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Le praticien en anesthésie-réanimation, 2004, 8, 1 35 MISE AU POINT Anesthésie et analgésie du patient souffrant d’une hypertension artérielle pulmonaire grave Vincent Laudenbach INTRODUCTION On est souvent amené à prendre en charge un patient souffrant d’une hypertension artérielle pulmonaire (HTAP) sévère en chirurgie cardio- thoracique. Mais la multiplicité des causes de cette affection fait que l’anesthésiste-réanimateur est souvent confronté à cette situation dans des domaines d’activité chirurgicale variés, chez l’enfant comme chez l’adulte, activité obstétricale incluse. Les objectifs de cette revue sont : – de faire la synthèse des connaissances actuelles concer- nant la physiopathologie de l’hypertension artérielle pulmo- naire ; – d’en indiquer les principales causes et les moyens du dia- gnostic ; – de faire le point des traitements disponibles ; – d’intégrer ces données à la réflexion présidant au choix d’une stratégie anesthésique ou analgésique, périopéra- toire ou obstétricale. Le lecteur désireux d’obtenir de plus amples informations sur les aspects physiopathologiques, diagnostiques et thérapeutiques de l’HTAP pourra se référer à l’une des nombreuses revues publiées récemment sur ces aspects (1-4). PHYSIOLOGIE DE LA CIRCULATION PULMONAIRE Anatomie — Valeurs normales de pression et de résistance Les valeurs de pression artérielle pulmonaire (PAP) norma- les pour un individu adulte sont de 18 à 25 mmHg pour la PAP systolique (PAPS), 6 à 10 mmHg pour la PAP diastoli- que (PAPD) et 12 à 16 mmHg pour la PAP moyenne (PAPM). Ces valeurs, basses au regard de l’importance du débit sanguin pulmonaire, reflètent le faible niveau de résis- tance de cette circulation (2-4). Les artérioles précapillaires pulmonaires sont très compliantes. De plus, le lit vasculaire pulmonaire comporte de nombreux vaisseaux susceptibles d’être recrutés, c’est-à-dire pouvant être réouverts en cas d’élévation du débit d’éjection du ventricule droit (VD). Les résistances vasculaires pulmonaires (RVP) dépendent de la différence de pression qui règne entre la lumière vasculaire et l’espace péri-vasculaire. On distingue les vaisseaux capil- Points essentiels • L’hypertension artérielle pulmonaire (HTAP) primitive est une pathologie rare (1 à 2 cas par millions d’habitants et par an). Son pro- nostic est sévère : la médiane de survie après diagnostic est de l’ordre de 2 à 3 ans. • Les HTAP secondaires sont plus fréquentes, compliquant le plus sou- vent l’évolution d’une cardiopathie (cardiopathie congénitale ou valvu- laire, insuffisance cardiaque gauche congestive) ou d’une insuffisance respiratoire. • La grossesse est une circonstance révélatrice classique de l’HTAP, en raison des modifications hémodynamiques physiologiques qui l’accompagnent (augmentation de la volémie et du débit cardiaque). La mortalité de l’HTAP chez la femme enceinte est très lourde, variant de 30 à 60 % selon les études et les causes. Le décès peut survenir en pré-, per- ou, le plus souvent, en post-partum, jusqu’à 2 à 4 semaines après la naissance. L’interruption prématurée de la grossesse peut être indiquée pour sauvetage maternel. • La prise en charge anesthésique et analgésique de ces patients peut faire partie intégrante du traitement étiologique de l’HTAP (chirurgie cardio- pulmonaire, transplantation) ou intervenir de façon inopinée dans l’évo- lution de la maladie, en raison d’un acte chirurgical non lié à celle-ci. • La chirurgie avec circulation extracorporelle comporte un risque particulier de poussée d’HTAP lié aux nombreuses perturbations hémodynamiques et métaboliques qu’elle engendre. • Les thérapeutiques symptomatiques visent à : 1) éviter l’aggravation d’une vasoconstriction pulmonaire réflexe ou d’une défaillance ventriculaire droite. Dans cette optique, la recherche d’une homéostasie optimale (normoxie, correction d’une acidose, d’une hypercapnie, d’une anémie, lutte contre l’hypothermie) et une stratégie analgésique efficace sont indispensables en périopératoire ; 2) améliorer les conditions de charge et la pression de perfusion coro- naire au niveau du ventricule droit (optimisation volémique, inotro- pes, vasopresseurs artériels systémiques). • Les agents vasodilatateurs pulmonaires délivrés par voie inhalée (NO, iloprost) sont les mieux tolérés car ils n’ont pas d’effet systémi- que, contrairement aux vasodilatateurs administrés par voie générale (inhibiteurs calciques, prostacycline, dérivés nitrés). Ils peuvent être poursuivis pendant une anesthésie. • Les effets propres des différentes stratégies anesthésiques dans ce contexte sont encore assez mal connus. Il faut vraisemblablement pré- férer autant que possible les techniques d’anesthésie locorégionale, y compris spinales, à condition d’employer des associations morphini- ques-anesthésiques locaux à faible concentration et de fractionner les doses pour une installation progressive du bloc. En cas d’anesthésie générale, il est souhaitable de privilégier les opiacés, d’éviter les fortes concentrations d’agents volatils et d’adapter la ventilation mécanique pour en limiter les répercussions hémodynamiques.

Anesthésie et analgésie du patient souffrant d’une hypertension artérielle pulmonaire grave

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Page 1: Anesthésie et analgésie du patient souffrant d’une hypertension artérielle pulmonaire grave

Le praticien en anesthésie-réanimation, 2004, 8, 1 35

M I S E A U P O I N T

Anesthésie et analgésie du patient souffrant d’une hypertension artérielle pulmonaire graveVincent Laudenbach

INTRODUCTION

On est souvent amené à prendre encharge un patient souffrant d’unehypertension artérielle pulmonaire(HTAP) sévère en chirurgie cardio-thoracique. Mais la multiplicité descauses de cette affection fait quel’anesthésiste-réanimateur est souventconfronté à cette situation dans des

domaines d’activité chirurgicale variés, chez l’enfant commechez l’adulte, activité obstétricale incluse. Les objectifs decette revue sont :– de faire la synthèse des connaissances actuelles concer-nant la physiopathologie de l’hypertension artérielle pulmo-naire ;– d’en indiquer les principales causes et les moyens du dia-gnostic ;– de faire le point des traitements disponibles ;– d’intégrer ces données à la réflexion présidant au choixd’une stratégie anesthésique ou analgésique, périopéra-toire ou obstétricale. Le lecteur désireux d’obtenir de plusamples informations sur les aspects physiopathologiques,diagnostiques et thérapeutiques de l’HTAP pourra se référerà l’une des nombreuses revues publiées récemment sur cesaspects (1-4).

PHYSIOLOGIE DE LA CIRCULATION PULMONAIRE

Anatomie — Valeurs normales de pression et de résistanceLes valeurs de pression artérielle pulmonaire (PAP) norma-les pour un individu adulte sont de 18 à 25 mmHg pour laPAP systolique (PAPS), 6 à 10 mmHg pour la PAP diastoli-que (PAPD) et 12 à 16 mmHg pour la PAP moyenne(PAPM). Ces valeurs, basses au regard de l’importance dudébit sanguin pulmonaire, reflètent le faible niveau de résis-tance de cette circulation (2-4). Les artérioles précapillairespulmonaires sont très compliantes. De plus, le lit vasculairepulmonaire comporte de nombreux vaisseaux susceptiblesd’être recrutés, c’est-à-dire pouvant être réouverts en casd’élévation du débit d’éjection du ventricule droit (VD). Les

résistances vasculaires pulmonaires (RVP) dépendent de ladifférence de pression qui règne entre la lumière vasculaireet l’espace péri-vasculaire. On distingue les vaisseaux capil-

Points essentiels

• L’hypertension artérielle pulmonaire (HTAP) primitive est unepathologie rare (1 à 2 cas par millions d’habitants et par an). Son pro-nostic est sévère : la médiane de survie après diagnostic est de l’ordrede 2 à 3 ans.• Les HTAP secondaires sont plus fréquentes, compliquant le plus sou-vent l’évolution d’une cardiopathie (cardiopathie congénitale ou valvu-laire, insuffisance cardiaque gauche congestive) ou d’une insuffisancerespiratoire.• La grossesse est une circonstance révélatrice classique de l’HTAP, enraison des modifications hémodynamiques physiologiques quil’accompagnent (augmentation de la volémie et du débit cardiaque).La mortalité de l’HTAP chez la femme enceinte est très lourde, variantde 30 à 60 % selon les études et les causes. Le décès peut survenir enpré-, per- ou, le plus souvent, en post-partum, jusqu’à 2 à 4 semainesaprès la naissance. L’interruption prématurée de la grossesse peut êtreindiquée pour sauvetage maternel.• La prise en charge anesthésique et analgésique de ces patients peut fairepartie intégrante du traitement étiologique de l’HTAP (chirurgie cardio-pulmonaire, transplantation) ou intervenir de façon inopinée dans l’évo-lution de la maladie, en raison d’un acte chirurgical non lié à celle-ci.• La chirurgie avec circulation extracorporelle comporte un risqueparticulier de poussée d’HTAP lié aux nombreuses perturbationshémodynamiques et métaboliques qu’elle engendre.• Les thérapeutiques symptomatiques visent à :1) éviter l’aggravation d’une vasoconstriction pulmonaire réflexe oud’une défaillance ventriculaire droite. Dans cette optique, la recherched’une homéostasie optimale (normoxie, correction d’une acidose,d’une hypercapnie, d’une anémie, lutte contre l’hypothermie) et unestratégie analgésique efficace sont indispensables en périopératoire ;2) améliorer les conditions de charge et la pression de perfusion coro-naire au niveau du ventricule droit (optimisation volémique, inotro-pes, vasopresseurs artériels systémiques).• Les agents vasodilatateurs pulmonaires délivrés par voie inhalée(NO, iloprost) sont les mieux tolérés car ils n’ont pas d’effet systémi-que, contrairement aux vasodilatateurs administrés par voie générale(inhibiteurs calciques, prostacycline, dérivés nitrés). Ils peuvent êtrepoursuivis pendant une anesthésie.• Les effets propres des différentes stratégies anesthésiques dans cecontexte sont encore assez mal connus. Il faut vraisemblablement pré-férer autant que possible les techniques d’anesthésie locorégionale, ycompris spinales, à condition d’employer des associations morphini-ques-anesthésiques locaux à faible concentration et de fractionner lesdoses pour une installation progressive du bloc. En cas d’anesthésiegénérale, il est souhaitable de privilégier les opiacés, d’éviter les fortesconcentrations d’agents volatils et d’adapter la ventilation mécaniquepour en limiter les répercussions hémodynamiques.

Page 2: Anesthésie et analgésie du patient souffrant d’une hypertension artérielle pulmonaire grave

Le praticien en anesthésie-réanimation, 2004, 8, 136laires intra-alvéolaires, qui ne sont ouverts que lorsque lavaleur de la pression intraluminale dépasse celle de la pres-sion alvéolaire, et les vaisseaux extra-alvéolaires (veines pul-monaires, soumises à la pression pleurale et gros vaisseauxintra-parenchymateux, soumis à la pression interstitielle).La participation de ces différents vaisseaux rend compte dela forme en U caractéristique de la relation entre le volumepulmonaire et les RVP (figure 1). Les RVP sont minimaleslorsque le volume pulmonaire est à la capacité résiduellefonctionnelle (CRF). Elles augmentent lorsqu’un collapsusalvéolaire abaisse le volume pulmonaire au niveau duvolume résiduel (VR). Ce sont alors les vaisseaux capillairesextra-alvéolaires qui contribuent majoritairement à cetteaugmentation. À l’opposé, une surdistension des territoiresalvéolaires aérés due, par exemple, à l’application d’unepression expiratoire positive (PEP) extrinsèque excessiveélève également les RVP, avec cette fois participation descapillaires intra-alvéolaires.

D’autres facteurs influent également sur les RVP : on peutnotamment citer la viscosité sanguine et, donc, l’hémato-crite, l’existence d’une obstruction vasculaire pulmonaireou celle d’une compression extravasculaire (œdème périca-pillaire par exemple) (2, 4). En pratique clinique, le cathé-térisme cardiaque droit permet de mesurer directement laPAP et les RVP, dont les déterminants sont les valeurs dePAPM, PAPO et de débit cardiaque (estimé par thermodilu-tion). On applique la formule suivante :

RVP = (PAPM – PAPO)/débit cardiaque

La valeur des RVP se situe normalement entre 90 et 120dynes.s.cm–5 (ou 1,1 à 1,4 unités Wood) chez l’adulte. Il fautsouligner la majoration du risque du cathétérisme artérielpulmonaire en cas d’HTAP sévère. Certains auteurs propo-

sent de réaliser le cathétérisme sans mesure de la PAPO,afin de minimiser le risque de rupture de l’artère pulmo-naire lié au gonflage du ballonnet. La PAP peut égalementêtre estimée par la mesure du gradient de signal Doppler auniveau d’une fuite tricuspide en échographie (transthoraci-que ou transœsophagienne). Le caractère non invasif del’échographie en fait bien entendu la méthode de choixpour le dépistage de l’HTAP (2, 4).

Régulation du tonus vasculaire pulmonaire

En réponse à l’hypoxie, la vascularisation pulmonaire est lesiège d’une vasoconstriction (au contraire de la circulationartérielle systémique). Inversement, une hyperoxie induitune vasodilatation. La vasoconstriction pulmonaire hypoxi-que (VPH) est un mécanisme physiologique protecteur des-tiné à limiter le shunt intrapulmonaire en cas d’atteinterespiratoire hypoxémiante. Néanmoins, une hypoxie mar-quée, portant sur une part importante de la vascularisationpulmonaire (par exemple, en cas d’atélectasie) peut entraî-ner une élévation des RVP. L’acidose est également un puis-sant facteur facilitateur de la VPH, tandis qu’une alcalosemodérée l’inhibe (1, 2, 4). Les mécanismes présidant à larégulation du tonus vasculaire pulmonaire sont complexeset incomplètement élucidés. L’endothélium vasculaire, eninteraction avec les cellules musculaires lisses, joue un rôleprépondérant. Le couple formé par ces deux types cellulai-res subit en permanence l’influence dynamique des méca-niques circulatoire et respiratoire, ainsi que les effets dedivers neurotransmetteurs et signaux hormonaux. Parmices derniers, le monoxyde d’azote (NO) est un acteur-clé,exerçant un effet vasodilatateur. Au niveau pulmonaire, ilest produit par la NO-synthase endothéliale (NOSe) à partirde la L-Arginine. En raison de son poids moléculaire très fai-ble, il diffuse facilement au travers des membranes des cel-lules musculaires lisses adjacentes. Il active la guanylatecyclase soluble cytoplasmique, augmentant ainsi la concen-tration intracellulaire de guanosine monophosphate cycli-que (GMPc), avec alors baisse du tonus musculaire lisse. Lademi-vie du NO circulant est brève, en particulier du fait desa chélation rapide par le groupement hème de l’hémoglo-bine. La voie du NO constitue donc un système d’adapta-tion du tonus vasculaire pulmonaire à la fois rapide et limitéà la circulation régionale. D’autres neurotransmetteurs ouseconds messagers interviennent dans la vasomotricité pul-monaire : prostaglandines, catécholamines (l’activation desrécepteurs β2-adrénergiques abaisse les RVP tandis les

β-blo-quants n’ont pas d’effet ; la dopamine ou la noradrénaline,agonistes

α1, ont un effet vasoconstricteur chez l’adulte),acétylcholine (stimulant la production de NO endogène),histamine et sérotonine (vasoconstrictrices), thromboxaneA2, angiotensine et endothéline (vasoconstricteurs).

Figure 1. Représentation des relations entre les volumes pulmonaireset les résistances vasculaires pulmonaires (RVP). VR : volume rési-duel ; CRF : capacité résiduelle fonctionnelle ; CPT : capacité pulmo-naire totale.

VR CRF CPT

RVP

Vaisseaux extra-alvéolaires

Vaisseaux alvéolaires

RVP totales

Page 3: Anesthésie et analgésie du patient souffrant d’une hypertension artérielle pulmonaire grave

Le praticien en anesthésie-réanimation, 2004, 8, 1 37PHYSIOPATHOLOGIE DE L’HYPERTENSION

ARTÉRIELLE PULMONAIRE (HTAP)

Définition

Une PAPM supérieure à 25 mmHg au repos (30 mmHg àl’effort) ou une valeur de RVP supérieure à 300 dynes.s.cm–5

sont généralement considérées comme les seuils permettantde porter le diagnostic d’HTAP. L’HTAP est sévère quand laPAPM dépasse 50 mmHg.

Physiopathologie

Généralités

Il est actuellement admis que l’élévation pathologique de laPAP fait intervenir une production inappropriée, par l’endo-thélium vasculaire pulmonaire lésé, de facteurs régulant letonus vasculaire (libération d’endothéline, déficit en NO eten prostaglandines), l’hémostase (excès de synthèse et deprotéolyse du facteur von Willebrand, excès de productiondu PAI-1, Plasminogen Activator Inhibitor type 1) et la pro-lifération cellulaire (notamment, l’angiopoïétine et la super-famille du TGF

α (Transforming Growth Factor

α). Cedéséquilibre peut être secondaire à différentes agressions :hypoxie, acidose, majoration des forces de cisaillement liéesà l’hyperdébit dans les cardiopathies congénitales avecshunt intracardiaque gauche-droit, médiateurs inflammatoi-res, fibrine (embols cruoriques), radicaux libres oxygénés.L’hypoxie chronique est une cause de modification stable del’hémodynamique, du métabolisme et de l’histologie vascu-laire pulmonaire. Expérimentalement, ces modificationss’installent rapidement (après 3 jours d’exposition àl’hypoxie chez le rat) ; elles ne sont que partiellement réver-sibles après arrêt du stimulus en cause et sont d’autant plusmarquées que l’individu est jeune. Dans l’HTAP primitive,une origine génétique a pu être établie (gène BMPR-2 situéau niveau du locus PPH1, 2q31-33) (voir page 38, le paragra-phe Étiologie) (5).

Phénomènes de remodelage vasculaire

L’HTAP persistante s’accompagne de différentes modifica-tions histologiques (Tableau 1). La proportion de cellulesmusculaires lisses augmente, allant jusqu’à la colonisationd’artérioles pulmonaires non muscularisées en conditionsnormales. L’épaisseur de l’adventice et de la média est aug-mentée. On observe des altérations de l’endothélium et unehyperplasie intimale évoluant vers la fibrose. La réactivitédes vaisseaux remodelés est anormale. La constitution dethromboses in situ peut constituer un mode évolutif termi-nal mais elle peut également initier la maladie vasculaire(artériopathie pulmonaire thrombotique). Ces phénomènesde remodelage sont observés dans l’HTAP primitive maisaussi dans diverses affections telles que les bronchopneumo-

pathies chroniques obstructives (BPCO), les atteintes pul-monaires septiques ou le syndrome de détresse respiratoireaigu de l’adulte (SDRA).

HYPERTENSION ARTÉRIELLE PULMONAIRE ET VENTRICULE DROIT

Physiologie et physiopathologie du ventricule droit

La fraction d’éjection du VD (FEVD) normale est d’environ55 %. La cinétique de contraction du VD est complexe,faisant intervenir un déplacement de la paroi libre vers leseptum interventriculaire (SIV) et une amplification dumouvement d’éjection par transmission de la contractiondu VG. Cela rend le VD dépendant de la fonction systoliquedu VG d’une part, et de l’intégrité septale d’autre part.

Tableau 1Classification histologique habituelle des stades de progres-sion de l’HTAP primitive. Des études récentes suggèrent quela progression chronologique de la maladie se ferait en faitdans l’ordre suivant : Grades I-II-III, Grade VI puis GradesIV-V.

• Grade I : Hypertrophie de la média des artérioles et des petites artères pulmonaires musculaires.

• Grade II : Prolifération cellulaire intimale.

• Grade III : Épaississement, prolifération et hyperplasie médiale associée à une prolifération intimale et une fibrose concentrique aboutissant à l’oblitération de nombreuses artérioles et petites artères.

• Grade IV : Dilatation et lésions « plexiformes » des artérioles et petites artères, c’est-à-dire développement d’un réseau de canaux ressemblant à des capillaires au sein d’un segment dilaté d’arté-riole ou de petite artère pulmonaire. Ces canaux sont séparés les uns des autres par des cellules endothéliales proliférantes. Ils sont eux-même souvent thrombosés ou constituent au contraire le mode de recanalisation d’un thrombus préalable.

• Grade V. Lésions complexes angiomateuses, plexiformes et caverneuses avec hyalinose de la prolifération intimale.

• Grade VI. Artérite nécrosante avec nécrose fibrinoïde.

D’après Heath D, Edwards JE. The pathology of hypertensive pulmonaryvascular disease. A description of six grades of structural changes in thepulmonary arteries with special references to congenital cardiac septaldefects. Circulation 1958;18:533 cité par Rich S (4).

Page 4: Anesthésie et analgésie du patient souffrant d’une hypertension artérielle pulmonaire grave

Le praticien en anesthésie-réanimation, 2004, 8, 138Inversement, une dilatation du VD par élévation des RVPpeut entraîner, via le déplacement paradoxal du SIV, unealtération du remplissage du VG, une élévation de la PAPOet une chute du débit cardiaque. Le péricarde joue égale-ment un rôle important dans l’interdépendance des deuxventricules. En cas de dilatation du VD, la pression péricar-dique augmente et participe à la moindre distensibilité duVG. La contraction auriculaire et la conduction auriculoven-triculaire doivent impérativement être normales pour quela fonction ventriculaire droite soit optimale (2).

La paroi libre du VD est irriguée par la coronaire droite,alors que la perfusion du SIV dépend à la fois de la coro-naire droite et de l’artère interventriculaire antérieure(IVA). La pression de perfusion coronaire du VD est pro-portionnelle à la pression aortique et inversement propor-tionnelle à la pression intraventriculaire. En conditionsnormales, cette perfusion a lieu aussi bien en systole qu’endiastole. En cas d’HTAP et d’élévation des pressions droites,la PA systémique est un déterminant essentiel de la fonctiondu VD.

En conditions physiologiques, le VD bénéficie moins que leVG d’une augmentation de la précharge. Une élévationexcessive de cette dernière peut même dégrader le rapporttransport/consommation en O2. Par ailleurs, le VD est plussensible que le VG aux variations de postcharge. Une éléva-tion aiguë de la PAPM n’excédant pas 40 mmHg peutencore être relativement bien tolérée du fait de la mise enjeu du mécanisme de Frank-Starling mais, pour des valeurssupérieures, on observera le plus souvent une chute de laFEVD, même si la contractilité ventriculaire est préservée.En revanche, une élévation progressive, au long cours, dela PAP s’accompagne d’une adaptation du VD, avec aug-mentation de l’épaisseur de sa paroi, ce qui maintient uneFEVD normale. En conclusion, dans le cadre de l’HTAP engénéral, une défaillance du VD peut résulter de différentsmécanismes intriqués :

– élévation aiguë ou chronique de la postcharge ;

– élévation aiguë ou chronique de la précharge (régurgita-tions tricuspides, communications interventriculaires) ;

– ischémie myocardique ;

– altération des performances contractiles intrinsèques duVD.

La mesure de la pression veineuse centrale (PVC), qui peutêtre influencée par d’éventuelles anomalies de la valve tri-cuspide et par des variations de compliance du VD, n’estpas un indicateur fiable de la performance ventriculairedroite. L’échographie, la thermodilution (cathéter de Swan-Ganz), la scintigraphie et l’angiographie sont infinimentplus performantes. Seules les deux premières approchessont envisageables en routine dans le contexte périopé-ratoire.

ÉTIOLOGIE

Les causes des HTAP sont synthétisées dans le tableau 2.

L’HTAP primitive

L’HTAP primitive est rare (1-2/millions d’individus/an), etprédomine chez la femme (sexe ratio 1,7/1). Environ 6 %des cas sont familiaux, la transmission se faisant sur unmode autosomique dominant à pénétrance variable. Lesprogrès accomplis dans le domaine de la génétique molécu-laire ont permis d’identifier, chez plus de la moitié desfamilles, des mutations de la protéine BMPR-2 (Bone Mor-phogenetic Protein Receptor type II), régulant la proliféra-tion cellulaire. Il faut toutefois noter que 30 % des individusprésentant une HTAP primitive dite « sporadique » ont enfait également ces mutations. Le pronostic est sombre, lamédiane de survie après diagnostic variant de 2 à 3 ans. Unedyspnée d’effort de classe III ou IV de la classification de laNew York Heart Association (NYHA) et une PAPM dépas-sant 55 mmHg sont des facteurs pronostiques péjoratifs.Signalons également l’existence d’HTAP familiales dans lecadre de la maladie de Rendu-Osler (ou télangiectasiehémorragique héréditaire), rattachée à l’existence de muta-tions des gènes ALK1 (activin receptor-like kinase 1) ouENG (endogline) (1-5).

LES HTAP SECONDAIRES

Les HTAP secondaires sont plus fréquentes et, pour certai-nes, potentiellement réversibles. La plupart font suite à desatteintes cardiaques ou respiratoires.

L’insuffisance cardiaque gauche congestive, les cardiopa-thies hypertrophiques du cœur gauche, les valvulopathiesmitrales et les myxomes de l’oreillette gauche entraînentsuccessivement une élévation de la PAG, des RVP et de laPAP. Les cardiopathies congénitales liées à un défectpariétal auriculaire et/ou ventriculaire ou la persistanceanormale du canal artériel s’accompagnent d’une éléva-tion du débit sanguin pulmonaire. Avec le temps, celle-cifait apparaître une HTAP « fixée ». Il résulte finalement del’augmentation des RVP une inversion du shunt qui, degauche-droit, devient droit-gauche, aggravant ainsi la com-posante hypoxique du tableau (syndrome d’Eisenmenger).Les pathologies respiratoires telles que les BPCO, les fibro-ses pulmonaires ou le SDRA entraînent généralement uncertain degré d’HTAP, en partie lié à l’hypoxémie qui enrésulte. Citons enfin le cas particulier des nouveau-nés,dont la PAP est physiologiquement élevée à la naissance,mais qui peuvent présenter une HTAP anormalementsévère et/ou prolongée.

Page 5: Anesthésie et analgésie du patient souffrant d’une hypertension artérielle pulmonaire grave

Le praticien en anesthésie-réanimation, 2004, 8, 1 39HTAP en période périopératoireDans le contexte chirurgical, de nombreuses circonstancespeuvent induire ou aggraver une HTAP. Elles sont résumées

dans le tableau 3. Dans toutes les situations à risqued’HTAP sévère, un outil d’évaluation peropératoire de lavolémie et des performances cardiaques (échographie

Tableau 2Classification étiologique des HTAP.

I. Hypertension artérielle pulmonaire isolée1. Hypertension artérielle pulmonaire primitive

a. Sporadiqueb. Familiale (dont certains cas de maladie de Rendu-Osler ou télangiectasie hémorragique héréditaire)

2. Hypertension artérielle pulmonaire secondairea. Collagénoses (LED, sclérodermie, polyarthrite rhumatoïde)b. Cardiopathies congénitales avec shunt gauche-droitc. Hypertension portaled. Infection par le VIHe. Toxiques

– Anorexigènes amphétaminiques– Autres

f. Hypertension artérielle pulmonaire néonatale persistanteg. Sténoses ou atrésies pulmonaires congénitales, autres causes d’HTAP secondaires

II. Hypertension veineuse pulmonaire1. Cardiopathies gauches, ventriculaires (systoliques ou diastoliques) ou auriculaires (myxome, thrombus, cœur triatrial)2. Cardiopathies gauches, valvulaires3. Compression veineuse pulmonaire extrinsèque

a. Fibrose médiastinaleb. Adénopathies/Tumeurs

4. Maladie veino-occlusive pulmonaire5. Péricardite chronique constrictive, sténoses veineuses pulmonaires congénitales, autres causes veineuses pulmonaires6. Bronchopneumopathies chroniques obstructives (BPCO)

III. Atteintes restrictives : pathologies pulmonaires interstitielles, fibroses pulmonaires, résections pulmonaires, atteintes neuromuscu-laires (myasthénie, Hypertension artérielle pulmonaire avec atteinte respiratoire

1. poliomyélite, atteintes centrales)2. Syndrome d’apnées du sommeil/Troubles respiratoires liés au sommeil3. Hypoventilation alvéolaire chronique4. Séjour prolongé à haute altitude5. Pathologies respiratoires d’origine néonatale, hypoplasie pulmonaire6. Dysplasie alvéolocapillaire7. Autres causes respiratoires : cancer, pneumonie aiguë, protéinose alvéolaire

IV. Hypertension artérielle pulmonaire d’origine thrombo-embolique1. Obstruction proximale des artères pulmonaires2. Obstruction distale des artères pulmonaires

a. Embolie pulmonaireb. Thrombose in situc. Drépanocytose

V. Hypertension artérielle pulmonaire liée à l’atteinte directe de la vascularisation pulmonaire (les atteintes respiratoires parenchy-mateuses s’accompagnent le plus souvent d’un certain degré d’amputation de la vascularisation pulmonaire qui peut contribuer à l’HTAP)

1. Atteinte inflammatoirea. Schistosomiaseb. Sarcoïdosec. Autres causes : maladie de Takayashu

2. Hémangiomatose capillaire pulmonaire

D’après Classification diagnostique de l’HTAP selon l’OMS (Executive Summary from the World Symposium on Primary Pulmonary Hypertension, Evian, Fran-ce, 1998, disponible via http://www.who.int/cardiovascular_diseases/resources/publications/en/) et (4).

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Le praticien en anesthésie-réanimation, 2004, 8, 140

transœsophagienne ou cathéter de Swan-Ganz), ainsi

qu’une mesure invasive de la pression artérielle paraissent

indispensables à une prise en charge rigoureuse de l’hémo-

dynamique (voir plus loin, le paragraphe Traitement). Le

risque d’aggravation semble supérieur en cas d’HTAP primi-

tive, par rapport aux HTAP secondaires (2). L’HTAP pério-

pératoire peut se compliquer d’infarctus du myocarde et

majorer la mortalité postopératoire chez les patients opérés

de pontage aorto-coronaire sous circulation extracorporelle

(CEC) (6). La CEC est, en elle-même, responsable de vaso-

constriction et de lésions endothéliales (2, 6). En postopé-

ratoire, d’autres facteurs peuvent intervenir, tels que la

stimulation adrénergique (correction d’une hypothermie,

frissons, douleur) ou les atélectasies.

HTAP et grossesse

La grossesse est une circonstance révélatrice classique

d’une HTAP, en raison des modifications hémodynamiques

physiologiques qui lui sont associées. Pendant la grossesse

normale, le débit cardiaque est augmenté de l’ordre de

50 %, essentiellement au cours des deux premiers trimes-

tres. Il croît encore de 10 à 40 % lors du travail obstétrical.

Au niveau de la circulation pulmonaire, on observe une élé-

vation importante du débit sanguin sans élévation de la

PAP, par majoration de la vasodilatation pulmonaire.

D’une façon générale, la baisse des résistances artériellessystémiques chez la femme enceinte, fait que les cardiopa-thies liées à une régurgitation valvulaire et celles accompa-gnées d’un shunt gauche-droit sont mieux tolérées que lesshunts droits-gauches (syndrome d’Eisenmenger) et les car-diopathies obstructives. La mortalité de l’HTAP révélée parla grossesse varie de 30 % à 60 % selon les études. Le décèsest du soit à une insuffisance ventriculaire droite réfractaireau traitement médical, soit à une mort subite. Il survient leplus souvent en post-partum, parfois après un délai notable,la majorité des décès étant recensés entre la naissance et le14e jour, voire jusqu’à 35 jours post-partum (7). Les fac-teurs de décompensation responsables de cette évolutionchronologique particulière au contexte obstétrical sont lesmodifications du tonus vasculaire (abaissement des RVS),l’élévation des concentrations plasmatiques de catécholami-nes associée au travail et les mouvements liquidiens dupost-partum (augmentation du retour veineux par levée dela compression cave et mobilisation du sang retenu parl’utérus gravide), avec éventuellement hypoxémie et acci-dents thrombo-emboliques (10). Il semble que le syndromed’Eisenmenger et l’HTAP primitive ont un pronostic moinsdéfavorable (mortalité de 30 à 36 %) que l’HTAP secon-daire, dont la mortalité est plus proche de 55 % (7). Il estévident, devant la sévérité du pronostic, qu’un conseil pré-conceptionnel doit être donné à ces patientes qui doiventbénéficier d’une contraception appropriée, la grossesseétant en principe contre-indiquée en cas d’HTAP sévère. Encas de grossesse inopinée, il faut proposer une interruptionthérapeutique précoce pour sauvetage maternel.

DIAGNOSTIC

Les signes fonctionnels les plus classiques de l’HTAP sont ladyspnée et l’asthénie. Une dyspnée d’effort, de repos puisune polypnée s’installent progressivement. L’HTAP peutégalement être révélée par une syncope, des douleurs tho-raciques, des œdèmes déclives, des hémoptysies. L’auscul-tation pulmonaire peut révéler un souffle d’insuffisancetricuspide, un éclat du B2 pulmonaire, un galop.

La radiographie thoracique peut montrer un élargissementde l’artère pulmonaire ou des vaisseaux hilaires. Sur l’ECG,il peut exister une tachycardie sinusale, des signes d’hyper-trophie VD, une déviation axiale droite du QRS, un bloc debranche droit. La gazométrie artérielle révèle le plus sou-vent l’association d’une hypoxémie et d’une hypocapnie.

L’échocardiographie recherche une fuite tricuspide permet-tant de mesurer indirectement la PAP, une dilatation du VD,une fermeture partielle de la valve pulmonaire, un aplatis-sement ou un mouvement paradoxal du SIV dont la conve-xité est normalement orientée vers le VD. Une éventuelle

Tableau 3Facteurs favorisant la survenue ou l’aggravation d’une HTAP en périopératoire (2).

Accident thromboembolique Grossesse, cure de varices

Embolie gazeuse (CO2) Cœliochirurgie

Embolie gazeuse (Air) Chirurgie en position assise (Neurochirurgie), Chirurgie hémorragique (hépatique, rachidienne, polytraumatisme)

Ciment osseux Chirurgie orthopédique

Protamine Chirurgie cardiaque

Circulation extracorporelle Chirurgie cardiaque

Syndrome d’ischémie-reperfusion

Clampage aortique, transplantation pulmonaire

Amputation vasculaire pulmonaire

Pneumonectomie

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Le praticien en anesthésie-réanimation, 2004, 8, 1 41angiographie pulmonaire ou un angioscanner ne montrentpas de signe en faveur d’une embolie pulmonaire récente.Finalement, le diagnostic définitif repose sur le cathété-risme cardiaque droit.

TRAITEMENT

L’HTAP est une pathologie d’installation progressive. Lesmodifications initiales de débit, de pression ou l’hypoxieentraînent une vasoconstriction pulmonaire longtempsréversible, sensible aux traitements vasodilatateurs et autraitement étiologique. Au stade de remodelage vasculaireimportant, l’élévation des RVP est plus difficilement réver-sible. Elle peut toutefois l’être, en quelques semaines oumois, sous l’effet d’un traitement qui doit être aussi précoceque possible. Cependant, plus la pathologie évolue, plusl’hyperplasie musculaire lisse fait place à une fibrose et àdes anomalies fixées, irréversibles. Le caractère retardé dessymptômes de défaillance du VD par rapport à l’installationde l’HTAP explique qu’une fois ces symptômes observés, ledélai moyen de survie des patients est de moins d’un an.

Mesures générales

Le traitement étiologique est fondamental. En cas dedéfaillance du VD liée à l’évolution d’une insuffisance cardia-que gauche, le traitement de cette dernière est prioritaire(diurétiques, vasodilatateurs). Le traitement bronchodilata-teur d’une BPCO, le traitement corticoïde d’une pneumonieinterstitielle, l’anticoagulation d’une maladie thromboembo-lique, le recrutement alvéolaire et les antibiotiques sur unepneumonie participent à la réduction de la PAP. S’il existe,au niveau du VD, une coronaropathie associée participant àl’ischémie, la reperfusion (angioplastie ou chirurgie) doitêtre envisagée.

En périopératoire ou lors d’un accouchement, les modifica-tions physiologiques associées à l’acte envisagé doivent êtreintégrées à la stratégie thérapeutique, de même que leseffets des différents agents anesthésiques employés. Latechnique chirurgicale a des répercussions certaines : lacœliochirurgie, en dépit de ses bénéfices en termes d’anal-gésie postopératoire, ne paraît pas appropriée en casd’insuffisance cardiaque sévère, voire d’une HTAP sévèreisolée, compte tenu de ses effets sur le retour veineux. Lasurveillance postopératoire doit s’effectuer en unité desoins intensifs.

Les objectifs thérapeutiques suivants doivent être pris encompte :

– correction d’une anémie (hématocrite < 30 %) ;

– correction d’une polyglobulie sévère, responsable d’hyper-viscosité (Ht > 60 %) ;

– correction d’une hypoxémie par augmentation desapports en O2 ;– prévention de l’acidose gazeuse (support ventilatoire) oumétabolique (apports de bicarbonates si pH < 7,20) ;– prévention de l’hypertonie adrénergique : sédation etanalgésie adaptées au niveau d’inconfort et de douleur, enévitant a priori les anti-inflammatoires qui, on le sait, majo-rent les RVP ;– prévention du frisson, lutte contre l’hypothermie ;– traitement de facteurs de décompensation, tels que dia-bète déséquilibré ou infections.

Traitements antithrombotiquesLeur bénéfice n’est pas formellement établi et donne lieu àcontroverse, mais les anticoagulants sont proposés par denombreux auteurs (4). Ils sont impératifs dans certainessituations, comme une fibrillation auriculaire, des antécé-dents de thrombose, uns image de thrombus endocavitaire,un syndrome des antiphospholipides par exemple. Ils sontcontre-indiqués en cas d’hémoptysie récente.En périopératoire, leur utilisation et la dose employéedépendent du rapport bénéfice/risque. Ils ne dispensentpas des autres mesures de prévention (hydratation adé-quate, bandes de contention veineuse, mobilisation), parti-culièrement indiquées chez ces patients.Chez la femme enceinte, le risque thrombotique est accru.L’héparine (de bas poids moléculaire ou non fractionnée)est le plus souvent proposée. Elle est introduite pour cer-tains dès la fin du 1er trimestre de grossesse, interrompueen peri-partum puis réintroduite jusqu’à 1 mois post-par-tum (8).

Ventilation mécaniqueLa stratégie de ventilation est axée sur :– le recrutement alvéolaire : niveau de PEP adapté en cas decondensation ou d’œdème pulmonaire, lutte contre les até-lectasies (kinésithérapie, mobilisation, fibroscopie, humidi-fication des voies aériennes et hydratation adéquates,analgésie) ;– la prévention de la surdistension pulmonaire, susceptibled’aggraver les RVP et de précipiter une défaillance du VD :volume courant 7-8 ml/kg, fréquence respiratoire basse ettemps expiratoire allongé en cas de trouble ventilatoire obs-tructif, réglage de la PEP évitant toute hyperinflation.Les réglages du respirateur sont régulièrement réévalués àla lumière des données du monitorage non invasif (oxymé-trie, capnographie, courbes de spirométrie), des gaz dusang et, en postopératoire, de la radiographie pulmonaire.

Traitement spécifique de l’HTAPEn cas d’élévation isolée des RVP, le traitement reposesur l’emploi de vasodilatateurs. En revanche, en cas de

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Le praticien en anesthésie-réanimation, 2004, 8, 142défaillance du VD, l’optimisation des conditions decharge peut justifier l’emploi d’un inotrope, éventuelle-ment associé à un traitement vasopresseur.

Agents vasodilatateurs pulmonaires

La pharmacopée des agents disponibles a considérablementévolué ces dernières années. Plusieurs nouvelles molécules(analogues de la prostacycline, antagoniste des récepteursde l’endothéline, antagoniste du thromboxane) ont faitl’objet d’études prospectives contrôlées, multicentriques(9). Plusieurs revues ont fait récemment le point sur les indi-cations et modalités d’emploi des différentes catégories demédicaments en fonction du contexte (voir notamment(6, 9-11).

L’adénosine

La surface des cellules endothéliales et musculaires lissesporte des récepteurs à l’adénosine. La demi-vie très brève(9 s) de cet agent le rend relativement sélectif de la circulationpulmonaire. Outre un bénéfice immédiat, son intérêt résidedans le fait qu’il peut permettre de prévoir l’efficacité d’autresmédicaments (inhibiteurs calciques, prostaglandines) : unabaissement des RVP de 25 % ou de la PAPM de 10 mmHg estconsidéré comme une réponse positive au traitement.

Les prostaglandines : prostacycline (PGI2 ou epoprostenol)et dérivés

D’origine endothéliale et agissant sur des récepteurs endo-théliaux spécifiques, la prostacycline augmente l’activité del’adénylate cyclase. Elle inhibe également l’agrégation pla-quettaire et la prolifération des cellules musculaires lisses,ainsi que les phénomènes de remodelage vasculaire. Sademi-vie brève (2-3 mn) impose son administration par voieintraveineuse continue. La principale limitation à son emploiest un effet vasodilatateur non sélectif de la circulation pul-monaire, responsable de divers effets indésirables : hypoten-sion systémique, céphalées, flush. Son efficacité est démontréesur le plan fonctionnel et pronostique chez des patients declasse III et IV de la NYHA. En dehors des complicationsliées à la présence d’un cathéter endovasculaire à demeure,il existe un risque d’ascite par fuite capillaire et d’œdèmepulmonaire, parfois fatal, notamment en cas d’ obstructionveineuse pulmonaire (maladie veino-occlusive ou hémangio-matose capillaire pulmonaire), laquelle constitue une con-tre-indication à l’emploi de cet agent.

L’iloprost est un analogue de l’epoprostenol, plus stable, quiaméliore le débit cardiaque, réduit les RVP et la PAP, avecdes effets minimes sur la pression artérielle systémique. Ilpeut être administré par voie inhalée ou systémique. Le bera-prost, autre analogue de la PGI2 peut être donné par voieorale, alors que le treprostinil peut l’être par voie sous-cuta-née, à l’aide de dispositifs de type pompe à insuline.

La PGI2 et l’iloprost ont été employés avec succès dans lecadre d’études non contrôlées, dans diverses indications :HTAP primitive, HTAP persistante du nouveau-né, SDRA,connectivites, chirurgie cardiaque infantile. Iloprost, bera-prost et treprostinil se sont avérés efficaces dans des étudesprospectives contrôlées (9). L’étude multicentrique ayantcomparé les effets de l’iloprost inhalé à ceux d’un placebochez 204 patients NYHA III ou IV souffrant d’HTAP primitiveliée à une connectivite ou post-embolique (Étude AIR, Aero-solized Iloprost Randomized Study), a montré un bénéficedu traitement en termes de signes fonctionnels, de paramè-tres hémodynamiques et, point beaucoup plus rarement éta-bli, de mortalité (4 % versus 13,7 % sur une période d’étudede 3 mois, p = 0,024) (1). En revanche, PGI2 et iloprost sem-blent inefficaces dans les HTAP des BPCO.

Le beraprost, lui, est efficace dans l’HTAP primitive, mais nesemble pas l’être dans l’HTAP secondaire. Le treprostinil, encas d’HTAP primitive secondaire à une cardiopathie congé-nitale ou à une connectivite, s’est avéré efficace sur les para-mètres fonctionnels et hémodynamiques (9).

Le monoxyde d’azote inhalé (NOi)

Sans effet systémique, le monoxyde d’azote inhalé ne modi-fie pas la pression de perfusion coronaire ni la précharge duVD. Les premières données cliniques ont été recueillies chezdes patients porteurs d’HTAP primitive. L’efficacité du NOien termes d’abaissement des RVP a été ensuite rapportéechez les patients porteurs de BPCO, de SDRA, de cardiopa-thie congénitale et après CEC (pour une revue récente, voir(12)). Enfin, il a été évalué dans des affections associanthypoxémie sévère et HTAP, typiquement le SDRA. Les effetsthérapeutiques du NOi sont relativement clairs en pédiatrie,mais ils le sont moins chez l’adulte où seuls des effets transi-toires ont été observés, sans qu’aucun bénéfice en termed’amélioration de la survie n’ait pu être démontré (13).

Le NO a certains effets indésirables qui justifient une atten-tion particulière. Il inhibe l’adhésion et l’agrégation plaquet-taires, allongeant le temps de saignement. On recommandeune surveillance spécifique par l’emploi d’analyseurs (NO,NO2) et la réalisation régulière de dosages sanguins (methé-moglobine), notamment chez le nouveau-né dont l’activitémethémoglobine réductase est faible. L’utilisation d’un sys-tème d’administration séquentielle du NOi couplant l’injec-tion à l’inspiration permet d’éviter les pics de concentrationau niveau de la branche inspiratoire lors de l’expiration. Lesevrage doit être progressif, par paliers, sous surveillancehémodynamique (invasive ou échographique).

NOi et contexte périopératoire

Le NOi peut contribuer à limiter les élévations de PAP et àaméliorer l’oxygénation en phase périopératoire, en particu-lier après CEC pour cure de cardiopathie congénitale chez

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Le praticien en anesthésie-réanimation, 2004, 8, 1 43l’enfant. Plusieurs observations ont également rapporté sonutilisation en obstétrique (13, 14). On peut l’administrer parvoie inhalatoire en ventilation mécanique peropératoire,mais il faut alors maintenir un débit de gaz frais supérieur àla ventilation alvéolaire (circuit ouvert), faute de quoi desdifférences importantes entre la concentration de NO régléeet celle effectivement mesurée peuvent être observées (15).Actuellement, les indications retenues sont :– appréciation préopératoire de la réversibilité de l’HTAP, parexemple avant transplantation pulmonaire ou cardiopulmo-naire, à condition qu’il n’existe pas une insuffisance ventricu-laire gauche associée qui risquerait d’être décompensée parl’abaissement brutal des RVP et l’augmentation résultante dela précharge ventriculaire gauche. Certains auteurs proposentde faire précéder le test au NO d’une épreuve à la dobuta-mine, qui permet à la fois de mesurer les capacités d’adapta-tion du ventricule gauche et de mesurer (par cathétérisme)les variations respectives des RVP et du débit cardiaque ;– traitement de l’HTAP postopératoire après chirurgie sousCEC.De nombreuses études ouvertes ont rapporté un bénéficedu NOi sur les RVP et/ou sur l’oxygénation après chirurgiecardiaque chez l’adulte et l’enfant, ainsi que dans la prise encharge des syndromes de reperfusion après transplantationpulmonaire. Toutefois, aucun bénéfice en termes de survien’est actuellement démontré.

Les antagonistes calciques(nicardipine, nifédipine, diltiazem)Ces agents sont proposés en traitement de fond aux patients,minoritaires (10-20 %), présentant une réponse positive auxépreuves d’administration de vasodilatateurs (adénosine,NOi, prostacycline). Ils sont notamment efficaces dans certai-nes HTAP primitives ou liées à des connectivites. En revan-che, ils ne semblent pas utiles et seraient même délétères danscelles liées à une BPCO. D’une manière générale, ils ne sontpas non plus indiqués dans les HTAP sévères responsablesd’une baisse du débit cardiaque, du fait de leur effet inotropenégatif potentiel. Les doses nécessaires sont souvent élevées(par exemple, 300 mg/j de nifédipine).

Les antagonistes des récepteurs de l’endothéline, ET-A et ET-BPlusieurs études ont démontré l’efficacité du bosentan (Tra-cleer®) sur les paramètres hémodynamiques et les signesfonctionnels dans les HTAP primitives ou liées à une connec-tivite (9). Il semble bien toléré à long terme, mais ses béné-fices en termes de survie restent à établir.

Les inhibiteurs de l’enzyme de conversion de l’angiotensine(IEC) et les antagonistes des récepteurs de l’angiotensineLes IEC semblent utiles à la correction des phénomènes deremodelage vasculaire. À court terme, le captopril ne modi-

fie pas significativement les RVP et la PAP dans les HTAPsecondaires, mais un traitement prolongé sur 3-6 mois réduitsignificativement ces deux paramètres (2, 3).

En revanche, le losartan, un antagoniste des récepteurs del’angiotensine II, réduit efficacement la PAP et les RVP chezdes patients porteurs d’HTAP secondaires, dans les 4 heuressuivant son administration (3).

Les inhibiteurs des phosphodiestérases(milrinone, amrinone, sildénafil)

Ces agents majorent les concentrations intracellulaires denucléotides cycliques (AMPc/GMPc), entraînant i) vasodila-tation pulmonaire et ii) augmentation de la contractilité ven-triculaire. Milrinone et amrinone abaissent les RVP, à la foisactivement par leur effet vasodilatateur et passivement viaune élévation du débit cardiaque. Administrées par voieintraveineuse, elles se sont avérées efficaces dans le contrôlede la PAP après chirurgie cardiaque. Dans cette indication,la milrinone peut également être employée par voie inhalée,permettant d’obtenir une vasodilatation pulmonaire sélec-tive sans effet systémique. L’utilisation du sildenafil (Via-gra®) a été rapportée sporadiquement. Plusieurs auteurs ontrapporté un effet synergique des inhibiteurs des phospho-diestérases et des analogues de la prostacycline.

Les antagonistes du thromboxane

Le terbogrel est un antagoniste des récepteurs du throm-boxane et un inhibiteur de la synthèse du thromboxane,actif par voie orale. L’unique étude prospective contrôléeréalisée à ce jour n’a pas pu démontrer de bénéfice parcomparaison au placebo, malgré une réelle réduction desconcentrations des métabolites du thromboxane (9).

Les dérivés nitrés et « donneurs de NO »

Certaines études préliminaires suggèrent que l’administra-tion orale de L-arginine, précurseur naturel du NO, pourraitaméliorer la tolérance à l’effort en cas d’HTAP précapillaire.L’emploi des dérivés nitrés, historique, est fortement limitépar leurs effets hypotenseurs.

Le magnésium

Ses modes d’action sont divers. Agissant principalementcomme bloquant des canaux calciques voltage-dépendantde type L, il est également capable d’activer la NOSe, l’adé-nylate cyclase et la production de PGI2. Efficace dans cer-tains travaux expérimentaux, son utilisation clinique est trèslimitée.

Traitement chirurgicauxL’endartériectomie pulmonaire peut être proposée dans lesHTAP post-emboliques. Les HTAP secondaires à une valvulo-pathie mitrale relèvent de la chirurgie valvulaire (valvuloplas-tie percutanée ou à cœur ouvert, remplacement valvulaire).

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Le praticien en anesthésie-réanimation, 2004, 8, 144Dans les formes les plus graves, on peut être amené à recourirà une transplantation monopulmonaire, bipulmonaire ou car-diopulmonaire.

Dans certaines insuffisances ventriculaires droites compli-quant une HTAP et réfractaires au traitement médical,l’atrioseptotomie à cœur fermé peut être envisagée. Cetteintervention palliative, grevée d’une mortalité lourde (envi-ron 16 %), améliore les conditions de charge du VD et ledébit cardiaque, au prix d’une majoration du shunt et del’hypoxémie. Elle est proposée, par exemple, en attented’une greffe pulmonaire (1).

Amélioration de la fonction du VD

Optimisation de la précharge du VDUne épreuve de remplissage (éventuellement « endogène »par surélévation des jambes du patient) est certainementutile si la PVC est inférieure à 10 cmH2O. Elle permet d’iden-tifier les patients « répondeurs » à l’expansion volémique, engénéral ceux pour lesquels la PAP est modérément élevée etla contractilité du VD préservée. En revanche, les patients« non-répondeurs » ou présentant une PVC supérieure à20 cmH2O peuvent nécessiter un traitement diurétique. Eneffet, dans ce cas, une volémie excessive pourrait être res-ponsable, via l’augmentation du volume télédiastolique duVD et le déplacement paradoxal du SIV, d’une gêne au rem-plissage du VG retentissant sur le débit cardiaque.

Réduction de la postcharge du VDUne amputation de plus de 60 % du lit vasculaire pulmonaireentraîne généralement une défaillance du VD. L’utilisationde vasodilatateurs injectables ou inhalés peut alors être utile,à condition de ne pas abaisser excessivement les RVS, ce quidiminuerait la pression de perfusion coronaire du VD (voirplus haut le paragraphe Agents vasodilatateurs pulmonai-res).

Amélioration de la pression de perfusion coronairedu VD-VasopresseursLa noradrénaline est efficace pour rétablir le débit cardiaqueet la PAS en cas de collapsus lié à une élévation aiguë de lapostcharge avec défaillance du VD. En effet, malgré son effetvasoconstricteur pulmonaire, elle augmente le rapportPAM/PAPM. Elle rétablit ainsi la pression de perfusion coro-naire, tout en évitant de majorer la consommation en O2 duVD par un effet « trop marqué ». Pour cela, il faut au préala-ble optimiser les conditions de précharge du VD, de façon àce que les effets délétères (élévation des RVP) n’excèdentpas les effets bénéfiques. La noradrénaline et la phény-léphrine peuvent également être employées pour corrigerl’hypotension liée à une défaillance VD décompensée à lasuite d’une anesthésie, chez des patients porteurs d’HTAP

chronique (5). Une ischémie du VD ne relève pas de l’admi-nistration de dérivés nitrés, contre-indiqués en raison de leureffet hypotenseur.

Amélioration de la contractilité du ventricule droit-InotropesEn cas d’altération aiguë de la contractilité du VD, la dobuta-mine peut être indiquée. Une élévation des RVP associée àune réduction de la contractilité du VD constitue égalementune bonne indication des inhibiteurs de la phosphodiesté-rase de type III. Il faut parfois associer plusieurs catéchola-mines. L’isoprénaline doit être évitée (effets hypotenseurs ettachychardisants). Enfin, les digitaliques restent un traite-ment classique du cœur pulmonaire chronique, en associa-tion avec les diurétiques (1, 3).

Méthodes d’assistance mécaniquesUn ballon de contrepulsion, une assistance ventriculaire ouune oxygénation par circulation extracorporelle peuventêtre nécessaires en cas de défaillance du VD réfractaire autraitement médical, dans les cas où un traitement étiologi-que est possible ou en attente de transplantation.

Rétablissement d’une activité sinusale normale et de la conduction auriculoventriculaireEn cas de trouble du rythme (auriculaire ou ventriculaire) oude trouble de la conduction aggravant la défaillance VD, untraitement spécifique peut être indiqué : anti-arythmiques,choc électrique externe, stimulation endocavitaire.

EFFETS DES AGENTS ANESTHÉSIQUES SUR LE TONUS VASCULAIRE PULMONAIRE ET LA FONCTION VENTRICULAIRE DROITE

Comme nous l’avons vu plus haut, dans l’HTAP chronique,un traitement de fond par divers agents vasodilatateurs pul-monaires peut s’avérer bénéfique. Ces médicaments doi-vent a priori être poursuivis, tout en gardant à l’esprit lesmodifications de l’hémodynamique pulmonaire qu’ilsentraînent et les interactions avec les agents employés enpériopératoire.

Peu de données publiées permettent de définir le protocoleanesthésique optimal. L’essentiel de la littérature est consti-tué de cas cliniques ou de séries de cas, ce qui fait sansdoute sous-estimer la mortalité associée. Plusieurs observa-tions rapportent des évolutions favorables après réalisationd’une intervention sous anesthésie médullaire, notammenten obstétrique (17, 18). L’anesthésie générale est possible,mais présente certains inconvénients, tels que l’augmenta-tion des RVP liée à la ventilation en pression positive oul’altération de la contractilité myocardique si l’on emploie

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Le praticien en anesthésie-réanimation, 2004, 8, 1 45les agents volatils halogénés, a fortiori en association auprotoxyde d’azote (N2O).

Anesthésiques intraveineux

Hypnotiques

Après une intervention de chirurgie coronaire sous CEC, lepropofol en perfusion continue abaisse les valeurs de PAM, dePAPM et de RVP (19). Sous ventilation unipulmonaire pourchirurgie œsophagienne, il diminue le shunt et élève donc laPaO2, par comparaison avec les anesthésiques volatils halogé-nés (isoflurane, sévoflurane) (20). Concernant la FEVD, seseffets sont controversés. Dans une étude en cross-over, Boydet coll. ont rapporté une amélioration des performances duVD avec le propofol par rapport à l’isoflurane (21). Aucontraire, Kellow et coll., comparant également isoflurane etpropofol, ont montré, chez des patients opérés de chirurgiethoracique, une réduction de l’index cardiaque et de la FEVDaprès instauration de la ventilation unipulmonaire plus mar-quée avec le propofol qu’avec l’isoflurane (22).

Comme le propofol, la kétamine, utilisée en anesthésie pourchirurgie avec ventilation unipulmonaire, altèrerait moinsles échanges gazeux que les agents volatils halogénés. Enrevanche, elle majore les RVP, sans doute via l’augmentationde la libération de catécholamines (2). Cet effet semblemoins marqué chez l’enfant.

Le thiopental diminue les RVP (2). L’étomidate semble lesmajorer légèrement.

Morphiniques

Le fentanyl et le sufentanil n’ont aucun effet sur le tonus vas-culaire pulmonaire (2). Ce sont donc des agents de choix encas d’HTAP avec ou sans défaillance du VD. Cela est égale-ment vrai pour le sulfate de morphine, à la réserve près quela libération d’histamine associée à l’injection d’une fortedose en bolus rapide peut majorer les RVP.

Au total, les anesthésiques intraveineux semblent n’avoirqu’un effet modeste sur le tonus vasculaire pulmonaire et lavasoconstriction hypoxique.

Anesthésiques volatils halogénés (AVH)

D’une façon générale, ces agents modifient peu les RVP outendent à les réduire, à l’exception du desflurane. Chez desvolontaires sains, le sévoflurane entraîne une réduction dePAPM plus importante que l’isoflurane (23). En revanche,le desflurane élèverait la PAP et les RVP (24).

Protoxyde d’azote (N2O)

Les travaux portant sur les effets du N2O sur la circulationpulmonaire sont anciens. Plusieurs études menées en chi-rurgie cardiaque sous CEC, chez l’adulte, l’enfant ou lenourrisson, ont rapporté une élévation de la PAP et des RVP

avec le N2O administré à une concentration de 50 % (2).Ces modifications seraient plus marquées en présenced’une HTAP préopératoire et seraient liées à une modula-tion du tonus sympathique. Même si aucune recommanda-tion ne déconseille l’usage de cet agent, il paraît préférablede ne pas l’employer en cas d’HTAP sévère, surtout s’ilexiste une hypoxémie.

En conclusion, la plupart des agents anesthésiques géné-raux disponibles n’ont que peu d’effet sur la circulation pul-monaire et semblent pouvoir être employés en cas d’HTAP,à l’exception du N2O et, peut-être, de la kétamine et du des-flurane. Toutefois, dans l’HTAP aiguë ou décompensée, lesAVH peuvent réduire dangereusement le débit cardiaque,par altération de la fonction ventriculaire droite ou aggrava-tion d’une hypotension artérielle systémique.

Anesthésie locorégionalePour certains auteurs, l’anesthésie péridurale thoraciquecombinée aux AVH pour chirurgie pulmonaire préserveraitrelativement mieux les échanges gazeux qu’une anesthésieintraveineuse totale (propofol-fentanyl) (25). Pourtant, laréalisation d’une anesthésie péridurale thoracique ne sem-ble pas modifier en soi le shunt intrapulmonaire (25).

ANALGÉSIE ET ANESTHÉSIE OBSTÉTRICALES

La prise en charge d’une parturiente souffrant d’HTAPsévère doit être multidisciplinaire et ne se conçoit que dansun centre spécialisé permettant, le cas échéant, la réanima-tion de la mère ou de l’enfant. Les naissances prématuréessont fréquentes, soit du fait de la pathologie cardiaque elle-même, soit parce que, parvenu au terme de 32-34 semainesd’aménorrhée, seuil à partir duquel on considère générale-ment que l’on peut déclencher l’accouchement, le pronos-tic maternel prime et amène à la décision de prématuritéconsentie. Dans un cas comme dans l’autre, il faut toujoursenvisager la prescription d’une corticothérapie de matura-tion fœtale par bétaméthasone. Les risques pour la mèred’une extraction par césarienne avant travail sont à mettreen balance avec ceux d’un accouchement par voie basse etde l’augmentation du débit cardiaque qu’il suppose. Iln’existe pas d’étude permettant de recommander uneapproche par rapport à une autre (8).

Pour un accouchement par voie basse, il est indispensabled’éviter l’épreuve d’effort que représenterait un travail longet douloureux. L’analgésie péridurale, seule ou combinée àla rachianesthésie, a donc largement sa place (sous réservebien sûr de respecter ses contre-indications, notamment vis-à-vis de la coagulation). Certains auteurs ont émis des réser-ves en raison du risque d’abaissement brutal des pressionsde remplissage ventriculaires (droite et gauche) et de la

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Le praticien en anesthésie-réanimation, 2004, 8, 146postcharge ventriculaire gauche, qui peut conduire à uncollapsus, voire à une majoration d’un shunt droit-gaucheen cas de syndrome d’Eisenmenger. Ces modifications peu-vent être contrôlées par titration des doses d’anesthésiquelocal. On choisira dans la mesure du possible une associationanesthésique local à faible concentration et morphinique.Certains proposent d’ailleurs de n’employer initialementqu’un morphinique et de limiter l’emploi des anesthésiqueslocaux à la dernière partie du travail, les métamères ciblésse cantonnant alors aux racines sacrées (8, 17).

Le traitement de l’hypotension artérielle par phényléphrineà faibles doses ou par association phényléphrine-ephédrineévite l’aggravation de la tachycardie maternelle, sans risquepour la perfusion utérine (26). La patiente est placée enposition proclive latéralisée à gauche, afin de prévenir lesyndrome de compression cave par l’utérus gravide. Unesurveillance multiparamétrique est indispensable, compor-tant éventuellement une mesure invasive de la pressionartérielle. Les apports liquidiens et la diurèse doivent êtreminutieusement suivis afin d’éviter toute surcharge délé-tère. Selon la gravité de l’HTAP, l’existence ou non d’uneinsuffisance du VD et les traitements administrés, une voiecentrale peut être nécessaire, certains auteurs allant jusqu’àproposer la mise en place d’un cathéter de Swan-Ganz(mais son rapport bénéfice/risques est particulièrement dif-ficile à évaluer dans ces circonstances). Selon la nature dela cardiopathie, une antibioprophylaxie destinée à prévenirl’endocardite d’Osler peut être indiquée. L’expulsion faitappel à un personnel entraîné. Elle est généralement abré-gée par l’emploi de forceps. Malgré ces efforts, le taux decésarienne, de l’ordre de 30-36 %, est très supérieur à celuide la population obstétricale générale.

En cas de césarienne, la technique d’anesthésie optimalereste discutée. La plupart des auteurs recommandent uneanesthésie locorégionale, en dehors des contre-indicationsformelles (anomalies de l’hémostase), avec les précautionsindiquées plus haut. La nécessité d’installation progressivedu bloc pour prévenir le collapsus contre-indique la rachia-nesthésie en injection unique.

Des élévations brutales de PAP faisant suite à l’expulsion età la mobilisation du placenta ont été rapportées. Les méca-nismes évoqués sont la contraction utérine, responsabled’une « chasse » veineuse, et la levée de la compressioncave avec augmentation brutale du retour veineux. L’oxyto-cine doit être utilisée avec prudence, en injection lente, enraison du risque d’hypotension artérielle associé. Une éléva-tion aiguë des RVP a de plus été décrite lors de perfusionscontinues. Ce risque est encore plus important avec laPGF2α (Nalador®), qui est contre-indiquée dans ce contexte.Par ailleurs, le risque d’hémorragie du post-partum sembleaccru en cas d’HTAP (8). Toute hémorragie doit donc êtredépistée et traitée précocement.

Indépendamment de la voie d’extraction et de la méthoded’anesthésie, l’administration simultanée de vasodilatateurspulmonaires (NOi) en complément de l’anesthésie été pro-posée avec succès chez plusieurs patientes (14). Les pros-tacyclines sont déconseillées pendant la grossesse car ellespourraient peut-être perturber la circulation utérine. L’ilo-prost semble tératogène chez le rat. Certaines équipes pro-posent, à l’extrême, une prise en charge « agressive » avecrecours aux techniques d’oxygénation extracorporelle.

Au total, la prise en charge de ces patientes à très haut ris-que impose une vigilance constante. Le décès peut surveniren période pre-partum, pendant le travail mais surtout enpost-partum. Une hospitalisation et une surveillance prolon-gées sont indispensables, les suites postopératoires immé-diates imposant de principe l’hospitalisation en unité desoins intensifs.

CONCLUSION

La prise en charge analgésique et anesthésique du patientsouffrant d’HTAP sévère est gravée d’un risque élevé, enparticulier dans le contexte obstétrical. Elle ne se conçoit,hors urgence, que dans un centre hautement spécialisé. Lesfluctuations hémodynamiques susceptibles d’être obser-vées chez ces patients en phase per- et postopératoire nepeuvent en aucun cas être interprétées de façon fiable sansle recours aux techniques échographiques ou au cathété-risme. La technique d’anesthésie idéale est déterminée aucas par cas, dans l’idéal après une discussion collégiale etmultidisciplinaire. La gamme des agents vasodilatateurssélectifs de la circulation pulmonaire s’est élargie ces der-nières années offrant, au-delà du bénéfice immédiat sur lesparamètres hémodynamiques, un espoir de réductionfuture de la mortalité périopératoire, ce que l’on a jamaisencore pu obtenir jusque-là, avec aucun traitement. ■

ABRÉVIATIONS

AVH Anesthésiques Volatils Halogénés

BMPR Bone Morphogenetic Protein Receptor

BPCO Bronchopneumopathie Chronique Obstructive

AMPc Adénosine Monophosphate Cyclique

CEC Circulation Extra Corporelle

GMPc Guanosine Monophosphate Cyclique

CIA Communication InterAuriculaire

CIV Communication InterVentriculaire

CPT Capacité Pulmonaire Totale

CRF Capacité Résiduelle Fonctionnelle

FEVD Fraction d’éjection ventriculaire droite

FIO2 Fraction inspirée en oxygène

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Le praticien en anesthésie-réanimation, 2004, 8, 1 47Ht Hématocrite

HTAP Hypertension Artérielle Pulmonaire

IEC Inhibiteurs de l’Enzyme de Conversion (de l’Angio-tensine)

NO Monoxyde d’azote

N2O Protoxyde d’azote

NYHA New York Heart Association

PA Pression artérielle (systémique)

PAD Pression Artérielle Diastolique (systémique)

PAG Pression Auriculaire Gauche

PAS Pression Artérielle Systolique (systémique)

PAM Pression Artérielle Moyenne (systémique)

PaO2 Pression partielle artérielle en oxygène

PAO2 Pression partielle alvéolaire en oxygène

PAPD Pression Artérielle Pulmonaire Diastolique

PAPM Pression Artérielle Pulmonaire Moyenne

PAPO Pression Artérielle Pulmonaire d’Occlusion

PAPS Pression Artérielle Pulmonaire Systolique

PCO2 Pression partielle en CO2

PvO2 Pression partielle veineuse en oxygène

PVP Pressions Veineuse Pulmonaire

RVP Résistances Vasculaires Pulmonaires

RVS Résistances Vasculaires Systémiques

SDRA Syndrome de Détresse Respiratoire Aigu del’Adulte

SIV Septum InterVentriculaire

SvO2 Saturation veineuse en O2

TGFα Transforming Growth Factor αVD Ventricule Droit

VG Ventricule Gauche

VPH Vasoconstriction Pulmonaire Hypoxique

VR Volume Résiduel

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44.Cette revue récente fait notamment le point sur l’état actuel des connaissancesconcernant les acteurs moléculaires impliqués dans la physiopathologie de l’HTAPet amène naturellement le lecteur vers les implications thérapeutiques qui en décou-lent.

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Tirés à part : Vincent LAUDENBACH,Réanimation Pédiatrique

et Laboratoire MERCI-DIFEMA EA2122, CHU Charles Nicolle,

1, rue de Germont 76031 Rouen Cedex.