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UNIVERSITE DE MONTPELLIER
FACULTE DE MEDECINE MONTPELLIER NIMES
THESE
Pour obtenir le titre de
DOCTEUR EN MEDECINE
Présentée et soutenue publiquement
Par
Charly CRESPE
le 30 juin 2017
TITRE
Les médecins généralistes et les conduites suicidaires, leurs
connaissances et leurs expériences : enquête en Languedoc-Roussillon
Directeur de thèse : Pr Philippe COURTET
JURY
Président :
Pr Philippe COURTET
Assesseurs :
Pr Philippe LAMBERT
Dr Emilie OLIE
Dr Jorge LOPEZ CASTROMAN
2
UNIVERSITE DE MONTPELLIER
FACULTE DE MEDECINE MONTPELLIER NIMES
THESE
Pour obtenir le titre de
DOCTEUR EN MEDECINE
Présentée et soutenue publiquement
Par
Charly CRESPE
le 30 juin 2017
TITRE
Les médecins généralistes et les conduites suicidaires, leurs
connaissances et leurs expériences : enquête en Languedoc-Roussillon
Directeur de thèse : Pr Philippe COURTET
JURY
Président :
Pr Philippe COURTET
Assesseurs :
Pr Philippe LAMBERT
Dr Emilie OLIE
Dr Jorge LOPEZ CASTROMAN
3
ANNEE UNIVERSITAIRE 2016 - 2017
PERSONNEL ENSEIGNANT
Professeurs Honoraires
ALLIEU Yves ALRIC Robert AUSSILLOUX Charles AVEROUS Michel AYRAL Guy BAILLAT Xavier BALDY-MOULINIER Michel BALMES Jean-Louis BALMES Michel BALMES Pierre BANSARD Nicole BAYLET René BILLIARD Michel BLARD Jean-Marie BLAYAC Jean Pierre BONNEL François BOUDET Charles BOURGEOIS Jean-Marie BRUEL Jean Michel BUREAU Jean-Paul BRUNET Michel CALLIS Albert CANAUD Bernard CASTELNAU Didier CHAPTAL Paul-André CIURANA Albert-Jean CLOT Jacques D’ATHIS Françoise DEMAILLE Jacques DESCOMPS Bernard DIMEGLIO Alain DU CAILAR Jacques DUBOIS Jean Bernard DUMAS Robert DUMAZER Romain
ECHENNE Bernard FABRE Serge FREREBEAU Philippe GALIFER René Benoît GODLEWSKI Guilhem GRASSET Daniel GROLLEAU-RAOUX Robert GUILHOU Jean-Jacques HERTAULT Jean HUMEAU Claude JAFFIOL Claude JANBON Charles JANBON François JARRY Daniel JOYEUX Henri LABAUGE Robert LAFFARGUE François LALLEMANT Jean Gabriel LAMARQUE Jean-Louis LAPEYRIE Henri LESBROS Daniel LOPEZ François Michel LORIOT Jean LOUBATIERES Marie Madeleine MAGNAN DE BORNIER Bernard MARY Henri MATHIEU-DAUDE Pierre MEYNADIER Jean-Charles MICHEL François-Bernard MICHEL Henri MIMRAN Albert MION Charles MION Henri MIRO Luis
NAVARRO Maurice NAVRATIL Henri OTHONIEL Jacques PAGES Michel PEGURET Claude POUGET Régis PUECH Paul PUJOL Henri PUJOL Rémy RABISCHONG Pierre RAMUZ Michel RIEU Daniel RIOUX Jean-Antoine ROCHEFORT Henri ROUANET DE VIGNE LAVIT Jean Pierre SAINT AUBERT Bernard SANCHO-GARNIER Hélène SANY Jacques SENAC Jean-Paul SERRE Arlette SIMON Lucien SOLASSOL Claude SUQUET Pierre THEVENET André VIDAL Jacques VISIER Jean Pierre
Professeurs Emérites ARTUS Jean-Claude BLANC François BOULENGER Jean-Philippe BOURREL Gérard CLAUSTRES Mireille DEDET Jean-Pierre DAURES Jean-Pierre DAUZAT Michel ELEDJAM Jean-Jacques GUERRIER Bernard MAURY Michèle MILLAT Bertrand MARES Pierre MONNIER Louis PREFAUT Christian SULTAN Charles TOUCHON Jacques
id
Professeurs des Universités - Praticiens Hospitaliers
PU-PH de classe exceptionnelle
ASENCIO Gérard - Chirurgie orthopédique et Traumatologique BACCINO Eric - Médecine légale et droit de la santé BONAFE Alain - Radiologie et imagerie médicale BRINGER Jacques – Doyen - Endocrinologie, diabète et maladies métaboliques ; gynécologie médicale CAPDEVILA Xavier - Anesthésiologie-réanimation ; médecine d’urgence COMBE Bernard - Rhumatologie COSTA Pierre - Urologie COTTALORDA Jérôme - Chirurgie infantile CRAMPETTE Louis - Oto-rhino-laryngologie CRISTOL Jean Paul - Biochimie et biologie moléculaire DAVY Jean Marc - Cardiologie DE LA COUSSAYE Jean Emmanuel - Anesthésiologie-réanimation ; médecine d’urgence DELAPORTE Eric - Maladies infectieuses ; maladies tropicales DOMERGUE Jacques - Chirurgie générale DUFFAU Hugues - Neurochirurgie DUJOLS Pierre - Biostatistiques, informatique médicale et technologies de la communication ELIAOU Jean François - Immunologie FABRE Jean Michel - Chirurgie générale GUILLOT Bernard - Dermato-vénéréologie HAMAMAH Samir - Biologie et Médecine du développement et de la reproduction ; gynécologie médicale HEDON Bernard - Gynécologie-obstétrique ; gynécologie médicale HERISSON Christian - Médecine physique et de réadaptation JABER Samir - Anesthésiologie-réanimation ; médecine d’urgence (option anesthésiologie-réanimation) JEANDEL Claude Médecine interne ; gériatrie et biologie du vieillissement, médecine générale, addictologie JONQUET Olivier - Réanimation ; médecine d’urgence LANDAIS Paul - Epidémiologie, Economie de la santé et Prévention LARREY Dominique - Gastroentérologie ; hépatologie ; addictologie MARTY-ANE Charles - Chirurgie thoracique et cardiovasculaire MERCIER Jacques - Physiologie MESSNER Patrick - Cardiologie MOURAD Georges - Néphrologie PELISSIER Jacques - Médecine physique et de réadaptation RENARD Eric - Endocrinologie, diabète et maladies métaboliques ; gynécologie médicale REYNES Jacques - Maladies infectieuses, maladies tropicales RIBSTEIN Jean - Médecine interne ; gériatrie et biologie du vieillissement, médecine générale, addictologie RIPART Jacques - Anesthésiologie-réanimation ; médecine d’urgence SCHVED Jean François - Hématologie; Transfusion TAOUREL Patrice - Radiologie et imagerie médicale UZIEL Alain - Oto-rhino-laryngologie VANDE PERRE Philippe - Bactériologie-virologie ; hygiène hospitalière VOISIN Michel - Pédiatrie
PU-PH de 1re classe ALBAT Bernard - Chirurgie thoracique et cardiovasculaire ALRIC Pierre - Chirurgie vasculaire; médecine vasculaire (option chirurgie vasculaire) AVIGNON Antoine - Nutrition AZRIA David - Cancérologie ; radiothérapie BAGHDADLI Amaria - Pédopsychiatrie ; addictologie BASTIEN Patrick - Parasitologie et mycologie BEREGI Jean-Paul - Radiologie et imagerie médicale BLAIN Hubert - Médecine interne ; gériatrie et biologie du vieillissement, médecine générale, addictologie BLANC Pierre - Gastroentérologie ; hépatologie ; addictologie BORIE Frédéric - Chirurgie digestive BOULOT Pierre - Gynécologie-obstétrique ; gynécologie médicale CANOVAS François - Anatomie CARTRON Guillaume - Hématologie ; transfusion CHAMMAS Michel - Chirurgie orthopédique et traumatologique COLSON Pascal - Anesthésiologie-réanimation ; médecine d’urgence COSTES Valérie - Anatomie et cytologie pathologiques
iid
COUBES Philippe - Neurochirurgie COURTET Philippe - Psychiatrie d’adultes ; addictologie CYTEVAL Catherine - Radiologie et imagerie médicale DAUVILLIERS Yves - Physiologie DE TAYRAC Renaud - Gynécologie-obstétrique, gynécologie médicale (option gynécologie-obstétrique) DE WAZIERES Benoît - Médecine interne ; gériatrie et biologie du vieillissement médecine générale, addictologie DEMARIA Roland - Chirurgie thoracique et cardio-vasculaire DEMOLY Pascal - Pneumologie ; addictologie DEREURE Olivier - Dermatologie - vénéréologie DROUPY Stéphane - Urologie FRAPIER Jean-Marc - Chirurgie thoracique et cardiovasculaire HAMEL Christian - Ophtalmologie JORGENSEN Christian - Thérapeutique ; médecine d’urgence ; addictologie KLOUCHE Kada - Réanimation ; médecine d’urgence KOENIG Michel - Génétique moléculaire KOTZKI Pierre Olivier - Biophysique et médecine nucléaire LABAUGE Pierre - Neurologie LAFFONT Isabelle - Médecine physique et de réadaptation LAVABRE-BERTRAND Thierry - Cytologie et histologie LE QUELLEC Alain - Médecine interne ; gériatrie et biologie du vieillissement, médecine générale, addictologie LECLERCQ Florence - Cardiologie LEFRANT Jean-Yves - Anesthésiologie-réanimation ; médecine d’urgence LEHMANN Sylvain - Biochimie et biologie moléculaire LEROUX Jean Louis - Rhumatologie LUMBROSO Serge - Biochimie et Biologie moléculaire MARIANO-GOULART Denis - Biophysique et médecine nucléaire MATECKI Stéfan - Physiologie MAUDELONDE Thierry - Biologie cellulaire MEUNIER Laurent - Dermato-vénéréologie MONDAIN Michel - Oto-rhino-laryngologie MORIN Denis - Pédiatrie NAVARRO Francis - Chirurgie générale PAGEAUX Georges-Philippe - Gastroentérologie ; hépatologie ; addictologie PETIT Pierre - Pharmacologie fondamentale ; pharmacologie clinique ; addictologie PUJOL Jean Louis - Pneumologie ; addictologie PUJOL Pascal - Biologie cellulaire QUERE Isabelle - Chirurgie vasculaire ; médecine vasculaire (option médecine vasculaire) ROUANET Philippe - Cancérologie ; radiothérapie SARDA Pierre - Génétique SOTTO Albert - Maladies infectieuses ; maladies tropicales TOUITOU Isabelle - Génétique TRAN Tu-Anh - Pédiatrie VERNHET Hélène - Radiologie et imagerie médicale YCHOU Marc - Cancérologie ; radiothérapie ZANCA Michel - Biophysique et médecine nucléaire
PU-PH de 2ème classe
AGUILAR MARTINEZ Patricia - Hématologie ; transfusion ASSENAT Éric - Gastroentérologie ; hépatologie ; addictologie BERTHET Jean-Philippe - Chirurgie thoracique et cardiovasculaire BOURDIN Arnaud - Pneumologie ; addictologie CAMBONIE Gilles - Pédiatrie CAMU William - Neurologie CANAUD Ludovic - Chirurgie vasculaire ; Médecine Vasculaire CAPTIER Guillaume - Anatomie CAYLA Guillaume - Cardiologie CHANQUES Gérald - Anesthésiologie-réanimation ; médecine d'urgence COLOMBO Pierre-Emmanuel - Cancérologie ; radiothérapie CORBEAU Pierre - Immunologie COSTALAT Vincent - Radiologie et imagerie médicale COULET Bertrand - Chirurgie orthopédique et traumatologique CUVILLON Philippe - Anesthésiologie-réanimation ; médecine d'urgence DADURE Christophe - Anesthésiologie-réanimation ; médecine d'urgence DE VOS John - Cytologie et histologie
iiid
DORANDEU Anne - Médecine légale - DUCROS Anne - Neurologie - DUPEYRON Arnaud - Médecine physique et de réadaptation FESLER Pierre - Médecine interne ; gériatrie et biologie du vieillissement, médecine générale, addictologie GARREL Renaud - Oto-rhino-laryngologie GAUJOUX Viala Cécile - Rhumatologie GENEVIEVE David - Génétique GODREUIL Sylvain - Bactériologie-virologie ; hygiène hospitalière GUILLAUME Sébastien - Urgences et Post urgences psychiatriques - GUIU Boris - Radiologie et imagerie médicale HAYOT Maurice - Physiologie HOUEDE Nadine - Cancérologie ; radiothérapie KALFA Nicolas - Chirurgie infantile KOUYOUMDJIAN Pascal - Chirurgie orthopédique et traumatologique LALLEMANT Benjamin - Oto-rhino-laryngologie LAVIGNE Jean-Philippe - Bactériologie-virologie ; hygiène hospitalière LE MOING Vincent - Maladies infectieuses ; maladies tropicales LETOUZEY Vincent - Gynécologie-obstétrique ; gynécologie médicale LUKAS Cédric - Rhumatologie MAURY Philippe - Chirurgie orthopédique et traumatologique MORANNE Olivier - Néphrologie MOREL Jacques - Rhumatologie NAGOT Nicolas - Biostatistiques, informatique médicale et technologies de la communication NOCCA David - Chirurgie digestive PANARO Fabrizio - Chirurgie générale PASQUIE Jean-Luc - Cardiologie PEREZ MARTIN Antonia - Physiologie PERNEY Pascal - Médecine interne ; gériatrie et biologie du vieillissement, médecine générale, addictologie POUDEROUX Philippe - Gastroentérologie ; hépatologie ; addictologie PRUDHOMME Michel - Anatomie PURPER-OUAKIL Diane - Pédopsychiatrie ; addictologie RIGAU Valérie Anatomie et cytologie pathologiques RIVIER François Pédiatrie ROGER Pascal - Anatomie et cytologie pathologiques ROSSI Jean François - Hématologie ; transfusion ROUBILLE François - Cardiologie SEBBANE Mustapha - Anesthésiologie-réanimation ; médecine d'urgence SEGNARBIEUX François - Neurochirurgie SIRVENT Nicolas Pédiatrie SOLASSOL Jérôme - Biologie cellulaire SULTAN Ariane - Nutrition THOUVENOT Éric - Neurologie THURET Rodolphe - Urologie VENAIL Frédéric - Oto-rhino-laryngologie VILLAIN Max - Ophtalmologie VINCENT Denis - Médecine interne ; gériatrie et biologie du vieillissement, médecine générale, addictologie VINCENT Thierry - Immunologie WOJTUSCISZYN Anne - Endocrinologie-diabétologie-nutrition
PROFESSEURS DES UNIVERSITES COLINGE Jacques (Cancérologie, Signalisation cellulaire et systèmes complexes)
LAOUDJ CHENIVESSE Dalila (Biochimie et biologie moléculaire) VISIER Laurent (Sociologie, démographie)
PROFESSEURS DES UNIVERSITES - Médecine générale
AMOUYAL Michel LAMBERT Philippe
PROFESSEURS ASSOCIES - Médecine Générale
DAVID Michel RAMBAUD Jacques
PROFESSEUR ASSOCIE - Médecine BESSIS Didier (Dermato-vénéréologie)
ivd
PERRIGAULT Pierre-François (Anesthésiologie-réanimation ; médecine d'urgence)
Maîtres de Conférences des Universités - Praticiens Hospitaliers
MCU-PH Hors classe CACHEUX-RATABOUL Valère - Génétique CARRIERE Christian - Bactériologie-virologie ; hygiène hospitalière CHARACHON Sylvie - Bactériologie-virologie ; hygiène hospitalière FABBRO-PERAY Pascale - Epidémiologie, économie de la santé et prévention HILLAIRE-BUYS Dominique - Pharmacologie fondamentale ; pharmacologie clinique ; addictologie LACHAUD Laurence - Parasitologie et mycologie PARIS Françoise - Biologie et médecine du développement et de la reproduction PRAT Dominique - Anatomie PUJOL Joseph - Anatomie RAMOS Jeanne - Anatomie et cytologie pathologiques RICHARD Bruno - Thérapeutique ; médecine d’urgence ; addictologie RISPAIL Philippe - Parasitologie et mycologie SEGONDY Michel - Bactériologie-virologie ; hygiène hospitalière
MCU-PH de 1re classe
ALLARDET-SERVENT Annick - Bactériologie-virologie ; hygiène hospitalière BADIOU Stéphanie - Biochimie et biologie moléculaire BOUDOUSQ Vincent - Biophysique et médecine nucléaire BOULLE Nathalie - Biologie cellulaire BOURGIER Céline - Cancérologie, Radiothérapie COSSEE Mireille - Génétique Moléculaire GABELLE DELOUSTAL Audrey - Neurologie GIANSILY-BLAIZOT Muriel - Hématologie ; transfusion GIRARDET-BESSIS Anne - Biochimie et biologie moléculaire GUILPAIN Philippe - Médecine Interne JUNG Boris - Anesthésie-Réanimation, Médecine d’urgence LAVIGNE Géraldine - Hématologie ; transfusion MATHIEU Olivier - Pharmacologie fondamentale ; pharmacologie clinique ; addictologie MENJOT de CHAMPFLEUR Nicolas - Neuroradiologie PANABIERES Catherine - Biologie cellulairePELLESTOR Franck - Cytologie et histologie PHILIBERT Pascal - Biologie et médecine du développement et de la reproduction RAVEL Christophe - Parasitologie et mycologie SCHUSTER-BECK Iris - Physiologie STERKERS Yvon - Parasitologie et mycologie STOEBNER Pierre - Dermato-vénéréologie TUAILLON Edouard - Bactériologie-virologie ; hygiène hospitalière YACHOUH Jacques - Chirurgie maxillo-faciale et stomatologie
MCU-PH de 2éme classe BRET Caroline - Hématologie biologique BRUN Miche - Bactériologie virologie, hygiène hospitalière DU THANH Aurélie - Dermato-Vénéréologie GALANAUD Jean-Philippe - Médecine Vasculaire JEZIORSKI Eric - Pédiatrie LE QUINTREC Moglie - Néphrologie LESAGE François-Xavier - Médecine et Santé au Travail MOUZAT Kévin - Biochimie et biologie moléculaire OLIE Emilie - Psychiatrie Adultes, Addictologie THEVENIN-RENE Céline - Immunologie
MAITRES DE CONFERENCES DES UNIVERSITES - Médecine Générale
COSTA David FOLCO-LOGNOS Béatrice
MAITRES DE CONFERENCES ASSOCIES - Médecine Générale
CLARY Bernard GARCIA Marc
MILLION Elodie REBOUL Marie-Catherine
SEGURET Pierre
vd
MAITRES DE CONFERENCES DES UNIVERSITES
Maîtres de Conférences hors classe BADIA Eric - Sciences biologiques fondamentales et cliniques
Maîtres de Conférences de classe normale
BECAMEL Carine - Neurosciences BERNEX Florence - Physiologie CHAUMONT-DUBEL Séverine - Sciences du médicament et des autres produits de santé CHAZAL Nathalie - Biologie cellulaire DELABY Constance - Biochimie et biologie moléculaire GUGLIELMI Laurence - Sciences biologiques fondamentales et cliniques HENRY Laurent - Sciences biologiques fondamentales et cliniques LADRET Véronique - Mathématiques appliquées et applications des mathématiques LAINE Sébastien - Sciences du Médicament et autres produits de santé LE GALLIC Lionel - Sciences du médicament et autres produits de santé LOZZA Catherine - Sciences physico-chimiques et technologies pharmaceutiques MAIMOUN Laurent - Sciences physico-chimiques et ingénierie appliquée à la santé MOREAUX Jérôme - Science biologiques, fondamentales et cliniques MORITZ-GASSER Sylvie - Neurosciences MOUTOT Gilles - Philosophie PASSERIEUX Emilie - Physiologie RAMIREZ Jean-Marie - Histologie TAULAN Magali - Biologie Cellulaire
PRATICIENS HOSPITALIERS UNIVERSITAIRES
FAILLIE Jean-Luc - Pharmacologie fondamentale ; pharmacologie clinique ; addictologie GATINOIS Vincent - Histologie, embryologie et cytogénétique GOUZI Farès - Physiologie HERLIN Christian - Chirurgie plastique ; reconstructrice et esthétique ; brûlologie HERRERO Astrid - Chirurgie générale KUSTER Nils - Biochimie et biologie moléculaire MICHON Anne-Laure - Bactériologie-virologie ; hygiène hospitalière MURA Thibault - Biostatistiques, informatique médicale et technologies de la communication PANTEL Alix - Bactériologie-virologie ; hygiène hospitalière PERS Yves-Marie - Thérapeutique, médecine d’urgence ; addictologie PINETON DE CHAMBRUN Guillaume - Gastroentérologie ; hépatologie ; addictologie TORRE Antoine - Gynécologie-obstétrique ; gynécologie médicale
vid
Remerciements
Au Professeur Philippe Courtet, je suis doublement honoré par votre présence comme
directeur de thèse et président du jury. Merci pour cet encadrement universitaire et la
confiance que vous m’avez témoignée lors de nos échanges, merci pour vos enseignements
au-delà de ce travail et vos qualités humaines,
Au Professeur Philippe LAMBERT, merci pour vos conseils dans le lancement de ce travail à
destination de la médecine générale, merci d’avoir accepté de participer au jury de cette
soutenance de thèse, votre point de vue sur ce travail est précieux,
Au Docteur Emilie OLIE, je suis très heureux de pouvoir te remercier dans ce travail, mes
remerciements portent sur l’ensemble de mon internat, et ce que tu m’as apporté tant sur
l’encadrement théorique que lors des visites à la Traversière,
Au Docteur Jorge LOPEZ CASTROMAN, c’est un vrai plaisir de bénéficier de ton regard sur ce
travail, je te remercie d’avoir accepté cette invitation au jury,
Remerciement à tous les psychiatres qui ont contribué à ma formation, avec dans l’ordre de
rencontre,
Le Docteur Stéphanie Bolland, avec qui j’ai commencé à faire de la psychiatrie en tant
qu’interne au CMP de la rue Hoche, merci pour ton soutien, et pour cette mise en autonomie
progressive jusqu’à « la coupure du cordon »,
Les Docteurs Monier et Pépin, pour votre accueil chaleureux dans cette unité de soins
intensifs psychiatriques. Merci Bérangère pour ta disponibilité et ta gentillesse,
Et plus généralement pour mon passage à Nîmes je remercie l’ensemble des autres
psychiatres et les équipes infirmières. Je remercie avec une mention spéciale le Docteur
ABBAR, merci à vous pour cette vision de la psychiatrie, pour le contenu de votre frigo lors
des gardes, merci pour votre générosité,
Merci aux Docteurs Boukhezra et Aubert pour leur accueil dans le service de psychologie
médicale. Olia, je te remercie pour ton soutien, et je suis très honoré de continuer après toi
au sein du dispositif Vigilans,
Je remercie le Docteur Hélène Denis pour son accueil chaleureux et sincère dans son unité
spécialisée. Hélène, je te remercie pour ton soutien sans faille, et l’ensemble des
connaissances apportées sur la psychothérapie.
viid
Je remercie le Docteur COPPOLA et le Docteur SCHENK. Merci à toi Fred que j’ai connu interne
puis jeune assistant. Ta gentillesse et tes qualités humaines furent pour moi un modèle pour
la pratique de notre métier.
Pour chacun de ces services, je remercie l’ensemble des équipes soignantes, avec qui j’ai pu
animer un groupe auprès d’adolescents, côtoyer de près « la psychose chronique », apprendre
la modestie, débattre sur le rôle de chacun dans le soin, passer de grands moments de rires,
de belles émotions, et de plaisir professionnel. Une mention spéciale là encore à ma
conseillère médicale qui se reconnaitra.
Merci à l’équipe Vigilans LR que je vais rejoindre « officiellement » très prochainement. Marie
France, Sandrine, Marie Christine, Christine, Eléazère, Maïté, Jorge et Harold.
Merci à l’ensemble de l’équipe de l’Unité INSERM U1061, en particulier à Isabelle Jaussent et
Séverine Béziat pour leur aide plus que précieuse dans le traitement des données. Merci pour
votre disponibilité.
Merci au Professeur Guillaume VAIVA, à Charles-Edouard Notredame et aux équipes lilloises
de Vigilans. Vous avez joué un rôle important et avez été d’une aide précieuse dans ce travail.
Merci pour votre gentillesse.
Merci au Docteur Fanny Molière pour cette collaboration en partenariat avec l’équipe
Carenity. Merci pour ta disponibilité, et pour ta conférence sur la santé mentale au Grau du
Roi.
Merci à mes co-internes, en particulier Nadia, Dimitri, Déborah, Thibaut, Estelle et Ismael.
Nadia, comment ne pas t’en vouloir après toute l’énergie mise dans la conception du
calendrier des chemises. Nous ne verrons plus jamais ce travail artistique. Je suis très heureux
de notre rencontre qui nous aura conduit de Calvi à Saint Jean du Gard !
Dimitri, tu resteras le premier de mes co-internes, celui avec qui nous avons débuté la
psychiatrie. Qu’il est loin le temps des histoires amusantes, des comptes rendus en retard, et
de nos expériences. Je te souhaite de réussir dans tes projets.
Déborah, je te remercie d’avoir su partager avec moi ta passion des lapins, je dois t’avouer
que tes arguments ne m’ont pas convaincu d’en adopter.
Thibaut, nous avons été brièvement co-interne, mais nous nous sommes plus vus en dehors
qu’à l’intérieur de notre terrain de stage. Et je dirais que cela n’a rien à voir avec le stage en
question, mais plus du fait de notre inscription commune au master de SHS.
Estelle, je te remercie pour ces 6 mois de pédopsychiatrie, à observer l’inobservable, et les
transformations des uns en autres. Je te remercie pour le cadre que tu m’as apporté, tes
conseils d’organisation et ta capacité attentionnelle. Je me suis senti moins seul !
Ismaël, je ne te remercierai jamais assez d’avoir su trouver du temps pour discuter avec moi à
l’occasion de notre stage de pédopsychiatrie (et tout le monde sait que cela n’est pas évident).
Merci pour ces échanges, débats et discussions en tout genre. Merci pour ton soutien.
viiid
Merci à Chloé, la liste de nos activités communes est si longue que je pourrai te compter parmi
mes co-internes. Merci de m’avoir offert ton créneau de thèse, sans ça je crois que j’aurais
abandonné l’idée de soutenir et me serais consacré à la politique. Très heureux pour notre
collaboration dans SOS SILR.
Merci à notre équipe pour 180 SPI ! Re merci à Chloé, et Ismael. Merci à Yann pour cette
brillante idée qui nous aura conduit dans le grand Nord de la France pour une sélection
mémorable et les rencontres improbables qui ont suivi... Merci également à l’équipe Carco
pour son soutien et en particulier à Nathalie Isabelle.
Merci à Popo, d’avoir misé sur moi et de continuer à le faire. Encore aujourd’hui j’essaie de
comprendre ce qui nous a conduit à cette situation. Et je suis formel, d’après mes calculs, il
s’agit du destin !
Merci à Lucile, pour ton sens de la psychiatrie, ta force, et ton courage. Je suis toujours très
heureux de savoir que l’esprit carabin n’est pas mort, même en psychiatrie. Je salue ici ta
tentative d’instauration de la roue à la Colombière. C’était au moins autant ambitieux que de
se lancer en politique.
Merci à Alex pour ses mots doux qui déjà le prédestinaient à la communication hypnotique.
Très heureux de te connaitre.
Merci aux autres internes de psychiatrie, une attention particulière à notre promo 2013 qui
n’a pas l’air d’être pressée de soutenir la thèse.
Je suis très heureux des rencontres faites au cours de mon internat, en particulier au cours de
la première année. J’ai adoré vivre dans cet internat à Carémeau, faire les améliorés, et
apprendre à vous connaitre. Je dois avouer toute la joie que j’ai eu lors de mon
déménagement à la rue de la Biche et cette première coloc improvisée avec Yoyo.
Yoyo tu es quelqu’un d’exceptionnel, tout simplement.
Merci aux membres de la villa 1 pour cette initiation à Clash, que vous avez tous arrêté alors
que je commençais à peine à progresser ! Merci surtout pour tout le reste de nos expériences
qu’il ne serait pas convenable de citer dans un document universitaire !
Merci à Valérie Marianne et Sylvia, pour leur soutien, leur dévouement à la cause des internes.
Merci aux membres des bureaux du Syndicat des Internes du Languedoc-Roussillon. Je suis
très heureux d’avoir pu contribuer à la vie de cette structure, dans la joie souvent, dans la
peine parfois. Merci vraiment à vous tous. Une mention spéciale à Yassir que j’admire pour ce
parcours associatif. Merci pour ton fidèle soutien dans chacune des phases de notre
développement stratégique 😉
Une pensée pour toutes les rencontres faites à Clermont Ferrand, mais surtout pour cette
amitié de qualité que j’ai nouée avec toi Mathilde. Une belle rencontre. Je te remercie pour
tous ces moments partagés jours et nuits, rythmés par nos études et nos rattrapages et la vie
de la corpo qu’il fallait mener d’une main de maitre. Comment ne pas oublier le jour où tout
à basculer pour la désignation du président du pôle humanitaire. Que serions-nous devenus
si les rôles avaient été inversés ?
ixd
Merci à Sévérin, je pense toujours à toi malgré l’évolution de nos relations.
Merci à cette belle coloc, Yassir, Rosa et Yoyo. Impossible de citer tous les excellents moments
passés ensemble à rire, manger, boire, et le reste de nos expériences. Je salue le courage de
ma petite Rosa pour vivre au sein de cette meute (ou l’inverse 😉). N’oubliez pas qu’il est un
appartement à Montpellier dans lequel une barre de traction inamovible sommeille. Un big
up à la déco des toilettes ! Et à notre traditionnel repas de Noël.
Merci à mes amis d’enfance, et du Grau.
Ce n’est pas sans émotion que j’écris cette partie des remerciements. Je peux vous assurer
que presque la totalité des personnes citées plus haut ont entendu parlé du Grau du Roi et de
mon amour pour ce village. Cet amour est celui de mes amis et de ma famille, et chez nous
ces liens se mélangent toujours.
Je remercie l’Equipe dans son ensemble. Jordy, Thomas, Paulo, Steven, Jems, Seb, Max, Circus,
Mij, Giovanni, Yann, Matthieu et Guitou, Jeff (même si tu n’es pas dans l’équipe), c’est
toujours avec plaisir que nous nous retrouvons pour le meilleur, souvent le pire ! Merci car
avec vous j’ai toujours passé de bons moments, vous avez été d’une aide précieuse pour ces
longues études qui s’achèvent.
Paulo, je te remercie pour le personnage que tu es. Je regrette trop souvent de ne pas te voir
assez. Une pensée pour ces souvenirs de CM2.
Max, incontestablement le plus imprévisible de la bande, capable de disparaitre à tous
moments. Une oreille musicale forgée à toute épreuve, et un talent d’imitation incroyable.
Mention spéciale à Mij, Jérémy et le petit Bas. Déjà qu’un c’est dur à suivre les 3 réunis
suffisent à épuiser un régiment. Je te remercie pour cette coloc informelle, pour tous nos
moments de « délires » et de fous rire. Merci beaucoup pour tout… De quoi ? De quoi ?
Guitou et Jeff, je n’ai compris trop tard que j’aurai dû vous faire venir aux soirées d’internat
plus souvent. Je n’oublierais jamais cette soirée de mélange des genres. Très heureux de vous
connaitre.
A Fred et Marina, très heureux d’avoir rencontré votre vie. Avec vous l’amitié s’est construite
progressivement et surement, jusqu’à ce merveilleux cadeau que vous m’avez fait en me
choisissant comme parrain de Tanit. Merci pour votre soutien dans ces études. Vous avez
toujours su m’écouter et me rassurer dans mes choix.
A toute ma famille, trop nombreuse pour être citée dans son intégralité.
A Philippe, merci pour ces années, ton soutien précieux et sans faille pour mener à bien ces
longues études.
A mon frère, Armand, une fierté grandissant constamment. Je suis très heureux de t’avoir
comme frère. Me voilà de retour dans la région, après ces années passées dans l’Auvergne
lointaine.
xd
A ma sœur Pauline, je te remercie pour ton soutien et cette capacité que tu as à me rassurer.
Je suis aussi fier de toi, et très heureux d’être ton petit frère.
A mes 2 grands-mères sur lesquelles je porte un regard émerveillé, et qui par leurs histoires
me font vivre et revivre les grands moments de notre histoire familiale.
A mes 2 grands-pères, qui dans des styles bien différents m’ont beaucoup apporté. Je retiens
de Pierre nos balades sur le port dans mon enfance, et de Max ta sagesse, ton calme et ton
dévouement pour m’accompagner dans mes déplacements lorsque j’étais encore trop jeune.
A mes oncles, tantes, cousins et cousines pour l’amour et la joie de vivre qu’ils me donnent.
A toi, qui est probablement à l’origine première de ce travail, et qui m’accompagne encore
dans cette rédaction. Tu es si prêt et si loin en même temps. Merci pour l’énergie que tu m’as
transmis, la sensibilité, et la curiosité de la vie.
A ma mère, merci pour cette façon de voir, de ressentir et de percevoir ce qui nous entoure.
Tu es sans doute en partie à l’origine de mon choix de la psychiatrie, toi qui m’en parlais si
souvent en négatif. Je suis très heureux de pouvoir te remercier publiquement pour tout
l’amour que tu m’as donné.
Et pour finir, je vais remercier celle qui est venue transformer ma vie de jeune garçon en celle
de futur papa. En 2 ans seulement nous avons construit un beau projet de vie.
Tout d’abord je veux te remercier pour le travail très très très important que tu as fourni dans
la conception de cette thèse : du soutien psychologique au travail sur l’estime de soi, en
passant par la relecture du manuscrit (à l’exception de ces remerciements que j’écris sans
supervision !). Il y a un an c’était ton travail de thèse que nous célébrions, dans tes
remerciements tu parlais des chemises de ton Carlito. Aujourd’hui, MON CHAT, je suis bien
embêté pour répondre, puisque rien de ce que je voudrais « balancer » sur toi ne peut s’écrire
dans ces pages.
Ensuite, je tiens à remercier ici plus généralement ta famille, et tes amis que j’ai appris à
découvrir et qui sont tous formidables. Je suis vraiment le plus heureux du monde à tes côtés,
et je suis déjà très impatients d’accueillir notre petite fille.
1
Sommaire
Sommaire ................................................................................................................................... 1
Introduction : .............................................................................................................................. 3
Généralités en suicidologie .................................................................................................... 3
Définitions et paramètres mesurés .................................................................................... 3
Structures étudiant le suicide ............................................................................................. 3
Données épidémiologiques nationales et régionales ......................................................... 4
La lutte contre le suicide un enjeu de santé publique ........................................................... 5
Revue de la littérature en prévention du suicide ............................................................... 5
Les dispositifs de veille, l’exemple Vigilans ......................................................................... 7
Le(s) rôle(s) du Médecin Généraliste ..................................................................................... 9
Santé mentale et médecine générale ................................................................................. 9
Etude réalisée dans la communauté en ligne « Carenity » .............................................. 10
La formation une action efficace contre le suicide .............................................................. 11
Littérature ......................................................................................................................... 11
La formation en France ..................................................................................................... 13
Quelle offre de formation sur le suicide en Occitanie ? ................................................... 13
Objectifs de ce travail de thèse ............................................................................................ 14
Partie 1 : Enquête en ligne « QECS-MG-LR » : .......................................................................... 16
Les connaissances, les attitudes envers le suicide et l’évaluation du risque par les médecins
généralistes ........................................................................................................................... 16
Description de l’étude (matériel et méthode) ..................................................................... 19
Population étudiée ............................................................................................................ 19
L’enquête en ligne ............................................................................................................. 19
Analyses statistiques ......................................................................................................... 21
Résultats ............................................................................................................................... 22
Caractéristiques de la population étudiée : ...................................................................... 22
QECS .................................................................................................................................. 23
Concernant la pratique des médecins .............................................................................. 29
Discussion résultats de l’enquêtes QECS-MG-LR ................................................................. 32
Généralités liées à la structure de l’étude ........................................................................ 32
2
Résultats de l’étude .......................................................................................................... 33
Limites et Forces de l’étude .............................................................................................. 36
Premières conclusions .......................................................................................................... 38
Partie 2 : Enquête qualitative sur les attitudes envers le suicide des médecins généralistes du
Languedoc-Roussillon ............................................................................................................... 39
Introduction .......................................................................................................................... 39
Matériel et Méthode ............................................................................................................ 39
Equipe de recherche et réflexion ...................................................................................... 39
Conception de l’étude ....................................................................................................... 40
Analyse des données ......................................................................................................... 41
Résultats ............................................................................................................................... 42
Les attitudes sur le suicide des généralistes ..................................................................... 42
La naissance d’une clinique diagnostique ......................................................................... 44
La clinique thérapeutique ................................................................................................. 46
Le rôle perçu des généralistes .......................................................................................... 51
Les attentes en termes d’outils et de formations............................................................. 53
Discussion ............................................................................................................................. 55
Discussion sur l’étude ....................................................................................................... 55
Discussion des résultats .................................................................................................... 55
Conclusions et perspectives ................................................................................................. 58
Conclusion ................................................................................................................................ 59
Bibliographie ............................................................................................................................ 60
Annexes .................................................................................................................................... 66
Serment d’Hippocrate .............................................................................................................. 72
Permis d’imprimer .................................................................................................................... 73
3
Introduction : Généralités en suicidologie Définitions et paramètres mesurés
« Le suicide c’est l’acte de mettre fin à ses jours » écrit l’Organisation Mondiale de la
Santé (OMS) sur son site (1).
Plusieurs définitions existent parmi lesquelles celle du sociologue français Emile
Durkheim qui écrit « On appelle suicide tout cas de mort qui résulte directement ou
indirectement d'un acte positif ou négatif, accompli par la victime elle-même et qu'elle savait
devoir produire ce résultat »(2).
Quelle que soit sa définition, le suicide demeure un phénomène important à travers la
planète. Chaque mort par suicide entraine de lourdes conséquences humaines pour la famille,
les proches et la société. En effet on estime qu’un suicide abouti entraine 6 personnes
endeuillées « directe » et concerne une vingtaine de personnes (3).
Il se produit un décès par suicide toutes les 40 secondes dans le monde. Malgré cela,
le suicide demeure trop peu une préoccupation de santé publique. Les progrès de la recherche
et la connaissance en la matière permettent de considérer le suicide comme « un phénomène
évitable ».
En 2014, l’OMS édite son premier rapport sur le sujet afin de rassembler les
connaissances et fournir des outils de prévention du suicide (4). Dans le cadre du plan d’action
pour la santé mentale 2013-2020, les états membres de l’OMS ont pris l’engagement de
réduire de 10% la mortalité par suicide de leur pays.
Pour atteindre cet objectif, la France a créé un Observatoire National du Suicide (ONS)
en 2013. L’ONS a pour but de « recenser les outils et les données disponibles sur les suicides
et les tentatives de suicides » et « évaluer les actions de préventions » (5).
Structures étudiant le suicide
En France, c’est l’Observatoire National du Suicide qui centralise les données sur les
suicides et tentatives de suicide. La collecte de données est fondamentale aussi bien en amont
des actions qu’en aval pour pouvoir les évaluer.
Pour collecter les données sur le suicide, l’ONS fait appel à différents organismes. Des
travaux cherchent à optimiser et automatiser le recueil de celles-ci.
Actuellement, le seul moyen pour obtenir de façon systématique la mortalité par
suicide consiste à utiliser les données du Centre épidémiologique des causes de décès
4
(CépiDC). Cette unité de l’Institut National de la Santé et de la Recherche Médicale (INSERM)
a pour mission le traitement des certificats de décès. La conséquence directe de cette
méthode de recueil est qu’il est impossible d’obtenir en temps « réel » l’incidence du suicide.
De plus, des études ont permis de mettre en évidence qu’il existe une sous-évaluation du
nombre de suicides avec cette méthode. C’est environ une sous-estimation de 10%, mais cela
varie selon les régions(6). Une autre conséquence de l’utilisation de ces données est le délai
entre leur collecte, leur traitement et leur publication. Ce long délai abouti à la publication de
la mortalité annuelle par suicide avec un décalage de 3 ans.
L’Institut National de Veille Sanitaire (INVS) devenu Santé Publique France, collecte
également des données sur le suicide, les tentatives de suicide et est aussi amené à évaluer
des dispositifs de prévention du suicide.
Parmi les différents organismes on retrouve la Direction de la Recherche, des Etudes,
de l’Evaluation et des Statistiques (DREES) qui a pour mission au sein de l’ONS d’encourager
la recherche sur le suicide et la compréhension des mécanismes qui le sous-tendent.
A l’échelle régionale les Agences Régionales de Santé (ARS) organisent leur
« Observatoire Régional de Santé » qui inclut dans leur domaine d’étude des données sur le
suicide.
Enfin sur le plan scientifique, des organisations existent en suicidologie c’est le cas du
Groupe d’Etude sur la Prévention du Suicide (GEPS) et la Section d’Etude sur les Conduites
Suicidaires (SECS).
Données épidémiologiques nationales et régionales En 2012 en France métropolitaine 9715 décès par suicide ont été enregistrés, ce chiffre
s’élève à 10 686 décès après correction de la sous-estimation de 10% (7).
Le nombre de suicide est plus élevé chez les hommes (7305 décès) que chez les
femmes (2410 décès). Le taux standardisé sur l’âge est 3 fois supérieur chez l’homme que chez
la femme : 25,9 pour 100 000 habitants contre 7,4 décès pour 100 000 habitantes(7).
Le taux de décès par suicide augmente avec l’âge chez l’homme : 9,4 pour 100 000 chez
les 15 à 24 ans et 67,1 pour 100 000 chez les plus de 74 ans. A l’inverse, la part du suicide dans
la mortalité diminue fortement avec l’âge. Ceci s’explique en raison de l’augmentation des
autres causes de mortalité avec l’âge (7).
Les 3 principaux modes de suicide sont la pendaison (54%), les armes à feu (15%) et les
prises de médicaments (11%) (7). Selon le sexe et la région les méthodes utilisées pour se
donner la mort varient, cependant la pendaison et l’usage des armes à feu restent parmi les
plus létales.
Dans la région Languedoc-Roussillon, on dénombre 428 décès par suicide dont 313
hommes et 115 femmes. Le taux brut de mortalité par suicide est de 15,8 décès pour 100 000
habitants.
5
Le moyen utilisé pour se donner la mort est principalement la pendaison chez l’homme
(53% des suicides masculins), tandis que chez la femme c’est l’intoxication médicamenteuse
volontaire (IMV) (32,2% des suicides féminins).
La lutte contre le suicide un enjeu de santé publique La littérature qui s’intéresse aux moyens de prévention du suicide est riche. Elle permet
la conduite d’une politique de santé publique efficace, s’appuyant sur les actions qui
fonctionnent. En effet dans le domaine de la prévention du suicide, il est nécessaire d’avoir
une approche globale et variée dans les moyens et les méthodes.
Les grands principes efficaces de la lutte contre le suicide consistent à établir des
programmes d’information et d’éducation de la population générale et des professionnels,
améliorer les méthodes de dépistage des personnes à haut risque, traiter les comorbidités
psychiatriques (en particulier dépression), établir une politique de restriction de l’accès aux
moyens létaux et travailler sur le traitement médiatique des conduites suicidaires (8).
Revue de la littérature en prévention du suicide De nombreux auteurs se sont intéressés à l’efficacité des actions de prévention du
suicide, parfois pour évaluer leur dispositif, parfois en faisant des revues de littérature.
Parmi ces auteurs, deux se distinguent par la qualité et la quasi-exhaustivité de leur travail.
C’est tout d’abord Mann, qui publie en 2005 dans le JAMA une première revue sur le
sujet. Son travail porte sur toute la période précédant 2005(8). C’est ensuite Zalsman, qui
publie en 2016 dans le Lancet Psychiatry une revue faisant état des actions de prévention sur
la période de 2005 à 2015(9). Ces travaux reprennent les articles et les classent en fonction
du champ de l’action réalisée.
Dans le domaine de la limitation de l’accès aux moyens létaux, il est assez bien
documenté que le contrôle des armes à feu contribue à la réduction de la mortalité par
suicide(10,11). Cependant, la démonstration du lien de causalité reste difficile, comme
l’illustre une étude Australienne comparant l’évolution des taux de suicide avant et après la
mise en place de la réglementation sur les armes à feu en 1997(12). Dans certains pays en
développement, où les agriculteurs se suicident par intoxication aux pesticides, il a été mis en
évidence que le contrôle de leur accès et leur mise en sécurité dans les exploitations agricoles
a permis une diminution des taux de suicide (13). Il en est de même pour l’utilisation de
pesticides avec un risque de toxicité plus faible chez l’homme. Limiter l’accès aux moyens
létaux c’est aussi avoir une stratégie de repérage et d’aménagement des « hotspots
suicidaires ». Dans ces lieux identifiés par les suicidants comme permettant de se donner la
mort, la mise en place de barrières pour en limiter l’accès à fait la preuve de son efficacité
(14–16). Enfin, limiter l’accès aux moyens létaux concerne aussi le milieu hospitalier et la mise
en œuvre de programmes visant à réduire les pendaisons en intra-hospitalier (17,18). Sur le
plan pharmaceutique, le retrait du marché des médicaments à haut risque de létalité ou la
diminution du nombre de médicaments par boite sont des politiques de prévention efficaces.
C’est le cas du le paracétamol (19–23).
Le deuxième champ de prévention, identifié comme efficace pour lutter contre le
suicide consiste à traiter les comorbidités psychiatriques. En effet, le traitement
6
pharmacologique, lorsqu’il est adapté à la pathologie, est efficace pour diminuer les conduites
suicidaires comme le montre l’utilisation du lithium, qui possède un effet anti-suicide propre
chez les patients souffrant de trouble bipolaire (24). Le traitement de la dépression par des
antidépresseurs dans le respect des règles de sécurité de leur emploi est reconnu comme un
élément de prévention du suicide (25–27). Cette question de l’usage des antidépresseurs a
longtemps suscité la polémique en raison d’une mauvaise connaissance du risque
d’augmentation des idées suicidaires et des comportements suicidaires à l’instauration du
traitement. Grâce à de nombreux travaux, il est maintenant connu que l’on doit favoriser une
introduction progressive du traitement, et évaluer le risque suicidaire du patient de façon
rapprochée. Pour finir sur l’aspect pharmacologique, il existe également des données sur un
effet anti-suicide de la kétamine(28). Cette dernière substance est très étudiée actuellement,
avec l’objectif de mettre au point un traitement de la crise suicidaire. Il est encore trop tôt
pour documenter l’effet bénéfique dans la pratique clinique de ce traitement.
Un troisième domaine d’action concerne les outils de psychothérapie et interventions
au niveau de la population. Ce sont par exemple les thérapies de résolution de problèmes et
la thérapie dialectique et comportementale pour lesquelles il y a des données prometteuses,
mais le nombre d’essais cliniques randomisés ou de méta analyses est encore insuffisant pour
affirmer avec force l’effet préventif(9). Des travaux étudient aussi l’effet de thérapies multi-
systémiques chez les adolescents incluant l’augmentation des compétences parentales,
l’échange entre les pairs, le soutien des activités pro-sociales. Ces mesures ont montré une
diminution des tentatives de suicide, mais le niveau de preuve reste bas.
Plus généralement, il existe tout un champ de la prévention du suicide qui s’attache à
la place du phénomène dans l’espace public. On peut décliner ce domaine en 3 types
d’actions : les campagnes grands publics, le traitement médiatique et la formation de relais
dans les institutions en contact avec du public.
La conduite de campagnes à destination du grand public pour la sensibilisation et
l’information sur la dépression et le suicide, semble favoriser l’augmentation des appels et les
recours aux dispositifs de prévention sans pour autant avoir d’effet sur les conduites
suicidaires en elle-même(8). Elles peuvent cependant avoir un effet bénéfique sur la
stigmatisation.
Le traitement médiatique des cas de suicide est une piste reconnue comme pouvant
avoir un effet sur les conduites suicidaires. L’effet est bilatéral, puisque les spécialistes de la
question s’accordent à décrire un effet favorisant et un effet protecteur des médias(29). En
effet, le passage à l’acte suicidaire d’individus vulnérables exposés à ce traitement médiatique
est appelé l’effet « Werther ». A l’inverse, on peut observer un effet protecteur du traitement
médiatique, dit effet « papageno ». L’étude de ces deux phénomènes est difficile, mais bien
admise par les experts qui préconisent dans ce domaine l’utilisation de grilles de relecture
médiatique afin de faire un traitement en faveur de l’effet papageno (9,30). Un projet national
sur cette question est en plein déploiement en France, il s’appelle le projet Papageno. Il
consiste en l’établissement de partenariat avec les écoles de journalisme pour sensibiliser les
futurs journalistes à l’impact de la couverture médiatique d’un cas de suicide(31).
7
Un autre concept est celui de « gatekeeper » qui concerne la formation de
professionnels décrits comme en contact avec des personnes à risque, ou susceptible de l’être.
Ces professionnels qui peuvent appartenir à des communautés, des établissements scolaires,
ou autres lieux de vie (par exemple : membres du Clergé, animateurs, travailleurs sociaux,
infirmiers libéraux, enseignants, personnels pénitenciers etc.) reçoivent une formation pour
les aider à identifier les sujets à risque suicidaire, et les orienter vers les bonnes structures
pour qu’ils soient pris en charge correctement (8). Il est difficile d’évaluer l’effet propre de ces
programmes sur les conduites suicidaires, et il n’a pas été possible de le faire par manque de
groupe contrôle. Cependant, ces programmes permettent d’améliorer les compétences et les
attitudes envers le suicide chez ces professionnels de premier plan (9). Les « gatekeepers »
sont aussi appelés « facilitateurs » du fait qu’ils contribuent à favoriser l’accès à une prise en
charge.
Enfin, dernier grand champ de la lutte contre le suicide, la prévention tertiaire qui
s’adresse aux auteurs de conduites suicidaires, avec pour objectif principal la diminution de la
mortalité, ou à minima la diminution des récidives. Dans ce domaine il existe 2 grandes
approches : les dispositifs de suivi intensif et les dispositifs de veille (cf. infra). En ce qui
concerne le suivi structuré après une tentative de suicide, les études peuvent diverger selon
les niveaux de développement des structures de soins psychiatriques. Des études ont
démontré un effet bénéfique selon les interventions qui peuvent aller du simple contact
téléphonique au suivi infirmier et médical rapproché (9).
Les dispositifs de veille, l’exemple Vigilans Au sein des moyens de lutte contre le suicide, les dispositifs de veille semblent
apporter un effet positif. L’intérêt grandissant pour ce type d’interventions et les possibilités
qu’elles offrent à l’heure de la médecine connectée justifient de les traiter dans un chapitre
spécifique.
La première expérience rapportée est celle de Jérôme Motto (psychiatre américain),
qui propose d’impliquer personnellement les psychiatres au-delà de la sortie d’hospitalisation
en leur faisant écrire une lettre manuscrite et personnalisée à leurs patients. Son étude
s’adresse aux patients sortant d’un service après une hospitalisation pour dépression ou
conduite suicidaire refusant un suivi ambulatoire. Il randomise alors cette population en deux
groupes, l’un recevant l’intervention (au moins quatre lettres par an pendant 5 ans), l’autre
groupe étant contrôle. Les résultats illustrent un effet de diminution statistiquement
significative des conduites suicidaires au cours des deux premières années suivant la sortie,
ce qui correspond aussi à la principale période à risque en post hospitalier (32). Cette
expérience est considérée comme fondatrice du concept de « recontact ».
Carter a réalisé une expérience presque similaire sur 12 mois chez des patients ayant
fait une intoxication médicamenteuse volontaire (IMV). Il n’a retrouvé qu’un résultat sur la
diminution du nombre cumulé de répétitions entre les 2 groupes (33).
D’autres interventions consistent en la distribution d’une carte ressource pour
demander de l’aide en cas de difficulté après une tentative de suicide. C’est ce que l’on peut
appeler une carte de crise, elle contient le numéro vert à contacter en cas de besoin(34).
8
En France, des études similaires ont permis de construire progressivement ce qui est
appelé à ce jour « Vigilans » et qui combine plusieurs modalités de contact. En effet, grâce à
la mise en place d’un contact téléphonique à un mois et 3 mois des patients ayant réalisé un
geste suicidaire il a été possible d’établir l’algorithme de prise de contact définissant la
meilleure stratégie de recontact(35,36).
C’est ainsi que le dispositif Vigilans s’est articulé autour de ces trois grandes idées que
sont : l’envoi de cartes postales, la carte de crise et le recontact des suicidants. Ce dispositif a
été déployé en premier lieu sur la région Nord Pas de Calais. Il s’agit d’un système de veille
auprès des sujets ayant fait une tentative de suicide.
Lors de leur sortie d’hospitalisation, une carte ressource est remise à chaque patient
afin qu’il puisse s’en saisir et appeler à l’aide si besoin. Il s’agit d’un numéro vert (gratuit), avec
un interlocuteur formé à ce type d’appel (un infirmier ou un psychologue). Lors d’un appel, le
professionnel évalue avec le patient la réponse à apporter à la situation et peut solliciter le
SAMU en cas de risque élevé de passage à l’acte. En dehors des horaires d’ouverture de la
ligne téléphonique, les appelants sont invités à composer le 15.
Tous les patients bénéficient de la carte ressource, mais ceux ayant des antécédents
suicidaires avérés seront systématiquement recontactés par un membre de l’équipe Vigilans
entre le 10e et le 21e jour après leur sortie d’hospitalisation. L’objet de cet appel est d’évaluer
le risque suicidaire, et de s’assurer que le compromis de sortie est respecté (p. ex. rendez-
vous en CMP, suivi psychiatrique etc.). A l’issu de cet appel, selon l’évaluation, un autre appel
peut être reprogrammé, ou la décision d’un envoi de carte postale mensuelle. Les cartes
postales peuvent aussi être envoyées en cas d’impossibilité à joindre par téléphone le patient.
La mise en place d’un tel dispositif de veille est reconnue comme efficace pour
diminuer la récidive suicidaire. Les données intermédiaires de l’évaluation du dispositif sont
encourageantes.
Vigilans prévoit également l’envoi systématique d’un courrier d’information sur le
dispositif auprès des médecins traitants et psychiatres traitants des patients inclus. Un
courrier leur est aussi envoyé à chaque contact avec le patient afin de les tenir informés. Dans
certains cas, les membres de l’équipe Vigilans peuvent téléphoner directement aux
professionnels de terrain en charge du patient pour les alerter. Inversement, une ligne est
spécialement dédiée aux professionnels de santé (psychiatres et généralistes) afin de leurs
permettre un contact direct avec un psychiatre référent pour donner un avis sur les prises en
charge.
Depuis le 9 mai 2016, le dispositif a vu le jour en Languedoc-Roussillon avec une
ouverture progressive des centres en commençant par Nîmes, suivi de Montpellier, Perpignan
et Carcassonne. Vigilans en Languedoc-Roussillon se compose d’une équipe de 3 infirmières,
une psychologue, une secrétaire médicale, un psychiatre hospitalier et une attachée de
recherche clinique. Cette équipe est basée au sein du CHU de Montpellier (site Lapeyronie et
sur le site de la plateforme SAMU à Vailhauquès) elle est en lien direct avec les patients, mais
aussi avec les services hospitaliers, les médecins généralistes et les psychiatres des patients.
Lors des ouvertures de site l’équipe Vigilans se déplace pour présenter le dispositif aux
9
équipes médicales et paramédicales. Le dispositif est le plus souvent bien accepté dans les
services d’urgences psychiatriques. Un an après l’ouverture du premier centre on compte plus
de 500 patients ayant pu bénéficier du dispositif à travers la région. Une évaluation globale du
dispositif est en cours à la fois sur le fonctionnement, l’efficacité et la pénétration du dispositif.
Ainsi, ce dispositif, au-delà d’être directement efficace pour limiter le nombre de réitérations
suicidaires permet d’envisager l’animation d’un réseau spécialisé de prise en charge des
patients suicidants, en s’adressant directement aux médecins généralistes. Inversement, les
médecins doivent aussi pouvoir se saisir de Vigilans comme un outil de veille et de conseil
pour leurs prises en charge.
Vigilans doit permettre cette animation de réseau, et favoriser la prise de conscience
des généralistes sur le rôle important qu’ils peuvent jouer pour améliorer les prises en charges
des patients suicidaires et espérer diminuer ainsi la mortalité par suicide.
Le(s) rôle(s) du Médecin Généraliste Santé mentale et médecine générale
Le recours au médecin généraliste pour des questions de santé mentale est fréquent.
Dans une étude comparative entre des pays européens, on constate que près de 70% des
utilisateurs de soins en santé mentale ont consulté un généraliste pour ces motifs (37). Dans
cette même étude, les patients ayant eu recours au généraliste se retrouvent orientés vers un
spécialiste dans moins de 25% des cas.
Le rôle des généralistes est central dans la prise en charge des dépressions et des
troubles anxieux ; pourtant la détection de ces troubles est encore trop faible en soins de
premiers recours. Les généralistes arrivent à repérer près de la moitié des troubles
psychiatriques (par exemple : ils détectent près de 63,3% des patients souffrant de dépression
majeure)(38).
En ce qui concerne la trajectoire des patients décédés par suicide, on estime qu’ils ont
consulté un généraliste dans près de 75% des cas dans l’année précédant leur geste, contre
seulement un tiers d’entre eux consultant un psychiatre (39). Ce chiffre peut varier entre 20
et 76 % des victimes de suicide qui consultent le généraliste dans le mois précédent leur geste
(40).
Des études de dossiers médicaux rapportent que dans près de 55% des cas le motif
de la dernière consultation du généraliste précédant le suicide était une raison
psychologique (40).
Ces données qui suggèrent que le généraliste est davantage consulté avant un passage
à l’acte suicidaire que le psychiatre (y compris lorsqu’un suivi psychiatrique est déjà en cours),
abondent dans le sens d’un rôle central des médecins généralistes dans la prévention du
suicide, et la détection d’une crise suicidaire.
Ces chiffres doivent être mis en rapport avec le fait que le suicide d’un patient demeure
un phénomène « rare ». En effet, des estimations rapportent qu’il faut en moyenne près de
8 ans de consultations à un généraliste avant d’être confronté au décès par suicide d’un
patient(40). Cette « rareté » est toute relative, à la lecture d’une étude transversale réalisée
10
auprès des généralistes d’un département français qui constatait que 92% d’entre eux avaient
été confrontés à un suicide de patient et 98% à une tentative de suicide(41). On peut ainsi
considérer que la plupart des patients consultent leur généraliste plus souvent que leur
psychiatre, c’est ainsi une cible de choix pour conduire des actions de prévention du suicide.
Enfin, nous avons également vu qu’une action importante de prévention du suicide
était la bonne prise en charge et le traitement de la dépression. Or, des études rapportent une
moins bonne adéquation du traitement de la dépression lorsque celle-ci est prise en charge
par un généraliste que lors d’un recours au spécialiste(42). Dans ce domaine, les études sont
nombreuses pour identifier les difficultés rencontrées par les généralistes dans la prise en
charge de cette pathologie. Le manque de temps, d’expérience, les sous-diagnostics, les
difficultés pour l’utilisation des antidépresseurs, et le recours aux psychothérapies sont mis
en évidence (43). Ce constat, partagé par les généralistes eux-mêmes, illustre leur
préoccupation et leur rôle dans la prise en charge diagnostique et thérapeutique de la
dépression (38).
Etude réalisée dans la communauté en ligne « Carenity » Dans le cadre d’un travail original réalisé avec le Docteur Fanny Molière et en
partenariat avec Michael Chekroun (fondateur de Carenity), nous avons conduit une étude sur
le vécu et les attentes des patients souffrant d’un Trouble de l’humeur (Thu) pour les
interroger directement sur le vécu de leur maladie, leurs liens avec l’entourage, la société et
les associations de patients. Nous avons également évalué, l’accès à l’information (tous
médias confondus) et aux soins somatiques et psychiatriques. Un autre objectif était
d’envisager le profil et les attentes des patients utilisant des outils connectés en santé.
La population a été recrutée sur le site www.carenity.com et correspond à la
communauté de patients en ligne (réseau social de patient) souffrant de dépression (n=3000)
ou d’un trouble bipolaire (n=3000). L’enquête a également été proposée en contrôle aux
communautés de patients souffrant de diabète de type 1 et de polyarthrite rhumatoïde.
Elle consistait en un questionnaire à réponses multiples de 30 items augmenté de 2
questions à réponse libre sur le vécu de la première prise en charge reçue, et sur les
améliorations à suggérer.
Au sein du questionnaire étaient évalués la participation aux associations d’usagers de
la santé, les liens de confiance avec le médecin traitant et le psychiatre traitant et les sources
d’informations médicales utilisées. Quelques questions interrogeaient spécifiquement sur
l’acceptabilité d’un dispositif connecté pour veiller à l’état de santé, la place de la
télémédecine ou d’un second avis médical.
Enfin, des questions sur l’évaluation du risque suicidaire, et sur la relation entre le
généraliste et le psychiatre étaient posées. Il apparait ainsi intéressant de présenter ici une
partie des résultats pour mieux envisager la perception du rôle du généraliste dans la prise en
charge des conduites suicidaires chez les patients ayant un trouble de l’humeur.
Seulement 55% des patients considèrent leur généraliste comme impliqué dans la
gestion de leur trouble de l’humeur. Pourtant, ils sont plus de 90% à être d’accord pour que
11
leur médecin généraliste soit au courant du suivi psychiatrique et les deux tiers (66%) sont
favorables à l’échange d’informations entre psychiatre et généraliste. Ces résultats doivent
encourager les échanges entre professionnels pour augmenter la continuité de la prise en
charge. Cette absence de lien entre généraliste et psychiatre peut expliquer l’attitude d’un
patient sur deux qui déclarait qu’en cas d’absence de son psychiatre il n’allait pas voir son
généraliste.
En ce qui concerne l’expression des idées suicidaires, ou la recherche de celles-ci, 4
patients sur 10 ont pu en parler à leur médecin traitant spontanément. Ce dernier n’interroge
directement sur le sujet que 3 patients souffrant de trouble de l’humeur sur 10, alors même
que cette population est à risque plus important de suicide. Ce chiffre tombe à 1 patient sur
10 pour les groupes contrôles (patients souffrant de polyarthrite rhumatoïde ou de diabète
de type 1). Ce qui signifie qu’il y a un déficit d’exploration des idées suicidaires en soins de
premiers recours.
Ces résultats peuvent suggérer qu’une amélioration de la communication entre
généralistes et psychiatres peut impacter la nature des relations entre un patient et son
médecin traitant sur la question de sa santé mentale. Ils illustrent aussi le faible taux
d’évaluation du risque suicidaire par les généralistes, alors même qu’ils sont les professionnels
les plus consultés par les patients décédés par suicide.
La formation est-elle une solution pour l’amélioration des pratiques ?
La formation une action efficace contre le suicide Littérature
La formation en médecine est un sujet important puisque les connaissances, les
pratiques et l’organisation des soins évoluent. A chaque évolution importante, on souhaite
proposer des formations pour améliorer les prises en charge. Cependant l’évaluation d’une
formation est délicate. On considère 4 niveaux d’évaluation de l’efficacité d’une formation
12
définis par la pyramide de Kirkpatrick (cf. figure 1) (44).
FIGURE 1. PYRAMIDE DE KIRKPATRICK
Malgré les difficultés existantes pour évaluer la qualité de la formation et en particulier
ses bénéfices sur les soins des patients (niveau 4), plusieurs études affirment que former les
professionnels est une action efficace dans la prévention du suicide (8).
Le premier exemple de l’effet positif d’une campagne de formation des généralistes a
été mis en évidence sur l’île de Gotland en Suède(45,46). Dans les années 80, cette île de plus
de 50 000 habitants avait des taux de dépression et de suicide supérieurs à la moyenne
nationale. Un programme de formation à destination des médecins généralistes a été réalisé
et répété à plusieurs reprises afin d’atteindre un maximum de praticiens formés. La formation
était principalement axée sur le dépistage de la dépression, son traitement par
antidépresseurs et sur l’évaluation du risque suicidaire. Cette étude a montré une réduction
du nombre de recours à l’hospitalisation, une diminution du taux de suicide passant de 25/100
000 en 1981 à 7/100 000 en 1985, une diminution globale du nombre de jours d’arrêts de
travail avec une augmentation du nombre de jours d’arrêts de travail pour dépression, et une
meilleure implication des généralistes dans les prises en charge de la dépression et du risque
suicidaire.
Fort de ce résultat, plusieurs tentatives de duplication ont pu donner des résultats
différents, parfois montrant clairement un bénéfice, parfois moins efficaces (47–50). Les
principaux écueils sont l’épuisement dans le temps d’un effet des formations et les taux de
participation. Les formations étudiées varient de quelques heures à 2 jours. Parfois elles
s’inscrivent dans des programmes plus globaux de lutte contre le suicide, rendant difficile
l’imputabilité de la diminution des conduites suicidaires à la seule formation des généralistes.
Néanmoins, les deux grandes revues de littérature sur le sujet reconnaissent l’intérêt de ces
13
formations(8,9), de même que la formation des généralistes est recommandée dans de
nombreux guides de bonnes pratiques(24).
La formation en France En 2000 la rédaction de la conférence de consensus sur la crise suicidaire cherche à
faire l’état des connaissances sur le dépistage et la gestion de la crise suicidaire(51). Dans le
même temps, ce support de connaissance doit être utilisé pour la formation des médecins
mais aussi plus largement des professionnels de santé ou des professionnels en contact avec
des sujets à risque. Cette conférence s’inscrit dans une stratégie nationale de prévention du
suicide, pilotée par la Direction Générale de la Santé.
La formation a aussi été recommandée dans les différents plans nationaux contre le
suicide, dont le dernier en date « plan national d’actions contre le suicide 2011-2014 »
(PNACS). Le Haut Conseil de la Santé Publique (HCSP) dans son rapport d’évaluation de mars
2016 sur le PNACS constate que la formation des généralistes s’est surtout développée grâce
aux programmes suivant le cahier des charges du professeur Terra. Il constate également que
ces formations ont été distribuées de façon hétérogène sur le territoire, et que
l’indemnisation du temps de formation des médecins libéraux est incomplète. Il recommande
au sujet de la formation des médecins généralistes qu’ils soient impliqués dès la conception
de celle-ci, et que la formation soit associée à une réflexion sur l’organisation locale du soin
psychiatrique et de la crise suicidaire. La mise en place d’une ligne téléphonique d’accès direct
au psychiatre et la mise en ligne d’outils d’évaluations du risque suicidaire(52).
En 2013 47,3% des médecins généralistes déclaraient ne pas avoir reçu de formation
en santé mentale au cours des 3 dernières années (38). Ce chiffre ne peut être que plus faible
en ce qui concerne le sous ensemble des formations sur la prévention du suicide et témoigne
d’une mauvaise mise à jour des connaissances dans ce domaine.
Quelle offre de formation sur le suicide en Occitanie ? Les principaux types de formations sont : les formations initiales, les formations
continues, le développement professionnel continu (DPC), les enseignements post
universitaires (EPU), les présentations par l’industrie pharmaceutique, les groupes de
formation médicale continue (FMC), les congrès, etc. Cette liste non exhaustive rend difficile
le référencement de l’offre de formation tout comme l’apport en connaissances et en
compétences qui en découle.
En ce qui concerne la formation initiale, les internes de médecine générale du
Languedoc Roussillon reçoivent tous un cours coanimé par un duo enseignant de médecine
générale et psychiatre. Ce cours existe depuis seulement quelques années, et permet de
donner des connaissances générales en psychiatrie, avec un temps spécialement dédié à
l’évaluation du risque suicidaire.
A titre indicatif, nous avons fait une recherche sur l’offre de formation par DPC dans la
région Occitanie en 2017 (ces données étaient les mêmes en 2016). En allant sur le moteur de
recherche de formation de l’agence nationale du DPC et en sélectionnant les critères
« médecin généraliste », « libéraux », « Occitanie » et « suicide » nous avons obtenu zéro
résultat. Il n’y a aucune formation DPC en Occitanie sur ce thème.
14
Nous avons renouvelé la recherche pour ces mêmes paramètres, mais en remplaçant
« suicide » par « dépression ». Nous trouvons 8 résultats dont les titres des formations sont
les suivants :
- HYPNOSE MEDICALE CLINIQUE ET THERAPEUTIQUE - PERFECTIONNEMENT :
Hypnoanalgésie et utilisation de techniques non pharmacologiques dans le traitement de la douleur - LA PLACE DE LA THERAPIE COGNITIVE DANS LA PRISE EN CHARGE NON
MEDICAMENTEUSE DU PATIENT PRESENTANT UN TROUBLE DE LA SANTE MENTALE - Situations de vulnérabilités en périnatalité - Dépistage des troubles mentaux de l'enfant et de l'adolescent par le médecin généraliste - Vous avez dit dépressions ? - Approche cognitivo- comportementale de la dépression en médecine générale - Souffrance au travail : le quotidien du soignant - Suivi de grossesse non compliquée et acupuncture
Sans préjuger de la qualité de ces formations, certains titres ne peuvent clairement pas
répondre à un objectif de formation sur la dépression et encore moins sur la prévention du
suicide. Enfin, ce nombre limité de formations, ne peut satisfaire un besoin réel, souligné par
le Haut Conseil de la Santé Publique.
Enfin, d’autres types de formations dans les groupes de FMC ou par l’industrie
pharmaceutique peuvent traiter de la dépression et du suicide, il est cependant difficile
d’accéder à leur nombre et d’évaluer leur qualité.
Objectifs de ce travail de thèse Dans cette introduction, nous venons de voir que le suicide est un problème de santé
publique important qui peut être prévenu par la mise en place de différentes mesures parmi
lesquelles la formation des médecins généralistes.
Les discours d’incitation à la formation sur le suicide, produits le plus souvent par des
spécialistes, ne semblent pas être suivis par les médecins généralistes eux même. En effet,
lorsqu’on regarde l’offre de formation sur le suicide, et le nombre de médecins qui y
participent, on peut en déduire le petit nombre de généralistes correctement formés. Or nous
l’avons vu, ces derniers jouent un rôle central dans la prévention du suicide, du dépistage des
idées suicidaires à la prise en charge des conduites suicidaires.
L’objectif de notre travail sera d’observer les connaissances, les attitudes et les
pratiques des généralistes par rapport au suicide et aux conduites suicidaires de leurs patients.
Dans un premier temps, nous évaluerons les connaissances sur le suicide et les attentes
en termes de formations des médecins généralistes et internes en médecine générale. Ce
travail sera réalisé par l’intermédiaire de l’enquête en ligne : Questionnaire d’Evaluation des
Connaissances sur le Suicide chez les Médecins Généralistes du Languedoc-Roussillon (QECS-
MG-LR).
Dans un second temps, un travail de compréhension des pratiques sera réalisé au
moyen d’une enquête qualitative par entretiens individuels, afin de mieux saisir le vécu des
généralistes face aux conduites suicidaires de leurs patients. Ce travail devrait rechercher
15
également les moyens pour faciliter le travail des généralistes dans la prévention du suicide
et la prise en charge des conduites suicidaires.
16
Partie 1 : Enquête en ligne « QECS-MG-LR » : Les connaissances, les attitudes envers le suicide et l’évaluation du risque par les médecins généralistes Les connaissances sont un ensemble d’affirmations pour lesquelles il est admis par une
majorité détenant le savoir, qu’elles sont vraies. Dans l’histoire, la connaissance a longtemps
été détenue par les religieux, ou les représentants du pouvoir. Plus récemment jusqu’à nos
jours, la majorité détenant la connaissance est représentée par la communauté scientifique,
même si aujourd’hui, on peut observer une résurgence des « parasciences », ou de
mouvements de contestation des connaissances scientifiques (p. ex. climatosceptiques). En
sciences comme en médecine, les connaissances évoluent : ce qui était vrai hier, ne l’est pas
forcément aujourd’hui et nul ne sait s’il en sera de même demain. Ce dynamisme des
connaissances justifie à lui seul l’intérêt que doit porter toute personne à la mise à jour de son
savoir. Ceci est particulièrement vrai en ce qui concerne les connaissances en santé, qui sont
régulièrement discutées et peuvent évoluer dans le temps. Ce constat plutôt simple soulève
la question de la mise à jour des connaissances par les professionnels. L’actualisation de ses
connaissances n’est pas toujours une pratique évidente. En effet, il n’est pas toujours facile
de distinguer ce que l’on sait de ce que l’on croit savoir ou de ce qu’il nous reste encore à
apprendre.
En suicidologie, beaucoup de progrès ont été réalisés au cours de ces dernières années
permettant de mieux comprendre les comportements suicidaires et d’améliorer la prise en
charge de ceux-ci. Le modèle encore valable dans ce domaine est le modèle stress-
vulnérabilité qui décrit les interactions « gènes-environnement » conduisant au passage à
l’acte. La crise suicidaire ne peut s’expliquer par une simple et unique cause : il s’agit d’un
processus dynamique conduisant l’individu à un passage à l’acte lorsque toutes les résistances
qu’il rencontrait jusqu’alors se sont effondrées.
Ces progrès dans la compréhension des mécanismes biopsychosociaux qui sous-
tendent les comportements suicidaires, sont encore insuffisants. Ils apportent cependant des
éléments utiles à l’élaboration de prise en charge et à la réalisation de guidelines. Ils
permettent aussi de faire évoluer la pensée de chacun puisque les connaissances en
suicidologie permettent d’améliorer la prédiction des passages à l’acte, et la prise en charge
de la crise suicidaire. Ainsi les connaissances dans ce domaine contribuent à lutter contre
l’idée que le suicide est un phénomène imprévisible et inévitable. A l’inverse un défaut de
connaissance sur la question du suicide peut favoriser le développement d’une pensée
« fataliste » autour de ce phénomène. Cette participation des connaissances à la construction
des mythes qui entourent le suicide illustre le lien qui existe entre connaissances et attitudes.
Les attitudes représentent l’ensemble des opinions manifestées par un individu, un groupe
social ou une institution, se traduisant par un comportement habituel ou circonstancié.
L’étude des attitudes envers le suicide est importante, elle permet de mieux cerner les
jugements, les croyances et les représentations d’un groupe d’individus sur ce sujet. Par
exemple, dans certaines populations le suicide d’un individu sera perçu comme un acte
courageux, dans d’autres cela sera plutôt une action lâche. Parfois le suicide est un
17
phénomène tabou, parfois les conduites suicidaires sont banalisées. Il existe un grand nombre
de représentations sur la question du suicide dont la liste exhaustive serait difficile. Ce qui est
certain, c’est qu’en observant les attitudes d’une population à l’égard du suicide on peut
réfléchir à des actions de préventions et mieux cibler les messages à faire passer.
Une enquête auprès des décideurs politiques de 5 pays européens a évalué au moyen
d’un questionnaire à réponses ouvertes leurs attitudes envers le suicide. Elle a permis de
repérer les besoins, en particulier la nécessité de leur délivrer une plus grande information sur
ce sujet de santé publique (53). Des études ont également été conduites auprès d’étudiants
pour évaluer leur représentation du suicide, leur perception du phénomène. On peut
apprendre que les étudiants acceptent plus le suicide que les étudiantes, alors que ces
dernières se déclaraient plus prêtes à aider un pair avec conduites suicidaires (54).
Toutes ces études apportent une contribution dans la compréhension du phénomène,
et son acceptation par la population. Elles favorisent les propositions d’actions de prévention,
par exemple pour augmenter l’appel à l’aide ou faciliter les discussions entre pairs sur le sujet.
Les professionnels de santé en tant que groupe social génèrent et véhiculent aussi des
attitudes, le plus souvent négatives à l’égard du suicide. Ces attitudes sont un sujet d’intérêt
pour l’amélioration des pratiques, bien qu’il soit difficile d’apporter la preuve de leur impact
sur la qualité des soins donnés aux patients.
Une revue de la littérature sur les attitudes et connaissances des équipes soignantes
et médicales envers les patients ayant des conduites suicidaires distingue six sous-ensembles
étudiés : les attitudes générales, la relation entre les caractéristiques des soignants et leurs
attitudes, l’influence des caractéristiques des sujets avec conduites suicidaires sur les
attitudes des soignants, la compréhension des raisons du geste, les effets de l’entrainement
des équipes soignantes sur les attitudes et les connaissances et enfin les pistes pour
l’amélioration des attitudes des soignants(55).
De façon générale dans la majorité des études, les attitudes des équipes sont
négatives, avec un sentiment d’impuissance, d’irritabilité et parfois même de colère associés
au sentiment de ne pas être compétent(56,57). Les attitudes les plus hostiles sont aussi
souvent associées à la notion de « légitimité de la demande de soin ». Ainsi, une étude révèle
que les équipes font la distinction entre des besoins qu’elles considèrent « légitimes » en soins
(asthme, dyspnée) pour lesquels elles éprouvent des attitudes positives, et des besoins dits
« illégitimes » (conduites suicidaires) source d’attitudes négatives (55). De plus, les équipes
soignantes travaillant en hôpital général ont plus souvent des attitudes négatives que celle
travaillant en hôpital psychiatrique (58).
Les attitudes ne varient pas seulement en fonction du type de professionnel, mais aussi
en fonction de l’intentionnalité du geste. En effet, des études suggèrent qu’il y a plus de
sympathie à l’égard des tentatives de suicides à haut risque de létalité. De même les soignants
expriment plus d’attitudes positives envers les sujets clairement suicidaires ou désespérés et
des attitudes plus négatives pour les patients réitérant leurs comportements (55).
18
En outre, une étude norvégienne auprès d’internistes, psychiatres et généralistes s’est
intéressée aux attitudes et compétences perçues pour la prise en charge de patients avec
conduites suicidaires. Les compétences perçues et l’engagement dans la prise en charge
étaient évalués par échelle de Likert de 1 à 5. Les compétences perçues pour la prise en charge
des conduites suicidaires par les généralistes était plus faibles en comparaison avec les
psychiatres (3,2 IC95% [3,1-3,4] vs 4,1 IC95% [4,0-4,2] p<0,001), de même pour l’engagement
dans la prise en charge (3,7 IC95% [3,5-3,8] vs 4,2 IC95%[4,1-4,3] )(59).
Ainsi, nous venons de voir comment le défaut de connaissance peut être source
d’attitudes négatives à l’égard des patients présentant des conduites suicidaires. Qu’en est-il
de l’impact sur la pratique clinique ? Qu’en pensent les généralistes et comment se
comportent ils par rapport à l’évaluation du risque suicidaire au cabinet ?
En France, de nombreuses études de méthodologies différentes ont tenté de répondre
à ces questions. En 2002, un questionnaire par courrier a été envoyé à tous les médecins
généralistes du département de Mayenne (41). Ils étaient près de 80% à considérer comme
difficile le repérage et l’évaluation du risque suicidaire. Si 87% des généralistes
reconnaissaient les antécédents personnels de tentative de suicide comme utile à l’évaluation
du risque, ils n’étaient plus qu’un sur deux à considérer qu’un antécédent familial ou des
antécédents psychiatriques personnels pouvaient aider au repérage du risque.
La question du repérage du risque suicidaire en médecine générale s’est également
posée dans un travail de thèse réalisé en 2013. Cette étude réalisée par l’envoi d’un
questionnaire à tous les généralistes d’un secteur psychiatrique du Nord Pas de Calais (N=76)
a rencontré un taux de réponse de 60%. Les principaux résultats montrent que 67% des
médecins généralistes se déclarent être en difficultés avec un patient suicidaire et qu’ils
attribuent cette difficulté au manque de temps pour les deux tiers, et au manque d’expérience
pour 20% d’entre eux. En ce qui concerne la méthode d’évaluation, la totalité des répondants
déclaraient ne pas utiliser d’échelle. Cependant l’étude concluait que sans la nommer, les
médecins appliquaient la méthode « Risque-Urgence-Dangerosité » lors de leur évaluation
(60).
A la lumière de ces travaux, il apparait que pour comprendre la prise en charge des
patients suicidaires par les généralistes, une triple interrogation se pose entre les
connaissances, les attitudes et les pratiques. De nombreux facteurs interviennent dans ces
processus comme le poids de la culture, l’organisation des soins primaires ou l’incidence des
conduites suicidaires variant selon les régions. Ainsi, dans la perspective d’améliorer les
pratiques, et de proposer une formation adaptée aux médecins généralistes de l’ancienne
région Languedoc-Roussillon, nous avons souhaité réaliser une étude chez ces médecins pour
répondre au mieux à leurs attentes et dresser un état des lieux de leurs connaissances sur le
suicide. Il s’agit de l’enquête en ligne « Questionnaire d’Evaluation des Connaissances sur le
Suicide chez les Médecins Généralistes du Languedoc-Roussillon » (QECS-MG-LR).
19
Description de l’étude (matériel et méthode) Population étudiée
L’enquête QECS-MG-LR a été conduite auprès des médecins généralistes et des
internes en médecine générale de la région Languedoc-Roussillon.
L’enquête était un questionnaire en ligne, hébergé sur le site sondageonline.com. Le
lien vers le questionnaire a été communiqué par courrier électronique en utilisant pour les
médecins généralistes la liste de diffusion de l’Union Régionale des Professionnels de Santé
Languedoc Roussillon (URPS-LR) grâce à l’autorisation du président de l’URPS Occitanie : le
docteur Maurice Bensoussan. Ce listing contient près de 1200 adresses emails, il n’est
cependant pas exhaustif de l’ensemble des généralistes du territoire. Le choix de cette base
s’est fait sur le conseil du département de médecine générale de la faculté de médecine de
Montpellier (DMG). Au total, nous avons réalisés 3 envois de courriels via cette liste de
diffusion.
Pour les internes en médecine générale, un mail a été envoyé en utilisant la liste de
diffusion du Syndicat des Internes du Languedoc Roussillon (SILR). Ce listing est exhaustif
puisque la totalité des internes adhèrent au SILR et possèdent une adresse électronique. Au
total deux envois ont été réalisés. Une annonce était également mise en ligne sur le groupe
Facebook dédié aux travaux de thèses des internes du SILR.
L’enquête QECS-MG-LR a été conduite sur la période de mai à décembre 2016.
L’enquête en ligne Questionnaire d’Evaluation des Connaissance sur le Suicide
Le Questionnaire d’Evaluation des Connaissances sur le Suicide (QECS), est un
questionnaire en cours de validation, développé à Lille pour évaluer les connaissances sur le
suicide. La première utilisation qui en a été faite était à destination d’une population
d’étudiants en journalisme par le docteur Charles-Edouard Notredame.
Il a été créé en raison d’une absence d’outil d’évaluation des connaissances sur le
suicide en langue française. Par ailleurs, cet outil, contient également des items d’évaluation
de la connaissance de l’effet Werther et de l’effet Papageno.
Les éléments suivants concernant la description, la cotation et le traitement du QECS
sont issus de notre collaboration avec le docteur Notredame créateur du QECS.
Description du QECS
Le QECS se décompose en 3 parties. La première est constituée de 6 questions
d’épidémiologie sur le suicide. La seconde partie concerne les mythes liés au suicide. Elle
permet d’évaluer 4 grands mythes, définis comme des idées fausses fréquemment répandues
sur le suicide.
Les 4 mythes :
- Mythe 1 : « Avoir des idées suicidaires ou faire une tentative de suicide c’est
anodin » 7 questions
20
- Mythe 2 : « Il existe une unique cause et directement identifiable au suicide »
6 questions
- Mythe 3 : « on ne peut pas prévoir le suicide » 6 questions
- Mythe 4 : « On ne peut rien faire pour éviter le suicide » 6 questions
Enfin, la troisième partie évalue la connaissance des effets Werther (incitatif) et
Papageno (préventif) au moyen de 4 questions.
Il existe d’autres échelles pour évaluer les connaissances sur le suicide, mais elles ne
sont pas, à notre connaissance, disponibles en langue française. Nous avons ainsi choisi le
QECS parce qu’il est une échelle française, dont la validité fait appel à la fois à des données de
la littérature et à un panel d’experts travaillant sur la question du suicide. En termes de
faisabilité ce questionnaire nous semblait adapté à une passation en ligne, pour une durée
estimée à 5-6 minutes.
Nous n’avons pas souhaité ajouter à ce questionnaire d’autres échelles qui auraient
augmenté la durée de passation et diminué le taux de réponses.
La cotation du QECS
Le QECS contient au total 35 items chacun permettant d’obtenir au maximum 1 point.
Le résultat final maximal est de 35 points.
La première partie « QECS-E » correspond à 6 questions d’épidémiologie sur le suicide,
dont les réponses sont cotées de façon binaire : 1 point quand la bonne réponse est choisie et
zéro lorsqu’une autre réponse que la bonne réponse est choisie. Le total des questions de
cette partie est une note sur 6 points. Les réponses sont issues du 2e rapport de l’observatoire
national du suicide (7).
La seconde partie « QECS-M » correspond à 25 déclarations dont les réponses
attendues sont données au moyen d’une échelle visuelle analogique allant de 0 à 100 en
fonction du degré d’accord avec l’assertion entre « pas du tout d’accord » et « tout à fait
d’accord ». Par exemple pour chaque proposition, le répondant sélectionnera sa position sur
l’EVA, cela donnera une valeur entre 0 et 100. Pour attribuer un nombre de point entre 0 et 1
par item une méthode particulière de calcul va être appliquée afin de donner un nombre de
points en fonction de la distribution moyenne du panel d’experts.
La méthode utilisée s’apparente à la technique des tests à concordance de script pour
lesquels la note obtenue est fonction de la proximité à la réponse du panel d’expert. Ainsi,
nous avons considéré qu’il serait attribué à un répondant une fraction de point correspondant
à la distance de laquelle il s’éloigne de la moyenne (µ) des experts. Le choix est le suivant :
- 1 point si la réponse est incluse dans l’intervalle [µ+0,5 DS ; µ-0,5 DS]
- 0,8 point si la réponse est incluse dans l’intervalle [µ-1 DS ; µ-0,5 DS[ ou ]µ+0,5
DS ; µ+1DS]
- 0,2 point si la réponse est incluse dans l’intervalle [µ-1,5 DS ; µ-1 DS[ ou ]µ+1
DS ; µ+1,5DS]
- 0 point si la réponse se situe en dehors de l’intervalle ]µ-1,5 DS ; µ+1,5DS[
21
C’est un système de notation qui permet de valoriser les réponses des enquêtés en
leur accordant les réponses les plus proches des experts. Elle tient compte aussi de la
variabilité des experts dans leur réponse.
La troisième partie « QECS-WP » qui évalue les connaissances relatives à l’effet
Werther et l’effet Papageno, est composée de 4 items chacun noté sur 1 point. Les réponses
sont aussi données sous la forme d’EVA en fonction du degré d’accord avec l’assertion. La
validité des réponses à ces 4 items étant particulièrement bien documentée dans la
littérature, l’attribution du nombre de points se fait sans le recours au panel d’expert. Ainsi,
pour une assertion avec laquelle il faut être d’accord l’attribution du nombre de point se fait
de la façon suivante : [𝑣𝑎𝑙𝑒𝑢𝑟 𝐸𝑉𝐴]
100. Lorsque l’assertion est fausse, la fraction de point obtenue
est 100−[𝑣𝑎𝑙𝑒𝑢𝑟 𝐸𝑉𝐴]
100 .
Questions concernant la pratique des médecins
Nous avons souhaité évaluer des éléments autour des pratiques des généralistes par
l’ajout de 8 questions supplémentaires.
Pour nous il s’agissait de connaitre les outils utilisés pour l’évaluation du risque
suicidaire et de la dépression, et interroger les médecins sur leur intérêt de disposer d’une
ligne téléphonique réservée aux professionnels. Enfin, nous demandons si les répondants
souhaitent bénéficier d’une formation, et leurs proposons de suggérer le contenu de cette
dernière au moyen d’une case de libre expression.
Analyses statistiques L’étude statistique consistera en des comparaisons de groupes. Ce travail a été réalisé
avec l’aide précieuse des statisticiens de l’Unité INSERM U1061 : Isabelle Jaussent et Séverine
Béziat. Dans un premier temps l’échantillon sera répartit en trois groupes : les médecins
généralistes de la région Languedoc-Roussillon (MG), les internes en médecines générales
(INT) et les experts (EXP).
En premier lieu la comparaison du groupes MG sera faite à celle de la population des
médecins généralistes de la région à partir des données du conseil de l’ordre des médecins
sur l’âge et le sexe par le test du Chi-2(61,62).
Les comparaisons pour le QECS seront faites entre le groupe MG et le groupe INT pour
chaque composite du questionnaire. Ainsi, une comparaison sera effectuée sur le score
obtenu au QECS-E, sur le score obtenu au QECS-WP, sur le score obtenu pour chaque mythe
et sur le score total aux 4 mythes (QECS-M). Enfin la comparaison entre les groupes sera faite
sur le score total des points obtenus au QECS. Pour toutes ces comparaisons le test utilisé est
le test non paramétrique de Wilcoxon Mann Whitney pour les variables continues.
Dans un second temps des comparaisons entre les 3 groupes (MG, INT et EXP) seront
réalisées à partir du test non paramétrique de Kruskal-Wallis. Pour les comparaisons des
groupes deux à deux, des analyses post hoc seront réalisées en appliquant la correction de
Bonferroni. Ces comparaisons n’ont été faites que pour les sections QECS-E et QECS-WP.
22
Notons que pour ce type de comparaisons toute la partie QECS-M ne sera pas utilisée puisque
la cotation des points pour ces items est déjà fonction des réponses d’experts.
Les comparaisons en ce qui concerne la partie des questions sur les pratiques des
médecins seront faites avec l’utilisation du test du Chi² pour les variables catégorielles (ou test
exact de Fisher si les effectifs théoriques sont < à 5). Pour cette partie, nous avons constitué 2
sous-groupes à partir du groupe MG en fonction de l’âge médian. Ainsi nous auront un groupe
de MG « plus jeunes » correspondant aux moins de 55 ans, et un groupe « plus âgés »
correspondant au plus de 55 ans. Le troisième groupe pour ces comparaisons demeurera le
groupe INT.
Nous pourrons faire pour cette partie des analyses post hoc de groupes deux à deux
en utilisant la correction de Bonferroni.
Dans le cadre du recueil des données il n’était pas nécessaire de répondre à toutes les
questions pour valider l’envoi du formulaire. Ainsi, un nombre de donnée manquante par item
est constaté de façon variable selon les questions. Les raisons de ces non réponses sont
multiples, il peut s’agir d’un abandon en cours de remplissage, d’une méconnaissance de la
réponse, de répondants non concernés par la question. Ainsi pour l’ensemble du traitement
statistique nous avons choisi d’ignorer les non répondants faute de pouvoir les traiter comme
une cause unique.
Résultats Caractéristiques de la population étudiée : L’étude a permis de recueillir un total de 357 réponses en ligne réparties en 145 dans
le groupe MG et 212 dans le groupe INT.
La liste de diffusion de l’Union Régionale des Professionnels de Santé Languedoc-
Roussillon contenait 1200 inscrits. On peut en déduire un taux de réponse de 12,1% dans le
groupe MG. Notons que l’on observe un taux nettement supérieur chez les internes, avec un
taux de réponses estimée à 39,4%.
Sur les 357 répondants qui constituent notre échantillon, nous notons qu’environ une
cinquantaine de personnes n’ont plus répondu à partir du QECS-M et QECS-WP. Ces personnes
n’ont pas non plus répondu à la dernière partie complémentaire. On peut penser cela en
raison d’une méconnaissance du sujet et/ou d’un manque de temps les obligeant à envoyer
le formulaire sans finir de le remplir.
Dans le groupe MG l’âge moyen était de 53,9 ans (écart type : 9,05) et il y avait une
majorité d’hommes (54% d’hommes et 46% de femmes) alors que dans le groupe des internes
il y avait une majorité de femmes (74% de femmes vs 26% d’hommes) et l’âge moyen était de
26,6 ans (écart type : 2,10).
En ce qui concerne l’origine des répondants chez les MG, la majorité provient de
l’Hérault (37%) et du Gard (24%) (cf. Figure 2). Dans le groupe INT le taux d’interne exerçant
dans l’Hérault est encore plus important (cf. Figure 3).
23
FIGURE 2 REPARTITION PAR DEPARTEMENT DU GROUPE MG
Dans le groupe des MG, on constate une nette majorité de médecins exerçant en
association (52%), suivi par des généralistes exerçant seuls en cabinet (36%). Soulignons que
seuls 7% sont installés dans une maison médicale disposant d’un psychiatre ou d’un
psychologue et que deux médecins seulement déclarent une orientation addictologie dans
leur pratique (1%). Enfin, notons que le groupe MG est composé par un tiers de maitres de
stages accueillant des internes.
A partir des données de « l’atlas de la démographie médicale 2016 » du Conseil
National de l’Ordre des Médecins (61), nous avons pu faire la comparaison sur l’âge et le sexe
entre notre échantillon et la population des médecins généralistes de la région Occitanie. Il
n’y a pas de différence significative sur l’âge et le sexe entre les populations (cf. Tableau 1).
Tableau 1. Caractéristiques démographiques MG par rapport à la population réelle
Paramètres Groupe MG N (%) Population réelle MG N (%) Chi² (p)
Age :
• Moins de 40 ans
• De 40 ans à 60 ans
• Supérieurs à 60 ans
12 (8,28)
93 (64,14) 40 (27,59)
1246 (15,20) 4690 (57,20) 2263 (27,60)
0,06
Sexe :
• Femmes
• Hommes
67 (46,21) 78 (53,79)
3780 (46,10) 4419 (53,90)
0,98
QECS Le QECS est composé de trois parties. La première partie appelée QECS-E comprend 6
items portant sur des questions d’épidémiologie du suicide.
FIGURE 3 REPARTITION PAR DEPARTEMENT DU GROUPE INT
24
Tableau 2. Résultats par item à la partie QECS-E
Questions Total (MG+INT) N (%) MG N (%) INT N (%)
1. Mortalité annuelle par suicide en France
Bonne réponse
110 (31)
44 (30) 66 (31)
2. Proportion de femmes victimes du suicide
Bonne réponse
169 (47) 66 (46) 103 (49)
3. Rang cause de mortalité 15-25 ans
Bonne réponse 214 (60)
87 (60)
127 (60)
4. Fréquence des tentatives de suicide par rapport aux suicides
Bonne réponse
44 (12)
20 (14)
24 (11)
5. Proportion de femmes parmi les victimes de tentatives de suicides
Bonne réponse
218 (61)
85 (59)
133 (63)
6. Tranche d’âge avec le plus grand nombre absolu de suicides en France
Bonne réponse
55 (15)
24 (17) 31 (15)
En ce qui concerne la mortalité annuelle par suicide, près des deux tiers ne la
connaissent pas. Ils répondent près de 6 fois sur 10 en sous estimant le phénomène.
Dans l’ensemble, le score global à cet ensemble de questions est faible avec une
moyenne dans le groupe MG de 2,4 points sur 6 et pour le groupe INT de 2,46 points sur 6
points. Il n’y a pas de différence statistiquement significative entre les deux groupes (cf.
tableau 3.).
Tableau 3. QECS_E total
Paramètres Groupes Valeur p
MG INT
0,511
Effectifs N 134 195
Moyenne (écart type)
2.40 (1.25)
2.46 (1.07)
MEDIANE [Min ; Max]
2.00 [0.00 ; 6.00]
2.00 [0.00 ; 5.00]
La deuxième partie du questionnaire évalue la connaissance des effets Werther et
Papageno, elle est appelée QECS-WP. Les questions qui y font références sont les questions 2
(Il est anodin de communiquer sur le suicide), 3 (Le suicide peut parfois être lié à un phénomène
d’imitation) 6 (La couverture médiatique d’un suicide peut diminuer le risque de passage à
25
l’acte suicidaire chez des personnes vulnérables) et 22 (La couverture médiatique d’un suicide
peut augmenter le risque de passage à l’acte suicidaire chez des personnes vulnérables).
QECS-WP est noté sur 4 points au total. On observe une moyenne autour de 2 points
sur 4 pour chaque groupe (MG 2,19 contre INT 1,96). On note que le groupe MG est
légèrement meilleur que le groupe INT avec une différence significative sur le plan statistique
entre les 2 groupes (p<0,0001).
Tableau 4. QECS_WP total
Paramètres Groupes Valeur P
MG INT
<0,0001
Effectifs N 131 175
Moyenne (écart type)
2.20 (0.52)
1.96 (0.53)
MEDIANE [Min ; Max]
2.21 [0.58 ; 3.93]
2.05 [0.47 ; 3.20]
La dernière partie du QECS évalue l’adhésion à quatre mythes (QECS-M). Elle est la
seule directement ajustée sur les réponses d’experts. En effet, nous avons vu plus haut que la
fraction de point attribuée par item dépend de la distribution des réponses d’experts. Nous
rappelons ici que ce choix permet de mieux prendre en compte l’avis d’un panel d’expert et
de favoriser l’obtention d’un meilleur score.
Le premier mythe évalué concerne l’idée qu’avoir des idées suicidaires ou faire une tentative
de suicide est anodin. Il est évalué par les 7 questions suivantes :
8 Une personne qui a déjà fait une tentative de suicide dans le passé est plus à risque de se
suicider que si elle n’en avait jamais fait,
12 Les personnes qui parlent de suicide ne passent que rarement à l’acte,
14 Quand une personne utilise un moyen peu dangereux pour essayer de se suicider, c’est
qu’elle n’est pas vraiment déterminée,
17 Avoir vécu un traumatisme expose nécessairement à des idées suicidaires,
18 Les personnes qui essaient de se suicider et échouent ne songent pas sérieusement à
mettre un terme à leur vie. Ils cherchent souvent simplement à attirer la compassion,
25 Il est banal d’avoir des idées suicidaires : la plupart des personnes qui vivent ou ont vécu
des événements difficiles (violence, chômage, …) en ont,
26 Les personnes qui menacent de se suicider ne mettront pas leur menace à exécution.
Seules les personnes qui restent silencieuses sur leur intention le feront.
Avec un score moyen de 4,69 sur 7 points dans le groupe INT et un score moyen de
4,18 dans le groupe MG on constate une petite supériorité des internes sur ce sujet.
26
Tableau 5. QECS_M1
Paramètres Groupes Valeur P
MG INT
0,002
Effectifs N 127 177
Moyenne (écart type) 4.18 (1.50) 4.69 (1.21)
MEDIANE [Min ; Max]
4.20 [0.20 ; 7.00]
4.80 [0.80 ; 7.00]
Le deuxième mythe est l’idée qu’il existe une unique cause directement identifiable au
suicide. Cette idée tend à simplifier le processus conduisant au suicide en supposant qu’un
évènement unique est à lui seul la cause d’un suicide. Pour l’évaluer les 6 assertions suivantes
sont utilisées :
1 Certains comportements peuvent laisser présager un risque suicidaire, même si la personne
n’en parle pas,
5 Quand une personne va mieux après une tentative de suicide, cela signifie que le risque est
passé,
7 Les personnes qui se suicident ou font une tentative de suicide ne cherchent que rarement
une aide médicale avant de passer à l’acte,
16 La plupart des personnes qui essaient de se suicider parlent au préalable de leurs intentions
ou laissent des indices,
19 Une personne joviale est à l’abri du suicide,
23 Le suicide ne survient que rarement sans signe d’alerte.
Sur ce thème le groupe MG a un score moyen à 3,53 sur 6 points contre 4,08 pour le
groupe INT. Là encore on note une différence statistiquement significative donnant le groupe
INT comme plus en accord avec l’idée que plusieurs facteurs sous-tendent les conduites
suicidaires (p<0,0001).
Tableau 6. QECS_M2
Paramètres Groupes Valeur p
MG INT
<0,0001
Effectifs N 129 177
Moyenne (écart type) 3.53 (1.02) 4.08 (0.92)
MEDIANE [Min ; Max]
3.60 [1.40 ; 5.80]
4.00 [1.80 ; 6.00]
Le troisième mythe concerne l’idée qu’on ne peut pas prévoir le suicide. L’adhésion à
cette idée est évaluée par les 6 assertions suivantes :
27
10 Toute personne qui se suicide aurait été diagnostiquée comme dépressive si elle avait été
vue par un médecin avant son geste,
13 Le suicide est le plus souvent associé à une maladie psychiatrique passée ou actuelle,
15 Il existe une association fréquente entre la dépendance à l’alcool et le suicide,
24 Une personne qui se suicide souffre nécessairement d’une maladie mentale,
27 Il existe une prédisposition héréditaire au suicide
29 Les idées suicidaires constituent, en elles même, un trouble psychique.
On peut considérer que les deux groupes partagent l’idée que le suicide peut être
prévenu. Ils affichent des scores moyens à 3,96 sur 6 points pour le groupe MG et 4,21 pour
le groupe INT. Il y a cependant une différence statistiquement significative entre les groupes
donnant les internes comme étant plus convaincus que l’on peut prévoir le suicide (p=0,040).
Tableau 7. QECS_M3
Paramètres Groupes Valeur p
MG INT
0,040
Effectifs N 127 177
Moyenne (écart type) 3.96 (0.98) 4.21 (0.88)
MEDIANE [Min ; Max]
4.00 [1.20 ; 5.60]
4.40 [1.80 ; 5.80]
Le quatrième mythe qu’évalue le questionnaire est l’idée qu’on ne peut rien faire pour
éviter le suicide. C’est une idée fondamentale contre laquelle il faut lutter pour se convaincre
qu’il existe des solutions et que nous pouvons agir. Elle est évaluée par les 6 assertions
suivantes :
4 Quand une personne a pris la décision de se suicider on ne peut rien faire pour l’en
empêcher,
9 Dans la grande majorité des cas, le suicide résulte d’un choix délibéré,
11 Ce qui pousse une personne à se suicider n’est pas nécessairement l’envie de mourir,
20 Si vous demandez à une personne « Pensez-vous à vous suicider ? », cela incitera
probablement cette personne à le faire,
21 On peut aider une personne qui pense au suicide même si on n’est pas expert et
28 Une personne suicidaire aura toute sa vie des idées suicidaires.
L’idée qu’on ne peut rien faire pour éviter le suicide est plus fréquemment admise dans
le groupe MG que dans le groupe INT. Les scores moyens pour cette section sont 3,67 points
sur 6 pour le groupe MG contre 4,29 points pour le groupe INT (p<0,0001).
28
Tableau 8. QECS_M4
Paramètres Groupes Valeur p MG INT
<0,0001
Effectifs N 129 175
Moyenne (écart type) 3.67 (1.34) 4.29 (0.97)
MEDIANE [Min ; Max]
3.80 [0.40 ; 6.00]
4.40 [1.40 ; 6.00]
Le score total pour la partie QECS-M diffère de façon statistiquement significative entre
les internes et les médecins généralistes avec un score moyen respectivement de 17,29 et
15,37 sur 25 points. En conclusion on trouve une moins bonne adhésion à ces 4 mythes chez
les internes en médecine générale.
Tableau 9. QECS_M
Paramètres Groupes Valeur p MG INT
<0,0001
Effectifs N 122 175
Moyenne (écart type) 15.37 (3.21) 17.29 (2.24)
MEDIANE [Min ; Max]
15.20 [8.00 ; 21.80]
17.40 [10.80 ; 23.60]
Le score total pour le QECS est également différent dans les 2 groupes. Les internes
possèdent un score moyen de 21,75 contre 20,02 sur 35 points chez les médecins généralistes
(p<0,0001). Ce score peut sembler insuffisant en regard de l’enjeux d’une meilleure prise en
charge des conduites suicidaires par les médecins de premiers recours que sont les
généralistes.
Tableau 10. QECS score total
Paramètres Groupes Valeur p MG INT
<0,0001
Effectifs N 121 172
Moyenne (écart type) 20,02 (3,54) 21,75 (2,59)
MEDIANE [Min ; Max]
20,07 [11.47 ; 27.75]
22,02 [14.17 ; 29.43]
L’analyse comparative des scores entre les 3 groupes (MG, INT et EXP) a été réalisée
pour les parties QECS-E, QECS-WP. Cette analyse confirme la supériorité des experts pour ces
3 questions (après correction de Bonferroni). Ces analyses sont concordantes avec les
résultats des tests précédents. En effet pour la partie QECS-WP les généralistes ont des
29
meilleures connaissances, et il n’y a pas de différence significative entre les groupes MG et
INT pour la section QECS-E.
Concernant la pratique des médecins Dans notre enquête une deuxième partie venait compléter le Questionnaire
d’Evaluation des Connaissances sur le Suicide. Il s’agit d’une séquence de 8 questions fermées
à réponse binaire ou multiple et d’une question ouverte sur les attentes d’une formation sur
le suicide.
Les 2 premières questions concernent les précautions liées à la prescription de
psychotropes (antidépresseurs et anxiolytiques). Il s’agissait de vérifier qu’une recherche
explicite des idées suicidaires était faite lors de la prescription d’un antidépresseur (question1)
et qu’une consultation était proposée dans les 15 jours suivant la prescription d’un
antidépresseur ou d’un anxiolytique (question2). Les réponses à ces questions sont plutôt
satisfaisantes avec respectivement 89,2 % et 85,6% (MG+INT) qui déclarent prendre ces
précautions liées à la prescription de psychotropes.
Les questions 3, 4 et 7 donnent des éléments sur l’évaluation du risque suicidaire. On
constate des différences entre les groupes sur le sentiment d’avoir des difficultés pour
aborder la question du suicide avec les patients (question3). En effet, chez les internes près
de la moitié expriment avoir des difficultés (44,6%) contre moins de 20% chez les généralistes
(19,8%) (p<0,0001). Il n’y a pas de différence sur cette question entre les MG « plus jeunes »
par rapport aux MG « plus âgés » lors des analyses post hoc.
Lorsqu’on s’intéresse aux raisons principales de ce sentiment de difficulté à traiter du
suicide avec les patients (question4), on constate que les internes évoquent en priorité un
manque d’expérience (67%) alors que les généralistes plutôt un manque de formation (60%)
suivi d’un manque de temps (28%). Cependant, l’effectif dans le groupes MG est tellement
faible qu’il n’est pas possible de comparer les groupes statistiquement.
Quant aux méthodes utilisées pour l’évaluation du risque suicidaire (question7) des
différences s’observent entre les internes et les MG. En effet chez les internes près des deux
tiers (61%) évaluent le risque selon la méthode d’évaluation triple « risque-urgence-
dangerosité » contre seulement 15% des généralistes. Ces derniers utilisent majoritairement
(69%) une évaluation clinique.
Nous avons aussi demandé la méthode utilisée pour l’évaluation de la dépression
(question6). Globalement l’évaluation est clinique pour 70% des répondants (MG+INT), près
de 20% utilisent des échelles de dépression, et seuls 2% déclarent ne pas l’évaluer. Parmi les
échelles les plus utilisées l’échelle de Hamilton arrive en tête (15%) suivie par l’échelle MADRS
(5%). Enfin, seuls 2% déclarent utiliser d’autres outils (EVA de l’humeur, Beck, GDS). Il n’y a
pas de différence entre les internes et les généralistes sur cette question.
Les questions 8 et 9 concernaient la formation. Nous avons interrogé les répondants
sur leurs attentes d’une formation sur le suicide (question8), et leurs avons demandé s’ils
participeraient à une formation sur la prise en charge de la dépression et du suicide
(question9). D’une façon générale, l’ensemble des répondants (84%) se disent prêts à suivre
30
une formation sur la dépression et le suicide. Cependant, dans les comparaisons en sous-
groupes deux à deux, on peut distinguer un effet génération dans l’intérêt d’une formation.
En effet, on ne retrouve pas de différence statistiquement significative entre le groupe INT et
MG « plus jeunes » (respectivement 86% et 89%). En revanche, dans le groupe MG « plus
âgés » (73% se déclarent prêts à se former) on retrouve une différence à la limite de la
significativité par rapport aux groupes plus jeunes (p=0,06).
Presque un généraliste sur deux (48%) et 40% des internes ont répondu à la partie libre
concernant les attentes d’une formation sur le suicide. Les principales attentes en termes de
formation suicide des généralistes semblent pouvoir se classer en 4 grands thèmes :
« Techniques d’entretien, d’écoute, et de psychologie de la relation avec le patient »,
« Evaluation du risque suicidaire, outils de dépistage », « hospitalisation : où ? quand ?
comment ? », « Relations entre professionnels ». D’autres attentes plus marginales ont été
citées comme la prise en charge des familles endeuillées, aide à la prescription des
traitements.
Dans le thème « Techniques d’entretiens, d’écoute, et de psychologie de la relation
avec le patient » la demande est une aide pour aborder le suicide avec moins de difficultés
« se sentir plus à l’aise », être « mieux préparé à l’écoute », c’est aussi « savoir communiquer,
savoir convaincre ». Une demande concerne des outils pour « se sentir moins seul face au
patient suicidaire » ou pouvoir être « plus solide pour aider ». Cela inclus aussi la question des
adolescents suicidaires qu’il faut gérer après une crise, ou pour lesquels il n’est pas facile
d’entrer en interaction.
Dans « Evaluation du risque suicidaire, outils de dépistage », les généralistes expriment
leur souhait d’avoir des échelles faciles à utiliser et fiables. Il est important pour eux de pouvoir
« évaluer un danger immédiat », « la caractérisation du degré d’urgence », « mieux dépister le
risque suicidaire ». Même si aucun médecin ne l’a citée en entier, l’ensemble des remarques
dans cette catégorie pointent le besoin de connaitre la méthode d’évaluation triple « Risque-
Urgence-Dangerosité ».
« Hospitalisation : où ? quand ? comment ? » est un thème qui peut se décliner en sous
parties. En effet il y a la question « quand hospitaliser ? » : « revoir les critères
d’hospitalisation », « à quel moment décider qu’une hospitalisation en psychiatrie est
nécessaire ? », « avoir du poids dans les demandes ».
La question du lieu d’hospitalisation est également présente : « orienter mieux », « une
unité spéciale qui pourrait recevoir rapidement le patient ». La question de l’organisation de
l’hospitalisation se pose aussi, avec des difficultés pour faire adhérer les patients à la
démarche d’hospitalisation : « adresser plus facilement les patients », « comment inciter à
l’hospitalisation si le patient est réticent », « les patients sont souvent réticents à aller aux
urgences, même s’ils sont prêts à accepter une hospitalisation ».
Enfin, le dernier thème principal concerne l’idée d’un réseau de soins et la
communication entre professionnels. En effet, plusieurs généralistes attendent d’une
formation de connaitre l’offre de soins psychiatriques qui les entourent, demandent une ligne
téléphonique pour joindre un psychiatre en urgence : « connaitre mieux les intervenants du
31
secteur », « je ne connais pas encore tous les intervenants (psychiatres, psychologues) ».
« Joindre un psychiatre relève souvent de l’exploit », « avoir des correspondants », et « réseau
de soins autour du suicide » sont des remarques favorables dans le contexte de
développement du dispositif Vigilans.
Dans le groupe des internes, les mêmes remarques sont observées. Cependant, on
peut noter que les internes sont plus en attente de « mise en situation », « jeux de rôle » que
leurs ainés. De plus, ils se posent aussi la question des soins sous contrainte et de leur place
dans la prise en charge du patient suicidaire. Ils semblent également plus nombreux à solliciter
un numéro d’appel d’urgence pour gérer les situations importantes, ou pour orienter au mieux
leurs patients.
Cette attente d’un numéro pour joindre un psychiatre en urgence est partagée par
tous les groupes mais on peut observer un effet « générationnel ». En effet, parmi les
généralistes « plus âgés » 65% se déclarent en attente d’une telle ligne téléphonique, contre
73% des généralistes « plus jeunes » et 87% des internes en médecine générale (p=0,0002).
Tableau 11. Synthèse des réponses sur les pratiques des généralistes
Questions Groupes Valeur p
MG « plus jeunes »
N (%)
MG « plus âgés » N (%)
INT N (%)
1. Recherche d’idées suicidaires et prescription d’antidépresseurs
Oui 64 (96,9) 59 (92,2) 149 (85,1) 0.0212
2. Consultations dans les 15 jours suivant la prescription d’antidépresseurs ou anxiolytiques
Oui 61 (92,4) 59 (92,2) 141 (80,6) 0.0156
3. Difficultés pour aborder le suicide
Oui 13 (19,7) 13 (20) 78 (44,6) <0.0001
4. Si oui, quelles raisons principales
Manque d’expérience Manque de temps Manque de formation
1 (8,3) 1 (8,3)
10 (83,3)
2 (15,4) 6 (46,2) 5 (38,5)
54 (69,2) 4 (5,1)
20 (25,6)
N/A
5. Demande d’un numéro d’appel professionnel
Oui 48 (72,7) 42 (64,6) 151 (87,3) 0.0002
6. Evaluation de la dépression
Evaluation clinique Echelle MADRS Echelle Hamilton Autres échelles Pas d’évaluation
47 (71.21) 6 (9.09) 11(16,7)
2(3) 0 (0)
48 (73.9) 3 (4.6)
12 (18,5) 1 (1,5) 1 (1,5)
130 (74.7) 7 (4)
25 (14,4) 3 (2,9) 7 (4)
N/A
7. Evaluation risque suicidaire
Evaluation clinique EVA suicidaire Evaluation triple RUD Pas d’évaluation
50 (76,7) 4 (6)
11 (16,7) 1 (1,5)
48 (73,9) 2 (3)
11 (16,9) 4(6,2)
51 (29,5) 2 (1,2)
113 (65,3) 7 (4)
N / A
8. Souhait de participer à une formation suicide
Oui 57 (89) 47 (73,4) 145 (86,3) 0.0265
32
Discussion résultats de l’enquêtes QECS-MG-LR Généralités liées à la structure de l’étude
Dans cette étude à destination des généralistes du Languedoc-Roussillon, nous
constatons un taux de réponse peu élevé. Nous avons choisi une diffusion par courriers
électroniques utilisant la base de données de l’URPS Languedoc-Roussillon. Malgré 3 relances
par courriel, nous constatons un taux de réponses de 12%. Ce taux de répondant doit être
mis en regard de la représentativité de notre échantillon qui ni sur l’âge, ni sur le sexe ne
diffère de façon significative de la population réelle des généralistes de la région Occitanie.
Nous pouvons expliquer le faible nombre de répondant par 2 éléments essentiels. Le
premier est le grand nombre des sollicitations dont sont « victimes » les généralistes qui
depuis l’avènement des nouvelles technologies reçoivent encore plus facilement des
invitations à participer aux sondages, questionnaires, et autres enquêtes faites sur leurs
pratiques. Le second point est peut-être une plus grande participation aux enquêtes qui
suscitent de l’intérêt. Ainsi, nous pouvons déjà relever une première conclusion quant à
l’interprétation des résultats : le sujet du suicide intéresse peu de généralistes. Nous pouvons
aussi faire l’hypothèse que nos résultats sont le reflet des connaissances des généralistes les
plus intéressés par la question du suicide. On peut penser que ces résultats correspondent aux
performances de ceux ayant les meilleures connaissances sur le sujet.
Notre choix du questionnaire informatique par rapport à une version papier s’est opéré
afin de faciliter le recueil des données (notamment les EVA) et pour diminuer le coût financier
et environnemental de l’opération.
Notre choix de l’utilisation du Questionnaire d’Evaluation des Connaissances sur le
Suicide (QECS) vient de l’originalité de cet outil. En effet, il existe de nombreuses échelles
d’évaluation des attitudes envers le suicide, toutes ne sont pas validées scientifiquement. Une
revue de la littérature s’est attachée à répertorier les principales échelles avec pour objectif
d’identifier leur pertinence(63). Dans cette étude 18 échelles ont été étudiées. Les auteurs
avaient identifié les paramètres faisant la qualité de ces échelles. Les paramètres étaient les
suivants :
- la validité (c’est-à-dire les échelles s’appuyant sur des concepts théoriques, sur la
littérature, des consensus d’experts),
- la fiabilité (composée de la cohérence interne, de la stabilité et de la reproductibilité)
- la faisabilité
- la « multidimensionnalité » (c’est-à-dire explorant plusieurs domaines, plusieurs
aspects des attitudes)
- le fait d’être appropriée pour l’utilisation en population générale indépendamment de
la culture, d’un groupe professionnel.
Les 3 principales échelles d’évaluation en population générale retenues comme
remplissant les conditions idéales sont : le Suicide Opinion Questionnaire (100 items), qui est
décrit comme long, le Suicide attitudes questionnaire SUIATT 63 items (long également) et
33
l’Attitude Toward Suicide (ATTS) plus courte qui est une échelle avec une plus grande
faisabilité (63). Ces échelles souvent longues et globales n’étaient pas adaptées à nos besoins.
Le choix du QECS vient dans le fait qu’il permet en seulement 35 items d’explorer 4
mythes et des connaissances sur l’épidémiologie. De plus, ce questionnaire est le seul à notre
connaissance à être disponible en langue française.
Associer le QECS avec une autre échelle validée aurait contribué à allonger
considérablement la durée de l’enquête, et nous pensons que cela aurait conduit à des
abandons en cours d’enquête.
En ce qui concerne notre recueil de données sociodémographiques, nous n’avons pas
demandé aux participants s’ils avaient déjà été exposés au suicide d’un patient, ou s’ils avaient
été personnellement confrontés au suicide d’un proche. Nous n’avons pas non plus demandé
s’ils avaient déjà suivi des formations suicide, ou s’ils avaient travaillé au cours de leur internat
ou carrière dans des services de psychiatrie. En effet notre objectif n’était pas d’expliquer les
facteurs qui pouvait être à l’origine de meilleures connaissances ou de meilleures attitudes. Il
s’agissait surtout de faire un état des lieux de la situation des connaissances des généralistes
et internes en médecine générale dans la région Languedoc-Roussillon.
Enfin, au sujet de notre type d’étude, il est fréquent d’observer un biais de déclaration
des répondants à ce type d’enquête. Il est fort possible que les généralistes répondent ce qui
leur semble juste mais pas forcément ce qu’ils font au quotidien dans leur pratique.
Résultats de l’étude QECS
Le QECS qui évalue les connaissances sur le suicide (épidémiologie et représentations)
est un outil probablement incomplet pour l’évaluation exhaustive des connaissances sur ce
sujet. Cependant le score moyen obtenu par un groupe à ce questionnaire permet de refléter
une tendance globale sur l’état des connaissances. Dans notre situation on constate des
résultats moyens, plutôt mauvais, en ce qui concerne l’épidémiologie. Sur ce dernier point, la
tendance est à la sous-estimation du phénomène. Ceci permet d’expliquer aussi la raison pour
laquelle peu de médecins s’intéressent au suicide. De même en ce qui concerne les mythes
évalués, les généralistes ont tendance à penser qu’il est anodin d’avoir des idées suicidaires
et qu’on ne peut rien faire pour prévoir ou éviter un suicide.
En ce qui concerne les mythes et la note globale au QECS, les internes sont plus
nombreux à être convaincus qu’il existe des moyens pour prévenir le suicide, que ce sujet
n’est pas anodin, et qu’il est possible d’agir pour éviter qu’un patient ne passe à l’acte.
Pour expliquer cette différence, nous pensons que les internes sont plus confrontés
dans leur formation à la question du suicide. Depuis quelques années maintenant un cours en
présence d’un psychiatre et d’un médecin généraliste est mis en œuvre par le département
de médecine générale à destination des internes en médecine générale de la région. Même si
nous ne pouvons le démontrer, il est certain qu’il y a parmi les internes répondant à cette
enquête une bonne partie qui a suivi ces cours. Nous pensons que ces enseignements, ainsi
que le contexte de l’examen national classant (pour lequel un item du programme est la
34
dépression et son traitement) sont des possibles explications à la différence dans les réponses
entre internes et généralistes.
Enfin, des études suggèrent que les femmes possèdent une plus grande conviction
qu’une prévention du suicide est possible (81% vs 65% p=0,02)(41). Cela pourrait expliquer un
effet du sexe sur nos résultats (avec un échantillon d’internes majoritairement féminin). Ces
résultats peuvent se discuter en ce que la féminisation de la profession pourrait être perçue
comme bénéfique sur les attitudes des professionnels de santé vis-à-vis du suicide. Nous
n’avons pas traité les différences d’attitudes en fonction du sexe car il ne s’agissait pas pour
nous d’expliquer les différences d’attitudes en fonction du sexe.
Partie « Pratiques »
Les 2 premières questions sur les pratiques donnent plutôt des réponses dans le sens
des recommandations de bonnes pratiques traitant de l’usage des antidépresseurs et des
anxiolytiques.
Ces résultats posent la question des recommandations et de leur adhésion par les
professionnels. En effet, en ce qui concerne les antidépresseurs, il y a eu en 2004 une alerte
de l’Agence américaine du médicament (the Food and Drug Administration) sur le risque
suicidaire des antidépresseurs utilisés chez les sujets jeunes. Cette annonce a été
immédiatement critiquée, pas tant sur le risque en lui-même, mais plutôt sur la crainte d’un
découragement des patients de rechercher l’aide d’un médecin, ou une diminution des
prescriptions y compris chez ceux pour qui l’indication était justifiée. Ces craintes se sont
avérées justes puisqu’à partir de 2004 on a pu voir une chute de la prescription
d’antidépresseurs à un point tel que la FDA a dû rappeler que le risque n’était que pour les
enfants et que la dépression elle-même conduisait au suicide. Cette tentative de correction
de la FDA a permis de redresser légèrement les prescriptions sans atteindre les niveaux
d’avant 2004(64). Un fait assez délicat est aussi celui lié à la diminution du taux de prescription
d’antidépresseurs en soins primaires chez les adultes, alors même que ceux-ci n’étaient pas
concernés par l’alerte de la FDA (65).
Un autre point qui interroge dans nos résultats est le nombre de médecins qui
déclarent avoir des difficultés à aborder la question du suicide avec leurs patients. En effet,
parmi les généralistes, seuls moins de 20% reconnaissent cette difficulté. C’est un chiffre
particulièrement bas lorsqu’on le compare à d’autres études sur le sujet : 67% se disent en
difficulté dans un travail de thèse en Nord Pas de Calais et 75% considéraient difficile le
repérage et l’évaluation du risque suicidaire(41,60).
Nous devons nous interroger sur la fiabilité de ces résultats lorsque l’étude Carenity
sur une cohorte nationale de patients déprimés révèle que 4 patients sur 10 ont pu parler à
leur médecin traitant spontanément de leurs idées suicidaires. Alors que ce dernier
n’interroge directement sur le sujet que 30% des patients souffrant de trouble de l’humeur,
et que cette population est à risque plus important de suicide. Ces résultats vont dans le même
sens que ceux observés en 2005 lors d’une étude en région PACA. L’étude cherchait à évaluer
les facteurs favorisant l’identification des idéations suicidaires par les généralistes lors de la
première prescription d’un antidépresseur ou d’un anxiolytique. 22% des patients
35
rapportaient des idéations suicidaires lors de la consultation avec le généraliste. Parmi eux, la
présence d’idées suicidaires n’avait été détectée qu’une fois sur 2 par le médecin. Les
médecins ayant participé à une formation médicale continue (FMC) sur la dépression étaient
ceux qui dépistaient le mieux ces idées suicidaires(66).
Notons que sur cette question les internes étaient près de 45% à reconnaitre avoir des
difficultés pour aborder la question du suicide avec leurs patients. Ils attribuaient
majoritairement cette difficulté à un manque d’expérience. En ce sens, nous pouvons
souligner qu’une formation par simulation permettrait de mettre en situation les internes et
de s’entrainer dans des conditions proches de la réalité. C’est aussi ce que l’on peut retrouver
dans les attentes de formation avec une forte représentation de la volonté de » mise en
situation pratique » pour les formations sur l’évaluation du risque suicidaire.
Dans cette étude nous avons cherché à savoir quelle était la place des échelles
d’évaluation du risque ou de la dépression. La première réponse est une place encore faible
de ces outils. En effet, les évaluations sont majoritairement cliniques alors qu’on peut
constater une forte demande de formation à l’utilisation de ces échelles. Dans la perspective
d’un programme de formation, il semble nécessaire de développer un module consacré à
l’utilisation de ces outils en routine. D’autant que l’évaluation de la dépression au moyen
d’une échelle validée est un acte médical rémunéré par l’assurance maladie.
Notre travail s’inscrit dans la perspective de mettre en place une formation pour
répondre aux besoins, et actualiser les connaissances des praticiens. Dans ce contexte, il est
intéressant d’observer que sur la question d’une participation à une formation, il y a des
différences entre les jeunes généralistes, les internes et les généralistes moins jeunes. En
effets les MG jeunes répondent à 90% qu’ils sont prêts à suivre une telle formation, ce chiffre
est de 86% chez les internes contre 73 % chez les généralistes les plus âgés. Cette différence
de génération illustre selon nous un changement positif dans la culture de la formation. Cette
idée qu’il est important en médecine de se mettre à jour est de plus en plus présente chez les
jeunes médecins. En effet, ce concept de mise à jour et d’évaluation des pratiques est très lié
avec l’apparition des recommandations de bonne pratique dont l’objectif est de toujours
soigner mieux. Les plus jeunes générations sont, dès la formation initiale, sensibilisés à
l’utilisation de ces outils, et à l’évolution des connaissances.
Il en est de même pour l’utilisation d’une ligne téléphonique spécialement dédiée avec
un professionnel de la santé mentale. Nos résultats montrent une acceptation de ce type de
dispositif d’autant plus grande que les sujets sont jeunes. Ce phénomène s’inscrit lui aussi
dans une forme de changement de paradigme pour le médecin généraliste. Il ne veut plus être
seul, isolé et sans contact avec les autres médecins. Cette attitude peut aussi faire écho aux
nouvelles prises en charge globale du patient souffrant de pathologie chronique. En effet, la
naissance du concept de maladie chronique a conduit des nouvelles organisations de soins
comme par exemple la création de réseau de soins spécialisés (ex diabétologie) avec une
facilitation des échanges entre professionnels. Aujourd’hui nous abordons cette
communication par ligne téléphonique, mais les nouvelles technologies en constante
évolution permettent dès à présent d’imaginer d’autres modalités pour la coordination du
36
parcours de soins utilisant les applications mobiles, les données des réseaux sociaux ou le
regroupement de patient dans des communautés en ligne.
D’une façon plus générale, nous pouvons interpréter les différences entre les internes,
les généralistes plus jeunes et les généralistes moins jeunes comme étant un reflet de
l’évolution des connaissances sur le suicide dans le temps. Le constat bien connu est que plus
on s’éloigne de la formation initiale (ou d’une formation), moins on en conserve le bénéfice.
Ces résultats suggèrent l’importance qu’il y a à proposer des formations de qualité aux
généralistes de la région, afin qu’ils s’améliorent sur leurs connaissances et attitudes envers
le suicide, et qu’ils puissent jouer pleinement le rôle de prévention que leur proximité avec les
patients permet.
La première grande étude sur ce sujet est l’étude d’évaluation de l’effet d’un
programme de formation des généralistes sur la dépression et le suicide sur l’île de Gotland
(Suède). Ce programme avait été conduit 2 fois par an en 1983 et en 1984 avec pour
conclusion qu’il avait permis une diminution importante du nombre de suicide. Cependant à
distance de ce programme, les chiffres ont commencé à augmenter à nouveau, conduisant les
auteurs à conclure qu’un programme de formation des généralistes possède un effet positif
sur les taux de suicide mais que celui-ci possède une action limitée dans le temps (45,67,68).
Une analyse du programme sur l’aspect « coût-efficacité » a permis d’ajouter qu’un tel
programme était bénéfique et qu’il semblait nécessaire de le reproduire tous les 2 à 3 ans
pour ne pas perdre l’effet(69).
Limites et Forces de l’étude Limites
Notre étude dont la vocation était l’étude des connaissances et représentations sur le
suicide s’est heurté à un faible taux de participation : 12,4 %. En ce sens, la généralisation de
nos conclusions doit se faire avec prudence, et ceci même si notre population ne présente pas
de différence statistiquement significative avec la population réelle des généralistes de la
région (sur l’âge et le sexe).
Une autre limite concerne aussi le choix d’un questionnaire non validé pour
l’évaluation des représentations et des connaissances.
Enfin, les connaissances sur le suicide ne peuvent être évaluées de façon exhaustive
par un seul questionnaire. Nous n’avons pas investigué la connaissance des médecins sur les
théories neurobiologiques sous-tendant les conduites suicidaires, ni sur leur connaissance
rigoureuse des facteurs protecteurs et des facteurs de risque.
Forces
Il existe de nombreux travaux de thèse sur la question du suicide en soins primaires.
Parmi ces travaux une majorité sont des enquêtes qualitatives, d’autres utilisent des
questionnaires. Les points étudiés varient entre mettre en lien l’expérience personnelle du
suicide et son impact dans la pratique ou à la méthode de dépistage des idées suicidaires.
37
Ce que nous observons est l’originalité de l’utilisation du QECS pour évaluer les
médecins à la fois sur les connaissances épidémiologiques et sur les représentations. En ce
sens, notre travail apporte un angle nouveau et des informations pour saisir ce que peuvent
être les connaissances des généralistes.
Notre étude est la première à notre connaissance à s’intéresser à la population
spécifique des généralistes du Languedoc-Roussillon. Il est pertinent d’étudier les
connaissances des médecins à l’échelle d’un territoire régional dans la mesure où l’on observe
des disparités entre les régions tant sur le taux de suicide que sur la démographie médicale.
Notre région (Languedoc Roussillon) ayant un taux de suicide plus élevé que la moyenne
nationale est particulièrement concernée par cette problématique de santé publique.
Lorsqu’on met ce chiffre en regard d’une démographie globalement supérieure à la moyenne
nationale on peut se poser la question du niveau de formation à la prévention des conduites
suicidaires des généralistes du territoire. C’est un point important que notre étude tend à
mettre en avant dans la perspective de proposer des formations à tous les médecins.
Cette étude s’inscrit dans une logique régionale de la lutte contre le suicide. Elle vient
renseigner les acteurs de cette lutte sur les connaissances des généralistes sur le suicide. C’est
un point fort dans le contexte actuel de déploiement du dispositif Vigilans. En effet ce
dispositif a vocation à être coordonné à l’échelle régionale et peut contribuer à diffuser de
l’information sur le suicide, ou proposer des formations. Ainsi, on peut placer l’étude dans la
perspective d’une meilleure coordination régionale de la lutte anti suicide.
De plus, la collecte de données quantitatives mais aussi qualitatives sur les attentes en
termes de formation devrait permettre d’élaborer des programmes d’instruction adaptés aux
besoins des praticiens.
Si l’utilisation d’un questionnaire non validé est une limite à l’étude, nous pensons que
c’est aussi une force pour le développement de cet outil. En effet, notre étude est la première
à utiliser ce questionnaire sur une aussi grande population de médecins généralistes. En
réalisant ce travail de thèse et avec cette masse de données que constituent les réponses des
généralistes, nous envisageons de continuer à travailler sur la question de l’évaluation des
connaissances sur le suicide, et la validation d’un tel outil. Nous avons des contacts réguliers
avec les concepteurs de cet outil.
Enfin, notre étude en ligne envoyée à plus de 1200 médecins généralistes de la région,
aura au minimum permis à ceux qui nous ont répondu de passer du temps à s’interroger sur
leur pratique. Nous pensons raisonnablement qu’il s’agit d’un point fort de l’étude. En effet,
en addictologie des travaux suggèrent un effet bénéfique de la passation d’échelles
d’évaluation sur la motivation(70). Nous pensons que ce simple questionnement, peut avoir
un effet positif pour faire évoluer certaines représentations du suicide et motiver la
participation à des formations sur le suicide.
38
Premières conclusions Les représentations qu’ont les généralistes sur le suicide constituent des freins à
l’amélioration des pratiques en ce qu’elles placent le suicide comme un phénomène rare, que
l’on ne peut pas prédire et contre lequel on ne peut rien faire. A partir de ces constatations, il
est évident qu’un des enjeux de la prévention du suicide est la mise en œuvre d’un système
de formation efficace ayant l’objectif idéal d’éduquer au dépistage de la crise suicidaire, à la
gestion des situations difficiles.
Dans ce domaine, il ne s’agit pas d’ajouter une énième formation au chapitre des
améliorations de la médecine préventive en soins de premiers recours. L’enjeux est de pouvoir
créer une politique de formation ambitieuse à l’égard de ceux qui en première ligne doivent
pouvoir identifier et traiter au mieux les situations de crises suicidaires. Cette politique
ambitieuse doit utiliser toutes les possibilités afin de favoriser la participation à de telle
formation, l’assimilation de connaissances et le développement de compétence pour
atteindre cet objectif.
Ce travail ne peut se faire sans une bonne compréhension de ce que vivent et
ressentent les généralistes par rapport à la question des conduites suicidaires de leurs
patients. Dans la seconde partie nous allons compléter notre évaluation sur les connaissances,
les attitudes et les pratiques des généralistes par une approche qualitative.
39
Partie 2 : Enquête qualitative sur les attitudes envers le suicide des médecins généralistes du Languedoc-Roussillon Introduction
La lutte contre le suicide est une priorité, ainsi nous chercherons à construire une
formation adaptée aux besoins de la médecine générale permettant aux praticiens d’acquérir
les compétences nécessaires pour atteindre cet objectif. Dans la partie précédente nous avons
présenté une exploration des connaissances et attitudes des généralistes sur le suicide au
travers à partir d’un questionnaire en ligne quantitatif dans le cadre de l’enquête QECS-MG-
LR.
Dans cette partie, nous souhaitons envisager la question du vécu des médecins
généralistes par rapport à la question du suicide ou des conduites suicidaires de leurs patients
au travers d’une approche qualitative.
Notre objectif sera d’étudier les médecins généralistes en tant que groupe social dont
les comportements propres sont, au moins en partie, liés à leur pratique ambulatoire et leur
proximité avec le patient. Nous pensons que les résultats de cette étude nous permettrons de
mieux comprendre la pratique de la médecine générale et de mieux connaitre leurs attitudes
par rapport au suicide.
Nous pensons que ce travail de compréhension est fondamental pour proposer une
formation qui ne constitue pas seulement un apport de connaissances spécifiques sur le
suicide, mais bien une aide précieuse pour affronter la réalité du terrain à laquelle sont
confrontés les omnipraticiens.
Nous pensons également que cette étude peut nous permettre de rechercher s’il existe
une différence entre le rôle « prescrit » - par les recommandations d’experts - des généralistes
et la place qu’ils s’accordent dans la prévention du suicide.
Matériel et Méthode La présentation de la partie matériel et méthode va se faire selon les lignes directrices COREQ
pour l’écriture et la lecture des rapports de recherche qualitative (71).
Equipe de recherche et réflexion Caractéristiques personnelles
L’ensemble des entretiens individuels ont été conduits par la même personne, soit l’auteur de
ce travail. Le niveau d’expérimentation par rapport à ce type d’étude est faible.
L’enquêteur est un interne en médecine en 4e année du Diplôme d’Etudes Spécialisées de
psychiatrie, n’ayant pas au cours de son internat réalisé de stage en médecine générale. Ceci
est une originalité dans le domaine des enquêtes qualitatives étudiant le suicide en médecine
générale puisque la plupart des travaux sont réalisés par des internes en médecine générale.
40
Relation avec les participants
L’enquêteur et les participants à l’étude ne se connaissaient pas. Il n’y avait eu aucune
situation de travail collectif précédente, ni dans le cadre de recherche, ni pour des situations
cliniques concernant des patients.
Conception de l’étude Cadre théorique
Ce travail est une enquête qualitative, par entretien individuel semi-dirigé avec analyse de
contenu.
Sélection des participants
Le recrutement des sujets pour l’étude s’est fait à partir de 2 bases de données.
Le recrutement d’une partie des sujets s’est opérée par envoi d’un courrier électronique à
l’ensemble des médecins généralistes exerçant dans les départements du Gard ou de l’Hérault
et ayant laissé leur adresse e-mail après avoir répondu à l’enquête en ligne « QECS-MG-LR »
réalisée en première partie. Les sujets ayant répondu à l’annonce de l’enquête qualitative
étaient ensuite contactés par téléphone pour convenir d’un rendez-vous.
La seconde partie du recrutement s’est effectuée à partir de la base de données des médecins
généralistes ayant eu un patient intégré dans le dispositif Vigilans LR (donc ayant fait une
tentative de suicide). Les médecins ainsi recrutés appartenaient essentiellement au
département du Gard et furent tous contactés directement par téléphone pour convenir d’un
rendez-vous.
Un seul médecin a été recruté directement dans l’annuaire, et un autre médecin appartenait
aux 2 bases de données (« QECS-MG-LR » et « Vigilans »).
La plupart des médecins contactés par téléphone, lorsqu’ils étaient joignables, répondaient
favorablement à l’idée de participer à l’enquête.
L’enquête a permis de rencontrer un total de 9 praticiens de médecine générale au cours de
la période de mars à avril 2017.
Contexte
Pour l’ensemble des sujets, les données ont été recueillies sur le lieu de travail (au cabinet) le
plus souvent sur un temps « administratif » ou avant de débuter leurs consultations. Ces
entretiens se déroulaient uniquement en présence du sujet et de l’enquêteur.
41
Tableau 12. Caractéristiques de la population :
N %
Départements
Gard 5 56%
Hérault 4 44%
Sexe
Hommes 5 56%
Femmes 4 44%
Sources
QECS-MG-LR 4 44%
Vigilans 3 33%
Autres 2 22%
Âge
Moyenne en années 53
Durée entretien
Moyenne en minutes 34
Recueil des données
Les entretiens individuels étaient semi-dirigés par un guide d’entretien qui n’était pas
fourni aux sujets. La version initiale du guide d’entretien se trouve en annexe, le choix a été
fait de limiter le nombre de question pour favoriser aussi la liberté des réponses.
Les entretiens n’ont pas été répétés, ils étaient enregistrés à partir d’un smartphone
et aucune note n’était prise avant, pendant ou après l’entretien.
Les retranscriptions n’ont pas été retournées aux participants pour commentaire ou
correction. Les retranscriptions ont été faites par l’enquêteur uniquement.
La durée moyenne des entretiens était de 34 minutes.
Selon notre travail d’analyse, la saturation des données n’a pas été atteinte pour
certains des thèmes analysés.
Analyse des données L’analyse et le codage des données ont été réalisés par l’enquêteur, sous la supervision du
Docteur Guilhem Birouste, généraliste et sociologue au sein du laboratoire SHS Med de l’UFR
médecine de Montpellier.
Le traitement du corpus a été constitué en 2 grands axes d’analyses. Le premier axe a été
défini à priori, il s’agissait d’illustrer la place dans le discours des généralistes des 4 grands
mythes étudiés dans l’enquête QECS-MG-LR. Le deuxième axe de lecture a été constitué avec
des thèmes déterminés à postériori en cherchant à identifier la perception qu’ont les
généralistes de leur propre pratique en rapport avec la question du suicide. Nous chercherons
ce qui appartient au domaine des généralistes en tant que groupe social.
Pour faciliter l’indexation des citations et l’organisation des thèmes, nous avons fait le choix
de l’utilisation du logiciel NVIVO v11 (dans sa version augmentée gratuite).
42
Résultats Les attitudes sur le suicide des généralistes A partir des verbatims d’entretiens, nous avons retrouvé la présence d’idées ou d’ensembles
de croyances sur le sujet du suicide que nous appelons « mythes ». Ces mythes sont les
représentations du suicide qu’ont les médecins généralistes interrogés. Lors de l’analyse
thématique nous avons focalisé notre attention sur les 4 mythes identifiés dans l’enquête
QECS-MG-LR sur la population des généralistes du Languedoc-Roussillon.
Le premier mythe concerne la banalisation des idées suicidaires. Pour certains médecins généralistes : ceux qui en parlent ne passeront pas à l’acte. C’est ce que nous dit ce médecin héraultais exerçant en semi-rural lorsqu’il évoque le décès par suicide d’une patiente qui avait des idées suicidaires et pour laquelle il fût surpris de son geste : « On a tendance à se dire que quelqu’un qui vient voir son médecin, qui parle de ce problème-là, on se dit qu’il y a moins de risque que ça arrive et puis bon ça arrive quand même ». Dr M Un autre médecin, lorsqu’il répond sur la fréquence du phénomène explique :
« Des gens qui parlent de suicide mais qui ne le font pas et bien, je dirais y’en a quatre par mois
et bien plus ». Dr S
Dans cet extrait, cette femme médecin d’une cinquantaine d’année, témoignait de la
fréquence importante des idées suicidaires en considérant que ceux qui en parlaient ne le
faisaient pas. Plus loin dans l’entretien, ce même médecin évoque au sujet de certains
accidents de la route qu’ils peuvent être des tentatives de suicide cachées. En effet, elle
évoque rencontrer un grand nombre de femmes qui lorsqu’elles les interrogent sur le suicide
lui répondent qu’elles n’ont pas d’idées suicidaires :
« …mais beaucoup de femmes répondent qu'en voiture ça leur vient à l'idée, de temps en
temps de foncer dans un platane, etc. Après voilà, celles qui en ont parlé ne l'ont pas fait. »
Dr S
Ces propos témoignent d’une forme de banalisation de ces idées suicidaires, nous verrons plus
loin aussi qu’il existe un phénomène de banalisation des conduites suicidaires.
Le second mythe qui concerne l’idée d’une cause unique facilement repérable au suicide n’est
pas retrouvé dans les entretiens, en effet, aucun des généralistes n’a évoqué à partir d’un cas
qu’il y avait une seule cause. Certains faisaient part de facteurs précipitants ou favorisants le
passage à l’acte.
L’idée selon laquelle le suicide est totalement imprévisible correspond au 3e mythe étudié
dans l’enquête QECS-MG-LR. Cette idée est retrouvée dans plusieurs entretiens pour lesquels
les médecins ne perçoivent pas dans les descriptions de leurs cas de suicide ou tentatives de
suicide les éléments qui permettaient de prévoir un risque important de passage à l’acte. Voici
quelques exemples :
« Elle me dit je suis triste quand même qu'il soit parti, je ne m’en remettrai pas. Mais elle ne
m'a pas dit quand même je vais me suicider, je voudrais partir. » Dr P
43
Un autre médecin au sujet d’un patient vivant seul évoque « surévalué dans le côté
dépressif […] soi-disant agoraphobe […] limite surtraité ce patient […] Et là, il a sauté par la
fenêtre. […] Oui, lui c’était une grosse surprise » Dr A. Ce témoignage est intéressant dans le
sens où un psychiatre pourrait voir dans ce cas une liste de facteurs de risques suggérant un
risque de passage à l’acte élevé alors que le généraliste ici souligne sa surprise lorsqu’il a appris
le passage à l’acte du patient.
Un autre médecin qui a eu plusieurs cas de suicide évoque que l’on ne peut pas identifier le
passage à l’acte : « sur des patients que vous voyez la veille, vous voyez rien, vous les voyez
quelques heures avant, vous avez rien vu et puis… et puis vous apprenez qu’ils se sont foutus
en l’air […] sans forcément de signes avant-coureur ». Dr Z
Enfin au sujet d’une perspective de prévision du risque suicidaire basée sur l’intelligence
artificielle, une généraliste déclare :
« Ce n’est pas possible qu'on puisse dire, qu'un robot puisse dire celui-là va se suicider. » Dr P
Si nous nous accordons à penser qu’effectivement, nous ne pouvons pas actuellement prévoir
avec assez de précisions le passage à l’acte d’un patient, nous savons qu’il existe de nombreux
facteurs de risque permettant d’envisager un risque élevé de passage à l’acte. Dans les cas
repris ici, les généralistes pensent qu’il n’est pas possible de prévoir le geste. Cette idée
s’accompagne parfois de celle que « de toute façon on ne peut rien faire », et qu’il n’est pas
possible d’éviter le suicide d’une personne décidée. Il s’agit là du dernier mythe exploré par le
QECS, nous le retrouvons sous différentes formes dans les entretiens comme par exemple :
« J'ai pu rien faire quelque part donc c'est assez douloureux pour nous les médecins. » Dr P
« Bon, je pense que malheureusement quand on en arrive à ces extrémités-là, c’est que vraiment la personne se sent dans une impasse, tellement totale qu’effectivement, réellement il n’y a plus moyen d’agir ou de l’empêcher de faire son acte. » Dr M Un autre médecin qui rapportait les propos d’un psychiatre lors d’une formation : « je me
rappelle d'une phrase, c'est marrant parce que c'est des choses qui marquent ; il nous avait
parlé d'un cas et il nous avait dit : « il va se suicider ». Et cette phrase là c'est quelque chose
que j'ai entendu et au fond de moi je crois ça. Je crois que quelqu'un qui ne veut pas vivre
arrivera à ses fins. Et en même temps cette phrase m'a aidé à accepter de ne pas être tout-
puissant. » Dr R.
Ce dernier extrait nous renseigne sur l’interprétation possible d’un message à l’occasion d’une
formation. En effet, sans savoir ce que le psychiatre souhaitait réellement dire, on s’aperçoit
que le généraliste en question retient et interprète le message comme le signe d’un effet
inévitable du suicide, et renforce l’idée que l’on ne peut rien faire pour éviter le suicide.
Ensuite, cette phrase questionne sur la construction des mythes et l’influence que peuvent
exercer les spécialistes et les formateurs. Dans cet extrait, nous ne savons pas ce que veut
réellement dire ce psychiatre : adhère-t-il à cette idée de fatalité ? Veut-il dire que le patient
avait une forte probabilité de décéder par suicide ? Est-ce une erreur d’interprétation du
généraliste ? Nous ne pouvons pas le dire avec ces seuls éléments. Ce que nous faisons dans
44
ce travail c’est continuer d’explorer les mythes pour essayer de comprendre comment ceux-
ci peuvent se construire, naitre ou mourir.
Nous venons de voir comment dans une formation un message peut véhiculer un mythe, dans
le cas suivant, un généraliste s’exprime au sujet de sa formation de régulateur SAMU :
« Elle m'a apporté un peu la marche à suivre dans l'interrogatoire, et de ne pas avoir peur de
poser certaines questions assez précises, surtout dans le scénario. Au départ on se dit qu’on
leur donne des idées quelque part, on a peur de leur donner des idées et finalement non ce
n’est pas ça » Dr B.
Cet extrait permet d’illustrer l’existence d’autres « idées fausses » sur le suicide et l’évaluation
du risque parmi lesquelles l’idée qu’en interrogeant avec précision un patient sur son projet
de suicide on favorise le passage à l’acte.
Un premier constat issu de nos résultats est qu’il existe de nombreuses attitudes à l’égard du
suicide, qui peuvent être positives ou négatives. Au travers des entretiens analysés, on perçoit
comment les mythes se construisent à partir de l’expérience, et comment l’expérience peut
renforcer certains mythes. Ce phénomène existe, ici il n’est pas question de savoir si le mythe
fabrique la pratique ou si la pratique forge le mythe mais plutôt d’observer comment ils
s’influencent l’un et l’autre. Pour décrire la pratique des généralistes nous avons reconstitué
à partir des entretiens deux grands thèmes d’une pratique que nous appelons « la naissance
d’une clinique diagnostique » (incluant la perception épidémiologique, la nosographie, les
repères concernant le suicide) et « les ressources thérapeutiques » (incluant les solutions
d’orientation et de soins, le recours aux autres professionnels, la gestion de l’urgence). A partir
de ces deux thématiques de la pratique du généraliste nous avons pu identifier le rôle perçu
du généraliste par rapport aux conduites suicidaires. Enfin, le dernier point de cette analyse
d’entretiens a permis de dessiner le contour des attentes en termes de formations et d’outils
sur le sujet.
La naissance d’une clinique diagnostique Ce thème regroupe l’ensemble des éléments qui permettent d’identifier un trouble, de poser
un diagnostic ou dépister une situation à risque. Transposé au sujet de notre étude, ce thème
identifie le champ lexical du généraliste à propos du suicide, sa perception du phénomène en
termes de fréquence, d’épidémiologie, et même de nosographie conduisant à la naissance
« d’une suicidologie » propre à l’exercice en médecine générale. Cette « science du suicide »
essentiellement empirique s’observe à partir d’un champ lexical propre : « ictus suicidaire »,
« appels à l’aide », « vraies TS ». S’il existe des vraies tentatives de suicide (TS), cela sous-
entend l’existence de fausses tentatives de suicide. D’autres médecins ont évacué le terme
« suicide » de leur langage, en particulier pour le rechercher à l’interrogatoire : « Je pose
clairement la question : est-ce que vous êtes prêts à faire des bêtises ? » Dr L ou « je leur pose
toujours la question : dis-moi où tu en es ? » Dr R. Enfin, une partie des médecins parlent de
conduites suicidaires de leurs patients de façon à les minimiser : « Et là j'ai quelqu'un qui était
suivi au centre d'addictologie de XX, et qui n'est pas très très bien, et qui a fait des pseudos
tentatives » Dr B, ou « Le petit accident que j’ai eu, c’est vrai que si je l'avais hospitalisé le jour
même qu'il n'y aurait pas eu la prise de médicaments. » Dr L, pour ce médecin une intoxication
médicamenteuse volontaire est un petit accident. « Elle avait fait des petites tentatives » Dr
45
R, à propos d’une patiente qui est décédée par suicide, comme s’il existait des « petites
tentatives » d’une part et le suicide d’autre part. Cette distinction dans le champ lexical n’est
pas qu’un usage sémantique différent, c’est la traduction des représentations des généralistes
sur le sujet des conduites suicidaires. En effet à partir des entretiens recueillis, il semble se
dessiner une classification des conduites suicidaires : une nosographie qui pourrait être basée
sur l’expérience.
C’est essentiellement lorsqu’il était demandé aux médecins d’évaluer la fréquence du
phénomène « conduites suicidaires » que l’on a pu observer cette classification propre aux
généralistes comme en témoignent ces extraits :
« Fréquent je dirais non, enfin des vrais TS parce qu’est-ce que les petits appels à l'aide, les
scarifications, les petits troubles de l'adolescence comptent-ils ? Ça j'en ai eu, pour moi ça ne
rentre pas dans le cadre de la vraie TS » Dr A
« Le vrai suicide réussi c'est assez rare, heureusement » Dr S
La classification des patients peut aussi se faire selon le mode choisi pour le passage à l’acte,
avec une banalisation des intoxications médicamenteuses du fait d’une létalité moindre :
« Mais bon après y'a les médicaments, souvent ça on arrive à les récupérer jusqu'à maintenant
j'ai réussi » Dr S,
« Les appels aux secours se font souvent par les médicaments » Dr R,
« Il prenait un excès de médicaments pas forcément pour se suicider mais pour se couper un
peu, pour oublier » Dr L.
Ces extraits illustrent la pensée des généralistes qui vont hiérarchiser les conduites suicidaires
à la fois selon le mode opératoire mais aussi selon l’issue de celle-ci. Dans l’extrait suivant, le
médecin interrogé fait référence à des patients qu’il reçoit en consultation dans les suites
d’une tentative de suicide par médicaments :
« Je trouve que ce genre de personne est coopérante […] ces tentatives de suicide je trouve que
souvent c'est des appels, donc ils viennent pour avoir une réponse à leur appel […] Ce genre de
personne je trouve c'est assez facile « entre guillemets » à prendre en charge et canaliser. » Dr
L
Toujours sur le même sujet des difficultés éventuelles avec les patients ayant des conduites
suicidaires, ce médecin poursuit :
« Il y a quand même eu des hospitalisations comme ça pour une prise de médicaments un peu
intempestive, sans que ça aboutisse à un décès […] On peut séparer en deux parties les gens
qui ont déjà fait des choses qui ont pris des médicaments et qui viennent me voir et qui
acceptent, et ceux qui ne reconnaissent pas encore ça et qui sont prêts à le faire. » Dr L.
Dans cet extrait on perçoit une façon dont peuvent se classer les patients à risque de passage
à l’acte : ceux qui ont déjà fait un geste et qui acceptent une prise en charge, et ceux qui sont
prêt à le faire. Il semble que pour ce médecin la catégorisation des conduites suicidaires
46
n’intègre pas la possibilité de récidive, ni même la question de l’intentionnalité du geste.
En ce qui concerne l’évaluation d’un patient après une tentative de suicide, aucun des
médecins n’a intégré cette question de l’intentionnalité du geste suicidaire dans son
raisonnement clinique. Cette observation renforce l’idée d’une distinction des conduites
suicidaires par l’issue de celles-ci, avec les conduites aboutissant au décès et celles banalisées,
réduites à de « simples » appels à l’aide.
Enfin une autre notion est absente, il s’agit de la dimension d’ambivalence associée aux
conduites suicidaires. En effet, seul un médecin évoque sans la nommer ce qui peut être de
l’ambivalence dans le passage à l’acte lorsqu’il parle des propos des patients revus après une
tentative de suicide : « secondairement ils nous disent mais non j’ai pas voulu mourir, j’étais
fatigué, j’en pouvais plus, tout ce que je voulais c’était dormir » Dr Z. Le fait que les généralistes
interrogés n’abordent pas cette question de l’ambivalence dans les conduites suicidaires
suggère qu’ils n’en ont probablement pas conscience. Ce qui peut renforcer le classement
« binaire » des patients entre ceux qui font des « vraies tentatives » de suicide (et qui en
meurent) et ce qui font des appels à l’aide, des fausses tentatives. Ignorer ainsi l’ambivalence
c’est penser que les patients suicidaires sont pris dans un processus statique, et oublier qu’ils
peuvent avoir en même temps l’envie de mourir et l’envie de vivre. Penser un patient
suicidaire de façon statique et stable dans le temps alimente les mythes déjà soulignés plus
haut, en particulier l’idée qu’on ne peut rien faire pour éviter le suicide.
A partir de leurs expériences, les généralistes façonnent une vision propre des conduites
suicidaires, construisant leur grille de lecture des comportements de leurs patients. Ces
situations cliniques aboutissent à la constitution d’un logiciel d’évaluation du risque suicidaire.
On retrouve dans les entretiens, une évaluation du risque suicidaire variant d’un médecin à
l’autre, certains recherchent des facteurs de risque, d’urgence et de dangerosité. Néanmoins,
cette évaluation du risque se base aussi pour certains sur « un ressenti », et « la connaissance
du patient ». Cette connaissance du patient fait partie de la perception des généralistes eux-
mêmes de leur propre profession, aucun ne la remet en cause alors même qu’ils ont pu être
surpris par les gestes de leurs patients : « Je connais mieux les patients que tout le monde
parce que je les connais dans leur entourage, par leur vécu, et parce que je les connais depuis
de nombreuses années. » Dr P, ce même médecin au sujet d’une patiente qu’elle avait vu la
semaine précédente disait : « j'étais loin de penser qu'une semaine après elle allait passer à
l'acte ». Cette évaluation est probablement perfectible, néanmoins tous les médecins
interrogés avaient connu des patients avec des conduites suicidaires. Ceci a permis de décrire
leurs prises en charges de ces patients, c’est ce que nous avons appelé « la clinique
thérapeutique ».
La clinique thérapeutique De la même façon qu’il existe une clinique diagnostique qui correspond aux attitudes des
médecins vis-à-vis des conduites suicidaires, il existe une clinique thérapeutique, qui
correspond à « l’arsenal » thérapeutique dont disposent les généralistes. Dans ce domaine on
peut identifier 3 grands champs d’actions, tout d’abord celui du généraliste seul face à son
patient (et/ou l’entourage), ensuite le recours à l’hospitalisation et aux services d’urgences
psychiatriques et enfin la mise en place d’un suivi psychiatrique. L’utilisation d’une stratégie
47
par rapport à une autre dépend évidemment du choix du patient, du degré d’urgence de la
situation, mais aussi des expériences cliniques précédentes.
Les urgences psychiatriques sont le recours en cas de risque important :
« Alors les patients suicidaires, dans l'urgence c'est sur le SAMU » Dr B,
« J'évalue, s’il y a vraiment un risque suicidaire très rapide dans ce cas-là je les envoie aux
urgences psychiatriques » Dr J
Les médecins reconnaissent qu’ils utilisent aussi les urgences pour obtenir un avis spécialisé
dans un délai plus rapide ou pour accéder à une hospitalisation. Il peut y avoir des déceptions
sur l’issue de la consultation des urgences comme le montre ce médecin au sujet d’une
patiente qu’il voulait faire hospitaliser pour dépression avec risque suicidaire :
« Je voulais la faire hospitaliser aux urgences depuis plusieurs jours je n'y arrivais pas. […] Je
voulais faire une hospitalisation à la demande d'un tiers, c'est ce qu'on a fait. Et finalement
elle est arrivée aux urgences et ils n'ont pas fait l'hospitalisation à la demande d'un tiers […]
du coup cette fois-là deux jours après elle était dehors. Des fois quand on a un peu du mal, on
aimerait qu'ils restent un peu quand même ! » Dr S
« La question de l'hospitalisation […] j'ai envoyé des patients quelques fois sur les urgences
psychiatriques et ce sont des gens qui ne sont pas restés. Ils sont repartis avec un traitement
[…] c'est des gens du coup qui rappellent et qu'il faut revoir et pour lesquels il faut réorganiser
quelque chose car finalement ils n'ont eu qu’un entretien qui a peut-être été utile mais pour
lequel finalement il n'y a pas eu a priori de nécessité d'hospitalisation donc on les revoit et il
faut recommencer » Dr J
Parfois les médecins rapportent que ce sont les patients qui ne restent pas aux urgences :
« Quelques-uns sont d'accord pour être hospitalisés puis finalement après 48-72 heures ça ne
leur va pas » Dr J
Les raisons sont variables, parfois le délai d’attente avant de rencontrer un psychiatre : « parce
qu'il y a eu un délai de prise en charge trop long » Dr B. Le vécu négatif peut aussi venir des
prises en charges aux urgences en particulier sur le traitement des patients : « la dernière fois
qu’il avait refait une TS, il avait repris des médicaments et il avait été mis aux urgences de XX.
On l’avait complètement déshabillé, on lui avait mis une blouse et on l'avait mis en salle
d'attente pendant trois heures avec les autres gens qui étaient habillés. Il est parti. C'est une
situation dégradante, il n'y a aucun respect et ça c'est vrai. […] Lui il était en attente pendant
trois heures et puis il a appelé sa famille et il a dit je m'en vais. Ce qui est un peu dommage. »
Dr B.
Ces mauvaises expériences doivent être repensées car les patients qui ont eu un mauvais vécu
de leur passage aux urgences ne souhaitent plus y retourner : « souvent quand ils reviennent
c'est ‘’Ah non, ben finalement je ne veux plus y retourner’’ » Dr J. « Finalement souvent il y a
une représentation des urgences psychiatriques qui fait que les gens ils y vont une fois et ils ne
reviennent pas » Dr J.
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Dans l’ensemble, les médecins généralistes identifient plutôt bien les urgences psychiatriques
comme un recours pour toutes les situations difficiles « Après c'est vrai que quand on est
bloqué on les envoie aux urgences pour voir le psy de garde aux urgences » Dr B. Néanmoins,
du fait des expériences négatives rapportées par les patients, ils perçoivent aussi des limites
à cette solution. C’est un résultat important de cette enquête qualitative qui ne peut être
ignoré et doit faire poser la question de la qualité des soins aux urgences psychiatriques.
Un point important autour de la question de la prise en charge des conduites suicidaires est
celui du suivi psychiatrique. En effet, les médecins ont tous parlé des difficultés dans le suivi
psychiatrique de leurs patients, essentiellement pour initier un suivi lorsque le patient en a
besoin.
« Ce qui est le plus difficile c'est d'abord d'avoir accès à un psychiatre » Dr J.
« Bon la difficulté c’est effectivement de trouver des rendez-vous […] on est impressionné quand on voit la liste des psychiatres sur les pages jaunes de l’annuaire et puis la difficulté à en trouver, des disponibles » Dr M. Les médecins interrogés constatent tous cette difficulté qu’ils soient installés en ville (Montpellier ou Nîmes) ou dans un milieu rural ou semi-rural. C’est un élément important qui peut faire interroger sur l’offre de soins psychiatriques. Les généralistes perçoivent cela dans les délais pour obtenir les rendez-vous quand ce n’est pas des refus de nouveaux patients : « Obtenir un avis c’est toujours très très difficile, pour avoir une consultation hormis le psychiatre de garde sur les urgences, dès qu’on commence à téléphoner pour avoir un rendez-vous avec un psychiatre c’est quand même très difficile d’avoir un rendez-vous avant quinze jours ou un mois » Dr Z « Elle ne prend plus de nouveaux patients. » Dr S
Quelques médecins évoquent les difficultés sur le fonctionnement de certains psychiatres :
« Et ce qui pêche énormément dans la prise en charge de la psychiatrie en ville c'est le côté
conversation thérapie. Les médicaments sont bons mais il manque l'échange et il manque la
construction de comment je vais vous sortir de là durablement. » Dr P
« Donc c'est vrai qu'en termes de prise en charge c'est un peu compliqué car chaque psychiatre
a sa façon de travailler ce qui est assez normal » Dr J
La question du coût du suivi est principalement évoquée pour des suivis avec les psychologues,
mais aussi pour les psychiatres : « Quelques fois, on a du mal à trouver un psychiatre pour le
suivi qui ne fait pas de dépassement » Dr S
Les médecins reconnaissent aussi qu’il y a une question de « feeling », et qu’il est aussi difficile
de trouver un psychiatre avec lequel la relation est de qualité entre le patient et le psychiatre.
Pour eux cela contribue aussi à diminuer les chances de suivi quand ce ne sont pas les patients
eux même qui refusent de voir un psychiatre : « Des fois ils sont réticents aller voir le psy,
ceux-là c'est vous ou rien du tout » Dr A.
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Ainsi, en dehors de l’urgence et devant un accès parfois difficile au suivi psychiatrique les
médecins généralistes peuvent entreprendre des prises en charge de patients le temps
d’obtenir un rendez-vous. Pour eux l’écoute ou la parole sont des outils pour gérer la crise :
« Souvent le fait de faire parler, de dire ce qu'on a, ça fait retomber la pression. Du coup je leur
dis ben demain ou dans 48 heures vous venez et on en reparlera etc. » Dr J
« Sinon je temporise, je parle… » Dr L
« Et donc parfois je mets le doigt où ça fait mal, et c'est simplement mon rôle d'essayer de voir
un petit peu. Après, si la personne évidemment elle ne veut pas en parler, et ben j'en parle pas.
Je tends une perche pour voir s’ils la prennent » Dr B
On peut voir que cette dimension de la parole ou d’écoute est liée à la relation de confiance
entre un médecin et son patient :
« S’ils viennent me voir c'est que déjà il y a une relation de confiance qui est établie » Dr B
« Souvent c'est des patients que je connais donc il doit y avoir une certaine confiance envers
moi pour m'en parler et qui fait qu’en contrepartie ils m'appellent aussi quand ça ne va pas »
Dr L
Cette idée de l’écoute pour apaiser les patients en crise est construite sur l’idée qu’il existe
une relation de confiance privilégiée entre un patient et son médecin, pour les généralistes
elle prend sens lorsqu’elle est combinée avec la disponibilité pour le malade. Les médecins
mettent tous en avant leur disponibilité :
« Ben je leur dis de me revoir. Si ça dérape. S’ils se sentent plus vulnérables. » Dr L
« Mais bon, pour l'instant oui, je leur laisse toujours la porte ouverte, je démarre un traitement
je leur dis on se voit dans quinze jours donc c’est arbitraire, et si ça ne va pas revenez me voir
avant voilà » Dr A.
« Moi je leur dis toujours la porte est toujours ouverte. Si ça ne va pas venez quand vous voulez,
vous m'appelez. Même si j'ai des rendez-vous et que je suis débordé je vous recevrai. Comme
ça ils ont toujours une échappatoire, ils savent qu'ils peuvent venir discuter » Dr B
L’idée pour les médecins est que cette disponibilité, cette écoute va suffire à passer la crise :
« On a tendance à se dire que quelqu’un qui vient voir son médecin, qui parle de ce problème-là, on se dit qu’il y a moins de risque que ça arrive et puis bon ça arrive quand même » Dr M Il est intéressant de mettre en évidence ce discours de disponibilité par rapport à la situation des médecins enquêtés qui rapportent pour la plupart un travail conséquent, et une surcharge de travail globale. De plus au cours des entretiens, presque tous les médecins ont été dérangés à plusieurs reprises par le téléphone ou la sonnette du cabinet, et tous acceptaient de participer à l’étude dans la limite de leur « disponibilité ». Cela doit permettre de questionner le point de vue du patient, comment perçoit-il ce discours de disponibilité tenu par son médecin traitant ?
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Les autres outils non médicamenteux pour gérer les patients en difficultés vont être la lutte contre l’isolement et le recours aux arrêts de travail : « Proposer de rentrer dans des associations de faire des activités un peu plus collectives pour
leur permettre un peu de rompre cet isolement » Dr J
« Est-ce que je préviens le suicide lorsque je me rends compte de l'isolement des gens et que
j'essaie de les orienter vers des activités, vers des rencontres ? Oui je pense que oui » Dr R
« Quelques fois j'envoie aussi chez le kiné pour faire des massages, pour rassurer, pour
travailler sur le corps. Quelques fois ça peut être une voie de détente. » Dr S
Enfin, dans les options pour la prise en charge de leurs patients, les généralistes peuvent aussi
prescrire des médicaments :
« Il y a le traitement antidépresseur, les anxiolytiques associés. Voilà tout en ayant peur que
ça puisse servir. » Dr L
Cet usage pharmacologique n’est pas sans susciter des craintes, elles mêmes étant parfois
alimentées par l’expérience : « un que j'avais mis sous antidépresseurs sans associer
d’anxiolytique par exemple et lui il est passé à l'acte aussi » Dr A.
« Je peux dire que je ne suis pas un distributeur de médicaments, parce que les appels aux
secours se font souvent par les médicaments […] Donc je pense pouvoir dire que mes patients
n'ont pas de stock de médicaments. » Dr R
Les attitudes envers la prescription de médicament sont plutôt négatives, avec la crainte de
favoriser le passage à l’acte, sans avoir une grande conviction dans l’efficacité du traitement
médicamenteux :
« Alors ça nous arrive d'en prescrire des antidépresseurs […] ça m'arrive quand il y a besoin.
C'est une béquille pour aller un peu plus loin... Pour les pousser pour qu'ils arrivent à tenir
debout pour aller voir le médecin, le spécialiste ou aller faire un autre chemin. Ce n’est pas un
but en soi, c'est pas ça qui change grand-chose. C'est plus le suivi, la relation ou l'envie d'aller
plus loin et d'aller voir quelqu'un parce que le médicament il donne la force de parler d'être un
peu moins anxieux de sortir de chez soi. De faire le chemin… » Dr S
« Déjà le fait de démarrer un traitement j’ose espérer que ça met un frein dans l'escalade qui
pourrait aller jusqu'à la tentative de suicide » Dr A
La crainte de la levée d’inhibition, est présente chez une grande partie d’entre eux :
« Je me rappelle très bien avoir pendant des années à chaque fois que je mettais un traitement
antidépresseur avoir la pensée de la levée d’inhibition » Dr R
« Il y a quand même toujours cette question de l’antidépresseur qui favorise le passage à l’acte
donc l’anxiolytique qui est à associer, bon ça c’est des schémas classiques qu’on nous a
toujours appris… » Dr M
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Le rôle perçu des généralistes Les attitudes envers le suicide observées au cours des entretiens ont permis de décrire les
éléments importants des prises en charge diagnostiques et thérapeutiques des conduites
suicidaires. Cet ensemble façonne un rôle auto-déterminé par les généralistes dans ce
domaine. Un point important pour les médecins est l’orientation du patient « Bah c'est le
premier contact, donc c'est le dépistage qui sert après à orienter selon l'importance : chez un
psy en urgence, en clinique ou à l'hôpital. C'est un peu comme un aiguilleur » Dr L. Il s’agit de
pouvoir « passer la main » en fonction des situations, cela implique de pouvoir identifier la
crise suicidaire : « il faut que le médecin traitant arrive à sentir la phase aiguë, que l'explosion
va bientôt arriver, prévenir ça et vous l'envoyer » Dr B ou « moi je pense que nous notre métier
de généraliste c'est de dépister la faille et la fragilité » Dr P.
Les généralistes définissent un rôle d’écoute et de relais pour les sujets en difficultés. C’est une mission de proximité : « de toute façon on est relais de proximité » Dr A ou « c'est être disponible c'est écouter » Dr Z. Cette proximité est aussi définie dans le temps, avec l’idée d’être proche des patients tout au long de leur vie : « finalement le seul médecin qui peut faire le lien sur toute la durée de la maladie […] c'est le médecin traitant quand les gens ne changent pas de médecin traitant » Dr J. La mission d’orientation des patients, et l’image de proximité dont bénéficie le généraliste
n’est pas spécifique à notre sujet d’étude. Les généralistes sont les acteurs des soins de
premiers recours qui impliquent cette proximité et d’organiser l’orientation des patients. Ce
résultat est intéressant en ce qu’il confirme que les généralistes se sentent concernés par les
conduites suicidaires des patients, et qu’ils définissent un rôle qui leur est propre.
Le médecin généraliste a aussi un rôle envers la famille, « on a quand même ce rôle formidable
de conseils de médecin de famille » Dr P. Ces liens avec la famille interrogent le rôle du
généraliste dans les conduites suicidaires en tant que « médecin de famille ». En effet,
beaucoup de médecins utilisent la famille comme support de leurs prises en charge : « je leur
dis j'appelle quelqu'un de la famille, et vous y allez » Dr S, ou « là j'en parle à la famille, je leur
demande de jeter un œil sur le traitement si je sens que c'est un peu limite. » Dr L. Pour d’autres
le fait de connaitre la famille est une aide dans l’évaluation du patient : « souvent on a la cellule
familiale, on sait quand il se passe des choses, ça circule finalement on a une image plus large
que ce que le patient nous dit » Dr R.
Néanmoins, la proximité peut en revanche devenir une limite, ou un frein à la confidence d’un
patient « justement comme on est trop avec tous (les membres de la famille) je crois que ces
gens-là ont besoin d'une relation plus individuelle, plus intimiste » Dr R.
Dans notre étude les généralistes ont pu souligner un rôle de « coordination » des soins pour
un patient, ce qui implique des relations avec les psychiatres, mais aussi avec d’autres
professionnels « dans les professionnels c'est celui qui est au centre » Dr J. Ce rôle soulève des
difficultés dans les échanges entre structures « la relation ville hôpital on n'en parle beaucoup
mais dans les faits, elle n'y est pas trop. » Dr B ou « Les difficultés sont permanentes pour
communiquer avec les spécialistes » Dr A.
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Pour finir, le rôle du généraliste comme acteur de la lutte contre le suicide se définit autour
de ses missions classiques de médecin de premier recours, qui dépiste, évalue la gravité et
oriente les patients selon les besoins. Cette perception des missions du généraliste est
partagée par tous avec des sensibilités différentes en partie influencée par l’expérience
personnelle. Parmi les médecins, 2 ont évoqué un parent (mère ou frère) souffrant d’un
trouble bipolaire. Cette expérience est une spécificité qu’ils ont spontanément abordée dans
l’entretien expliquant l’impact sur leur pratique : « la dernière chose qui m'a marqué mais ce
n'est pas un suicide c'est ma mère qui avait une psychose maniaco-dépressive […] j'ai toujours
pensé que ma mère pouvait se suicider » Dr R. Un autre médecin a pu aussi témoigner d’un
épuisement professionnel dans le passé qui influençait sa façon de travailler. Et un médecin a
décrit ses attentes d’une psychothérapie par rapport à son vécu personnel : « moi j'ai
rencontré dans ma vie une fois, un très bon psychothérapeute […] il avait su trouver les phrases
clés pour me sortir à un moment donné d'un problème […] Et ça, j'attends d’un psychologue
[…] qu'il écoute le patient et qu’il lui donne des phrases clés pour rebondir. » Dr P
Dans les entretiens les médecins font part de leur conscience professionnelle et de leur
volonté de faire au mieux. Ce « souci » de bien faire semble lié à un besoin de réassurance sur
leur pratique. En effet, les généralistes ont pu évoquer des difficultés multiples les conduisant
parfois à agir seul, ou à assurer eux même un suivi psychiatrique pour lesquels ils
reconnaissent ne pas être les mieux formés « Nous ne sommes pas bien formés » Dr A.
D’ailleurs au cours des entretiens plusieurs médecins semblaient attendre une validation de
leur pratique : « […] en tout cas je sais pas si c'est une bonne méthode […] » Dr B, ou « On n’est
jamais à l'aise, parce qu'on ne sait pas si ce qu'on a fait c’était vraiment ce qu'il fallait faire. »
Dr Z. D’autres se/me questionnent sur leurs connaissances « bon ça c’est des schémas
classiques qu’on nous a toujours appris, est ce que ça reste toujours valable ? » Dr M.
Cette recherche de réassurance s’observe aussi dans le souvenir qu’ils gardent de leurs
expériences avec le suicide :
« J'ai pu rien faire quelque part, donc c'est assez douloureux pour nous les médecins, parce que
les gens ne verbalisent pas. » Dr P. Cette attitude renforce l’idée qu’on ne peut pas prévoir.
« On se pose toujours la question de savoir si on aurait pu faire quelque chose mais vraiment
non je n’étais pas dans la relation. Elle nous avait tous trompés y compris sa fille. […] Elle avait
tout prévu c'est une femme qui avait quand même bien assumé son choix » Dr R. Ici ce médecin
considère qu’elle n’est pas la seule à avoir été trompée, et que le suicide est un choix « bien
assumé », c’est-à-dire sans ambivalence.
L’affect aide aussi pour accepter le suicide d’un patient : « ce n’est pas un patient que je voyais
depuis très longtemps, donc peut-être que l'affect était moins important » Dr B.
Enfin pour certains cas, les médecins rationnalisent le geste de leur patient : « le monsieur qui
s'est suicidé, il avait un cancer de la gorge, il était chasseur il s'est fichu une balle dans la tête
[…] ça s'est très bien passé […] la carotide pète c'est fini. J'ai trouvé qu'il avait peut-être bien
fait et je n’ai pas été traumatisée par ce suicide, vraiment, je me rappelle que je me suis posé
la question. » Dr R.
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« Et une autre dame qui s'est pendue et qui était maniaco-dépressive depuis 20 ans et un jour
elle est passée à l'acte ma foi… Pour elle c'était peut-être une délivrance... Voilà (soupirs) » Dr
S. Ici encore, on perçoit que le suicide est vécu comme un acte positif pour le patient.
Ces derniers extraits permettent d’expliquer en partie la présence persistante de certains mythes sur la question du suicide. On peut penser qu’il ne s’agit pas seulement d’une absence de connaissance sur le sujet mais bien d’une préférence idéologique afin d’aider à accepter ces comportements ou à minima rationnaliser le comportement de ceux qui décèdent de suicide. Ces attitudes envers le suicide de leurs patients permettent aux médecins de se rassurer sur leurs prises en charge des conduites suicidaires. Enfin le « souci de bien faire » se retrouve dans l’existence de propositions et d’attentes d’outils et de formations pour améliorer les pratiques.
Les attentes en termes d’outils et de formations Nous regroupons ici les résultats concernant les attentes en termes d’outils et de formation. Ceux qui ont suivi des formations ont pu décrire différentes façons d’aborder le suicide en formation. De façon classique ce sujet est abordé dans des formations sur la dépression, ou sur les urgences psychiatriques. Certains ont abordé cela autour de la question de prise en charge de population spécifique, comme par exemple la prise en charge des adolescents. Enfin, un dernier médecin a vu la question du suicide traitée dans une formation dont la thématique était « la mort ». Un sujet attendu explicitement concerne l’évaluation du risque suicidaire : « il faut des
formations sur les signes avant-coureurs, précurseurs de la TS » Dr P. Au sujet de sa formation
de régulateur SAMU « ils nous expliquent de poser les bonnes questions de savoir s’il y a un
scénario qui est établi pour voir s'il y a un risque immédiat. C'est l'évaluation du risque
suicidaire. Et ça c'est vrai qu'il faut pas avoir peur de poser les questions bien précises. » Dr B.
D’autres médecins ne semblent pas avoir tiré un avantage de leur formation : « On avait fait
une formation […] c'était toutes les urgences psychiatriques […] Voilà. Moi je n’ai pas eu
l'impression de me sentir plus à l’aise après ça » Dr Z. Probablement que ces remarques
confirment l’hétérogénéité de l’offre de formation et aussi des attentes. En termes de besoins,
des médecins évoquent aussi la question de la relation avec le patient : « d'autres techniques,
d’écoute et de soutien » Dr S.
Le sujet de l’information sur l’offre de soins est source d’intérêt : « Je la connais très mal moi. Ça d'ailleurs à l'occasion, il faudra faire le point, ça m'aiderait beaucoup dans ma prise en charge ça c'est sûr » Dr A. Ce sujet peut se voir comme une formation ou comme un outil. C’est un point important qui renvoie aux difficultés exprimées par les généralistes au sujet de l’orientation vers la psychiatrie (qu’il s’agisse d’une hospitalisation ou du suivi psychiatrique). Ce besoin va au-delà d’une simple attente en termes d’information sur l’offre de soin, il s’agit de « mettre plus en place des réseaux pour justement quand on repère quelque chose, savoir où envoyer » Dr Z. Certains médecins aimeraient « qu’il y ait comme pour certains services par exemple la cardiologie, la neurologie [...] un numéro d'urgence sur l'hôpital où l'on puisse avoir un médecin de garde quand on a besoin » Dr J. Cette idée de pouvoir joindre un psychiatre se
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retrouve chez presque tous les médecins interrogés « il faudrait qu'on ait le numéro de portable des médecins (psychiatre) ». Dr P. Et ce qui est étonnant, c’est la grande quantité des références faites à « la bonne utilisation d’un numéro de spécialiste » : « Quand j'appelle c'est que j'ai vraiment besoin » Dr J,
« Je pense les respecter, je ne les appelle pas pour rien et quand je les appelle et que c'est
urgent ils répondent » Dr P,
« Moi bien sûr, le cardio voilà il sait que j'ai un électro et je ne lui envoie pas toutes mes
douleurs thoraciques foireuses. Et celui d'hier c'était encore un truc. Si vous laissez votre
numéro, moi je laisse mon numéro à personne sinon je suis appelé sans arrêt pour n'importe
quoi […] » Dr A.
Ceci peut se percevoir comme un autre élément en faveur du souci de bien faire. Néanmoins
cela peut être source d’interrogations, que peuvent signifier autant de précautions sur le bon
usage des numéros de téléphone ? des difficultés de communication entre les généralistes et
les spécialistes ? un mauvais accueil des spécialistes pour des questions qui ne relèvent pas de
leur spécialité ?
Ce qui est certain c’est qu’il y a au sein des médecins interrogés, une attente d’un réseau de
prise en charge des conduites suicidaires, comme il existe cela pour de nombreuses
pathologies ou disciplines (réseau plaie et cicatrisation, filière de prise en charge des infarctus
du myocarde, filières neurovasculaires, etc.).
Tous les réseaux ne se ressemblent pas. En psychiatrie depuis peu il y a la mise en place du
dispositif Vigilans que nous avons présenté en introduction. A ce sujet, cinq des médecins
interrogés dans notre enquête étaient déclarés comme médecin traitant d’au moins un
patient ayant bénéficier du service Vigilans. Seul un médecin s’est souvenu de ce dispositif qui
– rappelons-le – permet au médecin généraliste de disposer d’un numéro de téléphone
spécialement dédié pour lequel il peut joindre un psychiatre en cas de besoin. Le service
Vigilans informe systématiquement le médecin traitant des contacts qu’il aurait eu avec le
patient, qu’il s’agisse d’un appel de contact ou un appel à l’initiative du patient. Ainsi, un
résultat important de cette enquête est le constat que les médecins ayant un patient dans
Vigilans n’ont pour la plupart pas évoqué ce dispositif lorsqu’ils parlaient de la ligne favorisant
un contact direct avec le psychiatre.
Pour les médecins concernés par Vigilans il était posé la question de l’existence de ce type de
réseau en fin d’entretien, parfois même en leur rappelant qu’ils avaient dû avoir un patient
dans le dispositif. Globalement, les médecins reconnaissaient avoir oublié le dispositif en
raison du grand nombre de courriers reçus ou d’un manque de clarté du courrier. Certains
pensaient qu’il aurait fallu faire un courrier d’annonce du lancement, d’autres que le dispositif
soit présenté à l’occasion de réunions d’information. Ce dernier médecin rajoutait tout de
même « Je sais que les généralistes sont pénibles et se déplacent peu, on est pénible parce
qu'on a des journées lourdes et qu'après vous êtes déçus vous ne nous voyez pas venir mais…
Faut quand même tenter le coup ! » Dr P.
Ces résultats sont riches d’enseignement à la fois lorsqu’on les traite littéralement, dans ce
qu’attendent les généralistes pour une meilleure pratique mais aussi ils conduisent à un
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questionnement intéressant lorsque l’on croise les expériences rapportées avec les attentes
exprimées.
Discussion Discussion sur l’étude Cette enquête a été réalisée auprès d’un effectif de neuf médecins généralistes des
départements du Gard et de l’Hérault. Bien que l’effectif soit faible, nous avons obtenu des
résultats intéressants permettant de soulever des questions sur les pratiques, le vécu mais
aussi les attentes des généralistes. La poursuite d’entretiens auprès d’autres médecins
pourrait aider à approfondir certaines notions, en particulier en les confrontant aux points de
divergence (entre les pratiques et les attentes) ou sur leur point de vue dans la lutte contre le
suicide par rapport au droit à chacun de mourir dans la dignité.
La grille d’entretien a peu évolué au cours des entretiens en raison de notre souhait de rester
le plus ouvert possible pour ne pas focaliser sur un aspect précis ou fermé de la question du
suicide en médecine générale. En ce sens cette enquête qualitative doit se percevoir comme
une étude préliminaire.
Un des objectifs de ce travail est de mieux comprendre la place du généraliste dans la prise
en charge des conduites suicidaires. Cette place du généraliste peut varier selon les
exercices, selon les médecins mais aussi selon le système de soin et ses acteurs. Dans un
système de soin la place qu’occupe un professionnel se définit par celle qu’occupent les
autres acteurs, mais aussi par celle que perçoivent ces autres acteurs. Ainsi, pour compléter
cette réflexion des enquêtes auprès des patients eux-mêmes, des familles, des psychiatres
libéraux et de tous les acteurs de la prise en charge des conduites suicidaires auraient permis
une vision plus globale.
Ce travail n’est que le résultat d’une co-construction entre les généralistes d’une part, et
l’interviewer d’autre part. Ces résultats doivent sans cesse interroger la part de subjectivité
de l’auteur du travail qui par son appartenance à la communauté des psychiatres ne peut être
sans conséquence sur l’analyse des résultats et la discussion qui en suit.
Discussion des résultats A partir des résultats nous pouvons apercevoir ce que signifie « suicide » en médecine
générale. En effet, la médecine générale s’est construite autour du concept de soins de
premier recours, de proximité. Nous avons pu voir comment étaient perçues les conduites
suicidaires de leurs patients, comment ils organisaient la sémiologie psychiatrique dans leur
pratique et comment l’expérience clinique nourrissait leurs représentations sur le suicide. En
pratique de médecine générale, la souffrance psychique est souvent confondue avec les
difficultés sociales en raison des multiples sollicitations des patients qui espèrent du
généraliste une solution à leurs maux. Dans ce contexte, le médecin est souvent isolé face à
des problématiques dépassant le seul fait médical, et pour lesquelles il n’a d’autres solutions
que de médicaliser le social (72). Cette pratique étendue de la médecine doit forcément
impacter sa perception de la souffrance en la globalisant comme un seul mal, loin d’une
démarche diagnostique, loin d’une définition psychiatrique de la dépression. Cette dernière
confondue avec d’autres maux prend alors une autre définition et devient une réalité propre
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à la médecine générale. On peut penser que la « nouvelle clinique diagnostique » qui vise à
minimiser les conduites suicidaires, à les réduire à de simples appels à l’aide est renforcée par
la perception d’une relative grande fréquence de la souffrance (psychique ou sociale) en
consultation en rapport à une faible fréquence de la complication redoutée qu’est « la mort
par suicide ».
Un autre point de la discussion est la question de la classification des conduites suicidaires
avec l’impression que les généralistes évoquent d’une part les tentatives de suicide comme
des « appels à l’aide » et d’autre part les suicides. Les descriptions se font comme si les
conduites suicidaires ne pouvaient aboutir au suicide et cette idée semble renforcée par
l’absence de la notion d’ambivalence dans les descriptions. De plus, dans l’analyse des
comportements suicidaires de leurs patients les médecins semblent ignorer certains facteurs
de risque de passage à l’acte. Cela aboutit à un effet de surprise du généraliste alors que la
situation qu’il décrit contient de nombreux signes d’alertes indiquant que la situation était à
risque élevée de passage à l’acte. Ce point est important puisqu’il met en lumière l’existence
d’un défaut de connaissance sur les facteurs de risque et les mécanismes conduisant au
suicide. Ces observations illustrent la participation du manque de connaissances sur le suicide
dans l’entretien de certains mythes comme l’idée que l’on ne peut pas prévoir le suicide. Ainsi,
nous pouvons penser qu’une simple formation à l’évaluation du risque suicidaire peut venir
combler des connaissances et affaiblir certaines croyances.
Les médecins généralistes ont décrit leur perception du système de soins, en particulier l’offre
psychiatrique ambulatoire insuffisante, et la difficulté pour obtenir des avis psychiatriques ou
partager des informations sur le suivi des patients. Ce qui est fort à comprendre dans ces
données, c’est qu’indépendamment de la réalité de l’offre de soins psychiatriques, le simple
fait de concevoir l’offre de soins psychiatriques comme insuffisante, impacte la prise en charge
pour les patients. Les médecins se retrouvent obligés d’assurer des suivis convaincus qu’ils
sont la seule solution accessible à leur patient. Dans le cas de l’urgence, les services d’urgences
psychiatriques apparaissent comme des solutions, néanmoins les descriptions qui en sont
faites doivent faire interroger sur l’ensemble du système de soins, bien au-delà de la pratique
du médecin traitant. On ne peut répondre à la question de la place du médecin généraliste et
à sa formation qu’en rapport avec le reste des acteurs. Enfin ce sentiment presque
« unanime » d’insuffisance du système de soins psychiatriques peut trouver une réalité en ce
que les communications avec les psychiatres sont difficiles, ce qui doit laisser penser qu’au
cours d’une formation la seule présentation d’une liste des lieux de consultations est très
insuffisante. Nous pouvons penser que des modules de formations, faisant intervenir les
acteurs de soins (psychiatre libéraux, d’urgences, des Centres Médico-Psychologiques) du
territoire ou secteur du généraliste, pourraient apporter une dimension nouvelle à la
formation.
En ce qui concerne la famille, nous avons pu voir que pour des généralistes la connaissance et
parfois le suivi de famille entière sont perçues comme des atouts dans la prise en charge des
conduites suicidaires (tant pour le dépistage des situations à risque que pour la prise en charge
des suicidants). Cependant, s’il est vrai que l’entourage peut être une ressource, ce statut de
« médecin de famille » comporte également des inconvénients que peu de médecins ont
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abordés. L’entourage n’est pas toujours protecteur, et la complexité des relations au sein d’un
système familial ou conjugal peut favoriser des passages à l’acte(3). L’évaluation de la qualité
de l’entourage est très importante et nécessite d’être soulignée dans le cadre d’une formation
sur le suicide. Enfin, les entourages peuvent eux aussi être fragiles après une tentative de
suicide ou un suicide, cela doit impliquer une vigilance particulière. D’une façon générale, on
peut penser que cette fonction de « médecin de famille » influence le généraliste dans sa
pratique et la perception de son rôle.
Nous avons décrit une attitude des médecins qui semblent chercher à se rassurer par rapport
aux conduites suicidaires de leurs patients, en particulier lorsque ces derniers décèdent par
suicide. Des médecins ont pu dire qu’ils pensaient que le suicide de leur patient était
bénéfique, comme un apaisement. Cette attitude pose la question de la fin de vie et du droit
à mourir pour les patients souffrant de troubles mentaux. Elle replace la lutte contre le suicide
dans sa dimension éthique et rappelle qu’il existe des opinions différentes sur ce sujet. On ne
peut faire de lutte contre le suicide sans entretenir une réflexion continue sur cette question
(73–75).
Enfin, à partir des entretiens, nous avons dessiné ce qui concerne les attentes des généralistes
en termes de formation et d’outils pour mieux prendre en charge les conduites suicidaires.
Ces attentes semblent similaires aux préoccupations manifestées dans l’enquête QECS-MG-
LR : favoriser le recours au psychiatre notamment en développant une ligne d’appel
spécialement dédiée pour obtenir des avis psychiatriques, former à l’évaluation du risque
suicidaire, et l’attente plus ambitieuse d’un réseau de prise en charge des patients avec
conduites suicidaires.
Cette attente d’un réseau de prise en charge sur un modèle similaire de ce qui existe déjà pour
d’autres pathologies (diabète, accidents vasculaires cérébraux, SOS main, etc.) est assez
fortement exprimée. Quelle forme devrait prendre un tel réseau spécialisé pour être le plus
efficace ? C’est une question à laquelle nous devons réfléchir, ceci d’autant plus qu’il existe
déjà le dispositif Vigilans pour proposer une amélioration de la prise en charge de ces patients.
S’il est vrai et encourageant que Vigilans semble répondre en théorie à des attentes des
médecins, nous devons aussi constater qu’en pratique les médecins qui avaient des patients
dans le dispositif ne s’en saisissaient pas, comme si ce réseau n’existait pas pour eux. Chaque
médecin n’avait eu qu’un patient dans le dispositif et l’inclusion du patient remontait toujours
à plusieurs mois ce qui peut expliquer « l’oubli » de l’existence du dispositif. Cependant, on ne
peut se focaliser sur la seule question d’un oubli lié à un nombre de patient faible. Il faut
considérer que la communication est insuffisante et envisager d’aller au-delà en proposant
dans les formations la présentation systématique de Vigilans, y compris dans des cas de
simulation médicale, afin que le recours à ce réseau puisse avoir une plus grande place dans
l’esprit des médecins généralistes.
Dans ce travail nous cherchons à comprendre ce qui influence et façonne les mythes. On peut
penser que Vigilans, en tant que réseau de veille spécialisé, contribue du simple fait de son
existence à lutter contre certains mythes. Cette question simple pourrait être étudiée, en se
disant « si le dispositif existe c’est qu’il doit y avoir des résultats positifs, c’est qu’on peut agir
contre le suicide, c’est qu’on peut éviter le suicide ». En effet, nous avons vu que les
58
généralistes basent leurs pratiques sur leurs expériences, ainsi, on peut espérer qu’à partir
d’expériences positives autour des prises en charge coordonnées avec Vigilans les médecins
changeront d’attitudes envers le suicide.
Vigilans n’est peut-être qu’une étape dans la construction d’un réseau spécialisé de prise en
charge. Faut-il aller plus loin ? Peut-on aller plus loin dans la constitution d’une filière
spécialisée de la prise en charge du suicide ? Cette idée de réseau nait-elle d’un véritable
besoin pour les généralistes ou s’agit-il d’une simple duplication du modèle existant pour
certaines prises en charge somatiques ? Sans pouvoir répondre à toutes ces questions, on peut
penser au vu de ce travail, qu’il existe une utilité à développer ce type de prise en charge
spécialisée. Vigilans n’est probablement qu’une étape dans la construction d’un réseau
spécialisé ambitieux basé sur le développement du management de cas.
Conclusions et perspectives Ce travail a permis de soulever plusieurs hypothèses quant à la génération et l’entretien des
attitudes des généralistes sur le suicide. Il semble que les représentations des généralistes sur
le suicide se situent au carrefour des connaissances, des convictions idéologiques et éthiques,
et sont alimentées par l’expérience. En ce qui concerne la pratique dans la prise en charge des
conduites suicidaires, elle n’apparait pas seulement guidée par les connaissances sur le sujet.
Les mécanismes produisant une pratique en médecine générale sont complexes et ce travail
rappelle que tout projet cherchant à améliorer ces pratiques doit questionner plus largement
que sur la simple réalisation d’une formation pour apporter des connaissances. En effet ce
travail montre comment les généralistes perçoivent le système de soins qui les entoure et
comment cette perception impacte la pratique.
Ainsi, pour répondre aux attentes des généralistes il semble nécessaire de les impliquer dans
une démarche qui va au-delà, pour leurs proposer « bien plus qu’une formation ». Au regard
de ce travail nous imaginons que cette formation doit prendre la forme d’une expérience
innovante basée sur la réalisation d’un enseignement modulable prenant des aspects
variables et utilisant des techniques d’enseignements différentes. Cela peut être la mise en
œuvre de séances de simulation pédagogique sur les thèmes de la famille, de la relation au
patient ou de l’évaluation du risque suicidaire. Des expériences de présentation de revue de
morbi mortalité peuvent aussi avoir leur place pour partager une nouvelle culture de
l’amélioration du risque pour le patient suivant. Enfin pour répondre aux attentes, la
formation doit aussi être un lieu de rencontres et d’échanges avec les professionnels de la
prise en charge du suicide de proximité. Cet aspect peut prendre la forme d’un module de
rencontre avec les professionnels du secteur (psychiatre des urgences, de secteurs, libéraux,
etc.) du médecin suivant la formation.
Pour mieux lutter contre le suicide, il n’existe pas de solution unique applicable pour tous. La
formation seule n’est pas suffisante, elle est néanmoins nécessaire tout comme il est
nécessaire de la faire évoluer conceptuellement. Ces formations doivent exister sous une
multitude de formes, permettant une modularité adaptée personnellement à chaque
médecin. Il s’agit d’inventer une formation personnalisée comme il existe la médecine
personnalisée au plus près des besoins d’un individus.
59
Conclusion Les représentations qu’ont les généralistes de la région Languedoc Roussillon sur le
suicide constituent des freins à l’amélioration des pratiques en ce qu’elles placent le suicide
comme un phénomène rare, que l’on ne peut pas prédire et contre lequel on ne peut rien
faire. A partir de ces constatations, il est évident qu’un des enjeux de la prévention du suicide
est la mise en œuvre d’un système de formation efficace ayant l’objectif idéal d’éduquer au
dépistage de la crise suicidaire, à la gestion des situations difficiles.
Dans ce domaine, il ne s’agit pas d’ajouter une énième formation au chapitre des
améliorations de la médecine préventive en soins de premiers recours. L’enjeux est de pouvoir
créer une politique de formation ambitieuse à l’égard de ceux qui en première ligne doivent
pouvoir identifier et traiter au mieux les situations de crises suicidaires. Cette politique
ambitieuse doit utiliser toutes les possibilités afin de favoriser la participation à de telles
formations.
Pour améliorer la prise en charge des conduites suicidaires, et mieux lutter contre le
suicide, le développement d’un réseau spécialisé, dont Vigilans n’est qu’une étape, est d’une
importance capitale. Les réseaux spécialisés doivent contribuer à la transmission des
connaissances et favoriser l’acquisition des compétences. Pour atteindre cet objectif, nous
devons mettre au point des formations innovantes conceptuellement. En effet à l’heure de
l’essor d’une médecine personnalisée, nous devons faire preuve de la même exigence
d’innovation en ce qui concerne la formation, et tendre vers une formation personnalisée des
médecins.
60
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66
Annexes
Questionnaire utilisé pour l’enquête QECS-MG-LR.
1- Quel âge avez-vous ?
2- Sexe :
3- Code postal
4- Quel est votre type d’activité :
1. Médecine générale libérale – seul en cabinet
2. Médecine générale libérale – en association
3. Médecine générale en maison médicale pluri professionnelle (dont psychiatre
ou psychologue)
4. Orientation addictologie
5. Autre
5- Quel est votre ancienneté (année d’expérience)
1. Nombre d’année :
6- En tant que médecin quel est votre titre ?
1. Médecin Libéral
2. Médecin salarié
3. Médecin – maitre de stage accueillant des internes
4. MCU-PA / PU-PA
5. Médecin remplaçant
6. Interne en médecine générale
Partie Questionnaire d’Evaluation des Connaissances sur le Suicide :
1- En moyenne, combien de personnes meurent d’un suicide en France chaque année ?
1. <5000
2. [5000 – 10 000[
3. [10 000 – 15 000 [
4. [15 000 – 20 000 [
5. > 20 000
2- En moyenne quelle est la proportion de femmes retrouvée parmi les victimes de
suicide ?
1. [0% - 20% [
2. [20% - 40% [
3. [40% - 60% [
4. [60% - 80% [
5. [80% - 100% [
67
3- Le suicide est la … cause de mortalité chez les 15-25 ans ?
1. 1ere
2. 2eme
3. 3eme
4. 4eme
5. 5eme
4- Les tentatives de suicide sont … plus fréquentes que les suicides ?
1. [1-2 fois [
2. [2-3 fois [
3. [3-5 fois [
4. [5-10 fois [
5. Plus de 10 fois
5- En moyenne quelle est la proportion de femmes retrouvée parmi les victimes de
tentatives de suicide ?
1. [0% - 20% [
2. [20% - 40% [
3. [40% - 60% [
4. [60% - 80% [
5. [80% - 100% [
6- Parmi les tranches d’âge suivantes, quelle est, en France, celle chez qui on retrouve le
nombre de suicides le plus élevé (en nombre absolu) ?
1. 15-24 ans
2. 25-34 ans
3. 35-44 ans
4. 45-54 ans
5. 55-64 ans
En dessous de chacune des propositions suivantes figure, sous la forme d'un axe, une échelle
allant de "Pas du tout d'accord" à "Tout à fait d'accord". Sur chacun de ces axes, positionnez
le curseur pour indiquer votre degré d'accord avec la proposition. Plus vous êtes d'accord
avec la proposition, plus votre curseur devra se situer à droite sur l'axe ; plus vous êtes en
désaccord avec la proposition, plus votre curseur devrait se situer à gauche sur l'axe.
1- Certains comportements peuvent laisser présager un risque suicidaire, même si la
personne n’en parle pas.
Pas du tout d’accord Tout à fait d’accord
2- Il est anodin de communiquer sur le suicide.
Pas du tout d’accord Tout à fait d’accord
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3- Le suicide peut parfois être lié à un phénomène d’imitation.
Pas du tout d’accord Tout à fait d’accord
4- Quand une personne a pris la décision de se suicider on ne peut rien faire pour l’en
empêcher.
Pas du tout d’accord Tout à fait d’accord
5- Quand une personne va mieux après une tentative de suicide, cela signifie que le
risque est passé.
Pas du tout d’accord Tout à fait d’accord
6- La couverture médiatique d’un suicide peut diminuer le risque de passage à l’acte
suicidaire chez des personnes vulnérables.
Pas du tout d’accord Tout à fait d’accord
7- Les personnes qui se suicident ou font une tentative de suicide ne cherchent que
rarement une aide médicale avant de passer à l’acte.
Pas du tout d’accord Tout à fait d’accord
8- Une personne qui a déjà fait une tentative de suicide dans le passé est plus à risque
de se suicider que si elle n’en avait jamais fait.
Pas du tout d’accord Tout à fait d’accord
9- Dans la grande majorité des cas, le suicide résulte d’un choix délibéré.
Pas du tout d’accord Tout à fait d’accord
10- Toute personne qui se suicide aurait été diagnostiquée comme dépressive si elle
avait été vue par un médecin avant son geste.
Pas du tout d’accord Tout à fait d’accord
11- Ce qui pousse une personne à se suicider n’est pas nécessairement l’envie de mourir
Pas du tout d’accord Tout à fait d’accord
12- Les personnes qui parlent de suicide ne passent que rarement à l’acte.
Pas du tout d’accord Tout à fait d’accord
13- Le suicide est le plus souvent associé à une maladie psychiatrique passée ou actuelle.
Pas du tout d’accord Tout à fait d’accord
14- Quand une personne utilise un moyen peu dangereux pour essayer de se suicider,
c’est qu’elle n’est pas vraiment déterminée.
Pas du tout d’accord Tout à fait d’accord
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15- Il existe une association fréquente entre la dépendance à l’alcool et le suicide.
Pas du tout d’accord Tout à fait d’accord
16- La plupart des personnes qui essaient de se suicider parlent au préalable de leurs
intentions ou laissent des indices.
Pas du tout d’accord Tout à fait d’accord
17- Avoir vécu un traumatisme expose nécessairement à des idées suicidaires.
Pas du tout d’accord Tout à fait d’accord
18- Les personnes qui essaient de se suicider et échouent ne songent pas sérieusement à
mettre un terme à leur vie. Ils cherchent souvent simplement à attirer la compassion.
Pas du tout d’accord Tout à fait d’accord
19- Une personne joviale est à l’abri du suicide.
Pas du tout d’accord Tout à fait d’accord
20- Si vous demandez à une personne « Pensez-vous à vous suicider ? », cela incitera
probablement cette personne à le faire.
Pas du tout d’accord Tout à fait d’accord
21- On peut aider une personne qui pense au suicide même si on n’est pas expert.
Pas du tout d’accord Tout à fait d’accord
22- La couverture médiatique d’un suicide peut augmenter le risque de passage à l’acte
suicidaire chez des personnes vulnérables.
Pas du tout d’accord Tout à fait d’accord
23- Le suicide ne survient que rarement sans signe d’alerte.
Pas du tout d’accord Tout à fait d’accord
24- Une personne qui se suicide souffre nécessairement d’une maladie mentale.
Pas du tout d’accord Tout à fait d’accord
25- Il est banal d’avoir des idées suicidaires : la plupart des personnes qui vivent ou ont
vécu des événements difficiles (violence, chômage, …) en ont.
Pas du tout d’accord Tout à fait d’accord
26- Les personnes qui menacent de se suicider ne mettront pas leur menace à exécution.
Seules les personnes qui restent silencieuses sur leur intention le feront.
Pas du tout d’accord Tout à fait d’accord
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27- Il existe une prédisposition héréditaire au suicide.
Pas du tout d’accord Tout à fait d’accord
28- Une personne suicidaire aura toute sa vie des idées suicidaires.
Pas du tout d’accord Tout à fait d’accord
29- Les idées suicidaires constituent, en elles même, un trouble psychique.
Pas du tout d’accord Tout à fait d’accord
Questions sur les pratiques : partie hors QECS
1) Lorsque vous prescrivez un antidépresseur à un patient, recherchez-vous de façon explicite la présence d’idées suicidaires ? a) Oui b) Non
2) Proposez-vous une consultation dans les 15 jours suivant la prescription
d'antidépresseurs ou anxiolytique ? a) Oui b) Non
3) Êtes-vous en difficulté pour aborder la question du suicide avec vos patients ?
a) Oui b) Non
4) Si oui, indiquez la raison principale parmi les propositions suivantes :
a) Manque d’expérience b) Manque de temps c) Manque de formation d) Désintérêt e) Autre :
5) Êtes-vous en demande d'un numéro d'appel pour professionnel qui permettrait de recevoir un avis spécialisé ? a) Oui b) Non
6) Comment évaluez-vous la dépression ?
a) Evaluation clinique b) Echelle MADRS c) Echelle de Hamilton d) EVA de l’humeur e) Pas d’évaluation f) Autre :
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7) Comment évaluez-vous le risque suicidaire ? a) Evaluation clinique b) EVA idée suicidaire c) Evaluation triple « risque-urgence-dangerosité » d) Pas d’évaluation e) Autre :
8) Qu’attendriez-vous d’une formation sur le suicide :
a) Rédaction libre
9) Participeriez-vous à une formation au sujet de la prise en charge de la dépression et sur
le suicide ? a) Oui b) Non
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Serment d’Hippocrate
➢ En présence des Maîtres de cette école, de mes chers condisciples et devant l’effigie d’Hippocrate, je promets et je jure, au nom de l’Etre suprême, d’être fidèle aux lois de l’honneur et de la probité dans l’exercice de la médecine.
➢ Je donnerai mes soins gratuits à l’indigent et n’exigerai jamais un salaire au-dessus de mon travail.
➢ Admis (e) dans l’intérieur des maisons, mes yeux ne verront pas ce qui s’y passe, ma langue taira les secrets qui me seront confiés, et mon état ne servira pas à corrompre les mœurs, ni à favoriser le crime.
➢ Respectueux (se) et reconnaissant (e) envers mes Maîtres, je rendrai à leurs enfants l’instruction que j’ai reçue de leurs pères.
➢ Que les hommes m’accordent leur estime si je suis fidèle à mes promesses. Que je sois couvert (e) d’opprobre et méprisé (e) de mes confrères si j’y manque.
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Résumé
Introduction : Chaque année en France 10 000 personnes se donnent la mort et près de
200 000 tentent de mourir. Cela fait du suicide un enjeux de santé publique. Les médecins
généralistes sont les plus consultés pour prendre en charge des conduites suicidaires, ainsi
plusieurs recommandations pour la prévention du suicide encouragent la formation de ces
professionnels.
Objectif : Evaluer les connaissances, les attitudes et les pratiques des généralistes, pour
proposer une formation adaptée à leurs besoins.
Matériel et Méthode : Une enquête en ligne a été adressée aux généralistes de la région
Languedoc-Roussillon de mai à décembre 2016 afin d’évaluer leurs connaissances sur le
suicide. Ce travail a été complété par une enquête qualitative par entretiens semi-dirigés
auprès de généralistes afin de comprendre leur vécu et leur pratique concernant les
conduites suicidaires de leurs patients.
Résultats : 357 réponses de médecins ont mis en avant des connaissances faibles sur le sujet
avec l’adhésion à l’idée que le suicide ne peut être ni prévenu, ni évité. L’enquête qualitative
a permis d’observer le rôle du généraliste et la façon dont ses représentations sur le suicide
s’alimentent à partir des expériences cliniques.
Conclusion : Pour améliorer la prise en charge des conduites suicidaires, le développement
des réseaux spécialisés doit transmettre des connaissances et des compétences en
proposant des formations innovantes conceptuellement. En effet, à l’heure de la médecine
personnalisée nous devons faire preuve de la même exigence en ce qui concerne la
formation, et tendre vers des formations personnalisées
MOTS-CLES : médecine générale, formation médicale, connaissances, conduites
suicidaires, suicide, attitudes, pratiques, généraliste
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