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  • LES NOTRESAbdias do Nascimento: un sicle de lutte noire

    AUTONOMIE

    ValenciaDonyets, modle dducation libre

    REPORTAGES

    Nous sommes fatigus dtre fatigus: plus jamais de partis!

    LES ANONYMES

    Point de vue dun travailleur libertaireRegard sur la grve en France

    Revue de quartier bimestrielle - Numro 10 - Dcembre 2010 / Janvier 2011

    Desinformmonos hermanos tan objetivamente como podamoswww.desinformemonos.org

    Hati Hati avant et aprs le cholraavant et aprs le cholra

    Histoire des rvoltes Histoire des rvoltes Adolfo Gilly Adolfo Gilly

    Maritza : Maritza : la vie est la vie est chaque jour chaque jour plus dure plus dure

    MabrukaMabruka Mimouni: Mimouni:

    des paroles des paroles urgentes qui nont urgentes qui nont

    pas t coutespas t coutes

    Quinze ans Quinze ans de police de police communautaire au communautaire au GuerreroGuerrero

    Los de Abajo Los de Abajo Jouer au son Jouer au son de la rsistancede la rsistance

  • Numro 10 - Dcembre 2010 / Janvier 2011 - www.desinformemonos.com2

    Du tremblement de terre au cholra

    En ce moment les mdias internationaux centrent leur attention sur la propaga-tion de lpidmie de cholra en Hati, qui risque de stendre Port-au-Prince, contaminant plus d1 300 000 personnes rfugies dans des camps depuis le trem-blement de terre du 12 janvier 2010. On parle dun peu plus de 500 morts en seulement quelques jours, cest dj une autre crise humanitaire. Hati est revenue sur le devant de la scne, aprs la grande spirale de silence survenue depuis le tremblement de terre de 7.3 sur lchelle de Richter.

    la tragdie humaine consquente au sisme sajoute aujourdhui les pluies diluviennes qui sabattent sur Hati, et louragan Tomas, qui bien quil ne fut pas trs important a tout de mme caus 20 morts et endommag plusieurs mai-sons, et les risques encourus par ceux qui vivent dans des refuges et dans la rue. Il faut y rajouter la propagation du cholra, qui a dj provoqu des morts au nord du pays et cause duquel huit mille personnes sont hospitalises.

    Elections en vue

    Le climat politique est tendu quelques jours avant les lections parlementaires et prsidentielles du 28 novembre 2010, o 4 millions de personnes liront les dputs et le successeur du prsident Ren Prval. LONU a pour omission de faire respecter lordre public avant et aprs les lections d au contexte actuel, la violence peut se dchaner. Ce travail est la charge de la Minustah (mission des nations unies de stabilisation en Hati) arrivs en juin 2004. Il existe un risque cause du pro-cessus lectoral, mais aussi cause de la croissante distribution darmes dans la population, de la reconstitution de bandes de narcotrafi quants et kidnap-peurs, et de lventuelle entente de ceux-ci avec des forces politiques en recherche de fi nancement.

    Aide slective, tentes de campagne et gopolitique

    Les pays donateurs ( Etats-Unis, Canada, France) et les entreprises multinationales vont se disputer les milliards pour les contrats publics de la reconstruction et pour utiliser lnorme quantit de main doeuvre bon march disponible dans les camps de rfugis. La responsabilit en incombe la CRIH (commission inter-nationale pour la reconstruction dHati) prside par Bill Clinton et le premier ministre hatien Jean-Max Bellerive, accu-ss de ne pas avoir tenus leurs promesses. La CRIH a t cre aprs le tremblement de terre du 12 janvier 2010.

    Linvestissement des Nations Unies en Hati a commenc en fvrier 1993 conjoin-tement avec lOEA (organisation des tats amricains), qui sest vue confi rme par le Conseil de scurit des Nations Unies en septembre 1993 comme UNMIH (Mission des Nations Unies en Hati). Celle-ci ne

    sest pas dveloppe pleinement (du moins jusqu fi n 1995) cause de labsence de coopration des autorits militaires ha-tiennes, qui lpoque appuyaient le coup dtat du 29 septembre 1991 foment par le gnral Raoul Cedras contre Jean-Ber-trand Aristide, vainqueur des lections de dcembre 1990. Malgr tout, le rle des missions de lONU en Hati est ques-tionnable. Les casques bleus ont eu des rles contradictoires depuis le dbut et ont t accuss de nombreux assassinats et violations des droits de lhomme. Aprs de rcurrents problmes dans la capitale hatienne entre les partisans de lactuel prsident Prval et ceux de lancien pr-sident Aristide, sest fortifi le mythe du peuple hatien comme violent et sauvage et ncessitant des armes trangres pour survivre. Hati traverse aujourdhui une priode complexe, vu que les dcisions importantes sont prises aussi par des tierces personnes et que les dcisions ne recherchent bien des fois ni les intrts rels ni le bien commun du peuple hatien.

    Hati et la MINUSTAH avant et aprs le cholraFabrizio Lorusso

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  • Numro 10 - Dcembre 2010 / Janvier 2011 - www.desinformemonos.com 3

    Adolfo Gilly est n Buenos Aires en 1928, il fut prisonnier politique au Mexique entre 1966 et 1972 et est natu-ralis mexicain depuis 1982. Son livre le plus rcent est Histoires clandestines, ditions Itaca/La Jornada, 2009, seize crivains sur les rbellions et les rebelles de Bolivie, Cuba, Guatemala, Prou et Mexique. Dans sa prsentation, il est dit: Les crivains de ce livre, chacun dans son temps et son lieu, cherchrent clai-rer, enregistrer et apprhender quelques moments discontinus de lhistoire dans laquelle se montrent en pleine lumire les sentiments, les manires dtre ensemble, les moyens et les imaginaires des oppri-ms, des subalternes, de ceux qui vivent de leurs mains, les faiseurs, et de quelques autres avec qui se jouent le destin.

    Compagnons de Desinformemonos:

    Cet crit, hommage immdiat Frie-drich Katz, le grand historiographe

    de Pancho Villa qui mourut dans la matine du 16 octobre 2010, est simple-ment un brouillon, un avenant pour ne pas attendre, un article pas encore fi ni,

    mme sil manque peut tre seulement quelques retouches. Je vous demande

    de le publier tel quel, vu quarrive le centime anniversaire de ce que lon veut

    aussi nous dpouiller. AG.

    Lhistorien ne va pas chercher une image du futur dans lidalisation ou la critique du pass sur lequel il enqute ou quil imagine.

    Il va chercher les traces vritables, la rgion o se cre le prsent et, surtout, la rgion et le processus o se crent les fantasmes du futur, les imaginaires de lavenir propre, les mythes pratiques qui organisent les volonts.

    Les rvolutions, les rvoltes, les ruptions crent le sous-sol, le sol et lhumus do un peuple imagine quand il sagit dimaginer

    et ne fait pas quobir ou rpter la mme routine chaque jour. Il nimagine pas un dsordre perptuel, sinon un quilibre, un ordre nouveau de justice et de libert.

    Il imagine quand advient lheure de crer. Ce crer est partir des conditions et des ralits prsentes de leurs vies, non dune rptition du pass ou dun impossible retour lui. Mais les ralits sont aussi une exprience et une culture matrielle, toutes deux hritage du pass.

    Ce qui permet et nourrit cette imagi-nation est lexprience, incomparable-ment plus relle, matrielle (parce que dans la vie) et durable que les plans et programmes des classes dirigeantes pour ordonner et rglementer les vies au sein de sa domination.

    Enquter, explorer, mettre jour cette humus requiert de lintention dans la recherche ; et dans la recherche historique plusieurs intentions sont possibles, pas une meilleure que lautre ou plus scien-tifi que, mais diff rentes (et, comme cela se passe souvent si le travail est bon, ces investigations se croisent et se nourrissent et se posent parmi de nouvelles questions et interrogations).

    Il est impossible dduquer ce regard si on considre la Division du Nord comme une anomalie et non comme une cration, si on la considre comme une erreur et non comme une forme de la vrit de la vie,

    si on la voit comme une interruption du bien ou une irruption du mal : et non comme une irruption du bien (autre) et une interruption du mal (autre).

    Il est impossible de penser lhistoire comme la seule histoire de lordre (des institutions, des muses, des gouvernants, de la science, de lart,...) sans la penser aussi comme lhistoire de lhumiliation, du dsordre, de la souff rance impose par lordre donn chaque poque et en chaque lieu.

    [Et, malheureusement, / la douleur aug-mente dans le monde chaque instant / elle croit de trente minutes par seconde / pas pas Csar Vallejo]

    Il est minutieux dtudier comme un tout les moments de rvlation et les moments de routine pleine de vie : les champs, les rues des villes, les ateliers, les places, les coles et leurs apprentissages, les cantines, les cins et les auberges.

    [Tout acte ou voix gnial vient du peuple / et va jusqu lui, de face ou transmis / par dincessantes brindilles, par la fume rose / damers mots de passe sans chance - Csar Vallejo].

    Dans tous ces moments vit et grandit une part immense de lespce humaine qui nexiste dans les registres que comme statistique ou comme travail pass fi g en uvres, et qui avec intermittence fait irruption et se rvle. Mais ce nest pas vraiment quelle se rveille, cest plutt quelle apparat et se prsente.

    Regards : regarder ici et depuis ici est un choix. Mais pour le faire et laffi rmer dans la vie et dans luvre, il nest pas besoin ni ncessaire dignorer ou de supplier qui regardent des autres cts quand ils le font avec rigueur et justice. Cela est aussi nces-saire pour eux.

    Histoire des rvoltes (Brouillon)Adolfo Gilly est historien, crivain et professeur mrite lUniversit nationale autonome de Mexico.

    Il est lauteur dune histoire de la Rvolution mexicaine : La Rvolution interrompue (premire dition 1971) et dautres tudes et dessais historiques, politiques et littraires.

  • Numro 10 - Dcembre 2010 / Janvier 2011 - www.desinformemonos.com4

    San Luis Acatln, Guerrero. Neuf muni-cipes de La Montaa et de Costa Chica ont des policiers. Ils nappartiennent pas au gou-vernement, ne reoivent pas de salaire et leur systme se base sur la rducation. Du 13 au 16 octobre a eu lieu la Rencontre Nationale pour la Scurit et la Justice des Peuples loccasion du quinzime anniversaire de la Police Communautaire et de la CRAC.

    La Police Communautaire emprunte un chemin diffi cle, important et trs actuel comme systme de justice et de scurit pour les populations. La CRAC cherche des chemins pour un dveloppement rgional prenant en compte: la sant, lducation, le commerce et les mdias de communication

    Le contexte

    Dans les annes soixante et soixante dix se sont dvelopps plusieurs mouvements sociaux qui avaient comme reprsentants Lucio Cabaas et Genaro Vzquez. LEtat ne comprenait pas la problmatique lori-gine de la mobilisation et a dclench une guerre contre ces groupes. Dans les annes 90 ont eu lieu des massacres de population indigne rests impunis: Aguas Blancas et El Charco.

    Lalternative la Guerilla sest construite sur un projet rgional. Cest aujourdhui un sys-tme de justice communautaire dans la zone Costa-Montaa. La cration dune police a t ncessaire pour freiner la dlinquance qui visait les personnes qui se dplacaient sur les routes de cette zone. La Police Com-munautaire a commenc ses activits le 15 octobre 1995.

    Fonctionnement de la CRAC

    La Police compte presque 700 membres et est contrle par la CRAC. Le systme de justice se base sur la rducation. Cest dire que quelquun qui commet un dlit se voit donner 15 jours de travail dans les com-munauts. En plus les anciens de la com-munaut lui parleront pour sa rducation.

    Pour la premire fois la CRAC a organis la rencontre pour la Scurit et la Justice des Peuples laquelle ont assist diff rentes organisations locales, nationales et inter-nationales.

    Aprs un mois de discussion avec les dpu-ts de lEtat, prs de 500 indignes me phaa et na savi de Atlamajalcingo ont march jusquau sige du Congrs pour exiger la destitution du prsident municipal Isidoro Andrade. Les dputs ont dit quil sagissait dun procs politique contre lui. La popula-tion a annonc quelle boycotterait les lec-tions pour le poste de gouverneur en 2011.

    Lactualit de la Montaa

    la Montaa, on continue denregistrer des actes de corruption, des fraudes normes, de la discrimination et des violences contre les indignes. Beaucoup de morts La Montana sont causs par des confl its lis la terre.

    Comme exemple de fraudes fi nancires rentes, il y a celui de ces deux coopra-tives dpargne populaire qui ont ralis des escroqueries ou des irrgularits. Les gens mme de la communaut avaient coopt les fraudeurs.

    Il ny a pas de rgulation des prix. la Montaa, il ny a pas de centime . Des magasins comme Chedraui ont dcid de ne pas utiliser les centimes et darrondir les quantits.

    Migration

    La migration vers les Etats-Unis a augment le pouvoir dachat de quelques habitants de la Montaa; des banques, des boutiques de tlphonie mobile, de vtements se sont ouverts dans des locaux de Tlapa.

    Pour ce qui concerne de la migration, interne, des journaliers vont proposer leurs services dans le nord du pays. Le Centre des Droits Humains de la Montaa, Tlachinol-lan, a demand aux instances gouvernemen-tales et fdrales leur appui pour viter les abus et lexploitation des journaliers. Peu a t fait.

    Et la suite?

    Lors de lAssemble plniere de la Ren-contre, les prsents demandrent la lib-ration de prisonniers politiques et la dmilitarisation et que soient punis ceux qui violent les droits humains dans le pays. Ils signrent un appui San Juan Copala.

    Les liens de la CRAC, de lUNISUR et des moyens de communication communau-taires doivent contribuer informer et gnrer une capacit bien vivre ensemble pour les gens de Costa Chica et Montaa. Tout comme considrer limportance du travail de la femme dans le dveloppement du projet, qui est du peuple pour le peuple.

    Dfi s et russites dune des expriences autonomes

    les plus notables du Mexique Quinze ans de police communautaire

    au Guerrero La Police Communautaire emprunte un chemin dif-fi cle, important et trs actuel comme systme de justice et de scurit pour les populations.

    La CRAC cherche des chemins pour un dveloppement rgional prenant en compte: la sant, lducation, le commerce et les mdias de communication

    Publication dun texte original de Sergio Ferrer

  • Numro 10 - Dcembre 2010 / Janvier 2011 - www.desinformemonos.com 5

    Ctait le 24 avril, il y a un an. Tu tais dans la fi le dattente, devant le commissariat, comme tant dautres, les papiers la main. Tu avais les mains moites, mais tu attendais, lgre et pleine despoir, tu savais que tu y tais presque arrive. Tu avais un travail, pas beaucoup dheures et pas beaucoup dargent, mais un travail, et cela suffi sait pour obtenir un permis de sjour, un bout de papier, un prcieux petit bout de papier. Un bout de papier o tait crit, noir sur blanc, que toi aussi tu avais droit un petit bout despace sur cette terre et sous ce ciel.

    Ils ont tout vrifi ton sujet, tes annes passes en Italie, les cinq annes de prison, de la premire jusqu la dernire. Ils sont tombs sur un dcret dexpulsion datant de 2001. Personne ne ta demand ce que tu faisais maintenant, ce que tu avais fait durant ces dernires annes, la fatigue et la force quil te fallait pour te mettre debout et pour te prouver toi-mme, ainsi quaux autres que tu pouvais le faire, que tu voulais vivre en paix, modestement en paix. Tu possdais, en toi, des paroles urgentes et ncessaires. Tu nas pas trouv doreilles, ni dentendements prts rece-voir ces paroles.

    Tu nas pas compris tout de suite ce quil tarrivait, tu as juste compris que quelque chose ne marchait pas comme tu lavais imagin, quils taient en train de temme-ner hors de l, que personne ne te donnait le prcieux bout de papier qui tautorisait exister. Personne ne te disait quoique ce soit. Ils tont mise dans une autre pice. Ta respiration se faisait plus courte, ton cur battait plus vite. Tu as espr, jusquau der-nier moment que cela ne tarrive pas toi, que quelquun vienne et te dise quon stait

    tromp, que tu allais avoir le bout de papier. Mais la porte est reste ferme jusqu ce que lon temmne hors de l.

    Tu es arrive Ponte Galeria, et l, tu avais tout compris: quil tait inutile de continuer esprer, que tu tais seule et que tu le reste-rais et que tes paroles urgentes et ncessaires navaient plus aucun sens, mme pour toi. Toi-mme tu ne croyais plus tes paroles, il te semblait les avoir sorties du nant. Elle nexistait plus la Mabruka qui nettoie les jardins, qui rentre chez elle et se prpare dner, qui fait ses courses au supermarch, qui regarde la tl, qui prend le mtro. Il ne reste que cette Mabruka, ici, enferme dans un fourgon blind de la police, sans le bout de papier, sans travail, sans maison, et avec les paroles urgentes mortes dans sa bouche.

    Tu as pass le 25 avril enferme dans la solitude de la cellule devenue immense, o lon tenferme, non pour ce que tu as fait mais pour ce que tu es, coupable dexister. Tu as d te sentir comme a, coupable dtre ne, davoir essay de vivre. Personne ne ta libre le 25 avril de lanne dernire. Un matin peine leve tu tes retrouve non pas face lenvahisseur mais face un fonction-naire de la Croix rouge ou de la police, peu importe, qui ta annonc que tu serais rapa-trie. Tu nas pas compris tout de suite. Tu

    as d penser: quelle patrie? Toi qui depuis 20 ans vivais ici. Retourner o? qui dire quil ne fallait pas que tu rentres, que tu navais ni maison ni famille en Tunisie? qui raconter que justement si tu ttais chappe de ce pays depuis si longtemps ctait pour avoir le droit de vivre? Tu as d ressentir une immense solitude, toute seule au milieu de murs normes, de barreaux, de lois et de tampons, de juges et surtout au milieu de diligents gardiens de lordre.

    Personne ne ta accompagne, comme pour sentir que tu allais mourir. Tu leur as dit que tu te tuerais sils tenvoyaient en Tuni-sie. Quelquun a mme dit que ctait ton problme.

    Tes camarades de dtention tont trouve pendue dans les toilettes de la cellule le matin o tu devais tre rapatrie, tire vers le bas par la force qui a bris ton vol, qui la fait prisonnier, tinterdisant dtre en vie et dtre enterre sous la montagne Ton corps, sans plus de paroles urgentes, a t envoy en Tunisie. Mme morte, ils nont pas voulu de toi, ils nont mme pas voulu te concder un petit bout despace sous terre.

    Adieu Mabruka, bella ciao.

    tre migrant, sans papiers, te prive du droit de choisir o vivre et mourir

    Mabruka Mimouni: des paroles urgentes qui nont pas t coutes

    Mabruka Mimouni, tunisienne de 44 ans, qui vivait en Italie depuis 20 ans sans papiers, sest suicide dans le Centre dIdentifi cation et dExpulsion pour Migrants Ponte Galeria de Rome, le jour o elle devait tre transfre en Tunisie. Voici lhistoire dune tragdie qui aurait pu tre vite.

    Tiziana Perna. Photos: Simona Granati. Traduction: Michle Blossier

  • Numro 10 - Dcembre 2010 / Janvier 2011 - www.desinformemonos.com6

    Mexico, District Fdral. Il y a 18 ans, grce lautogestion, est n le premier disque de Los de Abajo (Ceux den bas), un groupe mexicain dont la musique se distingue par la fusion de divers rythmes, qui vont du punk la salsa en passant par le reggae, le hip hop et llectronique.Mais en plus de ce mlange de sons, Los de Abajo se sont caractriss par leur engagement social et pour avoir os tre eux-mmes et dire sans crainte ce quils pensent.

    Vladimir, Yocu et Mauricio Osito (Nounours) sexpriment dans cette interview Desinformmonos.

    La critique sociale, un devoir et un plaisir

    Los de Abajo reconnaissent que leur du-cation et le milieu o ils ont grandi ont t trs importants dans la cration de leur musique. Les paroles de leurs chansons, qui invitent la rfl exion, confi rment leur position: en bas et gauche.

    Nous vivons linscurit et nous voyons lexploitation, cest pourquoi la critique mane de nous; la musique est un vhi-cule pour parler des problmes des Mexi-cains, dit Osito, saxophoniste et vocaliste de Los de Abajo.

    Le groupe considre que la critique sociale est un devoir, et ils prennent plaisir laccomplir. Cest important dinviter les gens sinformer, pour quil puisse y avoir un changement.

    La solution, cest lautogestion

    propos du centenaire de la Rvolution, Los de Abajo considrent quil ny a pas grand chose clbrer, car il existe encore des conditions comme celles qui existaient dans la priode prrvolutionnaire.

    On est en train de vendre le patrimoine national, on ouvre linvestissement priv, on donne plus dimportance aux aff aires quaux tres humains, et la somme

    de toutes ces conditions, cest le dbut dune nouvelle rvolution, dit Yocu, batteur et violoniste.

    La nouvelle rvolution a dj clat ajoute Vladimir, guitariste du groupe . Nous avons lexemple des zapatistes, qui rsistent depuis dj bien des annes. Ils sont la preuve que les choses peuvent se faire autrement. Il faut tre autogestion-naires, et ne rien attendre du gouverne-ment, cest a, la rvolution.

    Atenco, une lumire

    Les membres de Los de Abajo consi-drent que la lutte dAtenco pour obte-nir la libration de leurs 12 prisonniers lutte laquelle ils ont particip est trs importante, parce quelle est comme une lumire.

    Atenco est un phare qui, au milieu de lobscurit, nous montre le chemin de la rsistance. Les gens ont su sorganiser et ont obtenu la libration des prisonniers.

    H.I.J.O.S.

    La lutte contre la disparition des personnes, elle aussi, est soutenue par Los de Abajo, cest ce que dmontre leur participation lanni-

    versaire de H.I.J.O.S., organisation o les enfants de disparus luttent pour que cessent les assassinats pour des causes politiques.

    Cest important quil soit clair pour les gens que les disparus politiques, a existe encore au Mexique, et le nombre de cas nest pas en train de diminuer, mais daug-menter, explique Yocu.

    Alicia et autres projets

    Le chemin parcouru dans le monde de la musique et de la rsistance na pas teint la soif de nouveaux projets chez Los de Abajo, qui en ce moment font la pro-motion de leur disque Alicia, qui a t enregistr dans le forum du mme nom, un lieu pour lequel nous avons beaucoup daff ection, signalent-ils.

    Cest un honneur davoir enregistr un disque lAlicia, cest comme notre deu-xime chez-nous, un lieu autogestionnaire et ouvert la diversit.

    Lanne prochaine, Los de Abajo se produi-ront en Europe, au Canada et aux tats-Unis, et ils enregistreront le disque Latin Ska Force II. Le plus important est de continuer faire de la musique, cest a quon aime.

    Los de Abajo Jouer au son de la rsistanceMarcela Salas Cassani

  • Numro 10 - Dcembre 2010 / Janvier 2011 - www.desinformemonos.com 7

    Je suis Maritza Hernandez, jai quatre enfants que jai fait aller de lavant. Deux tudient et les deux autres ont des enfants. Je travaille depuis que jai quatorze ans. Javais des voisines qui faisaient des ptis-series et jallais les aider les vendre. Sur les marchs je proposais des produits ramens du Honduras. Jai tudi jusqu la premire anne du lyce, puis je suis tombe enceinte. Les grves ont com-menc. Jtais sur le point daccoucher et jai arrt de travailler.

    Aujourdhui je lave, je repasse, je fais des mnages dans des maisons. Mon compa-gnon est lectricien et maon. Ce quon arrive trouver, parce quaujourdhui, cest plutt rare, le travail. En aot et Nol je vends de la poudre pour les fuses et ptards, pour maider un peu. Parce que le mnage cest pas tous les jours, alors que les dpenses en nourriture, si.

    Je soutiens aussi mes neveux. Jaide mes fi lles, une delles est mre clibataire. Ainsi allons-nous, petit petit. La vie t trs dure.

    Le travail de la poudre est trs dangereux. Nous dormons avec le produit dans une maison improvise, et nous y passons le jour et la nuit. Nous mettons notre vie en jeu, la moindre tincelle le feu peut prendre. Les lois sont trs dures et demandent beaucoup de formalits. Mais avec lespoir que tout ira bien, et avec celui de rduire un peu nos dettes, une des lois nous accordera un prt pour payer les impts. Malgr tout, en aot, les ventes ont t trs basses.

    Avant je lavais et repassais beaucoup, mais maintenant jai de larthrite. Pour laver du linge au centre cest jusqu 35 crdobas la douzaine; ici jen gagne 20 ou 25.

    Il faut lutter pour emmener les enfants lcole. Je le dis: vous devez tre meil-leurs que moi, il faut aller de lavant. Les patrons accumulent le travail des domes-tiques, et veulent les payer peu et les mal-traiter. Cest pour a que jai arrt dtre domestique et que je ne moccupe que de laver et repasser. Quand le linge saccu-mule, je me lve tt pour repasser parce que le linge est rendre le lendemain. Et les gens ne veulent pas payer grand chose.Je dis mes deux fi lles qui ont des enfants que si elles veulent tudier et travailler, elles peuvent trouver une formation, a les aidera aller de lavant, pour leurs bbs. Je remercie Dieu du fait que mes enfants saccommodent de ce que jai. Si nous avons des tortillas et du sel manger, on mangera des tortillas et du sel. Ils nexigent rien. Sils avaient faim, ils se tairaient. Jai bon espoir que mes deux derniers fi ls vont russir. Je leur rpte que quand je ne serai plus l il faudra quils sappuient mutuellement les uns les autres parce que je nai pas un sou, rien. Mme la maison o lon vit nest pas mienne.

    Ils doivent donc trouver un travail pour avoir quelque chose eux. Jai fait des demandes la mairie pour acheter une maison, mais ils me la refusent peut-tre cause de mes revenus, qui sont en dol-lars. Mais moi je suis honnte, je le dis que mon salaire est trs bas. Je ne peux pas dire que jai un revenu de tant, a ne va pas le faire. Cest peut-tre pour a quils ne me donnent rien pour acheter un terrain. Mon rve a toujours t davoir une maison moi, do on ne pourra pas enlever mes enfants, pour quils y vivent tous. a cest la vie du pauvre, et pour nous qui narrivons pas nous en sortir, cest trs dur. Tout reste un rve, comme on dit. La vie est chaque jour plus dure et il y a de moins en moins de travail.

    La vie est chaque jour plus dure et il y a de moins en moins de travail

    Maritza est une travailleuse nicaraguayenne, mre de quatre enfants. Un de ses emplois consiste vendre des fuses et des ptards, occupation pour le moins risque.

    Extrait dun tmoignage recueilli par Amaranta Cornejo Hernndez Len, Nicaragua.Photographies de Luigi Partenza.

  • Numro 10 - Dcembre 2010 / Janvier 2011 - www.desinformemonos.com8

    Membre dun petit groupe libertaire (Offensive Libertaire et Sociale - OLS), je suis un homme blanc de 32 ans qui bosse dans la bibliothque Xavier Bichat de luniversit Paris 7 Denis Diderot. Non syndiqu, jessaye de participer aux diverses Assembles Gnrales (AG) qui se droulent sur le site principal de luniversit.

    En mai, pour ce mouvement nous avions ralis, avec une collgue, un tract qui fut diff us dans toutes les cases courrier de la facult de mdecine Xavier Bichat. Un peu isols nous navons pas voulu appeler une AG locale.

    Depuis la rentre de septembre la quasi totalit de mes collgues se mettent en grve. La bibliothque est donc ferme et localement la grve se voit. Les autres petites mains de la facult (ouvriers des services techniques) sont assez massive-ment en grve lors de ces journes.

    Ds que je peux, en fonction du mouve-ment gnral et tudiant en particulier, je me met en grve reconductible mais seul. En octobre, cela dmarreun peu. Le mouvement a cette fois-ci dmarr trs lentement dans notre universit du fait que les cours nont rellement repris quen octobre.

    Il y a bien eu des mots et des actes de solidarit avec dautre grvistes comme ceux dune usine dincinration situe proximit de luniversit dans la ville voi-sine dIvry. La critique gnrale, cest que personne na soulev le fait par exemple quun incinrateur est un producteur de maladies et que lon pourrait souhaiter son arrt total dans le futur.

    partir du 12 octobre a dbut un mou-vement minoritaire de grve reconductible luniversit et ailleurs. Sur ce mouve-

    ment beaucoup ont encore cherch le bastion, dans ce cas les raffi neries, pour gagner dfaut de gnralisation de la grve et des actions directes de blocages et de sabotage de lconomie.

    Moi dans tout cela jai navigu entre la lutte locale et les blocages plus gnraux tels que celui du muse du Louvre ou de Volia propret. La motivation est aussi venu dautres villes o les blocages co-nomiques ont t plus nombreux. Une collgue me raconta par exemple le blo-cage dune zone industrielle sur Amiens.

    Bref le mouvement a exist mais rien de bien motivant cest produit sur Paris. La

    foule de marcheuses et de marcheurs dans les grosses journes cest bien mais quoti-diennement au niveau de mon universit les personnes en mouvement se rduisent petit petit.

    Reste savoir si une auto-organisation de la lutte sera de plus en plus partage pour envoyer balader les cogestionnaires de notre misre que sont les syndicats tra-ditionnels. Ceci pour poursuivre la lutte en arrivant prparer des relles journes de mobilisation appeles directement la base par les personnes qui se sont mises en mouvement cet automne.

    Rimso !

    Point de vue dun bibliothcaire Regard sur la grve en France

    Le mouvement a exist mais rien de bien motivant cest produit sur Paris. La foule de marcheuses et de marcheurs dans les grosses journes cest bien mais quotidiennement au niveau de mon universit les personnes en mouvement se rduisent petit petit.

  • Numro 10 - Dcembre 2010 / Janvier 2011 - www.desinformemonos.com 9

    Dans la continuit de cet entretien avec Desinformmonos son pouse Elisa Larkin Nascimento a rpondu via courrier lectronique, avec lapprobation dAbdias.

    Quel est limportance du Jour national de la conscience noire, le 20 novembre, au Brsil ?

    Le 20 novembre (date de la mort de Zumbi en 1695, important dirigeant noir) sym-bolise la rsistance des africains contre lesclavage. Durant la priode coloniale sur tout le territoire national il existait des quilombos1 et dautres formes de rsistance qui, conjointement, aboutirent labolition de lesclavage. Cest le vritable sens de la lutte abolitionniste, dont les protagonistes ont t les propres noirs. La commmo-ration de cette date a comme objectif de raffi rmer la ncessit de continuer, nous, les noirs, lutter contre le racisme qui imprgne encore ce pays.

    Comment vous valuez la question de la dmocratie raciale dans le Brsil dau-jourdhui ?

    Le racisme au Brsil se caractrise par sa lchet. Ici il ne sassume pas en tant que tel, et pour cela, il ny a pas de sentiment de culpabilit ni dautocritique. On a lhabi-tude de le dcrire comme subtil, mais cest une erreur. Le racisme au Brsil nest pas subtil, cest tout le contraire, pour ceux qui ne veulent pas se voiler la face, il est expos au regard le plus dsinvolte et superfi ciel. Un regard plus profond confi rme la pre-mire impression : oui les noirs sont dans les couches sociales infrieures, ils occu-pent la base de la pyramide sociale, et l ils souff rent de discrimination et de baisse de lestime de soi en raison de leur couleur.

    1-Regroupements desclaves en fuite, dans la fort amazonienne, du dbut du 17e sicle jusqu labolition de lesclavage la fi n du 19e sicle (Ndt)

    Dans ces termes, comment valuer le cas de Cuba ?

    Lidologie raciale cubaine est la sur jumelle de la dmocratie raciale br-silienne. La socit dominante cultive une hirarchie sociale de couleur base sur les valeurs de la suprmatie du blanc. En mme temps, llite majoritairement blanche qui occupe le pouvoir, offi cialise lauto-loge de sa suppose gnrosit his-torique avec les esclaves et les descendants des africains. Dun point de vue cultu-rel, les systmes valorisent loccidental blanc, et dvalorisent, paternalisent ou folklorisent tout ce qui vient dAfrique et des indignes amricains. Dans le cas spcifi que de Cuba, la dynamique entre le rve socialiste et sa ralit confre un ton diff rent au questionnement du systme auquel se rfre la question raciale.

    Quel est limportance de la question de la terre pour le mouvement noir dans le Brsil daujourdhui ?

    La grande majorit des sans-terre, aujourdhui organiss, sont noirs. Lim-portance de la terre est fondamentalement en relation avec le fait que les villes sont pleines. La production agricole base sur des petites units, familiales ou commu-nautaires, est la seule solution pour la campagne et elle a besoin, aujourdhui, de subventions et des politiques dtat pour exister. Les communauts issues des quilombos (qui ont le droit des titres de proprit sur leurs terres depuis la Consti-tution de 1988) sont partie intgrante de cette solution.

    Mois de la concience noire au Brsil Abdias do Nascimento: un sicle de lutte noire

    Abdias est n en 1914, anne durant laquelle les souvenirs de lesclavage (aboli en 1888) taient encore vivaces. Tout au long de ses 96 ans, Abdias a t prsent et a particip dinombrables vnements importants des luttes noires du xxe sicle, non seule-

    ment au Brsil, mais galement aux tats-Unis et en Afrique. Son histoire se confond avec celle de la lutte noire brsilienne.Extrait dun entretien ralise par Joana Moncau et Spensy Pimentel,

    avec la collaboration de Rafael Gomes et de Gabriela Moncau.

    Phot

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    rasil

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    Montagne du Guerrero, Mexique. Dans le municipe dAtlamajalcingo del Monte, au Guerrero, dans le sud-ouest mexicain, les quelques 7000 habitants des 16 com-munauts tlapanques et mixtques (na savi y mephaa) qui le composent ont pris ce 15 aot en assemble la dcision de ne pas reconnatre lautorit du conseil municipal chapeaut par Isidro Andrade Pastrana. Depuis lors ils occupent paci-fi quement les installations de la mairie, pour exiger le retrait de tout le conseil et la reconnaissance lgale de celui quils ont nomm. Ce dernier, selon les informations de la coordination du mouvement, a t nomm selon les us et coutumes indignes.

    Aujourdhui les indignes exigent que le Congrs de ltat du Guerrero recon-naisse ses traditionnelles autorits indi-gnes comme ses lgitimes reprsentants. Simitrio Guerrero Comonforte, membre du nouveau Conseil de Gouvernement Municipal, explique quav ant la dcision du 15 aot, la communaut a tent de construire un dialogue, avec plus de dix runions, mais sans rsultats positifs: runions aprs runions, ces messieurs nont pas cout les communauts. Et donc, en consquence, il est arriv ce quil est arriv. On a dcid luna-nimit de ne pas reconnatre ce conseil. A t dcid aussi de fermer les installa-tions de la mairie, parce quelles taient ouvertes en vain, on ny travaillait pas, elles navaient aucune utilit.

    Depuis les problmes avec le congrs ont commenc, pour que les dputs puissent examiner la proposition de destitution du conseil dAtlamajalcingo. Nayant aucune rponse des dputs, les communauts ont fait appel leur mmoire historique, revenant sa forme propre dorganisation, son propre droit, raconte Simitrio.

    Le 5 octobre dernier, les gens dAtlama-jalcingo ont voyag jusqu Chilpancingo, capitale du Guerrero, et ont manifest jusquau Congrs quils ont ferm pour exiger la destitution et la reconnaissance du nouveau conseil municipal. Mme avec a, la proposition na pas t discute jusqu aujourdhui. Ce que lon a vu lors de ce processus, cest que le systme lair dtre fait pour ne pas favoriser les plus pauvres, les peuples indignes. Nous insistons sur le fait que cette lutte va continuer, dit le conseiller.

    Alors quils attendent une rsolution du cas, les habitants du municipe non conforme larrt du harclement de la police et de larme, qui font en perma-nence des patrouilles dans le municipe, et

    laube rgulirement. Ds quils auront obtenu la reconnaissance du nouveau congrs, les habitants dAtlamajalcingo veulent aussi en fi nir avec la politique partidaire du municipe, quils consi-drent ineffi cace et dispendieuse. Les mthodes traditionnelles prvoient des mcanismes pour que le pouvoir tourne et ainsi empcher les confl its, raconte Simitrio. La politique partidaire et les lections servent seulement dpenser du temps et de largent, et diviser le peuple.Nous avons des manires plus effi caces de rsoudre les problmes. Les communauts sont fatigues dtre fati-gues. Nous ne voulons plus ltre. Nous sommes nervs et nous en avons assez. On veut juste dire: a suffi t!

    Nous sommes fatigus dtre fatigus:

    plus jamais de partis! Une communaut du Guerrero ne reconnat pas les autorits et exige

    la fi n des lections et des partis et la reconnaissance de son autogouvernement.Extrait dun texte de Spensy Pimentel

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    Un espace ducatif libre auquel le mot cole va comme un corset, un lieu pas du tout conventionnel o la prmisse fondamentale est la libert au sein dune collectivit, contribuant la croissance et la formation des enfants partir de ce que chacun veut, de ce dont chacun a besoin. Donyets est une audace pdago-gique do surgissent des personnes qui refusent limposition et lautoritarisme, des tres humains critiques et rebelles, loin de la docilit quon inculque dans les coles formelles.

    Dans le quartier de Pedralvilla, Valence, on construit pas pas un pari ducatif diff rent, plein de recoins dapprentissage qui chappent aux rgles de lducation formelle. Il ne sagit pas dun espace o les enfants apprennent la mme chose dune autre manire, prcise Jordi Mar-tnez, un de ses coordinateurs. Il sagit, indique-t-il, dun travail psychodyna-mique et prventif, qui essaie dtablir les bases du changement depuis lenfance.

    Rien de plus rebelle et mancipateur que de respecter les processus nor-maux des enfants, en faisant quils se sentent aims, voulus, concerns, et surtout pris en compte. Il sagit, avant tout, de les pousser faire ce dont ils ont envie, quils dcident de ce quils veulent apprendre et quoi ils veulent jouer, en partant du fait que chacun et chacune sont diffrents, quils ont leur caractre et leur rythme propres.

    Imma Serrano, une autre des coordina-trices et une promotrice enthousiaste du projet, signale quil ne sagit pas quils grandissent sans rgles, mais quils sachent que leur parole compte au mileu dune collectivit et dautres paroles qui comptent elles aussi. Ce sont des enfants capables de lutter pour ce quils veulent, et qui ont le souci, par exemple, de demander des choses bonnes pour le monde. Le rsultat est, sans le moindre doute, quils se dveloppent avec un plus grand bonheur.

    Cette exprience ducative nest pas reconnue institutionnellement, ici, les enfants ne sont pas valus, il ny a ni qualifi cations ni grades, et les parents assument le risque de ne pas dispo-ser des papiers offi ciels. Quelque chose qui peut paratre insolite dans un pays europen o prdominent les valeurs de la concurrence.

    Ici, explique Imma, il ny a pas dobjectifs a priori et les enfants (de 2 14 ans) se dveloppent sans aucune de ces pressions. On leur fournit les ressources et les outils pour poursuivre leur ducation secon-daire et universitaire, et dans la majorit des cas, une fois insrs dans le systme formel, ils se montrent dexcellents lves, critiques et toujours curieux.

    Doyotens travaille sans reconnaissance offi cielle, et par consquent na pas de res-sources institutionnelles. Dans cet espace, lautogestion est une partie importante du projet, car il englobe toute la communaut.

    Ceux den bas

    Modle dducation libreGloria Muoz Ramrez

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    REVUE DE QUARTIER BIMESTRIELLE Numro 10 - Dcembre 2010 / Janvier 2011 www.desinformemonos.orgDirection Gloria Muoz Coordination Amaranta Cornejo Hernndez et Marcela Salas Casani

    Maquette : Francis Goche Traduction Traducteurs solidaires

    Desinformmonos hermanostan objetivamente como podamos

    desinformmonos con unciny sobre todocon disciplina

    que, esplndido que tus vastas praderas

    patriota del podersean efectivamente productivas

    desinformmonosqu lindo que tu riqueza no nos em

    pobrezca

    y tu ddiva llueva sobre nosotros pecadores

    qu bueno que se anuncie tiempo seco

    desinformmonosproclamemos al mundo la mentid

    ad y la verdira

    desinformmonosnuestro salario bandonen se desa

    rruga

    y si se encoge eructa quedamentecomo un batracio demcrata y sac

    iado

    desinformmonos y bastade pedir pan y techo para el mser

    o

    ya que sabemos que el pan engorda

    y que soando al rasose entonan los pulmones

    desinformmonos y bastade paros antihiginicos que provoc

    an

    erisipelas y redundanciasen los discursos del mismsimo

    basta de huelgas infecto contagiosas

    cuya razn es la desidia tan subversiva como ftida

    garanticemos de una vez por todas

    que el hijo del patrn gane su pancon el sudor de nuestra pereza

    desinformmonospero tambin desinformemos

    verbigraciatiranos no temblispor qu temer al pueblosi queda a mano el delirium treme

    ns

    gustad sin pnico vuestro scotchy dadnos la cocacola nuestra de ca

    da da

    desinformmonospero tambin desinformemos

    amemos al prjimo oligarcacomo a nosotros laburantes

    desinformmonos hermanoshasta que el cuerpo aguantey cuando ya no aguanteentonces decidmonoscarajo decidmonosy revolucionmonos.

    Mario benedetti