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UN SOIR AU MUSÉE | UNE EXPOSITION ÉVÈNEMENT JEAN EMMANUEL PRUNIER, COMMISSAIRE-PRISEUR 18 MAI 2018 ROUEN UNS OIR AU MUSÉE VOLUME 1

18 MAI 2018 ROUEN OIR - prunierauction.com · Line Vautrin élabore un nouveau matériau et une nouvelle technique qu’elle fait breveter: « le Talosel». Acronyme construit autour

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UN SOIR AU MUSÉE | UNE EXPOSITION ÉVÈNEMENTJEAN EMMANUEL PRUNIER, COMMISSAIRE-PRISEUR

18 MAI 2018 ROUEN UNS O I R A U M U S É E

VOLUME 1

VENTE AUX ENCHÈRESDU DIMANCHE 20 MAI 2018, À LOUVIERS

À m o n f i l s Ma x i m e

P R É L U D E À L A

Rouen : un soir au muséeVENDREDI 18 MAI 2018

Les pièces maîtresses seront exposées de

18h à 22h dans le Jardin des Sculptures du

musée des Beaux-Arts, Esplanade Marcel

Duchamp.

Parking Palais de Justice, musée des Beaux-Arts

LouviersSAMEDI 19 MAI de 11h à 12h et de 14h à 17h30

DIMANCHE 20 MAI de 11h à 12h.

28, rue Pierre Mendès-France

SVV PRUNIER SOCIÉTÉ DE VENTES VOLONTAIRES

28, rue Pierre Mendès-France 27400 Louviers - France

Tél. 02 32 40 22 30 - Fax 02 32 25 15 05 [email protected]

Agrément n° 2002-176

www.prunierauction.com

JEAN EMMANUEL PRUNIER

EXPOSITIONS

Haute coutureLa fabuleuse histoire de Monsieur Fath . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 10

Entre virtuosité et singularité . . . . . . p. 13

Bettina et la collection du printemps 56 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 15

Une automobile à propulsion humaine . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 16

Charles LapicqueL’apport de Lapicque dans les œuvres de ses contemporains . . . . . . . . . . . . . p. 21

L’Invitation à la sagesse . . . . . . . . . . . . p. 22

Une histoire de dessins . . . . . . . . . . . . p. 24

Les destroyers . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 27

L’orage sur Bréhat . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 28

L’intensité magique des arts primitifsLe coup d’État artistique . . . . . . . . . . . p. 30

Un objet sauvage d’Alexandre Noll. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 34

Le masque à bec d’oiseau de Charles Lapicque . . . . . . . . . . . . . . . . p. 37

Les deux masques . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 39Aux Îles Marquises . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 40

Lumières et couleursJean Puy et Paul Sérusier . . . . . . . . . . p. 44

Othon Friesz . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 46Suzanne Valadon . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 48Laurens par Rodin . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 50

Jules Dalou . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 54

Berthe Morisot . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 58

Joseph Cormier . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 60

Haute lecture médiévaleMANUSCRITS

Quand la peinture s’invite dans les livres . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 70

PRÉCIEUX INCUNABLES

Le berceau de l’imprimerie . . . . . . . . . p. 88

Le Diable emporte les emprunteurs de livres ! . . . . . . . . . . . p. 107

ROMANS COURTOIS ET RÉCITS DU MOYEN ÂGE

Le roman de la rose . . . . . . . . . . . . . . . . p. 115

Un livre de Boccace . . . . . . . . . . . . . . . . p. 117

L’affaire Martin Guerre . . . . . . . . . . . . p. 119

Objets raresUne montre de voyage . . . . . . . . . . . . . p. 120La géographie selon Mercator . . . . p. 122Soigner par les plantes au XVIIIe siècle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 125

D’argent, d’ivoire et de vermeil . . . p. 126

Fer forgé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 128

Émaux de Limoges . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 131

Saint Vincent . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 133

Du bout des doigts . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 134

Aux armes de Madame de Maintenon et du duc de Noailles . . . . . p. 137

Au service des dieux Les métamorphoses d’Ovide . . . . . . p. 140

L’homme démontable . . . . . . . . . . . . . . p. 145

Papiers peints . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 146

Civilisations disparues Un couvercle de sarcophage de la collection de Roger Peyrefitte . . . . p. 148 Les pré-incas . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 154

Les conditions de la vente . . . . . . . . . . . . . . . p. 159

SOMMAIRE

Le 18 mai 2018, exposition Un soir au musée, à Rouen à partir de 18hJardin des Sculptures - Musée des Beaux-Arts de Rouen - Réunion des Musées Métropolitains.

IL EST DES RENCONTRES PLUS IMPORTANTES QUE D’AUTRES,

NÉES D’UNE SIMPLE ÉMOTION, DE REGARDS CROISÉS

OU DE DIALOGUES IMPROBABLES.

6

La découverte d’un sarcophage égyptien

et de son propriétaire déclencha le point de

départ de cette belle épopée. Suivront pêle-

mêle d’autres histoires : les photographies de

la muse Bettina Graziani, égérie du couturier

Jacques Fath, les peintures de Charles

Lapicque ou les sculptures tourmentées

d’Auguste Rodin ou de Jules Dalou. Ce sont les

livres du Moyen Âge, manuscrits et incunables

enluminés qui soulevèrent en moi plus de

rêve et de passion. Quand la peinture s’invite

dans les livres, les œuvres se métamorphosent

et s’ imprègnent d’une rare magie. Une

telle collection nécessitait à mes yeux une

exposition dans un musée et c’est au musée

des Beaux-Arts de Rouen que nous allons

nous poser pour un soir le 18 mai 2018. Une

façon pour moi de renouer avec le cardinal

d’Amboise, célèbre collectionneur et mécène,

qui posséda au début du XVIe siècle l’histoire

de saint Augustin pour sa bibliothèque du

château de Gaillon. Ce manuscrit enluminé

aujourd’hui retrouvé sera l’un des fleurons de

cette nouvelle vente aux enchères le 20 mai

2018 à Louviers.

EditoREGARDS CROISÉS

Par Jean Emmanuel Prunier,

Commissaire-Priseur

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Haute coutureJA C Q U E S FAT H R É I N V E N T E L E S F O R M E S , L E S C O U L E U R S D A N S L’ E S PA C E

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JACQUES FATH

“ En août 1939, je devais faire toutes les robes du film Bal Tabarin. Malheureusement la mobilisation a tout arrêté. Je crois qu’il serait intéressant pour les sociétés d’avoir dans leur studio comme en Amérique un modéliste et un atelier de couture qui, comme moi pour-rait dessiner et faire exécuter les robes selon la personnalité des artistes et leur rôle, mettre en valeur les tissus, les couleurs et les contrastes.”

Jacques Fath, lettre inédite datée du 29 Juillet 1940

56. PORTRAIT DE JACQUES FATH - Photographie sur papier argentique, circa 1950.

9

Les deux noms qui reviennent le plus

souvent sur les lèvres du Tout-Paris de

la haute couture sont Dior et Fath, indique le

journal Paris-Match du 18 mars 1950. Jacques

Fath disparaît à l’âge de 42 ans en pleine gloire.

La découverte de cet incroyable ensemble de

photographies, dessins, lettres apporte un

nouvel éclairage sur le génial créateur, « ce

météore de la mode ». Cette collection va

permettre de saisir un peu plus le portrait du

couturier et l’esprit de ses créations. L’après-

guerre montre un Paris ressuscité et festif,

jeune, facétieux, beau, drôle et surdoué, il

transforme les soirées du Tout-Paris en défilé

de mode, organisant des bals au château de

Corbeville. De tous les couturiers, il était

le plus joyeux, le plus fantaisiste, aimait se

déguiser en Charlot, en prince des îles ou en

cow-boy. L’Europe et New-York se disputaient

ses collections, attirant les plus belles femmes

comme Paulette Godard, Rita Hayworth,

Katherine Hepburn, Eva Peron, Ingrid

Bergman, Marlène Dietrich, Michèle Morgan.

Le palais Galliera lui rendait un hommage

en 1993. Dans cette exposition, les stars

de la photographie de la mode comme

Henri Clarke, Irving Penn, Willy Maywald

transcendaient le génie créateur de Jacques

Fath. L’exposition au musée Galliera fut aussi

une occasion de présenter une centaine de

robes empruntées au Metropolitan Albert

Museum, à la collection d’Yves Saint-Laurent.

Paris l’adorait.

Bibliographie : Jacques Fath par Valérie Guillaume, éditions Adam Biro, Paris Musées

La fabuleuse histoire de Monsieur Fath

56. JACQUES FATH ET SA MUSE

Photographie sur papier argentique, circa 1950.

10

56. LE MODÈLE - Photographie sur papier argentique, circa 1950.

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Line Vautrin élabore un nouveau matériau et une nouvelle technique

qu’elle fait breveter : « le Talosel ». Acronyme construit autour des

syllabes de la résine de synthèse Acétate de cellulose élaboré, le Talosel

incrusté de petits éclats de verre miroitant sera à partir des années

cinquante de toutes ses créations proposant bijoux, cadres et miroirs à

l’instar du modèle « soleil torsadé » que nous présentons ici et d’où se

dégagent l’esprit et la délicatesse de l’artiste.

51. SOLEIL TORSADÉ

Miroir d’inspiration solaire aux formes rayonnantes, le cadre est en résine « Talosel »,

signature en creux « Line Vautrin » (1913-1997) et cachet ovale avec inscription « ROI » pour

miroir. Années cinquante.

entre virtuosité et singularité

“ Aussi loin que je remonte dans le passé, je me revois ajustant des brindilles ”

55. JACQUES FATH (1912-1954).Carnet de croquis de dessins et notes, reprenant l’Art et la mode de 1910 à 1918, mine de plomb et crayon. (27 x 21 cm) et photographies.

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BETTINA ET LA COLLECTION DU PRINTEMPS 56

C’était l’époque heureuse de l’après-guerre. Rien ne comptait vraiment.

Ce livret regroupant près de 300 planches-contacts présente la collection

Printemps de 1956 de la Maison Jacques Fath. Après le décès de son époux

Geneviève Fath n’engagera pas de modéliste ; l’équipe en place revisite avec

talent l’esprit des créations passées du maître. Ces photographies sont un

témoignage de l’élégance française à l’instar de ce modèle rendu célèbre par le

photographe Henry Clarke « le plus parisien des photographes américains » et

le mannequin Dovima chez Mme Geneviève Fath pour présenter un ensemble

de la collection 1956 complété par une étole en organdi blanc plissé.

56. LA COLLECTION DE PRÊT-À-PORTER DE 1956

Collection de 400 photographies sur papier argentique par Willy Maywald. On y joint une importante collection de

photographies de et par André Ostier, Agence Photo A.B.C, AGIP Robert

Cohen, Amson Marcel, Brodsky Michel, Carone Walter, Drucker-Hilbert

Co. Inc, Feneyrol J., Green Lennart, Heggemann Storp, G. Leyckam, Koruna Paul, Lido Serge, Max Foto, Morandotti,

Muret-Berhaut, N. Naef Fotobureau, Photo Maywald, Photo R. de Morgoli, Rizzo Willy, Séeberger Frères, Studio

C.P.S, Studio Franz, Van Kollem Lou, Zimmermann Werner (Salon de

couture, dans l’atelier, les défilés à New-York, bals et fêtes au château de

Corbeville)

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Dans les années vingt, l’automobile reste

l’apanage des milieux aisés. Charles

Mochet (1880-1934) est un constructeur

inventif au cœur d’une initiative tentant de

rendre l’automobile plus largement accessible.

Pour ce faire, il développe le concept de

« transport minimal » et glisse son vélocar

à la place laissée vide entre l’automobile

et la bicyclette. Optimisés pour en réduire

le coût, ces cycles fermés à quatre roues

ne comprenaient que le strict nécessaire.

Sensible aux exigences et aux avancées de

l’aéronautique, Charles Mochet en utilise

les matériaux comme le Triplex, un bois

contreplaqué facile à cintrer. Mais s’il est

attaché aux problèmes de conception pure du

vélocar, il ne reste pas moins convaincu de

l’importance de son design. Il lui donne alors

un style résolument moderne à l’apparence

ronde et fuselée, une esthétique directement

inspirée du monde de l’aviation.

UNE AUTOMOBILE À PROPULSION HUMAINE

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UNE AUTOMOBILE À PROPULSION HUMAINE

53. VÉLOCAR CAMIONNETTE À PÉDALES

Vélocar camionnette à pédales de la manufacture Charles Mochet, Puteaux France. Vers 1930. Porte une plaque : « Vélocar, 68 rue Roque De Fillol. Puteaux (Seine). Record du monde de l’Heure à bicyclette ordinaire 45km/h. Record du monde de l’heure en Vélocar 50 km/h ». Longueur : environ 230 cm.

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Charles LapicqueL’ A LT E R N AT I V E F I G U R AT I V E D E L’ A P R È S - G U E R R E . A P R È S L E S S O U F F R A N C E S D E L A G U E R R E , L’ A RT I S T E P R O P O S E U N A RT S I M P L E O Ù L’ H O M M E O C C U P E L A P L A C E C E N T R A L E .

Né en 1898 à Theizé dans le Rhône, Charles

Lapicque ne déroge pas à la tradition

familiale et embrasse une carrière scientifique.

Il obtient son diplôme d’ingénieur à l’École

Centrale en 1921 et, quelques années plus tard,

intègre un laboratoire à la Faculté des Sciences

de Paris où il mène des recherches en optique

sur la perception des couleurs.

Couronné du titre de docteur en Sciences

Physiques, il étudie les réactions de l’œil face à

une source lumineuse intense, à l’origine de la

formation des images étoilées qu’il reprendra

plus tard dans certaines de ses œuvres.

Le portrait de Charles Lapicque dans son atelier.

Photo sur papier argentique de Richard De Grab, circa 1950 (prêt de la famille).

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L’artiste dans son atelier, photographie sur papier argentique, circa 1950 (prêt de la famille).

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L’APPORT DE LAPICQUE DANS LES ŒUVRES DE SES CONTEMPORAINS

Le peintre Alfred Manessier écrit, suite à une

exposition collective historique à la galerie

Braun, à Paris, en 1941, intitulée « Vingt

peintres de tradition française » : « Tout au

début de l ’Occupation, quand nous nous

sommes tous retrouvés, nous n’avions pas

le même univers, nous nous connaissions

peu, mais c’était un effort collectif, nos

pensées avaient une base commune. C’était

Lapicque alors qui était le plus influent. En

fait, il était l’animateur, car il apportait, dans

nos discussions, une nouvelle effervescence

venant après le Cubisme. Il s’agissait de faire

du nouveau, de tout reprendre à zéro ; tout

était dispersé et il fallait être fort pour penser

à la peinture en ce temps-là. » L’influence de

Lapicque est évidente entre les années 1940 et

1950. À partir de 1942, d’abord Bazaine, Estève,

Gischia, puis Manessier, Singier, Le Moal, Elvire

Jan, Pignon adoptent le style de Lapicque dans

sa quête de transparence.

Dès sa jeunesse, Charles Lapicque comprend

avec l’expérience cubiste ouverte par cette

école, qu’il y a de ces possibilités immenses de

développements plastiques.

S’il acquiert sa personnalité de créateur en

assimilant les apports de ses prédécesseurs,

Cézanne, les grands cubistes, Matisse, Delaunay,

Dufy, c’est avant tout parce qu’il s’imprègne

de l’esprit des œuvres déjà produites et se

pénètre de toutes les libertés dont témoignent

les réalisations de ces grands maîtres : libertés

à l’égard des perspectives à multiples points de

vue, libertés à l’égard de l’espace, instaurant

une technique d’interpénétration des plans et

des formes, libertés à l’égard de la couleur qui

devient indépendante du contour.

En parallèle, il étudie longuement les vitraux du

Moyen Âge avec leur cloisonnement impératif

de l’espace et leur luminosité foudroyante, ainsi

que les faïences de Rouen au XVIIIe siècle ou les

émaux champlevés du XIIe siècle.

Dès 1935, Charles Lapicque magnifie son œuvre

peinte, par ruptures de plans, par recherches

sur la transparence des corps, sur la spiritualité

de l’objet ou sur la transcendance de l’être, dans

le but d’apporter à sa peinture, sous tous ses

aspects imaginables, une réelle présence et ce,

jusqu’à la création de sa dernière toile en 1988.

Les œuvres de perspectives à points de vue

multiples observées tant chez les cubistes que

dans les enluminures et tapisseries anciennes

sont développées de 1939 à 1975 où la démarche

de l’artiste excelle avec « Les Invalides ».

38. POUR DANIEL-HENRY KAHNWEILER. STUTTGART, GERD HATJE, 1965SPIES (Werner) (éd.). In-4, toile bleue d’éditeur, jaquette illustrée d’une lithographie de Picasso, étui. Édition originale de ce mélange publié à l’occasion du 80e anniversaire de Kahnweiler et auquel ont collaboré de nombreux artistes, écrivains, philosophes, musiciens, critiques d’art tels que Brassaï, Picasso, Aimé Césaire, Derain, André Masson, Ponge... L’ouvrage comporte de nombreuses illustrations et fac-similés d’autographes, dont 9 lithographies de Picasso, Elie Lascaux, Beaudin, André Masson, Suzanne Roger, Eugène de Kermadec, Yves Rouvre et Sébastien Hadengue. On compte deux lithographies de Picasso. Un des 200 exemplaires de tête, celui-ci faisant partie des 100 réservés aux amis et collaborateurs, portant le numéro XVII et comprenant une suite à part des neufs lithographies imprimées sur rives et signées par les artistes. Porte un envoi amical, daté du 31 mars 1966.

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L’INVITATION À LA SAGESSE

1 Médiations, Hiver 1961/62, page 102

Charles Lapicque écrit à propos de son œuvre

l’« Invitation à la sagesse »1 : « Après un

premier mouvement de surprise et d’humeur,

le tigre viendra participer aux méditations

d’un groupe de philosophes montagnards en

Chine, et franchira, en leur société, les derniers

degrés de l’humanisme confucéen. Il va sans

dire qu’à chacune de ces étapes civilisatrices,

dictées par le souci d’assurer le bonheur de

mes charmants compagnons, la peinture

trouvait son compte. Les rapprochements

inattendus du pelage rayé de l’animal avec

les broussailles fournissaient matière au

déploiement de toutes mes possibilités

abstractisantes ou figuratives. »

L’artiste souhaite que sa peinture ouvre à

notre imagination « un espace pur, fait pour

elle, où notre rêve pût se déployer en paix ».

Pour cette œuvre, afin d’atteindre l’éclat

spirituel recherché dans un mouvement de

sympathie envers une civilisation disparue.

Charles Lapicque transcende toutes les libertés

à l’égard de l’espace et de la couleur. Tel un

musicien jouant une symphonie des tons

les plus purs, l’artiste construit par chaque

touche colorée l’espace du tableau. Les teintes

orangées et rouges font formes et contre-

formes à des jaunes purs et transparents qui

illuminent le ciel bien au-delà des montagnes

lointaines. Cette profondeur est encore

accentuée par les bleus et violets du premier

plan. Il emploie, pour rendre la lumière et les

lointains, des teintes somptueuses orangées et

rouges qui s’illuminent.

Cet « espace pur », imaginaire et spirituel,

développé pour nos sens, dégagé de toute

imitation réaliste, devient hors du temps : il

est à la fois celui de l’art et de l’éternité.

42. L’INVITATION À LA SAGESSE

Lapicque, Huile sur toile, 1961. Signée et datée en bas à gauche, contresignée, titrée et datée au dos. 97x161cm. Un certificat d’authenticité de Monsieur Métayer, expert attitré de l’œuvre de Charles Lapicque, sera remis à l’acquéreur.Provenance : Collection particulièreBibliographie : Cette œuvre sera répertoriée dans le catalogue raisonné actuellement en préparation par Monsieur Métayer

41. LES INVALIDES

Huile sur toile, 1975. Signée et datée en bas à gauche, 97x130cm

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L’entraînement incessant auquel je me

soumettais dans le domaine du dessin me

permit d’aborder, en 1949, la figuration des

chevaux. C’était un sujet qui me passionnait

depuis ma jeunesse mais que je n’avais fait

qu’effleurer jusqu’alors. Il me conduisit à

davantage d’observation, car si le visage

humain nous est tellement intérieur que

nous le voyons paraître dans le simple

agencement de deux cercles et d’un triangle,

« la plus noble conquête de l’homme » doit

être picturalement reconquise par des efforts

autrement spécifiques… Le mouvement, il

va sans dire, prédomine dans ces œuvres. Il

résulte, me semble-t-il, tout d’abord du dessin

qui allonge les corps des chevaux, qui prend

le peloton tout entier, jockeys et montures,

dans un rythme suggérant un déplacement

rapide. Il vient également, je crois, d’un

certain chevauchement de la teinte et du trait,

ainsi que de la qualité mouvante du rouge et

de l’orangé, précédemment reconnue au cours

de mes recherches scientifiques. Une part

prépondérante est toutefois laissée à l’instinct,

à l’impulsion du moment, si bien que l’analyse

méticuleuse de ces divers facteurs n’est pas

toujours facile.

Charles Lapicque

48. ETUDE DE JOCKEY ET TOILETTE

Lapicque, 1950Plume et encre de chine sur papier. 335x500mmS.d.h.g. (mine de pl.) : Etude/Lapicque/50

48. LES DERNIERS CONSEILS

Lapicque. Plume et encre de chine sur papier. 335x500mmS.d.b.dr. (mine de pl.) : 50/Lapicque

UNE HISTOIRE DE DESSINS

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UNE HISTOIRE DE DESSINS

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40. LES DESTROYERS

Lapicque, Huile sur toile, 1952. Signée et datée en bas à droite, contresignée, titrée et datée au dos. 81x130cmProvenance : Galerie Galanis-Hentschel, 1953, Paris. Collection particulière. Bibliographie : Bernard Balanci, « Lapicque, catalogue raisonné de l’œuvre peint et de la sculpture », Editions Mayer, Paris, 1972, n°244 reproduit, René Le Bihan, « Charles Lapicque », Editions Le Télégramme 2007, page 37 reproduit, Philippe Bouchet, « Charles Lapicque le dérangeur », Thalia édition 2009, page 126 reproduit

LES DESTROYERS

Ce tableau « Destroyers aux régates », fait

partie d’une importante série exécutée

entre 1951 et 1952, sur le thème des régates,

dans laquelle l ’artiste exprime ses deux

préoccupations majeures : l ’espace et le

mouvement.

Selon son principe de l ’imbrication des

formes, le peintre restitue ici l’impression

des mouvements combinés des bateaux et des

vagues « où la demi-transparence des voiles

vient accroître l’impression de mouvement,

en nous rappelant qu’un court instant plus

tôt, nous avons vu le paysage qui se trouve

actuellement derrière elles ».

Ces impressions optiques d’espace et de

mouvance sont également suggérées par

l’effervescence du vent et des vagues qui

enroulent et déroulent de fulgurantes

arabesques, dans un chaos d’embruns et de

nuages, d’où surgit encore la profondeur de

l’espace dans un contexte d’aplats de couleurs

pures. Les bateaux en fête sont peints en

valeurs claires et compartimentés de la même

manière que le ciel et la mer, ce qui conduit

à ne pas les privilégier en tant que motif

dans la composition. La transparence des

voiles, comme de la cheminée du destroyer

au premier plan, permet au regard d’aller

au-delà des formes. L’artiste fait intervenir

pour cela la mémoire et invite l’observateur

à se rappeler ce qu’il y a derrière les voiles ou

structures mobiles. Par ce procédé, Lapicque

exprime en outre la durée, puisqu’il propose

« le rétablissement de nos droits par rapport

à l’infirmité que créent l’opacité des corps et

l’observation arrêtée un instant. »

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L’ORAGE SUR BRÉHAT

Cette œuvre horizontale reproduit le mouve-

ment d’un paysage marin agité par le vent.

La vivacité des couleurs fait écho à la passion

de Charles Lapicque pour la Bretagne, même

s’il doit à ses recherches sur les phénomènes

optiques la justesse avec laquelle, dans le fond

du tableau, il traduit une impression de pluie.

Le clair-obscur qui apparaît sous un lointain

lumineux, fortement imprégné du style vé-

nitien, semble particulièrement féerique à la

tombée du jour. Il est inventé par le peintre

pour donner aux lumières un éclat plus sai-

sissant ou plus dramatique qui lui rappelle les

spectacles exaltants observés quelques mois

plus tôt en « vaporetto » lors d’un séjour dans

la cité des Doges.

Comme l’écrit Charles Lapicque à la fin de ses

Essais sur l’Espace, l’Art et la Destinée, Edi-

tions Grasset, Paris, 1958 : « Des profondeurs

inconnaissables qui nous entourent peut jaillir

la clarté. »

39. L’ORAGE SUR BRÉHAT

Lapicque, Huile sur toile, 1956. Signée et datée en bas à droite. 82x117cm.

28

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246. FIGURE MASCULINE ABRON

Côte d’Ivoire. Bois dur, patine laquée noire, importante fissure à l’arrière comblée par de la résine, rehauts de kaolin et de bleu de lessive, bracelets de chevilles en pâte de verre, ainsi que la ceinture. Bras courts aux mains plaquées sur l’abdomen orné d’une scarification verticale se divisant en deux pour entourer le nombril saillant, cou annelé. Tête importante et ronde ornée d’un petit chignon, les yeux en grains de café sont peints en blanc et bleu ainsi que les lèvres. Debout sur des jambes légèrement fléchies et reposant sur une petite base rectangulaire gravée et rehaussée de kaolin. H : 49,5 cm.

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L’intensité magique des arts primitifsLes Africains auraient-ils inventé l’abstraction avant les Européens ?

Les œuvres Kotas suggèrent avec virtuosité un être par une simple figure

symbolique sans jamais s’asservir du réel.” Tout porte sur le regard dans ce

reliquaire, les yeux mi-clos semblent garder les secrets. La bouche est absente,

le visage décoré de cuivre rouge et jaune aux formes convexes et concaves. Tout

repose sur un équilibre parfait et renforce la magie entre les humains et les esprits

de la nature. La puissance surnaturelle mélange ici “apaisement et effroi, malaise

et sérénité”. Derain, Picasso, Braque, Elena Rubinstein ne s’y sont pas trompés.

266. FIGURE DE RELIQUAIRE KOTA, GABON

Grande figure de reliquaire de style classique, la face ornée de plaques de laiton et de cuivre gravé au repoussé, les parties latérales décorées aussi de lignes et de chevrons. Absence de sculpture au revers, mais un épannelage précis où l’on peut percevoir les coups d’herminettes et une patine ancienne d’usage. H : 53,5 cm. Laiton et cuivre sur une âme de bois, fer. Patine d’usage ancien. Provenance : Rapporté du Gabon par le Président de la chambre de commerce de Paris des bois coloniaux vers 1950.

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245. LE BEL ESPRIT GOURO

Masque « GU » Gouro. Côte d’Ivoire. Région de Bouaflé. Bois dur à patine laquée noire d’usage, gorge de fixation de la parure à l’arrière, trous latéraux pour y fixer un mors. Collecté par Maurice Lapalud, administrateur colonial, gouverneur du Gabon, gouverneur de la Côte d’Ivoire entre 1925 et 1930. Une place d’Abidjan porte son nom. Ce masque, remarquablement sculpté, collecté très tôt, n’est pas sans rappeler les masques publiés dès 1929 par Guillaume et Munro, dits du « maître de Bouaflé ». Il se caractérise par son profil, front convexe et protubérant surmontant un nez fin et concave, les yeux aux paupières étirées vers les tempes, des lèvres fines, une surface polie soigneusement et enduite d’une belle laque noire.

LE COUP D’ÉTAT ARTISTIQUE

“Le bonheur est un ange au visage grave”,

écrit Modigliani en mai 1913. Avec l ’art

africain, il libère l’art de la pensée occidentale,

recherchant un art conceptuel, un style

abstrait, sauvage.

C’est vers 1900 que les voyageurs rapportent

les masques nègres. Ils fascinent. On organise

des expositions au musée d’ethnographie du

Trocadéro, au musée d’Histoire Naturelle de

Paris ou “Expéditions d’Afrique” qui attirent

plus de 30 000 visiteurs. La génération Picasso

va se nourrir de cette nouvelle liberté, d’une

expression révolutionnaire, d’un art nouveau

simplifié. Nolde, Derain, Vlaminck, Braque,

Matisse, Modigliani y puisent l’art du XXe

siècle.

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248. MASQUE DE COURSE DAN DIOMANDÉ TANGAGLÉ

Côte d’ivoire. Bois dur, patine d’usage ancienne laquée noire, métal. Masque classique aux traits réguliers et aux yeux cerclés de métal. Le pourtour est marqué de scarifications permettant de l’attribuer au groupe Diomandé, au Nord du pays Dan. H : 24 cm.

L’essence que travaille ici Alexander

Noll est rare. L’ébène est taillée dans la

masse, minutieusement polie. La justesse

de l’intervention du créateur sublime, elle

n’altère pas. L’objet organique reste matière

et le bois dont il est fait nous apparaît alors

comme un moyen d’expression pure, comme

une substance primitive aux vertus magiques.

UN OBJET SAUVAGE D’ALEXANDRE NOLL

34

52. ALEXANDRE NOLL (1890-1970)

Boîte à couvercle abattant en ébène sculptée, signée A.NOLL, 8,5 x 23,8 x 17,8 cm. Alexandre Noll.

UN OBJET SAUVAGE D’ALEXANDRE NOLL

35

Intérieur de Charles Lapicque, photo sur papier argentique, vers 1950, prêt de la famille

36

Aux termes de longues méditations sur l’art

d’Afrique noire et l’art précolombien qu’il

collectait depuis 1938, Charles Lapicque disait

à propos des objets de la collection Granville

à Dijon qu’il présentait dans la « Revue du

Louvre et des musées de France »1 : « Ce ne

sont pas les siècles en eux-mêmes qui nous

exaltent, mais la présence des dieux, devant

lesquels le créateur de ces œuvres s’est à ce

point effacé, qu’à supposer qu’on nous révèle

son nom, le plus grand hommage à lui rendre

serait de l’oublier aussitôt. Au reste il s’en

va de même pour une forme d’art qui s’est

prolongée presque jusqu’à nos jours : l’art

africain. Ignorant toutes « Renaissances »,

il est demeuré si semblable à lui-même que

pas une date n’a pu être assignée aux œuvres

dirigées vers le divin : il y a fort à parier que

certaines d’entre elles sont contemporaines de

Géricault ou de Van Gogh. Qu’importe ! Leurs

créateurs n’ont pas cherché à diviniser leur

propre personne ni même leur siècle, mais à

invoquer les puissances protectrices de leur

race. C’est pourquoi ces œuvres, si voisines

de nous par la chronologie, se trouvent si

éloignées de notre siècle, non moins que du

précédent, bien qu’il soit probablement le

leur. »

1 « Revue du Louvre et des musées de France », mars 1977, Charles Lapicque page 210

Les méditations de Charles

LapicqueLE MASQUE À BEC D’OISEAU

250. MASQUE DAN / GUERZÉ

Côte d’Ivoire. Bois dur à ancienne patine laquée noire, restauration visible à la racine du bec, petits bouchages. Visage humain à bec d’oiseau, une scarification en relief verticale sépare le front, les yeux mi-clos. H : 25 cm. Provenance : Collection Lapicque.

37

Sa vision globale de l’art l’incita à faire côtoyer

dans une même salle d’exposition, dans

l’esprit du musée imaginaire de Malraux, ses

œuvres dites de l’Ecole de Paris des années

cinquante avec des faïences de Nevers et de

Rouen ou ses œuvres plus cubistes avec des

masques africains. Tel fut le cas à la galerie

Louis Carré en 1947 avec « Les deux masques »

présentés aux côtés d’une statuette Fang et

des masques Dan, puis à la galerie de Pierre

Loeb en présence de Charles Ratton et de sa

collaboratrice Madeleine Rousseau, critique

d’art et animatrice de revues culturelles. Cette

dernière écrivait en juin 1955 dans sa revue

« Le Musée vivant » à propos du Buveur, cette

œuvre majeure de 1937 : « Charles Lapicque

introduit dans ses tableaux des éléments

de civilisations étrangères comme cette

magnifique toile d’une expression intense

représentant un buveur habillé de bleu et

coiffé d’un masque Toltèque. »

Les collections d’art africain de Charles

Lapicque, Hartung, Tzara sont notamment

présentées dans le film Les statues meurent

aussi, d’Alain Resnais et Chris Marker2.

2 Film « Les statues meurent aussi » d’Alain Resnais et Chris Mar-ker, production de la revue Présence Africaine, conseiller artis-tique Charles Ratton.

44. LES DEUX MASQUESMine de plomb et crayon lithographique de 1945. Œuvre graphique sur papier, dim. : 500x325mm. Signée, datée en haut à droite (mine de plomb) : Lapicque 45. Cette œuvre graphique sur papier fait partie des dessins dits d’impulsion. Ces collections de masques africains et de statuettes archaïques, invitent Charles Lapicque à donner à ses œuvres produites de 1943 à 1945, et tout particulièrement à ce dessin de 1945 « les deux masques », la brutalité des objets africains.

LAPICQUE, « LES DEUX MASQUES, 1945 »

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LAPICQUE, « LES DEUX MASQUES, 1945 »

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AUX ÎLES MARQUISES LE PREMIER HOMME S’APPELAIT TIKKI

40

Ce rare ornement, ou cheville, d’oreille,

Haakai, des îles Marquises est sculpté

d’une seule pièce dans une dent de cachalot.

Ce matériau dur, fortement convoité dans la

société marquisienne, nécessitait un sculpteur

à la dextérité certaine. Notre modèle est orné

d’un Tiki, icône aux grands yeux circulaires,

au large nez, à la bouche grimaçante. Portés

aussi bien par les hommes que par les

femmes, ces ornements étaient réservés à

de rares occasions et apportaient panache et

prestige à celui qui en était paré. Mais leur

utilité ne se limite pas au simple apparat. La

forme, suggestive, laisse entrevoir sa portée

symbolique liée à la fécondité. Ces objets à la

charge spirituelle intense impressionnèrent

Gauguin et Picasso qui trouvèrent en eux une

source d’inspiration nouvelle..

Référence bibliographique : Tiki au vent des îles, musée de Tahiti et des îles, Edition Tahiti.

242. HAAKAI, CHEVILLE D’OREILLE

Le Haakai a été façonné dans une dent de cachalot. Époque XVIIIe-XIXe siècle. Une étiquette porte la mention « collectée par le commandant Baudre ».

AUX ÎLES MARQUISES LE PREMIER HOMME S’APPELAIT TIKKI

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Lumières et couleursR E G A R D S D E P E I N T R E S E T D E S C U L P T E U R S

“ Les êtres humains éprouvent en général une grande joie à la vue de la couleur.

L’œil a besoin d’elle tout comme il a besoin de la lumière”. Goethe

42

C’est dans l’atelier d’Eugène Carrière, aux

côtés de Matisse, que Jean Puy bouleverse

les codes de la peinture dans les années 1900.

A la recherche de sa propre vérité il s’incarne

comme « un fauve parmi les fauves »

travaillant sans relâche avec fougue. Adepte

de la couleur pure et de la lumière, il multiplie

avec ses amis Derain, Marquet, Manguin les

expériences, rejetant la reproduction des

apparences pour tendre vers une émotion de

« nature ». Cette « femme à la fenêtre » touche

René Domergue qui s’empresse de l’acheter

lors d’une exposition à la galerie Laurenceau.

Cette œuvre toute en modestie faite de

larges et épaisses touches de pinceaux est un

précieux témoignage marquant la naissance

du fauvisme.

36. FEMME LISANT À LA FENÊTRE

Jean Puy (1876-1960), Huile sur toile. Signée en bas à droite et datée 1902. Dim : 46x36 cm. Collection particulière Paris. Inventoriée et reproduite au catalogue raisonné sous le numéro 10617.

44

Au cours de l’été 1888, Paul Sérusier

rencontre Emile Bernard à Pont-Aven

qui lui présente Gauguin. Sous l’influence de

ce dernier, Sérusier s’initie à un nouveau style

de peinture ouvrant la voie à l’expression de

formes simples et l’emploi de couleurs pures.

À partir de ses expérimentations et de retour

à Paris, Sérusier fonde le groupe des « Nabis »

(prophètes en hébreu) formé de jeunes

artistes (Denis, Bonnard, Vuillard… ) férus de

symbolisme avec le souhait de remonter aux

sources de l’art primitif. Sérusier n’aura de

cesse de retourner en Bretagne, fasciné par

sa beauté rustique, sa culture et la tranquillité

préservée. Il s’installera définitivement

à Chateauneuf du Faou séduit par le site

magnifique dont il s’attachera à représenter

des scènes, des personnages du terroir, des

paysages à l’instar de l’œuvre que nous vous

présentons.

35. BRETONNE ET PAYSAGE EN FLEURS

Huile sur toile. cachet de l’artiste PS en bas à gauche. 40 x 52 cm. Provenance : Collection particulière, Vente Thierry-Lannon, 15/12/2002. À partir d’une palette de couleurs limitée à une variation autour de 4 teintes : dégradés de vert, pointes de jaune-orangé, de rose et d’ocre-brun et par une délicate vibration de ses touches, Paul Sérusier nous offre une constellation de pigments et transpose un idéal d’harmonie.

JEAN PUY & PAUL SERUSIER, ENTRE FAUVES ET NABIS

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JEAN PUY & PAUL SERUSIER, ENTRE FAUVES ET NABIS

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OTHON FRIESZ OU LE DÉSIR VORACE DE LA MODERNITÉ

Othon Friesz (1879-1949). « Voiliers dans

le port d’Honfleur ». Huile sur toile

signée en bas à droite. Exposée à la galerie

Charpentier, rue du Faubourg Saint-Honoré

en 1950.

Peintre exalté trop longtemps délaissé, Othon

Friesz est un « fauve » éminent. S’il participe

à la fondation du cercle de l’art moderne

en 1906 c’est pour défendre son idée de la

peinture et son désir vorace de modernité.

Cette toile, présentant des voiliers dans le port

d’Honfleur, touche une période plus sombre

du peintre, où le trait baroque s’évapore au

profit de lignes rigoureuses, et où la puissance

chromatique de sa palette laisse place à des

teintes plus apaisées constituées de bruns, de

verts et d’ocre. Preuve d’un talent reconnu et

d’une carrière plus officielle il se voit confier,

en 1937 avec son ami Raoul Dufy, le décor du

Palais de Chaillot.

37. BASSIN À HONFLEUR

Emile Othon Friesz (1879-1949), huile sur toile, signée en bas à droite E.Othon Friesz. Étiquettes d’exposition au dos dont Galerie Charpentier, 1950.Dim : 46x55 cm. Provenance : Collection particulière de Montpellier. Une version très proche de cette œuvre figure au catalogue de la vente Artcurial du 27 mars 2013 sous le numéro 310, p.117.

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SUZANNE VALADON CERNES ET COULEURS PURES

À son arrivée à Paris, rien ne

prédestine Suzanne Valadon à la

peinture, mais sa beauté charme vite les

peintres de Montmartre et elle devient

le modèle de Toulouse-Lautrec, Puvis de

Chavannes, Modigliani, Renoir, Degas…

Elle s’initie au dessin s’imprégnant de

la méthode et du style de chacun des

artistes qu’elle côtoie. La muse aux

formes sensuelles laisse place alors à

la femme artiste qui expose ses œuvres

dès 1894 pour s’affirmer pleinement

au salon d’automne en 1909. Après la

Première Guerre mondiale, période

de ce tableau, elle s’enrichit de ses

rencontres avec Picasso et Derain

et fera des natures mortes un sujet

d’excellence.

34. UNE ŒUVRE INÉDITE :NATURE MORTE AU JOURNAL, PICHET ET VERRE DE VIN

huile sur carton signée et datée 1918 en bas à gauche 42 x 53,2 cm. Le carton a été agrandi par l’ajout de deux bandes de papier peint aux extrémités haute et basse du carton. Œuvre inédite découverte à Montpellier, elle a été offerte dans les années vingt par l’artiste à son amie Madame Eugénie Marthe Berthe Langlois appelée Marthe Langlois, fille de Henri Eugène Langlois, laqueur de vernis Martin, issu d’une famille de laqueurs depuis le XVIIIe siècle.

48

49

Dans les années 1880, Rodin rend hommage

aux personnes qui l’encouragèrent. Il

crée ainsi toute une galerie de portraits parmi

lesquels des artistes tels Dalou, Puvis de

Chavannes ou encore Jean-Paul Laurens dont

nous présentons ici le buste en plâtre.

Correspondances et entretiens de Rodin

sont autant de sources pour évoquer l’amitié

fidèle de Rodin et de Laurens et l’origine de

l’exécution du buste de Jean-Paul Laurens.

L’ouvrage L’Art, Auguste Rodin Entretiens

réunis par Paul Gsell (Grasset, 1911) nous

renseigne sur l’amitié des deux artistes.

« Quelques jours après, je revis dans l’atelier

de Rodin à Meudon les moulages de plusieurs

de ses plus beaux bustes, et je saisis cette

occasion pour lui demander les souvenirs

qu’ils évoquaient en lui. Le buste de Puvis me

fit songer à celui de Jean-Paul Laurens, qui est

aussi au Musée du Luxembourg. Tête ronde,

visage mobile et exalté, presque haletant : c’est

un méridional ; quelque chose d’archaïque

et de rude dans l’expression ; des yeux qui

semblent hantés de visions très lointaines :

c’est le peintre des époques à demi sauvages

où les hommes étaient robustes et impétueux.

Rodin me dit :

— Laurens est un de mes plus anciens amis.

J’ai posé pour un des guerriers mérovingiens

qui, dans sa décoration du Panthéon, assistent

au trépas de sainte Geneviève.

Son affection m’a toujours été fidèle. C’est lui

qui me fit obtenir la commande des Bourgeois

de Calais. Et sans doute elle ne me rapporta

guère, puisque je livrai six personnages de

bronze au prix qu’on m’avait proposé pour

un seul ; mais je lui garde une reconnaissance

profonde de m’avoir poussé à créer une de

mes meilleures œuvres.

J’eus grand plaisir à faire son buste. Il me

reprocha amicalement de l’avoir représenté

la bouche ouverte. Je lui répondis que,

d’après le dessin de son crâne, il descendait

très probablement des anciens Wisigoths

d’Espagne, et que ce type était caractérisé

par la saillie de la mâchoire inférieure. Mais

je ne sais s’il se rendit à la justesse de cette

observation ethnographique.

(...)

Alors Rodin :

— J’ai fait de mon mieux. Je n’ai jamais menti.

Je n’ai jamais flatté mes contemporains. Mes

bustes ont souvent déplu parce qu’ils furent

toujours très sincères. Ils ont certainement

un mérite : la véracité. « Qu’elle leur serve de

beauté ! » Elisabeth Lebon dans son livre Faire-

Fonte au sable - Fonte à cire perdue - Histoire

d’une rivalité Editions Ophrys évoque

l’exécution par Rodin de deux bustes de Jean-

Paul Laurens :

« En 1882, sans doute encouragé par

l’enthousiasme encore débordant de l’ami

Dalou retrouvé dès 1880 et par une demande

qu’il (Rodin) sent croissante, il procède

prudemment à un essai comparatif avec le

buste de son ami Jean-Paul Laurens : il en

commande concurremment une épreuve à cire

perdue à Eugène Gonon et une autre au sable

aux fondeurs associés Rudier et Griffoul. »

20. JEAN-PAUL LAURENS (1838-1921) PAR AUGUSTE RODIN

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JEAN-PAUL LAURENS PAR AUGUSTE RODIN

20.

Portrait de Jean-Paul Laurens par son fils Jean-Pierre. Crayon sur papier bleu. Signé en bas à droite et dédicacé à sa mère (prêt de la famille Dieterle).

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20. JEAN-PAUL LAURENS (1838-1921) PAR AUGUSTE RODIN

Buste en plâtre, 1882, porte sur le devant l’inscription JP LAURENS ; daté 1882, sur un côté : Rodin A son ami JP Laurens ; sur l’autre : la technique : fonte à cire perdue et le nom du fondeur pour l’exécution du bronze : E. GONON. Hauteur : 58,2 cm, Largeur : 37,5 cm, Profondeur : 33 cm. Plâtre, patine bronze.

Provenance : Collection privée, Famille Yvonne Laurens.(La patine bronze postérieure a été effectuée par la femme de Jean-Pierre Laurens, l’artiste Yvonne Dieterle-Laurens, souvenir rapporté par les descendants de l’artiste).L’artiste est représenté de face, le crâne nu quelques cheveux sur l’arrière et sur les côtés, il

porte barbe et moustache, la tête très légèrement relevée, le regard fixe droit devant, le torse nu est légèrement de biais et l’épaule droite légèrement en avant.Notre exemplaire en plâtre correspond aux caractéristiques du modèle en bronze de Jean-Paul Laurens conservé aujourd’hui au Musée

des Augustins de Toulouse acquis en 1962 et provenant à l’époque de la collection Yvonne Pierre Laurens. Ce plâtre a été donné par Rodin à Jean-Paul Laurens puis transmis à sa belle-fille Yvonne. Il est resté depuis dans la famille. Ces commentaires ont été précisé par Jérôme Leblay dans un courrier daté de 1995.

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JULES DALOU, LES DIX-NEUF SCULPTURES DE LA COLLECTION CUNNINGTON, LONDRES

Jules Dalou est né en 1838 à Paris dans

une famille modeste de gantiers. Très tôt

il s’engage en politique, et s’affiche comme

un farouche défenseur de la République, un

fils de la Commune. L’académicien Roujon

disait de lui : « Son amour pour le peuple

était la seule religion de sa vie ». Sculpteur-né

il fait son apprentissage auprès de Carpeau

et bénéficie de leçons privées. A ses côtés, il

accède à la complète maîtrise de la technique

et un brillant avenir lui est promis. Mais ses

convictions politiques le conduisent à l’exil.

Après avoir obtenu le poste de curateur au

Louvre, il est expulsé du territoire et passe

neuf ans à Londres où il expose à l’Académie

Royale et connait le succès. Plus tard, il revient

à Paris avec la commande du Triomphe de la

Place de la Nation. Perfectionniste, il n’hésite

pas à détruire ses œuvres en plâtre ou en terre

cuite. Dalou arrive au sommet de son art en

imaginant « le monument aux ouvriers »,

un « concentré de toute son œuvre » dédiée

au peuple, prônant la noblesse et l’âpreté

du travail. Une centaine de maquettes et

d’études ont survécu. Aujourd’hui exposées

au Musée du Petit Palais, elles représentent

des modèles de travailleurs, d’ouvriers

d’usines ou des champs. Découvertes après

sa mort, ces œuvres témoignent de son

génie et de sa maîtrise du mouvement et de

l’art monumental. Jules Dalou, fleuron de la

statuaire française du XIXe siècle, répétait

à ses élèves « lorsque l’on suit quelqu’un

on ne voit que son dos… il ne suffit pas de

regarder le modèle, il faut le vivre ». Notre

vente propose un ensemble rare de dix-neuf

statuettes. Fondues par Hebrard et Susse

Frères, elles témoignent de la sensibilité d’un

artiste prônant le réalisme à l’image du « grand

paysan qui regarde la terre du haut de ses deux

jambes plantées retournant ses manches pour

attaquer l’ouvrage, le front baissé, comme celui

d’un bœuf de labour aux sillons attachés».

Bibliographie : Sculptures by Jules Dalou

(1838-1902), Mallet, London, 1964. Jules Dalou

le sculpteur de la République, Amélie Simier.

Paris Musées, 2013.

10. PUDDLER AVEC MASQUE ET TABLIER

Bronze à patine brun-médaille. Signé. Fonte Susse Frères Editeurs. Cire perdue. H : 17,5 cm.

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18. TUEUR AIGUISANT SON COUTEAU

Bronze à patine médaille. Signé. Double cachets Susse Frères. Cire perdue. H : 22 cm.

12. TERRASSIER S’APPUYANT SUR SA PELLE Bronze à patine médaille. Signé. Fonte Susse Frères Editeurs. H : 19,5 cm.

7. HOMME ALLANT AU TRAVAIL LA PELLE SUR L’ÉPAULE

Bronze à patine verte. Signé. Fonte Susse Frères Editeurs. Cire perdue. H : 13,7 cm.

13. PAVEUR À LA DEMOISELLE

Bronze à patine médaille nuancé vert. Signé. Fonte Susse Frères Editeurs. Cire perdue. H : 15,8 cm.

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UN ART RÉVOLUTIONNAIRE

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UN ART RÉVOLUTIONNAIRE

« L’INACHEVÉ EST SIGNE DE TALENT »

Artiste-femme dans un monde où le

génie était une qualité exclusivement

masculine, Berthe Morisot est aujourd’hui

considérée comme l’une des rares femmes

impressionnistes. Elle travailla sans relâche

et avec discrétion, par le biais de l’esquisse

notamment, à la reconnaissance de son talent,

mettant en scène une vision personnelle de

l’art, face à celle de ses camarades peintres

liés d’une amitié virile et lancés dans la

spirale impressionniste. Sans prétention

d’éternité, mais condamnée elle aussi au

« doute impressionniste » elle voulait saisir

l’instant : « Fixer quelque chose de ce qui

passe, oh ! Quelque chose, la moindre des

choses, un sourire, une fleur, un fruit, une

branche d’arbre [...]. Cette ambition-là est

encore démesurée. »

« Berthe Morisot réalise plusieurs études, au

moins cinq, pour la Baigneuse. Elle la dessine

au crayon, au fusain, au crayon bleu et au

moins deux fois à la sanguine. Il n’y a que peu

de variantes entre les différents dessins : la

forme du foulard, proche ici d’un bonnet de

nuit, la position de l’avant-bras droit.

Nous savons que cet été de 1891 n’a pas été

très clément, qu’il a beaucoup plu et que la

température n’était pas au rendez-vous. Après

une courte visite à Mézy, Renoir s’en plaint

d’ailleurs dans une lettre à Berthe Morisot, lui

disant le mercredi 12 août : « Je viens d’écrire à

un modèle. Je reprends le travail à l’atelier, en

attendant mieux. Voilà un mois que je regarde

le ciel, et que je ne fais rien autre. C’eût été

délicieux de pouvoir travailler un peu avec

vous. Mais, mais […] je me remets ce plaisir à

des temps meilleurs. Excusez-moi donc si je ne

profite pas de votre bonne hospitalité. Je vais

faire du plein air à l’atelier. Votre bien dévoué

ami. Merci et amitiés à tous. »

En raison de ce mauvais temps Berthe Morisot

ne peut pas demander au modèle de poser

longtemps dehors, et encore moins dans l’eau,

sans doute très froide. Certaines des études

ont peut-être même été effectuées à l’atelier

d’après de premières esquisses réalisées en

plein air. Dans cette sanguine plus que dans

les autres dessins préparatoires ou que dans la

toile, nous voyons le sein naissant de la jeune

paysanne. Cette sanguine a servi de modèle

pour la peinture de la toile.

H.W.

26. ETUDE POUR LA BAIGNEUSE

1891, dessin à la sanguine sur papier par Berthe Morisot (1841-1895). 38 x 32,5 cm. Provenance : Julie Manet et Ernest Rouart, Julien Rouart (par descendance), Thérèse Rouart (par descendance), Jean Griot, Collection particulière. A figuré à l’Exposition « Berthe Morisot » du 19 juin au 19 novembre 2002 à la Fondation Pierre Gianadda (Suiise) et reproduit sous le n°135.

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« L’INACHEVÉ EST SIGNE DE TALENT »

25. CORMIER JOSEPH (1869-1950)

Sculpture en marbre de Carrare figurant une femme nue agenouillée tenant un lotus en os. Signée « J.D Cormier » et « F. Barbedienne Editeur » sur la terrasse. H : 44 L : 26,5 P : 14,5 cm. Éventail légèrement accidenté et désolidarisé de l’ensemble.

24. MARGARET COSSACEANU LAVRILLIER (1893-1980)

Autoportrait. Marbre blanc signé vers 1937. H. 47 cm.

60

Haute lecture médiévale

“ On aura beau bâtir des temples grecs bien élégants, bien éclairés, pour rassembler le bon peuple de Saint Louis, et lui faire adorer un Dieu métaphysique, il regrettera toujours ces Notre-Dame de Reims et de Paris, ces basiliques, toutes moussues […] On ne pouvait entrer dans une église gothique sans éprouver une sorte de frissonnement et un sentiment vague de la divinité. On se trouvait tout à coup reporté à ces temps où des cénobites, après avoir médité dans les bois de leurs monastères, venaient se prosterner à l’autel, et chanter les louanges du Seigneur, dans le calme et le silence de la nuit”.

François rené de chateaubriand, Génie du Christianisme.

96. CHAPITEAU

En pierre calcaire. Circa 1200.

62

102. AIGLE-LUTRIN

en bronze. H : 152 cm. D’après l’aigle-lutrin de l’église Saint-Nicolas de Tournai (1385) conservé au Musée de Cluny à Paris.

104. ÉVÊQUE EN BRONZE

à patine médaille. Il est représenté debout portant le livre des Saintes Écritures. Bourgogne, fin du XVe siècle. Ancienne étiquette de collection au dos. H : 25 cm.

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77. PLAQUETTE À ÉCRIRE

en ivoire sculpté en bas-relief représentant la Vierge couronnée tenant L’Enfant sur son bras gauche sous une arcature. Ils sont entourés de chaque côté d’un ange. Dim : 8,2x4,9 cm. Allemagne, époque XIVe siècle. Fente en partie haute.

78. PLAQUETTE À ÉCRIRE

en ivoire sculpté en bas-relief représentant la Crucifixion sous un décor d’arcatures. Au centre de la scène, le Christ sur la croix avec à sa droite la Vierge accablée et à sa gauche, Saint Jean. Allemagne, vers 1380. Dim : 7,7x4 cm. Un trou dans la partie inférieure et deux trous en partie haute.

107. CHRIST À LA COLONNE

en albâtre sculpté en ronde-bosse et partiellement doré. Le Christ est représenté barbu, debout les mains entravées dans le dos à une large colonne. Epoque, fin du XVe siècle. H : 30 cm. Accidents, restaurations et manques. Cassé recollé en plusieurs endroits.

PAGE SUIVANTE

103. PAVEMENT

d’environ 3m2 composé de plus de 200 carreaux en terre vernissée à décor de ferronneries et fleurs. France, époque fin XVe début du XVIe siècle.

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La Vierge est représentée debout en prière, couverte d’un long

manteau et coiffée d’une guimpe. Saint Jean également debout,

se tient les mains jointes sous la taille. Il porte une robe ceinturée

au col boutonné et une longue chevelure aux épaisses boucles.

98. LA VIERGE ET SAINT JEAN AU CALVAIRE

Travail hispano-flamand de la fin du XVe siècle. Hauteurs respectives. H : 128 cm et H : 124 cm.

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SAINT JEAN ET LA VIERGE

99. LE BAPTÊME DU CHRIST

En bois sculpté, polychrome et doré. Italie du Nord, XVIe siècle, 69,5 x 82 cm.

71

SAINT JEAN ET LA VIERGE

ManuscritsQ UA N D L A P E I N T U R E S ’ I N V I T E D A N S L E S L I V R E S

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PSAUTIER À L’USAGE DE GAND PAR LE MAÎTRE FRANCISCAIN DE BRUGES

Mois de mars. Personnage émondant un arbre à la serpe. Une des 10 miniatures dans un encadrement à l’or.

PSAUTIER À L’USAGE DE GAND PAR LE MAÎTRE FRANCISCAIN DE BRUGES

116. PSAUTIER À L’USAGE DE GAND PAR LE MAÎTRE FRANCISCAIN DE BRUGES

Bruges vers 1255-1260Décoration par le Maître franciscain : 5 peintures à pleine page, 10 pour les travaux des mois, et 8 initiales historiées. Composition : 164 feuillets. Dimensions : 158 x 106 mm. Présence d’armoiries au début du volume

Ce psautier fut réalisé à Bruges au milieu

du XIIIe siècle par un maître enlumineur

et son atelier. Luxueux dans ses compositions

et par ses nombreuses miniatures et lettrines,

ce manuscrit témoigne du prestige d’une

grande famille laïque qui le fît armorier. L’en-

lumineur a créé une œuvre très personnelle,

transposant les effets du vitrail par l’usage raf-

finé de fonds d’or étincelants. Il s’inspire aus-

si de l’architecture en utilisant les gables, les

pinacles et arcatures. Dans les cinq grandes

scènes religieuses pleine page (saint François

et sainte Claire, l’Annonciation, la Nativité,

l’Adoration des mages et la Crucifixion) il ose

et innove. De ces illustrations se dégage un

sens monumental inhabituel. Parmi les minia-

tures, une composition est particulièrement

soignée : celle qui représente Sainte Claire et

Saint François. Leurs gestes et la délicatesse

des drapés sont soulignés par les contrastes

des manteaux gris ardoise. Un autre point

qu’il faut retenir est la fantaisie de certaines

scènes joyeuses représentées dans dix minia-

tures de taille moyenne qui alternent sur des

fonds bleus et roses.

Elles illustrent les occupations des mois et

mettent en scène différents personnages

comme le fauconnier pour le mois de

mars, le faucheur pour le mois de juillet, le

vendangeur pour le mois de septembre, le

semeur pour le mois d’octobre ou l’abattage

du cochon pour le mois de décembre. Pour

finir, neuf initiales historiées sur fond d’or

présentent notamment des visages d’une

grande délicatesse, probablement réalisés

par la main la plus habile de l’atelier. Suivent

190 initiales peintes à l’or. Si le style « 1200 »

triomphe dans ce manuscrit en prolongeant

les influences byzantines, ce sont l’élégance,

les couleurs empreintes de naturalisme, qui

impressionnent. Les formes s’assouplissent,

les personnages deviennent plus humains.

Une culture plus profane, plus laïque s’impose

rejetant le formalisme des décennies passées.

L’art devient plus attentif à la réalité et

annonce la redécouverte de la philosophie

d’Aristote. Ce livre rare est un précieux

témoignage du changement de la peinture

dans les manuscrits du début du XIIIe siècle et

apparaît comme une marque de l’importance

de la ville de Bruges.

75

116. PSAUTIER OUVERTDeux lettrines 77

116. DEUX MINIATURES DU PSAUTIER SUR FOND D’ORL’annonciation, saint claire et saint François

PAGE PRÉCÉDENTE

116. MINIATURE Les rois mages (détail)

80

Les miniatures en pleine page reposent sur une mise en page commune, tant dans leur présentation que dans la méthode picurale. L’encadrement est fondé sur une bande dorée soulignée d’un trait extérieur noir, des bandes bleues et mauve pâle, un festonnage ou des croisillons venant en briser la monotonie. A l’intéreur, la scène est située sous un arc trilobé surmonté d’une architecture avec deux ou 4 clochers, qui

montent au-delà de l’encadrement, les toits étant bleus, dorés ou vert émeraude. La scène est peinte sur un fond or. La Vierge est vêtue d’une robe brune et d’un manteau bleu ; à l’inverse, Joseph et saint Jean portent une robe bleue et un manteau brun. La palette de l’artiste est en effet assez réduite : il faut y ajouter un beau gris, le blanc, un vert émeraude et un rouge orangé sur les nimbes.

Les visages, dans l’ensemble très beaux et fins, sont présentés de trois quart, une tache orangée soulignant la bouche et les joues. Les habits de saint François et de sainte Claire sont très bien peints, quand ceux des robes et manteaux bleus semblent avoir été soumis à une attention moins soutenue — ce qui n’est pas le cas des robes et manteaux bruns —, et la pause des personnages et leur gestuelle restent rudimentaires.

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AVIGNON, CITÉ DES PAPES

Ce manuscrit remarquable, exécuté en

Avignon à la fin du XIVe siècle, compile

des sermons attribués à l’évêque d’Arles

Césaire (c.502-c.542). Rare, il présente une

foliotation remontant aux origines de sa

composition et présente un formidable travail

de copiste empreint de délicatesse et de

dextérité. Ici, tous les artifices pour enrichir

la présentation du livre ont été utilisés :

prolongement des lettres en filet, et rehauts de

jaune pour en faciliter la lisibilité. Mais c’est

l’imprévu qui caractérise cet ouvrage et plus

particulièrement son décor. Les rubriques (à

l’exception des deux premières) ont fait l’objet

d’un soin singulier à l’image des phylactères

contenant renvoi, et maintenus tantôt par un

ange ou un moine, tantôt par les pattes ou

la gueule d’un lion. Le reste de la décoration

consiste en d’agréables initiales filigranées.

Cette copie, bien que l’œuvre de plusieurs

mains, présente une unité dans le travail

d’écriture. Les lettres nous apparaissent

harmonieuses, de petite taille et d’un

dessin rond. Ce manuscrit est un précieux

témoignage qui nous plonge dans l’intimité

des scriptoria de l’époque médiévale.

117. CÉSAIRE D’ARLES (C. 502 - C. 542)

Petit manuscrit composé de vingt et un sermons attribués à Césaire d’Arles, de la règle d’Augustin et l’Expositio écrite par Hugues de Saint-Victor, et de deux bulles des papes Benoît XII et Urbain V, Avignon XIVe siècle. Manuscrit sur parchemin de 219 feuillets. 128x90 mm

83

Ainsi méditait Adso dans le scriptorium

de l’abbaye où lui et son maître

Guillaume de Baskerville, docte franciscain

et héros principal du roman d’Umberto Eco,

furent envoyés pour enquêter sur le meurtre

d’un moine. Il pensait à la production des

livres – entendez par là les manuscrits – et

leur destinée.

Un heureux hasard nous fait découvrir

aujourd’hui, parmi les fleurons de cette

collection, un manuscrit qui figurait

autrefois dans la librairie du cardinal Georges

d’Amboise en son château de Gaillon, l’un

des berceaux de la Renaissance en France. Ce

bibliophile et mécène, auquel une merveilleuse

exposition fut récemment consacrée au

musée d’Évreux, avec la collaboration de la

Bibliothèque nationale de France, avait réuni

une importante bibliothèque de livres et

manuscrits italiens, notamment par l’achat

vers 1503 des « restes » de la librairie des rois

d’Aragon de Naples.

C’est à une commande prestigieuse passée par

la famille des rois d’Aragon de Naples à la fin

du XVe siècle que répond ce manuscrit de la

Catena aurea de saint Thomas d’Aquin (1225-

“ Bientôt les deux feuilles se couvriraient de couleurs et de formes, la page deviendrait comme un reliquaire, étincelante de gemmes enchâssées dans ce qui devien-drait par la suite le pieux tissu de l’écriture. Ces deux frères, me dis-je, sont en train de vivre leurs heures de pa-radis sur la terre. Ils produisaient de nouveaux livres... (Troisième jour, tierce).”

umberto eco, Le nom de La rose

UNE COMMANDE DES ROIS D’ARAGON DANS LA COLLECTION DE GEORGES D’AMBOISE

1274). Avec vingt et un autres manuscrits, tous

aussi somptueux, il formait une collection

complète des œuvres du saint docteur de

l’Église, entreprise initiée par le cardinal Jean

d’Aragon († 1485) et poursuivie à grands frais

par son père le roi Ferdinand Ier († 1494).

Sa calligraphie et sa décoration en font un

objet de grand luxe. Le texte, méticuleusement

copié par Venceslas Crispus (ou Crispo),

scribe originaire de Bohême, se délie en

écriture gothique italienne sur deux colonnes,

à 45 lignes à la page, et ce, sur plus de 280

feuillets de vélin. Un nombre impressionnant

de lettrines (488 !), dont 24 de grande taille

avec ornements d’arabesques et de fleurs

s’étendant dans les marges, toutes enluminées

et attribuées à un artiste napolitain du nom de

Matteo Felice, rythment le texte et participent

au grand raffinement du manuscrit et à son

caractère précieux.

Soyons admiratifs, chers amis des livres,

devant tant de labeur ! Que de temps passé,

pour ces hommes, copistes et enlumineurs,

concentrés à travailler dans le silence des

ateliers ou des scriptoria, au seul bruit

procuré par les plumes glissant sur le vélin.

Parce qu’ils copiaient ou décoraient des textes

certes parfois profanes, mais surtout à portée

spirituelle, ils côtoyaient à leur manière le

divin et exerçaient, nous n’en doutons pas un

instant, un très beau métier.

Qu’il nous soit permis, comme Adso, de se

délecter de cet instant de grâce en contemplant

de magnifiques manuscrits tel que celui-ci.

■ ALEXANDRE MAILLARD

118. MANUSCRIT VERS 1480 THOMAS D’AQUIN (SAINT)

84

UNE COMMANDE DES ROIS D’ARAGON DANS LA COLLECTION DE GEORGES D’AMBOISE

118. MANUSCRIT VERS 1480 THOMAS D’AQUIN (SAINT)

87

Le royaume de France sous le règne

de Louis XII (1498 – 1515) connut un

véritable renouveau. Le roi, qui incarnait une

monarchie modérée et juste, a toujours écouté

son plus fidèle conseiller, Georges d’Amboise,

personnage bien connu des Normands.

Archevêque de Rouen et mécène de

premier ordre, Georges d’Amboise participa

grandement à l’avènement de la Renaissance

italienne en France. La formidable ascension

de ce noble moyen qui devint le « primo

homo », premier homme auprès de Sa Majesté

lui permit de réunir tout au long de sa vie une

collection spectaculaire d’ouvrages, tapisseries

et tableaux. Un goût indéniable qui lui

vaudra la première place dans la commande

d’art en France à l’époque ! Sa collection de

livres, très fournie était celle d’un bibliophile

collectant inlassablement les plus beaux

manuscrits. La plus belle prise de l’archevêque

fut certainement celle des manuscrits de la

collection royale d’Aragon. Excommunié et

déchu par le pape, Frédéric, dernier des rois

d’Aragon fut contraint de quitter Naples pour

la France avec huit galères remplies de livres,

vaisselle, argenterie et tableaux. Connaissant

des difficultés financières et un statut

précaire, l’ancien roi en disgrâce vendit à

Georges d’Amboise 138 manuscrits, véritables

symboles de la Renaissance italienne et joyaux

de l’enluminure de l’époque. Saint Augustin,

saint Grégoire, Ovide, Plutarque, Platon ou

encore Aristote sont ainsi immortalisés dans

des écrins uniques, reliés en velours, en soie,

avec des fermoirs en argent ou en cuir… Une

magnifique collection aujourd’hui dispersée

entre Paris, Louviers, Londres, le Vatican,

Berlin ou encore La Haye !

UNE COMMANDE DES ROIS D’ARAGON DANS LA COLLECTION DE GEORGES D’AMBOISE

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118. MANUSCRIT. - THOMAS D’AQUIN (SAINT)

Sanctus Thomas de Aquino. Commentaria in evangelium sancti Lucae [Catena aurea]. S.l.n.d.

[Naples, entre le début des années 1480 et 1493]. Manuscrit sur parchemin, 283 feuillets (+ 2 blancs).

In-folio (375 x 270 mm), peau de truie fauve, grand décor d’entrelacs et d’enroulements dessiné au moyen

de filets à froid et de listels mosaïqués en vert foncé et rouge, armoiries à froid au centre, dos à cinq nerfs

orné dans le même genre, bordure intérieure, tranches dorées sur marbrure (J. Légal rel. Angers).

UNE COMMANDE DES ROIS D’ARAGON DANS LA COLLECTION DE GEORGES D’AMBOISE

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Précieux incunablesL E B E R C E AU D E L’ I M P R I M E R I E , U N E C O L L E C T I O N D E S E I Z E I N C U N A B L E S

C’est en 1450 que Joannes Gutenberg invente l’imprimerie avec la mise au point des caractères

typographiques en métal. Son premier ouvrage, La Bible, fut totalement imprimé à 42 lignes et tirée

à 180 exemplaires. Les premiers livres imprimés avant 1501 sont appelés incunables, et marquent

l’enfance de l’imprimerie. Mais pendant cette période manuscrits et incunables rivalisent et

parfois se mélangent. Textes imprimés et décors enluminés s’associent pour satisfaire une riche

clientèle. Dans cette vente plusieurs exemples rares, comme la Bible de Koberger, témoignent de

cette période.

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91

121. LA BIBLE LATINE DE, 1479

BIBLE. — Biblia latina. Nuremberg, Anton Koberger, 6 août 1479. Fort volume grand in-folio, ais et dos mis à nu. Superbe incunable de la Vulgate imprimée par Anton Koberger, l’un des plus grands imprimeurs du XVe siècle dont le nom est associé, entre autres, à la célèbre édition de la Chronique de Nuremberg. Il s’agit de la cinquième édition sortie des presses de ce typographe, après celles qu’il livra en 1475, 1477, puis en avril et novembre 1478. Celle-ci est imprimée sur deux colonnes en caractères gothiques, de deux types différents, à 49/53 lignes à la page. Son achevé d’imprimer est daté du 6 août 1479.

Anton Koberger est probablement l’un des

plus fameux imprimeurs et éditeurs de

la fin du XVe siècle allemand. Son travail de

publication, associé au talent de Wolgemut

ou Dürer, donne une place de premier

rang à l’art de la gravure sur bois dans

l’ornementation des livres. Si les ouvrages

recueillent essentiellement des textes, ils

s’animent aussi de décors somptueux. La

Bible de Koberger illustre, par son faste,

l’influence de l’imprimeur. Il y fait peindre

par un enlumineur des lettrines à la tempera,

d’or ou d’argent, et y fait poinçonner les fonds

d’or. Le décor appuie le rôle symbolique des

écrits spirituels et les plus beaux ouvrages

sont un mélange de glose et d’images. Dans

cette vente, trois incunables sont proposés

aux enchères.

LES INCUNABLES D’ANTON KOBERGER

PAGE DE DROITE

128. NICOLAUS DE AUSMO

Supplementum summae Pisanellae. S.l.n.d. [au colophon] : Nuremberg, Anton Koberger, 27 juin 1478. In-folio, peau de truie estampée à froid sur ais biseautés, dos à quatre nerfs, doublure de feuilles de parchemin manuscrit.Belle édition incunable sortie des presses d’Anton Koberger àNuremberg, imprimée sur deux colonnes en caractères gothiques à 52 lignes à la page.Nicolaus de Ausmo (ou Nicolas d’Osimo), théologien et moine de l’ordre des frères Mineurs, vécut dans la première moitié du XVe siècle. Il révisa la Summa de casibus conscientiae, somme de casuistique composée dans les années 1330 par Bartholomeus de Sancto Concordia, dit Pisanella, et la publia dès 1473 sous le titre Supplementum summae Pisanellae.Superbe exemplaire, rubrique de rouge et de bleu, d’une fraîcheur remarquable. Il est orné au premier feuillet d’une belle initiale q enluminée et dorée à la feuille d’or, avec grand rinceau de feuilles d’acanthe se développant dans la marge.Le volume porte sur le contreplat supérieur l’ex-libris manuscrit de l’abbaye bénédictine de Sheyern, diocèse de Munich. Mention à la plume sur une garde : Duplum.

121.

92

LES INCUNABLES D’ANTON KOBERGER

LES INCUNABLES D’ANTON KOBERGER

Ludolphe de Saxe, chartreux allemand

né au début du XIVe siècle, est mort à

Strasbourg vers 1376. Son ouvrage, qui est

à la fois un récit de la vie de Jésus selon les

Saintes Écritures et des méditations sur la

Passion, fut l’un des livres de dévotion les plus

populaires du Moyen Âge tardif. Remarquable

exemplaire, très grand de marges, rubrique

de rouge et de bleu et agrémenté de 3 initiales

dessinées et peintes en rouge et bleu, avec

antennes, et visage grotesque pour deux

d’entre elles. Ces initiales ornées sont placées

aux feuillets 1, 4 et 189.

127. LUDOLPHUS DE SAXONIA

Vita christi. S.l.n.d. [au colophon] : 128Nuremberg, Anton Koberger, 1478. 2 parties en un fort volume grand in-folio (470 x 325 mm), peau de truie estampée à froid sur ais, dos à six gros nerfs, étiquette de titre manuscrite en tête du dos et en haut du premier plat (Reliure de l’époque). GW, M19215. — Hain, 10292. — Goff, L339. — Pellechet, 7258. Belle édition incunable imprimée par Anton Koberger, l’un des principaux typographes de Nuremberg au XVe siècle. Koberger en donna deux autres en 1483 et 1495. Cette édition est l’une des toutes premières de ce texte qui fut d’abord publié en 1478 à Strasbourg et à Cologne. Elle est imprimée en caractères gothiques. L’exemplaire est complet des 372 feuillets non chiffrés (188 + 184) et se présente dans sa reliure en peau de truie estampée sur ais, strictement contemporaine de l’édition. Celle-ci arbore dans son décor de gros fleurons typiques des ateliers germaniques.

94

LES INCUNABLES D’ANTON KOBERGER

95

Né le 22 août 1485, fils unique d’un riche

boucher de la ville qui fut membre

du Magistrat, Beat Bild, plus connu sous sa

forme latinisée, Beatus Rhenanus, est l’un de

ses génies nés dans l’enceinte nourricière de

Sélestat. « Savant dans l’une et l’autre langue »

(Érasme), il compte, notamment avec Mathias

Schurer et surtout Johannes Mentelin (Jean

Mentel), premier imprimeur alsacien, parmi

les Sélestadiens de l’époque versés dans le

domaine du livre.

Dès l’âge de six ans, Beatus fréquenta l’école

latine de Sélestat, puis il suivit de brillantes

études au collège du cardinal Lemoine à Paris

de 1503 à 1507, jusqu’au grade de maître ès

arts, sous la direction de Lefèvre d’Étaples.

Il exerça ensuite le métier de correcteur et de

philologue auprès des grands imprimeurs de

son temps (Henri Estienne, Josse Bade, Froben

et Mathias Schurer), tout en se consacrant

à l’édition et à l’étude des langues et des

textes anciens, sa passion première, comme

le rappelle Pierre Petitmengin dans l’Histoire

des bibliothèques françaises, t. I, pp. 415-

416 : Beatus Rhenanus a collectionné avec

un soin extrême tous les vestiges du travail,

à la fois intellectuel et typographique, qui

donne naissance au livre. [...] Cette passion

d’archiviste, qui le pousse à garder tout autant

une modeste plaquette romaine de quelques

pages, bien vite réimprimée par Froben, fait de

sa collection un point de passage obligé pour

qui veut étudier la façon dont on travaillait au

début du XVIe siècle dans les imprimeries de

Venise et de Bâle. [...] Rhenanus avait réussi à

se procurer la bibliographie essentielle dans

tous les secteurs où il travaillait, et il pouvait

ainsi se consacrer efficacement à son seul but

dans la vie, la défense des bonnes lettres.

On dit que Beatus menait, à Bâle et à

Sélestat, une vie studieuse et retirée, quasi-

monacale. Il était secondé dans ses tâches

quotidiennes par un famulus (d’abord Albert

Burer, puis Rodolphe Bertschi), et peut-être

par une servante qui devait veiller au soin

de la précieuse bibliothèque : les textes des

principaux grammairiens, des linguistes, des

philosophes, des humanistes, des historiens

de l’Alsace et du Moyen Âge germanique, et

surtout les manuscrits, ne devaient en aucun

cas être exposés à la poussière et la saleté.

Lorsqu’il décéda le 20 juillet 1547, des suites

d’une maladie de la vessie, la ville de Sélestat

devint l’heureuse et inattendue légataire de

l’ensemble de la collection de Beatus. Celle

que l’on appelle communément la Rhenana,

fut constituée durant près d’un demi-siècle,

et les premiers livres achetés par Beatus à la

foire de Strasbourg alors qu’il n’était âgé que

de quinze ans, en marquent le jalon. Forte de

423 volumes, dont 222 recueils composés de

1086 impressions et 41 pièces manuscrites,

interca lées au milieu des imprimés,

auxquels s’ajoutent la correspondance de

124. ETYMOLOGICUM MAGNUM GRAECUM

Ce lexique byzantin de grec ancien, composé au XIIe siècle, est le plus important qui nous soit parvenu. Il était destiné aux étudiants et érudits et devait les aider dans leur lecture de textes grecs, en particulier ceux des poètes. Il a été publié par Marcus Musurus (c. 1470-1517), humaniste crétois et helléniste distingué qui émigra en Italie vers 1490, avec l’aide de Joannes Gregoropoulos, son beau-frère, qui fut le chef des correcteurs dans l’imprimerie d’Alde Manuce.

BEATUS RHENANUS, ILLUSTRE SÉLESTAT, 1470

96

BEATUS RHENANUS, ILLUSTRE SÉLESTAT, 1470

Beatus (265 pièces), notamment avec les

grands humanistes (Érasme, Martin Luther,

Mélanchthon, Zwingli, Wimpfleing, Thomas

More, etc.), la Bibliotheca Rhenana forme

aujourd’hui le second noyau de la Bibliothèque

humaniste de Sélestat. Son inscription

en mai 2011 au Registre de la Mémoire du

monde de l’UNESCO témoigne du caractère

exceptionnel et unique du patrimoine légué

par cet humaniste, puisque la plupart des

bibliothèques humanistes de la Renaissance

ont été dispersées à l’époque, comme par

exemple celles d’Érasme ou du roi de Hongrie,

Mathias Corvin.

UN CHEF-D’ŒUVRE DE LA PROTOTYPOGRAPHIE GRECQUE EN OCCIDENT

Elle est sort ie des

p r e s s e s d e d e u x

érudits crétois, Zacharias

Callierges (ou Calliergis)

e t N i c o l a o s B l a s t o s

(ou Vlastos), lesquels

f o n d è r e n t d a n s l e s

dernières années du

XVe siècle à Venise une

imprimerie exclusivement

destinée à l’impression de

livres en grec. Les deux

hommes furent aidés

f inanc ièrement dans

leur entreprise par Anna

Notaras, fille de l’un des derniers grands

logothètes de l’empire byzantin, réfugiée

en Italie avant la chute de Constantinople.

Seuls quatre livres ont été imprimés par

Callierges et Blastos à Venise : l’Etymologicum

magnum est le premier d’entre eux. Tous ont

été imprimés avec un caractère grec cursif,

dont la beauté et la finesse

égalent voire surpassent celles

des caractères grecs employés

par Alde. Ces caractères ont

d’ailleurs une particularité qui les

distingue des caractères aldins :

c’est la gravure et la fonte en une

seule pièce de lettres grecques

accentuées. Musurus, dans sa

préface en forme de poème, en

attribue l’invention à Callierges

(cf. Proctor, The Printing of

Greek in the Fifteenth century,

pp 118-126, et Firmin-Didot, Alde

Manuce et l’hellénisme à Venise,

pp. 549-552).

L’Etymologicum magnum est imprimé sur

deux colonnes, entre 49 et 51 lignes à la

page. Son texte est agrémenté de grandes et

petites lettrines ornementales, ainsi que de

grands bandeaux xylographiques en forme

de U inversé en tête des chapitres, tous ornés

124. PREMIER FEUILLET

97

124. DÉTAILS

98

99

d’un décor ornemental constitué d’un réseau

de rinceaux et d’arabesques, et imprimés

en rouge. Sa mise en page singulière et très

esthétique rappelle les manuscrits byzantins

dont Callierges, également copiste de renom,

s’était fait une spécialité ; les grands en-

têtes évoquent notamment les pylai (pylé au

singulier), éléments décoratifs typiques de

l’art byzantin que l’on retrouve généralement

encadrant un titre dans ces manuscrits.

Les jolies marques typographiques de

Callierges et de Blastos, également imprimées

en rouge, sont apposées sous le colophon et le

registre : celles de Callierges montrent un aigle

bicéphale chargé des initiales Z et K, symbole

des empereurs de Byzance.

Exemplaire du célèbre humaniste alsacien

beatus rhenanus, avec son ex-libris autographe

apposé en haut du titre : sum beati rhenani

nec muto dominum [c’est-à-dire J’appartiens

à Beatus Rhenanus et je ne change pas de

maître], suivi de la mention datée Basilae AN.

M.D.XIII.

Originaire de Sélestat, Beatus Rinower (ou

Bild) (1485-1547), plus connu sous son nom

humaniste Beatus Rhenanus, fut l’un des plus

savants philologues de son temps. Élève de

Lefèvre d’Étaples et grand ami d’Érasme, il

fut en contact permanent avec les plus grands

érudits de l’Europe. Il partageait sa vie entre

l’étude de textes anciens et son métier de

correcteur d’imprimerie auprès de diverses

officines : Henri Estienne et Josse Bade à Paris,

Mathias Schurer à Strasbourg, et Froben à

Bâle. Tout au long de sa vie, il constitua une

bibliothèque, principalement axée sur les

langues classiques (surtout le latin), qu’il légua

à sa mort à sa ville natale. Hormis quelques

exemplaires réclamés à l’époque par les

institutions bâloises ou volés ici et là par les

Jésuites, cette collection fut conservée intacte

depuis le XVIe siècle et constitue aujourd’hui

le fleuron de la bibliothèque de Sélestat : elle

compte 423 volumes (dont 201 livres et 222

recueils contenant 1086 imprimés et 41 pièces

manuscrites) (cf. Pierre Petitmengin, « Les

livres de Beatus Rhenanus » in Histoire des

bibliothèques françaises, t. I, pp. 413-417). Les

exemplaires de beatus rhenanus en mains

privées sont d’une extrême rareté aujourd’hui.

De toute évidence, ce volume faisait partie

d ’un ensemble de livres et manuscrits

précieux (dont un manuscrit d’Aristote et

plusieurs fragments ayant servi aux ouvriers

BEATUS RHENANUS, ILLUSTRE SÉLESTAT

100

compositeurs de l’imprimerie aldine pour les

éditions princeps d’Aristote, de Théophraste,

d’Aristophane, etc.) légué par le moine

dominicain Jean Cuno à Beatus, suite à son

décès survenu à Bâle en février 1513 (cf.

Simone Follet, « Contributions à l’histoire de

deux manuscrits de Philostrate » in Revue

d’histoire des textes, n°5 (1975), 1977, pp. 1-11).

Beatus perçut sans doute son Etymologicum

non pas comme un objet de pure bibliophilie

mais plutôt comme un véritable instrument

de travail.

À l’instar du célèbre humaniste Guillaume

Budé, qui possédait un exemplaire annoté de

sa main de cet ouvrage (conservé à la BnF),

Beatus s’en servit pour se perfectionner dans

la connaissance de la langue grecque et son

étude des textes anciens.

On peut retracer une partie du parcours de cet

exemplaire après la mort de Beatus.

Dans la seconde moitié du XVIIIe siècle, un

humaniste et helléniste strasbourgeois de

renom, Richard François Philippe Brunck

(1729-1803), « exhuma » ce volume de la

Bibliotheca Rhenana comme le laisse supposer

une lettre écrite de sa main le 12 juin 1772 (cf.

Edmond Cougny, « Lettres inédites de Brunck

sur les ouvrages grecs qu’il a publiés » in

Revues des études grecques, vol. IX, 1875, p.

137). Bibliophile averti, c’est lui qui commanda

la reliure de ce volume, très certainement à un

atelier de Strasbourg, et fit apposer son nom

en queue de celle-ci.

Le volume a ensuite appartenu à Antoine-

Augustin Renouard, qui avait acheté

directement auprès de Brunck une partie de sa

collection : il a figuré aux catalogues de 1819

(t. II, p. 19) et 1853 (n°790). Enfin, il passa dans

la bibliothèque d’Ambroise Firmin-Didot qui

sut en apprécier la valeur : Chaque fois que

j’ouvre le bel exemplaire de l’Etymologicon

magnum qui me vient de la bibliothèque de

Renouard, je me plais à [...] lire en tête de la

première page ces mots que le savant Beatus

Rhenanus y a écrits [...]. Cette marque du

sincère attachement qu’avait ce savant érudit

et bibliophile pour ce livre et pour ceux

qu’il possédait provenant de l’imprimerie

d’Alde me le rend encore plus précieux, et il

le sera pour quiconque aime à revivre avec

les anciens souvenirs (Firmin-Didot, Alde

Manuce et l’hellénisme à Venise, p. 552, note

1).

“ Illustre Sélestat, [...]D’où te vient ton génie, si fécond, si généreux,

Quels astres brillèrent au-dessus de ton berceau ? [...]Le privilège qui n’est qu’à toi, c’est que seule, toi si petite, tu donnes le jour

À autant d’hommes distingués par les mérites de l’esprit ; [...]D’autres enfantent des corps, toi tu enfantes des génies.”

érasme, éLoGe de La viLLe de séLestat, traduction par paul imbs

BEATUS RHENANUS, ILLUSTRE SÉLESTAT

101

JACQUES DE VORAGINE ET LA LÉGENDE DORÉE

La Légende dorée, composée en latin dans

la seconde moitié du XIIIe siècle, est le

principal texte écrit par Jacques de Voragine

(vers 1230-1298), prédicateur dominicain né

à Varazze en Ligurie, archevêque de Gênes

et contemporain de saint Thomas d’Aquin.

Elle se présente comme un manuel de culture

religieuse destiné à l’affermissement de la

foi et à la lutte contre l’hérésie. En se basant

sur des sources authentiques et dans l’ordre

du calendrier liturgique, l’auteur y raconte la

vie de nombreux saints, saintes et martyrs

chrétiens depuis l’arrivée des Lombards en

Italie au VIe siècle. Son livre, lu dans tous les

monastères et traduit en plusieurs langues,

constitue une histoire de presque tout

l’Occident chrétien.

134. LEGENDA SANCTORUM SIVE LOMBARDICA HYSTORIA

Voragine (Jacques de). S.l.n.d. [au colophon] : Nuremberg, Georg Stuchs de Sulczpach, octobre 1488. Fort volume in-4, demi-vélin estampé à froid sur ais, dos à trois nerfs, restes de lanière de cuir, titre inscrit à l’encre sur la tranche de tête (Reliure de l’époque). Très rare édition incunable sortie des presses de georg stuchs, imprimeur actif à nuremberg de 1484 à la fin des années 1510. Très séduisant exemplaire, avec les initiales peintes en rouge, conservé dans sa reliure d’époque, probablement exécutée dans un atelier local.

102

132. FASCICULUS TEMPORUM

Venise, Georg Walch, 1479. In-folio gothique, demi-vélin, titre à l’encre en long au dos lisse, non rogné (Reliure vers 1900). GW, M38741. — HC, 6924. — Pellechet, n°9960. — Goff, R260. — Essling, n°276. Première édition incunable vénitienne de cette célèbre chronique, imprimée par Georg Walch en 1479. Quatre autres ont

suivi, toutes données par Ratdolt entre 1480 et 1485. C’est également le premier livre imprimé par ce typographe, dont seulement 4 autres éditions sorties de ses presses à Venise sont recensées. L’édition est imprimée en caractères gothiques. Elle est ornée de 4 figures sur bois (l’Arche de Noé, la Tour de Babel, le Temple de

Salomon, et Jésus-Christ bénissant) et d’une dizaine de bois dans le texte montrant des villes et des monuments. On y trouve pour la première fois la célèbre veduta de venise, considérée comme la plus ancienne représentation imprimée de la cité des Doges. Exemplaire complet, condition rare.

WERNER ROLEWINCK ET LES PREMIÈRES VEDUTA DE VENISE

103

L’illustration, attribuée au Maître des

Très Petites Heures d’Anne de Bretagne,

également connu aujourd’hui sous le nom

de Maître de l’Apocalypse-Rose, comprend

la figure de l’homme anatomique au verso

du titre, celle du Saint Graal au verso du

calendrier, des bois représentant les signes

du zodiaque placés dans les bordures du

calendrier, et 21 grandes figures illustrant des

scènes de la Bible (le Baiser de Judas, l’Arbre

de Jessé, la Visitation, la Nativité, la Pentecôte,

l’Adoration des bergers, la Fuite en Égypte, le

Jugement dernier, la Crucifixion, Urie tué à la

bataille, etc). Le texte est placé dans de larges

bordures ornées de scènes diverses, dont une

vie de la Vierge, et une Danse des morts en

66 bois réparties sur douze pages (30 pour les

hommes et 36 pour les femmes). On notera

aussi dans les bordures, des scènes de chasse

au cerf.

125. HEURES. — HEURES À LUSAIGE DE ROMME

Paris, Philippe Pigouchet pour Simon Vostre, 16 septembre 1498. In-4. Superbe édition incunable des Heures de Simon Vostre, imprimée en caractères gothiques par Philippe Pigouchet dont la marque typographique orne le titre. Elle comprend un almanach pour vingt et un ans (1488-1508) et un calendrier avec son texte latin, suivi de quatrains en latin et en français à la fin de chaque mois. L’édition la plus répandue et la plus célèbre des Heures imprimées par Pigouchet pour Simon Vostre, est datée du 16 septembre 1498. C’est l’une des plus richement illustrées. [...] L’édition de 1498 est entièrement illustrée et décorée d’après des dessins du peintre (sauf pour la marque typographique de Pigouchet et pour une Messe de saint Grégoire) (cf. François Avril et Nicole Reynaud, Les Manuscrits à peintures en France, 1450-1520, n°147).

LIVRE D’HEURES À L’USAGE DE ROME, 1498

104

LIVRE D’HEURES À L’USAGE DE ROME, 1498

105

125. HEURES. — HEURES À LUSAIGE DE ROMME (DÉTAIL)

106

125. HEURES. — HEURES À LUSAIGE DE ROMME (DÉTAIL)

107

108

Inscrite par le peintre Daniel Dumonstier

(1575-1646) sur une plinthe à l’entrée de sa

bibliothèque, cette sentence (ou anathème)

véhémente nous rappelle, à nous autres

amoureux des livres, bien des maux et des

désagréments auxquels les bibliothécaires

et les bibliophiles durent faire face et sont

encore parfois confrontés : un livre prêté qui

est rendu endommagé, ou pire, volé et perdu

à jamais !

Au Moyen Âge, pour prévenir le désordre

des livres déplacés dans les bibliothèques,

les convoitise et vol, on eut l’idée originale

d’attacher les manuscrits et les livres, surtout

ceux qui relevaient d’un caractère précieux,

aux meubles qui leur servaient de support ou

de rangement. D’où l’expression de « livres

enchaînés », libri catenati en latin.

Les livres étaient généralement reliés par

une chaîne constituée de plusieurs chaînons

et rivée en pied ou en tête de l’un des plats.

L’extrémité de celle-ci coulissait dans une

tige en métal fixée elle-même au pupitre

de lecture et munie d’un cadenas. Seuls

les bibliothécaires possédaient les clés qui

permettaient d’ouvrir les serrures et de

détacher les livres. Cette pratique, dont les

plus anciens témoignages remonteraient au

milieu du XIIIe siècle (on pense même que

cet usage existe depuis le XIe siècle), perdura

tardivement jusqu’au XVIIe siècle dans les

couvents et les bibliothèques publiques, voire

au XVIIIe siècle en Angleterre.

En Normandie, on possède la preuve que

certaines bibliothèques avaient recours à cet

usage. Ainsi, il en va de l’abbaye de Jumièges,

ou de Bayeux. Des archives nous apprennent

par ailleurs que vers 1470, les livres de la

librairie de la cathédrale de Rouen étaient

également enchaînés ; ainsi, un chanoine

rouennais du nom de Laurent Surreau, décédé

en novembre 1479, révèle dans son testament

vouloir donner et laisser « à ceste vénérable

esglise de Rouen pluseurs de mes livres de

la saincte escripture [...] et vueil que iceulx

livres soient mis et appliquez et enchaynez

en la librarie d’icelle esglise, pour y estre tant

qu’ilz pourront durer au prouffit et utilité des

bons estudians. »

Si de nos jours cette pratique a disparu, une

poignée de bibliothèques en garde les traces.

L’unique et impressionnante bibliothèque

enchaînée de la cathédrale d’Hereford au

Royaume-Uni, en est le témoignage parfait :

c’est aujourd’hui la seule qui soit conservée

dans son état primitif, avec quelque 2000

volumes enchaînés à des pupitres. Autre

exemple, dans la bibliothèque de l’église Saint-

Walburge à Zutphen, ville des Pays-Bas, où

des livres anciens sont encore reliés par des

chaînes aux pupitres de lecture.

LE DIABLE EMPORTE LES EMPRUNTEURS DE LIVRES !

21. BELZÉBUTH

SOMMER Carl August Wilhelm (1829-1921) Sculpture en bronze à patine médaille. Signé. Fondeur : F. Bruno Fuse. H : 117,5 cm. Bibliographie : E. Eckerlein, Carl August Wilhelm Sommer, ein vergessener Coburger Künstler. Coburger Heimat, volume 3, 1982, p : 69-72.

109

120. SUMMA THEOLOGICA ANTONINUS (FLORENTINUS)

Venise, Leonhard Wild, 1481. In-folio, veau brun estampé à froid sur ais, cabochons, bouillon et fermoirs en laiton ciselés, dos à trois gros nerfs. Pellechet, 879. Édition incunable vénitienne, imprimée en caractères gothiques par Leonhard Wild, typographe originaire de Ratisbonne. Religieux de l’ordre des Dominicains, Saint Antonin (1389-1459) fut archevêque de Florence et s’est rendu illustre par sa piété et ses ouvrages. Il fut le seul saint florentin de tout le Quattrocento et était très versé dans la jurisprudence civile et canonique, ainsi que dans l’histoire de l’Église. Exemplaire rubriqué, conservé dans sa reliure d’origine avec sa chaîne d’attache. Cette dernière, constituée de chaînons aplatis vers le milieu, est rivée en pied d’un des plats. Gruel, dans son Manuel de l’amateur de reliures, t. I, p. 95, décrit ces livres qui étaient enchaînés (libri catenati) à des pupitres ou des lutrins pour en prévenir le vol. Cet usage, dont les plus anciens témoignages remonteraient au milieu du XIIIe siècle (cf. Histoire des bibliothèques françaises, t. I, p. 487), perdura tardivement jusqu’au XVIIe siècle dans les couvents et les bibliothèques publiques. Rare specimen de reliure enchaînée, complète des cabochons, du bouillon et de ses fermoirs.

LES LIVRES ENCHAÎNÉS

Cette somme de théologie morale n’est pas,

comme le laisse supposer son titre, un

ouvrage de scolastique, mais un traité dans

lequel l’auteur a abordé diverses questions

sur l’usure, l’économie, le capitalisme, l’art,

etc. Premier volume présenté seul, sur les

quatre que compte cette édition. Notons que

même si cet incunable est répertorié dans bon

nombre de bibliothèques, peu sont complets

des quatre parties.

111

Romans courtois et récits du Moyen Âge

100. ANTONIO DEL MASSARO DA VITERBO DÎT “IL PASTURA”

« Vierge à l’Enfant » Panneau vers 1500 (Détail)

112

114

Po ème a l l é gor ique e t d id ac t ique

incontournable rédigé au cours du XIIIe

siècle, Le Roman de la Rose fut écrit en deux

temps. Par Guillaume de Lorris d’abord puis,

près de quarante ans plus tard, par Jean

de Meung. Il est le récit prophétique d’une

destinée amoureuse, l’itinéraire initiatique

d’un galant tentant de posséder l’être aimé.

La poursuite de l’amour et l’aventure sont

modèles de vie. Mais quand un poète refuse

la jouissance, couronnement du désir, l’autre,

plus satirique, se libère des idéaux courtois.

166. LORRIS (GUILLAUME DE) ET JEAN DE MEUNG.

Le Romant de la rose nouvellement imprimé à Paris. Paris.Première édition datée. Imprimée en caractères gothiques sur deux colonnes, elle est ornée d’un bois sur le titre, répété sous le colophon, et d’un grand bois montrant un écrivain à son pupitre, placé au verso du titre et au dernier feuillet. La grande marque de Michel Le Noir figure au verso du dernier feuillet. Monument de la littérature française, le Roman de la rose est l’un des textes les plus importants et les plus anciens de la langue et de la poésie françaises. Il fut commencé vers 1230 par Guillaume de Lorris, puis fut repris plus tard par Jean de Meung qui ajouta près de dix-huit mille vers aux quatre mille laissés par son prédécesseur. L’influence de ce roman courtois fut considérable sur la production littéraire et la pensée européenne de la Renaissance, en particulier auprès des poètes de la Pléiade. Ex-libris manuscrit presque effacé sur le titre. Étiquette du libraire Dentu.

LE ROMAN DE LA ROSE

115

BOCCACE

141.

116

BOCCACE

BOCCACE. Boccace des nobles / maleureux

[sic]. S.l.n.d. [au colophon] : Paris,

pour Antoine Vérard, s.d. [c. 1506]. In-folio,

maroquin rouge, janséniste, armoiries au

centre, large dentelle intérieure, plats anciens

de veau marbré avec armoiries collés sur la

doublure, tranches dorées (Reliure moderne).

Très belle édition gothique de la première

traduction française du De casibus virorum

illustrium de Boccace (1313-1375), établie par

l’humaniste Laurent de Premierfait.

Il s’agit de la seconde édition publiée par

Antoine Vérard, après celle de 1494. Elle est

ornée de 10 superbes grands bois. Le titre

est imprimé sur deux lignes et possède une

initiale B à cadeaux avec visage grotesque.

Le De casibus virorum illustrium, composé

par le maître florentin dans la seconde moitié

du XIVe siècle, est un recueil de biographies

à visée morale racontant la fin tragique,

renversés par fortune, d’hommes et de

femmes célèbres depuis la création du monde :

on y trouve ainsi les malheurs d’Athalie, de

Denys de Syracuse, de Mithridate, du roi

Arthur, de Philippe Le Bel, et de beaucoup

d’autres encore. L’ouvrage fut traduit pour la

première fois en langue française par Laurent

de Premierfait (vers 1370/1380-1418), qui en

écrivit deux versions, l’une en 1400, l’autre

vers 1409. Cet érudit et fin latiniste, originaire

de Champagne, connut une brillante carrière

en tant que traducteur à la cour de Charles VI.

Sa traduction fut imprimée pour la première

fois à Bruges par Collard Mansion en 1476.

L’exemplaire a été relié en maroquin et frappé

aux armes de Plessis-Villoutreys. On a collé

sur la doublure, des plats en veau marbré

provenant d’une reliure du XVIIIe siècle

aux armes de la marquise de Pompadour.

La favorite de Louis XV possédait bien

un exemplaire des Nobles malheureux de

Boccace, mais une édition in-folio de Michel Le

Noir, 1515 (cf. le catalogue de sa bibliothèque,

1765, n°347) : il ne peut en aucun cas s’agir de

la reliure originelle du livre.

141. BOCCACE. BOCACE DES NOBLES

Très belle édition gothique de la première traduction française du De casibus virorum illustrium de Boccace (1313-1375), établie par l’humaniste Laurent de Premierfait.

Il s’agit de la seconde édition publiée par Antoine Vérard, après celle de 1494. Elle est ornée de 10 superbes grands bois. Le titre est imprimé sur deux lignes et possède une initiale B à cadeaux avec visage grotesque.

Le De casibus virorum illustrium, composé par le maître florentin dans la seconde moitié du XIVe siècle, est un recueil de biographies à visée morale racontant la fin tragique, renversés par fortune, d’hommes et de femmes célèbres depuis la création du monde : on y trouve ainsi les

malheurs d’Athalie, de Denys de Syracuse, de Mithridate, du roi Arthur, de Philippe Le Bel, et de beaucoup d’autres encore. L’ouvrage fut traduit pour la première fois en langue française par Laurent de Premierfait (vers 1370/1380-1418), qui en écrivit deux versions, l’une en 1400, l’autre vers 1409. Cet érudit et fin latiniste, originaire de Champagne, connut une brillante carrière en tant que traducteur à la cour de Charles VI. Sa traduction fut imprimée pour la première fois à Bruges par Collard Mansion en 1476.

L’exemplaire a été relié en maroquin et frappé aux armes Du Plessis Villoutreys. On a incrusté dans la doublure, les plats de la reliure en veau marbré, aux armes de la

marquise de Pompadour, qui recouvrait l’exemplaire au XVIIIe siècle. La favorite de Louis XV possédait un autre exemplaire des Nobles malheureux de Boccace, édition in-folio de Michel Le Noir, 1515 (cf. le catalogue de sa bibliothèque, 1765, n°347).

Ex-libris manuscrit Colletet sous le colophon.

Déchirures réparées au titre, qui provient d’un autre exemplaire, et au feuillet b3. Manque le feuillet s7. Foliotation légèrement coupée à deux feuillets du cahier M, et légèrement atteinte aux deux derniers feuillets. Petites taches et mouillure claire à quelques feuillets. Quelques traits de plume anciens dans les marges.

117

149. CORAS (JEAN DE)

Arrest memorable, du Parlement de Tolose, Contenant une histoire prodigieuse, de nostre temps, avec cent belles, & doctes Annotations. Prononcé es Arrestz Generaulx le XII Septembre 1560. Lyon, Antoine Vincent, 1561. In-4, maroquin noir, janséniste, armoiries dorées au centre, dentelle intérieure dorée, tranches dorées (Reliure moderne). Édition originale, rare.Livre recherché, consacré à la célèbre affaire de Martin Guerre, soldat dont l’identité fut usurpée par un ancien compagnon d’armes, Arnaud du Tilh, qui parvint à se faire passer pour lui auprès de sa femme et de ses enfants pendant plus de trois ans (dit le texte). Au retour du vrai mari, Du Tilh fut démasqué et un procès fut intenté. En 1560, au terme d’une procédure judiciaire complexe, il fut reconnu coupable, pendu et brûlé. Jean de Coras (1515-1572), professeur de droit et conseiller au parlement de Toulouse, est l’un des grands juristes toulousains de son temps. Calviniste déclaré, il fut pendu peu de temps après la Saint-Barthélemy. Ex-libris manuscrit ancien en pied du titre.

L’AFFAIRE MARTIN GUERRE

118

En 1982, Daniel Vigne réalise le film Le

retour de Martin Guerre, l’histoire d’une

affaire judiciaire d’usurpation d’identité.

qui défraya la chronique après un jugement

retentissant à Toulouse en 1551. Dans cette

vente nous présentons le coras, une édition

originale commentée du célèbre procès.

Maître Jean de Coras, conseiller à la cour de

Toulouse, rapporte et annote copieusement

l’arrêt d’une affaire « d’ung argument si beau,

si delectable, & si monstrueusement estrange

qui défraya la chronique en 1559. Il en résume

ainsi l’Argument, & Sommaire du faict :

Martin Guerre, du lieu d’Artigat en Gascongne

ayant une belle jeune femme, appellee

Bertrande de Rolz, s’en va à la guerre, &

demeure huict ans absent.

Passez lesquelz Arnauld du Tilh, soy disant

Martin Guerre, se présente aux seurs, oncle,

& parents dud[it] Martin, ensemble à lad[ite]

de Rolz, femme : qui tous, pour la raison de

la grande similitude, qui estoit entre luy &

led[it] Martin absent, & pour les veritables

enseignes [c.à.d. renseignements], qu’il

donnoit à chacun, de toutes choses, facilement

se persuadent qu’il est Martin Guerre, &

pour tel le recoivent. & est recongnu de tous

les habitans dud[it] Artigat, mesmement de

lad[ite] de Rolz. avec laquelle il cohabite trois

ans, come mary, & de ses œuvres, ha deux

enfans.

Après l’imposture quelque peu decouverte,

il est fait prisonnier, par auctorité du juge de

Rieux, & en fin condemné perdre la teste.

De quoy appelle au parlement de Tolose, ou il

est amené, & ouy : soustenant toujours, qu’il

estoit Martin Guerre, comme aussi faisoient

les quatre seurs, & leurs marys, beaux freres

dud[it] Martin, ensemble xxx. ou xl. tesmoings.

Mais par ce que plusieurs autres au contraire

ou l’assuroient estre Arnauld du Tilh, ou bien

en doubtoient & n’osoient affermer ny l’un

ny l’autre, pour la ressemblance grande, du

prisonnier avec lesd[its] Martin, & du Tilh,

la cour estoit en merveilleuse perplexité. Et

comme on vouloit juger le procès, Martin

Guerre arrive : le quel neantmoins confronté

aud[it] du Tilh, demeure presque vaincu :

tant mieux scavoyt l’imposteur, farder ses

mensonges, que l’autre s’ayder de la verité.

Dont les juges encor plus incertains, font

venir les seurs, & certains autres tesmoings :

par lesquelz le nouveau venu, est remarqué, &

recongnu pour Martin Guerre : & l’imposture

faicte evidente. Dont s’en ensuyt arrest,

que led[it] du Tilh sera pendu, & son corps

bruslé : les enfans neantmoins procreez de

ses œuvres, & de lad[ite] de Rolz declairez

legitimes.

A l’execution duquel led[it] du Tilh condemné,

confesse au long l’imposture. »

Encore étonnante au XVIIIe siècle, l’affaire

Martin Guerre a été incluse dans le recueil

en 20 volumes des Causes célèbres et

intéressantes, publié par l’avocat au Parlement

François Gayot de Pitaval de 1738 à 1743. Elle

été remise en lumière à notre époque par le

film de Jean-Claude Carrière et Daniel Vigne

en 1982, Le Retour de Martin Guerre, joué

notamment par Gérard Depardieu et Nathalie

Baye. Ce film a obtenu l’oscar du meilleur

scénario.

On notera que ce film rendait bien l’attitude

ambiguë de l’épouse « abusée ».

L’AFFAIRE MARTIN GUERRE

119

Objets raresL E S S E C R E T S D E L A C H A M B R E D E S M E RV E I L L E S

“ Rien ne mérite plus une visite que les collections du signor Septalla, un chanoine de Saint Ambrose, célèbre dans toute la chrétienté pour son savoir et ses vertus. Parmi d’autres choses, il nous montra un bois des Indes qui a la parfaite odeur de la civette ; un silex, ou un cristal de roche emprisonnant une grande quantité d’eau que l’on peut voir entièrement car il est comme de l’Agate ; divers cristaux avec de l’eau ondulant à l’intérieur, certains renfermant aussi des plantes, des feuilles, des soies de porc, beaucoup d’ambre, plein d’insectes et diverses choses faites d’amiante « fibreuse ».”

John evelyn, milan 1646

120

65. VASE (détail)

Pour le cabinet des curiositésUNE MONTRE DE VOYAGE

Nuremberg était au XVIe siècle le centre de l’activité astronomique. On y fabriquait notamment

des cadrans qui reflétaient la voûte céleste et marquait les heures. Cet objet rare de la fin du

Moyen Âge marque ainsi le temps en observant la progression régulière du soleil.

66. CADRAN SOLAIRE DIPTYQUE

avec boussole en ivoire gravé d’une vierge à l’Enfant. Allemagne, Nuremberg vers 1500. Dimensions : H : 7,5 L : 6,8 x P : 1,2 cm. Cet objet est à mettre en relation avec un élément de cadran solaire du Metropolitan Museum of Art et portant le numéro d’inventaire 1987.340.

122

70. LA POCHETTE, UN INSTRUMENT À CORDES

Woerle Georg (Vils 1620-Augsbourg 1695). On connaît de ce maître deux pochettes marquetées, l’une présentée au musée Germain de Nuremberg l’autre de l’ancienne collection Heyer.

123

LA GÉOGRAPHIE SELON MERCATOR

124

180. STRABON D’AMASÉE

Nous présentons dans cette vente un in-folio du Rerum geographicarum libri XVII [graece et latine]. Il s’agit de la première édition commentée par Casaubon, accompagnée de la traduction latine de l’humaniste et philosophe allemand Guillaume Xylander. Cette édition est imprimée sur deux colonnes avec le texte grec en regard de la traduction

latine. Le titre est placé dans un très joli encadrement gravé sur bois en forme de portique, avec deux cariatides soutenant une grande couronne, la partie basse ornée elle d’une scène représentant sept des Muses. Cet encadrement, répété au titre de la seconde partie, provient du matériel d’Eustache Vignon et est reproduit par Heitz, Marques d’imprimeurs et de libraires de Genève,

sous le n° 158. La seconde partie de notre ouvrage, en pagination séparée et avec un titre particulier, est occupée par les Commentarius et castigationes de Casaubon. Issac Casaubon (1559-1614), érudit calviniste originaire de Genève, fut un grand helléniste et occupa notamment la charge de garde de la librairie royale sous Henri IV. Scaliger le surnommait le « grand Musagète». Cette édition rare,

LA GÉOGRAPHIE SELON MERCATOR

125

Strabon d’Amasée fait référence dans une

discipline à laquelle il consacra de patientes

descriptions et un ouvrage éponyme, La

Géographie. Également considéré comme un

éminent penseur Strabon estime que cette

science ne peut être purement descriptive.

La géographie est une source d’informations

centrale, elle nous raconte le passé des

hommes et celui de la terre habitée. Il met

l’interprétation au cœur de son travail de

géographe et précède la pensée de Marc-

Aurèle qui voulait que l’étude de la nature soit

utile : « Qui ne sait ce qu’est le monde, ne sait

où il se trouve lui-même. Qui ne sait pourquoi

il est fait, ne sait pas non plus qui il est, ni

ce qu’est le monde » Marc-Aurèle, Pensées

pour moi-même. L’œuvre de Strabon sera

redécouverte au XVe siècle grâce à l’Italien

Guarino Veronese qui la traduisit en entier.

présentée dans une élégante et sobre reliure en maroquin du XVIIe siècle, est recherchée pour la superbe carte des deux hémisphères gravée en taille-douce à double page par Rumold Mercator, réduction de la grande et célèbre carte donnée par son père Gérard Mercator en 1569. Notons que celle-ci apparaît pour la première fois dans cette édition de Strabon.

110. LES TROIS MAGOTS

Vitrail, époque fin XVe siècle. Diam. 12,5 cm

SOIGNER PAR LES PLANTES AU XVIIIe SIÈCLE

SOIGNER PAR LES PLANTES AU XVIIIe SIÈCLE

Liste des plantes décrites dans l’her-

bier : plantes évacuantes, techniques ou

pectorales, errhines, histériques, apési-

tives, diaphorétiques, alexitère, cépha-

liques, ophtalmiques, stomachiques,

lubrifiques, hépatiques, carminatives,

antistabutiques, altérantes, vulnéraires,

émollientes, résolutives, assoupissantes et

rafraichissantes.

58. HERBIER

par Haillot, Catalogue de toutes les plantes d’usage suivant l’ordre de leurs vertus. Ensemble de 175 planches reliées présentant une collection de plantes fixées à la cire rouge et légendées. Reliure en cuir vert. Époque XVIIIe siècle.

“ Je veux des maladies d’importance, de bonnes fièvres continues, avec des transports au cerveau, de bonnes fièvres pourprées, de bonnes pestes, de bonnes hydropisies formées, de bonnes pleurésies avec des inflammations de poitrine : c’est là que je me plais, c’est là que je triomphe ; et je voudrais, monsieur, que vous eussiez toutes les maladies que je viens de dire....”

molière, le malade imaGinaire 1673

127

128

65.

69. CHOPE

en ivoire, laiton et or. La prise datée 1677. Europe du Nord, XVIIe siècle. H. 26 cm

64. GOBELET COUVERT

Augsbourg XVIIIe en argent et vermeil reposant sur trois pieds boules, la prise du couvercle de forme sphérique, le corps et le couvercle ornés d’un décor au repoussé de frises feuillagées, poinçons sur le couvercle et sous le corps, la pomme de pin pour Augsbourg, P, S pour le maître orfèvre, prise de matière pour le contrôle de la garantie, H : 15 cm, poids : 175 g. (légers enfoncements sur les boules, un pied boule percé ).

67. PETITE CHOPE

couverte en argent et vermeil moulé, repercé et gravé. Le corps à décor de rocaille est composé de huit faces gravées de fruits et de fleurs. Le couvercle à poussoir surmonté d’une pomme de pin et l’anse ornée de perles d’argent. Poinçon de ville et de maître sous la base : Nikolaus Weiss (reçu maître en 1613- mort en 1631). Nuremberg, vers 1615-1625. H : 15,2 cm. Poids : 344 g. Réf. Rosenberg, n°4160.

65. VASE EN ARGENT, VERMEIL, ÉMAUX TRANSLUCIDES, SERPENTINE

Vers 1500-1550 ?

129

64.

67.

69.

80. COFFRET DE SÛRETÉ

en fer forgé et clouté à décor de moulures, pilastres et flèches gothiques formant pieds. En façade, deux serrures à moraillons sont activées par des systèmes camouflés dans les flèches et les pilastres. Le couvercle bombé est orné d’une poignée en fer tressé. France, vers 1500. H : 17,5 L : 24,5 P : 13 cm. Fond percé deux fois.

82. DEUX TARGETTES

en fer repoussé à décor d’entrelacs et de feuilles d’acanthe. L’une ornée d’un poussoir en forme de mufle de lion et l’autre en forme de tête d’homme barbu. France, Époque Milieu du XVIIe siècle. Dim : cm et cm. Des modèles comparables au Musée de la Renaissance d’Ecouen.

130

81. POIRE À POUDRE

en fer forgé, aux décors au repoussé et doré, Allemagne du sud, XVI°e siècle. Poire à poudre en fer forgé, au décor repoussé et doré. Sur une des faces ; Quatre portraits dans des médaillons formant une croix avec en son centre un blason chargé de cinq étoiles surmonté d’une chimère. Alternant aux portraits, quatre chimères au milieu de rinceaux. Les portraits représentent trois hommes à la collerette représentant probablement des nobles ou des Électeurs. Le quatrième médaillon représentant une femme en buste. Sur l’autre face ; une scène de chasse finement exécutée où un cerf est pourchassé par des chiens, le tout est enrichi par un décor de rinceaux et de feuilles d’acanthes. Un exemplaire com-parable est conservé Métropolitain Muséum, commandé par le prince électeur August 1er de Saxe. Ref : Lillie, Sophie. Was Einmal War : Handbuch der Enteigneten Kunstsammlungen Wiens. Vienna : Czernin, 2003. p. 1089, no. 2707.

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72. LÉONARD LIMOSIN

(entourage de). Plaque de forme losangée en émail peint polychrome translucide sur fond noir avec réhauts d’or représentant le buste en profil gauche de la déesse Diane. Inscription « DIANATRIA » en or. Contre-émail en fondant saumoné. Limoges deuxième quart du XVIe siècle. Dim : 19,5x17,1 cm. Très légers manques en bordure. Plusieurs séries de plaques losangiques de mêmes dimensions et illustrant les héros de l’Antiquité semblent avoir été réalisées dans un atelier limougeaud proche de Léonard Limosin. Une plaque illustrant Paris se trouve dans les collections du musée de la Renaissance à Ecouen (INV CI 18 389) et deux autres au Louvre représentent Hélène et Penthésilée (0A 3091 et 3090). De même, l’échiquier-trictrac du Louvre présente également quatre profils aux techniques et aux décors similaires. Réf : Léonard Limosin au Musée du Louvre, Sophie Baratte

73. JEAN COURT

(attribué à). Rare médaillon ovale en émaux polychromes. Emaux sur paillon

argent avec réhauts d’or représentant Mercure casqué, aux carnations

rosées, de profil tenant son caducée. Il est représenté sous un fronton soutenu

par deux colonnettes, dans un décor de fleurs où une urne répand de l’eau bénite.

Monture en bronze finement ciselée. Limoges, premier quart du XVIIe siècle.

Dim : 11,6x8,2 cm. Petit manque sur le bord. Ce médaillon est réalisé d’après

les travaux du graveur et orfèvre Etienne Delaume (1518/19-1583). Il est

à mettre en relation avec des émaux acquis par le Cincinnati Art Museum en

2010 ou encore par le Musée du Louvre. Un autre sujet de Martial Reymond,

à l’iconographie similaire, est présent au musée de la Renaissance à Ecouen.

Remerciements à Florian Dadat pour sa collaboration à la rédaction des fiches

descriptives des émaux.

Éclats et transparence

DES ÉMAUX DE LIMOGES

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134

LE MARTYRE DE SAINT VINCENTNORMANDIE, ROUEN, VERS 1500

106. PANNEAU EN CHÊNE SCULPTÉ EN PROFOND RELIEF

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DU BOUT DES DOIGTS

Debout, une jeune femme au collier

de perles, en arrière-plan d’un

paysage montagneux, est élégamment

vêtue, un châle de satin bleu et d’un

bordé d’or est épinglé sur le devant de sa

blouse, un riche tapis drapé retombe sur

une table en pierre sculptée d’un sujet

allégorique sur laquelle est assis un

petit chien. La jeune femme, le regard

lointain entoure de ses bras l’animal

et s’apprête à saisir délicatement

un morceau de pain du bout de ses

doigts. Elle semble absente de la scène,

détachée du sujet et de celui qui la

contemple. Van Mieris excella très tôt

dans le genre du portrait représentant

avec élégance et raffinement la haute

bourgeoisie hollandaise.

57. PORTRAIT DE FEMME AU PETIT CHIEN

Van Mieris Willem (1662-1747). huile sur panneau, 22,8 x 23 cm. Au dos : inscription en rouge d’un numéro d’inventaire. Restaurations d’usage. Provenance : Collection particulière. Ce tableau a figuré dans le catalogue de la vente du 13 décembre 2002 à Paris, n° 62, S.V.V Buffetaud-Godeau-Chambre-de Nicolay Pierre Bergé & Associés.

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AUX ARMES DE MADAME DE MAINTENON ET DU DUC DE NOAILLES

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Les coffrets de Pierre et Jean-François

Hache. Nous sommes face au raffinement

extrême, à un objet de luxe offert à l’occasion

d’un mariage d’une grande famille de France

(duc de Noailles et Madame de Maintenon) Il

était destiné au rangement des objets de toilette,

bijoux, boîtes à épices. Le montage particulier de

ce meuble objet, met en valeur les feuilles, fleurs

et feuillages et surtout les armes surmontées

d’une couronne. Dans le tiroir à secrets, la

marque de la célèbre maison. Les coffrets

réalisés par les Hache mais surtout par Pierre

Hache, qui en fit une spécialité, connaissent à

l’époque un grand succès. Ils étaient offerts à

l’occasion d’un mariage. Cinq ébénistes de la

dynastie Hache exercèrent à Grenoble au XVIIIe

siècle. D’origine picarde, ils descendaient d’un

artisan de métier, Noël Hache. Son petit-fils

Pierre Hache (28 décembre 1703 - 3 juin 1776)

estampillait ses ouvrages au moyen de deux

fers, l’un portant le nom Hache, l’autre, son lieu

de résidence à Grenoble. Bibliographie : Hache,

ébéniste à Grenoble, musée dauphinois publié

chez Glénat.

59. GRAND COFFRET DE MARIAGE POUR MADAME DE MAINTENON

estampillé Hache à Grenoble. Orné de marqueterie à l’italienne dans une composition de fleurs et de rinceaux feuillagés au naturel et teintés. Le fond en loupe de sycomore teinté en vert est entouré de filets chantournés dessinant des réserves. Deux tiroirs ouvrant à mécanisme agrémentent les côtés latéraux du coffret. Sur le couvercle orné de rinceaux feuillagés, la réserve centrale abrite les armoiries de la Maison de Noailles alliées à celles de Maintenon. Dimensions : 30,5 x 48,5 x 36, 2 cm.

61. PAIRE DE CANDÉLABRES

en argent de style rocaille à cinq bras de lumières de la maison Boin-Taburet à Paris. H: 53 cm. Poids : 5,950kg.

AUX ARMES DE MADAME DE MAINTENON ET DU DUC DE NOAILLES

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Au service des dieux

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111. CUIRASSE DE CENTURION

en marbre de Carrare provenant d’un buste antique. Ier siècle. H. 44 cm

OvideET LES MÉTAMORPHOSES

“ Ovide écrit en vers composés de six pieds (hexamètre dactylique) l’histoire du monde et la punition divine comme une épopée. Des hommes, des héros, des nymphes ou des dieux sont transformés en plantes, en animaux, en constellations. Ainsi, le prince Actéon est métamorphosé en cerf par la déesse Diane, furieuse qu’il l’ait vue dans sa nudité ; Narcisse, en fleur, parce qu’il aimait son reflet ; Arachné, en araignée, car elle tissait de très beaux ouvrages… Nous voici au cœur des mythes et des légendes de l’antiquité qui ont nourri notre civilisation.”

extraits de la présentation ovide, Les métamorphoses - Les Châtiments par solveiG hudhomme,

223. LES MÉTAMORPHOSES D’OVIDE

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223. LES MÉTAMORPHOSES D’OVIDE

Très belle édition de la célèbre traduction française de Nicolas Renouard et premier tirage des illustrations. Une première édition de cette version en prose avait d’abord paru en 1617. Magnifique illustration finement gravée en taille-douce, comprenant un titre-frontispice architectural par Pierre Firens d’après Daniel Rabel, un portrait d’Ovide par Jaspar Isaac, et 137 gravures dans le texte par Isaac Briot, Joannes Matheus, Michel Faulte et Pierre Firens. Les gravures non signées sont attribuées à Crispin de Passe. Un beau jeu d’alphabet historié et ornementé, ainsi que de multiples bandeaux et culs-de-lampe gravés sur bois complètent la décoration du livre.

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L’homme démontable

“ Mais parmi toutes les raretés, de cet endroit, j’ai été très content de voir leur école d’anatomie, le théâtre et la réserve attenante, qui est abondamment pourvue de curiosités naturelles : des squelettes, de celui de la baleine et de l’éléphant à celui de la mouche et de l’araignée, ce dernier constituant une pièce d’un art très délicat. Parmi d’autres choses d’une grande diversité, on m’a montré le couteau que, par une incision dans les côtes, on a récemment retiré des entrailles d’un Hollandais ivre, après qu’il eut échappé des doigts pour glisser dans son estomac”.

John evelyn à leider et rotterdam, 1641

LOUIS AUZOUX

Médecin audacieux, inventeur de talent,

artisan virtuose : voilà qui pourrait qualifier

Louis Auzoux, normand né au début du

XIXe siècle qui renouvela la pédagogie

médicale. Ses célèbres mannequins de papiers

entièrement démontables, originellement

conçus pour l’étude rigoureuse de l’anatomie

humaine, nous parviennent, à l’image de

notre spécimen, comme de rares objets de

curiosité. Leur apparence rigide et cependant

délicate, leurs traits naïfs et pourtant précis

en font des créations étrangement poétiques.

90. L’HOMME DÉMONTABLE

Auzoux Docteur Louis Thomas Jérôme (1797-1880). Écorché clastique d’un corps humain en papier mâché colorié, légendé et vernis. Marqué et daté sur la cuisse gauche : « Anatomie clastique du Dr Auzoux, 1883 ». Repose sur un piétement tripode en fonte d’origine. Hauteur hors socle : 122 cm. Manque le cerveau. Un modèle similaire apparaît sur une photographie prise au début du XXe siècle aux ateliers Auzoux de Saint-Aubin-D’Ecrosville. Référence bibliographique : Corps de papier, l’anatomie en papier mâché du docteur Auzoux, édition de La Martinière, 2012. Page : 168.

147

60. MANUFACTURE JOSEPH DUFOUR (1754-1827).

Vue panoramique composée d’une suite de papiers peints marouflés sur quatre toiles à décor de scènes mythologiques dans des paysages architecturés.

Epoque début du XIXe siècle. Dimensions totales des lés par toile : 244,5x263,5 cm ; 246,5x264 cm ; 246,5x210,5 cm et 243,5x211,5 cm. Manques de matière. Bibliographie : Papiers peints panoramiques, Flammarion Paris, 1998 p : 120 et 264.

148

“ Ma mémoire est un panorama ; là viennent se peindre sur la même toile les sites et les cieux les plus divers avec leur soleil brûlant ou leur horizon brumeux.”

mémoires d’outre-tombe - Chateaubriand,

PAPIERS PEINTS

149

UN COUVERCLE DE SARCOPHAGE DE LA COLLECTION DE ROGER PEYREFITTE

L’image de l’homme et de l’auteur sulfureux

Roger Peyreffite a souvent fait oublier

l’amateur d’art et le grand collectionneur

qu’il était. Observateur privilégié des milieux

les plus variés, ses collections témoignent

de ce même éclectisme. Érudit, passionné

par l’Antiquité, féru de culture gréco-latine,

il collectionna aussi bien monnaies, livres

rares, et sculptures antiques. Au nombre des

œuvres de sa collection dispersée lors d’une

vente aux enchères à l’Hôtel Georges V le 24

mai 1977, figure cet exceptionnel couvercle

de sarcophage thébain, dont les peintures

témoignent de la culture funéraire égyptienne.

Le sarcophage anthropomorphe en bois

stuqué est peint d’un décor polychrome

reprenant des figures issues du panthéon des

divinités égyptiennes et de formules rituelles

destinées à accompagner et protéger le défunt

au royaume des morts… Ici, le couvercle

de sarcophage en bois peint et doré porte

le nom de Djemhapi. Les trois colonnes de

hiéroglyphes en relief dorés reproduisent la

formule empruntée au texte des Pyramides

relatif à la protection du défunt par la déesse

Nout, sa mère. Période gréco-romaine, n°4

du catalogue de la vente du 24 mai 1977,

Collection Roger Peyrefitte.

Civilisations disparues

94. COUVERCLE DE SARCOPHAGE MOYENNE-EGYPTE ÉPOQUE PTOLÉMAÏQUE

en bois stuqué et peint d’un décor polychrome reprenant des figures issues du panthéon des divinités égyptiennes et de formules rituelles destinées à accompagner et protéger le défunt au royaume des morts… Ici, le couvercle de sarcophage en bois peint et doré porte le nom de Ghemhap fils de la Dame Tchehes. Les trois colonnes de hiéroglyphes en relief dorés reproduisent la formule empruntée au texte des Pyramides relatif à la protection du défunt par la déesse Nout, sa mère. Période gréco-romaine, n°4 du catalogue de la vente du 24 mai 1977, Collection Roger Peyrefitte. (Manques, décollement de matière) H : 220 cm environ.

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DÉESSE NOUT

Nout incarne le ciel, son rire est le tonnerre, ses larmes la pluie,

son corps symbolise la voûte céleste. Elle avale chaque soir

le soleil couchant et le met à nouveau au monde chaque matin. La

déesse accompagne le défunt dans le voyage de l’au-delà.

152

“ On conserve dans ce même lieu des momies de toutes sortes. c’est une curiosité qui n’est guère utile, mais elle a pourtant sa beauté. il y en a de blanches et de noires : celles-ci sont d’ordinaire embaumées, entourées de bandelettes et remplies d’idoles, de petits animaux et d’autres bijoux superstitieux. on m’a fait présent ailleurs de quelques curiositez de cette espèce qui ont été déterrées depuis peu d’une pyramide d’Égypte.”

charles patin, relations historiques et curieuses de voyaGe.

94. SARCOPHAGE

(détails)

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95. TÊTE DE DIGNITAIRE

Artefact en bois stuqué et peint représentant la face idéalisée d’un haut dignitaire porteur de la grande perruque mi-longue à pans droits dégageant les oreilles et connue depuis le Nouvel Empire. La chair peinte en rouge est conforme au canon conventionnel de couleurs. Atelier de Memphis, Époque ramesside ou plus tardive jusqu’à la période intermédiaire (XXe-XXIe dynastie).

La forme en ovale du visage, l’expression juvénile avec ses grands yeux rehaussés de traits noirs, le nez marqué à fine arête droite presque busqué, les lèvres bien modelées, mais le tout avec une certaine sécheresse de traitement, crée une figure conforme au stéréotype d’âge idéal et parfait de l’homme dans la plénitude de la jeunesse. H : 21,5 cm. Provenance : collection privé Manche.

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93. LE REPOS DU JEUNE BERGER

Clairin Georges Jules Victor (1843-1919). Pastel aquarellé signé, daté 1903 et dédicacé (?) en bas à gauche. Dim : 46x27 cm à vue.

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L’histoire pré-inca a subi l’indifférence intellectuelle longtemps

réservée aux périodes précoloniales dont on doutait qu’elles

aient pu être celles de civilisations organisées. C’est l’étude de son art

notamment, et de ses céramiques plus particulièrement, qui redonne

depuis plusieurs décennies ses lettres de noblesse au Pérou ancien.

L’ensemble que nous présentons témoigne de cette éminente richesse.

Les lignes géométriques des fabrications dites « formatives », a priori

abstraites et donc résolument modernes, nous parlent d’un temps

où l’absence d’ornement laisse place au décor, où l’objet purement

usuel reçoit la marque de sociétés en mutation. Une place large est

accordée à la civilisation Mochicà (Ier-VIIIe siècle de notre ère), à la

plastique réaliste et au pinceau habile de sa production. L’effet produit

par le brun rougeâtre ou le blanc ivoirien et opaque des céramiques

Moches révèle la vigueur de cette civilisation considérée comme étant

la première à atteindre une organisation sociale complexe pouvant

recevoir le « titre » d’État. L’abondance des scènes guerrières ou encore

la représentation physique de prisonniers, dont notre modèle est un

exemple rare, nous apporte la certitude d’un univers belliqueux,

d’une vie cérémonielle intense au centre de laquelle le monde des

dieux s’impose mais où transpire aussi la vie quotidienne à travers

le naturalisme des représentations. Les pièces présentées dépeignent

le Pérou ancien comme une mosaïque complexe, à l’image des motifs

composites qui ornent les productions de la vallée Nazca, dans

laquelle les hommes et les bêtes se mêlent aux silhouettes divines.

Les pré-incasLA DIVERSITÉ DES FORMES ET DES

REPRÉSENTATIONS, LEUR DIMENSION SYMBOLIQUE

MAIS PRAGMATIQUE FONT DE CES OBJETS DES

PIÈCES ESTHÉTIQUEMENT REMARQUABLES ET

SCIENTIFIQUEMENT INCONTOURNABLES.

PAGE DE DROITE

316. VASE ANTHROPOMORPHE

à large goulot tronconique représentant un prisonnier assis en tailleur, corde au cou et les mains liées dans le dos. Céramique brun-clair, surface semi-mate, décor peint en blanc et noir, cette dernière aujourd’hui peu visible décorait le corps nu du captif de tatouages. Pérou, civilisation Mochica IV. H : 31 cm. Provenance : vente Audap Paris, novembre 1991.

DOUBLE PAGES

SUIVANTE

310. COUPE EN CÉRAMIQUE

ocre-beige-noire, grise et ocre-rouge gravée sur le pourtour de huit poissons stylisés (raies) et de motifs géométriques. Côte sud du Pérou, Période Paracas moyen vers -600/-300 av. J.C. Diam : 15,5 cm.

156

158

310. COUPE PÉROU, VERS -600/300 AV. J.C.

159

Assisté de :

Dominique Courvoisier

Expert de la Bibliothèque Nationale de France

5, RUE DE MIROMESNIL, 75008 PARIS - TÉL. 06 09 38 18 66 TÉL. 01 42 68 11 29 - EMAIL : [email protected]

assisté de

Alexandre Maillard

Bruno Frey

Expert pour les arts d’Afrique et d’Océanie

TÉL. 06 20 70 10 01

Eric Turquin

Expert pour le tableau ancien numéro 100

TÉL. 01 47 03 48 78

Vatelot-Rampal

Expert luthier, TEL : 01.45.22.17.25,

Commissaire Priseur Jean-Emmanuel Prunier

Alain Merle

pour sa participation à la rédaction des fiches et textes concernant l’œuvre de Charles Lapicque

Véronique Filloux

Diplômée Commissaire-Priseur, Rédactrice

Gauthier Tabouel

Chargé de dossiers à l’étude

Sandrine Garel

Infographiste

Béatrice du Breuil

Commissaire-Priseur, la Suite, Barcelone pour les œuvres de Jules Dalou

TÉL. 0034 630 662 440

Florent Paillart Presse

TÉL. 06 83 77 94 83

Dominique Langlois Photographies

TÉL. 06 83 77 94 83

160

Les conditions de la venteLa vente est faite expressément au

comptant et les acquéreurs paieront en

sus de l’adjudication, les frais : 27 % T.T.C.

L’adjudicataire le plus offrant et dernier

enchérisseur aura l’obligation de payer

comptant et de remettre ses nom et

adresse. En cas de paiement par chèque

non certifié, la délivrance des objets pourra

être différée jusqu’à l ’encaissement.

Aucun lot ne sera remis aux acquéreurs

avant acquittement de l’intégralité des

sommes dues. Les clients non-résidents

en France ne pourront prendre livraison

de leurs achats qu’après règlement

bancaire incluant les éventuels frais de

change, paiement par Télex et Swift. Les

expéditions sont à la charge de l’acquéreur.

Dès l’adjudication prononcée, les objets

sont sous l’entière responsabilité de

l’adjudicataire. L’ordre du catalogue sera

suivi : toutefois le commissaire-priseur et

l’expert se réservent le droit de réunir ou

de diviser des lots.

D ’é v e n t u e l l e s m o d i f i c a t i o n s a u x

descriptions du catalogue pourront être

énoncées verbalement pendant la vente et

seront consignées au procès-verbal de la

vente. Les dimensions sont données à titre

indicatif. Les objets comportent quasiment

tous des accidents qui ne peuvent

systématiquement être annoncés. Aucune

réclamation ne sera admise pour les

restaurations d’usage, petits accidents,

défauts inhérents à la matière ou à la

technique de fabrication.

L’opérateur de vente volontaire est

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des impayés des Commissaires-priseurs

auprès duquel les incidents de paiement

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pour motif légitime sont à exercer par le

débiteur concerné auprès du Symev 15 rue

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Ordre d’achatLa S.V.V. se charge d’exécuter gracieu-

sement les ordres d’achat qui lui seront

confiés en particulier par les amateurs

ne pouvant assister à la vente. Les en-

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en considération que dans la mesure où

une demande écrite accompagnée d’un

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D R O U O T L I V E

SVV JE PRUNIER- 28, rue Pierre Mendès-France Louviers - Tél. 02 32 40 22 [email protected] - [email protected]

N° d’agrément : 2002-176PRUNIER

161

Au musée du Louvre, dans l’aile

Richelieu, depuis quelques semaines,

sont exposés des chefs-d’œuvre de

l’école de Cologne du XVe siècle.

On peut y retrouver le tableau Les

Anges musiciens du maître de Saint

Barthélemy peint vers 1595 qui a

été préempté dans notre maison de

vente lors de la vente aux enchères

de septembre 2017 pour la somme de

159 000 euros.

Cette œuvre rejoint le fragment

du tombeau du roi Charles V et de

Jeanne de Bourbon de la fin du XIVe

siècle, classé trésor national lui aussi

préempté par le musée du Louvre en

mai 2009, sous notre marteau.

AU DOS :

88. MOULE À PAIN D’ANIS

figurant un grand poisson, bois gravé, XVIe-XVIIe siècle, Dim. 12,5 x 58,5 cm

PRUNIERE N C H È R E S

www.prunierauction.com

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