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TABLE DES MATIERES 2 Eh oui, voilà…. 6 Coup de gueule 9 Il y a tant de choses à dire 11 Les survivants 14 le p’tit chose 15 Les trous du cul à la neige 17 Papy Bateau 20 Printemps 22 Salade de fruits

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TABLE DES MATIERES

2 Eh oui, voilà….

6 Coup de gueule

9 Il y a tant de choses à dire

11 Les survivants

14 le p’tit chose

15 Les trous du cul à la neige

17 Papy Bateau

20 Printemps

22 Salade de fruits

25 Sans domicile fixe

27 La Castellane

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Eh oui , voilà…. (Discours de départ à la retraite de Sarah Blanchon)

Eh oui voilà, le temps est arrivé.Il va falloir que je vous quitte.Je n’irai pas jusqu’à « mon grand regret »,Vous pensez bien que je m’en félicite, Après quarante et quelques années,De bons et de loyaux services,En majeure partie au lycée Je vais mettre fin au supplice :Ces derniers temps ça me pesait.

Je vais prendre un nouveau virage,Changer un peu d’activités,En souhaitant bien du courage A vous tous qui continuez.Je vais changer de paysage Je m’en vais suivre le soleil, M’occuper un peu du jardin, Sans la hantise d’un réveilQui me harcelait tous les matins ;Butiner comme les abeilles, Et pouvoir paresser enfin ; Envisager une petit’ sieste, Pendant que vous travaillerez, Vous en conviendrez sans conteste,Il n’y a pas mieux pour digérer.Et si un jour l’ennui me prend,

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Que je devienne nostalgique, Vu que je n’ai aucun talent, J’m’ mettrai à la politique,Comme beaucoup d’autres faineants.

Plus besoin de faire la chasse,A tous les téléphones portables,Qui fleurissent jusque dans les classes, Aux chewing gums et aux lecteurs Que l’on planque dans les cartables,Pour ne garder qu’les écouteurs ,En se moquant bien des menaces, Faites par certains professeurs.Plus besoin de m’excuser, En rencontrant, sur mon passage, Deux élèves en train de se bécoter,Et qui ont l’air tout étonné Que j’interrompe leur ouvrage. Et terminées les bousculades, Dans les couloirs embouteillés,Ou presqu’on vous écraserait Comme le ferait une tornade.

Finis les emplois du temps merdiques, Les réunions, et tout le bataclan,Les élèves, les profs, les parents,Et le train- train soporifiqueDe toutes les copies à corriger,Des cours sans cesse à préparer,Des bulletins et des moyennes,

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Et des années qui nous enchaînent,A nos livres et nos cahiers.Car je suis de la vieille école,Celle pour qui l’autorité,La discipline et le respect,Ne sont maintenant que fariboles.

J’n’ai pas de conseil à donner,Je suis peut-être un peu vieux jeu,J’n’voudrais pas vous décourager,Mais à forc’ de fermer les yeux, De laisser dire, de laisser faire, Bientôt, chez nous, c’est la banlieue, Y a déjà plus grand chose à faire,Car plus ça va et plus ça craint.Aujourd’hui c’est déjà demain.

J’avais invité le ministre, A boire un coup tout simplement,Pour fêter son avènement,En même temps clore un chapitre,De toute une vie d’enseignant.L’est pas v’nu, l’a pas voulu,Tant pis pour lui, n’en parlons plus.

Et j’avais aussi convié,Ce cher inspecteur d’académie.Mais à l’instar de ses subordonnés,Qui ne montent que pour le ski,Ou pour fair’ des cours’en Andorre, Il ne s’est point déplacé, Même pas un mot, je le déplore.

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Je remercie l’administration,Qui m’a fichu une paix royale,Me laissant gravir les échelons, A la vitesse d’un limaçon,Qui s’doperait au gardenal.

Merci aussi à toi DédéMaint’nant je peux te tutoyer,Pour le discours bien léché, Que tu as eu à mon égard.Car toute modestie à part,Qui veut qu’on vante les mérites De tous ces vieux monuments,J’avoue que je me félicite, D’avoir tenu aussi longtemps.

J’aurais une ultime pensée, Pour mon épou , qui se désole,Car il y a 7 ans bien pesésQue lui aussi quittait l’école.Il commençait à apprécierCes doux moments d’indépendance. Bien tranquille dans son coin, Il mettait beaucoup de constance A mener son petit train train……..Pour lui, terminées les vacances !

Trêve de sermons, de bonimentsOn a perdu assez de temps.

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Je ne tiens pas à vous fair’ faireUne ou deux heures supplémentaires,Qui bien sûr n’seraient pas payées,N’étant pas prévues au budget.

Pardonnez donc ces errements, J’commençais à m’exciter.Avant de devenir gnagnanAvant que vous soyez tous desséchésPermettez- moi d’vous remercier : Buvons un coup à ma santé .

Francis Blanchon

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Coup de gueule

1 Et c’est ma mer qu’on assassineA grands coups de chalutiers,Qui la lacèrent et la burinent,De leurs panneaux grands déployés,Laissant sur ses fonds dévastés, Courir de larges cicatrices. Ce sont les monceaux d’immondicesQue nous ramènent les courants, Et qui recouvrent et qui tapissent, Nos criques ou le sable était blanc.Et tous les résidus puants,Que les grands pétroliers vomissent,Sont les nouveaux sables mouvants ,Où les grands oiseaux s’enlisent. Ce sont les filets dérivants, Tous les produits, tous les solvants Que viennent cracher nos usines,Les détergents et désherbants Qui s’écoulent de nos collines. Et déjà on ne trouve plus, Ni de girelles ni de bijus ,Les thons aussi ont disparu,De la morue, n’en parlons pas,C’est devenu un plat de roi,Et les prix flambent pour l’anchois.

Quand il n’y aura plus de poissons,Et quand la mer deviendra vide,Les pêcheurs n’auront pas l’air conD’avoir programmé leur suicide.

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2 C’est mon jardin que l’on dévaste,A grands fracas de bulldozers.On détruit mes espaces verts,Et mes forêts qui étaient si vastes.Et on implante à tour de bras, A coups de béton et de gruesDe grands ensembles, des verrues Où les gens n’se connaissent pas.Même la neige n’est plus blanche.La vraie la pure ils l’ont sniffée.Il ne reste plus qu’un mélange Tout juste bon pour vacanciers. Et mes montagnes inaccessibles,Sont devenues terrains de jeuPour des snobinards de banlieue,Toujours en quête d’impossible.Au mépris de tous les dangers,En tenue plus ou moins légère,Ils veulent vaincre les sommets. On les ramèn’en hélicoptère Dès que le temps devient mauvais.Ca fait la Une des médias,Ca fait frémir dans les chaumières,Quand ils racontent « leurs exploits », Vendus par milliers d’exemplaires.

Quand tout sera viabilisé, Quand il n’y aura plus une seule P’tite parcelle à acheter, Les promoteurs feront la gueule.

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3 Et les promeneurs du dimanche,Quand fleurit le moindre rayon,Nous déboulent en avalancheEt s’installent avec leurs morpions.Ils viennent pour pique-niquer, Et dessinent avec leurs poubelles, Dans nos prairies de beaux sentiers,Semant partout des fleurs nouvelles,Comme les tags dans leurs cités.Mes champignons, c’est plus subtil,Sont à la sauce Tchernobil, Car les centrales font recette Et fleurissent sur la planète. Le nucléaire se porte bien,Le charbon lui ne vaut plus rien.Au prochain tremblement de terreOn a du souci à se faire.Déjà mon air qui était si bon, Qu’on ne le sentait même pas,Ecorche à présent mes poumons,Et me refile de l’eczéma.Même la pluie, on la salit.Quant aux rivières, restons- en là,Elles sont polluées elles aussi, Et se dégradent comm’ le climat.

Quand on aura bu tout l’ pinard, Et vidé la dernière barrique,On fumera l’dernier pétard,En criant « Vive la République !».

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Ah ! qu’on aura l’air bien malin,Quand il ne restera plus rien,Rien à manger, ni rien à boire,Et pour la soif plus une poire.

Alors l’homme s’apercevra,En se grattant les génitoires , Qu’il se s’ra mis dans le caca , Et de façon irréversible,Vu qu’ l’argent n’est pas comestible.

2007

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Il y a tant de choses à dire (autobiographie)

Un jour Joseph tu me disais :« Il y a tant de choses à dire »…Moi, je ne sais plus trop écrire,Et je n’ai rien à raconter. Je te parlerai donc du temps,Et de la pluie et du beau temps.

Au printemps, il y a feuilles en branches.En été tous les grains sont verts.En automne on fait la vendange,La grappe sèche et meurt l’hiver.

1. Le vent d’avril dans les pêchers,Les blancs pétales de l’amandierEt la senteur des mimosas Ont bercé mes tout premiers pas.

Avec insouciance j’allais, Sur tous les chemins buissonniersQui jalonnent l’adolescence. Je me souviens comm’ si j’y étais De mes premières expériences,Sur cette place, dans ce lycée, Où j’ai passé quelques dimanches,Comme un oiseau seul sur sa branche.Le mois suivant, j’ai pu voler.

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2. Juin a fait lever les graines Que l’on avait semées en mai.Juillet, je m’en souviens à peine,Août, je ne l’ai pas vu passer.

J’ai navigué sur des eaux calmes, Poussé par les vents de la mer,Vers des jardins couverts de palmes,Et ou couraient des ruisseaux clairs. Bien sûr, il y eut quelques nuages, Quelques orages, quelques éclairs Qui ont déchiré ce paysage, Car le ciel parfois est couvert, Pour peu que dure le voyage.

3. Septembre avec ses lunes pales,M’a permis un peu de souffler. Il a réveillé la cigale

Qui s’est remise à chanter.

Et puis octobre a été là,Avec du sel pour mes cheveux. Novembre avec tous ses frimas,Ses giboulées, ses ciels brumeux,M’a fait un peu courber les reins,M’a fait aussi trainer le pas.Le temps qui passe est assassin,Le corps faiblit mais l’on se bat Pour être là au p’tit matin.

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4. Décembre a neigé ses flocons, Janvier, baissé le baromètre. Les fleurs de givre à ma fenêtre Me font venir quelques frissons.

Et quand février viendra coucher

Son blanc linceul sur mon visage, Sur mes montagnes et mes forêts,Je serai au bout du voyage. Je partirai à contre coeur,Mais sans remords et sans regrets. J’ai donné la pièce au passeur Pour qu’il me fasse traverser.Mars, me verra de l’aut’ coté.

Tu vois Joseph j’ai fait l’effortDe trouver quelque chose à dire.Au fond tu sais,  t’avais pas tort !Sur la vie, l’amour et la mort,Il y aurait encor’ à dire.

Sur la vie, l’amour et la mort, Y a toujours quelque chose à dire.

Septembre 2008

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Les survivants

J’habitais un petit villageAu bout du monde, isolé.Il y avait une petite plage,Quelques commerces et trois cafés.Et sous l’ombrage de la place,Les enfants s’en venaient jouerAprès avoir fini la classe.

C’était un lieu incontournable Pour traverser les Pyrénées,Avec gare internationale,Poste frontière, maréchaussée.Les jours s’y  écoulaient agréables, Et le travail point ne manquait : Les transitaires florissaient,Les transbordeuses transbordaient,Les cheminots tout pleins d’entrain,Suivaient gaiement leur p’tit train train,Et les douaniers, nos fiers douaniers, En permanence à la Serre , Glandaient pas trop, pour n’pas changer,C’est vrai la tach’ ne pesait guère Pour si peu d’chose à surveiller.

Si le dimanche rassemblait Les habitants endimanchésSur la plage ou dans les cafés,Tout’s les dévotes assidues, Les bigot’s pleines de vertu,

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Pour rien au monde n’auraient boudéL’office de Monsieur l’curé.Le radis noir ne chômait pas,Entre baptêmes et communions, Mariages et bénédictions.Par contre on n’mourait presque pas, Des décès y en avait fort peu,Dans ce coin béni par les dieux.Le cimetière battait son pleinMais c’était l’ seul du patelin.

Il y avait une polyclinique, Réservée aux handicapésAyant des séquelles physiques, Et qui venaient s’rééduquer. Elle se trouvait bien située,Dans une p’tit’ anse idyllique.Elle était bien considérée,Au sein de la place publique.Elle créait quelques emplois Pour notre économie locale,Qui avait accueilli avec joieCette structure médicale.

Et puis l’Europe est arrivée,Si doucement, sans se presser .Qu’on n’s’est rendu compte de rien.Alors soudain un beau matin, On a ouvert tout’s nos frontières.Les marchandises ont circulé, Sans aucune taxe douanière.C’en était fini des douaniers !

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Par conséquence immédiate, Les transitaires ont transité.Z’ont cessé leur activité,Et licencié les bureaucratesAinsi que tous leurs employés. Les autoroutes ont absorbé Grande partie du ferroviaire. L’ouverture du TGV,A lancé l’avis mortuaire Du peu encor’ qui nous restait : La gar’ qui nous était si chère,Bientôt s’en trouva désertée.Les cheminots ont repris le trainQu’avait pris la maréchaussée,Et de l’église désertée, L’on exila le franciscain.

Notre clinique si pratique, On veut la délocaliser ,Pour des raisons économiques, C’est du moins c’qu’on a raconté. Même la plage a disparuAu cours des tempêtes d’hiver.Et le village est devenu Encor’ plus triste qu’un désertOù les oiseaux ne chantent plus.

Nous sommes les derniers survivants.Nous sommes juste une poignée. Jusque-là on a résisté

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Et aux pressions et aux tourments.Et maintenant presque assoupi,Sur les hauteurs du mas Mingou,Bien calé entre deux cailloux,Je viens de charger mon fusil. Demain je sais ça s’ra fini . L’assaut sera bientôt donné.Mais nous vendrons cher notre peau,Pour pas êtr’délocalisés. Ici était notre berceau,Ici nous avions nos repères,Je ne veux plus voir ces travauxQui ont commencé au Cap Cerbère, Où fleurissent tous ces panneaux « Bientôt Centrale nucléaire ».

2007

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Le p’tit chose

Et le matin quand sur ma couche Je suis dans les bras de Morphée, Il dort inerte et plus ne bouge,L’air triste et seul, abandonné.

C’est d’un zizi dont il s’agit ,Si vous n’l’aviez pas deviné,Qui se réveille tout engourdi,La tête basse un peu fripé.

Il suffit d’un p’tit bouche à bouche Pour aussitôt nous l’ranimer,Une main doucement le touche,Et c’est le 14 juillet.

Ce souffle doux le revigoreEt le voilà tout requinqué.Il grimpe, grimpe, et grimpe encore,Il est prêt à tout dévorer.

Avant de faire ses dévotions,Et à Vénus sacrifier,Sur le sommet de son donjonPerle une goutte de rosée.

Bien assis sur son fondement,Il tremble un peu, bave un moment,Et c’est la grande envolée

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Quand il envoie une giclée.

Alors son devoir accompli,A nouveau il se ramollitSe renferme dans son carcan, Et redevient monsieur Du Gland.

FB Septembre 08

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Les trous du cul à la neige

Les trous du cul y en a aussiUn peu partout, même dans le ski.Ils nous déboulent à fond la caisse,En ski, en surf ou sur les fesses.Et sans qu’on ait rien demandéIls viennent alors nous enc…. adrer !Le mot est faible, je suis poli,Si j’l’ai pensé, je n’l’ai pas dit !Toujours est-il que dans l’oignon, Ils nous le mettent bien profond.

Moi j’y ai laissé un péronéQui doit trainer sur la Record.Et mon genou tout déglingué, J’peux dir’ qu’il s’en souvient encore. Le ski alpin j’l’certifie, Dorénavant c’est bien fini,Je vais m’lancer dans la raquette,Au moins on n’se prend pas la tête. On a des chances d’y croiserDes cerfs, des biches dans la forêt,Et tout un tas d’autr’ animaux,Mais sûrement pas des blaireauxQui font les beaux, qui jouent l’épate,Mais qui skient comme des patates.

Un pote à moi, ça c’est balèze, Qui partait à la chasse au cerf,(Ca se passait en plein hiver)A ram’né un’ martiniquaise.C’était un bien joli dessert Que dans la neige il a trouvé Et que chez lui l’a dégusté. Il se l’est mise bien au chaud,

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En essayant d’pas trop l’user,Car c’était un sacré morceau Qui affichait ses 20 printemps,Sa joie de vivre et des lolosQu’elle exhibait naturel’ment, Quand elle te servait l’apéro. Au bout du compte, il l’a virée,Fatigué par le poids des ans.L’avait du mal à assumer,Peur d’attraper’ un coup de sang. Il lui a résilié le bail,Il a donc mis l’fusil en berneil a remisé sa giberne Et mis au clou son attirail.Un coup comme ça, c’est bien fini.Dans la foret, y a plus de fées.Surtout ne prend pas ton permis,Contente- toi donc de rêver,La dernière s’est envolée.

Les trous du cul ça se saurait, N’aiment pas trop se fatiguer. Sortis des pistes bien damées, Tu les retrouves au bistrot,Font du bronzing chez BernardoAfin de pouvoir s’exhiberDevant leurs potes au boulot.Ils se baladent en Mercédes Ou gros 4*4 tout rutilants.Ils jouent aux cracks, font les balèzes, Mais ils se trainent en cahotantDès que la route est enneigée.Et il arrive bien souvent,Qu’on les retrouve dans le fossé.

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Bref, qu’ils soient d’ici, Ou bien d’ailleurs,Qu’ils soient au ski, Ou à la mer,Les trous du culC’est bien connu,Sont bien assis Dans notre vieOù que tu ailles, Tu vas trouver,Des trous de balle Pour t’emmerder.Mêm’ au paradis, d’après moi,On ne pourra y échapper.Je ne vois donc pas trop pourquoi,J’irai un jour m’y installer.Quant à tous les trous du’c d’en bas,Je ne veux pas les fréquenter.Autour d’un joli feu de bois, Que Satan les fasse danser !

Je m’en vais donc, à l’avenir,Rester chez moi, fair’ mon jardin,En essayant de n’pas mourir,Tout en suivant mon p’tit chemin, Sans trop emmerder mes voisins.

Sept 08

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Papy bateau

C’est un bar restauJuste comme il faut.« Le papy bateau »Est posé sur l’eau.

Le Père Roro,Et Mamie Mado,Sont les tenanciers De ce p’tit café.

On ferait pas gaff’,Tous les bois sans soifViendraient se poserDans ce p’tit troquet.

Il est réservéAux habitués, Aux amis, aux potesCeux qui ont la côte :

Les bob’s d’a côté,Ceux qui ont le gosierUn peu desséché ;Mc Claude et Wimmie,Les Belges Hollandais,Y viennent aussi,Dans cet’ crémerie. Quand faut écluser,Lui, c’est pas l’dernier

A mettre sa tournée.Il te la joue classeQuand il t’sert la glace.Il suc’ pas les glaçons,Je te dis que ça,Il aime le bourbonAvec du coca,Ou le baccardi Avec du citron.On reste ébahi De voir ce qu’il boit.

Il y a des cousinsQui sont toujours là.T’as le ptit QuentinQui est comme un roi.Puis t’as les frangins,Ceux de la Mado,Et ceux de Roro,Ca change parfois.

T’as le marseillais,Qui vient voir Mado.Il prend un café,Et il fait le beau,Parle de gonzesses ,Et d’histoires de fesses.

Cette semaine ci,

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Tu as la MimiAvec son mari,Qui viennent de Touraine,Pour une petit’ huitaine.

lls veulent s’assurerQu’leur belle peugeot ,Tienne bien le coup.Ils ont peur surtout,Qu’ell’ s’mette en rideau, Comme l’an dernier,Où elle les a plantés, Tout près de Bordeaux.Z’étaient emmerdés,Faisaient pas les fiers,Ils ont du rentrer Par l’chemin de fer.

On y mange bienDans ce boui boui là.Au menu il y a Souvent paella,Et même quelquefois,De la fideoa,Des grillades aussi,Et, au feu de bois,Pour le même prix.

La note à la fin N’est pas trop salée,La plupart du temps ,

T’as rien à payer. A la fin du r’pas,La « Mamie Poissons »,Avec l’reliquat,Nourrit les poissons.Ils sont venus làBien avant midi,Et tournent en rond,Avec appétit.Ca amuse les grands,Et mêm’ les petits,Qui viennent essayerDe les attraper,A coups d’hameçons,Qu’ils laiss’nt traînerSur tous les cordages,Et le Belge en rage,Fout la zizanieAux parents des p’tits,Au risqu’ de créer,Un binze diplomatique,Entre notre Société,Et l’royaume de Belgique.

Ils sont bien polisLes patrons d’ici.Toujours ils saluent,Tous les trous du culs,Tous les tartempions ,Toute la populace,

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Qui sur le ponton,Passent et repassent.

« Bonsoir Madame, bonjour Monsieur »,Un mot gentil pour chacun d’eux,Un signe aussi à Antenn’ deux,Qui connait tout sur les bateaux,Et qui t’explique à tous les coups,Où c’est qu’tu dois pêcher le loup,L’oblade ou bien le maquereau.

Quand il n’y a plusde trou du cul,Le « papy bateau »Sur l’coup de minuit,Baisse le rideau,Souffl’les bougies.Le père RoroCouche le Quentin,Avant que d’allerFaire un ptit calin ,A la bonne fée Qui dort à coté,Celle de la maison,Pas la Fée Lation.

2008 septembre

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Printemps

Les hirondelles sont revenues. Les jours s’allongent un peu plus.L’herbe est verte dans les champs,A tous les coups c’est le printemps.

Elles sont la sur la 113,Plantées à même le bitume.La mini jupe au ras des fesses,C’est un coup à choper un rhume.

Bien avant la saison d’été,Elles se baladent à moitié nues,Et font alors le pied de grue,Pour mieux aguicher le routier.

Elles affichent au menu,Des prestations à la sauvette. Et pour quelques euros de plus,Tu auras droit à la complète.

« Vénus d’ici ou bien d’ailleurs,Tu fais chez nous un’ p’tit’ halte.Que tu sois claire ou de couleur,Qui donc t’a semé dans l’asphalte ?

Marchand d’amour , ou bien de rêves, Recruteur de basse besogne, 

Qui t’a vendu des jours meilleurs Sans état d’âme et sans vergogne ?

On t’a sur’ment fait miroiter,Une belle vie de princesse,Avec champagne et vrais papiersEt tout un wagon de promesses.

Et te voilà sur la 113,A tapiner pour quatre sous,La minijupe au ras des fesses,Et ton rêve en a pris un coup. 

Les hirondelles repartiront,Vers d’autres cieux, d’autres rivages.Seras tu parmi leurs bagages, Entre les oies et les hérons, Et tous les oiseaux du voyage ?Au lieu d’arpenter la 11 3,Au lieu de faire le pied de grue,La mini jupe au ras des fesses, Dans l’attente d’un inconnu. »

Francis Blanchon Sept 2008

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Salade de fruits (et légumes)(Il se reconnaîtra…ou pas)

Je suis un pauvre jardinier, J’ai passé ma vie à trimer Dans notre joli Roussillon.De l’aurore jusqu’au coucher,J’ai bossé dur dans les sillons Pour faire pousser le melon.

Ma femme me faisait le poireau,Un p’tit peu de temps en temps.Moi j’ m’occupais d’ son abricot, Quand j’avais un petit moment.Et quand s’en venait le printemps,Par ci par là ,je m’en allais Butiner dans d’autres vergers,Cueillir les prun’s de ma voisineC’était pas la porte à côté, Mais c’était une chaud’de la pine.

Je suis un pauvre jardinier, J’ai passé ma vie à trimer Dans notre joli Roussillon.De l’aurore jusqu’au coucher,J’ai bossé dur dans les sillons Pour faire pousser le melon.

Mais à soixante quinze balaisOn est un petit peu malade, Alors faut voir à l’ver le pied

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Et s’occuper de ses saladesComm’ me l’a dit la Faculté.Oui j’en ai gros sur la patateCar mon asperge qui levait, S’est ramollie aux vents mauvais D’la maladie de la prostate,Ca risqu’aussi vous arriver !

Je suis un pauvre jardinier, J’ai passé ma vie à trimer Dans notre joli Roussillon.De l’aurore jusqu’au coucher,J’ai bossé dur dans les sillons Pour faire pousser le melon.

Faudrait que j’ m’fasse opérer,Ou bien subir un coup d’laser.J’hésit’ je ne sais trop quoi fair’,J’ai peur qu’ell’n’ puisse se redresser. Alors, alors, ça m’rend amer, J’n’aurais plus qu’à sucrer les fraisesInstallé dans mon rocking chair, En regardant des films de baise,Qu’on passe le soir à la télé,Ou écouter Brigit‘ Lahaie.

Je suis un pauvre jardinier, J’ai passé ma vie à trimer Dans notre joli Roussillon.De l’aurore jusqu’au coucher,J’ai bossé dur dans les sillons

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Pour faire pousser le melon.

J’aim’rais me refair’ la cerise,Avoir à nouveau vingt printemps,Ne pas connaitre cette crise Qui turlupine les amants.Ce qui m’ redonnerait la pêche,C’est savoir que de l’aut’ coté,Les légumes jamais ne sèchent,Et que Saint pierre a veillé,A c’que chacun d’ses jardiniers,Ait son outil bien affuté .

Je suis un pauvre jardinier, J’ai passé ma vie à trimer Dans notre joli Roussillon.De l’aurore jusqu’au coucher,J’ai bossé dur dans les sillons Pour faire pousser le melon.

Francis Blanchon Cerbère 09/11/08

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Sans domicile fixeJe fais partie du paysage De vos villes et de vos trottoirs.Je m’excuse si mon imageN’est pas cell’que vous aim’riez voir.

M’en veuillez pas si je dérange Les habitudes de votre vie,Quand dans la rue je fais la manche.La mienne je l’ai pas trop choisie !Les aléas les circonstances,Des accidents, ou le hasard, Ont boul’versé mon existence,Et je suis devenu clochard.

Je sais, je sais, tous vos problèmes,Je les ai vécus autrefois :Les p’tits salaires, et puis le poids Des impôts et tout le système. Je connaissais les stratagèmesQui amélioraient les fins de mois.Je truandais un peu la loi,

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J’exagérais pas trop quand même !

Et puis, on plonge au fond du gouffre,Sans trop savoir comme on y va.Et tout s’enchaîne et vous recouvre,Et vous isole, et on se noie.On entre dans un autre monde,On a mis un pied en enfer,Et la descente est bien profonde,Et plus ça va plus on s’enferr’.

M’en veillez pas si je copine, Les jours d’hiver et de grand froid,Avec une bonne chopineQui m’suit sur mon chemin de croix.C’est pas facile de résisterAu gel aux vents et aux frimas,Alors je bois pour mieux rêver,Je m’fais mon petit cinéma.

J’aimerais remonter la pente, Retravailler, avoir un toit,Ne plus jamais trembler de froid,Enfin sortir de la tourmente,

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Echapper à la déchéance,Devenir vous, devenir toi,Qui passez pleins d’insouciance,Et qui ne me voyez même pas.

Devenir vous, devenir toi,Qui passez pleins d’indifférence,Et qui ne me regardez pas.

Sept 07

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A Marc, Jean Louis et Pierrot, A toi aussi Nin d’en Cabrette,Hélène, Régine et Zozo,En souvenir d’une placette.

La Castellane

1. Ma jeunesse s’est écoulée, Sur cette place Castellane, Sous le feuillage des mûriers,A l’ombre douce des platanes.Les nuits dété, de lune claire,On courait, on faisait les fous,Les pétanqueurs autour de nous,Piquaient parfois une colère.

Et assis sur le parapet, Qui dominait la nationale, Les grands fumaient ou bien flirtaient,En somme rien d’original.

2. On m’envoyait à l’épic’rie,Au coin d’la rue, chez la Mimi. Je lui piquais des carembars,Elle faisait semblant de pas voir,Pendant qu’ l’Auguste, son mari,Dans un tonneau où l’eau courait,Essayait de vous ranimer,

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Les morues mises à dessaler.

Certains jeudis, lors des beaux jours,On menait grande expédition,Pour passer le pont de l’amour.On allumait les lumignons,On affutait les lance- pierres,Et on partait faire la guerre Aux Mohicans fort belliqueux, Qui venaient eux d’la plac’ Bélieu.

C’était l’époque des cerceaux C’était le bon temps des tartinesEt moi j’allais cartable aux dos Enroulé dans ma pélerine,

3. Le long du quai de la Paquet, Quand s’amarraient les balancelles,

Les transbordeuses s’échinaient,Infatigable ribambelle,  A charger les wagons sinistres, Ecrivant le dernier chapitreD’une époque qui s’achevait :Celle des derniers grands voiliers

Ces mayorquines, ces gabares, Qui s’en venaient des baléares ,Des mers du sud ou d’Zanzibar,Et qui me faisaient tant rêver !

4. Puis vint le temps des grands cargos,

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Des oranges et des mandarines,Les quais s’emplissaient de cageots,De tonneaux , de sacs de farine. Les balles de liège se dressaient, En rangs serrés, au bord de l’eau,Et à midi quand on sortait, On y construisait nos châteaux. Et l’odeur forte des sardines, Que ramenaient les chalutiers, Se mêlait aux senteurs marines,Et aux épices et au café.

5. J’avais 12 ans , mon cœur déjà, Avait parfois quelques ratés, Pour la mésange qui l’été, Nichait en face de chez moi. Personne n’a jamais rien su.Elle ne s’en est jamais douté.Je sais pas c’qu’elle est devenue, Mais je l’entends toujours chanter.

J’ai dans la tête une rengaine,Qui m’ revient encor’ aujourd’hui,Celle d’une étoile dans la nuit,Que chantait ma jolie sirène.

6. Et ma première cigarette,Sortait d’un paquet de Craven,Acheté à la sauvette,Au tabac du quai, chez Carmen.On allait fumer en cachette,

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Bien à l’abri, aux Tamarins,Ou au stade ou à la jetée,Avec Jean Louis, Marc et René.

Puis vint le temps dur de l’exode,Quand l’El Mansour, l’El DjezaïrRapatriaient avec méthode, Tous les pieds noirs qu’on faisait fuirD’une Algérie à feu à sang.Et moi j’allais sur mes 16 ans. Avec mes potes je trainais Ou au Commerce ou sur les quais. On écumait en mobylette, Les alentours du patelin,En quête de quelque amourette, A cueillir sur notre chemin.

7. Et quand arrivait le mois d’aout,Et que l’été battait son plein,Afin de gagner quelques sous,On se levait tôt le matin, Pour une journée de galère A décharger les palanquées, De planches et de gros madriers, Pour l’entreprise de Bassère.

C’était l’époque des Blue jeans.Les cheveux longs, les blousons noirs,Faisaient fureur. Le grand James Dean,

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Pour toujours, entrait dans l’histoir’.

8. Onn’ faisait pas de mauvais coups,Cétait pas encore d’époque.On était parfois casse-cou,Avec des trucs un peu loufoques :Quand le vent d’est avait coutume,De souffler fort sur la jetée,Levant des vagues pleines d’écume,Nous on allait les défier.

Au mépris de tous les dangers,On voulait contourner le phare. Avant l’arrivée des pompiers,On s’esquivait dare dare.

9. C’était l’ temps des Chaussettes noires, D’Hugues Auffray et de Johnny. J’allais pieds nus sur les trottoirs, En fredonnant « Retiens la nuit ».Et le juke box de chez Carmen,Ne connaissait pas le chômage.On y entendait «  siffler le train »,Et miauler les Chats sauvages.

Et cette place Castellane, Rythmait le temps, rythmait la vie,Jour après jour, nuit après nuit,Au rythme lent de la sardane,La sardane qui s’envolait, Lorsque la fête s’installait,

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Sous le feuillage des mûriersA l’ombre douce des platanes.

Puis la vie a suivi son coursVers d’autres cieux, d’autres amours.Mais cette place est restéeGravée dans mon cœur, à jamais.

Francis Blanchon2007 Sept 2008