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AVERTISSEMENT Ce texte a été téléchargé depuis le site http://www.leproscenium.com Ce texte est protégé par les droits d’auteur. En conséquence avant son exploitation vous devez obtenir l’autorisation de l’auteur soit directement auprès de lui, soit auprès de l’organisme qui gère ses droits (la SACD par exemple pour la France). Pour les textes des auteurs membres de la SACD, la SACD peut faire interdire la représentation le soir même si l'autorisation de jouer n'a pas été obtenue par la troupe. Le réseau national des représentants de la SACD (et leurs homologues à l'étranger) veille au respect des droits des auteurs et vérifie que les autorisations ont été obtenues, même a posteriori. Lors de sa représentation la structure de représentation (théâtre, MJC, festival…) doit s’acquitter des droits d’auteur et la troupe doit produire le justificatif d’autorisation de jouer. Le non respect de ces règles entraine des sanctions (financières entre autres) pour la troupe et pour la structure de représentation. Ceci n’est pas une recommandation, mais une obligation, y compris pour les troupes amateurs. Merci de respecter les droits des auteurs afin que les troupes et le public puissent toujours profiter de nouveaux textes. 1

A Aulis, port où s’est réunie la flotte grecque en vue d’attaquer la … · 2014-07-21 · A Aulis, port où s’est réunie la flotte grecque en vue d’attaquer la ville de

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AVERTISSEMENT

Ce texte a été téléchargé depuis le site

http://www.leproscenium.com

Ce texte est protégé par les droits d’auteur. En conséquence avant son exploitation vous devez obtenir l’autorisation de l’auteur soit directement auprès de lui, soit auprès de l’organisme qui gère ses droits (la SACD par exemple pour

la France).

Pour les textes des auteurs membres de la SACD, la SACD peut faire interdire la représentation le soir même si l'autorisation de jouer n'a pas été obtenue par la

troupe. Le réseau national des représentants de la SACD (et leurs homologues à l'étranger) veille au respect des droits des auteurs et vérifie que les autorisations

ont été obtenues, même a posteriori. Lors de sa représentation la structure de représentation (théâtre, MJC, festival…) doit s’acquitter des droits d’auteur et la troupe doit produire le justificatif d’autorisation de jouer. Le non respect de ces règles entraine des sanctions (financières entre autres) pour la troupe et pour la

structure de représentation.

Ceci n’est pas une recommandation, mais une obligation, y compris pour les troupes amateurs.

Merci de respecter les droits des auteurs afin que les troupes et le public puissent toujours profiter de nouveaux textes.

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PROMISEde Anne-Sophie Nédélec

Inspiré de Iphigénie à Aulis Euripide

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SynopsisAu moment de lancer les navires grecs à l’assaut de la ville de Troie, les vents cessent de souffler. Artémis exige qu’Agamemnon lui sacrifie sa fille, Iphigénie. Celui-ci la fait venir au camp d’Aulis sous le prétexte de la marier avec Achille. Mais contrairement à ses ordres, Clytemnestre est venue accompagner sa fille…Conservant la structure d’une tragédie grecque, « Promise » raconte le sacrifice d’Iphigénie en utilisant un chœur de jeunes femmes comme soutien à l’action.

DistributionAgamemnonMénélasClytemnestreIphigénieAchille

Le chœur de jeunes femmes : Le coryphée = chef du chœurLa servante d’AgamemnonLa 1ère jeune filleLa 2ème jeune filleLa servante de Clytemnestre

DécorLe camp d’Agamemnon à Aulis.Une vasque

Tout public

Durée : 1h

Texte déposé à la SACD : pour toute représentation publique, faire une demande d’autorisation auprès de la SACD (www.sacd.fr Pôle utilisateurs-spectacle vivant)

Contact : Mail : [email protected] Blog : www.asophienedelec.wordpress.com

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A Aulis, port où s’est réunie la flotte grecque en vue d’attaquer la ville de Troie.Au fond, la tente d’Agamemnon, dont l’entrée est matérialisée par deux rideaux et deux trépieds dans lesquels un feu est allumé.En avant-scène, à jardin, une grande vasque.A cour, un gong.

La fumée envahit le plateau. Le coryphée entre et remplit la vasque. Il trouble l’eau et commence…

LE CORYPHEE : Voici les temps anciens où les dieux, présents sur le sol de Grèce,n’hésitent pas à intervenir dans les affaires des hommes, et les amènent à commettre les crimes les plus sordides au nom de l’honneur et du devoir.Clytemnestre, fille du roi Tyndare et de Léda, avait pour sœur Hélène, que Léda avait conçue de Zeus après qu’il l’eut séduite sous la forme d’un cygne.Les deux jeunes filles devaient devenir les épouses des Atrides.Agamemnon, l’aîné des fils d’Atrée, enleva Clytemnestre,et Hélène devint l’épouse de Ménélas, non sans que son père ait pris certaines précautions auparavant.Car Hélène était si belle qu’elle avait tourné la tête des princes de la Grèce.Tous voulaient sa main.

On aperçoit dans la tente les prétendants prêter serment. La suite du récit est également mimée.

Grand était l’embarras de Tyndare qui ne savait quel parti serait le meilleur pour sa fille.Il eut alors l’idée d’unir les prétendants par des serments :devant des victimes brûlées, ils jurèrent,en se maudissant s’ils manquaient à leur parole,de tous s’allier pour défendre celui qui recevrait la fille de Tyndare pour épouse.Ils jurèrent que, si quelqu’un venait à la ravir et le dépouillait de son lit,ils prendraient les armes pour partir en guerre contre le ravisseur.

Le serment donné et la sécurité de sa fille assurée,le vieux Tyndare alors lui permit d’élire pour épouxl’homme dont l’élan amoureux avait touché son cœur.Elle choisit celui qu’elle n’aurait jamais dû prendre : le roi de Sparte, Ménélas, frère d’Agamemnon.

Vint alors cet homme qu’on prétend être l’arbitre des déesses,Pâris de Troie,tout fleuri d’habits somptueux, éclatant d’or et de luxe barbare.Il s’éprit d’Hélène autant qu’elle de lui et l’enleva.

Alors Ménélas, dans la fureur de son désir,rappelle à toute la Grèce l’antique serment juré à Tyndare de venir au secours de l’époux outragé.Les Grecs aussitôt s’ébranlent pour la guerre, revêtent leur armure et font du détroit d’Aulis, protégé des courants, leur point de ralliement. Depuis deux ans, on rassemble ici navires et soldats innombrables,

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chevaux et chars, toutes les forces vives de la Grèce.Et pour les commander, afin de plaire à Ménélas, on élit son frère, Agamemnon.

L’armée est prête à partir, mais le vent se refuse aux voiles.

Alors Agamemnon consulte Calchas, mais le devin a répondu à son désarroi par un terrible oracle :Artémis, la déesse à la biche,Artémis, qu’Agamemnon a blessé en prétendant la surpasser au tir à l’arc, exige qu’il lui sacrifie sa fille, Iphigénie.Ainsi commence notre tragédie,le chant de Dionysos,le chant du bouc…

Le coryphée frappe le gong et sort.

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PROLOGUE

La nuit.Agamemnon est dans sa tente, en proie à une vive agitation.Une servante, assise auprès de la vasque, observe les étoiles.Enfin, Agamemnon sort et se dirige vers la servante, une tablette à la main.

AGAMEMNON : Ecoute-moi, brave servante.

LA SERVANTE D’AGAMEMNON: Je te vois en grande agitation, ô Agamemnon.Quelle ombre peut donc obscurcir le front d’un si grand roi ?Je t’écoute.

AGAMEMNON, qui hésite à parler : … Quelle est cette étoile sur la voûte céleste ?

LA SERVANTE D’AGAMEMNON : C’est Sirius, encore au milieu de sa course.Les Pléiades, filles d’Atlas que Zeus transformât en étoiles, l’entourent.

AGAMEMNON : Leur présence est signe de saison propice à la navigation. Pourtant, la flotte grecque ne peut quitter le port.

LA SERVANTE D’AGAMEMNON : Les étoiles ne commandent pas au vent.

AGAMEMNON : On n’entend rien, ni les oiseaux, ni le bruit de la mer.Et les vents se taisent.

LA SERVANTE D’AGAMEMNON : Alors pourquoi cette hâte qui te jette hors de ta tente, seigneur Agamemnon ?

AGAMEMNON : Ne sens-tu pas comme ce silence est assourdissant ?La menace des dieux pèse sur moi pire qu’une chape de plomb.

LA SERVANTE D’AGAMEMNON : Calme-toi, seigneur.Tout, dans Aulis, repose encore,la garde aux remparts attend la relève. En cet instant figé, où le monde semble suspendu au souffle des vents,profitons du silence et de la quiétude de la nature.

AGAMEMNON : Tu es sereine, toi.Heureux qui traverse sans gloire une vie sans danger.Celui-là je l’envie, et non celui qui est dans les honneurs.

LA SERVANTE D’AGAMEMNON : Là est pourtant l’éclat de la vie.

AGAMEMNON : C’est justement cet éclat qui nous perd.La gloire est flatteuse, mais son poison mortel à qui y a goûté.La gloire asservit qui la possède. Celui qui est dans la lumière n’a pas le droit à l’erreur. Il doit sacrifier son bonheur, sa vie et celle des siens aux exigences du bien commun.

LA SERVANTE D’AGAMEMNON : Je n’aime pas entendre un chef parler ainsi.Tu n’as pas été engendré pour un bonheur parfait, Agamemnon !

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Tu n’es qu’un mortel ; joie et souffrance sont notre lot communet tu ne peux rien contre les décisions des dieux.Mais je t’ai vu t’agiter dans ta tente, allumer ta lampe, écrire puis effacer ton texte,mettre le cachet et puis le rompre,jeter ton stylet à terre et puis reprendre ta tablette,fondre en larmes :bref, tous les signes d’incertitude de celui qui délire.Quel malheur t’oppresse, seigneur ?Allons, confie-moi ta peine.Tu parles à une esclave qui t’est totalement dévouée depuis le jour où Tyndare m’a joint à la dot de sa fille, Clytemnestre,et s’est fié à moi pour diriger l’escorte de ta jeune épouse.

AGAMEMNON : Le silence des vents est trop pesant pour n’être pas la volonté des dieux.J’ai voulu comprendre leur intention et j’ai consulté le devin Calchas.Il a rendu un oracle que j’aurais voulu ne jamais connaître :Artémis exige que je lui sacrifie ma fille Iphigénie.Ne pouvant me résoudre à immoler mon enfant,j’allais proclamer l’abandon de l’expédition, lorsque Ménélas vint alléguer mille raisons pour me faire accepter cet acte abominable.

Alors j’ai écrit pour demander à ma femme d’envoyer ma fille au plus vite,prétextant qu’Achille, dont j’exaltais les mérites,n’acceptait de se joindre aux Grecs qu’à la condition de recevoir une épouse de nos mains.

LA SERVANTE D’AGAMEMNON : Et le brave Achille a accepté de prêter son nom a cette funeste entreprise ?

AGAMEMNON : Achille ne sait rien. Seuls Calchas, Ulysse et Ménélas connaissent la vérité.Mais quel autre moyen de convaincre ma femme que de prétexter ce prestigieux mariage pour notre fille ?

LA SERVANTE D’AGAMEMNON : Périlleuse entreprise, Agamemnon, mon roi,de promettre ta fille au fils de la déessequand tu l’attires vers les Grecs pour être sacrifiée !

AGAMEMNON : Hélas, j’avais perdu l’esprit.Mais l’horreur de ma décision m’est apparue.C’est alors que, dans l’ombre de la nuit, tu me vis lier et délier ces tablettes.Lis ce qu’elles disent :

LA SERVANTE D’AGAMEMNON, lisant : « Contrairement à mon premier message, je te fais savoir, fille de Léda,que tu n’as pas à m’envoyer ta fille. La fête des noces est remise à des temps plus propices. »

AGAMEMNON : Pars, maintenant, et porte à Argos la missive.

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LA SERVANTE D’AGAMEMNON : Je me presse seigneur.Un tel message ne souffre pas que je m’accorde quelque repos.

AGAMEMNON : Si tu croises l’escorte,presse les chevaux et renvoie les femmes derrière les portes du gynécée.

LA SERVANTE D’AGAMEMNON : Cela sera fait.

AGAMEMNON : Pars, car le ciel blanchit déjà de la lumière de l’aurore et les feux du céleste quadrige d’Apollon bientôt illumineront ma trahison.(Il lui donne les tablettes)Prends ta part de ma peine.

LA SERVANTE : Nul mortel n’est toute sa vie comblé de biens et de bonheur.On ne vient pas au monde sans donner prise à la souffrance, mon roi.

La servante sort et Agamemnon rentre dans sa tente.

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PARODOS

Les deux jeunes filles du chœur, menées par le coryphée, entrent.

Strophe 1 :

LE CORYPHEE : Pour nous amener à la plage d’Aulis,où la mer bat le sable, notre barque a franchi les courants du détroit où s’étrangle l’Euripe.

JEUNE FILLE 1 : Nous venons de Chalcis,pour voir l’armée des Achéens, et aussi, prête à fendre la mer, la flotte des dix mille vaisseaux que le blond Ménélas et le noble Agamemnon envoient à la quête d’Hélène,elle que le berger Pâris de Troie enleva.

JEUNE FILLE 2 : Aphrodite la lui avait donnée,le jour où, près d’une fraîche fontaine,elle avait rivalisé avec Héra et Athéna le titre de la plus belle des déesses.

Antistrophe 1 :

JEUNE FILLE 1 : J’ai traversé en courant le bosquet d’Artémis, où se donnent les sacrifices, les joues rouges et le cœur battant,curieuse de voir le rempart où les Grecs protègent soldats, chars, et chevaux.

JEUNE FILLE 2 : J’ai vu les deux Ajax, compagnons d’armes ;Protésilas était assis avec le petit-fils de Poséidon, Palamède, l’inventeur du jeu de dames,à s’amuser des dessins compliqués des pions pour passer le temps.Diomède brillait au jeu du disque.Près d’eux se tenait Mérion, fils d’Arès dieu de la guerre,et Ulysse, le fils de Laërte, venu des rochers de son île en compagnie de Nirée,le plus beau de tous les guerriers grecs.

Epode :

JEUNE FILLE 1 : Achille à la course plus légère que le vent,je l’ai vu courir tout armé sur la plage,luttant de vitesse avec un quadrige.Comme il criait, le conducteur du char, en piquant ses chevaux !

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JEUNE FILLE 2 : C’était Eumélos, petit-fils de Phérès !Jamais je ne vis de plus bel attelage, dont les feins rehaussés d’orencadraient des animaux de race !Mais Achille maintenait sa foulée à hauteur malgré le poids des armes.

Strophe 2

JEUNE FILLE 1 : J’ai voulu compter les navires et rassasier mes yeux avides de leur merveilleux spectacle.

JEUNE FILLE 2 : A l’aile droite, les cinquante navires de l’armée des Myrmidons dominaient de leur poupe sculptée à l’image des Néréides,ces déesses qui servent d’insigne à l’armée d’Achille.

Antistrophe 2

JEUNE FILLE 1 : A côté, j’ai vu à l’ancre les navires d’Argos, commandés par le fils de Mécistée et celui de Capanée.

JEUNE FILLE 2 : Ensuite venaient les soixante vaisseaux ramenés d’Attique par le fils de Théséeavec pour emblème le char d’Athéna emporté par des chevaux ailés,image protectrice des marins.

Strophe 3 :

LE CORYPHEE : Puis j’ai pu voir l’escadre béotienne qui exhibait à sa proue l’image de Cadmos tenant le dragon d’or.

Antistrophe 3 :

JEUNE FILLE 1 : De Mycènes bâtie par les cyclopes, Agamemnon a amené le gros de la flotte,cent navires avec leurs équipages.Adraste avec lui les commande, pour réclamer au nom de la Grèce celle qui a déserté son foyer pour un lit barbare.

JEUNE FILLE 2 : Sur les proues venues de Pylos avec Nestor,figure le fleuve Alphée, sous les traits d’un taureau.

Strophe 4

JEUNE FILLE 1 : Puis viennent les douze vaisseaux des Enianes, ceux des dynastes d’Elide,et la flotte de Taphos avec ses rames blanches.

Antistrophe 4 :10

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JEUNE FILLE 2 : Avec ses douze vaisseaux rompus à la manœuvre Ajax de Salamine forme l’aile gauche.L’équipage que j’ai vu est si puissant que quiconque l’affronterait sur des nefs barbares, devrait renoncer au retour.

LE CORYPHEE : Ce grand rassemblement guerrier est inscrit à jamais dans notre mémoire.

Les jeunes filles s’installent auprès de la vasque et le coryphée frappe le gong.

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PREMIER EPISODE

1ère scèneMénélas entre par la gauche, tenant les tablettes que la servante d’Agamemnon essaie de lui enlever.

LA SERVANTE D’AGAMEMNON : Ah ! Ménélas, qu’oses-tu faire ?As-tu le droit d’agir ainsi ?

MENELAS : Arrière ! Chienne trop fidèle à ton maître !

LA SERVANTE D’AGAMEMNON : Voilà un reproche qui m’honore.

MENELAS : Malheur à toi que j’ai pris en faute !

LA SERVANTE D’AGAMEMNON : Tu ne devais pas ouvrir le message dont j’étais chargé.

MENELAS : Tu ne devais pas porter un message funeste à la Grèce.

LA SERVANTE D’AGAMEMNON : C’est avec ton frère qu’il faut en discuter. Mais rends-moi les tablettes.

MENELAS : Je n’en ai pas l’intention.

LA SERVANTE D’AGAMEMNON : Ni moi de te les laisser.

MENELAS : Vois mon sceptre ; il te mettra la tête en sang.

LA SERVANTE D’AGAMEMNON : Il est glorieux de mourir pour ses maîtres !

MENELAS : Assez. C’est trop parler pour une esclave.

LA SERVANTE D’AGAMEMNON, criant : Mon maître, on me fait violence.Ménélas m’a arraché de force ton message, et il refuse d’admettre qu’il est dans son tort.

Agamemnon apparaît sur le seuil de sa tente. La servante se réfugie au milieu du chœur.

AGAMEMNON : Que signifie ces cris, ce désordre devant ma porte ?

MENELAS : J’ai le droit de parler ici, et non pas elle.

AGAMEMNON : Mais pourquoi, Ménélas mon frère, la quereller et la traiter brutalement ?

MENELAS : Regarde-moi en face ; je répondrai ensuite.

AGAMEMNON : Moi, le fils d’Atrée, je devrais donc trembler et baisser les yeux devant toi ?

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MENELAS : Vois-tu bien ces tablettes, porteuses d’un coupable message ?

AGAMEMNON : Oui, je les vois. Mais laisse-moi d’abord les retirer de tes mains.

MENELAS : Pas avant que j’aie révélé leur contenu aux Grecs.

AGAMEMNON : Comment ? Tu as rompu le cachet ? Tu as lu le message ? Il ne t’était pourtant pas destiné.

MENELAS : J’ai appris, ne t’en déplaise, les méfaits que tu trames dans l’ombre.

AGAMEMNON : Oh Dieux ! Quel affront ! Où t’en es-tu saisi ?

MENELAS : Je guettais l’arrivée de ta fille au camp lorsque ton messager est passé.

AGAMEMNON : Tu es bien impudent. De quel droit épier mes affaires ?

MENELAS : Je me méfie de toi ; et je ne suis pas ton domestique.

AGAMEMNON : Ah quelle audace !

MENELAS : Tu ne sais pas ce que tu veux : aujourd’hui une chose, hier, une autre, et demain encore une autre !

AGAMEMNON : Beaux discours et vilaines actions. Qu’y a-t-il de plus haïssable que les mensonges de la parole ?

MENELAS : C’est vrai. Mais un esprit irrésolu fait autant de mal ;même un ami ne peu s’y fier.Je suis venu te démasquer ; aussi, ne permets pas à la colère de t’emporter contre la vérité,et dispense-moi de te torturer.Te souviens-tu du temps où tu brûlais de mener les Grecs contre Troie ?A t’écouter, tu n’y aspirais pas ; mais toute ta volonté était tendue vers ce but.Comme tu étais humble alors, serrant la main de tous,tenant ta porte ouverte à quiconque voulait entrer chez toi,offrant à tous – même à qui n’en avait nulle envie – l’occasion de t’aborder :manège servile pour acheter le titre convoité.Mais à peine ce titre obtenu, on te vit changer de manières :tu n’avais plus d’ami, tu te tenais enfermé derrière tes verrous…Un homme honnête ne doit pas changer d’attitude en arrivant au pouvoir,mais se montrer, plus que jamais, le plus ferme appui des siens.C’est là mon premier grief, le premier point où je te trouve en faute.

Arrivé ensuite à Aulis avec l’armée des Grecs, on te vit impuissant,accablé du destin envoyé par les dieux, quand le vent refusa de nous souffler en poupe.Las de s’épuiser en vain à Aulis, les Grecs te pressaient de renvoyer la flotte ;et tes yeux alors disaient ton désespoir de te voir dépouillé de ton titre et perdre ta belle gloire.Consulté, le devin Calchas déclara qu’il faudrait immoler ta fille à Artémis.Soulagé, tu la promets au sacrifice, et, de ton plein gré, tu fais dire à ta femme d’envoyer ici ton enfant

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sous le prétexte qu’elle doit épouser Achille.Et puis tu te ravises ! Je te surprends à écrire un contrordre :tu ne veux plus assassiner ta fille !

Voilà où nous en sommes. Que de revirements sous le ciel immuable ! C’est la Grèce surtout dont je plains le malheur.Au lieu d’acquérir de la gloire, elle va permettre aux barbares de la tourner en dérisionà cause de toi et de ta fille.Ce n’est pas le rang qui doit désigner le roi d’un pays ou le chef d’une armée, mais l’intelligence.N’importe qui peut conduire un Etat, pourvu qu’il y voie clair.

LE CORYPHEE : Lorsque la querelle naît entre deux frères, la lutte entre eux est bien plus âpre qu’entre deux étrangers.

AGAMEMENON : A mon tour de me plaindre de toi.Moi, je le ferai avec mesure, sans m’emporter, sans lever vers toi un regard insolent, en frère.Dis-moi : quelle fureur t’enflamme et te met le sang aux yeux ?Qui t’a fait tort ? Je ne peux pas t’offrir une épouse parfaite. Celle que tu avais, tu l’as mal gouvernée.Ai-je à expier tes malheurs, moi qui n’ait pas failli ?Le désir de tenir dans tes bras ta belle épouse t’a fait perdre toute raison, tout honneur.Est-ce moi qui suis méprisable ? ou toi qui as perdu une femme coupable et qui veut la reprendre alors que le ciel te rend un si bon service !Je ne tuerai pas mes enfants pour te permettre de te venger d’une femme infidèletandis que mes nuits et mes jours se consumeraient dans les larmes,pour avoir violé les lois de la nature envers mon propre sang.

LE CORYPHEE : Voici un tout autre langage, et qui sonne plus juste :un père doit épargner ses enfants.

MENELAS : Hélas ! Je n’ai donc pas d’ami.

AGAMEMNON : Tu en as, mais ne viens pas exiger leur ruine.

MENELAS : Tu es mon frère ; on doit accepter de souffrir avec les siens.

AGAMEMNON : Pour m’y encourager, fais-moi du bien, et non du mal.

MENELAS : Tu refuses donc de prendre ta part des efforts de la Grèce ?

AGAMEMNON : La Grèce est, avec toi, aveuglée par un dieu.

MENELAS : Glorifie-toi donc de ton sceptre, après avoir abandonné ton frère.Je m’en vais chercher d’autres amis.

2ème scèneUne servante de Clytemnestre entre en courant.

LA SERVANTE DE CLYTEMNESTRE : O Agamemnon, roi des Grecs fédérés,14

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je t’amène ta fille, celle que dans ton palais tu appelais Iphigénie.Sa mère, Clytemnestre en personne, l’accompagne, avec l’enfant Oreste.Que leur vue te réjouisse après une si longue absence.

Elles viennent de loin. Au bord d’une claire fontaine, elles reposent leurs pieds délicats, fatigués du voyage.Nous avons lâché les chevaux, pour les laisser paître dans l’herbe des prairies.Moi, j’ai pris les devants pour te donner le temps de préparer leur accueil.En effet, la nouvelle s’est répandue en un éclair :l’armée sait déjà qu’Iphigénie est arrivée,et le peuple accourt en masse pour la voir.

LE CORYPHEE : C’est que chacun aime à regarder les grands !

LA SERVANTE DE CLYTEMNESTRE : On se demande :

JEUNE FILLE 1 : « Sont-ce des noces ? »

JEUNE FILLE 2 : « Que préparent-ils ? »

JEUNE FILLE 1 : « Le roi Agamemnon avait-il un si vif désir de revoir son enfant qu’il l’a mandée ici ? »

LA SERVANTE DE CLYTEMNESTRE : D’autres m’ont dit :

JEUNE FILLE 2 : « La fiancée doit être menée à l’autel d’Artémis, reine d’Aulis.Qui sera son époux ? »

LE CORYPHEE : Allons ! Il faut consacrer des corbeilles et couronner vos têtes pour le mariage.C’est à toi, seigneur Ménélas, de tout disposer pour la cérémonie.Que la flûte chante dans la demeure, que la danse frappe le sol !Car voici venir pour la jeune fille une aube de félicité.

AGAMEMNON : Je vous remercie. Eloignez-vous, maintenant,et laissons le sort se charger du reste.(Les jeunes filles du chœur s’installent auprès de la vasque.)Hélas ! Quelle fatalité sur moi jette son joug ?Mon destin, plus rusé que toutes mes ruses, s’est joué de moi.Que dire à ma femme ? Comment l’accueillir ? Pour achever ma perte, fallait-il qu’elle vînt, sans avoir été appelée !Il est bien naturel, cependant, qu’elle vienne avec son enfant fiancéepour faire don de son bien le plus cher.Et ce sera pour me trouver coupable !Et ma fille – l’infortunée ! – que lui dirai-je ?Hélas ! C’est pour ma perte que Pâris, le fils de Priam, s’est uni à Hélène. En l’enlevant, il m’a ôté la vie. (Il reste tête baissée)

LE CORYPHEE : Moi aussi, je te plains. Une étrangère peut bien compatir au malheur des rois.

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Scène 3MENELAS : Mon frère, donne-moi ta main.

AGAMEMNON : La voici. Tu l’emportes. Le malheur est pour moi.

MENELAS : Par Pélops, notre aïeul, et par Atrée, qui nous engendra, quand j’ai vu des pleurs couler de tes yeux,j’ai eu pitié de toi, et à mon tour, j’ai pleuré sur ta peine.J’étais trop dur avec toi.Il ne faut pas tuer ta fille, c’est moi qui te le dis, ni préférer mon intérêt au tien.Est-il juste que tu sois dans les larmes et moi dans le bonheur ?Que meurent tes enfants tandis que les miens voient le jour ?Qu’est-ce que je demande ? Une épouse ?J’en trouverai une excellente ailleurs, pour peu que le désir m’en prenne.Mais perdre un frère pour récupérer Hélène, racheter ce mal au prix de ce bien ?Ce fut de ma part ignorance et sottise.Et puis la pitié m’a saisi pour cette fille infortunée.Elle est de mon sang et, par la faute de ma femme, on devrait l’immoler ?Que l’armée soit dissoute et qu’elle quitte Aulis !Cesse, mon frère, de verser des larmes, et cesse aussi de m’en tirer.J’ai changé d’avis, dira-t-on, mais c’est bien naturel.Mon amour pour mon frère a causé ce revirement.Un homme sans méchanceté sait se plier aux meilleurs arguments.

LE CORYPHEE : Noble langage, digne d’un fils de Tantale et de Zeus.Tu ne démens pas tes ancêtres.

AGAMEMNON : Je te rends grâce, Ménélas, pour tes paroles de raison et plus dignes de toi.Mais moi, je ne puis plus éviter mon destin : je dois accomplir le sacrifice de ma fille.

MENELAS : Comment ? Qui peut t’y forcer ?

AGAMEMNON : L’armée des Achéens, contre moi unanime.

MENELAS : Elle ne pourra rien si tu renvoies ton enfant à Argos.

AGAMEMNON : Calchas révèlera l’oracle.

MENELAS : A moins qu’il ne meure d’abord. C’est à notre portée.

AGAMEMNON : Il y a pire : Ulysse est au courant de tout.

MENELAS : Si nous sommes unis, il ne saurait nous nuire.

AGAMEMNON : Il a toujours une fourberie sous le coude, et il sait parler au peuple.Il révèlera l’oracle, ma promesse et comment j’y ai failli.Il incitera les Grecs à me tuer, ainsi que toi, puis il immolera mon enfant.Voilà jusqu’où va mon malheur, infortuné que je suis !A quelle détresse les dieux m’ont réduit !

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Rentre au camp, Ménélas, et veille seulement à ce que Clytemnestre ignore tout avant le sacrifice, et qu’ainsi un excès de larmes soit épargné à ma misère.Quant à vous, étrangères, taisez-vous sur ceci.

Ménélas sort et Agamemnon rentre dans sa tente.

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PREMIER STASIMON

Le coryphée frappe le gong.

Strophe :

LE CORYPHEE : Heureux ceux à qui la déesse accorde mesure et pudeur,

JEUNE FILLE 1 : heureux ceux qu’elle laisse en repos, sur le lit d’Aphrodite, à l’heure où l’arc d’Eros lance les deux traits du plaisir.

JEUNE FILLE 2 : L’un donne la félicité,

JEUNE FILLE 1 : l’autre détruit.

LA SERVANTE D’AGAMEMNON : Belle Aphrodite, écarte-le de notre lit.

LA SERVANTE DE CLYTEMNESTRE : Accorde-nous de connaître ta douceur à l’abri de ta violence.

Antistrophe :

LA SERVANTE D’AGAMEMNON : Diverses sont les natures des hommes, diverses leurs manières.

LA SERVANTE DE CLYTEMNESTRE : Le Bien se révèle toujours,et qui le cultive avec soin en cueillera de beaux fruits de vertu.

JEUNE FILLE 1 : L’honneur,

JEUNE FILLE 2 : c’est déjà la sagesse.

LA SERVANTE DE CLYTEMNESTRE : Il a le don de reconnaître le devoir grâce à l’intelligence,

LA SERVANTE D’AGAMEMNON : et toute la vie en reçoit une renommée sans déclin.

Epode :

JEUNE FILLE 2 : Tu es venu, Pâris, des contrées où tu grandis,et sur le mont Ida, tu as mené paître tes génisses blanches en sifflant des airs du pays.

JEUNE FILLE 1 : Mais le conflit des déesses t’égara ;il t’envoya en Grèce,vers le palais orné d’ivoire où vivait Hélène.

LA SERVANTE D’AGAMEMNON : Là, debout et les yeux dans les yeux, 18

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tu la blessas d’amour et d’amour tu fus blessé.

LA SERVANTE DE CLYTEMNESTRE : Alors, pour l’honneur, la Grèce entre en lutte,envoie ses armées et fait partir ses navires vers les remparts de Troie.

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SECOND EPISODE

Le coryphée frappe le gong.

LE CORYPHEE : Admirez la princesse Iphigénie, fille du roi Agamemnon et de Clytemnestre.Issue de la famille la plus noble, elle avance vers le destin le plus haut.Les puissants et les fortunés sont des dieux pour les pauvres mortels.Arrêtons-nous, filles de Chalcis, recevons la reine au sortir de son char,évitons qu’elle glisse en touchant le sol.Mais n’allons pas effrayer l’illustre fille d’Agamemnonpar un excès de bruit qui troublerait ces Argiennes, comme nous étrangères en ces lieux.

Le char qui transporte Iphigénie et Clytemnestre apparaît.Les jeunes femmes du chœur lancent des pétales de fleurs sur leur passage.

CLYTEMNESTRE : Votre accueil bienveillant me semble d’heureux présage,votre salut de bon augure.Oui, je l’espère, c’est vers un illustre hymen que j’amène la fiancée.Mon enfant, quitte cette voiture et pose ton pied délicat et tremblant sur le sol.Jeunes femmes, prenez-la dans vos bras et faites-la descendre.Que l’une de vous m’accorde l’appui de sa main.Voici Oreste, l’enfant d’Agamemnon. Tu dors, mon petit ? Réveille-toi pour l’hymen de ta sœur. Oui, c’est un beau jour, ma fille. Tu vas allier la noblesse de ton sang à la gloire d’un héros, égal des dieux, le fils de Thétis.Marche à mes côtés, Iphigénie,que ces étrangères, en nous voyant ensemble,sachent que je suis une mère heureuse.(Agamemnon apparaît sur le seuil de la tente)Mais voilà ton cher père ; va donc le saluer.

IPHIGENIE : Ma mère, laisse-moi courir au devant de mon père !Ne m’en veut pas si je vais le serrer sur mon cœur la première.(Iphigénie se précipite vers son père.)

CLYTEMNESTRE : Seigneur Agamemnon, toi que j’honore entre tous,nous voici, attentives à tes ordres.

Agamemnon reste immobile et silencieux.

IPHIGENIE : Mon père, je veux t’embrasser après une si longue absence.(Il se détourne)Laisse-moi jouir de ta vue. Ne sois pas fâché contre moi.

CLYTEMNESTRE : Tu fais bien, ma fille.De tous les enfants que j’ai mis au monde, nul n’a plus d’amour pour son père.

IPHIGENIE : Mon père, quelle joie de te revoir enfin !

AGAMEMNON, se ressaisissant : Je m’en réjouis aussi.20

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IPHIGENIE : Tu as bien fait de m’appeler auprès de toi, mon père.

AGAMEMNON : Je ne sais, mon enfant…

IPHIGENIE : Mais quoi ? N’es-tu pas heureux de me revoir ? Que tes yeux sont inquiets !

AGAMEMNON : Un chef d’armée a beaucoup de responsabilités.

IPHIGENIE : Laisse-là tes soucis et sois à moi un instant.

AGAMEMNON : C’est à toi, à toi seule, qu’en ce moment je pense.

IPHIGENIE : Alors accorde-moi un regard de bonté.

AGAMEMNON : Es-tu heureuse ? La joie que j’ai à te revoir est telle que je l’attendais.

IPHIGENIE : Et cependant tu pleures.

AGAMEMNON : Longue sera l’absence qui va nous séparer.

IPHIGENIE : Tu vas donc me quitter, et t’en aller au loin ?

AGAMEMNON : Plus tes paroles ont de sens, plus elles m’attendrissent.

IPHIGENIE : Eh bien j’en dirai d’insensées, si je puis ainsi t’égayer !

AGAMEMNON : Ah ! Je n’ai plus la force de me taire.

IPHIGENIE : Reviens chez nous, mon père, auprès de tes enfants.

AGAMEMNON : Je le veux et ne puis le vouloir ; c’est pourquoi je souffre.

IPHIGENIE : Maudits soient les combats et les maux causés par Ménélas !

AGAMEMNON : Ils en tueront bien d’autres, mais moi, j’en meurs déjà.

IPHIGENIE : Il y a si longtemps que tu es loin de nous, dans cette baie d’Aulis !

AGAMEMNON : Un obstacle y retient l’armée et m’y enchaîne aussi.

IPHIGENIE : Hélas ! Que n’est-il convenable que je passe avec toi la mer !

AGAMEMNON : Une traversée t’attend, toi aussi, où tu penseras à ton père.

IPHIGENIE : La ferai-je seule, ou avec ma mère ?

AGAMEMNON : Sans tes parents, et toute seule.

IPHIGENIE : Tu veux donc m’établir dans une autre maison ?

AGAMEMNON : Laissons ces choses que les jeunes filles doivent ignorer.21

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IPHIGENIE : Reviens vite de Phrygie, après une pleine victoire.

AGAMEMNON : J’ai tout d’abord un sacrifice à accomplir ici.

IPHIGENIE : Je veux voir à tes côtés ce qui est autorisé.

AGAMEMNON : Tu le verras. Ah combien tu es plus heureuse que moi de tout ignorer !Entre dans mon logis. Une fille se fait du tort en se laissant voir.Mais donne-moi d’abord un baiser, toi qui dois habiter loin de la maison de ton père.O combien me coûte Troie, combien me coûte Hélène !Rentre, ma fille, car mes larmes coulent malgré moi dès que je te touche.(Iphigénie entre dans la tente. A Clytemnestre :)Pardonne-moi, fille de Léda, si je m’attendris trop au moment d’accorder mon enfant à Achille.

CLYTEMNESTRE : Bien loin de te reprocher ta faiblesse, je sais que je ressentirai tout ce que tu éprouves quand, parmi les chants d’hyménée, je la conduirai à qui l’emmènera.Mais c’est le sort commun, et le temps atténuera nos regrets.As-tu déjà offert à la déesse le sacrifice préalable au mariage ?

AGAMEMNON : C’est cela justement qui m’occupe.

CLYTEMNESTRE : Ensuite tu célèbreras le festin nuptial ?

AGAMEMNON, brusquement : Non. A côté de l’époux, il suffira que moi, en présence des Grecs, je lui donne ma fille.

CLYTEMNESTRE : Tu veux accomplir sans la mère ce qui est son office ?

AGAMEMNON : Tu retourneras à Argos veiller sur tes filles.

CLYTEMNESTRE : Mais tel n’est pas l’usage !

AGAMEMNON : Il ne convient pas que tu sois loin de chez toi, au milieu de l’armée.

CLYTEMNESTRE : Mais il convient que je marie ma fille.

AGAMEMNON : Obéis.

CLYTEMNESTRE : Non, par Héra ! Toi, va commander au-dehors, mais c’est à moi de régler le mariage de mes filles.

Elle rentre dans la tente.

AGAMEMNON : Vains efforts, hélas, pour l’éloigner de ce qu’elle va voir !Pour tromper ce que j’ai de plus cher, je m’ingénie en ruses et chaque fois j’échoue.

Il s’éloigne.Le coryphée frappe le gong.

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SECOND STASIMON

Strophe :

LA SERVANTE DE CLYTEMNESTRE : Elle va partir dans les flots aux remous d’argent, la flotte grecque,avec ses vaisseaux et ses armes,vers Ilion et la plaine troyenne que protège Apollon.

Antistrophe :

JEUNE FILLE 1 : Sur les murs de Troie,

JEUNE FILLE 2 : autour des remparts,

LA SERVANTE D’AGAMEMNON : les Phrygiens seront prêts,quand débarqueront les fils d’Arès, dieu de la guerre,

LA SERVANTE DE CLYTEMNESTRE : revêtus de bronze,amenés à force de rames sur les vaisseaux rapides.

Epode :

JEUNE FILLE 2 : D’un cercle de carnage et de têtes coupées,ils ceindront Pergame et ses remparts de pierre,avant de raser la ville jusqu’aux fondations,faisant couler les pleurs des filles et de l’épouse de Priam.

JEUNE FILLE 1 : Qu’à moi et à tous mes descendants soit épargnée cette image qui hante riches Lydiennes et épouses Phrygiennes,qui l’une à l’autre se demandent :

LA SERVANTE D’AGAMEMNON : « Lequel saisira mes beaux cheveux pour me traîner en larmes,pour m’arracher comme une plante du sol de ma patrie en ruine ? »

LA SERVANTE DE CLYTEMNESTRE : Tout cela vient de toi, Hélène,fille du cygne au long cou,s’il est vrai, comme on le raconte,que Léda te conçut de l’oiseau dont Zeus avait pris le plumage.

LE CORYPHEE : Mais ce ne sont peut-être que des fables,inscrites aux tablettes des Musespour égarer les hommes.

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TROISIEME EPISODE

Le coryphée frappe le gong.Achille entre.

ACHILLE : Où est le chef de l’armée grecque ?Qu’un serviteur aille lui dire qu’Achille, fils de Pélée,le demande à sa porte !Cette attente n’a-t-elle pas assez duré ?Ceux d’entre nous qui ne sont point mariés ont laissé leur demeure vide pour venir ici.Ceux qui ont une épouse ne peuvent procréer.L’ardeur qui entraîne la Grèce à faire campagne est si puissante qu’un dieu nécessairement la conduit.Mais il est juste que je me plaigne : si j’ai quitté mon pays,ce n’est pas pour me voir arrêté par des vents trop faibles,et devoir contenir mes Myrmidons qui sans cesse m’assaillent :« Qu’attendons-nous, Achille ? Combien de jours nous faudra-t-il encore compter avant de partir pour Troie ?Si tu peux agir, fais-le tout de suite, ou ramène l’armée au pays.Les lenteurs des Atrides, Agamemnon et Ménélas, ont assez duré. »

Clytemnestre sort de la tente.

CLYTEMNESTRE : Fils de la divine Thétis, ta voix m’est parvenue et m’a fait sortir de ce logis.

ACHILLE : Qui es-tu ? Comment te trouves-tu au camp des Grecs, seule femme parmi tous ces hommes armés ?

CLYTEMNESTRE : Clytemnestre est mon nom.Le roi Agamemnon est mon époux.

ACHILLE : Bien. Mais il serait malséant de converser avec une femme.

CLYTEMNESTRE : Reste donc que je te touche la main,comme prélude à un heureux mariage.

ACHILLE : Que dis-tu ? Je vénère trop Agamemnon pour toucher ce qui m’est interdit.

CLYTEMNESTRE : Tu en as pourtant le droit, toi qui vas épouser ma fille.

ACHILLE : Un mariage ? Ton esprit s’égare pour tenir un tel langage !

CLYTEMNESTRE : Il est bon de rester sur la réserve en entendant parler de mariage.

ACHILLE : Mais je n’ai jamais demandé ta fille,et jamais les Atrides ne m’ont rien proposé de tel.

CLYTEMNESTRE : De quelle indignité suis-je victime ?Je viens briguer un mari qui n’en est pas un, à ce qu’il me semble.

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ACHILLE : On s’est moqué de nous.

CLYTEMNESTRE : Adieu, car je ne pourrai plus te regarder en face, après cet affront.

ACHILLE : Adieu à toi aussi. J’entre ici pour trouver ton époux.

Il s’approche de la tente. La servante d’Agamemnon s’approche.

LA SERVANTE D’AGAMEMNON : Arrête étranger, fils de la déesse, et toi aussi fille de Léda.

ACHILLE : Qui m’appelle d’une voix aussi émue ?

LA SERVANTE D’AGAMEMNON : Une esclave. On n’est pas fier de ce nom-là, mais on doit accepter son sort.Tu sais bien, femme d’Agamemnon, que je te suis entièrement dévouée, à toi et à tes enfants.

CLYTEMNESTRE : Je te connais, fidèle esclave de ma maison.

ACHILLE : Nous t’écoutons.

LA SERVANTE D’AGAMEMNON : O Fortune ! O Prévoyance, sauvez ceux-là dont le salut m’est cher !

CLYTEMNESTRE : Parle ! Découvre enfin ce que tu as à dire !

LA SERVANTE D’AGAMEMNON : Ta fille… son propre père va la tuer de sa main.

CLYTEMNESTRE : Comment ? Tu es folle !

LA SERVANTE D’AGAMEMNON : Il tranchera de son épée le cou blanc de la pauvre enfant.

CLYTEMNESTRE : Mais pourquoi ? Quel est le démon qui le mène ?

LA SERVANTE D’AGAMEMNON : Un oracle révélé par Calchas. C’est à ce prix que la flotte pourra gonfler ses voiles.

CLYTEMNESTRE : Malheureuse mère ! Malheureuse enfant que son père va tuer !Mais pourquoi ce mariage qui m’a fait quitter la maison ?

LA SERVANTE D’AGAMEMNON : Pour te décider à envoyer joyeusement ta fille, croyant l’unir avec Achille.

CLYTEMNESTRE : Alors que tu allais, ma fille, vers ta mort, et ta mère avec toi !Fils de Thétis et de Pélée, as-tu bien entendu ?

ACHILLE : Combien tu es à plaindre, oui !Et l’injure qui m’est faite compte aussi.

CLYTEMNESTRE : Ils vont tuer ma fille, prise au piège d’un hymen avec toi.25

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ACHILLE : Je suis indigné contre ton époux, et peu disposé à lui pardonner.

CLYTEMNESTRE : Ah ! Je ne rougis pas de tomber à tes pieds,moi, mortelle, devant le fils d’une déesse.Quel orgueil pourrait primer sur le salut de mon enfant ?Fils de Thétis, viens au secours de ma détresse, de celle qu’on nomma ta femme, vainement, je le sais, mais qu’importe !On te reprochera de ne pas la défendre ;car si l’hymen ne vous a point unis, de nom pourtant, tu as été l’époux,l’époux aimé de cette infortunée.Ton nom m’a perdue qui aurait dû nous protéger.Je n’ai pas d’autel où prier, seulement tes genoux.D’Agamemnon, tu sais que je ne puis attendre que mensonge et cruauté.Je suis venue, tu me vois, une femme au milieu des soldats.Aies-en seulement le courage, étends ta main et nous serons sauvées.Sinon, c’en est fait de nous.

LE CORYPHEE : Grande chose que d’être mère, charme puissant,qui nous amène toutes à souffrir pour nos enfants.

ACHILLE : Mon cœur s’exalte, mais il sait garder la mesure.J’ai appris à agir loyalement.Si les Atrides me commandent la justice, je leur obéirai, et non s’ils sont injustes.A Troie comme ici, j’entends agir en homme libre,et que ma lance soit l’honneur de cette guerre.Pour toi, si durement traitée par ceux qui te sont le plus proches,je veux, autant que le peut un jeune homme, t’entourer de mes soins.Après avoir été nommée ma fiancée,jamais ta fille ne sera égorgée par son père.Je ne me prêterai pas à ses machinations, car c’est mon nom qui serait l’assassin de ta fille.Il faudrait que je sois le plus lâche des Grecs pour que mon nom serve d’arme de meurtre à ton époux !Par Nérée, divin père de ma mère Thétis,le roi Agamemnon ne touchera pas à ta fille,non, pas même du bout des doigts, ni pour lui effleurer la robe !Oui ! C’est pour son malheur que Calchas prépara l’orge et l’eau pour le sacrifice !Qu’est-ce qu’un devin, après tout ?Parmi beaucoup d’erreurs, il dit parfois un peu de vrai, quand la chance le sert. Si elle se refuse, il n’a qu’à disparaître au lieu de demander des actions contre nature.Ce n’est pas ce mariage qui m’incite à parler de la sorte :cent jeunes filles aspirent à m’épouser ;mais le seigneur Agamemnon m’a fait insulte.Il n’avait pas à faire usage de mon nom sans mon consentement ;je l’aurais bien volontiers prêté aux Grecs si la route de Troie devait s’ouvrir à ce prix.Non, je n’aurais pas refusé de servir ainsi la cause commune.Mais ici, je ne compte pas.

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Nos chefs se soucient peu de me traiter bien ou mal.Mon épée pourrait bien se marquer d’une tache de sang avant même d’arriver en Phrygie,si quelqu’un voulait m’arracher ta fille.Sois donc rassurée. Je te suis apparu comme un dieu sauveur,ce que je ne suis pas,mais je me ferai tel pour toi.

LE CORYPHEE : Ce langage est bien digne de toi, fils de Pélée et de Thétis, la déesse marine.

CLYTEMNESTRE : Ah ! Comment te louer sans passer la mesure,et sans perdre ta faveur si je reste en deçà ?Car un homme au cœur noble, comblé de louanges, prend en aversion celui qui outre l’éloge.Je rougis de ne t’apporter que des plaintespour des malheurs qui ne te touchent pas et dont je souffre seule.Aie donc pitié de nous, car notre sort est pitoyable,le mien d’abord puisque je pensais t’avoir pour gendre,le tien ensuite, victime de ce mauvais présage pour tes noces futures.Grâce à toi, ma fille sera sauvée ;faut-il qu’en suppliante, elle vienne embrasser tes genoux ?Cela sied mal à une vierge, mais si tu le désires,elle viendra, le visage voilé de pudeur.

ACHILLE : N’amène pas ta fille devant moi ;Il est inutile d’attirer sur nous le blâme du vulgaire.Une armée désoeuvrée, privée de ses occupations habituelles,se livre avec délectation aux plus malveillants bavardages.Du reste, que tu m’implores ou non,tu n’obtiendras ni plus, ni moins.Car je suis résolu, quoi qu’il en coûte, à vous sauver.Et, sache-le, ce n’est pas en vain que je parle :que je meure si je te trompe !Mais que je vive si je sauve ta fille !

CLYTEMNESTRE : Que ton dévouement t’apporte le bonheur !

ACHILLE : Tentons de ramener le père à des vues plus sensées.

CLYTEMNESTRE : Il est lâche et craint trop l’armée.

ACHILLE : Mais une raison peut en vaincre une autre.

CLYTEMNESTRE : Froide espérance ! Dis-moi cependant ce que je dois faire.

ACHILLE : Conjure-le d’abord en lui disant qu’un père ne doit pas tuer ses enfants.S’il te résiste, alors seulement viens me trouver,car s’il cède à tes vœux,mon intervention n’est plus nécessaire, et ma conduite envers lui en sera plus aisée.Enfin, j’éviterais que l’armée me reproche rien.Tout serait arrangé pour le bonheur des tiens,

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sans que j’eusse à m’en occuper.

CLYTEMNESTRE : Oui, je vais t’obéir.Mais si je n’obtiens pas ce que je veux,où donc pourrais-je te revoir ? Où aller, malheureuse,pour trouver ton bras secourable ?

ACHILLE : Je me tiendrai où je pourrai le mieux veiller sur toiet t’épargner de devoir parcourir dans ton émoi, l’armée des Grecs aux yeux de tous.

CLYTEMNESTRE : Tout cela sera fait.S’il existe des dieux, ils devront te récompenser pour ta vertu.Sinon, à quoi bon se donner tant de peine ?

Achille sort.Clytemnestre rentre dans la tente.Le coryphée frappe le gong.

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TROISIEME STASIMON

Strophe :

JEUNE FILLE 1 : Pour les noces de Thétis et Pélée,

JEUNE FILLE 2 : parents du noble Achille,

JEUNE FILLE 1 : la flûte de Libye,

JEUNE FILLE 2 : la cithare amie de la danse,

JEUNE FILLE 1 : et les roseaux sonores

JEUNE FILLE 2 : élevaient ensemble leur chant.

LA SERVANTE D’AGAMEMNON : Sur le mont Pélion,

LA SERVANTE DE CLYTEMNESTRE : pour le banquet des dieux,

LA SERVANTE D’AGAMEMNON : les muses Piérides aux belles tressesmarquaient le sol en cadence de leurs sandales d’or.

LA SERVANTE DE CLYTEMNESTRE : Et les cinquante Néréides déroulaient leur ronde sur le sable brillanten l’honneur des jeunes époux.

Antistrophe :

JEUNE FILLE 2 : Tenant leurs piques de sapins,

JEUNE FILLE 1 : couronnés de verdure,

LA SERVANTE DE CLYTEMNESTRE : la troupe des centaures vint au festin des dieux

LA SERVANTE D’AGAMEMNON : boire au cratère de Dionysos.

LE CORYPHEE : Leur voix a crié :

LA SERVANTE DE CLYTEMNESTRE : « O fille de Nérée,le devin Chiron l’a proclamé :de toi va naître un fils,un soleil pour la Thessalie.Il ira embraser l’illustre cité de Priamrevêtu de l’armure d’or forgée par Héphaïstos,dont tu lui auras fait présent. »

LE CORYPHEE : Ainsi les dieux ont promis le bonheur à Pélée,lorsqu’il épousa l’aînée des nobles Néréides.

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Epode :

JEUNE FILLE 1 : Quant à toi, Iphigénie, les Argiens vont couronner tes belles tresses comme on couronne une génisse tachetée,qui descend vierge des grottes des montagnes,et de ta gorge humaine feront jaillir le sang !

JEUNE FILLE 2 : Pourtant, tu n’as pas grandiau milieu des pipeaux et des sifflets des pâtres,mais auprès de ta mère,pour être un jour parée en fiancéeet unie à un fils des hommes.

LE CORYPHEE : Pudeur et Vertu pourront-elles garder le front hautsi l’honneur est bafoué,

LA SERVANTE D’AGAMEMNON : si les actes contre nature l’emportent sur la loi

LA SERVANTE DE CLYTEMNESTRE : si nous refusons d’unir nos efforts pour conjurer la vengeance des dieux jaloux ?

Le coryphée frappe le gong.

Pour obtenir la fin de la version courte ou la version longue, contacter l’auteur à l’adresse courriel : [email protected]

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