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Ann Urol 2002 ; 36 : 250-3 2002 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés S0003-4401(02)00115-8/FLA Prostate Angiolipome rénal compliqué d’un hématome rétropéritonéal R. Rabii 1, H. Fekak 1 , K. Moufid 1 , A. Joual 1 , S. Benjelloun 1 , K. Khaleq 2 , B. Idali 2 , A. Harti 2 , L. Barrou 2 1 Service d’urologie, CHU Ibn Rochd, Casabanca, Maroc ; 2 service d’anesthésie-réanimation, CHU Ibn Rochd, Casabanca, Maroc RÉSUMÉ L’angiomyolipome (AML) rénal est une tumeur bénigne, généralement asymptomatique qui peut se manifester par une douleur abdominale, une masse palpable ou une hé- maturie. Nous rapportons un cas inhabituel d’une patiente âgée de 65 ans, qui consulte pour une hémorragie rétro- péritonéale par rupture spontanée d’un angiomyolipome rénal. L’échographie et la tomodensitométrie abdomino- pelvienne ont été performantes et ont permis le diagnos- tic préopératoire d’AML rénal droit compliqué d’hématome rétropéritonéal. Le traitement a consisté en une néphrec- tomie par voie transpéritonéale. Les suites sont simples. L’examen histologique a confirmé le diagnostic d’AML ré- nal. À travers ce cas, les auteurs discutent le diagnostic et le traitement d’AML rénal compliqué d’hémorragie ré- tropéritonéale. 2002 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS angiomyolipome rénal / hémorragie rétropéritonéale ABSTRACT Renal angiomyolipoma complicated by a retroperi- toneal hematoma. Renal angiomyolipoma (AML) is a benign tumor, they are generally asymptomatic or can manifested by abdomi- nal pain, palpable mass or hematuria. We report an un- commun case of 65 years old women who consulted for retroperitoneal hemorrhage by spontaneous rupture of renal AML with palpable mass. The ultrasound and CT abdominopelvic scan were performed in the preop- erative diagnosis and showed a typical right renal AML with retroperitoneal hematoma. The right nephretomy by transperitoneal approach was performed with a good follo up. The histological examination confirmed the diagno- Correspondance et tirés à part : R. Rabii, 26, rue de Rome, angle rue d’Amsterdam, Résidence Rime, Casablanca, Maroc. Adresse e-mail : [email protected] (R. Rabii). sis for renal AML. About this case, the authors discuses the diagnosis and the managment for AML with retroperi- toneal hemorrhage. 2002 Éditions scientifiques et médi- cales Elsevier SAS renal angiomyolipoma / retroperitoneal hemorrhagic 1. INTRODUCTION L’angiomyolipome (AML) rénal est une tumeur bé- nigne rare, souvent associée à des affections congé- nitales surtout la sclérose tubéreuse de Bourne- ville [1]. Généralement, elle est asymptomatique, et rarement symptomatique [2]. Nous rapportons un cas rare de AML compliqué d’hémorragie res- ponsable d’un important hématome rétropéritonéal, à travers lequel, nous allons discuter la prise en charge de ces formes cliniques rares et qui peuvent engager le pronostic vital. 2. OBSERVATION Mme G.A., âgée de 65 ans sans antécédents patholo- giques a consulté pour une douleur lombaire droite isolée, d’installation récente sans autres troubles urinaires. L’examen physique trouve des conjonc- tives légèrement décolorée, une masse abdomino- pelvienne étendue de l’hypochondre droit à la fosse iliaque droite. L’échographie abdominopelvienne montre une formation échogène à centre liquidien

Angiolipome rénal compliqué d'un hématome rétropéritonéal

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Page 1: Angiolipome rénal compliqué d'un hématome rétropéritonéal

Ann Urol 2002 ; 36 : 250-3 2002 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés

S0003-4401(02)00115-8/FLAProstate

Angiolipome rénal compliqué d’un hématome rétropéritonéal

R. Rabii1∗, H. Fekak1, K. Moufid1, A. Joual1, S. Benjelloun1, K. Khaleq2, B. Idali 2, A. Harti 2,L. Barrou2

1Service d’urologie, CHU Ibn Rochd, Casabanca, Maroc ; 2 service d’anesthésie-réanimation, CHU Ibn Rochd, Casabanca, Maroc

RÉSUMÉL’angiomyolipome (AML) rénal est une tumeur bénigne,généralement asymptomatique qui peut se manifester parune douleur abdominale, une masse palpable ou une hé-maturie. Nous rapportons un cas inhabituel d’une patienteâgée de 65 ans, qui consulte pour une hémorragie rétro-péritonéale par rupture spontanée d’un angiomyolipomerénal. L’échographie et la tomodensitométrie abdomino-pelvienne ont été performantes et ont permis le diagnos-tic préopératoire d’AML rénal droit compliqué d’hématomerétropéritonéal. Le traitement a consisté en une néphrec-tomie par voie transpéritonéale. Les suites sont simples.L’examen histologique a confirmé le diagnostic d’AML ré-nal. À travers ce cas, les auteurs discutent le diagnosticet le traitement d’AML rénal compliqué d’hémorragie ré-tropéritonéale. 2002 Éditions scientifiques et médicalesElsevier SAS

angiomyolipome rénal / hémorragie rétropéritonéale

ABSTRACTRenal angiomyolipoma complicated by a retroperi-toneal hematoma.Renal angiomyolipoma (AML) is a benign tumor, they aregenerally asymptomatic or can manifested by abdomi-nal pain, palpable mass or hematuria. We report an un-commun case of 65 years old women who consultedfor retroperitoneal hemorrhage by spontaneous ruptureof renal AML with palpable mass. The ultrasound andCT abdominopelvic scan were performed in the preop-erative diagnosis and showed a typical right renal AMLwith retroperitoneal hematoma. The right nephretomy bytransperitoneal approach was performed with a good folloup. The histological examination confirmed the diagno-

∗ Correspondance et tirés à part : R. Rabii, 26, rue de Rome, angle rue d’Amsterdam, Résidence Rime, Casablanca, Maroc.Adresse e-mail : [email protected] (R. Rabii).

sis for renal AML. About this case, the authors discusesthe diagnosis and the managment for AML with retroperi-toneal hemorrhage. 2002 Éditions scientifiques et médi-cales Elsevier SAS

renal angiomyolipoma / retroperitoneal hemorrhagic

1. INTRODUCTION

L’angiomyolipome (AML) rénal est une tumeur bé-nigne rare, souvent associée à des affections congé-nitales surtout la sclérose tubéreuse de Bourne-ville [1]. Généralement, elle est asymptomatique,et rarement symptomatique [2]. Nous rapportonsun cas rare de AML compliqué d’hémorragie res-ponsable d’un important hématome rétropéritonéal,à travers lequel, nous allons discuter la prise encharge de ces formes cliniques rares et qui peuventengager le pronostic vital.

2. OBSERVATION

Mme G.A., âgée de 65 ans sans antécédents patholo-giques a consulté pour une douleur lombaire droiteisolée, d’installation récente sans autres troublesurinaires. L’examen physique trouve des conjonc-tives légèrement décolorée, une masse abdomino-pelvienne étendue de l’hypochondre droit à la fosseiliaque droite. L’échographie abdominopelviennemontre une formation échogène à centre liquidien

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Figure 1. Échographie abdominale : masse rénale polairesupérieure droite à centre liquidien avec épanchement périrénal.

bien limitée au niveau rénal polaire supérieur, as-sociée à une coulée hypoéchogène périrénale des-cendant jusqu’au pelvis mesurant 20× 5 × 9 cm(Fig. 1). Une tomodensitométrie abdominopelvienneconfirme le diagnostic d’AML suspecté à l’échogra-phie par la présence d’une masse de 7/5 cm à triplecomposante : tissulaire, vasculaire, et surtout grais-seuse (−40 UH), avec une collection pararénale fu-sant le long de l’aorte, ne prenant pas le contrastecorrespondant à un hématome (Fig. 2).

Le rein controlatéral est normal. Après une trans-fusion sanguine, un abord chirurgical est réalisé parune voie tanspéritonéale sous costale droite. L’explo-ration trouve un important hématome rétropéritonéaltendu. Après décollement coloduodéanal, repérageet mise sur lac du pédicule, on procède à l’évacua-tion de l’hematome puis la nephrectomie est réalisée.L’examen de la pièce retrouve une grosse tumeur ré-nale polaire supérieure avec à la coupe des plagesd’hémorragie et de graisse, évocatrice d’AML rénale(Fig. 3). Les résultats d’anatomopathologie confirmele diagnostic d’AML rénal. L’évolution est bonneaprès un recul de six mois.

Figure 2. TDM abdominopelvienne : masse polaire supérieure à composante graisseuse prédominante avec hématome pararénal.

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Figure 3. Pièce de néphrectomie montrant à la coupe une massetumorale polaire supérieure à contenu graisseux, siège de foyershémorragiques.

3. COMMENTAIRE

L’angiomyolipome rénal est une tumeur bénigne rarequi peut être unique ou multiple, unilatérale ou bila-térale dans le cas surtout d’affections congénitalesdont la plus fréquente et la plus classique, la sclé-rose tubéreuse de Bourneville [2, 3, 6]. Générale-ment, elle est asymptomatique mais peut être révé-lée par une douleur, une hématurie et rarement parune masse palpable [2, 4 – 6]. Parfois, les AML sontrévélées par des remaniements hémorragiques dans9 % des cas [2]. Ce mode de révélation peut survenirde façon spontanée comme à la suite d’un trauma-tisme minime [2]. Mais souvent, l’hémorragie res-ponsable d’hématome rétropéritonéal est de surve-nue spontanée par rupture des vaisseaux développésau sein de la tumeur [7]. Ce mode de révélation quiest souvent de survenue brutale peut poser un pro-blème diagnostique et de prise en charge thérapeu-tique [1, 2, 8 – 10].

Souvent, le diagnostic est très évocateur après desexplorations radiologiques, notamment l’échogra-phie et la tomodensitométrie abdominopelviennesdans plus de 95 % des cas, par la présence au seinde la tumeur, d’une densité graisseuse [8]. L’écho-génécité de la tumeur est identique à celle du si-

nus rénal, l’épanchement est hypoéchogène, en règlesous capsulaire ou périrénale, rarement rompu dansle pelvis [2, 8]. L’examen tomodensitométrique estcaractéristique pour des lésions hétérogènes, avec uncontingent vasculaire qui se rehausse moins [8, 11].Les hématomes récents ont une hyperdensité sponta-née (50–90 UH) qui s’atténue progressivement, l’hé-matome devenant isodense puis hypodense par rap-port au parenchyme rénal [6]. La tomodensitométrieest plus sensible que l’IRM qui a montré en T1 unhypersignal sans rehaussement après injection de ga-dolinium [12].

L’angiographie peut montrer l’aspect irrégulierdes vaisseaux et surtout l’absence de shunt artério-veineux qui est un bon élément de diagnostic del’angiolipome [5]. Elle peut avoir aussi un rôle théra-peutique d’embolisation dans le cas compliqué d’hé-morragie [13].

Dans le cas d’AML rénal compliqué d’hémorragierétopéritonéale massive, le diagnostic peut être rendudifficile et de même, l’éventualité d’une associationd’un cancer rénal ne peut être exclue [10, 11, 14].Ainsi, la prise en charge thérapeutique de ces formescompliquées diffère des autres modes de révélation.

Pour ces dernières formes d’AML non compli-quée, la chirurgie n’est indiquée que si la tumeur estsymptomatique, si la tumeur augmente de taille, sus-pecte ou associée à une sclérose tubéreuse de Bour-neville [3, 8].

Cette chirurgie dans ces formes est de plus en plusconservatrice [8, 11, 13]. Dans les formes hémor-ragiques, l’exploration chirurgicale précédée ou pasd’une embolisation, est la méthode de choix [10, 16].Souvent dans ces formes, la tumeur est de grandetaille, supérieure à 7 cm avec un hématome abondantqui peut être remanié, relevant d’un nettoyage de laloge rénale et d’une néphrectomie [2, 10, 13, 15].La voie d’abord idéale pour l’exploration des AMLcompliquée d’hémorragie reste la voie antérieure ab-dominale sous costale et transpéritonéale qui permetune meilleure sécurité pour le contrôle vasculaireavant d’explorer le rein et d’évacuer l’hématome,d’autant plus que la tumeur est souvent de taille plusde 7 cm et associée à une hémorragie [10, 16]. Ra-rement dans ces formes, un traitement conservateurest proposé surtout s’il s’agit d’une tumeur sur reinunique ou tumeur bilatérale [4].

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4. CONCLUSION

L’AML rénal compliqué d’hémorragie rétropérito-néale est une urgence chirurgicale. La TDM restel’exploration radiologique de choix. Son traitementest conservateur, se limitant à l’exploration chirurgi-cale, mais le plus souvent l’intervention se solde parune néphrectomie d’hémostase.

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