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TRAVAUX ET RECHERCHES DU GÉRAC Working paper La mise sous tutelle de la société civile chinoise sous Xi Jinping Adrien Savolle Étudiant au doctorat en anthropologie Université Laval, Québec, Canada i

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TRAVAUX ET RECHERCHES DU GÉRAC

Working paper

La mise sous tutelle de la société civile chinoise sous Xi Jinping

Adrien Savolle

Étudiant au doctorat en anthropologie

Université Laval, Québec, Canada

i

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L’auteur peut être contacté à l’adresse suivante :

[email protected]

Ce travail a été supervisé par madame Isabelle Henrion-Dourcy, professeure titulaire au

département d’anthropologie de la Faculté des sciences sociales de l’Université Laval et

membre du comité directeur du GÉRAC.

Ce document peut faire l’objet, après l’approbation par la direction du GÉRAC, d’une

publication dans un ouvrage ou une revue. Tous les travaux et recherches du GÉRAC

n’engagent que leurs auteurs et ne sont en aucune façon le reflet d’une politique ou d’une

perspective privilégiée par le GÉRAC et par l’École supérieure d’études internationales.

Il convient de citer le document de la façon suivante : Adrien Savolle, « La mise sous tutelle de la

société civile chinoise sous Xi Jiping »,

https://www.gerac.hei.ulaval.ca/sites/gerac.hei.ulaval.ca/files/adrien-savolle.pdf, page.

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Table des matières

Introduction ..................................................................................................................................... 4

1. Le concept de société civile et son application en Chine continentale ................................ 7

1.1 Le débat académique et les modalités d’utilisation pour la Chine ............................... 7

1.2 Le débat académique en dehors de la Chine ............................................................... 10

2. Une Chine fusionnée au PCC ............................................................................................ 13

2.1 Imbrication du PCC et des institutions étatiques ........................................................ 13

2.2 Le système de crédit social ......................................................................................... 14

3. La récupération des œuvres artistiques .............................................................................. 15

4. La sphère religieuse ........................................................................................................... 18

5. Les sujets de mobilisation de la société civile chinoise ..................................................... 22

5.1 Les questions environnementales ............................................................................... 23

5.2 L’émancipation de la société civile grâce au travail ................................................... 25

6. Les moyens de mobilisation utilisés par les différents acteurs de la société civile ........... 28

6.1 Le système judiciaire chinois ..................................................................................... 28

6.1.1 La fusion du Parti-État à la justice et à l’économie .................................................. 28

6.1.2 Utilisation concrète du système judiciaire par la société civile et adaptations en cours

............................................................................................................................................ 31

7. Les ONG en Chine ............................................................................................................. 33

7.1 Les ONG officielles .................................................................................................... 34

7.2 Les ONG officieuses .................................................................................................. 35

7.3 L’entreprenariat social. ............................................................................................... 35

7.4 Les ONG étrangères ................................................................................................... 36

8. La presse comme relais de la société civile ? ..................................................................... 37

9. Les médias sociaux ............................................................................................................ 40

9.1 L’utilisation des médias sociaux par la société civile ................................................. 40

9.2 L’utilisation d’Internet par le PCC ............................................................................. 46

Conclusion .................................................................................................................................... 48

Bibliographie................................................................................................................................. 50

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INTRODUCTION

De très nombreux chercheurs en sciences humaines ont écrit sur le régime chinois depuis

la mort de Mao Zedong (1976), et la mise en place des réformes entamées par Deng Xiaoping à

partir de 19781. Si de nombreuses analyses décrivent une démocratisation lente du pays au milieu

des années 1980, puis un revirement avec la répression du soulèvement de Tian’anmen (1989), on

assiste depuis à l’annulation de plusieurs projets de réformes censés faire plus de place à la société

civile dans les prises de décisions2, comme par exemple la demande de séparation du PCC et du

gouvernement faite par le secrétaire générale du PCC Zhao Ziyang3.

Outre la répréssion des mouvements pro-démocratie, les politiques de Deng Xiaoping et de

son successeur Jiang Zemin cherchent à assurer une croissance économique forte en démantelant

le système de sécurité sociale existant. Face au péril de stabilité sociale engendré par ces politiques,

Hu Jintao, qui prend le pouvoir en 2002, remet en place un nouveau système de protection sociale

favorisant le réemploi des travailleurs licenciés4 . Il essaie aussi d’apporter des solutions aux

1 Deng Xiaoping s’efforce d’éviter au maximum le retour d’une dictature personnalisée, en passant d’un système

totalitaire à de l’autoritarisme (un régime autoritaire décrit une forme de pouvoir vertical sans concertation de la

population concernée ni mécanisme de contestation. Un régime totalitaire abolit de surcroit toute distinction entre la

vie collective et la vie privée de ses habitants : habillement, religion, travail, sexualité… Les dénominations accolées

au régime actuel sont nombreuses : néo-totalitarisme, autoritarisme dur…). Il est connu pour avoir mis en place les

quatre modernisations (四个现代化, si ge xiandaihua) dans les domaines de l’agriculture, de l’industrie, des sciences et

technologies et de la défense nationale. Il s’appuie sur quatre principes fondamentaux (四个基本原则, si ge jiben yuanze),

soit la modernisation, la stabilité sociale, le développement économique et l’ouverture sur l’extérieur. Il réhabilite

aussi les intellectuels à travers une période de « libéralisation de la pensée » (思想解放, sixiang jiefang) qui aboutit sur

la circulation d’idées jusque-là proscrites (individualisme, droits de l’homme) et de revendications (mise en place d’un

État de droit, adoption de pratiques démocratiques) qui deviennent rapidement inaudibles pour le Parti communiste

chinois. En 1983 est lancée une campagne contre la « pollution spirituelle » qui vise à condamner toute influence

étrangère dans les productions artistiques et en 1987 contre la « libéralisation bourgeoise ». Cette dernière fait suite

aux manifestations étudiantes de 1986 demandant une plus grande démocratisation du régime, et démarre avec le

remplacement de Hu Yaobang favorable à ces demandes par Zhao Ziyang au poste de secrétaire général du Parti

communiste chinois.

CABESTAN, Jean-Pierre, 2018, Demain la Chine : démocratie ou dictature?, Paris : Gallimard, p .1-19.

DUCHÂTEL, Mathieu et ZYLBERMAN, Joris, 2012, Les nouveaux communistes chinois, Paris : Armand Colin,

p. 225-226.

RICCI, Jean-Claude, 2011, Histoire des idées politiques, Paris : Dalloz, p. 424-425. 2 BRODSGAARD, Kjeld Eric, 2018, « China’s Political Order under Xi Jinping: Concepts and Perspectives », China:

an International Journal, 16, 3, p. 1-17. 3

Zhao Ziyang dut démissioner et finit sa vie en résidence surveillée pour s’être positionné contre la répression de

Tian’anmen.

BÉJA, Jean-Philippe et GOLDMAN, Merle, 2009, « L’impact du massacre du 4 juin sur le mouvement

démocratique », Perspectives Chinoises, 2, p.19-30. 4Jean-Louis Rocca dans MINONZIO, Jérôme, 2014, « L’équation du pouvoir : une classe moyenne sans élections.

Entretient avec Jean-Louis Rocca », Informations sociales, 185, 5, p. 92-101.

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problèmes provoqués par le triplement du nombre de migrants internes 5 estimé alors à 200

millions 6 , en réformant la taxation agricole des exploitations familiales et en assurant

l’enseignement gratuit pour les enfants de classes économiques défavorisées7. Malgré le succès

apparent de sa politique (croissance économique du pays), les centaines de millions de migrants

sans protection sociale et les 180 000 protestations populaires annuelles font de son règne une

« décennie perdue » aux yeux de nombreux Chinois8. D’un point de vue organisationnel, il finalise

le déploiement du système électoral actuel au niveau local et recrute des gens d’affaires au sein du

PCC9.

À la fin de l’année 2012, Xi Jinping devient premier secrétaire du PCC et hérite d’un

ensemble d’institutions politiques et étatiques transformées, ainsi que d’une configuration sociale

particulière. Alors que le rôle du parti avait décru dans la vie des Chinois depuis la mort de Mao,

Xi réhabilite le PCC comme un acteur incontournable de l’ensemble de la société chinoise, en

mettant de l’avant les douze idéaux reflétant les valeurs socialistes (社会主义核心价值观, shehui

zhuyi hexin jiazhiguan) : la prospérité, la démocratie, la civilité, l’harmonie, la liberté, l’égalité, la

justice, l’état de droit, le patriotisme, le dévouement, l’intégrité et la camaraderie.

En janvier 2013, il promeut les « trois confiances en soi » (三个自信, san ge zixin) censées

doper le pays et la loyauté de ses habitants : le communisme aux caractéristiques chinoises, le

système théorique sur lequel ce communisme s’appuie et le système politique actuel. Il ajoutera

en 2016 un quatrième paramètre de cette confiance en soi, la « culture chinoise ». En avril 2013,

paraît également le Document 9 qui met en garde contre les valeurs occidentales et fait ressortir

sept caractéristiques à ne surtout pas importer en Chine : l’idée d’une constitution démocratique à

l’occidentale, la défense des droits de l’homme, le néolibéralisme, la liberté de la presse,

l’apparition d’une société civile et de partis politiques multiples, et l’indépendance de la justice.

5 Souvent nommés nongmingong (农民工) par les spécialistes et les médias chinois, la plupart récusent cette appellation

et se considèrent comme des waidiren (外地人).

ZAVORETTI, Roberta, 2017, Rural Origins, City Lives: Class and Place in Contemporary China, Seattle: University

of Washington Press, p. 28-51. 6 HEITZ, Pauline, 2005, « Quand les rêves de Mao s’effondrent », Perspective Monde, Université de Sherbrooke :

École de Politique appliqué. 7 MINZNER, Carl, 2018, End of an Era. How China’s Authoritarian Revival is Undermining its Rise, Oxford: Oxford

University Press, p. 25; 57-58. 8 ECONOMY, Elisabeth C., 2018, The Third Revolution. Xi Jinping and the New Chinese State, Oxford: Oxford

University Press, p. 9. 9 BRODSGAARD, Kjeld Eric, 2018, op. cit., p. 4.

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Ce document souligne que la libéralisation de l’économie ne remet aucunement en cause le

fonctionnement sociétal imposé par le PCC.

Simultanément, Xi Jinping lance une campagne promouvant le culte de sa personnalité10

et devient officiellement le cœur (核心, hexin) du PCC11, tout en faisant inscrire sa pensée dans la

constitution du pays en 201712. Enfin, la campagne anticorruption en cours vise actuellement des

instances du PCC que Xi Jinping ne contrôle pas, et est interprétée par de nombreux observateurs

comme une mise au pas de celles-ci.

Dans ce nouveau contexte, de nombreux auteurs ont noté les restrictions des espaces

mobilisables par la « société civile chinoise », réactivant un débat plus ancien sur ce qui est entendu

par le concept de société civile en sciences sociales. Cette appellation ayant une généalogie propre

dans le pays, je reviendrai sur son utilisation en Chine avant de dépeindre brièvement le débat que

ce terme suscite en dehors du pays. Partisan de l’utilisation de ce concept, je ne nie aucunement

les spécificités de la société civile chinoise ni de son environnement, et c’est dans cette optique

que la seconde partie de cet essai mettra en lumière les relations reliant les institutions étatiques et

le PCC. Une fois ces caractéristiques propres au contexte chinois soulignées, je décrirai la

pénétration du PCC dans les productions artistiques et les pratiques religieuses des Chinois, avant

de m’intéresser aux sujets qui mobilisent les Chinois, puis aux outils qu’ils utilisent pour influencer

les décisions émanant des différents échelons de pouvoir. Cette recherche s’efforce donc de

répondre à trois questions principales : quels sont les sujets les plus importants pour la société

civile chinoise contemporaine? Quelles sont les tactiques déployées pour peser sur les décisions

politiques ? Et enfin, à l’inverse, quels sont les ajustements et les évolutions du pouvoir politique

face à ces développements ?

10 SRIDI, Nicolas, 2017, « Chine : du bon usage des symboles selon Xi Jinping », Asialyst, (consulté le 29 avril 2019 :

https://asialyst.com/fr/2017/11/24/chine-du-bon-usage-symboles-selon-xi-jinping/). 11 ECONOMY, Élisabeth C., 2018, op. cit., p. 24. 12 SCHELL, Orville, 2018, « A Neglected Democratic Heritage », Journal of Democracy, 29, 2, p. 90-97.

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1. LE CONCEPT DE SOCIETE CIVILE ET SON APPLICATION EN CHINE CONTINENTALE

1.1 LE DÉBAT ACADÉMIQUE ET LES MODALITÉS D’UTILISATION POUR LA CHINE

C’est à la suite des événements de Tian’anmen que les chercheurs extérieurs au pays se sont

mis à utiliser ce concept 13 , alors même que la question de la « société civile chinoise » est

également débattue par de nombreux chercheurs chinois14. En Chine, cette discussion ne se limite

pas à une discussion érudite autour d’un concept particulier. « Pour les intellectuels chinois qui ont

tiré les leçons du mouvement de la place Tian’anmen et des mouvements contestataires à l’est de

Taiwan, la question de la société civile n’est pas seulement une préoccupation intellectuelle, elle

est au cœur de l’avenir de la démocratie : moyen d’affaiblir le régime, et peut-être même de le

détruire »15. Selon les auteurs chinois, cette décennie voit la naissance, ou la renaissance, de la

société civile, notamment par la résurgence d’organisations traditionnelles comme les sociétés

secrètes et les clans. Si l’existence de la société civile est donc admise et décrite comme une force

d’espérance par beaucoup, d’autres chercheurs voient en son existence une menace16. En effet,

voyant dans des pays de l’ex-URSS les conséquences des réformes qu’implique la reconnaissance

de la société civile, une pensée étatiste se développe : « pour certains, le risque principal, ce n’est

pas l’inertie ou la faiblesse de la société civile, c’est au contraire que l’État perde tout contrôle de

la société »17. Cette approche va donner naissance à un courant de pensée conservateur et effacer

la société civile de la plupart des travaux de sciences sociales produits dans le pays.

13 Liste non exhaustive :

GOLD, Thomas B., 1990, « The resurgence of civil society in China », Journal of Democracy, 1, 1, p. 18-31.

ØSTERGAARD, Clemens Stubbe, 1989, « Citizens, groups and a nascent civil society in China: Towards an

understanding of the 1989 student demonstrations », China Information, 4, 2, p. 28-41.

STRAND, David, 1990, « Protest in Beijing: Civil society and public sphere in China », Problems of Communism, 39,

3, p. 1-19.

YANG, Mayfair Mei-hui, 1989, « Between state and society: The construction of corporateness in a Chinese socialist

factory », The Australian Journal of Chinese Affairs, 22, p. 31-60. 14 Pour les prémices de ce débat, voir HE, Baogang, 2011 [1995], « The Ideas of Civil Society in Mainland China and

Taiwan, 1986-92 », in Z. Deng (Ed.), State and Civil Society. The Chinese Perspective, Londres: World Scientific, p.

197-239.

Pour les textes publiés entre 1992 et 2000 voir la bibliographie de DENG Zhenglai, 2011, « Academic Inquiries into

the ‘Chinese Success Story’ », in Z. Deng (Ed.), 2011, op. cit., p. 1-22. 15 ZHANG, Lun, 2003, La vie intellectuelle en Chine depuis la mort de Mao, Paris : Fayard, p. 237. 16 Liste non exhaustive :

SHI, Yuankang, [石元康], 1991, « 市民社會與重本抑末──中國現代化道路上的障礙 » [Shemin shehui yu

zhongben xiandai daolusheng de zhangai / Société civile et politique de réhabilitation : des obstacles à la

modernisation chinoise], 二十一世紀 [Ershiyi Shiji/21e Siècle] (août), p. 105-120.

WANG, Shaoguang [王紹光], 1991, « 關於「市民社會」的幾點思考» [Guanyu « shemin shehui » de jidian

sikao/Réflexion sur la « société civile »], 二十一世紀 [Ershiyi Shiji/21e Siècle] (décembre), p. 102-114. 17 ZHANG, Lun, 2003 op. cit., p. 238.

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Ce courant laisse encore des traces aujourd’hui, alors que les chercheurs contemporains chinois

suivent pour la plupart une approche officielle. Or, depuis le mois de mai 2011 et l’article d’un

membre du Comité des Affaires politiques et juridiques18, l’expression société civile (公民社会,

gongmin shehui)19 a disparu des médias officiels20 et a été remplacée par gonggong shehui (公共

社会, société publique) 21.

Les chercheurs chinois contemporains des facultés de sciences sociales évitent donc d’utiliser

le concept de société civile dans leurs analyses et, s’ils présentent généralement la démocratie

socialiste comme perfectible, elle est pour eux préférable à la démocratie bourgeoise. Ils expliquent

leurs réticences à travailler sur les phénomènes politiques observables dans la société de par leur

nature sensible (敏感, mingan). Ils avancent également que travailler sur ce type de sujet pourrait

être une source d’instabilité (破坏社会稳定, pohuai shehui wending)22. À cela s’ajoutent des

considérations très terre à terre, comme le fait que l’État-Parti est le financeur principal des

recherches dans le pays. Également, les chercheurs chinois font majoritairement la promotion

d’une « exception chinoise »23 qui rend difficile la coopération avec les chercheurs étrangers, et

renforce l’ambigüité pour les spécialistes occidentaux d’utiliser ou non le concept de société civile

en contexte chinois. Cette posture pose aussi la question de l’indépendance de la science vis-à-vis

du pouvoir politique24.

18 ZHOU, Benshun [周本顺], 2011, « 走中国特色社会管理创新之路 » [Zou Zhongguo tese shehui guanli

chuangxin zhi lu / Suivre le chemin aux caractéristiques chinoises dans l’innovation de la gestion sociale], 豆瓣Douban. 19 Trois expressions chinoises se traduisent par société civile, mais les connotations qui y sont attachées diffèrent

grandement.

L’expression gongmin shehui (公民社会) apparaît dans les années 1980 et est adoptée par les académiciens. Cette

expression transporte l’idée d’une participation par la concertation de la population aux politiques étatiques.

L’expression shimin shehui (市民社会) est plus ancienne. Elle a servi à traduire les écrits de Marx, et est rattachée

dans l’imaginaire collectif aux sociétés bourgeoises.

Enfin, l’expression minjian shehui (民间社会) est très utilisée à Taiwan. Sans connotation spécifique, elle a été utilisée

par des historiens de Chine continentale, mais son usage sur le continent reste très faible. 20 PILS, Éva, 2012, « Introduction. ‘Société civile’ et ‘communautés libérales’ en Chine », Perspectives Chinoises,

120, 3, p. 2-8. 21 CABESTAN, Jean-Pierre, 2014, Le système politique chinois, Paris : SciencesPo Les Presses, p. 485-486. 22 La position officielle des chercheurs chinois est qu’ils améliorent au quotidien un système déjà démocratique, mais

aux particularités chinoises (zhongguo tese, 中国特色). 23 Ces chercheurs mettent de l’avant les spécificités locales (bentuhua, 本土化) pour travailler en vase clos. 24 CABESTAN, Jean-Pierre, 2014, op. cit., p. 26-27.

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Citons tout de même l’exception de Guo Yuhua (département de sociologie de l’Université

Tsinghua) et de ses travaux sur le monde ouvrier, les travailleurs migrants, et les modes

d’organisation des propriétaires 25; de Ying Xing (sociologue à l’Université de sciences politiques

et de droit de Chine) qui a travaillé sur le mouvement des paysans manifestant à la suite des saisis

de leurs terres par les autorités locales ; et enfin les chercheurs réfléchissant à l’agentivité des

classes dominées, dont Xu Xiaohan (département de sociologie de l’Université Tsinghua) et Wang

Qingming (Professeur associé au département de sociologie de la Zhou Enlai School of

Government Administration de l’Université de Nankai), tous répertoriés par Frenkiel et Wang26.

Peu nombreux à traiter directement de la contestation populaire27, les chercheurs chinois

sont donc plus mobilisés pour étudier les transformations et les créations de nouveaux espaces

publics28. Notons que cette description des travaux réalisés par des chercheurs locaux s’intéressant

de manière détournée à la société civile chinoise a de nombreuses failles, à commencer par le fait

que je ne suis au courant que d’une fraction infime des publications sorties en Chine. En effet, si

les universitaires chinois ont une liberté relative sur leur sujet de recherche, la publication de leurs

résultats est beaucoup plus problématique, ce qui explique que sur les sujets sensibles comme celui

de la société civile, ils préféreront ne pas les publier, ou encore les publier dans des neibu (内部,

revue dévolue à une circulation interne)29.

25 Son livre ayant eu le plus d’écho (voir Guo, 2013 en bibliographie) a été édité à Hong Kong est est interdit de

publication en Chine continentale. Un de ses articles a été traduit en français (voir Guo, 2008). 26 FRENKIEL, Émilie et WANG, Simeng, 2017, « Les jeunes Chinois dans différents espaces nationaux : expressions

et engagements politiques », Participations, 17, p. 5-33. 27 Il est risqué de publier des études sur des sujets sensibles, et cela s’est aggravé depuis l’arrivée de Xi Jinping, comme

le montre le licenciement, et l’interdiction de sortie du territoire touchant le prestigieux professeur libéral de droit de

l’Université Tsinghua Xu Zhangrun, suite à un article critiquant les politiques actuelles vis-à-vis des libertés dans le

pays.

BARMÉ, Geremie R., 2019, « Introducing ‘The Xu Zhangrun Archive’ », China Heritage (consulté le 19 juin 2019:

http://chinaheritage.net/journal/introducing-the-xu-zhangrun-archive/).

LAU, Mimi et MAI, Jun, 2019, « Law professor who criticized President Xi Jinping barred from leaving China »,

Inkstone (29 avril) (consulté le 19 juin 2019: https://www.inkstonenews.com/politics/law-professor-xu-zhangrun-

barred-leaving-china/article/3008103).

28 Voir les nombreuses références citées par MENG, Tianguang ; PAN, Jennifer et YANG, Ping, 2017, « Conditional

Receptivity to Citizen Participation: Evidence From a Survey Experiment in China », Comparative Political Studies,

50, 4, p. 399-433. 29 FRENKIEL, Émilie, 2014, Parler politique en Chine. Les intellectuels chinois pour ou contre la démocratie, Paris :

Presses Universitaires de France, p. 23.

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Les chercheurs chinois travaillent donc sur des lieux et des expressions de la société civile,

mais le plus souvent sans la nommer. Ceci étant dit, le débat sur la pertinence du concept de société

civile existe dans le pays. Par exemple, Sun donne sa propre définition de la société civile sur un

blog chinois (une société composée de citoyens individuels ayant des responsabilités civiques et

des droits individuels leur permettant de les exercer) et ne pense pas que l’on puisse parler de

« société civile chinoise » à l’heure actuelle 30 . Xiao Gongqin, « représentant majeur du

néoconservatisme »31 et campé contre toute démocratisation immédiate de la société chinoise lui

réplique qu’une « société civile » peut se former sans être en opposition avec l’État, mais en

coopération avec lui32, réactualisant une théorie déjà utilisée dans le pays33 , et justifiant les

mécanismes étatiques actuels, qu’il y ait ou non une société civile en Chine.

Du côté des chercheurs hongkongais, ceux qui ont participé à l’ouvrage collectif édité par

Benny Yiu-ting Tai 34 voient la « société civile chinoise » comme un secteur indépendant se

formant dès la fin du 19e siècle, puis annihilée en 1949 et finalement remplacée par des

« organisations de masse » (群众组织, qunzhong zuzhi) mises en place par le PCC en Chine

continentale. Ils perçoivent également que la société civile hongkongaise est pour sa part étouffée

depuis la rétrocession de l’île en 199735.

1.2 LE DÉBAT ACADÉMIQUE EN DEHORS DE LA CHINE

Le débat sur la pertinence du concept de société civile pour la situation chinoise mobilise des

arguments différents en dehors du pays. Dans les années 1990, alors que les intellectuels chinois

valident quasi unanimement l’apparition de la société civile dans leur pays, des chercheurs

occidentaux se positionnent contre son utilisation invoquant, entre autres, des différences

historiques et l’absence d’une bourgeoisie dans le pays36. Pourtant, si l’on considère la définition

30 SUN, Liping [孙立平], 2009, « 中国有没有公民社会 ? » [Zhongguo you mei you gongmin shehui ?/ La Chine a-

t-elle une société civile ?], cité par PILS, Éva, 2012, op. cit., p. 3 :http://sun-liping.blog.sohu.com/129843127.html. 31 FRENKIEL, Émilie, op. cit., p. 7. 32 XIAO, Gongqin [萧功秦], 2012, « 发展公民社会之中国路径 » [Fazhan gongmin shehui zhi zhongguo lujing /

Développer la voie chinoise de la société civile], cité par PILS, Éva, 2012, op. cit., p.3 :

http://www.aisixiang.com/data/55833.html. 33 DENG, Zhenglai et JING, Yuejin, 2002, « Constructing China’s Civil Society », in Z, Deng et Y. Yuejin (Eds.),

Research on Civil Society Theories, Pékin : Chinese University of politics and Law Press. 34 Condamné le 24 avril 2019 à 16 mois de prison pour son rôle dans le mouvement des parapluies. 35 TAI, Benny Yiu-ting (Ed.), 2018, China’s Sharp Power in Hong-Kong, En ligne: Hong Kong Civil Hub. 36 Liste non exhaustive : CHEVRIER, Yves, 1995, « La question de la société civile : la Chine et le chat du Cheshire »,

Études chinoises, 14, 2, p. 153-251.

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de la société civile donnée par Habermas37, il est difficile de nier dans les années 1990 l’existence

d’espaces non supervisés par l’État où se cristallise une opinion publique à travers l’histoire

chinoise38.

Dans ce débat épistémologique, Yang souligne qu’elle n’utilise pas le concept de société civile

en Chine comme une description empirique de la société civile occidentale, « in which to search

for its traces is at the same time to invoke the non-state sphere and make it a conscious project »39.

Teets, qui est confronté aux mêmes problèmes sémantiques quinze ans plus tard, précise que :

« First, the state-society relationship is theorized to be dynamic and contested, and thus not

dependent on autonomy as the primary determinant of relationship but rather allowing for a

relational view that includes varying degrees of partnership and collaboration. Second, an action-

based definition focuses on the ability of civil society organizations to create social trust, collective

action and civic participation »40.

De mon point de vue, et sans nier les spécificités de la société civile chinoise « en construction

et en transformation permanente, probablement plus proche de la bürgerliche Gesellschaft de

WAKEMAN, Frederic Jr., 1993, « The civil society and public sphere debate: Western reflection on Chinese political

culture », Modern China, 19, 2, p. 108-138. 37 Habermas soutient que la société civile est le sujet de l’opinion publique. Loin d’être la somme des opinions privées,

l’opinion publique est une opinion qui se forme en public, ce qui présuppose l’existence d’un lieu ou d’un moyen de

communication permettant à cette opinion publique d’être débattue. Habermas pense que les villes et l’imprimerie ont

permis dans un premier temps à la frange bourgeoise des sociétés occidentales de partager leurs opinions en sortant

de l’entre-soi, mais il note que cette opinion publique reste longtemps apolitique, la presse politique étant interdite

jusqu’à la fin du 18e siècle. Cette opinion publique devient par la suite politique, et joue un rôle prépondérant dans le

développement des différents systèmes de démocratie parlementaire, où elle devient arbitre des politiques proposées.

L’ensemble de ces changements encourage les autorités du pouvoir à utiliser la communication et ses outils plutôt que

le culte du secret qui régnait jusque-là. Si cette opinion publique bourgeoise transforme la façon d’exercer le pouvoir,

elle exclut encore l’opinion publique ouvrière qui va s’imposer via le suffrage universel, après de nombreuses luttes

au sein du monde du travail.

FRYDMAN, Benoit, 2004, « Habermas et la société civile contemporaine », in B. Frydman (Ed.), La société civile et

ses droits, Bruxelles : Bruylant, p.123-144. 38ROWE, William T., 1993, « The Problem of Civil Society in Late Imperial China », Modern China, 19, 2, p.139-

157.

SCHOPPA, R. Keith, 1982, Chinese Elites and Political Change. Zhejiang Province in the Early Twentieth Century,

Cambridge: Harvard University Press. 39 YANG, Mayfair Mei-hui, 1994, Gifts, Favors, and Banquets: The Art of Social Relationship in China, Ithaca:

Cornell University Press, p. 288. 40 TEETS, Jessica C., 2009, « Post-earthquake relief and reconstruction efforts: The emergence of civil society in

China? », The China Quarterly, 198, p. 330-347.

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Hegel et de Marx41 que de la société politique chère à Gramsci ou à Habermas »42, je rejoins les

chercheurs qui parlent de société civile au sujet de la Chine du troisième millénaire, tout en

reconnaissant que le débat académique entourant les perspectives de recherches possibles en Chine

par l’utilisation du concept de société civile est toujours en cours43.

Mais, reconnaître la société civile chinoise ne doit pas non plus mener à gommer les limitations

empiriques de cette société civile. À ce sujet, certains thèmes sont soigneusement évités, « comme

l’indépendance du Tibet ou de Taiwan, mais à l’extérieur de la zone noire, il existe une zone grise

au périmètre imprécis et fluctuant, au sein duquel des revendications peuvent se déployer et obtenir

gain de cause lorsqu’elles savent adopter une formulation et des modalités d’expression

acceptables. C’est ainsi que les mobilisations vont éviter de se présenter comme défiant le Parti,

et vont au contraire privilégier l’utilisation et le détournement de la rhétorique officielle afin de

faire apparaître leur revendication comme légitime et comme contribuant à l’amélioration de la

bonne gouvernance (Hua et al., 2010 ; O’Brien et Li, 2006) »44.

Enfin, le PCC est fusionné aux institutions étatiques et restreint les espaces publics de la société

civile. Avant de nous intéresser à la performativité de la société civile, il faut donc d’abord

comprendre la configuration dans laquelle celle-ci se déploie.

41 Chez Hegel, la bürgerliche Gesellschaft est constituée de personnes privées ayant pour but des intérêts propres

différents de ceux de leur famille ou de l’État. De son côté, Marx identifie pour sa part la bürgerliche Gesellschaft au

capitalisme transnational. La bürgerliche Gesellschaft est pour lui une société bourgeoise à laquelle il oppose la

‘société humaine’.

BOND, Niall, 2010, « La ‘société civile’ et ses expressions en Allemagne », in J. Rowell et A.M. Saint-Gilles, La

société civile organisée au XIXe et XXe siècle : perspectives allemandes et françaises, Villeneuve d’Asq : Presses

Universitaires du Septentrion, p. 45-57. 42 CABESTAN, Jean-Pierre, 2014, op. cit., p.486-487. 43 Pour les différentes utilisations de ce concept, voir GLEISS, Marielle Stigum et SAETHER, Elin, 2017,

« Approaches to civil society in authoritarian states: The case of China », Sociology Compass, 11.

Pour une proposition théorique récente, voir GLEISS, Mariel Stigum ; SAETHER, Elin et FÜRST, Katinka, 2019,

« Re-theorizing civil society in China : Agency and the discursive politics of civil society engagement », China

Information, 33, 1 : 3-22. 44 SALMON, Nolween, 2017, « Quelle place accorder à l’opinion publique dans la gouvernance chinoise ? La

mobilisation autour des particules PM2.5 en 2011 », Participations, 17, 1, p. 91-120.

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2. UNE CHINE FUSIONNEE AU PCC

2.1 IMBRICATION DU PCC ET DES INSTITUTIONS ÉTATIQUES

Le PCC compterait actuellement 90 millions d’adhérents45. Sans entrer dans les détails,

rappelons que le premier secrétaire du PCC est automatiquement président du pays et chef des

armées. Si le PCC n’est pas le seul Parti politique officiel, les « partis démocratiques » autorisés46

servent dans les faits à relayer la propagande étatique auprès de secteurs particuliers de la société,

et ont un rôle actif dans les mécanismes de répression contre des dissidents47.

Très hiérarchisées, les branches locales du PCC sont de natures multiples et sont réparties

sur plusieurs échelons organisationnels48. Elles sont dirigées par un comité élu pour cinq ans par

un système de démocratie directe ou indirecte49 qui est joué d’avance dans la mesure où la liste

des candidats doit être validée par les organisations de l’échelon supérieur. Leur rôle est

45 LEPAULT, Sophie et FRANKLIN, Romain, 2018, Le monde selon Xi Jinping, France : Illégitime défense et ARTE

G.E.I.E. 46 Ces partis ont été cooptés en 1949 par le PCC qui une fois victorieux du Guomindang, cherchait à stabiliser le pays

par la mise en place du « Front Uni », et la mise en place du « programme commun ».

FLORENCE, Eric, 2017, « Chine : permanence de l’État-Parti », Politique : Revue de débats, 100, p.28-35.

TSIEN, Tché-hao, 1975, « Les traits particuliers de la nouvelle constitution chinoise », Revue internationale de droit

comparé, 27, 2, p.349-373. 47 CABESTAN, Jean-Pierre, 2014, op. cit., p. 365-367. 48 Il y a différentes unités de base du Parti :

- Celles des quartiers urbains (jiedao, 街道).

- Celles des cantons, des bourgs, des villages et des quartiers d’habitation (shequ, 社区).

- Celles déployées dans les entreprises publiques et parfois privées (qui supervisent l’Assemblée générale des

actionnaires et la direction, tout en dirigeant les branches syndicales et autres organisations implantées dans

l’entreprise comme la Ligue de la jeunesse communiste).

- Celles dédiées aux ambassades et entreprises publiques installées à l’étranger.

- Celles organisées au sein de l’armée et de la police populaire armée.

- Celles s’occupant des organisations sociales et des ONG (minban feiqiye danwei, 民办非企业单位) 49 Les élections aux échelons les plus bas (district et canton, dont la seule prérogative est le maintien de l’ordre public)

sont directes depuis 1987 dans certaines régions. Ces élections ont été implantées au fur et à mesure dans l’ensemble

du pays, et à des dates différentes, empêchant toute cristallisation autour d’un enjeu quelconque à l’échelle nationale.

Elles sont indirectes pour les autres échelons. Il faut également noter qu’on peut individuellement se présenter comme

candidat indépendant avec le soutien de dix citoyens, ce qui peut conduire à des primaires lorsque les candidats sont

trop nombreux. Les idéalistes politiques et les défenseurs des droits de l’homme sont rarement élus, de par la

répression exercée sur eux, et la grande marge laissée aux autorités locales pour manipuler les résultats. Les élections

permettent par contre à certains membres de l’élite locale (chefs de village, entrepreneurs privés) de se faire élire,

faisant des cellules rurales (dont les cantons supervisent l’élection du secrétaire) des organisations souvent noyautées

par une seule famille représentant un des clans du village.

CABESTAN, 2014, op. cit., p. 287-330 ; 489.

DUCHÂTEL, Mathieu et ZYLBERMAN, Joris, 2012, op. cit., p. 222-224.

SCHUBERT, Gunter, 2007, « La démocratie peut-elle coexister avec le parti unique ? Pour une appréciation nuancée

des élections villageoises et cantonales en Chine », in M. Delmas-Marty et P.E. Will (Eds.), La Chine et la démocratie,

Paris : Fayard, p. 713-733.

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d’appliquer les mesures décidées par les instances supérieures, de transmettre de l’information

émanant de la localité, de recruter de nouveaux membres et d’éduquer la population vis-à-vis des

projets en cours. Ces organisations de base sont encadrées par les membres dirigeants du Parti (党

组, dangzu) nommés directement par l’organisation du Parti de l’échelon supérieur.

Chaque échelon du PCC est doublé d’une assemblée populaire à vocation représentative,

servant la plupart du temps de boîtes d’enregistrement des décisions prises au sein du PCC, et

d’une Conférence consultative politique du peuple chinois réunissant le Front Uni (中国人民政

治协商会议, zhongguo renmin zhengzhi xieshang huiyi), qui regroupe des membres du PCC et

des huit partis démocratiques, ainsi que des organisations ayant fait alliance avec le PCC au sein

du front uni patriotique lors de la guerre civile entre 1946 et 194950. Actuellement, son travail

s’intensifie et vise à inciter par tous les moyens afin que les personnalités importantes externes au

Parti le soutiennent.

2.2 LE SYSTÈME DE CRÉDIT SOCIAL

Nous voyons donc que le PCC influe à tous les niveaux de la structure organisationnelle

politique chinoise, et qu’il définit par le fait même l’espace public accessible à la société civile,

espace qui connait des « cycles of contraction and expansion »51 dans le temps. L’espace public

actuel est en pleine contraction, avec la mise en place depuis 2015 d’un système de notation des

citoyens mettant à jour un « crédit social » (社会信用体系, shehui xinyong tixi), par la collecte

automatique de données et leurs traitements par des intelligences artificielles développées par huit

compagnies chinoises52. Alors que les mots honnêteté (诚, cheng) et crédibilité (信, xin) fleurissent

sur les messages de propagandes du PCC, la population semble soutenir pour le moment la mise

50 Mao disait de ce front qu’il était une « arme magique » consistant à s’allier avec ses ennemis les moins dangereux

pour vaincre les plus dangeureux. Si les recommandations du Front Uni ont été par la suite instrumentalisées ou tout

simplement ignorées, Xi Jinping a réinvesti massivement dans cette tactique avec le recrutement de 40 000 cadres au

sein du département du travail du Front Uni, qui collecte et traite les informations se rapportant aux relations avec les

partis démocratiques, les intellectuels, le milieu universitaire, les groupes religieux et ethniques, ainsi que d’autres

personnalités influentes n’ayant pas de lien direct avec le PCC.

INTROVIGNE, Massimo, 2018, « ‘L’arme magique’ : comment la Chine tente de contrôler l’information à

l’étranger », Bitter Winter. Un magazine sur les libertés religieuses et les droits de l’homme en Chine (consulté le 19

juin 2019 : https://fr.bitterwinter.org/larme-magique-comment-la-chine-tente-de-controler-linformation-a-letranger/). 51 HOWELL, Jude, 2011, « Civil society in China », in M. Edwards (Ed.), The Oxford Handbook of Civil Society,

Oxford: Oxford University Press. 52 ECONOMY, Élisabeth C., 2018, op. cit., p. 79.

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en place de ce système de notation, espérant, entre autres, l’éradication des pengci (碰瓷), ces

tentatives d’extorsion suite à de faux accidents. Quarante-trois municipalités pilotes servent pour

le moment de test53. En parallèle se développe le projet « yeux perçants » permettant à tout citoyen

de se connecter aux caméras de surveillance placées à l’entrée des villages, et la mise à jour

mensuelle des mauvais payeurs sur le site creditchina.gov.cn, qui sont privés de train rapide et

interdit d’inscrire leurs enfants dans certaines écoles tant qu’ils n’ont pas régularisé leur situation54.

L’élargissement de ce système de notation à l’ensemble du pays est prévu pour 2020, mais la

mouture spécifique n’a pas encore été publicisée par le PCC.

Avec ce système de crédit social, l’état-parti chinois est en train de mettre en place un

système de contrôle numérique de sa population jusque là inégalé. En effet, les conséquences

encourues pour avoir une note décotée font que tout le monde veut respecter les réglements en

place. La population s’auto-contrôle pour avoir une note A, et doît donc se plier aux règles

demandées. Le système de crédit social n’est donc pas juste un système de surveillance généralisé,

mais est aussi un système de contrôle très efficace de la population.

3. LA RECUPERATION DES ŒUVRES ARTISTIQUES

Le PCC ne se limite pas à contrôler l’ensemble des fonctions étatiques et à mettre au point

un système de surveillance et de contrôle généralisé de sa population. En effet, le PCC, en « perfect

dictatorship »55, modèle aussi au maximum l’ensemble des discours en circulation dans le pays,

comme le montre une analyse du monde artistique. Si les productions artistiques sont en effet une

forme d’expression qui permet de contourner les normes, et de proposer des alternatives politiques,

elle peuvent également servir de canal de propagande au PCC.

53 Toutes utilisent le recoupage des informations obtenues grâce aux objets connectés des citoyens (en premier lieu

les téléphones portables) et celles découlant de la reconnaissance faciale par l’installation massive de caméra de

surveillances dans les espaces publics. 54, RAPHAEL, René et XI, Ling, 2019, « Quand l’État organise la notation de ses citoyens. Bons et mauvais Chinois »,

Le Monde Diplomatique, 778, p. 4-5. 55 RINGEN, Stein, 2016, The Perfect Dictatorship. China in the 21st Century, Hong Kong: Hong Kong University

Press.

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Les productions artistiques sont donc également un domaine que le PCC souhaite contrôler,

et si possible instrumentaliser. Les pressions sur les artistes se multiplient, Xi Jinping leur ayant

rappelé la « responsabilité qui est la leur devant la nation chinoise, et condamné leur appât du gain

et leur asservissement au marché aux dépens de la valeur artistique et morale »56 . Il insiste

également sur l’importance du patriotisme dans les productions artistiques, productions devant

informer le public « de manière indistincte, mais influente »57.

Ce souhait touche également la culture populaire, avec un communiqué en janvier 2018,

émanant de l'administration d’État chargée de la presse des publications de la radio, du cinéma et

de la télévision du peuple de la République de Chine, visant à limiter la diffusion d’images

associées à la culture hip-hop ainsi que les personnalités tatouées. Ce communiqué demande de ne

pas médiatiser les personnes « dont le cœur et la morale ne sont pas en adéquation avec la ligne du

Parti et dont les intentions ne sont pas nobles »58, et d’éviter d’engager des acteurs « de mauvais

goût, vulgaire ou obscène »59. Cette directive vise principalement la série télé-crochet Rap of China

dont l’audience s’accompagne de l’émergence de nouvelles pop-stars60. Il faut dire que si le rap

chinois a ses propres classiques depuis le début des années 200061, et qu’il rencontre un franc

succès depuis les années 2010, il peut être aux yeux du pouvoir un outil de subversion comme

lorsque des groupes régionaux préfèrent chanter dans leur langue régionale plutôt qu’en Mandarin

(langue imposée par l’état).

Faisant rayonner la culture chinoise à l’international62, et se revendiquant fièrement comme

Chinois63 (ce que les sociologues de Kloet et Fung nomment le cosmo-patriotism)64, le PCC tente

56 FRENKIEL, Émilie, 2016, « Entre rééducation des artistes et développement effréné, où va la culture en Chine ? »,

Nectart, 1, 2, p. 69. 57 Ibid., p.69. 58 MOREL, Jean, 2018, « Le rap chinois est-il en train de conquérir le monde ? », Nova. 59 Ibid. 60 Ibid. 61 Cette chanson du groupe 隐藏 (yincang / dissimuler, mettre à l’abri) de 2001 est un morceau incontournable pour

le rap chinois (consulté le 19 juin 2019 : https://www.youtube.com/watch?v=Qh6lJWfYyTo). 62 Le groupe Higher Brothers de la ville de Chengdu a réalisé un featuring avec le rappeur de Chicago Famous Dex,

ou encore avec la star du rap sud-coréen Keith Ape. 63 Le patriotisme des artistes mène parfois à des dérives, comme le montre le titre 瓜老外 (gua laowai / stupides

étrangers) signé par l’artiste Fat Shady (consulté le 19 juin 2019 :

https://www.youtube.com/watch?time_continue=96&v=GWZ8yTQyqoA). 64 De KLOET, Jeroen et FUNG, Anthony, 2017, Youth Cultures in China, Cambridge : Polity Press.

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de museler certains artistes rap65, mais a bien compris l’influence de ce style musical sur la

jeunesse du pays, et créait ses propres groupes. Par exemple, le groupe CD Rev se présente lui-

même comme un groupe de gangsta rap sponsorisé par le gouvernement. Leur chanson This is

China66 reprend en langue anglaise l’ensemble du discours étatique sur des sujets aussi divers que

la pollution, la corruption, l’influence étrangère ou la réunification de Taiwan à la Chine. Cette

instrumentalisation du rap chinois par le PCC est d’ailleurs de plus en plus assumée, comme le

montre un clip67 réalisé par l’agence de presse officielle Xinhua et le studio Su Han à l’occasion

de l’ouverture de la session parlementaire chinoise de mars 2019.

L’art comme moyen de critique du pouvoir, puis sa récupération par le PCC est également

visible dans le domaine littéraire. La littérature subversive chinoise est d’abord une littérature

clandestine qui apparaît à la fin des années 196068. Des revues littéraires comme Jintian (今

天,Aujourd’hui) éclosent et sont interdites. Comme les productions artistiques sont intimement

liées à la situation politique et sociale qui les entoure, ce n’est pas un hasard de voir les thèmes

abordés par les auteurs chinois contemporains de sciences-fictions (SF), comme l’incontrôlable

désir de développement de la Chine et ses conséquences, la résurrection cybernétique de Mao, les

réflexions sur les possibilités d’une « société harmonieuse » (slogan politique de Hu Jintao)

encadrée par des lois favorisant le néolibéralisme économique… 69.

La reconnaissance de la SF chinoise à l’étranger, avec le prix Hugo décerné en 2015 au

livre Problème à trois corps (三体 / santi) de Liu Cixin semble pourtant marquer un début de

récupération de ce genre par le PCC, avec l’appel du vice-président de la république Li Yuanchao

aux auteurs de SF de concourir au rêve chinois (中国梦/ zhongguo meng : slogan politique porté

par Xi Jinping). Cette déclaration est depuis suivie par la mise en place de nombreux prix littéraires

65 En 2017, l’émission the Rap of China consacre les rappeurs PG One et Gai. La popularité de l’émission alarme les

organes étatiques qui font disparaître de nombreux titres raps des ondes radios. Gai est également interdit de spéctacle,

car ses chansons ne correspondent pas aux valeurs du PCC, alors que PG One s’excuse pour certaines de ses paroles

qui glorifieraient le sexe et la drogue. 66 Consulté le 19 juin 2019 : https://www.youtube.com/watch?time_continue=13&v=RJHqBUlfa9w. 67 Consulté le 19 juin 2019 : https://www.youtube.com/watch?v=7VZnlsc1xrU. 68 BEI, Dao, 2001, « L’hier et l’aujourd’hui d’Aujourd’hui », in A. Currien et J. Siyan (Eds.), Littérature chinoise. Le

passé et l’écriture contemporaine. Regards croisés d’écrivains et de sinologues, Paris : Éditions de la Maison des

sciences de l’homme, p. 15. 69 SONG, Mingwei, 2015, « Après 1989 : la nouvelle vague de science-fiction chinoise », Perspectives Chinoises, 1,

p. 7-14.

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consacrés à la SF dans le pays, alors que le secrétaire de l’Association chinoise de Science et de

Technologie Wang Chunfa, membre du Parti, explique que la SF pourrait concourir au prestige de

la culture chinoise à travers le monde70.

Le rap et la science-fiction ne sont que deux exemples qui démontrent que les productions

artistiques permettent à certains acteurs de la société civile de s’exprimer. Mais, lorsque le succès

devient important, les artistes sont alors soit récupérés par le PCC qui façonne alors leurs discours,

soit muselés. Mais le PCC ne se limite pas au monde de l’art, et régente également des pans entiers

des institutions religieuses.

4. LA SPHERE RELIGIEUSE

Dans la mesure où tout observateur ne peut qu’être surpris par le renouveau religieux

observable des Chinois 71 , les communautés religieuses sont-elles créatrices d’espaces pour

l’expression de la société civile ? Rappelons que si la pratique religieuse est officiellement libre

depuis 1978 pour tout Chinois (à l’exception des membres du PCC)72, la reconstitution de comités

et d’associations encadrant les cinq cultes autorisés (bouddhisme, taoïsme, islam, catholicisme et

protestantisme)73 la même année, servent pour le PCC de courroie de transmission de ses directives

et d’organes de surveillance.

Le Document 19 de 1982 dessine la politique post-maoïste appliquée aux religions. Ce

document ne cache pas sa poursuite d’un idéal d’un pays sans religions, mais admet que les

phénomènes religieux sont complexes (alliant des facteurs sociologiques, ethniques et régionaux),

et que l’atteinte de cet objectif sera un travail de grande ampleur. Ce document définit également

les bonnes et mauvaises pratiques attachées à la religion, et justifie donc les interventions de l’État

dans la sphère religieuse. Mais, mis à part les lieux autorisés ou non (il est par exemple interdit de

70 GAFFRIC, Gwenaël, 2017, « Histoire et enjeux de la science-fiction sinophone », Monde Chinois, 51/52, p.12. 71 GOOSSAERT, Vincent et PALMER, David A., 2012, La question religieuse en Chine, Paris : CNRS Éditions.

JOHNSON, Ian, 2017, The Souls of China. The return of Religion after Mao, New York: Pantheon. 72 NIQUET, Valérie, 2017, La puissance chinoise, Paris : Tallandier. 73 PALMER, David A., 2009, « Les danwei religieuses. L’institutionnalisation de la religion en Chine populaire »,

Perspectives Chinoises, 4, p. 28.

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faire de la promotion religieuse dans la rue), les critères de bonnes pratiques restent très flous,

permettant au PCC d’intervenir à sa guise.

Suite aux événements de Tian’anmen, le PCC tente de se relégitimer par le développement

économique, et transforme de nombreux temples en lieux touristiques. La Chine utilise également

les religions pour adoucir son image à l’international, en envoyant des délégations mettant de

l’avant le caractère pacifique des religions chinoises74. La démonstration de force du mouvement

Falun gong 75 (1999), devenu depuis officiellement une « secte » ( 邪教 , xiejiao), change

l’approche du PCC sur la question, annonçant sa réorientation idéologique sur la question

religieuse. Ce changement de cap s’est renforcé depuis l’arrivée de Xi Jinping au pouvoir.

Depuis février 2018, de lourdes amendes sont distribuées aux organisateurs d’événements

religieux non enregistrés aux autorités. De plus, Xi Jinping déclare lors de l’ouverture du 19e

Congrès du PCC (2017) : « nous appliquerons intégralement la politique fondamentale du Parti en

matière d’affaires religieuses, veillerons à ce que les religions se sinisent (zhongguohua) et

travaillerons activement à aider les religions dans leur adaptation »76. Cette sinisation voulue par

le pouvoir prévoit certes une traduction chinoise pour le vocable théologique, rituel et culturel,

mais il demande surtout à ce que les discours véhiculés par les autorités religieuses s’alignent sur

celle du PCC77. D’ailleurs, la traduction officielle du discours en français ne parle pas de sinisation

renvoyant à la culture chinoise ou à un nationalisme culturel, mais bien du fait « que les religions

se conforment mieux aux réalités chinoises »78, poursuivant une instrumentalisation de la culture

traditionnelle focalisée exclusivement sur des comportements et des valeurs se résumant à « ordre,

obéissance aux supérieurs, dévouement à l'État, défense de la famille »79. Cette sinisation fait partie

pour Zhe d’une spiritualité étatique « néo-totalitaire », seul moyen pour le régime de se légitimer

74 ZHE, Ji, 2017, « Les avatars de la question religieuse en Chine : de 1949 au XIXe Congrès », Monde Chinois, 50, 2,

p. 89-97. 75 Le Falun gong (le qigong de la roue du Dharma) est un mouvement qui apparaît en 1992. Il fusionne les techniques

corporelles et méditatives du qigong à une doctrine moraliste, messianiste et apocalyptique. Suite à la mort de deux

de ses adeptes en 1999, le mouvement organise une manifestation de grande ampleur à Pékin, entrainant son

interdiction et une répression par le pouvoir qui se poursuit encore de nos jours.

OWNBY, David, 2006, « Qigong, Falun Gong, et la religion de l’État moderne chinois », Sociologie et société, 38,

1 : 93-112. 76 VERMANDER, Benoît, 2019, « Le rêve chinois de religion civile », Esprit, 1, p. 174. 77 Ibid., p. 175. 78 ZHE, Ji, 2017, op. cit., p. 95. 79 BÉJA, Jean-Philippe, 1995, « Naissance d’un national-confucianisme », Perspectives Chinoises, 30, p. 9.

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suite aux événements de 1989. Cette recherche de légitimité se traduit par de nombreuses

cérémonies totalement dévitalisées de leurs contenus symboliques originaux et présidées par des

cadres du PCC, que cela soit lors du Festival de la culture confucéenne organisé dans la ville de

Qufu, lors de sacrifice public en l’honneur de l’empereur jaune80, ou lors de festivals régionaux81.

Zhao Litao (2010) explique de son côté que le sécularisme de la Chine post-maoïste

cherche un renouveau religieux syncrétique et apolitique, ce qui explique la grande méfiance du

PCC vis-à-vis du bouddhisme tibétain, de l’islam pratiqué dans le Xinjiang et du protestantisme82.

Dans ce contexte, les « religions chinoises » (taoïsme et néoconfucianisme religieux) sont mieux

acceptées par le PCC que les « religions étrangères » (bouddhisme83, christianisme et islam).

Malgré cela, le nombre de chrétiens est exponentiel dans le pays, et Dubois de Prisque voit dans

ce phénomène « une forme de sécession spirituelle des masses chinoises à l’encontre d’un régime

qui tente de les étouffer derrière de hauts murs étroitement surveillés »84. C’est sans doute dans ce

contexte qu’il faut analyser la volonté de « sinisation » des religions, et la campagne lancée en

2014 de destruction de croix trop visibles.

Si le catholicisme chinois (9 à 12 millions de fidèles, dont 6 millions affiliés à l’église

officielle) ne concentre pas de réformateurs ou de dissidents politiques, les Congrégations

protestantes posent plusieurs problèmes récurrents au PCC. Ces problèmes ne sont pas l’œuvre de

l’église officielle protestante (20 millions de fidèles), mais de nombreuses congrégations

souterraines, parfois reliées à des organisations religieuses étrangères basées pour la plupart aux

États-Unis et à Taiwan, et qui se sont politisées85.

Encore plus dangereux pour le PCC, un nombre croissant de militants politiques se

revendiquent de leur foi religieuse pour critiquer le système actuel. En effet, les fidèles de ces

80 Personnage légendaire considéré comme le fondateur de la civilisation chinoise. 81 ZHE, Ji, 2015, « Secularization without Secularism: The Political-Religious Configuration of Post-1989 China »,

in T.T.T. Ngo et J.B. Quijada (Eds), Atheist Secularism and its Atheist Secularism and its Discontents. A Comparative

Study of Religion and Communism in Eurasia, Berlin : Springer, p. 101-104. 82 Cité par ZHE, Ji, 2015, op. cit., p. 94. 83 Le bouddhisme est historiquement une religion étrangère, et sa sinisation complète reste toujours d’actualité. Pour

un exemple contemporain, voir YANG, Luguang, 2019, « Le PCC peint des temples bouddhistes en blanc », Bitter

Winter. Un magazine sur la liberté religieuse et les droits humains en Chine. 84 DUBOIS DE PRISQUE, Emmanuel, 2015, « Chine : sécession des élites et révoltes des masses », Le Débat, 184,

2, p. 152-160. 85 CABESTAN, Jean-Pierre, 2018, op. cit., p. 142-147.

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congrégations protestantes affirment que Jésus est le seul chef de l’Église, et que la religion et la

politique sont deux royaumes séparés86. Le PCC a donc mis en place une politique pour encadrer

les congrégations et les fidèles qui se politisent, et tuer dans l’œuf toute expansion du phénomène

au reste de la société civile87. Cette politique répressive est toutefois difficile à mettre en place, car

les congrégations protestantes sont autonomes les unes vis-à-vis des autres, et ne sont pas

chapeautées par une instance centrale88. Une stratégie de résistance fréquemment utilisée est une

suspension des activités religieuses lors des opérations de l’Etat, et une réactivation progressive

de la congrégation une fois celle-ci finie. Notons également que l’évangélisation protestante est

forte en zone urbaine89 (chaque pratiquant s’évertuant à convertir son réseau familial). L’ensemble

de ces dynamiques pressure l’association protestante officielle du pays qui perd continuellement

des membres90.

Outre le protestantisme, l’islam est vu comme un problème par le PCC. En effet, l’islam

est majoritairement pratiqué par des personnes faisant partie des « minorités ethniques » (少数民族,

shaoshu minzu), et a plutôt mauvaise image chez les Han (92 % de la population). Les Hui qui

représentent l’islam de langue chinoise, ont depuis les années 1980 été mis de l’avant par les

autorités chinoises, au détriment des musulmans turcophones du Xinjiang91. Bien que les Hui

soient surveillés, et que leur relation avec le PCC soit fluctuante, le fait qu’ils parlent chinois les

protège pour le moment d’une politique assimilationniste brutale, ce qui n’est pas le cas des

musulmans turcophones et des Ouïgours en particulier. Ces politiques accompagné de décennies

de colonisation interne (les Han sont passés de 6 % des habitants du Xinjiang en 1940 à 40 % en

2010) 92 ont abouti à la situation actuelle largement relayée dans les médias : camps de

concentration de grande ampleur, brimades quotidiennes, check-point, surveillance électronique…

86 SUN, Yanfei, 2017, « The Rise of Protestantism in Post-Mao China : State and Religion in Historical

Perspective », The American Journal of Sociology, 122, 6, p. 1681. 87 VALA, Carsten T., 2017, The Politics of Protestant Churches and the Party-State in China. God Above Party ?,

Londres et New York : Routledge. 88 Une autre interprétation est que cette décentralisation explique que le PCC ne voit pas dans ce mouvement une

menace sérieuse, ce qui expliquerait que les congrégations protestantes illégales n’aient pas encore été supprimées

totalement.

ZHE, Ji, 2015, op. cit., p. 107. 89 LINCOT, Emmanuel, 2015, « Le Saint-Siège et la Chine », Outre-Terre, 45, 4, p. 282. 90 SUN, Yanfei, 2017, op. cit., p. 1702-1708. 91 ALLÈS, Elisabeth ; CHERIF-CHEBBI, Leïla et HALFON, Constance-Hélène, 2001, « L’islam chinois, unité et

fragmentation », Archives de sciences sociales des religions, 115, p. 20. 92 MOUTON, Ghautier, 2015, « Du Carrefour à l’impasse : la région du Xinjiang et la ‘question ouïghoure’ », Monde

Chinois, 44, 4, p. 78.

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Cette situation ressemble à celle mise en place au Tibet, qui connait également une

colonisation interne des Han, en plus d’une campagne de sédentarisation forcée des éléveurs

nomades. Les entraves à la pratique du bouddhisme tibétain sont également nombreuses. S’il est

vrai que le bouddhisme tibétain et le bouddhisme chinois sont différents, la sinisation voulue par

le régime a d’autres implications. En effet, « on ne peut nier que l’identité individuelle et collective,

pour une immense majorité des Tibétains, repose sur le bouddhisme tibétain. […] Être tibétain,

aujourd’hui comme avant l’occupation par la Chine, c’est être bouddhiste »93, ce qui explique que

les autorités chinoises relient la pratique du bouddhisme tibétain aux velléités indépendantistes.

Nous voyons donc que la sphère religieuse, qu’elle soit en contexte Han ou en contexte

minoritaire, est soit instrumentalisée et folklorisée par le PCC, soit étroitement surveillée, voire

interdite. Bien qu’elle permette aux pratiquants de tisser des réseaux sociaux qui échappent à la

surveillance de l’État, la religion semble donc être un espace des plus limité pour s’exprimer. Après

avoir vu deux avenues d’expression des Chinois par la pratique de l’art et de la religion, et les

possibilités limitées de tenir un discours subversif dans le pays, intéressons-nous aux sujets

spécifiques entrainant des mobilisations populaires dans le pays.

5. LES SUJETS DE MOBILISATION DE LA SOCIETE CIVILE CHINOISE

Les spécificités de l’État-parti chinois ont beau limiter les expressions possibles de la

société civile, celle-ci se manifeste de manière concrète sur de nombreux fronts. Ses actions sont

le plus souvent d’ampleur locale, et ce phénomène s’est amplifié avec la création de dizaines de

milliers d’agences locales lors de la réforme sur la transparence gouvernementale de 2008. Ces

agences chargées de répondre aux questions des Chinois ont reçu 1,3 million de demandes de

clarification pour la seule année 2011, mais n’ont répondu qu’à 14 % des celles-ci dans un délai

de 30 jours94. Distelhorst montre que la création de ces institutions « quasi démocratiques » en

Chine ont tout de même ouvert de nouveaux moyens de protestation pour la population, en

s’appuyant par exemple sur l’étude d’une campagne visant au respect des droits de propriété à

93 ROBIN, Françoise, 2015, « Suis-je Charlie ? Le dilemme tibétain », Le carnet des recherches pluridisciplinaires de

l'équipe ASIEs sur la Corée, la Chine, l'Asie du Sud-Est, la Haute-Asie et l'Océan indien. 94 DISTELHORST, Greg, 2017, « The Power of Promises : Quasi-Democratic Institutions and Activism in China »,

Comparative Political Studies, 50, 4, p. 464-498.

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Canton, ou celle émanant du site Internet China Budget Network95, et demandant la transparence

budgétaire en Chine. Les institutions locales ont de plus tout intérêt à résoudre elles-mêmes les

mécontentements locaux pour être bien notées par les échelons supérieurs. Dans cette dynamique

complexe sont même apparus des courtiers (黄牛, huangniu) servant de médiateurs entre les

populations et les élus locaux96.

Outre les organisations de résistance aux expropriations déjà évoquées rapidement, et en

lien avec des affaires de corruption dans le cadre de projets immobiliers, la société civile se

mobilise via d’autres arènes, notamment autour des problèmes écologiques que connait le pays, et

des bouleversements affectant l’organisation du travail salarié.

5.1 LES QUESTIONS ENVIRONNEMENTALES

L’environnement et sa défense ont été un des points d’achoppement permettant la visibilité de

la société civile : « l’environnement est d’ailleurs devenu un lieu privilégié pour gagner du terrain

sur des questions clairement politiques qui n’auraient pu être abordées de front, comme la

transparence de l’information ou le respect des droits des citoyens »97. Il n’est donc pas étonnant

que plus de la moitié des « incidents de masse »98 soient reliés à des problématiques écologiques99.

Le journaliste Ma Jun est un des catalyseurs importants de ce phénomène. Il réalise dans les

années 1990 de nombreux reportages sur la dégradation de l’environnement pour le compte du

quotidien hongkongais South China Morning Post, et sort en 1999 le livre La Crise de l’eau100,

qui a de grandes répercussions dans la prise de conscience écologique à travers le pays. Il crée en

95 La plateforme China Budget Network a été montée en 2005 par le militant Wu Junliang

Ibid., p. 482-484. 96 ONG, Lynette, H., 2018, « Engaging Huangniu (brokers): Commodification of State-Society Bargaining in China»,

Journal of Contemporary China, 28, p. 293-307. 97 SALMON, Nolween, 2017, op. cit., p. 92. 98 D’une manière plus générale, les « incidents de masse » toutes causes confondues sont en augmentation constante

dans le pays, et résultent le plus souvent d’abus de pouvoir de cadres locaux, noté plus souvent sur leurs résultats

économiques que sur leurs gestions des administrés.

FEWSMITH, Joseph, 2013, The Logic and Limits of Political Reform in China, New York: Cambridge University

Press, p. 18-41. 99 LIN, Fen et ZHANG, Xinzhi, 2018, « Movement–Press Dynamics and News Diffusion: A Typology of Activism

in Digital China », China Review, 18, 2, p. 33-64. 100中国水危机 (Zhongguo shui weiti ), traduit en 2004 en anglais (voir en bibliographie).

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2006 l’ONG Institute of Public & Environmental Affairs qui met à jour une carte de la Chine en

recoupant l’ensemble des données de mesures de polluants101.

Les associations de défense de l’environnement ont pour leur part fait leur apparition dès

1993102, et ont souvent des connexions avec des consœurs étrangères103. Elles organisent des

campagnes de sensibilisation et d’information sur la corruption malgré leurs difficultés de

financements et d’enregistrements officiels 104 . C’est aussi vis-à-vis des questions

environnementales que certains Chinois, tout en respectant les limites qui leur sont imposées, se

détournent parfois des associations universitaires émanant directement du PCC pour créer leurs

propres associations105. Enfin, notons la création en 1998 du premier Centre d’assistance juridique

aux victimes de la pollution (CAJVP) par Wang Cangfa, qui épaule les acteurs de la société civile

lorsqu’ils en ont besoin. Il a été reproduit en 2005 par la Fédération de l’environnement de Chine106.

Les questions environnementales ont également occasionné des manifestations dans les rues107,

et le PCC a évidemment légiféré pour contenir cette forme d’activisme. En 2003, l’organisation

d’audits publics devient obligatoire pour les évaluations d’impacts environnementaux des grands

projets de construction108, et plusieurs tribunaux spécialisés sur les questions environnementales

voient le jour à partir de 2008109. Depuis le mois de mai 2013, le PCC souhaite réguler au plus vite

cette source de contestation et multiplie les normes à suivre et les planifications sur le sujet110.

101 DOUAY, Nicolas, 2014, « Mouvements sociaux numériques et aménagement de l’espace », Informations sociales,

185, 5, p. 123-130. 102 Citons par exemple « Les amis de la nature » et « Le village global de Pékin ». 103 XIE, Lei, 2011, « China’s Environmental Activism in the Age of Globalization », Asian Politics & Policy, 3, 2, p.

207-224. 104 THIREAU, Isabelle, 2014, « Les mobilisations collectives pour la défense de l’environnement et de la sécurité

alimentaire », Informations sociales, 185, p. 112-118. 105 SÉLIM, Monique, 2013, « L’irruption de la nature à Canton. Entre ONG, État et normes globales », Écologie &

politique, 47, 2, p. 39-49. 106 BALME, Richard, 2013, « La justice environnementale comme équité. La politisation des conflits

environnementaux en République populaire de Chine », Écologie & politique, 47, 2, p. 63-75. 107 Les cas sont nombreux. Notons ici les plus emblématiques, soit celles de 2007 à l’encontre de la construction d’un

complexe pétrochimique produisant du paraxylène à Xiamen (Fujian) finalement transféré dans la péninsule de Gulei

(Zhangzhou), et la fermeture et le déménagement d’un complexe pétrochimique à Dalian (Liaoning) en 2011.

BALME, Richard, 2013, op. cit., p. 57.

SÉLIM, Monique, 2013, op. cit., p. 39-40. 108 BALME, Richard, 2013, op. cit., p. 69-70. 109 WANG, Alex L. et GAO, Jie, 2010, « Environmental Courts and the Development of Environmental Public Interest

Litigation in China », Journal of Court Innovation, 3, 1, p. 37-50. 110 ECONOMY, Elisabeth C., 2018, op. cit., p. 162-163.

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Dans les populations déplacées par des migrations écologiques (生态移民, shengtai yimin)111,

on note une hausse de participation des populations visées (participation aux assemblées

populaires de village, recours aux cadres locaux) dans la gestion post-migratoire du projet. Ces

personnes qui subissent une migration non choisie et qui supportent des procédures expéditives

ainsi que la perte de leur emploi, se retrouvent généralement transférées dans des logements de

basse qualité, avec un accès à l’eau difficile112.

5.2 L’ÉMANCIPATION DE LA SOCIÉTÉ CIVILE GRÂCE AU TRAVAIL

Les conflits vis-à-vis des conditions de travail ont également créé des espaces publics, en

réunissant l’ensemble des travailleurs d’une entreprise. De plus, dans la mesure où les protections

sociales sont faibles113 , les conditions de travail deviennent primordiales pour de nombreux

travailleurs.

La Chine a connu plusieurs vagues de conflits dus aux conditions de travail. La première va de

l’année 2000 à l’année 2004 et résulte de la restructuration massive des entreprises d’État. La crise

de 2008 entraine une deuxième vague de conflits provoquée cette fois par la fermeture de

nombreuses entreprises de petite et de moyenne tailles dans les zones côtières, provoquant des

problèmes multiples pour les migrants qui y travaillaient : salaires impayés, employeurs en fuite.

Les autorités locales essaient alors de colmater les crises en demandant à de tierces parties, comme

les propriétaires de grands sites industriels, d’avancer les fonds requis pour satisfaire les

travailleurs migrants. Si l’on en croit les statistiques officielles, le nombre de conflits est

redescendu en 2016 au niveau de celui des années 2000114. Ils sont majoritairement localisés dans

111 Les migrations écologiques résultent de politiques initiées par le gouvernement central de déplacement d’une partie

ou d’une population complète (un village) vers une région présentant un meilleur environnement. 112 DUBÉ, François N. ; YANG, HaiJuan et HUANG, LiJun, 2015, « Participation des populations aux projets

programmés de migration environnementale dans le Ningxia (Chine) », Revue européenne des migrations

internationales, 31, 2, p. 97-117. 113 Pour un historique des différents régimes de protection sociale existant dans le pays, voir URBAN, Marie, 2014,

« L’état de la protection sociale en Chine », Revue française d’administration publique, 150 : 467-479. Retenons ici

que les détenteurs d’un hukou116 urbain sont mieux protégés, et qu’il est très difficile pour les migrants d’obtenir un

droit découlant d’une cotisation faite dans une autre région. 114 Notons que ne sont comptabilisés que les conflits collectifs tels que définis dans la Loi (l’article 7 de la loi sur

l’arbitrage des conflits du travail de la République populaire de Chine datant de 2008 définit un conflit collectif comme

un conflit où plus de dix salariés défendant la même revendication sont engagés), et enregistrés par les comités

d’arbitrage des conflits de travail au niveau des comtés. Or, les travailleurs utilisent le plus souvent des moyens plus

directs (grèves, manifestations, pétitions) que le recours aux procédures d’arbitrage.

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les zones côtières industrialisées des provinces orientales 115 , régions qui ont bénéficié

économiquement du système de hukou (户口)116. Malgré ce que pourraient sous-entendre ces

chiffres, la plus grosse grève en effectifs de travailleurs depuis la fondation de la République

populaire de Chine (1949) s’est déroulée en 2014117, et les conflits de travail récents en Chine ont

des spécificités propres, qui s’expliquent en partie par le fait que la Chine dispose d’un système

syndical unifié à travers la Fédération des syndicats de Chine, directement rattaché au PCC et ses

syndicats affiliés.

Dans ce contexte, toutes les tentatives de créer des syndicats non affiliés ont mené à

l’emprisonnement de leurs initiateurs, comme ceux de l’usine Jasic basée à Shenzhen cette année.

De plus, la création d’une branche locale de la Fédération des syndicats de Chine est le résultat de

l’action concertée de la Fédération et de la direction de l’entreprise ; c’est une décision prise par

des cadres et dans laquelle les salariés ne sont pas impliqués. Ne disposant d’aucune autonomie

vis-à-vis de la direction des entreprises qui lui verse 2 % du total de la masse salariale, le syndicat

se contente donc de distribuer un certain nombre de biens et de services aux salariés118. Les conflits

de travail récents dans le pays ont comme caractéristiques principales le fait que :

BAO, Xiaoming et MURRAY, Gregor, 2016, « Chine : Évolutions récentes des conflits collectifs du travail dans les

entreprises », Chroniques internationales de l’IRES, 156, p. 116-134. 115 BOSKER, Maarten ; DEICHMANN, Uwe et ROBERTS, Mark, 2018, « Hukou and highways the impact of

China’s spatial development policies on urbanization and regional inequality », Regional Science and Urban

Economics, 71, p.91-109. 116 Le hukou indique le lieu de résidence officielle d’une personne, classée rurale ou urbaine. Les droits des individus

(accès au logement, aux soins médicaux, à l’école…) sont basés sur leur hukou. Le système de hukou est implanté en

1958 comme un outil politique cherchant à éviter des migrations internes. Le système de hukou a subi de nombreuses

réformes depuis les années 1980, qui ont simplifié le changement de hukou rural en hukou urbain suivant la grosseur

des municipalités : il reste quasiment impossible pour un migrant d’obtenir un hukou émanant de Pékin ou Shanghai.

De plus, de nombreux travailleurs migrants préfèrent tout de même conserver leurs hukou d’origine (qui leur donne

normalement droit à une parcelle de terre suffisante pour la construction d’une maison et d’une petite exploitation

agricole), espérant rentrer dans leur village dès qu’ils le pourront. Le Plan national pour un nouveau modèle

d’urbanisation (2014-2020) du Conseil d’État prévoit que 75 % des travailleurs migrants aient un hukou urbain en

2020, contre 67,1 % en 2012.

BOQUET, Yves, 2009, « Le Hukou », Espace, population, société, 3 : 355-357.

CHEN, Chuanbo et FAN, C. Cindy, 2016, « China’s Hukou Puzzle : Why Don’t Rural Migrant Want Urban Hukou »,

The China Review, 13, 3, p. 9-39.

LÉVY, Christian, 2016, « Les enjeux du développement urbain en Chine », Annales des Mines - Responsabilité et

environnement, 84, 4, p. 79-83. 117 40 000 ouvriers de la compagnie Yuyuan Footwear employés dans la ville de Dongguan (Guangdong), et

spécialisés dans la fabrication de chaussures ont ciblé leur employeur, puis l’administration locale, au sujet des

cotisations de retraite, des fonds de logement, des salaires, et de la représentativité du syndicat d’entreprise

BAO, Xiaoming et MURRAY, Gregor, 2016, op. cit., p. 121-123. 118 ANONYME, 2010, « Chine. Mais où sont passés les syndicats ? », Courrier International, 1023.

GUIHEUX, Gilles, 2006, « L’entreprise citoyenne en Chine : réalité et débat », Transcontinentales, 3, p. 15-29.

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- ils sont le plus souvent organisés via les réseaux sociaux.

- Ils visent majoritairement la défense de droits assurés par la Loi sur les contrats de travail

adoptée en 2008, puis se transforment en demande d’amélioration des conditions de travail.

- Ils n’ont pas de leaders qui personnifient le mouvement : les grèves sont plus souvent

tolérées que légales, et les membres du groupe ayant organisé la grève préfèrent rester

discrets : ils risquent le licenciement immédiat.

- Le syndicat officiel est le plus souvent hostile au conflit, et cherche dans un premier temps

à diffamer l’action.

- En l’absence de mécanismes de médiation, les travailleurs en grève ont souvent du mal à

se mettre d’accord sur leurs revendications. Même lorsqu’une ONG tente de jouer ce rôle,

les travailleurs restent réticents à l’élection de représentants du mouvement.

- Si l’employeur est réticent à ouvrir des négociations, les employés ciblent leurs actions sur

l’administration locale par des manifestations ou des pétitions119.

Certaines GONGO (Government-Organised Non-Government Organisations, qui sont des

ONG encadrées par l’État)120 ont également investi ce secteur. La thèse de Yang121 basée sur des

observations réalisées entre 2013 et 2015, laisse entendre que certaines d’entre elles, tout en se

conformant aux directives étatiques, trouvent des moyens de conscientiser les travailleurs sur leurs

droits, et la nécessité de les défendre. Cela explique sans doute la vague de répression qui s’abat

sur certaines d’entre elles, révélant un changement de leur approche s’appuyant jusque là sur les

droits individuels. Leurs nouvelles formes de mobilisations « provenant de la base et visant à

institutionnaliser un nouveau système de dialogue social centré autour des principes de

‘représentation ouvrière’ (gongren daibiao zhi 工人代表制) et de ‘négociation collective’ (jiti

tanpan 集体谈判) »122 déplaisant au PCC. Pour conclure sur ce sujet, notons que depuis 2015, les

LIN, Kevin, 2019, « State Repression in the Jasic Aftermath. From Punishment to Preemption », Made in China, 4, 1,

p. 16-19. 119 BAO, Xiaoming et MURRAY, Gregor, 2016, op. cit., p. 124-128. 120 CHEN, Lichuan, 2009, « Chine : les organisations sociales face à l’état », Monde chinois, 19, p. 1-8. 121 YANG, Xuehui, 2016, Labor NGOs : Labor movement agencies in China, Thèse soutenue à l’Université Baptiste

de Hong Kong. 122 FRANCESCHINI, Ivan et LIN, Kevin, 2019, « Les ONG de défense des travailleurs en Chine. Fluctuations entre

mobilisation légale et lutte collective », Perspectives Chinoises, 1, p. 80.

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ONG reliées aux travailleurs sont très surveillées, et que le PCC peut déployer légalement sa propre

cellule en leur sein123.

6. LES MOYENS DE MOBILISATION UTILISES PAR LES DIFFERENTS ACTEURS DE

LA SOCIETE CIVILE

Après avoir dépeint les sujets politiques autour desquels la société civile chinoise se

mobilise, je vais maintenant présenter la configuration générale particulière dans laquelle elle

déploie ses actions, en analysant le système judiciaire chinois, les différentes ONG existant dans

le pays, le rôle de la presse, et celui des médias sociaux.

6.1 LE SYSTÈME JUDICIAIRE CHINOIS

La fusion du PCC et de l’État est légitimée par le droit, mais l’utilisation de la législation n’est

pas l’apanage du PCC. La société civile l’utilise également pour communiquer ses multiples griefs.

Loin de connaitre une séparation des pouvoirs, la Chine a une configuration judiciaire spécifique.

Après avoir présenté cette dernière, nous verrons les subtilités utilisées par les acteurs de la société

civile pour obtenir satisfaction par ce médium.

6.1.1 La fusion du Parti-État à la justice et à l’économie

Le droit chinois a connu trois grandes transformations : les années 1980 furent celles d’un

renouveau du droit socialiste comme cadre structurant des échanges avec l’étranger et du contrôle

social ; La période 1989-1996 est marquée par sa modernisation vis-à-vis du secteur économique,

tout en restant subordonnée aux impératifs politiques ; depuis 1997, le droit vise à légitimer le PCC

et à lui permettre de diriger en accord avec la législation mise en place124.

123 LEI, Ya-Wen, 2018, The Contentious Public Sphere. Law, Media and Authoritarian Rule in China, Oxford: Oxford

University Press, p. 192-193. 124 CABESTAN, Jean-Pierre, 2006, « L’impact international de la réforme juridique en Chine », Politique et

Sociétés, 25, 2/3, p. 105-119.

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Ces réformes législatives n’ont pas consacré la séparation des pouvoirs, mais ont permis

d’avoir une base sur laquelle certains réformistes du droit peuvent s’appuyer125. Sans entrer dans

les détails du système judiciaire126, nous devons toutefois souligner son rôle de plus en plus accru

depuis 1996 dans la gestion des relations et des tensions sociales127. Bien que le 13e amendement

constitutionnel datant du 15 mars 1999 stipule que « la République populaire de Chine gouverne

l’État en vertu du droit, et construit un État de droit socialiste »128, la liberté prise par certains juges

de déclarer des lois inconstitutionnelles a amené en 2007 la Cour Suprême à leur enlever cette

possibilité129.

Loin d’avoir une séparation des pouvoirs, la structure des instances judiciaires et les

jugements rendus révèlent là aussi la fusion du PCC et de la justice en une seule entité.

Actuellement, cette fusion est mise en évidence par les jugements (avant tout politiques)

concernant les affaires de corruption, grand cheval de bataille de Xi Jinping. D’ailleurs, les peines

encourues pour indiscipline à la ligne du Parti sont bien plus lourdes que les peines judiciaires vis-

à-vis de la corruption130. Dans les faits, les tribunaux ne peuvent contredire une administration. De

plus, dans la mesure où « la loi chinoise interdit à un requérant qui s’est désisté de saisir le juge de

nouveau pour la même cause »131, les administrations locales (dont on a souligné qu’elles étaient

125 CHOUKROUNE, Leila et FROISSART, Chloé, 2013, « Réforme du droit et contestation sociale sans état de droit :

le laboratoire chinois », Le Mouvement social, 244, 3, p. 47-65. 126 Retenons que le système judiciaire est dirigé par le PCC et est contrôlé à l’interne par de puissantes Commissions

politiques et judiciaires. Caricaturalement, le système judiciaire chinois a quatre niveaux de juridiction qui suivent les

différents niveaux d’organisation du PCC : les tribunaux locaux, les Cours intermédiaires, les Cours suprêmes

provinciales et la Cour suprême populaire.

CABESTAN, Jean-Pierre, 2014, op. cit., p. 271-285.

WANG, Alex L. et GAO, Jie, 2010, op. cit., p. 38. 127 CABESTAN, Jean-Pierre, 2014, op. cit., p. 281-282. 128 LI, Zhang, 2014, « Les mécanismes de contrôle de l’administration en Chine. Une ‘société harmonieuse’ peut-elle

se construire au détriment de l’État de droit ? », Revue française d’administration, 150, p. 371-392. 129 CABESTAN, Jean-Pierre, 2014, op. cit., p. 321. 130 Ibid., p.451-483 pour l’historique de ce type de conflits et ses résolutions.

En ce qui concerne les développements de la campagne anticorruption lancée par Xi Jinping en 2012, notons que

58 accusations de corruption sur les 527 000 enregistrées en 2017 touchent des fonctionnaires de haut-rang.

Soulignons également la création d’une Commission nationale de supervision chargée de la lutte anticorruption en

2018 dont les pouvoirs (détention préventive de longue durée sans avocat et sans transparence sur les traitements des

accusés) sont maintenant inscrits dans la Loi.

GAO, Charlotte, 2018, « China’s Anti-Graft Campaign: 527 000 people punished in 2017 », The Diplomat.

PETER, Thomas, 2018, « Chine : une nouvelle agence anticorruption aux pouvoirs considérables », RFI.

TIEZZI, Shannon, 2018, « China’s Massive Government Overhaul: What you Need to Know », The Diplomat. 131 LI, Zhang, 2014, op. cit., p. 378.

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fusionnées aux cellules locales du PCC) proposent fréquemment d’ouvrir une médiation à la suite

d’un abandon des poursuites.

À cette fusion PCC-État-Justice s’ajoute une fusion du PCC à l’économie. Certes,

l’ensemble de l’économie n’est pas fusionné au PCC, mais ce dernier est maître des règles dans de

nombreux secteurs et tient à le rester pour plusieurs raisons. La première est stratégique et vise à

atteindre l’objectif politique du développement chinois autonome via le programme « Made in

China 2025 »132. La seconde est historique : le PCC impose toujours des cellules du Parti interne

aux grandes entreprises rentables ou sensibles du point de vue de la sécurité intérieure, et ne s’en

cache pas, comme le démontrent l’article 6 et l’article 12 de la Loi sur le renseignement national

(国家情报法, guojia qingbao fa)133. Cette fusion PCC-État-Justice interfère également dans les

rendus de justice.

Depuis Hu Jintao, le PCC a pris l’habitude de légitimer ses actions en s’appuyant sur le

corpus légal qu’il manipule au besoin « comme s’il devenait nécessaire d’invoquer ces textes

même pour justifier une répression légalement infondée »134. L’appel à la formation d’un État de

droit fait en 2012 par Xi Jinping,135 comme la décision annoncée lors 3e plénum du 18e Comité

central en novembre 2013 de réformer le système judiciaire en le rendant plus autonome et

transparent136, loin d’annoncer un réel changement, nous montre plutôt la volonté du PCC de

renforcer la légitimité de ses décisions137.

Pour mettre en relief la discordance entre le discours public et les faits empiriques,

soulignons que tout juge est maintenant supervisé par un membre du PCC ayant un rôle effectif au

niveau provincial ou au niveau national138. La reprise en main totale du système judiciaire par le

PCC se marque aussi par des vagues de répression contre les avocats spécialisés dans la défense

132 LO, Kinling, 2018, « Xi Jinping urges China to go all in on scientific self-reliance after ZTE case exposes hi-tech

gaps », South China Morning Post (28 mai). 133 ASPI (Australian Strategic Policy Institute), 2018, Huawei and Australia’s 5G Network, Rapport n.8. 134 SALMON, Nolween, 2017, op. cit., p. 94. 135 BALME, Stéphanie, 2014, « Chine : la règle de droit aux marges d’un empire bureaucratique et absolutiste (1978-

2014) », Revue française d’administration publique, 150, 2, p. 393-413. 136 WANG, Lifeng, 2016, « Enhancing Credibility and Transparency through Judicial Reforms », in S. Tsang et H.

Men (Eds.), China in the Xi Jinping Era, Basingstoke: Palgrave Macmillan, p. 41-70. 137 PILS, Éva, 2015, « The Rise of Rule by Fear », China Policy Institute: Analysis, Nottingham: University of

Nottingham. 138 SHIRK, Susan L., 2018, « The Return to Personalistic Rule », Journal of Democracy, 29, 2, p. 22-36.

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des droits de l’homme139. Autre nouveauté, depuis 2013, les jugements doivent normalement être

mis en ligne, mettant les juges dans une position délicate, placés entre les directives politiques

(qu’ils ne peuvent outrepasser) et le ressenti de la population.

Partant de ce constat, il semblerait que la société civile ait peu de chance d’obtenir des

avancées concrètes par les poursuites judiciaires. En effet, les expropriations sont souvent l’œuvre

de cadres locaux du PCC, lequel est fusionné avec la cour de justice locale. Du point de vue des

demandes écologiques, les causes sont le plus souvent soit le résultat de mauvaises politiques

locales, soit le non-respect des règles par les entreprises. Or, les entreprises financent une partie

des politiques locales, et les cellules locales du PCC en ont besoin. Par conséquent, les rendus de

justice sur les questions environnementales comme celles relevant des conditions de travail

aboutissent rarement en faveur des plaignants.

6.1.2 Utilisation concrète du système judiciaire par la société civile et adaptations en cours

Pourtant, des acteurs de la société civile utilisent la volonté du PCC de se légitimer pour

tenter de peser sur les décisions. C’est le cas de neuf ONG environnementalistes, qui ont déposé

en 2015 trente-sept plaintes contre plusieurs usines, en s’appuyant sur la Loi de la protection de

l’environnement de 2014140. Notons également la plainte de l’association Les amis de la nature

contre le Bureau de protection de la nature de Nujiang (Yunnan)141.

Les exemples individuels existent aussi comme le démontrent l’avocat Dong Zhengwei, et

sa demande de publication de la pollution des sols à l’échelle nationale. Bien que sa demande ait

été rejetée, certains journaux proches du pouvoir (le Quotidien du peuple et le Global Times) ont

soutenu sa requête. Un autre exemple est le dépôt d’une plainte d’un habitant de la ville de

Shijiazhuang contre sa municipalité, accusée de ne rien faire pour résoudre la pollution chronique

de l’air. Le plaignant demandait le remboursement des purificateurs d’air et des masques qu’il

devait acheter pour faire face à la pollution142.

139 ECONOMY, Elisabeth C., 2018, op. cit., p. 46-47. 140 Une nouvelle Loi de la protection de l’environnement, entrée en application le 1er janvier 2018, prévoit que les

industries et les établissements publics dépassant les limites de polluants ou de bruit fixées par les autorités s’acquittent

d’une taxe environnementale. 141 LIT, Yew Wei, 2018, « Disembedding lawful activism in contemporary China: The confrontational politics of a

green NGO’s legal mobilization », China Information, 32, 2, p. 224-243. 142 THIREAU, Isabelle, 2014, op. cit., p. 113-114.

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Ces demandes au système judiciaire ne donnent pour le moment que peu de résultats. Rocca

note à ce sujet que le résultat d’une plainte en Chine dépend de deux facteurs : la situation sociale

du plaignant et les enjeux politiques soulevés143. Le recours à la justice sert par contre dans de

nombreux cas de levier pour forcer les gouvernements locaux à réagir, ou encore à alerter les

échelons supérieurs des problèmes locaux144, mais le risque pour les avocats des plaignants est de

plus en plus grand depuis la prise de contrôle de Xi Jinping, comme le montre la convocation de

centaines d’entre eux par la police le 9 juillet 2015, suivi de la condamnation à de lourdes peines

pour certains d’entre eux145.

Dans ce contexte, et étant donné la récurrence de jugements très souvent biaisés, de

nombreux acteurs de la société civile utilisent aussi le mécanisme des lettres de visite (信访, xinfang)

pour passer outre ce despotisme judiciaire. Ce dispositif a été créé en 1951146, mais reprend un

mécanisme ancré dans l’histoire profonde du pays147. Servant dans un premier temps d’outil de

management pour le PCC148, il connait un essor rapide depuis 1994, moment où le PCC commence

à légitimer les pétitions qu’il n’a pas commanditées149. Il permet à tout Chinois de déposer des

griefs multiples aux Bureaux des lettres de visites. Ce mécanisme constitue donc un système

judiciaire parallèle. Parmi les requêtes les plus fréquentes, on note l’expropriation des terres

agricoles, les démolitions urbaines et les déplacements de populations en résultant, le

fonctionnement des instances judiciaire, le droit du travail, les questions de sécurité et les

problèmes environnementaux. Ce système de lettre s’accompagne, lorsque les plaignants

n’obtiennent pas de réponses, de « visites » (manifestations devant les administrations incriminées).

Ces visites collectives sont de plus en plus fréquentes, et celles destinées aux plus hautes instances

du pays augmentent plus vite que celles destinées aux échelons locaux administratifs150. S’adaptant

à cette nouvelle réalité, le port de banderoles et les inscriptions sur des vêtements sont interdits

143 MINONZIO, Jérôme, 2014, op. cit., p. 94. 144 BALME, Richard, 2013, op. cit., p. 71. 145 BÉJA, Jean-Philippe, 2019, « Les droits de l’homme, un enjeu politique de taille dans la Chine contemporaine »,

Communications, 104, 1, p.58. 146 THIREAU, Isabelle, 2014, op. cit., p. 114. 147 LI, Zhang, 2014, op. cit., p. 374. 148 CAI, Yongshun, 2004, « Managed Participation in China », Political Science Quarterly, 119, 3, p. 425-451. 149 CHEN, Xi, 2012, Social Protest and Contentious Authoritarianism in China, New York: Cambridge University

Press, p. 88-89. 150 THIREAU, Isabelle, 2014, op. cit., p. 114.

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depuis 2005. On note aussi le déménagement de plus en plus fréquent de bureaux administratifs,

pour éviter des « visites » inopportunes.

D’un autre côté, les bureaux locaux préfèrent régler les griefs eux-mêmes et ne voient pas

d’un bon œil les « visites » à Pékin, dans la mesure où celles-ci sont maintenant prises en compte

de manière négative dans l’évaluation des fonctionnaires locaux151. Dans les notations de citoyens

en phase de tests du système du crédit social, celle mise en place par la ville de Rongcheng est

assez proactive en la matière : « la peine la plus redoutable s’abat sur ceux qui partent pétitionner

auprès de l’échelon supérieur sans passer par le chef du village : 1 000 yuans d’amende et un

basculement automatique dans la catégorie B »152.

La justice chinoise est donc le théâtre d’un combat complexe. Tenus au niveau local par

les cadres du PCC, les Chinois tentent d’élargir leur espace d’expression via les lettres de visite,

mais les cadres locaux tentent de leur côté de bâillonner la frange de la société civile utilisant le

système judiciaire pour contester leurs décisions. Dans cette bataille, on peut se demander si les

ONG, en portant plainte à la place des individus, aident ou non au renforcement de la société civile.

7. LES ONG EN CHINE

J’ai souligné précédemment le rôle des ONG 153, qui sont nombreuses dans le pays. Elles sont

de différents types, à savoir les ONG officielles (GONGO), les ONG officieuses (non enregistrées),

les entreprises à vocation sociale et les ONG étrangères.

151 LI, Zhang, 2014, op. cit., p. 375 et THIREAU, Isabelle, 2014, op. cit., p. 116. 152 RAPHAEL, René et XI, Ling, 2019, op. cit., p .4-5. 153 Le terme d’organisation populaire (民间组织 , minjian zuzhi, ou 社会组织 shehui zuzhi) est préféré à celui

d’organisation « non gouvernementale » (发政府组织, feizhengfu zuzhi) par le PCC. Depuis 2011, le terme le plus

employé par les acteurs de ces mouvements est gongyi (公益, traduction littérale : intérêt public), et est souvent accolé

à la philanthropie (慈善, cishan).

CABESTAN, Jean-Pierre, 2014, op. cit., p. 502-504.

WU, Fengshi, 2017, « An Emerging Group Name ‘Gongyi’: Ideational Collectivity in China’s Civil Society », The

China Review, 17, 2, p. 123-150

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7.1 LES ONG OFFICIELLES

Les ONG officielles, dites GONGO (Gouvernement Organized NGO, 政府民间组织 ,

zhengfu minjian zuzhi) sont approuvées par le gouvernement et enregistrées154. Elles s’occupent

essentiellement de causes touchant les affaires sociales, l’éducation et la protection de

l’environnement. L’enregistrement des GONGO dépend des réalités sociologiques locales (des

ONG similaires pourront être acceptées ou non par le PCC local suivant les intérêts propres de

celui-ci)155. Enfin, ce n’est pas parce qu’une GONGO est enregistrée administrativement que ses

relations avec les institutions étatiques sont au beau fixe156. Notons en outre que les GONGO

dépendent largement du financement alloué par le Parti-État157, grâce aux contrats qu’il leur

délègue. Cela explique que les GONGO ayant des moyens suffisants pour remplir leur mission

sont toutes fortement connectées aux intérêts du PCC158. D’ailleurs, un guide de pensées politiques

doit depuis 2016 être suivi par toute ONG. Ce guide se résume à la primauté du PCC dans tous les

domaines sur lesquels travaillent les ONG, et sur le fait que sa supervision ne doit pas être remise

en cause 159 . En somme, « Les GONGO rendent opérationnelle une forme de ‘charité

gouvernementale’ qui s’étend au-delà de la collecte de fonds pour des services

gouvernementaux »160.

De plus, et alors que la grande majorité des GONGO entretiennent de bonnes relations avec

les membres locaux du PCC161, le PCC créait encore ses propres ONG lorsqu’il en a besoin162. À

154 Pour l’ensemble des législations encadrant les ONG enregistrées, voir YANG, Yongjiao ; WILKINSON, Mick et

ZHANG, Xiongxiong, 2016, « Beyond the abolition of dual administration », Voluntas, 27, 5, p. 2292-2310. 155 Pour le cas des associations de migrants dans les grandes villes, voir par exemple HSU, Jennifer Y.J., 2012,

« Layers of the Urban Space: Migrant Organizations and the Chinese State », Urban Studies, 49, 16, p. 3513-3530. 156 Pour ce qui concerne les associations promouvant la lutte contre le sida ou la défense des homosexuels, et

l’évolution des rapports qu’elles entretiennent avec le PCC, voir par exemple BAO, Hongwei, 2018, Queer Comrades.

Gay Identity and Tongzhi Activism in Postsocialist China, Copenhague, NIAS Press. 157 LU, Yiyi, 2009, Non-Governmental Organizations in China. The Rise of Dependent Autonomy, Londres et New

York: Routledge. 158 ZHAO, Rong; WU, Zhongsheng et TAO, Chuanjin, 2016, « Understanding Service Contracting and Its Impact on

NGO Development in China », Voluntas, 27, 5, p. 2229-2251. 159 ECONOMY, Élisabeth C., 2018, op. cit., p. 179. 160 MICOLLIER, Evelyne, 2003, « Phénomènes de stigmatisation dans un monde chinois confronté au VIH-Sida :

vers une collaboration entre réponses officielles et société civile », Étude spéciale de l’UNESCO, 20, p. 39-54. 161 HSU, Jennifer Y.J. et HASMATH, Reza, 2017, « A maturing civil society in China? The role of knowledge and professionalization in the development of NGOs », China Information, 31, 1, p. 22-42. SHEN, Yongdong et YU, Jianxing, 2017, « Local government and NGOs in China : Performance-Based Collaboration », China : An International Journal, 15, 2, p. 177-191. 162 THORNTON, Patricia M., 2013, « The Advance of the Party: Transformation or Takeover of Urban Grassroots Society », The China Quarterly, 213, p. 1-18.

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contrario, l’enregistrement des ONG à coloration religieuse ou voulant défendre les travailleurs

est beaucoup plus compliqué, voire banni dans certaines régions, depuis 2012.

7.2 LES ONG OFFICIEUSES

Il existe également de très nombreuses ONG officieuses (发政府组织, feizhengfu zuzhi), car

non enregistrées au Ministère des Affaires civiles. La plupart d’entre elles utilisent des couvertures

commerciales pour dissimuler leurs véritables activités 163 , ce qui a l’avantage de pouvoir

engranger une trésorerie, et donc d’avoir les ressources nécessaires à ce fonctionnement. En effet,

si la répression des ONG émanant du Falun gong à partir de 1999 rendit d’abord la viabilité des

autres ONG officieuses difficiles, le mouvement de bénévolat spontané qui suivit le tremblement

de terre de Wenchuan (Sichuan, 2008) a amené le PCC à les tolérer, dans la mesure où elles ne

s’occupaient pas de politique164.

Les ONG officielles et officieuses communiquent ensemble et sont en lien avec d’autres

instances de leur secteur (agences gouvernementales, institutions académiques). Les échanges sont

d’ailleurs parfois houleux, comme lors de la première Conférence nationale organisée en 2011

avec l’ensemble de ces acteurs, où Wang Zhenyao (fonctionnaire du Ministère des Affaires civiles)

critiqua vivement les procédés démocratiques mis en place par certaines ONG à l’interne165.

7.3 L’ENTREPRENARIAT SOCIAL.

L’entreprenariat social déclaré est un phénomène relativement récent dans le pays, mais connait

un essor rapide. Il s’agit d’entreprises travaillant dans des secteurs habituellement couverts par des

ONG, qui se retrouvent à cheval sur le secteur lucratif et le secteur non lucratif. La ville de Pékin

les encadre depuis 2011 et cette régulation se déploie actuellement à l’ensemble du territoire166.

Plus de la moitié des entreprises à vocation sociale étudiée par Yu servaient de relais direct aux

politiques étatiques, et l’ensemble de ces entreprises est de toute façon fortement contrôlé et

163 ZHANG, Ning, 2015, « Web-based Backpacking Communities and Online Activism in China: Movement without

Marching », in G. Yang (Ed.), China’s Contested Internet, Copenhague: Nias Press, p. 108-136. 164 CABESTAN, Jean-Pierre, 2014, op. cit., p. 504-507. 165 WU, Fengshi, 2017, op. cit., p. 124. 166

RICHARDIER, Verena, 2016, « Un regard sur les ONG en Chine », Alternatives Humanitaires, p. 132-145.

YU, Xiaomin et JACQUET, Raphaël, 2016, « L'entrepreneuriat social dans le secteur non lucratif en Chine : Le cas

de la participation innovante de la société civile dans l'effort de reconstruction qui suivit le tremblement de terre de

Wenchuan », Perspectives Chinoises, 3, p. 55-64.

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influencé par les institutions étatiques. De plus, comme la viabilité économique n’est pas assurée,

ces entreprises sociales s’enregistrent différemment les unes des autres suivant les possibilités que

leurs modèle économique permet (parfois comme coopératives, fondations communautaires,

entreprises à vocation sociale, etc.), car le type d’enregistrement donnent le droit des exonérations

de taxes de degrés différents. Il faut également noter qu’avec la multiplication de ce type

d’entreprises, la compétition économique s’accroit167. Les entrepreneurs sociaux doivent donc

prendre en compte la localisation et la communication de leurs produits, condition nécessaire pour

faire des profits, et pouvoir réinvestir dans des causes sociales168.

L’entreprenariat social semble donc des plus rentable pour le PCC. De plus en plus contrôlé sur

les objectifs poursuivis, ce secteur s’autofinance. L’entreprenariat social permet à des individus de

la société civile, lorsque les règlements le permettent, de poursuivre des buts spécifiques.

Autonome du point de vue économique, mais sous tutelle quant aux objectifs poursuivis, ce type

d’entreprenariat montre à la fois la constitution de la société civile autour de causes, et sa

cooptation/utilisation par le pouvoir.

7.4 LES ONG ÉTRANGÈRES

Les ONG étrangères (国际民间组织, guoji minjian zuzhi) sont pour leur part admises au

compte-goutte et sont extrêmement surveillées, se faisant discrètes et accommodantes

politiquement169, comme WWF et la fondation Ford. De plus, elles font les frais de la Campagne

contre les idées occidentales mises en place sous Xi Jinping. Depuis janvier 2017, elles ne doivent

plus s’enregistrer au Ministère des Affaires civiles, mais au Ministère de la Sécurité publique et

sont maintenant automatiquement affiliées à une entité du gouvernement chinois qui supervise

leurs faits et gestes. Enfin, il leur est interdit de lever des fonds à l’extérieur du pays170. Economy

témoigne que des ONG étrangères qu’elle connait personnellement ont obtenu assez facilement

leur enregistrement. Elle souligne par contre qu’elles étaient préalablement bien installées (ayant

167 YU, Xiaomin, 2013, « The Governance of social enterprises in China », Social Enterprise Journal, 9, 3, p. 225-

246. 168 JIANG, Yaling, 2018, « Chinese Social Entreprises Try to Make Money, but Not for Profit », Sixth Tone (consulté

le 20 juin 2019: https://www.sixthtone.com/news/1002737/chinese-social-enterprises-try-to-make-money%2C-but-

not-for-profit). 169 LU, Yiyi, 2009, op. cit. 170 ECONOMY, Élisabeth C., 2018, op. cit., p. 41 et LEI, Ya-Wen, 2018, op. cit., p. 193-194.

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du guanxi) et qu’elles ne travaillaient pas sur des sujets actuellement sensibles 171 . D’autres

chercheurs pensent pour leur part que cette nouvelle législation va permettre aux ONG chinoises

de reprendre à leur compte certaines missions dévolues jusque-là aux ONG étrangères, faisant

accroitre leur capacité d’influence directe sur les décisions politiques172. On peut douter de cette

interprétation lorsque l’on analyse les évolutions récentes de la capacité d’influence des

journalistes.

8. LA PRESSE COMME RELAIS DE LA SOCIETE CIVILE ?

Si on laisse de côté la période comprise entre décembre 1978 et avril 1979, où des dizaines

de journaux indépendants paraissent à Pékin, Canton et Hangzhou173, on peut dire que tous les

médias chinois se résumaient jusqu’en 1992 à un canal de propagande du PCC174, en servant

officiellement d’outil de « supervision de l’opinion publique » dès 1980175. Mais dans la mesure

où depuis 1992, l’État ne finance plus cet outil, les médias sont encouragés à s’autofinancer via

leur lectorat. Les médias doivent donc certes respecter les limites et cadres imposées par le PCC,

mais aussi produire des contenus leur permettant d’être viables économiquement, ce qui les pousse

à jouer avec les règlements176.

Alors que certains journalistes publiaient jusqu’à peu des enquêtes sensibles de manière

anonyme sur Internet, les nouveaux règlements de gestion de l’information leur interdisent

maintenant de publier en dehors des médias détenus par leurs employeurs177. Dans ce domaine

comme dans les autres, Xi Jinping semble donc là aussi vouloir réduire l’espace public ouvert par

les journaux.

171 Ibid., p.41-42. 172 HSU, Carolyn et TEETS, Jessica C., 2016, « Is China’s new Overseas NGO Management Law sounding the death

knell for civil society?: Maybe not », The Asia Pacific Journal 14, 4, p. 1–14. 173 ROUX, Alain, 2006, La Chine au XXe siècle, Paris : Armand Colin, p. 122. 174 LEI, Ya-Wen, 2018, op. cit., p. 7. 175 CHEN, Dan, 2017, « ‘Supervision by Public Opinion’ or by Government Officials? Media Criticism and Central-

Local Government Relations in China », Modern China, 43, 6, p. 620-645. 176 LEI, Ya-Wen, 2018, op. cit., p. 7-8. 177 Ibid., p.188.

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Par exemple, en 2012, un éditorial du journal Hebdomadaire du Sud (南方周末, nanfang

zhoumo) à Canton, considéré comme le journal au ton de parole le plus libre de Chine, a été

« corrigé » par le département de la propagande. Il était intitulé « Le rêve chinois, le rêve d’une

constitution » (中国梦,宪政梦 , zhongguo meng, xianzheng meng) et appelait à des réformes

constitutionnelles alors rejetées par le Xi Jinping fraichement élu178. La réaction fut immédiate,

avec plusieurs interventions d’intellectuels, d’avocats, mais aussi d’autres médias soutenant la

parution de l’éditorial original, qui circulait en de multiples copies via les réseaux sociaux et autres

blogs179. Une pétition d’étudiants de l’Université Sun Yatsen demandant le respect des libertés est

organisée180, ainsi qu’une manifestation d’une centaine de personnes devant le Siège social du

journal. Le PCC réagit en renvoyant les journalistes présents dans la manifestation et en bloquant

leurs blogs respectifs.

Un autre exemple est celui du mensuel de Pékin Depuis l’empereur jaune (炎黄春秋,

yanhuang chunqiu) qui lui aussi se positionne et demande au Parti de respecter les principes de

liberté de parole et d’indépendance judiciaire inscrite dans la constitution. Alors que le journal de

Canton colporte une image sulfureuse, le mensuel de Pékin compte sur de nombreux amis bien

placés, et a à maintes reprises servit de tribune à de hauts membres du PCC comme à des

intellectuels respectés. Pourtant, une mise en garde est envoyée au journal et sa licence lui

permettant d’avoir un site Internet lui est retirée 181 . Il semble donc bien que le rôle de

sensibilisation de la population sur certaines thématiques force la presse à négocier son contenu

avec le PCC 182 , comme le montre aussi l’autorisation de distribution suivie du retrait du

documentaire Sous le dôme (穹顶之下, qiongding zhi xia) traitant de la pollution atmosphérique183.

Depuis le 19e congrès du PCC (2017), on demande aux médias de se conformer au livre La

nouvelle pensée de Xi Jinping (习近平新闻思想讲义, Xi Jinping xiwen sixiang jiangyi) édité par le

département de la propagande. Ce livre contient le « nouveau positionnement » (新定位 , xin

178 ECONOMY, Élisabeth C., 2018, op. cit., p. 20. 179 LEI, Ya-Wen, 2018, op. cit., p. 1-2. 180 JOHNSON, Ian, 2013, « Test for New Leaders as Chinese Papers Takes on Censors », The New York Times (6

janvier). 181 ECONOMY, Élisabeth C., 2018, op. cit., p. 21. 182 GEALL, Sam, 2013, « China’s environmental journalists: a rainbow confusion », in S. Geall (Ed.), China and the

Environment. The Green Revolution, Londres et New York : Zed Books, p. 15-39. 183 YANG, Fan, 2016, « Under the Dome: ‘Chinese’ smog as a viral media event », Critical Studies in Media

Communication, 33, 3, p. 232-244.

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dingwei) sur la nature et le statut du PCC, qui prend maintenant (officiellement) en compte des

attentes des Chinois pour conduire le pays dans une ère de paix et de prospérité. Ce « nouveau

positionnement » demande à tous les acteurs de la société (dont les médias) de soutenir

inconditionnellement le PCC184. Le livre contient également de nouvelles formulations et objectifs

politiques attribués à Xi Jinping, visant à remettre le PCC au centre de tout, par le service global

(服务大局 , fuwu daju) qu’il rend à la population. Enfin, ce livre s’adresse directement aux

journalistes dans des termes on ne peut plus clairs : « If we are to take on this responsibility and

mission, we must place political orientation (政治方向) in the first position, firmly adhering to the

principle of Party spirit (党性原则), firmly adhering to the Marxist View of Journalism (马克思主义

新闻观), firmly adhering to correct guidance of public opinion (正确舆论导向), firmly adhering to

an emphasis on positive propaganda (正面宣传为主) »185. Des directives sont aussi envoyées aux

journaux pour les mises en page de leur site, comme le montre cet exemple datant de février 2019 :

« Placez l'article sur la conférence ouverte par le secrétaire général Xi Jinping tout en haut de la

page d'accueil du site et des applications. Puis insérez l'article sur l'entrevue entre M. Xi et les

dignitaires étrangers. […] Veillez à n'utiliser que les informations des autorités compétentes

(gouvernement ou [agence officielle] Xinhua) pour l'attentat du Jiangxi [attaque au couteau devant

une école ayant fait 11 blessés en février 2019]. Les vidéos et photos montrant du sang sont

interdites. N'envoyez pas de journalistes sur le terrain »186. Si la présidence de Hu Jintao (2003 à

2012) a été surnommée la « décennie d’or » des médias chinois, cette période est donc révolue

depuis l’arrivée de Xi Jinping à ce poste. Bien que certains journalistes soient devenus

indépendants et essaient de contourner la censure par différents moyens techniques, celle-ci est de

plus en plus performante, et tend à museler complètement leur travail187.

Si l’espace public octroyé par le système judiciaire est actuellement en négociation, il semble que

dans le domaine de l’utilisation des médias, le PCC a pour le moment totalement réduit ce canal

comme place d’un espace public. Se peut-il que les réseaux sociaux remplacent ce rôle ?

184 De RAMBURES, Dominique, 2018, « Chine : naissance d’une dictature postmoderne », Le Débat, 4, p. 62-72. 185 Traduit par BANDURSKI, David, 2018, « Mapping Xi Jinping New Thought », China Media Project. 186 ENYO, Mitsusada, 2019, « Chine. Trente ans après Tian’anmen, la censure revient en force », Courrier

International, 1491, p. 26-28. 187 Ibid.

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9. LES MEDIAS SOCIAUX

9.1 L’UTILISATION DES MÉDIAS SOCIAUX PAR LA SOCIÉTÉ CIVILE

Les Chinois sont très connectés — 720 millions de personnes en 2016188 — malgré des

disparités énormes entre les urbains et les ruraux189. La connexion de la Chine au réseau Internet

mondial date d’avril 1994190. Elle est suivie par des régulations émanant du PCC entre 1994 et

1996, qui viennent encadrer son expansion, son exploitation et son utilisation191. La première

condamnation pour « violation politique » tombe dès 1998 à l’encontre de Lin Hai, qui a envoyé

massivement l’adresse d’un magazine prodémocratie basé aux États-Unis. En 1999, Facebook est

bloqué à la suite de son utilisation par des manifestants au Xinjiang192. Enfin, l’utilisation du réseau

par le mouvement Falun gong convainc les dirigeants du pays de contrôler fortement ces médias

sociaux193.

Le PCC mène donc une « strategic censorship »194. Pour ce faire, il a développé une

infrastructure Internet utilisant de nombreux serveurs de petite taille, ce qui facilite les blocages

de mots-clés195. À cette censure technique s’ajoute celle exercée par le Ministère de l’Industrie et

de l’Information technologique sur l’ensemble des médias produisant du contenu en ligne196, et la

188 LEI, Ya-Wen, 2018, op. cit., p. 131. 189 WANG, Qingbin et LI, Minghao, 2012, « Home computer ownership and Internet use in China: Trends, disparities,

socioeconomic impacts, and policy implications », First Monday, 17, 2. 190 Le réseau intérieur date de 1987, mais son utilisation est alors limitée aux cercles académiques.

ECONOMY, Élisabeth C., 2018, op. cit., p. 62. 191 ARSÈNE, Sévérine, 2012, « Protester sur le Web chinois (1994-2011) », Le Temps de Médias, 18, p. 99-110. 192 ECONOMY, Élisabeth C., 2018, op. cit., p. 56 ; 63. 193 CREEMERS, Rogier, 2017, « Cyber-Leninism: History, Political Culture and the Internet in China », in M. Price

et N. Stremlau (Eds.), Speech and Society in Turbulence Times: Freedom of Expression in Comparative Perspective,

Cambridge: Cambridge University Press, p. 255-273. 194 LORENTZEN, Peter, 2014, « China’s strategic censorship », American Journal of Political Science, 58, 2, p. 402-

414. 195 Le site https://en.greatfire.org/analyzer permet de suivre les mots et expressions bloqués en temps réel. 196 Les premiers « blogueurs du PCC » plus connus comme le Parti des 50 centimes (五毛党, wumao dang) apparaissent

en 2004, et sont dans un premier temps recrutés par le ministère de l’Éducation. On estime leur nombre à deux millions,

leur rôle étant d’effacer du contenu « mal avisé ». À cela s’ajoutent 280 000 « Hackers rouges » chargés d’orienter les

débats pour légitimer le PCC sur les forums, et qui publieraient près de 488 millions de commentaires par an. De son

côté, le Ministère de l’Industrie et de l’Information technologique (中华人民共和国业工和信息化部) est une police

généraliste du réseau Internet. Cette première barrière est complétée par le travail de l’Administration d’État pour la

presse, les publications, la radio, le cinéma et la télévision (中华人民共和国国家新闻出版广电总局), ces deux instances

étant elles-mêmes supervisées par le Département central de la propagande, le Bureau de l’information du Conseil

d’État et le Ministère de la Sécurité publique.

DOUAY, Nicolas, SEVERO, Martha et GIRAUD, Timothée, 2012, « La carte du sang de l’immobilier chinois, un cas

de cyber-activisme », L’Information géographique, 76, 1, p. 74-88.

ECONOMY, Élisabeth C., 2018, op. cit., p. 64 ; 82.

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législation encourage fortement les fournisseurs à surveiller leurs clients, en les rendant

partiellement responsables des contenus mis en ligne par des clients. Outre ces trois processus

permanents, le PCC mène aussi des campagnes coup de poings, comme lors des Congrès du Parti

de 2012 et 2017197, la déconnexion de région entière198, ou encore la fermeture massive de sites

considérés comme pornographiques et de cybercafés clandestins. À cette panoplie de moyens

s’ajoute l’autocensure des utilisateurs. Pour encourager cette autocensure, tout internaute doit

normalement s’inscrire auprès du bureau de police locale depuis 1996. Ce règlement n’a jamais

été appliqué, mais depuis 2009, les autorités ont imposé l’identification des internautes auprès des

fournisseurs de service, mais aussi des hôtels et des cafés Internet199, mesure renforcée par la Loi

antiterrorisme de 2015200. À noter, le PCC a renoncé à sa tentative de rendre obligatoire un logiciel

de filtrage intégré aux ordinateurs en 2009, montrant que la « censure a désormais une acceptabilité

limitée »201.

Malgré cet arsenal impressionnant mis en place par le PCC, la majorité de la jeunesse du

pays dit exprimer ses opinions personnelles sur Internet 202 . D’ailleurs, la médiatisation

d’informations sur le réseau (allant du déraillement d’un train à la tentative de viol d’une employée

d’un hôtel par un membre du PCC) oblige les autorités à être un peu plus transparentes sur les

conclusions des enquêtes menées203.

Mais, là aussi, le resserrement du contrôle sous Xi Jinping rend les prises de parole en ligne

de moins en moins libres204. Face à cette situation, certaines personnes contournent la censure par

NOUBEL, Filipp et WU, Vivian, 2014, « Le chaos créatif des réseaux sociaux : opportunité ou menace pour la

dynamique de l’état chinois », Revue française d’administration publique, 150, 2, p. 481-494. 197 FRENKIEL, Émilie et WANG, Simeng, 2017, op. cit., p. 14. 198 Par exemple en 2009, alors que des violences interethniques éclatent au Xinjiang, les autorités coupent Internet

dans la région, et bloquent l’envoi de tous SMS et fax. Cette mesure est depuis 2015 insérée dans la Loi.

ECONOMY, Élisabeth C., 2018, op. cit., p. 74.

NOUBEL, Filipp et WU, Vivian, 2014, op. cit., p. 491 199 Les arrestations pour « incitation à la subversion du pouvoir de l’état » sont nombreuses. Citons ici le cas de Huang

Qi en 2000 qui avait mis en ligne le site 6-4tianwang.com (à propos du 4 juin 1989), ou celui de Liu Xiaobo en 2009

pour la parution de la Charte 08.

ARSÈNE, Sévérine, 2012, op. cit., p. 102-103. 200 LEI, Ya-Wen, 2018, op. cit., p. 179. 201 ARSÈNE, Sévérine, 2012, op. cit., p. 108. 202 WALLIS, Cara, 2011, « New media practices in China: youth patterns, processes and politics », International

Journal of Communication, 5, p. 406-436. 203 ECONOMY, Elisabeth C., 2018, op. cit., p. 65-67. 204 FRENKIEL, Émilie et WANG, Simeng, 2017, op. cit., p. 11.

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leur maîtrise de l’informatique et l’utilisation de proxy ou de VPN205 , mais la majorité des

internautes utilisent la parodie (恶搞, e’gao) et les homophonies nombreuses de la langue chinoise.

Par exemple, les internautes chinois utilisent l’expression « crabe de rivière » (河蟹, hexie) pour

parler de la censure nommée humoristiquement « harmonisation » en référence au slogan de la

société harmonieuse (和谐, hexie)206, ou encore le « riz-lapin » (米兔, mitu) pour parler et participer

au mouvement #MeToo207. En 2009 apparait un clip avec un animal nommé Caonima (草泥马,

littéralement « lama de plante boueux »), homonyme de « nique ta mère » 208 , et visant

indirectement le système de censure en place. Ces formes satiriques ont été comparées par certains

spécialistes à un carnaval209.

À cette culture particulière se déployant sur Internet s’agglomèrent des associations

virtuelles qui rassemblent des personnes partageant les mêmes préoccupations, et qui relaient des

mobilisations collectives se déroulant en dehors d’Internet. Par exemple, la mort en 2003 du

migrant Sun Zhigang lors de sa garde à vue prouve que les médias sociaux (les deux plateformes

principales utilisées en Chine sont weixin / WeChat et weibo) peuvent être le support de

protestation efficace à l’échelle nationale, et ce, sur des sujets très sérieux210. La médiatisation de

cette mort sur Internet sera reprise par les médias traditionnels, et forcera les autorités à mettre fin

au système d’internement administratif pour les résidents d’autres provinces ne pouvant prouver

leurs identités lors d’un contrôle211.

205 Pour les premières stratégies utilisées historiquement par les internautes chinois, voir CHASE, Michael et

MULVENON, James, 2002, You’ve Got Dissent ! Chinese Dissident Use of the Internet and Beijing’s Counter-

Strategies, Santa Monica: RAND. 206 FRENKIEL, Émilie et WANG, Simeng, 2017, op. cit., p. 15. 207 ZENG, Meg Jing, 2018, « From #MeToo to #RiceBunny: how social media users are campaigning in China », The

Conversation. 208 ARSÈNE, Sévérine, 2012, op. cit., p. 108. 209 HEROLD, David Kurt et MAROLT, Peter (Eds.), 2011, Online Society in China : Creating, Celebrating, and

Instrumentalising the Online Carnival, New York: Routledge.

Pour les autres homonymes utilisés pour contourner la censure, voir :

SU, Alice, 2018, « Dirt-poor and ugly — the proud new mantra of those left behind in the new China », Los Angeles

Times (26 décembre).

SZABLEWICZ, Marcella, 2015, « The ‘Losers’ of China’s Internet: Memes as ‘Structures of Feeling’ for

Disillusioned Young Netizens », in G. Yang (Ed.), China’s Contested Internet, Copenhague: Nias Press, p. 168-191.

HUANG, He, 2012, « 浅析 ‘屌丝文化’ 的性别管 » [Qian xi « diaosi wenhua » de xingbie guan/Prise en compte des

rapports de genre au sein de la « culture diansi »], cité par SZABLEWICZ, Marcella, 2015, op. cit., p.180. 210 ARSÈNE, Sévérine, 2012, op. cit., p. 105. 211 NOUBEL, Filipp et WU, Vivian, 2014, op. cit., p. 492.

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Conscient des possibilités qu’offrent ces plateformes, le PCC a toujours été très vigilant

sur son utilisation, mais de nombreux experts constatent un rehaussement des contrôles depuis

l’arrivée de Xi Jinping212, avec par exemple l’arrêt radical du « Nouveau mouvement citoyen » ou

celui du « Mouvement des rues du Sud »213. Alors que de plus en plus de sites étrangers sont

bloqués214 , la législation intérieure se durcit concernant l’utilisation de VPN, et les moyens

techniques pour les bloquer s’intensifient depuis 2015215.

De plus, l’Administration chinoise du Cyberespace (ACC) « a précisé que pour publier sur

les sites Internet, applications, forums de discussion, blogs, microblogs, médias sociaux,

messageries instantanées et plateformes de vidéo en direct des contenus concernant le

gouvernement, l’économie, l’armée, la diplomatie ou les problèmes sociaux, il faudra obtenir un

permis. Ces fournisseurs d’information en ligne doivent, selon l’ACC, ‘guider correctement

l’opinion publique’ et ‘servir la cause du socialisme’ tout en ‘préservant l’intérêt de la nation et

du peuple’. Il est également spécifié que les supports d’information ne recevant pas d’argent public

ne peuvent effectuer de reportages originaux. De plus les employés de ces fournisseurs

d’information devront recevoir une formation et une évaluation sanctionnée par l’État. Un

partenariat avec une entité étrangère devra au préalable recevoir une ‘évaluation sécuritaire’. Ceux

qui ne respecteraient pas cette nouvelle réglementation s’exposent à des amendes financières et

des révocations de leur licence »216.

Faut-il voir dans le règne de Xi Jinping l’arrêt de l’activisme en ligne ? Yang définit

l’activisme en ligne comme « any form of Internet-based collective action that promotes, contests,

212 ARSÈNE, Sévérine, 2012, op. cit., p. 109. CREEMERS, Rogier, 2015, « Le pivot de la cybergouvernance chinoise », Perspectives chinoises, 4, p.5-14.

NOUBEL, Filipp et WU, Vivian, 2014, op. cit., p. 493.

SVENSSON, Marina, 2015, « Voice, Power and Connectivity in China’s Microblogsphere: Digital Divides on

SinaWeibo », in G. Yang (Ed.), China’s Contested Internet, Copenhague: Nias Press, p. 227-256. 213 Le « nouveau mouvement citoyen » a été lancé par l’avocat Xu Zhiyong en 2010. Il visait à promouvoir des droits

usuellement associés aux sociétés occidentales telle la liberté d’expression. Le « mouvement des rues du Sud »

commence en 2011 par des pétitions en ligne demandant l’arrêt des destructions de maisons dans les villes de Canton

et de Shenzhen.

CHEN, Sally Xiaojin, 2015, « Collective Action in Digital China : A Case Study of the 2013 Southern Weekly

Incident », in G. Yang (Ed.), China’s Contested Internet, Copenhague : Nias Press, p. 283-304. 214 RFI et FORGET, Angélique, 2017, « Chine : la censure d’Internet toujours plus importante », Radio France

Internationale. 215 LEI, Ya-Wen, 2018, op. cit., p. 179. 216 RFI, 2017, « La presse en ligne sous contrôle de plus en plus étroit en Chine », Radio France Internationale

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or resist change »217. Partant de cette définition, les mobilisations sont de nature sociale et politique

et on peut penser que l’activisme en ligne n’a pas disparu dans le pays, mais que les formes

d’activisme se sont transformées. D’ailleurs, avec le durcissement de la réglementation depuis

2012 (dont le principal objectif est de réduire la probabilité d’action collective)218, et dans la

mesure où le PCC multiplie les exemples comme lors de l’appel à une révolution de Jasmin219, les

militants utilisant Internet se font discrets : « les utilisateurs se sont repliés vers des réseaux sociaux

moins ouverts comme WeChat (weixin), où les discussions sont restreintes à de petits groupes »220.

Or, comme en Occident, les réseaux sociaux chinois compartimentent souvent les utilisateurs dans

des catégories. D’ailleurs, de nombreux internautes chinois se présentent comme des loosers (屌

丝 , diaosi), phénomène que des chercheurs chinois interprètent comme un soulignement des

inégalités sociales et des impossibilités à changer de classe sociale dans le pays. Si cette sous-

culture est revendicative et demande de manière subtile une société plus égalitaire, un article publié

sur le blog d’anthropologie de l’Université du Fudan souligne aussi les dérives sexistes créées et

relayées par cette communauté grandissante221.

Cette dislocation de la société civile en plusieurs groupes sociaux distanciés recoupe aussi

en partie les divisions économiques existantes. Alors que les travailleurs migrants postent plutôt

des textes ou des vidéos valorisant leur identité, les jeunes détenteurs de hukou urbains véhiculent

un discours élitiste et dénigrent fréquemment la faible valeur, ou « qualité » (素质, suzhi) de leurs

compatriotes « moins éduqués »222.

Pourtant, et malgré cette division de la société civile, l’utilisation de médias sociaux a tout

de même permis d’obtenir des changements notables de la part des autorités, comme le montrent

217 YANG, Guobin, 2009, The Power of the Internet in China: Citizen Activism Online, New York : Columbia

University Press, p. 3. 218 KING, Gary; PAN, Jennifer et ROBERTS, Margaret E., 2013, « How censorship in China allows government

criticism but silences collective expression », American Political Science Review, 107, 2, p. 326-343. 219 ECONOMY, Élisabeth C., 2018, op. cit., p. 69. 220 FRENKIEL, Émilie et WANG, Simeng, 2017, op. cit., p. 15. 221 HUANG, He, 2012, « 浅析 ‘屌丝文化’ 的性别管 » [Qian xi « diaosi wenhua » de xingbie guan/Prise en compte des

rapports de genre au sein de la « culture diansi »], cité par SZABLEWICZ, Marcella, 2015, op. cit., p.180. 222 Cet argumentaire est aussi utilisé pour justifier la non-mise en place d’élections compétitives, voir :

ANAGNOST, Ann, 2004, « The corporeal politics of quality (suzhi) », Public Culture, 16, 2, p.189-208.

KIPNIS, Andrew, 2006, « Suzhi: a keyword approach », The China Quarterly, 186, p. 295-313.

ROCCA, Jean-Louis 2017, The Making of an Ideal Class. In the Making of the Chinese Middle Class, New York:

Palgrave Macmillan.

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par exemple les revendications entourant la publication des mesures de particules fines PM2.5223.

Un autre exemple se déroule en 2013, lorsque des internautes de la région de Weifang (Shandong)

accusent certaines usines de rejeter leurs eaux usées directement dans les sols alentour, et

témoignent de l’apparition de taches rouges sur la peau des enfants, et de l’augmentation des cas

de cancer au sein de leur communauté. L’indignation dépasse le cadre de la région et force les

autorités à prendre des mesures 224 . On voit donc que les divisions sociales, langagières et

techniques s’effacent parfois, et que certains sujets fédèrent de grandes parties de la société civile.

Ce dépassement des intérêts individuels (caractéristique d’une société civile chez Habermas) est

également perceptible dans une pratique apparue en 2012, qui permet à des inconnus de soutenir

financièrement des prisonniers politiques225.

Ceci étant dit, le durcissement actuel de la régulation du réseau n’entraîne pas qu’une

séparation de la population en plusieurs groupes. La parution du Livre blanc dédié à Internet en

2010226 et la « Campagne contre les rumeurs » lancée par Xi Jinping en 2013 visent clairement à

ce que toute influence de la société civile sur les prises de décisions émanant d’Internet soit plus

difficile 227 . Cette campagne cherche à assimiler les « rumeurs » à des initiatives contre-

révolutionnaires qui obéiraient à des « raisons cachées » (别有用心 , bieyou yongxin) parfois

orchestrées de l’étranger228. Les « rumeurs » sont pléthoriques sur les réseaux sociaux chinois et

sont « le plus souvent le fruit d’un mélange d’informations, de vidéos et photos, de rumeurs et de

223 La mobilisation sur la qualité de l’air et la mesure des particules PM2.5 commence en 2008, lorsque le ministère

de la Protection de l’environnement lance un projet de révision de la loi sur la qualité de l’air, et ouvre une période de

consultation. Après de nombreuses péripéties, les mesures des particules PM2.5 sont finalement divulguées dans

plusieurs grandes villes.

SALMON, Nolween, 2017, op. cit. 224 THIREAU, Isabelle, 2014, op. cit., p. 117. 225 La première collecte de ce genre date du 20 juillet 2012, lorsque l’activiste Xiao Yong qui milite pour la

commémoration des protestations de Tian’an men, risque 18 mois de prison pour des malversations financières. Rou

Tang Seng (pseudonyme utilisé sur weibo), blogueur connu pour ses positions concernant le respect des droits humains,

explique qu’il ne connait pas personnellement Xiao Yong, mais que celui-ci est poursuivi avant tout pour ses opinions.

Il demande alors un soutien financier aux internautes, et reçoit malgré la sensibilité du cas 152 495 renmibi (proche

de 30 000 dollars canadiens) en utilisant la plateforme taobao. Malgré le blocage du compte taobao le 24 octobre 2013,

et les risques encourus, cette pratique a été reprise depuis par plusieurs activistes. WU, Fengshi et YANG, Shen, 2016, « Web 2.0 and Political Engagement in China », Voluntas, 27, 5, p. 2055-2076. 226 ARSÈNE, Sévérine, 2017, « L’opinion publique en ligne et la mise en ordre du régime chinois », Participations,

17, 1, p. 35-58. 227 SALMON, Nolween, 2017, op. cit., p.115. 228 JUN, Liu, 2017, « Les rumeurs et la téléphonie mobile : participation et résistance dans la Chine contemporaine »,

Participations, 17, 1, p. 59-90.

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commentaires en ligne »229. Malgré la Campagne en cours, un rapport de l’Académie chinoise des

sciences sociales estime que plus de 2,1 millions de « rumeurs » y sont effacées chaque jour230. En

2017, 500 millions de messages furent bloqués en tant que rumeurs, et 180 000 comptes

pénalisés231. Or, ces « rumeurs » gagnent en crédibilité pour de nombreux internautes chinois, qui

estiment que les efforts de censure démontrent que le PCC a des choses à cacher232, alors que

d’autres y voient une forme de persécution politique233. Jun voit dans ce phénomène un moyen

pour les Chinois de contester facilement les décisions du PCC : moyen de résistance qui ne

demande pas d’organisation et qui comporte peu de risque pour ceux qui ne sont pas les auteurs

premiers des « rumeurs ».

9.2 L’UTILISATION D’INTERNET PAR LE PCC

Si Internet est donc bien un outil permettant aux acteurs de la société civile chinoise de

s’exprimer, cette technologie est à double tranchant. En effet, le PCC utilise également Internet

pour influencer la population. Outre le fait de collecter des données sur sa population, le Conseil

d’État a annoncé dès 2008 qu’il cherchait à utiliser le réseau pour consulter sa population, ce qui

lui permet en vérité d’accroitre les données sur le positionnement des Chinois 234 , qui sont

fortement invités à ne pas remettre en cause la « mélodie dominante » (主旋律, zhuxuanlü)235

orchestrée par la ligne directrice du PCC 236 . Internet sert aussi de courroie de transmission

supplémentaire pour les directives émanant du PCC, et ce, particulièrement pour les

229 NOUBEL, Filipp et WU, Vivian, 2014, op. cit., p. 482. 230 GUAN, X. ; XIAO, J.; GONG, Y. et YAO, X., 2016, « Voice of Reason Becomes Stronger When Facing Rumors »,

People’s Daily [人民日报] (21 janvier 2016), p. 12, cité par JUN, Liu, 2017, op. cit. 231 LAM, Oiwan, 2018a, « ‘Fake news’ is in the eye of beholder: China is centralizing efforts to stop online ‘rumors’»,

Advox – Global Voices. 232 BAI, Yin [白寅], 2010, « 网络流言传播的动力学机制分析 » [Wangluo liuyan chuanbo de dongli xue jizhi fenxi/Analyse

des dynamiques de propagation des rumeurs], 新闻与传播研究 [Xinwen yu chuanbo yanjiu/Recherches sur la

communication], 5, p. 91-96, cité par JUN, Liu, 2017, op. cit. 233 JUN, Liu, 2017, op. cit., p. 67. 234 BALLA, Steven J., 2015, « Government Consultation and Political Participations on the Chinese Internet », in G.

Yang (Ed.), China’s Contested Internet, Copenhague: Nias Press, p. 75-107. 235主旋律 se traduit littéralement par thème (musical), mais renvoie en Chine contemporaine aux nombreux discours

de sensibilisation portant sur les « valeurs essentielles » du socialisme, et est utilisé comme un synonyme de « ligne

directrice principale de la propagande ». 236 GUO, Wenjing, 2015, Internet entre État-parti et société civile en Chine, Paris : L’Harmattan, p. 317.

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gouvernements locaux. En 2013, il y avait déjà 176 000 blogs tenus par des structures

gouvernementales237.

Comme l’espace judiciaire, le cyberespace et son utilisation semblent donc être un terrain

important de discorde entre une partie de la population et le PCC. Si la société civile se joue encore

du PCC en adoptant certaines techniques subversives, le PCC utilise également Internet de manière

active, par exemple pour accompagner des réformes politiques au départ mal acceptées par la

population238. De plus, l’utilisation de VPN ou de Twitter dans le pays devient de plus en plus

risquée239, au point qu’on peut se demander si les réseaux sociaux parviendront à rester un espace

public pouvant être investi par la société civile. Une autre tendance est la mise au pas (au silence)

des personnes influentes (ayant des comptes suivis par de nombreux abonnés) plus ou moins

critiques240. L’ensemble de ces éléments vont dans le sens de Griffith qui pense que le PCC

s’approche d’un contrôle total d’Internet241.

L’avènement de Xi Jinping marque donc clairement un resserrement important des

possibilités jusque-là offertes par les réseaux sociaux242. De son côté, le PCC voit Internet comme

un outil permettant une propagande innovante et un moyen de « guidage » de l’ensemble de

médias243. La propagande change donc de ton, privilégiant les modes d’expression compassionnels

et une cooptation des leaders d’opinion adoubées, accompagnés d’une répression accrue des

autres244. Xi Jinping organise également des changements organisationnels, en établissant une

coordination des politiques au niveau présidentiel (création du Groupe dirigeant central pour la

cybersécurité et l’informatisation), et en renforçant considérablement l’autorité du Bureau d’État

de l’information sur Internet245.

237 SCHLAEGER, Jesper et JIANG, Min, 2015, « Official Microblogging and Social Management by Local

Governments in China », in G. Yang (Ed.), China’s Contested Internet, Copenhague : Nias Press, p. 192-226. 238 REPNIKOVA, Maria et FANG, Kecheng, 2018, « Authoritarian Participatory Persuasion 2.0: Netizens as Thought

Work Collaborators in China », Journal of Contemporary China, 113, 27, p. 763-779. 239 Pour certaines campagnes de répressions en cours, voir LAM, Oiwan, 2018b, « Crackdown in Beijing: ‘Using

Tweeter is more dangerous than street demonstrations’ », Advox — Global Voices 240 MINZNER, Carl, 2018, op. cit., p. 90. 241 GRIFFITHS, James, 2019, The Great Firewall of China. How to Build and Control an Alternate version of Internet,

Londres: Zed Books. 242 LEI, Ya-Wen, 2018, op. cit., p. 173-177. 243 BANDURSKI, David, 2016a, « A ‘Year of Innovation’ for Internet Controls », China Media Project .

BANDURSKI, David, 2016b, « How Xi Jinping Views the News », China Media Project. 244 LI, Angela Ke, 2015, « Vers une méthode plus proactive : le contrôle de l’opinion publique sur les microblogs

chinois sous la nouvelle présidence de Xi Jinping », Perspectives chinoises, 4, p.15-24. 245 CREEMERS, Rogier, 2015, op. cit., p.6.

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Si Internet a donc été un outil de subversion et de communication extrêmement pratique

pour nationaliser une cause ou organiser une action, le réseau permet maintenant au PCC

d’accroitre son contrôle et sa surveillance sur l’ensemble des individus se trouvant dans le pays.

CONCLUSION

Après avoir décrit les implications de l’utilisation du concept de société civile en contexte

chinois, et la fusion de l’État au parti dans ce pays, j’ai analysé la nature des revendications

émanant de cette société civile, ainsi que les outils mobilisés suivant les arènes de contestation.

Ces descriptions semblent révéler que l’ensemble des espaces publics utilisés par la société

civile chinoise se réduit fortement depuis l’arrivée au pouvoir de Xi Jinping en 2012. Outre la

réduction des différents espaces d’expression, la mise au ban de toute personne d’influence

critiquant un tant soit peu le fonctionnement du pays est de plus en plus visible, comme en

témoigne le retour des confessions publiques à la télévision depuis 2013246.

À ce durcissement idéologique s’ajoute la mise en place du système de crédit social. J’ai

souligné que la majorité des Chinois sont pour le moment favorable à ce dispositif, mais le

déploiement sur l’ensemble du territoire prévu pour 2020, outre le fait de conditionner les Chinois

dans leur quotidien, pourrait également marquer un recul de toute forme de contestation dans le

pays, comme le montre le cas du journaliste Liu Hu, dont la note de crédit social a été déclassée

depuis une enquête sur la corruption au plus haut niveau du régime, et qui a également été poursuivi

pour diffamation247.

D’un autre côté, j’ai souligné les nombreuses inventions subversives utilisées par les

Chinois pour pouvoir se faire entendre, ou tout simplement s’exprimer. Appuyant

Cabestan lorsqu’il analyse que « la société civile existe bien [en Chine], mais [qu’] elle restera

probablement dans un avenir prévisible embryonnaire et sous tutelle » 248 , je pense que les

changements sociétaux actuels découlant des applications de directives du PCC imposent aux

246 LEI, Ya-Wen, 2018, op. cit., p.187. 247 CARNET, Matthew, 2018, « Leave no Dark Corner », en Ligne : Australian Broadcasting Corporation. 248 CABESTAN, Jean-Pierre, 2018, op. cit., p.175.

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chercheurs de continuer à documenter le plus précisément possible ses formes d’expression dans

les années à venir.

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