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RAPPORT NATIONAL SUR LE DÉVELOPPEMENT HUMAIN Cohésion sociale et développement humain en Union des Comores 2010

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RAPPORT NATIONAL SUR LE DÉVELOPPEMENT HUMAIN

Cohésion sociale et développement humain en Union des Comores

2010

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Rapport National sur le Développement Humain

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PréfaceL’édition 2010 du rapport sur le développement humain des Comores porte sur la cohésionsociale. Le choix de ce thème est fondamentalement en adéquation avec l’histoire modernedu pays qui est marquée par toute une série de conflits, parfois récurrents, qui mettent àmal sa cohésion sociale et son unité. Du récent débarquement de l’armée nationale à Ndzu-wani pour y rétablir l’ordre républicaine, en passant par la sécession de cette île en 1997, lesnombreux coups d’état ou tentatives de coups d’état enregistrés dans le pays ainsi que lenombre important de constitutions différentes que les Comores ont connus, on peut y voir,en grande partie, les conséquences de défaillances dans le système national de gestion desconflits et le dialogue national. Par ailleurs, aujourd’hui, un simple match de football, unealtercation entre deux jeunes de villages différents ou un problème de « frontière » entredeux localités peut se transformer en cauchemar avec des pertes en vies humaines et la des-truction de biens publics ou privés. Il s’avère donc primordial d’analyser le phénomène enprofondeur afin de chercher des pistes qui permettent au pays d’éviter au maximum cesconflits ou, s’ils éclatent, de les gérer au mieux pour ne pas mettre en péril la cohésion dela société comorienne et l’existence même des Comores en tant qu’Etat nation.

Le PNUD a, comme de coutume, apporté un appui multiforme au processus d’élaborationde ce rapport. Il a d’autant plus adhéré au choix du thème que l’Equipe pays des Nationsunies aux Comores s’est engagé dans la déclaration dite du Galawa publiée à l’issue de saretraite annuelle de 2007, à soutenir les efforts du pays pour renforcer la cohésion socialeet la cohésion nationale, à travers notamment la promotion du dialogue national. En effet,au cours de cette retraite à laquelle le Gouvernement était convié, les participants avaientsouligné que l’efficacité et l’efficience de l’action de développement étaient gravement ob-turées par la multitude de conflits de tous ordres qui frappe le pays. D’ailleurs, le messagefort qui émane du présent rapport est que le déficit de cohésion sociale et de cohésion na-tionale que connait le pays depuis son indépendance est, pour beaucoup, à la base du faibleniveau de développement humain actuel des Comores. Et qu’il faut s’attacher résolument

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Préfaceà bâtir une société plus unie et plus solidaire pour créer un environnement habilitant pourle développement humain. Le rapport montre que ces conflits empêchent même l’établis-sement de consensus nationaux durables autour d’objectifs communs de développement.Au-delà des recommandations sur les actions et les stratégies à mettre en œuvre pour ren-forcer la cohésion sociale, le rapport met l’emphase sur la nécessité d'une volonté politiquetangible et d'un engagement concret et soutenu de l'ensemble des acteurs nationaux du dé-veloppement.

Comme pour la précédente édition, l’élaboration du rapport a bénéficié du partenariat dela jeune université des Comores associée au CNDRS, cela a grandement contribué au respectdu principe de l’autonomie d’analyse et à assurer une analyse de qualité dans le processus.On se souvient que l’ancien Directeur du Bureau du rapport sur le Développement humain(HDRO), Sakiko Fukuda-Parr, disait à ce propos que « l’autonomie d’analyse contribue àrendre le rapport national sur le développement humain plus objectif, plus stimulant et pluspolémique tout en restant constructive, ce qui assure son succès en tant que contributionprécieuse au débat sur le développement du pays ». Il faut souligner que, bien qu’il repré-sente un processus de dialogue et de consensus, le rapport sur le développement humainn’est pas un « document consensuel ».

Nous formons le vœu que ce rapport contribue à promouvoir les débats publics autourdes enjeux que représente la cohésion sociale pour le développement et à mobiliser lesmoyens pour soutenir l’action et le changement. Une cohésion sociale renforcée, outrequ’elle favorisera l’efficacité de l’action de développement comme le souligne le rapport,permettra au pays de concentrer les efforts dans la recherche et la mise en œuvre de solu-tions adéquates aux nombreux problèmes de développement auxquels il fait face puisqu’elleévite de consacrer l’essentiel des énergies à régler des conflits interminables.

Nourdine Bourhane

Secrétaire Général du Gouvernement Opia Mensah Kumah

Représentant Résident du PNUD

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Sigles & acronymesAGR Activité Génératrice de Revenu

AMIE Appui à la Création et au Développement des Micro et petites entreprises

AND Armée nationale de Développement

ASEC Association des Stagiaires et Etudiants des Comores

ASEOCF Association des Stagiaires et Etudiants originaires des Comores en France

BAD Banque Africaine de Développement

CNDRS Centre National de Documentation et de la Recherche Scientifique

DH Développement Humain

DOM-TOM Département d'Outre Mer - Territoire d'Outre Mer

DSCRP Document de Stratégie de Croissance et Réduction de la Pauvreté

EDSC Enquête Démographique et de Santé aux Comores

EIM Enquête Intégrale auprès des Ménages

FADC Fonds d'Appui au Développement Communautaire

FD Front Démocratique

HALDECHaute Autorité de Lutte contre les Discriminations et pour l'égalité des Ci-toyens

HDRO Human Development Report Office

IDH Indice de Développement Humain

IPF Indicateur de Participation des Femmes

IPH Indicateur de Pauvreté Humaine

Rapport National sur le Développement Humain

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Sigles & acronymesISDH Indice Sexospécifique du développement humain

MECK Mutuelle d'Epargne et de Crédits ya Komor

MOLINACO Mouvement de Libération Nationale des Comores

ONG Organisation Non Gouvernementale

PEID Petits Etats Insulaires en Développement

PIB Produit Intérieur Brut

PMA Pays moins Avancés

PNB Produit national Brut

PNUD Programme des Nations Unies pour le Développement

PPA Parité Pouvoir d'Achat

RENAG Réseau National des Avocats du Genre

RGPH Recensement Général sur la Population et l'Habitat

RMDH Rapport Mondial sur le développement Humain

RNDH Rapport National sur le Développement Humain

RNFD Réseau National Femmes et Développement

SCRP Stratégie de Croissance et de Réduction de la Pauvreté

SNIC Syndicat National des instituteurs Comoriens

SNPC Syndicat National des Professeurs Comoriens

SNPSF Société Nationale des Postes et des Services Financiers

SYNAS Syndicat national des Agents de la Santé

TBS Taux Brut de Scolarisation

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Introduction

Chapitre 1: Contexte et tendances

du développement humain aux

Comores p.12

1.1. Contexte géographique et démographique

1.2. Contexte politique et institutionnel

1.3. Contexte économique

1.4. Contexte socioculturel

1.5. Problèmes intrinsèques de l’insularité

1.6. Le concept de «développement humain durable»

1.7. Analyse du développement humain en union des Comores

1.8. Situation de pauvreté humaine

1.9. Faibles performances de l’économie comorienne

Chapitre 2: Problématique de la

cohésion sociale et du développe-

ment humain p.28

2.1. Définition et mesure de la cohésion sociale

2.2. Approches de mesure de la cohésion sociale

2.3. Les déterminants de la cohésion sociale

2.4. Relations entre cohésion sociale et développement humain

durable

Chapitre 3: Insularité et cohésion

sociale p.44

3.1. Insularité comme facteur de cohésion sociale

3.2. Insularité et crises politico-institutionnelles

3.3. La double crise politique et institutionnelle de 1997

Som

maire

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Chapitre 4: Conséquences des

crises politico-institutionnelles sur

la cohésion sociale et le développe-

ment humain p.54

4.1. Conséquences sur la gouvernance politique, administra-

tive, économique et sociale

4.2. Conséquences des types de gouvernance sur la cohésion so-

ciale et le développement humain

Chapitre 5: Les structures et les

facteurs de cohésion sociale de la

société comorienne p.62

5.1. La parente

5.2. Le mdji, une fédération des groupes de filiation

5.3. Les espaces communautaires symboliques

Chapitre 6: Les acteurs non éta-

tiques et leurs rôles dans la cohé-

sion sociale et le développement

humain durable p.72

6.1. Le tissu associatif de quartier, de village et de région

6.2. Les syndicats

6.3. Les ONG opérant pour la promotion du genre

6.4. Les associations de la diaspora

Conclusion p.82

Recommandations p.84

Liste des membres du

Comité de Pilotage p.88

Dispositif institutionnel p.90

Bibliographie p.92

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Le développement humain durable se définit comme étant la capacitéde toutes les communautés humaines, y compris les plus démunies,à satisfaire leurs besoins fondamentaux en matière d'habitat, d'eaupotable, d'alimentation, de conditions sanitaires et d'hygiène, de par-ticipation à la prise de décisions, de cohésion sociale, de tissu rela-tionnel, d'expression culturelle et spirituelle... Il est donc un processusà facettes multiples qui cherche à créer une harmonie entre les do-maines écologique, économique et social tout en tenant compte d'élé-ments politiques (participation et démocratisation), éthiques(responsabilité, solidarité, justice sociale…) et culturels (diversité lo-cale et expression artistique).

Le concept et les objectifs de développement humain durable sontpar nature universels. Ils prennent en compte les dimensions écono-mique, environnementale et sociale du développement durable auregard des contraintes des pays en développement, en insistant toutparticulièrement sur la nécessité de considérer ces dimensions defaçon intégrée. Depuis 1990, le Programme des Nations Unies pourle Développement (PNUD), demande chaque année à une équiped’experts indépendants appuyée par des membres du HDRO duPNUD, de rédiger un Rapport Mondial sur le développement hu-main durable. Le rapport national sur le développement Humain du-rable (RNDH) est le pendant au niveau national du rapport mondial.Il a pour but de promouvoir le développement humain durable pardes débats et échanges autour de thématiques majeures du dévelop-pement humain afin de définir des actions concrètes à mettre enœuvre.

Le présent Rapport National sur le Développement Humain Durableen Union des Comores a pour thème central la cohésion sociale. Ila pour but d’examiner la situation de la cohésion sociale en relationavec le développement humain et de ressortir les interrelations. Dansla littérature on peut distinguer divers types de cohésion, entre autres:

• Cohésion d’équipe,• Cohésion de groupe,• Cohésion internationale,• Cohésion politique,• Cohésion institutionnelle,• Cohésion nationale,• Cohésion territoriale,• Cohésion sociale.

Partant de l’idée sommaire que la cohésion sociale est l’union intimedes parties constituant une société donnée, le concept de cohésionsociale renvoie à plusieurs dimensions: politique, institutionnelle, ter-ritoriale (régionale et nationale). Cette étude vise à montrer commentla cohésion sociale, avec le croisement de ces différentes dimensions,peut contribuer à améliorer la situation du développement humain

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aux Comores et inversement, partant duconsensus que l’homme constitue l’élémentcentrale de gravitation de chacun de ces deuxdomaines.

Longtemps oublié par sa lointaine métropole,l’archipel des Comores est resté durant la pé-riode coloniale dans le dénuement le plus com-plet avec peu d’infrastructures, uneadministration éloignée de ses citoyens, et uneéconomie basée essentiellement sur la vente desproduits de rente. Les Comores accèdent à l’in-dépendance dans un contexte difficile caracté-risé par une quasi absence d’infrastructuresviables, une insuffisance de ressources hu-maines qualifiées et une économie atrophiée etpeu diversifiée. Par ailleurs, le processus ayantconduit l’archipel à s’émanciper de la tutelle co-loniale, a abouti à la proclamation d’une indé-pendance unilatérale, inachevée du fait de sonamputation de Maoré, sa quatrième île. Depuis,le pays est confronté à une instabilité politiqueet institutionnelle qui a entraîné de nombreuxeffets négatifs sur le développement social. Lestroubles politiques récurrents se sont soldés parun affaiblissement de l’Etat et ont engendré unesituation économique difficile en particulierpour les couches les plus pauvres de la popula-tion. En 1997, le pays a été confronté à unegrave crise politique exacerbée par la sécessionde l’île de Ndzuwani qui a entraîné le pays dansune longue période d’incertitudes politiques etinstitutionnelles et qui a menacé jusqu’à l’exis-tence même des Comores, en tant qu’Etat na-tion. Cette crise séparatiste a été révélatrice denombreuses frustrations et de rancœurs accu-mulées au fil des années par les ressortissantsdes différentes îles composant l’archipel qui sesont muées en conflits inter îles. Les valeurscommunes de solidarité et de cohésion socialeont été mises à rude épreuve.

Il ressort des études et recherches réalisées dansle pays que divers facteurs sont à la base de cetterupture de l’équilibre et de la cohésion sociale.Des multiples sources de conflits se sont accu-mulées dont des crises sociopolitiques récur-rentes, des cadres politiques inadaptés, uneorganisation économique rudimentaires et un

climat social de plus en plus délétère. Cessources de conflits se retrouvent à tous les ni-veaux:

Au niveau national: la méfiance et la défianceapparues entre les îles a eu comme corollairel’adoption de structures institutionnelles com-plexes et peu efficaces orientées principalementvers la satisfaction des préoccupations/reven-dications insulaires. La gestion des affaires pu-bliques se résume actuellement aux conflits decompétences entre les îles et l’Union, et aux sur-enchères de la classe politique, incapables de ré-soudre ses différends par des voiesconstitutionnelles ou législatives. Ces conflitsperpétuels au sein de la classe politique avecl’immobilisme qu’ils provoquent dans l’ensem-ble de la société ont comme conséquence uneincapacité à s’entendre sur un projet fédérateurquelconque. Partout on note un net recul du na-tionalisme et du patriotisme qui jadis réunis-saient les élites et la population et permettaientl’acquisition d’une grande maturité ayant contri-bué notamment à l’acquisition de l’indépen-dance ou à la lutte contre le mercenariat.Aujourd’hui, on assiste à la quasi-absence degrands projets consensuels nationaux mobili-sant l’ensemble des Comoriens; tout aucontraire, le pays voit l’émergence d’un sépara-tisme outrancier. Chaque île se découvre uneidentité propre et un besoin pressant d’évoluerseule sans les autres. L’érection et la banalisationde ce séparatisme outrancier a sapé les fonde-ments de la cohésion et de la paix sociales. Prô-ner le séparatisme est considéré comme unesimple opinion politique et ceux qui passent auxactes n’ont jamais eu à répondre de leur forfai-ture.

Au niveau insulaire: L’opposition villes/cam-pagne s’est accentuée. Au plan économique, ladétérioration des cours des produits de rente etl’appauvrissement des campagnes qui en décou-lent ont entrainé le développement du chômageet de la précarité. De multiples sources deconflits sont apparues avec la généralisation dela corruption dans l’administration locale et ledéveloppement du non droit. Cette situation oc-casionne de nombreux conflits fonciers. La ma-

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jorité des terres appartenant au domaine publicet aux grands propriétaires des villes sont van-dalisées ou confisquées par les localités rive-raines ou par des individus soutenus par leurcommunauté. Compte tenu de la forte crois-sance démographique du pays, le règlement glo-bal du problème foncier permettrait de réaliserun meilleur aménagement du territoire, d’anti-ciper les conflits futurs et de faciliter l’investis-sement privé et productif dans tous les secteursen particulier le secteur agricole. Au plan socio-politique, le séparatisme a généré aussi un irré-dentisme basé sur une idéologie chauvinisteforte. L’environnement politique aidant, l’Etatest obligé de se plier aux exigences des régionset des localités en ouvrant de manière inconsi-dérée des centres d’Etat civil, des dispensaires,des écoles… sans tenir compte des ressourcesdisponibles ni des plans existants. Les répercus-sions de ce laisser faire et ce laisser aller sont labaisse du niveau scolaire et la mauvaise qualitédes soins notamment. L’absence d’une véritablepolitique de développement local laisse les ré-gions et les villages conduire leur développe-ment de façon anarchique selon desmécanismes régulateurs propres, souventsource potentielle de conflits. Les méfiances etdéfiances, parfois séculaires, entre localitésconduisent à des affrontements parfois meur-triers pour des causes souvent banales (matchde football, querelles entre jeunes…)

Au niveau de la cité: Les jeunes générationss’éloignent de plus en plus de l’idéal du bien êtrecollectif, de la justice et de l’entraide. On voitpointer dans le pays des pratiques étrangèresaux traditions de vertu et de tolérance qui ca-ractérisaient la société comorienne. La généra-lisation de la crise économique a entraîné ladémission de nombreux parents appauvris deleurs responsabilités d’éducateurs. De nom-breux jeunes ont perdu tout repère et s’adon-nent à la recherche de l’argent facile et del’enrichissement sans le moindre effort. L’exilest devenu un idéal pour fuir la misère. Le brasde mer qui sépare Maore de Ndzuwani est de-venu l’un des plus grands cimetières marins dumonde avec pas moins d’un demi-millier demorts chaque année. La pauvreté s’est étendue

et s’est enracinée dans le pays. Des segmentsimportants de la population vivent au dessousdu seuil de pauvreté et n’ont pas accès aux ser-vices sociaux de base. Ces disparités associéesaux risques de catastrophes naturelles (érup-tions volcaniques, inondations, épidémies…) oucausées par l’homme (chômage, dégradationdes conditions de vie, conflits…) ont pour effetd’exacerber la vulnérabilité et l’exclusion socialeet d’entamer ainsi la cohésion sociale.

En se fondant sur une analyse approfondie desopportunités et défis prioritaires de la cohésionsociale dans le pays, ce rapport doit proposerdes stratégies d’intervention pour les questionset problèmes identifiés. Divers types d’interven-tions pourront être proposés, depuis la mise enplace d’une politique de cohésion sociale, la ré-forme complète du système de gouvernance etd’administration publique, la mise en placed’institutions capables de répondre aux besoinsde la population, le développement de méca-nisme de veille, d’alerte, d’information et ges-tion efficace des problèmes mettant en péril lacohésion sociale. Il s’agit de donner une visionstratégique du pays en ce qui concerne la miseen place des institutions fortes, respectueusesdes lois et règlements, garantes de la démocratieet des droits de l’homme, et aptes à promouvoirla participation des citoyens à la vie politique etéconomique et aux sphères de prise de déci-sions.

Le présent rapport comprend six chapitres. Lepremier chapitre traite du contexte et des ten-dances du développement humain. Le secondchapitre analyse la problématique de la cohésionsociale et du développement humain. Le troi-sième chapitre aborde la question de l’insularitéet de la cohésion sociale. Le quatrième chapitreaborde les conséquences des crises politico-ins-titutionnelles sur la cohésion sociale et le déve-loppement humain. Le cinquième chapitreanalyse les structures et les facteurs de cohésionsociale de la société comorienne. Le sixièmechapitre concerne les acteurs non étatiques etleurs rôles dans la cohésion sociale et le déve-loppement humain durable.

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Rapport National sur le Développement Humain

Chapitre 1: Contexte et tendances du développement humain aux Comores

A. Cadre géographique

Les Comores font partie des Petits Etats Insu-laires en Développement (PEID). Situé à l’en-trée Nord du Canal de Mozambique entrel’Afrique orientale et le Nord-Ouest de Mada-gascar, l’ensemble de l’archipel couvre une su-perficie de 2.236 km² répartie inégalement surquatre îles: Ngazidja (Grande Comore) 1.148km², Mwali (Mohéli) 290 km², Ndzuwani (An-jouan) 424 km² et Maore (Maore) 374 km². Lazone économique exclusive est estimée à plusde 160 000 km². Elle recouvre 900 km² de pla-teau continental et 427 km de côte. Le climatest de type tropical humide sous influence océa-nique avec deux saisons. Le présent rapportporte sur les trois premières îles.

B. Données démogra-

phiques

La population totale est estimée à 653000 habi-tants en 2008 (selon les projections basées surles données du RGPH 2003). Elle connaît uneévolution relativement rapide avec un taux d’ac-croissement annuel moyen de 2,1%. La densitémoyenne est de 269 habitants /km² mais variesensiblement d’une île à l’autre et à l’intérieurdes îles. Cette densité est particulièrement éle-vée à Ndzuwani posant ainsi des problèmes

socio-économiques graves (fortes pressions surles ressources naturelles, dégradation des fo-rêts…). La population est très jeune puisque53% de celle-ci ont moins de 20 ans. Lesfemmes en âge de procréer représentent 23,6%de la population. Parmi ces femmes près de lamoitié (49,9%) sont mariées. Cependant, le tauxde divorce chez les femmes n’est pas négligeable(7,6%). La proportion des hommes mariés estestimée à 46%. L’âge moyen au premier mariage(30 ans chez les hommes) et (24 ans chez lesfemmes) varie d’une île à une autre: à Ngazidjales hommes se marient un peu tardivement (31ans) par rapport à Ndzuwani et Mwali (28 ans).La polygamie, aspect important en matière decohésion familiale, n’est pas observée de lamême façon dans les trois îles: le taux de poly-gamie à Ndzuwani (22%), supérieure à lamoyenne nationale (20%), est plus élevé quecelui de Ngazidja (19%) et de Mwali (14%).L’indice synthétique de fécondité est estimé à5,3 enfants par femme. L’espérance de vie à lanaissance est de 65,5 ans dont 64,3 ans chez leshommes et de 66,9 ans chez les femmes. Letaux de mortalité maternelle est évalué à 381femmes1 pour cent mille naissances vivantes en2003. La mortalité infantile dont le taux est de83,2 pour mille au niveau national a un niveauplus élevé à Ngazidja (98,9 pour mille) par rap-port à Ndzuwani (76,1 pour mille) et Mwali (58pour mille).

1.1. Contexte géographique et démographique

121Résul tats du RGPH 2003

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Cohésion Sociale et Développement Humain - 2010

Chapitre 1: Contexte et tendances du développement humain aux Comores

Indépendantes depuis juillet 1975, les Comoresont connu une instabilité politique et institu-tionnelle extrêmement préjudiciable au dévelop-pement, due aux multiples coups d’Etat etrécemment en 1997 à la crise séparatiste. Plusde trente ans ap rès la déclaration unilatérale del’indépendance, les Comores n’ont pas su tirerprofit de cette souveraineté retrouvée. Les dés-ordres institutionnels dans lesquels s’est empê-tré l’Etat comorien naissant, a plongé le paysdans une incertitude totale. L’amateurisme po-litique, l’inefficacité d’une administration pu-blique pléthorique et peu efficace et démotivéeainsi que la mauvaise gestion des maigres res-sources ont conduit le pays à l’impasse.La signature de l’accord de Fomboni, en 2001,a mis fin à la crise séparatiste et a contribué à la

création du nouvel ensemble comorien. Unenouvelle constitution a été votée le 23 décembre2001. Elle consacre une large autonomie des îleset garantit un partage du pouvoir entre l’Unionet les îles qui la composent afin de permettre àcelles-ci d’administrer et de gérer librementleurs propres affaires et de promouvoir leur dé-veloppement socio-économique. Compte tenude nombreux conflits de compétences entre lesîles et l’Union, une modification de cette consti-tution a été adoptée le 17 mai 2009. Chaque îleest désormais placée sous l’autorité d’un Exé-cutif composé d’un gouverneur élu et de com-missaires, le pouvoir législatif étant dévolu à unconseil dont les membres sont également élus.

1.2. Contexte politique et institutionnel

La mise en place des nouvelles institutions de-vait créer des perspectives nouvelles pour le dé-veloppement économique et social. Mais lacroissance économique négative par tête d’ha-bitant et le développement subconséquent de lapauvreté n’ont pas permis d’amorcer un redres-sement de la situation économique et financièreni d’engager le pays dans la voie du développe-ment humain durable. Le chômage et le sousemploi se sont accrus. Les conditions de vie dela majorité de la population se sont détérioréeset l’accès aux services sociaux de base est de-venu difficile. La situation politico-économiquereste précaire malgré les investissements effec-tués au cours de ces dernières années qui n’ont

pas amélioré substantiellement le niveau de viede la population.

L’Union des Comores est classée parmi les paysles plus pauvres du monde en termes de revenupar tête et en termes d’indicateurs de bien être.L'Indice de Développement Humain (IDH) estde 0,576 en 2007 (cf. Rapport Mondial sur ledéveloppement Humain 2009) correspondant àune espérance de vie à la naissance de 65,5 ans,un taux d'alphabétisation des adultes de 75,1%.Le pays occupe le 139ème rang sur les 177 paysoù l'IDH a été calculé dans le RMDH de 2009.L’Indicateur de Pauvreté Humaine (IPH-1) quiétait de 31,6% en 2005 est estimé, à 20,4% en

1.3. Contexte économique

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2009. L'incidence de la pauvreté monétaire estpassée de 54,7% à 44,8% entre 1995 et 2004.

Le pays connaît une pression démographiquecroissante pour des ressources limitées. Lacroissance démographique élevée associée à ladéforestation et à l’utilisation de techniquesagricoles archaïques entraîne une surexploita-tion des sols, leur appauvrissement et leur éro-sion. Les conséquences majeures de cettedégradation amplifie la pauvreté rurale, aug-mente le flux migratoire du milieu rural vers lemilieu urbain et développe l’insécurité alimen-taire. Le défrichement de la forêt et l’érosionsubséquente des sols sont aussi une menacepour les ressources du pays en eau. L’activitééconomique reste confinée au commerce deproduits importés et à l’exploitation de quelquesproduits agricoles de rente (essences de plantesà parfum, production de boissons…). La fré-quentation touristique reste encore faible parrapport à celle des pays voisins à cause de l’in-suffisance en infrastructures hôtelières et de

l’absence d’une politique touristique cohérente.

Un cadre stratégique de croissance et de réduc-tion de la pauvreté (SCRP) est en place aux Co-mores depuis 2003; elle est opérationnelle àtravers son Plan d’Action qui a été adopté. LeGouvernement de l’Union des Comores s’estdoté de cet instrument pour organiser et har-moniser ses efforts et ceux de ses partenairesen matière de lutte contre la pauvreté. LeDSCRP a servi d’outil de mobilisation de res-sources à la Conférence des bailleurs du 8 dé-cembre 2005 à Maurice. La Table Ronde deMaurice a réuni plus de 50 pays et organisationsdonateurs et a enregistré des résultats impor-tants en matière de mobilisation de fonds et deconsolidation de la réconciliation nationale. Unmécanisme de suivi de la conférence est mis enplace par le gouvernement avec l’appui duPNUD. Le DSCRP a été révisé, réactualisé, fi-nalisé et validé par le pays au cours de l’année2009.

L’archipel des Comores ayant été, et demeurantencore aujourd’hui un espace largement ouvertaux apports démographiques et culturels exté-rieurs, ses institutions socioculturelles sont le ré-sultat de la synthèse et de l'évolution locale destraditions issues de tous les pays africains etasiatiques riverains de l'Océan Indien. L’organi-sation sociale est cependant, fortement marquéeau niveau des structures par l'héritage africainet au niveau des valeurs par l'apport arabo-per-san. Les bantous ont légué à l’archipel leur sys-tème de parenté et un habitat groupé encommunautés appelées midji au pluriel (villesou villages, singulier mdji ou muji), structuréesverticalement par des groupes de descendanceet horizontalement par des catégories d’âge.

Sur ce territoire de faibles dimensions, isolé aumilieu du Canal de Mozambique, les ajuste-ments des principes de filiation, de résidence,d’héritage et de succession, introduits par lesdifférentes ethnies africaines de langues bantou;aux règles morales (akhlaq) et ethno-sociales(mu'amalates) qui sont les cadres donnés par leCoran aux relations sociales, ont été réalisés len-tement et dans une concorde relative au coursdes siècles. L’Islam bien qu’étant apparu commeune sacralisation des traditions et des coutumesbantoues a toléré l’existence syncrétique despratiques animistes. Il a contribué à la stabilisa-tion d’un milieu social et familial bantou qui aconservé ses structures, ses hiérarchies et sa dis-cipline.

1.4. Contexte socioculturel

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Cohésion Sociale et Développement Humain - 2010

La presque totalité des archipels et des petitesîles dans le monde est confrontée à des pro-blèmes liés à leur insularité, à leur dimension età leurs réalités culturelles, économiques et poli-tiques. Pendant longtemps, ces problèmes spé-cifiques des archipels et des petites îles ont reçuune attention très limitée de la part de la com-munauté des nations. Les études spécifiques res-tent encore éparses. Ce peu d’intérêt pourraits’expliquer, en partie, par le manque d’impor-tance économique aussi bien comme produc-teurs de matières premières que comme marchépotentiel des produits des pays industrialisés. Aucours de ces dernières années, quelques organi-sations et institutions internationales ont com-mencé à se pencher et à essayer de comprendreles problèmes inhérents aux petites îles et archi-pels indépendants en voie de développementqui représentent 14% du nombre des paysmembres des Nations Unies. Malgré son faiblepoids économique, ce groupe de pays repré-sente une valeur stratégique grâce á l’impor-tance du nombre de voix dont il dispose dansles organismes internationaux.

Généralement les archipels et petites îles sontconsidérés comme étant des entités non viablesparce qu’ils sont petits, isolés, vulnérables etleurs populations ont tendance à ne pas possé-der un sens approfondi d’appartenance à une

nation. Etant entourés par la mer, ils dépendenténormément des ressources marines et côtièrespour leur vie journalière mais aussi commesource de devises étrangères à travers l’expor-tation. Certains ont développé d’importantes in-dustries touristiques très dépendantes de labeauté de leurs paysages et de leurs ressourcesmarines et côtières. Les problèmes importantsdes îles sont principalement de nature écolo-gique (dégradations de l’environnement, pollu-tion, expositions aux cyclones…), économique(limitation des terres agricoles, sources énergé-tiques peu diversifiées à cause de leur formationgéologique, peu de sources en eau douce, indus-trialisation limitées…) sociopolitiques (déstabi-lisation fréquentes, propension auxséparatismes, points de transits pour toutessortes d’activités illégales…).

En ce qui concerne les Comores, les problèmesinhérents à leur insularité tiennent principale-ment à la fragilité écologique et économique, àla forte vulnérabilité et à la faible capacité de ré-ponse aux changements climatiques et aux ca-tastrophes naturelles. A cela s’ajoutentd’importants problèmes liés à la gouvernancepolitique et économique, ainsi qu’à l’étroitessede la base des ressources, des coûts élevés del’énergie, des communications et des transportsaériens et maritimes.

1.5. Problèmes intrinsèques de l’insularité

Le développement humain durable est au centredes préoccupations et de la réflexion sur les en-jeux du devenir de l’humanité. Il mobilise lesplus éminents chercheurs et des programmes deformations à part entière lui sont consacrésdans les universités. Il est le point de mire desgénérations actuelles et futures. C’est une desidées fortes «qui définissent la société contem-poraine». Quelle est l’origine exacte de ceconcept ? Quelle est sa signification ? Que re-couvre-t-il ? Le concept de «développement hu-main durable» est né de la fusion de deux autresconcepts: «développement humain» et «déve-

loppement durable».

A. La notion de «dévelop-

pement humain»

L’urgence de la nécessité de reconstruire lespays dévastés par la deuxième guerre mondiale,avait concentré les esprits sur la nécessité de dé-gager de la croissance. La maximalisation del’accumulation des richesses avait, pendant qua-tre décennies, obnubilé les décideurs de poli-

1.6. Le concept de «développement humain durable»

15

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tiques économiques au détriment de la dimen-sion humaine de cette reconstruction. L’ap-proche monétaire et quantitativiste avaientprédominé la pensée économique qui avait faitde la croissance économique - de la richessemonétaire - à la fois le moteur et le centre d’in-térêt du développement. C’est ainsi que le ni-veau de la richesse nationale était devenu laréférence pour mesurer le niveau de développe-ment d’un pays. Le PNB par tête d’habitant étaitl’indicateur de mesure du niveau de développe-ment. La ligne (ou seuil) de référence ayant étéfixé à 1000 $ par personne, tous les pays quiavaient un PNB/tête supérieur à 1000 $ étaientconsidérés comme développés. Ceux, dont lePNB/tête était inférieur à 1000 $ étaient classéssous-développés.

L’aberration de ce système n’a pas tardé à fairel’unanimité contre lui dans les années soixantedix et quatre vingt. La nécessité de trouver uneméthode plus appropriée de mesure du déve-loppement s’est rapidement imposé au sein desorganisations internationales et des universités:il faut penser le développement autrement quepar la croissance et l’accumulation des richesses.Le développement doit refléter la satisfactiondes besoins essentiels et fondamentaux des po-pulations. D’autant plus que les expériences, àtravers tous les continents, ont démontré que lebien être des populations ne dépend pas du re-venu mais de la manière dont celui-ci est utilisé.Un niveau de revenu modeste peut être accom-pagné d’une bonne qualité de vie et, à l’inverse,celle-ci peut être médiocre malgré un niveauélevé du revenu. «Le développement doit doncêtre bien plus qu’une accumulation de revenu etde richesse. Il doit être centré sur les per-sonnes.»2 L’homme doit donc être au centre, lapréoccupation majeure du développement entant qu’acteur et bénéficiaire, d’où la formula-tion de la notion de «développement humain».

B. Le concept de «dévelop-

pement durable»

La notion de «développement durable» s’est im-posée après que la science ait constaté les dan-gers consécutifs à l’exploitation abusive, à

l’utilisation excessive et au non respect des res-sources naturelles de la planète. La destructionde l’environnement naturelle (écologique) com-promet, à terme, l’existence de l’humanité. Le«développement humain» ne saurait être effectifque si les ressources naturelles de la planète, quicouvent l’épanouissement physique et moral del’homme, sont préservées. Le «développementhumain» doit donc être un processus pérenne.Mais cette pérennité est soumise à celle de l’en-vironnement. Il s’avère tout simplement que ledéveloppement est indissociable de la préserva-tion de l’environnement.

Ainsi, en 1987, dans le Rapport dit «Brundt-land», la Commission mondiale sur l’Environ-nement et le Développement, définit le«développement durable» comme étant «un dé-veloppement qui répond aux besoins des géné-rations du présent sans compromettre lacapacité des générations futures de répondreaux leurs. Deux concepts sont inhérents à cettenotion: le concept de " besoins ", et plus parti-culièrement des besoins essentiels des plus dé-munis, à qui il convient d’accorder la plusgrande priorité, et l’idée des limitations quel’état de nos techniques et de notre organisationsociale impose sur la capacité de l’environne-ment à répondre aux besoins actuels et à venir.»

C. Définition du dévelop-

pement humain durable

Le «développement humain durable» est l’outille plus précieux pour mieux gérer et mieux maî-triser l’adéquation entre le progrès technique etla pérennité des ressources naturelles. Le déve-loppement humain durable permet d’envisagertous les aspects de l’impact de l’activité humainesur la planète et de le gérer de façon responsa-ble, à long terme, pour le plus grand bénéficede toutes les sociétés, présente et futures. Detoutes les définitions du «développement hu-main durable» formulées jusqu’ici, celle de 1994de l’ancien Administrateur du PNUD, J. G.Speth est la plus répandue: «Le développementhumain durable est un développement qui n’en-gendre pas seulement la croissance, mais quidistribue de façon équitable ses bénéfices; qui

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Chapitre 1

renouvelle l’environnement plutôt qu’il ne le dé-truit; qui responsabilise les gens plutôt qu’il neles exclut». Il a pour objet de créer un environ-nement au sein duquel chaque être humainpourra accroître ses capacités et élargir ses choixsans remettre en cause ceux des générations fu-tures.

D. Schématisation du dé-

veloppement humain du-

rable

Du schéma emprunté à «Sequovia»3 qui suit, onpeut déduire que le développement humain du-rable repose sur quatre piliers majeurs:

• L’environnement,• L’économie,• Le social,• L’équité et la démocratie participative.

L’environnement: le développement repose 1)sur l’utilisation et la gestion rationnelle et dura-ble des ressources naturelles (air, eau, sol), 2) lemaintien des grands équilibres naturels ‘(climat,diversité biologique, océan, forêts etc.), 3) lamaîtrise de l'énergie et l'économie des res-sources non renouvelables (pétrole, gaz, char-

bon, minerais etc.);L’économie: l’activité économique doit être res-pectueuse des milieux naturels agricoles et ma-ritimes d’où proviennent les ressources de base.Elle doit profondément remodeler le paysagedes relations économiques internationales demanière à promouvoir un commerce mondialéquitable, un paysage qui soit propice à une an-nulation de la dette des pays les moins avancéset à une augmentation des investissements àdestination de ces pays.

Le social: les préoccupations sociales doiventêtre au centre du développement. C’est le seulmoyen de réaliser sa dimension qualitative.Combattre l’exclusion sous toutes ses formes,maîtriser la croissance démographique et ur-baine, satisfaire les besoins sociaux essentielstels que l’alimentation, l’habitat, l’éducation etla santé doivent découler de la mise en place destructures sociales adéquates et indispensablesà l’épanouissement de l’homme.

L’équité: le développement est impérativementsoumis à une juste répartition des ressources etdes richesses. Les mesures statistiques réaliséesà travers le monde ont montré que les inégalitéssont responsables de la pauvreté. Le meilleurmoyen de lutter contre les inégalités est d’élargirles opportunités offertes. «Le développement

Durable

Viable Viable

Equitable

Ecologique

Social Economique

Reproduction du schéma de Séquovia

173www.sequovia.com

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Rapport National sur le Développement Humain

humain est un processus qui conduit à l’élargis-sement des possibilités qui s’offrent à chacun.En principe, elles sont illimitées et peuvent évo-luer avec le temps.»4 Le meilleur garant del’équité demeure incontestablement l’instaura-tion et le respect des règles de la démocratieparticipative. Ces quatre piliers (l’environne-ment, l’économie, le social, l’équité) sont inex-tricablement liés et sont en interactionconstante. Ils sont donc indissociables à toutesles échelles de l'organisation et des activités dela société.

E. Problématique de la

collecte de données pour le

calcul des indicateurs du

développement humain

aux Comores

La problématique de la collecte de donnéespour le calcul des indicateurs du développementhumains est une étape importante mais extrê-mement difficile à franchir pour les raisons sui-vantes:

• Premièrement, les statistiques nationales neparviennent toujours pas à aligner des séries sta-tistiques fiables et régulières. En 2009, les sta-tistiques disponibles devant être utilisées dansle calcul de ces indicateurs proviennent d’en-quêtes anciennes. Elles ne sont pas régulière-ment réactualisées ne serait-ce que sur la basede méthodes statistiques prospectives pointueset affinées.

• Deuxièmement, aucun des deux principaux in-dicateurs du développement humain (IDH,ISDH) ne peut être calculé sans le PIB nationalen dollars parité de pouvoir d’achat. Or celui-cin’est pas établi par les statistiques nationalesmais par la Banque mondiale. Le PIB pourl’Union des Comores est disponible, mais, tech-niquement, on ne peut pas l’éclater entre les îles.Une extrapolation grossière aurait été possiblesi on disposait de la part relative de chaque îledans le PIB nominal ou réel du pays.

Le tableau ci-contre illustre la situation en ma-tière de disponibilité des données statistiquespour le calcul des indicateurs de développementhumain aux Comores.

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Cohésion Sociale et Développement Humain - 2010

Indicateur Statistiques nécessairesDisponibilité

Pays Iles

IDH

Espérance de vie Oui Oui

Taux Alphabétisation Oui Oui

Taux Brut de Scolarisation combiné Oui Oui

PIB/H (en $ PPA) Oui Non

ISDH

Part des femmes dans la population Oui Oui

Part des hommes dans la population Oui Oui

Espérance de vie chez les femmes Oui Oui

Espérance de vie chez les hommes Oui Oui

Taux alphabétisation. chez les femmes Oui Oui

Taux alphabétisation. chez les hommes Oui Oui

TBS chez les femmes Oui Oui

TBS chez les hommes Oui Oui

PIB/H chez les femmes ($ PPA) Oui Non

PIB/H chez les hommes ($ PPA) Oui Non

IPF

Part des femmes dans la population Oui Oui

Part des hommes dans la population Oui Oui

Part des femmes au Parlement Oui Oui

Part des hommes au Parlement Oui Oui

% de femmes députés ou Directrices Non Non

% hommes députés ou Directeurs Non Non

Revenu /H chez les femmes ($ PPA) Oui Non

Revenu/H chez les hommes ($ PPA) Oui Non

IPH-1

Probabilité de décéder avant 40 ans Oui Non

Taux d’an alphabétisation. des adultes Oui Oui

% de population privée de point d’eau aménagé Oui Oui

Statistiques nécessaires au calcul des indicateurs du développement humain

Les données statistiques nécessaires aux calculs des indices dimensionnels de l’espérance de vie et du niveaud’instruction sont disponibles pour 2006 et 2007. Mais l’IDH pour ces années ne peut pas être calculé sans l’indicedimensionnel du PIB par tête en parité de pouvoir d’achat (PPA).

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A. Les Indices dimension-

nels de mesure

Une enquête des Nations Unies réalisée àl’échelle mondiale a permis de dégager quatrebesoins essentiels retenus comme communs àtoutes les populations:

• Vivre longtemps et en bonne santé.• Accéder au savoir dans ses différentes dimen-sions.• Disposer de ressources matérielles suffisantespour mener une vie décente.• Participer librement à la vie communautaire etpublique.

Ainsi, la mesure du niveau de développementse fait à l’aide de l’Indice du DéveloppementHumain (IDH). C’est un indice synthétique quireprésente la moyenne arithmétique des trois in-dices dimensionnels suivants:

• L’Indice de l’espérance de vie à la naissancepour la dimension santé,• L’indice du niveau d’instruction qui comprendle taux d’alphabétisation des adultes et le tauxbrut de scolarisation combiné (Primaire, secon-daire et supérieur),• L’Indice du PIB par habitant exprimé en dol-lars de parité de pouvoir d’achat (PPA)L’IDH, dont la valeur est compris entre 0 et 1,permet de comparer les performances de déve-loppement de tous les pays du monde. Ces der-

niers sont ainsi classés en quatre catégories:• Les pays à niveau de développement humaintrès élevé, ceux dont l’IDH est supérieur 0,9;• Les pays à niveau de développement humainélevé, ceux dont l’IDH est compris entre 0,8 et0,9; • Les pays à niveau de développement humainmoyen, ceux dont l’IDH est compris entre 0,5et 0,8

Et les pays à niveau de développement humainfaible, ceux dont l’IDH est inférieur à 0,5

B. Situation générale du

développement humain

Les conditions de vie de la population aux Co-mores ne sont pas satisfaisantes. Néanmoins,elles se sont améliorées ces dernières années,certes très timidement, et a influé positivementsur le développement général du pays. L’évolu-tion positive de l’indicateur agrégé du dévelop-pement humain (IDH) depuis 1980 (Graphique1) le confirme parfaitement. En effet, depuis1980, sa progression est continue. De 0,447cette année là, à 0,489 en 1990, il atteint 0,540en 2000 et passe à la valeur de 0,576 en 2007,ce qui place les Comores, dans le RMDH 2009,au 139ème rang mondial sur 177 pays, alorsqu’elles étaient classées 137ème en 2003.L’Union des Comores figure ainsi parmi lespays ayant un niveau moyen de développementhumain.

1.7. Le concept de «développement humain durable»

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0,447! 0,461!0,489!

0,513!0,54!

0,57! 0,573! 0,576!

0!

0,1!

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1980! 1985! 1990! 1995! 2000! 2005! 2006! 2007!

70,

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1980 1985

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Cohésion Sociale et Développement Humain - 2010

Graphique 1 : Evolution de l’indicateur agregé du développement humain depuis 1980

Source: Rapport Mondial sur le Développement Humain 2009, PNUD

C. Comparaison de l’IDH des Comores à celui d’autres pays

Pour avoir un jugement nuancé de la situation du développement humain aux Comores, nous avons comparécelle-ci avec celle des autres pays de la région (cf. tableau 1 ci-dessous). L’Union des Comores se trouve en queuede peloton des pays à niveau de développement humain moyen. La valeur de son IDH en 2005 (0,561) est infé-rieure de 0,134 point (-20%) à celle de l’IDH moyen de l’ensemble des PVD (0,691) et de 0,068 points supérieurà l’IDH de celle l’ensemble de l’Afrique subsaharienne (0,493). Par contre, au sein de la COI, l’Union des Comoresarrive devant Madagascar, mais loin derrière Maurice et Seychelles.

1998 2003 2005

IDH NDH RM IDH NDH RM IDH NDH RM X - Y

Comores 0.508 M 137e 0.547 M 132e 0.581 M 134e 10

Madagascar 0.483 F 141e 0.499 F 146e 0.533 M 143e 27

Maurice 0.761 M 71e 0.791 M 65e 0.804 E 65e -13

Seychelles 0.785 M 53e 0.821 E 51e 0.843 E 50e -10

Tanzanie 0.415 F 156e 0.418 F 164e 0.467 F 159e 15

Kenya 0.508 M 138e 0.474 F 154e 0.521 M 148e 9

Mozambique 0.341 F 168e 0.379 F 168e 0.324 F 172e -16

Cap Vert - - - 0.694 M 146e 0.736 M 102e 11

Ensemble PVD 0.642 M - 0.518 M - 0.691 M - -

Ensemble PMA 0.435 F - 0.515 F - 0.488 F - -

Afr. Subsaharienne 0.464 F - 0.499 F - 0.493 F - -

Tableau 1: de l’IDH des Comores à celui d’autres PVD5

IDH = Indicateur de développement humain; ND = Niveau de développement; RM = Rang mondial, X = Classementselon le PIB par tête, Y = Classement selon l’IDH

Source: PNUD

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Avec un IDH de 0,821 en 2003 et 0,843 en2005, les Seychelles figurent aujourd’hui parmiles pays à IDH élevé alors qu’elles étaient parmiles pays à IDH moyen en 1998. L’île Mauricefait également partie des pays à IDH élevé. Eneffet, son IDH est passé de 0,761 en 1998 à0,791 en 2003 et à 0,804 en 2005.

Les performances des Seychelles et de Mauricene doivent pas occulter le cas du Kenya qui seprésente ici comme un avertissement. En 1998,ce pays était classé parmi les pays à IDH moyen(0,508) alors qu’il se trouve aujourd’hui dans lespays à IDH faible (0,474). Mais sa situation s’estredressée en 2005 où il retrouve une IDHproche de celle de 1998 et qui lui permet de re-trouver le groupe des pays moyennement déve-loppés et un classement de 148e.

La dernière colonne du tableau 1 donne la dif-férence entre le classement du pays selon sonPIB par tête (en PPA) et son classement selonl’IDH. Un chiffre positif indique que le pays estmieux pour l’IDH que pour le PIB. C’est unsigne de la faible contribution du revenu au dé-veloppement humain du pays. Un relèvementdu PIB par tête améliorerait la situation du dé-veloppement humain. Ce qui est précisément lecas des Comores. Inversement, un chiffre néga-tif montre que le pays fait mieux dans le do-

maine économique qu’en matière social.

D. Indice Sexospécifique

du développement humain

(ISDH)

En plus de l’IDH, d’autres indicateurs permet-tent d’apprécier le niveau du développementhumain dans les pays. Il s’agit de:• L’indicateur Sexospécifique du Développe-ment Humain (ISDH),• L’Indicateur de Participation des femmes(IPF)6

• L’Indicateur de Pauvreté humaine (IPH)

L’ISDH et l’IPF) permettent d’appréhender lesinégalités entre les sexes dans la réalisation dudéveloppement humain.

Alors que l’IDH mesure le niveau de dévelop-pement moyen atteint par un pays, l’ISDH in-tègre dans ses calculs la part des femmes dansles différentes dimensions de manière à y faireapparaître les inégalités entre les deux sexes. Parl’ISDH on vise à considérer les capacités desfemmes et des hommes dans la réalisation dudéveloppement.

22

5 Les intervalles du niveau de développement varient d’une année à l’autre. Pour 1998: ND élevé [0,801-0,963]; NDmoyen [0,505-0,799]; ND faible [0,290-0,499]. Pour 2004 c’est respectivement [0,800-0,965] les niveaux élevés;

[0,500-0,798] pour les niveaux moyens; [0,311-0,495] les niveaux faibles.6 L’IPF ne sera pas abordé par manque de données. Le rapport du PNUD ne le présente pas.

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Chapitre 1

0.503! 0.505!0.51!

0.55!0.554!

0.571!

0.46!

0.48!

0.5!

0.52!

0.54!

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1998! 2000! 2002! 2004! 2005! 2007!

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! ! ! ! ! !Source: PNUD, RMDH

A l’instar de l’IDH, l’ISDH des Comores connaît une progression encourageante.La considération de l’aspect genre dans le développement aux Comores en général, comparativement aux autrespays voisins à travers l’ISDH dégage des observations similaires à celles déjà formulés lors de la comparaison àl’aide de l’IDH. A cet égard, avec un ISDH de 0, 541 en 2003 contre 0,503 en 1998, les Comores se placent der-rière Maurice.

Pays

1998 2003 2005

ISDH NDHRangselonISDH

ISDH NDHRangselonISDH

ISDHRangselonl’ISDH

Rangselonl’IDH

Comores 0.503 M 137e 0.541 M 101e 0.554 116e 134e

Madagascar 0.478 F 116e 0.483 F 118e 0.53 122e 142e

Maurice 0.75 M 61e 0.781 M 54e 0.796 63e 65e

Tanzanie 0.41 F 127e 0.414 F 127e 0.464 138e 159e

Kenya 0.504 M 112e 0.472 F 117e 0.521 127e 148e

Mozambique 0.326 F 139e 0.365 F 133e 0.373 150e 172e

Tableau 2: Comparaison de l’ISDH des Comores avec celui des pays voisins

Source: PNUD

23

Graphique 2 : Evolution de l’indice sexospécifique du développement humain depuis 1998

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Le développement humain et la pauvreté hu-maine sont deux aspects de l’analyse du déve-loppement. En fait, les deux approches secomplètent. Alors que l’IDH mesure le niveaude développement humain moyen atteint par unpays, l’IPH fait apparaître les carences ou lesmanques constatés dans les trois dimensionsfondamentales déjà envisagées pour l’IDH.Pour calculer l’IPH on considère:• La Santé: - Probabilité à la naissance de ne pas survivrejusqu’à 40 ans, - Pourcentage des enfants de moins de 5 anssouffrant d’insuffisance pondérale• L’Education: taux d’analphabétisme desadultes

• L’Assainissement: pourcentage de populationn’ayant pas accès à un point d’eau aménagé

Le tableau suivant montre l’évolution de l’IPHdes Comores comparativement aux autres paysvoisins. Nous avons également comparé le clas-sement des pays selon leur niveau d’IPH et deleur IDH.

La pauvreté humaine a diminué de 1998 à 2003passant de 33% à 31,2% durant cette période.Mais depuis 2003 le niveau de pauvreté hu-maine stagne puisqu’il n’a évolué que 0,6 pointjusqu’en 2005.

1.8. Situation de pauvreté humaine

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1998 2003 2005

IPH(%)Rang

selon IPHIPH(%)

Rangselon IPH

IPH(%)Rang

selon IPHRang

selon IDH

Comores 33 57e 31.9 51e 31.3 61e 134e

Madagascar - - 33.7 61e 35.8 75e 142e

Maurice 11.6 14e 11.3 15e 11.4 27e 65e

Tanzanie 29.2 50e 32.9 54e 32.5 67e 159e

Kenya 29.5 51e 31.9 49e 30.8 60e 148e

Mozambique 50.7 79e 47.9 83e 50.6 101e 172e

Cap Vert 22 37e 20.8 37e 15.8 28e 102e

Toutefois, l’IPH des Comores est nettement meilleur que celui des pays voisins tels que Madagas-car, Mozambique, Kenya et Tanzanie.

Source: PNUD

24

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Chapitre 1

Les statistiques présentées plus haut montrentque les Comores figurent parmi les pays à dé-veloppement humain moyen et dont l’IDH esten progression continue. A ce propos, ceci nedoit pas occulter le fait que les Comores figu-rent parmi les pays les moins avancés. Lescauses du sous-développement du pays sont àrechercher à plusieurs niveaux.

Fortement dominée par les activités primaireset tertiaires, l'économie comorienne souffred'une incapacité chronique à diversifier sessources de croissance. Sa structure productive

est pratiquement restée identique depuis l'acces-sion du pays à l'indépendance en 1975. En effet,en 1979, le secteur primaire représentait 41%du PIB, le secondaire 14% et le tertiaire 45%.Ces chiffres sont respectivement de 40%, 10%et 50% en 1989 et de 41%, 11% et 48% en1999. Les calculs à partir du Rapport annuelBCC 2007 montrent que cette structure est res-tée identique. Cette structure conjuguée à unsecteur privé peu dynamique et à une activitéindustrielle très limitée ne parvient pas à assurerune croissance économique soutenue, commele montre le graphique 3.

1.9. Faibles performances de l’économie comorienne

Graphique 3 : Evolution de la croissance économique de 1995 à 2007

Les raisons de cette faible croissance sont liéesà l’interaction de plusieurs facteurs:• L’instabilité politique récurrente: depuis l’in-dépendance en 1975, les Comores ont connuune histoire politique et institutionnelle agitée,marquée par plusieurs coups d’état suivis par lapériode (1997-2008) de crise séparatiste. Cetteinstabilité politique a engendré une situationéconomique difficile, en particulier pour lescouches de la population les plus pauvres no-tamment les femmes et les jeunes. La planifica-

tion socio-économique a rencontré souvent degrands obstacles. Le pays a connu trois pro-grammes de développement reconnus commetels durant ces trente quatre années d’indépen-dance:- le plan quinquennal de développement («Pulamwedeleyo») de 1976;- le plan intérimaire de développement écono-mique et social de 1982;- et le Document Stratégique de Croissance etde la Réduction de la Pauvreté (DSCRP) dont

257Mémoire des Comores, Troisième Conférence des Nations Unies sur les pays les moins avancés, Bruxelles, 14-20 mai2001, page 5

Source : Rapports annuels de la BCC, Evolution de quelques indicateurs économiques dans la zone Francs

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la version intérimaire a été élaborée en 2003, ac-tualisée en 2005 et finalisée en 2009.Ce manque de continuité dans la gestion du dé-veloppement a beaucoup contribué aux faiblesperformances économiques enregistrées.

• Des problèmes systémiques de gouvernance:mis à part l'insuffisance quantitative et le faiblerendement du capital investi, se pose le pro-blème de la rationalité des décisions d’investis-sement et donc de la cohérence de l’ensembledu processus d’investissement. Autrement dit ily a une absence d’affectation des ressources demanière optimale selon les avantages compara-tifs, de choix des personnes compétentes pourgérer ces ressources, de formation appropriéedu capital humain, etc.8

• L’étroitesse du marché limite les économiesd’échelle et le jeu de la concurrence;• Des coûts de facteurs élevés:- Les coûts de transports sont très élevés avecles marchés extérieurs mais aussi entre les îles.- Le coût du travail: Dans le secteur de l’écono-mie moderne, le niveau des salaires se situeentre 50 et 80 euros par mois. Le travail como-rien non qualifié est donc relativement cher etson coût est renchéri par la faible productivitédes travailleurs.- Le coût du capital: Malgré l’élargissement dusecteur financier avec l’ouverture de nouvellesbanques et d’institutions de micro finance lestaux d’intérêt sont trop élevés.- Le coût de l’électricité: Le coût du kilowat-theure est très élevé par rapport à beaucoup depays d’Afrique, et c’est en partie en raison del’isolement géographique du pays et des coûtsélevés des transports, de l’origine thermique del’énergie produite, mais c’est aussi et surtout enraison des problèmes de gestion, l’Etat étant àla fois propriétaire et consommateur.- Le coût des télécommunications: Le coût des

télécommunications paraît relativement élevépar rapport aux autres pays de la sous-région,notamment Madagascar et la Tanzanie.• Des infrastructures et des services inadéquatspar rapport aux exigences d’une économie mo-derne• Une économie agraire caractérisée par des cul-tures de rente dont les prix mondiaux fluctuentfortement et rapidement, exposant le pays à deschocs extérieurs répétés: trois produits bruts etsemi-finis d’origine agricole (vanille, girofle etessence d’ylang ylang) génèrent plus de 90% desrecettes d’exportation. La production vivrière etl’élevage ne couvrent pas les besoins alimen-taires des populations. L’écart qui en découle estcomblé en permanence par des importations,ce qui accentue le déficit structurel de la balancecommerciale• Un secteur financier dont les activités de prêtsont orientées principalement vers des opéra-tions à caractère commercial. En effet, les finan-cements des investissements productifs sonttrès limités. En conséquence, on enregistre untaux d’investissement relativement faible. A titreillustratif, pour la période 1986-1990, les inves-tissements ont représenté 21,5% du PIB. Untaux qui est resté presque au même niveau(21%) en 1991-1993 et qui a considérablementrégressé dans la période 1994-1999 avec 18,3%.Actuellement ce taux d’investissement tourneautour de 10% du PIB. Une analyse de sensibi-lité de la croissance à l’investissement, effectuéesur la période 1976-1999, montre que l’investis-sement a très peu d’impact sur la croissanceéconomique car toute variation de 1% de l’in-vestissement n’induit qu’une croissance écono-mique de 0,2%. Ce qui pose le problème del’efficacité des projets d’investissements.

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268 La deuxième partie de ce document traite plus spécifiquement de ces aspects de la gouvernance économique

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Chapitre 1

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Chapitre 2: Problématique de la cohésion sociale et du développement humain

A. Historique et émer-

gence

Le concept de cohésion sociale est apparu pourla première fois en 1893 dans l’ouvrage du so-ciologue Émile Durkheim intitulé «De la divi-sion du travail social». La cohésion sociale y estdéfinie comme étant l'état de bon fonctionne-ment de la société où s'expriment la solidaritéentre individus et la conscience collective.Pour le sociologue Max Weber, l’histoire etl’émergence de la problématique de cohésionsociale sont inhérentes à celle des classes so-ciales. Il distingue trois types de stratification so-ciale:• La «situation de classe» qui regroupe des indi-vidus vivant dans la même situation écono-mique, ayant des opportunités identiques de seprocurer des biens (capital, biens de consom-mation, biens culturels),• La hiérarchisation sociale qui repose sur leprestige et le statut,• La hiérarchisation politique qui renvoie à lacompétition pour la conquête du pouvoir.

Ces trois types de stratification sociale ne se su-perposent pas nécessairement, mais laconscience d’appartenance commune se mani-feste sur la base des groupes de statut. Dans lalignée de la définition contemporaine desclasses sociales, les sociologues distinguent deuxcatégories: 1) les classes inégalement situées etdotées dans le système productif, 2) celles quisont marquées par une forte identité d’apparte-

nance:• Identité temporelle caractérisée par l’apparte-nance permanente à la catégorie, l’imperméabi-lité à la mobilité intra et intergénérationnelle,l’absence de porosité aux échanges matrimo-niaux avec les autres catégories, • Identité culturelle qui repose sur le partage deréférences symboliques spécifiques en termesde mode de vie et de manières de faire, permet-tant une reconnaissance mutuelle,• Identité collective, c’est-à-dire une capacitéd’agir collectivement, certes de façon conflic-tuelle dans le domaine politique, mais en faisantprévaloir et reconnaître l’unité du groupe, de lanation et de leurs intérêts.

Patrice Mann démontre que les incitations mo-rales et «solidaires» jouent un rôle importantdans l’émergence de l’action collective. En agis-sant communément dans une collectivité oùprédominent les liens de solidarité et d’amitié,les individus signent un pacte d’obligation mo-rale qui peut également devenir un plaisir poureux. Et l’interpénétration de ces trois identitésva se renforcer et constituer une synergie dansl’harmonisation des relations entre les membresde la collectivité et la défense de leurs intérêtscommuns.

La cohésion sociale occupe aujourd’hui uneplace prépondérante dans les régions dévelop-pées d’Europe et d’Amérique du Nord en rai-son de la diversité identitaire de leurs sociétés.Elle fait partie depuis 2000 des objectifs de Lis-bonne pour la période 2000-2010. Aujourd’hui,

2.1. Définition et mesure de la cohésion sociale

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289 Patrice Mann, L’action collective, Armand Colin, 1991

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Chapitre 2: Problématique de la cohésion sociale et du développement humain

le Conseil de l'Europe s’est doté d'une Stratégiede Cohésion Sociale et d'une Direction Géné-rale de la Cohésion Sociale. La cohésion socialea, alors, un sens de lien entre les peuples (UnionEuropéenne) et de capacité à garantir le bienêtre de tous, en évitant les disparités par la co-responsabilité des acteurs.

B. Approches du concept de«cohésion sociale»

La question de la cohésion sociale est une pro-blématique complexe de par ses diverses dimen-sions et la hiérarchisation de celles-ci dans leurinterpénétration au point que des travaux sur laquestion proposent de définir le concept de co-hésion sociale selon plusieurs approches. SelonDurkheim, la cohésion sociale se développe parl'existence soit de liens marchands, soit de lienspolitiques, soit de liens communautaires.Les liens marchands apparaissent par l'utilisa-tion de contrats ou de conventions et autres rè-gles informelles. Ils constituent une cohésionsociale par le biais de l'intérêt de l'échange debiens et services. Les liens politiques apparaissent par des règlespropres aux institutions créées afin d'établir unecertaine légitimité. La prise de décisions négo-ciées par un groupe légitime favorise la cohé-sion sociale.Les liens communautaires (sociétaires) apparais-sent lorsque certaines similitudes s'établissent(des différences et complémentarités pour lessociétés modernes). Ces caractéristiques peu-vent révéler une cohésion sociale source de so-lidarité.

C. Sens étymologique de la co-hésion sociale

Dans son sens étymologique, la cohésion se dé-finit comme étant la propriété d’un ensembledont toutes les parties sont intimement liées.Par analogie, autant on peut affirmer qu’en bio-logie où dans les organismes vivants, la cohé-sion d’un corps est assurée par les liens entre lesparties élémentaires (moléculaires), autant onpeut dire que la cohésion sociale est assurée parles liens entre les individus et les structures. Lacohésion sociale s’oppose donc au délitement,à la division. Les mots clé dans cette concep-tualisation sont donc «liens» et «unité». Partantde cette considération préliminaire on identifieplusieurs approches de définition de la «cohé-sion sociale»: 1) une définition fondée sur lesliens communautaires, 2) une définition repo-sant sur le partage de valeurs et l’appartenance,3) une définition selon la capacité d’agir ensem-ble.

D. Approche fondée sur lesliens communautaires

L’approche fondée sur les liens communau-taires aboutit le plus souvent à des définitionsénonçant la «cohésion sociale» comme étant «lapromotion de communautés stables, coopéra-tives et durables». Toutefois, on reproche à cetteapproche de faire abstraction de la qualité par-ticulière des liens de solidarité qui vont seconstituer dans une société cohésive. De plus,elle ne fait aucune référence à ce qui caractérisela stabilité, la coopération et la durabilité d’une

Cohésion Sociale et Développement Humain - 2010

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société des individus telle que cela apparaît au-jourd’hui dans les sociétés modernes.

E. Approche fondée sur le par-tage des mêmes valeurs et l’ap-partenance

L’approche fondée sur le partage des mêmes va-leurs et l’appartenance affirme que: «La cohé-sion sociale est le processus continuel dedéveloppement des communautés ayant des va-leurs partagées, des défis partagés et des oppor-tunités égales, basées sur l’espoir, la confianceet la réciprocité» (Social cohesion Network,selon Stanley, 2001). Ainsi, «La cohésion socialeimplique la construction de valeurs partagées etd’une communauté d’interprétation, réduisantles disparités en matière de revenus, et permet-tant généralement aux personnes d’avoir le sen-timent d’être engagés dans une entreprisecommune, partageant les mêmes défis et mem-bres d’une même communauté; [Cela suppose]une société qui offre des possibilités à tous sesmembres dans un même cadre de valeurs etd’institutions acceptées». Ainsi, «La cohésionsociale met l’accent sur les communautéscomme un tout, sur la participation et la gou-vernance, ainsi que sur les besoins des per-sonnes exclues».

Cette approche a largement inspiré les défini-tions officielles de plusieurs gouvernements eu-ropéens.

F. Approche fondée sur la capa-cité d’agir ensemble

Différentes définitions de la cohésion socialesont proposées dans l’approche fondée sur lacapacité d’agir ensemble dont celles qui:• met l’accent sur la cohésion sociale commeétat dans lequel un groupe de personnes (déli-mité par une région géographique, comme unpays) démontre une aptitude à collaborer afinde produire un climat favorable au changement;

• présente la cohésion sociale comme étant lacapacité des personnes à répondre de façon col-lective pour atteindre les résultats estimés etfaire face aux stress (positifs ou négatifs) éco-nomiques, sociaux, politiques ou environne-mentaux qui les affectent.En général, la définition simplifiée de la cohé-sion sociale donnée en milieu scolaire met l’ac-cent sur la situation d'un groupe fortementsolidaire et intégré avec des buts communs etune attraction des individus les uns par rapportaux autres et leur attachement au groupe. Cettecohésion favorise donc l'intégration des indivi-dus, c'est à dire la participation à un réseau derelations sociales qui confère aussi une identitépropre.Cependant, malgré la multiplicité de ces défini-tions et l’inspiration qu’elles provoquent auprèsde certains gouvernements, leur approche estcritiquée pour plusieurs raisons:

Elles privilégient davantage la conception mé-canique de la cohésion sociale et tendent à oc-culter la question clé de la diversité desconditions, d’intérêts et d’identités ainsi quetout processus consensuel non violent, permet-tant à des individus autonomes et différentsd’agir ensemble. Comme le souligne J. Rawls,elle fait abstraction du «fait de pluralisme»10.Rawls avertit que les individus dans les sociétésmodernes sont autonomes dans leur choix devie. Ainsi il privilégie le «processus d’accord»comme base de la cohésion sociale plutôt quele sentiment d’«appartenance à une commu-nauté». Pour lui le processus d’accord est le seulmoyen d’assurer la coexistence pacifique entreles membres de la communauté, dans l’exercicedes droits et de la participation. Une telleconception risque d’assimiler la cohésion socialeà l’absence de différences. Or, les sociétés d’au-jourd’hui, tant du monde développé que dumonde en développement, sont fortement ca-ractérisées par la pluralité d’intérêts et d’identi-tés.

L’Union Européenne conçoit la cohésion so-ciale dans une société moderne comme étant «la

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3010 Rawls, J., Political Liberalim, Columbia University Press, New

York, 1993, cité dans le guide méthodologique de l’Europe

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Cohésion Sociale et Développement Humain - 2010

Les spécialistes reconnaissent qu’il n'y a pas en-core d'indicateurs fiables de la présence, de laforce ou de la faiblesse de la cohésion sociale.Néanmoins, certains indicateurs statistiquespeuvent être utilisés comme indiquant une évo-lution des liens sociaux et des formes de cohé-sion dans quelques domaines des activitéssociales. Par exemple: formation et dissolutiondes couples (divorces); création d'associations;pratiques religieuses anciennes et nouvelles;nombre d'emplois précaires et de chômeurspour le monde du travail; évolution de la délin-quance et de la criminalité; etc. Nous proposonsde conceptualiser la mesure de la cohésion so-ciale selon deux approches: 1) une approche

complexe, 2) une approche simplifiée.

A. L’approche complexe

L’approche complexe que nous proposonss’inspire de la méthodologie proposée dans leguide européen de la cohésion sociale. Bien quese référant aux réalités de l’Europe de l’Ouestet de l’Est, cette méthodologie de mesure de lacohésion sociale présente une dimension relati-vement complète de mesure de la cohésion so-ciale. Mais la matrice présentée ici est guidée parla considération des réalités sociologiques et so-cioéconomiques des Comores.

2.2. Approches de mesure de la cohésion sociale

capacité de celle-ci à assurer, de façon durable,le bien-être à tous ces membres, incluant l’accèséquitable aux ressources disponibles, le respectde la dignité dans la diversité, l’autonomie per-sonnelle et collective et la participation respon-sable»11. En termes plus explicites on définitgénéralement la cohésion sociale comme un«ensemble de processus et mécanismes qui

contribuent à l’équilibre d’une société. Ces pro-cessus et mécanismes permettent aux individus,dotés de talents divers, de chances sociales dif-férentes et mus par des passions et des intérêtscontradictoires, de construire une société et devivre une vie collective»12.

31

11 Méthodological guide to the concerted develop-ment of social of social cohesion indicators, Conseil del’Europe, juin 2005, page 23. Voir ce document pourplus de détails et de commentaire sur ces définitions

12 Cohésion sociale et Reconstruction Nationale,RNDH 2004, République de Code d’Ivoire, page 5

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DimensionsPhénomèneà mesurer

Indicateur principalValeurs de l’indicateur par île

Comores Ngazidja Ndzouani Mwali

I- Equitédans lajouissancedes droits

1. Equitédans les re-venus

Inégalité de réparti-tion du revenu : in-dice de Gini(Source : EIM2004)

0.557 0.523 0.595 0.422

2. Equitéd’accès autravail

Taux de chômagede longue durée(source RGPH2003)

14.30% 19.90% 13.50% 14.20%

3. Equitédans lasanté

Espérance de vie àla naissance

65.5 69.2 66.8 63.6

4. Equitédans l’habi-tat

Population sans lo-gement du tout

- - - -

Population sans lo-gement de qua-lité :% des ménageslogeant dans deshabitations pré-caires

(RGPH  2003)

31.30% 10.80% 46.90% 73.20%

II- Dignité/reconnais-sance

1. Egalitéde recon-naissancedes sexes

Egalité des chancespour les hommes etles femmes

- - - -

Accès des femmes àdes hauts postes deresponsabilités(nombre defemmes)

2 0 2 2

2. Egalitéde recon-naissanceethnique etculturelle

Ghettos ethniques etreligieux

- - - -

3. Dignitédes per-sonnesâgées

Personnes âgées bé-néficiant d’une pro-tection sociale etfamiliale

- - - -

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Cohésion Sociale et Développement Humain - 2010

DimensionsPhéno-mène àmesurer

Indicateur principalValeurs de l’indicateur par île

Comores Ngazidja Ndzouani Mwali

III- Autono-mie/déve-loppementpersonnel,familial etprofession-nel

1. Suffi-sance derevenus

Proportion de ménages surendettés - - - -

Proportion des ménages vivant endessous du seuil de pauvreté(source EIM 2004)

36.90% 35.30% 38.40% 37.80%

2. Suffi-sance duniveaud’éduca-tion

Taux brut de scolarisation : tauxbrut de scolarisation dans le pri-maire (source : Tableau de bord2006-2007/ Ministère de l’Educa-tion Nationale)

95.90% 97.50% 91.40% 131.50%

Taux d’abandon à l’âge minimumde départ de l’école sans diplôme

3. Mobilitésociale

Succès scolaire pour les enfantsdes couches sociales défavorisées

- - - -

IV- Partici-pation/en-gagement

1. Partici-pation auxélections

Participation aux votes des 18- 34ans

2. Engage-ment descollectivitéspubliques

Part du budget dévolu aux ques-tions sociales :

38% - - -part du budget exécuté du secteursocial dans le budget total duPIP (source : PIP 2008)

3. Engage-ment desentreprises

Proportion des travailleurs handica-pés dans le secteur public et privé

4. Engage-ment descitoyens

Nombre d’associations communau-taires

204 118 41 45

Contributions au développementcommunautaire

5. Engage-ment et so-lidarité desfamilles

Pourcentage des personnes âgéesvivant dans les familles

Taux de dépendance 3.4 3.8 3.3 2.8

V- Respectetconfiancemutuelle

1.Confiancepartagée

Population ayant confiance dansles institutions

- - - -

2. Connais-sance par-tagée

Population ayant connaissance desdroits de l’homme et du droit à lajustice

- - - -

3. Tolé-rance etrespectd’autrui

Tolérance et respect des personneshandicapées

- - - -

Tolérance et respect des personnesmalades du VIH et autres maladies

- - - -

33

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Les informations statistiques recueillies (voir ta-bleau précédent) sur les aspects de la cohésionsociale appellent plusieurs observations. Lesfacteurs de décohésion sociale aux Comorespeuvent s’observer aussi bien en terme demanque que d’inégalité ou d’iniquité commel’indiquent les chiffres disponibles. Ainsi, onnote la présence de disparités et d’inégalités so-cioéconomiques qui influent négativement surla cohésion sociale.

Premièrement, en matière de répartition des re-venus, la valeur de l’indice de Gini estimée à0,557 en 2004 indique que les revenus ne sontpas équitablement repartis entre les ménages.Cette inégalité est importante tant au niveau na-tional qu’au sein des îles. A Mwali, où la pau-vreté est plus importante (incidence de pauvretéétant de 37,8% de l’ensemble des ménages) qu’àNgazidja, dont le niveau de pauvreté monétaireest de 35,3%, l’inégalité de répartition de reve-nus est relativement moins forte (avec un indicede Gini de 0,422).

Deuxièmement, la société comorienne enregis-tre un taux de chômage élevé qui aggrave la si-tuation de la décohésion sociale. D’autant plusque ce chômage est inégalement réparti entreles îles et au sein des îles engendrant des frus-trations et des défiances entre les communautésau sein de la population. A cet égard, on notequ’au niveau national 14,3% de la populationactive sont au chômage et ce taux de chômageest plus élevé à Ngazidja (19,9% de la popula-tion active) qu’à Ndzouani (13,5%) et Mwali(14,2%).

Ce problème de chômage a plusieurs consé-quences néfastes sur la vie socioéconomiquedes ménages. Il réduit le pouvoir d’achat de lapopulation active et limite la capacité à prendreen charge les inactifs (les enfants, les plus âgés,les handicapés…). On note, au niveau national,à travers le taux de dépendance, qu’un actif oc-cupé supporte en moyenne 3,4 personnes inac-tives ou au chômage et cette dépendanceéconomique est plus importante à Ngazidja (le

taux de dépendance étant de 3,8) que dans lesdeux autres îles (3,3 à Ndzuwani et 2,8 à Mwali).Troisièmement, des inégalités sociales sont ob-servées en matière d’accès à un logement dé-cent, les ménages vivant dans les logementsprécaires atteignant une proportion considéra-ble au niveau national (soit 31,3% de l’ensembledes ménages). Cette proportion déjà importanteà Ndzuwani (46,9%) atteint un niveau inquié-tant à Mwali avec un taux de 73,2%. Concer-nant l’île de Ngazidja, la situation estrelativement meilleure puisque seulement10,8% des ménages vivent dans les logementsprécaires.

En dernier lieu, des disparités sont observéesdans les secteurs sociaux de la santé et de l’édu-cation à des degrés différents.En matière de santé, l’espérance de vie accuseune nette amélioration passant de 55 ans dansles années 1980 à 65,5 ans au recensement de2003. On constate toutefois des disparités entreles îles. En effet, sur le plan de la santé l’île deMwali enregistre une espérance de vie de 63,6ans, conséquence d’une situation sanitaire plusprécaire dans cette île.En matière d’éducation, avec un taux brut descolarisation de 96% en 2006-2007 dans le pri-maire, le pays semble disposer d’une capacitéd’accueil acceptable pour ce niveau. Ce taux descolarisation élevé s’observe dans les trois îles.Toutefois, au sein des îles, des disparités impor-tantes existent notamment entre les milieux ru-raux et urbains.

B. L’approche simplifiée

L’approche simplifiée est celle de l’inclusion del’individu, mise en exergue par les analysesd’Amartya Sen et diverses études du PNUD.L’inclusion est le moyen approprié de donner àl’individu la possibilité de s’épanouir par la sa-tisfaction de ses aspirations essentielles, («lesfonctionnements»), c’est-à-dire être suffisam-ment nourri, être en bonne santé… en tantqu’éléments constitutifs du bien être, d’une part,mais aussi les «facultés» ou «capabilités» (tou-

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jours selon Sen) reflétant la liberté de poursui-vre ces derniers, et qui peuvent avoir un rôle di-rect dans le bien être, d’autre part, «puisquechoisir et décider font également partie de lavie» On retrouve ici une des idées fortes de Senqui accorde une place importante à «l’expé-rience sociale largement partagée et la partici-pation active d’une société, par l’égalitégénéralisée des possibilités et des chances de lavie qui s’offrent aux gens sur le plan individuel,et par l’atteinte d’un niveau de bien être élémen-taire pour tous les citoyens». L’inclusion socialeest donc fondamentale pour la réussite de la co-hésion sociale. De façon simplifiée, on peut uti-liser les indicateurs de bien-être tels que le tauxde pauvreté monétaire, le taux de pauvreté hu-maine, les indices d’inégalité monétaire et nonmonétaire, le taux de chômage, etc.

2.3. Les déterminants de la co-hésion sociale

Il existe plusieurs déterminants de la cohésionsociale parmi lesquels cinq retiennent l’atten-tion: l’intérêt collectif, l’équité et la justice, lagouvernance, la culture et la famille

A. L’intérêt collectif

Assurer le bien être à tous est l’objectif pour-suivi par tous les acteurs de la société. L’avène-ment de la crise mondiale actuelle a mis fin auxpréjugés sur le rôle séparé de l’Etat de celui desentreprises, des collectivités, des familles, etc.Par la cohésion sociale, tous ces acteurs concou-rent à la réalisation de l’intérêt collectif qui estle bien être de tous. Parce que l’objectif de co-hésion sociale invite chacun d’eux à jouer plei-nement son rôle en tenant compte del’interaction et de la complémentarité avec lesautres. Les actions de l’ensemble des acteurs dela société concourent à cet idéal commun.

B. Equité et justice

Grâce à la cohésion sociale, la capacité de la so-ciété à assurer le bien être à tous se fait par uneffort à minimiser autant que possible la discri-mination, et à maximiser l’équité et la justice.C’est le seul moyen de reconnaître à chacun sescompétences dans le respect de la dignité. La di-versité ethnique et culturelle est reconnue àtoutes les sociétés. Mais la justice, l’équité et lanon discrimination véhiculées par la cohésionsociale est le meilleur moyen de gérer ces diver-sités. La meilleure société cohésive est celle quia le mieux réussi dans la mise au point d’outilset méthodes pour prévenir et dissiper d’éven-tuelles tensions. Car, croire qu'une sociétéconnaissant des conflits sociaux est une sociétésans cohésion sociale est une erreur. La mani-festation et la gestion collective des conflits pardes mécanismes convenus et/ou légaux peuventmontrer au contraire la volonté de vivre ensem-ble, sans sécession (rupture définitive), maisdans un cadre de relations sociales différentesd’équité et de justice.

C. La gouvernance

Selon la Banque Mondiale, «La gouvernance estl’exercice de l’autorité par le biais de traditionset d’institutions formelles ou informelles, pourle bien commun. Elle englobe le processus desélection, de supervision et de remplacementdes gouvernements. Elle inclut aussi la capacitéde formuler et de mettre en œuvre des poli-tiques sérieuses et le respect des citoyens et del’Etat pour les institutions régissant les interac-tions économiques et sociales entre eux.» Pourla BAD c’est tout simplement «la manière dontles gens sont gouvernés et dont les affaires d’unEtat sont réglementées»13. De son côté, lePNUD définit la gouvernance comme étant«l’exercice de l’autorité politique, économiqueet administrative des affaires nationales à tousles niveaux.». Mais la bonne gouvernance c’estautre chose. C’est la transparence, le respect dudroit et des règles démocratiques dans la gestiondes affaires de l’Etat et des collectivités. Elle estle ciment de la cohésion sociale. En tant quecentre de gravité des compromis sociaux (régu-

3513 République du Congo, Gouvernance, Cohésion sociale et développe-ment humain durable en république du Congo, RNDH 2005, page 22

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lation économique et social), et arbitre du dia-logue social, l’Etat doit gérer les affaires du paysde manière à inspirer le maximum de confianceaux individus. Car la confiance mutuelle dansune société ethniquement et culturellement plu-rielle passe obligatoirement par la confiance enl’autorité de l’Etat. La bonne gouvernance gé-nère la conviction de participer et renforce lesentiment d’appartenance à l’ensemble cohésif.S’il est vrai que la plupart des institutions inter-nationales parlent de «bonne gouvernance», lePNUD utilisent plus le concept de «gouver-nance démocratique» qui se prête davantage àune articulation avec les objectifs du dévelop-pement humain, en général, et ceux de la cohé-sion sociale, en particulier.

Dans l’optique du développement humain,toute gouvernance n’est pas éthiquement accep-table. Dans le RMDH 2002, on peut lire que:«La gouvernance au service du développementhumain suppose notamment de pouvoir comp-ter sur des institutions et des règles efficientes,afin de promouvoir le développement en facili-tant le fonctionnement des marchés et en veil-lant à ce que les services publics soient dignesde ce nom en étant véritablement au service descitoyens, Mais elle suppose aussi de protéger lesdroits de l’homme, de favoriser une participa-tion plus large de la population aux règles et àl’élaboration des institutions qui influent sur lavie des individus et d’obtenir des résultats éco-nomiques et sociaux plus équitables. La gouver-nance au service du développement humain nevise donc pas seulement la réalisation de per-formances efficientes et équitables, mais veilleaussi à ce que les processus soient justes. Lagouvernance au service du développement hu-main doit être démocratique dans le fond etdans la forme et élaborée par et pour les indivi-dus» (RMDH 2002, p. 51-52). Une des origina-lités de l’approche du PNUD concernant la«gouvernance démocratique» réside dans la re-cherche nécessaire d’une adéquation de la gou-vernance en intégrant des facteurs relatifs à lapluralité des parcours historiques et à la diversitédes configurations socio-anthropologiques des

nations et des sociétés: «Les démocraties sontmultiformes: étant donné que les systèmes po-litiques varient, ils peuvent être diversement dé-mocratiques sur plusieurs fronts. […] Ladémocratie est le seul régime politique compa-tible avec le développement humain dans sonsens le plus profond, car, dans une démocratie,le pouvoir politique est accordé et contrôlé parle peuple sur lequel il s’exerce. La dictature laplus modérée imaginable serait incompatibleavec le développement humain, car ce derniersuppose que la population en soit pleinementpropriétaire. Il ne peut être accordé depuis enhaut» (RMDH 2002, p. 69). Une «gouvernancedémocratique» est donc une gouvernance danslaquelle il existe des mécanismes qui permettentau peuple de s’impliquer dans la gestion des af-faires de la cité. Cette implication crée en mêmetemps une situation favorable à la cohésion na-tionale, par l’affirmation d’une unité politico-ju-ridique et institutionnelle, et à la cohésionsociale, par la reconnaissance du droit de cha-cun à s’occuper des enjeux de bien commundans les domaines importants de la vie sociale(l’éducation, la santé, la culture, etc.).

D. Diversité culturelle: énigmede la cohésion sociale

Le débat sur la diversité culturelle en tant quedéterminant de la cohésion sociale est houleuxet loin d’être clos. Le pluralisme culturel a tou-jours fait référence à la présence de groupesayant des origines ethniques et raciales diffé-rentes (minorités nationales immigrés etc.),contrairement à la diversité culturelle tradition-nelle existant par exemple entre régions, entrezones rurales et urbaines, entre catégories pro-fessionnelles, entre religions, etc.

Aujourd’hui, le pluralisme culturel désigne lapluralité des valeurs, des styles de vie, des cul-tures, des religions et des langues propres à lasociété. Les défenseurs du pluralisme culturelrevendiquent l’égalité de traitement et l’accep-tation des différences culturelles des immigrés

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et des minorités nationales. Car ils estiment quec’est la meilleure façon d’assurer la cohésion so-ciale. Cependant, les opposants à la pluralité cul-turelle voient en la reconnaissance officielle dupluralisme culturel un danger pour l’unité del’Etat et la nation14.

Partant de là, du point de vue de la culture, onobserve deux approches de la cohésion sociale.La première consiste à bâtir la cohésion socialeet l’unité nationale en faisant couler les individusdans un «moule» socioculturel majoritaire, parun processus d’acculturation unilatéral, qui estsupposé leur faire perdre leur appartenance eth-nique et culturel au fur et à mesure qu’ils assi-milent et intériorisent la culture dominante. Cefut par exemple l’approche des pères fondateursdes Etats-Unis. La seconde approche vise àconstruire la cohésion nationale et la cohésionsociale en tenant compte de la diversité des cul-tures. Les identités singulières sont toujours to-lérées, parfois même publiquement reconnueset institutionnalisées. Dans les pays où elle estpratiquée, cette seconde approche est associéeà une politique qui vise à favoriser la cohésionsociale par l’élaboration de règles de vie com-munes et consensuelles essentielles. L’accepta-tion de la diversité et l’interaction entre lescultures permettraient ainsi la formation de re-lations sociales harmonieuses. La cohésion so-ciale se construit alors en reconnaissant la valeuret la pertinence de la diversité.

E. Organisation familiale etcommunautaire

Aux Comores, comme dans toutes les sociétésen voie de développement, africaines en parti-culier, l’individu s’identifie d’abord par son ap-partenance à la famille et à la communauté. Unefaçon implicite de dire que la cohésion socialeau niveau nationale commence d’abord dans lesfamilles et les communautés. Celles-ci sont ré-gies par des règles de relations entre les indivi-dus, les groupes sociaux, de manière à assurerla transparence et la justice dans la gestion des

affaires et la recherche de satisfaction des be-soins individuels et communautaires. «Chaquefamille est un maillon d’une communauté quiveille sur ses membres. Le respect des valeursde chaque famille contribue à perpétuer l’exis-tence même de la communauté….C’est grâce àla famille, à la lignée, au clan et à la tribu quel’on acquiert le sens de la communauté»15.

Ce tissu social très développé aux Comores,constitue un filet de sécurité et de cohésion so-ciale indéniable. Les associations de quartier, devillages sont de nos jours devenus des acteursclés dans la construction de la cohésion socialedans le pays. Elles sont devenues des centres dediscussions, d’élaboration de politiques écono-mique et sociale. Elles initient des projets de dé-veloppement communautaire, dont lapertinence a suscité l’intérêt d’organismes de fi-nancement comme c’est le cas du Fonds d’ap-pui au développement communautaire (projetFADC). Elles forgent des liens de solidaritéentre les individus, les familles, les quartiers etles villages.

Aux Comores, tout comme dans les pays afri-cains, la famille est toujours élargie aux frères etcousins de la mère et du père et des deux grandsparents. Par conséquent, la manière dont les re-lations intrafamiliales, interfamiliales, intra-com-munautaires et intercommunautaires sontstructurées, organisées joue un rôle déterminantdans la construction de la cohésion sociale àl’échelle nationale.

2.4. Relations entre cohésionsociale et développement hu-main durable

La corrélation entre «cohésion sociale» et «dé-veloppement» n’est pas établie. Ainsi, certainspays peuvent afficher de forts niveaux de déve-loppement sans toutefois connaître de bons ré-sultats en matière de cohésion sociale. Nousavons précisé plus haut que la préoccupation dela cohésion sociale s’est intensément affichée

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14 L’académie française vient de refuser l’institutionnalisation de la languecorse estimant que cela menace l’unité nationale de la France.

15 Cohésion sociale et reconstruction nationale, RNDH de Côte d’Ivoire 2004

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dans les pays hautement développés d’Amé-rique du Nord et de l’Europe. Inversement, lacohésion sociale peut s’avérer consolidée dansdes pays pauvres, voire extrêmement pauvres.Il convient de préciser que le développementest un terme très large. Le développement peutêtre industriel, matériel, agricole, institutionnel,organisationnel, militaire, etc. C’est la raisonpour laquelle le PNUD a formalisé le conceptde «développement humain», c'est-à-dire un dé-veloppement qui place l’homme au centre despréoccupations. Mais tout développement n’en-traîne pas automatiquement la cohésion sociale.D’un point de vue théorique, l’articulation entreces deux concepts passe par le fait de placerl’homme et les relations sociales au centre dudéveloppement. D’un point de vue pratique, ledéveloppement et la cohésion sociale ne peu-vent converger que par la définition d’une stra-tégie qui œuvre à raffermir les liens sociaux,d’une part, et par l’action quotidienne des col-lectivités qui partagent le même espace de vie,

d’autre part.

A. Evolution des indicateurs dudéveloppement humain et deleurs composants

Le graphique ci-après montre l’évolution deséléments constitutifs de l’IDH. Il offre ainsi lapossibilité d’identifier celui qui doit éventuelle-ment faire l’objet de politique particulière de co-hésion sociale dans l’effort au développement.De ce graphique, nous tirons deux leçons es-sentielles: La tendance de l’IDH est identique àcelle des indices de l’espérance de vie et du ni-veau d’instruction. Le comportement satisfai-sant de ces deux indices s’explique par l’impactdes efforts réalisés ces dernières années dans ledomaine de l’éducation et de la santé.

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1998 2000 2002 2004 2005

Espérance de vie générale 59.2 59.8 59.9 63.7 64.1

Femmes 60.6 61.2 62 65.8 66.3

Hommes 57.8 58.4 59.2 61.5 62

Taux d'alphabétisation général 58.5 55.9 56.5 56 56

Femmes 51.6 48.7 49.1 48.1 63.9

Hommes 65.5 63.2 63.5 63.5 63.9

TBS combiné national 39 35 38 38 46.4

Femmes 35 33 41 42 42

Hommes 42 38 50 50 50

PIB réel/habitant (PPA) 1 398 1 588 1 690 1 943 1 993

Femmes 974 1 136 950 1 306 1 337

Hommes 1 822 2 038 1 699 2 576 2 643

Evolution de l’IDH 0.508 0.533 0.53 0.56 0.561

Variation de l’IDH - 4.90% -0.60% 3.20% 2.60%

ISDH 0.503 0.505 0.51 0.55 0.554

variation de l’ISDH - 0.40% 0.10% 7.80% 0.72%

Tableau 4: Comparaison de l’ISDH des Comores avec celui des pays voisins

Source: Rapports mondiaux sur le DH, PNUD New York, diverses éditions

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B. Matrice relationnelle entrecohésion sociale et indices di-mensionnels de l’IDH

Le développement humain durable a pour pre-mier objectif d’assurer le bien être à tous lesmembres de la société, en se souciant de la sa-

tisfaction de leurs besoins fondamentaux. Lesdimensions couvertes par le calcul de l’IDH, àsavoir 1) être en bonne santé, 2) être instruit et3) disposer d’un niveau de vie décent à traversle revenu sont des facteurs qui participent à lacréation d’une situation favorable à la conver-gence du développement humain et de la cohé-sion sociale.

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Dimensions del’IDH

Actions de politique de cohésion sociale envisageables Acteur

Santé et cou-verture socialepour tous

Adoption d’une charte du patient hospitalisé

Etat

Disponibilité de médicaments génériques

Régulation et contrôle des prix des médicaments et des servicesde santé

Contrôle des investissements faits en matière de santé

Contrôle de la répartition géographique des structures et ser-vices de santé

Accompagnement des personnes à mobilité réduite Collectivités locales

Couverture socialeEntreprises

Prévention des accidents

Négociation pour une couverture sanitaire Syndicats

Intervention d’ONG dans la santéONG nationales et

internationales

Instruction/Cul-ture: Accès àl’éducationpour tous

Accroissement des dépenses publiques consacrées à l’éducation

Etat/Iles

Dispositions législatives sur le droit à l’éducation

Dispositions incitatives pour la scolarisation des enfants et desjeunes

Dispositions incitatives des enseignants pour aller travailler dansdes zones reculées

Valorisation des expériences pédagogiques nouvelles

Programme sur le développement des savoir-faire et savoir être

Dispositions positives pour l’éducation des groupes vulnérables

Généralisation de l’alphabétisation

Vulgarisation des émissions télé et radio sur l’ensemble du terri-toire nationale

Programmes de rencontre écoles/Université/entreprisesEntreprises/écoles/

Université

Négociations avec le ministère de l’éducation sur les conditionsd’enseignements

Syndicats

Soutien scolaire Ong

Revenu/Pouvoird’achat conve-nable pour tous

Dispositions constitutives et législatives pour revenu/salaire mini-mum garanti

Etat/Iles

Mesure politique pour le soutien au crédit

Contrôle strict des prix

Développement du microcrédit et des activités génératrices derevenus (AGR)

Prime à l’auto emploi

Soutien à la finance éthique associative et solidaire Collectivités locales

Aides aux personnes exclues

Conventions collectivesEntreprises/Mar-ché/Syndicats

Epargne salariale dans les fonds éthiques

Facilitation et médiation pour la mise en place de projet et l’ac-cès aux crédits

Collectivités lo-cales/Ong

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C. Cohésion sociale et inégalitéssexospécifiques

Un des piliers du DH étant la non discrimina-tion et la participation des instruments de me-sure des disparités ont été formalisés. Entreautres des indicateurs de mesure des inégalitéssexospécifiques (ISDH et IPF). L’ISDH est uneversion de l’IDH pondéré de l’inégalité entre lessexes. Par conséquent, les mesures de politiquede cohésion sociale envisagées précédemmentpour les dimensions de l’IDH sont valablespour l’ISDH, mais avec une attention particu-

lière pour la promotion de l’instruction desfemmes et leur accès au marché du travail. Enrevanche, on peut établir une deuxième matricerelationnelle entre les dimensionnels de l’IPF etles actions de politiques de cohésion sociale.

La préoccupation en matière de développementd’élargir l’appréhension de la problématique dela disparité à toutes les catégories sociales aconduit à mettre au point des techniques de me-sure des disparités pour l’ensemble des mem-bres d’une société: incidence de la pauvreté,Indice de Gini, etc.

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Dimensions de l’IPFActions de politique de cohé-sion sociales envisageables

Acteur

Part des Femmes. au ParlementEncouragement de l’implication des

femmes à la vie politiqueEtat/Partis politiques/Société civile

% de F. députés ou DirectricesDispositions incitatives pour l’inser-

tion professionnelle des femmesEtat/Partis politiques/Société civile

D. Opportunités et défis de lacohésion sociale

«Le développement humain est un processusqui conduit à l’élargissement des possibilités of-fertes à chacun»16. Or, le point commun auxnombreuses définitions de la cohésion socialequi précèdent est qu’elle doit faciliter l’inclusionet donner la possibilité à tous les membres dela société afin de participer librement à saconstruction. Le développement humain ne selimite pas à la création de capacités personnellespar le revenu, la santé, le savoir..., il englobeaussi des notions fondamentales telles que la «li-

berté politique, économique, sociale, la créati-vité, la productivité, le respect de soi et la ga-rantie des droits humains fondamentaux»17.Cependant, on a du mal jusqu’à présent à inté-grer ces dimensions dans les mesures du déve-loppement humain. La cohésion sociale est unmoyen de pallier cette insuffisance. La matricede mesure de la cohésion sociale intègre des in-dicateurs pertinents pour ces dimensions diffi-cilement quantifiables.

Le renforcement du capital social qui est un as-pect déterminant de la cohésion sociale influepositivement sur le développement humain. Eneffet, le capital social constitue l’ensemble des

16 Rapport Mondial sur le développement humain 1990, page 1017Même document, encadré 1.1, Qu’est ce que le développement humain, page 10

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liens et réseaux entre les personnes et lesgroupes sur le plan géographique ou profes-sionnel. En d’autres termes, c’est l’ensemble desrelations horizontales entre les individus appar-tenant au même groupe, qu’elles soient d’ordrefamilial, amical, ethnique, organisationnel ouprofessionnel. Or, nous avons montré, plushaut, que l’organisation familiale et communau-taire est un déterminant important de la cohé-sion sociale.

Pour les Comores, les liens de solidarité par as-sociations communautaires interposées (villa-geoises ou de quartiers), jouent un rôle décisifdans la réalisation des projets de développementlocal. Traditionnellement, ces liens et réseaux decohésion sociale offrent un cadre idéal pour larésolution de conflits éventuels par consensusmutuel d’une part, mais aussi, depuis quelquestemps, une opportunité pour une meilleure sen-sibilisation des citoyens aux enjeux de préserverl’environnement pour assurer une meilleure vieaux générations actuelles et des possibilités desurvies aux générations à venir, d’autre part. Lacohésion sociale joue ainsi pleinement en faveurd’une meilleure gestion et protection des res-sources environnementales et donc du dévelop-pement durable.

Mais ces opportunités ne peuvent réellementêtre saisies que si deux défis majeurs sont rele-vés:• Parvenir à semer, de façon indélébile, le senti-ment d’appartenance à un ensemble, à une na-tion, malgré les particularités régionales ouclaniques qui peuvent se manifester.• Parvenir à enraciner dans les mentalités et laculture collective la pertinence et la nécessité:1) de l’équité dans la jouissance des droits et lanon discrimination,2) de la dignité dans la reconnaissance mutuelledes diversités,3) du développement personnel et collectif,4) de la participation et de l’engagement.

A ce propos, il est légitime de s’interroger surla viabilité du système de double nationalitépour les citoyens des pays en développementqui apparait comme un leurre et un facteur dedécohésion sociale et nationale. En effet, il estdifficile d’avoir un sentiment d’appartenance àun ensemble composé de deux nations qui par-fois peuvent être en conflit du point de vue desvaleurs ou même des intérêts politiques et éco-nomiques ?

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Chapitre 3: Insularité et cohésion sociale

Le caractère insulaire des Comores ne devraitpas constituer un obstacle majeur à la cohésionsociale du pays. Mais des facteurs extérieurs liés,essentiellement à la décolonisation inachevéedes Comores par la France et à des méthodesde gouvernance inadaptées, arrivent à transfor-mer ces atouts en handicaps au point de com-promettre l’unité nationale et la cohésionsociale. Malgré le caractère insulaire du pays, ily a une proximité géographique, une populationhomogène pratiquant la même religion et par-lant la même langue (le shikomori). Les Co-mores renferment ainsi les éléments constitutifsd’une nation.

A. Origine commune

Les Comores sont un archipel dont la quasi-to-talité de la population a des origines communesissues d’un brassage entre africains, indonésiens,persans, arabes et malgaches selon des propor-tions qui peuvent varier d’une région à l’autre.De ce brassage est née une grande homogénéitéet une richesse culturelle faite de contes, dedanses, de mythes et de traditions séculairespour la plupart.

B. Une langue commune

Le shikomori est une langue parlée par tous lescomoriens. Proche du swahili et écrite en carac-tères arabes ou latins, il présente certes des va-riances d’une île à l’autre, voire d’une région àune autre, mais il reste compris par tous sur l’en-semble du territoire. Le shikomori est un des pi-liers qui permet d’assurer la cohésion nationale.

Le facteur de la langue comme élément de co-hésion sociale ou d’appartenance à une nationest sans doute pertinent mais doit être nuancé.On ne pourrait prétendre former une nation àpartir de la seule communauté de langue. Et in-versement, il existe, de part le monde, des na-tions multilingues.S’il est vrai que la langue peut être un facteurimportant de cohésion nationale et sociale, ellea aussi été utilisée comme argument par les par-tisans du séparatisme à Maore prétextant quedans cette île certaines populations de certainsvillages parlent malgache, pour conclure queMaore était complètement différente des troisautres îles.

C. Une religion commune

La religion joue un rôle important comme forcestabilisatrice de la société comorienne. L’Islam,religion dominante, constitue le ciment de la co-hésion nationale des Comores. L’école cora-nique, lieu de l’enseignement des principes del’Islam et des valeurs socioculturelles, forme lapersonnalité du comorien en même tempsqu’elle l’initie à la lecture du Saint Coran et àl’écriture en arabe. La mosquée, lieu de prière etde recueillement, prolonge la place publique etperpétue les règles de la société.

Les Comoriens, comme la plupart des croyants,ont toujours recouru à la religion pour calmerleur souffrance et prier Dieu pour pénaliser lesusurpateurs et autres ennemis présumés. Avantl’avènement de l’Islam dans l’Archipel, que lesarchéologues situent entre le VIIIe et le XIIIe

3.1. Insularité comme facteur de cohésion sociale

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Chapitre 3: Insularité et cohésion sociale

siècle de notre ère, les Comores auraient été ha-bitées par des païens. L’Islam est présentécomme une civilisation venue purifier les citéscomoriennes et donner une âme à leurs habi-tants.

Dès le XVIe siècle, les sultans firent de l’Islamla religion de tous les comoriens et contribuè-rent activement à sa diffusion dans les Comoresprofondes. Les Comoriens ont abandonné lespratiques magico-religieuses traditionnelles auprofit du monothéisme islamique. Il y eut, ce-pendant, la persistance d’une sorte de syncré-tisme religieux. En effet, tout en s’ouvrant aunouveau dogme, les Comoriens ont continué àobserver, par souci d’équité, certaines pratiquesqui n’ont rien de commun avec la nouvelle reli-gion. Certaines de ces pratiques subsistent en-core de nos jours.

A la fin du XIXe siècle, au moment de la péné-tration coloniale, on peut considérer que les Co-moriens étaient acquis à l’Islam. Les Colonssont assimilés à des infidèles venus essentielle-ment dans la région pour christianiser l’Archi-pel. Les Comoriens arrêtés et condamnés àl’exil, priaient avant de monter dans les bateauxpour conjurer le mauvais sort et maudire les mé-créants. A Wani (Ndzuwani), les gens organi-saient, au temps du Sultan Abdallah III (fin duXIXe siècle) des prières pour contester lesconfiscations foncières et la pénétration colo-niale18. En 1890, les notables de Ngazidja réunisà Kwambani, sur la prestigieuse place de Shan-gani Trengwe avaient juré par un hitma (ser-ment que l’on prête, en lisant intégralement lecoran) de destituer le Sultan Saïd Ali, soup-çonné de complicité avec la France coloniale19.

Malgré ces diverses réactions, la colonisationfinit par être imposée par la loi d’annexion de1912. Les sultans ont été forcés d’abdiquercontre une pension de retraite. Le décret de1914 rattacha l’Archipel au Gouvernorat colo-nial de Tananarive. L’Islam a renforcé la solida-rité naturelle des Comoriens et les a unis dansun combat commun, celui de la défense des va-leurs culturelles traditionnelles.

Il convient de préciser que dans la situation co-morienne le rôle de la religion dans la cohésionsociale est renforcé par l’unicité du Madhab(Imam Shafi) et de l’organisation des confrériessoufi telle que la Shadhuliyat, la Quadiriat et laRifaiinyat qui militent pour la fraternité etl’amour entre les mourides.

Pour illustrer cela il faut noter qu’au plus fortdu séparatisme à Ndzuwani, alors qu’aucun po-litique ne pouvait circuler les mourides de laShadhuliyat notamment pouvaient se rendre àAnjouan et ceux d’Anjouan pouvaient aller àNgazidja pour les grandes cérémonies commé-moratives telle que la mort du Qutub le vénéréCheikh Said Mohammad Al Maanrouf. Lesmourides étaient accueillis dans les familles mal-gré l’atmosphère de méfiance et de haine quiexistaient entre les ressortissants des deux iles.

Néanmoins, il faut noter la fréquentation moinsassidue des écoles coraniques traditionnelles parles enfants étant souvent surchargés de travaildans les écoles modernes. C’est d’ailleurs pourcette raison qu’a été entreprise au niveau du Mi-nistère de l’Education, l’expérience des Ecolescoraniques rénovées intégrées au système édu-catif officiel qui allient l’éducation religieuse,

18 Voir Pierre Vérin op.cit.19 Moussa Said op.cit.

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l’apprentissage du Coran et le programme offi-ciel des écoles publiques.

D. Une organisation sociale ori-ginale

La société comorienne est profondément com-munautaire et privilégie les rapports de solida-rité et le maintien de sa cohésion par denombreux rites auxquels tous participent selonun code reposant sur un système de valeurs,fondé sur l’honneur ou le droit d’aînesse. L’or-ganisation sociale est variable d’une île à l’autre.Alors qu’à Ngazidja, la société traditionnelles’est structurée sur la base d’une division trèsmarquée entre ceux qui ont fait le mariage cou-tumier (les notables) et ceux qui ne l’ont pas fait,à Ndzuwani le pouvoir local traditionnel estexercé le plus souvent par les élites du villageou bien ceux ayant exercé un mandat électif. AMwali prédomine le système de groupes d’âgeoù les générations nouvelles doivent respect etobéissance aux générations anciennes. Le co-morien est connu comme profondément atta-ché à ses collectifs d’appartenance: la famille,quartier, la lignée, le village, la région, l’île.

3.2. Insularité et crises politico-institutionnelles

Pour comprendre les crises politico-institution-nelles aux Comores, il est nécessaire d’incluredans l’analyse du problème plusieurs facteursqui déterminent, dans une certaine mesure, lasituation de la cohésion nationale, laquelle, à sontour, influence la cohésion sociale. Parmi cesfacteurs, on relèvera notamment la colonisation,le problème de Maore, la proclamation unilaté-rale de l’indépendance, les évènements qui ontmarqué la première période de l’indépendanceet l’instabilité politique.

A. Origines de la décohésion

sociale du pays

La formation sociale des Comores a été mar-quée par la division des iles et régions en com-munautés féodales, dirigées par des chefsguerriers territoriaux: Fe, fani et sultans. Les rè-gles de fonctionnement de ces entités de pou-voir étaient bien admises par la population,lesquelles privilégiaient la naissance, l’apparte-nance d’abord citadine et ensuite insulaire. Dansce dernier cas, les citoyens aspirant à la notoriétépublique devaient faire preuve de persévérancedans les joutes guerrières très fréquentes àl’époque et dont la finalité était la consécrationsociale et l’annexion de territoires. A l’époque,ces traditions régissaient équitablement les rap-ports entre les individus et les différents pou-voirs. Mais elles ont été fragilisées et perturbéespar les invasions des pirates malgaches auXVIIIe siècle et par les rivalités coloniales dansla seconde moitié du XIXe siècle20. Pirates etColons se sont ingérés activement dans les af-faires intérieures des Sultanats en se position-nant comme des acteurs de la vie politiquenationale. Ces ingérences ont été le prélude àl’occupation coloniale de l’Archipel qui s’estproduite en trois étapes: vente de Maore à laFrance en 1841 par le sultan malgache An-driantsoly, signatures d’accords de Protectoratavec les autres îles entre 1886 et 1887 et an-nexion de l’ensemble du pays à la France en1912. Les Comores furent rattachées à Mada-gascar de 1914 à 1946.

Chaque étape était marquée par des conflitsaigus entre colons et colonisés, dans la mesureoù l’appropriation des domaines féodaux et dupouvoir politique par les Colons, était la règle.Des aventuriers en quête de fortune ont imposédes traités aux sultans, dans des contextes poli-tiques particuliers. Ils exploitaient à leur profitles crises politiques qui menaçaient les pouvoirsen place. Les familles dépositaires du pouvoirsultanique (Djumbe) se sentaient par là, mena-cées et elles cédaient souvent aux appétits desuns et des autres à la recherche de protection.

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20 Voir Jean Martin (1983)

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Ces traités, une fois signés, permettaient aux co-lons de s’accaparer de la terre et de l’exploiter àleur propre compte. En retour, ils s’engageaientconfidentiellement à fournir des mercenaires re-crutés, à partir de l’Afrique de l’Est ou de Ma-dagascar, pour servir les régimes en place ou lesprinces qui cherchaient à reconquérir le trône.Une stratégie qui les mettait d’ailleurs en porte-à-faux avec leurs métropoles respectives. Ce futle cas de l’Americain Sunley à Ndzuwani, duFrançais Lambert à Mwali, Humblot à Ngazidjaet de Ciret à Maore21. Ces spoliations foncièrescontinuent encore de nos jours à peser sur la vieéconomique de l’Archipel et à dresser les com-munautés urbaines et rurales les unes contre lesautres. En effet, ces dernières tentent de se ré-approprier les terres des anciens colons. Les raz-zias malgaches et la colonisation ont doncouvert une ère de conflits, d’une part, entre lapopulation et les régimes en place et, d’autrepart, entre les régimes en place et les colons.Ainsi ces deux formes d’agression ont constituéun facteur important de déstabilisation et deconflits sociaux.

La suppression des Sultanats particuliers en1892, au profit d’un pouvoir centralisé entre lesmains d’un seul sultan, considéré comme acquisà la cause coloniale, allait être, en outre, à l’ori-gine de nombreuses tensions sociopolitiquesqui ont secoué le pays, depuis cette période,jusqu’en 1916. La colonisation a généralisé, no-tamment dans les zones urbaines, l’économiemonétaire, jusque là ignorée par la grande ma-jorité de la population. Pour faire fonctionnerles administrations mises en place, elle institua,en effet, un impôt par tête (lateti) qui allait rem-placer le kundza djumbe (graine du palais). Lekundza djumbe était un impôt sur les récoltesque les paysans du Sultanat étaient tenus de ver-ser aux Djumbe. Si les Comoriens avaient ac-cepté le premier impôt traditionnel en nature,,ils ont rejeté l’impôt par tête allant jusqu’à or-ganiser des frondes voire des révoltes contre lamilice indigène et les chefs de village chargés dele collecter.

Des révoltes furent orchestrées en 1902 àMwali, en 1915 à Ngazidja et en 1940 à Ndzu-wani, notamment dans la région du Nyumakele.En outre, les retards accusés dans les domainesscolaire et sanitaire le manque de réforme dansle secteur foncier alimentaient les surenchèresde toutes sortes et poussaient la population à ladésobéissance. Les résistances les plus signifi-catives furent celles du Mbude et du Dimani(1915). A l’origine de ces soulèvements, la col-lecte de l’impôt par tête. Le feu a été allumédans le Mbude et s’est généralisé dans le Dimaniassimilé à une résistance contre le régime colo-nial naissant à cause de son impact. Dans le Di-mani, la France a fait intervenir, dans larépression de la rébellion, des gardes indigènesvenus de Madagascar. Massimou, un guerrier deDimani, ainsi qu’une bonne partie de ses com-pagnons y ont laissé leur vie. D’autres, commeIpvesi Mgomdri dit Bungala, poète-chanteur derenom originaire de Shomoni dans le Washili,ont été arrêtés, jugés d’abord à Maore et dépor-tés ensuite à Madagascar.

La situation sociale créée par la présence colo-niale qui a exproprié les autochtones de leursterres, visiblement à l’origine des conflits so-ciaux jusqu’à l’après-guerre, n’ont pas toujourstrouvé de réponse dans les réformes initiées parl’administration. Ce malaise n’a cessé de s’inten-sifier et les manifestations politiques des années1950 et 1960 n’ont pas atteint leurs objectifs.Car les quelques élites locales se préoccupaientbeaucoup plus du partage de sièges dans lesnouvelles institutions que des questions sociales.

B. La genèse et le développe-ment du problème de Maore

L’instabilité aux Comores est étroitement liée àl’amputation de Maore par la France, anciennepuissance colonisatrice. Maore fait partie de l’ar-chipel des Comores depuis des temps immémo-riaux. Nombreux sont les livres et documentshistoriques qui attestent cette appartenance. Lessultanats avaient des liens très forts notamment

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21 Voir Pierre Vérin (1994)

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du fait des rapports de cousinage entre les sul-tans qui se succédèrent à leur tête. L’interven-tion de la France dans l’ensemble des Comorescommence au milieu du 19ème siècle, alors queles quatre îles furent le théâtre de nombreux af-frontements entre sultans locaux. C’est dans cecontexte que la France réussit le 25 avril 1841,à imposer un traité de vente de l’île de Maore àun sultan d’origine malgache, Andriantsoli, quivenait de s’emparer de l’île en évinçant le sultanlocal et qui craignait d’être renversé à son tour.La vente est conclue en échange d’une aide mi-litaire française, d’une rente annuelle de 1000piastres (ou 765 euros actuels) et l’éducation desenfants d’Andriantsoli dans l’île de la Réunionaux frais du gouvernement français. En réalité,la marine française avait besoin d’un port im-portant à l’entrée du canal du Mozambique,après la perte de l’ile Maurice conquise par lesAnglais. Le Traité de 1841 présenté comme unbanal traité commercial, constituait une vérita-ble vente forcée. C’était, pour la France, unequestion de stratégie: il fallait occuper le plus deterritoires possibles afin d’empêcher les Anglaiset les Allemands de les conquérir. Le roi LouisPhilippe entérina cette acquisition de Maore en1843. L’ensemble de l’archipel est placé cinq an-nées plus tard, en 1848, sous l’autorité du gou-vernement colonial français basé à Maore, puistombe sous le protectorat français en 1886. Leprotectorat durera jusqu’en 1892 et laisse unpeu plus tard place à la colonie de «Maore et dé-pendances» rattachée par la loi du 25 juillet 1912à l’île de Madagascar. Après deux révoltes im-portantes, l’une à Ngazidja en 1915 et l’autre àNdzuwani en 1940, les Comores obtinrent en1946 une autonomie administrative et la ville deDzaoudzi fut choisie comme capitale du Terri-toire. A partir de 1946, les Comores furent dé-tachées de Madagascar et furent représentéesdirectement au Parlement français. La puissancecoloniale, la France, a constamment administrél’archipel en respectant son unité géographique,sociale, culturelle et politique. Aussi, chaque foisque le législateur ou le pouvoir réglementairefrançais est intervenu, il l’a fait en considérantque l’archipel des Comores constituait une en-

tité unique, composée de quatre îles. Jusqu’en1974, avant le référendum pour l’indépendance,toutes les lois et dispositions adoptées par legouvernement français et relatives à l’évolutiondu statut administratif et politique de l’archipeldes Comores se sont conformé à cette unité.Ainsi, la communauté internationnale aconstamment considéré les Comores commeétant une entité territoriale unique colonisée parla France.

Les velléités séparatistes maoraises datent del’année 1958, lorsque l’Assemblée territorialevote le transfert de la capitale de Dzaoudzi àMoroni. Cette décision mise en applicationentre 1960 et 1966, entraîne le mécontentementdes habitants de l’île. Ce transfert fait perdre desemplois et éloigne plusieurs cadres maorais deleur famille. A l’origine, le transfert devait êtresuivi d’une compensation économique pourl’île. Le transfert de la capitale de Dzaoudzi versMoroni, et plus particulièrement des servicesdes finances, entraîne un vide qu'il fallait com-bler au plus vite car il n'y avait plus de travail surplace. La population se trouve démunie du jourau lendemain. Pour pallier le manque, plusieurspropositions sont également faites au gouver-nement comorien, notamment l’installationd’un détachement de la marine nationale àDzaoudzi et la compensation économique pré-vue. Le non respect de ces engagements et levide laissé par ce transfert amène un fort res-sentiment dans l’île. Le gouvernement como-rien, au lieu de prêter une oreille attentive auxsollicitations des habitants, raidit sa position etchoisit l’arbitraire en renvoyant les fonction-naires maorais dans leur île d’origine pour allercalmer la population, et en n’entamant aucunenégociation avec les élus. La frustration et lesentiment d’avoir été spoliés se sont installéschez les habitants de l’île. C’est ce qui expliquela réaction violente des femmes mahoraises, ce2 août 1966, lorsque le président du Conseil deGouvernement, Said Mohamed Cheikh se renden visite dans l’île. Il est reçu par des jets depierres. Le mouvement de contestation est di-rigé par Zeina M’Déré (expulsée de Madagascar

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par le gouvernement de Tsiranana), ZainaMeres et Marcel Henry, un métis franco-mal-gache natif de l’île Sainte-Marie (île restée liée àMadagascar accédant à l’indépendance, alorsque ses habitants y étaient en majorité hos-tiles…). Après cet incident le président SaidMohamed Cheikh décide de ne plus remettreles pieds à Maore, de son vivant. La populationde l’île, de son côté, se radicalise et devient sen-sible au discours séparatiste. A la Chambre desDéputés, les élus maorais ne manquent aucuneoccasion pour évoquer leur souhait de se déta-cher de l’archipel de façon à pouvoir gérer leurpropre budget. En réalité, ils recherchent toutsimplement que le gouvernement français ac-corde à l’île une autonomie financière.

C. L’indépendance unilatérale

Au cours des négociations pour l’accession àl’indépendance des Comores, les revendicationsdes séparatistes sont déboutées. La déclarationcommune du 15 juin 1973 dite «les accords du15 juin», signée par Bernard Stasi, ministreFrançais des DOM-TOM et Ahmed AbdallahAbdérémane, président du Conseil du Gouver-nement, reconnaît officiellement la vocation desComores à l'indépendance. Elle prévoit quecelle-ci prendrait effet dans un délai maximumde cinq ans, provoquant la colère des partisansde la séparation de Maore de l’ensemble como-rien et attisant leur haine à l'égard des «serrez-la-main» (les personnes qui se prononcent pourl’appartenance de Maore à l’ensemble comorienindépendant). Le vote intervenu le 27 juin 1975devant l’Assemblée Nationale française donneun signal fort aux partisans du mouvement sé-paratiste maorais. En effet, au cours de ce vote,le Secrétaire d’Etat aux DOM-TOM, OlivierStirn, et la majorité du parlement français réunieautour du Président Giscard d’Estaing, décidepar un amendement à la loi sur l’indépendancedes Comores, que la future constitution de l’ar-chipel doit être soumise à chaque île séparémentet ne sera appliquée que là où elle aura été ac-ceptée. Le député de Maore, Marcel Henry, de-mande au lendemain du vote du 27 juin, que

Maore soit placée «sous la protection de laFrance». L’amendement du ministre OlivierStirn est d’autant plus inacceptable pour les Co-moriens que lors de la consultation du 22 dé-cembre 1974, ils ont répondu «oui» à 93% ets’attendent à ce que l’intégrité territoriale de l’ar-chipel soit respectée. Pour justifier la tentativede garder Maore sous son statut colonial, le Se-crétaire d’Etat à l’outre-mer met en avant sa dé-cision de respecter «la volonté exprimée par lespopulations». Il dit être «attaché à faire respecterle principe de l’autodétermination». La décisionfrançaise de revenir à la partition de l’archipelpousse Ahmed Abdallah Abdérémane à pren-dre une position tranchée. Celui-ci comprendtrès vite que le lobby soutenant la sécession ma-horaise est fort. Il est en passe de réaliser la sé-cession de Maore. Alors, pour faire barrage à ceprocessus, la chambre des députés des Comoresvote l’indépendance unilatérale des Comoresproposée par le conseil du gouvernement duterritoire dirigé par Ahmed Abdallah Abdéré-mane le 06 juillet 1975. Suite à cela, la France adécidé de maintenir son administration sur l’îlecomorienne de Maore, ce malgré la réprobationunanime de la communauté internationale. Eneffet, l’ONU admet en son sein le 11 novembre1975 le nouvel Etat comorien dans ses fron-tières héritées de la colonisation, incluant doncMaore.

D. Aggravation des problèmesdu pays après l’indépendance

La principale conséquence immédiate de la dé-claration unilatérale d’indépendance est l’aggra-vation du différend franco-comorien autour deMaore qui reste la toile de fond de l’histoirepostcoloniale de l’archipel et la base arrière del’instabilité chronique que connaît le pays. La viepolitique comorienne est ponctuée d’événe-ments qui sapent toute tentative d’assumer l’in-dépendance acquise, créant une instabilitépolitique et des changements institutionnels fré-quents. Comme partout dans l’histoire de la dé-

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colonisation française, c’est la résistance popu-laire qui a poussé la France à mettre fin à la co-lonisation des Comores. Elle a eu quand mêmele temps de nouer les maillons du filet qui luipermet de maintenir sa domination malgré laproclamation de l’indépendance. De ce fait,l’Etat français continue depuis 1975 à faire fides condamnations unanimes et répétées à tra-vers les résolutions pertinentes des NationsUnies, de l’Union Africaine, des Etats de laLigue Arabe qui ont reconnu l’indépendancedes Comores dans ses frontières héritées de laColonisation.

Dans le cas d’espèce, on ne peut que conclure àl’illégalité de l’action de la France au sujet del’occupation de Maore. Pour Jean Martin22, quiexprimait il n’y a pas si longtemps son sentimentà RFO Mayotte23, «Il y a un principe fondamen-tal de l’Organisation Africaine qui est l’intangi-bilité des frontières coloniales. Comme vous lesavez, en Afrique, les Etats se sont formés dansles frontières qui avaient été celles de défuntescolonies et les dirigeants africains ont eu pourprincipe, à quelques exceptions près, de respec-ter cette règle fondamentale. On ne peut que lesapprouver, autrement ils auraient précipité lecontinent africain dans des guerres à n’en plusfinir s’ils avaient voulu revenir sur les frontièrestracées arbitrairement, il est vrai par le coloni-sateur. Mais toute frontière est arbitraire. On ditaussi qu’en Afrique continentale, il y a des tri-bus, des ethnies séparées par des frontières ar-bitrairement établies par les colons. Maiscroyez-vous qu’en Europe on n’observe pas lamême chose ? Croyez-vous qu’il n’y pas deBasques des deux côtés de la frontière franco-espagnole, qu’il n’y a pas de Catalans des deuxcôtés de la frontière franco-espagnole, qu’il n’ya pas de Flamands dans le territoire français etdans le territoire de la Belgique ? Et ainsi desuite, on pourrait multiplier les exemples. Toutefrontière est une convention arbitre.» Et plusloin, «…ce n’est pas le cas pour Maore, car lecolonisateur était le même.»

Pour ceux qui veulent séparer l’histoire de

Maore de l’ensemble de l’Archipel des Co-mores, la même source indique que «c’est cer-tainement une erreur de vouloir étudier Maoreséparément des trois autres îles Comores. Il estévident qu’il y a une grande analogie linguis-tique, culturelle, historique entre Maore et An-jouan, Mohéli et Grande-Comore. Même si lerégime politique de Maore est différent, Maoreest une île des Comores.»

En 2006, un général de l’armée française justi-fiait la présence de la France dans l’Océan In-dien notamment à Maore par rapport à laprésence des autres puissances dans cette zone.Il s’agit d’une position géostratégique pourcontrôler le passage des tankers acheminant lepétrole de l’Orient vers l’Occident. Certes, lecheminement des Comores vers le choix de l’in-dépendance n’a pas échappé à la France qui adonc organisé là, d’une manière ou d’une autre,la sécession de Maore.

Les pratiques des différents gouvernementsfrançais ont été pour le moins ambigües, depuisValéry Giscard d’Estaing jusqu’à Jacques Chirac.La politique de Nicolas Sarkozy et le référen-dum du 29 mars 2009 à Maore confortent cetteanalyse et ne promettent pas un avenir meilleurdans le règlement du différend. De ce point devue, les autorités françaises n’ont jamais pro-posé de solutions alternatives permettant un rè-glement négocié de ce contentieux quicontinuera à envenimer les relations entre Mo-roni et Paris et à dresser les Comoriens les unscontre les autres sapant ainsi les bases mini-males pour une cohésion nationale. Il faut ce-pendant noter une déclaration toute récente duprésident de l’Union des Comores, Ahmed Ab-dallah Mohamed Sambi, proposant du haut dela tribune des Nations Unies de louer Maore àla France pour une période déterminée moyen-nant la reconnaissance officielle par la Francede l’appartenance de Maore à l’Union des Co-mores et des investissements massifs dans lestrois autres îles. Ces investissements sont sup-posés rehausser le niveau de vie dans les troisîles et faciliter ainsi le retour effectif de Maore.

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22Jean Martin, entretien avec le professeur, RFO. Mayotte 16/02/2009 (rfo.mayotte.fr)23 Radio France Outre mer

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Cette proposition est vite rejetée par la France.

La décision de la France de maintenir Maoredans son giron est préjudiciable au développe-ment socio-économique et politique des Co-mores. L’île de Maore, base arrière dumouvement séparatiste des années 1990, est de-venue un pôle de déstabilisation permanente dela République des Comores. Une situation po-litique qui est exploitée à fond par l’extrêmedroite française qui voit là, une manière d’as-seoir dans cette partie du Monde, la grandeurde la France. Parallèlement, le bras de mer sé-parant Maore de Ndzuwani large d’une cin-quantaine de kilomètres, voit pérircontinuellement un grand nombre de Como-riens qui tentent de regagner Maore sur des em-barcations de fortune, les fameusesKwassa-Kwassa. On estime à plusieurs dizainesde milliers de morts les victimes des naufragesà répétitition de ces embarcations depuis l’indé-pendance notamment après l’instauration duvisa Balladur en 1994.

Les échecs répétés des politiques de développe-ment engagées et l’état d’extrême pauvreté dela population de certaines régions des trois au-tres iles renforcent le ressentiment contre les au-torités comoriennes et la détermination de ceuxqui se livrent à l’émigration vers Maore en es-pérant y trouver un échappatoire à la misère.Mais les candidats à l’aventure maoraise et leursfamilles sont souvent victimes de traumatismesphysiques, et de pertes de leurs biens et patri-moines et vivent les séquelles d’un désarroimoral très profond.

Les programmes de développement des diffé-rents gouvernements qui se sont succédés auxComores depuis 1975 n’ont pas permis un pro-grès notable à cause de problèmes de gouver-nance de toute sorte. Dans ces conditions, lestrois autres îles ont du mal á convaincre lesMaorais de la pertinence de leur retour dans legiron comorien et à combattre la politique sé-cessionniste des dirigeants maorais. En re-vanche une forte propagande et une stratégie

politique habile des autorités françaises contri-buent à faire oublier aux autorités comorienneset à la population, l’appartenance de Maore à lanation comorienne.

L’occultation du cas de Maore dans les discoursofficiels et les statistiques nationales semble ava-liser le fait accompli de l’occupation de cette ilecomorienne par une Puissance étrangère alorsque cette situation constitue un facteur majeurde décohésion nationale et sociale. Des famillesentières sont déstabilisées par les femmes oudes maris tentés par l’aventure Mahoraise quiquittent le foyer conjugal sans être divorcés etqui dans le meilleur des cas se remarient àMaore en dépit de la loi musulmane. Pour ce quiest de la décohésion sociale, on peut citer le casdes enfants expulsés de Maore car «sans pa-piers» et qui sont ainsi obligés d’interromprel’école et de vivre loin de leurs parents restésdans l’ile occupée, l’exemple reste aussi vraidans le cas où ce sont les parents qui sont ex-pulsés.

E. Les coups d’Etat

Un mois après la déclaration unilatérale d’indé-pendance du 6 juillet 1975, un régime révolu-tionnaire s’installa au pouvoir par un coupd’Etat qui allait être suivi par plusieurs autres.Depuis, le pays est entré dans l’engrenage del’instabilité politique passant de coup d’Etat encoup d’Etat qui n’a fait que fragiliser la cohésionnationale ainsi que la cohésion sociale. Ils plon-gent le pays dans une instabilité chronique, etbafouent les libertés politique et économiquefondamentales.

En 1995, l’histoire s’est répétée comme au mo-ment de la pénétration coloniale. Le troisièmecoup d’Etat fomenté dans notre pays par lemercenariat avec á sa tète le tristement célèbreBob Denard a été suivi par la déportation duPrésident de la République à l’île de la Réunion.La population, choquée, a condamné cet acte,mais a dû subir les conséquences néfastes desjeux politiques des unes et des autres. Depuis

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lors, on observe une certaine désaffection en-vers la classe politique. Pendant ce temps, les sé-paratistes maorais continuent à prendre leurdistance et utilisent cette instabilité comme ar-gument pour asseoir la balkanisation de l’Archi-pel.

En 1999, les militaires, conduits par Azali As-soumani, prétextant l’échec de la conférenced’Antananarivo qui devait trouver une réponseau séparatisme anjouanais, ont remué le couteaudans la plaie. Ils ont renversé le gouvernementlégitime et instauré un régime autoritaire rapi-dement isolé à l’intérieur comme à l’extérieurdu pays. Il a fallu l’implication des instances in-ternationales pour que l’ordre constitutionnelpuisse être rétabli trois ans après.

Ces coups d’Etat ne faisaient que repousser lesproblèmes importants de la jeune républiquesans les résoudre. En effet, les conséquences ensont qu’aujourd’hui la population se détournede plus en plus de la politique. Ainsi, lors desélections, certaines personnes n’hésitent pas àéchanger leur suffrage contre de l’argent oucontre des biens matériels.

3.3. La double crise politique etinstitutionnelle de 1997

En 1997, les Comores ont été confrontées à unecrise grave, une double crise exacerbée par la sé-cession de l’île de Ndzuwani. Sous la houlettede nombreux politiciens de l’île, Ndzuwani pro-clame sa séparation d’avec les autres îles sœursde l’archipel. L’île s’arroge et exerce unilatérale-ment les pouvoirs exécutifs, législatifs et judi-ciaires. Le mouvement séparatiste est organiséavec l’appui délibéré de lobbies français installéà Maore. Les mutins proclament l’indépendanced’Anjouan lors d’un grand meeting organisé àcet effet Cette situation met à mal l’Etat como-rien. Surpris par l’évènement, les autorités na-tionales ont d’abord du mal à prendre uneposition claire sur la situation. Après quelquesjours de torpeur, elles engagent sans succès des

négociations politiques avec les séparatistes. Cetéchec conduira les autorités centrales, à ordon-ner un débarquement de l’armée nationale àNdzuwani. L’échec de cette intervention ag-grava la situation et laissera des séquelles au seindes forces armées.

Cette sécession de l’île de Ndzuwani a entraînéle pays dans une longue période d’incertitudespolitiques et institutionnelles qui a menacéjusqu’à l’existence même des Comores, en tantqu’Etat nation. Au terme de longues négocia-tions entre les différentes parties comoriennes,en présence des représentants de la commu-nauté internationale, un processus de réconci-liation nationale a été amorcé, avec la signaturede l’Accord Cadre de Fomboni intervenu le 17février 2001(voir l’encadré «Cohésion sociale etcohésion nationale» ci-contre).

La constitution de 2001, issue de l’Accord deFomboni, a consacré le fait insulaire au lieu dechercher à renforcer l’unité du jeune Etat. Dansl’esprit de certains hommes politiques, l’auto-nomie des îles n’a rien à avoir avec une politiqued’aménagement du territoire pour assurer undéveloppement harmonieux du pays. Pour eux,il s’agit surtout de se faire une place à travers larépartition des postes de responsabilité. Le dé-voiement de l’autonomie des îles à érigé ces der-nières en mini-Etat et entraîné une pléthored’institutions budgétaire et un népotisme tousazimuts.

Les propos qui précèdent tendent à montrerque les Comores n’en ont pas fini avec l’insta-bilité politique et institutionnelle dont les causessont à rechercher depuis la période coloniale.La décolonisation inachevée des Comores estaujourd’hui un facteur essentiel de décohésionnationale. Autrement dit, à l’heure actuelle, lepays se trouve encore dans l’œil du cyclone, etdans cette situation pour le moins inconforta-ble, les problèmes relatifs à la cohésion natio-nale et à la cohésion sociale restent à résoudre.

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COHÉSION SOCIALE ET COHÉSION NATIONALELa cohésion sociale est le processus de gestion des relations sociales prises dans des contradictions et des conflits insolublesdans l’absolu dans le but de prévenir la désagrégation des liens sociaux. La cohésion nationale désigne, quant à elle, leprocessus par lequel des liens de coexistence mutuelle se forment et se consolident entre toutes les parties constitutivesde la nation. L’expérience récente du séparatisme aux Comores a révélé combien la relation entre ces deux concepts estforte et complexe.

Une situation de cohésion ou de décohésion sociale peut avoir des conséquences au niveau national. En effet, les facteursde décohésion sociale sont aussi, au moins potentiellement, des facteurs de décohésion nationale. Aux Comores, ce sontles conditions de vie précaires qui ont conduit, selon un processus complexe, à l’accentuation du séparatisme anjouanaisen 1997. Le séparatisme a constitué un facteur de décohésion nationale puisque l’existence de la nation comorienneétait clairement en jeu jusqu’à la signature de l’Accord Cadre de Fomboni en 2001. La crise politique qui a fragilisé lacohésion nationale est liée à la crise sociale qui précarise les conditions de vie de la majorité de la population tout encreusant les inégalités sociales. A Ngazidja, la précarité des conditions de vie de la majorité de la population a participéà la création d’un sentiment de frustration sociale. La volonté, habituelle dans de telles circonstances, de trouver unbouc émissaire a conduit à des oppositions entre les communautés d’origine grand-comorienne et anjouanaise. Mal géré,ce conflit social a conduit à la désagrégation des liens sociaux et a été instrumentalisé politiquement au point de créerdes antagonismes entre des parties (les îles en tant que réalité juridique et institutionnelle) constitutives de l’Union desComores. Ainsi, s’il est vrai que la pauvreté n’induit pas mécaniquement un effet de décohésion sociale, les inégalitéssociales qui accompagnent souvent la paupérisation créent, néanmoins, une situation favorable à la fois à la décohésionsociale et nationale.

Cependant, la situation de décohésion nationale occasionnée par le séparatisme a, sans conteste, produit des effets dedécohésion sociale. Il est vrai que le séparatisme, expression d’une décohésion nationale en acte, a exacerbé les parti-cularismes insulaires et le repli sur soi au détriment des facteurs de cohésion de l’Union des Comores. La détériorationde la cohésion sociale, est due au repli sur soi. Elle contrarie la solidarité et la tolérance nécessaire pour contenir leseffets de décohésion sociale susceptibles d’être générés par la pauvreté couplée à l’aggravation des inégalités sociales.Autrement dit, le séparatisme (manifestation particulière de la décohésion nationale) empêche l’émergence d’une dy-namique collective durable en faveur de l’amélioration des conditions de vie de la population.

Du point de vue d’une démarche de développement humain, l’enjeu essentiel est d’inventer un mode d’articulation entreles facteurs de cohésion sociale et les facteurs de cohésion nationale. En positionnant l’individu et le groupe social commeprotagonistes du changement social et en en faisant la référence et la finalité ultime du développement, l’exigence dela satisfaction des besoins de vie serait de nature à favoriser l’articulation de la cohésion sociale et de la cohésion natio-nale.

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Chapitre 4: Conséquences des crises politico-institutionnelles sur la cohésion sociale et

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L’Union des Comores est confrontée à des pro-blèmes de gouvernance sous plusieurs aspects:politique, administrative et économique. Cesproblèmes constituent des déterminants ma-jeurs de la persistance de la pauvreté et du sousdéveloppement du pays. S’il est bien vrai que laqualité de vie s’est quelque peu améliorée avecles avancées socio-économiques et technolo-giques, l’instabilité politique continue de freinerle développement économique.

A. Conséquences sur la gouver-nance politique

Depuis son indépendance, l’Union des Co-mores est entrée dans une spirale de crises et deconflits politiques qui ont porté un coup sévèreà sa stabilité intérieure et nuit à son image à l’ex-térieur. Cette situation est caractérisée par undysfonctionnement de l’appareil étatique, unecroissance économique médiocre et des perfor-mances limitées en matière de développementhumain entraînant des flux migratoires impor-tants. Les régimes politiques successifs, à uneexception près, ont fait preuve d’une faible cul-ture démocratique et d’une incapacité à amorcerun développement réel du pays. La conséquenceest que l’Etat est actuellement confronté à l’ab-sence d’institutions efficaces pour garantir undéveloppement économique et social harmo-nieux. Le système de gouvernance politiquesouffre d’un manque de vision à long terme no-tamment dans le développement social; ce quis’est traduit par un système de planification dudéveloppement limité à moyen terme.

a. Les changements constitutionnels

En trente-quatre ans d’indépendance, les Co-mores ont connu cinq constitutions différentesainsi qu’une charte constitutionnelle édictée parles militaires en 1999. La première constitutiona été élaborée par le régime d’Ali Soilihi. Le ré-gime révolutionnaire d’Ali Soilihi met la décen-tralisation au cœur du développement. En effet,le principe de l’Etat comorien est le pouvoirlocal (art. 4) en précisant que les organes cen-traux …ne traitent que des questions présentantun intérêt commun pour l’ensemble de la po-pulation de l’archipel. Il a été aussi souligné lerespect de l’autonomie de gestion des diffé-rentes collectivités locales et régionales. Cetteconstitution n’a pas été appliquée car condition-née à un référendum de ratification après la li-bération de Maore. Cette constitution nereconnaissait pas explicitement les partis poli-tiques ni les syndicats.

Après le coup d’Etat 03 mai 1978 qui a mis finau régime d’Ali Soilih et entraîné le retour duprésident Ahmed Abdallah Abdérémane, unenouvelle constitution a été élaborée et adoptéele 1er octobre 1978. Cette constitution instaureune République Fédérale Islamique des Co-mores dans laquelle chaque île constitue une en-tité territoriale autonome qui s’administrelibrement par l’intermédiaire de ses organes, leGouverneur et le Conseil. La commune est lacollectivité territoriale de base.

Une révision constitutionnelle a été réalisée en1982 portant notamment sur le mode de dési-

4.1. Conséquences sur la gouvernance politique, ad-

ministrative, économique et sociale

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gnation des gouverneurs qui seront désormaisnommés et non élus. Cela va limiter considéra-blement la portée de cette constitution et créerle terreau des mouvements séparatistes insu-laires. La première constitution (celle d’Ali Soi-lih) comme la seconde (celle d’Ahmed AbdallahAbdérémane), même révisée, prennait encompte l’appartenance de Maore à l’ensemblecomorien. Le changement de régime avec l’élec-tion de Said Mohamed Djohar en 1990 à la ma-gistrature suprême inaugure une nouvellepériode, celle du pacte de réconciliation natio-nale, de la Conférence Nationale et de la démo-cratie. La constitution du 7 juin 1992 élaboréepar la conférence nationale établit la démocratieet prévoit une répartition équilibrée des pou-voirs entre les îles. Toutefois, une partie des ins-titutions prévues dans cette constitution n’ajamais été mise en place.

b. Relations entre le pouvoir et la population

Ali Soilihi malgré les exactions de son régime asu impulser un élan nouveau dans le pays dontl’impact était l’affermissement d’un esprit pa-triotique. L’idée d’appartenir à une même nationau destin commun a constitué un facteur trèsimportant de cohésion sociale. Le coup d’Etatdu 13 mai 1978 qui remet au pouvoir AhmedAbdallah Abdérémane implique un groupe demercenaires. Le régime de parti unique instauréétouffe les libertés élémentaires et laisse auxmercenaires la réalité du pouvoir politique etéconomique. Ce pouvoir qu’on qualifie de féo-dalo-mercenaire s’est maintenu jusqu’en 1989avec l’assassinat par les mêmes mercenaires duprésident Abdallah.

L’avènement du pouvoir du président Said Mo-

hamed Djohar avait donné beaucoup d’espoir àla population quant à la gestion des affaires pu-bliques et l’amélioration des conditions de la viede la population. Mais peu de temps après, lepays est secoué par sa première crise de reven-dications insulaires d’ampleur. Mwali réclameun équilibre tant institutionnel que politique. Enmême temps éclatent au grand jour des affairesmaffieuses (Inter trade et Ashley entre autres)qui détériorent le climat politique. La méfianceet la défiance de la population envers la classepolitique prend des dimensions inquiétantes.

L’implication des partenaires sociaux dans la re-cherche de mécanismes qui assurent un dia-logue et une concertation sur les politiques dedéveloppement et une interaction des diffé-rentes structures dans le processus d’élabora-tion et d’exécution de ces politiques auguraientune ère nouvelle dans le combat pour la démo-cratisation du pays. C’est une évolution signifi-cative dans la mesure où on voit croître le rôled’une société civile et d’organisations non éta-tiques dans l’amélioration des actions des pou-voirs publics et le processus de démocratisation:réseaux syndicaux, associations des femmes etde développement.

On commence à ce moment à douter des capa-cités de l’Etat à juguler la crise financière quisévit et qui paralyse l’activité économique. Tousles gouvernements buttent sur la question de sa-voir concilier une politique sociale active avecdes ressources financières limitées. Des mouve-ments sociaux, partis souvent des secteurs del’éducation et de la santé ont constitué le pré-lude de l’insurrection sécessionniste qui allaitronger l’unité nationale. En effet, le MouvementPopulaire Anjouanais récupère et utilise le mé-

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contentement social populaire pour saperl’unité nationale en s’alliant à des organisationscriminelles, étrangères et obscures.

c. Faiblesses de l’Etat de droit

L’instabilité politique et institutionnelle annihileles avancées en termes de liberté d’expressionet de fonctionnement d’un Etat démocratique,principes affirmés pourtant dans toutes lesconstitutions appliquées dans le pays. Le multi-partisme y est également consacré même si unepléthore de partis politiques conduit à la para-lysie de l’action politique. Les graves problèmesqui entravent le fonctionnement de l’Etat sontla détérioration du climat social et une crise éco-nomique qui aboutissent à une instabilité em-pêchant d’envisager des réformesinstitutionnelles et structurelles, et l’instaurationd’un Etat de droit véritable.

Les régimes politiques qui se sont succédé onttoujours cherché à se soustraire du contrôle par-lementaire. Ils ont également exercé une main-mise sur la justice. Le système judiciairefonctionne mal et ce pour plusieurs raisons. Ilne dispose pas de moyens matériels et humainssuffisants pour répondre à l’attente des justicia-bles et garantir le respect de l’Etat de droit. Ilen résulte que les jugements rendus ne sont pasappliqués ou sont contournés. L’efficacité de lajustice est entravée aussi par le manque de ma-gistrats spécialisés, le coût élevé des procès, lalongueur de l’instruction des dossiers, une faibleculture juridique des justiciables. Le manque d’harmonisation de systèmes judi-ciaires parfois incompatibles explique égale-ment quelques aspects de l’inefficacité de lajustice. En effet on peut compter trois systèmesjudiciaires qui coexistent et travaillent parallèle-ment aux Comores:(i) la justice traditionnelle issue du Milanatsi(ii) la justice musulmane dont le code est le Mi-nihadji Attalibina(iii) la justice héritée du système français et ducode Napoléon. Des contradictions peuventexister entre ces trois systèmes. Par exemple la

faute collective et donc la punition collective,sont reconnues dans le milanantsi et rejetées parla justice de type français. La possession de laterre par le manyahuli, bien indivis appartenantà la lignée de la femme n’existe ni dans la justicemusulmane ni dans la justice de type français.Un effort d’harmonisation de ses trois systèmesde justice apporterait un plus à la cohésion so-ciale car tous les citoyens seraient ainsi jugés dela même façon.

d. Conséquences sur la gouvernance adminis-

trative

Les fréquents changements constitutionnels, lenon respect des cadres institutionnel et régle-mentaire, l’opacité dans la gestion des affairespubliques, les réformes administratives souventannoncées et non traduites dans les faits et lacentralisation excessive des pouvoirs de décisionont fait de l’administration publique une struc-ture inopérante qui contribue faiblement au dé-veloppement et parfois même l’entrave.

e. Une administration inefficace et non produc-tive

L’image de l’administration publique como-rienne auprès des usagers est extrêmement né-gative. Non seulement, les prestations desservices publics de base ne répondent pas auxnormes de qualité et des délais requis, mais aussielles sont devenues sources de corruption et demal gouvernance. Les fonctionnaires et agentsde l’Etat subissent depuis plusieurs décenniesune situation de délaissement qui est à l’originede l’état de laxisme actuel de l’administrationpublique. En effet, les salaires versés sont déri-soires et les arriérés de salaires s’accumulenttout au long des années. La gestion des carrièresest quasi-absente, les conditions matérielles detravail sont déprimantes, les responsabilités etpostes de travail mal définis.

L’administration publique est perçue notam-ment comme moyen de redistribution des reve-

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nus. Elle se caractérise par une pléthore de fonc-tionnaires, constitués souvent par des clientspolitiques plutôt que par des cadres compétents.Le recrutement est partial et très politisé. L’avè-nement de l’Union des Comores avec ses mul-tiples institutions et directions a renforcé lesrecrutements régionalistes et politiques. L’Etatcomorien bien que conscient de l’inefficacité del’administration publique, n’arrive toujours pasà redresser la situation en dépit des réformesdestinées à gérer les effectifs, à redéfinir lespostes de travail, le statut des fonctionnaires, lagestion des carrières et les questions liées à lamasse salariale hypertrophiée et á la régularitédes salaires. Les réformes de l’administrationpublique timidement tentées n’ont jamaisabouti.

f. Une administration éloignée de la population

L’accès aux services publics n’est pas garantipartout sur l’ensemble du territoire national. Lesdroits élémentaires, tels que l’accès à la santé ouà l’éducation ne sont pas garantis notammentpour les couches les plus pauvres de la popula-tion. Démoralisées et lassées par l’inefficacité del’administration publique, les communautés ur-baines et rurales se retournent vers les mouve-ments associatifs qui s’imposent désormaiscomme des acteurs incontournables du déve-loppement économique et social. Les parte-naires internationaux semblent s’yaccommoder. Les différents gouvernementsrestent indifférents, voire incapables de canaliseret coordonner l’action de ces associations en lesorientant vers des actions fiables et conformesaux besoins de l’heure. On multiplie les mêmesactions dans les mêmes localités ne serait-ce quepour rivaliser d’éclat et de magnificence sanstenir compte de la moindre harmonisation desplans d’action. On peut ajouter à ces différents dysfonctionne-ments de l’administration. L’utilisation exclusivedu français dans les actes administratifs alorsque cette langue n’est comprise que par une mi-norité de comoriens.

Pour bien comprendre l’impact de ce phéno-mène sur l’exclusion des citoyens de l’adminis-tration, il faut imaginer l’administration d’unpays comme la France qui rédigerait les actesadministratifs en allemand !

g. Fraude et corruption

L’administration publique est peu transparentedu fait notamment de l’absence d’un manuel deprocédures opérationnel et du non respect desrègles en vigueur. Cette situation favorise lafraude et la corruption. Pour accéder à un ser-vice public ou réduire les délais d’obtentiond’un acte administratif, l’usager doit parfoismettre la main à la poche. Une culture de des-sous de tables s’est discrètement développée etpermet à certains fonctionnaires véreux de s’en-richir considérablement. Aucun contrôle admi-nistratif n’est mis en place. Les régies derecettes sont la propriété du responsable admi-nistratif nommé. Les organes de régulation telsla cour des comptes ou le Conseil économiqueet social n’ont jamais vu le jour.Cette culture de corruption est encouragée parl’impunité qui prévaut dans le pays. Pire encore,un corrompu notoire de biens ou de deniers pu-blics peut accéder à un poste ministériel ou di-rectorial important et perpétuer la corruption.Autrement dit, la banalisation des nominationsaux postes politiques constitue un facteur im-portant de mal gouvernance.

h. Conséquences sur la gouvernance écono-mique

L’Union des Comores est classée dans la caté-gorie des PMA avec un PNB par habitant de450* dollars américains. La situation actuelle dedéveloppement du pays est essentiellement tri-butaire des performances d'une économie à trèsfaible potentiel de croissance due, en bonnepartie, à la faiblesse des investissements produc-tifs. Le pays est confronté à un déficit chroniquede sa balance commerciale dû essentiellement àune base exportatrice réduite à trois cultures derente que sont le girofle, l’ylang ylang et surtout

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la vanille, produits dont les cours mondiauxsont instables et très bas. Les importations sonttrès importantes pour soutenir une forteconsommation dont la valeur dépasse celle duPIB. La lenteur des progrès réalisés en matièrede stabilisation macroéconomique résulte aussides nombreux déséquilibres structurels et descontraintes naturelles et extérieures sur les-quelles ce petit pays insulaire n'a aucune em-prise. Durant les vingt dernières années le tauxde croissance du revenu per capita a été presquetoujours négatif. Ces 5 dernières années on peutnoter une augmentation importante de l’impor-tation des produits vivriers, à savoir bananes,maniocs, noix de coco cabris etc. pour lesquelsle pays était auparavent autosuffisant.

i. Conséquences sur la gouvernance sociale Les conflits sociaux

Du fait de l’inefficacité chronique des institu-tions publiques et de l’affaiblissementprogressif du rôle de l’Etat, les conflits sociauxse multiplient et deviennent récurrents. Les re-vendications sont salariales du fait que les fonc-tionnaires comptabilisent plusieurs moisd’arriérés de salaires. Elles sont aussi politiques,économiques et sociales.

La faiblesse de l’Etat favorise les conflits fon-ciers qui engendrent des batailles rangées entreles localités pour l’appropriation de terrains do-maniaux. Compte tenu de la forte croissancedémographique du pays, une gestion rationnelledes terres domaniales et l’établissement du ca-dastre permettraient d’anticiper les conflits fu-turs et de faciliter l’investissement privé etproductif dans tous les secteurs, en particulierle secteur agricole (Voir l’encadré «Les méca-nismes de règlement des conflits» ci-desssous).

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LES MECANISMES DE REGLEMENT DES CONFLITSLe Comorien est un être communautaire, il ne perçoit son existence qu’à travers ses groupes d’appartenance qui structurent lescommunautés régionales à l’intérieur de son île et de l’archipel : famille, catégorie d’âge, groupes de statuts, communautés dequartiers, de villages et de villes. Toute l’organisation de la vie collective repose sur une hiérarchie des groupes générationnels qui correspond à une répartition desmissions d’autorité et de responsabilité dans la cité. Le groupe des « enfants du village » acquiert par la pratique des connaissancessur les rouages de la société et notamment sur les mécanismes de préventions et de résolutions des conflits. Les jeunes gens etjeunes filles doivent savoir distinguer une infraction ou un conflit qui se présente comme un obstacle à la paix, à la stabilité et àla cohésion sociale. La société traditionnelle ne fait pas la distinction entre droit public et droit privé ; l’atteinte portée au patrimoined’un individu engage son groupe d’appartenance et celui du coupable. La conséquence d’une telle atteinte est soit une compensation,ou une sanction.Tout conflit avéré doit être traité d’abord et au besoin successivement, par les chefs des groupes de proximité avant que la classedes « hommes accomplis » soit saisie en tant qu’arbitre. Celle-ci ne sanctionne pas un individu mais un groupe de parenté ou devoisinage. Quand aux doyens ou sages, ils n’entrent en scène que si un membre de la classe des « hommes accomplis » est partieprenante au conflit et que toutes les conditions sont réunies pour que ce dernier soit définitivement résolu.Avant la colonisation celui qui commettait un crime, la sanction était l’uréhwa. Tous les biens fonciers et les animaux de sa famillematernelle étaient saisis ; ses membres étaient exclus de toutes les institutions sociales. Le coupable lui-même et sa descendanceétaient réduit en esclavage et vivaient hors du village sur une propriété de celui qui était devenu leur maître. L’uréhwa n’étant plus applicable, la société n’a pas réussi à inventer un nouveau mécanisme pour résoudre les conflits intercom-munautaires actuels, qui prennent leurs racines dans les rencontres sportives ou le recours aux nouvelles techniques de pêchetelles que l’utilisation des mines ou des filets. Les antagonistes font donc appel à la justice républicaine. Mais le droit écrit d’origineoccidental tranche les litiges sans considération des frustrations des parties ni le rétablissement de la paix sociale. Aussi, denombreux conflits intercommunautaires à l’exemple de celui qui oppose les villages de Chezani et de Hantsindzi ne sont jamaisrésolus. Une partie de la jeunesse de deux communautés échappe à tout contrôle de l’Etat et de la notabilité. Elle peut être àl’origine de massacres en représailles.

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La pratique des activités sportives engendre denombreux conflits inter villages souvent meur-triers. Autour des stades s’est développé unesorte de «hooliganisme» de jeunes qui profitentdes matchs de football ou de basket-ball pourse défouler et s’attaquer aux équipes adverses età tous les ressortissants des villages d’origine deces équipes. Ce phénomène assez marginal dansles années quatre vingt a connu un dramatiquedéveloppement. Pratiquement toutes les se-maines, des échauffourées voire des bataillesrangées sont signalées partout sur le territoire.L’Etat parait dépassé par ce type de conflits etn’a comme seul moyen que l’interposition mili-taire pour stopper les affrontements. Lesconflits restent entiers, même à l’état latent,faute de procès et/ou de suivi d’application dedécisions de justice à ce propos.

L’apparition des brouettes de plus en plus nom-breuses des marchands ambulants incontrôla-bles par le fisc et les autorités de manièregénérale crée souvent des conflits avec les mar-chands attitrés et patentés Ces conflits sont sou-vent teintés de chauvinisme insulaire du moinsà Ngazidja où les propriétaires des brouettessont pour la plus part originaires de l’ile deNdzuwani.

j. Développement des mécanismes sociaux derésolution des conflits

La faiblesse chronique de l’Etat rend difficile lerèglement des conflits par les voies modernes àtravers le système judiciaire. Pour parer à cettedéfaillance, la population recours souvent auxmécanismes traditionnels de résolution desconflits. Ce sont les notables ou les leaders as-sociatifs qui interviennent le plus souvent pourapaiser ou résoudre les conflits. En effet, la po-pulation dispose de mécanismes traditionnelsde gestion et de règlement de conflits efficacesqui n’entravent pas nécessairement l’action dela justice.

B. Conséquences des types de

gouvernance sur la cohésion so-ciale et le développement hu-main

a. Les différents régimes politiques et leur im-pact sur la cohésion sociale et le développementhumain

Des personnalités aux styles très différents ontété à la tête de l’Etat comorien, sans arriver àfaire des Comores un Etat moderne et pros-père.. L’action «révolutionnaire» a eu à boule-verser les structures et les bases coutumières dupays et initier un début de développement éco-nomique et social. Le coup d’état et la restaura-tion du président Ahmed AbdallahAbdérémane en 1978 a stoppé net cet élan. Unenouvelle orientation politique et économiquebeaucoup plus libérale est imposée. L’avène-ment du président Said Mohamed Djohar a faitcroire un instant que l’Etat allait fonctionnerenfin normalement dans la stabilité. L’espoirs’est vite dissipé avec la valse des gouverne-ments et des parlements. La période du prési-dent Mohamed Taki Abdoulkarim a vu l’Etat,jadis uni, voler en éclats, et ses contours géogra-phiques devenir encore plus flous et à géométrievariable. Les Comores voient au cours du ré-gime de Mohamed Taki l’émergence d’un sépa-ratisme outrancier. C’est au cours de cettepériode que l’île de Ndzuwani a proclamé sa sé-paration des autres îles de l’archipel. Le prési-dent Mohamed Taki Adoulkarim parti dans descirconstances mal connues, c’est autour de Tad-jiddine Ben Said Massonde, en tant que prési-dent intérimaire, de tenter en vain de recoller lesmorceaux. La conférence inachevée d’Antana-narivo a donné le prétexte au colonel Azali As-soumani de prendre le pouvoir par un coupd’état militaire. Ce jeune colonel avait toutes lescartes en main pour sortir le pays de sa torpeur,car il avait dissout toutes les institutions et sus-pendu la constitution. Ses premières mesures delutte contre la corruption et de restauration del’autorité de l’Etat lui ont valu une certaine sym-

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pathie et ont suscité de grands espoirs auprèsdes couches populaires. Mais, après quelquesmois, le jeune officier retombe dans les mêmestravers que ses prédécesseurs. Depuis 2006, lepays est dirigé par le président Ahmed AbdallahMohamed Sambi. De nombreuses initiativespour relancer le développement sont prises. Ce-pendant, l’action des nouvelles autorités resteminée par les querelles sans fin entre l’Union etles Exécutifs des îles.

Les conséquences sociales de cette instabilitépolitique sont incommensurables. L’économieet les finances publiques sont toujours dans unesituation difficile. La santé et l’éducation, malgréquelques acquis engrangés (augmentation dunombre de cadres médecins, infirmiers, sages-femmes, enseignants…) souffrent de problèmeschroniques de gestion des maigres ressourcesallouées. L’éducation continue à former des ca-dres sans aucune adéquation avec les besoinsréels du pays en ressources humaines. Cette si-tuation constitue une entrave au développementhumain durable du pays.

La sortie des Comores de la crise et du sous-dé-veloppement requiert, non seulement une fortevolonté politique et un engagement sans faillede la part des gouvernants, mais aussi le dévoue-ment des hommes et des femmes, soutenu parun grand idéal et une foi inébranlable en la na-tion.

b. Les processus de réconciliation politique etleurs impacts sur la cohésion sociale

Deux conceptions politiques se sont opposéeslors de la conférence de Fomboni sur la récon-ciliation nationale en 2001. L'une portée par legouvernement central est fondée sur les normesinternationales et proclame la volonté de fairedes droits de l'individu le principe organisateurde la société, et de la mise en place d’un pouvoirpolitique basé sur les relations impersonnelles.L'autre, conçue par les séparatistes et leursconseillers étrangers, exprime la volonté d’érigerles intérêts des groupes de proximité, fondés sur

les liens biologiques et de voisinage, à l’époquedes sultanats insulaires et des chefferies tradi-tionnelles, en principe fondateur de la société etd’instaurer un pouvoir politique qui passe parles liens communautaires.

Les partisans de ce dernier système ont fondéleurs arguments sur les échecs de la RépubliqueFédérale Islamique depuis 1978, et sur la longé-vité du régime des sultanats. La balance a pen-ché en leur faveur et les acteurs politiquescomoriens ont signé, à l’aube du XXIème siècle,ces accords de Fomboni qui proclament letriomphe du système du yezi traditionnel sur lesystème institutionnel de l’Etat moderne.

Un historien français a écrit: «C’est par la naturedes dépenses publiques que l’on peut connaîtresi une nation est représentée ou si elle ne l’estpas, si elle est bien administrée ou elle ne l’estpas.» La différence entre les institutions ances-trales qui administrent les villages comoriens etles composantes de l’Union des Comores de-vraient résider dans les procédures de percep-tion de leurs impôts, la nature de leurs dépenses,le mode de recrutement de leurs personnels etdans les normes juridiques qu’elles appliquent.Cette différence s'est peu à peu estompée.

Les relations entre les administrés et l’adminis-tration sont essentiellement basées sur des rè-gles non écrites plutôt que sur des normesréglementaires préétablies. La gestion des fondspublics demeure aussi opaque, sinon plus, quecelle des caisses communautaires. Les lois et lesrèglements sur les recrutements et les nomina-tions aux emplois publics sont très peu appli-qués. Les sanctions et mesures administrativessont prononcées sans motivation. La délivrancedes permis et autorisations administratifs, estacceptée ou refusée sans formalisme. Les mar-chés publics ne sont pas octroyés au terme d’unappel d’offre public sauf pour les marchés fi-nancés par les bailleurs étrangers qui imposentcette procédure. De nombreux actes juridiquessont réalisés en dehors du formalisme juridiquedu droit moderne. C’est le cas de nombreux

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actes de la vie sociale tels, le prêt, la donation,la location, les transactions qui ne sont pas em-preintes de juridisme formel. On peut citer aussiles cas du mariage ou du divorce qui sont célé-brés ou prononcés oralement sans qu’il soit be-soin de rédiger systématiquement un acte demariage ou un prononcé de divorce. Fort heu-reusement le code de la famille adopté en 2007a apporté quelques restrictions en mettant desconditions à la répudiation et à la bigamie. Cequi favorise quelque peu la cohésion des fa-milles. Les rapports sociaux continuent d’êtrerégis par des règles coutumières. Et celles-ci,fondées sur des valeurs ancestrales périmées,constituent un obstacle majeur à la préservationde l’unité et de la cohésion nationales et à lanaissance d’un Etat moderne et démocratique,tourné vers le développement. Et pourtant,l’Etat de droit, promis au peuple et qui est pro-clamé par la constitution du 23 décembre 2001,ne peut être que celui dans lequel la société estorganisée sur la base de règles objectives, écrites,

établies démocratiquement, et observées égale-ment par les gouvernants et les gouvernés, danstous les domaines de la vie sociale. Les lois quigarantissent la soumission de l’administrationau droit, protègent les citoyens contre l’arbi-traire des gouvernants et assurent la légalité del’action administrative sont un moteur essentiel.Pour que l’Etat comorien cesse d’être un Etat-institution, incapable de produire des normesde régulation sociale et d’en assurer le respect,il est nécessaire de dépasser certaines valeurs pé-rimées, héritées d’un passé lointain et révolu.La pérennité d’un Etat démocratique et mo-derne aux Comores est soumise à la conditionque les règles objectives, écrites, établies démo-cratiquement, soient également accessibles auxgouvernants comme aux gouvernés aussi biensur le plan physique de l’accès aux lois et règle-ments à travers des journaux officiels disponi-bles dans les localités mais accessibles surtoutsur le plan de l’utilisation d’une langue qui doitêtre comprise par tous.

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Chapitre 5: Les structures et les facteurs de cohésion sociale de la société comorienne

Tout comme le langage, le système de parentédiffère d'une société à l'autre et n'est pas unesimple notion biologique; il résulte de la recon-naissance d'une relation sociale. La terminologiede la parenté est dite classificatoire: le père etses frères (et même ses sœurs pour ce qui est deNgazidja) sont tous nommés père et la mère etses sœurs sont toutes nommées mère. La basede l'organisation de la parenté est constituée parles principes de résidence uxorilocale-matrilo-cale (la femme reçoit de ses propres parents unemaison et héberge son mari et ses enfants), etde filiation cognatique (l’enfant appartient à samère et à son père mais avec des droits et de de-voirs différents à l’égard de chacun des deux li-gnages). Le système familial est un réseau derapports basés sur des droits, devoirs et obliga-tions explicitement définis, et des attitudes ins-titutionnalisées de respect, d’affection entreparents. Le système d’appellation permet de re-connaître comme parent un grand nombre depersonnes, de les classer dans un nombre rela-tivement limité de catégories. Les critères de dif-férenciation appliqués sont la génération, lesexe, la collatéralité et l’alliance.

Le groupe de parenté est un ensemble d’unitéssociales qui constituent un emboîtement d’élé-ments qui jouissent d’une certaine autonomiedans le domaine économique et celui des rituelssociaux. Chacune s’insère dans la trame socialeà la fois directement et à travers la structure plus

large qui l’englobe. Le noyau central est consti-tué par la femme mariée. Chaque épouse a sonpropre ménage et est le centre d’une unité so-ciale autonome, le nyumba (maisonnée); la mai-son lui appartient; elle loge outre son mari et sesenfants, des parents plus ou moins éloignés etéventuellement des dépendants. Elle possèdeses propres foyers mais partage souvent l’airede cuisson avec plusieurs ménages. Les sœurset cousines germaines (appelées sœurs) issuesde la mère de la famille souche habitent un es-pace domestique commun appelé selon les îleset les régions à l’intérieur des îles: bamba,dago/daho, mraba, shandza.

Un réseau de ces unités résidentiellesmalago/malaho ou miraba constitue un seg-ment de lignage mba/mimba (ventre). L’ensem-ble des groupes forme le dziwe, inya(matrilignage), kinya ou kabila (lignage cogna-tique). En vertu de l’unité de direction, chaqueunité autonome est représentée dans les ins-tances communautaires; la maisonnée par lemari ou chef de famille (mwinyidaho ou mwe-nye), le groupe domestique à plusieurs foyers,par l’aîné des oncles maternels (Itswadaho) oule mari de la femme appartenant à la générationla plus ancienne (mwenye muhu). L’ensembledes groupes de descendance est sous l’autoritémorale du doyen du matrilignage. Le caractèresymbolique de la représentation de chacun deséléments de ce système pyramidal confère à

5.1. La parenté

Après plus d'un siècle de colonisation et plus de trois décennies d'indépendance vécues sous l’em-prise d'une législation étrangère, la société comorienne a conservé l’essentiel de ses structures etses règles de fonctionnement traditionnelles. Actuellement, certaines d’entre elles constituent unobstacle majeur à l'appropriation par le peuple de formes institutionnelles de l'Etat moderne.

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Chapitre 5: Les structures et les facteurs de cohésion sociale de la société comorienne

chaque segment du groupe de filiation son iden-tité propre et au tissu social son ciment.

Le clan est dispersé dans plusieurs villes ou vil-lages par des lignages ou segments de lignagequi peuvent porter des noms patronymiquesdifférents d’une région à l’autre. Le lignage estune entité qui possède, son patrimoine culturelpropre, une histoire, une généalogie, des lé-gendes, des poèmes et des chants, des lieux sa-crés (ilindi, djando25), un patrimoineéconomique, des terres de cultures et des mai-sons d'habitation, un capital social constitué desrichesses investies dans les fêtes et cérémoniessociales: mariages, naissances, funérailles etc. Ledoyen ou doyenne du lignage est l'Itswadaho;c’est une autorité morale qui arbitre les conflits,préserve les liens de solidarité, établit les straté-gies d'alliances matrimoniales, supervise la ges-tion des biens fonciers collectifs.

Les maisons sont des lieux d’apprentissage desfonctions d’autorité. Tout individu, quel que soitson rang de naissance, est appelé un jour à fon-der un ménage et être maître ou maîtresse d’unemaisonnée donc à assumer un rôle d’autoritédans sa famille. Les filles et fils aînés bénéficientcependant, d’une position privilégiée au mo-ment de l’apprentissage des fonctions de pou-voir. Ils sont autorisés, très tôt, à assister auxréunions des anciens lorsqu’ils doivent prendredes décisions importantes.

Le statut d’aîné autorise la participation à descérémonies coutumières familiales ou pu-bliques. L’aîné connaît très tôt les droits, les pri-vilèges et les devoirs des différentes catégoriesd’âges, des groupes de statuts et des groupes li-gnagers. Il reconnaît les moments et les circons-

tances qui autorisent les uns et les autres à êtreprésents ou absents, à parler ou à se taire, à in-tervenir ou à s’abstenir, à obliger ou à obéir.Cette formation pratique stimule le besoin desavoir et rapproche les aînés, filles et garçonsdes adultes. Le système d’initiation crée des re-lations de subordination entre les générationsanciennes et nouvelles. Il inculque aux cadets lerespect et l’obéissance à l’égard des aînés. Pourassumer plus tard, leur rôle de représentant etde médiateur, jeunes gens et jeunes filles doiventmaîtriser les connaissances relatives à la lignéeet à son histoire. Ils doivent acquérir les apti-tudes à gérer les biens collectifs, à arbitrer lesconflits, à diriger les débats en faisant circulerla parole selon le rang d’âge et parvenir à l’una-nimité. Chacun doit être préparé pour devenirle lieu des liens de solidarité de la famille.

L’aîné, pour les membres du groupement dontil a la charge, constitue le maillon le plus prochesur la chaîne filiative de l’ancêtre fondateur. Ilest donc son représentant. Cette légitimité doitêtre sans cesse confirmée par un comportementet par des actions dignes de cet ancêtre, au filde son action à la tête des structures résiden-tielles, la maisonnée et le groupe domestique àplusieurs.

On remarque qu’aucune place n’est faite au seinde la famille à l’enfant naturel qui parfois mêmepeut être éliminé soit physiquement soit paréloignement par crainte de la honte qui peut re-jaillir sur la famille dans un tel cas.Ce phénomène est beaucoup plus marqué àNgazidja que dans les trois autres îles où l’en-fant naturel est plus ou moins toléré.

25C’est la maison considérée comme l’habitation de l’ancêtre

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a. Les espaces familiaux

Le sexe et l’âge ont autant d’effets structurantssur les liens familiaux que sur l’organisation del’espace habité. La catégorie de sexe n’a pas seu-lement la fonction générale et fondamentale dedéfinir les rapports entre deux groupes sociaux,celui des hommes et celui des femmes, elleconstitue un principe organisateur de l’espaceaussi bien familial que social et politique. Au cli-vage homme/femme correspond un clivage pu-blic/privé-domestique.

Le plan de la maison reflète la dichotomieconceptuelle et spatiale entre ce qui est à l’inté-rieur, privé et féminin et ce qui est à l’extérieurpublic et masculin L’habitat traditionnel estconstitué d’un espace délimité par une clôtureen bois, un mur de pierres sèches ou en maçon-nerie. De la rue, on accède par une porte quipeut être monumentale avec battants en boissculpté, à une cour autour de laquelle sontconstruites les maisons (nyumba) qui abritentles cellules conjugales dont les épouses, sœurset cousines germaines sont issues en ligne ma-ternelle d’une famille souche.

La salle de séjour (bandani ou shandzahari) estla pièce où le mari reçoit ses amis. Elle sert ausside salle à manger. On y trouve souvent un lit ré-servé à l’ami de passage. La porte est toujoursouverte pendant la journée. Ce principe est basésur l’attachement et l’importance que l’ondonne à l’accueil social. Une porte fermée sym-bolise le rejet et l’abandon de l’individu par lasociété.

Il faut noter cependant que ce fait et cette ana-lyse ne sont pas valables à Ndzuwani dans lesgrandes villes où l’influence arabe plus marquée,fait que les portes sont toujours closes le mariemportant avec lui la clé pour pouvoir entrer àtout moment sans prévenir. Dans certaines mai-sons particulièrement nobles on peut même re-marquer des jalousies qui permettent auxfemmes de regarder dehors sans être vues.La convivialité anjouanaise se transporte sur la

place publique où les générations se mélangentet échangent sans retenu sur tous les sujets,chose plutôt rare à Ngazidja.

Dans les quartiers anciens des villes tradition-nelles, les membres d’un groupe domestiquepossèdent en commun un pâté de maisons. Achaque étage, habitent une famille conjugale etses dépendants. La règle de résidence matrilo-cale est la source d’un fort sentiment d’appar-tenance du Comorien à la famille maternelle etau village de sa mère. Les demi-frères utérinssont plus solidaires entre eux qu’avec leursdemi-frères agnatiques.

b. La famille et la terre

La matrilocalité est un principe fondamental del’organisation de l’institution familiale. Pour lesComoriens, la femme qui porte et élève les en-fants, ne peut pas être aussi mobile quel’homme; elle est la gardienne des valeurs et desparcelles de terres héritées des générations pas-sées. A Ndzuwani et à Maore, le pouvoir de dé-cision à l’intérieur du groupe parental est quasipatriarcal et se rapproche du modèle des socié-tés musulmanes arabo-swahili. Cependant l’ac-cès au patrimoine foncier passe par le lien deparenté par les femmes. C’est la mère qui trans-met sans risque de contestation, le statut de ka-baïla ou de mmatsaha26 et de mwenyewamudji(membre à part entière de la communauté lo-cale) à ses enfants.

La coutume dans toutes les îles de l’archipel co-morien impose au père de construire une habi-tation pour sa fille; toutefois, cetteresponsabilité peut être mise en œuvre par ledon d’une maison qui a déjà été habitée par lamère ou d’une parcelle de l’espace résidentiel dela famille utérine. Ainsi, dans le passé, les en-fants, principalement les filles aînées, habitaientà proximité des doyennes de la famille, dans levoisinage des lieux symboliques, le bangwe oupangahari et la grande mosquée. La jeunefemme s’intègre dans les associations coutu-mières de quartier et de groupes d’âge et parti-

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25Kabaila mot d’origine arabe qui signifie tribu et qui aux Comores signifie noble. Mmatsaha signifie paysan

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cipe dans son nouveau statut de mariée aux ac-tivités communautaires. Outre la maison que lepère construit ou réhabilite, la jeune femme re-cevait à son mariage un champ qui était mis à ladisposition du mari pour exploitation. Lechamp peut être un don du père, mafa (dona-tion). Il peut être offert par l’oncle ou la famillede la mère, c’est le dawo (la natte). Une traditionqui n’existe actuellement que dans certaines ré-gions rurales de l’île de Ngazidja imposait cetteattribution de terres de culture sous le contrôledes anciens de la communauté. C’est, dès l’an-nonce des fiançailles, que les parents indiquaientaux chefs coutumiers le terrain destiné à êtreremis au couple. Le fiancé, informé, sollicitaitl’aide de son groupe d’âge pour le cultiver. Lafamille de la fiancée préparait alors un grandrepas pour les travailleurs. Les hommes ne fontque les travaux de défrichage, en un seul jour.C’est le jour du mrema-daho (potager familial).Les parents de la femme se chargent des se-mailles, de l’entretien et des récoltes.

La femme mariée possède donc sa propre mai-son, une ou plusieurs parcelles de terre exploi-tées par son mari, ses frères ou ses oncles. Laparcelle offerte par le père est une propriété in-dividuelle (milk) qui relève soit du droit musul-man donc enregistré chez le cadi, soit du droitd’origine coloniale donc immatriculée et enre-gistrée au service du cadastre. La parcelle reçuede l’oncle maternelle, le dawo (natte) est géné-ralement prise sur le patrimoine indivis du ma-trilignage. Son statut relève du droit coutumier.Le droit d'usufruit de cette parcelle est trans-missible après décès aux enfants de deux sexesdes filles du groupe de parenté. A chaque géné-ration les enfants des garçons sont exclus de lasuccession, c'est le manyahuli. Seuls les enfantsde deux sexes, issus des filles sont coproprié-taires. Les enfants des garçons n'héritent pas desdroits de leur grand-mère paternelle car ils sontétrangers à son matrilignage; ils appartiennentà celui de la mère de leur mère. Ce systèmen’existe à Ndzuani que dans les zones urbaineset il est moins visible qu’à Ngazidja en raisond’une forte endogamie et de la valorisation des

liens généalogiques patrilinéaires qui rattachentles familles aux ancêtres arabes.

La propriété aux Comores revêt de multiplesformes et se rattache à des époques historiquesdont aucune n’a détruit ce que la précédenteavait élaboré, mais qui ont interféré pour don-ner la situation actuelle. Le manyahuli a été crééau temps où les villages étaient une fédérationdes matrilignages dirigés par des doyens (mafey,sing. Fey). L'avènement des sultanats au quin-zième siècle a accompagné la naissance du us-wayezi. Celui-ci, comprend le dahwayezi (lepalais de fonction des sultans et toutes les terresnon occupées par les familles au moment de lacréation des sultanats. Le dahwayezi où résidele sultan en exercice est différent du djumbe quiest un manyahuli de la famille royale. Dans lasociété comorienne, il n'existe pas de finage. Aumoment de l'abolition de l'esclavage, les familleslibérées ont conservé, la maison qu'elles habi-taient et le champ qu'elles cultivaient pour senourrir; ces biens devenaient mnyahuli et sym-bolisaient la liberté retrouvée. C'est une tradi-tion millénaire chez les Comoriens qui pourquelque motif que se soit, vœux ou manifesta-tion d'une joie ou d'une reconnaissance enversDieu, pour un mariage, une naissance, une gué-rison et autre, libéraient un ou plusieurs es-claves.

Le nabi est la propriété d'une famille éteintedonc qui est tombé en déshérence. Avant lacréation de la fonction de cadi et l'apparition dumilk, elle tombait dans le domaine public ou us-wayezi. Après, le dix neuvième siècle, à Nga-zidja, elle est gérée par la communautévillageoise sous le contrôle du cadi tant que lepouvoir public ne l'utilise pas. Le wakfu est unepropriété inaliénable léguée à un groupe de pa-renté, à une communauté, à une institution re-ligieuse ou d'intérêt social, elle est sous lajuridiction du cadi. Le milk est une propriété ac-quise à titre individuel suivant la loi islamique.

Le régime foncier de droit musulman a été ins-tauré au dix septième siècle à Ndzuwani par le

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sultan Idarusi. Il a nommé des cadis dans lesvilles de Domoni, Mutsamudu, Wani et Moyapour enregistrer les terres qu'il attribuait auxmembres de l'aristocratie. Maore introduisit cerégime peu de temps après mais c'est le sultanOmar qui, au siècle suivant le généralisa. A Nga-zidja et Mwali, les sultans qui avaient voulu ap-pliquer les recommandations des juristesshaféites faillirent perdre leur trône. Les imamscontinuèrent, jusqu'au XIXe siècle à assister lesultan ou ses wazirs (gouverneurs) pour rendrela justice et le droit coutumier fut maintenu etest toujours appliqué.

Après les famines de 1848 et 1852 à Ngazidja,le sultan Ahmed dit Mwinyi Mkuu créa desgrandes plantations agricoles qui employaientde la main d'œuvre servile amenée d'Afriquecontinental. Il créa des pépinières dans le Bam-bao, le Mbadjini et le Mbwankuu pour diffuserde nouvelles variétés de plantes vivrières impor-tées du Kenya. Devenu ntibe (sultan suzeraindes sultans de l’île), il nomma des cadis et fit en-registrer ses propriétés. D'autres lettrés l'imitè-rent. A la fin du XIXème siècle les cadisappliquaient la loi coranique en matière de suc-cession sur ces terrains, avec comme règle debase, une part pour la fille et deux parts pour legarçon. A partir de 1886, l'ensemble de l'archi-pel est de fait, annexé à la France, les terres sontconcédées aux colons. Le droit français est ap-pliqué sur les terres immatriculées par les plan-teurs européens et réunionnais.

Au début de ce siècle, les terres relevant du sta-tut coutumier avaient disparu à Ndzuwani etMaore. A Ngazidja elles étaient réduites à despetites parcelles autour des villages. La rétroces-sion des terres aux autochtones a commencépar une réforme imposée aux propriétaires degrands domaines par une loi de 1949. A l'ap-proche de l'indépendance, les planteurs se mi-rent à vendre leurs terres. Le retour de la terreaux propriétaires comoriens porte encore lamarque de l'impact de la patrilocalité dans toutl'archipel depuis l'accession à l'indépendance.Les femmes propriétaires de leur maison repré-

sentent 74% à Mwali, 87% à Ndzuwani et 88%à Ngazidja (PNUD, 1989). Concernant lesterres agricoles, elles sont détenues, pour l’es-sentiel, par les femmes à Ngazidja et par leshommes à Mwali et Ndzuwani. il y a lieu de sou-ligner que même à Ngazidja, ce sont leshommes, notamment les oncles maternels et lesmaris, qui gèrent les terres.

B. Le mdji, une fédération desgroupes de filiation

Le mdji est une collectivité locale. Elle peut êtrerurale ou urbaine. Le mdji est délimité par leuhura wa mdji (mur d’enceinte du village) ou lengome pour les villes fortifiées. Le territoireintra-muros est découpé en unités privées quisont les habitations, les ateliers d'artisans, lesépiceries et les écoles coraniques et en unitéscommunautaires: les mosquées des quartiers, lesplacettes et les ruelles, les grandes places pu-bliques (bangwe ou mpangahari), les rues prin-cipales, la mosquée du vendredi, le marché, lescimetières, les foyers des associations et groupesprofessionnels (pécheurs).

Le mdji est d'abord une hiérarchie de groupesde parenté. Cette hiérarchie est fondée sur le cri-tère de l'ancienneté sur le territoire du mdji. Lelignage qui occupe le sommet est celui dont l'an-cêtre qui a défriché et construit la première mai-son du village. A l'intérieur du mdji, le groupede parenté constitue une structure verticale quis'articule sur un ensemble de structures hori-zontales qui sont: les groupes d'âge (hirimu oubeya) et leur sous groupes (shikao), les groupesde statuts (statuts acquis après avoir réalisé le"grand mariage" (wanazikofia, wafomamdji).

Le hirimu est une institution initiatique engrades: mshondje, mzuguwa, mfomanamdji,guzi. C'est un cadre de formation civique. Uncadre pour l'apprentissage du sens de la hiérar-chie et de la discipline, du dévouement à lachose publique, du respect des valeurs tradition-nelles. Le niveau le plus élevé est celui de mfo-

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manamdji. C'est un véritable conseil municipalqui s'efforce de marquer l'histoire du mdji, eninscrivant dans la pierre et la mémoire collectiveleur action: construction et restauration d'édi-fices communautaires, innovations dans les ma-nifestations collectives, modernisation de lasociété. Les groupes d'âge constituent un sys-tème fondé sur les critères d'appartenance ligna-gère et territoriale. Il inculque le primat del'allégeance à la communauté du mdji commetotalité sur l'allégeance lignagère. Les groupesd'âge et les groupes de statuts ainsi que les com-munautés de quartier qui englobent les deuxpremiers sont des structures issues d'une pé-riode statique très ancienne. On n'y adhère pasde sa propre initiative, on est membre par sanaissance. On y retrouve les aînés de la familleet du quartier.

Le mdji est administré par une assemblée inter-mittente qui se réunit sur le bangwe, selon l'ur-gence, l'importance ou la nature du sujet àl'ordre du jour. La réunion a lieu généralementaprès la grande prière du vendredi, après lesprières quotidiennes de fin d'après midi ou dusoir, ou à l'occasion d'une grande manifestationsociale ou religieuse. Cette assemblée qui réunittous les wandrwadzima du mdji est dirigée parune autorité représentative du collège des wa-fomamdji. Ce collège se saisit et décide detoutes les questions concernant les relations duvillage avec les autres villages et avec l'Etat. Ildécide en dernier ressort des questions d'ordreéconomique telles que, le shao (interdictionsagricoles) les litiges sur les terres, les équipe-ments communautaires: routes, bâtiments ci-ternes, dispensaires, mosquées, placespubliques… ou d'ordre publics: répression devoleurs pendant les récoltes, conflit entregroupes lignagères ou sociaux ou culturels. Lecollège des wafomamdji agrée les différentes au-torités coutumières: chef du village, chefs desquartiers, chefs de lignage (itswadaho), chefs etassistants du hirimu (wafoma mabeya), autoritésreligieuses (wanazioni), groupes de métiers (ma-fundi).

Le principe de l’exercice de l'autorité dans lemdji est la collégialité. Les décisions sont prisespar un comité qui comprend les chefs en titre,leurs assistants et des personnes représentativesdes groupes concernés par la matière discutée.Les lois coutumières, le milanantsi (tradition etpays) et le andanamila (coutume et tradition) nementionnent jamais des attributions à exercerpar un individu. Il s'adresse toujours à des unitéssociales, groupe de filiation, groupe domestique,catégorie d'âge, groupe de voisinage (quartierou village, chefferie). Quand un mdrumadzimacommet un délit qui porte atteinte au groupeauquel il appartient ou à la communauté, le an-danamila réagit en lui demandant des comptes.Dans ce cas c'est la défense de la société contrel'individualisme.

C. Les espaces communautairessymboliques

Les principaux espaces de participation à la viecommunautaire sont: la place publique, l’écolecoranique, la mosquée, le cimetière, le marché.

a. La place publique

C'est le cœur de la cité; elle est appelée selon lesîles, bangwe, bangani, mpangahari, shandza yadago est le cœur de la vie sociale de la cité co-morienne. Elle est le centre cérémoniel de lacommunauté sociale. C’est un lieu de référencesitué au voisinage des édifices symboliques ouhistoriques (demeures des anciennes familles ré-gnantes, cimetières des personnages illustres,mosquée du vendredi), un lieu de rencontres detoutes les générations, de débats publics, dejeux, et un lieu où les aînés exercent le pouvoiroù les jeunes reçoivent leur éducation sociale,artistique et esthétique (musique, danses, art dela parole)

Le bangwe ou mpangahari (la place publique)est le cœur de la cité. C’est un espace réservéexclusivement aux hommes. C’est un concept àla fois, social, politique et esthétique; c’est le lieu

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des rencontres, de visites, de célébrations et dejeux de société. C’est un espace harmonieux quiexprime par son architecture, les goûts et les va-leurs artistiques des wenyedji (les citoyens au-thentiques de la cité). Il porte la marque du rangsocial et politique attribué à la cité par l’histoire.

Le bangwe est une aire polyvalente de réunionspubliques, de cérémonies et de danses. Généra-lement rectangulaire, il est entouré de murs àdemi-hauteur et de bancs en maçonnerie. C’estle mpangahari (Ndzuwani et Mwali), shilindoni(Mwali) ou shandza-ya-dago (Maore). Cette airepolyvalente ne représente qu’un des élémentsdu bangwe de Ngazidja où la structure de cetespace communautaire est la plus complexe. Ony ajoute deux autres éléments. L’ivogo, une en-ceinte rectangulaire de quatre à six mètres delongueur sur deux de large formée par desbancs de pierres où l’on y danse le mdiridji, ladanse noble par excellence jadis interdite auxhommes non mariés selon la coutume. Elle estappelée mdiridji à Ngazidja, diridji à Mwali ettari à Ndzuwani et à Maore. Exécutée pour cé-lébrer les grands événements heureux, elle estanimée par un lettré, un Imam, qui chante desextraits du maulid, un récit en vers de la vie duprophète Muhammad.

Le paya-la-mdji26, est un vaste kiosque où jadis,on conservait, suspendu à la charpente, sous latoiture, le matériel utilisé pour animer les fêteset cérémonies: les ngoma (tambours) et leshanda ou shandaruwa, vélum blanc ou multi-colore qui couvre l’aire de danse ou de rassem-blement; le jour, il l’abrite du soleil, et la nuit, ilrabat la lumière des lampes à pétrole sur les par-ticipants. A partir de quinze heures, après la troi-sième prière de la journée, les hommes, assis surles bancs à l’intérieur du paya-la-mdji, prati-quent ordinairement divers jeux de société.

Les deux entrées principales du bangwe sontdes portes monumentales constituées d’une ar-cade qui repose sur deux piliers carrés ou rec-tangulaires. L’ensemble est abondammentdécoré des motifs abstraits ou floraux et sur-

monté d’un croissant de lune. L’extension re-marquable, depuis l’indépendance, du réseauroutier bitumé et les moyens de transports inter-îles, ont multiplié considérablement les liensentre les hommes, entre les familles et entre lescommunautés. Ils ont imposé la création d’unenouvelle catégorie d’agora qui accueille des ma-nifestations aux fonctions religieuses, sociales,politiques ou culturelles spécifiques. Beaucoupde villages ont aménagé parfois hors du centredu mdji une vaste place pour les grandes mani-festations qui rassemblent des invités venus detout l’archipel notamment le maulid du mois dela naissance du prophète ou certaines cérémo-nies à caractère religieux à l’occasion du GrandMariage.

Le marché, bien que fréquenté presque quasiexclusivement par les femmes, était jadis amé-nagé aux abords de la place centrale. Ce sont lesadministrateurs coloniaux qui l’ont transféré àla périphérie obligeant les jeunes épouses desmilieux urbains qui ne peuvent sortir le jour desruelles discrètes de la médina à recourir aux ser-vices d’un personnel domestique.

La ville comorienne est toujours divisée en deuxou plusieurs secteurs autonomes qui conserventchacun le poids démographique d’un village etsauvegarde l’intensité des relations au sein de lafamille et entre les familles. Chacun de ces "ar-rondissements coutumiers" possède son proprebangwe et est dirigé par son propre conseil desanciens qui veille au respect des règles de pré-séance fondées sur l’ancienneté des lignages etla hiérarchie des catégories d’âge. Autour de laplace des cérémonies, "l’arrondissement coutu-mier" est formé de plusieurs quartiers. Chacund’eux possède son propre espace ouvert, le shi-lindro/shinlindo réservé aux réunions et auxfestivités organisées par les membres du groupede voisinage. Il est situé dans un renfoncementdes maisons ou au croisement de plusieurs rues.Le shilindro n’a pas comme le bangwe une dé-nomination propre. Il prend l’appellation duquartier précédé parfois d’un préfixe de locali-sation. Aucun élément architectural ne signale

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26Littéralement: la cuisine du mdji

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le shilindro; des bancs en maçonneries ou enbois y sont parfois installés. L’arrondissementcoutumier le plus proche du bangwe le plus an-cien, est celui qui est habité par les premiers ar-rivés sur le site, il est donc le quartier noble.

b. L’école coranique

Elle accueille l’enfant à partir de trois ans dansune salle voire une cour de la maison du maître.Elle forme à la lecture aisée du Coran, au res-pect des écritures saintes et à la pratique desprières quotidiennes. Elle lui fait connaître lescritères coraniques de la propreté du corps, desvêtements et de l’eau. L’enfant apprend parcœur plusieurs textes sacrés étudiés pour leursfonctions sociales; ceux qui sont récités collec-tivement à l’occasion des cérémonies familialeset communautaires: naissances, mariages, funé-railles, anniversaire de la naissance du prophète,etc. L’échec social d’un homme qui ne vit passelon les règles de la bienséance était, il y a seu-lement une trentaine d’années, attribué à l’in-compétence de son maître coranique. Cetteécole fournit à la société, les cadres de pensée,de langage et de savoir vivre qui sont l’ossaturede la mentalité collective. Elle fixe pour la vie,selon des règles communes à l’ensemble de l’ar-chipel, les réactions courantes de l’individu entoutes circonstances.

L’école coranique constitue le premier contactde l’enfant avec le système éducatif et sert enquelque sorte de phase préscolaire. Des initia-tives sont actuellement développées pour réno-ver l’école coranique dans le sens d’y introduireles outils et méthode modernes d’apprentissage.

c. La mosquée

La mosquée est une structure à la fois religieuseet sociale. C’est un lieu de culte, d’enseignement,de méditation et de rencontres. La mosquéecentrale domine le paysage architectural dumdji. C’est une structure à la fois religieuse etsociale. Les quartiers possèdent leurs mosquéesd’où cinq fois par jour, l’appel du muezzin

rythme la vie quotidienne.

Un autre espace culturel, la zawiyat rassembleles adhérents d’une confrérie soufie. Plus de60% de la population participe plus ou moinsassidûment aux activités de ces associations. Lazawiyat se situe entre la mosquée dont elle estproche par sa fonction religieuse et le bangwedont elle a emprunté l’organisation de l’espaceet la structure hiérarchique de la communauté.

La zawiyat comprend un espace non couvert,rectangulaire, au sol cimenté, entouré d’un murconstruit à demi-hauteur. Certaines zawiyatscomme celle du village de Shuwani, sont pour-vues de la porte monumentale caractéristiquede la place publique. Celle de la Shadhuliyat alyashrutuyat à Moroni, a perdu ce portique, il ya peu de temps, à la suite des travaux d’agran-dissement de l’édifice. Comme à la mosquée ony entre déchaussé. Les adeptes s’y réunissentpour le dhikr (invocation de Dieu).

La deuxième composante de la zawiyat est unesalle couverte pourvue d’une niche qui indiquela direction de la Kaaba à la Mecque. Elle est ré-servée aux prières subrogatoires des cheikhs,aux prières quotidiennes obligatoires des mu-rides et à leur formation aux rites de la confré-rie. Cette pièce est contiguë à un troisièmeespace non moins important, celui des mauso-lées des anciens grands maîtres dont le récit deleur vie exemplaire sert de modèle, de guidemoral et spirituel aux nouvelles générations.

d. Les cimetières communautaires

Ils sont situés généralement hors de la murailled’enceinte de la ville. A l’intérieur, des cimetièresprivés peuvent être rattachés aux résidences fa-miliales, à une mosquée ou à une zawiyat.

e. Les espaces communautaires nouvelles.

D’autres espaces communautaires naissent del’augmentation de la population et de la diver-sification des activités de cette dernière.C’est le

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cas des de«foyers des jeunes» puis un peu plustard des «foyers des femmes»., Pour les jeunes les foyers sont dûs à une scola-risation de plus en plus poussée dans tous lesvillages de la Grande Comores notamment,pour ce qui est des foyers des femmes ils rem-placent les grands salons des maisons tradition-

nelles les Ukumbi qui servaient aussi bien auxtoirab des hommes qu’aux danses des femmes.L’influence zanzibarite avec l’introduction aNgazidja de la cérémonie de l’Utolwa Ukumbia entrainé la nécessité d’espaces plus vastes pouraccueillir plus de femmes. D’où l’apparition desfoyers des femmes.

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Chapitre 6: Les acteurs non étatiques et leurs rôles dans la cohésion sociale et le

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Le mdji est doté d'une organisation très complexe qui assure pour ses membres des fonctionsmultiples: sociales, culturelles, économiques et politiques. Au cours de l'histoire différentes formesd'organisation ont apparu. Elles sont nées avec le développement des échanges de biens écono-miques de plus en plus variés et la multiplication des manifestations culturelles exigeant beaucoupplus de savoir faire et des moyens techniques et financiers importants. On peut regrouper les as-sociations de villages en quatre catégories:

1. Les associations coutumières sont des cercles de partage dont les membres manifestent leursliens de solidarité lors des événements coutumiers et familiaux liés au cycle de la vie: mariages,naissances, circoncisions. Ce sont les midji pour les hommes et les matchama et itifaki pour lesfemmes. A Moroni, l'itifaki réunit les femmes d'un sous quartier, quelques pâtés de maisons bor-dant les deux côté une ruelle.2. Les associations d'intérêt économique mranda. Les membres se réunissent pour cultiver le

champ d'un de leurs, ou pour accomplir d'autres travaux.3. Les associations d'animation: Elles assurent l'organisation matérielle, artistique des festivités

pour leurs membres et moyennant de l'argent pour des non membres.4. Les associations religieuses: ce sont les confréries, les fidèles des mosquées ou les groupementsdes élèves et des écoles coraniques.5. Les associations déclarées: ce sont des sociétés reconnues officiellement et qui fonctionnementsur des statuts et des règlements intérieurs selon des lois héritées de la loi française de 1901 surles associations. Ce sont les mouvements de jeunes, scout, sociétés sportives, musicales, associa-tions culturelles.

A la fin du régime du président Ali Soilihi, les jeunes s’éloignaient des structures coutumières, encours de restauration. Ils ont crée alors des sociétés déclarées et enregistrées dans les préfectures.Ils élisent démocratiquement pour l'association un bureau qui assure les fonctions qui, dans lesystème traditionnel de Ngazidja, sont dévolues au comité directeur de la catégorie d’âge des wa-fomanamdji (les rois des enfants du mdji). L’association dispose des fonds alimentés par les recettesdes concerts et divers spectacles vivants produits par des artistes locaux ou invités et originairesd’autres villages ou d’autres îles. Ces fonds sont investis dans les instruments de musique et dansdes équipements d’éclairage et de sonorisation. Les communautés villageoises sont contentes d’uti-liser ces équipements dans leurs manifestations coutumières et religieuses. En contrepartie l’asso-ciation est progressivement acceptée, réintègre la société coutumière et occupe une place en tantqu'institution de la communauté et reçoit des fonds provenant des redevances payées sur les ma-nifestations et festivités organisées dans le cadre du anda. A son tour, elle investit dans des équi-pements et services communautaires et entreprend de travaux de construction des foyers culturelset divers édifices d’intérêts collectifs: rues, citernes ou réseau d’adduction d’eau, dispensaires, etc.

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Chapitre 6: Les acteurs non étatiques et leurs rôles dans la cohésion sociale et le

développement humain durable

6.1. Le tissu associatif de quartier, de village et de

région

A. L’aspect potentiellement po-sitif du tissu associatif

Le tissu associatif est très développé aux Co-mores. Chaque village a une ou plusieurs asso-ciations qui sont à la base d’une séried’initiatives dans de nombreux domaines. Cesassociations sont nées, très souvent, sous l’im-pulsion des habitants pour mener bénévole-ment des actions culturelles, sanitaires,environnementales, musicales, etc.

La contribution financière des ressortissants ex-patriés dans les réalisations des projets de déve-loppement initiés par les associations desvillages constitue souvent la part la plus impor-tante. La puissance coercitive du mdji pèse lour-dement sur la décision du migrant de se priverainsi de la jouissance individuelle ou familiale,d’une partie de ses revenus pour participer àl’action commune dans son village d'origine.Cependant, vivant dans l’idée de quitter un jourun pays suréquipé où sont nés ou ont séjournéleurs enfants, neveux et autres petits frères pourfaire leurs études, les expatriés sentent mieuxque tous leurs concitoyens, l’impérieuse néces-sité de doter leur futur cadre de vie, d’un mini-mum d’infrastructures capables de répondreaux besoins de santé, d’éducation, d’informa-tion et de loisirs d’une jeunesse moderne. Plu-sieurs localités ont pu ainsi aménager des ruesbitumées ou revêtues de dalles de ciment,construire des écoles, se doter de bibliothèques,de centres de loisirs et de moyens de commu-

nication de masse telles que la radiodiffusion etles télévisions communautaires.

La direction d’une association qui réalise desgrands projets suscite inévitablement de la ja-lousie entre ses membres qui aspirent à la diri-ger et se scinde en deux ou plusieursmouvements rivaux. Encouragés par les "Jeviens" (la Diaspora), les notables rassemblentd'autorité toutes les associations, mouvementsdes jeunes, tous les cercles sociaux des hommeset des femmes. Un nom français est par la suiteadopté pour dénommer le conseil de coordina-tion de ces mouvements à savoir le comité depilotage. Il est utilisé dans les dossiers soumisaux organismes étrangers bailleurs des fonds.Le comité de pilotage est ouvert à toutes les ca-tégories sociales, hommes et femmes, ancienset jeunes. La composition de son bureau est ré-solument moderne. En effet, pour assurer la di-rection technique des activités, il choisit sansdiscrimination de statuts coutumiers, ni de sexe,ceux qui sont capables d’utiliser les moyens mo-dernes de paiement, de tenir une comptabilitéet de négocier avec les institutions de crédit etles organismes d’assistance bilatérale et multila-térale.

Au cours des années 1990, l’attention de plu-sieurs donateurs est attirée par les réalisationsdes associations communautaires. Ils ont estiméque, compte tenu de l’enthousiasme de la po-pulation, lorsqu’elle prend elle-même ses af-faires en main, le transfert des ressourcesdirectement aux bénéficiaires sans passer par les

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autorités gouvernementales, améliore les résul-tats ou l’impact des programmes. En se référantau concept de bonne gouvernance, les bailleursde fonds saisissent là une possibilité de modifierl’équilibre des pouvoirs entre la société civile etl’Etat, en renforçant la capacité de la populationà gérer ses propres affaires d’une façon auto-nome. Plusieurs structures ont été ainsi misesen place par le gouvernement et ses partenairespour accompagner directement les communau-tés dans leurs efforts pour le développement deleur localité comme le FADC (Banque Mon-diale), projet de microréalisations (Union Euro-péenne), les projets de micro-finance (Sanduk,Meck, AMIE…).

Un exemple significatif est celui des mutuellesde santé qui jouent un rôle important dans ledéveloppement social. En effet, parmi les ac-teurs non étatiques qui jouent un rôle crucialdans le développement on trouve les mutuellesde santé. Ce sont des organisations autonomes,administrées librement par leurs membres dansle respect des principes de démocratie et de li-berté. Elles établissent des conventions de soinset services de santé avec les prestataires et lesremboursent selon les termes du contrat. Eneffet un des problèmes majeurs du système desanté est de concilier, dans un contexte de pau-vreté, l’objectif d’amélioration de l’accessibilitéfinancière aux soins de santé et l’équité dans lesystème de santé d’une part, et la nécessité demobiliser des ressources internes pour accroîtrela viabilité financière des services de santé d’au-tre part. Depuis la réforme sanitaire en 1994, lesdonnées disponibles montrent que les ménagesont de plus en plus de difficultés à faire face auxcoûts des soins de santé. En effet, les taux d'uti-lisation des services de santé modernes est trèsfaible. Parmi les raisons évoquées relatives à lanon-utilisation et le manque de satisfaction àl’égard des services de santé, les coûts des soinssont le plus fréquemment évoqués par la popu-lation. En effet, les barrières financières pouraccéder aux soins résultent en différentesformes d’exclusion, dont l’exclusion totale oul’indigence, l’exclusion saisonnière, l’exclusion

temporaire et l’exclusion partielle. Les risquesd’exclusion totale ou d’indigence sont plus éle-vés parmi la population extrêmement pauvre.Parmi les autres segments de la populationayant des revenus faibles et irréguliers, dont lamajorité est la population rurale, les risquesd’exclusion saisonnière, temporaire et partiellesont plus élevés.

On assiste alors, à l’essor de toute une séried’organismes du secteur associatif qui fournitune part, de plus en plus variée, de prestationssociales à la population. Ces associations dé-ploient une activité intense dans divers do-maines, environnement, santé, éducation,formation professionnelle, crédit, promotion del’artisanat, de l’agriculture vivrière, de la pêche,etc. Sous la pression du public et des orga-nismes d’aide au développement, elles reçoiventde l’Etat certaines délégations de pouvoirs etprennent des initiatives de développement.

A la fin des années 1990, des Français origi-naires des Comores sont élus conseillers muni-cipaux en France. Ils se sont mis en relationavec des anciens fonctionnaires retraités ou "dé-flatés" de la fonction publique et résidant dansleurs villages pour doter leur communauté d’ori-gine d’un statut qui peut servir de base à l'éta-blissement des relations de coopérationdécentralisée avec les commues françaises. Sansdemander l’avis du gouvernement, certainescommunautés, surtout à Ngazidja, transformentles "comités de pilotage" en conseils munici-paux et donne à leurs présidents le titre demaire.

Le secteur associatif et celui des "communes pi-lotes" occupent aujourd’hui un vaste champd’activités économiques et sociales. Les groupe-ments étaient d’abord créés et dirigés par desétudiants et des jeunes cadres de moins detrente ans, guidés par l’altruisme caractéristiquedu unamdji (jeunesse du village). Les perfor-mances atteintes dans la réalisation et la gestiondes équipements collectifs, l’inscription desprincipes d’organisation conformes aux mo-

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dèles démocratiques (bureau associatif élu) ontdonné à ces structures une consistance juridiqueet une légitimité politique qui les mettent sur unplan proche des organes étatiques. Le décalage,jadis important, entre la représentation des rôlesdes autorités coutumières et de ceux des agentsde l’administration s’est estompé. Cet effort deredéfinition de l’organisation et de réorientationdes objectifs permet à l’association à base com-munautaire de se présenter comme le résultatd’une mutation adaptative d’une structure tra-ditionnelle.

a. L’aspect potentiellement négatif du tissu as-sociatif

La part de l’Etat dans la prestation des servicespublics se réduit parallèlement à la mise en placedes programmes d’investissements collectifs parles associations villageoises et les municipalités«informelles» selon les procédures démocra-tiques. L’Etat leur délègue progressivement l’en-cadrement de certains des projets dedéveloppement.

Les conséquences sont nombreuses; la premièreest la moindre présence de l’Etat dans la gestiondirecte des projets de développement. La se-conde est l’atomisation des initiatives de déve-loppement. Cela rend difficile la coordinationdes efforts de développement. La troisième estla croissance des risques d’importation d’équi-pements trop onéreux inadaptés à l’environne-ment technologique et aux capacités locales demaintenance. Il faut ajouter que le recours sys-tématique des communautés locales à l’aideétrangère accroît la dépendance de la société, visà vis des ressources extérieures qui ne sont pasappelées à durer et introduit dans la populationcette culture d’assistanat déjà largement pré-sente dans l’élite bureaucratique.

D’autres mutations au sein même des structuresdes associations sont à craindre. Les lycéens, lesétudiants et les jeunes cadres, notamment lesenseignants plus présents dans les villages sontde plus en plus préoccupés par les crises fré-

quentes qui interrompent leurs études et per-turbent leur cadre de travail. La direction des as-sociations passe actuellement aux mains des"déflatés" de la fonction publique qui se révè-lent être des redoutables chasseurs de projets dedéveloppement. Ils n’ont pas de difficultés à ob-tenir des délégations de pouvoirs aussi bien dela part des autorités gouvernementales que desacteurs coutumiers. Ils sont moins soumis queles jeunes à l’obligation redditionnelle. La nou-velle association communautaire peut échapperà la vigilance des autorités traditionnelles et ap-paraître comme le résultat d’une désagrégationde la structure étatique ou en d’autres termes leproduit d’une "informalisation" du formel.

B. Les syndicats

Les syndicats participent au développement dupays. Bien que leur activité principale repose surles revendications catégorielles, ils participentdans une large mesure à des actions de promo-tion de la solidarité notamment à travers la dé-fense des intérêts de groupes vulnérables dansles secteurs de l’agriculture et de la pêche. Lemouvement syndical comorien n’a vu réelle-ment le jour que sous la restauration du régimedu Président Ahmed Abdallah en 1978. Autemps de la Colonisation et sous le régime ré-volutionnaire d’Ali Soilihi, rien n’a été fait parles pouvoirs en place pour encourager les forcesvives de la nation à s’organiser pour défendreleurs intérêts. Cette situation a été voulue pourdifférentes raisons. Sans doute parce que les au-torités coloniales et les différents gouverne-ments issus de l’autonomie interne prévoyaient,en effet, une dérive éventuelle des syndicatsdans les revendications sociales. Un mouvementsyndical fort, parviendrait à mettre en difficultésles autorités politiques en aiguisant les contra-dictions.

Dans les années 1980, un mouvement corpora-tiste, connu sous le nom de collectif des ensei-gnants, sans organisation particulière, animaittant bien que mal les grèves des personnels dumonde de l’Education. Le principal parti poli-

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tique qui s’opposait activement au pouvoir duprésident Ahmed Abdallah Abdérémane, leFront Démocratique (FD) parvenait à exploiterles revendications sociales à des fins politiques.Ce fut en partie grâce au FD que les enseignantsainsi que les agents de la santé s’organisèrent vé-ritablement en syndicats. Ainsi en 1989 et 1991naquirent respectivement le Syndicat Nationaldes Professeurs Comoriens (SNPC), le SyndicatNational des Instituteurs Comoriens (SNIC) etle Syndicat National des Agents de la Santé(SYNAS)27.

La mobilisation des différents personnels étaitsignificative du malaise social permanent: lecumul sans cesse croissant des arriérés de sa-laires. Cette situation de détresse réduisait lesplates-formes revendicatives en guerre salariale.Les grèves débouchaient parfois sur des annéesblanches dans le secteur de l’enseignement. Lesélèves comoriens étaient en permanence pris enotage à la fois par l’Etat, lequel fermait souventles portes à toutes négociations, et les syndicatssoutenus et encouragés par les partis politiquesde l’opposition. Les autorités de l’Etat, assimi-laient chaque mouvement de grève à une tenta-tive de déstabilisation du gouvernement. Ce quiouvrait les portes à toutes les dérives possibles.

Rares étaient les ministres qui prenaient, dès ledépart, les revendications salariales au sérieux.Les menaces de licenciement envers les diri-geants des syndicats étaient à chaque fois bran-dies par les gouvernements, ce qui n’était pas denature à calmer le jeu. Une situation que beau-coup d’observateurs ne pouvaient pas com-prendre, dans la mesure où la constitution areconnu la liberté syndicale. Les épreuves deforce étaient monnaie courante allant jusqu’àl’organisation des examens par des non-ensei-gnants.

Quand il y a eu des négociations notammentsous le régime du président Mohamed Taki Ab-doulkarime (1996-1998) et du président AzaliAssoumani (1999-2006), des avancées ont étéobtenus: uniformisation des diplômes d’Etat

des infirmiers, deux avancements28 des agentsde la fonction publique ont été opérés. Mais cesbons résultats arrivent à un moment où la lassi-tude a gagné les syndiqués. La fête du premiermai intéresse de moins en moins les salariés etles congrès ne sont plus tenus. Contrairementaux années 1980 et 1990 les grèves sont de plusen plus impopulaires et reçoivent de moins enmoins le soutien de la population.

Ce dysfonctionnement exprime un malaise pro-fond. La population est irritée de la stratégiesyndicale réduite à des fermetures fréquentesdes établissements scolaires et hospitaliers, dufait des arriérés de salaires, sans qu’il y ait desavancements véritables dans les méthodes etdans les approches revendicatives. Les événe-ments séparatistes de Ndzuwani n’ont fait queprouver l’aspect superficiel du syndicalisme quin’est pas encore bien ancré dans les pratiquesde la société civile. Les syndicats gagneraient encrédibilité en s’impliquant davantage dans la re-cherche de solutions novatrices aux problèmesstructurels que connaît le pays dans le domainebudgétaire et de gouvernance (mise en place desassociations parents-maîtres, structures decontrôle budgétaire…).

C. Les ONG opérant dans lapromotion du genre

Bien que la situation du genre laisse apparaîtrede grands déséquilibres entre les sexes, des pro-grès significatifs ont été réalisés au cours de cesdernières années. Le réseau National Femmeset Développement (RNFD), le Réseau Nationaldes Avocats du Genre (RENAG) et de nom-breuses organisations développent des actionsde sensibilisation et de mobilisation en faveurde la promotion du genre dans le pays. A la suitede leurs nombreuses actions, un commissariatà la solidarité et à la promotion du Genre a étécréé avec pour mission principale l’éliminationdes inégalités entre les sexes. Le Gouvernementa ratifié la convention portant sur l’éliminationde toutes les formes de discrimination à l’égard

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27Le SYNAS a été crée en 1991 suite aux affectations arbitraires des agents de la Santé, orchestrées par le Ministre de la Santé28Ces avancements étaient gelés par le Ministre des Finances d’Ahmed Abdallah, Said Ahmed Said Ali

29Le SNPC ne tient plus ses congrès depuis 1992. Des démarches sont en cours pour septembre 2009, fruit des démarches enta-mées à Mohéli, Anjouan et en Grande-Comore par la nouvelle direction provisoire

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des femmes et a entamé la mise en œuvre de laplate-forme de Beijing. Des campagnes de sen-sibilisation sur le genre sont en cours à traversle pays. Une politique nationale de genre a étéélaborée et adopté, et un plan d’action quin-quennal sera adopté prochainement. La nou-velle Loi fondamentale fait de l’intégration dela dimension genre une exigence constitution-nelle.

La politique nationale de genre gagnera en co-hérence et en efficacité si elle prend en compteles besoins profondément ressentis par lafemme comorienne non scolarisée. La missionhistorique de l'élite féminine actuelle, comptetenu des fondements sociologiques de la com-munauté nationale, est de faire passer la géné-ration actuelle et celles qui suivent, de lacitoyenneté communautaire à la citoyenneté po-litisée. Aux dernières élections législatives, lesfemmes ont été nombreuses à se porter candi-dats (13 pour les mandats de conseillers et 11pour les mandats de députés). Malheureuse-ment, seulement deux d’entre elles ont été éluesau niveau des conseillers. La réussite de cettepolitisation demande l'élaboration d'une straté-gie fondée sur une connaissance approfondiedes conditions sociales et familiales du citoyen,et dépend de la mise en œuvre des programmesappropriés d'information et de formations desadultes et de scolarisation des enfants, pour l'in-sertion des uns et des autres dans une sociététournée vers le progrès. Pour obtenir l'adhésionde la population à une politique si ambitieuse,les responsables de la conception et de l'exécu-tion de la politique de genre ne peuvent pasignorer la nature des liens qui garantissent de-puis plus de quinze siècles, la solidarité et la co-hésion de la nation. Ils doivent être capables depuiser dans la culture du peuple pour assurerl'évolution du pays en produisant, hors de toutmimétisme, leurs schémas structurels propreset parfaitement adaptés aux données de leur en-vironnement.

Il est incontestable que la politique nationale etles actions des ONG nationales et internatio-

nales en faveur du genre remportent de grandssuccès dans le domaine de l’éducation. Lesfemmes instruites se regroupent dans des asso-ciations de développement qui fonctionnent surla base de statuts écrits. Elles mènent alors desactivités d'alphabétisation, de formation dejeunes filles aux travaux ménagers. Elles lancentdes campagnes de sensibilisation sur les grandsproblèmes de santé publique et de protectionde l'environnement. Les femmes cadres, qui ontpu exercer des fonctions de responsabilité font,pour la plupart d'entre elles, preuve de dyna-misme et de professionnalisme reconnus par lesclasses dirigeantes. Néanmoins, tant qu'elles neseront pas capables de s'insérer dans la sociététraditionnelle et œuvrer ensemble pour la trans-former de l'intérieur, elles se priveront d'untremplin pour accéder aux centres de décisionsdes politiques nationales.

Les associations coutumières des femmesn'évoluent pas au même rythme que celles deshommes. Les premières ne comptent que de-puis peu et en nombre infime, des membres quiont acquis une expérience de la hiérarchie mo-derne des statuts professionnels et qui ont vécud'autres règles du jeu social que celles édictéespar la coutume. 97% des femmes de 45-49 anscontre 88% d'hommes n'ont pas fréquentél'école primaire; 31% des femmes de 25-29 anscontre 47% d'hommes ont un niveau d'ensei-gnement secondaire ou supérieur (EDSC 1996).Non seulement les femmes instruites sont peunombreuses, mais en plus, elles sont marginali-sées jusque dans les assemblées exclusivementféminines. Celles qui n'ont pas franchi toutes lesétapes de réalisation du "grand mariage" sontstigmatisées par le statut de personne de moin-dre valeur. Le nombre des femmes intellec-tuelles encore minoritaire qui militent contre lesdépenses ostentatoires du grand mariage cèdedevant les ainées et les femmes peu instruitesqui néanmoins détiennent une grande majoritédu commerce informel et qui, en général, s’op-posent à toute réforme du système. Celui-ci estdevenu une arène pour la démonstration d'unesupériorité par l'argent et toute autre valeur de

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générosité, de fraternité, de solidarité entre lesréseaux familiaux est en passe d'être éliminée.

Les groupements de la société féminine peuventpourtant jouer un rôle éminemment positifdans la communauté. Les femmes mariées pos-sèdent la capacité institutionnelle et les moyensfinanciers provenant des prélèvements sur lesprestations distribuées au cours des cérémoniescoutumières pour concevoir et mettre en œuvredes programmes d'équipements publics. Fon-dées sur la seule loi coutumière (andanamila),donc non écrite, les associations des femmes dequartiers ne peuvent pas solliciter, comme lesautres organisations locales de développement,l'assistance des organismes internationaux de fi-nancement. Leurs projets sont pourtant mieuxciblés, répondent à des besoins réellement res-sentis par la communauté et suscitent une vo-lonté collective de maintenir et préserver lesinvestissements réalisés.

Les associations féminines traditionnellesconstituent des puissants groupes de pression,qui lancent les modes vestimentaires et des nou-velles recettes culinaires, lors des concerts et descérémonies d’échanges des cadeaux entre les fa-milles des mariés. Elles exercent une forte in-fluence sur le choix des produits consommésdans les repas de fêtes familiales et communau-taires. Elles comptent parmi ses membres descommerçantes avisées et des agents publicitaireshabiles à lancer des produits nouveaux en créantdes slogans souvent efficaces. Elles seraient ca-pables de renverser la tendance actuelle en fai-sant du "grand mariage" un instrument depromotion des produits locaux, de créationd’emplois, et donc un moyen efficace de luttecontre la pauvreté et l’exode rurale. Beaucoupde femmes sont des spécialistes du tourismed'affaires et sillonnent les pays des différentscontinents. Une formation adaptée au com-merce international ferait d’elles des courtièresefficaces pour lancer les produits comoriens surles marchés extérieurs. D’autres filières tellesque le stylisme, la haute couture, le sport, lacréation d’entreprise s’ouvrent de plus en plus

à la compétence des femmes.

D. Les associations de la Dias-pora

Les Comoriens ont toujours été un peuple demigrants. Les plus importants mouvementsd’émigration débutent vers l’année 1864, aprèsl’inauguration de la ligne des messageries mari-times (Maurice, Réunion, Diégo-Suarez, Maha-janga, Comores, Zanzibar et Marseille via la MerRouge30). C’est de cette époque sans doute quedate l’installation des Comoriens à Mahajanga,à Zanzibar, à Durban, ou au Mozambique. C’estde cette période également que daterait la no-tion de «navigateurs», nom donné aux Como-riens embauchés sur les bateaux de laMessagerie.

Les Comoriens s’installent d’abord dans les payset îles voisines. Zanzibar a été la destination deprédilection des Comoriens. Leur installationsur cette île remonterait au temps du sultanat deMascate. Les Comoriens s'y rendent régulière-ment pour se pourvoir en épices, acheter deshabits et autres costumes d’apparats utilisés lorsdes mariages ou des cérémonies traditionnelles.Ils y vont aussi pour s’inscrire dans les écolesde théologie musulmane de l'île. L’immigrationcomorienne à Madagascar daterait de la fin du19e siècle. Une colonie importante s’était déjàfixée à Mahajanga. Elle gagne en nombre à par-tir de 1912, période au cours de laquelle lesplanteurs de Madagascar font appel aux Como-riens pour travailler sur leurs terres. Cette pré-sence comorienne dans la Grande Ile vas’accentuer avec l'annexion de l'archipel par laFrance et son rattachement comme dépendancede Madagascar.

Des Comoriens sont aussi présents dans l’île dela Réunion dès le début du XIXème siècle. Cer-tains sont des ouvriers agricoles, ou travaillentdans les usines de canne à sucre; d’autres sontrecrutés comme dockers, importés pour briserdes mouvements sociaux très fréquents dans

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30Chanudet Claude, 1990 – Mohéli et les Comores dans le sud-ouest del’Océan Indien. – Paris INALCO, 154p (Etude Océan Indien n°11)

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l’île. La Réunion a eu en outre à accueillir desdéportés et des bannis de l’Etat colonial françaisaux Comores; le plus illustre d’entre eux est lesultan Said Ali qui y séjournera en tant qu’exiléentre 1894 et 1909. La Diaspora s’amplifie dansles années 1920-1930. Ce mouvement d’instal-lation des natifs des Comores dans l’île s’accé-lère avec l’acquisition en mars 1946, du statutde Département d’outre mer. Les nouveaux mi-grants comoriens s’y établissent comme travail-leurs, constituant la génération la plus ancienne.

En Europe, les premiers Comoriens s’installenten France et en Angleterre. Ceux vivant enFrance sont constitués par un petit nombre demilitaires, et de «navigateurs» travaillant, dansleur majorité, dans les Messageries maritimes etla Havraise Péninsulaire. Ils sont principalementimplantés dans les villes portuaires de Marseilleet de Dunkerque, depuis les années 1920. Dansla cité phocéenne, ils élisent domicile dans lesvieux quartiers, aux alentours de la Place d’Aix,où ils recréent les Comores en miniature.

En 1968, l’Institut français des statistiques re-cense 844 individus31 d’origine comorienne vi-vant en France. Les Comoriens vivant enAngleterre proviennent principalement deMombasa et de Zanzibar. On les trouve surtoutdans les universités de Londres et d’Oxford, oudans les écoles professionnelles.

La Diaspora comorienne installée en Tanzanieest la première à se lancer dans la lutte politiqueet à promouvoir l’idée de libération des Co-mores par tous les moyens. Fortement repré-sentés dans les instances de décisions de l’île deZanzibar, ces comoriens sont imprégnés de na-tionalisme et de désir d’indépendance. Ils créentune toute première association qui très vite de-viendra un mouvement politique appelée leMouvement de Libération Nationale des Co-mores (MOLINACO). A la Réunion, au coursde cette même période, les originaires des Co-mores créent une association dénommée «As-sociation des Comoriens» qui cherche à lesréunir au sein d’une organisation capable de ser-

vir d’intermédiaire avec l’administration locale.En France, la petite communauté estudiantinecomorienne, réunie le 27 mars 1966, à Aix-en-Provence, décide la création d’une associationde défense de ses intérêts moraux et matériels,appelée Association des Stagiaires et EtudiantsOriginaires des Comores en France (ASEOCF)et qui deviendra plus tard Association des Sta-giaires et Etudiants des Comores (ASEC).

Une constante dans la Diaspora comorienne,notamment celle qui est installée en France, estla conservation de relations relativementétroites avec l’archipel. Ils y retournent fré-quemment pour se marier, assister à un enter-rement, ou préparer le pèlerinage à la Mecque.Selon les nombreuses études réalisées, cetteDiaspora assure des transferts de biens consti-tués essentiellement des Véhicules, matériauxde construction, articles de ménages, vêtements,médicaments, etc. Elle participe également dansl’initiation et la mise en œuvre de projets com-munautaires de prestige. Les formes actuellesd’intervention de la Diaspora sont souvent cri-tiquées et considérées comme des investisse-ments stériles et contre productifs. Le principalposte d’affectation de l’argent des transferts àNgazidja est le grand mariage ainsi que des ma-nifestations coutumières à caractère religieuseou initiatique. Ces manifestations sont des oc-casions de frénétiques consommations.

Dans le souci de mettre en place un cadre stra-tégique adéquat pour mieux orienter les trans-ferts financiers de la Diaspora, les autoritéscomoriennes ont entrepris une série d’initiativesnotamment la mise en place d’une direction ad-ministrative chargée de la Diaspora, l’organisa-tion de réunions périodiques avec les différentsreprésentants de cette Diaspora principalementcelle résidant en France, l’ouverture de succur-sales de la SNPSF en France. La problématiquedu rôle de la Diaspora comorienne dans le dé-veloppement du pays suppose que les condi-tions d’un véritable partenariat soient réuniespour rendre possible l’utilisation optimale dupotenciel que représentent ces concitoyens co-

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31Rapport du Recensement français de 1968

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moriens vivant à l’étranger. Il s’agit entre autresde:

- Réunir les conditions socio-politiques et éco-nomiques nécessaires pour créer un climat pro-pice afin d’attirer des investissements productifsissus de la Diaspora- Constituer des réseaux scientifiques et tech-niques capables d’aider au transfert des connais-sances de la Diaspora pour assurer ledéveloppement du pays- Assurer un meilleur encadrement et unebonne orientation des différentes interventionsinitiées par la Diaspora à travers une meilleurearticulation entre les pouvoirs publics, le mou-vement associatif et les ONG nationales et in-ternationales- Accélérer le processus de mise en place des

communes afin de favoriser l’émergence desgrands projets de développement fédérateurs àcaractère régional qui impliqueraient la Dias-pora aussi bien dans l’investissement que dansl’expertise- Prendre en compte la dimension Diasporadans les grands projets d’envergure nationalepour le développement durable- Poursuivre et renforcer les actions initiées vi-sant à sécuriser les transferts financiers à traversles institutions financières nationales (banquede développement, MECK, SANDUK,), et desprojets d’appui au développement durablecomme AMIE, FADC- Poursuivre le désenclavement du pays en dé-veloppant le trafic aérien et maritime et en ren-forçant leur sécurité.

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La cohésion sociale est un concept multidimensionnel complexe.Certains auteurs continuent à s’interroger sur ses fondements et sapertinence32. La cohésion sociale émerge de la préoccupation demaintenir les équilibres et de sauvegarder l’unité nationale dans lessociétés et les grands ensembles pluriethniques et pluriculturels.

Certes les Comores ne connaissent pas des problèmes multieth-niques, mais leur petite taille cache des réalités sociales caractériséespar des forts sentiments d’appartenance clanique, communautaire etrégionale, et qui peuvent être sources de compétitions voire deconflits d’intérêts. Par conséquent, toute politique de développementaux Comores doit viser à transcender ces divergences et à forger lesmentalités de manière à dépasser le niveau clanique, communautaireet régionale et à évoluer vers le sentiment d’appartenance à une na-tion, dont les intérêts prévalent sur ceux du clan, de la communautéet de la région.

L’analyse de la situation de la cohésion sociale et du développementhumain a mis en exergue la complexité de la société comorienne etl’ampleur des besoins auxquels il faut répondre pour promouvoir lacohésion sociale et le développement humain. Elle a révélé l’existencede facteurs de décohésion sociale et surtout la faiblesse actuelle descadres politique, législatif et institutionnel pour servir de vecteur àla promotion de la cohésion. Dans ces conditions, l’élaboration d’unestratégie nationale de cohésion sociale constitue une cible prioritaire.L’analyse des initiatives structurant la cohésion sociale a montré qu’ilexiste une forte tradition communautaire de solidarité et des méca-nismes de prévention et de gestion des conflits.

Le processus de réconciliation nationale initié dans le cadre de l’ac-cord de Fomboni a permis de calmer les mécontentements et demaintenir l’unité nationale, ceci malgré la complexité de l’architectureinstitutionnelle mise en place qui est porteuse de beaucoup d’incer-titudes. L’éventail de stratégies informelles de solidarité et de gestiondes risques, contribue au maintien de la cohésion sociale. Les solida-rités locales ou familiales contribuent au soutien des ménages et desindividus vulnérables, au rassemblement des communautés localeset au maintien de la paix sociale. Les us et coutumes liées au grandmariage, très puissants à Ngazidja favorisent les efforts déployés parles villageois pour le développement communautaire. Des associa-tions de la diaspora et des émigrés envoient régulièrement de l’argentdans leurs villages pour le bénéfice de leurs parents ou de la com-munauté. Ces apports qui illustrent un dynamisme communautaireest un atout majeur dans le maintien de la cohésion sociale. On peutconstater une cohésion sociale dans la précarité et qui n’est pas viable.Le défi consiste à mettre en place des stratégies adéquates pour luttercontre les archaïsmes qui empêchent la société d’internaliser les chan-gements nécessaires au progrès tout en préservant les valeurs qui luipermettent de faire face aux chocs extérieurs notamment ceux inhé-rents à la mondialisation.

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82 32Voir Paul Bernard, La cohésion sociale: critiques dialectique d’un quasiconcept, Université de Montréal, Département de Sociologie, 1999.

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Les principales recommandations issues du processus d’élaborationde ce rapport sont:

1. Promouvoir l’éducation à la citoyenneté, la formation et la re-cherche vecteurs de cohésion sociale: Il s’agit d’investir dans la pro-motion d’une culture du sentiment d’appartenance national et decitoyenneté en contribuant à:- Renforcer l’instruction civique dans les écoles,- Instaurer l’enseignement de l’histoire et de la langue comoriennedans les programmes scolaires,- Instaurer un système de service national obligatoire des jeunes quiatteignent l’âge de 18 ans,- Augmenter les moyens divers des médias audio-visuels nationauxet renforcer leurs capacités d’assurer une couverture sur l’ensembledes quatre îles,- Permettre l’éligibilité de chaque citoyen dans chaque partie du ter-ritoire national- Encourager la mobilité des citoyens entre les iles et les régions

2. Faire des organisations de la société civile des cadres de promotiondes valeurs démocratiques et de cohésion sociale: Les organisationsde la société civile sont aujourd’hui des cadres qui peuvent permettreà leurs adhérents de promouvoir les valeurs démocratiques et consti-tuer une force de propositions en matière de développement socio-économique. Elles disposent d’une implantation dans les différentesîles. Une reconnaissance et un soutien devraient leur être apportésafin d’assurer leur développement et leur épanouissement.

3. Initier et développer des politiques économiques basées sur la di-versification de la production nationale et des activités économiquesà forte valeur ajoutée: il s’agit d’accroître la richesse nationale afin dedégager les moyes de financer les services sociaux de base (santé,éducation, assainissement, énergie etc.). L’Etat devrait réguler et sou-tenir la diversification de la production nationale. Il doit appuyer desprogrammes sociaux de grande envergure et la recherche des inves-tissements.

4. Faire de la déconcentration et de la décentralisation de l’Etat desprincipes fondateurs de la cohésion sociale. Tenant compte de lanouvelle architecture institutionnelle et des conflits de compétencesrécurrents, le rôle de l’Etat devrait être revu et renforcé dans ses mis-sions régaliennes. Il doit être présent de façon effective sur le terri-toire national. Pour autant, les îles et les collectivités locales devraientvoir leurs actions de développement local étendues et soutenues afinde rapprocher l’administration des citoyens. Il ne devrait plus avoirde confusion possible entre les missions d’Etat et celles d’une entité.Pour la mise en œuvre effective de la présente recommandation, ilimporte d’adopter comme principes de bonne gouvernance et degestion efficace de différents personnels des administrations pu-

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bliques la possibilité d’affectation et ou de mu-tation des agents de l’Etat, pour nécessité deservice, sur les différentes parties du territoirenational.

5. Contribuer à la mise en place et au fonction-nement des collectivités locales (communes)afin d’impliquer fortement la population dansle processus de développement humain durableet chacun puisse apporter sa contribution dansla construction de la cohésion sociale et du dé-veloppement du pays.

6. Refonder la fonction publique pour en faireun instrument fédérateur de la nation: Il s’agitde faire jouer à la fonction publique un rôle depromoteur de services de qualité de sorte à laréconcilier avec ses usagers. La Haute Autoritéde la fonction publique devrait remplir correc-tement sa mission régulatrice de l’administrationpublique et de garant de son bon fonctionne-ment. Les capacités de cette institution devrontêtre renforcées en vue de contribuer à la mora-lisation des services, à l’assainissement du fi-chier FOP et à un recrutement qui réponde àdes critères scientifiques établis et reconnus (ré-férences exigées, évaluation, concours, gestionde carrières rationnelle et le principe du mérite)7. Promouvoir et renforcer les communicationset les télécommunications intra et inter-îles: Ilest indéniable que la proximité favorise les soli-darités entre communautés villageoises insu-laires et nationales. L’Etat doit favoriser ledéveloppement des transports aériens, mari-times et terrestres, gages de liberté de circula-tion des biens et des personnes. La connexiondes Comores à la fibre optique doit réellementcontribuer au désenclavement du pays entermes de télécommunication et accélérer le dé-veloppement économique de l’Archipel, dansun contexte de mondialisation.- Développer un programme d’infrastructuresappropriées pour rapprocher encore plus les îles(ports et aéroports secondaires, renforcementdes centres administratifs…)- Promouvoir et vulgariser les Technologies del’Information et de la Communication.

8. Faire de la promotion et la codification de la

langue nationale un vecteur de développementhumain: La promotion de la langue comorienneest une nécessité pour intégrer le développe-ment. Son apprentissage doit prendre encompte ses variantes locales qui font sa richesseet son dynamisme. La reconnaissance de ces va-riantes et leur mise en valeur est un moyenidoine pour la pratique des recherches socialeset culturelles locales qui doivent en retour nour-rir la connaissance scientifique du pays dans saglobalité. L’Université des Comores doit consti-tuer le socle pour faire de la langue comoriennele moyen pour concevoir et diffuser ses re-cherches et ses découvertes. Les stages de for-mation, les mémoires personnels, les travauxpratiques et les visites professionnelles, qu’en-treprendraient les étudiants dans les îles autresque leur ile d’origine, feraient de l’Université desComores le cadre idéal pour la mise en place dechantiers favorisant des échanges réels et des re-lations cohésives.

Il s’agit de contribuer à:- la reconnaissance officielle et l'introductiondans le système éducatif, des graphies arabe etlatine, et l'orthographe proposées par leCNDRS,- la traduction en shikomori et la vulgarisationdes textes constitutionnels et des lois au profitde la population,- la traduction en shikomori du code de la fa-mille et sa diffusion large, avec à l'appui, desproductions radiodiffusées et télévisées; ainsique tout autre document officiel jugé nécessaireau renforcement de la gouvernance, l’Etat dedroit et la politique de genre,- la promotion de la presse écrite en shikomori

9. Instaurer des nouveaux mécanismes et struc-tures de prévention et résolution des conflits:Les enseignements tirés ces derniers temps desconflits liés soit au foncier, à la pratique dessports et à la pêche montrent que le rôle jouéjusqu’ici par les structures traditionnelles pouraplanir les conflits et malentendus est insuffi-sant. D’où la nécessité d’instaurer des nouvellesmédiations capables d’apporter les solutions ap-propriées. Il est urgent de mettre en place unecharte de résolution des conflits incluant la for-

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mation et la spécialisation des médiateurs.

10. Promouvoir la micro finance comme sourcede création de richesses, de cohésion sociale etde développement économique: Les liens de so-lidarité au travers des associations intercommu-nautaires, l’entretien des tontines (Mtsango,shikowa) et le fait que les communautés adhè-rent progressivement au système de micro fi-nance constituent des facteurs qui renforcent lasolidarité et la cohésion sociale et encourage ledéveloppement économique des collectivités.L’existence de ces réseaux de solidarité et de cesdynamiques sociales en même temps que lamicro-finance est une opportunité pour encou-rager le développement d’une économie socialeet populaire qui adopterait des règles souples etpragmatiques ainsi que les principes d’une éco-nomie solidaire.

11. Renforcer la justice et l’Etat de droit commerempart contre les assauts de la décohésion: Ils’agit de contribuer à mettre en place des méca-nismes d’appui et de régulation tels que:

11a. La création d’une Haute Autorité de Luttecontre les discriminations et pour l’égalité descitoyens (la HALDEC): La création d’une au-torité administrative indépendante permettraitd’asseoir sur des bases solides notre identité ci-toyenne. La HALDEC aurait pour mission:- Le traitement des réclamations individuellesou collectives dont elle est directement saisie oudécide de se saisir,- La promotion et la défense du principe del’égalité des citoyens (recommandations, recon-naissance de bonnes pratiques, traitement desréclamations)

11b. Promouvoir les outils juridiques de luttecontre la discrimination sous toutes ses formes:La xénophobie, le communautarisme, le régio-nalisme, le séparatisme sont un danger publicgravissime pour la cohésion sociale et le progrèséconomique et culturel auquel aspirent les Co-mores.

12. Renforcer et Consolider l’Armée Nationalede Développement (AND) pour en faire uneinstance de sécurité et d’intégration sociale:

Face aux mutations tant internes que mondialeset aux enjeux géostratégiques, l’Armée Natio-nale de Développement (AND) constitue un pi-lier important de la cohésion nationale. Son rôlea été décisif lors de la «libération de Ndzuwani»et du rétablissement de l’unité nationale.L’AND est aussi un acteur important pour lasécurité des frontières. Son rôle devra être accruet ses moyens renforcés afin qu’elle puisse as-surer pleinement ses missions essentielles dont:- La préservation de l’intégrité du territoire na-tional en s’implantant solidement dans l’ensem-ble du territoire,- L’organisation des secours humanitaires,- Participer à la formation des jeunes à des mé-tiers spécialisés de génie civile, mécanique, élec-tricité, etc.- Participer à l’instauration d’un système de ser-vice national- Participation aux grands travaux nationauxd’utilité publique

13. Initier et développer une politique hardie demobilisation des ressources internes et externespour financer les investissements indispensablesau développement humain durable et contri-buer au renforcement de la cohésion sociale. Ilest important d’identifier les canaux pour la mo-bilisation de ressources pour soutenir le déve-loppement. L’Etat devrait concevoir et mettreen œuvre une coopération pour le développe-ment.

14. Développer un programme national de col-lecte, de traitement et de valorisation des don-nées statistiques afin d’établir un cadre nationalde suivi et d’évaluation des progrès nationauxen matière de développement humain durableet de cohésion sociale. Il s’agit de combler lesgaps actuels et d’asseoir des mécanismes solideset transparents pour rendre compte des résul-tats de l’action de développement.

15 Favoriser la constitution de partis politiqueset ONG à caractère national. Cela servirait àrenforcer la solidarité entre les îles et les régionsde l’union des Comores et serait un antidote auxidéologies séparatistes tous azimuts qui minentl’unité nationale et la cohésion sociale.

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Liste des membres du

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- Sitti Said Hassane, Directrice des Affaires Sociales de Ngazidja, Présidente du Comité de Pilotage- Alfeine Soifiat Tadjiddine, Commissaire Générale au Plan- Toulaibi Msa, Directeur de la Population et du Développement, CGP - Soalihy hamadi, Directeur de la Coordination des Projet, CGP - Salim Djabir, Président du COPSED de Mwali - Halifa Houmadi, Président du COPSED de Ndzuwani - Chamsouddine Tourqui, Président du COPSED de Ngazidja - Mohamed Rachadi Ibrahim, Président de l’Université des Comores- Ainoudine Sidi, Président, du CNDRS- Said Aboubacar, Directeur Général du Plan de Ngazidja- Zakaria Dayadji, Directeur Général du Plan de Mwali- Claude Ben Ali, Directeur Général du Plan de Ndzuwani- Moinafatima Charani, Représentante du RENAG- Riad Meddeb, Conseiller Economique Principal du PNUD- Attoumane Boina Issa, Economiste National du PNUD- Aboubacar Boina, Secrétaire Général de la Commission National de l’UNESCO- Moinaécha Cheikh Yahaya, Enseignant chercheur à l’Université des Comores- Abdallah Nourdine, Enseignant chercheur à l’Université des Comores- Fatouma Hadji, Directrice de la Solidarité- Idi Mohamed, Doyen de la faculté de Droit de l’Université des Comores- Mahamoud Abdallah, Secrétaire Général du SYNAS- Abdou-salam Saadi, Responsable de l’Unité Gouvernance du PNUD- Said Bourhane, Doyen de la faculté Imam Chafion de l’Université des Comores- Mohamed Toihir, Directeur du CUFOP, Université des Comores- Assoumani Youssouf Mondoha, Président de la Commission des Affaires Sociales de l’Assemblée Nationale- Cha an Bany Moussa, Intersyndical des enseignants

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COMITÉ DE SUPERVISION

Consultants nationaux Comité technique Comité de lecture

Commissariat Général au Plan(CGP)

Programme des Nations Unies pour le

Développement(PNUD)

ONU Comores

Secrétariat technique

Université des Comores et CNDRS Comité de pilotage

Ateliers de concertation

Atelier national de validation

Groupe thématique Genre & Droits

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COMITÉ DE SUPERVISION

Consultants nationaux Comité technique Comité de lecture

Commissariat Général au Plan(CGP)

Programme des Nations Unies pour le

Développement(PNUD)

ONU Comores

Secrétariat technique

Université des Comores et CNDRS Comité de pilotage

Ateliers de concertation

Atelier national de validation

Groupe thématique Genre & Droits

HumainsCOPSED

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REFERENCES

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