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C'EST LA VIE! EnquêteRubrique coordonnée par Emmanuelle Mary

Le "foire soi-même",bon pour la planèteet le portefeuille !CRISE OBLIGE, LE FAIT MAISON A LE VENT EN POUPE. SI ON CONNAISSAITDÉJÀ LES DÉCOS CRÉATIVES, CERTAINES SE SONT LANCÉES DANS LAFABRJCATION DE LEURS PRODUITS MÉNAGERS OU DE BEAUTÉ, VOIRE LEURSREMEDES. EXEMPLES À SUIVRE. Caroline Tancrède, photos Corinne Mariaud pour Pleine Vie

r*• 'est une terminologie^L y anglaise, mais elle tra-^^^^S duit un phénomènebien français • le do it yourself, DIYpour les initiés, signe le retour engrâce du fait maison, ou fabriquémain, qui concerne de nombreuxdomaines, du scrapbooking à lacosmétologie, en passant par le

'aire simple en économisant.Samia Mokrani, 26 ans. historienne et bloeueusef- r- O «j

C'est un art de vivre ! U permet de pratiquer l'écologie au qtidien, de créer ses produits en respectant la nature. Pourquoifaire compliqué quand on peut faire simple et réaliser, en plus,de vraies économies I Pour fabriquer mes cosmétiques, j'utilise*ce que j'ai chez moi (hulk et sucre pour le gommage). Pour lacrème de jour, j'achète les huiles essentielles que je mélange àce que j'ai sous la main. En produits d'entretien, je suis deve-nue maîtresse dans l'art défaire briller les carreaux (avec desjournaux) et briquer les surfaces (mélange savon noir et eau).Mon blog (50000 visites) me permet de partager mes recetteset d'en discuter avec les autres, devenus des fidèles.

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f^Toiit devient possible. On se sent valorisé.Nathalie Delimard, 53 ans, créatrice d'abracadacraft.com"}e suis tombée dedans enfant ! J'aimais bricoler, transformer la matière.

Nos grands-mères savaient tout faire par elles-mêmes. Nos mères ont

refusé ces tâches manuelles, y voyant probablement un asservissement

féminin Mais ce qu'elles vivaient comme une contrainte est désormais une

source de plaisir. Le DIY est un sas de décompression : on se retrouve face

à de la matière et tout devient possible. En toute simplicité, chez soi, loin

de la consommation et du tout jetable ! On prend le temps défaire avec

ce qu'on a. On se sent valorisé. Le phénomène des blogs a sorti les adeptes

du DIY de leur isolement. C'est donc très naturellement que]'ai eu envie

de fédérer ces sites en créant une plateforme commune pour permettre

à chacun de partager son savoir-faire Ainsi est né Abracadacraft "

bricolage ou la customisation d'ob-jets Ce succès va croissant depuisdix ans Au point que, selon Opi-nion Way, l'institut qui a réalisé ledernier sondage sur le sujet, lesdeux tiers* de nos compatriotes yconsacrent aujourd'hui une part deleur temps libreLe salon annuel qui lui est dédiéPorte de Versailles à Paris a encorefait en novembre dernier un véri-table tabac, relayé sur la blogos-phère francophone par les quelque553 DOO blogs qui partagent astuceset créations avec la communautédu fait maison A l'image de Toutfaire soi-même, un site qui se quali-fie d'"écono-écolo", créé par Natha-lie, 36 ans et mère de deux enfantsElle y partage ses propres recettesde savons ou de cosmétiques ens'appuyant sur ses connaissanceset ses expérimentations person-nelles Un art de vivre que Natha-lie dit cultiver depuis longtempsDes masques pour visage jusqu'auproduit vaisselle maison, tout y est

garanti écologique et à petit prix,et, confie-t-elle, la plupart desrecettes lui ont été transmises parsa propre grand-mère '

Un engagement citoyenCet engouement pour le DIY nedoit rien au hasard Hier cantonnéeaux pages de la presse féminine,cette manne d'astuces, remèdesde grand-mère et créations origi-nales envahit internet et les reseauxsociaux dont il défend la mêmephilosophie partage, consciencecitoyenne, économie collaborativeet système D "On n'a rien inventé,souligne toutefois modestementNathalie Delimard, co-créatrice etdirigeante de la plateforme Abraca-dacraft qui héberge 250 à 300 nou-veaux blogs par jour Ce qui, hier,êtait vécu par nos mères ou nos grandsmères comme une contrainte estaujourd'hui perçu comme un plaisir "Rejet des excès de la société deconsommation, recherche d'unesobriété heureuse, besoin d'écono-mie ? En ces temps de morosité quijoue les prolongations, les causesdu succès du DIY sont multiplesToujours selon le sondage Opi-nion Way, 60% de ses adeptes sontmotivés par le désir de depensermoins "Normal, confirme le socio-logue Ronan Chastellier, car l'envied'économiser en faisant soi-même, c'est

fl la fois la joie d'une liberté retrou-vée et le refus de déléguer aux indus-triels On redevient ainsi acteur de saconsommation "Mais créer sa gamme cosméto, recy-cler des objets en leur dormant unautre aspect, voire une autre fonc-tion, fabriquer ses produits ména-gers répond à d'autres motivationssouvent plus engagées Sandrine,48 ans, directrice médicale à Lyon,avoue avoir pris un jour un coup desang face à son placard transforméen rayon de supermarché "J'en aieu marre d'avoir cinquante produitsà la maison, chacun pour une actionsoi disant spécifique Aujourd'hui, f aifait le grand vide Ne restent que levinaigre blanc et l'alcool ménager quiviennent à bout des surfaces les plussales, de la poussière mais aussi desdépôts sur les vitres Ils ont mêmeremplacé le produit de rinçage du lavevaisselle Le déclic7 Une conscience« écono-ecolo » longtemps restée endomiance La culpabilité de souillerla planète et l'impression demeter l'ar-gent par les fenêtres '"Sandrine a fait des émules désor-mais une dizaine de ses copinesont suivi cette voie Même son decloche chez Samia, auteur d'unblog qui permet "de réaliser de Ieco-logie au quotidien" en prenant lesautres à témoins dans l'espoir deles convaincre "J'y partage mes

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recettes en cosméto que je concoctemoi-même à partir d'huile d'olive, desucre, d'argile ou à.'aloe vera. Avant, jedépensais 50 € tous les deux mois pourmes produits de beauté, aujourd'huij'ai divisé le coût par cinq, et j'ai lasatisfaction de pouvoir en faire profi-ter les autres." Idem pour les pro-duits d'entretien ménagers deSamia, tous fabriqués à la maison."J'ai decouvert le plaisir immense deréaliser les choses moi-même en res-pectant la nature, poursuit la jeunefemme. Pourquoi, dès lors, faire com-pliqué quand on peut faire simple ? Enfabriquant par moi-même, j'ai mesuréà quel point le marketing commercialessaie en permanence de créer de nou-veaux besoins, la plupart inutiles."

Des recettes et des coursFace à ce qui s'apparente de plusen plus à une philosophie de vie,l'offre sur internet suit, de plus enplus diversifiée: pour quelqueseuros, des biogueuses proposentdésormais des ateliers et dormentdes cours en ligne... révélant uneforme de professionnalisation du

*•Restaurer la pratt*de nos grands-mères..Édith;.Petitetf^ 54 a sx créatrice d'HerbéorflM.PÏ!?P.!?s*!..4!?;*..***:!t!iÇ!r.? ..4'][**3d!îÇr*stÇ.Çil!Ç?."Après vingt ans passés dans l'industrie pharmaceu-tique comme docteurs en pharmacologie et toxicologie,mon mari et moi avons eu envie de sortir du système.Nous souhaitions transmettre notre savoir-faire desplantes et de leur assemblage. Préparer un soin n'estpas évident pour tout le monde alors qu'en fait, c'estsimple et il suffit de bien respecter les consignesessentielles I Avec le lancement des ateliers, il y a unan, nous voulions restaurer sur Bordeaux, la pratiquedes soins de nos grands-mères afin que les gens réap-prennent fl devenir autonomes pour fabriquer leursproduits d'hygiène simples et sains et soigner leurspetits bobos (stress, insomnie, douleurs articulaireset musculaires, cellulite, etc.). On ne prend pas unemassue pour tuer une fourmi."

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Macramé, tricot, bougie... Les années 1970 étaient aussicréatives qu'aujourd'hui Photo tirée du film More.

secteur La plateforme Abracada-craft prépare une série de e-lear-rungs (sessions sur internet) des-tinés à ses internautesLes marques ne veulent pas êtreen reste Lush ou Aroma-Zoneproposent en boutique en lignede faire soi-même son assemblagede cosmeto Plus retors, certainesmarques n'hésitent pas à offrirdes produits aux biogueuses lesplus connues en espérant qu'ellesen assureront la promotion surla toile "On assiste a une forme dedévotement de la philosophie du DIY,reconnaît Nathalie Dehmard quitente chaque jour de traquer lesmarques sur sa plateforme où desdizaines de milliers de blogs créa-tifs sont hébergés Le faire soi-mêmec'est accepter de perdre du temps pourune création originale Pas juste d'as-sembler à la va-vite deux ou trois pro-duits standardisés"Parfois bien éloignées de l'espritpionnier de partage qui animaitles biogueuses du DIY en 2005,lors de l'explosion du phénomènesur la Toile, ces dérives ne doiventpas faire oublier les multiples ini-tiatives locales qui naissent ici etlà Ainsi, à Bordeaux, Edith et sonmari, anciens chercheurs en biolo-gie végétale, vont ouvrir le premierbar à Cosméto Pour moins de 10 €,on y apprendra à faire soi-mêmeune crème de soin sur mesure, sousla surveillance d'un professionnel100% bio et composée à 100% de

substances actives, là où les équiva-lents dans le commerce proposent àdes prix souvent exorbitants des pro-duits avec moins de I % de principesactifs Rien de plus simple ensuiteque de reproduire l'expérience chezsoi En toute autonomie ' Hier can-tonnée aux pages de la presse fémi-nine, cette manne d'astuces, remèdesde grand-mère et autres créations ori-ginales envahit le Web 2 O

Où trouver des idées-> www.abracadacraft.com :une plateforme très dynamiquede do if yourself avec, chaquematin, une sélection de 10 des2000 meilleures créations du jour1

-» Herbéo l'atelier : 31, rue desAyres, Bordeaux (06 83 36 49 77),www herbeo.fr Pour fabriquer sesphytocosmétiques et se formerà la préparation des remèdes debase sous l'œil attentif de vraischimistes phytothérapeutes Unincontournable dans ce domaine'-» www.Lesideesdesamia.com(blog de Samia Mokrani) parfaitpour s'initier aux joies du DIY encosméto, déco et produits d'entre-tien de la maison. . et se lancerdans ces expériences amusantes >-» www toutfairesoimeme.com.ce blog écono-écolo donne desastuces et des méthodes pour toutfaire soi-même, de la cosmétiquemaison à base de produits bio a lacuisine et à l'entretien.

AVK RTYPFDT RonanChastellier, sociologue,Hl 10 U CAl CH I auteur de Tous en slip !, éd du Moment, 2014

->0uel rôle joue la crise dans la montée du phénomène du fait maison?Le do ii yourself est un fourre tout qui englobe aussi bien la cuisine, le scrapbookmg,le bricolage, que la customisation d objets et la fabrication de produits en tout genre Lacrise a favorisé toutes ces expressions, mais elle nest que l'un des facteurs qui renforcele phénomène Dans un monde qui s'uniformise, les produits transformés ont investi toutela sphère de la vie Beaucoup entrent désormais en résistance i Le 'faire soi-même"exprime alors une sorte de refus de ce tout industriel et du tout jetable qu'il a engendré

-îles Français seraient-ils plus ecolos qu'ils en ont l'air?Le souci d'économiser n'est jamais loin de l'aspiration a une forme de décroissance,de non au gâchis et au toujours plus En customisant des vieux meubles de cuisine ouen élaborant soi-même ses produits ménagers, on fait avec ce qu'on a et, pour certainsadeptes du DIY, on allège son empreinte écologique en consommant moins

->Peut-on parler d'une quête de sens à travers le fait main?Les 61% de Français* qui s'adonnent au DIY trouvent là une régénération, une prisesur le réel et une liberté que l'on a quasiment perdue dans la sphère du travail On estloin d'un phénomène marginal, mais bien à un retour à une société Homo habilis oùl'activité forme et transforme celui qui l'accomplit, où l'amour de la matière permet deralentir le rythme dans un monde trop rapide trop déresponsabilisant Cette créativitéau quotidien signe selon moi les retrouvailles entre l'homme et la matière La joiequ'elle procure libère une énergie bienfaitrice et valorisante pour tous'Sondage 2014 OpimonWay pour le Salon Créations & Savoir faire