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JDD 29/12/17 par Annie Chenieux Le Livre de ma mère ** Théâtre de l’Atelier, 1 place Charles Dullin, Paris 18e. Tél. 01 46 06 49 4. theatre-atelier.com Jusqu’au 17 mars (relâche du 7 au 22 janvier).
Patrick Timsit joue le texte d'Albert Cohen Le Livre de ma mère.
(Pascal Victor/Artcom Press)
Pour Patrick Timsit, c’était un "vieux rêve" : jouer Le Livre de ma mère, d’Albert Cohen (1954). Plus de trente ans qu’il attendait ce moment. Et le moment est arrivé, avec l’aide du metteur en scène Dominique Pitoiset, de dire sur scène cette histoire d’amour entre une mère et son fils, unique et universelle. Regard lumineux, sourire au coin des lèvres, le comédien délivre le texte comme s’il était sien, en intimité avec les mots de Cohen et les donnent en partage au public. Debout ou assis derrière une longue table de travail, il dit ce "chant de mort" mais les images de vacances en noir et blanc que l’on peut voir projetées sont issues de ses souvenirs personnels. "Ma mère est morte", il le redit, pour se persuader de cette réalité. En même temps, la tristesse laisse place à la réminiscence des moments heureux. "Pleurer sa mère c’est pleurer son enfance". Le comédien, avec une certaine élégance et délicatesse, tient la bride à l’émotion et laisse la douleur à distance. De la pudeur, de la tendresse à l’évocation de l’image maternelle, de l’humour aussi au souvenir du caractère excessif et de l’amour inconditionnel. Des bribes de musique s’invitent dans le récit, tendance jazz ou mélancolique. Et pour clore cette ode à toutes les mères aimantes, Timsit reprend à son compte le message de Cohen aux fils impatients. Message transmis.
AVANT PREMIÈRE Paroles uniques, mélancolies partagées
1. LE FIGARO 28/12/201
2. Photo Pascal Victor/ArtcomPress
Par Armelle Héliot
Mis à jour le 28/12/2017 à 17h02 | Publié le 28/12/2017 à 16h31
LA CHRONIQUE D'ARMELLE HÉLIOT-
Patrick Timsit à l'Atelier avec Le Livre de ma mère, d'Albert Cohen, Denis Lavant à l'Athénée avec Cap au pire, de Samuel Beckett, touchent l'universel.
Un grand écrivain est celui qui vous raconte des histoires très personnelles et semble tout
connaître de vos propres expériences. Un grand écrivain fait du plus singulier une aventure
universelle. Dire cela est naïf. Pourtant, on en fait l'expérience, ces temps-ci à Paris, par la
grâce de deux interprètes intelligents, sensibles, très bien dirigés.
On est ému, on admire la sensibilité et la rigueur de Patrick Timsit, qui n'en rajoute pas
À l'Atelier, Dominique Pitoiset a imaginé un environnement assez important pour déployer,
par la seule parole et la seule présence de Patrick Timsit, Le Livre de ma mère, d'Albert
Cohen. Disons-le d'entrée, c'est un comédien profond et très nuancé qui porte ce récit unique.
Longue histoire, lente maturation: il y a trente ans que Timsit a découvert l'ouvrage
bouleversant. Trente ans avant qu'il ne se sente prêt. Celui que l'on connaît plus comme un
acteur de fantaisie a mûri. Il a le visage chiffonné de ceux qui ne craignent pas les larmes. Un
regard perdu, une voix bien placée qui magnifie cette prose superbe, l'une des plus belles de la
langue française du XXe siècle.
Un bureau, de longs pupitres, un atelier d'écriture en quelque sorte. C'est comme si Albert
Cohen, devant nous, composait son livre. «Des années se sont écoulées depuis que j'ai écrit ce
chant de mort. J'ai continué à vivre, à aimer. J'ai vécu, j'ai aimé, j'ai eu des heures de bonheur
tandis qu'elle gisait, abandonnée, en son terrible lieu. J'ai commis le péché de vie, moi aussi,
comme les autres.»
Lumières, sons, vidéo, clip étoffent la représentation qui repose pour l'essentiel sur la
«succession d'états» que distingue Dominique Pitoiset. Des moments, des souvenirs précis ou
flous. De l'alliance du style très évocateur et de la sincérité de l'interprète naissent plus que
des images: des apparitions. Cette mère, simple, aimante, on la voit. On l'accompagne à la
plage. On la suit. Elle revit. C'est un travail très fin et remarquable qui donne de la chair à
l'encre d'Albert Cohen. On est ému, on admire la sensibilité et la rigueur de Patrick Timsit,
qui n'en rajoute pas. Qui sert une histoire qui devient celle de chacun.
Mots énigmatiques L'encre de Samuel Beckett, c'est autre chose. Dans Cap au pire, le dernier texte qu'ait écrit le
Prix Nobel de littérature 1969, on ne saisit pas tout clairement. Le sens se dérobe, parfois.
Composé en anglais, il a été traduit par Édith Fournier. Il y a quelques années, à l'Atelier,
justement, Sami Frey en avait fait une lecture feutrée et envoûtante. C'est à l'Athénée, dans la
petite salle Christian-Bérard, que l'on retrouve ces mots simples et énigmatiques. Beckett,
comme Mallarmé, rêve du «livre», le livre unique, le livre de l'accomplissement. Il se reprend,
il rature. Sous le regard pénétrant de Jacques Osinski, debout et totalement immobile, au bord
d'un carré de lumière au sol, comme une obsédante page blanche, Denis Lavant éclaire de sa
personnalité puissante le texte.
Des images surgissent, des images reviennent. Et, en particulier, celle d'un vieil homme
tenant par la main un petit garçon
Son timbre très prenant, sa manière, parfois, de suspendre dans le silence l'écriture
de Beckett, tout subjugue. Le grand Irlandais va vers toujours moins: moins de mots, moins
d'effets. Il rêve du livre qu'il n'aura jamais écrit. Des images surgissent, des images
reviennent. Et, en particulier, celle d'un vieil homme tenant par la main un petit garçon. Cet
enfant, c'est lui. Pas de doute. Cet homme, c'est son père. James Knowlson, auteur d'une
biographie passionnante, n'en doute pas: cette image vient de l'enfance lointaine et jamais tue.
Verts paradis d'un temps où l'on ne pouvait rien craindre, puisqu'un père vous tenait par la
main…
Ainsi, par-delà le temps, Cohen et Beckett nous parlent-ils de l'essentiel. La simplicité
heureuse et douloureuse à la fois de nos liens. Humains, très humains.
Le Livre de ma mère, au Théâtre de l'Atelier, du mardi au samedi à 19 heures.
Représentations supplémentaires le 6 janvier 2018 à 16 heures, le 31 décembre à
17 heures. Jusqu'en mars. Tél.: 01 46 06 49 24. Cap au pire, au Théâtre de l'Athénée,
mardi à 19 heures, vendredi, samedi à 20 heures. Jusqu'au 14 janvier. Tél.:
01 53 05 19 19.
LES ECHOS
Patrick Timsit ouvre grand « Le Livre
de ma mère »
Philippe Chevilley / Chef de Service | Le 22/12 à 06:00, mis à jour à 16:35
Patrick Timsit oscille entre la tristesse du deuil et la joie des souvenirs heureux. © Pascal
Victor/ArtComPress
Mis en scène par Dominique Pitoiset, le
comédien interprète l'ode à toutes les
mères d'Albert Cohen avec une intensité et
une retenue qui bouleversent. Un spectacle
rare au Théâtre de l'Atelier.
Il a les larmes yeux, Patrick Timsit, alors que le spectacle s'achève tout juste et que le
public du Théâtre de l'Atelier lui fait un triomphe. Un peu plus que des larmes même...
le regard lumineux de l'homme et de l'artiste qui sait qu'il a rempli sa mission :
transmettre la puissance et la magie d'un chef-d'oeuvre humaniste, qui a mûri en lui
pendant de nombreuses années, « Le Livre de ma mère » d'Albert Cohen (1954).
Timsit, bouleversant, en distillant plus d'une heure durant l'émotion sans jamais verser
dans le pathos, est soudain bouleversé. L'arroseur (de larmes) arrosé...
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Il n'est pas évident pour un acteur - surtout quand il est davantage reconnu pour ses
talents comiques - de s'attaquer à ce « chant de mort », ode à toutes les mères
défuntes, qui lui sert de livre de chevet depuis trente ans. Le risque est grand de passer
à côté, d'en faire trop ou, à l'inverse, d'en proposer une lecture plate et trop
révérencieuse. Mais l'homme ému a attendu son heure. Et une rencontre : avec
Dominique Pitoiset, metteur en scène précis et féru de grands textes modernes.
Pitoiset a su donner un cadre juste au comédien. Une grande table de travail, du style
de celle qu'utilisait sans doute l'écrivain diplomate lorsqu'il oeuvrait à protéger les
réfugiés au sortir de la guerre, occupe une bonne partie de la scène. Un écran, au-
dessus, montre quelques fines vidéos, un patchwork de souvenirs et d'allégories
poétiques portés par une bande-son délicate. Les déplacements sont économes, les
gestes calculés. Patrick Timsit oscille entre la tristesse du deuil et la joie des souvenirs
heureux. Exprimant sa douleur et sa tendresse d'une voix ferme et posée, il préfère
les doux sourires aux rictus de colère...
MESSAGE UNIVERSEL On entend tout, on ressent tout : le sentiment de perte, de vide (« ma mère est
morte » répété à l'envi), la mémoire vive (et amusée) de l'affection maternelle
débordante, la nostalgie des bons moments passés ensemble... Puis le message
devient universel, s'adresse à toutes les mères et à tous les fils qui ne paient pas
toujours leur amour en retour. Cohen-Timsit parle en filigrane de la cruauté du monde,
de l'absurde méchanceté des hommes et de la mystérieuse absence de Dieu. Autant
que par le propos, puissant, prenant, on est saisi par la magie de chaque phrase, de
chaque mot. Le chant de mort devient musique céleste. Et Patrick Timsit tutoie les
étoiles.
LE LIVRE DE MA MÈRE
d'Albert Cohen
Mise en scène de Dominique Pitoiset. Paris, Théâtre de l'Atelier (01 46 06 49 24). 19 h 00. Relâche du 7 au 22 janvier. Durée : 1 h 20
'Aucun fils ne sait que sa mère mourra'
Patrick Timsit émouvant de justesse dans Livre de ma mère Le texte à fleur de peau du petit juif de Corfou immigré à Marseille à
5 ans avec ses parents résonne avec l’histoire familiale de l’acteur AFP 22 décembre 2017, 15:33
C’est dans un registre inhabituel que l’humoriste et acteur Patrick Timsit propose une
interprétation sensible du Livre de ma mère d’Albert Cohen au Théâtre de l’Atelier.
Le texte à fleur de peau du petit juif de Corfou immigré à Marseille à 5 ans avec ses parents
résonne avec l’histoire familiale de Patrick Timsit, né à Alger en 1959 et rapatrié en France à
l’âge de deux ans.
L’humoriste a ouvert Livre de ma mère il y a trente ans, mais a attendu la rencontre avec le
metteur en scène Dominique Pitoiset pour le porter à la scène.
Il se glisse comme dans un gant dans le texte lyrique d’Albert Cohen. « Les mots, ça console, ça
venge, mais ils ne me rendront pas ma mère », dit-il, dans la scénographie très sobre de
Dominique Pitoiset.
Sur scène, un grand bureau et un écran sur lequel est projeté un film d’enfance : un gamin aux
yeux rieurs à la plage, une jolie maman en maillot de bain en arrière-plan … On retrouve le grain
des films super 8 des années 1960, celles de l’enfance de Patrick Timsit.
S’il semble parfois lire quelques feuillets, c’est pour relier le spectateur à la magie du texte écrit,
car ce texte, il le possède sur le bout des doigts.
« Aucun fils ne sait que sa mère mourra », écrit Albert Cohen, inconsolable fils unique d’une
maman à l’amour absolu. Pendant une heure, il décrira cette mère aimante jusqu’au ridicule, et le
couple maladroit qu’il forme, enfant, avec elle, deux étrangers dans cette France d’adoption.
On pense forcément à la mère de Romain Gary dans La Promesse de l’aube, à toutes les mères,
juives ou pas, qui ne vivent que dans le sourire, le regard du fils aimé.
Le texte se déroule gravement, sans être jamais larmoyant, avec quelques pointes d’humour : une
mère aime son fils même laid, même gringalet. Imagine-t-on Ophélie amoureuse d’un Hamlet
maigrichon ? Non « l’amour d’Ophélie a besoin de 60 kg de bifteck ».
Le comédien est bouleversant de sincérité lorsqu’il interpelle le public à la fin, met en garde tous
les fils : oui, les mères sont mortelles, et il convient de les aimer comme elles nous aiment, sans
restriction.
Le spectacle joue au théâtre de l’Atelier jusqu’au 6 janvier, puis du 23 janvier à fin mars
(19h, samedi 16h et 19h, relâche dimanche et lundi)