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T TH THÈME VII.- DROIT DES OBLIGATIONS ET DES CONTRATS. TITRE.- GÈNESE DE LA RÉFORME ET SOURCES DES OBLIGATIONS. CHAPITRE I.- LA REFORME DU DROIT DU CONTRAT. L'ordonnance n° 2016-131 portant la réforme du droit du contrat, du régime général et de la preuve des obligations a en effet été publiée le 10 février 2016, son entrée en vigueur étant décalée au 1er octobre 2016. Section 1 : Genèse de la réforme La genèse de la réforme repose tant sur les causes de la réforme que sur les méthodes de la réforme. §1 : Les causes de la réforme. La réforme du 10 février 2016 repose sur des raisons nationales (A) et internationales (B). A - Les raisons nationales de la réforme - Le droit des contrats, matière inchangée depuis 1804. Le droit des contrats, quasiment inchangé depuis 1804, était un îlot d'immobilisme en comparaison avec les changements du droit des successions (2001-2006), le divorce (2004), la filiation (2005, 2009), les sûretés (2006), les tutelles (2007), la prescription (2008) ou le mariage (2013). - Un droit prétorien. Le premier péril était le développement d'un droit prétorien, par nature fluctuant et peu saisissable. Même s'il n'a pas fait l'objet de profondes réformes, le droit des obligations a nécessairement

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TH THÈME VII.- DROIT DES OBLIGATIONS ET DES CONTRATS.

TITRE.- GÈNESE DE LA RÉFORME ET SOURCES DES OBLIGATIONS. CHAPITRE I.- LA REFORME DU DROIT DU CONTRAT.

L'ordonnance n° 2016-131 portant la réforme du droit du contrat, du régime général et de la preuve des obligations a en effet été publiée le 10 février 2016, son entrée en vigueur étant décalée au 1er octobre 2016.

Section 1 : Genèse de la réforme

La genèse de la réforme repose tant sur les causes de la réforme que sur les méthodes de la réforme.

§1 : Les causes de la réforme.

La réforme du 10 février 2016 repose sur des raisons nationales (A) et internationales (B).

A - Les raisons nationales de la réforme

- Le droit des contrats, matière inchangée depuis 1804. Le droit des contrats, quasiment inchangé depuis 1804, était un îlot d'immobilisme en comparaison avec les changements du droit des successions (2001-2006), le divorce (2004), la filiation (2005, 2009), les sûretés (2006), les tutelles (2007), la prescription (2008) ou le mariage (2013).

- Un droit prétorien. Le premier péril était le développement d'un droit prétorien, par nature fluctuant et peu saisissable. Même s'il n'a pas fait l'objet de profondes réformes, le droit des obligations a nécessairement évolué depuis 1804. A la différence d'autres branches du droit dans lesquelles les évolutions sont fracassantes, elles sont lentes et progressives en droit des obligations, en deux cents ans, la jurisprudence avait comblé le silence de la loi (les négociations), créé des notions et des concepts nouveaux (les groupes de contrats, l'inexistence...) ou, de manière plus radicale, abrogé certains articles du Code civil (voir l'article 1142 sur l'exécution des obligations de faire ou de ne pas faire). La réforme avait donc, à bien des points de vue, déjà eu lieu. Mais elle ne se voyait pas, du moins pas assez ! Qui s'en serait référé au seul droit codifié n'aurait pas dit le droit positif français. Ce décalage entre le droit codifié et le droit prétorien ne favorisait guère les nouveaux parangons de l'accessibilité et de l'intelligibilité du droit.

- Un droit éclaté. Le second péril était la menace d'éclatement de la matière : les textes du Code civil, de portée générale, étaient concurrencés par des règles spéciales, relevant souvent du droit commercial ou du droit de la consommation et donc le Code Civil n´était plus la matrice du droit des contrats.

. B - Les raisons internationales de la réforme

- La perte d'influence du droit français des contrats. Au plan international, la nécessité d'une réforme se faisait aussi sentir. Des pays qui s'étaient autrefois inspirés du Code civil français avaient déjà réformé leur droit des obligations en s'affranchissant du modèle initial, trop ancien pour demeurer source d'inspiration. C'était notamment le cas du Québec (1991), des Pays-Bas (1992), du Portugal (1996), l´Espagne (1994), et plus récemment de l'Allemagne (2001). Au-delà de ces illustrations de la perte d'influence du modèle français, deux éléments militaient pour la réforme.

- Les projets d'harmonisation. Le premier était la multiplication des projets d'harmonisation du droit européen et international des contrats, qui fleurissent depuis une vingtaine d'années : les Principes Unidroit relatifs aux contrats du commerce international élaborés en 1994 et complétés en 2004, les Principes du Droit Européen des Contrats en 1995, 2000 et 2003, le projet de Code européen des contrats de 2000 ont montré que la voix de la France était peu audible. Une modernisation du droit français des contrats permettrait assurément au Gouvernement de demeurer une force de proposition crédible dans le cadre de ces négociations. Dans ce contexte international de réforme ou d'harmonisation, il était indispensable pour la France, de se doter d'un droit des contrats lisible et prévisible, qui constituerait assurément un facteur susceptible d'attirer les investisseurs étrangers et les parties qui souhaiteraient rattacher leur contrat au droit français.

§2 : Méthodes de la réforme.-

Moderniser le droit français des contrats revenait donc, à l'opposé de cette tendance, à asseoir l'image d'un droit écrit et donc accessible à tous.Chacun était donc convaincu de la nécessité de réformer le droit français des contrats. Mais comment faire ? Même si elle a été précédée de nombreux travaux académiques (A), l'Ordonnance du 10 février 2016 a été très décriée en raison de la méthode employée (B).

A - Les travaux académiques antérieurs à la réforme du 10 février 2016

- Catala, Terré... De nombreux projets de réforme du droit des obligations ont été élaborés depuis le bicentenaire du Code Civil. Aucun n'avait cependant franchi le seuil du Conseil des Ministres. Ainsi, l'avant-projet Catala remis au Garde des Sceaux en septembre 2005, les propositions de réforme rédigées sous la direction du Professeur Terré remis au Garde des sceaux en 2008 (droit des contrats), 2011 (responsabilité) et 2013 (prescription), les projets de la Chancellerie de 2008 (droit des contrats) et 2011 (régime et preuve de l'obligation) avaient tous été suivis de colloques et soumis aux observations des opérateurs économiques... mais n'avaient reçu aucune suite politique. B - Le recours aux ordonnances

- Le Projet de loi du 27 novembre 2013. Sortant de cette résignation, l'article 3 du projet de loi relatif à la modernisation et à la simplification du droit et des procédures dans les domaines de la justice et des affaires intérieures, déposé au Sénat le 27 novembre 2013, a fait renaître toutes les espérances. Noyé au milieu de dispositions disparates portant aussi bien sur l'administration légale que le droit des biens ou des successions, cet article laissait espérer que les nombreux avant-projets de réforme du droit des contrats allaient enfin sortir des sphères académiques pour entrer dans l'arène politique. Ambitieux et optimiste, l'article dessinait, en treize points,-

Section 2 : Le contenu de la réforme

- Le périmètre de la réforme : exit le droit de la responsabilité. La réforme porte sur le droit des contrats, le régime général et la preuve des obligations. On remarquera immédiatement que le droit de la responsabilité n'est pas impacté par la réforme.

- La forme. En la forme, les 286 articles (dont certains se déclinent en -1, -2...) sont rédigés en termes clairs et concis. Ils sont accompagnés d'un dense Rapport fait au Président de la République, dont il faudra déterminer la portée normative. Ils conduisent à la disparition de quelques article symboliques (1134, 1165, 1184...).

- Le fond. Au fond, le Rapport fait au Président de la République explique qu'il « est apparu nécessaire, conformément au vœu émis non seulement par la doctrine, mais également par de nombreux praticiens du droit, non pas de refondre totalement le droit des contrats et des obligations, mais de le moderniser, pour faciliter son accessibilité et sa lisibilité, tout en conservant l'esprit du code civil, à la fois favorable à un consensualisme propice aux échanges économiques et protecteur des plus faibles ».

Section 3 : L'entrée en vigueur de la réforme

- Dispositions transitoires. L'article 9 de l'ordonnance fixe les dispositions transitoires en trois alineas.

- L'alinea 1 fixe la date d'entrée en vigueur au 1er octobre 2016. Cette entrée en vigueur décalée a été voulue pour laisser aux opérateurs économiques le temps d'aménager leurs contrats. Les contrats conclus avant cette date restent soumis à la loi ancienne. Seuls les contrats conclus à compter du 1er octobre seront soumis aux nouveaux textes. Cette règle est une illustration du principe de la survie de la loi ancienne en matière contractuelle c´est à dire: « la loi nouvelle ne s'applique pas, sauf rétroactivité expressément décidée par le législateur, aux actes juridiques conclus antérieurement à son entrée en vigueur »). Les contractants seront donc vigilants aux hypothèses de renouvellements ou de tacite reconduction des contrats conclus avant le 1er octobre 2016 : ces mécanismes donnant naissance à un nouveau contrat, ce dernier sera nécessairement soumis aux nouvelles dispositions. En revanche, si le contrat est prorogé, il s'agit du même contrat dont le terme est étiré : les dispositions de la loi ancienne lui restent donc applicables. - L'alinea 2 pose cependant trois exceptions au principe : les actions interrogatoires prévues pour les pactes de préférence (C. civ., art. 1123 ), pour la représentation (C. civ., art. 1158) et pour la nullité (C. civ., art. 1183) seront immédiatement applicables dès le 1er octobre 2016, même aux contrats conclus antérieurement.

- L'alinea 3 pose enfin une règle destinée à assurer la sécurité juridique : si une instance a été introduite avant le 1er octobre 2016, l'action sera poursuivie et jugée, y compris en appel et en cassation, conformément à la loi ancienne.

« Article 1123Le pacte de préférence est le contrat par lequel une partie s'engage à proposer prioritairement à son bénéficiaire de traiter avec lui pour le cas où elle déciderait de contracter.Lorsqu'un contrat est conclu avec un tiers en violation d'un pacte de préférence, le bénéficiaire peut obtenir la réparation du préjudice subi. Lorsque le tiers connaissait l'existence du pacte et l'intention du bénéficiaire de s'en prévaloir, ce dernier peut également agir en nullité ou demander au juge de le substituer au tiers dans le contrat conclu. Le tiers peut demander par écrit au bénéficiaire de confirmer dans un délai qu'il fixe et qui doit être raisonnable, l'existence d'un pacte de préférence et s'il entend s'en prévaloir. L'écrit mentionne qu'à défaut de réponse dans ce délai, le bénéficiaire du pacte ne pourra plus solliciter sa substitution au contrat conclu avec le tiers ou la nullité du contrat. » « Article 1158 Le tiers qui doute de l'étendue du pouvoir du représentant conventionnel à l'occasion d'un acte qu'il s'apprête à conclure, peut demander par écrit au représenté de lui confirmer, dans un délai qu'il fixe et qui doit être raisonnable, que le représentant est habilité à conclure cet acte. L'écrit mentionne qu'à défaut de réponse dans ce délai, le représentant est réputé habilité à conclure cet acte. » “Article 1183 Une partie peut demander par écrit à celle qui pourrait se prévaloir de la nullité soit de confirmer le contrat soit d'agir en nullité dans un délai de six mois à peine de forclusion. La cause de la nullité doit avoir cessé. L'écrit mentionne expressément qu'à défaut d'action en nullité exercée avant l'expiration du délai de six mois, le contrat sera réputé confirmé. » « Article 1184 Lorsque la cause de nullité n'affecte qu'une ou plusieurs clauses du contrat, elle n'emporte nullité de l'acte tout entier que si cette ou ces clauses ont constitué un élément déterminant de l'engagement des parties ou de l'une d'elles. Le contrat est maintenu lorsque la loi répute la clause non écrite, ou lorsque les fins de la règle méconnue exigent son maintien. »

CHAPITRE II LES SOURCES DES OBLIGATIONS.-

Le Code civil énumère et définit les sources d’obligations. Bien que la présence de telles dispositions au sein du Code civil soit une nouveauté, l’ordonnance se contente de reprendre les catégories et définitions induites par la doctrine de l’étude du droit positif. La distinction classique entre les actes juridiques et les faits juridiques est ainsi consacrée. Les actes juridiques se subdivisent en deux sous-catégories : les conventions et les actes juridiques unilatéraux. Certains auteurs distinguaient un troisième type d’acte juridique, l’acte juridique collectif, celui qui n’a pas été consacré par l’ordonnance (groupe d´intêrets collectifs, société…)

Art. 1100.- Les obligations naissent d’actes juridiques, de faits juridiques ou de l’autorité seule de la loi. Elles peuvent naître de l’exécution volontaire ou de la promesse d’exécution d’un devoir de conscience envers autrui.

Art. 1100-1.- Les actes juridiques sont des manifestations de volonté destinées à produire des effets de droit. Ils peuvent être conventionnels ou unilatéraux. Ils obéissent, en tant que de raison, pour leur validité et leurs effets, aux règles qui gouvernent les contrats.

Art. 1100-2.- Les faits juridiques sont des agissements ou des événements auxquels la loi attache des effets de droit. (Exemple: la possession, obligation de réparer, faits naturels comme la naissance, la mort…, faits de force majeur : cataclysme) Les obligations qui naissent d’un fait juridique sont régies, selon le cas, par la responsabilité extracontractuelle ou par d´ autres sources d’obligations.

TITRE II.- LES CONTRATS.

Chapitre I.- LA FORMATION DES CONTRATS.

Section I.- Les principes.

Le contrat constitue un instrument fondamental d'organisation de la vie économique et sociale. Il crée un lien de droit voulu entre deux personnes, en vertu duquel l'une peut exiger de l'autre une prestation ou une abstention. Aussi, dès qu'il existe un accord conclu entre deux individus, il est possible de considérer que le contrat est formé. Cependant, des règles juridiques existent afin qu'aucun déséquilibre ne se crée entre les parties. C'est pourquoi le contrat obéit à des règles de forme. Section II.- - Trois principes. L'article 1102 pose le principe de la liberté contractuelle (§1), l'article 1103 celui de la force obligatoire du contrat (§2), l'article 1104 celui de la bonne foi (§3).

§1 : La liberté contractuelle- La liberté contractuelle est un principe fort, reconnu par le Conseil constitutionnel. L'article 1102 en précise les éléments et les limites.

A - Les éléments de la liberté contractuelle

- Liberté de contracter ou de ne pas contracter. La liberté contractuelle a un aspect positif (on est libre de contracter) et un aspect négatif (on est libre de ne pas contracter). Toutefois, il existe des atténuations comme le montrent par exemple les nombreuses hypothèses de contrats imposés : assurance automobile, assurances professionnelles... - Liberté de choisir son contractant. On est en principe libre de choisir son contractant et, par conséquent, libre de ne pas contracter avec d'autres. Cette liberté est cependant atténuée par les nombreuses hypothèses.- Liberté de déterminer le contenu et la forme du contrat. Les parties sont libres du contenu de leur contrat. Là aussi les limites sont innombrables comme le montrent le droit de la consommation ou le droit du travail.

B - Les limites à la liberté contractuelle

- Les lois et l'ordre public. L'article 1102 al. 2 pose que la liberté contractuelle ne vaut que « dans les limites fixées par la loi », tandis que l'article 1102 al. 2 dispose que « la liberté contractuelle ne permet pas de déroger aux règles qui intéressent l'ordre public ». La référence à la loi et à l'ordre public est directement inspirée de l'article 6 du Code civil. On remarquera cependant que le texte fait référence aux « règles » qui intéressent l'ordre public, et non plus seulement aux « lois ». C'est donc dire que l'ordonnance confirme l'évolution du droit positif en admettant un ordre public virtuel ou judiciaire.

- Les bonnes mœurs. L'ordonnance passe sous silence les bonnes mœurs. Cette expression a sans doute parue désuète au regard de l'évolution de la société. On peut également penser que la notion d'ordre public est suffisamment accueillante pour englober, si les juges l'estimaient nécessaire, un contrat contraire aux bonnes mœurs qu'ils entendraient sanctionner.

- Les droits et libertés fondamentaux. L'ordonnance reste également silencieuse sur l'atteinte qu'un contrat pourrait porter aux droits et libertés fondamentaux d'un des contractants. Ce silence est étonnant car le contentieux s'est multiplié sur cette question et car le projet d'ordonnance soumis à consultation publique en février 2015 contenait une disposition sur ce thème. L'article 1102 du projet prévoyait en effet que « la liberté contractuelle ne permet pas... de porter atteinte aux droits et libertés fondamentaux reconnus dans un texte applicable aux relations entre personnes privées, à moins que cette atteinte soit indispensable à la protection d'intérêts légitimes et proportionnée au but recherché ».

§2 : La force obligatoire du contrat

- Rehaussement au rang des principes. L'ancien article 1134 al. 1 disposait « les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ». Le nouvel article 1103 dispose désormais que « les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits ». §3 : La bonne foi

- Rehaussement de la bonne foi. L'article 1104 nouveau dispose que « les contrats doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi. Cette disposition est d'ordre public ». Il montre la généralisation de l'exigence de bonne foi puisque l'ancien article 1134 al. 3 se contentait de préciser que les conventions « doivent être exécutées de bonne foi ».

.La nouvelle disposition permet trois remarques :

Quant à la nature de la bonne foi, on peut hésiter entre les qualifications de devoir légal ou d'obligation. La bonne foi joue non seulement dans la formation et l'exécution du contrat, mais également lors de sa négociation, l'ordonnance penche pour la qualification de devoir général. Quant au caractère impératif de la disposition, l'ordonnance est sans appel. Cette disposition est d'ordre public », l'ordonnance empêche toute contractualisation de la bonne foi. Quant à la sanction d'un comportement de mauvaise foi, le texte reste silencieux. Ce silence s'explique sans doute par la volonté de laisser aux juges le soin de retenir la

sanction la plus appropriée, en fonction des circonstances et du domaine dans lequel le comportement contraire à la bonne foi se manifeste Section III.- La validité du contrat.

. La liberté du consentement ; . La capacité juridique de contracter ; . L´objet certain et licite du contrat, qui forme la matière de l'engagement ; . La cause du contrat.

1.- Le consentement :

Le consentement, c'est la volonté de contracter. Il doit être libre et éclairé. Il peut être écrit, cela est même obligatoire pour tout acte dont le montant est supérieur à 1 500 €. En dessous de ce seuil, le consentement peut être uniquement donné à l'oral. Afin que le contrat soit valablement formé, le consentement doit être exempt de vices. Cette théorie, posée dès la conception, en 1804, du Code civil, considère qu'un consentement n'est pas valable quand il a été donné par « erreur, dol ou violence » : L'erreur porte sur la substance du contrat. Si elle avait été connue de l'une des parties, le consentement n'aurait pu se former. Elle est, par nature, involontaire ; Le dol est le plus grave des vices du consentement. C'est une erreur provoquée, qui consiste en une manœuvre frauduleuse. Le dol est donc volontaire et a pour objectif de tromper l'autre partie. Il doit être prouvé ; La violence est, quant à elle, physique ou morale. C'est une pression exercée par l'une des parties afin d'obliger la seconde à contracter. Ainsi, si une personne est séquestrée afin de contracter, alors la violence exercée est de nature physique. 2.- La capacité juridique

La capacité juridique est la possibilité reconnue à un individu de jouir de ses droits et de les exercer. Elle se compose de la capacité de jouissance et de celle d'exercice. Cette dernière ne peut être mise en pratique que si l'individu est majeur (toutefois, il existe certaines exceptions à ce principe : mineurs émancipés, mineurs et majeurs sous protection représentés, assistés et autorisés). Pour le contrat et sa formation, il est nécessaire que la personne soit en possession de sa capacité de jouissance, mais aussi qu'elle ne soit pas déclarée incapable par la loi. Selon les fondements de l'article 1123 du Code civil, « toute personne peut contracter si elle n'en est pas déclarée incapable par la loi ». Ainsi, un mineur peut acheter du pain, ce qui constitue une forme de contrat, mais il ne peut acheter un immeuble.

3.- L'objet du contrat

L'objet du contrat doit être certain, il « forme la matière de l'engagement » (article 1108 du Code civil). C'est ce par quoi l'un des cocontractants s'engage à réaliser, à ne pas faire ou à donner. Quand un individu souhaite acheter un véhicule, alors l'objet du contrat est la vente et non le véhicule.Par conséquent, afin d'être valable, l'objet doit avoir les caractéristiques suivantes : Être déterminé : le bien lié à l'objet du contrat existe ou existera de manière certaine, il peut ainsi être individualisé. Par exemple, dans le cadre de l'achat d'un appartement sur plan, l'objet du contrat est la vente d'un appartement qui est identifié par un numéro de lot ;

Être possible, c'est-à-dire exister dans le commerce ; Être licite et par conséquent, ne pas relever d'une activité interdite par la loi (ex : la vente de stupéfiants).

4.- La cause du contrat

La cause représente les raisons qui poussent à contracter. Mais elle représente aussi la contrepartie qui existe dans tout accord de volonté (ex. : la rémunération du salarié dans le cadre du contrat de travail). Bien évidemment, celle-ci doit cadrer avec le droit, elle ne peut être illicite, amorale ou contraire à l'ordre public.

Section IV.- Clauses particulières.

1.- Les clauses particulières dans un contrat.

Par principe, les clauses permettent d'adapter le contrat à la volonté des parties. C'est pourquoi, dès l'instant qu'elles ne sont pas contraires au droit ou qualifiées d'abusives, elles peuvent être insérées au contrat. Certaines d'entre elles y apparaissent régulièrement. Ainsi, dans un avant-contrat de vente immobilière, on retrouvera une clause pénale. Cette clause a pour effet de sanctionner financièrement la partie « acquéreur » si jamais elle ne réalise pas son obligation pour une raison autre que celles prévues dans le contrat (arrhes pénitentielles). Exemples : L´Acompte est en fait un premier versement à valoir sur un achat. Il n’y a aucune possibilité de dédit et le client peut être condamné à payer des dommages-intérêts s’il se rétracte. L’entreprise elle-même ne peut se raviser, même en remboursant l’acompte au client et pourrait être contrainte elle aussi à verser des dommages-intérêts (c´est un contrat firme) Les arrhes constituent un moyen de dédit. Lorsque des arrhes sont versées au moment de la commande, ni l’entreprise, ni son client ne se sont engagés irrévocablement. L’article 1590 du Code civil prévoit en effet que: Si c’est le client qui se dédit (annulation de commande ou désistement), il perdra les arrhes versées, mais il ne peut être contraint à l’exécution du contrat ; Si c’est l’entreprise qui se dédit (refus de livrer ou d’exécuter la prestation commandée), elle devra restituer le double des arrhes reçues à la commande ( c´est un avant-contrat) L’avoir correspond à la valeur d’une marchandise restituée. Il permet un achat ultérieur. Si l’entreprise est dans son tort (marchandise défectueuse, livraison hors délai, etc.), le client n’est pas obligé d’accepter cet arrangement. Si l’acheteur revient sur sa décision, le vendeur peut, à titre commercial, lui accorder un avoir. (C´est un contrat que l´on peut annuler en recevant sa valeur ou changer l´objet si les parties sont d´accord).

Clauses pénales importantes :

La clause résolutoire, quant à elle, permet de mettre un terme à un contrat dont l'obligation ne serait pas réalisée au moment déterminé. Enfin, une condition suspensive offre la possibilité à l'une des parties de ne pas réaliser son obligation pour une raison citée au contrat. Ainsi, dans une promesse de vente, l'acquéreur peut subordonner l'achat d'un terrain à l'obtention d'un permis de construire.

LA CONDITION SUSPENSIVE : (art. 1304) Tant que la condition n’est pas réalisée, les obligations contractées n’ont qu’un caractère éventuel. C’est le cas de la condition liée à l’obtention d’un prêt par l’acquéreur. Lorsque que la condition est réalisée, c’est-à-dire que l’acquéreur a obtenu son prêt, l’obligation contractée devient pure et simple et l’avant-contrat est applicable dans toutes ses dispositions. Lorsqu’au contraire la condition n’est pas réalisée à cause d’un refus d’octroi de prêt, l’avant-contrat est considéré comme n’ayant jamais existé et les parties se trouvent dégagées de toute obligation. Aucune commission ne peut être touchée par l’agent immobilier dans ce cas.«  Article 1304L'obligation est conditionnelle lorsqu'elle dépend d'un événement futur et incertain.La condition est suspensive lorsque son accomplissement rend l'obligation pure et simpleElle est résolutoire lorsque son accomplissement entraîne l'anéantissement de l'obligation. »

LA CONDITION RESOLUTOIRE : (Cod Civil 1125)

La condition résolutoire constitue un évènement futur et incertain qui affecte rétroactivement les conventions passées. Ainsi l’avant-contrat est applicable dès le jour de la signature. La survenance de l’évènement efface rétroactivement les obligations contractées et remet les parties dans l’état antérieur comme s’il n’y avait pas eu d’avant-contrat, ni de transfert de propriété. Exemple : S´il existe un délai dans le payement du prix de l´achat d´un terrain, et les parties ont établi une condition résolutoire si le versement du prix ne se fait pas au moment déterminé. Si la condition survient le bien immobilier est restitué et le prix remboursé ou un pourcentage.Article 1225La clause résolutoire précise les engagements dont l'inexécution entraînera la résolution du contrat.La résolution est subordonnée à une mise en demeure infructueuse, s'il n'a pas été convenu que celle- ci résulterait du seul fait de l'inexécution. La mise en demeure ne produit effet que si elle mentionne expressément la clause résolutoire.

2.- Les sanctions en cas d'inobservation des conditions de formation du contrat.

Le droit considère que si les conditions de validité du contrat ne sont pas toutes remplies, alors celui-ci est frappé de nullité. Cependant, la sanction n'est pas automatique. Pour être reconnue, la nullité du contrat doit émaner d'une décision de justice. Les conséquences d'une telle décision sont variées, car la nullité peut être relative ou absolue. Si elle est relative, c'est qu'une règle protégeant l'intérêt privé a été transgressée (ex. : vice du consentement) .La victime peut renoncer à agir en nullité, on dit ainsi que la nullité relative est susceptible de confirmation (article 1183). Cette confirmation doit faire disparaître le vice affectant l’acte, le validant ainsi de manière rétroactive. Il faut également que la volonté de renoncer à l’action en nullité soit réelle et certaine.

“ Article 1183,- La confirmation est l'acte par lequel celui qui pourrait se prévaloir de la nullité y renonce. Cet acte mentionne l'objet de l'obligation et le vice affectant le contrat. La confirmation ne peut intervenir qu'après la conclusion du contrat. L'exécution volontaire du contrat, en connaissance de la cause de nullité, vaut confirmation. En cas de violence, la confirmation ne peut intervenir qu'après que la violence a cessé. La confirmation emporte renonciation aux moyens et exceptions qui pouvaient être opposés, sans préjudice néanmoins des droits des tiers. »

En revanche, l'absence de consentement libre, un objet improbable, une cause immorale entraînent une nullité absolue. Celle-ci sanctionne la transgression d'une règle protectrice de l'intérêt général. Le délai d'action en nullité relative ou absolue est de cinq ans. La nullité judiciaire ou conventionnelle. L'article 1178 dispose que « un contrat qui ne remplit pas les conditions requises pour sa validité est nul ». Avant la réforme de 2016, seul le juge pouvait prononcer la nullité ; l'annulation n'était donc jamais acquise de droit et une action en justice était nécessaire pour la faire prononcer. L'ancien article 1117 du Code civil rappelait à cet effet que « la convention contractée par erreur, violence ou dol, n'est point nulle de plein droit ; elle donne seulement lieu à action en nullité ou en rescision... ». Le nouvel article 1178 prévoit désormais que « la nullité doit être prononcée par le juge, à moins que les parties ne la constatent d'un commun accord ». La nullité conventionnelle est donc désormais admise : elle supposera cependant que les parties se mettent d'accord sur les restitutions réciproques. La nullité conventionnelle se distingue ainsi de la révocation par consentement mutuel, prévue par l'article 1193.

En dehors de cette hypothèse, la nullité devra être « prononcée par le juge ». L'action en nullité repose sur la distinction entre nullité absolue et nullité relative (§1). En revanche, une fois la nullité prononcée par le juge, qu'elle soit relative ou absolue, elle produira les mêmes effets (§2).

§2 : La distinction entre nullités absolue et relative

La nullité consiste ainsi en un rétablissement de la légalité que le contrat contrarie. C'est alors la nature de la loi contrariée qui détermine la nullité absolue ou relative : si la loi protège l'intérêt général, c'est une nullité absolue ; si elle protège un intérêt particulier, c'est une nullité relative - Apport de l'ordonnance. L'ordonnance consacre la théorie moderne des nullités puisque l'article 1178 dispose que « la nullité est absolue lorsque la règle violée a pour objet la sauvegarde de l'intérêt général. Elle est relative lorsque la règle violée a pour seul intérêt la sauvegarde d'un intérêt privé ». À côté du formalisme exigé pour la validité des contrats, il faut aussi tenir compte de la validité des clauses, qui ne doivent pas être considérées comme abusives. Celles-ci sont définies par l'article L. 132-1 du Code de la consommation, qui considère que toute clause qui crée un déséquilibre significatif dans un contrat doit être considérée comme abusive. Ceci est valable quel que soit le support du contrat : bon de commande, facture… et seulement à l'égard des non-professionnels.Dans les clauses abusives, il convient de distinguer celles qui sont présumées abusives de celles considérées comme abusives à l´égard à la gravité des atteintes portées. Ces deux catégories sont listées dans le Code de la consommation,

elles ont pour conséquence juridique d'être réputées non écrites. Ainsi, le contrat reste applicable, quand cela est possible, sans prendre en considération les clauses incriminées.

Chapitre II.- Les différents types de contrats

Section I.- Les familles de contrat. Les articles 1105 à 1111-1 égrènent les différents types de contrats. Toutes les distinctions n'ont pas la même importance.

§1 : Les contrats nommés et innommés

- La distinction. L'article 1105 porte la distinction qui était déjà évoquée à l'ancien article 1107. Le contrat nommé est celui qui est réglementé par le Code civil et se trouve donc soumis à des règles propres : La vente, l'échange, le dépôt, le prêt, le mandat, le louage, la promotion immobilière, la société.Le contrat innommé est celui qui n'est soumis à aucune réglementation, autre que la théorie générale des contrats. La difficulté est qu'il faut alors le qualifier pour savoir quel régime juridique on lui appliquera : la qualification peut être mixte, unitaire, ou absente. - L'agencement des règles générales et spéciales. Au-delà de la distinction, l'article 1105 al. 3 contient une règle essentielle : « les règles générales s'appliquent sous réserve des règles particulières » Il arrive parfois que les contrats innomés combinent plusieurs types de contrat nommés. C'est le cas de figure du leasing ou crédit bail, qui combine à la fois le contrat de bail et le contrat de location. Ce qui rend les choses complexes. Une autre classification est la suivante

- contrats translatifs

- contrats de jouissance (appartements touristiques)

- contrats de crédit

- contrats de services diverses prestations de services qui ne sont pas exécutées sous l'empire d'un contrat de travail. Il peut être utilisé dans des domaines très variés (construction d'un immeuble, fournitures d'opérations informatisées, restauration collective d'entreprise, etc.).

- contrats d'organisation "instituent une coopération entre deux parties ; lesquels mettent en commun des choses qui jusque-là leur étaient propres et les emploient à une activité conjointe".

- contrats de procédure (qui sont constaté par un juge)

Le Rapport fait au Président de la République explique que « Le troisième alinéa introduit en revanche une nouveauté importante et attendue des praticiens, puisqu'il rappelle que les règles générales s'appliquent sous réserve des règles spéciales. C'est donc dire que les dispositions générales ont une vocation résiduelle, subsidiaire. Elles ne s'appliqueront qu'à défaut de règles spéciales. Exemple :, le nouvel article 1119,

alinéa 2 du Code civil prévoit que, en cas de discordance entre les conditions générales invoquées par l'une et l'autre des parties, les clauses incompatibles sont sans effet. Ce texte s'annonce difficile à concilier avec l'article L. 441-6 du code de commerce qui, disposant que les conditions générales de vente sont le socle de la négociation commerciale, impose un accord, et non la simple édiction de conditions générales d'achat contraires, pour y déroger. En revanche, d'autres dispositions annoncent de sérieuses difficultés. C'est notamment le cas du nouvel article 1171 qui dispose que « dans le contrat d'adhésion, toute clause qui crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat est réputée non écrite ». Comment se texte se conciliera-t-il avec l'article L. 132-1 du Code de la consommation et avec l'article L. 442-6-I-5° du Code de commerce ? Le recours à l'adage specilia generalibus derogant n'est ici d'aucune aide puisque l'article 1171 ne pose pas une règle générale mais édicte au contraire une règle spéciale, propre aux contrats d'adhésion.

§2 : Les contrats synallagmatiques et unilatéraux

- Exposé de la distinction. La distinction est posée à l'article 1106 du Code civil. Lorsqu'il est synallagmatique, le contrat fait naître des obligations à la charge des deux parties : la vente, le bail... sont des contrats synallagmatiques. Lorsqu'il est unilatéral, le contrat, quoique né de la rencontre de deux volontés, ne fait naître d'obligations qu'à la charge d'une partie : la donation, les contrats de restitution comme le prêt ou le dépôt, la promesse unilatérale de vente dans laquelle seul le promettant est tenu d'une obligation, le bénéficiaire restant libre... sont des contrats unilatéraux.

- Intérêt de la distinction. L'intérêt de la distinction est double : quant à la preuve, l'acte sous seing privé constatant un contrat synallagmatique doit être rédigé en double original (C. civ., art. 1375) alors que celui constatant un contrat unilatéral (du moins un contrat par lequel une personne s'engage à payer une somme d'argent) est soumis à l'article 1376). Quant aux effets, parce que le contrat synallagmatique donne naissance à des obligations interdépendantes, il est soumis à des règles particulières comme la résolution pour inexécution, l'exception d'inexécution et à la théorie des risques (cf. infra). « Article 1376L'acte sous signature privée par lequel une seule partie s'engage envers une autre à lui payer une somme d'argent ou à lui livrer un bien fongible ne fait preuve que s'il comporte la signature de celui qui souscrit cet engagement ainsi que la mention, écrite par lui-même, de la somme ou de la quantité en toutes lettres et en chiffres. En cas de différence, l'acte sous signature privée vaut preuve pour la somme écrite en toutes lettres. Article 1377L'acte sous signature privée n'acquiert date certaine à l'égard des tiers que du jour où il a été enregistré, du jour de la mort d'un signataire, ou du jour où sa substance est constatée dans un acte authentique. » - Relativité de la distinction. Toutefois, la doctrine doute parfois de la pertinence de la distinction car la pratique aux contrats synallagmatiques imparfaits : initialement le contrat était unilatéral, mais en cours d'exécution, une obligation naît à la charge du contractant qui, normalement, n'aurait pas eu à en supporter. Par exemple, le dépositaire expose des frais pour la conservation de la chose donc le déposant est tenu d'une dette. La doctrine considère que pour être réciproques, les obligations ne sont pas

interdépendantes et donc ne sont pas susceptibles d'entraîner la résolution pour inexécution

§3 : Les contrats à titre gratuit et à titre onéreux

- Exposé de la distinction. La distinction est posée à l'article 1107 du Code civil. Alors que le contrat à titre onéreux suppose une contrepartie, le contrat à titre gratuit procure à une partie un avantage sans aucune contrepartie : la vente, le bail sont des contrats à titre onéreux, le change ou permutation; la donation, le bail sans loyer, le cautionnement sont des actes à titre gratuit. Toutefois, la contrepartie peut être constituée autrement que d'une somme d'argent (échange,...).

- Relativité de la distinction. Toutefois, la distinction entre contrat onéreux et contrat de bienfaisance s'obscurcit car, bien souvent un acte, apparemment gratuit, s'insère dans un ensemble plus vaste qui fait apparaître son caractère onéreux. §4 : Les contrats commutatif et aléatoire

- Exposé de la distinction. Posée à l'article 1108 du Code civil, la distinction est la suivante : le contrat est commutatif lorsque les parties ont définitivement fixé, au moment de la conclusion du contrat, les prestations mises à la charge de l'une et de l'autre. Il existe alors un rapport que les parties ont estimé être d'équivalence entre les prestations qu'elles assument. Le contrat est au contraire aléatoire lorsque la prestation de l'un des contractants dépend, dans son existence (contrat d'assurance) ou dans son étendue (vente avec rente viagère), d'un événement incertain. Chacun des contractants court alors une chance de gain et un risque de perte.- Intérêt de la distinction. L'intérêt de la distinction est lié au fait que le prix est fixé sans que l'on sache s'il correspondra ou non à la contrepartie. Par exemple, une personne s'assure (et paie) pour se garantir des conséquences d'un accident automobile... qu'elle n'aura pas ! Cette absence d'équilibre, liée à la nature aléatoire du contrat, fait que les contrats aléatoires ne peuvent être rescindés pour lésion.

§5 : Contrats consensuels, solennels et réels

- Exposé de la distinction. Le principe est que le contrat se forme par la seule rencontre des volontés. Il est donc consensuel. Toutefois, la rencontre des volontés sera parfois insuffisante pour que le contrat accède à la vie juridique : son existence pourra être suspendue à une formalité (acte authentique pour les donations ou les contrats de mariage ; rédaction d'un écrit pour certains baux) ou à la remise d'une chose. Les premiers contrats sont solennels, les seconds réels. On retrouvera ces distinctions dans l'étude des conditions de forme.

- Relativité de la distinction. La distinction de l'article 1109 est très théorique. En pratique, elle est de moindre portée. «  Article 1109Le contrat est consensuel lorsqu'il se forme par le seul échange des consentements quel qu'en soit le mode d'expression.Le contrat est solennel lorsque sa validité est subordonnée à des formes déterminées par la loi.Le contrat est réel lorsque sa formation est subordonnée à la remise d'une chose. »

D'une part, la catégorie des contrats réels ne cesse de se rétrécir : le gage mobilier est devenu un contrat solennel depuis l'ordonnance n° 2006-346 du 23 mars 2006 (C. civ., art. 2336) ; les prêts d'argent des articles L. 311-11 et suivants du code de la consommation et les crédits immobiliers des articles L. 312-7 et suivants du même code ne sont plus des contrats réels Le mouvement est tel qu'on évoque un phénomène de « déréalisation » des contrats et que certains auteurs doutent de la nécessité de consacrer cette catégorie moribonde.

D'autre part, la jurisprudence fait preuve d'une telle souplesse dans l'appréciation de la forme de certains contrats solennels qu'elle en vient presque à les « retrécir ».

§6 : Contrats de gré à gré et d'adhésion

L'article 1110 pose une distinction entre les contrats de gré à gré et les contrats d'adhésion. Dans les contrats de gré à gré, il y a une négociation réelle entre les deux contractants. De tels contrats sont finalement assez rares et, dans la majorité des cas, c'est un contractant qui fixe, seul, le contenu du contrat (Air France, un contrat d'assurance, de téléphonie mobile d'accès à internet, de télévision numérique...). C'est alors un contrat auquel le contractant se contente d'adhérer. Si le contrat de gré à gré est issu de la libre négociation, le contrat d'adhésion permet à celui qui rédige le contrat de dicter sa volonté à son partenaire. Loin d'être un outil de liberté, le contrat peut devenir un outil de sujétion. Le contrat d'adhésion repose selon l'ordonnance sur trois critères : l'existence de conditions générales, leur détermination à l'avance par l'une des parties, leur soustraction à la négociation.L'existence de conditions générales est imposée par le texte. Par des organismes professionnels comme c'est souvent en matière bancaire ou assurantielle. Par un notaire comme c'est par exemple le cas dans les VEFA (vente en l'état futur d'achèvement). Il y a bien peu de marge de négociation pour l'acheteur et pourtant le contrat n'est pas rédigé par le promoteur, mais par le notaire. Les conditions générales doivent enfin être « soustraites à la négociation ». Ce troisième critère pourra également se révéler d'un maniement difficile: ce qui compte n'est pas tant que le contrat n'ait pas été négocié mais que les conditions générales du contrat aient été soustraites à la négociation. En d'autres termes, si le contractant propose les conditions générales à la négociation et que le cocontractant ne négocie pas, il n'y a pas contrat d'adhésion.

§7 : Contrats cadres et contrats d'adhésion

La pratique des contrats-cadre est née dans le droit de la distribution : plutôt que de conclure plusieurs fois un même type de contrats, un fournisseur (par exemple une société pétrolière) et son distributeur (par exemple une station-service) conviennent d'un cadre contractuel qui va fixer toutes les modalités de l'exécution de leur accord : modalités des commandes, des livraisons, des garanties, des responsabilités... C'est le contrat cadre. Lorsque le distributeur souhaitera être livré, il lui suffira de passer commande, toutes les modalités étant déjà arrêtées, c'est le contrat d'application.

Le contrat cadre – accord par lequel les parties conviennent des caractéristiques générales de leurs relations futures – et des contrats d'application – accords qui en précisent les modalités d'exécution – est volontairement large- Intérêts de la distinction. La définition n'est pas seulement pédagogique et se trouve dotée de conséquences pratiques. L'article 1164, alinéa 1er dispose, en effet, que « dans les contrats cadre, il peut être convenu que le prix sera fixé unilatéralement par l'une des parties... ».

§8 : Contrats à exécution instantanée et successive

- Il existe deux critères concurrents pour distinguer les contrats à exécution instantanée et les contrats à exécution successive.

Le premier est un critère temporel qui s'intéresse à la durée de l'exécution selon qu'elle se réalise en un (vente) ou selon qu'elle nécessite une certaine durée(contrat de travail.

Le second est un critère qualitatif qui oppose les contrats s'exécutant en une prestation unique et ceux qui supposent plusieurs prestations échelonnées. Ce critère suppose d'examiner l'utilité qu'attendait le créancier du contrat : espère-t-il une prestation unique ou attend-il des prestations échelonnées, qui se renouvellent par des tranches satisfaisantes.

L'ordonnance tranche nettement en faveur du second critère par l'article 1111-1.

On doit distinguez que les contrats à exécution instantanée étaient résolus, alors que les contrats à exécution successive étaient résiliés. L'ordonnance se garde de tout dogmatisme en la matière et laisse une large marge d'appréciation au juge (C. civ., art. 1229).

Chapitre IV.- L'effet relatif du contrat

- C. civ., art. 1199 et 1200 . Le rayonnement des actes de droit privé est guidé par le principe de l'effet relatif et de l'opposabilité du contrat. Ces principes sont exposés aux articles 1199 et 1200 mais sont assortis d'exceptions.

Section I.-: Les principes de l'effet relatif et de l'opposabilité

- C. civ., art. 1199 et 1200 . Le rayonnement des actes de droit privé est guidé par le principe de l'effet relatif et de l'opposabilité du contrat. Ces principes sont exposés aux articles 1199 et 1200 mais sont assortis d'exceptions.

Les principes de l'effet relatif et de l'opposabilité

A - L'effet relatif

- C. civ., art. 1199. L'article 1199 du Code civil dispose : « le contrat ne crée d'obligations qu'entre les parties; les tiers ne peuvent ni demander l'exécution du contrat, ni se voir contraint de l'exécuter... ».

B - L'opposabilité

- Le contrat est un fait social opposable. Il ne faut alors pas confondre effet relatif et opposabilité. Si les tiers ne peuvent être liés par les effets du contrat, le contrat est un fait social qui s'impose à eux. L'article 1200 précise ainsi que « les tiers doivent respecter la situation juridique créée par le contrat ». Les articles 1200 alinéa 2 et 1201 fournissent des illustrations de cette opposabilité du contrat. En réalité, il faut distinguer selon que les tiers se voient opposés à l'existence du contrat (1) ou selon qu'ils invoquer l'existence du contrat (2). « Article 1200 Les tiers doivent respecter la situation juridique créée par le contrat. Ils peuvent s'en prévaloir notamment pour apporter la preuve d'un fait. » « Article 1201

Lorsque les parties ont conclu un contrat apparent qui dissimule un contrat occulte, ce dernier, appelé aussi contre-lettre, produit effet entre les parties. Il n'est pas opposable aux tiers, qui peuvent néanmoins s'en prévaloir. »

1. L'opposabilité du contrat aux tiers - Le contrat est un fait qui peut être opposé aux tiers. En ce cas- là, ils n'y sont pas obligés (l'effet relatif est sauf) mais ils doivent respecter le contrat. On en citera deux illustrations, selon que le contrat donne naissance à un droit réel ou personnel.

- Droit réel. Lorsque le contrat transfère la propriété d'un bien, la jurisprudence retient une opposabilité particulièrement forte car « le droit de propriété serait perpétuellement ébranlé si les contrats destinés à l'établir n'avaient de valeur qu'à l'égard des parties contractantes »

- Droit personnel. Mais lorsque le contrat ne donne naissance qu'à des droits personnels, l'opposabilité aux tiers est encore présente : le tiers engage dès lors sa responsabilité s'il se rend complice d'une inexécution par une partie. Par exemple, un acquéreur qui contracte directement avec un vendeur en sachant très bien qu'un agent immobilier sera ainsi privé de sa commission engage sa responsabilité délictuelle à son égard.

2. L'opposabilité du contrat par les tiers - Les tiers peuvent parfois invoquer le contrat. Ici encore, il ne faut pas en déduire qu'ils sont créanciers d'une obligation née du contrat ; ils demandent simplement à ce que le fait social que constitue le contrat soit pris en compte. Ils peuvent le faire pour prouver un fait (a) ; pour mettre à jour une dissimulation (b) ; pour rechercher une responsabilité (c).

a) L'opposabilité du contrat par les tiers pour prouver un fait

Code civ., art. 1200 al. 2. L'article 1200 al. 2 disposent que « les tiers peuvent s'en prévaloir (de la situation juridique créée par le contrat) notamment pour apporter la preuve d'un fait ».

b) L'opposabilité du contrat par les tiers en cas de simulation

La simulation est un mensonge concerté entre les parties qui dissimulent le contrat qui renferme leur volonté derrière un contrat apparent. Il y a donc deux conventions : l'une ostensible, mais mensongère, l'autre cachée, mais sincère.

c.- L'opposabilité du contrat par les tiers en cas de responsabilité

- Responsabilité. Lorsqu'un tiers subit un préjudice du fait de la mauvaise exécution du contrat, il peut rechercher la responsabilité délictuelle. Exemple : Un entrepreneur s'engage à faire des travaux en faveur d'un copropriétaire et de son locataire. Il cause alors un dommage à un autre copropriétaire et à son autre locataire. Ces derniers assignent l'entrepreneur en considérant que l'inexécution de son obligation de résultat constitue à leur égard une faute délictuelle. La Cour casse l'arrêt d'appel qui avait droit à cette demande : « en statuant ainsi par des motifs qui, tirés du seul manquement à une obligation contractuelle de résultat de livrer un ouvrage conforme et exempt de vice, sont impropres à caractériser une faute délictuelle », la cour d'appel a violé l'article 1382.

« Article 1382Les présomptions qui ne sont pas établies par la loi, sont laissées à l'appréciation du juge, qui ne doit les admettre que si elles sont graves, précises et concordantes, et dans les cas seulement où la loi admet la preuve par tout moyen. »

. §2 : Les exceptions au principe de l'effet relatif

L'article 1199 réserve expressément les exceptions prévues à la présente section et au chapitre 3 du titre 4. Ce sont des exceptions traditionnelles (A). Il en est aussi de nouvelles (B).

A - Les exceptions traditionnelles

1. L'action oblique .

- L'article 1341-1 dispose que « lorsque la carence du débiteur dans l'exercice de ses droits et actions à caractère patrimonial compromet les droits de son créancier, celui-ci peut les exercer pour le compte de son débiteur, à l'exception de ceux qui sont exclusivement attachés à sa personne

- On entend souvent parler d’action oblique et d’action paulienne mais quelles sont les différences entre ces deux types d’actions ?

L’action oblique et l’action paulienne permettent de protéger le droit de gage général des créanciers. Toutefois, ces deux procédés sont différents :

– L’action oblique a vocation à lutter contre la simple inertie du débiteur ; alors que– L’action paulienne a pour objectif de sanctionner la fraude commise par le débiteur.

A, B et C. Si par exemple C doit de l'argent à B, et que B doit de l'argent à A sans prendre toutes les mesures nécessaires pour obtenir le remboursement de sa créance à l'encontre de C, alors A disposera sous certaines conditions de l'action oblique afin d'intervenir

directement auprès de C. L'action oblique nécessite cependant une créance qui soit certaine, liquide et exigible. Par ailleurs, le débiteur doit être insolvable et doit faire preuve d'inertie.Certaine car il ne doit pas être possible de contester son fondement. Liquide, car exprimée en devises (dinero). Exigible car sa date d’échéance doit être dépassée.

2.- L´action Paulienne.

Elle est prévue par l’article 1341-2 du Code civil (Créé par Ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 – art. 3) :

Le créancier peut aussi agir en son nom personnel pour faire déclarer inopposables à son égard les actes faits par son débiteur en fraude de ses droits, à charge d’établir, s’il s’agit d’un acte à titre onéreux, que le tiers cocontractant avait connaissance de la fraude.En comparaison avec l’ancienne version (article 1167 ancien du Code civil) :

Ils peuvent aussi, en leur nom personnel, attaquer les actes faits par leur débiteur en fraude de leurs droits.L’action paulienne n’a pas pour effet de réintégrer dans le patrimoine du débiteur les biens frauduleusement soustraits par ce dernier (Cass, Civ 1ère, 30 mai 2006, n° 02-13.495).

En effet, le créancier bénéficie, contre le tiers acquéreur ou le tiers sous-acquéreur, d’une action en restitution qui lui permet de saisir le bien pour se faire payer postérieurement sur sa valeur dans la limite de sa créance (c’est un peu un équivalent à un droit de suite).L’obligation de restitution ne se fera que dans la limite de ce qui est nécessaire à la restauration des droits du créancier.

– La preuve de la connaissance de la fraude par le cocontractant du débiteur pour les actes à titre onéreux est nécessaire donc tel n’est pas le cas pour les actes à titre gratuit.

La sanction étant l’inopposabilité à l’égard du créancier qui a agi, cela signifie que l’acte frauduleux demeure néanmoins efficace à l’égard de tous les autres créanciers du débiteur qui sont restés passifs. Donc le bénéfice de l’action paulienne est individuel.

Exemple 1. Le débiteur dispose dans son patrimoine d’un bien, et il donne ce bien à un proche, sans contrepartie. Si les conditions de la fraude paulienne, le créancier peut exiger que cette opération lui soit inopposable. [Il s’agissait d’un appauvrissement quantitatif volontaire].

Mais il peut y avoir un autre type d’appauvrissement : l’appauvrissement qualitatif. Le débiteur possède p. ex. un appartement, qu’il vend (à prix normal) à un tiers. la difficulté pour le créancier c’est que le créancier avait à l’origine un bien assez facilement saisissable, or ce bien est remplacé par une somme d’argent, plus facilement dissimulable. Si les conditions de la fraude paulienne sont remplies, le créancier peut déclarer que cette vente immobilière lui soit déclarée inopposable. (le cas des hypothèques)

3. L'action directe

- Description. L'action directe désigne le mécanisme mis en place par le législateur pour permettre à un créancier de réclamer le paiement qui lui est dû à une autre personne que son débiteur immédiat. Le créancier se paye ainsi sur la somme que devait le tiers à son débiteur ; il échappe par là au concours des autres créanciers qui ne peuvent appréhender la somme en question. Il faut distinguer évidemment distinguer entre les actions directes en paiement (qui nous intéressent) et les actions directes en responsabilité (cf. infra sur les chaînes de contrats et l'action nécessairement contractuelle).

- Diversité. Même les actions directes en paiement restent très variées, de sorte que l'article 1341-3 n'a pu que les évoquer : « dans les cas déterminés par la loi, le créancier peut agir directement en paiement de sa créance contre le débiteur ». Les actions directes restent en effet très variées et ont été créées par le législateur sans référence à un schéma unique. Les plus connues sont l'action directe du bailleur contre le sous-locataire ,l'action de la victime contre l'assureur du responsable l'action du sous-traitant contre le maître de l'ouvrage ….En dépit de cette diversité, on peut cependant répertorier les actions directes en deux catégories.

4. Le porte-fort

- Présentation. L'article 1203 du Code civil rappelle le principe de l'impossibilité de s'engager pour autrui : « on ne peut s'engager en son nom propre que pour soi-même ». Ainsi, Pierre ne peut promettre que Paul vendra sa maison. Paul demeure libre et ne se voit assujetti à aucune obligation.

5. La stipulation pour autrui

- Présentation et évolution. La stipulation pour autrui est le mécanisme par lequel une personne, le stipulant, obtient d'une autre personne, le promettant, qu'elle donnera ou fera quelque chose au profit d'un tiers, le bénéficiaire. (article 1205 Cod. Civ ).Le bénéficiaire peut être une personne future mais doit être suffisamment désigné pour pouvoir l'identifier au moment de l'exécution de la promesse. Issu d'une longue tradition historique, l'ancien article 1121 du Code civil avait une vision très restrictive de la stipulation pour autrui. Il disposait qu'on peut stipuler au profit d'autrui lorsque la stipulation est la condition d'une donation qu'on fait à un autre (je te donne mon château à condition que tu nourrisses mes enfants) ou lorsque elle était la condition d'une stipulation que l'on faisait pour soi-même (le vendeur stipule qu'une partie du prix sera versée à X).

- Dans les rapports entre le stipulant et le promettant : si le promettant n'exécute pas la stipulation, le stipulant peut agir en résolution du contrat ou le contraindre à exécuter (C. civ., art. 1209). Ce sont les sanctions classiques de l'inexécution contractuelle (cf. infra) qui s'appliquent ici.

La " stipulation pour autrui " dont il est question à l'article 1205 du Code civil , est la convention par laquelle il est convenu entre les parties comparantes à l'acte que c'est une tierce personne et qui n'en est pas le signataire, qui bénéficiera des avantages du contrat. Dès son acceptation, qui est le plus souvent tacite, le tiers disposent d'une action directe contre le promettant pour le contraindre à exécuter son obligation. Le contrat d'assurance, la convention conclue par une agence de voyage au bénéfice d'un client sont des stipulations pour autrui, même si dans le second cas il s'agissait d'une stipulation.

B - Les exceptions nouvelles : les groupes de contrats

- La complexité des contrats a donné naissance à une nouvelle figure : ainsi, le fabricant vend un produit à un grossiste, qui le revend à un distributeur, qui le revend à un consommateur. De la même façon, le contrat d'entreprise par lequel un peintre étend de la peinture sur un mur fait suite à un contrat de vente par lequel il a acheté la peinture chez un distributeur qui, lui-même, l'avait acquise auprès de la société fabricante. Quelle influence peut jouer cette agrégation contractuelle? La jurisprudence est, là encore, tourbillonnante. Il faut distinguer entre différents groupes de contrats selon qu'ils soient (1) ou non (2) translatifs de propriété.

1. Les chaînes de contrats translatives de propriété

- Il est ici question des successions de contrats translatifs de propriété (succession de ventes par exemple). La question est de savoir si le maillon final de la chaîne peut intenter une action contre les maillons précédents (du fabricant en passant par les différents vendeurs intermédiaires) de plus, si on admet qu'il le peut, il faut s'interroger sur la nature, délictuelle ou contractuelle, de l'action, ainsi que sur son régime. Traditionnellement, on enseignait que le sous-acquéreur pouvait intenter une action contre le fabriquant mais cette action était une action en responsabilité délictuelle. Le sous-acquéreur devait donc prouver une faute du fabricant, ce qui n'était pas toujours facile. Pour faciliter sa situation, la jurisprudence a admis une action contractuelle en deux hypothèses. On en verra la justification et les avantages que cela confère au sous-acquéreur.

- Les hypothèses de l'action « nécessairement contractuelle ». On a admis que le sous-acquéreur bénéficiait d'une action nécessairement contractuelle tant dans les chaînes homogènes (vente suivie d'une vente) . Si c´est une action délictuelle (ex : contre la santé) se ne sera pas contractuelle. 2. Les chaînes de contrats non translatives de propriété

- Nous sommes à présent dans l'hypothèse d'une succession de contrats non translatifs de propriété (plusieurs contrats d'entreprise). Par exemple, voici un maître de l'ouvrage qui fait appel aux services d'un entrepreneur, lequel sous-traite les travaux à un tiers. L'action du maître de l'ouvrage contre le sous-traitant est-elle délictuelle ou contractuelle ? La jurisprudence a évolué : d'abord contractuelle, l'action est délictuelle à présent.

- Section 3 : La cession de contrat

La réforme distingue la cession de créance et la cession de dette (C. civ., art. 1321 et s.) de la cession de contrat (C. civ. art. 1216). C'est l'hypothèse par laquelle un contractant cède sa place dans le contrat à une autre personne : un contrat est conclu entre A et B ; B entend céder sa position dans le contrat à C. A quelle condition une telle opération est-elle possible ?

La loi a parfois prévu certaines hypothèses où le contrat pouvait être cédé, sans que le contractant cédé n'ait à consentir : tel est le cas de l'article 1743 du Code civil, de l'article L. 1224-1 du Code du travail, de la loi du 13 juillet 1992 qui prévoit que l'acheteur d'un

voyage peut céder son contrat « après en avoir informé le vendeur dans un délai fixé par voie réglementaire avant le début du voyage ou du séjour »... Le Code civil s'appliquera donc à défaut de réglementation spéciale. Il distingue les conditions (§1) et les effets (§2) de la cession de contrat.

Article 1743

Si le bailleur vend la chose louée, l'acquéreur ne peut expulser le fermier, le métayer ou le locataire qui a un bail authentique ou dont la date est certaine.

« Il peut, toutefois, expulser le locataire de biens non ruraux s'il s'est réservé ce droit par le contrat de bail. »

« Article L1224-1

Lorsque survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société de l'entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise. »

§1 : Les conditions de la cession de contrat

L'article 1216 prévoit trois conditions : l'accord du contractant cédé, la rédaction d'un écrit et l'information du contractant cédé.

(C. civ., art. 1216 al. 2).

§2 : Les effets de la cession Les Effets de la cession : Lorsque la cession intervient, c'est le même contrat qui continue avec deux nouveaux contractants. La cession n'emporte aucun effet novatoire. Le cessionnaire n'est tenu des obligations du cédant que pour l'avenir ; ainsi le cédant reste tenu de ses engagements passés. Les articles 1216-1 et suivants apportent trois précisions. « Article 1216-1Si le cédé y a expressément consenti, la cession de contrat libère le cédant pour l'avenir. A défaut, et sauf clause contraire, le cédant est tenu solidairement à l'exécution du contrat.

Article 1216-2

Le cessionnaire peut opposer au cédé les exceptions inhérentes à la dette, telles que la nullité, l'exception d'inexécution, la résolution ou la compensation de dettes connexes. Il ne peut lui opposer les exceptions personnelles au cédant.Le cédé peut opposer au cessionnaire toutes les exceptions qu'il aurait pu opposer au cédant.

Article 1216-3 Si le cédant n'est pas libéré par le cédé, les sûretés qui ont pu être consenties subsistent. Dans le cas contraire, les sûretés consenties par des tiers ne subsistent qu'avec leur accord.Si le cédant est libéré, ses codébiteurs solidaires restent tenus déduction faite de sa part dans la dette. »

Chapitre V.- Dispositions générales

- Section I.- Les articles 1217 et 1218 fixent le cadre général de l'inexécution contractuelle.

§1 : L'énumération des sanctions

L'article 1217 énumère les cinq sanctions de l'inexécution : exception d'inexécution, exécution forcée, réduction du prix, résolution du contrat, responsabilité contractuelle . Au -delà de cette énumération, il pose deux règles communes : celles du domaine des sanctions ; celle de leur conciliation.

- Le domaine- La conciliation des sanctions. L'article 1217 al. 2 dispose que « les sanctions qui ne sont pas incompatibles peuvent être cumulées ; les dommages et intérêts peuvent toujours s'y ajouter ». Il est en effet logique qu'une réparation financière puisse se cumuler avec les autres sanctions qui, elles, ont pour objectif de régler le sort du contrat. Bien évidemment, l'allocation de dommages et intérêts ne sera concevable que si les conditions de la responsabilité contractuelle sont remplies.

On peut en cause d'appel, invoquer une sanction qui n'avait pas été invoquée devant les premiers juges ? La clé de la solution repose sur l'article 565 du Code de procédure civile qui interdit la formulation, en appel, de demandes nouvelles, à moins qu'elles tendent aux mêmes fins que la demande initiale. Pendant longtemps, on considérait que les actions en résolution et en exécution tendaient aux mêmes fins. Le créancier pouvait donc changer son fusil d'épaule et demander, en appel, la résolution qu'il n'avait pas sollicitée en première instance. Cette solution avait été condamnée par des arrêts postérieurs qui estimaient que l'action en résolution, qui vise à mettre à néant le contrat, ne tend pas aux mêmes fins que la demande.

§2 : La force majeure

Le nouvel article 1218 pose des règles claires qui concernent tant la caractérisation (A) que les effets (B) de la force majeure.

A - La caractérisation de la force majeure

- L'article 1218 appelle à préciser la caractérisation de la force majeure (1) et ses conséquences (2). « Article 1218

Il y a force majeure en matière contractuelle lorsqu'un événement échappant au contrôle du débiteur, qui ne pouvait être raisonnablement prévu lors de la conclusion du contrat et dont les effets ne peuvent être évités par des mesures appropriées, empêche l'exécution de son obligation par le débiteur.

Si l'empêchement est temporaire, l'exécution de l'obligation est suspendue à moins que le retard qui en résulterait ne justifie la résolution du contrat. Si l'empêchement est définitif, le contrat est résolu de plein droit et les parties sont libérées de leurs obligations dans les conditions prévues aux articles 1351 et 1351-1. »

1. La caractérisation de la force majeure

Pour percevoir les effets de l'ordonnance (a), il faut évoquer l'état du droit antérieur (b).

a) Avant l'ordonnance

- Approche classique. La caractérisation de la force majeure a toujours été une question débattue. Dans une interprétation classique, on retenait que la force majeure devait présenter trois caractères. Imprévisibilité. Il fallait que l'événement n'ait pas pu être prévu au jour de la formation du contrat. Une composition chimique anormale de l'eau, indécelable lors des contrôles d'usage, avait pu être invoquée par des architectes pour s'exonérer de la mauvaise distribution de l'eau d'un lotissement (Cass. civ. 3ème, 19 mars 1985, Bull. civ. III, n° 57). Irrésistibilité. Cela signifiait qu'aucun moyen ne pouvait être mis en œuvre pour exécuter le contrat, malgré ledit événement. Extériorité. L'événement devait enfin rester extérieur au débiteur ou aux moyens qu'il mettait en œuvre. Ne constituait ainsi pas une cause extérieure à l'entreprise le fait que des marins en conflit avec l'employeur se soient rendus maîtres d'un navire –

b) Après la réforme.

- L'article 1218 al. 1 autorise deux brèves remarques.

La force majeure « en matière contractuelle » est une cause de libération du débiteur de ses obligations. L'expression force majeure « en matière contractuelle » demeure assez énigmatique, sous-entendant que la force majeure « en matière extracontractuelle » pourrait s'en distinguer. La réforme permettrait ainsi à la Cour de cassation de faire évoluer sa jurisprudence, si elle le souhaite.

Le texte contient les trois piliers classiques de la force majeure : il y a force majeure en matière contractuelle lorsqu'un événement échappant au contrôle du débiteur (extériorité), qui ne pouvait être raisonnablement prévu lors de la conclusion du contrat (imprévisibilité) et dont les effets ne peuvent être évités par des mesures appropriées (irrésistibilité ) empêche l'exécution du contrat

2. Les effets de la force majeure

- Plan. L'article 1218 al. 2 évoque deux hypothèses : celle d'un empêchement temporaire (a) et celle d'un empêchement définitif (b).

a) L'empêchement temporaire

- Suspension. En cas d'empêchement temporaire, l'exécution de l'obligation est seulement suspendue sauf si le retard qui en découle, du fait de sa gravité, justifie la résolution du contrat.

b) L'empêchement définitif

- Résolution de plein droit. Si l'empêchement est définitif, le contrat est résolu de plein droit et les parties sont libérées de leurs obligations. Section 2 : Les différentes sanctions

- Enumération. Les articles 1219 et suivants détaillent les différentes sanctions prévues : l'exception d'inexécution (§1), l'exécution forcée en nature (§2), la réduction de prix (§3), la résolution (§4), la réparation du préjudice (§5).

§1 : L'exception d'inexécution

- . L'exception d'inexécution est le droit d'une partie de suspendre l'exécution de ses obligations tant que son partenaire n'a pas exécuté les siennes

A - Les conditions de l'exception d'inexécution

Les articles 1219 et 1220 retiennent deux hypothèses d'exception d'inexécution : celle où l'inexécution est avérée (1) et celle où elle est simplement redoutée (2).

1. Exception pour inexécution avérée

Trois conditions sont nécessaires pour qu'un contractant puisse, utilement, décider de suspendre ses obligations envers son contractant.

- Interdépendance des obligations. Il faut d'abord que les obligations (celle inexécutée et celle suspendue) soient interdépendantes. La jurisprudence a cependant de cette notion une vision large et admet l'exception d'inexécution au-delà des simples contrats synallagmatiques : ont ainsi été considérées comme interdépendantes les obligations liées aux restitutions à la suite d'une résolution ou d'une annulation ; de même, dans les contrats synallagmatiques imparfaits (cf. supra), la jurisprudence a admis que le dépositaire qui avait exposé des frais à l'occasion de la garde de la chose qui lui avait été confiée pouvait refuser de la restituer tant qu'il n'avait pas été désintéressé par le déposant.

- Simultanéité des obligations. L'exception d'inexécution ne peut évidemment jouer quand les obligations sont assorties d'un terme ou d'un

délai. Par exemple, si un vendeur me consent un délai de paiement, il ne pourrait, au motif que je ne l'ai pas encore payé, refuser de me délivrer la chose vendue.

- L'exception d'inexécution doit être proportionnée. Un contractant ne saurait, au motif qu'une obligation secondaire et accessoire a été inexécutée par son partenaire, suspendre l'exécution de son obligation principale. Par exemple, un locataire ne peut arrêter de payer le loyer (obligation principale) si le propriétaire traîne pour faire des réparations mineures (obligation secondaire). Pour suspendre le paiement du loyer, le locataire doit être dans l'empêchement de jouir de la chose louée.

2. Exception pour inexécution redoutée

- L'article 1220 consacre l'exception de peur : un contractant peut suspendre l'exécution de son obligation s'il craint que son cocontractant n'exécute pas la sienne.

B - Les effets de l'exception d'inexécution

-Entre les parties, le contrat est suspendu. Il continue donc d'exister. La situation est bloquée et pourra évoluer soit vers une exécution par l'une des parties (entraînant alors celle de l'autre), soit vers une résolution judiciaire. L'exception d'inexécution est donc un moyen de pression... mais elle ne règle pas une situation de façon définitive.

- A l'égard des tiers, l'exception est opposable. Dès lors si un tiers exerce, contre un contractant, une action fondée sur le contrat suspendu (action oblique, action paulienne, action directe, cf. supra et infra), son action sera paralysée. En revanche si le tiers invoque un droit distinct du contrat (responsabilité délictuelle par exemple), son action pourra perdurer. Exemples :Les travaux réalisés par votre entrepreneur présentent des malfaçons et ce dernier tarde ou refuse de procéder aux réparations nécessaires. Votre êtes moniteur d’auto-école et votre client ne vous paie pas l’acompte demandé

§2 : L'exécution forcée en nature

- Avant la réforme. L'article 1142 du Code civil disposait que « toute obligation de faire et de ne pas faire se résout en dommages-intérêts, en cas d'inexécution de la part du débiteur. Ainsi, si on pouvait contraindre le débiteur d'une obligation de donner à l'exécuter en nature (par exemple, si le vendeur refuse de transférer la propriété du bien vendu, il pourra y être contraint), on ne pouvait, en revanche, contraindre le débiteur à faire ou à ne pas faire quelque chose contre sa volonté. La solution se justifiait par le souci de préserver et protéger la liberté individuelle de chacun.

- L'apport de la réforme. Les articles 1221 et 1222 prennent en compte l'évolution jurisprudentielle mais la dépassent. Ils offrent au créancier

de l'obligation inexécutée le choix entre poursuivre l'exécution en nature ou faire exécuter lui-même l'obligation.

§3 : La réduction de prix

Le nouvel article 1223 du code civil prévoit une sanction nouvelle et redoutable : la réduction de prix. Cette sanction existe dans des droits spéciaux qui prennent soin d'encadrer les modalités de la réduction du prix. Ainsi, Exemple : Article 50 de la CVIM l(a Convention des Nations Unies sur les contrats de vente internationale de marchandises ) permet à l'acheteur de réduire unilatéralement le prix, à proportion de la valeur de la marchandise reçue, en cas de défaut de conformité non réparé par le vendeur. La réduction correspond à la différence entre la valeur que les marchandises effectivement livrées avaient au moment de la livraison et la valeur que des marchandises conformes auraient eue à ce moment ;

l'article 1644 du Code civil permet à l'acheteur d'un bien affecté d'un vice caché de poursuivre l'action rédhibitoire, qui s'apparente à une diminution du prix. C'est toutefois le juge qui fixe ici le nouveau prix du contrat; l'article 1617 du Code civil prévoit que si la vente immobilière est faite avec indication de la contenance, à raison de tant la mesure, le vendeur doit délivrer à l'acquéreur la quantité indiquée au contrat. A défaut, le vendeur est obligé de procéder à une diminution proportionnelle du prix.

§4 : La résolution du contrat

Les articles 1224 révolutionnent la présentation de la résolution, ou plutôt des résolutions, du contrat. Ils précisent les conditions (A) et les effets (B) de la résolution.

A - Les conditions de la résolution

- Trois types. L'article 1224 dispose que « la résolution résulte soit de l'application d'une clause résolutoire soit, en cas d'inexécution suffisamment grave, d'une notification du créancier au débiteur ou d'une décision de justice ». Il y a donc trois types de résolution.

1. La résolution par l'application d'une clause résolutoire

- Définition et effet. C'est une clause par laquelle les parties prévoient que le contrat sera automatiquement, elle doit être très bien déterminée.

2. La résolution par notification

- Origines de l'article 1226 . La jurisprudence avait jugé qu'une partie pouvait décider de mettre fin, unilatéralement, au contrat, sans saisir le juge : « la gravité du comportement d'une partie à un contrat peut justifier que l'autre partie y mette fin de façon unilatérale à ses risques et périls, et cette gravité n'est pas nécessairement exclusive d'un délai de préavis » .Un contractant

victime d'une inexécution doit pouvoir mettre fin au contrat, sans attendre l'issue d'un procès, et remplacer sur partenaire par un opérateur économique plus performant. Elle doit cependant éviter un écueil : il faut en effet éviter qu'un contractant puisse se défaire à bon compte d'un contrat duquel il ne veut plus en invoquant une inexécution fantaisiste. Il y aurait alors une violation de l'article 1134 du Code civil et du respect de la parole donnée. La solution a ensuite été précisée dans chacun de ses termes. Le nouvel article 1226 tente de trouver un juste équilibre entre ces deux impératifs.

- Les conditions de la résolution par notification. Les conditions se trouvent aux articles 1224 et 1226. Il faut une « inexécution suffisamment grave » et « une mise en demeure ».« L'inexécution suffisamment grave ». L'expression montre que ce type de résolution est réservé aux cas les plus graves. Avant la réforme, « la gravité du comportement » (expression alors retenue par la Cour de cassation) avait donné lieu à plusieurs interprétations doctrinales.

- 3. La résolution judiciaire

L'article 1227 dispose que la résolution « peut, en toute hypothèse être demandée en justice ». C'est la reprise de l'ancien article 1184 al. 3 qui disposait que la résolution résultait en principe d'une décision judiciaire.

- Les conditions de la résolution judiciaire. L'article 1224 exige un « cas d'inexécution suffisamment grave ». C'est donc le juge qui appréciera la gravité de l'inexécution. Avant la réforme, la jurisprudence avait précisé les cas d'inexécution ouvrant droit à la résolution judiciaire.

B - Les effets de la résolution

- . Les articles 1229 et 1230 fixent les effets de la résolution : elle met fin au contrat (1) ; elle entraîne des restitutions (2) ; elle laisse survivre certaines clauses (3).

1. La cessation du contrat

- Plus de rétroactivité. L'effet principal de la résolution est celui de rompre le lien contractuel, sans rétroactivité (comp. avec l'article sur les effets de la nullité).

Avant la réforme, le principe était que la résolution entraînait la destruction rétroactive du contrat. Il fallait donc remettre les parties dans le même état que si le contrat n'avait pas été conclu et procéder aux restitutions. La réforme abandonne toute idée de rétroactivité. Cela entraînera d'importantes conséquences : en matière immobilière, les droits qui auront pu être consentis sur le bien ne seront plus anéantis La résolution judiciaire : date fixée par le juge ou date de l'assignation en justice. Il appartiendra au juge de fixer la date d'effet de la résolution (ex : date à laquelle les parties ont cessé de respecter leurs obligations). A défaut, le code retient la date de l'assignation en justice et non la date de la décision. La

jurisprudence avait fait un autre choix et retenu la date du jugement en matière de bail d'habitation (Cass. 3e civ., 31 mai 2006, no 05-18.214) ou de contrat de travail (Cass. soc., 24 avr. 2013, no 11-28.629, dans la mesure où la relation de travail s'était poursuivie jusqu'au jugement).

2. Les restitutions

- Avant la réforme, la rétroactivité de la résolution ouvrait sur d'insondables mystères. Toutefois, il faut évidemment contenir la solution à la seule indemnité correspondant à l'utilisation de la chose.

§5 : La responsabilité contractuelle

Comme pour la responsabilité délictuelle, la responsabilité contractuelle suppose une faute, un dommage et un lien de causalité.

1. La faute La gravité de la faute

- Le principe est donc que la responsabilité contractuelle est encourue quelle que soit la gravité de la faute commise : de la plus légère, à la plus lourde.

2. Un dommage

- Le créancier de l'obligation inexécutée doit, pour être indemnisé, alléguer d'un dommage. On retrouve ici le dualisme de l'action en responsabilité contractuelle :s'il se contente de demander l'exécution de l'obligation, il n'a, en principe, pas de préjudice à prouver

1.- Principe de non cumul des responsabilités

- Le créancier d'une obligation contractuelle inexécutée peut-il intenter contre son débiteur l'action qu'il préfère (contractuelle ou délictuelle), ou ce choix s'impose-t-il à lui, l'option lui étant d'avance fermée ? Les intérêts de choisir sont nombreux : si la responsabilité contractuelle est plus favorable à la victime en ce qui concerne l'appréciation de la faute), elle lui est moins favorable en ce qui concerne l'intégralité du dommage réparable .De même, alors que le contractant peut, dans le cadre du contrat, prévoir des clauses élusives ou limitatives de responsabilité , ces clauses ne se conçoivent pas dans le cadre d'une action délictuelle. On conçoit donc sans peine qu'un contractant puisse avoir tantôt pour intérêt de se fonder sur la responsabilité contractuelle, tantôt sur la responsabilité délictuelle.

2. Nécessité d'une mise en demeure (aviso legal)

- La mise en demeure est l'acte par lequel un créancier demande à son débiteur d'exécuter l'obligation contractuelle à laquelle il est tenu. Le nouvel

article 1231 dispose que « à moins que l'inexécution ne soit définitive (ce qui sera le cas pour les manquements aux obligations de ne pas faire), les dommages et intérêts ne sont dus que si le débiteur a préalablement mis en demeure de s'exécuter dans un délai raisonnable ».

- Les formes de la mise en demeure. L'article 1344 dispose que « le débiteur est mis en demeure de payer, soit par une sommation ou un acte portant interpellation suffisante soit, si le contrat le prévoit, par la seule exigibilité de l'obligation ». La forme est donc libre.

3. Les aménagements conventionnels

a) Les clauses limitatives ou exclusives de responsabilité

- Définition. Comme leur nom l'indique, ces clauses permettent à une partie d'exclure totalement ou de limiter le montant de l'indemnité qu'elle pourrait être amenée à verser en cas d'inexécution de sa part. Par exemple, les compagnies aériennes limitent le montant de leur responsabilité en cas de perte des bagages.

- Principe de validité. La validité de ces clauses est admise au titre de l'autonomie de la volonté. Les parties sont libres de prévoir dans leur contrat les modalités auxquelles elles veulent être tenues. Ainsi, il a été jugé que « aucune disposition légale ne prohibe de façon générale l'insertion des clauses limitatives ou exonératoires de responsabilité dans les contrats d'adhésion

b) Les clauses pénales

- Définition. La clause pénale est celle qui stipule que le contractant qui manquera d'exécuter le contrat paiera une certaine somme à titre de dommages et intérêts (C. civ., art. 1231-5i – Nature de la clause pénale.

– Régime juridique de la clause pénale

- Nécessité de mise en demeure. Le dernier alinéa de l'article 1231-5 est une nouveauté procédurale : pour mettre en œuvre la clause pénale prévue dans le contrat, le créancier devra désormais mettre en demeure le débiteur de s'y conformer, sauf en cas d'inexécution définitive. Il s'agit néanmoins d'une disposition supplétive de volonté et les parties pourront y déroger comme en cas de mise en jeu de la responsabilité contractuelle.

- Risques d'abus. Le caractère forfaitaire de la clause pénale en faisait une arme contractuelle redoutable : certains contractants n'hésitaient nullement à prévoir des clauses pénales d'un montant très important... forçant ainsi leur débiteur à s'exécuter.