commuté permet deux types d’accès :
- Accès à Internet en utilisant un programme d’émulation de terminal sur PC ou
un Macintosh équipé d’un modem.
- Accès à distance IP depuis un PC Windows ou un Macintosh, équipé d’un
modem, permettant un accès à toutes les fonctionnalités de l’Internet en
utilisant SLIP ou PPP.
L’accès à Internet est théoriquement possible à partir de toute ligne téléphonique du
pays au coût d’une communication locale. Ceci en composant le 1150.
Le projet Réseau Développement Durable (RDD) prévoit l'accroissement de la
capacité du noeud national avec un doublement du débit actuel ainsi que la
décentralisation des accès par la mise en place de cinq noeuds locaux.
Emmanuel Lacroix Page 29
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Ce panorama du pays, de la situation de son informatique et de ses
télécommunications va à présent nous permettre d’obtenir une vision plus claire de
l’accès à l’internet, du niveau d’utilisation de ce média ainsi que de l’état des
compétences techniques. Nous examinerons enfin le contenu des inforoutes
burkinabé.
Emmanuel Lacroix Page 30
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
B. L’internet : accès, utilisation, compétences et production de contenu
Nous avons vu que le niveau d’informatisation était faible et que la situation des
télécommunications n’était pas non plus satisfaisante. Ces deux difficultés, ajoutées
au difficile arbitrage entre développement technologique du pays et utilité des
ressources financières apportées par l’Office National des Télécommunications,
rendent les conditions de l’accès à l’internet très diverses selon les zones
géographiques ; nous nous attarderons particulièrement sur le statut privilégié de la
capitale. Nous observerons ensuite les pratiques des internautes et leur profil avant
d’observer quelques exemple d’utilisation de l’internet dans des cadres
professionnels ou associatifs.
11.. AAccccèèss àà ll’’IInntteerrnneett eett pprraattiiqquueess dd’’uuttiilliissaattiioonn
a) Les fournisseurs d’accès
(1) De nombreux FAI à Ouagadougou
Six Fournisseurs d’Accès à Internet (FAI) privés sont en concurrence à
Ouagadougou. L’ONATEL, l’opérateur national de télécommunication était en
situation de monopole au moment de l’ouverture de l’Internet au grand public en
1997 ; cette situation lui a permis de d’occuper une place prépondérante sur le
marché dont elle a su profiter par la suite. L’entreprise nationale disposait selon
Charlemagne Zannou de 3000 abonnés en 2000. Le nombre a nettement augmenté
en 2002 puisque l’ONATEL affiche maintenant (selon ses déclarations) environ 4000
abonnés par RTC et loue une centaine de lignes spécialisées de 32 à 128 kbps. Elle
gère également environ 8000 adresses email et héberge une centaine de sites en
.bf.
Les autres FAI sont :
- le CENATRIN, entreprise d’Etat chargée de l’informatique. Elle disposait en
2000 d’environ 550 abonnés selon Charlemagne Zannou. Nous avons pu
Emmanuel Lacroix Page 31
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
contacter au téléphone un responsable de l’entreprise qui affirme disposer
actuellement de 700 abonnés Le CENATRIN ne semble donc pas avoir profité
de façon conséquente de l’augmentation du nombre de connexion en 2 ans.
- LIPTINFOR, également entreprise d’informatique disposait en 2000 de 460
abonnés selon Charlemagne Zannou, le chiffre actualisé pour 2002 (déclaré au
téléphone par un responsable de l’entreprise), montre une nette progression
puisque l’entreprise affirme posséder actuellement près de 1000 abonnés.
- ZCP, arrivé en 2000 sur le marché, ne possédait que quelques abonnés à cette
date. L’entreprise annonce en 2002 près de 250 abonnés.
- River Télécom a lancé son activité en janvier 2001 et affiche 110 abonnés en
septembre 2002.
- Netaccess est le dernier arrivé sur le marché puisqu’il a lancé son activité en
février 2001. Ce démarrage tardif ne lui permet pas d’afficher plus de 120
abonnés en septembre 2002.
La majorité des FAI n’envisage pas pour l’instant une implantation dans d’autres
villes du Burkina. Près de 80% des lignes téléphoniques du Burkina sont exploitées à
Ouagadougou, ce chiffre relativise fortement l’intérêt commercial d’une implantation
dans des villes secondaires.
Enfin, il convient de ne pas oublier que la DELGI joue également le rôle de FAI pour
l’administration publique et que l’ensemble des fonctionnaires bénéficient d’un accès
gratuit à l’internet par son intermédiaire. Nous n’avons pas pu obtenir le chiffre exact
de fonctionnaires qui profitent réellement de ce service.
(a) Le CENATRIN
Le CENATRIN propose une seule formule qui consiste en une connexion illimitée23.
Cette formule est proposée au prix de 17 700 francs CFA ttc. A l'abonnement, une
caution de 35 000 francs CFA est demandée ainsi que 17 700 francs CFA
correspondant au premier mois de connexion. L'installation et la configuration sont
gratuites.
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
(b) LIPTINFOR
Liptinfor propose trois formules24. Aucune ne nécessite une caution ou des frais
d’installation :
Formule mail :
Cette formule ne permet que l’utilisation de la messagerie. L’abonnement mensuel
est de 5000 francs CFA ttc. La minute supplémentaire est facturée 20 francs CFA ttc.
Formule Surf :
Cette formule permet l’utilisation de la messagerie et du web dans la limite de 30
heures d’utilisation mensuelle. L’abonnement mensuel est de 15 000 francs CFA ttc.
La minute supplémentaire est facturée 20 francs CFA ttc.
Formule illimitée :
Cette formule permet l’utilisation de la messagerie et du web avec une durée
illimitée. L’abonnement mensuel est de 17 000 francs CFA ttc.
(c) ZCP
Zongo Consulting Production (ZCP) est le dernier arrivé sur le marché de l’accès
Internet au Burkina Faso. Ce FAI, lancé par Sylvain Zongo amorti également sa
ligne spécialisée sur une activité de cybercafé avec l’entreprise « cyberfrite » que
nous évoquons dans le chapitre consacré aux cybercentres.
Selon le site web de Zcp25, l’entreprise propose trois formules pour l'accès à Internet.
Formule N°1
Accès illimité : Cette formule permet d'avoir un accès sans limitation mensuelle du
temps de connexion au serveur d'accès de ZCP.
Prix : 12 000 francs CFA ttc par mois.
23 www.cenatrin.bf 24 www.liptinfor.bf 25 www.zcp.bf
Emmanuel Lacroix Page 33
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Formule N°2
Accès illimité avec restriction de la plage d'accès. Cette formule permet d'avoir un
accès sans limitation mensuelle du temps de connexion au serveur d'accès de ZCP.
Du lundi au vendredi inclus de 19h00 à 06H30.
Le WE, du samedi 12H00 au lundi à 06H30.
L'accès au réseau sera également autorisé les jours légalement fériés au Burkina.
Prix : 7 500 francs CFA ttc par mois.
Formule N°3
Formule prépayée. Accès sans abonnement à 15 francs CFA ttc la minute.
En plus de ces trois formules de connexion à Internet, ZCP propose trois autres
services complémentaires en option. La redevance mensuelle de chaque option est
de 2400 francs CFA ttc.
- Option N°1 : accès au détail de la connexion à Internet afin de connaître la
durée cumulée d’utilisation et l'impact sur la facture téléphone à la fin du mois.
- Option N°2 : limitation du compte à l’utilisation de la messagerie et sur le site
Web de ZCP.
- Option N°3 : personnalisation de la plage d'accès à Internet.
Adresses Electroniques
L’abonnement inclut une adresse email (deux pour les entreprises). La création d’un
email supplémentaire est facturé 7 500 francs CFA ttc. Il n 'y a pas de redevance
mensuelle.
(d) River Télécom
River Télécom propose un tarif unique de connexion à 11 000 francs CFA ttc
mensuel, mais un responsable nous a affirmé qu’il s’apprêtait à ramener le prix à 10
000 francs CFA ttc.
(2) L’ONATEL avec Fasonet : le fournisseur d’accès à l’Internet en position de monopole dans tout le pays hormis la capitale
Emmanuel Lacroix Page 34
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
(a) Les prix pratiqués par l’ONATEL
Le site web de l’ONATEL26 donne les informations suivantes concernant les prix des
prestations Internet de l’entreprise.
Formule 1
Formule à la durée comprenant un abonnement RTC avec une boite à lettre ( E-mail)
Création + remise en service : 13 630 francs CFA ttc
Redevance mensuelle : 6 136 francs CFA ttc.
Minute de connexion : 18 francs CFA ttc.
Formule 2
Formule forfait mensuel pour 10 heures de connexion comprenant un abonnement
RTC avec une boite à lettre ( E-mail)
Création + remise en service : 13 630 francs CFA ttc
Redevance mensuelle : 10 030 francs CFA ttc
Minute de connexion supplémentaire : 12 francs CFA ttc
Formule 3
Formule forfait mensuel illimitée comprenant un abonnement RTC avec une boite à
lettre (E-mail)
Création + remise en service : 21 300 francs CFA ttc
Redevance mensuelle : 17 700 francs CFA ttc
(b) La qualité du service offert par l’ONATEL
La qualité du service offert par l’ONATEL sur les connexions par RTC représente un
enjeu assez important puisque, hormis à Ouagadougou, ce mode de connexion est
l’unique moyen d’accéder à Internet dans le pays.
Tous les cybercafés de Bobo-dioulasso, seconde ville du Burkina Faso, utilisent par
exemple le service d’accès de cette entreprise. L’impact économique de Fasonet sur
26 www.onatel.bf
Emmanuel Lacroix Page 35
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
ces entreprises est donc conséquent, or nous avons rencontré plusieurs patrons de
cybercafés mécontents de ce service.
Les témoignages évoquent des ruptures fréquentes de connexions ou des échecs
immédiatement après la réponse du serveur. Ce cas de figure est très handicapant
économiquement pour les cybercafés puisque « l’entrée en connexion » avec le
serveur signifie que la communication téléphonique est comptabilisée par l’ONATEL
(60 francs CFA ttc forfaitaires) ; ceci alors que le serveur conclu ensuite à
l’impossibilité de poursuivre la connexion avec une « entrée sur Internet ».
Le préjudice est donc triple pour un cybercafé :
- D’une part il « paye de sa poche » le forfait minimum de communication
téléphonique avec le serveur malgré le fait que la connexion n’ait pas été
utilisée car il ne peut pas se permettre de facturer à son client l’inefficacité du
service de l’ONATEL. La multiplication de ce genre d’incident peut coûter très
cher sur une longue période.
- D’autre part cet accident de connexion détériore l’image du cybercafé, ses
clients ne comprenant pas toujours que l’échec de la connexion n’est pas de
son fait.
- Enfin, si l’accès à Internet représente l’unique activité de l’entreprise, il n’est
pas en mesure de l’exercer et ne peut donc amortir ni son matériel, ni ses
locaux, ni son abonnement Internet auprès de l’ONATEL.
Ainsi, 15 jours d’observation de l’activité d’un cybercafé de Bobo-Dioulasso au cours
du mois d’octobre 2001 nous a permis de constater que les connexions à l’internet
pouvaient être impossibles pendant plusieurs jours consécutifs, que les tentatives de
connexion répétées et inefficaces de la part des clients généraient des coûts
importants pour le cybercafé et que des clients insatisfaits se rendaient ensuite dans
d’autres cybercafés de la ville. Le responsable de l’entreprise nous a confirmé que
cette mauvaise qualité de service était habituelle quoi qu’en cours d’amélioration
depuis le début de l’année 2002.
Cette situation était déjà constatée en 2000 par Charlemagne Zannou qui notait dans
son étude sur l’Internet au Burkina Faso que seuls 9% des abonnés de Fasonet
jugeaient « bon » le service utilisé. Ceci alors que 100% des abonnés de LIPTINFOR
Emmanuel Lacroix Page 36
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
et 63% des abonnés du CENATRIN étaient satisfaits de leur FAI (50% jugeait même
la prestation de LIPTINFOR excellente).
Charlemagne Zannou constatait également que l’utilisation de Fasonet induisait en
moyenne 16 échecs de connexion par jour. Ceci contre 2 pour LIPTNIFOR et 1 pour
le CENATRIN.
b) Les points d’accès à l’Internet
(1) Les accès à domicile
Les accès à domicile sont peu fréquents. Notons que les fonctionnaires peuvent
profiter d’un accès gratuit à domicile par le biais de RESINA. Cela nécessite
cependant de posséder son propre matériel informatique ; or nous avons vu que ce
dernier était très onéreux au Burkina.
Une importante part des accès à domicile concerne les étrangers, souvent
européens, qui profitent d’un niveau de vie important et qui ont donc les moyens
d’acquérir ordinateur, téléphone fixe et connexion à Internet.
(2) Les accès professionnels
Nous nous limiterons ici à donner un aperçu des principaux accès professionnels à
l’internet, ce descriptif n’est pas exhaustif.
(a) Les entreprises
De nombreuses entreprises possèdent un accès à Internet par RTC, ces
abonnements profitent également aux employés qui peuvent ainsi accéder
gratuitement au réseau.
Il est intéressant de constater que le fournisseur d’accès à Internet ZCP propose une
option qui permet de restreindre l’accès à certaines plages horaires afin de donner
aux entreprises la possibilité de limiter l’utilisation d’Internet par leurs employés.
La connexion de la radio Horizon FM par une liaison spécialisée mérite d’être notée.
Emmanuel Lacroix Page 37
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Les employés des cybercafés et des fournisseurs d’accès à Internet profitent
également d’un accès à Internet. Les employés des FAI sont notamment
particulièrement avantagés puisqu’ils peuvent utiliser un accès illimité et rapide.
(b) REFER : le réseau de la francophonie
Quatorze pays francophones dont le Burkina Faso, disposent d’un point d’accès à
l’Internet par l’intermédiaire du REFER, le réseau d’édition et de diffusion, sous
espace francophone de l’Internet mis en place par l’Agence francophone pour
l’enseignement et la recherche.
(c) RENER : le réseau de la recherche
Trois secteurs ont été identifiés comme pôle de développement des TIC lors du
premier atelier national sur les TIC organisé à Ouagadougou en 1996. Le premier de
ces secteurs était la recherche. Cela a conduit à la création du réseau RENER qui
relie les centres de recherche du Burkina Faso.
Un point d'accès internet par liaison spécialisée a été créé à l'Université de
Ouagadougou en décembre 1997. L'ORSTOM, le SYFED et le RESAFAD sont reliés
à ce point par des liaisons spécialisées.
L'Université de Ouagadougou, avec le soutien du gouvernement néerlandais, met en
place un centre de ressources informatiques qui est relié par fibre optique au point
d'accès RENER.
Le RENER donnait, en 2000, un accès à environ 500 personnes.
(d) RESINA : le réseau de l’administration
Le réseau informatique national de l'administration (RESINA) a été mis en place à la
suite du premier atelier national sur l'internet et les autoroutes de l'information. Son
centre se trouve à la Délégation Générale à l’Informatique (DELGI).
Emmanuel Lacroix Page 38
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Son extension doit permettre à toute l’administration de se connecter gratuitement à
l'internet. Ce réseau, réservé aux fonctionnaires, assure une bonne maîtrise des
nouvelles technologies dans l’administration. Nous avons vu qu’il permet également
aux fonctionnaires de se connecter depuis leur domicile s’ils sont équipés.
Chaque ministère ou département public dispose d'un sous-nom de domaine qu'il
doit gérer de manière autonome. Un réseau sécurisé permettant la communication
entre les différentes administrations est également prévu.
RESINA comptait en moyenne en 2000, 1200 abonnés pour 8 lignes
téléphoniques27.
(e) Organismes internationaux et représentations étrangères
La représentation du système des Nations-Unies dispose d’une liaison spécialisée à
64 Kbps. Celle ligne est partagée entre les délégations des différents organismes
des Nations-Unis. Il en est de même pour le personnel des ambassades du Canada,
des Etats-Unis et d’Allemagne. Le siège de l’UEMOA est, quant à lui, relié par une
liaison spécialisée à 128 Kbps.
Au total, ces représentations offrent un accès à Internet à environ 1000 personnes.
(3) Les accès communautaires
(a) Les accès commerciaux : les cybercafés
Sylvestre Ouédraogo notait en 200028, que la situation de l’accès à Internet était
nettement différente entre Ouagodougou et les autres villes du pays. Seule la ville de
Bobo-Dioulasso pouvait bénéficier d’un service proche de celui de la capitale. Alors
que dans ces deux villes, les cybercafés proposent des salles comprenant de
27 Charlemagne Zannou, RIFOD, Internet au Burkina Faso, www.anais.org, 2000 28 Sylvestre Ouédraogo, Accès aux nouvelles technologies de la communication (TIC) au Burkina Faso, une analyse des centres d’accès collectifs et des comportements des usagers Internet au Burkina Faso. www.anais.org. Septembre 2000
Emmanuel Lacroix Page 39
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
nombreux ordinateurs reliés en réseau, les accès dans les villes secondaires
consistent en un unique ordinateur utilisé alternativement pour la bureautique et pour
la connexion à Internet.
(i) Panorama des cybercafés
Notons que de nombreuses informations contradictoires circulent sur l’internet quant
à la situation des cybercafés au Burkina Faso. Certaines excellentes initiatives
comme celle re Ramata Soré, ont permettent d’obtenir un panorama en ligne depuis
septembre 2001, malheureusement les chiffres n’ont pas été tenus à jour et il est
difficile d’obtenir des réponses de la part des cybercafés. Enfin, quand ceux-ci
acceptent de participer à une enquête, les réponses sont rarement franches. Nous
pensons ainsi par exemple que le nombre de clients quotidiens des cybercafés a été
systématiquement sous-évalué par ces derniers. L’enquête menée par Anaïs29
montre ainsi une moyenne de fréquentation de 56 clients quotidiens, ce qui est bien
supérieur aux déclarations que nous avons recueillies.
(a) Une multiplication des points d’accès
efficaces à Ouagadougou
(i) De nombreux cybercafés
Ouagadougou, compte en 2002, une grande quantité de cybercafés qui profitent de
la multiplication (toute relative) du nombre de FAI dans la capitale. Le service y est
donc relativement rapide et plutôt efficace. On peut estimer qu’il existe environ une
trentaine de cybercafé reliant plus de 3 machines. Les petits points d’accès de moins
de 3 machines sont également nombreux.
La spécificité de l’accès à Internet dans la capitale réside dans le fait qu’il existe des
centres très importants reliant souvent plus de vingt ordinateurs. On peut ainsi
compter 5 cybercafés de cette taille à Ouagadougou. Par ailleurs, l’examen du
nombre de clients quotidiens de ces centres (déclarés par ces mêmes centres)
montre qu’il n’est pas rare que ces entreprises accueillent en moyenne plus de 50
Internautes dans une journée.
29 Femmes et TIC au Burkina Faso, http://www.anais.org/reseau/Fr/documents/burkina/femmes.html
Emmanuel Lacroix Page 40
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
(ii) Des prix minorés grâce à des initiatives de gestion efficaces
Ouagadougou, avec ses quatre fournisseurs d’accès à Internet (FAI), bénéficie d’un
service privilégié. Ce choix plus large de FAI conduit à une amélioration du service
proposé par certains cybercafés.
Ainsi, Sylvain Zongo, qui avait précédemment lancé le Fournisseur d’Accès à
Internet ZCP, a appliqué les principes classiques de gestion des entreprises
médiatiques30 : il a amorti sur une autre activité les coûts fixes de location de la ligne
spécialisée indispensable à un FAI. Il a dans cette logique décidé d’ouvrir un
cybercafé relié par ligne spécialisée.
Le cybercafé peut ainsi profiter d’une connexion permanente et rapide à l’internet qui
le dispense notamment des frais de communications téléphoniques supportés par
ses concurrents et lui permet de pratiquer des tarifs inférieurs. Le cercle vertueux
ainsi créé, fait de son point d’accès, l’un des plus profitables de Ouagadougou.
En outre, Sylvain Zongo a eu l’idée de coupler son service d’accès à Internet à une
restauration de frites. Le concept ainsi créé, appelé « cyberfrites »31, a permis
d’attirer l’attention des médias dès le commencement du projet.
(iii) La multiplication des lignes spécialisées
Notre enquête a fait apparaître que de plus en plus de cybercafés bénéficient d’une
ligne spécialisée, cela est en premier lieu profitable aux internautes qui peuvent ainsi
bénéficier d’un accès plus rapide et plus confortable. L’exemple de Cyberfrite, que
nous venons d’évoquer, illustre l’avantage ainsi offert aux internautes de la capitale.
Ainsi, l’enquête effectuée en collaboration avec Issaka Campaoré a permis de
recenser 6 cybercafés disposant d’une ligne spécialisée à Ouagadougou.
30 Nadine Toussaint Desmoulins, L’économie des médias, PUF, 1996 31 François Laureys, Cybercafé à Ouagadougou, là où les frites et cyber font bon ménage, www.afribone.com
Emmanuel Lacroix Page 41
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
(b) Les difficultés d’obtenir un service stable
à Bobo-Dioulasso malgré une situation
privilégié
Le service d’accès à Bobo-Dioulasso, deuxième ville du pays, est loin d’être aussi
efficace que celui de Ouagadougou. La ville de Bobo-Dioulasso est notamment très
désavantagée par l’absence de concurrence entre FAI. L’ONATEL est l’unique
opérateur d’accès à Internet et le service offert est relativement chaotique. Les
cybercafés en souffrent ainsi que les Internautes.
Il est fréquent de subir une interruption de service de plusieurs jours et la connexion
est assez instable.
Bobo-Dioulasso reste néanmoins plutôt avantagé au regard de la situation des
autres villes du Burkina Faso. En effet, la ville compte près une dizaine de
cybercafés mais également de nombreux petits secrétariats publiques qui offre aussi
ce service de manière occasionnelle, leur nombre est difficile à évaluer. La ville de
Bobo-Dioulasso possède en outre son propre nœud de connexion à l’internet.
Notre enquête a fait apparaître que les cybercentres disposent souvent de plus de 10
ordinateurs connectés. Elle nous a également permis de noter que mis à part AMC,
BI/PSI et Yamnet tous les autres cybers sont situés à moins de 1000 m du grands
marché.
Cybercentre Nb d’ordi connectés Info-élec 14
Espace internaute 10
Cisplus 12
Syanet 11
SOGECI 5
Yamnet 4
BIG 7
BI/PSI 10
Emmanuel Lacroix Page 42
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
AMC 4
Multicom NC
(c) Le difficile désenclavement des zones
urbaines secondaires et la totale absence de
service en brousse
Les autres grandes villes du Burkina Faso disposent d’accès aux inforoutes
beaucoup moins efficaces, les cybercafés sont rares à Banfora, Ouahigouya,
Koudougou et Kaya.
Le cas de Ouahigouya reflète relativement bien la situation de ces villes secondaires.
La ville n’avait encore aucun Cybercentre à l’été 2000. Quatre ont ouvert leur porte
entre cette date et l’été 2001. Le premier, alpha presse, a lancé son service à la fin
de l’année 2000 avec un cybercafé reliant deux machines entre elles. Trois autres
points d’accès ont suivis au cours de l’année, Cybercenter ouvrant en Juin 2001
avec 5 postes connectés. Espace Internaute, dernier arrivé lançant le même service
dans 6 autres localités au cours de la même année32.
En moyenne, chacune de ces villes secondaires disposent de 5 ou 6 cybercafés. Les
connexions sont obligatoirement effectuées via l’offre d’accès de l’ONATEL.
Effectivement, l’opérateur national se réserve le monopole de l’utilisation d’un
numéro de connexion spécial qui autorise la facturation d’une connexion entre tous
points du pays et le nœud de Ouagadougou au prix d’une communication locale.
Les villes précitées ainsi que le reste du territoire sont donc comme Bobo-Dioulasso,
soumis aux aléas de l’offre d’accès Fasonet.
Dans les villes de troisième ordre et dans les campagnes, la situation de l’accès à
Internet tient plus de l’anecdotique. Les connexions publiques existent mais sont le
fait de mini-opérateurs (un seul ordinateur connecté) et sont souvent associées à
une action de développement ou à l’intervention d’une quelconque ONG.
32 Eric Bernard, Explosion cyber à Ouahigouya (Burkina Faso), www.africanti.org, été 2001
Emmanuel Lacroix Page 43
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
(ii) Prix pratiqués
(a) Prix pratiqués selon l’enquête menée par
Ramata Soré et diffusée sur le site du
RESAFAD
(i) Prix pratiqués à Ouagadougou
Voici quelques exemples des prix pratiqués33 dans les cybercafés ouagalais selon
une enquête réalisée par Ramata Soré, stagiaire du RESAFAD en septembre 2001 :
Nom du cybercentre
Quartier Tarif au 1/4d'heure
Datakunskap Zogona 500f cfa
Yame's service 1200 Lgmts 600 f cfa
Acotour-sarl 1200 Lgmts 500 f cfa
Télé Ent LTD Zogona 600 f cfa
BTF Zogona 750 f cfa
Géneral B.
2000 1200 Lgmts 700 f cfa
GTC Cité An III 750 f cfa
Ile 1200 Lgmts 500 f cfa
(ii) Prix pratiqués à Bobo-Dioulasso
Voici, selon la même étude, une illustration des prix pratiqués dans les cybercafés
Bobolais. On peut constater que les prix étaient légèrement supérieurs en moyenne
aux prix pratiqués à Ouagadougou.
33 http://www.bf.resafad.org/projetsDU/cybercentres/cybercentresbobo-ouaga.html
Emmanuel Lacroix Page 44
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Nom du cybercentre
Quartier Tarif au 1/4d'heure
ASM Centre ville-sect 1 1000f cfa
Multicom Centre ville-sect 1 1500 f cfa
Cyber Net Centre ville-sect 1 750 f cfa
Télécentre
Jonathan Centre ville-sect 1 750 f cfa
ISTEL Diarradougou 750 f cfa
Info Elec Centre ville-sect 1 750 f cfa
Sya Télécom Faragan -sect 1 750 f cfa
ABC Skasso-cira 750 f cfa
(b) Les prix à l’été 2002
Les prix ont considérablement diminué en deux ans. Au regard de notre enquête,
réalisée de juin à septembre 2002, il semblerait que les prix aient été réduits en
moyenne de moitié.
(i) Les prix pratiqués à Ouagadougou
Nous avons constaté les prix suivants à Ouagadougou :
Type
d’accès Fournisseur Internet
Tarif
(En FCFA)
L.S. Modem Fasonet Libtinfort Zcp Cenatrin Autre
Nb.
d’Ordi
connecté Les
15
Min
L ‘
Heure
Nbre Pers
connectée
par jour
* * * 8 400 1000 25
Emmanuel Lacroix Page 45
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
* * 3 400 1500 6
* * 12 250 1000 -
* * * 20 250 1000 -
* * 20 200 800 -
* * 20 300 1000 50
* * * 12 300 1200 60
* * * 8 500 2000 15
* * 10 200 750 32
* * 5 200 800 50
* * 7 300 1200 10
* * * 9 200 1000 25
* * 10 225 900 30
* * * 20 250 1000 25
* * 3 300 1000 20
* * 10 300 - 30
* * 8 300 1000 25
* * * * 10 225 900 15
* * 21 200 1000 32
(ii) Les prix pratiqués à Bobo-Dioulasso
Notre enquête a montré la pratique des prix moyens suivants à Bobo-Dioulasso : la
minute est facturée en moyenne 40 francs CFA ttc, la demi-heure coûte entre 700 et
500 francs CFA ttc, l'heure varie entre 1200 et 1000 francs CFA. Les prix
correspondent donc globalement à ceux pratiqués à Ouagadougou.
Notre enquêteur sur place constate par ailleurs que l'heure était encore récemment
facturée 2000 francs CFA et la minute à 50 francs CFA. La chute des prix est
principalement due selon ce dernier (lui même patron de cybercafé) à l'amélioration
du service de l'ONATEL et à la multiplication des cybercafés qui engendre une
concurrence bienfaisante pour les internautes.
Emmanuel Lacroix Page 46
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
(b) Les accès non commerciaux, associatifs ou subventionnés
(i) Le centre d’accès Yam Net
Le centre d’accès à l’internet YamNet que l’association Yam Pukri à ouvert à
Ouagadougou dispose de plusieurs ordinateurs, connectés à l’internet par modem.
Notons que l’association a également récemment ouvert un centre à Bobo-
Dioulasso.
(ii) Les Centres Municipaux Multimédias
Cinq centres municipaux multimédias ont été ouverts par la municipalité de
Ouagadougou depuis février 1999. Cette opération, à l’initiative de la marie de
Ouagadougou et de l’Association internationale des maires francophones, a permis
d’ouvrir un premier centre en février 1999 avec 8 machines et une ligne spécialisée à
64 Kbps. Le second a ouvert en mai 2000 et compte 16 machines et une Liaison
Spécialisée (LS) à 128 Kbps.
Chaque centre accueille en moyenne 600 enfants par an et leur permet de bénéficier
d’une sensibilisation à l’internet et aux outils de bureautique (Word, Excel, Windows).
Des formations accélérées ont également lieu chaque été pour les élèves qui
étudient à l’extérieur de Ouagadougou.34
Le projet n’est évidemment pas rentable en terme économique et ne peut vivre que
grâce à l’appui de la commune de Ouagadougou.
Le choix de la sensibilisation aux outils Microsoft est cependant controversé. En
effet, ces outils sont chers. Des logiciels libres permettraient selon certains de mieux
investir l’argent consacré à l’informatique et aux télécommunications au Burkina
Faso.
34 Eric Bernard, , Centres Municipaux Multimédias (Burkina Faso), Africanti.org
Emmanuel Lacroix Page 47
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
(iii) Le Centre d’Information sur la Recherche
et le Développement (CIRD)
Le Centre d'Information sur la Recherche et le Développement (CIRD) a été créé en
décembre 2000 après la fusion des fonds documentaires du Centre de Coopération
Internationale en Recherche Agronomique (CIRAD), du Centre d'Information sur le
Développement (CID) du Centre Culturel Georges Méliès et de l'Institut de
Recherche pour le Développement (IRD).
En plus d’un accès à de nombreux cédéroms, le centre offre une salle Multimédia
avec un réseau de 10 ordinateurs connectés à l’internet
c) Les Internautes
(1) Leur nombre
A la fin du mois de décembre 1997, soit à peine 9 mois après l’ouverture du réseau
au grand public, le nombre de machines connectées à l’internet était estimé à 900
par l’ONATEL. Le nombre d’utilisateurs était estimé à plus de 2000. En janvier 2000,
le Burkina Faso disposait d’environ 4000 abonnements par le biais de FAI privés.
En 2002, le nombre d’abonnements commerciaux à Internet est d’environ 6000 mais
cela ne reflète en aucune façon le nombre d’internautes. Aucune estimation du
nombre d’Internautes burkinabé en 2002 n’existe à ce jour. Nous ne nous risquerons
pas à tenter une évaluation. Cette opération est en effet très délicate puisque l’accès
à l’internet est, nous l’avons vu, principalement public et partagé. Seul un
recensement de population ou une enquête à très grande échelle permettrait donc
de donner une estimation précise de ce chiffre.
(2) Les profils des Internautes burkinabé
Emmanuel Lacroix Page 48
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
(a) L’étude publiée par Sylvestre Ouédraogo en septembre 2000
Une étude publiée en septembre 200035 par Sylvestre Ouédraogo, professeur de
l’Université de Ouagadougou tentait de dresser un portrait des internautes burkinabé
et de leurs pratiques.
Cette étude qui portait sur un échantillon de 211 cas, montrait les caractéristiques
suivantes :
- Les internautes interrogés étaient principalement des hommes (68,7%)
- La majorité des internautes (46,9%) avaient entre 20 et 25 ans. Seuls 5,3%
des internautes avaient plus de 30 ans.
- 28, 6% avaient suivi des études de second cycle et 27, 6% des études de
premier cycle universitaire. Notons également que 19,4% des Internautes
avaient un niveau de Maîtrise.
- 72,5% de la population concernée était étudiante (48,3%) ou élève.
- Sur cette population, près de la moitié affirmait utiliser l’internet depuis plus de
24 mois, c’est à dire avant 1998, contre 23,7% qui disait ne se connecter que
depuis moins de 6 mois.
(b) Les résultats de notre étude menée de mai à Septembre 2002
(i) Méthodologie
L’enquête regroupe un échantillon de 100 personnes et a été menée par deux
canaux distincts :
- 50 personnes ont été interrogées à Ouagadougou par Monsieur Issaka
Campaoré qui a collaboré bénévolement à cette étude. Cette enquête a été
menée dans différents centres d’accès à Internet afin d’assurer une
représentativité maximale de l’échantillon. Ainsi, les enquêtés ont été
interrogés dans des services publics, des camps militaires, des églises, des
banques, des universités et des Cybercentres. L’enquêteur a également veillé
Emmanuel Lacroix Page 49
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
à interroger un échantillon le plus représentatif possible des personnes
remarquées dans les cybercafés.
- 50 autres personnes ont répondu à un questionnaire apparaissant en ligne sur
le site www.bobodioulasso.net. Ces personnes, toutes burkinabé, proviennent
donc d’horizons plus divers.
(ii) Résultats
(a) Sexe, âge
La majorité des enquêtés étaient des hommes, les femmes représentent 20% de
l’échantillon ; il est d’ailleurs intéressant de noter qu’elles n’ont représenté que 14%
des réponses obtenues via le formulaire en ligne.
L’âge moyen constaté est légèrement supérieur à 28 ans. La répartition des sondés
selon leur tranche d’âge donne les résultats suivants :
- 6% inférieur à 20 ans
- 52% entre 20 et 30 ans
- 25% entre 30 et 40 ans
- 4% entre 40 et 50 ans
- 3% supérieur à 50 ans
(b) Activité et niveau scolaire
Nous avons pu constater que les Internautes burkinabé sont beaucoup plus diplômés
que la moyenne. Ainsi, sur la population enquêtée, nous avons pu relever la
répartition suivante :
- 5 ont un niveau d’étude de Collège
- 19 ont un niveau de Lycée
- 28 ont un niveau de premier cycle universitaire
- 27 ont un niveau de deuxième cycle universitaire
35 Sylvestre Ouédraogo, Accès aux nouvelles technologies de la communication (TIC) au Burkina Faso, une analyse des centres d’accès collectifs et des comportements des usagers Internet au Burkina Faso. www.anais.org. Septembre 2000
Emmanuel Lacroix Page 50
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
- 13 ont un niveau de troisième cycle universitaire
- 8 personnes n’ont pas répondu à cette question
Statut des sondés :
- 10 sont des élèves de collège ou de lycée
- 20 sont des étudiants
- 23 sont des fonctionnaires
- 11 sont des libéraux ou patrons d’entreprises
- 6 en recherche d’emploi
- 25 sont des salariés d’entreprises
- 5 personnes n’ont pas répondu à cette question
Leur domaine d’activité est large, on peut noter un éparpillement des réponses, nous
avons cependant pu noter
- 3 commerçants
- 5 financiers
- 10 informaticiens
- 6 inspecteurs du Trésor (nous craignons d’avoir un peu sur-représenté cette
catégorie)
- 3 concepteurs internet
- 2 secrétaires
- 2 comptables
- 2 militaires
(c) Antériorité de l’usage de l’Internet
La découverte de l’internet est en moyenne relativement récente, la majorité des
internautes burkinabé (64%) le sont devenus depuis l’année 2000 :
- 4 personnes connectées avant 1997
- 6 personnes connectées depuis 1997
- 5 personnes connectées depuis 1998
- 19 personnes connectées depuis 1999
- 27 personnes connectées depuis 2000
- 16 personnes connectées depuis 2001
Emmanuel Lacroix Page 51
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
- 18 personnes connectées depuis 2002
- 5 personnes n’ont pas répondu à cette question
Cette information sur la faible antériorité de la découverte de l’internet, démontre la
nécessité de cette étude sur la population des internautes burkinabé. Effectivement,
la plupart des études menées, bien qu’excellentes, dataient de l’année 2000.
(3) Les pratiques des internautes burkinabé
(a) Constatations effectuées par Sylvain Zongo, responsable du fournisseur d’accès à Internet Zongo Consulting and Production (ZCP) et de « cyberfrites » en 1999
Sylvain Zongo, le patron du fournisseur d’accès ZCP et du cybercafé « cyberfrite »,
estimait en 199936 qu’environ 80% des connexions effectuées dans son cybercafé,
concernaient le « cyber-romantisme ». Il estimait même que de nombreuses clientes
de « cyberfrites » vivaient de leurs charmes sur le web.
Plus généralement, Sylvain Zongo précisait que la majeure partie des connexions en
journée était le fait d’étudiants qui recherchaient avant tout le « dating » (rencontre
en ligne) via le web et le chat (discussion en temps réel). En revanche, les soirées
étaient plutôt consacrées au courrier électronique.
Ce témoignage d’un patron de cybercafé est intéressant car il résulte d’une
constatation de visu qui n’est donc pas biaisée par les déclarations des enquêtés qui
sont soumis au regard de l’enquêteur et n’osent sans doute pas avouer le type de
pratiques décrites par Monsieur Zongo.
36 François Laureys, chez nos voisins, cybercafé à Ouagadougou : là où les frites et Cyber font bon ménage, www.afribone.com, 1999
Emmanuel Lacroix Page 52
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
(b) Les études publiées en 2000
(i) L’étude de Charlemagne Zannou
L’étude menée par Charlemagne Zannou pour le compte du Réseau d’Information et
de Formation sur le Développement (RIFOD) aborde les pratiques des internautes
dans le cadre des ONG et des associations. Cette étude, publiée en 2000, montre
que dans le milieu associatif, l’Internet est utilisé prioritairement pour l’échange de
courriers électroniques.
Ainsi, l’auteur soulignait-il à l’époque que dans ce milieu, le courrier électronique était
le service le plus utilisé dans 100% des cas. L’auteur se penchant ensuite sur la
navigation sur la toile constatait qu’elle était pratiquée par 97% des internautes.
Dans la grande majorité des cas, les adresses des sites visités étaient connues par
le biais du bouche à oreille ou parce qu’un support écrit en avait fait la promotion.
L’utilisation des moteurs de recherche était extrêmement rare. Seul 11% des
personnes interrogées utilisaient un moteur ou un annuaire pour identifier des sites.
Les domaines de recherche sur l’internet étaient les suivants :
1. L'agriculture, l'élevage et l'environnement ( 97%) ;
2. L'éducation (40%) ;
3. Les sciences et techniques ( 35%) ;
4. La santé ( 32%) ;
5. L'informatique et bureautique ( 23%) ;
6. La culture ( 22%) ;
7. La politique ( 15%) ;
8. Le commerce (12%) ;
9. Les loisirs et voyages (4%) ;
10. Autres domaines ( 7%).
Le RIFOD notait également que les services tels que le chat, les newsgroups, les
visioconférences et autres services connexes n’étaient connus que par une minorité
d’internautes et n’étaient pratiquement pas utilisés.
Emmanuel Lacroix Page 53
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Enfin, d’une façon générale, la totalité des internautes estimait que le contenu trouvé
sur la toile ne correspondait pas à ses attentes. Soit parce que le contenu était en
anglais, soit parce les données consultées n’étaient pas spécifiques au Burkina.
(ii) L’étude de Sylvestre Ouédraogo
L’étude menée par Sylvestre Ouédraogo s’attardait moins sur les pratiques
proprement dîtes mais plutôt sur les bénéfices ressentis et sur les obstacles
rencontrés.
Nous apprenions ainsi que le principal avantage ressenti sur le plan privé concernait
le renforcement des relations personnelles qui était exprimé dans près de 70% des
cas. Cela confirmait le statut de vedette du courrier électronique dans l’internet
burkinabé.
Les bénéfices cités ensuite dans une bien moindre mesure, étaient
l’amoindrissement des coûts financiers, la facilité pour s’informer et l’épanouissement
personnel.
L’auteur s’intéressait ensuite aux bénéfices ressentis sur le plan professionnel.
L’amélioration dans la recherche arrivait alors nettement en tête avec près de 50%
des réponses. Venaient ensuite la facilité de communication dans le domaine
professionnel, l’inscription dans les écoles et l’obtention de bourses et le choix accru
des consommateurs.
Sylvestre Ouédraogo note que d’une façon générale, dans le milieu professionnel, le
courrier électronique remplace progressivement la télécopie et le téléphone, plus
coûteux à utiliser. L’auteur notait ainsi qu’une « page de fax à envoyer en France
coûte en 2 000 FCFA soit 20 FF. Il est possible d’envoyer un document de plus de
200 pages par fichier attaché et cela ne vous coûtera pas plus de 500 FCFA soit 5FF
à Yam Pukri par exemple.
Le coût d’équipement en matériel Fax est aussi élevé et il faut disposer d’une ligne
téléphonique et payer des coûts fixes mensuels en plus ».
Emmanuel Lacroix Page 54
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Enfin, dans les inconvénients rencontrés dans la recherche d’information, le coût
important de la navigation sur la toile était cité en premier lieu par plus de 30% des
internautes, le manque de maîtrise de l’anglais arrivant en deuxième position.
Notons, que plus généralement, la majorité des Internautes déclaraient être
confrontés à de nombreux problèmes (37.6%).
Il est intéressant de constater qu’une nouvelle fois, le manque de contenu
francophone sur la toile était cité par une importante quantité d’utilisateurs.
(iii) L’étude de Aicha Tamboura
Aicha Tamboura a mené en 1999-2000 une étude centrée sur les femmes
internautes au Burkina Faso37. Il en ressortait les informations suivantes.
Aicha Tamboura notait tout d’abord que l'information sur les différentes possibilités
de l’Internet se limitait souvent au courrier électronique (41,8%) et à la navigation sur
le web (38,8%). La connaissance des forums de discussion était rare (7,1%) et 54%
avait émis le souhait de pouvoir les fréquenter après que leur existence leur ait été
révélée.
Les femmes interrogées utilisaient plus l’internet dans le cadre professionnel que
pour des besoins personnels. Les principaux domaines qui faisaient l'objet de
recherche d'informations sur l’internet par ordre d'importance étaient :
1. La culture, 40%
2. Le commerce, 20%
3. Les sciences, 15%
4. L'éducation, 10%
Les avantages de l’Internet constatés par les utilisatrices interrogées étaient les
suivants :
1. Gain de temps : 36,6%
2. Efficacité : 26,7%
37 RECIF, Aicha Tamboura, Les femmes et les Technologies de l’Information et de la Communication au Burkina Faso, www.anais.org, Ouagadougou 2000
Emmanuel Lacroix Page 55
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
3. Economie budget : 26,7%
Les inconvénients étaient :
1. Les virus : 22,6%
2. Les problèmes de maintenance : 12,9%
3. Le coût : 12,9%
4. La non confidentialité : 9,7%
5. Les problèmes de connexion : 6,5%
Enfin, malgré les difficultés et les contraintes soulignées, le taux de satisfaction des
utilisateurs restait très élevé, 85%.
(c) Les résultats de notre enquête menée de mai à septembre 2002
(a) Des spécificités féminines
Il apparaît tout d’abord que notre échantillon comprend 20 femmes sur 100
personnes interrogées. Il est intéressant de noter que seules 7 femmes ont participé
au sondage en ligne. Nous ne savons quelles interprétations peuvent être données à
cette constatation. Les femmes burkinabé sont-elles moins attirées que les hommes
par un site qui, tel bobodioulasso.net, présente une ville de leur pays ? Ou ne
souhaitent-elle tout simplement pas, pour une raison quelconque (discrétion ?),
répondre à des sondages en ligne ?
L’étude publiée par le réseau Anaïs sur l’internet et les femmes burkinabé, souligne
également des spécificités féminines. Ainsi, le réseau montre que les femmes sont
plus nombreuses dans les grands cybercentres dans lesquels elles peuvent
représenter jusqu’à 25% des Internautes. Leur présence dans les petits centres est
en revanche beaucoup plus rare.
Notre enquêteur à Ouagadougou a également constaté que les femmes souhaitaient
beaucoup plus rarement communiquer des informations personnelles telles que
l’adresse de courrier électronique.
Emmanuel Lacroix Page 56
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
(b) Lieu de connexion
Sur l’ensemble des sondés, nous avons pu constater qu’une écrasante majorité des
internautes se connectaient dans les cybercafés. Ils représentent le lieu de
connexion pour 68% des internautes sondés ayant exprimé une réponse. Vient
ensuite le lieu de travail qui représente une part importante des connexions,
notamment semble-t-il pour les salariés de l’administration.
- 65 personnes se connectent dans les cybercafés
- 20 personnes se connectent à leur travail
- 10 sondés se connectent à leur domicile
- 3 se connectent à un autre endroit (notre sondage en ligne limitait la liste de
réponse)
- 2 n’ont pas répondu à cette question
(c) Fréquence et durée de connexion
Les fréquences de connexion sont relativement bien étalées, on peut observer une
répartition des internautes en trois grandes masses :
- 27 personnes se connectent une fois par mois ou moins
- 37 personnes se connectent une fois par semaine environ
- 33 personnes se connectent une fois par jour ou plus
- 3 personnes n’ont pas répondu à cette question
A chaque connexion, les internautes restent un temps relativement important devant
l’ordinateur puisqu’on peut constater qu’ils sont 75% des sondés (à avoir répondu) à
passer plus de trente minutes devant la machine :
- 3 se connectent en moyenne 5 minutes
- 19 se connectent en moyenne 10 minutes
- 30 se connectent en moyenne 30 minutes
- 38 se connectent en moyenne 1 heure ou plus
- 10 n’ont pas répondu à cette question
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Notons que 19 internautes affirment se connecter au moins une heure chaque jour.
Cette sous-population qui constitue la crème des internautes burkinabé est
principalement connecté à domicile ou au travail.
(d) Services utilisés
51% des sondés citent le mail comme utilisation principale de l’internet. Les autres
réponses sont très diverses. Notons par exemple la recherche d’information, les
rencontres ou encore la recherche de cours en relation avec l’université (cité par 6
étudiants en utilisation principale et 6 autres en utilisation secondaire). Il est
intéressant de noter que l’internet rempli déjà en partie son rôle de bibliothèque
universelle pour les étudiants burkinabé.
d) Quelques exemples d’utilisation de l’internet dans un cadre
professionnel ou associatif
Examinons maintenant quelques exemples d’utilisation de l’internet dans des cadres
professionnels ou associatifs burkinabé.
(1) DEVENET : des cédéroms et un site
Le Réseau d’Information et de formation sur le développement (RIFOD) a lancé le
projet DEVENET. Celui-ci offre de l’information sur les acquis de la recherche liés au
développement durable. Cette information est publiée sur des supports multimédias
(cdroms, site web) à l’intention des professionnels du développement.
L’objectif du projet est de faciliter l’accès aux connaissances et la communication
entre les membres du réseau intervenant dans le développement durable.
Le site devenet.org regroupe notamment de nombreuses ressources sur
l’environnement, l’agriculture ou encore l’élevage.
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
(2) L’utilisation de l’internet dans une association de Pô
Le site afridev.net évoque le cas de l’ONG Agir pour le Développement (APD),
association qui a de nombreux champs d’action :
- la préservation de l’environnement ;
- l’animation de « causeries-débats » entre les différentes classes sociales
(jeunes, femmes, hommes) ;
- l’organisation d’ateliers de formation sur les mouvements associatifs et sur les
produits locaux (beurre de karité) ou encore l’apprentissage des techniques de
recherche de marché ;
L’APD travaille aussi à la valorisation des produits de la cueillette et de certains
produits oléagineux. A ce titre elle fonctionne comme une coopérative de
commercialisation : elle collecte les produits et recherche des marchés prometteurs.
Cette dernière activité l’a motivée à vouloir utiliser Internet dans ses recherches de
partenaires pour écouler sa production de beurre de karité. La secrétaire exécutive
de l’association utilise l’internet depuis 1999 et s’en sert principalement pour la
messagerie électronique. Au siège social de l’association, à Pô, l’unique ordinateur
est utilisé pour le traitement de texte et ne dispose pas de connexion à Internet. La
connexion n’était en 2000 possible qu’à Ouagadougou, ville dans laquelle la
secrétaire ne se rendait en moyenne que deux fois par mois. Une personne relevait
et imprimait donc pour elle les messages reçus.
Le même système était mis en place pour la réponse : la secrétaire remettait sur
papier les messages à envoyer à une connaissance se rendant à Ouagadougou ;
celle-ci le transmettait à son tour à la coordonnatrice du centre d’accès Internet ;
cette dernière se chargeant de l’envoyer.
Les voyages à Ouagadougou représentaient pour la secrétaire exécutive des
occasions de surfer sur les sites des associations qui traitent de la formation et de
l’éducation. Elle recherchait également le cours des matières grasses (cacao) pour
fixer le prix de son beurre de karité. Elle suivait particulièrement le grand marché qui
Emmanuel Lacroix Page 59
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
s’ouvre aux pays producteurs de beurre de karité avec la possibilité que le beurre de
karité soit introduit dans la fabrication du chocolat. Elle recherchait enfin les normes
internationales pour les produits gras.
Les informations trouvées sur le web lui évitaient de se rendre régulièrement à la
chambre de commerce du Burkina Faso pour se renseigner sur les opportunités
d’affaires sur le marché international. ADN souhaiterait réaliser un site pour mettre
en valeur les actions qu’elle entreprend à ce niveau mais ne dispose pas
actuellement de ressources financières suffisantes pour sa création et son
hébergement. L’absence de connexion à l’internet dans les provinces du Burkina
Faso est un frein aux activités des différentes associations qui s’y trouvent.
(3) L’utilisation de l’internet par une entreprise informatique
AGI PLUS, comme beaucoup d’autres entreprises d’informatique du Burkina Faso
visite les sites Internet qui proposent du matériel informatique afin de comparer les
produits proposés par les fournisseurs avant de passer commande. Elle lance aussi
ses commandes par virement bancaire. Elle compare les coûts de livraison et les
modes de paiements. L’internet lui permet de proposer à ses clients des coûts
compétitifs.
Si AGI PLUS se sert de l’internet pour passer ses commandes, elle ne dispose pas
encore de site web pour présenter son entreprise et ses produits à sa clientèle.
Pour d’autres entreprises informatiques, l’absence de carte bancaire rend impossible
le commerce électronique. Citons par exemple, le cas de l’entreprise Bureautique
Informatique Gestion (BIG) qui ne possède pas de carte bancaire et qui doit donc
faire appel à des relations en Europe pour pouvoir acheter le matériel qu’elle revend
ensuite au Burkina.
(4) L’utilisation du courrier électronique pour favoriser les échanges dans le cadre d’un jumelage franco-burkinabé
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
La ville de Vendôme en France et celle de Boulsa au Burkina, sont jumelées depuis
1992. Un programme d’équipement en informatique et en télécommunication a été
mis en place en 1999 afin de faciliter les communications entre les deux partenaires.
Ce nouvel équipement a permis de développer des contacts plus fréquents et de
réduire les temps de réaction ainsi que les coûts de télécommunication. Le courrier
électronique a permis par exemple de préparer le voyage des jeunes de Vendôme à
Boulsa.
Le matériel, un ordinateur d’occasion, a été acheminé de Vendôme à la Maison des
Jeunes et de la Culture à Boulsa. La connexion a nécessité l’installation d’une ligne
téléphonique (106 euros) et un abonnement (15 euros/mois pour 10 heures de
connexion). Elle a été possible car le local de Boulsa dispose d’un groupe
électrogène.
Ce projet a représenté un investissement considérable au regard du budget dont
dispose la ville de Boulsa : 45 000 euros. La ville de Vendôme intervient à hauteur
d’un tiers de ce budget. Ce coût semble un peu disproportionné par rapport aux
avantages apportés. Certes, le projet a permis la diffusion des NTIC dans une zone
rurale. Mais des inconvénients apparaissent sur la durée :
- Seules quelques personnes ont accès à l’ordinateur à Boulsa, ce qui leur
confère un certain pouvoir dont elles sont susceptibles d’abuser.
- L’absence de techniciens informatiques rend les moindres dysfonctionnements
très vite problématiques. Une difficulté informatique a été dépannée par
téléphone, d’autres problèmes ont nécessité l’intervention d’une personne
extérieure. Le manque de formation des usagers - seules deux personnes
connaissent l ’utilisation du matériel - ne permet pas une utilisation optimale
(5) L’utilisation de l’internet par le Centre Muraz de Bobo-Dioulasso
Le Centre Muraz est un centre de recherche médicale. Le centre comprend environ
une trentaine de chercheurs. Il est connecté à l’internet depuis 1997, date de l’arrivée
de l’internet à Bobo-dioulasso. Le centre dispose d’un parc informatique d’une
quarantaine de machines dont près de la moitié est reliée à Internet.
Emmanuel Lacroix Page 61
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Les chercheurs utilisent l’internet pour obtenir des informations dans le domaine de
la santé. Le courrier électronique est également très utilisé pour des échanges avec
les chercheurs des pays partenaires.
Le centre Muraz dispose également d’un site web créé en 1997 par un Coopérant du
Service National (CSN) français, gestionnaire du centre.
Ce panorama de l’accès à l’internet et de l’utilisation de cet outil au Burkina Faso doit
maintenant être complété par un aperçu des compétences et des formations
dispensées dans les domaines de l’informatique, des télécommunications et de
l’internet. Nous nous attarderons ensuite sur le problème de la fuite des cerveaux
mais également sur les bienfaits que peuvent apporter au pays, les compétences
acquises par des expatriés qui sont parfois les moteurs de l’internet burkinabé.
22.. EEttaatt ddeess ccoommppéétteenncceess tteecchhnniiqquueess
a) Compétences informatiques
(1) Les compétences en entreprises
L’informatique est utilisé dans de nombreuses entreprises en 2002. Les
compétences sont donc de moins en moins rares, surtout au sein des jeunes
générations. Il est cependant étonnant de constater que les outils Microsoft
détiennent une part très importante du marché et que les logiciels libres sont très mal
maîtrisés. Ceci alors que ces derniers, de par leur gratuité notamment, conviennent
nettement plus au contexte africain.
(2) Les formations universitaires, en entreprises ou pilotées par l’Etat
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
(a) La Délégation générale à l’informatique (DELGI)
La DELGI réalise des formations à l’intention du personnel de l’administration. Une
partie importante du personnel administratif a dores et déjà été formée à
l’informatique par ce biais. Joachim Tankoano et Mahamoudou Ouédraogo estiment
que 20% du personnel administratif avait déjà profité d’une formation en 200138.
D’une façon générale, si la maîtrise de l’outil informatique va en s’améliorant, la
population capable d’utiliser un ordinateur reste largement minoritaire et quasi-
entièrement urbaine.
(b) Une école d’encadrement : l’Ecole Supérieure d’Informatique (ESI)
L’ESI est une école d’informatique créée en 1991 sous l’impulsion de la DELGI pour
assurer le développement des ressources humaines nécessaires à la mise en œuvre
des plans informatiques. L’école est dirigée par Joachim Tankoano qui est
également le Délégué Général à l’informatique. L’école profite donc du rôle central
joué par son directeur dans la politique informatique du Burkina Faso.
L’école forme chaque année une trentaine d’ingénieurs de travaux (BAC+3), elle
vient également d’ouvrir un cycle d’ingénieurs de conception (BAC+5).
L'ESI entretient par ailleurs des relations étroites avec l'université de Nancy et
l'Institut national de recherche en informatique et en automatique (Inria)39.
(c) Deux écoles privées de formation à la maintenance informatique : l’ISIG et le CEFIG
Deux écoles privées, L'Institut Supérieur en Informatique de Gestion (ISIG) et le
Centre d'Etude et de Formation en Informatique et de Gestion (CEFIG) ont vu le jour
38 Mahamoudou Ouédraogo, Joachim Tankoano, Internet au Burkina Faso : réalités et utopies, éditions l’Harmattan, 2001 39 Pascal Renaud, Un exemple Burkinabé, in Le Monde diplomatique, février 1996, page 25
Emmanuel Lacroix Page 63
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
récemment. Elles délivrent des BTS en informatique de gestion et en maintenance
informatique.
(d) Les formations dispensés par les entreprises informatiques
Les formation pratiquées par les entreprises informatiques restent extrêmement
onéreuses, voici, à titre d’illustration, les prix pratiqués par deux grandes entreprises
informatiques du Burkina.
(i) Coûts pratiqués par Liptinfor
LIPTINFOR facture 3 heures de formation chez le client à 40.000 francs CFA htva,
soit approximativement 50 000 francs CFA ttc, ce qui revient à près à 76 euros.
L’assistance technique chez le client est quant à elle facturée 25.000 francs CFA
htva.
(ii) Coûts pratiqués par ZCP
Chez ZCP, le dernier FAI arrivé sur le marché, les trois heures d’initiation à la
Messagerie et à la navigation chez le client sont facturées 36 000 francs CFA ttc.
b) Compétences en gestion des infrastructures et en
télécommunication
(1) Les compétences en entreprises
(a) Les Fournisseurs d’Accès à Internet
Les FAI disposent tous d’une main d’œuvre compétente dans la gestion des
infrastructures de télécommunication, c’est en effet le cœur de leur métier. Il ne nous
a malheureusement pas été possible d’obtenir une estimation du nombre d’employés
disposant de ces compétences.
Emmanuel Lacroix Page 64
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
(b) Les entreprises d’installation, de maintenance et de revente de matériels de télécommunications
Outre l’ONATEL, l’opérateur historique des télécommunications au Burkina Faso qui
regroupe l’essentiel des compétences techniques, il existe environ une dizaine de
fournisseurs locaux de matériels de télécommunications (câble téléphoniques,
postes, répondeurs téléphoniques, télécopieurs et autres matériels d’installation).
Ces fournisseurs effectuent fréquemment des installations d’intercommunications et
d’autocommutateurs privées. Ces installations ont principalement lieux dans des
entreprises ou dans l’administration.
Ces petites entreprises emploient donc une main d’œuvre qualifiée dans ce domaine
qui doit être comptabilisée dans le recensement des compétences en
télécommunication.
(2) l’Ecole Nationale des Télécommunications
L’Office National des Télécommunication (ONATEL) dispose d’un établissement de
formation professionnelle qui assure la formation initiale des cadres moyens de
l’entreprise. Ce centre de formation porte le nom d’Ecole Nationale des
Télécommunications.
L’école assure également la formation du personnel technique d’entreprises privées.
c) Compétences en Conception Internet
(1) Les compétences en entreprises
Les entreprises qui proposent des services de conception internet sont nombreuses
et la concurrence commence à faire baisser les prix qui étaient jusque là
démesurément élevés.
Cependant malgré la multiplication des entreprises, les compétences sont encore
rares et sont limitées à la seule programmation. La bonne connaissance des outils
graphiques semble être particulièrement peu répandue. Mais ces compétences sont-
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
elles utiles ? Leur utilisation n’est elle pas superflue pour ce pays ? On répondrait
volontiers par l’affirmative s’il s’agissait uniquement de produire du contenu à
l’attention de l’Afrique, mais ce serait oublier les opportunités offertes par la sous-
traitance de création multimédia au profit des pays industrialisés.
Nous reviendrons sur la nécessité de maîtriser ces compétences graphiques dans un
marché mondialisé.
(2) Les formations
(a) L’Ecole Supérieure d’Informatique (ESI) : une compétence informatique applicable à la conception Internet
Le programme de l’ESI prévoit l’enseignement de nombreux langages de
développement informatique.
Ces compétences, alliées à une familiarité avec les logiciels et l’informatique en
général, rendent l’apprentissage des techniques de conception Internet, relativement
aisé pour les diplômés. Elles sont particulièrement adaptées à la programmation de
systèmes de bases de données mais elles excluent en revanche les compétences
graphiques valorisées dans la communication web européenne.
(b) Le DU Communicateur multimédia du RESAFAD
L'expérimentation du Diplôme d'Université de Communicateur Multimédia a débuté
en avril 1999 à l'Université de Ouagadougou. Le campus électronique RESAFAD est
hébergé par le serveur de l'Université du Mans qui fournit également un service de
tutorat distant. Treize personnes sont entrées en formation. Des cours ont été
organisés. Devant la difficulté à identifier et recruter des intervenants locaux dans les
domaines de formation concernés, ils ont été pour la plupart dispensés par le
correspondant RESAFAD. Douze personnes ont été reçues. Les soutenances ont
permis la présentation de projets pertinents et intéressants. Les diplômes ont été
remis par l'Ambassadeur de France en juin 2000.
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
La réputation acquise par la formation, sur laquelle la Télévision Nationale du
Burkina, a réalisé un documentaire a permi, à l'issue d'une campagne d'information
menée en juin et septembre 2000, d'inscrire 40 nouveaux candidats à Ouagadougou
et 20 autres à Bobo-Dioulasso en partenariat avec l'ESI de l'UPB.
Le diplôme compte un Directeur et trois responsables pédagogiques. Ces derniers
ont été désignés pour encadrer les deux groupes d'étudiants inscrits à Ouagadougou
et celui de Bobo-Dioulasso. Leur tâche consiste à recruter les intervenants
pédagogiques, à planifier l'organisation pédagogique, à mettre en place les
évaluations.
Trois assistants de formation ont également été recrutés à Ouagadougou. Deux
d'entre eux sont chargés d'accueillir les usagers du centre et de veiller au bon
fonctionnement quotidien du centre. La troisième est chargée de gérer la
documentation et d'assurer le secrétariat de la formation.
(c) Les formations assurées par les associations oeuvrant pour le développement des TIC
Plusieurs associations effectuent des formations à l’utilisation des outils bureautique
ou d’Internet. Certaines proposent également des formations à la conception de
pages web. Citons par exemple le réseau Girafe-info, l’association NTBF, le club
arobase ou encore Yam pukri.
d) La fuite des cerveaux
(1) La fuite des cerveaux : une pénalisation importante des pays en voie de développement
Le rapport sur le développement humain publié par le PNUD en 2001 souligne à
travers l’exemple de l’Inde, les inconvénients représentés par la fuite des cerveaux
pour un pays en voie de développement : « en Inde, environ 100 000 diplômés
devraient ainsi bénéficier des nouveaux visas délivrés par les Etats-Unis. Les
ressources consacrées par leur pays d’origine à leur formation, en pure perte,
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
représentent 2 milliards de dollars par an. Du fait de cette fuite des cerveaux, il est
plus difficile pour les pays en développement de retenir les individus essentiels à leur
expansion technologique, dont les salaires s’alignent de plus en plus sur ceux du
marché mondial de l’emploi ».
(2) Le cas particulier des nouvelles technologies
Selon Le Monde Interactif40, le marché des nouvelles technologies provoquerait un
retour des cerveaux. Les nombreuses opportunités offertes par ce marché en Afrique
inciteraient de nombreux diplômés d’origine africaine partis étudier dans les pays du
Nord, à revenir dans leur pays.
Le Monde interactif cite ainsi le cas du Cameroun dans lequel « la plupart des
cybercafés ont été créés par des personnes ayant étudié et travaillé dans les pays
du Nord ». Le journal donne également l’exemple d’Albert Kamanou, diplômé de
l’Université de Louvain et retourné au Cameroun créer Global Net, un fournisseur
d’accès sans fil. Ce dernier, évoquant son retour, explique « qu’il y a tout à faire et
que les opportunités sont, ici, encore ouvertes ».
Cette constatation est cependant relativisée par l’organisateur du Salon Yaoundé
Netcom qui affirme que « les nouvelles technologies ne suscitent pas un retour
massif ».
Le secrétaire général de l’Observatoire des systèmes d’information, des réseaux et
des inforoutes au Sénégal (OSIRIS) constate par ailleurs que de nombreux cadres
africains de grandes sociétés occidentales, remarquent lors de leur passage au pays
le manque de certains services et mènent ensuite à distance des projets d’entreprise
ou des actions de développement sans se rapatrier physiquement.
(3) La diaspora au secours de l’Internet burkinabé
Heureusement pour les pays en voie de développement, la fuite des cerveaux peut
par ricochet présenter quelques avantages à terme. Ainsi, dans le cas de l’Inde, le
Emmanuel Lacroix Page 68
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
rapport du PNUD précise que « Les communautés émigrées peuvent accroître la
réputation de leur pays d’origine. Le succès de la diaspora indienne dans la Silicon
Valley, par exemple, semble modifier la façon dont le reste du monde perçoit l’Inde et
crée une sorte de label indien. Pour un programmeur de logiciels, être de nationalité
indienne est ainsi devenu un gage de qualité, à l’instar du « made in Japan » pour
l’électronique grand public ».
Dans le cas précis du Burkina, on est encore loin de l’image d’experts informatiques
gagnée par les ingénieurs indiens. Cependant la diaspora compte un certain nombre
de personnes dynamiques et motivées par l’idée de développer les NTIC dans leur
pays. Youn Sanfo et Cyriaque Paré illustrent bien ce cas de figure. Youn Sanfo est
un ingénieur informatique burkinabé qui habite en France, à Caen. Il a été l’un des
premiers à concevoir des applications portails sur le Burkina Faso et son site « point
de rencontre » a acquis une notoriété importante dans les butineurs de la toile
burkinabé. Il a plus récemment été à l’initiative de l’association NTBF pour la
promotion des NTIC et des logiciels libres au Burkina Faso.
Cyriaque Paré, attaché de presse à l’ambassade du Burkina en France, illustre
également ce cas de figure. Ce doctorant est à l’origine de travaux de recherche
intéressant sur les nouvelles technologies et les médias, il participe également
activement à toutes les listes de discussion liant l’internet et Afrique et il représente
souvent la principale source d’information sur le Burkina Faso dans les groupes de
discussion. Il anime en outre plusieurs sites en relation avec le Burkina dont le portail
burkinet (www.burkinet.com).
Penchons nous maintenant sur l’information en relation avec le Burkina qui circule
sur les inforoutes afin d’obtenir une idée précise de sa visibilité, de son niveau de
développement et du type d’applications qui ont émergé de la toile burkinabé. Nous
examinerons également les conditions d’hébergement de ces inforoutes et les prix
pratiqués sur le marché de la conception internet.
40 S. Fo., L’espoir du retour des cerveaux, Le Monde Interactif, édition du 9 mai 2001
Emmanuel Lacroix Page 69
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
33.. LL’’iinnffoorrmmaattiioonn bbuurrkkiinnaabbéé ssuurr lleess iinnffoorroouutteess
a) La visibilité et la pertinence d’une recherche sur le web
burkinabé
(1) Quantité
Les sites web sur le Burkina Faso sont en apparence nombreux en 2002. Une
recherche sur « Burkina Faso » avec le moteur de recherche Google41 permet
d’accéder à environ 816 000 résultats.
Cette première constatation doit être relativisée. D’une part, cela ne signifie pas que
les sites sont aussi nombreux mais seulement que les « mots clés » en question
apparaissent dans 816 000 sites environ. La même recherche limitée aux pages
francophones donne 167 000 réponses. L’information est donc principalement
d’origine anglophone. D’autre part, la même recherche appliquée par exemple au
mot « France », renvoie approximativement 32 500 000 réponses avec le même
moteur. Soit près de 40 fois plus.
Il est également intéressant de constater qu’à la pénurie de contenu en liaison avec
le Burkina Faso s’ajoute une pénurie de contenu d’origine burkinabé.
(2) Qualité, origine et pertinence des résultats
L’étude de la première page de résultats renvoyés par le moteur Google avec les
mots « France » et « Burkina Faso » est en ce sens explicite.
Tout d’abord, la recherche avec le mot France renvoie au 31 juillet 2002, la liste
suivante :
1. Yahoo France *
2. Météo France
3. France Telecom
41 http://www.google.fr
Emmanuel Lacroix Page 70
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
4. France-2
5. Bibliothèque Nationale de France
6. Air France (accueil en anglais)
7. France-3
8. Page d’accueil de Lycos multimania *
9. Air France (accueil en français)
10. Internet.com *
Le contenu renvoyé correspond donc en intégralité à des sites d’entreprises. La
majorité étant par ailleurs d’origine française (« * » apparaît à côté des sites d’origine
étrangère). Précisons que pour Lycos-multimania, le site renvoyé est celui de
multimania, entreprise française, passée récemment sous le contrôle de Lycos,
entreprise américaine.
La même recherche appliquée au Burkina Faso donne le résultat suivant :
1. Site du gouvernement burkinabé
2. Site de la CIA
3. Site sur le Burkina Faso (en anglais)
4. Site de l’ambassade du Burkina aux Etats-Unis (en anglais)
5. Site de l’ambassade du Burkina au canada
6. All africa.com (site en anglais)
7. Ambassade des Etats-Unis au Burkina (an anglais)
8. Site du bureau des affaires consulaires des Etats-Unis (en anglais)
9. Site de l’ONATEL
10. Site de l’ambassade de France au Burkina
On constate tout d’abord qu’aucune entreprise mis à part l’ONATEL n’intervient dans
la liste de résultat. On remarque ensuite que la majorité des réponses correspond à
un contenu d’origine étrangère au Burkina Faso.
Précisons cependant que cette constatation n’est valable qu’à l’instant du constat et
que la situation est susceptible d’évoluer à tout moment ; les règles qui définissent
l’ordre d’apparition dans les moteurs de recherche sont modifiées continuellement.
Emmanuel Lacroix Page 71
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
b) Panorama du web burkinabé
Dans ce chapitre, nous ne prétendons évidemment pas fournir un panorama
exhaustif des sites présents sur les inforoutes burkinabé, nous avons vu
précédemment que le nombre de pages sur le Burkina est déjà considérable malgré
le retard affiché par ce pays en la matière. Nous nous contenterons de donner un
aperçu le plus représentatif possible des types de contenu apparaissant sur les
inforoutes burkinabé.
(1) L’information d’origine burkinabé
(a) De nombreux sites officiels et une bonne information à l’intention des investisseurs potentiels
Le premier résultat d’une recherche sur le Burkina Faso renvoie sur le site du
gouvernement. Ce positionnement reflète la forte présence du contenu d’origine
gouvernemental au sein des inforoutes burkinabé. Il existe une dizaine de sites
d’origine institutionnelle :
www.primature.gov.bf (Site officiel du Gouvernement)
www.finances.gov.bf (Site du Ministère de l’Economie et des finances)
www.mairie-ouaga.bf (Site de la Mairie de Ouagadougou)
www.delgi.gov.bf (Site de la Délégation générale à l’informatique)
www.legiburkina.bf (Site sur la législation du BURKINA FASO)
www.ambf.bf (Site de l'association des maires du Burkina)
www.metss.gov.bf (Site du ministère de l'emploi du travail et de la sécurité sociale)
www.mediateur.gov.bf (Site du médiateur du Faso)
www.mae.gov.bf (Site du ministère des affaires étrangères )
http://www.zedcom.bf/annonces/ontb/ontb.htm (Office du tourisme)
(b) La recherche et l’éducation
Les sites dans le domaine de la recherche et de l’éducation sont encore peu
nombreux, on peut cependant noter les présentations suivantes :
www.univ-ouaga.bf (Site de l’Université de Ouagadougou)
www.profis.gov.bf ( Site du programme de formation au métier de l'image et du son)
Emmanuel Lacroix Page 72
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
http://www.isig.bf (site de l'Institut Supérieur en Informatique de Gestion)
www.ciospb.bf ( site du centre d'orientation scolaire et universitaire)
www.foner.bf ( site web du FONER, le fonds de éducation et recherche)
www.worldlinks.bf ( site du programme d'enseignement à distance de la banque
mondiale au Burkina)
www.droit-et-toile.net/fr/index.html ( site web sur le droit et la toile)
www.cafp.bf ( site web de la cellule d'appui à la formation professionnelle)
(c) Les sites portail
Les sites portail sur le Burkina sont en pleine explosion depuis deux ans. Les
tentatives de « monter un portail » sont nombreuses et les motivations diverses. On
constate une volonté des principales entreprises burkinabé de renforcer leur
notoriété en occupant ce terrain mais aussi des initiatives individuelles de burkinabé
qui ont été parmi les premiers à investir le terrain des NTIC et qui exploitent l’avance
conséquente qu’ils ont pu acquérir sur leurs compatriotes. Il est vrai que la rareté du
contenu burkinabé sur la toile incite à occuper ce marché.
http://www.netaccess.bf/
www.burkinet.com
www.burkina.org
www.burkinaonline.bf/
www.liptinfor.bf/
www.multimania.com/ysanfo/
(d) Les sites d’associations burkinabé
Les associations burkinabé sont de plus en plus présentes sur la toile et les sites
fleurissent, notamment ceux d’associations qui participent à la promotion des
nouvelles technologies.
http://www.yam-pukri.org (le site de l’association Yam pukri pour le développement
des NTIC au Burkina)
www.faso-ong.org/ (le site fédérateur des des ONG oeuvrant au Burkina)
www.rifod.org (le site de l’association RIFOD)
http://www.clubarobase.bf (le site du club arobase)
Emmanuel Lacroix Page 73
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
(e) La promotion des produits du Burkina : un début encourageant
(i) Une plate forme d’information : le Trade
Point
Le Trade Point du Burkina Faso (http://www.tradepoint.bf) mérite une attention
particulière. Ce site consiste en une plate-forme d’information dédiée au commerce
international impliquant le Burkina Faso. La possibilité de publier des offres d’affaires
représente un important pas en avant pour les opportunités de commerce du pays.
Le succès du trade point est cependant encore très limité et l’existence du site
semble pour l’instant symbolique. Une comparaison rapide permet de constater que
pour 13 offres apparaissant sur le Trade point du Burkina le 31 juillet 2002, 1143 sont
en ligne sur celui du Sénégal.
(ii) L’artisanat
Le Salon International de l’Artisanat de Ouagadougou (SIAO) dispose d’un site web
(www.siao.bf) qui permet une visite virtuelle du salon. Ce site existe également dans
une version en langue anglaise. Ce site permet d’assurer la promotion de l’artisanat
burkinabé partout dans le monde.
(iii) Les produits agricoles (haricots verts et
mangues)
Le Burkina Faso est un pays dont l’économie est principalement agricole. La
commercialisation des produits de l’agriculture représente donc un enjeu
économique important. Les inforoutes présentent en ce sens un potentiel indéniable.
Cet enjeu a bien été perçu par la fédération des industries agroalimentaires du
Burkina qui a mis en ligne un site vitrine de ses activités et de ses produits.
http://www.faso-ong.org/fiab/
Emmanuel Lacroix Page 74
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
(iv) Les entreprises
Les entreprises à disposer d’un site web sont peu nombreuses au Burkina. A
quelques exceptions près, seules les plus grandes entreprises sont pour l’instant
présentes sur la toile.
www.fasonet.bf/pr-prao (Site du projet de la Société des Fibres et Textiles ;
SOFITEX)
www.onatel.bf (Site de l’ONATEL)
www.fasonet.bf (Site de l’ONATEL pour la clientèle abonnée aux différents services
internet)
www.cenatrin.bf (Site du CENATRIN)
www.cenatrin.bf/sogetel (Site de la Compagnie d’électricité SOGETEL)
www.liptinfor.bf (Site de la société LIPTINFOR elle-même)
(v) Les Médias
Les médias sont de plus en plus présents sur les inforoutes, la plupart d’entre eux
possèdent un site. Notons par exemple :
www.tnb.bf (Site de la Télévision Nationale du Burkina)
www.sidwaya.bf (Site des Editions SIDWAYA)
www.aib.bf( Site de l'agence d'information du Burkina)
www.fasonet.bf/hebdo( Site de l'hebdomadaire du Burkina)
www.lobservateur.bf ( Site de l'observateur Paalga)
(vi) L’art et la culture (cinéma, lettre, …)
Le Burkina Faso est un pays particulièrement connu et reconnu pour son cinéma
mais aussi pour sa musique, ses masques et ses contes. Plusieurs sites ont été mis
en ligne afin de promouvoir et de faire vivre sur les inforoutes ces différentes facettes
de la culture burkinabé.
www.fespaco.bf (Site du Festival Panafricain de Cinéma de Ouagadougou
(FESPACO
Emmanuel Lacroix Page 75
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
www.culture.gov.bf ( Site du ministère des Arts et de la Culture)
www.museedegaoua.gov.bf ( Site du musée de Gaoua)
www.poterieduburkina.gov.bf ( Site sur la potérie au Burkina Faso)
www.museedelamusique.gov.bf ( Site du musée de la musique de Ouagadougou)
www.snc.gov.bf( Site de la semaine nationale de la culture)
http://www.bf.refer.org/texte/palabre4/index.htm (contes et légendes africaines)
(2) Les sites d’origine étrangère sur le Burkina Faso
(a) La promotion du tourisme : une affaire de « sites personnels »
Les sites qui présentent le Burkina sur un aspect touristique et à l’attention des
étrangers européens et américains sont principalement l’œuvre de ressortissants des
continents en question. Notons néanmoins que commencent à apparaître quelques
pages personnelles de burkinabé qui maîtrisent progressivement les techniques de
conception. Ces sites sont très nombreux, nous nous contenterons d’en citer
quelques uns, fréquemment présentés en « liens conseillés » sur les autres sites :
www.bobodioulasso.net (un portail humoristique sur la ville de Bobo-dioulasso
réalisé par un coopérant français).
http://membres.lycos.fr/michaud/burkina/main.htm (un site sur le Burkina réalisé par
un couple français).
http://www.vilain.de/ (un site sur le Burkina réalisé par un français)
(b) Aide au développement du commerce
Le site andines.com (http://www.andines.com), comme le site
commerceequitable.com propose la vente en ligne d’artisanat et de produits
agricoles africains. Une partie des objets proposés sont produits par des burkinabé.
Le site http://www.artisanatweb.com propose un service comparable spécialisé dans
l’artisanat.
Emmanuel Lacroix Page 76
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
(c) Organismes internationaux, gouvernements étrangers et institutions de développement
Il existe de nombreux sites d’organismes internationaux et de représentations de
pays étrangers. Citons par exemple :
http://www.bf.resafad.org/ (site du RESAFAD, réseau de formation à distance au
Burkina)
http://www.bf.refer.org/ (site de l’agence universitaire de la francophonie au Burkina
Faso)
http://www.pnud.bf/ (site du PNUD au Burkina Faso)
www.ird.bf (Site de l’IRD ex ORSTOM)
www.france-burkina.bf (ambassade de France au Burkina)
www.francophonie.gov.bf (Site de la Francophonie)
www.snvburkina.org (Organisation Néerlandaise de Développement)
www.pnud.bf ( site web du PNUD Burkina Faso)
(d) Associations
Les sites web d’associations et d’ONG au Burkina Faso sont nombreux. Voici à titre
d’illustration quelques adresses de sites d’associations et d’ONG oeuvrant au
Burkina :
http://www.edukafaso.org
http://www.france-burkina.bf/CoopDec/ONG/AOI.html (aide ondotologique
internationale)
http://membres.lycos.fr/capdeveloppement/ (site d’une association havraise de
solidarité internationale)
c) L’hébergement du web burkinabé
Il est difficile d’estimer précisément le nombre de sites hébergés au Burkina.
Effectivement, de nombreux sites apparaissent en sous-domaine et sont donc peu
visibles.
Emmanuel Lacroix Page 77
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Notons que l’hébergement de sites web au Burkina est pour l’instant très onéreux et
de mauvaise qualité, il est même rare de pouvoir accéder depuis la France à certains
sites hébergés en .bf.
Voici une illustration des prix pratiqués par l’ONATEL, ceci pour une qualité de
service que nous estimons comparable à celle de l’offre proposée à 1.5 euros
mensuel par hébergement discount, entreprise d’hébergement basée à Toulouse.
Description Désignation des frais
Prix unitaire en F CFA
H TVA TVA TTC
Formule
http://www.fasonet.bf/nom du
domaine
Mise en service 15000 2700 17700
Redevance
mensuelle par
tranche
indivisible de 5
MO
25000 4500 29500
Formule http://www.nom du
domaine.bf
Mise en service 85000 15300 100300
Redevance
mensuelle par
tranche
indivisible de 5
MO
70000 12600 82600
Formule http://www.nom du
domaine.bf ou http://www.nom du
domaine.org
Mise en service 120000 21600 141600
Redevance
mensuelle par
70000 12600 82600
Emmanuel Lacroix Page 78
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
tranche
indivisible de 5
MO
Formule site Web commercial
sécurisé http://www.nom du
domaine.bf ou http://www.nom du
domaine.com
Mise en service sur devis ! /
Redevance
mensuelle par
tranche
indivisible de 5
MO
sur devis ! /
L’entreprise Liptinfor propose pour sa part une unique offre au prix de 20 000 francs
CFA htva par mois par tranche de 5 Mo
ZCP propose enfin d’héberger un site Web pour 180 000 francs CFA par an et par
tranche de 5 Mo.
d) Un marché intérieur extrêmement limité
(1) Les coûts importants de la création Internet au Burkina Faso
(a) Les coûts pratiqués
Les coûts pratiqués en conception Internet sont difficiles à présenter de façon
catégorique et objective. Effectivement, le Burkina Faso est un pays dans lequel la
culture de la négociation des prix est très répandue. Comme, le disent fréquemment
avec humour les commerçants des marchés aux touristes intéressés : « il faut
regarder, c’est moitié cadeau, moitié pas cher ».
Emmanuel Lacroix Page 79
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Cet état d’esprit se reflète dans les prix de conception web et le premier prix annoncé
ne correspond que rarement à une juste estimation du coût estimé du travail mais
plutôt à l’approche la plus précise possible du prix que le client est prêt à payer pour
son site web.
La mise en concurrence permet de contrebalancer partiellement ce phénomène.
Mais un accord tacite entre les différents prestataires de conception web implique
qu’un organisme de coopération brassant des millions de francs CFA paiera sans le
moindre doute un site vitrine de 10 pages beaucoup plus cher qu’une entreprise dont
le directeur a une connaissance chez un prestataire de conception web.
(i) Les coûts pratiqués par Liptinfor
L’entreprise LIPTINFOR annonce sur son site, des prix de l’ordre de 50 000 francs
CFA htva par page web créée.
(ii) Les coûts pratiqués par ZCP
ZCP facture la création d’un domaine sous bf à 30 000 FCFA. La création d’un
domaine en .com ou .org coûte en revanche 90 000 FCFA. Notons que cette
opération prend au maximum une dizaine de minutes et coûte 12 euros sur le site
www.gandi.net.
Les prix pratiqués pour la conception de sites web ne sont pas annoncés par
l’entreprise sur son site.
(b) L’illustration d’un paradoxe
Nous avons constaté au cours de notre enquête un cas de figure révélateur du
paradoxe engendré par le manque de compétences : une entreprise informatique
burkinabé ne disposant pas de compétences en conception Internet, sous-traitait à
un concepteur web français le développement de contrats obtenus au Burkina Faso.
Emmanuel Lacroix Page 80
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Si l’on considère le rapport du niveau des salaires entre la France et le Burkina Faso
(salaire minimum environ 20 fois supérieur en France) et le prix de vente des sites
web également plus élevé en France, la sous-traitance d’un contrat obtenu au
Burkina Faso vers la France tient de l’aberration économique.
Dans l’absolu, cette forme de contrat est rentable puisqu’elle semble permettre à un
prestataire français de gagner une petite marge sur le contrat et à l’intermédiaire
burkinabé de conserver une commission satisfaisante.
Cependant, les sommes, rapportées au pouvoir d’achat dans chaque pays,
relativisent le constat et soulignent la nécessité de ne pas pérenniser ce type de
contrat en développant rapidement les compétences dans le pays.
(c) Les raisons des niveaux de prix pratiqués
Les coûts de la conception web au Burkina sont, nous l’avons vu, très élevés. Cela
peut s’expliquer par plusieurs facteurs :
- La rareté des compétences qui entraîne une inflation importante des devis.
- L’existence de fantasmes liés à l’Internet. Les clients sont prêts à consacrer
des sommes importantes pour être présent sur la toile, cette dernière étant
censé être porteuse d’un potentiel commercial miraculeux avec les pays
occidentaux.
- Les entreprises de conception savent qu’aucune d’entre elles n’a intérêt à
diminuer trop les prix. Un seuil plancher n’est donc jamais dépassé.
- Le matériel informatique coûte cher et doit être amorti
- Les ressources humaines capables de concevoir et de programmer des sites
sont rares et chères. Effectivement, ces personnes sont pour l’instant
majoritairement des ingénieurs et sont donc grassement payés.
Or, ces coûts élevés découragent les quelques organisations qui auraient réellement
un intérêt à diffuser de l’information sur le web.
Emmanuel Lacroix Page 81
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Penchons nous maintenant sur les structures nationales, internationales et
associatives qui encadrent et accompagnent le développement de l’internet au
Burkina Faso.
Emmanuel Lacroix Page 82
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
C. Structures nationales et actions internationales de développement
Examinons en premier lieu les structures nationales et le cadre de développement
des NTIC avant de nous pencher sur les caractéristiques du plan de développement.
11.. LL’’aaccttiioonn dduu ggoouuvveerrnneemmeenntt,, lleess ssttrruuccttuurreess dd’’eennccaaddrreemmeenntt
mmiisseess eenn ppllaaccee eett llee ppllaann ddee ddéévveellooppppeemmeenntt nnaattiioonnaall
a) Les organes et les cadres qui structurent l’internet au Burkina
Faso
(1) Le Conseil Supérieur à l‘Informatique du Faso
Le Conseil Supérieur à l’Informatique du Faso (CSIF) a été créé en 1997. Il est
présidé par le Chef du gouvernement, ses missions sont les suivantes :
- Définir et proposer au gouvernement les grandes lignes de la politique
nationale informatique en rapport avec les plans de développement
- Examiner les plans et les programmes informatiques
- Recommander tous projets, études et programmes dans les domaines
informatique et les disciplines connexes
- Préconiser toute mesure propre pour la maîtrise et la promotion de
l’informatique.
(2) La Délégation Générale à l’Informatique (DELGI)
La Délégation Générale à l’Informatique (DELGI) a été créée en 1997. C’est un
organe public d’aide à la décision, d’exécution et de contrôle de la politique
informatique de l’État. Son délégué général, actuellement Johachim Tokoano, est
nommé en Conseil des Ministres. La DELGI est rattachée au Premier Ministre. Ses
missions sont les suivantes :
- Planification, réglementation et contrôle de l’informatique
- Planification et suivi de la formation et de la recherche en informatique
Emmanuel Lacroix Page 83
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
- Délivrance des agréments pour la fourniture d’équipements et de services
informatiques
- Tutelle technique des centres de traitement informatique, des centres de
formation informatique et de toutes autres structures publiques dont l’activité
entre dans le cadre de ses attributions
- Supervision et validation des schémas directeurs informatiques des ministères
et établissements publics
- Promotion et vulgarisation de l’outil informatique
- Donner son avis sur tout marché informatique de l’état e de ses
démembrements
(3) Les ateliers
Des ateliers nationaux ont été lancés en 1996 et 1997 dans l’objectif d’engager des
réflexions sur le développement des nouvelles technologies au Burkina Faso. De
nombreuses pistes de développement sont issues de ces ateliers.
(4) Le cadre de référence pour le développement des TIC
Un cadre de référence a été défini afin d’assurer un développement global et
cohérent des TIC. Il a été approuvé par le Conseil Supérieur de l’Informatique du
Faso le 23 avril 1998.
Il poursuit les objectifs suivants :
- créer les conditions pour la bonne gouvernance en réduisant les charges et en
améliorant la circulation de l’information, la productivité, la qualité des services
et la pertinence des prises de décision ;
- aider le pays à développer les avantages concurrentiels qui vont lui permettre
de tirer le meilleur parti de la mondialisation, à travers une parfaite maîtrise et
une utilisation optimale des nouvelles technologies de l’information et de la
communication ;
Emmanuel Lacroix Page 84
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
- garantir la rationalisation des efforts à consentir, un développement
conséquent des ressources humaines requises et la cohérence du cadre
institutionnel et de l’infrastructure nationale à mettre en place.
Ces intentions ont été traduites par quatre programmes sectoriels :
- La modernisation de l’administration
- La facilitation du commerce
- L’appui à l’éducation et à la recherche
- Le développement de centres communautaires
Et quatre programmes fédérateurs :
- La mise en place d’une infrastructure nationale de communication
- La sensibilisation et la formation
- Les choix technologiques
- L’organisation du secteur
(5) ONATEL/FASONET
L’Office National des Télécommunications (ONATEL) a été créé le 19 février 1987
sous la forme juridique d’un établissement public à caractère industriel et commercial
(EPIC), il a ensuite été transformé en novembre 1994 en société d’Etat. Ses
missions étaient à sa création les suivantes ; elles sont restées approximativement
les mêmes :
- La mise en place et l’exploitation rationnelle et efficace du service public des
télécommunications.
- L’application de la réglementation et de la législation en matière de
télécommunications, notamment les accords, les conventions et les règlements
adoptés par les organisations internationales des télécommunications dons le
Burkina Faso est membre.
- La préparation et l’exécution des plans et programmes de développement du
réseau national et international en vue de la desserte progressive, totale et
conséquente du pays en services de télécommunications.
- L’offre de services de qualité, au plus grand nombre sous la contrainte d’un
équilibre financier.
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
(6) Le Centre National de Traitement de l’Information (CENATRIN)
Le Centre National de Traitement de l’Information (CENATRIN) a été créé au début
des années 70. Son avènement correspond à l’introduction de l’informatique au
Burkina Faso.
(a) Les missions du CENATRIN à sa création
Le CENATRIN était à sa création, un Etablissement Public à Caractère Industriel et
Commercial (EPIC), ses missions traduisaient une volonté d’optimiser l’utilisation du
matériel et la gestion des ressources humaines, toutes deux très rares à l’époque
dans le secteur informatique :
- L’acquisition et la gestion de centres informatiques
- La réalisation de tous travaux nécessaires au traitement de l’information
commandés par les services de l’Etat, les collectivités locales, les entreprises
et organismes publics, parapublics et privés.
- L’unification et la standardisation des moyens et des méthodes de saisie et
d’exploitation des données.
- La formation professionnelle du personnel informaticien en fonction de ses
propres besoins et de ceux des services utilisateurs des techniques de
l’informatique.
- L’initiation et la formation professionnelle aux techniques de l’informatique, du
personnel non informaticien des services utilisateurs des techniques de
l’informatique.
- L’information du public sur les techniques de l’informatique et sur les nouvelles
méthodes de gestion qu’elles permettent.
- La collecte de toute information nécessaire à la définition d’une politique de
l’informatique et la mise en œuvre de la politique arrêtée par le gouvernement.
De sa création en 1970 jusqu’à l’avènement de la micro-informatique à la fin des
années 80, le CENATRIN a assuré le développement d’applications informatiques
pour les principaux services de l’Etat.
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Au début des années 90, l’évolution du matériel et de l’informatique personnelle a
conduit l’Etat burkinabé à modifier son approche et à adopter le premier plan
directeur informatique national. La politique de centralisation des traitements
informatiques autours du CENATRIN a été abandonné au profit d’une politique de
rapprochement de l’outil informatique de l’utilisateur final.
(b) Les missions du CENATRIN depuis 1994
La nouvelle orientation a conduit à une redéfinition des missions du CENATRIN qui a
été transformé en 1994 en Société d’Etat. Les nouvelles missions du CENATRIN
sont les suivantes :
- La conception et / ou la commercialisation de solutions adaptées aux besoins
locaux basés sur une utilisation optimale des Nouvelles Technologies de
l’Information et de la Communication (NTIC).
- La fabrication, le montage et / ou la commercialisation d’appareillages
informatiques adaptés aux conditions locales d’utilisation.
- La réalisation de tous travaux nécessaires aux traitements de l’information
(développement de logiciels spécifiques, installation de réseaux locaux,
installation de systèmes, gestion de centres informatiques, maintenance et
dépannage d’appareillages informatiques), commandés par les services de
l’Etat, les collectivités locales, les entreprises et organismes publics,
parapublics et privés.
- La formation des utilisateurs.
- Le recyclage et le perfectionnement des informaticiens.
Le CENATRIN dispose d’un siège à Ouagadougou et d’un bureau à Bobo-dioulasso.
b) Caractéristiques du plan de développement des NTIC
Le gouvernement burkinabé a défini dans le plan quinquennal de 2000-2005, les
orientations générales de sa politique de développement humain durable. Le
gouvernement y a intégré l’usage des nouvelles technologies de la communication
(NTIC).
Emmanuel Lacroix Page 87
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Selon Charlemagne Zannou42, la stratégie de développement des NTIC peut être
caractérisée par trois éléments :
(1) Le développement de l’internet en adéquation avec la politique nationale de développement humain durable
La stratégie de développement des NTIC reflète le souhait de l’Etat burkinabé de
donner une priorité au développement humain tel qu’il est définit par le PNUD.
(a) Le développement de l'infrastructure de base et l’ouverture du secteur de la télécommunication aux opérateurs privés
La loi du 23 décembre 1998 organise la fin de trente années de monopole de
l’ONATEL. Des opérateurs privés ont déjà fait leur entrée sur le marché des
télécommunications. La concurrence devrait favoriser l’émergence d’un service plus
efficace et moins onéreux.
(b) La modernisation de l'Administration publique et l'interconnexion des différents services ministériels et des représentations Burkinabé à l'étranger
Un Intranet sécurisé administratif (RESINA) est en cours de réalisation. Le réseau
ainsi créé devrait permettre un meilleur accès à l’information dans l’ensemble des
services de l’Etat, notamment pour les services décentralisés.
La DELGI, noyau central de ce réseau, offrira un accès à l’internet aux services
publics.
(c) L'intégration sous-régionale et le renforcement de la coopération internationale
La compétitivité du Burkina Faso au sein de l'union économique et monétaire ouest
africain (UEMOA) passe par un renforcement de ses infrastructures de
42 Charlemagne Zannou, RIFOD, L’Internet au Burkina Faso, www.anais.org, 2000
Emmanuel Lacroix Page 88
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
télécommunications de base et son accessibilité par toutes les populations y compris
celles des zones rurales.
Il est, dans cette logique, prévu l'installation de points d'accès de proximité répartis
sur le territoire national en vue de développer la communication des populations
avec l'international.
Le gouvernement a parallèlement attiré l’attention de ses consuls et ambassadeurs
sur l’internet comme moyen de communication international. Ceci en vue d’améliorer
la communication auprès des partenaires internationaux et des représentations à
l’étranger.
(d) Le renforcement de l'état de droit et l'amélioration du débat politique
Le gouvernement souhaite développer des sites web d’information sur les
procédures administratives, appels d’offres… Ces sites permettront de renforcer
l’implication des citoyens dans la politique en leur donnant une information plus
limpide. Ceci dans l’objectif de renforcer l’état de droit et la démocratie.
(2) Une stratégie de développement des NTIC trop centralisée et orientée vers l’administration publique
Les bases de la politique nationale, jetées en 1996-97, insistaient fortement sur le
rôle central du DELGI. Cette centralisation n’est plus adaptée en 2002. Trop lourde,
la politique n’implique pas suffisamment le privé. Les choix stratégiques sont ensuite
inadaptés car ils ne sont pas orientés vers des outils gratuits tels que les logiciels
libres. Enfin, l’absence de sensibilisation du public burkinabé aux nouveaux outils de
communication ne permet pas aux acteurs économiques du pays de comprendre les
enjeux de sa maîtrise.
Emmanuel Lacroix Page 89
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
(3) L’implication de l’Etat dans les services de télécommunications classiques et dans l’accès à Internet
En 1999, les recettes téléphoniques de l’ONATEL avoisinaient cinq cent millions de
francs CFA. Dans le même temps, les recettes des services Internet (connexion,
abonnement, etc.) étaient estimées à plus de quatre milliard de francs CFA. Ce
chiffre explique à lui seul le manque d’empressement de l’Etat à privatiser l’opérateur
national.
Les investissements initiaux de l’ONATEL et la création du 1150, service de
connexion au prix d’une communication locale partout sur le territoire, ont facilité
l’implantation de l’internet au Burkina Faso. Mais cela a également donné naissance
à une hégémonie et a instauré un environnement de concurrence déloyale puisque
seul l’ONATEL fourni un accès à l’internet via ce tarif local partout dans le pays. Cet
environnement handicape beaucoup le développement des services internet dans
les villes secondaires. Ces dernières ne peuvent pas profiter des services des
concurrents de l’ONATEL et la volonté politique semble faire défaut pour corriger
cette situation inéquitable.
Le Burkina Faso fait figure de retardataire dans la sous région puisque tous ces
principaux voisins ont donné aux entreprises les moyens de développer un service
rentable d’accès à l’internet. En moyenne chacun de ces pays possède ainsi une
dizaine de FAI.
Observons maintenant les actions internationales qui favorisent le développement
des NTIC au Burkina Faso.
Emmanuel Lacroix Page 90
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
22.. LLeess aaccttiioonnss ddee ccooooppéérraattiioonn ddeess EEttaattss,, ddeess ccoommmmuunnaauuttééss eett
ddeess iinnssttiittuuttiioonnss ddee BBrreettttoonn WWooooddss
a) L’action de la Francophonie et de l’Etat français
(1) REFER
Depuis 1994, l’AUPELF (Association des Universités partiellement ou totalement de
langue française) a mis en œuvre le projet REFER (Réseau Francophone de
l’Education et de la Recherche) afin de faire face à l'explosion d'information
numérique et créer un réseau d'information scientifique et technique universitaire
entre les pays du Nord et du Sud. Cela s'est notamment traduit par des accords de
recherche (groupes de travail), des bourses et l’édition d'ouvrages (le catalogue des
publications est présent sur http://www.auf.org/catalogue/).
(2) SYFED
Un deuxième organisme, le Système Francophone d'Edition et de Diffusion (SYFED)
a pour objectif de mettre à la disposition des universités une documentation
scientifique et technique multi-support en français (support papier, CD-Rom...)
susceptible de palier au peu de ressources informationnelles auquel sont souvent
confrontées les universités francophones.
L'AUPELF-UREF (ancien nom de l'AUF) voulait susciter et participer au démarrage
d'intranet et de réseaux universitaires dans les universités partenaires en organisant
notamment de nombreuses formations dans le centre SYFED. Un soutien fort aux
actions de formations de formateurs est parallèlement mené et des tentatives visant
à rendre efficiente la formation à distance sont menées.
(3) Le RESAFAD
Le Réseau Africain de Formation à Distance (RESAFAD) est une initiative de la
coopération française dont l’objet est de faire émerger des compétences en Afrique
en profitant des potentialités des TIC tout en affermissant la présence francophone
sur le continent.
Emmanuel Lacroix Page 91
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
L'objectif du centre de ressources RESAFAD au Burkina Faso est de relayer les
actions du réseau, de former aux NTIC, de faciliter l'accès à des ressources
techniques et formatives, de dynamiser les échanges au sujet des NTIC pour la
formation et l'éducation.
Le RESAFAD agit au Burkina Faso depuis 1997. Le réseau a lancé de nombreuses
actions, citons notamment :
- La formation à distance de directeurs d'écoles dans le cadre du projet d’appui à
l’enseignement de base de la coopération française. Un CD-ROM élaboré par
un consortium de formateurs d'universités françaises est utilisé pour la
formation.
- Le cycle de formation aux services accessibles sur Internet destiné en priorité
aux cadres du secteur de l’éducation.
- Le Séminaire Interactif des Responsables de Planification (SIRP), dont
l'objectif était de permettre une communication régulière entre des
planificateurs africains de l'Education.
- Le lancement du Diplôme d’Université de Communicateur Multimédia évoqué
précédemment. Ce dernier a été expérimenté auprès de treize inscrits en
1999-2000.
- Enfin, dans le cadre du programme Supports Médiatisés pour la Formation
(SUMEF), cinq projets de réalisation de multimédia à caractère éducatif ont été
identifiés. Quatre ont été poursuivis.
(4) Centre de formation au multimédia
L'Agence de la Francophonie a de son côté financé le centre de formation au
multimédia du Centre Interafricain d'Etudes en Radio Rurale de Ouagadougou
(CIERRO).
(5) Le P@je
L'Agence Universitaire de la Francophonie (AUF) a lancé en 1999 le programme
"Campus numériques francophones", une initiative qui a permis d'ouvrir dans vingt
pays du Sud entre 300 et 500 accès à Internet et près de 10 000 messageries.
Emmanuel Lacroix Page 92
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Le programme P@je a financé l'implantation de 4 "Points d'accès à Internet pour la
jeunesse" au Burkina Faso. Deux à Ouaga et deux en province (Tenkodogo et
Koudougou).
Le programme consiste à sélectionner sur dossiers des structures développant des
activités destinées à la jeunesse et possédant une structure susceptible d'offrir les
conditions optimum de fonctionnement pour un lieu d'accès à l’internet réservé aux
jeunes. Dans l’esprit du programme les jeunes doivent pourvoir accéder à Internet,
mais aussi souvent faire leur première rencontre avec l'outil informatique, à des coûts
compatibles avec leur pouvoir d'achat.
L'INTIF finance les coûts d'acquisition de 5 PC et des périphériques, la mise en
réseau des appareils, l'abonnement chez un FAI et les frais de connexion pour les 2
premières années de fonctionnement. Les structures étant censées réunir les
conditions pour autofinancer le fonctionnement du P@je à terme.
La situation par rapport à l’internet ayant considérablement évolué au Burkina
comme dans la majorité des pays, depuis 1999, année de la 1ère implantation à
Ouaga, les points d'accès publics ou privés se sont multipliés, les coûts de
connexion sont très variables selon l'option technique retenue. La situation, du moins
dans les grandes villes, s'est inversée, c'est-à-dire que les jeunes trouvent des
conditions d'accès plus économiques et plus confortables dans des cyber
commerciaux fonctionnant sur LS ou autres systèmes que dans les PAJE en RTC
avec des coûts de connexion téléphonique élevés et un débit lent.
(6) Fragments du monde
L’agence intergouvernementale pour la Francophonie, le fond Francophone des
inforoutes, le ministère de la jeunesse et des sports, celui de la culture et celui des
affaires étrangères ont par ailleurs apporté les fonds nécessaires au projet
Fragments du monde lancé à l’initiative de VECAM et de l’Institut National de la
Jeunesse et de l’éducation Populaire. Fragments du monde est un programme qui
consiste à permettre à des jeunes du monde d’utiliser Internet pour présenter un
Emmanuel Lacroix Page 93
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
fragment de la culture de leur pays. Tous les fragments sont ensuite réunis pour
former un atlas culturel du monde43.
Au Burkina Faso, des jeunes ont réalisés un site sur le « faux départ du
Mogho Naaba». Le Mogho Naaba est l’empereur Mossi. Une cérémonie mimant un
départ à cheval avorté a lieu dans la cour de son palais chaque vendredi. La
cérémonie commémore le départ raté d’un empereur Mossi qui comptait rejoindre et
punir son frère qui avait fui avec les fétiches sacrés, mais l’entourage de l’empereur
l’avait finalement persuadé d’annuler son projet, qui n’était pas souhaitable pour le
peuple Mossi.
(7) Université virtuelle Francophone
L'université Virtuelle Francophone (UVF) a été lancée officiellement en 1998 à
l'initiative de l'organisation internationale de la Francophonie.
b) La coopération néerlandaise
La coopération néerlandaise est particulièrement impliquée dans le développement
des NTIC au Burkina Faso. Elle a déjà conduit de février 1999 à février 2001 un
programme44 financé par L’IICD et Média Plaza qui a permis d’introduire les TIC
dans les boutiques d'informations et a abouti selon la SNV à :
- « l'utilisation des applications et produits multimédias dans le travail
d’information et de concertation des boutiques.
- l'utilisation d'Internet pour la recherche d’information pour les populations.
- La généralisation des échanges e-mails pour les contacts avec les boutiques
ainsi que la participation à des réseaux concernant la décentralisation et la
gestion des ressources naturelles ».
« Depuis janvier 2001, la SNV/BF appuie les initiatives en matière d'appropriation
des TIC des organisations intervenant dans les départements des boutiques
d'information .
43 http://www.fragmentsdumonde.org 44 http://www.snvburkina.org/
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
- Mise en place, en partenariat avec le PNUD, d’une radio communautaire à
Tansila intégrant les possibilités des satellites Worldspace (captage de
données audio et numérique sur radio numérique et ordinateur).
- Création d'un centre multimédia communal à Koloko : le projet est formulé
depuis Août 2001 et une requête de financement a été envoyée aux bailleurs
de fonds.
- Appui à la commune de Orodara pour la formulation du projet de création d'un
centre multimédia communal.
Enfin dans le cadre du renforcement des capacités, les organisations bénéficient
d'appui à la réalisation de bases de données afin d'améliorer la gestion de leurs
activités ».
c) Le CNUCED et le Trade Point
Le CNUCED a lancé en 1992 le programme Trade Point qui prévoyait la mise en
place à d’un système d’information et d’échanges sécurisés.
Le Trade Point du Burkina Faso est hébergé au sein de l’Office National du
Commerce Extérieur (ONAC). Ses objectifs sont :
- Faciliter l’activité commerciale en mettant l’information sur la réglementation à
la disposition de tous les acteurs économiques.
- Mettre le potentiel offert par l’Internet à la disposition des acteurs économiques
bukinabé afin de leur permettre de saisir toutes les opportunités offertes par la
mondialisation.
- Créer un cadre réglementaire favorable à la dématérialisation des procédures
de façon à favoriser le commerce électronique.
d) La Banque mondiale
(1) AfricaLink
Le programme AfricaLink mis en place par la Banque Mondiale doit permettre de
connecter plusieurs centres de l'Institut de l'Environnement et de la Recherche
Agricole (INERA) à la messagerie électronique, notamment ceux situés dans l'arrière
pays.
Emmanuel Lacroix Page 95
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Le projet de Système d'Information et de Suivi de l'Environnement sur Internet
(SISEI) bénéficie de l'assistance de l'UNITAR (United Nations Institute for Training
and Research). Le SISEI-Burkina Faso consiste en une base de données sur
l'environnement au Burkina Faso, conçue et alimentée par toutes les institutions
intervenant dans le domaine.
(2) Université virtuelle Africaine
L'Université Virtuelle Africaine (UVA) a été lancée à l'initiative de la Banque Mondiale
en 1997.
e) Le PNUD : Initiative Internet pour l'Afrique (IIA) /Réseau de
Développement Durable (RDD)
Le projet Réseau Développement Durable (RDD) initié par le PNUD en 1991,
s'appuie sur différentes institutions dans le cadre du projet régional "Initiative Internet
pour l'Afrique" (IIA). Au Burkina Faso, il prévoit l'accroissement de la capacité du
noeud national avec un doublement du débit actuel ainsi que la décentralisation des
accès par la mise en place de cinq noeuds locaux, dont ceux de Bobo-Dioulasso et
de Koudougou.
f) L’UNESCO et le CRDI : projet de télécentres
communautaires polyvalents d’appui au développement humain
durable (TPC)
Ce projet vise l’implantation de télécentres communautaires polyvalents en zones
rurales. Ces centres assureront un accès aux nouveaux outils de communication
dans des endroits habituellement peu desservis. Placé sous l’égide de la DELGI, le
projet prévoit l’ouverture de 50 centres en zones rurales et la création de supports
multimédias permettant l’auto-formation. Le projet est co-financé par l’UNESCO et
par le CRDI.
Emmanuel Lacroix Page 96
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
g) La FAO et le projet de télécentres communautaires
polyvalents à BOUGNOUNOU
La FAO a lancé un programme de mise en place de télécentres communautaires
polyvalents dont l’objectif est triple :
- Assurer des services de communication sur des thèmes spécifiques tels que
l’éducation des filles, la santé ou la gestion des ressources naturelles ;
- Assurer, pour les populations rurales de Bougnounou, un accès aux
informations agro-météorologiques et environnementales et aux informations
sur le marché et les produits ;
- Former des acteurs du développement rural par le biais de supports
multimédias ;
h) L’IICD et l’Intranet FIAB
Le soutien économique de l’Institution Internationale pour l’Information de la
Communication pour le Développement (IICD) a permis à la Fédération Nationale
des Industries Agroalimentaire du Burkina (FIAB) de développer un réseau Intranet
qui facilite la transmission d’informations entre les différents opérateurs de la
fédération.
i) Le projet Inforoute Communale
L’Inforoute Communale du Burkina Faso est un carrefour d'échange d'informations
au profit du processus de décentralisation, des communes et de l'administration.
Les objectifs du projet sont les suivants :
- Permettre aux gestionnaires des mairies de bénéficier d’outils de gestion en
vue de l’amélioration de la gestion financière et administrative des communes.
- Donner aux organismes de tutelle, des outils d’aide à la décision afin de
permettre un meilleur accompagnement des compétences administratives et
financières des communes.
- Mettre en relation les communes par le biais des NTIC afin qu’elles puissent
offrir des services d’état civils décentralisés
- Permettre aux acteurs clés de disposer d’information permettant d’affiner des
actions stratégiques en matière de développement et de décentralisation
Emmanuel Lacroix Page 97
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
- Assurer la pérennité et la consolidation future du projet d’Inforoute communale.
j) Divers
Le Burkina Faso est engagé dans plusieurs autres programmes sous-régionaux,
notamment :
- le Programme de lutte contre le Sida en Afrique Francophone qui utilise
l'internet pour connecter entre eux les chercheurs sur le Sida ;
- Le Connectivity Information and Training Centre for Internet (CITI) sous l'égide
de l'UNITAR doit permettre de former des techniciens pour fournir des services
internet aux organisations publiques et privées.
Observons enfin l’action associative dans le domaine des NTIC. De très nombreuses
associations et ONG oeuvrent pour le développement des nouvelles technologies au
Burkina Faso, nous ne pourrons donc pas être exhaustifs. Le milieu associatif est
extrêmement hétérogène et certaines associations comme RENER pèsent beaucoup
dans l’internet burkinabé.
33.. IInniittiiaattiivveess ddeess aassssoocciiaattiioonnss
a) L’association RENER
L’association RENER vise la promotion des technologies de l’information et de la
communication comme pilier du développement de l’éducation et de la recherche au
Burkina Faso.
L’association regroupe les principaux acteurs des NTIC au Burkina : le Conseil
Africain et Malgache pour l'Enseignement Supérieur (CAMES), le Centre National de
la Recherche Scientifique et Technologique (CNRST), le Centre SYFED, l'Ecole
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Inter-Etats des Ingénieurs de l'Equipement Rural (EIER), l'ORSTOM, le Réseau
Africain de Formation à Distance (RESAFAD) et l'Université de Ouagadougou et
prochainement le Centre International de Recherche en Agronomie pour le
Développement (CIRAD).
L’action de l’association se traduit notamment par le développement du réseau
RENER, réseau de la recherche déjà évoqué précédemment. Chaque membre de
l’association est responsable de la mise en place et de la gestion de son réseau
local.
b) Réseau d’Information et de Formation sur le Développement
(RIFOD)
Le RIFOD45 est une Organisation Non Gouvernementale (ONG), son action se
concentre sur les objectifs suivants :
- Informer sur le potentiel du Burkina Faso en matière de nouvelles technologies
de l’information ;
- Communiquer sur des thématiques prioritaires liées au développement
durable.
- Organiser des formations sur place ou à distance sur les NTIC.
c) Yam Pukri
L’association Yam Pukri est une initiative de Sylvestre Ouédraogo, enseignant-
chercheur de l’Université de Ouagadougou. Elle regroupe des burkinabé qui
souhaitent promouvoir l’internet dans leur pays.
Yam Pukri46 signifie en français « éveil de l'intelligence ». L’association intervient
dans les domaines suivants :
- Formation en informatique et en Internet pour le public jeune de préférence ;
- Formation en pages web ;
- Formation en maintenance informatique ;
- Vulgarisation des nouvelles technologies ;
- Création et gestion de cybercentres (3 sont fonctionnels).
45 www.rifod.org 46 www.yam-pukri.org
Emmanuel Lacroix Page 99
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Yam Pukri a notamment ouvert le centre Yam-net qui tient lieu de Centre de
Formation et de cybercentre avec une douze ordinateurs connectés à Internet.
Le centre comprend 2 salles de formations équipées d'une dizaine de machines
chacune.
Le cybercentre est ouvert à tous. Il est surtout fréquenté par des étudiants et des
élèves (40%). L’association souligne que c’est la messagerie électronique qui attire
le plus d’utilisateurs. Le cybercentre accueille en moyenne une vingtaine de
personnes par jour.
d) NTBF
L’association Nouvelles Technologies au Burkina Faso (NTBF) a été créée dans
l’objectif de promouvoir l’utilisation des nouvelles technologies et des logiciels libres.
L’association est présidée en France par Younoussa Sanfo et au Burkina par WEPIA
Korabié. Elle regroupe en majorité des personnes qui, à l’image du président français
de l’association, sont déjà impliquées à titre personnel dans l’animation de sites web
sur le Burkina.
L’association a organisé en 2002 le séjour de 5 mois d’un étudiant en informatique
français qui a assuré de nombreuses formations à la conception multimédia.
e) RECIF / ONG-BF
Les femmes représentent environ 52% de la population du Burkina Faso et jouent un
rôle socio-économique important dans la société. Elles sont non seulement souvent
piliers de l’économie notamment informelle et relais d’information pour l’éducation,
l’hygiène et la santé.
L’enjeu de la participation des femmes à la croissance est donc majeur. Or, les
facteurs socioculturels limitent fortement l’accès des femmes au savoir-faire
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
technique47. Un accès à l’information en général et aux NTIC en particulier doit leur
être ménagé afin de leur assurer une place dans la société de l’information.
C’est cette question qui a conduit le RECIF à agir en multipliant les initiatives en
faveur d’une meilleure connaissance des pratiques d’utilisation d’Internet par les
femmes48.
f) Le club@
Le club est une Association pour la promotion des NTIC dans les médias.
Les objectifs de l’association sont les suivants49 :
- Créer sur la problématique des nouvelles technologies de l'information et de la
communication (NTIC) pour les professionnels des médias un cadre convivial
d'échange d'idées
- Former les professionnels des médias à l'utilisation des NTIC ;
- Informer et sensibiliser les professionnels des médias sur les enjeux des NTIC
au plan national et international ;
- Inciter les professionnels des médias à sensibiliser les usagers sur les enjeux
des NTIC par la production d'articles et d'émissions sur le sujet ;
- Participer à des opérations d'information et de sensibilisation sur les NTIC au
niveau national et international ;
- Etablir des partenariats avec les opérateurs nationaux et internationaux en
matière de NTIC.
Le Club@ a organisé récemment une journée de formation sur les nouvelles
technologies de l'information et de la communication, avec l'appui de l'IICD, l'institut
pour la communication et le développement.
47 RECIF, Aicha Tamboura, Les femmes et les technologies de l’information et de la communication au Burkina Faso, www.anais.org, Ouagadougou, 2000 48 Olivier Barlet, Entretien avec Aicha Tamboura, Une utilisation africaine des nouvelels technologies entre les associations féminines, www.africultures.com, 1999 49 www.clubarobase.bf
Emmanuel Lacroix Page 101
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
g) Réseau Girafe-info
Le réseau Girafe-info agit en faveur de la création d’un contenu burkinabé sur le
web. Il a réalisé dans ce cadre une dizaine de sites web en relation avec le Burkina
Faso. Il effectue également des formations à la conception web, à la bureautique et à
l’administration réseau. Trois formations ont eu lieu dans ce cadre.
Après cet aperçu de la situation de l’internet au Burkina Faso en 2002, nous allons
maintenant nous pencher sur les enjeux qui accompagnent le développement de
l’internet dans ce pays et en Afrique Francophone d’une façon plus générale. Nous
examinerons auparavant les difficultés posées par la culture orale africaine dans le
développement de l’internet et nous observerons les incidences socioculturelles des
contraintes liées à l’utilisation des nouveaux outils de télécommunications.
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
II. Entre culture orale et nécessité
d’une maîtrise des nouvelles formes de
l’information : incidences et enjeux de
l’internet en Afrique Francophone
Le continent africain est fréquemment présenté comme celui de l’oralité. Nous
examinerons donc en premier lieu cette culture orale et les antagonismes qui
l’oppose à l’appropriation des médias écrits et virtuels.
A. Culture orale et médias La culture orale supposée de l’Afrique va dans le sens du développement de la radio,
média qui semble particulièrement adapté à ce continent. Observons la situation de
celle-ci au Burkina Faso avant d’en décortiquer les spécificités afin de comprendre
les atouts que présente la radio en Afrique.
11.. LLaa rraaddiioo :: mmooyyeenn ddee ccoommmmuunniiccaattiioonn aaddaappttéé àà ll’’AAffrriiqquuee
a) Aperçu de la radio au Burkina
(1) Radios internationales
Le paysage radiophonique au Burkina n'est pas tellement différent de celui de ses
voisins.
Les radios internationales telles que Africa numéro 1, RFI (Radio France
Internationale) ou encore la Deutsche Welle doivent actuellement compter avec la
concurrence des chaînes gérées par l’Etat ainsi que les chaînes commerciales qui
ont un taux d'écoute significatif.
Emmanuel Lacroix Page 103
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
(2) Radios gérées par l’Etat
A côté des chaînes nationales et régionales (Radio Rurale, Radio Arc-En-Ciel,
Radio-Arc-En-Ciel Plus, Radio Bobo, Radio Gaoua), démembrements de la Radio
Nationale du Burkina, existent des radios locales mises en place par l'Etat et gérées
par les communautés locales (les radios de Diapaga, Djibasso, Gassan, Kongoussi,
Orodara et Poura).
(3) Radios commerciales
Les nombreuses radios FM commerciales sont principalement implantées dans la
capitale et dans quelques centres urbains de l'intérieur à côté des radios
confessionnelles. La première radio indépendante de l'Afrique noire francophone a
commencé à émettre en décembre 1990. Horizon-FM était la pionnière du nouveau
paysage médiatique qui commence à se dessiner en Afrique occidentale. Le succès
d’Horizon-FM Ouagadougou fut tel que son initiateur, Moustapha Thiambiano, mit
rapidement deux autres stations en service : Horizon-FM Ouahigouya en novembre
1992 et Horizon-FM Koudougou en janvier 1993.
Fort de cet exemple, les initiatives se sont ensuite multipliées, citons notamment
Radio Pulsar, Radio Savane, ou encore radio de l'Amitié.
(4) Radios associatives
Il existe enfin des radios associatives souvent localisées dans les zones rurales, à
l'initiative des associations ou ONG. Citons notamment Radio Salankoloto, La Voix
du Paysan ou encore Radio Kakoadb Yam Venegré.
(5) Radios confessionnelles
Les radios confessionnelles se sont également multipliées avec notamment les
chaînes suivantes : Radio Évangile Développement, Radio Maria, Radio Lumière
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Vie Développement, Radio Alliance Chrétienne (Bobo), Radio Évangile du Sud
Ouest (RESO) (Gaoua), Radio Notre Dame du Sahel (Ouahigouya)50.
b) Un média transportable et qui permet une autre activité
Jean-Paul Cluzel, président de Radio France Internationale (RFI) s’exprimant sur le
site Afrik.com51, évoquait la position de la radio en Afrique :
« On ne remplacera jamais la radio par Internet. Pour une raison bien simple :
la radio est le seul média dont on puisse bénéficier en faisant autre chose. On
écoute la radio en travaillant, en préparant la cuisine, en conduisant, ce que
vous ne pouvez pas faire en regardant la télévision ou en surfant sur Internet.
Le média radio est donc absolument spécifique. Autant je suis persuadé qu'il y
aura de profondes conséquences pour la télévision du développement
d'Internet en Afrique, et dans le reste du monde, autant la radio, sans négliger
l'importance du web, devra rester spécifique. Elle passe par la parole, par le
son. C'est un média mobile. »
Cette observation, même si elle reflète la position logique du responsable d’une
grande radio en Afrique, souligne néanmoins les réels avantages de ce média.
Jacques Barrat, dans Géographie économique des médias52, confirme cette
supériorité de la radio sur le continent africain. Il souligne que ce média est
totalement adapté à ces zones dont les économies sont restées traditionnelles. Le
transistor en particulier possède l’immense avantage de ne pas nécessiter
d’équipement électrique.
Il réaffirme par ailleurs les avantages de la radio en déclarant « l’avantage de la radio
demeure bien évidemment le fait qu’elle est facilement transportable, qu’elle permet
le maintien d’activités parallèlement à son écoute et qu’enfin, à tord ou à raison, elle
apparaît plus libre, plus directe et plus spontanée que le média télévision ».
50 http://www.cnpress-zongo.net/ 51 Olivia Marsaud, interview de Jean-paul Cluzel, Internet ne remplacera pas la radio, www.afrik.com, 31 janvier 2001 52 BARRAT Jacques, Géographie économique des médias, éditions LITEC, 1992
Emmanuel Lacroix Page 105
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Revenant plus spécifiquement sur l’adaptation du média au continent africain, il
ajoute « la radio, média roi, a encore de belles perspectives devant elle. D’abord
parce que la télévision, lorsqu’elle existe, est souvent très coûteuse et encore
réservée à une minorité de privilégiés ou à une élite. Enfin et surtout parce que les
possibilités de décentralisation de la radio lui permettent de toucher des publics très
spécifiques dans des langues régionales ou locales ».
c) Un média de culture « orale »
Le malien Amadou Hampaté Bah, ancien membre du conseil exécutif de l’UNESCO,
avait coutume de dire qu’en "Afrique, un vieillard qui meurt est comme une
bibliothèque qui brûle". Cette phrase reflète l’importance considérable de l’oralité en
Afrique. Cette dernière réside dans le fait que presque tout le patrimoine culturel
africain est mémorisé sous la forme orale. Traditions, secrets, contes, histoires, toute
la culture africaine circule par ce biais depuis plusieurs milliers d’années.
Dans la tradition africaine, la parole, cadeau des dieux, est sacrée et possède une
force magique. Le griot est le personnage clé de la diffusion de la culture par la
parole et par le chant. Le mot " griot " vient d'une incompréhension des
Occidentaux. Les colons ont comparé le griot malien au crieur public portugais, le
criado. Puis ils ont francisé criado en griot.
Bakary Soumano, chef des griots de Bamako, déclarait récemment que « le bon
griot est le gardien des traditions, le garant des coutumes, le dépositaire de la
mémoire collective, un rempart contre toute forme d'acculturation ». Grâce à l'action
des griots, qui profitent de tous les grands rassemblements (mariages, baptêmes,
enterrements…) pour ranimer la mémoire des ancêtres, les africains sont imprégnés
de cette culture. Tous les enfant connaissent l'histoire de leur famille, de leurs
ancêtres et la signification de leur nom. Les burkinabé s'adonnent également aux
« parentés à plaisanterie » qui lient des clans, ethnies, contrées, corps de métier
différents. C'est d'ailleurs cet humour au service de la paix sociale qui a contribué à
préserver le Burkina des guerres claniques ou ethniques53.
53 Le Mali des talents, guide touristique et culturel. Cauris Editions, 2002
Emmanuel Lacroix Page 106
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
La radio possède donc un avantage indéniable puisqu’elle associe un récepteur
transportable et peu onéreux (le transistor) à une culture orale totalement en
adéquation avec la tradition africaine. Il n’est pas surprenant dans ces conditions que
la radio soit fréquemment qualifiée de « média roi » en Afrique et que son succès soit
effectivement indéniable.
La tradition orale serait selon certain de plus en plus fréquemment complétée par
l’écrit ; ainsi Sophia Gazza nuance la prépondérance de l’oralité en affirmant dans
son ouvrage Les habitudes de lecture en Afrique subsaharienne et les
apprentissages traditionnels54 que la lecture apparaît de plus en plus comme une
nouvelle forme de divertissement directement lié au développement de la scolarité.
Elle se pratique collectivement, lors de veillées ou avec la communauté locale au
cours de séances de lecture publique. Le temps de la culture orale contre la culture
écrite semble dépassé même si, en Afrique, le savoir ne passe pas exclusivement
par l'écrit.
Après avoir examiné les atouts importants présentés par la radio en Afrique,
observons maintenant la relation de l’Afrique à l’écrit et au virtuel. Cela nous
permettra de mieux saisir les difficultés auxquelles se heurtent l’internet sur le
continent noir.
22.. LLaa ccuullttuurree ddee ll’’ééccrriitt eett dduu vviirrttuueell eett ll’’AAffrriiqquuee
a) Les difficultés des journaux africains face à la faiblesse de
l’alphabétisation
(1) Un analphabétisme handicapant
La situation de la presse dans le monde est évidemment intimement liée à celle de
l’alphabétisation. La presse en Afrique en général et au Burkina Faso en particulier,
est en ce sens, fortement handicapée.
54 Sophia Gazza, Les habitudes de lecture en Afrique subsaharienne et les apprentissages traditionnels, collection : Perspectives sur le développement du livre africain n° 4. Groupe de travail de l'ADEA sur les livres et le matériel éducatif, 1997
Emmanuel Lacroix Page 107
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Effectivement, le continent noir est particulièrement touché par l’analphabétisme. Le
rapport mondial sur le développement humain 2002, montre un taux
d’analphabétisme certes en diminution, mais encore très important. Ainsi, un chapitre
consacré aux disparités mondiales en termes d’alphabétisation, montre un taux
d’alphabétisation des adultes en Afrique subsaharienne, de l’ordre de 60%. La
progression est importante par rapport à 1990 puisque le taux moyen était à cette
période de 50%.
Mais l’examen plus précis de la situation du Burkina Faso montre un taux
d’alphabétisation des adultes de 23.9%, ce taux très faible est particulièrement
bloquant pour le développement de la presse dans ce pays. Avec des tirages
maximum de l’ordre de 5000 exemplaires, la rentabilité de la presse au Burkina est
difficile à assurer.
(2) La presse quotidienne
L’étude du nombre de quotidiens publiés dans le monde ne montre pas de fossé
apparent entre le Nord et le Sud. C’est en rapportant le nombre de titres de presse
au nombre d’habitants qu’apparaît le profond déséquilibre entre le Nord et le Sud.
Ainsi, Jacques Barrat montre dans Géographie économique des médias55, que pour
1000 habitants, 337 quotidiens paraissaient au Nord en 1988 contre 43 seulement
dans les PVD.
L’examen de la situation de l’Afrique noire est plus calamiteux encore : avec 17 titres
pour 1000 habitants en 1988, l’Afrique noire se place au dernier rang des zones
géographiques définies par l’auteur pour son étude. Le continent noir n’éditait ainsi
que 1,9% des quotidiens parus dans le monde. La situation rapportée au tirage des
quotidiens aggravait le constat puisque l’Afrique noire ne représentait que 1,2% du
tirage mondial des quotidiens.
55 BARRAT Jacques, Géographie économique des médias, éditions LITEC, 1992
Emmanuel Lacroix Page 108
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Ainsi le tirage moyen d’un quotidien africain pour 1000 habitants était d’environ 10
exemplaires, ceci contre approximativement 310 exemplaires pour les quotidiens
européens.
(3) La presse périodique
L’examen de la situation de la presse périodique en 1988, montre un retard important
des pays du Sud. L’Afrique notamment disposait de peu de titres dont le tirage
étaient par ailleurs très faible en comparaison des tirages de leurs équivalents dans
les pays développés.
b) L’internet, un média qui nécessite la maîtrise de l’écrit,
l’appropriation technologique et qui rompt la relation de
communauté physique
L’internet est un média qui présente de nombreux inconvénients, il semble au
premier abord très peu adapté à un contexte africain :
- Nécessité d’investissement en matériels (un ordinateur, un onduleur)
- Nécessité de disposer d’infrastructures (électricité, branchement téléphonique
à peu près stable)
- Nécessité de posséder des compétences (maîtriser la technique, savoir lire et
écrire)
Ces nombreux inconvénients semblent proscrire son utilisation en Afrique.
Cependant, force est de constater qu’une adaptation de l’outil au contexte africain
est possible. En effet, les usages collectifs ont permis de régler les questions de
coûts et d’infrastructures. La question de l’analphabétisation pourrait également être
réglée progressivement par le développement de contenus de plus en plus
« multimédias » et s’appuyant sur le son et l’image plus que sur l’écrit.
Le concept de l’auto-formation rendu possible par ce type de contenu est
fréquemment évoqué comme une perspective intéressante du développement des
NTIC en Afrique.
Emmanuel Lacroix Page 109
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Reste un problème majeur : celui de la relation individuelle à la machine. Elle
s’oppose à la relation orale et communautaire répandue en Afrique. Mais la culture
orale et communautaire peut être perçue comme complémentaire à la technique. Le
concept de médiateurs, dont le succès est avéré en France comme au Sénégal,
démontre que l’utilisation directe de la machine n’est pas obligatoire. La diffusion de
l’information est nécessaire et l’internet la révolutionne, mais une relation indirecte à
ce nouveau média est envisageable et semble adaptée au contexte africain,
notamment rural.
Cela conduit Jean-Michel Cornu, le directeur scientifique de la Fondation Internet
Nouvelle Génération à déclarer56 : « L'Internet est très adapté à l'Afrique. Non pas
pour toucher tout le monde, mais pour que tout le monde soit touché ».
Enfin, le mariage de l’oralité et du virtuel est possible ; Joachim Tankoano et
Mahamoudou Ouédraogo57 suggèrent par exemple le développement « de pages
web formées essentiellement de contes pour enfants ». Ces deux responsables de la
communication numérique au Burkina, soulignent que par « ce canal, les populations
locales et les franges concernées pourraient retrouver leur compte au niveau de leur
préoccupation à s’ouvrir aux valeurs universelles tout en restant bien enracinées
culturellement ».
Le projet cyber-griot procède de cette logique. Egalement intitulé « sous l’arbre à
palabres », ce site lancé en collaboration avec les institutions francophones, permet
la consultation en ligne, de contes et de légendes burkinabé.
56 Olivia Marsaud, entretien avec Jean Michel Cornu, Internet un outil africain, www.afrik.com 57 OUEDRAOGO Mahamoudou, TANKOANO Joachim, Internet au Burkina Faso : réalités et utopies, éditions l’Harmattan, 2001
Emmanuel Lacroix Page 110
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Cet aperçu de la relation entre culture orale et appropriation des outils du virtuel,
nous a éclairé sur les difficultés auxquelles se heurte le développement de l’internet
sur le continent africain. L’examen des incidences socio-culturelles du
développement des technologies de l’information va maintenant nous permettre
d’apercevoir les risques d’acculturation présentés par l’apparition des nouveaux
outils de communication et des contraintes liées à leur coût, à leur pratique
individuelle ou à la nature de leur support dans une société pauvre et à forte tradition
sociale et orale. Nous nous attarderons notamment sur une étude réalisée sur
l’introduction du téléphone chez les Sanan au Burkina Faso.
Emmanuel Lacroix Page 111
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
B. Les incidences socio-culturelles des nouveaux moyens de communication
Examinons tout d’abord la situation et les causes de l’acculturation. Commençons
notamment par décrire le court-circuit qui découle de l’avènement de la société de
l’information et de la globalisation. Nous observerons ensuite les effets des
mondialisations et de la globalisation sur les cultures africaines.
11.. UUnnee aaccccuullttuurraattiioonn pprrooggrreessssiivvee
a) Le court-circuit
Philippe Quéau intervenant au Congrés de Locarno en avril 1997, évoquait les
importantes modifications de nos sociétés engendrées par l’avènement de la société
de l’information. Il présentait notamment le phénomène du court-circuit qu’il
définissait comme la mise en contact immédiate de points du globe auparavant
séparés par des distances géographiques considérables et désormais réduites à
presque rien.
Ce phénomène se traduit selon lui de trois manières :
- La glocalisation, contraction du local et du global, court circuit géographique
et territorial du fait des mondialisations des marchés, des capitaux, des
informations. Mais également liée à la mondialisation de la pollution ou encore
de la déculturation.
- La désintermédiation qui se traduit par l’éviction des intermédiaires de toutes
sortes, rendus inutiles par les nouvelles technologies de distribution de biens
ou de services immatériels. Une perte de pouvoir de taxation de ces flux
immatériels par les Etats-nations en résulte.
- La dérégulation, qui reflète la démission de la politique régulatrice devant les
lois du marché.
Ces courts-circuits méritent qu’on s’y attarde et qu’on en observe les conséquences
sur les cultures locales. Quand la France possède le poids politique et les moyens
Emmanuel Lacroix Page 112
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
financiers pour tenter d’introduire l’idée d’une exception culturelle face à la « machine
culturelle » anglo-saxonne, les pays les moins avancés ne peuvent que consommer
les produits issus d’une industrie culturelle que Jacques Barrat qualifie d’
« accessoire du commerce pour une idéologie libérale mondialiste et nivelante »58.
b) Les mondialisations et leurs effets
Plusieurs mondialisations créent la glocalisation selon Philippe Quéau. Attardons
nous sur certaines d’entre elles.
(1) Mondialisation de la production : l’exemple de l‘impact culturel de l’application des normes ISO au Maroc
L’étude menée par Noureddine EL AOUFI et Michel HOLLARD sur L’impact des
normes d’entreprises sur l’organisation de l’industrie marocaine59 montre que les
retentissements culturels des normes industrielles sont réels.
L’étude de l’application des normes ISO 9000 qui reposent sur des procédures
écrites visant à rendre compréhensible et lisible le mode de fonctionnement qualité
de l’entreprise, font conclure aux auteurs qu’elles « marquent, ce faisant, la fin d’une
culture orale par formalisation et systématisation de tous les savoir-faire formels et
informels ».
(2) Mondialisation de l’information et des contenus des programmes : impact culturel du mimétisme des journalistes africains
Jacques Barrat souligne dans Géographie économique des médias60, la rareté avec
laquelle les journalistes africains utilisent les services de l’Agence Panafricaine
d’Information. Le recours systématique de ces derniers aux services de l’Agence
58 Jacques Barrat, La francophonie et les autoroutes de l’information, dialogues, avril 1996 59 Noureddine El Aoufi et Michel Hollard, Impact des normes d’entreprises sur l’organisation de l’industrie marocaine, http://www.ambafrance-ma.org 60 BARRAT Jacques, Géographie économique des médias, éditions LITEC, 1992
Emmanuel Lacroix Page 113
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
France Presse ou de Reuter leur donne selon lui une part de responsabilité dans le
niveau d’acculturation actuel de l’Afrique.
(3) Mondialisation des cultures : impact des industries culturelles et des nouveaux appareils de communication
André Nyamba, évoque dans La parole du téléphone61, l’impact considérable sur le
mode de vie africain de la mondialisation culturelle. Il affirme que l’image « d’une
communauté villageoise chaleureuse » relève aujourd’hui d’une méconnaissance de
« l’Afrique des villages ». Cette fausse représentation, selon lui encouragée par les
partisans d’un développement local, ne signifie rien à l’heure où on rencontre dans
les villages du Burkina Faso, des jeunes, baladeurs sur les oreilles, écoutant une
musique moderne inconnue des anciens.
Les traditions de solidarité se sont selon lui éloignées et ne correspondent plus qu’à
un souvenir. Les premiers émissaires de cette globalisation sont selon lui « les
nouveaux appareils autonomes de communication individuelle ».
c) La disparition progressive des médias traditionnels
Jaques Barrat remarque dans Géographie économique des médias, que depuis le
début des années quatre-vingt-dix, les médias modernes comme la radio et la
télévision grignotent peu à peu les derniers domaines dans lesquels régnaient
encore les médias traditionnels. Il constate par exemple qu’au début des années 90,
le nombre de transistors chez les Beti du Cameroun était supérieur au nombre de
tam-tam ou de mvet, moyens de communication traditionnels.
Jacques Barrat signale que les médias modernes sont beaucoup plus rapides pour
propager les informations « du temps réel » comme par exemple les résultats de
matchs de football. La forme spectaculaire que prend l’information avec les médias
61 André Nyamba, La parole du téléphone, significations sociales et individuelles du téléphone chez les Sanan du Burkina Faso, sous la coordination d’Annie Chéneau-Loquay, Enjeux des technologies de la communication en Afrique, éditions Karthala, 2000
Emmanuel Lacroix Page 114
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
modernes ne laisse pas la place aux systèmes traditionnels vieux de plusieurs
millénaires.
Les médias traditionnels n’ont cependant pas encore tout à fait disparu car
l’information par le biais des médias modernes restent l’apanage d’une certaine élite
qui sert d’intermédiaire entre les médias audiovisuels et le reste de la population.
L’information transite ensuite au sein des villages par le biais des médias
traditionnels ou de l’expression orale. Une certaine complémentarité est donc
apparue entre anciens et nouveaux médias. Jacques Barrat prédit cependant une fin
prochaine de cette complémentarité qui ne survivra pas au développement des
nouvelles formes de communication.
Attardons nous maintenant sur le cas de l’arrivée du téléphone chez les Sanan au
Burkina Faso. Cet exemple nous permettra d’illustrer les importantes incidences
socioculturelles des technologies de la communication et de leurs contraintes.
22.. LLeess iinncciiddeenncceess ssoocciiooccuullttuurreelllleess ddeess TTIICC :: llee ccaass ddee ll’’aarrrriivvééee dduu
ttéélléépphhoonnee cchheezz lleess SSaannaann
Les statistiques habituellement mises en avant d’une ligne pour 200 habitants
tiennent compte de tous les espaces confondus, or la télédensité urbaine est
beaucoup plus importante que celle des zones rurales.
Au Burkina Faso, l’accès des zones rurales au téléphone est très limité, on trouvait
en 1999, moins d’une ligne pour 2000 habitants.
« L’Afrique des villages » est souvent absente des débats sur les
télécommunications, or l’implantation des technologies de l’information et de la
communication n’est pas neutre et entraîne de nombreuses perturbations dans
l’organisation sociale des communauté rurales. L’étude menée par André Nyamba
est en ce sens instructive.
Emmanuel Lacroix Page 115
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
a) Les significations sociales du téléphone chez les Sanan du
Burkina Faso
(1) Origine des Sanan et description de leurs systèmes de communication et de leur organisation sociale avant la venue du téléphone
(a) Organisation sociale
La parole a une grande importance chez les Sanan du fait de leur organisation
sociale et de leur histoire.
Les Sanans se sont sédentarisés dans le nord ouest du Burkina Faso en se
constituant sous la forme de communautés villageoises comprenant chacune entre
500 et 3000 habitants. Les villages sont découpés par quartiers plus ou moins
autonomes et plusieurs corps de métiers spécialisés comme les griots ou les
forgerons se distinguent.
Leur structure sociale est patrilocale : la place du père de famille est prépondérante.
Ils ne possèdent pas la forte hiérarchie qu’on peut observer chez leurs voisins Mossi.
Ils croient en Lawa, le Dieu de la pluie. Pour eux Lawa a une connotation de pluie
bienfaisante annonciatrice de bonnes récoltes et donc de paix sociale. Actuellement,
Islam et Christianisme, religions importées, prennent de l’ampleur, au point que
Jésus et Allah sont fréquemment invoqués lors des salutations.
(b) Système éducatif et système de reproduction sociale
Le chef de la concession et le chef de terre possèdent tous deux une autorité morale.
Leur parole a valeur de commandement. Ils pratiquent la polygamie et les familles
sont grandes. Les enfants ont de plus une grande importance, ils entretiennent une
Emmanuel Lacroix Page 116
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
relation très étroite avec leur famille au sein de laquelle ils reçoivent leur première
éducation avant de devenir les enfants de la communauté.
« L’école des blancs » a introduit de nombreux changements dans leur système
éducatif, elle a notamment conduit à une plus forte individualisation au détriment du
groupe social et de son système d’organisation familiale.
Tous les Sanan sont des cultivateurs, mais certains commerçants commencent à
apparaître. Le téléphone présente d’ailleurs certains avantages pour l’exercice de ce
nouveau métier. Enfin, les Sanan possèdent quasiment tous dans leur famille un
individu qui « fait un travail de blanc », c’est à dire un salarié. L’impact de ces
personnes qui ont quitté le village pour la ville ou même l’étranger est important dans
leur rapport au téléphone.
(2) L’impact du téléphone
(a) L’organisation sociale et la venue du téléphone
L’étude menée par André Nyamba a montré que la venue du téléphone faisait
apparaître des questions et des problèmes identiques dans l’ensemble des villages
sur lesquels portaient l’enquête. Ces questions étaient par ordre d’importance, les
suivantes :
- La désignation du responsable de la cabine téléphonique
- Le choix de l’emplacement de la cabine
- Les heures d’utilisation du téléphone
(i) La désignation du responsable
Le consensus qui émergeait pour la désignation du responsable se portait dans la
plupart des cas sur des personnes qui avaient fait l’école et qui avait donc, en
quittant le village, expérimenté l’extérieur de leur milieu. Ils avaient en ce sens
quelque chose « d’étranger » qui leur donnait une similitude avec le téléphone.
Emmanuel Lacroix Page 117
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Au delà de cette méfiance vis à vis du téléphone, une certaine compétition avait lieu
pour la gestion de la cabine, source de prestige. Le responsable serait en effet le
point de contact avec l’extérieur disposant de la primeur de l’information. Cette
médiation avec un extérieur menaçant dans un contexte de mondialisation et de
mutations sociales ne pouvait être assuré que par une personne choisie
raisonnablement en fonction de « l’idée que les Sanan se font d’eux-mêmes et de
l’étranger ».
(ii) Le choix de l’emplacement
Le choix de l’emplacement de la cabine, provoqua une compétition beaucoup plus
vigoureuse. Nous avons vu que les quartiers disposent d’une autonomie importante
dans les villages et l’identification des individus à leur quartier est forte. La présence
de cette « chose de Blanc » dans le quartier était donc source de prestige.
L’emplacement de la cabine donna lieu à des palabres qui ne tenaient plus du tout
compte des impératifs techniques qui étaient pourtant admis et compris. L’impératif
social primait sur les questions techniques : l’emplacement de la cabine était un
enjeu de pouvoir. Le consensus fut finalement trouvé pour des lieux à caractère
neutre afin de ne pas créer de jalousies.
(iii) Les horaires d’utilisation
Enfin, concernant les heures d’utilisation, les esprits s’accordèrent rapidement à
constater qu’il était impossible de prévoir les heures d’appel et qu’il ne fallait pas
restreindre outre mesure les horaires « d’ouverture » de la cabine. Des cas
d’urgences furent notamment évoqués comme les décès et les maladies « qui ne
préviennent pas ».
L’arrivée du téléphone entraîne donc une plus grande conscience du temps.
Effectivement il sera dès lors nécessaire d’être présent à l’heure exacte pour un
appel extérieur, il sera également nécessaire de savoir à quelle heure appeler
quelqu’un pour être certain de le trouver.
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Le téléphone va ainsi accélérer le rythme des relations sociales et donner aux Sanan
une conscience aiguë du temps. Les populations confrontées à son introduction
étaient conscientes de ces perturbations probables de leur organisation.
(b) Les relations sociales et l’utilisation du téléphone
L’enquête montre que la majorité des Sanan pensaient, a priori, utiliser le téléphone.
Les cas les plus évoqués concernaient l’entretien de relations avec l’extérieur, la
gestion de rapports de parenté, ou le développement des échanges économiques.
La venue du téléphone était souhaitée par 97% des Sanan en milieu rural. Ce taux
reflète une demande forte de contact avec l’extérieur. Elle s’explique par
l’enclavement des zones rurales et le coûts des déplacements.
Si 76% des personnes interrogées savaient ce qu’était le téléphone, nombreux sont
ceux parmi eux qui définissaient son utilisation comme « parler dans le fil de la
corde », allusion au fil téléphonique tendu entre les poteaux le long des routes.
b) Impact du téléphone sur la parole
(1) Le rôle de la parole chez les Sanan
La parole est un élément primordial dans l’organisation sociale chez les Sanan. Elle
est au centre de leur éducation, les veillées de conte sont l’occasion de son
apprentissage. Ce savoir dire précède chez eux le savoir faire, lui même préalable
au savoir être. La parole représente donc le pilier de tout un système.
La confrontation de ce rôle déterminant qu’à la parole à l’outil de communication
qu’est le téléphone, qui impose une durée limitée de parole, ne peut donc avoir lieu
sans incidences.
(2) Les salutations et le téléphone
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Les salutation représentent un rituel important de la vie familiale dans de
nombreuses ethnies. Elles « constituent un indicateur de l’identité individuelle et de
l’appartenance à un lignage ».
Le matin, le villageois va « saluer l’aîné de la famille, s’enquérir de sa santé, savoir
s’il a passé une bonne nuit ; il s’agit de longues litanies répétitives dons l’objectif de
toute évidence n’est pas prioritairement d’ordre informationnelle ; l’objectif est
d’entretenir les bonnes relations familiales avec ses longues litanies des
bénédictions et des souhaits ; le rituel s’étend également jusqu’aux belles-familles à
côté de la concession ou dans d’autres quartiers du village ».
Le symbole de ces relations réside dans l’expression préalable aux salutations qui
consiste à dire « salut à toi… ça fait deux jours ». Cette métaphore souligne que le
temps a paru long depuis la dernière rencontre afin de bien signifier à l’autre qu’il
nous a manqué, deux journées représentant la limite tolérable entre deux rencontres
au sein de la famille.
André Nyamba s’interrogeait en 1999 : les salutations allaient elles disparaître au
téléphone ? Quelles en seraient les incidences en terme d’organisation sociale ?
Un premier élément de réponse peut dores et déjà être précisé : l’arrivée du
téléphone mobile dans les principales villes du Burkina Faso a fait pratiquement
disparaître les salutations des relations sociales s’effectuant par ce nouveau moyen
de télécommunication.
c) A terme, quelles incidences du téléphone sur les
comportements collectifs et individuels des Sanan ?
Sur le plan individuel, il semblerait que le téléphone ait introduit une nouvelle notion
qui pèsera sur le positionnement par rapport à la famille et à l’espace villageois : le
devoir d’informer et d’être informé.
André Nyamba précise ainsi :
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
« Par ailleurs, le téléphone exercera sur l’individu une pression pour
reconsidérer désormais sa représentation du monde extérieur ; par exemple il
ne se lancera plus dans une émigration sans une information au préalable ».
Sur le pan collectif, la conscience du temps sera plus forte, elle « accélèrera les
relations à la famille, au lignage » ; paradoxalement cette accélération
« s’accompagnera de la restriction formelle de leur expression, en terme de durée
essentiellement ; sans pour autant savoir si ce sera en bien ou en mal ; et les
réflexions du genre « pourquoi tu ne m’as pas appelé ? » deviendront à la fois
nouvelles et courantes dans le groupe, car il existera toujours le désir d’entretien de
ces relations ; or avant la question ne se serait même pas posée ».
Enfin, l’ouverture du village au monde à travers l’introduction de l’information
modifiera certainement les « habitudes et les pratiques en matière de production
économique et de reproduction sociale ».
Cet aperçu des incidences socioculturelles de l’introduction du téléphone chez les
Sanan permet de mesurer l’étendu du fossé qui sépare les grandes villes des pays
riches, des villages enclavés des pays du Sud. Il permet également d’apercevoir
l’impact socioculturel de l’introduction des techniques de l’information et de la
communication dans ces espaces ruraux et les phénomènes d’acculturation qui
pourraient en découler.
Ce préalable nous conduit à observer les profondes modifications induites par
l’avènement de la société de l’information, nous examinerons ensuite la situation de
l’Afrique Francophone dans cette société et sur les enjeux représentés par le
développement des NTIC. Auparavant, nous examinerons les inégalités entre Nord
et Sud dans l’accès à l’information.
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
C. Enjeux de l’internet et place de l’Afrique Francophone dans la société de l’information
Une présentation de l’histoire récente de l’information et du lien qui rattache cette
dernière au développement nous permettra de mieux appréhender par la suite les
enjeux qui accompagnent le développement de l’internet dans le monde et l’Afrique
Francophone en particulier. Nous étudierons le lien entre cette situation et le sous-
développement ainsi que les luttes idéologiques qui entourent la perception de cette
relation entre information et développement. Nous verrons également que les
disparités Sud-Sud face à l’information sont également très marquées.
11.. LLeess iinnééggaalliittééss ffaaccee àà ll’’iinnffoorrmmaattiioonn
a) Les disparités Nord-Sud face à l’information
(1) La perception du déséquilibre d’information entre Nord et Sud
(a) La théorie de l’exploitation et la montée d’une contestation
(i) La théorie de l’exploitation néo-
impérialiste
Francis Balle dans Médias et Sociétés62, décrit les théories de l’exploitation néo-
impérialiste qui soutinrent ensuite le contenu du rapport Mac Bride, point d’orgue de
la revendication pour un nouvel ordre mondial de l’information.
En 1913, Rosa Luxembourg défendait dans l’Accumulation du capital, la thèse selon
laquelle le capitalisme devait, pour survivre, exploiter d’autres sociétés, non
capitalistes.
62 Francis Balle, Médias et Sociétés, 10ième édition, Montchrestien, pages 615 à 628, 2001
Emmanuel Lacroix Page 122
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Cette idée fut reprise dans les années 60 par des auteurs américains suivis par des
français, dont Samir Amin et Arghiri Emmanuel qui développèrent le thème de
l’échange inégal.
L’ouvrage publié en 1974 par Pierre Jolée, intitulé Le pillage du tiers-monde,
souligne que la situation des échanges entre le Nord et le Sud n’a cessé de se
détériorer au détriment du tiers-monde au cours des années cinquante et soixante.
Le caractère inégal de ces relations garantissait selon lui la prospérité du Nord
capitaliste au dépend d’un sous-développement croissant du Sud.
Armand Mattelard suggère également en 1976, dans Multinationales et systèmes de
communication, que les multinationales, au service de l’Etat américain, sont les
piliers d’une exploitation capitaliste mondiale. L’impérialisme culturel qui s’exprime
par de nombreux investissements dans les médias et les activités culturelles
permettant par ailleurs de diffuser des modèles de consommation capitaliste
renforçant cette exploitation.
(ii) 1973-1976 : montée de la contestation
(a) Septembre 1973 : la IVième conférence
des non-alignés à Alger
En 1973, la quatrième conférence des pays non alignés donne lieu aux premières
déclarations dénonçant le déséquilibre de l’information. La déclaration finale de la
conférence souligne la nécessité de réorganiser une information dont les instruments
ont été, pour la plupart, légués par les anciens colonisateurs.
La nécessité d’une « appropriation collective des satellites de communication ainsi
que de l’élaboration d’un code de conduite international pour leur utilisation » est
également évoquée. « La prise en main de l’information par les pays du tiers-
monde » est le mot d’ordre pour mettre fin à l’aliénation culturelle du Sud par le Nord.
Globalement, les questions de l’information ne représentent cependant qu’un des
aspects de la conférence d’Alger qui est consacrée aux questions posées plus
généralement par le nouvel ordre économique mondial.
Emmanuel Lacroix Page 123
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
(b) 1975 : décision commune
En janvier 1975, l’ensemble des ministres des Affaires étrangères des pays non
alignés prend la décision de créer un pool commun des agences de presse.
(c) Mars 1976 : symposium de Tunis
Cette décision est suivie par le symposium de Tunis qui donne lieu à la mise en
accusation extrêmement explicite des agences de presse internationales : « Les
pays non-alignés souffrent de la mainmise sur les moyens de communication de
masse par les pays développés qui ont le monopole de la plupart des moyens de
communication dans le monde, et par le canal duquel sont diffusées la plupart des
nouvelles et sont signalées les diverses activités dans les pays non alignés ».
(b) Evolution du début des années 70 jusqu’à 1985
(i) La conférence de l’UNESCO de 1976 et
la revendication pour un « nouvel ordre
mondial de l’information »
En novembre 1976, la conférence générale de l’UNESCO réunie à Nairobi, donne
lieu à l’expression publique de la montée de la contestation engagée dans les pays
non alignés depuis quelques années. La conférence ouvre ainsi la voie à une
spectaculaire fronde des pays du Sud en faveur d’un rééquilibrage de l’information.
(a) La triple accusation du Sud contre le
Nord
(i) Les pays du Nord passent le Sud sous silence
Le Sud estimait que les moyens d’information des pays du Nord ne consacraient
qu’une place minimale voire nulle aux évènements des pays du Sud. L’exemple de
l’accession du Surinam à l’indépendance en novembre 1975, a pris en ce sens, une
valeur de symbole. L’événement n’a occupé que quelques lignes (3% de
l’information consacrée à l’étranger) dans les principaux journaux du continent sud-
Emmanuel Lacroix Page 124
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
américain alors que le pays concerné est plus vaste que l’Angleterre. 70% de
l’information publiée sur l’étranger par ces mêmes journaux était dans le même
temps consacrée aux pays industrialisés.
(ii) L’information est tronquée ou déformée
Les pays du Sud estimaient que les agences de presses internationales, toutes
occidentales, offraient une image du Sud conforme à leurs intérêts. Nous avons vu
que l’accession du Surinam à l’indépendance avait occupé 3% de l’information
étrangère publiée dans les journaux d’Amérique latine. La totalité de cette
information venait des agences de presse des pays occidentaux.
De même, 80% de l’information consacrée aux pays industrialisés provenait
également de ces agences de presse.
Les pays du Sud affirmaient donc que la presse du monde entier donnait une image
fausse du tiers monde. Cette image étant par ailleurs négative puisque les agences
de presse ne s’intéressent au pays du Sud qu’en cas d’évènements dramatiques,
coups d’Etat, cyclones ou autres catastrophes. A l’image de Madame Indira Gandhi,
Premier Ministre de l’Inde, le Sud plaidait « nous voulons entendre ce que disent les
africains sur les évènements en Afrique et donner l’explication indienne des
évènements de l’Inde ».
(iii) Les pays du Nord font preuve d’un impérialisme culturel et colonisent les esprits
La libre circulation de l’information entre le Nord et le Sud et l’invasion du Sud par les
médias et les films des pays riches qui en résulte, donnaient lieu, selon les pays
pauvres à une colonisation des esprits. Cette propagande culturelle aurait pour objet
de pérenniser la situation de domination mise en place à la colonisation.
(b) La revendication d’un nouvel ordre
mondial de l’information (NOMIC)
Emmanuel Lacroix Page 125
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Cette triple accusation contre les agences de presse internationale, s’accompagne
de la volonté d’un Nouvel Ordre Mondial de l’Information et de la Communication
(NOMIC), idée fortement soutenue par l’Union Soviétique. A l’enjeu d’un
rééquilibrage venait s’ajouter, selon Jacques Barrat, les enjeux géopolitiques d’une
lutte idéologique entre communisme et capitalisme. Le déséquilibre était bien réel,
mais le cœur de la bataille se trouvait dans l’établissement d’un lien entre domination
culturelle et économique. L’examen de la question fut finalement reportée à la
conférence suivante.
(ii) La commission Mac Bride
La résolution adoptée par la 19ième conférence générale de l’UNESCO conduisit son
Directeur Général, a créer en 1977, une commission internationale d’étude sur la
situation et les perspectives d’évolution de la communication dans le monde. La
direction de cette commission fut confiée à Sean Mac Bride, prix Nobel et prix
Lénine, fondateur d’Amnisty International. Elle donna lieu selon Jacques Barrat à « la
plus grande consultation internationale jamais entreprise dans le domaine des
médias ».
Les résultats des travaux arrivèrent en février 1980 sous la forme d’un rapport intitulé
« Voix multiples, un seul monde ».
Le rapport était articulé autour de cinq thèmes portant sur :
- Communication et société
- Communication aujourd’hui
- Déséquilibre, distorsion et démocratisation
- Cadre institutionnel et professionnel
- La communication demain
De l’ensemble du rapport ressort l’affirmation de la domination du Nord sur le Sud et
la responsabilité des pays capitalistes occidentaux et des Etats-Unis en particulier
dans cette situation.
Emmanuel Lacroix Page 126
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Selon Francis Balle, l’assemblée générale de l’UNESCO, réunie à Belgrade en
octobre 1980 n’a pas approuvé le rapport Mac Bride et s’est contentée de prendre
acte de sa remise. Il ajoute « qu’au delà des arrières pensées idéologiques, le
rapport Mac Bride a néanmoins ouvert la voie au pragmatisme ».
(iii) La conférence intergouvernementale sur
les politiques de la communication en
Afrique
La Conférence intergouvernementale sur les politiques de la communication en
Afrique s’est tenue du 22 au 31 juillet 1980 à Yaoundé. Elle fut l’occasion de
souligner que le déséquilibre dans la circulation des informations à destination ou à
provenance de l’Afrique trouvait ses origines dans l’histoire de la colonisation.
(c) L’après Mac Bride
(i) Le Programme International pour le
Développement de la Communication
(PIDC)
La conférence de Yaoundé et les remous provoqués par le rapport Mac Bride
provoquèrent, sur proposition américaine, les premières réflexions qui conduirent à la
création du PIDC lors de la 21ème session de la Conférence générale réunie à
Belgrade.
Les objectifs de ce programme étaient « d’accroître la coopération et l’aide en faveur
du développement des infrastructures de la communication et réduire l’écart entre les
divers pays dans le domaine de la communication ».
L’examen du bilan du programme entre 1981 à 1991, montre le lancement en Afrique
de près de 100 projets pour une somme de 22 millions de dollars.
Emmanuel Lacroix Page 127
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
(ii) La fin du NOMIC
La fin des années 80 marquèrent l’enterrement progressif du NOMIC autant au sein
des pays du tiers-monde que lors des rencontres de l’UNESCO. Les origines de ce
reflux sont multiples : le départ des Etats-Unis qui quittèrent l’organisation en 1985,
la détente des relations est-ouest avec l’arrivée au pouvoir de Mickael Gorbatchev en
URSS. L’arrivée de Frederiko Mayor à la tête de l’UNESCO en 1987 marqua
l’enterrement définitif du NOMIC.
(iii) Des conceptions multiples
Ces débats ont donné lieu par la suite à une diversité de conceptions relatives à
l’information. Francis Balle63 distingue trois thèses qui s’expriment dans les pays du
tiers-monde :
- La thèse modérée s’exprime dans des pays qui, tel le Sénégal par la voix de
son ancien président, souhaitent retrouver leur identité culturelle. Ces pays
pensent que les médias peuvent contribuer au développement tout en
respectant la souveraineté nationale.
- La thèse socialiste évoque la nécessité d’une « décolonisation de
l’information » qui doit passer par une nationalisation complète des agences de
presse et des entreprises d’information. Dans cette conception, le journaliste
est un militant de l’information au service de sa patrie.
- La thèse libérale n’est pas le fait de gouvernements mais d’individus
protestataires ou dissidents. Elle dénonce d’une part l’hégémonie culturelle du
Nord et le contrôle de l’information par les Etats dans les pays du Sud. Le
plaidoyer de deux journalistes tunisiens , Fethi Houidi et Ridha Najar, pour un
nouvel ordre « national » de l’information, s’inscrit dans cette logique.
Du côté des pays occidentaux s’expriment des hésitations entre reconnaissance de
la légitimité des revendications des pays pauvres et dénonciation de l’hypocrisie qui
consistent à présenter la « domestication de l’information comme une
démocratisation ou une libération par rapport aux puissances étrangères ».
63 Francis Balle, Médias et Sociétés, 10ième édition Montchrestien, 2001
Emmanuel Lacroix Page 128
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
(2) Un déséquilibre global réel
Jacques Barrat montre dans Géographie économique des médias64, que le
déséquilibre d’information entre le nord et le sud s’exprime tout d’abord par une
répartition inégale des infrastructures nécessaires à la production et ensuite par une
nette supériorité du Nord en matière de production.
(a) Une répartition inégale des infrastructures nécessaires à la production d’information et de biens culturels
Les déséquilibres liés aux infrastructures de production sont, d’après Jacques Barrat,
fortement liés aux capacités technologiques des pays et plus encore à leur
puissance financière.
(i) La production de papier culturel
Ainsi, en 1985, l’examen de la production de papier culturel dans le monde montrait
que l’essentiel (85%) était produit dans les pays développés. L’Afrique qui possède
pourtant un immenses potentiel forestier, produisait moins de 1% du papier culturel
consommé dans le monde.
Cette sous-production s’explique selon Jacques Barrat, d’une part par la faiblesse
générale de l’industrie en Afrique et d’autre part par l’ancrage profond de la culture
orale sur ce continent.
(ii) La production de papier journal
Un constat identique pouvait être fait à la même époque concernant le papier journal.
Pour une production des pays en voie de développement inférieure à 7%, l’Afrique
ne parvenait pas à dépasser 1%.
(iii) Les émetteurs radio et TV
En matière d’émetteurs radio et TV, l’Afrique représente une part négligeable de
l’équipement mondial. Avec, depuis 1985, une part d’environ 2% de l’équipement
64 Jacques Barrat, Géographie économique des médias, éditions LITEC, 1992
Emmanuel Lacroix Page 129
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
mondial, l’Afrique n’a pas réussi à maintenir la moyenne de 5% qu’elle avait atteint
entre 1980 et 1984.
Précisons cependant, en matière de radiophonie, que l’Afrique a particulièrement
développé ce média dans les années 80 et 90. Il est probable que le nombre
d’émetteurs radio du continent a augmenté fortement et que les chiffres proposés ne
reflètent plus la réalité. Le manque de temps et les difficultés rencontrées pour réunir
des informations sur les parties les plus essentielles de ce travail, ne nous a pas
permis de réunir des chiffres plus récents sur ce point.
(b) La supériorité du Nord en matière de production d’information et de biens culturels
(i) L’édition
L’Afrique noire éditait en 1986, environ 10 000 titres contre près de 250 000 en
Europe. Ces chiffres correspondaient pour l’Afrique noire à l’édition de 1,2% des
publications parues dans le monde. L’examen du nombre de titres parus par habitant
montrait également un fossé important puisque l’Afrique disposait d’un tirage de 23
titres pour un million d’habitants alors que l’Europe atteignait 578 titres pour un
nombre identique de personnes.
(ii) La presse quotidienne et périodique
Nous avons précédemment fait le constat de la situation difficile de la presse en
Afrique noire. Cette situation reflète un contexte très peu adapté au développement
des médias écrits dans cette zone. Entre analphabétisme, tradition orale et sous-
développement, la priorité des dépenses pour les africains se porte rarement sur la
consommation des produits de presse.
(iii) Le cinéma
Le cinéma représente un média particulièrement choyé dans les pays du Sud. Le
continent asiatique est un très important producteur autant que consommateur.
L’Afrique noire, si elle ne brille pas la quantité de sa production, se distingue
Emmanuel Lacroix Page 130
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
néanmoins par la qualité de ses œuvres et par le dynamisme de ses réalisateurs. Le
Burkina Faso mérite notamment d’être signalé pour son Festival de cinéma africain,
le Fespaco, qui regroupe tous les deux ans la quasi-totalité des cinéastes du
continent ainsi que de nombreux producteurs des pays développés.
Des cinéastes tels que Idrissa Ouédraogo ou Gaston Kaboré assurent également au
cinéma burkinabé une renommée internationale qui n’a pas d’égale en Afrique.
(iv) La radio et la télévision
Dans le domaine de la production de contenu pour la radio et la télévision, les pays
développés sont, à l’exception du Brésil et du Mexique, les seuls à pouvoir faire face
aux importantes dépenses nécessaires à leur avènement. L’Afrique est une fois
encore, quasiment absente de ce marché.
En matière de consommation cependant, l’Afrique, nous l’avons vu, est le continent
de la radiophonie.
(3) Un déséquilibre amplifié par l’apparition des nouvelles technologies
(a) Photographie de l’accès aux NTIC dans le monde
Selon le Rapport mondial sur le développement humain de 2002,
d’approximativement 500 millions aujourd’hui, les utilisateurs de l’internet devraient
passer à près d’un milliard d’ici 2005. L’accès à l’information via Internet, en se
généralisant, exclura d’autant plus les individus qui n’y auront pas accès. Or, le
rapport note précisément que 72 % des internautes vivent dans les pays de l ’OCDE,
qui ne représentent pourtant que 14 % de la population mondiale. 164 millions
d’entre eux se trouvent aux Etats-Unis.
La bande passante internationale accessible à l’Afrique est inférieure à celle dont
dispose la métropole brésilienne de São Paulo. Et les capacités de transmission de
Emmanuel Lacroix Page 131
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
l’Amérique latine sont elles-mêmes globalement équivalentes à celles de la ville de
Séoul, en République de Corée du Sud.
Certaines technologies beaucoup plus anciennes ne sont toujours pas parvenues
jusqu’aux pauvres. L’électricité, couramment utilisée depuis l’invention de l’ampoule,
dans les années 1870, reste toujours inaccessible pour quelques 2 milliards de
personnes, soit un tiers de la population mondiale.
L’Afrique reste un continent anecdotique dans l’accès à l’internet. Le Rapport
mondial sur le développement humain de 2001 montre qu’entre 1998 et 2000, alors
que le nombre d’internautes exprimés en pourcentage de la population, progressait
de plus de 28% aux Etats Unis, il ne croissait que de 0.3% en Afrique
subsaharienne.
Le rapport montre également que le coût mensuel d'accès à l’internet en
pourcentage du revenu mensuel moyen est source d’inégalités énormes dans le
monde. A titre d’illustration, en 2000, un américain consacrait en moyenne 1,2% de
son revenu à sa connexion à l’internet. En revanche, l’obtention d’une connexion
pour un habitant du Népal nécessiterait d’investir 128% de ses revenus.
(b) Le développement des NTIC en faveur du développement selon le PNUD
Le rapport mondial sur le développement humain conclut que les technologies de
l’information et des communications peuvent avoir un impact important sur le
développement, car elles peuvent permettre de surmonter les obstacles de
l’isolement social, économique et géographique, accroître l’accès à l’information et à
l’éducation, et permettre aux individus pauvres de prendre davantage part aux
décisions qui influent directement sur leur vie.
En évaluant le potentiel des TIC, le rapport évoque de nouvelles opportunités
d’émancipation politique (comme en témoigne la campagne mondiale par courriers
électroniques qui a contribué à renverser le président Estrada aux Philippines, en
janvier), les réseaux sanitaires (comme en Gambie et au Népal), l’apprentissage à
Emmanuel Lacroix Page 132
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
distance (comme en Turquie) et la création d’emplois (comme au Costa Rica, en
Afrique du Sud et en Inde).
Sakiko Fukuda-Parr, auteur principal du rapport, indique que ce n’est qu’un début : «
Les TIC représentent un véritable espoir pour la démocratie et la diffusion du savoir
aux individus pauvres ». Le rapport cite les ordinateurs à bas prix et les écrans
tactiles pour les personnes ayant des difficultés de lecture comme des exemples de
technologies en cours de développement et qui pourraient considérablement
renforcer l’autonomie des pauvres.
Mais le rapport conclut également que jusqu’ici, on est passé à côté de nombreuses
opportunités technologiques essentielles pour les pauvres, par manque de demande
sur le marché et en raison de l’insuffisance des financements publics. Les
chercheurs du secteur privé répondent aux besoins des consommateurs à revenu
élevé, plutôt qu’à ceux des personnes qui ont un faible pouvoir d’achat. Les fonds et
les incitations accordés par le secteur public à la recherche et au développement
pourraient compenser ces insuffisances du marché, mais, selon le rapport, jusqu’ici,
dans les pays en développement comme dans les pays développés, les pouvoirs
publics n’apportent pas le soutien nécessaire.
(c) Deux axes divergeant entre pays du Sud et pays du Nord
Le PNUD mettait récemment en parallèle trois facteurs qui reflètent l’état de
développement des NTIC dans le monde : nombre d’accès à Internet, nombre de
sites web et coût de la connexion. Cette juxtaposition l’amenait à conclure que dans
les pays développés, davantage d’individus accèdent à davantage d’information pour
un coût inférieur. Ce cercle vertueux de l’accès à l’information exprime tout son
potentiel dans les pays développés.
A l’inverse, comme le souligne Monsieur le Professeur Francis Balle65, « des
infrastructures de télécommunications peu développées (nombre de téléphones, en
moyenne, inférieur à 1% de la population) entraînant des coûts de communication
Emmanuel Lacroix Page 133
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
trop élevés : tel est le cercle vicieux du sous-développement. Le faible taux de
consommation ne permet pas d’investir dans des liaisons spécialisées à coût
forfaitaire qui pourraient briser ce cercle. De nombreuses connexions entre pays
africains transitent par l’extérieur du continent : une liaison Côte d’Ivoire - Sénégal
passe par Paris ».
b) Des disparités Sud – Sud très marquées
(1) Des contrastes entre pays du Sud
Monsieur le Professeur Jacques Barrat insiste dans Géographie économique des
médias66 sur les disparités qui existent entre les pays du Sud. Elles sont, selon lui,
plus encore marquées que celles qui séparent les pays du Nord des pays du Sud.
La chute de l’Union Soviétique a entraîné, poursuit-il, la fin de la notion de Tiers
Monde. Il convient maintenant de distinguer parmi les pays du Sud, quatre groupes,
classés en fonction du niveau de développement de leur média et de celui de leur
économie.
(a) Les pays nouvellement industrialisés
Ce groupe comprend « les pays sous développés les plus modernes, les plus
occidentalisés où les médias ont suivi la croissance économique dans ses envolées,
tout en conservant qualitativement les traditions culturelles liées à de vieilles
habitudes en matière de presse écrite ».
Jacques Barrat classe dans cette catégorie les dragons asiatiques et des vieux pays
de peuplement blanc en Afrique.
(b) Les pays les moins avancés
« Les pays sous-développés les plus pauvres et les moins modernisés où la
médiocrité des médias est un corollaire de l’état d’arriération de l’économie. C’est le
65 Francis Balle, Médias et Sociétés, 10ième édition, Montchrestien, 2001 66 Jacques Barrat, Géographie économique des médias, édition LITEC, 1992
Emmanuel Lacroix Page 134
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
cas pour l’essentiel des pays africains ou la tradition de l’oralité a freiné l’explosion
d’une presse écrite apportée par la colonisation et où la faiblesse de la croissance
économique a fait réserver la télévision à des privilégiés citadins. Lorsque la
télévision y est moderne, c’est que la greffe technique qu’elle représente est
particulièrement récente. La radio y est donc le média roi à la fois parce que sa
technologie est des plus simples et qu’elle est peu coûteuse ».
(c) Les pays en voie de développement
« Les pays sous-développés en situation intermédiaire où les décalages entre
croissance économique et croissance des médias sont flagrants. C’est par exemple
le cas des pays musulmans pétroliers à forte croissance où la débauche médiatique
n’a en rien aidé à un quelconque développement. Les mêmes décalages existent
dans des pays de vieilles civilisation écrite, où la presse a conservé ses lettres de
noblesse, mais où l’essor de la l’audiovisuel a été soit freiné, soit favorisé pour des
raisons tantôt politiques, tantôt financières, comme en Turquie, au Liban, en Egypte,
en Inde, en Argentine, au Pérou. Le Maghreb constitue un bloc un peu à part dans la
mesure où la presse écrite de qualité y est pour l’essentiel francophone, et
l’audiovisuel le plus consommé, d’origine étrangère ».
(d) Les pays se réclamant du marxisme
« Les pays sous-développés qui continuent plus ou moins de se réclamer du
socialisme, où la situation des médias d’Etat est à l’image de leur économie et de
leur régime politique : Chine, Vietnam, Corée du Nord, Cuba, Angola et
Mozambique ».
(2) Des contrastes entre centres urbains et zones rurales au sein des pays du Sud
A ces différences considérables entre pays du Sud, s’ajoutent des disparités
importantes entre zones urbaines et rurales des pays du Sud. Ainsi l’examen de la
situation des télécommunication fait apparaître les éléments suivants :
Emmanuel Lacroix Page 135
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Les villes africaines sont généralement bien desservies même si les délais sont
parfois excessif pour obtenir une ligne de téléphone fixe. Ainsi, au Sénégal et en
Côte d'Ivoire, 80 à 90% du parc de lignes se trouverait en zones urbaines ou
industrielles.
A l'opposé, les zones rurales sont parfois totalement privées de raccordement au
RTC (Réseau Téléphonique Commuté) de l'opérateur historique, alors que près de
80% de la population active africaine vit en milieu rural.
En terme de télédensité, cette disparité entre grande agglomération et reste du pays
est particulièrement notable. En 199467, la télédensité dans la plus grande ville de
chaque pays s'élève à 2,39, pour seulement 0,21% dans le reste des pays, ce qui
constitue un ratio ville principale/reste du pays de 11,4. La spécificité de l'Afrique
subsaharienne, qui privilégie nettement les zones urbaines, se trouve confirmée par
comparaison avec le reste de l'Afrique, où le ratio n'est que de 4,5.
André Nyamba, dans La parole du téléphone68, insiste ainsi sur le cas du Burkina
Faso et dénonce le discours d’un responsable des télécommunications qui après
avoir présenté le chiffre d’affaire et le bénéfice important de l’ONATEL avait
demandé « qui dit mieux ? ». Le chercheur s’indigne en évoquant une satisfaction
malvenue des responsables des télécommunications qui se félicitent de résultats
obtenus au dépend de la pus grande partie des zones rurales dans lesquels le
téléphone reste inaccessible.
De la même façon, l’équipement en radio et en télévision dans les zones rurales est
bien inférieur à celui des zones urbaines.
67 Jean Marchal, les solutions technologiques disponibles, in cédérom Internet au Sud, édité par Pascal Renaud, 1999
Emmanuel Lacroix Page 136
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Ce panorama de la relation entre information et développement nous a permis de
saisir l’importance de la maîtrise de l’information par les pays du Sud, mais
également ses limites et les luttes idéologiques qui ont perturbé la compréhension de
son poids réel.
Observons maintenant les modifications majeures qui découlent de l’avènement de
la société de l’information. Quadruple révolution, confusion et multiples contradictions
nous amèneront à conclure à la nécessité de réinventer les outils du savoir pour
permettre l’intégration des pays du Sud dans cette société.
22.. UUnnee nnoouuvveellllee ssoocciiééttéé,, ddee nnoouuvveeaauuxx eennjjeeuuxx
a) Une quadruple révolution
Philippe Quéau évoquait dans Identité culturelle et éthique de l’universel69, la
quadruple révolution que provoque l’entrée dans la société de l’information.
(1) Une révolution culturelle
L’avènement de la société de l’information, dont l’internet est un pilier, n’est pas une
simple révolution technique, c’est une bouleversement beaucoup plus profond qui
s’opère.
Le nouveau média peut être comparé à une imprimerie universelle , personnelle,
ubiquitaire, instantanée et très bon marché. L’invention est comparable à l’apparition
de l’alphabet. Elle nous conduit à une nouvelle manière d’être et modifie notre regard
sur le monde.
Cette révolution pourrait conduire à l’émergence d’une intelligence collective, très
utile pour résoudre des problèmes de plus en plus complexes et globaux.
(2) Une révolution sociale et économique
68 André Nyamba, La parole du téléphone, sous la coordination d’Annie Chéneau-Loquay, Enjeux des technologies de la communication en Afrique, éditions Karthala, 2000 69 Philippe Quéau, Identité culturelle et éthique de l’universelle, Enjeux des technologies de la communication en Afrique, sous la coordination de Annie Chéneau-Loaquay, éditions Karthala, 2000
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
L’économie est dématérialisée progressivement ; les entreprises et les institutions
deviennent globales. Le fossé se creuse entre le « temps réel » de la finance et de la
spéculation qui transfère des millions d’euros par jour et le temps long de l’émigration
des hommes chassés par la faim ou la guerre. La lenteur des hommes devient
disqualifiante.
(3) Une révolution politique
La dérégulation des télécommunications et la déterritorialisation liée intrinsèquement
au cyberespace conduiront toutes deux à une diminution de la souveraineté des
Etats.
Devant un tel choc, Philippe Quéau s’interroge : « de quelle sagesse avons nous
aujourd’hui besoin ? »
Il est selon lui nécessaire d’adopter aujourd’hui une éthique universelle pour réguler
une économie mondialisée. Cette éthique donnera une assise plus ferme à l’Etat
actuellement tenté par la démission. Elle pourra servir de base à la constitution d’une
civilisation mondiale.
b) La confusion
Cette quadruple révolution nous plonge dans une société nouvelle, inconnue et
introduit une confusion des plans de lecture et d'interprétation. Cette confusion
touche d’abord au langage, on confond les images et les réalités, les métaphores et
les modèles, les mots et les concepts.
Elle touche ensuite à l'exercice des différents plans de l'esprit, on confond ses divers
domaines d'intervention : la pensée claire et la pensée obscure, le songe et la raison.
C'est également une confusion des valeurs, au sens économique comme au sens
philosophique. « L'éclatement des bulles financières et foncières, la mise en état de
lévitation virtuelle des marchés spéculatifs, l'abstraction sans racine des grands
indicateurs économiques ou de la valeur des monnaies, ne permettent plus
Emmanuel Lacroix Page 138
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
aujourd'hui de dire ce que vaut le yen, ou le mètre carré à Ginza »70. Cette confusion
des valeurs se traduit également par le renversement des fins et des moyens, le
Marché prime sur les hommes, l'économie du réel est asservie à une spéculation
purement virtuelle.
C'est enfin une confusion des niveaux de réalité et de vérité : la simulation, la réalité
virtuelle, la réalité augmentée, deviennent parfois plus réelles que le réel, et
contribuent à perturber notre compréhension de la nature et du réel même.
La quadruple révolution évoquée précédemment est également la source de
contradictions multiples de la société en transition.
c) Des contradictions multiples
(1) Contradictions entre le lieu et le non lieu, le local et le global
Le cyberespace, sans frontière et par nature supra-national s’oppose aux territoires,
aux pays. Le développement croissant des communautés virtuelles (financières,
intellectuelles…) semble aller de paire avec l’essor des ghettos du monde réel.
Parallèlement, les villes mondes se développent, plus éloignées de leurs banlieues
que de l’autre ville du monde la plus lointaine. Des pays entiers sont jugés inutiles
aux marchés.
(2) Contradictions entre le droit et le non-droit
Les lois nationales s’appliquent aux mêmes espaces virtuels que d’autres avec
lesquelles elles sont en contradiction. A l’image des objets néonazis apparaissant sur
le site nord-américain Yahoo et dont la vente fut interdite par la justice française, le
cyberespace autorise toutes les contradictions.
70 Philippe Quéau, l’université de l’universel, Congrès de Locarno, 30 avril - 2 mai 1997 : Annexes au document de synthèse CIRET-UNESCO
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Philippe Quéau évoque par exemple la « contradiction aussi entre la défense du
copyright et la promotion d’un régime de copyleft préoccupé avant tout par la
circulation des idées pour la recherche et l’invention ».
(3) Contradictions entre l’intérêt général et les intérêts particuliers, entre la fin et les moyens
Devant les frondes organisées par quelques intérêts privés en faveur de la rétribution
de leurs propriétés intellectuelles, quelle doit être la place réservée à l’intérêt
général ? Les tentative de breveter le génome humain, pourtant quintessence du
patrimoine commun de l’humanité, démontrent le poids croissant du domaine privé
au détriment du domaine public. Quelle sera la place réservée à chacun de ces
domaines dans le cyberespace ?
Il est nécessaire de développer un espace public riche sur les réseaux, il permettra
l’accès à la connaissance, à l’expression de la diversité culturelle et à la logique
participative. L’inversion du rapport actuel entre privé et public devra passer, comme
le demandait déjà Kant, par une transformation des citoyens en « législateurs de
l’universel ». C’est cette condition qui permettra l’événement d’une éthique
universelle.
d) Entrée de l’Afrique dans la société de l’information et
université de l’universel
(1) La coupure : une exclusion de l’Afrique
Le court-circuit (glocalisation, désintermédiation, dérégulation) provoque en réaction
la création de ghettos et de tribus excluantes. Les infos-riches et les infos-pauvres
sont placés sur deux courbes de développement divergentes. Les infos-riches ont
accès aux NTIC et peuvent tirer au mieux parti du réseau pour accroître leurs
connaissances, ce qui contribue à creuser davantage encore l’écart avec les infos-
pauvres. La capacité à utiliser les NTIC fournit un avantage comparatif important, de
nouvelles clés d’intelligibilité et de compréhension du monde qui permettent de
creuser l’écart symbolique et matériel avec ceux qui restent au bord des inforoutes.
Emmanuel Lacroix Page 140
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Ces nouvelles formes d’exclusion sont préoccupantes car elles coupent le monde en
d’énormes blocs dont certains pans entiers sont totalement mis sur le côté d’une
nouvelle société.
A ces nouveaux défis, l'Université de demain devra selon Philippe Quéau71, opposer
une triple réponse. Elle devra être catalytique, connectée, coopérative.
(2) Réinventer l’enseignement pour répondre à ces nouveaux défis : l’université de l’universel
(a) Une université catalytique
L'université de demain doit être catalytique : elle doit dissoudre et rendre possible.
Elle doit être transdisciplinaire et donner les moyens de mettre les champs
disciplinaires en relation.
Elle devra avant tout donner les moyens de comprendre les nouvelles formes
d’intelligibilité du monde virtuel. Il faut maîtriser la navigation sur les océans du savoir
et permettre l’auto-apprentissage et le travail de collaboration en développant des
ressources d’une pensée globale.
Philippe Quéau prédit ainsi que « La pensée en terme de systèmes permettra d'avoir
une vue d'ensemble des multiples liens possibles entre causes et effets, entre
modèles et réalités. La pensée expérimentale, qui fait varier certains aspects d'un
problème tout en en conservant invariants certains autres, permet d'explorer
exhaustivement un ensemble de possibilités et de résultats, de les comparer, de les
extrapoler. On privilégiera la simulation et la recherche épistémologique, les
expériences de pensée et l'expérience de "nouvelles réalités" ».
71 Philippe Quéau, l’Université de l’universel, Congrès de Locarno, 30 avril - 2 mai 1997 : Annexes au document de synthèse CIRET-UNESCO
Emmanuel Lacroix Page 141
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
(b) Une université connectée
L’Université de demain doit être universelle, connectée par l’internet à toute les
bases de données et centres de savoir de la planète. Elle ne manquera pas de
données brutes, de textes, d'images et de sons.
Elle devra également enseigner la préservation des identités locales, tout en ne
perdant jamais de vue son utopie globale. Elle devra notamment protéger la diversité
culturelle contre les tendances du marché à rationaliser et à harmoniser.
(c) Une université coopérative
A l’image du mouvement de la copie libre, la coopération devient une nécessité
vitale, et une exigence éthique. La capacité à travailler en groupe, en réseaux, en
partenariat sera primordiale.
L’environnement d'apprentissage doit être global, ouvert, au service de tous, en tous
lieux, à tous moments et dans tous les domaines du savoir. « Les laboratoires
virtuels, les réseaux d'hopitaux, d'école, de bibliothèques, de musées, de serveurs
d'archives en ligne constitueront une nécessaire infrastructure coopérative globale . Il
faudra développer la coopération intellectuelle, les expériences de pensée
collecticielle, le jumelage virtuel de groupes de recherche, les réunions virtuelles
qu'autorisent les techniques de groupware ».
La société du travail sera remplacée à terme par une société de « pleine activité
fondée sur l'intégration, la participation, la créativité culturelle et sociale, et sur des
valeurs de paix, de tolérance, de respect de l'Autre, de compassion, de symbiose
avec la nature. »
L'Université de l'Universel devra fournir les cadres intellectuels et moraux pour un tel
avènement.
« Dans la période de crise grandissante que nous allons traverser, la priorité devra
être de contribuer à recréer le lien social dissous par le triple mouvement de
confusion, de mise en court-circuit et de coupure ». La tâche de l'Université de
Emmanuel Lacroix Page 142
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
l'Universel sera prioritairement de définir et promouvoir une culture véritablement
universelle. Cette dernière devra s’opposer aux cultures stéréotypées et
hégémoniques que le marché tentera également de diffuser universellement. Le
Marché ne pourra cependant, et c’est sa limite, satisfaire que les besoins solvables.
L'enjeu de la culture de l'Universel sera de s'adresser à tous, son terrain d'action
privilégié sera le domaine public, gratuit par nature, et qu'il faudra rendre plus
accessible et plus attrayant. Créer un lien social global par une culture
authentiquement universelle, voilà la mission de l'Université de l'Universel.
(3) Les premiers pas vers la mise en place d’une université universelle
Les objectifs assignés par Philippe Quéau à l’Université de l’Universel sont
poursuivis dès aujourd’hui par de nombreux projets nationaux et internationaux. Le
premier pas consiste à créer des centres de savoir et d’enseignement connectés.
Pascal Renaud soulignait déjà dans la revue Université72 en mars 1997, qu’en
« Afrique francophone, par exemple, on constate qu'il y a très peu de bibliothèques,
notamment universitaires, très peu de centres de documentation, et qu'ils sont tout à
fait insuffisants en termes de contenus. Internet apporte donc quelque chose
d'extrêmement précieux puisqu'il permet l'accès à une sorte de bibliothèque de taille
considérable, qui recèle une bonne partie de la production scientifique mondiale.
Beaucoup de richesses en anglais bien sûr, mais aussi en français.
Sur le plan de l'apprentissage à la recherche personnelle, Internet pourrait devenir un
instrument de formation essentiel pour le Sud. La capacité d'autonomie est
déterminante pour monter une entreprise, pour diriger des équipes, pour développer
des activités économiques, sociales ou politiques. Pour cela, il n'y a pas besoin
d'investissements très lourds, mais de formation technique. Les cinquante ou cent
ordinateurs de l'université de Ouagadougou, au Burkina Faso deviendront, une fois
reliés à l'Internet, des points d'accès à une immense bibliothèque virtuelle. Ils
pourront servir à la documentation et à la formation de milliers d'étudiants ».
72 Roger Tréfeu, entrevue avec Pascal Renaud, in Revue Université, vol 18-1, mars 1997
Emmanuel Lacroix Page 143
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
(a) Universitas 21
Constitué de 18 universités, Universitas 21, est un consortium multinational pour
l'internationalisation de l'enseignement supérieur, dont le siège est à Singapour.
(b) U21 global
Un projet d'université en ligne, U21 global, dont l'objectif est de vendre des
formations supérieures à des régions du monde où la demande est croissante mais
où des universités de type traditionnel ne seraient pas viables, se développe.
(c) Université virtuelle Francophone
L'université Virtuelle Francophone (UVF) a été lancée officiellement en 1998 à
l'initiative de l'organisation internationale de la Francophonie.
(d) Université virtuelle Africaine
L'Université Virtuelle Africaine (UVA) a été lancée à l'initiative de la Banque Mondiale
en 1997.
(e) Autres projets locaux et exemples de logiciels libres pour l’enseignement
(i) Initiative sénégalaise
La Fondation Internet Nouvelle Génération (FING) informait le 11 juin 200273 que le
président sénégalais, Abdoulaye Wade, avait annoncé qu'il avait réuni la somme
nécessaire au financement de son projet d'Université du futur africain (UFA). Cette
nouvelle université devrait accueillir près de 5 000 étudiants de tout le continent et
sera reliée par Internet, pour chaque matière enseignée, à une université étrangère.
Bien plus qu'une coopération, le projet repose sur une "codiplômation" : les diplômes
seraient décernés par l'UFA et par l'université étrangère qui aura accepté le
partenariat.
73 www.fing.org
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
(ii) Une plate-forme logicielle libre : Claroline
Claroline (Classroom Online) est une plate-forme logicielle d’enseignement en ligne
développée par l'Université catholique de Louvain. Elle permet aux enseignant de
créer et administrer un support interactif pour leurs cours en ligne.
Claroline est distribuée sous licence GPL, elle est donc gratuite et le code source est
ouvert à ses utilisateurs. Une communauté contribue bénévolement au
développement et à l'avancement de Claroline qui existe à présent en 8 langues74.
(iii) Les cours du MIT américain bientôt
accessibles aux pays du Sud par Internet
Les professeurs du Massachussetts Institute of Technologogy (MIT), l’institut de
technologie américain, ont annoncé qu’ils allaient prochainement mettre en ligne le
contenu des leurs conférences, exercices, examens, travaux dirigés, manuels,
expériences et simulations ainsi que des démonstrations et une grande partie de la
bibliographie et du programme d'enseignement.
La base de données du MIT contient plus de deux mille cours qui sont accessibles
gratuitement (si ce n'est pas à usage commercial). Les quatre-vingt-dix premiers
seront mis en ligne dans les prochains mois75.
Aux questions soulevées par Philippe Quéau sur les nouvelles normes
d’interprétation et à sa proposition de développer la place de l’espace public dans le
cyberespace pour maintenir la diversité culturelle dans une société universelle, la
francophonie propose pour sa part, l’usage du français comme barrière à
l’uniformisation culturelle. Elle présente l’enjeu géopolitique du développement de
contenus en français comme un impératif majeur. Après avoir rappelé le statut
Francophone du Burkina Faso, nous observerons les enjeux de la Francophonie et
74 www.ntbf.org 75 Louis-Martin Essono - http://thot.cursus.edu/rubrique.asp?no=17385, 7-8-2002
Emmanuel Lacroix Page 145
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
du rôle des NTIC dans ce défi Francophone. Nous poserons enfin l’utilité de la
création d’un contenu en langues ethniques sur les inforoutes.
33.. EEnnjjeeuuxx ddee llaa FFrraannccoopphhoonniiee ffaaccee àà llaa ggllooccaalliissaattiioonn
a) Le Burkina Faso : un pays officiellement Francophone et dont
la population maîtrise très mal l’anglais
Au Burkina Faso très peu de personnes maîtrisent l’anglais. L’étude menée au
Burkina par Sylvestre Ouedraogo76 et publiée en décembre 2000, montrait que le
manque de familiarité avec cette langue était cité en troisième position par les
internautes interrogés sur les problèmes qu’ils rencontraient dans la recherche
d’information. Cette réponse apparaissait derrière « problèmes multiples » et
« recherche coûteuse ». La réponse « problèmes multiples » correspondait en outre
probablement en partie à une mauvaise maîtrise de l’anglais.
Selon l'Association Réseaux et Développement77, il n'y aurait en juillet 2002 que 2,81
% du contenu des sites Web en français dans l'ensemble de la Toile mondiale. Ceci
contre 75 % de contenu en langue anglaise.
Le français occupe une place encore moindre dans les forums de discussion avec à
peine 1,5 % des échanges, très loin derrière l’anglais utilisé à 80 % pour les
échanges sur le Net.
L’absence de maîtrise de la langue anglaise représente donc un handicap important
dans l’accès à l’information.
b) Enjeux géopolitiques du développement d’un contenu
Francophone sur les inforoutes
(1) Quels sont les enjeux de la Francophonie ?
76 Sylvestre Ouedraogo, accès aux nouvelles technologies de la communication au Burkina Faso, www.anais.org, Ouagadougou, Septembre 2000 77 http://thot.cursus.edu/rubrique.asp?no=3803
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Monsieur le Professeur Jacques Barrat souligne dans Géopolitique de la
francophonie78, l’enjeu géopolitique majeur représenté par la francophonie et la
nécessité induite d’un développement d’un contenu francophone sur Internet.
Charles Durand dans La mise en place des monopoles du savoir79 s’interroge
également sur la situation actuelle et démontre que l'adoption officielle ou officieuse
de l'anglais comme véhicule de communication internationale dans le seul domaine
scientifique entraîne un certain nombre d'effets pervers plus importants que les
bénéfices que cette pratique est censée apporter à ses promoteurs. Plus
particulièrement, dans le cadre universitaire, elle entraîne la formation de monopoles
en opposition absolue aux principes de libre accès au savoir dans des
établissements d'enseignement supérieur libres et ouverts.
L'actuel quasi-monopole du savoir technico-scientifique moderne détenu par les
Anglo-américains - que certains refusent encore d'admettre - n'est pas lié aux seuls
mérites de leurs chercheurs et de leurs ingénieurs. Pour une large part, ce quasi-
monopole est la conséquence directe de l'adoption de la langue anglaise comme
langue internationale en science et en technologie, démultipliant ainsi la visibilité du
monde anglo-saxon dans ces secteurs au détriment de celle des autres.
(2) L’émergence des NTIC et la Francophonie
L’absence d’une structure de direction centralisée pour l’internet offre, selon
Jacques Barrat, une chance pour la diversité des expressions culturelles. Il est
important dans cette logique que les pays francophones maîtrisent l’environnement
technologique et maintiennent une stratégie d’ensemble80. Il est notamment
nécessaire de créer un contenu français sur Internet.
C’est une approche semblable que développe le japonais Kenzaburô Ôé81, prix
Nobel de littérature, qui voit dans l’internet, le « média de résistance pour les
individus » qui permettra de contrebalancer le fait que les Etats, les relations
internationales et toute la planète sont « écrasés par la langue d’un seul pouvoir ».
78 Jacques Barrat, Géopolitique de la francophonie, PUF, 1997 79 Charles Durand, La mise en place des monopoles du savoir, éditions l’harmattan, 120 pages, 2002 80 Jacques Barrat, La francophonie et les autoroutes de l’information, dialogues, avril 1996 81 Kenzaburô Ôé, Internet et moi, Le monde diplomatique, décembre 1998
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
(a) Face à la stratégie hégémonique anglo-saxonne, la Francophonie doit « occuper le terrain » des NTIC
Selon Jacques Barrat, « les consortiums américains des industries de l’information
se concertent chaque année au sein d’association telles que ACM (Association
Computing Machinery) ou CUI (Computer User Interforce) ». Ils ont selon lui, une
stratégie qui consiste à s’implanter dans les réseaux européens et à acquérir des
droits sur les richesses européennes de contenu (œuvres d’art, encyclopédies…) qui
fournissent ensuite la matière première de l’édition électronique.
Il ajoute que « c’est notamment l’objet de la création de la société Continuum par
Microsoft ». Les pays de la francophonie doivent donc présenter un front uni face à
ces stratégies.
(b) Actions de la Francophonie
La Francophonie doit donc non seulement assurer la présence de contenus
francophones, mais aussi élaborer les normes et les outils propres à engendrer un
modèle francophone d’accès à la connaissance. C’est donc bien la bataille des
contenus informationnels au sens large (culture et procédure d’accès) qui est
engagée.
Selon Jacques Barrat, « la Francophonie doit orienter prioritairement ses
investissements dont le volume est nécessairement limité, en direction des éléments
constitutifs (contenus francophones, numérisation des fonds patrimoniaux…) de son
espace virtuel. Cela se fera partiellement au détriment du développement
d’infrastructures qui ne pourraient que se mettre au service de l’effort de guerre
américain. »
Une politique francophone de l’information devra soutenir les efforts en matière de :
- « Numérisation des fonds culturels et produits francophones, condition même
d’une présence de la Francophonie sur l’Inforoute ;
Emmanuel Lacroix Page 148
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
- Standardisation des formats d’échanges, qui rend possible la communication et
la réutilisation des ressources ;
- Normalisation afin que les francophones puissent communiquer sur l’inforoute
dans leur langue. Une participation massive aux comités internationaux semble
s’imposer, faute de quoi la langue française pourrait se trouver appauvrie au
nom d’impératifs techniques. Ainsi, par exemple, la norme ISO Latin 8859-1
persiste à ignorer le caractère « oe » ;
- Navigation : il s’agit de rendre disponible des outils de recherche et de
navigation en français permettant d’utiliser au mieux les ressources des
réseaux. »
La coopération apportée à court terme par les pays développés de la
Francophonie et les bénéfices probables à long terme du développement de la
Francophonie sur l’internet représentent des tremplins pour accéder à la modernité.
Le « pays des hommes intègres » a donc tout intérêt à favoriser la stratégie
Francophone et profiter de son appartenance à cette communauté.
c) Un contenu en langues ethniques sur les inforoutes : un enjeu
culturel au delà des enjeux géopolitiques de la Francophonie
Le français est la langue officielle de 13 pays d’Afrique noire. La population
officiellement francophone représente dans cette région approximativement 120
millions d’habitants.
Jacques Barrat estime que seuls 10% de cette population parle réellement le
français correctement. Le français est effectivement l’outil de communication officiel
de l’administration et des relations internationales ainsi que la langue de
l’enseignement. Mais dans la pratique il est faiblement utilisé en tant qu’instrument
de communication et d’échange social au quotidien.
Jacques Barrat oppose francophonie et approche anglo-saxonne en affirmant que
« la Francophonie s’oppose à une idéologie libérale mondialiste et nivelante qui fait
de la culture un accessoire du commerce ». La Francophonie, plus qu’un tremplin
commercial, participe à une lutte pour le maintien de la pluralité.
Emmanuel Lacroix Page 149
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Ce combat pour la diversité d’expression et de culture se joue également au niveau
ethnique. Si le français est bien le lien fédérateur qui doit être maintenu et amplifié, il
n’implique pas pour autant une disparition des particularismes et de la diversité
ethnique. Ainsi, la création d’un contenu en langues ethniques permettrait d’une part
de conforter l’embryon de culture africaine sur le web et d’autre part de donner accès
à un contenu aux africains qui ne sont francophones qu’officiellement et qui
représentent selon Jacques Barrat, près de 90% de la population totale des pays
francophones (jusqu’à 95% au Mali).
Il serait par exemple envisageable de mettre à la portée des burkinabé des contenus
en langues ethniques organisés sous la forme de portails locaux. On peut également
imaginer, à l’image du site de l’association Edukafaso, de créer une version de
chaque site burkinabé dans la langue majoritaire de la zone concernée par le site.
L’association a ainsi traduit le site www.edukafaso.org en dioula, langue
majoritairement utilisée dans la région de Bobo-dioulasso.
La création de ce type de contenu pourrait dans un premier temps être encouragée
pour les sites des associations oeuvrant au Burkina Faso.
Cette présentation des incidences et des enjeux du développement de l’internet en
Afrique Francophone va nous permettre dégager les perspectives offertes par
l’internet au Burkina Faso et d’envisager clairement les objectifs de long, moyen et
court termes. Il convient en premier lieu de dégager les conditions préalables et les
solutions qui permettront l’amélioration de l’accès à l’internet au Burkina Faso. Nous
observerons ensuite les facteurs de développement du contenu burkinabé sur la
toile. Nous examinerons enfin les opportunités commerciales directes portées par les
NTIC.
Emmanuel Lacroix Page 150
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
III. Quelles perspectives pour l’internet
au Burkina ?
La condition préalable à la maîtrise des nouveaux outils de la communication, est
l’alphabétisation de la population. Ceci n’est pas un mince défi dans un pays de
tradition orale et dont la population est dans sa grande majorité analphabète.
L’amélioration de l’informatisation et des télécommunications intervient ensuite
comme condition nécessaire au développement des points d’accès à l’internet.
L’utilisation véritable du réseau nécessite enfin le développement des compétences,
véritables clés d’accès aux savoirs virtuels. Toutes ces modernisation nécessitent
cependant d’importants investissements, nous verrons que des solutions ont été
proposées pour financer les infrastructures et le développement de l’internet africain.
A. L’entrée du Burkina Faso dans la société de l’information : comment assurer l’accès à l’internet et le développement des compétences « utilisateur » ?
Le développement de l’alphabétisation est le premier pas vers une appropriation des NTIC. Nous verrons que les enjeux de l’alphabétisation sont considérables et qu’ils font l’objet d’un travail important de la part de l’UNESCO. Nous nous pencherons ensuite sur quelques exemples d’actions nationales et associatives dans le domaine de l’éducation.
11.. DDéévveellooppppeerr ll’’aallpphhaabbééttiissaattiioonn :: llee pprreemmiieerr ppaass vveerrss uunnee
aapppprroopprriiaattiioonn ddeess NNTTIICC
Comment l'Afrique, et plus précisément certains pays du Sahel, peuvent-ils atteindre
un niveau d'alphabétisation optimal pour assurer l’indispensable maîtrise des outils
préalable à l’entrée dans la société de l’information ?
Emmanuel Lacroix Page 151
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Cette question est vaste et a donné lieu a de nombreuses publications et des points
de vues divergeant. Après avoir examiné la situation et les enjeux de l’éducation,
nous nous pencherons sur les pistes soulevées par l’UNESCO dans ce domaine
ainsi que sur l’action d’une association française au Burkina Faso.
a) Panorama, et enjeux
(1) Aperçu de l’éducation dans le monde
Le dossier d’information sur l’éducation pour tous publié sur le site web de la section
de l’éducation de l’UNESCO82, précise que des progrès réels ont été réalisés depuis
la Conférence mondiale sur l'éducation pour tous (Jomtien, Thaïlande,1990), vers les
objectifs de l 'Education pour tous :
« 10 millions d'enfants supplémentaires sont scolarisés chaque année ; le niveau
d'alphabétisation des adultes est passé à 85 % pour les hommes et à 74 % pour les
femmes ; le nombre d 'enfants dans le primaire est passé de 599 millions en 1990 à
681 millions en 1998 ; celui des enfants non scolarisés a reculé de 127 à 113
millions. »
« Dans le même temps, plus de 100 millions d 'enfants, dont une majorité de filles,
restent exclus de l'éducation. Si rien n'est fait, ils rejoindront les 875 millions
d'adultes analphabètes, dont près des deux tiers sont des femmes ».
« Dans les pays en développement, on estime qu ’un enfant de 6 à 11 ans sur cinq,
soit 113 millions, n ’est pas scolarisé. 60% sont des filles. Neuf pays – le
Bangladesh, le Brésil, la Chine, l’Egypte, l’Inde, l’Indonésie, le Mexique, le Nigeria et
le Pakistan – abritent 70 % des analphabètes du monde. Les filles et les femmes
sont les premières concernées. L’Asie du sud compterait 60 % de femmes
analphabètes. A l ’échelle mondiale, une femme sur quatre ne sait pas lire ».
« La qualité de l'éducation demeure souvent faible et inégale. En Asie du sud et en
Afrique subsaharienne, moins des trois quarts des élèves atteignent la cinquième
82 dossier d’information sur l’éducation pour tous, www.unesco.org
Emmanuel Lacroix Page 152
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
année primaire. La recherche a pourtant démontré que six années d 'éducation
primaire sont nécessaires pour atteindre des capacités durables en écriture et en
calcul ».
« La pandémie de VIH/sida menace de saper les progrès accomplis en matière
d’alphabétisation et d’éducation générale. Dans les pays d ’Afrique les plus touchés,
jusqu’à 10 % des enseignants pourraient être emportés par le virus au cours des
cinq prochaines années ».
« De nombreux pays ont réalisé des progrès spectaculaires dans le développement
de la scolarisation, l'amélioration des taux de rétention et d'achèvement scolaires et
la réduction des disparités sexuelles. La scolarisation a doublé en cinq ans en
Ouganda, au Malawi et en Mauritanie, avoisinant un taux brut de 100 %. Le Bénin et
la Guinée-Bissau ont également bien accru la scolarisation dans le primaire.
Certaines régions sont également proches de l 'éducation primaire universelle. Elle
est déjà réalisée dans les pays développés et les pays en transition ; et les régions d
'Asie orientale/Océanie et 'Amérique latine / Caraïbes touchent quasiment au but ».
(2) Enjeux de l’éducation
La brochure publiée par la section de l’éducation de l’UNESCO83, note que
l’éducation « apporte aux enfants, aux jeunes et aux adultes la capacité de réfléchir,
d’effectuer des choix et de mener une vie meilleure. Elle brise le cycle de la pauvreté
et constitue une des clés du développement économique et social. L’éducation des
mères a des répercussions hautement bénéfiques sur la santé, le bien-être familial et
la fécondité.
- En Ouganda, quatre années d ’éducation primaire augmentent la production d
’un fermier de 7 %;
- En Zambie, l’enfant d ’une mère ayant fréquenté l’école primaire a 25 % de
chances de survie en plus que l ’enfant d ’une mère sans éducation ;
83 brochure de communication de la section éducation de l’UNESCO, www.unesco.org
Emmanuel Lacroix Page 153
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
- Au Bangladesh, les femmes ayant reçu une éducation secondaire ont trois fois
plus de chances de se rendre à une réunion politique que les femmes non
éduquées ;
- Les filles éduquées sont généralement beaucoup moins exposées au virus du
sida ».
b) Les objectifs de Dakar et l’idéal de l’éducation pour tous
La Conférence mondiale sur l’éducation pour tous (Jomtien, Thaïlande, 1990) a fait
de l’éducation de base une des grandes priorités du développement. Depuis, des
progrès réels ont été accomplis : 10 millions d’enfants supplémentaires sont
scolarisés chaque année, et le niveau d ’alphabétisation des adultes est passé à 85
% pour les hommes et à 74 % pour les femmes.
En avril 2000, le Forum mondial sur l’éducation (Dakar, Sénégal) a permis l’adoption
du Cadre d’action de Dakar qui définit les objectifs de l’éducation pour tous et les
stratégies pour les atteindre.
Ce document retient 6 objectifs dans la lutte contre l’illettrisme :
1. Développer et améliorer sous tous leurs aspects la protection et l 'éducation
de la petite enfance, et notamment des enfants les plus vulnérables et
défavorisés.
2. Faire en sorte que d'ici à 2015 tous les enfants, notamment les filles, les
enfants en difficulté et ceux appartenant à des minorités ethniques, aient la
possibilité d'accéder à un enseignement primaire obligatoire et gratuit de
qualité et de le suivre jusqu'à son terme.
3. Répondre aux besoins éducatifs de tous les jeunes et de tous les adultes en
assurant un accès équitable à des programmes adéquats ayant pour objet
l'acquisition de connaissances ainsi que de compétences nécessaires dans la
vie courante.
4. Améliorer de 50% les niveaux d'alphabétisation des adultes, et notamment
des femmes, d'ici à 2015, et assurer à tous les adultes un accès équitable aux
programmes d 'éducation de base et d 'éducation permanente.
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
5. Eliminer les disparités entre les sexes dans l'enseignement primaire et
secondaire d'ici à 2005 et instaurer l'égalité dans ce domaine en 2015 en
veillant notamment à assurer aux filles un accès équitable et sans restriction à
une éducation de base de qualité avec les mêmes chances de réussite.
6. Améliorer sous tous ses aspects la qualité de l'éducation dans un souci
d’excellence de façon à obtenir pour tous des résultats d 'apprentissage
reconnus et quantifiables notamment en ce qui concerne la lecture, l'écriture
et le calcul et les compétences indispensables dans la vie courante
Le Cadre d’action de Dakar fixe en outre trois grandes échéances :
1. « 2002 : finalisation des plans d’actions nationaux. D ’ici 2002,tous
les pays devront avoir établi ou renforcé des plans d’action nationaux,
définissant des stratégies concrètes pour la réalisation des objectifs de
Dakar. Ces plans s’inscriront dans les stratégies de lutte contre la
pauvreté existantes et seront préparés en consultation avec l
’ensemble de la société civile (responsables communautaires,
enseignants, parents, apprenants, etc.).
2. 2005 : réaliser l’équité entre filles et garçons. D ’ici 2005, l’équité
devra être instaurée entre garçons et filles dans l’éducation primaire et
secondaire.
3. 2015 : réaliser l’éducation pour tous. 2015 est la date butoir de
l’universalisation de l’éducation primaire obligatoire et de l ’amélioration
de 50 % des niveaux d’alphabétisation des adultes ».
c) Exemples d’actions nationales ou associatives
(1) Le développement d’un secteur éditorial en langues nationales
Afin de résoudre le problème de l'illettrisme, la plupart des pays africains
francophones ont inscrit l'utilisation des langues africaines comme une stratégie
incontournable pour améliorer et développer leurs programmes éducatifs. Cette
stratégie vise principalement l'intégration des langues africaines comme moyen de
communication orale et écrite dans l'enseignement.
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Hassina Alidou Ngame résume les stratégies mises en place dans une publication
intitulée Stratégies pour le développement d’un secteur éditorial en langues
nationales dans les pays du Sahel : Burkina Faso, Mali, Niger et Sénégal84.
(2) L’amélioration de l’accès aux livres en Afrique
L'accès limité aux livres et aux bibliothèques a eu un impact très important sur
l'éducation en Afrique. C’est ce qu’affirmait la Banque mondiale en soulignant que «
La rareté des matériels éducatifs dans les salles de classe représente l'obstacle le
plus sérieux à l'efficacité de l'éducation en Afrique ».
Dans cette logique, Diana Rosenberg85 analyse l'accès, l'approvisionnement et
l'utilisation de matériels complémentaires de lecture dans un certain nombre de pays
africains. Elle montre comment de grands espoirs, des plans ambitieux et des efforts
individuels ont été annulés à cause d'une planification, de moyens et d'infrastructures
inadéquates et d’un manque de suivi dans la formation des enseignants à
l'enseignement par les livres.
(3) Une action associative au Burkina : EDUKAFASO
L’action de l’association Edukafaso s’inscrit dans la logique de l’UNESCO.
L’association se présente de la façon suivante : « Edukafaso est une O.S.I.
(Organisation de Solidarité Internationale) de droit français constituée sous la forme
d'une association loi 1901. Elle est basée en Région parisienne. Elle compte 150
adhérents de tous âges, de toutes conditions et professions, répartis dans la France
entière, et pour une petite partie à l'étranger. Un quart des adhérents sont connectés
à Internet. Sur les trois points où elle agit (Bobo Dioulasso, Tougan et Konsabla),
Edukafaso dispose de correspondants qui veillent à ce que les fonds soient bien
84 Hassina Alidou Ngame, Stratégies pour le développement d'un secteur éditorial en langues nationales dans les pays du Sahel Burkina Faso, Mali, Niger et Sénégal, Collection : Perspectives sur le développement du livre africain n° 8. Groupe de travail de l'ADEA sur les livres et le matériel éducatif, 2000. 85 Diana Rosenberg, Des livres pour les écoles. Améliorer l'accès aux ouvrages de lecture en Afrique, 2000
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
employés et répartis équitablement. Avec un budget de fonctionnement annuel très
modeste (11 000 euros), elle aide plus de 400 enfants à suivre leur scolarité ».
Il est intéressant de noter que, conformément aux conclusions de l’UNESCO,
l’association intervient prioritairement sur le développement de l’éducation de base :
« Son champ d'action est l'éducation de base, cycle qui correspond à notre
éducation primaire (CP - CM2) et qui prévoit l'acquisition par les enfants des
compétences élémentaires : savoir lire, écrire et compter. Elle intervient sur le plan
matériel (distribution de fournitures scolaires, mis en place de cantines de brousse,
paiement des frais de scolarité), mais aussi culturel. Elle établit ainsi des
rapprochements entre écoles primaires de France et du Burkina et promeut la culture
burkinabé à travers ses supports d'information (journal de l'association, site internet,
newsletter…). Elle met également en place des bibliothèques jeunesse qui servent
de support à son action éducative. A terme elle sensibilisera les maîtres à l'utilisation
du multimédia et d'Internet et à leurs vertus éducatives ».
Par ailleurs, Edukafaso privilégie l’enseignement des filles et l’action dans les zones
rurales :
« Edukafaso s'adresse avant tout aux enfants les plus défavorisés en leur donnant
les moyens matériels de suivre les enseignements. Les priorités concernent les
zones rurales beaucoup moins pourvues en équipements scolaires que les
agglomérations. La scolarisation des filles est plus particulièrement suivie. La volonté
de l'association est à la fois d'élargir la base de bénéficiaires mais également de
suivre les enfants dans la durée. En ce sens, les écoliers qui intègrent le cycle
secondaire sont accompagnés par Edukafaso ».
Dans le domaine des NTIC, Edukafaso a d’ores et déjà engagé des actions de
sensibilisation. Un « chat » a par exemple été organisé à l’occasion de la fête de
l’internet 2002 entre Bobo-Dioulasso et un collège de Seine et Marne. L’opération,
relayée par de nombreux médias a atteint pleinement son objectif de sensibilisation.
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
L’alphabétisation est certes indispensable, mais pas suffisante, le développement de
l’accès à l’internet passe également par une amélioration de l’informatisation et des
infrastructures de télécommunications. Observons maintenant quelles sont les
conditions nécessaires à ce développement.
22.. AAmméélliioorreerr llee nniivveeaauu dd’’iinnffoorrmmaattiissaattiioonn eett lleess iinnffrraassttrruuccttuurreess ddee
ttééllééccoommmmuunniiccaattiioonnss
a) Informatisation
(1) Des signes positifs
Le passage à l’an 2000 a permis d’accroître le parc informatique et de le renouveler
en partie. Parallèlement, le « boum » informatique des années quatre-vingt-dix a
donné naissance dans toutes les grandes villes du Burkina à des secrétariats publics
informatisés. Ces petites entreprises offrent des services de bureautique et
favorisent la rencontre de la population avec l’informatique.
Enfin, le développement et le succès grandissant du marché du matériel d’occasion
confirme l’intégration progressive de la culture informatique dans les couches
moyennes de la population.
(2) Un abaissement des droits de douanes ?
La question de l’abaissement des droits de douanes et des taxes sur le matériel
informatique en Afrique est récurrente. Il est d’usage de demander que ceux-ci soient
abaissés afin de favoriser le développement de l’informatique dans les pays les
moins avancés. Nous nous permettrons de remettre en question cette logique en
opposant la nécessité de favoriser l’informatisation au statut de produit de luxe du
matériel informatique et à la nécessité pour un des pays les plus pauvres du monde
de maintenir une de ses rares sources de revenu.
La question de l’arbitrage doit être posée : la source de revenu représentée pour
l’Etat par les droits de douanes et les taxes sur le matériel informatique vaut-elle
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
moins que le bénéfice potentiel attendu d’un abaissement de ces taxes ? Alain
Mingat notait dans cette logique dans Le Monde Diplomatique86 que « les ressources
budgétaires sont globalement rares en Afrique eu égard à la faiblesse de la base
fiscale des pays, si bien que les arbitrages à faire s'avèrent plus difficiles et doivent
par conséquent avoir une justification factuelle plus forte ».
Nous pouvons constater que le matériel informatique est un produit de luxe. Quel
que soit le niveau des taxes et du transit, le coût du matériel acheté hors taxe en
Europe est déjà d’un niveau tel qu’il est inaccessible pour l’essentiel de la population
du Burkina Faso. Nous avons vu en effet qu’un Pentium 4 (passons sur les
caractéristiques détaillées) pouvait être acheté 889 euros HT en France en juillet
2002. Nous avons vu également que le coût du transit de cet ordinateur vers le
Burkina représenterait 192 euros. Le vendeur appliquant une marge, le prix moyen
de vente de l’ordinateur au Burkina est donc compris entre 1800 et 2000 euros.
Le niveau de prix du matériel informatique est tel que nous pouvons supposer que
les personnes qui s’équipent sont plutôt fortunées et que l’ajout de quelques dizaines
d’euros à un achat qui dépasse déjà 1000 euros ne pèse pas lourd dans la décision
d’achat. Une importante part du parc informatique des particuliers est en outre
détenu par des expatriés européens qui disposent habituellement de revenus
confortables. Notons également que la plupart des organismes internationaux ainsi
que les structures de l’Etat profitent d’une exonération quasi totale de taxes et de
droits de douanes.
Enfin, le cas des grandes entreprises mérite d’être examiné. Elles sont susceptibles
d’allouer un montant fixe à l’équipement informatique et réduisent donc le nombre de
machines achetées en fonction du niveau des taxes. Ce cas de figure est peu
courant au Burkina Faso. Les grandes entreprises sont effectivement très peu
nombreuses. Sans doute serait-il cependant souhaitable de réserver des accords
spécifiques à ces dernières.
86 Alain Mingat, Les nouveaux outils de l'évaluation scolaire, Le monde diplomatique, décembre 2000, page 33
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Notons enfin que les ressources issues des taxes et des droits de douanes sur
l’informatique, représentaient pour l’Etat un montant important, non négligeable sur
un budget qui atteignait 69 millions de dollars en 2001.
Toutes ces raisons nous conduisent à adopter une position relativement nuancée sur
la nécessité d’une baisse du niveau des droits de douane.
(3) Le développement du logiciel libre
Nous avons évoqué précédemment l’enjeu souligné par Philippe Quéau, du
développement d’un espace public de l’information. Les logiciels libres procèdent de
cette philosophie et leur utilisation ainsi que leur développement représentent des
enjeux déterminants pour l’entrée de l’Afrique dans la société de l’information.
Dans le cas du Burkina Faso, plusieurs organismes participent à la promotion de ces
logiciels. L’association NTBF souligne par exemple l’importance de l’abandon de
l’utilisation des logiciels payants et notamment des produits Microsoft omniprésents
dans le monde.
Nous regrettons à ce sujet que des organismes comme les centres multimédias
municipaux ne participent pas à la promotion de ces logiciels et mettent a contrario
l’accent sur les outils Microsoft.
(4) La nécessité d’une coordination des différentes actions et d’une recherche de synergie
De nombreuses associations oeuvrent dans le domaine du développement de
l’informatique et des nouvelles technologies au Burkina Faso ; cependant les
témoignages semblent montrer qu’aucun rapprochement de ces différentes
organisations n’a été effectué pour l’instant.
Il semble pourtant que la mise en place d’une structure de coordination permettrait
une importante synergie dans l’action des ONG. La création d’un site web auto-
animé par les associations et permettant une information en temps réel de
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
l’ensemble des groupes sur les actions menées et sur les envois de frets, permettrait
sans aucun doute des économies importantes pour l’ensemble des associations. Le
Trade Point illustre ce concept appliqué au commerce.
Le site web Faso-ONG, site portail des ONG du Burkina, lancé par l’association Yam
Pukri (http://www.faso-ong.org) représente un premier pas important dans cette
logique. L’aspect vitrine et annuaire du site reste cependant limité et il convient
d’aller plus loin et d’offrir une plate-forme d’échange digne de ce nom, ce qui
nécessite l’utilisation de bases de données. L’association Yam Pukri travaille en ce
sens.
b) Infrastructures de télécommunication
(1) L’enjeu de la boucle locale radio
Selon Jean Marchal87, expert en télécommunication et développement, l'évolution
technique permet aujourd'hui d'envisager les technologies radio comme une
alternative au réseau filaire traditionnel. Les technologies radio permettent un
déploiement rapide et adapté à la demande, pour des densités d'abonnés faibles et
fortes.
Tous les industriels promettent que les technologies radio permettront d'offrir des
services aussi perfectionnés que ceux proposés sur un réseau "filaire" (voix, Internet,
vidéocommunication), avec en outre la possibilité de fournir des services de mobilité
sur une zone réduite, pour un investissement initial relativement mesuré.
C'est pourquoi la boucle locale radio constitue un enjeu important du développement
des télécommunications, particulièrement en zones enclavées à faible densité, et un
marché stratégique pour les opérateurs et les industriels.
L'intérêt de cette technologie réside pour une bonne part dans son coût relativement
modéré et surtout progressif. En effet, la planification du réseau de distribution est
87 Jean Marchal, les solutions techniques disponibles, in cédérom Internet au Sud, édité par Pascal Renaud, 1999
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
plus simple puisqu'il n'est en général pas nécessaire de connaître a priori la position
exacte des futurs clients.
L'exploitant peut, par ajout ultérieur d'antennes, augmenter la capacité du réseau et
sa couverture en fonction de la demande, ce qui lui assure une meilleure
progressivité des investissements en fonction du nombre d'abonnés que dans le cas
d'une solution filaire.
Il y a également un enjeu réglementaire et concurrentiel : la boucle locale apparaît
comme une brèche dans les monopoles existants, permettant éventuellement
l'émergence d'opérateurs locaux, partiellement ou totalement pris en charge par les
populations locales. L'utilisation d'infrastructures hertziennes devrait en effet
permettre de déployer un réseau à moindre coût et plus rapidement que dans le cas
d'infrastructures filaires, et ainsi de permettre réellement l'apparition d'opérateurs
locaux, agissant là où l'opérateur historique n'a pas voulu s'impliquer.
La boucle locale radio peut être enfin conçue comme un vecteur de développement
des services à haut débit (multimédia, nouveaux services). La boucle locale filaire
paraît en effet moins adaptée dans sa structure actuelle à la fourniture de services
haut débit que des réseaux déployés dans les fréquences de la gamme des micro-
ondes.
Au Bénin, le FAI Firstnet a développé une offre de connexion par onde radio depuis
fin 2000. Elle a permis de connecter de nombreux points d’accès à l’internet dans ce
pays et l’offre, bien qu’encore en rodage, peut dores et déjà être considérée comme
un succès88.
(2) Les bénéfices attendus de la libéralisation du secteur des télécommunications
La loi du 23 décembre 1998 fixe les conditions de libéralisation du secteur des
télécommunications au Burkina Faso. Cette réforme, suggérée par le Fond
88 Ken Lohento, Maîtrise sociale des TIC en Afrique : Analyses d’expériences d’utilisation des TIC, www.iafric.net, avril 2001
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Monétaire International (FMI) et la Banque Mondiale, s’articule autours des points
suivants :
- Abandon du monopole des télécommunications
- Libéralisation du secteur avec ouverture du marché burkinabé à de nouveaux
opérateurs
- Mise en place d’un organe de régulation du secteur
La loi prévoit la répartition suivante du capital de l’ONATEL :
- 63% à des investisseurs privés
- 34% à l’Etat
- 3% aux salariés
L’ouverture du secteur a également conduit à l’arrivée de nouveaux opérateurs sur le
marché des télécommunications. Les sociétés TELECCEL et MSI CELLULAR
INVESTMENTS à travers sa filiale CELTEL ont ainsi lancé des prestations à
l’attention du grand public avec l’ouverture officielle de leurs réseaux en janvier 2001.
Les deux entreprises ont également accordé des agréments à des sociétés
commerciales pour la distribution de leurs produits.
Si l’introduction de la concurrence dans les télécommunications semble être
profitable pour la qualité de service et pour les prix pratiqués, des questions
subsistent quant à la rentabilité réelle à terme des privatisations.
(3) Bénéfice sectoriel et bénéfice global : les réserves émises face à la logique de libéralisation
De nombreux économistes du développement émettent en effet des doutes sur le
bénéfice global pour le pays d’une politique de libéralisation économique. La grande
désillusion, ouvrage publié récemment par le prix Nobel d’économie Joseph Stiglitz89
a notamment popularisé une approche très critique de l’action du FMI dans les pays
du Sud.
89 Joseph E. Stiglitz, La grande désillusion, fayard, 2002
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
D’autres, pionniers de l’internet en Afrique, émettent également des réserves sur
l’efficacité des politiques d’ouverture des marchés des télécommunications en
Afrique de l’Ouest.
Pascal Renaud notait90 notamment que ces libéralisations imposées par les
institutions de Bretton woods, s’appuient sur un mythe selon lequel l’internet serait le
résultat de la politique américaine de dérégulation des télécommunications. Il
souligne que cette relecture idéologique renforce la légitimité des acteurs
commerciaux du réseau et qu’elle est totalement contraire à la réalité. Ni en Europe,
ni aux Etats-Unis, affirme-t-il, le déploiement du réseau ne s’es effectué à la faveur
de libéralisations. Il démontre ensuite que la progression du parc informatique est en
revanche stimulé par les interventions de l’Etat dans le financement des
infrastructures.
Pascal Renaud rappelle que l’internet est alimenté par des fonds publics depuis sa
naissance et que c’est le projet NSFnet de la National Science Fondation (NSF) qui a
contribué le plus à son développement. Ce projet actif jusqu’en 1995 s’est ensuite
désengagé progressivement au profit des opérateurs privés. Pascal Renaud souligne
que c’est dans ce cadre, fortement subventionné et protégé du marché que l’Internet
s’est développé et stabilisé aux Etats-Unis. Cela le conduit à s’interroger : « si le
démarrage de l’Internet s’est appuyé, au Nord sur une intervention massive de l’Etat,
est-il sérieux de proposer aux pays les plus pauvres de faire appel au marché ? »
Samir Amin91 abonde également dans ce sens en affirmant que la déréglementation
des télécommunications dans les pays du Sud permet aux entreprises de
s’approprier des profits juteux et qu’elle est « catastrophique pour la majorité des
pays du monde ».
90 Pascal Renaud, Vers la désertification technologique du sud ? in enjeux des technologies de la communication en Afrique, éditions Kathala, 1999 91 Samir Amin, de l’outil à l’usage, ? in enjeux des technologies de la communication en Afrique, éditions Kathala, 1999
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Nous allons maintenant observer que favoriser l’accès à l’internet signifie également
de multiplier les endroits qui permettent à la population d’accéder aux nouveaux
savoirs ; ceci pour un coût raisonnable et avec un éventuel accompagnement
technique.
33.. FFaavvoorriisseerr ll’’aaccccèèss àà ll’’IInntteerrnneett
a) Le coût de l’accès à Internet en question
(1) Le coût des communications téléphoniques pour les fournisseurs d’accès à Internet concurrents de l’ONATEL
L’ONATEL est l’opérateur national de télécommunications mais l’office est également
le plus important fournisseur d’accès à l’internet du pays. Ce double statut lui donne
un avantage comparatif par rapport à la concurrence qui mérite d’être signalé.
L’ONATEL, en ne donnant pas à la concurrence les avantages dont elle profite,
empêche la baisse des prix d’accès à l’internet dans le pays. Hormis à
Ouagadougou, les prix sont ceux du plus cher des opérateurs, c’est à dire ceux de
l’ONATEL.
Effectivement, alors que l’ONATEL offre, par le biais du numéro 1150, un tarif unique
de télécommunication dans tout le pays pour l’accès à l’internet (au prix d’une
communication locale), elle ne reconnaît pas à ses concurrents la possibilité de
profiter également d’un numéro d’accès à tarification spéciale.
Cette situation empêche la concurrence d’offrir un service dans les zones du Burkina
Faso dont le potentiel commercial n’est pas suffisant pour permettre qu’un opérateur
loue une ligne spécialisée.
Nous soulignerons sur ce point qu’il est uniquement question de volonté politique. Ce
qui peut cependant se comprendre facilement au vu du niveau important des
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
recettes issues de l’Internet pour l’ONATEL qui reste pour encore quelques mois une
société d’Etat.
(2) Le coût d’une ligne spécialisée
Selon le site web de l’ONATEL, un accès permanent à Internet par une ligne
spécialisée à 64 Kbps représente, hors frais de mise en service, un coût mensuel de
1 003 000 Fcfa (soit à peu près 1500 euros / mois). Si l’on ajoute à ce prix celui de
« location vente modem série synchrone » qui représente un coût de 94.400 francs
CFA mensuel, la location d’une ligne spécialisée coûte approximativement 1 100 000
francs CFA chaque mois.
Ce coût, fixé par l’ONATEL, dépasse légèrement le prix moyen d’une ligne
spécialisée 64 Kbps en Afrique qui est, selon François Ossama, de 800 000 F
CFA92.
Le coût d’une ligne spécialisée rend très difficile le développement d’un accès à
Internet bon marché, fiable et rapide.
Une projection sur l’amortissement d’une ligne spécialisée par un cybercafé donne
une idée limpide de la difficulté de développer ce service sans l’amortir en parallèle
avec une activité de FAI.
En effet, si l’on considère un cybercafé possédant cinq ordinateurs, louant un local et
une ligne spécialisée à 64 Kbps. Le chiffre d’affaire mensuel nécessaire pour
atteindre le seuil de rentabilité peut être estimé approximativement (hors frais
financiers et salaires) de la façon suivante :
- 1 ordinateur coûte environ 1 200 000 F CFA. En amortissant chaque ordinateur
sur 5 ans, l’amortissement mensuel total sera d’environ 100 000 F CFA.
- La location d’un local en centre ville de Ouagadougou ou de Bobo-Dioulasso
peut être estimé à environ 100 000 F CFA par mois.
- La location de la ligne spécialisée coûte 1 000 000 FCFA par mois.
92 François Ossama, Les nouvelles technologies de l’information. Enjeux pour l’Afrique subsaharienne, éditions l’Harmattan, 2001
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Le total, hors frais financiers et hors salaires, peut donc être évalué à près de 1 200
000 F CFA par mois.
Le coût d’une heure d’Internet dans un cybercafé étant de 1000 FCFA, il est
nécessaire pour amortir les charges que le cybercafé ait chaque mois, un minimum
de 1200 heures d’activité. Ce qui signifie que chaque ordinateur doit être occupé 9,6
heures par jour, toute l’année, avec une journée de fermeture hebdomadaire. Cela,
nous le rappelons, sans salaires, ni frais financiers.
On peut dès lors facilement constater qu’un cybercafé ne peut amortir une liaison
spécialisée sur une seule activité. Cela explique d’une part le faible nombre de
cybercafés (quoi que croissant) qui disposent d’une liaison spécialisée et d’autre part
que très peu d’entrepreneurs se contentent de fournir l’accès à l’internet et multiplient
les activités afin d’amortir les coûts fixes de location de la ligne. Nous avons évoqué
précédemment le cybercafé de Sylvain Zongo, également FAI, ce cas de figure
illustre parfaitement notre propos.
b) Pour une appropriation progressive des NTIC dans le monde
rural : la création de postes de médiateurs
L’Afrique des villages peut-elle être laissée sur le bord des inforoutes ? Il est vrai que
les obstacles apparaissant dans les zones rurales semblent souvent
infranchissables. Nous avons tracé précédemment un panorama des conditions
nécessaires à l’utilisation de l’internet. Cet outil nécessite notamment un niveau
d’alphabétisation très éloigné des réalités du monde rural ; il implique également une
appropriation technique inenvisageable à court terme ; il nécessite enfin des
infrastructures et un équipement onéreux.
Le principe de réalité nous force à nous interroger sur les modalités que pourraient
prendre l’implantation des NTIC en zone rurale. Les nombreuses questions posées
par la simple arrivée du téléphone chez les Sanan du Burkina Faso nous amènent à
douter de la possibilité d’introduire l’internet dans les campagnes.
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Cependant, le succès d’opérations telles que DEVENET ou le constat effectué par
de nombreux chercheurs des avantages offerts par les télécommunications en
matière de développement économique du monde rural, soulignent la nécessité de
faire entrer l’Afrique des villages dans la société de l’information.
Comment concilier ces principes antagonistes ? Le développement des postes de
médiateurs au Sénégal mérite qu’on s’y arrête. Annie Chéneau-Loquay et Pape
N’diaye Diouf évoque dans Disponibilités et usages des technologies de la
communication dans les espaces de l’échange au Sénégal93, le cas d’un médiateur à
Sandaga, le grand marché du centre de Dakar. Babacar Diop a installé une petite
entreprise de conseil et de formation en communication dans un nouveau centre
commercial à côté du grand marché. Son entreprise dispose d’une connexion à
l’internet. Il a ouvert des boîtes aux lettres électroniques aux commerçants et les
informe à partir d’informations trouvées sur le web. Il a par exemple évité à l’un d’eux
de se rendre à Hong-Kong en lui fournissant les renseignements dont il avait besoin.
Ce type de services pourrait se développer et créer des emplois privés dans les
contextes ruraux qui réuniront suffisamment de demande pour permettre une activité
rentable. Une adaptation de cette fonction de médiation à une logique d’action
publique, pourrait également être envisagée dans les autres situations. Soulignons
que ce principe de médiation est utilisé en France depuis plusieurs années.
c) Le cas du Sénégal : le développement des cabines
téléphonique et des télécentres
Au Sénégal, un politique de développement des télécentres a permis d’accroître
considérablement la télédensité et de développer de la sorte un maillage de
télécommunication favorable au développement des NTIC.
En milieu rural, la SONATEL (opérateur public de télécommunication du Sénégal) a
installé gracieusement des cabines téléphonique et en à confié la gérance aux chefs
des communautés rurales concernées. En moyenne, deux milliards de francs CFA
93 Annie Chéneau-Loquay, Pape N’diaye Diouf et Thibaud Le Renard, Disponibilités et usages des technologies de la communication dans les espaces de l’échange au Sénégal, Sous la coordination d’Annie Chéneau-Loquay, Enjeux des technologies de la communication en Afrique, éditions Karthala, 2000
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
sont investis annuellement dans les zones rurales, soit environ 15% des
investissements annuels. L’objectif est de mettre le téléphone à moins de 5 km de
tout citoyen. Les recettes de ces infrastructures rurales ne couvrent cependant pas
les charges d’amortissement d’exploitation mais la SONATEL remplit parfaitement sa
mission de service public. A terme, l’existence de lignes téléphoniques pourra être
exploitée pour des accès à l’Internet.
Parallèlement, en milieu urbain, des autorisations ont été délivrées à des personnes
physiques pour qu’elles ouvrent et exploitent des petits centres de
télécommunication appelés « télécentre privé ». Le projet avait débuté en 1992 avec
l’installation de 4 télécentres et a rapidement pris une ampleur étonnante.
Gaston Zongo note que cette « politique de développement des télécentres contribue
à améliorer les conséquences néfastes de la faible densité téléphonique et de la
mauvaise productivité du secteur africain des télécommunications, en corrigeant un
tant soit peu leur impact, et peut, moyennant une analyse plus poussée, permettre
une meilleure connaissance de la structure de la clientèle (élément important de la
planification). Enfin les télécentres, après avoir rendu le téléphone populaire, peuvent
servir de points d’accès aux autoroutes de l’information. S’ils sont organisés et
conseillés, les exploitants des télécentres pourraient, avec les profits réalisés,
investir en équipements adéquats, pour se connecter à l’Internet, servir de centres
de consultation et d’hébergement pour les PME/PMI, les artisans et autres clients
individuels pour de nombreux services à valeur ajoutée et intensifier leur impact
socio-économique et financier pour une actualisation sur l’offre de service ».
Le Burkina Faso a approché le Sénégal pour tirer profit de son expérience et les
télécentres sont de plus en plus nombreux au « pays des hommes intègres »,
notamment à Ouagadougou.
Assurer l’alphabétisation, l’informatisation, le développement des infrastructures et
des points d’accès ne sera pas suffisant si la population ne dispose pas des
Emmanuel Lacroix Page 169
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
compétences qui permettent de découvrir les nouveaux océans du savoir. Cette
appropriation technologique nécessite de mobiliser les différents acteurs, de
multiplier les formateurs, de mener des actions de sensibilisation et de capitaliser les
expériences.
44.. DDéévveellooppppeerr lleess ccoommppéétteenncceess «« uuttiilliissaatteeuurr »»
a) Impliquer le monde associatif et élaborer un plan de
coordination
Les besoins en formation de l’Afrique sont considérables et s’expriment dans de
nombreux domaines. Le manque de formateurs est réel et il représente le problème
central du développement des compétences. Le site burkinet.com nous apprend
ainsi que « le gouvernement du Burkina Faso a annoncé vendredi que quelque 1.100
enseignants manquaient dans les établissements secondaires par rapport aux
besoins en effectifs pour l'année scolaire 2002/2003. "Si dans une classe qui est
censée avoir cinq enseignants, vous n'en avez que deux, il est évident qu'ils ne
peuvent pas enseigner l'ensemble des plages
horaires prévues pour cinq personnes", a déploré le ministre burkinabè des
Enseignements secondaire et supérieur, Laya Sawadogo, au cours d'une conférence
de presse à Ouagadougou. "Cette situation a une répercussion sur le rendement de
l'enseignement", a ajouté M. Sawadogo, qui tient "la déperdition des enseignants et
la construction anarchique d'établissements" pour responsable de ce déficit ».
Il conviendrait donc dans cette logique de mobiliser l’ensemble des ressources
humaines de bonne volonté.
Sans doute serait-il souhaitable de publier un « livre blanc » des actions de formation
prioritaires ou de mettre en ligne un site qui aiguillerait les associations sur les
besoins en formation du pays.
D’une façon générale, la création d’une structure d’information à l’intention des
associations serait souhaitable. Elle permettrait de faciliter les actions et de
concentrer les investissements sur les aspects les plus importants du développement
des compétences.
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
b) Former des formateurs
La formation de formateurs est une solution au manque de main d’œuvre dans la
formation. Cependant cela ne peut être effectué que dans un cadre matériel et social
qui assure la pérennité des formations et l’exploitation des compétences acquises.
La formation de formateur doit donc s’inscrire dans un projet global bien défini.
c) Mener des action de sensibilisation et initier le plus tôt
possible les élèves à l’informatique
Il est indispensable que des actions de sensibilisation telle que la fête de l’Internet
continue à être réalisée afin que la population prenne conscience du potentiel offert
par l’internet. L’exemple du « chat » mis en place par l’association Edukafaso entre
Bobo-Dioulasso et un collège de Seine et Marne mérite d’être à nouveau souligné
comme une illustration d’une action efficace de sensibilisation.
Parallèlement il est nécessaire de conduire des actions de sensibilisation dans les
écoles et de fournir à ces dernières des équipements informatiques et un
accompagnement éducatif afin d’habituer les élèves le plus jeune possible à utiliser
ces outils.
d) Capitaliser les expériences
(1) Pourquoi capitaliser ?
Le nombre de formations menées au Burkina Faso est déjà conséquent. Ainsi une
recherche rapide sur le web permet de découvrir plusieurs témoignages de
formateurs qui présentent leur action et évoquent les aléas de leurs expériences. Il
peut s’avérer très intéressant de « décortiquer » le contenu de chacun de ces
rapports afin d’en conserver l’essence et d’améliorer progressivement la pertinence
des interventions autant sur le fond que sur la forme.
Emmanuel Lacroix Page 171
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
L’examen d’un témoignage d’une jeune femme intervenant pour le compte de la
Francophonie et pris au hasard de la toile permet par exemple de dégager certains
éléments :
(a) Des conditions précaires d’enseignement
La jeune femme, d’origine canadienne, fait d’abord part de sa surprise quant aux
conditions matérielles d’enseignement :
« Je suis arrivée alors que les locaux n'étaient pas aménagés et les ordinateurs,
toujours dans leurs boîtes.
Étant contrainte à un seul ordinateur et un branchement Internet turbulent, je donnais
la formation aux abonnés sur une base individuelle ou en groupe de deux personnes.
Parfois, il y avait deux participants, mais 5 ou 6 personnes nous entouraient pour
écouter. »
(b) La difficulté de planifier la formation
Les aléas du Burkina rendent toute planification très difficile, la formatrice fait ainsi
part du fait qu’elle n’a pas pu aborder la formation telle qu’elle l’avait imaginé :
« Lors de notre formation pré-départ du Canada, on nous avait avertis que nos
attentes, nos objectifs, notre plan de travail changeraient sans doute pour s'adapter
aux réalités du terrain. Je sous estimais à quel point mes tâches en tant que
formatrice seraient variées.
La formation telle que je l'avais anticipée, n'a pas eu lieu. Toutefois, j'ai travaillé pour
aider les gens en tenant compte de leurs connaissances et aptitudes en
informatique. J'ai côtoyé des internautes de tous les niveaux : à la fois des gens qui
avaient peur de l'ordinateur et des gens qui en connaissaient beaucoup plus que
moi. »
(c) Des repères culturels différents qui rendent l’enseignement plus difficile
Enfin, les différences culturelles rendent l’enseignement difficile car les métaphores
ne sont pas toujours explicites :
Emmanuel Lacroix Page 172
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
« Je donnais souvent des exemples pour illustrer des notions ou des concepts de
l'informatique. Parfois, je me rendais compte que mes exemples étaient pertinents
dans un contexte nord-américain, mais avaient comme résultat d'assombrir les
choses pour les Burkinabé. Ce fut tout un défi d'imaginer des exemples pertinents
pour illustrer des concepts qui leur sont complètement étrangers.
Un jour, j'assistais un élève à créer une adresse de courriel. Le concept du mot de
passe lui étant complètement nouveau, j'ai voulu lui donner un exemple. Je lui ai
expliqué l'utilité d'un mot de passe en lui donnant l'exemple du mot de passe au
guichet automatique dans une banque. Il est inutile de vous dire que mon exemple
n'a pas éclairé mon ami.
Au début, j'ai eu du mal à vraiment saisir s'ils avaient compris. Par contre, il a été
intéressant de constater que les gens étaient de plus en plus à l'aise avec moi au fur
et à mesure qu'on se voyait, car ils posaient de plus en plus de questions. Parfois,
j'étais émerveillée qu'un abonné ait compris une manipulation ou un concept du
premier coup, alors qu'il avait du mal à comprendre une notion que moi je
considérais plus simple. »
(2) Comment capitaliser ?
La capitalisation des expériences est essentielle. Elle pourrait par exemple prendre
la forme d’un site web dédié à la formation au Burkina Faso et autorisant une
animation participative sur le modèle de SPIP.
Nous encourageons dans cette logique, l’association NTBF, qui a effectué un
premier pas déterminant dans le sens d’une capitalisation des expériences, d’une
implication commune franco-burkinabé et qui utilise SPIP comme technique de
communication.
Il nous semble essentiel que ce travail de mise en commun, soit transversal et
permette l’accumulation de connaissances autant du côté des associations que de
celui des professionnels.
Emmanuel Lacroix Page 173
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Interrogeons nous enfin sur les moyens de financer ces ambitieux investissements.
De la taxe sur les brevets proposée par Philippe Quéau à la taxe sur les bénéfices
apportés par les NTIC aux pays riches suggérée par Pascal Renaud, plusieurs
solutions existent.
55.. FFaavvoorriisseerr llaa ccrrééaattiioonn dd’’uunn eessppaaccee ppuubblliicc ddee ll’’iinnffoorrmmaattiioonn eett
ffiinnaanncceerr llee ddéévveellooppppeemmeenntt ddeess iinnffrraassttrruuccttuurreess eenn AAffrriiqquuee
a) Une taxe sur les brevets ?
Le projet « The Public Domain.02 » vise à consolider l’espace public de l’internet en
construisant un secteur ouvert à tous les usages, sauf les utilisations commerciales,
comprenant des textes et des logiciels d’auteurs vivants, et financé par des
ressources publiques ou une taxe sur les télécommunications. En France, Philippe
Quéau s’est fait le défenseur de l’approche du domaine public.
Ce dernier intervenant en janvier 2000 dans Le Monde Diplomatique posait la
question suivante : à qui appartiennent les connaissances ? Dans cette réflexion sur
les brevets et la propriété intellectuelle, Philippe Quéau notait que fin 1997,
l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) avait décidé de diminuer
d'environ 15 % les redevances imposées aux entreprises désireuses de déposer des
brevets industriels. La raison de cette diminution se trouvait dans le surplus financier
dégagé par l’organisation en raison de l’augmentation fulgurante du nombre de dépôt
en 10 ans.
Philippe Quéau soulignait avec ironie que « le fait qu'une organisation internationale
gagne trop d'argent est, à l'heure actuelle, rarissime. Et les idées ne manquent pas
pour affecter à l'intérêt général de tels fonds, provenant continûment d'une des
sources financières les plus profondes qui soient... »
Cela amenait cet intellectuel à remarquer que « les brevets industriels, et plus
généralement toutes les productions intellectuelles protégées par les lois sur la
Emmanuel Lacroix Page 174
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
propriété intellectuelle, utilisent pour une bonne part un fonds commun
d'informations, de savoirs et de connaissances appartenant de manière indivise à
l'humanité tout entière. Il serait juste, dans une optique de « bien commun mondial »,
d'utiliser les revenus obtenus par l'OMPI grâce au dépôt des brevets. Par exemple,
pour encourager la création d'une bibliothèque publique mondiale virtuelle,
uniquement constituée de textes appartenant au domaine public, et donc accessibles
à tous gratuitement.
Cela serait d'autant plus juste que, dans des organisations internationales comme
l'OMPI, c'est la puissance publique combinée des pays membres qui est mise au
service de la défense des intérêts privés des déposants. Le coût de l'infrastructure
juridique et policière permettant le renforcement effectif de la propriété intellectuelle
est, en effet, entièrement supporté par des fonds publics ».
L’auteur concluait en rappelant qu’un rapport du PNUD proposait qu’une partie des
fonds collectés auprès des détenteurs de brevets puisse également servir à financer
des recherches négligées du fait de leur manque d'intérêt pour le « marché ». « Ces
sommes pourraient être allouées aux agences des Nations unies dont on sait
qu'elles sont notoirement sous-financées. Ces agences pourraient alors d'autant
mieux jouer le rôle de régulation de la recherche au niveau planétaire qu'on attend
d'elles, rôle que le marché laissé à lui-même est bien incapable de remplir ».
b) Taxer les bénéfices apportés par les NTIC à la croissance
des pays riches ?
Pascal Renaud, chercheur à l’IRD et à l’Unitar, reprenait en 2001 dans la revue
futur(e)s94 l’idée émise par le Programme des Nations unies pour le développement
(PNUD) de taxer les e-mail. Il commentait cette solution en affirmant que « l'Union
européenne n'hésite pas à taxer les bénéfices réalisés dans les villes industrielles du
Nord pour aider le Sud ou l'Est du continent. En toute logique, les promoteurs de la
mondialisation devraient assumer la redistribution mondiale des ressources au profit
des zones défavorisées. Les NTIC sont, nous dit-on, à l'origine de 10 % à 20 % de la
croissance actuelle. Pourquoi ne pas reverser 1 % ? Et donner, par exemple, un
ordinateur au Sud pour cent vendus au Nord ? ».
94 Pascal Renaud, Quand la high-tech réduit le fossé nord-sud, in futur(e)s numéro 4, mars 2001
Emmanuel Lacroix Page 175
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
c) Les propositions issues du débat de l’AFTIDEV
D’autres propositions méritent d’être signalées, notons par exemple celles issues du
débat en ligne sur la maîtrise sociale des nouvelles technologies en Afrique sur le
forum AFTIDEV (http://www.aftidev.net) :
- Les redevances perçues lors de l’exploitation par l’Afrique des infrastructures
de commutations du Nord durant les communications ;
- La mise en place d’une taxe sur les communications électroniques,
- La mise en place d’une taxe sur les noms de domaines;
- Taxe sur les profits des activités économiques liées aux nouvelles technologies
de l’information des filiales au Sud des entreprises du Nord.
Le panorama des solutions pour favoriser l’accès à l’internet au Burkina ayant été
dressé, intéressons nous maintenant à la production et à la mise en ligne de contenu
burkinabé sur les autoroutes de l’information.
La création du contenu de la toile burkinabé doit en premier lieu éviter les pièges liés
aux fantasmes des entrepreneurs face à un nouveau média dont le potentiel semble
a priori immense, mais qui est dans les faits moins « magique » qu’il n’y paraît. Nous
définirons les axes qui permettront au Burkina Faso de définir ses priorités de
communication et d’éviter tout mimétisme. Nous examinerons ensuite les moyens de
favoriser la création de contenu en diminuant les coûts pratiqués par les entreprises
de conception web.
Emmanuel Lacroix Page 176
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
B. Entre Francophonie et présence du Burkina dans la société de l’information : comment favoriser la création de contenu burkinabé sur le web ?
Les risques liés aux fantasmes des entrepreneurs face à un média en apparence
« magique », sont importants. Il convient d’éviter le mimétisme et les entreprises
doivent faire preuve de retenue.
11.. LLeess rriissqquueess ddeess ffaannttaassmmeess eett ddeess uuttooppiieess ppoouurr lleess
eennttrreepprreenneeuurrss
a) Ne pas construire de contenus « à l’occidentale »
Face à l’avènement d’un nouvel outil de communication qui permet, chose rare, de
communiquer du Sud vers le Nord, les risques sont grands de voir survenir des
fantasmes sources de dépenses inconsidérées.
Les entrepreneurs burkinabé doivent se méfier des services « à l’occidentale » ; le
public cible n’est pas le même, le nombre d’internautes diffère également. Le modèle
d’un financement par la publicité n’est, par exemple, pas un modèle adapté au
contexte africain (pas assez de public notamment). On peut cependant se demander
également si ce modèle est adapté à l’Europe elle-même. Les nombreuses faillites
de « start up » lancées dans le secteur de l’internet à la fin des années 90 ont
introduit un doute légitime sur ce point.
Nous avons pu noter que de nombreux sites burkinabé proposaient des insertions
publicitaires, nous nous permettrons de douter de l’intérêt de cette démarche au vu
du faible nombre d’internautes burkinabé. Le mimétisme n’est certainement pas
souhaitable, il est indispensable que le Burkina exploite ses singularités et crée un
contenu adapté à son contexte
Emmanuel Lacroix Page 177
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Les questions sous-jacentes à tous projets de site web dans le secteur privé doivent
être tout d’abord celle de l’intérêt du projet puis celle de sa rentabilité.
Ces questions sont en fait identiques dans tous les domaines d’activité et il n’existe
aucune raison pour que l’Internet fasse exception au principe. Cependant les
nombreux fantasmes issus du média peuvent provoquer des décisions irrationnelles.
b) Illustration du principe
(1) Un commerçant de Ouagadougou
Le site de l’agence Syfia International rapporte un exemple qui illustre parfaitement
les dépenses inconsidérées consécutives aux fantasmes qui règnent parfois autour
des nouvelles technologies au Burkina Faso.
Il cite l’exemple d’un commerçant de Ouagadougou qui possède un site web réalisé
en 1998 par le CENATRIN. L’activité du commerce consiste à vendre des produits
alimentaires tels que le riz, le sésame et le karité.
L’article, ironique, évoque l’adresse web erronée qui apparaît sur la carte de visite du
commerçant. Cette erreur, loin d’être anecdotique, est révélatrice d’une
méconnaissance totale du média. En février 2000, le commerçant ne possédait
toujours pas de connexion Internet et n’avait jamais envoyé ni reçu le moindre
courrier électronique. Son site web présente un bon de commande en ligne, mais ni
les références ni les tarifs des produits ne sont indiqués et le commerçant n’a jamais
reçu la moindre commande.
Le commerçant en question a déboursé en 1998, 1,6 millions de francs CFA pour
l’achat de son site (2 439 euros).
Ce cas ne reflète pas l’état d’esprit de tous les entrepreneurs du Burkina Faso, mais
nous avons pu constater que la méconnaissance du média et de son impact réel
étaient fréquemment sources de dépenses exagérées. Un autre cas, à Bobo-
Dioulasso, vient illustrer également ce principe.
Emmanuel Lacroix Page 178
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
(2) Un hôtelier de Bobo-Dioulasso
En octobre 2001, un hôtelier de Bobo-Dioulasso discutait d’un projet de site web
avec un concepteur web français. Le concepteur français proposait un prix de 200
000 F CFA pour la réalisation d’un site web plaquette pour l’hôtel (304,9 euros).
L’hôtelier, ne comprenant pas que le prix était annoncé en francs CFA et réagissant
donc par rapport à un prix de 200 000 francs français, envisageait sérieusement le
contrat, mais négociait tout de même en demandant une réduction du prix de moitié.
Il envisageait donc de payer un site web « plaquette » 100 000 francs français, soit
approximativement le double du prix qui serait proposé en France pour le même
service. Comprenant finalement son erreur, l’hôtelier s’est exclamé : « Je signe tout
de suite : à ce prix là ce n’est plus de la coopération, c’est du social ! ».
Cela reflète parfaitement la combinaison des fantasmes et des coûts trop élevés de
la conception web dans le pays. En effet, un hôtelier de Bobo-Dioulasso peut il
espérer réellement un retour supérieur aux 200 000 F CFA investis ? La question
mérite d’être posée.
Cependant, ces considérations comportent une forte part de subjectivité dans la
mesure où elles résultent uniquement d’une connaissance intuitive du web et du
marché du tourisme au Burkina Faso.
Après avoir désigné les services que le Burkina Faso doit absolument assurer, nous
allons maintenant examiner le type de contenu que le Burkina Faso doit créer en
priorité avant d’insister sur la visibilité des créations.
Emmanuel Lacroix Page 179
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
22.. QQuueell ccoonntteennuu bbuurrkkiinnaabbéé ssuurr llee wweebb ??
a) Posséder ses propres structures et ses services adaptés
Le Burkina Faso doit développer ses propres structures et ses services pour des
utilisations adaptées au contexte africain. L’exemple du courrier électronique illustre
cet enjeu.
Les internautes du Burkina Faso, nous l’avons vu, utilisent principalement le courrier
électronique sur l’internet. Rares sont ceux qui possèdent leur propre email hébergé
chez leur FAI ; la majorité utilisent les services de sites web comme Yahoomail ou
hotmail. Cela amenait en juin 2001 Sylvestre Ouédraogo à attirer l’attention sur les
risques liés à ce type d’utilisation. Il affirmait ainsi sur le site FING.ORG, « il y a un
problème que l'on oublie souvent : chez nous il n'y a pas d'internet local. Toutes nos
données sont stockées à l'extérieur, aucune dans le pays ! Si une boîte de
messagerie type Hotmail tombe en panne, c'est foutu. Au moindre problème on perd
tout ».
Cela a conduit à la création du service Wenadougou webmail, qui permet le stockage
burkinabé du courrier burkinabé. Cet exemple illustre la nécessité de développer
certains services et d’impliquer d’avantage le Burkina Faso dans la gestion des
infrastructures de l’internet.
b) Définir des secteurs prioritaires
(1) A qui s’adresse le contenu web du Burkina Faso ?
Avant tout, nous avons déjà montré que l’utilisation de l’internet ne va pas dans le
sens de la culture orale du Burkina Faso. L’information burkinabé sur le web ne doit
donc être envisagée que comme un complément exhaustif à une information déjà
connue, mais en aucun cas comme l’unique canal d’information sur un sujet donné.
Cela rend difficile pour l’instant la mise en place de systèmes d’informations partagés
sous la forme d’intranet par exemple. Ces derniers sont déjà difficiles à faire
fonctionner dans les pays occidentaux de « culture écrite » et il serait périlleux
d’investir dans des « gadgets » non utilisés dans la pratique.
Emmanuel Lacroix Page 180
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Sur le court terme, les internautes occidentaux peuvent constituer une cible
pertinente pour le développement de sites burkinabé sur le web. En effet, les
principaux enjeux de court terme pour le Burkina résident dans la valorisation du
savoir-faire, de la main d’œuvre ou de la culture du pays auprès des pays riches.
(2) Les secteurs qui doivent être favorisés
Plusieurs secteurs peuvent être valorisés en priorité et bénéficier par exemple d’une
aide de l’Etat pour le développement de leur contenu web. Notons par exemple le
tourisme qui représente un important potentiel économique pour le Burkina Faso. Un
portail des hôtels existe mais l’information n’est pas tenue à jour et le site est très
mal référencé. Il est dommage que cette information, cruciale pour les touristes, ne
gagne pas en visibilité.
La promotion des produits industriels, artisanaux et agricoles mérite également d’être
favorisée, la plate forme commerciale initiée par le Trade point doit être développée
d’avantage et être mise plus en avant par le gouvernement. D’une manière générale,
la réalisation technique d’une plate-forme d’information ou d’un site web ne constitue
que tout au plus 50% du travail, le lancement et le décollage fonctionnel doit
catalyser autant de volontés si ce n’est plus.
L’utilisation de la technologie web dans une perspective de recherche médicale et
peut également être envisagée dans le cadre d’une coopération sous-régionale.
Enfin, la promotion des artistes et de la culture du Burkina peut permettre de
développer des opportunités intéressantes pour le pays. La notoriété de ces artistes
à l’étranger provoquera notamment des retombées touristiques à terme.
c) Rendre visibles les créations multimédia
(1) Le poids du référencement
On estime le nombre de pages sur Internet à plusieurs milliards. Le fait de proposer
un contenu ne peut donc être considérée comme une fin en soit, il s’agit de lui
Emmanuel Lacroix Page 181
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
donner ensuite une visibilité. Le référencement des créations sur les moteurs et
annuaires est, en ce sens, indispensable.
(2) La capitalisation de la visibilité sous la forme de réseaux et de portails
La création de portails est une stratégie classique pour assurer la visibilité de
contenu sur la toile. Dans le cas du Burkina Faso, il semble évident que la publicité
ne peut être une source de financement pour la création d’un portail. Les médias
classiques souffrent déjà de la rareté des investissements publicitaires, ceci alors
qu’ils touchent une part beaucoup plus large de la population.
Le développement de stratégies de portail résultera donc d’une recherche de
notoriété (comme l’a fait par exemple l’entreprise CENATRIN) ou d’une volonté de
développer un espace public national sur l’internet (comme l’a fait Younoussa Sanfo
avec son site Burkinet).
Il est inévitable que les entreprises cherchent à améliorer leur positionnement sur le
marché et qu’elles usent dans cette logique de stratégies favorisant leur notoriété ;
mais dans le cas des portails développés dans l’intérêt commun (tel burkinet), nous
incitons à limiter le nombre d’initiatives et à capitaliser sur une expérience réussie.
(3) La création d’une liste officielle des contenus d’intérêt général
La visibilité importante de certains contenus du web burkinabé permettrait de
favoriser l’intérêt général des burkinabé. La création d’une liste de sites présentant
un caractère d’intérêt général comme le Trade Point, le site du Fespaco, le site de
coordination des ONG et d’autres expériences réussies, permettrait de donner un
supplément de visibilité aux sites qui correspondent à la stratégie de développement
de l’internet du pays.
La rareté du contenu burkinabé est là encore une chance : le site du gouvernement
burkinabé arrive systématiquement bien placé sur les moteurs de recherche. Une
Emmanuel Lacroix Page 182
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
page de ce site pourrait ainsi être consacrée à la mise en avant de cette liste en
insistant sur le l’intérêt général présenté par les sites concernés.
(4) La mise en place d’une charte technique de création multimédia
Une véritable coopération entre les différents acteurs pourraient également passer
par la mise en place d’une charte technique de création multimédia permettant une
intégration facilité de chaque nouveau site dans un portail pré-existant. Il suffit pour
cela que toutes les pages soient « optimisées en pourcentage » et que les menus
soient intégrés en « include » sous forme de bandeaux. L’utilisation de normes
graphiques comme un fond blanc et un minimum d’images va également dans ce
sens.
Cette charte technique permet d’intégrer l’information facilement dans un portail tout
en respectant le souhait légitime ou non des acteurs de valoriser leur propre action
sur leur propre site.
Ce travail de recherche sera publié sur l’internet dans cette logique.
Penchons nous maintenant sur les moyens d’assurer un développement rapide de la
toile burkinabé. La diminution des coûts et la création d’une agence nationale de la
création multimédia nous semble notamment des objectifs prioritaires.
33.. CCoommmmeenntt ffaavvoorriisseerr llaa ccrrééaattiioonn dd’’uunn ccoonntteennuu bbuurrkkiinnaabbéé ??
a) Favoriser la conception de contenu en brisant les coûts de
conception
A l’image du cercle vicieux du sous développement des télécommunication que
Francis Balle décrit95 en évoquant « des infrastructures de télécommunications peu
95 BALLE Francis, Médias et Sociétés, 10ième édition, Montchrestien, pages 615 à 628, 2001
Emmanuel Lacroix Page 183
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
développées entraînant des coûts de télécommunication trop élevés », la création de
contenu sur les inforoutes du Burkina Faso, souffre du nanisme du marché potentiel
au Burkina.
Les sociétés et les organismes qui souhaitent se doter d’un site web ne sont pas
nombreuses ce qui n’incite pas à la création d’entreprises spécialisées. Les
entreprises qui proposent des services de création multimédia exercent toutes une
activité annexe, complémentaire.
Les coûts de conception web sont ainsi encore trop élevés actuellement. Ce niveau
de prix ne reflète pas les coûts habituellement pratiqués pour la vente de « matière
grise » au Burkina Faso. Ces coûts disproportionnés freinent la création de sites web
et il devient urgent de crever cette « bulle internet ». La concurrence et la meilleure
répartition des coûts fixes (multiplication des activités) sont nécessaires mais ne
seront pas suffisantes pour atteindre rapidement un niveau de prix acceptable. La
solution pourrait résider dans une intervention de l’Etat.
b) L’intervention de l’Etat pour le développement d’un contenu
prioritaire : la création d’une agence nationale de conception
multimédia
Nous avons vu précédemment que la création de contenus burkinabé sur les
inforoutes représentait un enjeu important pour le pays. Au delà de ces enjeux de
long termes, l’existence de certains contenus que nous avons qualifiés
précédemment de prioritaires, représente un intérêt urgent. Or les coûts
disproportionnés pratiqués actuellement par les entreprises de conception web
freinent la création de ces sites d’intérêt national.
La création d’une agence nationale de conception multimédia proposant des devis à
faible marge pourrait permettre d’aligner le niveau de prix de la conception web sur
ceux habituellement pratiqués dans le pays. Cette agence pourrait être consultée par
tous les individus ou organismes correspondant aux critères de « contenu
prioritaire » ; elle fournirait ainsi à ces derniers des propositions financières
Emmanuel Lacroix Page 184
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
raisonnables, libre aux entreprises privées de conception web de s’aligner ensuite
sur les prix proposés.
Penchons nous maintenant sur les opportunités économiques portées en elles-
mêmes par les NTIC. Nous insisterons notamment sur la nécessité de développer
une industrie de l’information et nous examinerons les conditions de la mise en place
de la sous-traitance informatique.
Emmanuel Lacroix Page 185
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
C. Au delà des enjeux liés à la société de l’information, les NTIC sont porteuses en elles-mêmes d’opportunités économiques pour le Burkina Faso
En premier lieu, les opportunités offertes par les NTIC nécessitent de développer une
industrie de l’information. Nous allons voir en effet que l’information est porteuse d’un
marché lucratif. Nous nous attarderons notamment sur le développement de logiciels
pour le compte des pays industrialisés, très demandeurs de main d’œuvre qualifiée
dans le domaine informatique.
11.. LLaa nnéécceessssiittéé ddee ddéévveellooppppeerr uunnee iinndduussttrriiee ddee ll’’iinnffoorrmmaattiioonn
Il est impératif pour le Burkina Faso, comme pour la plupart des autres pays
d’Afrique subsaharienne, que l’entrée dans la société de l’information ne s’effectue
pas qu’en tant que consommateur des produits de l’information distribués par les
pays du Nord. Nous avons déjà vu que la production d’un contenu francophone et
africain présentait un enjeu important pour la région. Mais avant même les enjeux de
long terme représentés par l’insertion du Burkina dans la société de l’information et
par le développement d’un contenu francophone, le développement des
compétences en production multimédia destinés au marché international pourrait
représenter en elle même une source de revenu conséquente pour le pays.
(1) L’information : un marché porteur
Comme le souligne François Ossama dans Les nouvelles technologies de
l’information, enjeux pour l’Afrique subsaharienne96, les investissements dans le
secteur de la conception Internet, sont en général moins lourds que dans l’industrie
et donc plus accessibles aux opérateurs économiques africains. Il évoque l’exemple
des pays asiatiques. Des pays comme Taiwan regroupent de très nombreuses
petites entreprises d’à peine 100 personnes qui produisant des milliers de cartes
96 François Ossama, Les nouvelles technologies de l’information. Enjeux pour l’Afrique subsaharienne, éditions l’Harmattan, 2001
Emmanuel Lacroix Page 186
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
mères par mois. Ces entreprises investissent plus de 5% de leur bénéfice net dans
la recherche ce qui leur permet de rester compétitive et de concurrencer les
entreprises occidentales.
La production de matériel n’est cependant pas le créneau le plus adapté à l’Afrique.
Nous insisterons plutôt, sur la production de logiciels et de supports multimédias
(sites web, Cdrom). Ces dernières productions se résument davantage à de la
créativité. C’est ce qui explique selon François Ossama que de nombreux
programmes ont été développés par des étudiants avant d’être récupéré par les
grands éditeurs comme Microsoft.
(2) L’externalisation de la programmation par les pays riches
Le marché de « l’offshore programming » mérite une particulière attention. Ce terme
désigne le procédé par lequel les grands éditeurs comme Oracle ou Microsoft, sous-
traitent à des sociétés de pays en développement, l’écriture ou la traduction de leurs
logiciels.
L’Inde représente un exemple particulièrement réussi de pays qui a su attirer les
investissements pour le développement de logiciels. Ainsi la ville de Bangladore
dans l’Etat de Kartataka a plus en commun avec la Sillicon Valley américaine
qu’avec les quartiers pauvres de calcutta. Les très nombreuses entreprises
informatiques développent pour l’essentiel, des logiciels pour le compte des plus
grandes entreprises occidentales. En 1996, le pays avait exporté pour 600 millions
de dollars de logiciels informatiques. En 2001, les exportations ont atteint 2,5
milliards de dollars.
Il est intéressant dans cette logique de noter que le Burkina Faso avec des coûts de
main d’oeuvre extrêmement faible pourrait s’introduire dans les énormes marchés de
la sous-traitance informatique. La saisie de données représente à elle seule un
marché de trois milliards de dollars par an.
Emmanuel Lacroix Page 187
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
b) Le développement d’une image qualitative et l’attrait des
investisseurs
A terme, la qualité des développements et l’habitude de la sous-traitance peut
représenter pour le Burkina Faso, une chance de présenter une nouvelle image
internationale globalement positive de partenaire intéressant dans le domaine de la
sous-traitance de services.
Michel Roussin, ancien ministre de la coopération intervenant dans Le Monde97,
posait la question suivante : « Comment donner confiance aux investisseurs
étrangers quand les entrepreneurs locaux ne croient pas réellement en l'avenir de ce
continent ? »
Pour y parvenir, il est selon lui nécessaire que l'intégration régionale soit forte et
reconnue. Ce qui implique d’établir « des priorités dans le transfert de souverainetés
nationales au niveau régional : en créant, comme cela a été fait en Europe, une
agence susceptible d'assurer la gestion d'infrastructures régionales ; en
encourageant les initiatives visant à harmoniser l'environnement des affaires au
niveau régional ; en créant une structure régionale de négociation sur les questions
multilatérales, à l'image de la Regional Negociation Machinery des Caraïbes.
L'investissement étranger constitue avec l'investissement local l'élément moteur de la
croissance et de l'emploi. Le secteur privé africain doit s'approprier la technologie la
meilleure et investir lui-même sur le continent. Comment donner, en effet, confiance
aux investisseurs étrangers quand les entrepreneurs locaux ne croient pas
réellement en l'avenir de l'Afrique ? Les conditions essentielles pour atteindre cet
objectif : mettre en place un environnement politique, juridique et financier stable
ainsi qu'une administration efficace, pour assurer le fonctionnement d'un Etat de droit
qui donne une visibilité de long terme aux investisseurs ; fixer l'épargne locale en
s'attaquant à la fuite des capitaux, à la corruption, et améliorer les structures
financières en favorisant la création ou en renforçant les marchés de capitaux locaux
existants ; concentrer l'APD sur des projets significatifs, viables et ayant un impact
visible ; redéfinir les conditions du partenariat public-privé (PPP) ; diffuser une image
97 Michel Roussin, Afrique, indispensables opérateurs privés, Le Monde, 27 juin 2002
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
positive de l'Afrique ; donner une priorité à la formation professionnelle ; conduire des
actions d'envergure en faveur de l'intégration du secteur informel dans l'économie ».
Michel Roussin précise en outre que « la mise en place des infrastructures de
communication entre tous les pays d'Afrique est un impératif pour la croissance et la
valorisation des richesses. Dans ce domaine à forte intensité capitalistique exigeant
un savoir-faire pointu, rien ne pourra se faire de manière durable sans une
concertation étroite entre le secteur privé, les bailleurs de fonds et la puissance
publique ».
L’ancien ministre conclue enfin son intervention en affirmant que « l'Afrique recèle
d'immenses potentiels de croissance. Pour les concrétiser, il faut créer les conditions
qui permettent l'émergence d'un tissu d'entrepreneurs locaux et de tirer les bénéfices
de la croissance mondiale. Les pays d'Afrique nous proposent aujourd'hui un mode
de coopération qui n'est plus celui de la simple main tendue. Nous devons y
répondre par un contenu approprié, en osant aller au-delà du débat sur le taux de
contribution par rapport au PIB des pays riches ».
Penchons nous maintenant sur les conditions de mise en œuvre de la sous-traitance
informatique en insistant en premier lieu sur la nécessité d’une démarche de
prospection puis sur les efforts à effectuer nécessairement dans le domaine de la
formation. Nous examinerons pour finir le cas du Sénégal, exemple réussi d’une
activité de téléservices en Afrique de l’ouest.
22.. CCoommmmeenntt ppeerrmmeettttrree llaa mmiissee eenn ppllaaccee ddee llaa ssoouuss--ttrraaiittaannccee
iinnffoorrmmaattiiqquuee ??
a) Initier la sous-traitance par une démarche de prospection
Devant les difficultés d’attirer la confiance des investisseurs ou d’obtenir des contrats
de sous-traitance, notamment dans le domaine de l’informatique, le Burkina pourrait
initier elle même une démarche de prospection après avoir créé le cadre nécessaire
à une activité efficace.
Emmanuel Lacroix Page 189
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Dans le domaine des NTIC, nous avons précédemment proposé la création d’une
agence nationale de conception multimédia chargée d’établir des devis et de
concevoir des sites pour le développement d’un contenu prioritaire sur les inforoutes
du Burkina. Ces mêmes agences pourraient ensuite créer une mini-filiale en Europe
chargée de prospecter les entreprises en proposant un service de création
multimédia. La structure européenne prendrait en charge la gestion de projet et
l’interface avec le client et l’agence burkinabé développerait graphisme et structure
technique.
Cette « prise en main » par le Burkina du développement commercial de son activité
dans le domaine des TIC, permettrait au pays d’acquérir une reconnaissance de ses
compétences et lui assurerait à terme de se positionner comme un sous-traitant des
pays du Nord dans le domaine de l’internet. Cela pourrait également, à terme, ouvrir
la voie à un développement plus global.
b) Développer des compétences correspondant aux besoins de
la sous-traitance
(1) Le développement des compétences en infographie
Nous avons vu précédemment que les compétences en infographie étaient pour
l’instant relativement rares au Burkina Faso, leur développement est important car
ces techniques sont au centre de la communication numérique des entreprises des
pays riches.
La maîtrise de la technologie flash est notamment devenue incontournable dans les
pays occidentaux et il serait utopique de vouloir prospecter les marchés de la
communication des pays riches sans disposer d’une main d’œuvre qui connaisse
parfaitement cette technologie.
Le développement d’une stratégie de sous-traitance passe donc d’abord par une
formation adaptée de la main d’œuvre au Burkina Faso. Cela implique notamment
Emmanuel Lacroix Page 190
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
l’acquisition de compétences graphiques et l’étude des standards graphiques
occidentaux.
(2) Les langages de programmation
Les compétences en programmation sont plus répandues au Burkina Faso : l’ESI,
excellente école, forme des ingénieurs de bon niveau qui sont capables de réaliser
des programmes de qualité et d’adapter facilement leurs compétences à la
conception web.
Le bon niveau de cette formation et la multiplication des ressources universitaires en
ligne, pourraient être mis à profit pour effectuer une veille permanente sur les
évolutions technologiques et pour acquérir systématiquement une avance sur les
autres pays. L’apparition du langage XML aurait par exemple pu permettre au
Burkina Faso de posséder un avantage comparatif s’il avait rapidement mis en place
une stratégie dans ce sens. L’utilisation de ce langage a en effet mis près de 4 ans à
se généraliser, ceci alors que son potentiel était connu depuis plusieurs années.
Observons, pour finir, le cas du Sénégal qui a su développer un service efficace de
sous-traitance informatique.
c) Le cas du Sénégal
Le Sénégal représente un exemple intéressant d’un pays d’Afrique de l’ouest
francophone lancé sur le marché mondial des offres de services issues des NTIC98.
Dans une étude intitulée Le développement du commerce électronique en Afrique :
le cas du Sénégal99, Abdoulaye Ndiaye, chercheur, définit les téléservices comme «
toute prestation de services à valeur ajoutée, entre entités juridiques distinctes,
utilisant les outils de communication ».
98 Bassirou Ndiaye, Sud TIC n°1, www.anais.org, extrait de Sud Quotidien du mardi 27 juin 2000 99 Abdoulaye Ndiaye, "Développement du commerce électronique en Afrique : le cas du Sénégal", Programme d’Assistance Coordonnée à l’Afrique dans le domaine des services (Capas), Union Internationale des Télécommunications (UIT), octobre 1999
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Cette étude nous apprend que plusieurs structures ont déjà été créées au Sénégal et
se développent au gré d’une demande de plus en plus précise et pointue. Certaines
sociétés se sont spécialisées dans leurs offres et ont créées des structures
spécialisées dans un secteur donné. C’est le cas par exemple de la société
“Mastercad” créée pour satisfaire la demande en Conception assistée par ordinateur
(Cao) et Dessin assisté par ordinateur (Dao). Cette société s’est notamment
consacrée à la numérisation de plans.
Une autre société, Téléservices S.A. dont la Sonatel détient 34% du capital, offre des
services de télésaisie de documents et d’informations juridiques sur le système
judiciaire sénégalais. Téléservices S.A. collabore avec de grandes multinationales de
l’informatique.
Une autre entreprise de téléservices, Alphacad, reprend, grâce à un logiciel de
dessin assisté par ordinateur, de vieux plans d’architecture de la France qui avaient
été dessinés, à l’époque, à la main, et les envoie par la voie électronique sous forme
de fichiers. L’entreprise Pictoon S.A. réalise des dessins animés pour des clients
européens tandis qu'Africa Net fait la télésaisie d’horoscopes pour des clients
français qui les publient sur l’internet et sur le minitel.
La société Addaxim offre une solution intranet aux entreprises. Elle offre également
un système de câblage réseau susceptible de combiner la voix, les données, l’image
et l’énergie.
Modou Diouf100, responsable de la formation et du Campus numérique de Dakar a
réalisé une étude qui classe ces téléservices en cinq grandes catégories :
- Téléservices d'information et de médiation (téléservices de courtage et
médiation téléinformatique ;
- Téléservices de compensation, catalogues électroniques, etc) ;
- Téléservices fonctionnels (télésecrétariat, télésaisie, télétraduction,
téléinterprétariat, téléconseil, télégestion, etc) ;
100 Modou Diouf, Nouvelles technologies de l’information et de la communication au Burkina Faso, en Guinée, au Mali et au Sénégal, Agence Universitaire de la Francophonie.
Emmanuel Lacroix Page 192
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
- Téléinformatique (téléingénierie, téléassistance technique, télédéveloppement
de logiciels, téléarchivage, etc) ;
- Télégestion, télésurveillance d’équipement ou de réseaux (télésurveillance et
télégestion des équipements de chauffage et climatisation, télésurveillance des
ascenseurs, télégestion des réseaux d’eau, d’électricité, de gaz et d’éclairage
public, etc).
Le gouvernement a tenu un conseil interministériel en juillet 1999 en vue d’examiner
les voies pour promouvoir les téléservices au Sénégal. Plusieurs décisions ont été
prises, notons par exemple l’éligibilité des entreprises de téléservices au régime des
entreprises franches d’exportation qui leur confère des avantages fiscaux et
douaniers, la dotation du Conseil supérieur de l’industrie de moyens financiers et
techniques pour faciliter la certification des entreprises de téléservices aux normes
ISO 9000, etc.
L’existence d’une forte diaspora à travers le monde représente en outre un atout
important car elle a permis de favoriser les contacts entre l’offre et la demande.
Les acteurs de l’industrie de l’information sénégalaise insistent maintenant pour
qu’un certain nombre de contraintes soient levées afin que le Sénégal soit prêt à
répondre au maximum de sollicitations.
Ces contraintes résident notamment dans “le coût des télécommunications et
notamment le système de tarification actuellement en vigueur qui est proportionnel
au temps de connexion et qui n’offre aucun choix de paiement d’un montant
forfaitaire mensuel et enfin qui n’offre aucune différenciation entre un appel
téléphonique local et une connexion Internet”. Ces coûts élevés de la communication
sont dissuasifs pour les usagers, maillon essentiel de la chaîne des téléservices. Au
plan des outils et des coûts, on peut noter également “l’absence de culture
technologique, la faiblesse du taux d’équipement informatique, la méconnaissance
des possibilités offertes par les téléservices, le coût élevé des équipements, de la
maintenance et, parfois, la mauvaise qualité de l’énergie électrique”.
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Au plan institutionnel, les obstacles au développement des téléservices résident
dans l’existence de trop nombreuses structures et d’un manque de coordination dans
la mise en œuvre de la politique nationale. Les acteurs notent également l’absence
d’une promotion du Sénégal, non plus seulement comme une destination touristique
mais aussi comme un pays de services.
Ces différentes actions, ajoutées à un potentiel significatif notamment lié à l’avance
certaine du Sénégal sur ses voisins dans le domaine industriel et commercial, ont
permis au pays d’acquérir un statut reconnu bien qu’encore naissant dans le
domaine des téléservices informatiques.
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Conclusion
Nous avons montré que d’un point de vue global, philosophique et politique,
l’intégration des pays du Sud dans la société de l’information représentait une
nécessité absolue. Les enjeux économiques, culturels et pratiques de la
Francophonie incitent également à favoriser l’entrée des pays d’Afrique Francophone
dans la société de l’information. Ceci implique de développer l’accès à l’internet, la
maîtrise technologique et la production de contenus.
Le développement de l’accès à l’internet au Burkina Faso implique certains
préalables qui rejoignent parfois d’autres impératifs de développement. Il en est ainsi
du développement de l’éducation et de l’objectif affiché par l’UNESCO d’atteindre
« l’éducation pour tous ». L’alphabétisation représente effectivement le premier et
indispensable pas vers la maîtrise des nouveaux outils de communication qui, tels
l’internet, fonctionnent à partir d’un support écrit. Dans le même temps mais dans un
contexte plus ambitieux, l’éducation passe également par la formation de la
population à l’utilisation des nouveaux outils de communication dont les premiers
représentants sont l’ordinateurs et la messagerie.
Le développement des infrastructures de télécommunication et de l’informatisation
du Burkina s’inscrivent également comme des efforts incontournables et la
privatisation de l’Office national des Télécommunications (ONATEL) procède de
cette logique.
L’accès à l’internet doit être favorisé par la multiplication des points d’accès et par le
développement de solutions adaptées à l’Afrique, c’est à dire l’usage partagé des
nouveaux outils de communication. En premier lieu, l’accès RTC, qui nécessite des
Emmanuel Lacroix Page 195
L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
communications téléphoniques fréquentes et qui entraîne de nombreux surcoûts, doit
être remplacé progressivement par un accès continu à coût fixe.
Enfin, la notion de service public ne doit pas être oubliée et l’implantation de la
téléphonie et de l’internet en zones rurales doit être favorisée. La multiplication des
télécentres et la création de postes de médiateurs permettraient d’avancer dans ce
domaine. Il est également souhaitable que soit tenu compte des incidences socio-
culturelles de ces nouveaux outils sur les populations.
Au delà du nécessaire développement de l’accès aux nouvelles technologies, la
création d’un contenu burkinabé sur les inforoutes regroupe également de multiples
enjeux. Entre sauvegarde d’une culture précieuse, l’existence de ressources en
français (et donc accessible à une population non-anglophone) et le poids politique
et économique de la zone francophone, le développement de la toile burkinabé est
loin de représenter un enjeu anecdotique. La formation à la conception doit donc être
favorisée.
Ces enjeux stratégiques et les grands axes qui en découlent soulèvent d’autres
objectifs et enjeux de court terme. Dans ce dernier volet, le plus concret, plusieurs
points sont améliorables et plusieurs défis doivent être relevés .
Nous regrettons par exemple l’éparpillement des projets, le manque de coordination
des différents acteurs. Ainsi, un coopérant français à Ouagadougou affirmait encore
récemment sur une liste de diffusion consacrée aux nouvelles technologies que
« pour le cas du Burkina, il est patent de constater que la mobilisation pour les TIC
existent mais encore plus de déplorer un flagrant délit d'éparpillement de tous les
projets, du RESAFAD à la Banque mondiale, PAJE, NTBF, CDSPTT, AID, Burkina,
Yam Pukri, Club @, projets universitaires (Ouaga-Bobo) et autres de la DELGI ,
coopération hollandaise, belge et allemande et j'en passe (…), il est déplorable de ne
pas sentir un vrai désir d'harmonisation que seul le Burkina lui-même peut insuffler ».
Derrière cette nécessaire coordination, apparaît l’enjeu de la visibilité sur l’internet.
La création de sites web centralisant les informations de toutes les origines afin de
permettre l’information des différents acteurs est, dans cette logique, indispensable.
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Nous avons souligné que cela était souhaitable dans le domaine de l’action
associative mais aussi dans celui du commerce ou encore de la coopération. La
désignation d’une liste de sites représentant un intérêt national peut également
s’avérer intéressante.
Le renforcement d’une collaboration globale pour le développement des inforoutes
au Burkina Faso pourrait continuer par l’utilisation d’une charte technique facilitant
l’intégration des informations des sites sur un portail commun. La non multiplication
des portails est également souhaitable dans cette logique.
Parallèlement, le Burkina Faso doit éviter le mimétisme et construire ses propres
inforoutes en les adaptant au contexte africain. Ceci en se méfiant des mirages
portés par les nouvelles technologies et en s’appropriant les outils de son
indépendance, non pas dans une logique anticolonialiste mais dans un esprit de
coopération et de limitation des risques. Pour Microsoft, l’exploitation de l’entreprise
de courrier en ligne Hotmail ne représente que des enjeux financiers. Pour le Burkina
Faso, l’arrêt de l’activité de cette messagerie signifierait la perte d’une part
importante de l’information numérique du pays. Cela va dans le sens de la création
de services comme webanougou, le service de courrier en ligne de Ouagadougou.
Le développement de contenus burkinabé sur la toile mondiale doit être favorisé.
Des programmes de coopération oeuvrent déjà pour la création de ressources
numériques au Burkina. Cependant, nous avons vu que le niveau de prix pratiqué
pour la conception internet était encore largement prohibitif et qu’il risquait de freiner
la création de certains contenus qui représentent un intérêt pourtant crucial pour le
pays. La création d’une agence nationale de conception multimédia sans objectif de
profit pourrait répondre à cette préoccupation.
Enfin, au delà des utopies portées par l’avènement d’un marché mondial et par les
techniques d’information qui permettraient potentiellement aux produits burkinabé de
trouver des débouchés, les NTIC sont porteuses en elle mêmes d’opportunités
commerciales. Nous avons notamment examiné le potentiel offert par le marché du
développement informatique et internet tout en attirant l’attention sur les difficultés
auxquelles sera confronté le Burkina pour attirer les investisseurs et acquérir le statut
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
d’interlocuteur valable. La création d’une petite structure chargée de prospecter en
Europe pour le compte d’entreprises informatiques burkinabé, représente selon nous
une solution à ce manque de confiance.
Les défis auxquels le Burkina Faso doit faire face à long, moyen et court termes,
dans le domaine des NTIC sont considérables. Ce pays enclavé, dont l’indice de
développement humain est l’un des plus bas du monde, n’est cependant pas seul
pour amorcer cette pente. Il peut compter en premier lieu sur la coopération sous-
régionale qui regroupe des pays confrontés aux mêmes défis et dont certains,
comme le Sénégal, ont déjà franchis quelques étapes importantes et disposent donc
d’une connaissance empirique qui doit être partagée. Le Burkina Faso continuera
également à être assisté par les pays occidentaux et par des institutions
internationales comme l’UNESCO. Les pays Francophones, à travers leurs
organisations, apporteront enfin un soutien non négligeable afin d’atteindre ces
objectifs.
Emmanuel Lacroix Page 198
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www.aib.bf
Site de l'association des maires du Burkina
www.ambf.bf
Site de commerce équitable
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Site sur l’artisanat
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Site du RESAFAD, réseau de formation à distance au Burkina
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Portail humoristique sur la ville de Bobo-dioulasso
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Site de l’agence universitaire de la francophonie au Burkina Faso
http://www.bf.refer.org/
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Burkina NTIC, le réseau lien
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Site web de la cellule d'appui à la formation professionnelle
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Site du centre d'orientation scolaire et universitaire
www.ciospb.bf
Site du club@. Association pour la promotion des NTIC dans les médias
www.clubarobase.bf
Site de commerce équitable
www.commerceequitable.com
Site de la Délégation générale à l’informatique
www.delgi.gov.bf
Site de l’entreprise dell en France
http://www.dell.fr
Site web sur le droit et la toile
www.droit-et-toile.net/fr/index.html
Site de l’association Edukafaso
http://www.edukafaso.org
Site fédérateur des ONG oeuvrant au Burkina
www.faso-ong.org/
Site de la FIAB
http://www.faso-ong.org/fiab/
Site du projet de la Société des Fibres et Textiles, SOFITEX
www.fasonet.bf/pr-prao
Site de l’ONATEL pour la clientèle abonnée aux différents services internet
www.fasonet.bf
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Site de l'hebdomadaire du Burkina
www.fasonet.bf/hebdo
Site du Festival Panafricain de Cinéma de Ouagadougou (FESPACO)
www.fespaco.bf
Site de la fête de l'internet au Burkina Faso.
http://www.feteinternet.bf
Site du Ministère de l’Economie et des finances
www.finances.gov.bf
Site de la fondation internet nouvelle génération
www.fing.org
Site de l’ambassade de France au Burkina
www.france-burkina.bf
Site de « Aide Ondotologique Internationale »
http://www.france-burkina.bf/CoopDec/ONG/AOI.html
Site de la Francophonie au Burkina
www.francophonie.gov.bf
Site du projet fragments du monde
http://www.fragmentsdumonde.org
Site web du FONER, le fonds de éducation et recherche
www.foner.bf
Site de la francophonie
www.francophonie.org
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
Moteur de recherche google
http://www.google.fr
Site de l'Institut Supérieur en Informatique de Gestion
http://www.isig.bf
Site de l’IRD ex ORSTOM
www.ird.bf
Site de l’ITU
http://www.itu.int/home/index.html
Site sur la législation du BURKINA FASO
www.legiburkina.bf
Site du FAI LIPTINFOR
www.liptinfor.bf
Site de l'observateur Paalga
www.lobservateur.bf
Site du ministère des affaires étrangères
www.mae.gov.bf
Site de la Mairie de Ouagadougou
www.mairie-ouaga.bf
Site personnel sur le Burkina réalisé par un couple français
http://membres.lycos.fr/michaud/burkina/main.htm
Site d’une association havraise de solidarité internationale
http://membres.lycos.fr/capdeveloppement/
Site du médiateur du Faso
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www.mediateur.gov.bf
Site du ministère de l'emploi du travail et de la sécurité sociale
www.metss.gov.bf
Site du « point de rencontre » de Younoussa Sanfo
www.multimania.com/ysanfo/
Site du musée de la musique de Ouagadougou
www.museedelamusique.gov.bf
Site du musée de Gaoua
www.museedegaoua.gov.bf
Site web du FAI netacces
http://www.netaccess.bf/
Site de l'association NTBF pour la promotion des NTIC au Burkina Faso.
http://www.ntbf.net/
Site de l’ONATEL
www.onatel.bf
Site sur les NTIC dans les médias au Sénagal
http://www.panos.sn/
Site du PNUD au Burkina Faso
http://www.pnud.bf/
Site officiel du Gouvernement
www.primature.gov.bf
Site du programme de formation au métier de l'image et du son
www.profis.gov.bf
Emmanuel Lacroix Page 213
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Site sur la potérie au Burkina Faso
www.poterieduburkina.gov.bf
Site de l’association RIFOD
www.rifod.org
Le site du réseau RIO
http://www.rio.net/datecle-bis.html
Site de l’association Reporter Sans Frontières
www.rsf.org
Site du SIAO
www.siao.bf
Site des Editions SIDWAYA
www.sidwaya.bf
Organisation Néerlandaise de Développement
www.snvburkina.org
Site de la semaine nationale de la culture
www.snc.gov.bf
Site de Thot, publication hebdomadaire en ligne consacrée à l'actualité et au
développement de la formation à distance, particulièrement dans les pays de la
francophonie
http://thot.cursus.edu/
Site de la Télévision Nationale du Burkina
www.tnb.bf
Site du Trade Point du Burkina
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
http://www.tradepoint.bf
Commission économique pour l’afrique. Nations-unies
http://www.uneca.org/aisi/nici/Burkina%20Faso/burkinab.htm
Site de l’Université de Ouagadougou
www.univ-ouaga.bf
Site du programme d'enseignement à distance de la banque mondiale au Burkina
www.worldlinks.bf
Site de l’association Yam-Pukry, pour la promotion des NTIC au Burkina Faso
http://www.yam-pukry.org
Site du FAI ZCP
www.zcp.bf
Office du tourisme
http://www.zedcom.bf/annonces/ontb/ontb.htm
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Table des matières
REMERCIEMENTS..................................................................................................... 1 SOMMAIRE................................................................................................................. 2 INTRODUCTION......................................................................................................... 3
I. La situation de l’Internet au Burkina Faso en 2002 .................................................... 10 A. LE PAYS, SON INFORMATISATION ET SES INFRASTRUCTURES DE TELECOMMUNICATION 10
1. Présentation du Burkina Faso ..................................................................................10 a) Le pays, ses richesses, sa population ....................................................................10
(1) Histoire politique ..........................................................................................10 (2) Situation géographique et démographique ...................................................15 (3) Niveau de développement humain (selon les critères retenus par le PNUD) 16
b) Histoire des technologies de la communication au Burkina.................................17 (1) histoire de l’informatisation et des télécommunications ..............................17 (2) Du Réseau Intertropical d’Ordinateur (RIO) développé par l’ORSTOM à l’internet « grand public » en Afrique ......................................................................19
2. Informatique : équipement du pays et prix pratiqués ...............................................22 a) Le niveau d’informatisation actuel .......................................................................22 b) Un matériel informatique importé en totalité .......................................................23 c) Taxes et procédures ..............................................................................................24
(1) Des taxes élevées sur les produits informatiques..........................................24 (2) Des procédures d’importations allégées mais encore handicapantes pour les non ouagalais ............................................................................................................25
3. Télécommunications, infrastructures et prix pratiqués ............................................26 a) Le réseau téléphonique .........................................................................................26
(1) Etat des lieux.................................................................................................26 (2) Un réseau téléphonique de mauvaise qualité ................................................27 (3) Un coût élevé des télécommunications.........................................................28
b) Infrastructures Internet..........................................................................................28 (1) Le service de transmission de données par paquets X25 (FASOPAC) ........28 (2) Réseaux locaux et liaisons spécialisées ........................................................28 (3) Etat du réseau public.....................................................................................29
B. L’INTERNET : ACCES, UTILISATION, COMPETENCES ET PRODUCTION DE CONTENU ........31
1. Accès à l’Internet et pratiques d’utilisation .............................................................31 a) Les fournisseurs d’accès .......................................................................................31
(1) De nombreux FAI à Ouagadougou...............................................................31
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
(2) L’ONATEL avec Fasonet : le fournisseur d’accès à l’Internet en position de monopole dans tout le pays hormis la capitale .........................................................34
b) Les points d’accès à l’Internet ..............................................................................37 (1) Les accès à domicile .....................................................................................37 (2) Les accès professionnels...............................................................................37 (3) Les accès communautaires............................................................................39
c) Les Internautes......................................................................................................48 (1) Leur nombre..................................................................................................48 (2) Les profils des Internautes burkinabé ...........................................................48 (3) Les pratiques des internautes burkinabé .......................................................52
d) Quelques exemples d’utilisation de l’internet dans un cadre professionnel ou associatif .......................................................................................................................58
(1) DEVENET : des cédéroms et un site............................................................58 (2) L’utilisation de l’internet dans une association de Pô ..................................59 (3) L’utilisation de l’internet par une entreprise informatique...........................60 (4) L’utilisation du courrier électronique pour favoriser les échanges dans le cadre d’un jumelage franco-burkinabé .....................................................................60 (5) L’utilisation de l’internet par le Centre Muraz de Bobo-Dioulasso .............61
2. Etat des compétences techniques..............................................................................62 a) Compétences informatiques..................................................................................62
(1) Les compétences en entreprises....................................................................62 (2) Les formations universitaires, en entreprises ou pilotées par l’Etat .............62
b) Compétences en gestion des infrastructures et en télécommunication.................64 (1) Les compétences en entreprises....................................................................64 (2) l’Ecole Nationale des Télécommunications .................................................65
c) Compétences en Conception Internet ...................................................................65 (1) Les compétences en entreprises....................................................................65 (2) Les formations ..............................................................................................66
d) La fuite des cerveaux ............................................................................................67 (1) La fuite des cerveaux : une pénalisation importante des pays en voie de développement ..........................................................................................................67 (2) Le cas particulier des nouvelles technologies...............................................68 (3) La diaspora au secours de l’Internet burkinabé ............................................68
3. L’information burkinabé sur les inforoutes ..............................................................70 a) La visibilité et la pertinence d’une recherche sur le web burkinabé.....................70
(1) Quantité.........................................................................................................70 (2) Qualité, origine et pertinence des résultats ...................................................70
b) Panorama du web burkinabé.................................................................................72 (1) L’information d’origine burkinabé ...............................................................72 (2) Les sites d’origine étrangère sur le Burkina Faso.........................................76
c) L’hébergement du web burkinabé ........................................................................77 d) Un marché intérieur extrêmement limité ..............................................................79
(1) Les coûts importants de la création Internet au Burkina Faso......................79
C. STRUCTURES NATIONALES ET ACTIONS INTERNATIONALES DE DEVELOPPEMENT...........83 1. L’action du gouvernement, les structures d’encadrement mises en place et le plan de développement national ...............................................................................................83
a) Les organes et les cadres qui structurent l’internet au Burkina Faso....................83 (1) Le Conseil Supérieur à l‘Informatique du Faso............................................83 (2) La Délégation Générale à l’Informatique (DELGI) .....................................83
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
(3) Les ateliers ....................................................................................................84 (4) Le cadre de référence pour le développement des TIC ................................84 (5) ONATEL/FASONET ...................................................................................85 (6) Le Centre National de Traitement de l’Information (CENATRIN) .............86
b) Caractéristiques du plan de développement des NTIC.........................................87 (1) Le développement de l’internet en adéquation avec la politique nationale de développement humain durable ................................................................................88 (2) Une stratégie de développement des NTIC trop centralisée et orientée vers l’administration publique..........................................................................................89 (3) L’implication de l’Etat dans les services de télécommunications classiques et dans l’accès à Internet ...........................................................................................90
2. Les actions de coopération des Etats, des communautés et des institutions de Bretton Woods...................................................................................................................91
a) L’action de la Francophonie et de l’Etat français .................................................91 (1) REFER..........................................................................................................91 (2) SYFED..........................................................................................................91 (3) Le RESAFAD...............................................................................................91 (4) Centre de formation au multimédia ..............................................................92 (5) Le P@je ........................................................................................................92 (6) Fragments du monde.....................................................................................93 (7) Université virtuelle Francophone..................................................................94
b) La coopération néerlandaise .................................................................................94 c) Le CNUCED et le Trade Point .............................................................................95 d) La Banque mondiale .............................................................................................95
(1) AfricaLink.....................................................................................................95 (2) Université virtuelle Africaine .......................................................................96
e) Le PNUD : Initiative Internet pour l'Afrique (IIA) /Réseau de Développement Durable (RDD) .............................................................................................................96 f) L’UNESCO et le CRDI : projet de télécentres communautaires polyvalents d’appui au développement humain durable (TPC) .......................................................96 g) La FAO et le projet de télécentres communautaires polyvalents à BOUGNOUNOU..........................................................................................................97 h) L’IICD et l’Intranet FIAB.....................................................................................97 i) Le projet Inforoute Communale ...........................................................................97 j) Divers....................................................................................................................98
3. Initiatives des associations .......................................................................................98 a) L’association RENER...........................................................................................98 b) Réseau d’Information et de Formation sur le Développement (RIFOD) .............99 c) Yam Pukri .............................................................................................................99 d) NTBF ..................................................................................................................100 e) RECIF / ONG-BF ...............................................................................................100 f) Le club@.............................................................................................................101 g) Réseau Girafe-info..............................................................................................102
II. Entre culture orale et nécessité d’une maîtrise des nouvelles formes de l’information : incidences et enjeux de l’internet en Afrique Francophone....................... 103
A. CULTURE ORALE ET MEDIAS ........................................................................................103 1. La radio : moyen de communication adapté à l’Afrique ........................................103
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
a) Aperçu de la radio au Burkina ............................................................................103 (1) Radios internationales.................................................................................103 (2) Radios gérées par l’Etat ..............................................................................104 (3) Radios commerciales ..................................................................................104 (4) Radios associatives .....................................................................................104 (5) Radios confessionnelles..............................................................................104
b) Un média transportable et qui permet une autre activité ....................................105 c) Un média de culture « orale ».............................................................................106
2. La culture de l’écrit et du virtuel et l’Afrique.........................................................107 a) Les difficultés des journaux africains face à la faiblesse de l’alphabétisation ...107
(1) Un analphabétisme handicapant .................................................................107 (2) La presse quotidienne .................................................................................108 (3) La presse périodique ...................................................................................109
b) L’internet, un média qui nécessite la maîtrise de l’écrit, l’appropriation technologique et qui rompt la relation de communauté physique ..............................109
B. LES INCIDENCES SOCIO-CULTURELLES DES NOUVEAUX MOYENS DE COMMUNICATION112
1. Une acculturation progressive................................................................................112 a) Le court-circuit ...................................................................................................112 b) Les mondialisations et leurs effets......................................................................113
(1) Mondialisation de la production : l’exemple de l‘impact culturel de l’application des normes ISO au Maroc .................................................................113 (2) Mondialisation de l’information et des contenus des programmes : impact culturel du mimétisme des journalistes africains....................................................113 (3) Mondialisation des cultures : impact des industries culturelles et des nouveaux appareils de communication...................................................................114
c) La disparition progressive des médias traditionnels ...........................................114 2. Les incidences socioculturelles des TIC : le cas de l’arrivée du téléphone chez les Sanan ..............................................................................................................................115
a) Les significations sociales du téléphone chez les Sanan du Burkina Faso.........116 (1) Origine des Sanan et description de leurs systèmes de communication et de leur organisation sociale avant la venue du téléphone............................................116 (2) L’impact du téléphone ................................................................................117
b) Impact du téléphone sur la parole .......................................................................119 (1) Le rôle de la parole chez les Sanan.............................................................119 (2) Les salutations et le téléphone ....................................................................119
c) A terme, quelles incidences du téléphone sur les comportements collectifs et individuels des Sanan ?...............................................................................................120
C. ENJEUX DE L’INTERNET ET PLACE DE L’AFRIQUE FRANCOPHONE DANS LA SOCIETE DE L’INFORMATION ...................................................................................................................122
1. Les inégalités face à l’information .........................................................................122 a) Les disparités Nord-Sud face à l’information.....................................................122
(1) La perception du déséquilibre d’information entre Nord et Sud ................122 (2) Un déséquilibre global réel .........................................................................129 (3) Un déséquilibre amplifié par l’apparition des nouvelles technologies .......131
b) Des disparités Sud – Sud très marquées ............................................................134 (1) Des contrastes entre pays du Sud................................................................134 (2) Des contrastes entre centres urbains et zones rurales au sein des pays du Sud 135
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
2. Une nouvelle société, de nouveaux enjeux..............................................................137 a) Une quadruple révolution ...................................................................................137
(1) Une révolution culturelle ............................................................................137 (2) Une révolution sociale et économique........................................................137 (3) Une révolution politique .............................................................................138
b) La confusion .......................................................................................................138 c) Des contradictions multiples...............................................................................139
(1) Contradictions entre le lieu et le non lieu, le local et le global...................139 (2) Contradictions entre le droit et le non-droit................................................139 (3) Contradictions entre l’intérêt général et les intérêts particuliers, entre la fin et les moyens...........................................................................................................140
d) Entrée de l’Afrique dans la société de l’information et université de l’universel 140
(1) La coupure : une exclusion de l’Afrique ....................................................140 (2) Réinventer l’enseignement pour répondre à ces nouveaux défis : l’université de l’universel...........................................................................................................141 (3) Les premiers pas vers la mise en place d’une université universelle..........143
3. Enjeux de la Francophonie face à la glocalisation ................................................146 a) Le Burkina Faso : un pays officiellement Francophone et dont la population maîtrise très mal l’anglais ...........................................................................................146 b) Enjeux géopolitiques du développement d’un contenu Francophone sur les inforoutes ....................................................................................................................146
(1) Quels sont les enjeux de la Francophonie ? ................................................146 (2) L’émergence des NTIC et la Francophonie................................................147
c) Un contenu en langues ethniques sur les inforoutes : un enjeu culturel au delà des enjeux géopolitiques de la Francophonie....................................................................149
III. Quelles perspectives pour l’internet au Burkina ? .................................................... 151
A. L’ENTREE DU BURKINA FASO DANS LA SOCIETE DE L’INFORMATION : COMMENT ASSURER L’ACCES A L’INTERNET ET LE DEVELOPPEMENT DES COMPETENCES « UTILISATEUR » ? ...............................................................................................................151
1. Développer l’alphabétisation : le premier pas vers une appropriation des NTIC.151 a) Panorama, et enjeux............................................................................................152
(1) Aperçu de l’éducation dans le monde.........................................................152 (2) Enjeux de l’éducation .................................................................................153
b) Les objectifs de Dakar et l’idéal de l’éducation pour tous .................................154 c) Exemples d’actions nationales ou associatives...................................................155
(1) Le développement d’un secteur éditorial en langues nationales.................155 (2) L’amélioration de l’accès aux livres en Afrique.........................................156 (3) Une action associative au Burkina : EDUKAFASO ..................................156
2. Améliorer le niveau d’informatisation et les infrastructures de télécommunications 158
a) Informatisation....................................................................................................158 (1) Des signes positifs ......................................................................................158 (2) Un abaissement des droits de douanes ? .....................................................158 (3) Le développement du logiciel libre ............................................................160 (4) La nécessité d’une coordination des différentes actions et d’une recherche de synergie...................................................................................................................160
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
b) Infrastructures de télécommunication.................................................................161 (1) L’enjeu de la boucle locale radio................................................................161 (2) Les bénéfices attendus de la libéralisation du secteur des télécommunications ................................................................................................162 (3) Bénéfice sectoriel et bénéfice global : les réserves émises face à la logique de libéralisation.......................................................................................................163
3. Favoriser l’accès à l’Internet .................................................................................165 a) Le coût de l’accès à Internet en question............................................................165
(1) Le coût des communications téléphoniques pour les fournisseurs d’accès à Internet concurrents de l’ONATEL ........................................................................165 (2) Le coût d’une ligne spécialisée...................................................................166
b) Pour une appropriation progressive des NTIC dans le monde rural : la création de postes de médiateurs ...................................................................................................167 c) Le cas du Sénégal : le développement des cabines téléphonique et des télécentres 168
4. Développer les compétences « utilisateur » ...........................................................170 a) Impliquer le monde associatif et élaborer un plan de coordination....................170 b) Former des formateurs ........................................................................................171 c) Mener des action de sensibilisation et initier le plus tôt possible les élèves à l’informatique .............................................................................................................171 d) Capitaliser les expériences..................................................................................171
(1) Pourquoi capitaliser ?..................................................................................171 (2) Comment capitaliser ? ................................................................................173
5. Favoriser la création d’un espace public de l’information et financer le développement des infrastructures en Afrique................................................................174
a) Une taxe sur les brevets ? ...................................................................................174 b) Taxer les bénéfices apportés par les NTIC à la croissance des pays riches ?.....175 c) Les propositions issues du débat de l’AFTIDEV ...............................................176
B. ENTRE FRANCOPHONIE ET PRESENCE DU BURKINA DANS LA SOCIETE DE L’INFORMATION : COMMENT FAVORISER LA CREATION DE CONTENU BURKINABE SUR LE WEB ?....................177
1. Les risques des fantasmes et des utopies pour les entrepreneurs...........................177 a) Ne pas construire de contenus « à l’occidentale » ..............................................177 b) Illustration du principe........................................................................................178
(1) Un commerçant de Ouagadougou...............................................................178 (2) Un hôtelier de Bobo-Dioulasso...................................................................179
2. Quel contenu burkinabé sur le web ? .....................................................................180 a) Posséder ses propres structures et ses services adaptés ......................................180 b) Définir des secteurs prioritaires ..........................................................................180
(1) A qui s’adresse le contenu web du Burkina Faso ? ....................................180 (2) Les secteurs qui doivent être favorisés .......................................................181
c) Rendre visibles les créations multimédia............................................................181 (1) Le poids du référencement..........................................................................181 (2) La capitalisation de la visibilité sous la forme de réseaux et de portails ....182 (3) La création d’une liste officielle des contenus d’intérêt général ................182 (4) La mise en place d’une charte technique de création multimédia ..............183
3. Comment favoriser la création d’un contenu burkinabé ? .....................................183 a) Favoriser la conception de contenu en brisant les coûts de conception..............183 b) L’intervention de l’Etat pour le développement d’un contenu prioritaire : la création d’une agence nationale de conception multimédia .......................................184
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L’internet au Burkina Faso en 2002 : situation, enjeux et perspectives
C. AU DELA DES ENJEUX LIES A LA SOCIETE DE L’INFORMATION, LES NTIC SONT PORTEUSES EN ELLES-MEMES D’OPPORTUNITES ECONOMIQUES POUR LE BURKINA FASO ....186
1. La nécessité de développer une industrie de l’information ....................................186 (1) L’information : un marché porteur .............................................................186 (2) L’externalisation de la programmation par les pays riches ........................187
b) Le développement d’une image qualitative et l’attrait des investisseurs............188 2. Comment permettre la mise en place de la sous-traitance informatique ? ............189
a) Initier la sous-traitance par une démarche de prospection..................................189 b) Développer des compétences correspondant aux besoins de la sous-traitance ..190
(1) Le développement des compétences en infographie...................................190 (2) Les langages de programmation .................................................................191
c) Le cas du Sénégal ...............................................................................................191
CONCLUSION ........................................................................................................ 195 BIBLIOGRAPHIE .................................................................................................... 199 ANNEXES............................................................................................................... 215
Emmanuel Lacroix Page 222
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