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VOL. 7 (I951) SHORT COMMUNICATIONS, PRELIMINARY NOTES ACTION DES RAYONS U.V. SUR L'AFFINIT~ DU NOYAU CELLULAIRE POUR LE VERT DE MI~THYLE par M. ERRERA Laboratoim de Morphologie animale, Facult$ des Sciences de 1"Universit~ libre de Bruxelles ( Belgique) 605 Le m~canisme de l'action des radiations sur les cellules est encore loin d'6tre clair. On rem~rque toutefois une grande similitude entre les effets des radiations ionisantes ou ultraviolettes (ralentisse- ment ou blocage des mitoses, effets l~taux, mutations), et il semble logique d'utiliser ces derni~res dont l'action est plus sp~cifique pour ~tudier la nature des constituants l~s~s. Les spectres d'action U.V. des effets envisages indiquent g~n~ralement que l'~nergie est absorb~e au niveau des constituants nucl~oprot~iques ~, ce qui ne peut ~tre consid~r~ comme une preuve de leur alteration. En effet, leur r61e pourrait se limiter au transport de l'6nergie comme c'est le cas pour la chlorophylle au cours de la photosynth~se ou pour certains photosensibilisateurs l~ermettant la production des m~mes l~sions cellulaires ~ l'aide de radiations qui ne sont pas habituellement absorb~es~, 8. Nous avons donc entrepris d'~tudier le complexe d~soxyribonucl~ique du noyau cellulaire au cours de l'irradiation. Cette ~tude est possible depuis que KURmCK a d~montr~ la sp~cificit6 du vert de m~thyle pour l'acide d~soxyribonucl~ique polym~ris~8 et que l'on sait que les U.V. entratnent une diminution d'afl~uit~ de cet acide pour ce m~me colorant s. Une suspension cellulaire homog~ne est obtenue en dispersant des petits fragments de moelle osseuse (grenouille, souris) dans du Ringer isotonique contenant o.02 g ~o de citrate de Na et d~pourvu de Ca ++. On dispose 5 ° mml d'une telle suspension sur une lame de verre ~clair6e par une lampe mineralight ~mettant environ 9o% de sa lumi~re ~ 253.7 m/~. A intervalles de temps d~termin~s, T~moin~ ,o ~ ~ ~ 8o ~o 12o t~o ~o t8o ~oo b o.71. ~%~/~ 2.1.~ e~4cm~ o 2o 4o e,o oo ioo t~o ~4o ~o ~o2bo " ~o' ,-., ~ 4.2.1o'm~/,.~ VERT de HETHYLE EEIJLOEN l~ig. x. Moelle osseuse de grenouille. Ordonn6es: hombre de ce]lu]es 6tudi~es. Abscisses: extinction du noyau color6 (unit~s arbitraires) ; M: valeur moyenne de l'extinction

Action des rayons U.V. sur l'affinité du noyau cellulaire pour le vert de méthyle

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Page 1: Action des rayons U.V. sur l'affinité du noyau cellulaire pour le vert de méthyle

VOL. 7 ( I951) SHORT COMMUNICATIONS, PRELIMINARY NOTES

ACTION DES RAYONS U.V. SUR L'AFFINIT~ DU

NOYAU CELLULAIRE POUR LE VERT DE MI~THYLE

par

M. E R R E R A

Laboratoim de Morphologie animale, Facult$ des Sciences de 1" Universit~ libre de Bruxelles ( Belgique)

605

Le m~canisme de l 'action des radiat ions sur les cellules est encore loin d'6tre clair. On rem~rque toutefois une grande simil i tude entre les effets des radiations ionisantes ou ultraviolettes (ralentisse- men t ou blocage des mitoses, effets l~taux, mutat ions) , et il semble logique d 'ut i l iser ces derni~res dont l 'act ion est plus sp~cifique pour ~tudier la nature des cons t i tuants l~s~s. Les spectres d'action U.V. des effets envisages indiquent g~n~ralement que l'~nergie est absorb~e au niveau des cons t i tuants nucl~oprot~iques ~, ce qui ne peut ~tre consid~r~ comme une preuve de leur alteration. En effet, leur r61e pourrai t se l imiter au t ranspor t de l '6nergie comme c'est le cas pour la chlorophylle au cours de la photosynth~se ou pour certains photosensibil isateurs l~ermettant la production des m~mes l~sions cellulaires ~ l 'aide de radiat ions qui ne sont pas habi tue l lement absorb~es~, 8. Nous avons donc entrepris d'~tudier le complexe d~soxyribonucl~ique du noyau cellulaire au cours de l ' irradiation. Cette ~tude est possible depuis que KURmCK a d~montr~ la sp~cificit6 du vert de m~thyle pour l 'acide d~soxyribonucl~ique polym~ris~ 8 et que l 'on sait que les U.V. entra tnent une d iminut ion d'afl~uit~ de cet acide pour ce m~me colorant s.

Une suspension cellulaire homog~ne est obtenue en dispersant des pet i ts f ragments de moelle osseuse (grenouille, souris) dans du Ringer isotonique contenant o.02 g ~o de citrate de Na et d~pourvu de Ca ++. On dispose 5 ° mml d 'une telle suspension sur une lame de verre ~clair6e par une lampe mineralight ~met tant environ 9o% de sa lumi~re ~ 253.7 m/~. A intervalles de temps d~termin~s,

T~moin~

,o ~ ~ ~ 8o ~o 12o t~o ~o t8o ~oo b o.71. ~%~/~

2.1. ~ e~4cm ~ o 2o 4o e,o oo ioo t~o ~4o ~o ~ o 2 b o

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VERT de HETHYLE EEIJLOEN

l~ig. x. Moelle osseuse de grenouille. Ordonn6es: hombre de ce]lu]es 6tudi~es. Abscisses: extinction du noyau color6 (unit~s arbitraires) ; M: valeur moyenne de l ' ext inct ion

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on pr~l~ve environ IO mml de la suspension: on dispose sur une m6me lame de microscope les frottis t~moins et irradi~s. Plusieurs lames sont pr#par~s simultan~ment; les frottis sont fixes par la m~thode de KURmCK (10 minutes darts HCI o.1 N), puis neutralists (acetate de Na o.2 M, PH 4.1). Un certain nombre d 'entre eux sont color,s au Feulgen, d'autres au vert de m~thyle e.

I1 est possible ensuite, ~t l 'aide d 'un microspectrophotom~tre inspir6 de celui de LxsoN~, de d6terminer la quantit6 relative de colorant fix6 h chaque noyau en utilisant un filtre Ilford No. 608 (transmission maximum A 670 m/t) pour le vert de m6thyle, et No. 605 (transmission maximum

550 m/t) pour le Feulgen. On d6termine d'abord la valeur de la densit~ optique de chaque noyau color~, &off est d~duite la valeur de la densit6 optique moyenne d'une vingtaine de noyaux non color~s, dans le but de diminuer les erreurs dus A la r*flexion ou A la diffusion de lumi~re. Connaissant ensuite le diam~tre des noyaux il est possible de d~terminer en unit6s arbitraires la quantit6 totale de colorant fix6 A chacun d'eux s.

La Fig. I repr~sente une experience typique: on voit imm*diatement que l'affinit6 des cellules irradi6es pour le Feulgen n'est pas modifi6e, alors qu'elle diminue de mani~re appr6ciable dans le cas du vert de m6thyle. Les quantit~s moyennes de vert de m~thyle fix6es par rapport au t6moin sont port6es en ordonn~es d 'un graphique semi-logarithmique (Fig. 2) dont les abscisses repr~senten t les ~nergies d6pens~es; le ph6nom~ne est ainsi clairement mis en 6vidence.

8t.

60

I 2 3 4 5 6 7

40

Fig. 2. Ordonn6es: % des extinctions moyennes des noyaux color6s au vert de m~thyle, par rapport aux t6moins non

irradi~s Abscisses: ~nergies U.V. en ergs/cm ~ (des mesures spectro- photom6triques ont montr6 qu'environ 75% de l'~nergie peut 6tre absorb~e par le liquide dans lequel baignent les

cellules) o moelle osseuse de grenouille × moelle osseuse de souris

Conclusions L'affinit6 pour le vert de m6thyle des noyaux des cellules de la moelle osseuse irradi6es diminue,

alors que la quantit6 totale d'acide d~soxyribonucl6iqne (Feulgen) n 'est pas modifi6e. Ceci peut signifier que la structure macromol6culaire de cet aeide, ou l '~tat de ses groupements phosphoriques libres (responsables de l'afl~nit6 pour les colorants basiques) sont modifi6s sous l'effet de l ' irradiation. Si on s'arr~te ~ la premiere 6ventualit6, on peut imaginer une d6gradation de l 'acide d~soxyribonu- cMique semblable ~ celle d6crite in vitro z. On peut ensuite, connaissant la quantit6 d'acide d6soxy- ribonucl6ique par noyau (d6termin~ par KURmCK darts le foie de Sourise), et la densit6 optique du noyau (Fig. 1), comparer la quantit~ d'~nergie n~cessaire pour d~grader une m~me quantit6 d'acide d6soxyribonucl6ique in vivo et in vitro; dans le dernier cas il taut nne irradiation lO ~t 5 ° fois plus intense que dans le premier.

Rien ne justifie ~videmment la comparaison d'acide d6soxyribonucl~ique de noyaux de tissus de mammif~res diff~rents, de sorte qu'un choix entre les deux ~ventualit6s propos6es est pr6matur6. Cependant, des remaniements du complexe d6soxyribonucMique r6sultant d'une alt6ration des groupements phosphor~s libres (combinaison ~ des groupements basiques de prot6ines, p. ex.) pour- raient tr~s bien expliquer aussi les faits exp6rimentaux. Une troisi~me explication possible serait l 'existence d 'un m~canisme d'action des U.V. diff6rent in vi o e t in vitro. Remarquons enfin que l'effet d~crit est obtenu apr~s des irradiations dont l ' intensit6 est d 'un ordre de grandeur comparable

celles utilis~es pour obtenir des effets biologiques. Nous tenons ~ remercier vivement M. J. JEENER qui a r6alis6 le montage ~lectrique du micro-

spectrophotom~tre. Des d~tails exp~rimentaux et la discussion des implications biologiques des r~sultats feront l 'objet d'une autre publication.

BIBLIOGRAPHIE

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Re~u le x 5 septembre 1951