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BA NDEYE FATOUMATA Analyse multicritère pour la priorisation des interventions en matière d’approvisionnement en eau en milieu rural au Sénégal : cas de la région de Diourbel. Mémoire présenté à la Faculté des études supérieures de l’Université Laval dans le cadre du programme de maîtrise en génie civil pour l’obtention du grade de maîtrise ès science (M. Sc.) SCIENCE ET GÉNIE GÉNIE CIVIL UNIVERSITÉ LAVAL QUÉBEC 2009 © Ba N. Fatoumata, 2009

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BA NDEYE FATOUMATA

Analyse multicritère pour la priorisation des

interventions en matière d’approvisionnement en eau en

milieu rural au Sénégal : cas de la région de Diourbel.

Mémoire présenté

à la Faculté des études supérieures de l’Université Laval

dans le cadre du programme de maîtrise en génie civil

pour l’obtention du grade de maîtrise ès science (M. Sc.)

SCIENCE ET GÉNIE

GÉNIE CIVIL

UNIVERSITÉ LAVAL

QUÉBEC

2009

© Ba N. Fatoumata, 2009

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i

Remerciements

Au moment où je rédige les dernières lignes de mon mémoire de maîtrise, je tiens à faire

part de ma profonde gratitude à M. Christian Bouchard pour avoir accepté de m’encadrer

dans ce projet, pour ses précieux conseils, sa compréhension et sa disponibilité. Le chemin

a été long et souvent difficile. Vous m’y avez accompagnée sans relâche et avec beaucoup

de rigueur dès les premiers moments. Merci M. Bouchard pour la générosité d’esprit dont

vous avez fait preuve en mon égard.

J’exprime également toute ma gratitude à Mme Irène Abi-Zeid, co-directrice de ce

mémoire, pour son appui ses conseils avisés et ses encouragements. C’est elle qui m’a

transmise mes connaissances de base en aide à la décision. Son sens de la précision a été

d’un apport appréciable dans les travaux de recherche. Mille mercis Irène.

Mes remerciements vont aussi à l’endroit de M. Bruno Urli, professeur à l’Université du

Québec à Rimouski pour avoir accepté avec diligence et beaucoup d’intérêt, non seulement

de réviser ce mémoire mais aussi, de participer au jury du séminaire de présentation des

travaux de recherche.

À toute ma famille, pour son soutien inconditionnel, je tiens à réaffirmer toute ma

reconnaissance et mon affection. Parce que le caractère académique de ce document

demande une certaine réserve, je me contenterai de paraphraser Jean Gabin qui disait : ‘‘le

jour où quelqu’un vous aime, il fait très beau. Je ne peux pas mieux dire, il fait très beau’’!

Merci à tous ceux qui, de près ou de loin, ont contribué au bon déroulement de ce mémoire,

par un conseil, par un document, par une information ou par un sourire. Ils sont nombreux.

Merci à chacun d’entre vous.

Alkhamdoulila.

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ii

Résumé

De nombreux programmes et projets visant l’accès aux ressources en eau sont initiés au

Sénégal pour satisfaire une demande en eau qui se fait de plus en plus pressante en milieu

rural notamment. L’insuffisance des moyens financiers pour mettre à la disposition des

populations une eau de bonne qualité en quantité suffisante impose qu’un échelonnement

dans le temps soit opéré pour la réalisation de ces projets. En amont des études de

faisabilité technique et économique, il est nécessaire d’identifier les diverses dimensions

que revêt l’allocation des ressources en eau afin d’établir des priorités d’investissement.

Cette étude présente une analyse multicritère d’aide à la décision pour définir les priorités

d’interventions relatives à l’approvisionnement en eau. Après avoir identifié les objectifs

relatifs à l’approvisionnement en eau en milieu rural en général, sept critères (quantitatifs et

qualitatifs) de priorité permettant d’atteindre ces objectifs sont définis. Ils portent sur la

qualité des eaux disponibles, la quantité d’eau disponible pour les besoins domestiques, la

distance d’accès aux points d’eau, l’acceptabilité des coûts de l’eau, le potentiel de

développement et enfin la disponibilité de l’eau pour l’agriculture. Des indicateurs de

mesure sont proposés en fonction des données disponibles pour chacun des critères

pondérés par des acteurs de la gestion des ressources en eau au Sénégal. La région de

Diourbel au Sénégal est étudiée en particulier. Il s’agit d’une région essentiellement

alimentée par des eaux souterraines de qualité médiocre et où le manque d’eau est

récurrent. Elle sert à la fois de cadre d’élaboration et d’analyse de la démarche. L’analyse

multicritère d’aide à la décision pour prioriser les besoins d’intervention en matière

d’approvisionnement en eau de Diourbel aboutit au rangement par ordre de priorité des huit

arrondissements de la région par la méthode MACBETH (Measuring of Attractiveness by

Categorical Based Evaluation Technique). L’atteinte de l’objectif consistant à favoriser

l’élevage n’est cependant pas mesuré faute de données. Ainsi, le critère portant sur la

disponibilité de l’eau pour le cheptel n’a pas été retenu dans l’évaluation des

arrondissements de Diourbel. Une analyse de sensibilité permet de juger de l’effet des

variations des pondérations sur le classement ainsi obtenu. L’analyse du processus dans son

ensemble permet de mettre en exergue les difficultés potentielles liées à l’utilisation d’une

telle démarche dans le contexte sénégalais tout en laissant entrevoir des perspectives plutôt

prometteuses quant aux possibilités de mise en application.

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iii

Abstract

Many programs and projects for water resources management are initiated in Senegal to

satisfy an increasing demand for water, especially in rural areas. The lack of sufficient

funding requires that these projects be spread over time. Therefore, prior to any technical or

economic feasibility study, it is necessary to identify the higher priority areas. This study

presents a multicriteria analysis for ranking rural subareas in Senegal, in particular in the

region of Diourbel, in terms of prioroities of water supply needs. After having identified the

objectives related to water supply on the regional scale, six quantitative and qualitative

priority criteria were defined. These criteria pertain to the available water quality, the

available quantity of water for domestic needs, the distance to water distribution points, the

availability of water for agriculture, the acceptability of water costs and the development

potential of a rural subarea. The achievement of the objective which consists in supporting

the cattle farming is however not measured due to lack of data. Indicators are proposed for

each criterion based on the data available at the time of the study. Criteria weights were

obtained from various water resource management stakeholders in Senegal. It’s a region

essentially feed by mediocre quality groundwater and where the lack of good water quality

is recurrent. Our multicriteria analysis leads to the ranking of eight districts of the Diourbel

region in terms of intervention priority. A sensitivity analysis enabled us to evaluate the

effect of the criteria weights on the districts ranking. Our experience with this project has

brought forward the difficulties associated with conducting a multicriteria analysis in the

Senegalese context, while emphasizing promising application possibilities.

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iv

Avant-Propos

Ce mémoire intègre un article soumis pour publication à la Revue des Sciences de l’Eau.

L’auteure principale de l’article est l’étudiante Ba Ndeye Fatoumata, également auteur de

ce mémoire. Le premier co-auteur est M. Christian Bouchard, professeur au département de

Génie Civil de l’Université Laval. La seconde co-auteure est Mme Irène Abi-Zeid,

professeure au département d’Opération et Systèmes de Décision de l’Université Laval.

Page 6: Analyse multicritère pour la priorisation des ...€¦ · BA NDEYE FATOUMATA Analyse multicritère pour la priorisation des interventions en matière d’approvisionnement en eau

v

L’eau est un vecteur d’inégalités profondes

car sa répartition place États et population

dans une situation de disparités dont on a du

mal à imaginer l’importance1.

1 Fauchon Loïc (1998). Gestion future des ressources en eau dans l'espace méditerranéen, Congrès de Kaslik,

Liban 1998.

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vi

Acronymes et abréviation

AFD : Agence Française de Développement

AHP : Analytic Hierarchy Process

APRHN : L’Agence de Promotion du Réseau Hydrographique National

ARD : Agence Régionale de Développement

ASUFOR : Association des Usagers de Forage

BAD : Banque Africaine de Développement

DEM : Direction de l’Exploitation et de la Maintenance

CR : Communauté Rurale

CSE : Conseil Supérieur de l’Eau

DGPRE: Direction de la Gestion et de la Planification des Ressources en Eau

DH : Déficit Hydrique

DHR ou DHY : Direction de l’Hydraulique Rurale

DRDR : Direction régionale de Développement Rural

DSPR : Document de Stratégie de Réduction de la Pauvreté

ELECTRE : Elimination et Choix Traduisant la Réalité

FAO: Organisation des Nations unies pour l’Alimentation et l’Agriculture (Food and

Agriculture Organization)

F CFA : Franc de la Communauté Française d’Afrique

GIRE : Gestion Intégrée des Ressources en Eau

ISDEI : Indicateur Simplifié de Satisfaction de la Demande en eau d’Irrigation

MACBETH: Measuring Attractiveness by Categorical Based Evaluation Technique

MAHS : Ministère de l’Agriculture et de l’Hydraulique du Sénégal

MEFS : Ministère de l’Économie et des Finances du Sénégal

PAPIL : Projet d’Appui à la Petite Irrigation Locale

PCR : Président de communauté Rurale

PEPAM : Projet eau Potable et Assainissement du Millénaire

PELT : Projet Eau à Long terme

PNDA : Plan Naional de Développement Rural

PNIR : Programme National d’Infrastructures Rurales

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vii

PNUD : Programme des Nations Unies pour le Développement

PRDI : Plan Régional de Développement Intégré

PROMETHEE : Preference Ranking Organization METHod for Enrichment Evaluations

OMD : Objectifs du Millénaire pour le Développement

OMS : Organisation Mondiale de la Santé

REVA : Retour Vers l’Agriculture

SAUR : Société d’Aménagent Urbain et Rural

SDE : Sénégalaise Des Eaux

SONES : Société Nationale des Eaux du Sénégal

SONEES : Société d’Exploitation des Eaux du Sénégal

TTC : Toutes Taxes Comprises

UNICEF: United Nations International Children's Emergency Fund

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viii

Table des matières

Remerciements .................................................................................................. i

Résumé .............................................................................................................. ii

Abstract ............................................................................................................iii

Avant-Propos ................................................................................................... iv

Table des matières ........................................................................................ viii

Liste des tableaux ............................................................................................. x

Liste des figures ................................................................................................ x

Introduction ...................................................................................................... 1

Revue de Littérature ........................................................................................ 5

1. La gestion de l’eau au Sénégal ........................................................................................... 6

1.1 La problématique de l’approvisionnement en eau ........................................................ 6

1.1.1 L’eau : une prise de conscience collective ............................................................ 6

1.1.2 L’état de la ressource en eau au Sénégal ............................................................... 7

1.1.3 L’approvisionnement en eau .................................................................................. 8

1.2 L’organisation de la gestion de l’eau au Sénégal ........................................................ 10

1. 2.1 Cadre institutionnel, réglementaire et législatif .................................................. 10

1.2.2 Une gestion complexe ......................................................................................... 16

1.2.3 Revue stratégique du secteur ............................................................................... 17

2. Les méthodes d’aide multicritères à la décision .......................................................... 21

2.1 Généralités ................................................................................................................... 21

2.1.1 L’aide à la décision .............................................................................................. 21

2.1.2 L’aide multicritère à la décision ......................................................................... 22

2.2 L’application des méthodes multicritères à la gestion des ressources en eau ............. 26

2.3 La méthode MACBETH ............................................................................................. 27

Article .............................................................................................................. 33

Résumé .................................................................................................................................. 35

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ix

Abstract ................................................................................................................................. 36

1. Introduction ...................................................................................................................... 37

2. Contexte de recherche ...................................................................................................... 38

2.1 Présentation de la région de Diourbel ......................................................................... 38

2. 2 L’approche méthodologique ...................................................................................... 40

3. Structuration du processus ................................................................................................ 42

3.1 Identification des acteurs et des décideurs .................................................................. 42

3. 2 Choix des unités territoriales ..................................................................................... 43

3.3 Identification des objectifs et formulation des critères ............................................... 43

3.4 Évaluations des arrondissements ................................................................................ 45

4. Rangement des arrondissements ....................................................................................... 52

4.1 Le logiciel M-MACBETH .......................................................................................... 52

4.2 Pondération des critères .............................................................................................. 53

4.3 Fonctions de valeur ..................................................................................................... 54

5. Analyse des résultats et de la démarche ............................................................................ 58

6. Conclusion ........................................................................................................................ 60

Remerciements ...................................................................................................................... 61

Complément sur la méthodologie : détermination des unités territoriales

et orientation adoptée pour l’évaluation des unités territoriales .............. 65

Définition des critères .................................................................................... 68

Conclusion générale ....................................................................................... 78

Bibliographie................................................................................................... 79

Annexes ........................................................................................................... 87

Annexe A : Présentation de la région de Diourbel ............................................................... 88

Annexe B : Description des ouvrages d’adduction d’eau en milieu rural ............................ 93

Annexe C : Questionnaire transmis aux présidents de communauté rurale (PCR) pour

estimer l’acceptabilité des populations à payer l’eau ........................................................... 95

Annexe D : Critère accessibilité au point d’eau - Script ArcView ..................................... 100

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x

Liste des tableaux

Tableau 1- Tranche tarifaire de la SDE

Tableau 2- Matrice des jugements inconsistants

Tableau 3- Intervalles de qualité d’eau souterraine

Tableau 4- Détermination de la qualité globale de l’eau.

Tableau 5- Pondération, évaluation et priorités.

Liste des figures

Figure 1- Schéma organisationnel des services de l’eau potable en milieu rural.

Figure 2- Les étapes d’un processus de prise de décision

Figure 3- Classification des techniques d’analyse multicritère.

Figure 4-Exemple de matrice des jugements d’attractivité du logiciel M-MACBETH.

Figure 5- Schéma d’une situation d’inconsistance sémantique

Figure 6- Carte de la région de Diourbel

Figure 7 - Schéma du processus d’élaboration de la démarche

Figure 8 - Arbre des objectifs, critères et indicateurs de mesure

Figure 9- Fonctions de valeurs

Figure 10- Effet de la pondération sur le rangement des arrondissements

Figure 11- Borne fontaine

Figure 12 - Borme avec pompe à motricité humaine

Figure 13- Puits moderne

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1

Introduction

Mise en contexte et motivation

L’exploitation rationnelle et équitable des ressources en eau est l’un des enjeux majeurs de

notre époque. Dans les pays de l’Afrique subsaharienne où se conjuguent accroissement

démographique rapide, sécheresse et manque de moyens financiers pour l’exploitation des

ressources, plus qu’une priorité, le problème de l’accès à l’eau est une question de survie

pour ces pays en voie de développement. En effet, l’eau est un vecteur de développement

incontestable mais c’est avant tout une ressource vitale. L’enjeu stratégique que représente

l’accès à l’eau est reconnu par la communauté internationale de sorte qu’il est maintenant

considéré comme un droit humain de base [ONU, 2002]. Aujourd’hui, c’est donc une

obligation pour les gouvernements de mettre en place des politiques garantissant ce droit.

Le Sénégal, à l’image d’autres pays sahéliens, développe des programmes et projets

favorisant l’accès des populations à l’eau pour ses divers usages. Malgré un souci de plus

en plus affirmé des autorités de garantir cet accès à tous, les populations rurales demeurent

les moins bien servies. Au Sénégal, seuls 67% de la population en milieu rural disposent

d’un accès raisonnable à l’eau contre 87% en milieu urbain [MAHS, 2004].

Problématique

Les causes majeures d’une telle disparité résident dans l’inégale répartition des ressources

hydriques sur le territoire, dans la multiplicité des facteurs à intégrer mais surtout dans le

manque de moyens financiers pour mettre à la disposition des populations une eau de

qualité et en quantité suffisante. L’ampleur du problème n’étant pas la même partout et les

moyens étant limités, il est dès lors pertinent de chercher à élaborer des stratégies

d’allocation et de gestion intégrée des ressources en eau permettant de satisfaire de manière

prioritaire les besoins en infrastructures d’adduction ou de traitement de l’eau. Pour les

mener convenablement, il est nécessaire d’y intégrer la multiplicité des dimensions des

projets et programmes d’allocation des ressources hydriques. Les traditions

socioculturelles, l’interaction entre les institutions, la motivation des intervenants, la

préservation de l’environnement et le souci de répondre aux attentes des populations sont

autant de facteurs d’importance.

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2

Dans cette perspective, l’État met en place des outils pour favoriser un cadre de gestion

efficace intégrant ces diverses dimensions. Et à cet effet, une approche de gestion intégrée

des ressources en eau (GIRE) a été initiée en 2004 par le Ministère de l'Agriculture et de

l'Hydraulique et est pilotée par la Direction de la Gestion et de la Planification des

Ressources en Eau (DGPRE) [BAD, 2005]. Néanmoins, des disparités marquantes

demeurent [PNUD, 2001] tant au niveau de l’espace qu’au niveau des usages.

Contribution

L’objectif du travail de recherche présenté est de contribuer, dans une certaine mesure, à

surmonter ces difficultés. Le projet s’inscrit dans une démarche d’aide à la décision de la

gestion des ressources et des infrastructures en eau en milieu rural au Sénégal. Pour ce

faire, nous proposons une procédure pour ranger en termes de priorité d’interventions en

matière d’approvisionnement en eau, des unités territoriales sur la base de plusieurs

critères. L’analyse du cas de la région rurale de Diourbel illustre la démarche. L’étape

d’analyse des priorités d’interventions ici étudiée ne prend pas en compte l’identification

ou le choix de projets ni leur financement. Elle est située en amont. La démarche est

élaborée dans une approche systématique, permettant d’expliciter clairement la

problématique et facilitant l’analyse des nombreuses variables (qualitatives et quantitatives)

que nécessitent les décisions concernant la priorisation des interventions en matière

d’approvisionnement en eau afin d’aboutir à un choix rigoureux et transparent.

Aperçu de la méthodologie

La région de Diourbel sert de cadre d’illustration de la démarche. Il s’agit d’une région

majoritairement rurale, essentiellement alimentée par des eaux souterraines de qualité

médiocre et où le manque d’eau est récurrent. Ses huit arrondissements sont évalués selon

un ensemble de critères pondérés par des acteurs de la gestion des ressources en eau au

Sénégal. Ces critères sont établis en prenant en compte les principes du développement

durable et les exigences légales en matière d’allocation des ressources en eau au Sénégal.

L’approche proposée intègre l’utilisation de données bibliographiques sur le cadre

institutionnel et réglementaire de la gestion des ressources en eau au Sénégal. Elle

comprend aussi la collecte de variables d’évaluations sur la région d’étude. Des entrevues

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3

auprès des intervenants dans le domaine et des enquêtes sur le terrain pour l’évaluation des

arrondissements sur certains critères ont également été effectuées dans l’élaboration de la

démarche d’aide multicritère proposée. Les évaluations ont nécessité le développement de

programmes de calculs pour pouvoir agréger, à l’échelle de l’arrondissement, les

informations disponibles au niveau des villages ou des communautés rurales. Un système

d’information géographique (SIG) a permis l’analyse spatiale, l’agrégation et la

représentation des données. Il s’agit du logiciel ArcView 3.2. Le logiciel d’aide multicritère

à la décision MACBETH (« Measuring Attractiveness by Categorical Based Evaluation

Technique ») [Bane e Costa et Vansnick, 1999] a servi à établir le rangement final des

arrondissements.

Objectifs et résultats attendus

Au terme de cette étude, le classement des arrondissements de la région de Diourbel en

termes de priorité d’adduction et de traitement d’eau est obtenu. L’analyse de sensibilité

des résultats permet de juger de la variation des poids accordés aux critères et de leur effet

sur le classement obtenu. Le travail inclut aussi une analyse succincte du cadre décisionnel

en matière d’allocation des ressources en eau au Sénégal.

Les différentes étapes qui ont permis d’atteindre ces résultats constituent la démarche

multicritère pour la priorisation des interventions pour l’approvisionnement en eau. Les

résultats obtenus concernent spécifiquement la région de Diourbel. Néanmoins,

globalement, la démarche pourrait être adaptée à d’autres régions rurales du Sénégal, voire

servir de cadre à l’élaboration d’un outil d’aide à la décision utile aux professionnels

œuvrant dans le domaine de la gestion des ressources en eau (administrateurs publics,

responsables de la santé publique, investisseurs, ingénieurs etc.) dans des contextes

géographiques et sociologiques similaires.

Organisation du document

Suite à ce chapitre d’introduction, le document s’organise autour de 6 grands chapitres. Le

premier chapitre correspond à la revue de littérature. La gestion de l’eau au Sénégal et les

méthodes multicritère d’aide à la décision y sont abordées.

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4

Le second chapitre est constitué de l’article présentant l’analyse multicritère pour la

priorisation des interventions en matière d’approvisionnement en eau dans le cas de la

région de Diourbel. Il peut être lu indépendamment des autres chapitres. L’article comprend

une introduction suivie par la présentation du contexte de recherche qui débute par la

présentation de la région de Diourbel ; l’exposition de l’approche achève cette seconde

section de l’article. La structuration du processus constitue la troisième section. Elle inclut

l’identification des acteurs et des décideurs de la gestion de l’eau au Sénégal, le choix des

unités territoriales à prioriser, la définition des critères ainsi que les procédures

d’opérationnalisation de ces critères. La section quatre de l’article permet d’exposer l’étape

de rangement des unités territoriales. Le logiciel M-Macbeth y est brièvement décrit, la

procédure de pondération et les fonctions de valeurs également. Elle se termine par le

rangement des arrondissements. S’en suit une analyse des résultats obtenus. L’article

s’achève par une discussion des résultats et de la démarche dans son ensemble et une

conclusion ouvrant sur les perspectives futures de l’application d’une telle démarche.

Les chapitres suivants du mémoire sont des compléments au contenu de l’article. Le

troisième chapitre explique le choix de l’orientation adoptée pour l’évaluation des unités

territoriales. Le chapitre suivant présente plus en détail les indicateurs de mesure de chacun

des critères. Une discussion sur l’élaboration de la démarche et une conclusion plus large

termine le document.

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5

Revue de Littérature

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6

1. La gestion de l’eau au Sénégal

1.1 La problématique de l’approvisionnement en eau

1.1.1 L’eau : une prise de conscience collective

Si ouvrir un robinet est un geste simple, anodin pour certains, l’accès à l’eau, est un

problème quotidien dans les pays en voie de développement. En Afrique sub-saharienne en

particulier, près de 42% de la population n’ont pas accès à de l’eau en quantité et en qualité

suffisante [OMS et UNICEF, 2004]. Ceci est la cause, entre autres, des nombreuses

maladies d’origine hydrique responsables de millions de décès sur le continent chaque

année [OMS et UNICEF, 2004, 2005]. À cela s’ajoute un manque de superficies agricoles

irriguées pour atténuer un déficit, alimentaire annuel de plusieurs millions de tonnes de

produits agricoles [Seck, 2005]. En effet, en Afrique de l’Ouest, seuls 4% des terres arables

sont irriguées comparé à 38% en Asie [Diouf, 2006]. Compte tenu de l’accroissement

démographique rapide, il devient impératif d’améliorer l’accès à une eau salubre en

quantité et de développer une agriculture nourricière efficace. Ceci ne pourra se réaliser

sans une bonne maîtrise de l’eau.

Dans la volonté d’atteindre ses propres objectifs de développement dans le secteur de l’eau

et ceux pour lesquels il s’est engagé auprès de la communauté internationale (les Objectifs

du Millénaire pour le Développement, OMD), le Sénégal développe des programmes

favorisant l’accès à l’eau pour la consommation humaine, l’assainissement et l’agriculture.

Outre l’aspect financier qui constitue un obstacle de taille, les difficultés rencontrées pour

la réalisation adéquate de ces objectifs sont souvent l’insuffisance de concertations des

acteurs civils et des institutions [Hane, 2006]. On observe aussi, un manque d’intégration

des diverses dimensions des projets en hydraulique, notamment les considérations

socioculturelles. Par ailleurs, comme le souligne le rapport provisoire de l’état des lieux de

l’hydraulique de 2004 [MAHS, 2004] la stratégie, la planification et la programmation

constituent des points faibles du secteur de l’hydraulique au Sénégal. Cependant, bien qu’il

reste des efforts à faire dans ce sens, le gouvernement met en place des outils de

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7

planification stratégique, de concertation et d’intégration pour favoriser un cadre de gestion

efficace. A cet effet, une approche de gestion intégrée des ressources en eau (GIRE) a été

initiée en 2004 par le Ministère de l'Agriculture et de l'Hydraulique et est pilotée par la

Direction de la gestion et de la planification des ressources en eau (DGPRE) [BAD, 2005].

1.1.2 L’état de la ressource en eau au Sénégal

À l’image d’autres pays sahéliens, le Sénégal est aux prises avec des difficultés

d’approvisionnement en eau. Pourtant, le pays est traversé par d'importants cours d'eau et

recèle des nappes souterraines appréciables [Ambassade France, 2003].

Parmi les ressources en eau de surface, on compte [FAO, 2005] le bassin versant du fleuve

Sénégal, qui occupe par ailleurs 37% du territoire et constitue avec des apports annuels de

20 milliards de m³ par an, la source en eau de surface la plus importance. Il alimente en

grande partie le Lac de Guiers, importante réserve d’eau douce avec un potentiel de 0,6 à

1,2 millions de m³/j [Badiane et al. 2000]. Le fleuve Gambie occupe 30% de la superficie

totale du pays. Le fleuve Casamance couvre quant à lui 11% du territoire national. La

rivière Kayanga qui prend sa source dans le massif du Fouta Djallon en Guinée, a un

écoulement annuel estimé à 60 millions de m³ par an. Les cours d’eau du Sine et du

Saloum, autrefois avec une activité hydrologique relativement importante, connaissent

aujourd’hui une intrusion permanente d’eau saline en aval.

Les petits bassins versants sont le siège d’écoulements épisodiques, qui alimentent les

grands cours d’eau ou se déversent dans la mer. Dans les grandes dépressions, il se forme

également des mares et des marigots pouvant durer de 2 à 3 mois après l’hivernage [FAO,

2005]. Ces cours d’eau non pérennes sont nombreux dans le Ferlo nord et au sud du pays

ainsi que dans la zone humide des Niayes qui est ambivalente dans la mesure où elle

appartient à la fois au domaine côtier et continental. Ils sont caractérisés par une forte

variabilité des apports au cours de l’année et une irrégularité des apports d’une année à

l’autre [MAHS, 2004].

Le pays bénéficie de ressources en eau souterraines importantes sur la majeure partie du

territoire [Badiane et al. 2000]. Quatre types de nappes sont identifiés : les nappes

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8

superficielles (50 à 75 milliards m³ avec renouvellement de 5 milliards m3/an), les nappes

semi-profondes (10 milliards m³), la nappe profonde du Maestrichtien (300 à 500 milliards

m³ [FAO, 2005] avec des potentialités de renouvellement de 200 millions m3/an) et la

nappe de la zone du socle, dans la partie Est du pays (50.000 m3/an mobilisables) [BAD,

2005].

Le pays est donc doté de ressources en eau considérables. La disponibilité des ressources en

eau renouvelable est estimée à environ 4750 m3 par habitant et par an [MAHS, 2004 ; CSE,

2005]. La valeur de référence de pénurie d’eau est de 1000 m³/habitant/an. Le Sénégal est

bien au dessus. Cependant, en ce qui concerne les eaux de pluie, qui se concentrent sur une

courte période de 3 à 4 mois [Badiane et al., 2000], on note un abaissement généralisé de la

pluviométrie, avec une translation des isohyètes du nord vers le sud.

1.1.3 L’approvisionnement en eau

Il est admis que le problème de l’eau au Sénégal se pose non pas en termes de quantité mais

en termes de disponibilité, d’accès et de qualité de la ressource. En effet, alors que les

régions de Ziguinchor et de Kolda bénéficient de la présence du fleuve Gambie (avec un

débit de 10 milliards de m³/an en moyenne) [Badiane et al. 2000], de celle de Saint-Louis,

de la présence du fleuve Sénégal (20milliards de m³/an au total) [Ba, 2003], la zone Centre-

Ouest est l’une des plus pauvres en ce qui concerne les eaux de surface. Mais elle est,

paradoxalement, la plus peuplée [APRHN, 2006]. De plus, les eaux souterraines existantes

demandent des investissements importants pour leur exploitation. Dans la zone centre, les

nappes semi-profondes sont difficilement exploitables, du fait que leur eau est saumâtre,

avec de fortes teneurs en chlorures et en sels minéraux [MAHS, 2004]. Malgré cet état de

fait, au milieu des années quatre-vingt dix déjà, les eaux souterraines fournissaient 84% des

débits pour l’alimentation en eau potable des centres urbains et en milieu rural. La majorité

des unités industrielles, minières et touristiques est aussi alimentée par des eaux

souterraines. [Ministère de l’Hydraulique, 1994].

Leur utilisation pour l’irrigation est cependant relativement faible. En effet, les eaux

souterraines ne contribuent que pour 10% [site internet CSE, 2007] à l’irrigation des

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9

superficies irriguées qui eux ne représentent que 1,6% du potentiel irrigable, estimé à

500 000 hectares, sur l’étendue du territoire. [Banque Mondiale et Coopération Française,

2007].

L’accès à l’eau potable et à l’eau d’irrigation implique des coûts de distribution (coût de

transport) et de traitement (exigences de qualité). De ce fait, l’allocation doit être

financièrement rentable. Il s’agit d’une exigence pour la SONES et la SDE. L’État, qui

jusqu’à maintenant a subventionné les communautés rurales et les maraîchers de la zone

des Niayes, (à Dakar qui utilisent l’eau traitée distribuée par la SDE) veut se départir de

cette responsabilité insoutenable à long terme. Pour disposer d’eau, il faudra donc en avoir

les moyens. Dès lors, l’aspect financier constitue un critère incontournable pour l’allocation

des ressources hydriques. Au-delà du déséquilibre naturel de la répartition des ressources

hydrauliques, se pose le problème de l’inégale répartition des infrastructures de production

et de distribution. La priorité a longtemps été donnée à la capitale et aux grandes villes au

détriment des collectivités rurales. Ces dernières, pour la plupart, ont un accès limité à l’eau

salubre pour leurs activités domestiques et agricoles ainsi que pour l’assainissement. [Site

Banque Mondiale].

Au Sénégal, le PEPAM estime à 64% le taux d’accès raisonnable à l’eau potable en milieu

rural et à 17% le taux d’accès à l’assainissement approprié [MAHS, 2004]. Pour la région

de Diourbel, ces pourcentages sont respectivement 77% et 17% [Portail internet du

PEPAM, 2006].Ce taux d’accès à l’eau comprend l’apport des potences à charrettes.

Pourtant, près de 70% de la population sénégalaise vit en milieu rural [Thiam, 2005] avec

comme principales sources de revenu l’agriculture et l’élevage [Gouvernement du Sénégal,

2007]. C’est aussi là que l’on compte le plus de pauvres.

Pour suivre le rythme de la croissance démographique, les producteurs devront accroître la

production vivrière. Ceci nécessite des apports suffisants en eau pour l’élevage et

l’agriculture. Cependant, comme le soulignent de nombreuses études [Badiane et al., 2000,

Faye et al., 2000, Thiam, 2005, site du CSE], les apports en eaux pluviales sont de plus en

plus faibles et insuffisants pour satisfaire les besoins des producteurs.

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10

1.2 L’organisation de la gestion de l’eau au Sénégal

1. 2.1 Cadre institutionnel, réglementaire et législatif

Le recensement des organismes, autorités et personnes impliqués dans les projets

d’hydraulique ainsi que l’organigramme hiérarchique des intervenants dans le domaine de

la gestion de l’eau au Sénégal, ont permis de répertorier les décideurs et autres acteurs à

consulter. Les textes de lois (code de l’eau, code de l’environnement) ont permis de mieux

comprendre la législation régissant l’exploitation des ressources naturelles.

a. Réforme du secteur de l’eau

La réforme du cadre institutionnel et réglementaire du secteur de l’eau au Sénégal a été

entreprise au milieu des années 90 suite aux difficultés financières de la Société Nationale

d’Exploitation des Eaux du Sénégal (SONEES). Dans le cadre de cette réforme, la

SONEES a été remplacée par la SONES (Société Nationale des Eaux du Sénégal) et la SDE

(Sénégalaise Des Eaux) (loi n° 95-10 du 7 avril 1995).

Selon l’Agence Française de Développement, AFD (2006), ce choix a été dicté, d’une part,

par la volonté de distinguer la société de gestion et l’Etat sénégalais dans l’optique d’en

préciser les objectifs et de faciliter les aides internationales directement affectées au

domaine de l’eau. D’autre part, il a été dicté par le souci de limiter le risque trop important

de faire une concession avec une entreprise privée du fait de la connaissance relativement

mauvaise de l’état du patrimoine et des investissements à réaliser.

La seconde réforme entamée vers 2005 avec le lancement du PELT est plus une réforme

sectorielle que structurelle. Les volets assainissement, alimentation en eau potable,

environnement et gestion des ressources en eau [Coly, 2006] sont globalement pris en

compte en vue de renforcer et de développer le secteur de l’hydraulique.

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11

b. Cadre institutionnel

La gestion des ressources hydriques au Sénégal est organisée principalement autour :

- du Ministère de l’Agriculture, de l’Élevage et de l’Hydraulique (décret n°2003-358

de mai 2003) responsable de la mise en œuvre de la politique, des projets et des

programmes dans le secteur de l’assainissement et de l’hydraulique ;

- du Ministère de l’économie et des finances, MEFS, chargé de la maîtrise d’ouvrage

des projets d’hydraulique et d’assainissement financés par l'État; il recherche les

financements et gère le service de la dette;

- du Conseil Supérieur de l’Eau (CSE), (juin 1998) qui, sous l’autorité du Premier

Ministre, statue sur les orientations générales du secteur et les grandes options

d’aménagement, veille au respect de la réglementation relative à la gestion des eaux

internationales, et décide de la gestion des ressources en eau;

- le Comité Technique de l’Eau, (juin 1998) chargé d’étudier toutes les questions

relatives à la gestion de l’eau pour le compte et à la demande du CSE.

D’autres ministères sont impliqués de manière directe ou indirecte dans le secteur. Il s’agit

du Ministère de l’Environnement et de la Protection de la Nature, du Ministère de

l’Hygiène Publique et de l’Assainissement, du Ministère du Plan et du Développement

Durable, du Ministère de l’Intérieur ainsi que du Ministère des Collectivités Locales et de

la Décentralisation.

– la Direction de la gestion et de la planification des ressources en eau (DGPRE); la

DGPRE est chargée de la planification de l'utilisation des ressources en eau et du

développement de la connaissance des ressources; elle délivre des autorisations de création

d’ouvrages, suit et contrôle les mesures de la qualité de l'eau;

– la Direction de l'hydraulique (DHY) dont le rôle principal est la programmation et la

maîtrise d'ouvrages des travaux neufs en milieu rural; elle veille à l'application des normes

et standards nationaux;

– la Direction de l'exploitation et de la maintenance (DEM) a pour mission d’assurer

la bonne exploitation et la maintenance des forages ruraux motorisés; la DEM intervient

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12

aussi dans la maîtrise de travaux de réhabilitation; elle veille ainsi à la qualité des

opérations et à la continuité du service de l'eau potable.

Les Sociétés d’exploitation et de patrimoine qui sont sous l’autorité du ministère chargé de

l’hydraulique comprennent :

– La SONES est la société de patrimoine et de contrôle d’exploitation de l’eau au

Sénégal (l’État en est le principal actionnaire); elle a en charge la gestion du patrimoine,

l’élaboration du plan directeur de l’hydraulique urbaine ; la SONES intervient au niveau de

la programmation des investissements et de la recherche des financements; elle a aussi

pour rôle de sensibiliser le public et de contrôler la qualité de l’exploitation; en outre elle

assure la maîtrise d’ouvrage des travaux de renouvellement des infrastructures;

– La Sénégalaise Des Eaux (SDE) est une société privée (à 98,5% possédée par la

SAUR) chargée de l’exploitation technique et commerciale du réseau urbain

d’approvisionnement selon un contrat d’affermage d'une durée de 10 ans.

Les autres administrations autonomes sont :

- L’Agence de promotion du réseau hydrographique national (APRHN) créée depuis

octobre 2000 a comme mission ‘‘d’œuvrer à l’aménagement et à la réhabilitation du réseau

hydrographique national et de constituer un maillage complet du territoire national de façon

à apporter l’eau à toutes les populations tant pour les besoins domestiques que pour ceux de

l’agriculture et de l’élevage; à cet effet, l’APRHN pourra:

procéder à toutes les opérations d’extraction, de transfert et de stockage d’eau

ou d’excédents d’eau de surface et d’eau de ruissellement ;

concevoir et planifier tous programmes d’exécution physique et financière;

réaliser ou faire réaliser tous travaux et études d’exécution en matière de

transfert d’excédents d’eau de surface et d’infrastructures hydrauliques, tels

que :endiguements, barrages, canalisations ou ouvrages de retenues et de prise ;

ceci bien sûr en rapport avec les besoins en eau potable et en eau à usage

agricole et pastoral, des populations et des autres acteurs économiques.’’ (Décret

2000-804 article 2);

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13

- La société d’aménagement et d’exploitation des terres du delta du fleuve Sénégal

(SAED) qui intègre dans son champ d’action les vallées du fleuve Sénégal et de la Falémé

depuis 1974 [Ngaidé, 2006] a un mandat orienté vers l’agriculture et l’élevage; elle accorde

une grande importance à la gestion et à la préservation du patrimoine hydraulique;

- La société de développement agricole et industriel du Sénégal (SODAGRI) est

chargée de piloter des projets de développement industriel rural du Bassin de l’Anambé

telles que la réalisation d’infrastructures et la formation des producteurs.

Les Services déconcentrés du Ministère de l'hydraulique (rattachés à la DEM depuis le

début de l'année 2004) comprennent :

- 10 Divisions Régionales de l'Hydraulique (DRH);

- 15 Brigades des Puits et Forages (BPF), responsables du suivi de l'exploitation et de

la maintenance des forages;

- Des Subdivisions Régionales de Maintenance (SRM), structures de maintenance

lourde et de formation de conducteurs de forage;

- Des Brigades Hydrologiques (BHY), en charge du suivi des eaux de surface et des

eaux souterraines pour le compte de la DGPRE qui en assure la tutelle;

- Des Associations d’Usagers de Forages (ASUFOR) responsables de l’exploitation

des forages en milieu rural.

La figureFigure 1 présente un schéma de l’organisation de la gestion de l’eau en milieu

rural.

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14

ASUFOR DEM

Communauté

rurale

Gouverneur de

région

Opérateur de

maintenance

Gérant Opérateur

financier

Protocole Reconnaissance

juridique

Licence

d’exploitation

Contrat de

maintenance

hydraulique

Contrat de

gérance

Contrat de prêt plan

épargne projet

Figure 1- Schéma organisationnel des services de l’eau potable en milieu rural.

Adapté de MAHS, 2004

c. Cadre réglementaire et législatif

Plusieurs textes de lois, de décrets et d’arrêtés régissent la gestion, la planification et

l’utilisation des ressources en eau.

Il s’agit essentiellement de :

- la loi n° 76-66 du 2 juillet 1976 portant code du domaine de l’État réglant le statut

juridique des ressources en eau ;

- la loi n°81-13 du 4 mars 1981 portant code de l’eau, mise en application depuis juin

1998. Ce code organise la préservation et la protection de la qualité des ressources

hydriques et détermine les régimes d’utilisation des eaux suivant un ordre de

priorité bien défini : l’alimentation humaine, l’élevage, l’agriculture, la sylviculture

et en dernier lieu l’agro-industrie ;

- la loi n°2001-01 du 15 janvier 2001 portant code de l’environnement fixant les

règles en matière de protection de l’environnement.

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15

La formulation des objectifs

Selon le recensement effectué dans le cadre du PEPAM [MAHS, 2004], les objectifs

d’accès utilisés au Sénégal sont formulés de manière globale:

- dans le Document de Stratégie de réduction de la pauvreté (DSRP) [Ministère de

l’Économie et des Finances, 2003];

- dans la lettre de politique sectorielle de l’environnement en ce qui concerne

l’assainissement;

- dans le cahier des charges du contrat d’affermage pour l’hydraulique urbaine;

- et dans le cahier des charges du Ministère de l’hydraulique.

La délimitation de l’hydraulique rurale et urbaine

Concernant la délimitation entre la gestion de l’eau en milieu urbain et celle en milieu rural,

elle est faite suivant un critère unique de statut administratif. Les populations des localités

ayant le statut de commune sont classées comme population urbaine. Un seuil de 5000

habitants est souvent mentionné pour la classification mais il n’est pas toujours respecté

(exemple: la communauté rurale de Touba Mosquée).

La tarification

En ce qui concerne la tarification, en milieu rural, les charges d’exploitation du service de

l'eau potable se répartissent entre l'État et les usagers. La DEM s’occupe du renouvellement

du forage, des réservoirs ou châteaux d'eau ainsi que des canalisations principales pour le

compte de l’État. Les dépenses liées à la maintenance des infrastructures sont à la charge

des usagers. Ces derniers s’en acquittent suivant deux systèmes tarifaires : les cotisations

forfaitaires (surtout là où les compteurs d’eau sont défectueux ou inexistants) et la vente de

l’eau au volume. La vente de l'eau au volume se pratique essentiellement par bassine de 25

litres (entre 5 et 15 francs de la communauté financière africaine, FCFA2 ou par m³ au

branchement particulier. Ce mode de tarification est systématiquement appliqué sur les

nouveaux projets, et progressivement instauré sur les sites existants dans le cadre de

REGEFOR selon un rapport d’évaluation de la BAD [BAD, 2005].

2 1 FCFA équivaut à 0,245 $ Canadien en date du 21 avril 2009.

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16

En milieu urbain, la grille tarifaire est appliquée aux usagers domestiques à trois niveaux

(Tableau 1). Le premier est la tranche sociale réservée aux consommateurs domestiques et

subventionnée à hauteur de 60% pour une consommation inférieure à 10m³/mois (191,32

FCFA pour les villes avec des réseaux d’assainissement, 181 FCFA pour les villes non

assainies en date de janvier 2003) [AFD, 2006]. Le second niveau est celui de la tranche

pleine payée par les usagers domestiques ayant une consommation mensuelle comprise

entre 10 et 20m³. Le dernier niveau constitue la tranche dissuasive pour une consommation

supérieure à 20m³ par mois. Les tarifs au mètre cube de ces deux derniers niveaux étaient

respectivement de 629,88 et 788,67 FCFA en date de janvier 2003 [AFD, 2006].

Les fontainiers, revendeurs d’eau, en périmètre affermi, bénéficient d’un tarif unique de

264 ou 322 le m³ selon que la ville est assainie ou pas. Les usagers achètent l’eau entre 600

et 1000 FCFA le m³.

Tableau 1- Tranche tarifaire de la SDE

Catégorie Total TTC en FCFA/m³

Abonnés domestiques

Tranche sociale (< 10m³/mois)

Tranche pleine (10 à 20m³/mois)

Tranche dissuasive (>20m³/mois)

191,32

629,88

788,67

Abonnées non domestiques 788,67

Bornes fontaines 322,31

Maraîchers

< Quota Q

Comprise entre Q et 2xQ

>2xQ

131,37

507,84

788,67

Adapté de [AFD, 2006] ; TTC : toute taxe comprise.

Le prix moyen de l’eau, estimé à 456 FCFA/m³ en 2002, comprend ‘‘le prix patrimoine’’

versé à la SONES, le ‘‘prix exploitant’’ versé à la SDE, le tarif assainissement (pour les

villes assainies), la TVA de 18%, la surtaxe hydraulique (sauf exonération) de 1,95

FCFA/m³ et la surtaxe (sauf exonération) municipale de 3,25 FCFA [BAD, 2005].

1.2.2 Une gestion complexe Dans le cadre de son analyse sur le cadre institutionnel et juridique de la gestion des

ressources en eau et de l’environnement, Ngaidé (2006), met en exergue les difficultés

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17

d’ordre institutionnel, juridique et financier auxquelles se heurte la gestion des ressources

en eau au Sénégal. Ainsi, les remaniements ministériels fréquents contribuent à l’instabilité

institutionnelle rendant difficile la mise en place de projet ou programme à long terme dans

le secteur de l’hydraulique. Ngaidé (2006) fait remarquer cependant que les changements

des organes de gestion de l’eau sont parfois liés à des adaptations exigées par la multiplicité

des problèmes que pose cette ressource. De plus, la législation relative à l’eau n’est pas

assez harmonisée. Toute la réglementation relative à cette dernière n’est pas regroupée dans

le Code de l’eau. Elle est complétée par d’autres textes tel que le code de l’hygiène, le Code

de l’environnement, le code du domaine de l’État etc. [Hane, 2006; MAHS, 2005]. Une

question aussi importante que le droit à l’eau, par exemple, n’est pas prise en compte dans

le Code de l’eau [Ngaidé, 2006]. Ces difficultés sont renforcées par la multiplicité des

acteurs qui complique la coordination des actions des différentes structures et la dichotomie

entre l’hydraulique rurale et urbaine entraîne une gestion déséquilibrée au détriment de

l’hydraulique rurale tel que l’illustre la section 1.2.1. La plupart des programmes

d’hydraulique développés concernent le milieu urbain. À cet effet, il est nécessaire de

renforcer les programmes d’hydraulique rurale [Ngaidé, 2006]. En outre, actuellement,

comme nombre de pays africains, le Sénégal dépend fortement de financements extérieurs

dans sa gestion des ressources naturelles [CSE, 2005]. Les infrastructures qui ne répondent

pas suffisamment à la demande actuelle deviennent plus dispendieuses à réaliser. Des

moyens de financement plus souples (construction progressive) et l’utilisation de matériaux

locaux pourraient apporter des solutions, pas toujours faciles à appliquer cependant.

1.2.3 Revue stratégique du secteur

Les perspectives de l’État dans le secteur de l’hydraulique visent la réorganisation du cadre

institutionnel en cours, entre autres, par le renforcement des moyens de mise en application

des textes en vigueur, une meilleure clarification de la mission et de la responsabilité des

acteurs, l’implication des usagers et des collectivités locales aux programmes à caractère

social. L’état s’investit également dans la consolidation et le renforcement des

infrastructures et la préservation des ressources notamment en améliorant notamment les

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18

capacités de traitement des eaux, en limitant l’exploitation de la nappe maestrichtienne

menacée d’intrusion saline, en garantissant la satisfaction des divers usages de l’eau et en

assurant une gestion durable des eaux du lac de Guiers. Parallèlement, l’État et ses

partenaires font de l’atteinte de l’équilibre financier du secteur de l’hydraulique par la

maîtrise du prix de l’eau un objectif essentiel. L’atteinte des OMD, notamment en ce qui a

trait à la satisfaction des besoins en eau pour le milieu rural (84%) et le milieu urbain

(100%) d’ici 2015, est aussi un des objectifs majeurs dans le domaine de la gestion des

ressources en eau au Sénégal. À cet effet, les pouvoirs publics ont mis en place divers

projets et programmes de développement dans le secteur de l’hydraulique et les domaines

connexes (PNIR, plan REVA, PNDA, PAPIL, PEPAM etc.).

Les projets et actions engagées trouvent leur origine dans les années 80 où il était

nécessaire de faire face au développement de plus en plus important des villes alors que les

investissements dans le secteur de l’eau stagnaient [Ngaidé, 2006]. C’est ainsi qu’ont été

mis en place le Projet Sectoriel Eau (PSE, 1996-2004), le projet d’alimentation en eau de la

Petite Côte (1998-2000), le projet d’alimentation en eau des onze villes régionales (2001-

2003), le Projet Eau à Long Terme (PELT, 2002-2005) [Coly, 2006]. Le PELT visait à

accroître la production et la distribution d’eau pour desservir 800 000 habitants en zones

périurbaines à Dakar et 200 000 dans les villes secondaires ainsi qu’à permettre l’accès à

l’assainissement collectif de 90 000 personnes supplémentaires à Dakar et 50 000 autres en

centres secondaires. Depuis 2005, le Programme Eau Potable et Assainissement du

Millénaire (PEPAM) a été initié et comprend un sous-programme rural et urbain. Aussi,

dans l’ensemble des régions, des plans de développement ont été initiés ou actualisés.

Depuis 1996, date de l’entrée en vigueur des nouveaux textes de loi sur la décentralisation,

la région sert de cadre de programmation du développement économique, social et culturel.

Le plan régional de développement intégré (PRDI) est un important outil de planification

en vue d’améliorer les conditions de vie des populations (ARD, 2000). Les objectifs

fondamentaux du PRDI [PRDI, 2000] concernent la promotion de l’équité à travers les

différentes couches de la population et la lutte contre le déséquilibre interrégional en

utilisant de manière efficace les potentialités de l’espace régional. Dans la région de

Diourbel, l’élaboration de la seconde version de ce plan est le résultat d’une démarche de

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19

concertation entre divers acteurs (agriculteurs, éleveurs, collectivités locales, ONG,

organisations de populations etc.). Le premier tome du PRDI présente un bilan

diagnostique succinct de la région à partir duquel quatre enjeux majeurs sont dégagés. Les

objectifs stratégiques tirés de ces enjeux servent d’appui aux perspectives de

développement économique et social proposées dans la seconde section du document. Les

perspectives ainsi énumérées sont certes pertinentes, mais les moyens de mise en œuvre

demeurent abstraits.

Parmi les grands projets hydrauliques de l’État, on compte la construction du Canal du Baol

(rebaptisé canal Cheikh Amidou Bamba) [APRHN, 2006] destiné à l’alimentation de la

zone Centre-Ouest, la remise en eau des vallées fossiles en vue d’améliorer la disponibilité

en eau de surface pérenne et le programme de développement de la rive gauche du fleuve

Sénégal (PDRG) pour l’irrigation de 240 00 hectares de terres [Badiane et al., 2000]. Un

projet relativement similaire avait été entrepris dans les années 80-90. Il s’agissait du projet

du Canal du Cayor. Il visait à la fois la satisfaction de la demande en eau de la capitale et

des villes traversées ainsi que le développement hydro-agricole des régions de Louga,

Thiès, Diourbel et Dakar. Dans le cadre de ce projet qui a fait l’objet d’une étude technique

et financière complète, l’eau devait être transférée dans une conduite à ciel ouvert. Mais

n’ayant pas obtenu l’aval des bailleurs de fonds (notamment la Banque Mondiale), il fut

abandonné [Adams, 2000].

Dans les actions de développement menées par l’État ou certains organismes non

gouvernementaux, l’approche projet est souvent privilégiée. Cependant, elle n’a pas permis

d’articuler avec efficacité les objectifs des projets avec la politique macroéconomique. Elle

se fait souvent de façon mécanique et peu intégrée tel que le souligne le rapport sur l’état de

l’environnement au Sénégal du Ministère de l’environnement et de la protection de la

nature [CSE, 2005]. Ce même rapport informe aussi sur la faiblesse des mécanismes de

suivi et d’évaluation des programmes et celle du niveau de développement de l’approche

programme dont souffrent les exercices de mise en œuvre d’un cadre stratégique de

planification environnementale.

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20

Les organismes internationaux participent par leurs financements mais aussi par des études

et des rapports, directement ou indirectement, à la gestion du secteur de l’hydraulique au

Sénégal. Ainsi, pour pallier le déficit d’approvisionnement en eau et les nombreux

problèmes qu’il engendre, la Banque Mondiale préconise aux pays africains comme le

Sénégal, de moderniser les infrastructures, d’améliorer les méthodes de gestion, de réduire

les coûts et d’accroître l'efficacité des systèmes d'approvisionnement en eau. C’est dans

cette optique que des programmes comme le PEPAM sont appuyés par la Banque mondiale

mais aussi par la Banque Africaine de développement et d’autres organismes.

La mise en place de programmes appropriés de gestion des ressources en eau devrait

contribuer de manière décisive à la réduction de la pauvreté, à la croissance économique, à

la sécurité alimentaire et à la préservation des écosystèmes naturels de la région [ARD,

2000, Banque Mondiale, 2007]. Un programme comme le PEPAM, initié par le

gouvernement sénégalais dans le cadre des OMD, devrait permettre d’atteindre ces

objectifs. Avec ce programme, le Sénégal est devenu le premier pays Africain à disposer

d'une véritable stratégie sectorielle pour l'atteinte des OMD pour l'eau potable et

l'assainissement. Ce programme porte cependant que sur l’eau potable et l’assainissement.

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21

2. Les méthodes d’aide multicritères à la décision

2.1 Généralités

2.1.1 L’aide à la décision Le concept de processus de prise de décision qui provient, selon [Tsoukias, 2008], de

Simons relève principalement de l’activité cognitive d’un individu (décideur) confronté à

une problématique pour laquelle il n’existe pas de solution sur mesure. Quant à l’aide à la

décision, elle implique au moins 2 acteurs : le client et l’analyste.

Le processus d’aide à la décision se définit selon [Roy et Bouyssou, 1993] comme étant

‘‘l’activité de celui qui, prenant appui sur des modèles clairement explicités mais non

nécessairement complètement formalisés, aide à obtenir des éléments de réponse aux

questions que se pose un intervenant dans un processus de décision, éléments concourant à

éclairer la décision et normalement à recommander, ou simplement à favoriser, un

comportement de nature à accroître la cohérence entre l’évolution du processus d’une

part, les objectifs et le système de valeurs au service desquels cet intervenant se trouve

placé d’autre part’’. En effet, partant des connaissances du client relatives à la situation et

aux connaissances méthodologiques de l’analyste, le but est d’arriver à un consensus

cohérent.

Le modèle de préférence utilisé pour l’élaboration d’une recommandation intègre un

modèle de réflexion. Les approches d’aide à la décision diffèrent notamment par la place et

le rôle accordés au modèle de rationalité traduisant l’information de manière formelle.

[Tsoukias, 2008] dresse une liste des différentes approches. La première approche énoncée

est l’approche normative. Le modèle de rationalité est défini d’avance. Il se veut universel.

Le décideur doit s’y conformer.

La deuxième approche, dite descriptive permet de surmonter les difficultés que peuvent

rencontrer les décideurs à suivre le postulat dans l’approche précédente. Les modèles de

l’approche descriptive sont fondés sur l’observation des décideurs (ou plutôt de leurs

préférences). Ils sont indépendants de la situation du problème.

Dans l’approche prescriptive, le modèle rationnel s’élabore à l’intérieur du processus

décisionnel. Sa validité est donc limitée aux conditions locales.

Page 33: Analyse multicritère pour la priorisation des ...€¦ · BA NDEYE FATOUMATA Analyse multicritère pour la priorisation des interventions en matière d’approvisionnement en eau

22

L’approche constructive permet de construire le modèle de rationalité du décideur à partir

des réponses apportées aux questions relatives à ses préférences. Cette interaction conduit à

la formulation du problème en même temps que l’élaboration de sa solution.

C’est dans cette dernière approche que se situe la finalité de l’aide multicritère à la décision

selon Planeix (1999). On ne cherche plus à réfléchir sur la façon dont le décideur prend sa

décision mais on cherche au contraire à modéliser à la fois le problème à traiter et les

préférences du décideur [Le Bars M., 2003]

2.1.2 L’aide multicritère à la décision L’aide multicritère à la décision dont il s’agit ici, est une branche des modèles de recherche

opérationnelle qui s’occupe des problèmes de décision lorsqu’il y a un nombre important de

critères [Zeleny, 1982]. La pertinence de l’utilisation des méthodes multicritères d’aide à la

décision vient du fait que, dans la plupart des situations, lorsque les gens prennent des

décisions, ils n’ont pas un seul objectif. Au contraire, ils ont besoin de prendre en

considération un certain nombre de points de vue [Morais et Almeida, 2006] . C’est le cas,

la plupart du temps, des problèmes liés à la gestion des ressources naturelles [Takch et

Simonovic, 2002].

L’analyse multicritère constitue un cadre d’analyse du contexte décisionnel, de

structuration du processus de décision. Elle facilite l’intervention des acteurs participant à

la légitimation de la décision finale [Roy, 2005]). Ces modèles multicritères se fondent sur

plusieurs hypothèses dont les suivantes [Roy, 1992] :

- L’ensemble des possibles n’est pas défini de façon stable dès le départ; il peut varier

au cours du processus; les préférences ne sont pas définitives mais construites au cours de

la phase de conception;

- La multiplicité des critères implique la recherche de compromis, par opposition à

une solution optimale définie de façon rigide;

- Le fait que les algorithmes retenus soient suffisamment souples pour autoriser des

itérations nombreuses et peu coûteuses permet également de traiter des cas où les

informations ne sont pas toutes disponibles en même temps.

Page 34: Analyse multicritère pour la priorisation des ...€¦ · BA NDEYE FATOUMATA Analyse multicritère pour la priorisation des interventions en matière d’approvisionnement en eau

23

L’application d’une procédure d’aide multicritère à la décision suit un certain nombre

d’étapes clés. Celles-ci ont été identifiées dans plusieurs études [Joubert et al., 2003 ;

Morais et Almeida, 2006]. Il s’agit d’une procédure itérative [Lahdelma et al., 2000]

comprenant les étapes suivantes [CSIRO, 2000] :

- l’identification des acteurs ou des décideurs;

- la définition des objectifs et des critères;

- l’identification des alternatives;

- la pondération des critères;

- l’établissement d’une unité de mesure pour chaque critère;

- le choix d’une méthode d’évaluation et l’évaluation des options ou des alternatives;

- l’analyse de sensibilité

La Figure 2 présente les étapes d’un processus de prise de décision proposée par Morais et

Almeida (2006).

Évaluation des

résultats

Recommandations

Paramètres de

décision

Évaluation des

performances

Sélection de la méthode

d’aide multicritère à la

décision

Formulation des

actions potentielles Sélection des critères

Définition du

problème

Identification des

acteurs

Figure 2- Les étapes d’un processus de prise de décision (Morais et Almeida, 2006)

Page 35: Analyse multicritère pour la priorisation des ...€¦ · BA NDEYE FATOUMATA Analyse multicritère pour la priorisation des interventions en matière d’approvisionnement en eau

24

Dans le champ de l’analyse multicritère, de nombreuses méthodes d’analyse ont été

développées. À ce titre, on peut citer Analytic Hierarchy Process (Saaty, 1980), Théorie de

Multi-Attribute Utility Theory (MAUT) (Keeney and Raiffa, 1976), le Simple Multi-

Attribute Rating Technique (SMART), Preference Ranking Organization Method for

Enrichment Evaluations (PROMETHEE), Elimination et Choix Traduisant la Réalité

(ELECTRE), etc.

La figureFigure 3 adaptée de [CSIRO, 2000], présente une classification des techniques

d’analyse multicritère.

Page 36: Analyse multicritère pour la priorisation des ...€¦ · BA NDEYE FATOUMATA Analyse multicritère pour la priorisation des interventions en matière d’approvisionnement en eau

25

Les éléments en italique sont des éléments qui font appel au jugement plutôt qu’à l’analyse.

Support multi-

objectif d’aide

à la décision

Méthode de standardisation des données en des

unités communes

Méthode de la valeur espérée

Méthode naïve de conversion passant d’ordinal à

cardinal

Point fixe

Méthodes graphiques

AHP

Analyse des jugements

Méthode du compromis

Macbeth

Rangement

Évaluation

Analyse de concordance

Rangement

lexicographique

Classement linéaire

Méthode de la fréquence

Théorie Multi-Attribut

Analyse de discordance

Somme pondérée

Point Idéal

Compromise programming

Méthode de permutation

ELECTRE

Evamix

Cardinalisation de la

matrice d’évaluation

AHP

MACBETH

Méthode pour

ranger les

actions

Méthode

pour

transformer

les données

Méthode pour

pondérer les

critères

Continue

Discrète

Qualitative

Qualitative

Quantitative

Quantitative Mixte

Figure 3- Classification des techniques d’analyse multicritère.

Page 37: Analyse multicritère pour la priorisation des ...€¦ · BA NDEYE FATOUMATA Analyse multicritère pour la priorisation des interventions en matière d’approvisionnement en eau

26

2.2 L’application des méthodes multicritères à la gestion

des ressources en eau

Concernant les problèmes d’ingénieries ou de gestion liés aux ressources en eau,

l’application des méthodes d’aide multicritère à la décision remonte au début des années

soixante-dix déjà [Roy et al. 1992 ]. Connel et al. (2000) suggèrent leur utilisation pour le

développement d’une gestion convenable des ressources en eau [Rajui et al. 2000]. Bien

que, beaucoup reste encore à faire pour l’application des approches multicritères à de réels

problèmes de design et d’aménagement en ingénierie impliquant des objectifs conflictuels

comme le soulignent [Rajui et al. 2000 ; Bhattarai et Starkl, 2005]. D’autres auteurs tels

que ( Royet et al.., 1992 ; Duckstein et al., 1994 ; Abu-Taleb M. F et Mareschal B, 1995

Bender et Simonovic, 2000 [cités par Rajui et al. 2000]; Hämäläinen R. P., et al., 2001 ;

Hedia T., 2004) ont aussi cherché à promouvoir leur utilisation dans ce domaine.

Parmi les différentes méthodes employées, on trouve les méthodes de surclassement de

synthèse qui constituent une des approches les plus prolifiques en aide multicritère à la

décision [Martel et Matarazzo, 2005]. L’idée est de construire des relations binaires en

comparant par pair toutes les actions potentielles pour ensuite les exploiter de sorte à

obtenir une recommandation finale. Dans cette catégorie, les méthodes de la famille

ELECTRE et PROMETHEE sont bien connues et ont été appliquées dans divers problèmes

concrets [Martel et Matarazzo, 2005] notamment en gestion des ressources en eau [Raju et

al. 2000]. Ainsi, (Roy et al. 1992 ) proposent une méthodologie pour la ‘‘priorisation’’ de

l’allocation des ressources en eau dans une région de Pologne en utilisant la méthode de

surclassement. ELECTRE III.

D’autres méthodes de la famille ELECTRE ont été utilisées (ELECTRE 1, Tri, 3 et 4) dans

la gestion des ressources en eau pour l’allocation de ressource ou de projet. (Morais et

Almeida, 2006, Raju et al. 2000) [Raju et al. 2000] ont aussi utilisé la méthode

PROMETHEE dans une étude de cas sur la gestion des ressources en eau en Espagne. Elle

a longtemps été une alternative à ELECTRE III. Certains considèrent d’ailleurs qu’elle en

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27

est une simplification. Elle poursuit en effet le même but (le rangement), avec des moyens

analogues (le surclassement), tout en étant beaucoup moins complexe [Shärlig A., 1996].

D’autres familles de méthodes ont aussi été employées dans le domaine de la gestion des

ressources en eau. Il s’agit notamment des méthodes de critère unique de synthèse. C’est

une classe de méthodes fondées sur l’agrégation complète des critères en un critère unique.

C’est le cas de AHP [Bhattarai et Starkl, 2005], et de MACBETH [Bana e Costa et al.,

2004]. Cette dernière méthode, utilisée dans le cadre du présent mémoire est présentée dans

la section suivante.

2.3 La méthode MACBETH

MACBETH (Measuring Attractiveness by Categorical Based Evaluation Technique),

comme son nom l’indique, est une approche pour mesurer l’attractivité par une technique

d’évaluation basée sur des catégories [Bana e Costa et Vansnik, 1999]. Il s’agit d’un

processus interactif qui permet, à partir d’un ensemble fini d’éléments, de construire une

échelle intervalle permettant de quantifier l’attractivité de ces éléments selon l’opinion d’un

évaluateur. Cette méthode s’inscrit dans la famille des systèmes d’aide à la décision du type

critère unique de synthèse.

Dans la procédure MACBETH, afin d’établir une échelle cardinale de valeur pour

l’évaluation d’actions ou la pondération de critères, on fait appel au jugement qualitatif de

l’évaluateur. Comme le souligne Bana e Costa et al. (2004), ceci a pour avantage d’éviter

les difficultés potentielles qui peuvent subvenir lorsque l’on force l’évaluateur à produire

une estimation numérique directe des poids ou de la valeur des actions.

L’approche et son logiciel d’application ont été utilisés dans des problèmes décisionnels

divers allant de la sélection d’un portfolio d’actions [Bana e Costa et Soares, 2004] au

choix d’une future carrière pour un individu [Bana e Costa et Chagas, 2004]. Dans le

domaine de la gestion de l’eau, pour l’évaluation multicritère des mesures de contrôle

Page 39: Analyse multicritère pour la priorisation des ...€¦ · BA NDEYE FATOUMATA Analyse multicritère pour la priorisation des interventions en matière d’approvisionnement en eau

28

d’inondation dans le cas de la rivière de Livramento au Portugal, l’approche a été appliquée

pour construire un modèle d’évaluation quantitative basé sur les jugements de valeur

qualitatifs formulés par un groupe d’experts. [Bana e Costa et al. 2004].

L’objectif de la méthode MACBETH est de faciliter la construction d’une échelle cardinale

pour représenter les jugements de valeur d’un évaluateur E sur les éléments ai d’un

ensemble fini A d’actions potentielles sur lesquelles il doit se prononcer. Selon un

processus similaire, une échelle des poids des critères peut être générée. MACBETH offre

aussi des outils d’analyse de sensibilité et de robustesse. Les sections suivantes décrivent

les étapes de ce processus.

Mode de questionnement

La procédure de questionnement dans la méthode MACBETH consiste à demander à E

d’exprimer son jugement absolu [Bana e Costa et Vansnick, 1995] de différence

d’attractivité entre les éléments de A en les comparant deux à deux. Cette notion de

jugement absolu a été utilisée par Saaty (1977, 1980) dans sa méthode AHP (Analytical

Hierarchy Processus). Pour exprimer son jugement de valeur, E choisit parmi les six

catégories sémantiques suivantes proposées par MACBETH : C1 : très faible, C2 : faible,

C3 : modérée, C4 : forte, C5 : très forte, C6 : extrême. D’un point de vue mathématique, ces

catégories sont des relations binaires asymétriques. La catégorie C0 ( « no difference ») sert

à exprimer l’indifférence entre deux éléments.

En répondant aux questions, E complète au fur et à mesure la matrice d’évaluation ; la

dernière colonne étant celle de l’élément le moins attractif de A. L’élément le plus attractif

est sur la première ligne de la matrice [Bana e Costa et Chagas, 2004]. Ainsi, il est

nécessaire de remplir seulement la partie supérieure de la matrice. Bana e Costa et Chagas,

2004 font remarquer qu’il n’est pas indispensable de comparer l’ensemble des paires

d’éléments pour obtenir une échelle numérique à l’aide du logiciel. Cependant, plus il y a

d’informations disponibles, plus l’échelle sera précise. Dans l’exemple de la Figure 4

(accompagnant le logiciel, M-MACBETH) qui illustre l’utilisation de la méthode pour le

choix d’une imprimante, selon un critère de qualité d’impression, l’attractivité du niveau de

Page 40: Analyse multicritère pour la priorisation des ...€¦ · BA NDEYE FATOUMATA Analyse multicritère pour la priorisation des interventions en matière d’approvisionnement en eau

29

qualité ‘‘Très bonne’’ par rapport au niveau ‘‘Bonne’’ est faible. Elle est modérée par

rapport au niveau ‘‘Acceptable’’, très forte, par rapport au niveau ‘‘Neutre’’ et extrême par

rapport au niveau ‘‘Faible’’. Ainsi, le niveau ‘‘Très bonne’’ est préféré au niveau ‘‘Bonne’’

qui est préféré au niveau ‘‘Acceptable’’ qui est préféré au niveau ‘‘Neutre’’ ; le niveau

‘‘Faible’’ étant le moins attractif.

Figure 4-Exemple de matrice des jugements d’attractivité du logiciel M-MACBETH.

Dérivation d’une échelle numérique

Une fois la matrice des jugements générée, le logiciel teste automatiquement la consistance

des jugements émis par E. Si elle est vérifiée, le système propose une échelle de valeurs

numériques traduisant ces jugements. Un nombre réel v(ai) est associé à chaque élément ai

de A en respectant les deux règles de mesure suivantes [Bana e Costa et Vansnick. 1999] :

(1) , : ( ) ( ) est plus attractif que x y A v x v y x y (Condition ordinale)

(2)

'

, ' 1,2,3,4,5,6 , , , ,

avec , et , :

' 1 ( ) ( ) ( ) ( )

k k

k k x y w z A

x y C w z C

k k v x v y v w v z

(Condition sémantique)

Obtention d’une échelle intervalle

L’échelle numérique proposée par MACBETH est révisée et validée par E afin qu’elle

corresponde le plus exactement possible à ses jugements de valeurs. Pour chaque valeur

proposée, il est possible de visualiser l’intervalle à l’intérieur de laquelle, il est permis de la

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30

faire varier sans violer les contraintes imposées par les règles de mesures [Bana e Costa et

al. 1999] précédemment citées. En validant les valeurs, E valide la cardinalité de l’échelle

Bana e Costa et al, 2004].

Gestion de l’inconsistance

Lorsque qu’aucune fonction de valeur ne peut être associée à la matrice de jugement de E,

on parle d’incompatibilité. Bana e Costa et Vansnick [Bana e Costa et Vansnick. 1999]

listent les quatre cas d’incohérences généralement rencontrés entraînant l’incompatibilité.

Ils concernent l’incohérence entre le jugement comparatif et le jugement sémantique :

1) Pour trois éléments x, y, z tel que x et y sont tous deux plus attractifs que z, x

est plus attractif que y et la différence d’attractivité entre y et z est plus

importante que celle entre x et z ;

2) Pour trois éléments x, y, z tel que x est plus attractif que y et z, y est plus

attractif que z et la différence d’attractivité entre x et y est plus grande que

celle entre x et z

3) Pour trois éléments x, y, z tel que x et y sont tous deux plus attractifs que z, il

n’y a pas de différence d’attractivité entre x et y et la différence d’attractivité

entre x et z est différente de celle entre y et z ;

4) Pour trois éléments x, y, z tel que z est plus attractif que x et y, il n’y a pas de

différence d’attractivité entre x et y, et la différence d’attractivité entre z et x

est différente de celle entre z et y.

L’incompatibilité peut aussi être causée par une inconsistance entre les jugements

sémantiques. L’exemple de Bana e Costa et Vansnick (1999) qui est présenté au

tableauTableau 1 et à la figureFigure 5 illustre cela.

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31

Tableau 2- Exemple de matrice de jugements inconsistants

A B C D E F

A No very weak weak Strong very strong Extreme

B No very strong Strong very strong Extreme

C No Weak Moderate very strong

D No Weak Strong

E No Moderate

F no

weak

moderate very weak

strong

B

C

D

E

Figure 5- Schéma d’une situation d’inconsistance sémantique

Ainsi, on a v(B)-v(D) > v(C)-v(E) et v(D)-v(E) > v(B)-v(E) ce qui même par sommation à

v(B)-v(E) > v(B)-v(E). La règle 2 (condition sémantique) n’est pas respectée.

Dans ces cas, le logiciel MACBETH offre une alternative. Il met en exergue les évaluations

posant problème et suggère de changer certains jugements [Bana e Costa et al. 1999]. Il

peut y arriver que les 2 règles de mesure ne puissent pas être respectées simultanément.

Dans ce cas, la première condition (condition ordinale) est toujours respectée et

MACBETH essaye de minimiser l’erreur sur la seconde condition (par programmation

linéaire).

Obtention des constantes d’échelle

Lorsque l’on cherche à comparer des éléments ai de A selon différentes dimensions, pour

chacune de ces dimensions, E évalue la différence d’attractivité entre les éléments de A. Il

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32

complète ainsi une matrice des jugements par dimensions. La procédure est similaire pour

la pondération des sous-critères (ou sous-dimensions) d’un critère global.

La valeur finale est obtenue par une simple addition qui procède du bas vers le sommet de

l’arbre représentant les liens entre les dimensions globales et leurs sous-dimensions. Les

dimensions globales sont au sommet de l’arbre. On admet que la valeur de chaque

dimension contribue indépendamment à l’agrégation [Bana e costa et al, 2004 et Bana e

Costa et al. 1999].

Ainsi :

1

1

( ) . ( )

1 0 ( 1,..., )

et

(le plus attractif) 100, (le moins attractif) 0

dC

dC

n

C i j j i

j

n

j j dC

j

j j

V a w v a

avec

w w j n

v v

Où :

VC est la valeur de l’élément ai sur la dimension globale C ;

ai est un élément de l’ensemble A sur lequel E doit se prononcer ;

ndC est le nombre de sous-dimensions composant C;

wj est le poids attribué à la sous-dimension j ;

vj(ai) est la valeur de ai sur la sous dimension j.

Page 44: Analyse multicritère pour la priorisation des ...€¦ · BA NDEYE FATOUMATA Analyse multicritère pour la priorisation des interventions en matière d’approvisionnement en eau

33

Article

Page 45: Analyse multicritère pour la priorisation des ...€¦ · BA NDEYE FATOUMATA Analyse multicritère pour la priorisation des interventions en matière d’approvisionnement en eau

34

Analyse multicritère pour la priorisation des interventions en matière

d’approvisionnement en eau en milieu rural au Sénégal : cas de la région

de Diourbel.

Multi-criteria analysis for the prioritization of water supply intevention

projects in a rural area in Senegal: the case of Diourbel region.

Fatoumata Ba, Christian Bouchard, Irène Abi-Zeid

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35

Résumé

De nombreux programmes et projets visant l’accès aux ressources en eau sont initiés au

Sénégal pour satisfaire une demande en eau qui se fait de plus en plus pressante,

notamment en milieu rural. L’insuffisance des moyens financiers impose que ces projets

soient échelonnés dans le temps. En amont des études de faisabilité technique et

économique, il est nécessaire d’établir des priorités d’intervention. Cette étude présente une

analyse multicritère d’aide à la décision pour prioriser les besoins d’intervention en matière

d’approvisionnement en eau en milieu rural au Sénégal. Le cas de la région de Diourbel est

étudié. Après avoir identifié les objectifs relatifs à l’approvisionnement en eau au niveau de

la région, six critères quantitatifs et qualitatifs permettant de mesurer les degrés d’atteinte

de ces objectifs sont définis. Ces critères permettent d’évaluer la priorité en termes de

projets de développement éventuels. Il s’agit de critères portant sur la qualité des eaux

disponible, la quantité d’eau disponible pour les besoins domestiques, la distance d’accès

aux points d’eau, la disponibilité de l’eau pour l’agriculture et enfin, l’acceptabilité des

coûts de l’eau ainsi que le potentiel de développement. La démarche a abouti au rangement

des huit arrondissements de la région de Diourbel par ordre de priorité d’intervention. Les

critères ont été pondérés par des acteurs de la gestion des ressources en eau au Sénégal.

Une analyse de sensibilité permet de juger de l’effet des différentes pondérations sur le

classement des priorités obtenu. L’analyse du processus dans son ensemble permet de

mettre en exergue les difficultés liées à l’utilisation d’une telle démarche dans le contexte

sénégalais tout en montrant les avantages que l’on peut en tirer.

Mots clés : approvisionnement en eau, gestion, priorité, approche multicritère, milieu rural,

Sénégal.

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36

Abstract

Many programs and projects for water resources management are initiated in Senegal to

satisfy an increasing demand for water, especially in rural areas. The lack of sufficient

funding requires that these projects be spread over time. Therefore, prior to any technical or

economic feasibility study, it is necessary to identify the higher priority areas. This study

presents a multicriteria analysis for ranking rural subareas in Senegal, in particular in the

region of Diourbel, in terms of priorities of water supply needs. After having identified the

objectives related to water supply on the regional scale, six quantitative and qualitative

priority criteria were defined. These criteria pertain to the available water quality, the

available quantity of water for domestic needs, the distance to water distribution points, the

availability of water for agriculture, the acceptability of water costs and the development

potential of a rural subarea. Indicators are proposed for each criterion based on the data

available at the time of the study. Criteria weights were obtained from various water

resource management stakeholders in Senegal. Our multicriteria analysis process lead to the

ranking of eight districts of the Diourbel region in terms of intervention priority. A

sensitivity analysis enabled us to evaluate the effect of the criteria weights on the districts

ranking. Our experience with this project has brought forward the difficulties associated

with conducting a multicriteria analysis in the Senegalese context, while emphasizing

promising application possibilities.

Keywords: water supply, priority, multicriteria analysis, rural area, Senegal.

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37

1. Introduction

Dans les pays d’Afrique subsaharienne où se conjuguent croissance démographique rapide,

sécheresse et manque de moyens financiers pour l’exploitation des ressources hydriques,

l’accès à l’eau est un enjeu majeur et un défi considérable. Dans le cadre des Objectifs du

Millénaire pour le Développement de l’Organisation des Nations Unies [PNUD, 2001] et

de ses propres objectifs de développement dans le secteur de l’eau, le Sénégal développe

des programmes favorisant l’assainissement des eaux usées et l’accès à l’eau pour la

population. Cependant, seuls 67% de la population en milieu rural au Sénégal disposent

d’un accès raisonnable à l’eau contre 87% en milieu urbain [MAHS, 2004]. Les causes

majeures d’une telle disparité résident dans l’inégale répartition des ressources hydriques et

surtout dans le manque de moyens financiers. Ces limitations physiques et économiques

obligent à échelonner les projets d’adduction et de traitement de l’eau.

Il est dès lors pertinent de développer des stratégies de gestion des ressources en eau, pour

répondre aux besoins les plus prioritaires et les plus pressants en termes

d’approvisionnement en eau. Les instruments de calculs économiques classiques

(rentabilité, coûts-bénéfices etc.) s’avèrent limités pour une telle gestion. En effet, toutes les

variables du problème ne peuvent être ramenées à une échelle purement monétaire

[Hajkowics et al., 2000]. Les traditions socioculturelles, la motivation des intervenants, la

préservation de l’environnement et le souci de répondre aux attentes des populations sont

autant de facteurs d’importance qui sont difficiles voire impossibles à quantifier

financièrement.

Nonobstant ces difficultés, le Sénégal met en place des outils pour favoriser un cadre de

gestion efficace. À cet effet, une approche de gestion intégrée des ressources en eau a été

initiée en 2004 par le Ministère de l'Agriculture et de l'Hydraulique du Sénégal (MAHS) et

est pilotée par la Direction de la Gestion et de la Planification des Ressources en Eau

(DGPRE) [BAD, 2005]. Néanmoins, des disparités marquantes demeurent tant au niveau

local que régional [PNUD, 2001].

L’objectif du travail de recherche présenté ici est de contribuer à surmonter ces difficultés.

Il s’agit de proposer une démarche structurée d’aide à la décision pour prioriser les

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38

interventions en matière d’approvisionnement en eau en milieu rural au Sénégal. Pour ce

faire, nous proposons une analyse multicritère pour ranger des unités territoriales par ordre

de priorité d’intervention. Le présent projet ne porte pas sur l’identification ou le choix de

projets précis d’adduction ou de traitement d’eau ni sur leur financement. L’étude se situe

en amont de ces derniers. Cet article présente les résultats et les différentes étapes de

l’analyse multicritère pour la priorisation des interventions en matière d’approvisionnement

en eau dans la région de Diourbel.

2. Contexte de recherche

2.1 Présentation de la région de Diourbel

La région de Diourbel est principalement rurale et s’étend sur une superficie de 4769 km²

subdivisée en trois départements, huit arrondissements (Baba-Garage, Lambaye, Ngoye,

Ndoulo, Ndindy, Ndame, Kael et Taïf) et 33 communautés rurales (Figure 6). Elle abrite

une population de 929 414 habitants [MAHS, 2005]. Cette région qui a un climat soudano-

sahélien chaud et sec ne reçoit, en moyenne, que 400 à 600 mm pour 30 à 40 jours de pluie

avec une irrégularité spatio-temporelle très marquée [ARD-Diourbel, 2000]. Les

températures oscillent entre 27 et 30°C avec un maximum entre avril et juin. La sécheresse

dans les réseaux hydrographiques de surface du Car-Car (au nord) et du Sine (au sud-est)

illustre la dégradation des conditions climatiques au cours des dernières décennies [Badiane

et al. 2000].

Page 50: Analyse multicritère pour la priorisation des ...€¦ · BA NDEYE FATOUMATA Analyse multicritère pour la priorisation des interventions en matière d’approvisionnement en eau

39

Dakar

Océan Atlantique Sénégal

Région de Diourbel

Baba-Garage Lambaye

Ngoye

Ndindy

Ndoulo

Ndame

Kael

Taif

Océan Atlantique

20km

Dakar

Océan Atlantique Sénégal

Région de Diourbel

Baba-Garage Lambaye

Ngoye

Ndindy

Ndoulo

Ndame

Kael

Taif

Océan Atlantique

20km

Figure 6- Carte de la région de Diourbel

L’approvisionnement en eau dans la région se fait essentiellement à partir de nappes d’eau

souterraine avec une forte exploitation de la nappe du Maestrichtien. Bien que le potentiel

hydrique de la région soit considéré comme important, la quantité disponible pour les

populations de même que la qualité de ces eaux sont insatisfaisantes actuellement [MEFS,

2007]. En effet, les points d’approvisionnement sont disparates. Les équipements sont à

certains endroits insuffisants ou vétustes. Par ailleurs, les teneurs en fluorures sont au

dessus des normes sanitaires dans plusieurs communautés rurales de la région. Les

problèmes d’assainissement tel que la proximité des fosses septiques avec le réseau d’eau

potable, l’absence de système d’évacuation adéquat des ordures et des eaux usées, la

pollution de la nappe superficielle, etc. se répercutent sur la qualité des eaux de

consommation.

Page 51: Analyse multicritère pour la priorisation des ...€¦ · BA NDEYE FATOUMATA Analyse multicritère pour la priorisation des interventions en matière d’approvisionnement en eau

40

Située dans le bassin arachidier, la région de Diourbel a pour principales activités

l’agriculture et l’élevage. Les difficultés d’ordre climatique, l’appauvrissement des terres et

le manque d’infrastructures d’adduction d’eau constituent des obstacles majeurs au

développement de ces activités. Diourbel, jadis zone maraîchère, souffre aujourd’hui de la

sécheresse. Les agriculteurs ne peuvent compter que sur les eaux de pluies qui ne tombent

que durant les trois mois d’hivernage et de manière irrégulière. Pour le reste, l’eau, souvent

trop salée, est impropre à l’agriculture. À cause du manque de pâturages (les terres

agricoles sont rares et très convoitées) et du manque d’eau, le bétail transhume tout au long

de l’année entre le Sud et le Sud-est, séjournant même pendant une certaine période hors de

la région. Une urbanisation croissante et une évolution démographique rapide [PNUD,

2001] accroissent ces difficultés et augmentent la pression sur les ressources hydriques

(voir Annexe A pour une présentation plus détaillée de la région).

2. 2 L’approche méthodologique

Les décisions en matière de planification de projets d’infrastructures de production et de

distribution d’eau relèvent souvent d’une analyse complexe ayant des objectifs conflictuels

à intégrer (objectifs sociopolitiques, environnementaux et économiques). Elles ont un

caractère multidimensionnel et intègrent un nombre d’intervenants important avec des

systèmes de valeurs variés. Les approches purement objectives à la recherche d’une

solution unique et optimale s’avèrent dès lors irréalistes [Bana e Costa et al., 2004a]. Dans

cette perspective, les approches multicritères constituent un support d’analyse adapté à la

complexité d’une telle décision. Elles permettent de faciliter le processus de décision en le

rendant plus explicite, rationnel et efficient. D’ailleurs, plusieurs études dont, (Abu-Taleb et

Mareschal, 1995 ; Raju et al. 2000 ; Hämäläinen et al., 2001 ; Tkach et Somonovic 2002 ;

Hedia, 2004) suggèrent l’utilisation de telles approches pour le développement d’une

gestion efficace des ressources hydriques.

Dans ce projet, l’analyse multicritère s’est effectuée en trois phases principales (voir Figure

7): la structuration du processus, l’évaluation des unités territoriales puis l’analyse des

Page 52: Analyse multicritère pour la priorisation des ...€¦ · BA NDEYE FATOUMATA Analyse multicritère pour la priorisation des interventions en matière d’approvisionnement en eau

41

résultats ayant mené à un rangement de ces unités. La structuration du processus a débuté

par la définition du contexte décisionnel avec l’identification des acteurs du processus. Les

objectifs ont été définis ainsi que les critères permettant de mesurer le degré d’atteinte de

ces objectifs par chacune des unités territoriales. Durant la seconde phase, les méthodes et

les paramètres permettant de rendre opérationnels les critères ont été élaborés. Les unités

territoriales ont été évaluées sur chaque critère et l’agrégation a été réalisée à l’aide du

logiciel M-MACBETH (Measuring of Attractiveness by Categorical Based Evaluation

Technique ; [Bana e Costa et Vansnick, 1999]. Enfin, les résultats et la démarche ont été

analysés.

• Définition du contexte décisionnel

• Identification des objectifs

• Définitions des critèresStructuration du processus

• Indicateurs de mesure

• Évaluations

• Agrégations des évaluationsÉvaluation des unités

territoriales

• Analyse des résultats

• Analyse de la démarche

Analyse

• Définition du contexte décisionnel

• Identification des objectifs

• Définitions des critèresStructuration du processus

• Indicateurs de mesure

• Évaluations

• Agrégations des évaluationsÉvaluation des unités

territoriales

• Analyse des résultats

• Analyse de la démarche

Analyse

Figure 7 - Schéma du processus d’élaboration de la démarche

Page 53: Analyse multicritère pour la priorisation des ...€¦ · BA NDEYE FATOUMATA Analyse multicritère pour la priorisation des interventions en matière d’approvisionnement en eau

42

3. Structuration du processus

3.1 Identification des acteurs et des décideurs

Le secteur de l’eau au Sénégal se distingue par un très grand nombre et une forte diversité

d’acteurs, par des réformes organisationnelles fréquentes et par la séparation qui est faite

entre les zones rurales et urbaines. Cinq grands groupes d’intervenants ayant des influences

plus ou moins grandes dans la gestion de l’eau peuvent être identifiés. Les collectivités

locales assument une responsabilité grandissante dans la maîtrise d’ouvrage local et la

planification de projets de petite et moyenne envergure (réhabilitation de puits modernes, la

promotion des systèmes autonomes individuels, etc.). Au niveau rural, les populations sont

des acteurs significatifs au sein des projets d’adduction d’eau. Elles ont un droit de regard

sur les choix et priorités d'investissements à travers le processus participatif d'élaboration

des plans locaux. Mais dans les faits, leur participation est pour l’instant limitée. Le secteur

privé et la société civile (bureaux d’étude, bailleurs de fond et banques) sont aussi

fortement impliqués dans la gestion et la distribution des ressources en eau. En fait, les

bailleurs de fonds internationaux sont des intervenants majeurs. Les organismes non

gouvernementaux constituent des promoteurs importants de projets en hydraulique rurale

mais c’est au niveau des services techniques de l’État que les projets sont validés [Hane,

2006]. L'État est le responsable de l’atteinte des objectifs de desserte en eau au niveau

national. Il veille à la préservation, à la protection des ressources en eau et de

l'environnement ainsi qu’à la pérennité de l'approvisionnement en eau. Il assume aussi la

maîtrise d'ouvrage de grands projets hydrauliques. L’État, par l’entremise de ses organes

(ministères, directions et agences), est donc le décideur ultime en matière d’allocation des

ressources en eau.

L’importance du nombre de parties prenantes rendant presque impossible la participation

de tous, même à différents niveaux d’implication, nous avons dû choisir des représentants

de ces parties prenantes. Les organismes qui ont été sollicités à divers stades de l’étude sont

mentionnés dans les sections 3.3, 3.4 et 4.

Page 54: Analyse multicritère pour la priorisation des ...€¦ · BA NDEYE FATOUMATA Analyse multicritère pour la priorisation des interventions en matière d’approvisionnement en eau

43

3. 2 Choix des unités territoriales

Dans la terminologie de l’aide à la décision, les éléments sur lesquels les décideurs doivent

se prononcer sont nommés options. Dans le cas présent il s’agit d’arrondissements qui sont

des unités territoriales administratives (voir les 8 arrondissements à la figureFigure 6). Ce

choix, plutôt que celui d’unités physiques hydrographiques, s’explique par le fait que l’eau

vient essentiellement de grandes nappes souterraines qui couvrent une bonne partie de la

région à l’étude. L’échelle de l’arrondissement a été choisie de sorte à correspondre à la

plus petite échelle à laquelle pour les informations sont significatives et exploitables, et à

concorder le plus possible à une représentation mentale que se font les intervenants de leur

territoire. L’arrondissement, lequel est la plus petite unité territoriale pour laquelle les

informations sont les plus complètes, correspond également à un découpage administratif

déjà établi. Les décisions en matière de développement (en dehors des projets individuels)

se prennent d’ailleurs, souvent, en suivant le découpage administratif du territoire. Parmi

les huit arrondissements que compte Diourbel, celui de Ndame abrite une communauté

rurale aux caractéristiques particulières. Il s’agit de la communauté rurale de Touba

Mosquée considérée comme une communauté rurale mais qui est en fait une ville de plus

de 400 000 habitants. Cette ville a donc été exclue de l’analyse.

3.3 Identification des objectifs et formulation des critères

Au niveau national, le Document de stratégie de réduction de la pauvreté sert de référence

à l’élaboration des plans sectoriels de développement (dont celui des ressources en eau) et

de programme d’investissement [MEFS, 2003]. Le Code de l’eau et le Code de

l’Environnement [République du Sénégal, 1981 et 1983] sont également deux documents

de réglementation concernant les ressources hydriques. Les priorités d’allocation des

ressources en eau selon l’usage y sont précisées. À partir des entrevues avec des

intervenants du secteur de l’hydraulique au Sénégal et de l’ensemble des documents cités

ci-dessus, nous avons identifié les objectifs d’un approvisionnement en eau qui visent à

améliorer les conditions de vie des populations rurales. Ces objectifs sont présentés à la

figureFigure 8. Nous avons ensuite élaboré des critères pour mesure les degrés d’atteintes

Page 55: Analyse multicritère pour la priorisation des ...€¦ · BA NDEYE FATOUMATA Analyse multicritère pour la priorisation des interventions en matière d’approvisionnement en eau

44

de ces objectifs par les différents arrondissements. Les évaluations des arrondissements sur

ces critères nous permettent d’arriver à un rangement de ces arrondissements en ordre de

priorité pour d’éventuels projets de développement de ressources hydriques :

Critère 1 : Qualité des eaux souterraines ;

Critère 2 : Acceptabilité des coûts de l’allocation ;

Critère 3 : Satisfaction des besoins domestiques en eau ;

Critère 4 : Accessibilité au point d’eau ;

Critère 5 : Satisfaction des besoins en eau pour la production agricole ;

Critère 6 : Potentiel de développement.

Améliorer l’approvisionne-ment en eau des

populations rurales

Préserver l’environnement

Réduire la pauvreté

Préserver la santé et le bien être des populations rurales

Développer les activités génératrices de revenu

Exploiter le potentiel économique

Tendre vers l’autosuffisance alimentaire

Réduire les maladies d’origine hydrique

Augmenter l’accessibilité à l’eau

Favoriser le potentiel de développement

Potentiel de développement

Favoriser l’élevage

Favoriser l’agriculture

Satisfaction du besoin en eau

Assurer une bonne qualité d’eau

Qualité des eaux souterraines

Garantir un accès à une distance ‘‘raisonnable’’

Distance parcourue pour s’approvisionner en eau

Assurer la pérennité de l’approvisionnement par une gestion durable des infrastructures et limiter le gaspillage

Acceptabilité des coûts de l’allocation

Assurer une quantitésuffisante d’eau pour l’hygiène et les autres usages domestiques

Satisfaction des besoins domestiques en eau

Objectifs CritèresIndicateurs de mesure

Évaluation subjective par un responsable régional

Indicateur simplifiéde satisfaction de la demande en eau d’irrigation pour une plante de référence

Indicateur qualitatif global basé sur les teneurs en fluorures, nitrates et résidus secs

Proportion de la population pour laquelle la distance est > 1km

Résultats d’un sondage auprès de présidents de communautés rurales

Pourcentage de satisfaction par rapport à l’objectif moyen terme du PEPAM

Améliorer l’approvisionne-ment en eau des

populations rurales

Préserver l’environnement

Réduire la pauvreté

Préserver la santé et le bien être des populations rurales

Développer les activités génératrices de revenu

Exploiter le potentiel économique

Tendre vers l’autosuffisance alimentaire

Réduire les maladies d’origine hydrique

Augmenter l’accessibilité à l’eau

Favoriser le potentiel de développement

Potentiel de développement

Favoriser l’élevage

Favoriser l’agriculture

Satisfaction du besoin en eau

Assurer une bonne qualité d’eau

Qualité des eaux souterraines

Garantir un accès à une distance ‘‘raisonnable’’

Distance parcourue pour s’approvisionner en eau

Assurer la pérennité de l’approvisionnement par une gestion durable des infrastructures et limiter le gaspillage

Acceptabilité des coûts de l’allocation

Assurer une quantitésuffisante d’eau pour l’hygiène et les autres usages domestiques

Satisfaction des besoins domestiques en eau

Objectifs CritèresIndicateurs de mesure

Évaluation subjective par un responsable régional

Indicateur simplifiéde satisfaction de la demande en eau d’irrigation pour une plante de référence

Indicateur qualitatif global basé sur les teneurs en fluorures, nitrates et résidus secs

Proportion de la population pour laquelle la distance est > 1km

Résultats d’un sondage auprès de présidents de communautés rurales

Pourcentage de satisfaction par rapport à l’objectif moyen terme du PEPAM

Figure 8 - Arbre des objectifs, critères et indicateurs de mesure

Les critères 2 et 6 semblent moins directement liés à la problématique de besoins

d’approvisionnement en eau. Le critère 2 est relatif à l’acceptabilité et subséquemment à la

Page 56: Analyse multicritère pour la priorisation des ...€¦ · BA NDEYE FATOUMATA Analyse multicritère pour la priorisation des interventions en matière d’approvisionnement en eau

45

faisabilité économique des projets éventuels d’adduction d’eau. La tarification est

également un moyen de gestion de la demande. Par la tarification, on limite le gaspillage

des ressources. En outre, au-delà des préoccupations sanitaires, l’eau, dans ses diverses

utilisations, est un facteur de réduction de la pauvreté et un vecteur de développement

considérable. La prise en compte du critère potentiel de développement (critère 6) est liée à

cet objectif. Le choix de ce critère vient aussi pallier la faiblesse d’une démarche

essentiellement basée sur l’état actuel des choses. En matière de planification, l’aspect

projection est important et c’est ce qu’apporte ce critère.

Tous les critères ont été validés par 7 représentants de différents ministères (Agriculture et

hydraulique; Environnement et protection de la nature; Prévention, hygiène publique et

assainissement; Réseau hydrographique national), par 1 représentant de l’Agence Régionale

du Développement rural de Diourbel (ADR-Diourbel), par 1 représentant de l’Agence

Régionale de Développement de Diourbel (DRDR-Diourbel) et par 2 représentants de la

Société de Distribution d’Eau (SDE) et de la Société Nationale des Eaux du Sénégal

(SONES). À noter que, dans un premier temps, un critère sur la satisfaction des besoins en

eau du cheptel avait été retenu. Cependant, ce critère n’a pu être gardé faute de données

suffisantes pour faire les évaluations des arrondissements.

3.4 Évaluations des arrondissements

Afin d’évaluer les arrondissements sur les différents critères, il a fallu élaborer des

indicateurs de mesure. Deux orientations s’offraient à nous dans l’élaboration des

indicateurs de mesure : la première étant de prioriser les populations les plus nécessiteuses

c’est-à-dire celles pour lesquelles les lacunes sont les plus grandes par rapport à leurs

besoins; la seconde étant de réduire globalement le plus possible les lacunes quitte à

favoriser des arrondissements plus populeux où les lacunes sont relativement plus faibles

mais qui peuvent représenter en absolu des déficits importants. En se basant sur les

documents d’élaboration des plans sectoriels de développement et des programmes

d’investissement pour le Sénégal [MEFS, 2003 ; République du Sénégal, 2005], la première

orientation a été choisie en visant une réduction des inégalités entre arrondissements, c’est-

à-dire en utilisant des indicateurs relatifs plutôt que des indicateurs absolus. À noter que les

indicateurs développés pour l’évaluation des arrondissements sur la base des critères ont été

Page 57: Analyse multicritère pour la priorisation des ...€¦ · BA NDEYE FATOUMATA Analyse multicritère pour la priorisation des interventions en matière d’approvisionnement en eau

46

validés par des représentants des organismes suivants : SDE, PEPAM3, DGPRE, ARD-

Diourbel, DRDR-Diourbel, Collectivité de Diourbel.

Critère 1 - Qualité des eaux souterraines.

Les populations de la région de Diourbel s’approvisionnent à partir de trois types de nappe

d’eau souterraine, et ce, en proportion variable (les gammes de profondeur de pompage

sont indiquées entre parenthèses): Éocène (40 à 95m), Paléocène (105 à 280m) et

Maestrichtien (215 à 365m). La qualité de ces nappes varie dans la région. Il a donc fallu

évaluer la qualité globale des eaux souterraines captées dans un arrondissement donné.

Globalement, la qualité d’une eau dépend de paramètres physico-chimiques et de

paramètres microbiologiques. Dans la présente étude, cette évaluation se limite aux

paramètres physico-chimiques car il n’a pas été possible d’obtenir de donnée permettant de

distinguer les eaux pompées du point de vue de leur qualité microbiologique (voir la

description des infrastructures de captage dans la section portant sur le critère 3). Les trois

paramètres physico-chimiques considérés sont ceux qui posent le plus de problème au

niveau de Diourbel et pour lesquels l’information était disponible, à savoir les résidus secs

(cela est très proche des solides totaux dissous et de la teneur en sels totale), les nitrates et

les fluorures.

La qualité physico-chimique globale de l’eau captée dans un arrondissement a été évaluée

en plusieurs étapes. Dans un premier temps, les informations présentes dans les rapports de

(Badiane et al.2000) et de (l’ARD-Diourbel 2000), les données du PEPAM (2006) et celles

de la base CHRONO de la DGPRE (2008) ont été compilées. Cela a permis d’estimer les

teneurs en résidus secs de chaque nappe dans chaque arrondissement. Pour les nitrates, les

nappes plus profondes (Paléocène et Maestrichtien) ont été considérées comme non

contaminées puisque la contamination de surface, essentiellement d’origine agricole,

n’atteint pas a priori ces nappes. Cela a été confirmé par la compilation des données

disponibles qui montre que la concentration en nitrates chute brutalement quand l’eau

souterraine est captée à plus de 70m. Dans le cas des fluorures, la contamination est, a

3 PEPAM : Programme Eau Potable et Assainissement du Millénaire : programme de mise en œuvre des

Objectifs du Millénaire pour le développement pour l’eau potable et l’assainissement en milieu rural et

urbain.

Page 58: Analyse multicritère pour la priorisation des ...€¦ · BA NDEYE FATOUMATA Analyse multicritère pour la priorisation des interventions en matière d’approvisionnement en eau

47

priori, naturelle et donc cela dépend de la nature des minéraux avec lesquels l’eau

souterraine est en contact. Ne disposant pas de données locales, la teneur en fluorures a été

appréciée de manière globale pour un arrondissement donné. Trois niveaux d’appréciation

ont été définis pour chaque paramètre: bonne, médiocre et mauvaise (voir

Tableau 3). Ces niveaux ont été établis sur la base des normes de l’OMS, en vigueur au

Sénégal [OMS, 2004]. Le premier niveau de qualité correspond à des concentrations

relevées respectant majoritairement la norme de l’OMS; le troisième niveau correspond à

des concentrations dépassant en majorité la norme de l’OMS ; et le second niveau est un

niveau intermédiaire compris entre les deux précédents.

Tableau 3- Intervalles de qualité d’eau souterraine

Paramètre de qualité Valeurs seuils Intervalles de qualité retenus

Fluorures 0,5mg/L : concentration minimale

souhaitable du point de vue de la

prévention des caries ;

1,5mg/L: norme de l’OMS (2004) au-

delà duquel il y a un risque de fluorose

dentaire et de fluorose osseuse

5mg/L: concentration au-delà de

laquelle il y a un risque important de

fluorose dentaire et un risque de fluorose

osseuse paralysante.

Bonne : une majorité de relevés

dans l’intervalle [0 – 1,5mg/l]

Médiocre : des relevés

également au dessus et dans la

norme

Mauvaise : une majorité de

relevés >1,5mg/l

Nitrates 50mg/L : norme de l’OMS (2004)

Bonne : une majorité de relevés

dans [0 – 50mg/l]

Médiocre : des relevés

également au dessus et dans la

norme

Mauvaise : une majorité de

relevés >50mg/l

Résidus-secs 1200mg/L : valeur indicative de l’OMS

(2004)

2000mg/L : limite supportable pour les

humains en zone aride ou semi-aride.

Les animaux sont encore plus résistants

mais les plantes le sont moins [Badiane

et al., 2000].

Bonne : une majorité de relevés

dans [0 – 1200mg/l]

Médiocre : des relevés

également au dessus et dans la

norme

Mauvaise : une majorité de

relevés >1200mg/l

Nous avons ensuite défini une règle d’agrégation qui mène à 8 classes de qualité globale

d’eau souterraine (Très mauvaise, Mauvaise, Très médiocre, Médiocre, Passable à

médiocre, Passable Passable à bonne et Bonne). Il s’agit d’une échelle de dangerosité

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48

globale où les fluorures sont les éléments les plus déterminants suivis des nitrates puis des

résidus secs (voir Tableau 4). Finalement, le niveau de qualité retenu pour l’arrondissement

est celui de la nappe d’eau souterraine la plus captée. L’échelle du critère qualité d’eau

correspond donc à l’évaluation globale définie au tableau

Tableau 4. L’arrondissement est d’autant plus prioritaire que son niveau de qualité d’eau

est mauvais.

Tableau 4- Détermination de la qualité globale de l’eau. Fluorures Nitrates Résidus-secs Qualité Globale

Mauvaise Mauvaise Mauvaise

Très mauvaise

Mauvaise Médiocre

Mauvaise Bonne

Médiocre Mauvaise

Médiocre Médiocre

Médiocre Bonne

Bonne Mauvaise

Mauvaise Bonne Médiocre

Bonne Bonne

Médiocre Mauvaise Mauvaise

Très médiocre Mauvaise Médiocre

Mauvaise Bonne

Médiocre Mauvaise

Médiocre

Médiocre Médiocre

Médiocre Bonne

Bonne Mauvaise

Bonne Médiocre

Bonne Bonne

Bonne Mauvaise Mauvaise

Médiocre à Bonne Mauvaise Médiocre

Mauvaise Bonne

Médiocre Mauvaise

Bonne Médiocre Médiocre

Médiocre Bonne

Bonne Mauvaise

Très Bonne Bonne Médiocre

Bonne Bonne

Critère 2 - Acceptabilité des coûts de l’allocation

Pour chacun des arrondissements de la région, l’acceptabilité des coûts de l’allocation a été

mesurée à travers un questionnaire transmis à 18 présidents de communauté rurale (PCR)

Page 60: Analyse multicritère pour la priorisation des ...€¦ · BA NDEYE FATOUMATA Analyse multicritère pour la priorisation des interventions en matière d’approvisionnement en eau

49

sur les 33 que compte la région(le questionnaire est consigné à l’annexe C). Les PCR sont

des représentants et des résidants de la communauté rurale. La population administrée par

les PCR interrogés représente au moins 50% de la population de chacun des

arrondissements. L’approche choisie consiste à poser directement la question sur la volonté

de payer pour l’installation de nouveaux branchements privés ou l’amélioration des

infrastructures publiques d’eau potable et d’eau d’irrigation. Trois niveaux de réponses sont

possibles: oui, non, peut- être. En accordant une valeur de 0 à une réponse négative (non),

de 0,5 à une réponse incertaine (peut-être), et de 1 à une réponse positive (oui), les

arrondissements ont été évalués en calculant le pourcentage de la somme de oui et de peut-

être dans l’ensemble des réponses. Plus le pourcentage obtenu est élevé, et plus la volonté

de payer des populations de l’arrondissement pour une amélioration du service est jugée

grande. Les arrondissements où le pourcentage de réponse positive est la plus grande sont

jugés prioritaires.

Critère 3 – Satisfaction des besoins domestiques en eau

L’évaluation sur ce critère a été effectuée à l’aide d’un des indicateurs proposés par le

PEPAM pour l’accès à l’eau: ‘‘l’équivalent point d’eau’’ (EPE). Un EPE correspond en fait

à une borne fontaine qui est supposée alimenter 300 habitants à raison de

25L/personne/jour (MAHS, 2004). Les autres ouvrages d’alimentation en eau peuvent être

ramenés à l’EPE selon une table de conversion (MAHS, 2004). Les directives de l’OMS

sur la quantité d’eau destinée aux usages domestiques précise l’importance de satisfaire les

besoins en eau des populations à la fois en termes de quantité et de qualité (OMS et

UNICEF, 2004). Ainsi, seules les infrastructures, qui garantissent une eau de qualité

suffisante du point de vue microbiologique et qui sont retenues dans l’inventaire sénégalais

des points d’eau disponibles pour les populations (la borne fontaine, le puits moderne, le

branchement privé et le forage avec pompe à motricité humaine), ont été considérées dans

la présente étude (l’annexe B fournie une description des ouvrages hydrauliques).

L’indicateur de mesure retenu pour l’évaluation des arrondissements est le taux de

satisfaction en termes d’approvisionnement en eau:

(%) 100P N

N

A ATaux de satisfaction

A

(1)

Page 61: Analyse multicritère pour la priorisation des ...€¦ · BA NDEYE FATOUMATA Analyse multicritère pour la priorisation des interventions en matière d’approvisionnement en eau

50

Où A (m3/jour) est l’approvisionnement en eau et où les indices « P » et « N »

correspondent respectivement aux approvisionnements présent et nécessaire. AP est calculé

à partir du recensement des ouvrages provenant à la fois de la base de données PROGRES

(Programme de gestion des ressources en eaux souterraines ; référence pour les ouvrages

d’adduction d’eau souterraine) de la DGPRE et des plus récentes enquêtes effectués dans le

cadre du PEPAM. Il est à noter cependant que ces données renseignent sur l’existence

physique des ouvrages mais pas sur leur état de fonctionnalité. La valeur de AN est

déterminée à partir du nombre d’habitants de l’arrondissement (données provenant du

recensement de la population de 2002 ; [MAHS, 2005]) et de l’objectif à moyen terme du

PEPAM d’approvisionnement en eau en zone rurale c’est-à-dire 25L/pers/jour [MAHS,

2004]. Plus le taux de satisfaction est faible, plus l’arrondissement est jugé prioritaire.

Critère 4 - Accessibilité au point d‘eau

Quatre types d’information ont été utilisés pour l’évaluation sur ce critère. Il s’agit du

nombre d’habitants, du type et du nombre d’infrastructures d’adduction d’eau, ainsi que de

la position géographique des villages. Ces informations proviennent des résultats de

l’enquête sur les infrastructures des villages de Diourbel [PEPAM, 2006] pour la base de

données PROGRES. L’accessibilité au point d’eau est évaluée en mesurant, dans un

premier temps, la distance parcourue par les populations pour s’approvisionner en eau. Le

logiciel de système d’information géographique ArcView GIS 3.2 a servi à effectuer les

calculs de distance parcourue par les habitants de chaque arrondissement pour combler

leurs besoins en eau en termes de quantité (le script ArcView est présenté à l’annexe D).

Le déficit ou l’excédent d’eau de chaque village a été évalué sur la base de 25L/pers/jour.

L’hypothèse de base est la suivante : les habitants des villages déficitaire en eau vont

combler leur déficit avec l’excédant du village (ou des villages) excédentaire(s) le(s) plus

proche(s). La position géographique des habitants se confond à celle du centre du village

auquel ils sont rattachés. Cette démarche de calcul permet de déterminer la distribution des

distances de marche pour chaque arrondissement. L’indicateur de mesure retenu pour

l’évaluation des arrondissements est la proportion d’habitants parcourant plus d’un

kilomètre. Un arrondissement est d’autant plus prioritaire que son pourcentage d’habitants

Page 62: Analyse multicritère pour la priorisation des ...€¦ · BA NDEYE FATOUMATA Analyse multicritère pour la priorisation des interventions en matière d’approvisionnement en eau

51

ne bénéficiant pas d’un accès raisonnable, et parcourant donc une distance supérieure à 1

km pour s’approvisionner en eau, est important.

Critère 5 – Satisfaction du besoin en eau pour l’agriculture

Les difficultés rencontrées dans la collecte des données nécessaires au calcul précis du

déficit hydrique (DH), une méthode très utilisée dans l’évaluation des besoins en eau pour

l’agriculture, ont conduit à l’élaboration d’un indicateur simplifié de satisfaction de la

demande en eau d’irrigation (ISDEI). Cet indicateur, qui est inspiré du DH, se calcule

comme suit :

90

90

(%) 100mil

mil

P DISDEI

D

(2)

où Dmil90 est la demande en eau d’irrigation (mm/an) et P sont les précipitations (mm/an).

La demande en eau pour l’agriculture est évaluée en utilisant une culture de référence pour

la région qui a été choisie avec l’aide du Centre National de Recherche Agronomique de

Bambey, à savoir le mil variété 90 jours. La valeur retenue pour Dmil90 est de 457mm/an.

Cette valeur correspond à l’évapotranspiration maximale pour le mil (variété 90 jours) tel

que déterminé par l’Institut Sénégalais de Recherche Agronomique. La quantité d’eau de

pluies par arrondissement représente la quantité d’eau disponible (en mm/an), les

précipitations constituant à plus de 90% la source d’eau pour l’agriculture dans la région

(les précipitions ont été supposées homogènes dans un arrondissement donné). Les valeurs

du ISDEI, qui ont servi à l’évaluation des arrondissements sur le critère satisfaction du

besoin en eau pour l’agriculture, ont été calculées avec les données pluviométriques datant

de 1997, 1998 et 2004. Ces dernières sont les seules années pour lesquelles les données

étaient complètes. À noter que les données pour l’année 2005 étaient également disponibles

mais ces données n’ont pas été retenues car il s’agit d’une année exceptionnelle du point de

vue pluviométrique. Plus le ISDEI est bas, plus l’arrondissement est jugé prioritaire.

Critère 6 - Potentiel de développement

Ce critère a été évalué de manière qualitative par un responsable de la DRDR-Diourbel et

ancien responsable de l’ARD-Diourbel. Le DRDR œuvre au nom du ministère de

Page 63: Analyse multicritère pour la priorisation des ...€¦ · BA NDEYE FATOUMATA Analyse multicritère pour la priorisation des interventions en matière d’approvisionnement en eau

52

l’agriculture à la mise en place d’une politique de développement agricole cohérente et à

contribuer à renforcer la promotion des initiatives régionales et locales. L’ARD a quant à

elle pour mission de permettre la coordination et l'harmonisation des interventions et

initiatives des collectivités locales en matière de développement local en général. Le

responsable interviewé s’est basé sur un certain nombre de vecteurs de développement tels

que la qualité des sols pour l’agriculture, l’organisation sociale et l’esprit d’entreprenariat et

a effectué son évaluation du potentiel de développement des arrondissements sur une

échelle composée de sept niveaux : Très grand, Grand++, Grand+, Grand, Moyen+, Moyen,

Faible. Plus son potentiel de développement est jugé élevé, plus l’arrondissement est jugé

prioritaire pour l’allocation des ressources en eau.

4. Rangement des arrondissements

4.1 Le logiciel M-MACBETH

Le logiciel M-MACBETH qui a servi à ranger les arrondissements en termes de priorité

pour des projets éventuels de développement de ressources hydrique est un outil d’aide

multicritère à la décision appliquant la méthode MACBETH. Cette méthode a été déjà

appliquée à divers cas réels d’aide multicritère à la décision [Bana e Costa et al. 2004a,

Bana e Costa et al. 2004b].

MACBETH permet à un décideur (ou à un analyste) de construire une fonction de valeur

pour chaque critère. Une telle fonction de valeur établit une relation entre l’évaluation

d’une option (un arrondissement dans notre cas) et sa performance (un degré de priorité

d’intervention dans notre cas). L’élaboration d’une fonction de valeur inclut le choix des

évaluations qui correspondent au niveau de performance inférieure (0) et au niveau de

performance supérieure (100). Pour établir une fonction de valeur, le décideur (ou

l’analyste) compare deux à deux les niveaux d’évaluation suivant ce critère en utilisant

l’échelle d’attractivité suivante : nulle (les deux niveaux sont jugées égales), très faible,

faible, modérée, forte, très forte, extrême (un niveau est jugé extrêmement fort par rapport à

l’autre). Ce faisant, Il construit sa fonction de valeur pour le critère considéré. Le système

Page 64: Analyse multicritère pour la priorisation des ...€¦ · BA NDEYE FATOUMATA Analyse multicritère pour la priorisation des interventions en matière d’approvisionnement en eau

53

vérifie simultanément la consistance des réponses et fournie des propositions en cas

d’inconsistance. Au terme de cette étape, le logiciel propose une échelle numérique

soumise à l’appréciation du décideur. Celui-ci a la possibilité de revenir sur son jugement,

d’y apporter des changements. L’échelle ainsi obtenue est une échelle cardinale

représentative des jugements de valeur du décideur.

4.2 Pondération des critères

La pondération des critères a été faite par 13 personnes lors d’entrevues privées pour statuer

sur l’importance relative des critères : Direction de l’environnement (2 personnes), SDE, (2

personnes), SONES (1 personne), MAH (1 personne), APRHN (Agence de Promotion du

Réseau Hydrographique National) (1 personne), DGPRE (3 personnes), DRDR-Diourbel (1

personne), Ministère du plan (1 personne), Direction de l’hydraulique (1 personne). La

technique d’évaluation utilisée est celle du point fixe [Hajkowicz et al., 2000]. Le décideur

est appelé à distribuer, sur l’ensemble des critères, un nombre de points fixé d’avance, 100

en l’occurrence. Pour faciliter la distribution des points, il a été proposé aux intervenants de

classer les critères, représentés par des fiches, par ordre d’importance et de les éloigner

selon leur importance relative en y intercalant des cartes blanches avant de leur assigner un

poids. À noter que les pondérations ont été choisies alors qu’il y avait encore un 7e critère

sur les besoins en eau du cheptel. Suite au retrait de ce critère, le poids de ce critère a été

redistribué sur les autres poids au prorata de leur valeur initiale. Les poids moyen, minimal

et maximal pour chaque critère sont présentés au tableauTableau 5.

Page 65: Analyse multicritère pour la priorisation des ...€¦ · BA NDEYE FATOUMATA Analyse multicritère pour la priorisation des interventions en matière d’approvisionnement en eau

54

Tableau 5- Pondération, évaluation et priorités.

Pondérations

Critère 1 Critère 2 Critère 3 Critère 4 Critère 5 Critère 6

Moyenne 24% 12% 26% 12% 13% 12%

Minimale 16% 4% 13% 8% 6% 6%

Maximale 35% 27% 43% 20% 25% 18%

Arrond. Critère 1 Critère 2 Critère 3 Critère 4 Critère 5 Critère 6 Global

Évaluations

A Très médiocre 0% 16% 26% -35% Grand

B Médiocre 0% 9% 27% -13% Grand

C Médiocre 0% -8% 36% -34% Grand

D Médiocre 33% 27% 20% -3% Moyen

E Médiocre 72% 12% 35% -29% Moyen+

F Mauvaise 0% -14% 36% -16% Très grand

G Mauvaise 22% -32% 53% -7% Grand+

Bonne 50% -32% 63% -21% Grand++

Priorités (pondérations moyennes)

A 53 0 6 26 47 60 31

B 32 0 10 27 21 60 24

C 32 0 21 36 46 60 31

D 32 33 3 20 20 27 21

E 32 72 8 35 40 40 33

F 74 0 25 36 22 100 44

G 74 22 41 53 20 73 49

H 0 50 41 63 28 87 39

4.3 Fonctions de valeur

Pour la présente étude, et à une exception près, nous avons élaboré nous-mêmes les

fonctions de valeur en fonction des informations dont nous disposions (voir ci-dessous).

Dans le logiciel M-MACBETH, nous avons défini les fonctions de valeur. Pour les critères

Acceptabilité des coûts de l’allocation et Accessibilité au point d’eau, les fonctions de

valeurs sont considérées linéaires c’est-à-dire que la différence d’attractivité entre deux

niveaux d’évaluation consécutifs est constante. Pour ces deux critères, les bornes sont les

mêmes à savoir :

- L’évaluation de 0% correspond à une performance de 0 sur l’échelle MACBETH ;

Page 66: Analyse multicritère pour la priorisation des ...€¦ · BA NDEYE FATOUMATA Analyse multicritère pour la priorisation des interventions en matière d’approvisionnement en eau

55

- L’évaluation de 100% correspond à une performance de 100 sur l’échelle

MACBETH ;

Les quatre autres fonctions de valeurs sont présentées graphiquement à la figureFigure 9.

La fonction de valeur du critère Qualité des eaux souterraines (Figure 9a) a une allure

décroissante. La différence d’attractivité entre les niveaux de qualité diminue en tendant

vers le niveau ‘‘Bonne’’. Les jugements sur les différences d’attractivité des niveaux

qualitatifs de performance du critère Potentiel de développement ont été bâtis à partir des

indications fournies par un représentant de l’ARD-Diourbel. Il a précisé lors de

l’évaluation, la relation qu’il y avait entre les niveaux consécutifs. Ainsi, par exemple, le

niveau ‘‘Grand++’’ se situe entre le niveau ‘‘Très grand’’ et le niveau ‘‘Grand+’’ (voir la

fonction de valeur à la figure Figure 9b). Pour le critère de Satisfaction des besoins

domestiques en eau, la priorité maximale correspond à une quantité de 5l/pers./j (80% de

déficit par rapport à 25l/pers./j). Il s’agit du minimum recommandé en zone tropicale

[Gleick, 1996]. La priorité minimale correspond à une quantité de 35l/pers./j (surplus de

40% par rapport à 25l/pers./j). Il s’agit de la quantité recommandé par l’OMS. Cette valeur

est considérée comme l’objectif à long terme pour l’approvisionnement en eau en milieu

rural au Sénégal. C’est également l’extrémité supérieure de la fourchette de quantité d’eau

consommée par jour par les personnes disposant d’un branchement privé (30-35l/pers./j),

estimée d’après une enquête effectuée en 1996 (sur la faisabilité de la réforme du secteur)

et une autre effectuée en 2004 pour le projet REGEFOR [MAHS, 2004]. Une fonction

décroissante non-linéaire est définie entre ces deux bornes (voir Figure 9c). Cela reconnaît

le fait qu’un déficit est d’autant plus important que la quantité disponible est faible. La

fonction de valeur du critère Satisfaction des besoins en eau pour la production agricole a

été établie en considérant deux niveaux de référence intermédiaires entre les niveaux

supérieur et inférieur qui correspondent à des ISDEI de respectivement -100% et +100%.

Les niveaux intermédiaires correspondant à des pluviométries de 200mm et de 378mm

d’eau. D’après la FAO (1992), l'agriculture pluviale n'est pas praticable quand les

précipitations varient entre 100 et 300mm. En prenant la moyenne de ces valeurs, à savoir

200mm (ISDEI = -56%), nous avons estimé que la différence entre celle-ci et un manque

absolu d’eau de pluie (ISDEI = -100%) pour satisfaire les besoins de la plante de référence

Page 67: Analyse multicritère pour la priorisation des ...€¦ · BA NDEYE FATOUMATA Analyse multicritère pour la priorisation des interventions en matière d’approvisionnement en eau

56

peut être considérée comme faible (selon les jugements sémantiques proposés par le

logiciel M-MACBETH). Le second point intermédiaire correspond à une pluviométrie de

378mm (ISDEI = -17%) qui est la valeur d’évapotranspiration minimale de la plante de

référence. Entre cette valeur et la valeur maximale (ISDEI = +100%), la différence

d’attractivité est jugée faible. La fonction de valeur a été construite à partir de ces deux

différences d’attractivité et est présentée à la figureFigure 9d.

0

20

40

60

80

100

Très m

auva

ise

Mau

vaise

Très m

édio

cre

Méd

iocr

e

Méd

iocr

e à

pass

able

Pas

sabl

e

Bon

ne

Pri

ori

0

20

40

60

80

100

-100% -50% 0% 50%

Évaluation

Pri

ori

0

20

40

60

80

100

-100 -80 -60 -40 -20 0 20 40 60 80 100

Évaluation

Pri

ori

0

20

40

60

80

100

Très gr

and

Gra

nd++

Gra

nd+

Gra

nd

Moy

en+

Moy

en

Faibl

e

Évaluation

Pri

ori

téa) b)

c) d)

0

20

40

60

80

100

Très m

auva

ise

Mau

vaise

Très m

édio

cre

Méd

iocr

e

Méd

iocr

e à

pass

able

Pas

sabl

e

Bon

ne

Pri

ori

0

20

40

60

80

100

-100% -50% 0% 50%

Évaluation

Pri

ori

0

20

40

60

80

100

-100 -80 -60 -40 -20 0 20 40 60 80 100

Évaluation

Pri

ori

0

20

40

60

80

100

Très gr

and

Gra

nd++

Gra

nd+

Gra

nd

Moy

en+

Moy

en

Faibl

e

Évaluation

Pri

ori

téa) b)

c) d)

Figure 9- Fonctions de valeurs a) Critère qualité eau, b) Critère potentiel de

développement, c) Critère satisfaction des besoins domestiques, d) Critère satisfaction des

besoins en eau pour la production agricole.

4.4 Rangement des arrondissements

À partir des évaluations (voir Tableau 5), des fonctions de valeur et des pondérations des

critères, une performance globale est calculée sur une échelle de 0 à 100 pour chaque

arrondissement. Le calcul est une moyenne pondérée. Les performances globales des

arrondissements, qui correspondent à leur priorité d’intervention en matière

Page 68: Analyse multicritère pour la priorisation des ...€¦ · BA NDEYE FATOUMATA Analyse multicritère pour la priorisation des interventions en matière d’approvisionnement en eau

57

d’approvisionnement en eau, sont présentées au tableau Tableau 5. De manière De manière

générale, les performances globales varient de 21/100 à 49/100 sur l’échelle MACBETH, et

ce pour les pondérations moyennes. Les trois arrondissements les plus prioritaires sont G

(49/100), F (44/100) et H (39/100). Les deux arrondissements les moins prioritaires sont D

(21/100) et B (24/100). Les trois autres arrondissements (A, C et E) se situent entre ces

deux groupes. Il est intéressant de constater à la figureFigure 10, où sont montrées les

performances minimales et maximales, que les pondérations ne modifient pas cette

tendance. Bien que les pondérations varient significativement (voir les pondérations

minimales et maximales au tableauTableau 5) et qu’elles aient un impact sur les valeurs des

performances, cela ne remet pas significativement en cause le classement basé sur la

pondération moyenne. En effet, pour 100% des pondérations, l’arrondissement G demeure

le plus prioritaire tandis que pour plus de 70% des pondérations, les arrondissements F et H

gardent, respectivement, leurs seconde et troisième places par ordre de priorité

décroissante. Par ailleurs, pour près de 80% des pondérations, les arrondissements B et D

maintiennent, respectivement, leur avant-dernière et dernière places dans ce rangement.

Dans l’ensemble, le rangement des arrondissements du tableauTableau 5 établi pour les

pondérations moyennes semble donc valide vis-à-vis des préférences des décideurs

consultés au cours de l’étude.

0

10

20

30

40

50

60

A B C D E F G H

Pe

rfo

rma

nc

e g

lob

ale

min

max

Figure 10- Effet de la pondération sur le rangement des arrondissements

Page 69: Analyse multicritère pour la priorisation des ...€¦ · BA NDEYE FATOUMATA Analyse multicritère pour la priorisation des interventions en matière d’approvisionnement en eau

58

5. Analyse des résultats et de la démarche

Dans l’ensemble, les intervenants consultés se sont montrés intéressés et favorables à la

démarche proposée d’aide à la décision multicritère proposée. La participation importante

des intervenants a enrichi son élaboration et lui apporte beaucoup de légitimité. Cependant,

il a été impossible de réunir l’ensemble des représentants pour une concertation directe vu

leur grand nombre. La gestion des ressources en eau au Sénégal se caractérise par la

séparation qui est faite entre le rural et l’urbain, par le très grand nombre d’intervenants

avec des prérogatives quelques fois similaires et par les restructurations fréquentes des

organes d’État concernés. Ceci complique la coordination des efforts et la mise en place

d’une approche participative dont la nécessité dans la gestion des ressources en eau est

pourtant reconnue [ARD-Diourbel, 2000 ; BAD, 2005 ; République du Sénégal, 2005]. Des

organes officiels de coordination et de concertation comme le Conseil Supérieur de l’Eau

et le Comité Technique de l’Eau ont été mis en place mais nous n’avons pas trouvé de trace

d’activité de ces organismes. On peut supposer ainsi qu’il existe des obstacles d’ordre

structurel (dynamique hiérarchique complexe) à la concertation directe entre les groupes

d’intervenants notamment en ce qui concerne les entités étatiques. L’étude n’a pas permis

d’identifier ces obstacles de manière précise. Il serait intéressant de les analyser dans une

étude ultérieure afin d’essayer de les surmonter.

La principale difficulté rencontrée lors de l’élaboration de la démarche s’est située au

niveau de la qualité et de la disponibilité des données. Il s’agit d’un handicap majeur pour

l’opérationnalisation des critères. Par exemple, l’évaluation du critère Qualité des eaux

souterraines, ne prend pas en compte l’ensemble des paramètres physico-chimiques

d’importance ni les paramètres microbiologiques car ces informations ne sont pas

complètes dans les bases de données de la DGPRE chargée de leur traitement et de leur

stockage. Un critère initialement retenu sur la satisfaction des besoins en eau pour le

cheptel a dû être abandonné faute de données sur les quantités d’eau actuellement

disponibles pour l’abreuvage du cheptel. Le problème se pose également concernant le

recensement des infrastructures (leur nombre et leur fonctionnalité). En outre, la

Page 70: Analyse multicritère pour la priorisation des ...€¦ · BA NDEYE FATOUMATA Analyse multicritère pour la priorisation des interventions en matière d’approvisionnement en eau

59

connaissance du nombre d’habitants par localité est essentielle à la démarche. Pourtant

l’information disponible sur la population par localité n’est qu’une estimation effectuée

dans le cadre du PEPAM à partir des données du recensement de 2002 et des taux de

croissance par localité datant de 1988. Les consultants du PEPAM n’ont pu avoir accès à

des données plus récentes auprès de la Direction de la Prévision et de la Statistique. Une

tentative a aussi été entreprise dans le cadre de cette étude mais sans succès.

Concernant, le critère Acceptabilité des coûts de l’allocation, les évaluations par les

décideurs n’ont été faites que sur la base de l’acceptabilité financière des populations sans

tenir compte de leur capacité de payer. La prise en compte de ce second aspect pourrait se

faire dans le futur au moyen d’enquêtes. En outre, l’analyse aurait pu s’opérer à plus petite

échelle : celle de la communauté rurale (reconnue comme l’unité territoriale administrative

de base pour l’allocation lorsque l’analyse est menée à l’échelle d’une région). Toutefois,

toutes les informations nécessaires à l’évaluation des critères ne sont pas disponibles

actuellement à cette échelle. Ainsi, dans la perspective de mettre en place des outils de

planification mais aussi de suivi et d’évaluation, des efforts devraient être faits dans la

collecte de données actualisées et précises et dans l’échange d’informations entre les divers

intervenants. Étant donné le développement rapide des technologies de l’information et de

la communication, ces problèmes pourraient être surmontés du point de vue technique.

L’approche présentée pourrait aussi être améliorée en utilisant le logiciel M-MACBETH

pour les pondérations des critères. En effet, les poids devraient être sur une échelle ratio et

refléter l’importance relative d’un changement d’unité sur la fonction de valeur [Hajkowicz

et al., 2000] ce qui n’est pas garanti avec la méthode du point fixe utilisée. Cependant, le

poids des critères exprimé par les décideurs reste valable pour traduire l’importance relative

accordée à chaque critère.

Page 71: Analyse multicritère pour la priorisation des ...€¦ · BA NDEYE FATOUMATA Analyse multicritère pour la priorisation des interventions en matière d’approvisionnement en eau

60

6. Conclusion

A l’instar d’un certain nombre de pays en voie de développement, le Sénégal initie des

projets de petite et moyenne envergure pour répondre à l’urgence de l’approvisionnement

en eau dans le monde rural. En amont de ces projets, l’insuffisance des moyens impose

qu’un choix soit fait quant aux priorités d’intervention en matière d’approvisionnement en

eau. En tant que ressource naturelle vitale intégrant bien d’autres dimensions (sociale,

environnementale, humaine, culturelle), l’eau ne peut être traitée comme un simple bien

économique dont l’allocation dépendrait de l’équilibre entre l’offre et la demande. La

multiplicité de ses dimensions impose une gestion intégrée et concertée qui s’avère

complexe. Dans le cadre de la présente étude, le contexte décisionnel a été analysé selon un

point de vue multicritère. Des critères ont été proposés dans le but de faciliter, à l’échelle

régionale, la priorisation des besoins en eau en milieu rural au Sénégal. Ces critères sont en

rapport avec le système de valeurs de différents intervenants identifiés dans la gestion des

ressources en eau et les objectifs fixés par l’État. Des indicateurs de mesure pour ces

critères ont été proposés dans le contexte du Sénégal. Ces indicateurs, des pondérations

définis par des intervenants sénégalais, et des fonctions de valeur définies à l’aide du

logiciel M-MACBETH, ont permis de ranger les arrondissements de la région rurale de

Diourbel par ordre de priorité. D’après les résultats obtenus, trois de ces arrondissements

ressortent comme plus prioritaires du point de vue de l’approvisionnement en eau.

Globalement, l’application d’une telle démarche d’aide à la décision s’avère donc tout à fait

faisable. Néanmoins, une amélioration de la collecte et de la compilation de données sur

l’utilisation de l’eau au Sénégal faciliterait l’expansion et le raffinement ce type de

démarche.

Page 72: Analyse multicritère pour la priorisation des ...€¦ · BA NDEYE FATOUMATA Analyse multicritère pour la priorisation des interventions en matière d’approvisionnement en eau

61

Remerciements

Tous les organismes, et leurs représentants, du secteur de l’eau au Sénégal qui ont participé

à cette étude sont remerciés pour leur précieuse collaboration. L’étude présentée dans cet

article a bénéficié en particulier de l’appui de la Direction de Gestion et de Planification des

Ressources en Eau et de celui de l’organe de coordination du PEPAM. Enfin, Oscar Nilo,

professionnel de recherche à l’Université Laval, est remercié pour son aide dans la partie

informatique de l’étude.

Page 73: Analyse multicritère pour la priorisation des ...€¦ · BA NDEYE FATOUMATA Analyse multicritère pour la priorisation des interventions en matière d’approvisionnement en eau

62

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65

Complément sur la méthodologie : détermination des

unités territoriales et orientation adoptée pour

l’évaluation des unités territoriales

Détermination des unités territoriales Dans la terminologie de l’aide à la décision, les éléments sur lesquels les décideurs doivent

se prononcer selon leur système de valeur sont généralement nommés options, ou actions.

Dans le cas présent les unités territoriales de la région d’étude représentent les options.

L’ensemble des options constituant la région, l’exigence d’exhaustivité est donc facilement

rencontrée. Cependant, cet ensemble peut varier en nombre selon l’échelle d’allocation

choisie. Le découpage du territoire sur lequel les décideurs doivent se prononcer quant à la

priorité d’allocation des ressources en eau doit répondre à deux contraintes principales : à

savoir la pertinence (pour que les informations soient significatives) et la faisabilité (en ce

qui a trait au travail de recherche). L’unité de surface sur laquelle porte la décision

d’allocation a donc été choisie de sorte à correspondre à la plus petite échelle pertinente de

décision, à concorder le plus possible à une représentation mentale que se font les

intervenants de leur territoire et à être la plus homogène possible en terme de

caractéristiques. Le choix s’est porté sur l’arrondissement car il s’agit de la plus petite unité

territoriale pour laquelle les informations sont les plus complètes mais aussi parce que cela

correspond à un découpage administratif déjà établi. Les décisions en matière de

développement se prennent d’ailleurs, souvent, en suivant le découpage administratif du

territoire (village, CR, arrondissement, département ou région). Les plans locaux de

développement (PLD) par exemple se définissent au niveau de la CR.

Parmi les 8 arrondissements que compte Diourbel, celui de Ndame abrite une communauté

rurale aux caractéristiques particulières de sorte qu’elle a été exclue de l’analyse. Il s’agit

de la communauté rurale de Touba Mosquée. Capitale du mouridisme, Touba Mosquée,

dans le département de Mbaké, a les caractéristiques d’une ville d’après le critère de

délimitation entre l’hydraulique rurale et urbaine (5000 habitants). Elle est pourtant

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66

considérée comme une communauté rurale. Cette ville abrite plus de 90% de la population

de l’arrondissement et près de 47% de celle de l’ensemble de la région soit 421 495

personnes (d’après les estimations faites à partir du recensement de 2002; d’autres sources

mentionnent plus de 462 000). Cette population fluctue de manière importante lors des

grands évènements religieux qui ont lieu plusieurs fois au cours de l’année. C’est une zone

de forte attraction. Cette affluence s’explique par sa fonction religieuse et le caractère

commercial de la cité. De même, le fait que les terres et l’eau y sont gratuites contribue à

cette affluence. Dans ce contexte démographique et socio-religieux, le traitement de la

question de l'eau relève d'une approche spécifique [MAHS, 2005].

Orientation adoptée pour l’évaluation des unités territoriales Pour l’ensemble des arrondissements, la priorité d’intervention pour l’approvisionnement

en eau est déterminée en fonction du niveau de satisfaction des besoins sur l’ensemble des

critères. Deux orientations s’offraient à nous dans l’élaboration des indicateurs d’évaluation

par critère: la première étant de prioriser les populations les plus nécessiteuses c’est-à-dire

celles pour lesquelles les lacunes sont les plus grandes ; la seconde étant de réduire

globalement le plus possible les lacunes quitte à favoriser des arrondissements plus

populeux où les lacunes sont relativement plus faibles. Le choix dépend des orientations

données à la gestion des ressources en eaux, définies par les décideurs (politiques et

bailleurs de fonds).

Le document de stratégie de réduction de la pauvreté (DSRP) sert de référence à

l’élaboration des plans sectoriels de développement (dont celui des ressources en eau) et de

programme d’investissement [MEFS4, 2003]. Le gouvernement y affirme sa volonté de

réduire les inégalités en répartissant de façon équilibrée les richesses, en généralisant

l’accès aux services sociaux et en éradiquant toutes formes d’exclusion. L’équité est un des

principes directeurs de mise en œuvre énoncé dans le DSPR [République du Sénégal,

2005]. L’objectif socio-politique en matière d’allocation des ressources en eau, s’il

4 Ministère de l’Économie et des Finances

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67

s’inspire du DSRP tel que voulu par l’État, semble donc être de réduire les écarts à la

norme (à la cible). En se basant sur les documents d’élaboration des plans sectoriels de

développement et des programmes d’investissement pour le Sénégal, la première

orientation a été choisie en visant une réduction des inégalités entre arrondissements, c’est-

à-dire, évaluer les arrondissement sur les critères en utilisant des valeurs relatives plutôt que

des valeurs absolues.

Cependant, en ce qui concerne l’adduction en eau potable en milieu rural de manière

spécifique, le PEPAM5 qui sert d’outil de mise en œuvre des projets pour l’atteinte des

OMD dans ce domaine, vise la satisfaction des besoins minimum des communautés rurales

en fonction de leur population. Un objectif global d’accès à l’eau potable en milieu rural de

82% est également fixé dans le cadre de ce programme. Ainsi, cet objectif devrait être

mieux explicité afin d’éviter que les stratégies de réduction de la pauvreté dans quelque

secteur que ce soit, soient basées sur un objectif qui ne corresponde pas à la réalité du

processus décisionnel.

Le critère Qualité des eaux souterraines évalué de manière qualitative ne répond qu’à

l’objectif de réduction des inégalités entre arrondissements. Du fait des informations

disponibles, l’échelle n’a pas pu être définie de sorte à prendre en compte l’importance

relative de la population concernée. L’évaluation du critère Potentiel de développement a

également été faite de manière qualitative. Elle intègre de façon assez complexe

l’importance de la population tout en établissement une échelle relative entre les

arrondissements.

5 PEPAM : Programme Eau Potable et Assainissement du Millénaire : programme de mise en œuvre des

Objectifs du Millénaire pour le développement pour l’eau potable et l’assainissement en milieu rural et

urbain.

Page 79: Analyse multicritère pour la priorisation des ...€¦ · BA NDEYE FATOUMATA Analyse multicritère pour la priorisation des interventions en matière d’approvisionnement en eau

68

Définition des critères

À partir des entrevues avec des intervenants du secteur de l’hydraulique au Sénégal et d’un

ensemble de documents de référence sur la gestion des ressources en eau au Sénégal, nous

avons identifié les objectifs en matière d’approvisionnement en eau qui visent à améliorer

les conditions de vie des populations rurales. Ces objectifs sont présentés à la figure Figure

8 - Arbre des objectifs, critères et indicateurs de mesure. Nous avons ensuite élaboré des

critères pour répondre aux objectifs de dernier niveau. La liste des critères a été validée par

7 représentants de différents ministères (Agriculture et hydraulique; Environnement et

protection de la nature; Prévention, hygiène publique et assainissement; Réseau

hydrographique national), par 1 représentant de l’Agence Régionale du Développement

rural de Diourbel (ADR-Diourbel), par 1 représentant de l’Agence Régionale de

Développement de Diourbel (DRDR-Diourbel) et par 2 représentants de la Société de

Distribution d’Eau (SDE) et de la Société Nationale des Eaux du Sénégal (SONES). Ces

critères, au nombre de sept, permettent ainsi, de déterminer les priorités d’interventions en

matière d’approvisionnement en eau en milieu rural. Cependant, le critère de satisfaction

des besoins en eau du cheptel n’a pas été retenu dans l’évaluation finale des

arrondissements de la région de Diourbel (dont les résultats sont présentés dans l’article)

faute de données suffisantes pour procéder à l’évaluation.

Cr1 : Qualité des eaux souterraines.

Cr2 : Acceptabilité des coûts de l’allocation

Cr3 : Satisfaction des besoins domestiques en eau.

Cr4 : Accessibilité au point d’eau.

Cr5 : Satisfaction des besoins en eau pour la production agricole.

Cr6 : Potentiel de développement.

Cr7 : Satisfaction des besoins en eau du cheptel.

Page 80: Analyse multicritère pour la priorisation des ...€¦ · BA NDEYE FATOUMATA Analyse multicritère pour la priorisation des interventions en matière d’approvisionnement en eau

69

Qualité des eaux souterraines Assurer la qualité de l’eau est un objectif sanitaire incontournable dans les projets

d’allocation des ressources en eau mais ceci constitue aussi, de façon plus globale, un

objectif de développement majeur. Il s’agit d’une condition de succès pour la lutte contre la

pauvreté, la faim, la mortalité infantile, l’égalité entre les genres etc. [OMS et UNICEF,

2004]. Cette qualité dont il est question comprend un aspect physico-chimique et un aspect

microbiologique qui font l’objet d’une réglementation au niveau national suivant les

recommandations de l’OMS. Cependant, pour des raisons économiques, l’eau disponible,

surtout en milieu rural, ne rencontre pas toujours les normes en vigueur. Il s’agit avec ce

critère, d’évaluer la qualité globale des eaux souterraines captées des arrondissements de la

région en utilisant les normes de l’OMS comme références. Cette évaluation se limite

néanmoins aux paramètres physico-chimiques car l’information nécessaire pour

l’évaluation sur les paramètres microbiologiques n’est pas disponible. Ainsi, les

arrondissements ayant des eaux de moins bonne qualité au regard des paramètres physico-

chimiques sont prioritaires pour l’allocation des ressources en eau.

Acceptabilité des coûts de l’allocation La quantité et la qualité de l’eau ne sont pas les seuls éléments à considérer pour garantir

les besoins de base en matière d’approvisionnement en eau. La satisfaction de ces besoins

dépend également de l’accessibilité définie en termes de distance et de temps

d’approvisionnement mais aussi d’accessibilité financière [Guy Howard et Jamie Bartram,

2003] et de pérennité des infrastructures d’approvisionnement. C’est sur ces deux derniers

aspects que porte le critère volonté de payer des populations. En effet, l’accès à l’eau

potable et à l’eau d’irrigation implique des coûts (de distribution et de traitement). De ce

fait, l’allocation doit être financièrement rentable de manière durable. Simultanément,

l’accessibilité économique de l’eau aux populations a une influence significative sur le

choix de la source d’eau. Un coût trop élevé de l’eau peut conduire les populations à utiliser

des sources alternatives de moindre qualité [OMS et UNICEF, 2005]. Or, le financement

des infrastructures par la vente de l’eau aux populations conditionne leur implantation et

Page 81: Analyse multicritère pour la priorisation des ...€¦ · BA NDEYE FATOUMATA Analyse multicritère pour la priorisation des interventions en matière d’approvisionnement en eau

70

assure leur pérennité. Ainsi, les arrondissements où la volonté de payer est la plus forte sont

jugés prioritaires.

Satisfaction des besoins domestiques en eau L’eau est essentielle aux activités domestiques. Le caractère vital de la ressource et les

multiples usages qui en sont faites rendent nécessaire la garantie d’un accès adéquat à l’eau

pour les populations. Satisfaire l’alimentation en eau des populations est par ailleurs

l’objectif premier de l’allocation des ressources en eau selon le code de l’eau au Sénégal

(article 75 du code de l’eau). Sur le plan international, l’importance de disposer d’une eau

potable en quantité adéquate est reconnu comme un droit humain de base [Vaillancourt,

2003]. Ce critère référant à la quantité d’eau disponible pour la population humaine est

donc incontournable dans la démarche d’élaboration de l’outil d’aide pour l’allocation des

ressources en eau en milieu rural. Il se justifie d’un point de vue sanitaire et légal.

Les directives de l’OMS en la matière précise l’importance de satisfaire les besoins en eau

des populations à la fois en termes de quantité et de qualité [OMS et UNICEF, 2004]. À ce

titre, seules les infrastructures garantissant une eau de qualité microbienne en quantité

suffisante sont retenues dans l’inventaire des points d’eau disponibles pour les populations.

C’est pourquoi, dans l’évaluation de ce critère, les points de distribution ne garantissant pas

un tel niveau d’accès n’ont pas été comptabilisés.

Accessibilité au point d’eau Le critère d’accès à l’eau potable adopté pour l’atteinte des OMD au Sénégal est celui

défini par l’OMS et l’UNICEF dans le cadre du Joint Monitoring Program for Water

Supply and Sanitation. L’accès raisonnable est le niveau retenu. Il définit l’accès en termes

de quantité mais aussi de distance. Il s’agit d’un niveau de desserte garantissant une

disponibilité de 20 litres par personne au minimum, à un point d’accès situé à une distance

d’un kilomètre ou moins du point de résidence des consommateurs [OMS et UNICEF,

2000]. Ces deux aspects relatifs à la quantité et la distance sont pris en compte dans

l’élaboration de la démarche d’aide multicritère proposée. Ainsi, le critère accessibilité au

point d’eau dont il s’agit dans ce chapitre, mesure la satisfaction du niveau d’accès

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71

raisonnable en termes de proportion de personne ne bénéficiant pas de ce niveau d’accès

par arrondissement. Il est admis que la distance à parcourir pour s’approvisionner en eau a

des conséquences non négligeables sur la quantité et la qualité de l’eau. La distance limite

la quantité d’eau transportable et la manutention et la nécessité d’entreposage peut accroître

les risques de contamination. La distance à parcourir a également un impact considérable

sur l’éducation des jeunes -surtout des filles- obligés d’effectuer les corvées de collecte au

détriment de leurs études, sur le développement économique et l’équité entre les genres

[OMS et UNICEF, 2004]. La prise en compte de ce critère dans la démarche d’élaboration

de l’outil d’aide à la décision permet donc, au-delà de l’impact sanitaire, d’intégrer

indirectement d’autres aspects socio-économiques d’importance reliés à l’adduction en eau.

Satisfaction des besoins en eau pour la production agricole Il existe des objectifs sociaux et économiques évidents d’intégration de la satisfaction des

besoins en eau pour l’agriculture dans les critères d’allocation des ressources en eau. Parmi

ceux-ci : la nécessité d’améliorer le cadre de vie des populations en favorisant

l’autosuffisance alimentaire et le besoin de développer l’économie locale en permettant la

pratique des activités agricoles pour assurer un minimum de revenu aux populations

rurales. La considération de ce critère se justifie aussi de manière légale par l’obligation de

prendre en compte, dans le cadre de l’allocation des ressources en eau, les besoins sociaux

et économiques des populations (section 5, article 75 du Code de L’Eau). Or en milieu

rural, l’agriculture et l’élevage constituent les premières sources de revenus. La satisfaction

des besoins en eau pour l’agriculture s’inscrit d’ailleurs en troisième position dans l’ordre

de priorité défini dans le Code de l’Eau du Sénégal (section 5, article 76). De plus, le droit à

une alimentation suffisante, droit reconnu par la communauté internationale, exige qu’un

accès aux ressources en eau soit garanti à l’agriculture [FAO, 2004].

Potentiel de développement Ce critère mesure le potentiel de développement des arrondissements si plus d’eau de

meilleure qualité était disponible pour l’irrigation et la consommation. Comme son intitulé

le précise, il introduit la notion de potentiel et permet ainsi de prendre en compte des

éléments quantitatifs mais aussi qualitatifs, tel que le dynamisme ou le potentiel de terre

Page 83: Analyse multicritère pour la priorisation des ...€¦ · BA NDEYE FATOUMATA Analyse multicritère pour la priorisation des interventions en matière d’approvisionnement en eau

72

cultivable, facteurs d’importance dans la contribution des projets d’adduction en eau au

développement des arrondissements. Il à été introduit dans la démarche pour compléter

l’évaluation des autres critères. En effet, l’ensemble des autres critères, sauf celui portant

sur la volonté de payer des usagers, sont évalués en fonction de la demande ou des besoins

actuelles sans tenir compte des perspectives futures difficilement évaluables dans le cadre

de cet étude. La prise en compte de ces facteurs permet aussi, de mesurer a priori

l’efficacité de la mise en valeur des arrondissements par l’allocation des ressources en eau.

Satisfaction des besoins en eau pour le cheptel L'élevage joue un rôle primordial pour la sécurité alimentaire par sa contribution à la

satisfaction des besoins alimentaires des populations. Sur le plan économique, il est à noter

qu’il occupe une place importante dans l’économie de la région et participe pour 7,5% au

PIB national [Gouvernement du Sénégal, 2007]. Les mesures engagées par le

gouvernement pour renforcer les atouts du secteur de l’élevage et réduire les contraintes,

prennent en compte l’amélioration des infrastructures hydrauliques. La satisfaction des

besoins en eau de l’élevage s’inscrit, par ailleurs, en seconde position (après celle des

besoins pour l’alimentation humaine) dans l’ordre des priorités défini dans le Code de l’Eau

de l’État du Sénégal.

Pour ce critère, l’indicateur de mesure initialement proposé consistait en l’évaluation de

l’effectif du cheptel par unité territoriale converti en Unité Bétail Tropical6, la

détermination de la quantité d’eau nécessaire pour son alimentation ainsi que la quantité

d’eau effectivement disponible. Un arrondissement serait d’autant plus prioritaire que la

satisfaction des besoins en eau de son cheptel est faible.

Ce critère n’a cependant pas été retenu dans l’évaluation des arrondissements de Diourbel.

Les données nécessaires à la détermination de la quantité d’eau nécessaire pour

l’alimentation du cheptel ainsi que la quantité d’eau effectivement disponible n’ont pu être

collectées auprès du ministère chargé de l’élevage et d’autres structures impliquées dans

l’alimentation en eau du cheptel.

6 1UBT correspond à un à un animal de 250kg consommant 40L/J (environ, dépendamment des conditions)

Page 84: Analyse multicritère pour la priorisation des ...€¦ · BA NDEYE FATOUMATA Analyse multicritère pour la priorisation des interventions en matière d’approvisionnement en eau

73

Discussion générale

L’identification des nombreux objectifs qui sous-tendent la gestion des ressources en eau

démontre que l’élaboration d’une stratégie d’allocation des ressources ne peut être menée

selon une seule dimension. Elle nécessite l’intégration des aspects sociaux, économiques et

environnementaux et la prise en compte des systèmes de valeurs des intervenants, ce qui

représente un nombre considérable de données. L’approche multicritère d’aide à la décision

utilisée permet non seulement d’identifier ces éléments, de les analyser chacune dans une

unité de mesure appropriée (pas nécessairement monétaire) mais aussi de les synthétiser.

Elle offre un cadre d’élaboration constructif et le formalisme qu’impose une telle approche

pousse les décideurs à prononcer clairement leurs jugements de valeurs. Ceci apporte

beaucoup de transparence et d’intelligibilité au processus décisionnel.

L’application de la démarche demande le support d’un outil efficace pour l’agrégation des

évaluations sur l’ensemble des critères. La méthode MACBETH [Bana e Costa et

Vansnick, 1999] utilisée dans le cadre de cette étude s’avère simple d’utilisation et son

logiciel d’application convivial. En effet, il s’agit d’une technique d’agrégation additive

bien connue et simple d’utilisation. Elle ne requiert que des jugements qualitatifs de la part

des évaluateurs pour juger de l’attractivité des options. Sur le plan théorique, la procédure

permettant le passage d’une échelle ordinale à une échelle cardinale est cohérente avec les

principes de la théorie du mesurage [Falmagne, 1988].

Un point important est à souligner quant à l’utilisation du logiciel M-MACBETH comme

outil d’agrégation dans la démarche. Pour plus de cohérence, le poids des critères devrait

également être obtenu avec la même méthode ou une méthode similaire. En effet, les poids

devraient être sur une échelle ratio et refléter l’importance relative d’un changement d’unité

sur la fonction de valeur [CSIRO, 2000] ce qui n’est pas garanti avec la méthode du point

fixe utilisée. Cependant, le poids des critères exprimé par les décideurs reste valable pour

traduire l’importance relative accordée à chaque critère.Par ailleurs, la méthode M-

MACBETH et son logiciel d’application présentent bien des avantages qui devraient

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74

faciliter l’application d’une telle démarche. Cependant, le principale critique qu’on puisse

formuler quand à la méthode et qu’elle n’admet pas l’incomparabilité entre les options et

qu’elle induit une certaine compensation entre les critères [Maystre et al. (1994)] en ayant

recourt à la somme pondérée. L’incomparabilité autorise une plus grande richesse dans la

relation entre les options. En effet, les informations sur lesquelles se fonde le classement ne

sont pas toujours assez précises pour qu’une distinction tranchée puisse être faite dans

l’évaluation des options ou, dans le cas de ce mémoire, des unités territoriales.

En ce qui concerne la compensation entre les critères, une alternative consisterait en

l’utilisation de M-MACBETH dans un premier temps, pour établir les pondérations ; dans

un second temps une méthode de surclassement admettant l’incomparabilité servirait à

établir le rangement. Dès lors, la question du choix même de M-MACBETH pourrait être

posée par le lecteur. Mais il n’est pas de méthode d’agrégation multicritère parfaite et le

choix pourrait lui-même nécessité une analyse multicritère. L’option de M-MACBETH a

été motivée notamment par la simplicité d’utilisation du logiciel. Le recours à ce logiciel a

évité, entre autres, d’avoir à définir de nombreux seuils comme cela doit être fait dans les

méthodes de surclassement.La méthode et son logiciel d’application facilitent en fait

l’application d’une démarche d’aide à la décision dans des contextes comme celui de la

présente étude.

L’analyse de la région de Diourbel a servi de cadre d’élaboration de la démarche. Elle a

également permis d’évaluer son applicabilité et mesurer les difficultés inhérentes à un tel

projet.La principale difficulté rencontrée lors de l’élaboration de la démarche s’est située au

niveau de la qualité et de la disponibilité des données. Il s’agit d’un handicap majeur pour

l’opérationnalisation des critères. Ainsi, alors que 7 critères sont définis pour la démarche

proposée, seuls 6 sont retenus dans l’analyse des priorités d’interventions pour la région de

Diourbel. Le critère satisfaction des besoins en eau pour le cheptel n’a pu être considéré.

Les informations sur les infrastructures d’alimentation en eau destinées au cheptel ne sont

pas disponibles. Ce critère demeure pourtant d’une grande importance dans l’analyse des

priorités d’interventions d’approvisionnement en eau en milieu rural au Sénégal.

Page 86: Analyse multicritère pour la priorisation des ...€¦ · BA NDEYE FATOUMATA Analyse multicritère pour la priorisation des interventions en matière d’approvisionnement en eau

75

De plus, l’évaluation du critère Qualité des eaux souterraines, ne prend pas en compte

l’ensemble des paramètres physico-chimiques d’importance ni les paramètres

microbiologiques car ces informations ne sont pas complètes dans les bases de données de

la DGPRE chargée de leur traitement et de leur stockage. Une démarche de prise en compte

des paramètres microbiologiques a cependant été tentée. Elle consistait à mesurer la

vulnérabilité à la contamination microbiologique des différents systèmes d’adduction d’eau

en fonction de leurs caractéristiques et de leur environnement immédiat. Elle n’a pas abouti

par manque de données (notamment en ce qui concerne l’environnement immédiat :

distance aux champs, distance par rapport au point d’abreuvage etc.). Le problème se pose

également concernant le recensement des infrastructures (leur nombre et leur

fonctionnalité). En outre, la connaissance du nombre d’habitants par localité est essentielle

à la démarche. Pourtant l’information disponible sur la population par localité n’est qu’une

estimation effectuée dans le cadre du PEPAM à partir des données du recensement de 2002

et des taux de croissance par localité datant de 1988. Les consultants du PEPAM n’ont pu

avoir accès à des données plus récentes auprès de la Direction de la Prévision et de la

Statistique. Une tentative a aussi été entreprise dans le cadre de cette étude mais sans

succès.

Pour les même raisons, un élément d’importance n’a pas été pris en compte : la capacité

financière des ménages. En effet, dans la démarche proposée, le critère acceptabilité des

coûts de l’allocation n’a été évalué que sur la base de la volonté de payer des populations

sans prendre en compte leur capacité, l’information sur les revenus par ménage n’étant pas

accessible. Or l’acceptabilité des coûts de l’allocation est fortement liée à ces deux

paramètres. Reste à savoir comment les évaluer simultanément pour juger de l’acceptabilité

des coûts par les populations.

Enfin, l’analyse aurait pu s’opérer à plus petite échelle : celle de la communauté rurale

(reconnue comme l’unité territoriale administrative de base pour l’allocation lorsque

l’analyse est menée à l’échelle d’une région). Toutefois, toutes les informations nécessaires

à l’évaluation des critères ne sont pas disponibles actuellement à cette échelle.

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76

Dans l’ensemble, les intervenants consultés se sont montrés intéressés et favorables à la

démarche proposée. La participation importante des intervenants a enrichi son élaboration

et lui apporte beaucoup de légitimité. Les motivations académiques de l’étude n’ont pas

constitué un frein majeur à leur implication. Ils ont au contraire reconnu la nécessité d’une

telle démarche.

Néanmoins, il a été impossible de réunir l’ensemble des représentants pour une

concertation directe vu leur grand nombre. La gestion des ressources en eau au Sénégal se

caractérise par la séparation qui est faite entre le rural et l’urbain, par le grand nombre

d’intervenants avec des prérogatives quelques fois similaires et par les restructurations

fréquentes des organes d’État concernés. Ceci complique la coordination des efforts et la

mise en place d’une approche participative dont la nécessité dans la gestion des ressources

en eau est pourtant reconnue [ARD, 2000 ; BAD, 2005]. En fait, des organes officiels de

coordination et de concertation comme le Conseil Supérieur de l’Eau et le Comité

Technique de l’Eau ont été mis en place. Cependant nous n’avons pas trouvé de trace

d’activité de ces organismes. On peut supposer qu’il existe des obstacles d’ordre structurel

(dynamique hiérarchique complexe) à la concertation directe entre les groupes

d’intervenants notamment en ce qui concerne les entités étatiques. L’étude n’a pas permis

d’identifier ces obstacles de manière précise. Il serait intéressant de les analyser dans une

étude ultérieure afin d’essayer de les surmonter. Si cette concertation entre décideurs est

rendue plus facile, il serait possible d’aboutir à un ensemble de poids qui soit le résultat

d’un consensus plutôt que d’une moyenne arithmétique. Cela est d’autant plus vrai qu’on

note des différences significatives entre les poids minimaux et maximaux accordés aux

critères (voir section 4.2). La piste de la moyenne géométrique plutôt qu’une moyenne

pondérée arithmétique, qui a été envisagée tardivement dans le cadre de ce mémoire,

pourrait être explorée étant donnée la variabilité des poids.

Dans la perspective de mettre en place des outils de planification mais aussi de suivi et

d’évaluation, des efforts doivent être faits dans la collecte de données actualisées et précises

et dans l’échange d’informations entre les divers intervenants. Il en existe d’ores et déjà

mais leur accès n’est pas facile et les données ne sont pas mises à jour fréquemment. Les

coûts inhérents à ces efforts peuvent constituer un frein à leurs applications. Pourtant, d’un

Page 88: Analyse multicritère pour la priorisation des ...€¦ · BA NDEYE FATOUMATA Analyse multicritère pour la priorisation des interventions en matière d’approvisionnement en eau

77

point de vue technique, étant donné le développement rapide des technologies de

l’information et de la communication, ces problèmes pourraient être facilement surmontés.

L’opérationnalisation des critères a souffert de ce manque de données. Les méthodes

d’évaluations proposées dans ce travail pourraient alors être redéfinies en fonction des

données et des moyens disponibles dans le cadre d’un projet similaire. C’est le cas

notamment du critère Qualité des eaux souterraines qui demanderait probablement la

décomposition de l’indicateur de mesure en deux sous-indicateurs (physico-chimique et

microbiologique).

Page 89: Analyse multicritère pour la priorisation des ...€¦ · BA NDEYE FATOUMATA Analyse multicritère pour la priorisation des interventions en matière d’approvisionnement en eau

Conclusion générale

A l’instar d’un certain nombre de pays en voie de développement, le Sénégal initie des

projets de petite et moyenne envergure pour répondre à l’urgence de l’approvisionnement

en eau dans le monde rural. En amont de ces projets, l’insuffisance des moyens impose

qu’un choix soit fait quant aux priorités d’intervention en matière d’approvisionnement en

eau. En tant que ressource naturelle vitale intégrant bien d’autre dimensions (sociale,

environnementale, humaine, culturelle), l’eau ne peut être traitée comme un simple bien

économique dont l’allocation dépendrait de l’équilibre entre l’offre et la demande. La

multiplicité de ses dimensions impose une gestion intégrée et concertée qui s’avère

complexe. Dans le cadre de la présente étude, le contexte décisionnel a été analysé. Des

critères ont été proposés dans le but de faciliter, à l’échelle régionale, la priorisation des

interventions concernant l’approvisionnement en eau en milieu rural au Sénégal. Ces

critères sont en rapport avec le système de valeurs de différents intervenants identifiés dans

la gestion des ressources en eau et les objectifs fixés par l’État. Des indicateurs de mesure

pour ces critères sont proposés dans le contexte du Sénégal. Ces indicateurs, des

pondérations définis par des intervenants sénégalais, et des fonctions de valeur définies à

l’aide du logiciel M-MACBETH, ont permis de ranger les arrondissements de la région

rurale de Diourbel par ordre de priorité. D’après les résultats obtenus, trois de ces

arrondissements ressortent comme plus prioritaires du point de vue de l’approvisionnement

en eau. Globalement, l’application d’une telle démarche d’aide à la décision s’avère donc

tout à fait faisable. Néanmoins, une amélioration de la collecte et de la compilation de

données sur l’utilisation de l’eau au Sénégal faciliterait l’expansion et le raffinement ce

type de démarche. Par ailleurs le raffinement de ce type de démarche pourrait être entrepris

notamment en développant des méthodes d’agrégation pour comparer des sources d’eau sur

plusieurs paramètres en même temps ou encore en analysant de manière spécifique le lien

entre la capacité et la volonté de payer. En fait, l’étude de chacun de ces critères pris

individuellement pourrait constituer un sujet d’étude intéressant.

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Annexes

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88

Annexe A : Présentation de la région de Diourbel

La région de Diourbel s’étend sur de 4769 km² subdivisés en trois départements (Diourbel,

Bambay et Mbaké), huit arrondissements (Baba-Garage, Lambaye, Ngoye, Ndoulo,

Ndindy, Ndame, Kael et Taïf) et 33 communautés rurales. Elle abrite une population de 929

414 habitants [MAHS, 2005]. Située dans le bassin arachidier, elle a pour principales

activités l’agriculture et l’élevage. Les difficultés d’ordre climatique, l’appauvrissement des

terres et le manque d’infrastructures d’adduction d’eau auxquelles fait face la région

constituent des obstacles majeurs au développement de ces activités génératrices de revenus

pour une population essentiellement rurale mais plus largement pour le bien-être de cette

population. En effet, la région de Diourbel dispose d’un climat soudano-sahélien chaud et

sec. Sur le plan pluviométrique, elle ne reçoit en moyenne que 400 à 600 mm pour 30 à 40

jours de pluie avec une irrégularité spatio-temporelle très marquée. Une urbanisation

croissante et une évolution démographique rapide accroissent ces difficulté, et augmentent

la pression sur les ressources hydriques [Agence régionale de la prévision et de la

statistique 2005 ; PNUD, 2001].

L’approvisionnement en eau se fait essentiellement à partir des ressources en eaux

souterraines (avec une forte exploitation de la nappe du maestrichtien). Le taux d’accès à

l’eau potable est estimé à 77% [MASH, 2005] avec néanmoins des disparités. En outre,

bien que le potentiel hydraulique de la région soit considéré comme important, la quantité

disponible pour les populations de même que la qualité de ces eaux sont insatisfaisants. En

effet, les points d’approvisionnement sont disparates. Les équipements sont insuffisants et,

par endroit, vétustes. Par ailleurs, les teneurs en fluorures et en sel sont au dessus des

normes sanitaires dans toute la région. Bambey et Mbaké connaissent en plus des

concentrations en fer importantes. Les problèmes d’assainissement tel que la proximité des

fosses septiques avec le réseau d’eau potable, l’absence de système d’évacuation adéquat

des ordures et des eaux usées, la pollution de la nappe superficielle etc., se répercutent sur

la qualité des eaux de consommation. Diourbel autrefois zone maraîchère,

souffreaujourd’hui de la sécheresse. Les agriculteurs ne peuvent compter que sur les eaux

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89

de pluies qui ne tombent que durant les trois mois d’hivernage et de manière irrégulière.

Pour le reste, l’eau, souvent trop salée est impropre à l’agriculture.

A.1 Situation géographique et contexte physique

La région de Diourbel se situe entre 14°30’ et 15° de latitude nord et entre 15°40’ et

16’40 de longitude ouest (ARD, 2000). Au centre ouest du pays, elle est limitée au

Nord par la région de Thiès et de Louga, au Sud par les régions de Thiès et de Fatick,

à l’Est par les régions de Fatick et Louga et à l’Ouest par la région de Thiès.

Avec ses 4769 km² de superficie, elle est la région la moins étendue du pays après

Dakar. Le relief y est plat, avec quelques cuvettes et de rares formations dunaires. Les

sols y sont essentiellement de type Dior et Deck-Dior ferrugineux.

A.2 Population

En termes de densité de population, la région de Diourbel se place en deuxième

position après Dakar. Elle abrite 929 414 habitants [MAHS, 2005] dont près de 78%

en milieu rural. La population est essentiellement jeune et féminine : 59 % ont moins

de 20 ans, et 53% sont des femmes. [Senagrosol, 2006]. Touba, capitale du

mouridisme, dans le département de Mbaké -par ailleurs le plus peuplé de la région-

est une zone de forte attraction. Elle abrite 96% de la population de l’arrondissement

et 47% de l’ensemble de la région [Agence régionale de la prévision et de la

statistique, 2005]; cela s’explique par sa fonction religieuse et le caractère commercial

de la cité. Cette affluence s’explique aussi par le fait que les terres et l’eau y sont

gratuites.

La population diourbelloise est caractérisée par une urbanisation croissante, et une

évolution démographique rapide. En effet, le taux de croissance démographique de la

région de 3,8% est l’une des plus forte du pays (2,4% pour le plus récent recensement

en 2002) [Agence régionale de la prévision et de la statistique 2005 ; PNUD, 2001].

On note toutefois une forte dépression démographique dans la population active due à

des difficultés d’ordre économiques et sociales (activités agricoles et industrielles peu

prospères, exode rural…).

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90

A.3 Climat

La région de Diourbel dispose d’un climat soudano-sahélien chaud et sec. Sur le plan

pluviométrique, elle ne reçoit en moyenne que 400 à 600 mm pour 30 à 40 jours de pluie

avec une irrégularité spatio-temporelle très marquée. Les températures moyennes oscillent

entre 27 à 30°C avec un maximum entre avril et juin. La non fonctionnalité des réseaux

hydrographique du Car-Car (au nord) et du Sine (au sud-est) illustre la dégradation des

conditions climatiques au cours des dernières décennies [Badiane et al. 2000].

A.4 Activités économiques dominantes

Diourbel n’est pas nantie sur le plan industriel. En effet, elle ne renferme que deux

unités industrielles : la SONACOS et la SETUNA, des usines alimentaires. Malgré

des difficultés d’ordre climatique et l’appauvrissement des terres, l’agriculture est une

activité dominante avec une prépondérance de l’arachide, du mil, de la souna, du

sorgho et du niébé [ARD-Diourbel, 2000]. L’élevage y est aussi pratiqué. Il est

cependant, de plus en plus extensif et transhument à cause de la rareté des pâturages

au profit de l’agriculture. Le cheptel de la région est important avec une

prédominance au Nord, à Mbaké.

A.5 Condition d’approvisionnement en eau potable et eau

d’irrigation

L’approvisionnement en eau se fait essentiellement à partir des ressources en eaux

souterraines (avec une forte exploitation de la nappe du maestrichtien), les cours d’eau

douce étant quasi inexistants. Avec plus de 190 ouvrages hydrauliques [MAHS, 2005], le

taux d’accès à l’eau potable est estimé à 77% avec néanmoins des disparités. En outre, bien

que le potentiel hydraulique de la région soit considéré comme important, la quantité

disponible pour les populations de même que la qualité de ces eaux sont insatisfaisants. En

effet, les points d’approvisionnement sont disparates : le principal cours d’eau (le Sine)

subit des infiltrations saline. Lors de fortes pluies, il se forme des marres dans les zones

dépressionnaires. Les équipements sont insuffisants et, par endroit, vétustes. Par ailleurs,

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91

les teneurs en fluorures et en sel sont au dessus des normes sanitaires dans toute la région.

Bambey et Mbaké connaissent en plus des concentrations en fer importantes. Les

problèmes d’assainissement tel que la proximité des fosses septiques avec le réseau d’eau

potable, l’absence de système d’évacuation adéquat des ordures et des eaux usées, la

pollution de la nappe superficielle etc. se répercutent sur la qualité des eaux de

consommation.

A.6 Sols de la région

Trois types de sols sont présents dans la région de Diourbel [ARD-Diourbel, 2000] :

- Les sols ferrugineux tropicaux peu ou pas lessivés (‘‘Diors’’) ils couvrent 80% des

terres. Ils sont composés à 95% de sable, 3% d’argile et 1,5% de limon. Perméables,

leur capacité de rétention en eau est généralement faible ainsi que leur capacité

d’échange. Ce type de sol est pauvre en phosphore (moins de 150 mg/kg de terre), en

azote (0,3 à 1,5%) et en est de même pour la concentration en matière organique

(0,2%). Le pH est souvent acide. Lorsqu’ils sont bien amendés, ses sols sont propices à

la culture de l’arachide, du mil, du niébé, de l’oseille, du manioc et de la pastèque.

- Les sols brun hydromorphes (‘‘Deck’’) d’une apparence argileuse qui représente 15%

des sols de la région. Ils sont favorables aux cultures céréalières et maraîchères.

- Les sols ferrugineux tropicaux rouge (‘‘Deck-diors’’). Ils ne couvrent que 5% des

terres. Ils sont propices à la culture du Sorgho, du maïs, des agrumes et de la tomate.

A.7 Cheptel

Le cheptel est estimé à 134 718 bovins, 294 750 bovins et caprins, 475 800 volailles et à 82

125 têtes d’équins et d’asins selon les recensements 2005 de l’inspection régional des

services vétérinaires. À cause du manque de pâturages -les terres agricoles étant rares et

très convoitées- le bétail transhume tout au long de l’année entre le Sud et le Sud-est. De

plus la majeure partie des troupeaux séjourne pendant une certaine période hors de la

région.

A.8 La communauté rurale de Touba Mosquée : un cas particulier

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92

Parmi les 8 arrondissements que compte Diourbel, celui de Ndame abrite une communauté

rurale aux caractéristiques particulières de sorte qu’elle a été exclue de l’analyse. Il s’agit

de la communauté rurale de Touba Mosquée. Capitale du mouridisme, Touba Mosquée,

dans le département de Mbaké, a les caractéristiques d’une ville d’après le critère de

délimitation entre l’hydraulique rurale et urbaine (5000 habitants); elle est pourtant

considérée comme une communauté rurale. De même, le fait que les terres et l’eau y sont

gratuites contribue à cette attractivité. Dans ce contexte démographique et socio-religieux,

le traitement de la question de l'eau relève d'une approche spécifique [MAHS, 2005].

Page 104: Analyse multicritère pour la priorisation des ...€¦ · BA NDEYE FATOUMATA Analyse multicritère pour la priorisation des interventions en matière d’approvisionnement en eau

93

Annexe B : Description des ouvrages d’adduction d’eau

en milieu rural

B.1Le branchement domiciliaire

Les usagers bénéficiant de ce type de branchement sont raccordés à un réseau de conduites

de distribution alimenté par un château d’eau. Ils possèdent un (ou plusieurs) robinet(s) à

l’intérieur de leur concession. En milieu rural, ceci n’implique pas nécessairement un

traitement de l’eau distribuée.

B.2 La borne fontaine La borne fontaine est une infrastructure de

distribution d’eau publique. Elle est raccordée à un

réseau alimenté par un château d’eau ou directement

au forage muni d’une pompe électrique. La borne

fontaine est préférentiellement située au centre du

village. Les habitants viennent s’y fournir en eau dans

des bidons ou des bassines le plus souvent sans

couvercle. Le fontainier est chargé de gérer la vente.

En son absence le robinet est mis sous scellé.

B.3 Le forage avec pompe à motricité humaine

Au niveau du forage à motricité humaine, le sol est foré jusqu'à

la nappe et les parois sont protégées par un enduit de bentonite

comme pour le reste des forages. L’eau est acheminée à la

surface via une pompe manuelle, elle sort d’un tuyau en métal

et est recueillie comme dans le cas des bornes fontaines dans

des récipients.

Figure 11- Borne fontaine

Figure 12 - Borme avec

pompe à motricité humaine

Page 105: Analyse multicritère pour la priorisation des ...€¦ · BA NDEYE FATOUMATA Analyse multicritère pour la priorisation des interventions en matière d’approvisionnement en eau

94

B.4 Le puits moderne

Le puits moderne est un ouvrage hydraulique dont le diamètre conventionnel est compris

entre 1,80m et 2m. Il est souvent en béton armé. Sa différence par rapport au puits

traditionnel est sa grande pénétration sous le niveau statique de la nappe. Cette descente

sous le niveau statique nécessite le recours à des techniques perfectionnées7. La limite de

creusement des puits modernes à grand diamètre varie selon la profondeur du niveau des

eaux souterraines, mais est environ de 40 à 50 m au maximum, alors que pour les forages,

une profondeur plus grande est possible8. L’eau est acheminée à la surface par un sceau de

puits. Comme dans le cas des autres infrastructures publiques d’adduction d’eau, l’eau est

recueillie dans des récipients.

Ce seau est plongé dans le puits et ramené

à la surface par une corde. Le sol autour du

puits est protégé par une dalle de ciment

pour limiter une éventuelle pollution par

infiltration. L’accès aux animaux est aussi

évité en surélevant les abords immédiats

du puits moderne.

B.5 Le puits traditionnel Aussi appelé puits artésien, le puits traditionnel est un puits à trou creusé manuellement

protégé par des pierres ou du bois mais on en trouve aussi protégé par une structure en

ciment ou en argile.

7 DGPRE : Base de données hydrogéologie (consulté en juin 2007). 8 JGRC (Société Japonaise des Ressources Vertes - département outre-mer) (2001) : Guide technique du développement des ressources

en eau. Construction d'infrastructures hydrauliques adaptées aux conditions locales : puits, mares et mini-barrages, mars 2001.

Figure 13- Puits moderne

Page 106: Analyse multicritère pour la priorisation des ...€¦ · BA NDEYE FATOUMATA Analyse multicritère pour la priorisation des interventions en matière d’approvisionnement en eau

95

Annexe C : Questionnaire transmis aux présidents de

communauté rurale (PCR) pour estimer l’acceptabilité

des populations à payer l’eau

Les hypothèses émises pour l’évaluation du critère volonté de payer

- L’opinion des PCR ou des sous-préfets représente celle de la population qu’ils

administrent

- Les personnes interrogées ont une bonne connaissance des avantages liés à une

amélioration de la desserte, de l’intérêt que cela représente pour la population et de

la valeur qu’elle lui accorde

Note pour l’enquête

- Informer le PCR que l’enquête n’a été commandée par aucun organisme (ni SDE ni

SONES etc.) et qu’il est réalisé dans un cadre académique (maîtrise en génie civil)

pour recueillir des données sur la gestion des ressources en eau dans la communauté

rurale (CR).

- Exposer clairement le but de l’enquête : recueillir l’opinion de la population de la

CR en question. Le PCR représente ici cette population. Ses réponses doivent donc

refléter l’opinion de la majeure partie de la population de toute la communauté

rurale.

- Informer le PCR que d’autres CR de la région seront visitées pour l’enquête (2 à 3

par arrondissement) selon l’importance de la population. L’enquête couvre toute la

population de la CR qu’il administre et non pas seulement celle du village où est

basé le chef le de CR.

- S’assurer que le PCR comprend bien les questions et si nécessaire les traduire en

wolof et ne pas hésiter à revenir sur certaines questions.

- Insister sur l’importance de leur contribution à la présente enquête.

- Le scénario d’adduction d’eau améliorée (‘‘à la question si une eau de meilleure

qualité…’’) implique des infrastructures d’eau répondant mieux aux besoins des

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96

habitants et à une distance raisonnable ainsi que de l’eau de meilleure qualité; ceci

aussi bien pour l’eau de consommation que pour l’eau d’irrigation.

- Point d’eau de distribution : borne fontaine (BF), branchement privé (BP), puits

protégé ou puits moderne (PM) et forage villageois avec pompe à motricité humaine

(FVPMH).

- Le tarif est un tarif moyen même s’il peut varier d’un village à un autre à l’intérieur

de la communauté rurale.

- Il est très important de préciser la quantité en litre ou en m³ pour le prix aux

questions 10 et 11 de même qu’aux questions 13, 15 et 17

- Demander à la fin de l’interview, en tant que question hors enquête, comment

s’explique la différence de tarif entre la borne fontaine et le BP afin de mieux

comprendre les préférences et l’attitude de la population.

- Aux questions 13, 15 et 17, si le répondant répond OUI, pour obtenir le prix

maximal, démarrer avec le prix payé actuellement à la borne fontaine et rajouter

10F CFAjusqu’à ce que le répondant juge que c’est le maximum qu’il est près à

payer.

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97

Questionnaire

Identification

Département : _____________________

Arrondissement : _____________________

Communauté rurale (CR) : _____________________

Contacts du PCR (tel etc.) __________________

Rapport de visite

Date de la visite : _____________________

Nom du répondant : _____________________

Nombre d’année en poste : _____________________

Commentaires

_________________________________________________________________________

_________________________________________________________________________

_________________________________________________________________________

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98

1 Voir importance

agriculture

irriguée dans

CR

Y-a-t-il des superficies

irriguées dans la CR ?

Non Un peu Beaucoup

2 Vérifier

l’uniformité des

cultures

Quelles sont les cultures

dominantes dans la CR ?

- les fruits (pastèque, mangue etc)

- les légumes (arachide, niébé etc.)

- les céréales (mil, sorgho etc.)

3 Vérifier Q14,

16 et 18

Quelles sont les limites au

développement de

l’agriculture ?

- les surfaces cultivables

- le prix de l’eau

- la qualité de l’eau

- la disponibilité de l’eau

- autres

4 Évaluer

cohérence Q13,

15 et 17

Le revenu mensuel des

habitants est en moyenne

compris entre

- 15 000 et 35 000 FCFA

- 35 000 et 50 000 FCFA

- Plus de 50 000 FCFA

5 Attitude face à

au fait de devoir

payer

Complète Q9

Quelle est l’origine de l’eau

utilisée pour l’irrigation ?

- Puits

- BF

- Céanes

- Autre :

6 Liée à Q11 Quelle est l’infrastructure

d’adduction d’eau pour usage

domestique (animaux et être

humain) la plus utilisée dans

toute la CR ? (plusieurs

réponses possibles)

- Puits moderne

- BP

- BF

- ForagePMH

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99

7 Renseignement sur

pannes et si prix déjà problématique

Vérifie Q14

Quels sont les difficultés

rencontrées pour

l’approvisionnement en eau de

consommation?

- aucune difficulté

- les quantités insuffisantes

- la qualité insuffisante

- les pannes trop fréquentes (détails si possible)

- la distance trop grande

- le prix est trop élevé

- autres :

8 Hypothèse critère

distance moyenne Quelle est la distance moyenne au

lieu d’approvisionnement pour

l’eau de consommation?

- moins de 1 km

- entre 1 et 2 km

- plus d e 2 km

9 L’eau d’irrigation est-elle

payante ? (précisez le nombre de

litres ou m³ pour le prix payé) ?

Non OUI

-Puits :___________F/________(L ou m³)

-BF: ______________F/_________

-Céanes:___________F/_________

-Autre : ___________F/_________

10 Comparer au

maximum de Q13,

15 et 17

L’eau de consommation est-elle

payante (précisez nombre de litres

ou m³ pour le prix payé) ?

Non Oui

- à la BF __________F/_______(L ou m³)

- au BP ____________F/_________

- au FVPMH ________F/_________

- au puits ___________F/_________

- vendeurs ambulants _______F/________

11 Combien paye t- on en moyenne

pour un raccordement

domiciliaire?

_________________FCFA

12 Les habitants préfèrent-ils payer

une facture (du compteur) ou au

jour le jour ?

Recevoir une facture

(tous les 1,2 ou 3 mois)

Payer à chaque prélèvement

Supposons que l’approvisionnement collectif en eau soit amélioré (meilleure qualité, plus grande proximité, plus grande

quantité) ; est-ce que les habitants de votre arrondissement seraient prêts à payer davantage pour l’eau ? Quel serait le

prix maximal acceptable (précisez pour quelle quantité)?

13 Oui

Prix maximal:_______FCFA

Pour________(litre ou m³)

Peut être maximal:_______FCFA

Pour________(litre ou m³)

Non

14 Si non, pour quelle raison ? - la situation actuelle leur convient

- la situation ne leur convient pas mais la majorité de la population

qui paie déjà l’eau n’a pas les moyens de payer plus cher

- autre (à préciser)

Supposons que l’approvisionnement privé en eau soit amélioré (meilleure qualité, plus grande quantité, moins de

panne) ; est-ce que les habitants de votre arrondissement seraient prêts à payer davantage pour l’eau ? Quel serait le prix

maximal acceptable (précisez pour quelle quantité)?

15 Oui

Prix maximal: _______FCFA

Pour________(litre ou m³)

Peut être

Prix maximal:______FCFA

Pour________(litre ou m³)

Non

16 Si non, pour quelle raison ? - la situation actuelle leur convient

- la situation ne leur convient pas mais la majorité de la population

qui paie déjà l’eau n’a pas les moyens de payer plus cher

- autre (à préciser)

Supposons que l’approvisionnement en eau pour l’irrigation soit amélioré (meilleure qualité, plus grande quantité) ;

est-ce que les habitants de votre arrondissement seraient prêts à payer davantage pour l’eau ? Quel serait le prix maximal

acceptable (précisez pour quelle quantité)?

17 Oui

Prix maximal:______FCFA

Pour________(litre ou m³)

Peut être

Prix maximal:______FCFA

Pour________(litre ou m³)

Non

18 Si non, pour quelle raison ? - la situation actuelle leur convient

- la situation ne leur convient pas mais la majorité de la population

qui paie déjà l’eau n’a pas les moyens de payer plus cher

- autre (à préciser)

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100

Annexe D : Critère accessibilité au point d’eau - Script

ArcView

Le script Arcview illustré ci-après a servi à estimer des distances à parcourir pour la

satisfaction des besoins en eau des populations des arrondissements de Diourbel (critère

d’Accessibilité au point d’eau).

Dans un premier temps, pour chaque village identifié (par son nom, sa communauté rurale,

son arrondissement et ses coordonnées géographiques), la différence entre le EPE

nécessaire et le EPE présent est calculée.

- Si la valeur est égale à 0, le village est consigné dans la liste des villages comblés en

EPE (Village_EPE_Comblé)

- Si la valeur est supérieure à 0, le village est consigné dans la liste des villages en

surplus d’EPE (Village_EPE_Surplus)

- Si la valeur est inférieure à 0, le village est consigné dans la liste des villages en

déficit d’EPE (Village_EPE_Déficit)

Ensuite, pour chaque village dans la liste des villages en déficit, la distance avec l’ensemble

des villages de la liste des villages en surplus d’EPE est calculée. En débutant par la

distance la plus petite, le surplus du village le plus proche est alloué au village déficitaire

préalablement choisi jusqu’à épuisement du surplus ou satisfaction du déficit. Si le surplus

est épuisé, le second village en surplus le plus proche du village déficitaire sert à combler

une partie ou tout le reste du déficit du village en question. Le premier village ayant servi à

réduire le déficit est transféré dans la liste des villages comblés (Village_EPE_Comblé). Si

le déficit est comblé sans épuisant du surplus, le village en surplus reste dans la liste pour

réduire éventuellement d’autres déficits.

La somme des distances nécessaires à combler le déficit du village déficitaire constitue

l’indicateur pour le critère d’accessibilité. Le script offre la possibilité de limiter

l’allocation à la communauté rurale, à l’arrondissement ou à l’ensemble de la région.

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