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Approche quantitative Le protocole de recherche Les objectifs pédagogiques Connaître les principales caractéristiques de la méthode scientifique Se sensibiliser à la nécessité de contrôler les variables Connaître les principaux protocoles de recherche Les facteurs qui menacent la validité interne et externe des résultats Les approches de contrôle d’après Kirk Les raisons pour lesquelles nous devons utiliser un protocole de recherche Les difficultés entraînées par les groupes restreints et les groupes homogènes Le sommaire 1. Le soleil ne se lève pas et ne se couche pas non plus 2. La méthode scientifique, c’est quoi ? 3. Les erreurs de recherche 4. Un projet en herbe 5. Le protocole idéal de recherche 6. Les facteurs qui menacent la validité interne et externe des résultats 7. Les quatre approches de contrôle selon Kirk 8. Une méthodologie de recherche : pourquoi ? 9. Le contrôle des variables indépendantes 10. Les groupes restreints 11. Le hasard fait bien les choses Le protocole de recherche Donald Long Centre de recherche et de développement en éducation (CRDE) © Université de Moncton [email protected] (506) 858-4886 page 1

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Approche

quantitative

Le protocole de recherche

Les objectifs pédagogiques

Connaître les principales caractéristiques de la méthode scientifique Se sensibiliser à la nécessité de contrôler les variables

Connaître les principaux protocoles de recherche Les facteurs qui menacent la validité interne et externe des résultats

Les approches de contrôle d’après Kirk Les raisons pour lesquelles nous devons utiliser

un protocole de recherche Les difficultés entraînées par les groupes restreints et

les groupes homogènes

Le sommaire

1. Le soleil ne se lève pas et ne se couche pas non plus 2. La méthode scientifique, c’est quoi ?

3. Les erreurs de recherche 4. Un projet en herbe

5. Le protocole idéal de recherche 6. Les facteurs qui menacent la validité interne et externe des résultats

7. Les quatre approches de contrôle selon Kirk 8. Une méthodologie de recherche : pourquoi ?

9. Le contrôle des variables indépendantes 10. Les groupes restreints

11. Le hasard fait bien les choses

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1. Le soleil ne se lève pas et ne se couche pas non plus !

Je m’étonne toujours lorsque j’entends l’annonceur à la radio dire que le soleil s’est levé ce matin à 5 h 12. Du point de vue des habitants de la Terre, le soleil paraît se lever. En nous faisant passer de la noirceur à la clarté, il part du bas du firmament pour monter vers le haut. Il

nous apparaît même plus gros à l’horizon qu’au zénith. Il est facile croire que le soleil se lève. Les apparences contribuent à véhiculer une fausse croyance.

Pendant des siècles, les humains ont inventé divers systèmes de croyances pour expliquer la relation privilégiée que nous entretenons avec le soleil. Chacun de ces systèmes était fondé sur des principes de base souvent erronés. Nous avons conservé dans notre langage quotidien bien des vestiges de ces systèmes. La plupart de ces systèmes de croyances sont considérés comme des mythes depuis que certains individus nous ont fait part des résultats de leur recherche dans ce domaine. Des scientifiques tels que Copernic, Galilée, Hubble, Einstein et Hawking ont remis les pendules à l’heure en contribuant chacun à leur façon à une meilleure compréhension du fonctionnement de notre système solaire et de l’univers tout entier. Grâce à eux nous savons maintenant que le soleil ne se lève pas ! D’accord. Mais, pourquoi s’est-il couché à 7 h 48 hier ?

Comment ces scientifiques sont-ils parvenus à nous expliquer la véritable réalité, surtout qu’ils étaient contraints à observer

l’univers sans pouvoir le manipuler comme on le fait dans un laboratoire ?

Par des techniques rigoureuses d’observation et par la méthode scientifique.

2. La méthode scientifique, c’est quoi ?

La plupart du temps, la recherche faite par un scientifique se réalise selon une démarche systématique. Dans d’autres domaines, la démarche de recherche relève de l’intuition autant que de l’organisation, comme c’est le cas du prospecteur de métaux précieux.

Ce dernier n’exécute pas son travail à l’aveuglette : il procède selon une démarche personnelle qu’il a développée. Bien que sa méthode de recherche ait une certaine efficacité, elle ressemble à du fromage suisse : elle

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est pleine de trous ! Il fera quand même des découvertes intéressantes parce qu’au fil du temps il a appris à associer toutes sortes d’indices et de repères de l’environnement à la présence de métaux. D’une découverte à l’autre, il raffine sa démarche personnelle.

À l’observer, on dirait qu’il brise des cailloux au hasard. Au contraire, il essaie plutôt de réagir de façon systématique à divers aspects du terrain. Certes, sa quête de métaux précieux relève en partie de l’intuition, comme c’est le cas lorsque vous cherchez vos clés perdues. Malgré tout, en cherchant vos clés vous procédez de manière à ne pas retourner sans cesse aux mêmes endroits. Sans être une recherche scientifique, la recherche de vos clés se fait selon une démarche à la fois intuitive et systématique.

Il ne faut pas croire que les résultats d’une expérience scientifique sont toujours valides et que ceux de d’autres

méthodes sont toujours douteux et contestables.

Si, en théorie, elle semble être la méthode idéale de recherche, il reste que son application est entravée d’innombrables facteurs connus et inconnus. Les principes de la méthode scientifique sont considérés comme des objectifs à poursuivre, des buts dont nous devons nous rapprocher le plus près possible.

S’il est vrai que la valeur véritable de la méthode scientifique se vérifie dans son application,

il s’ensuit que le protocole de recherche est d’importance capitale.

D’après Ladouceur et Bégin (1980), la méthode scientifique comporte des caractéristiques particulières qui la distingue des autres démarches telles que celle utilisée par le prospecteur de métaux. Ces auteurs énumèrent quatre caractéristiques propres à la méthode scientifique de recherche.

Caractéristiques de la méthode scientifique 1. Le déterminisme

L’univers est un ensemble organisé et structuré dont le fonctionnement est compréhensible et prévisible.

2. La démarche empirique À partir d’une expérimentation, des données sont recueillies et analysées de

manière à accepter ou à rejeter une hypothèse destinée à expliquer un phénomène étudié.

3. Les définitions opérationnelles Les concepts fondamentaux et les instruments de mesure

sont définis de façon à être compris universellement

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et à être reproduits à d’autres temps ou dans d’autres lieux. 4. Le souci d’objectivité

Ce sont les résultats similaires d’une étude à l’autre qui permettent aux chercheurs d’arriver à un consensus. C’est donc crucial que les résultats d’une

recherche soient reproduits par d’autres chercheurs indépendants.

La recherche expérimentale permet de mieux contrôler les facteurs qui influencent le phénomène à l’étude. Cependant, la recherche expérimentale est moins populaire en éducation que dans d’autres domaines. On préfère, la plupart du temps, observer et analyser les phénomènes dans leur environnement naturel. Ce faisant, toutes sortes de difficultés surgissent et le taux d’erreurs augmente. Les résultats obtenus ne peuvent pas être expliqués de façon aussi complète parce que certaines composantes du phénomène échappent au contrôle du chercheur. Malgré tout, les autres protocoles permettent de vérifier des hypothèses de recherche et de mieux comprendre les phénomènes qui nous intriguent.

3. Les erreurs en recherche

La recherche vise une meilleure compréhension des phénomènes. Ces études sont menées soit en laboratoire, soit en milieu naturel. La croissance d’une plante peut être étudiée dans des conditions contrôlées de laboratoire ou bien dans votre cour arrière. Dans le laboratoire il est

possible d’appliquer diverses conditions qui stimulent la croissance de la plante selon des dosages précis. Par exemple, des rayons de lumière particuliers seront utilisés à raison d’un nombre de minutes précis et constant à chaque jour; des quantités précises d’éléments nutritifs seront introduites à un rythme régulier; la température de la pièce sera contrôlée; les insectes seront complètement éliminés; le taux d’humidité recevra une attention de tous les instants et bien d’autres facteurs aussi.

Dans un protocole expérimental, la plupart des facteurs resteront constants tout au long de l’étude, alors que quelques-

uns varieront. C’est ainsi qu’on pourra plus aisément établir une relation entre les facteurs qui varient et

le taux de croissance de la plante.

Vous avez déjà compris qu’un tel contrôle ne peut s’appliquer aux plantes de votre potager. Ce qui ne signifie pas qu’il soit impossible d’étudier la croissance de vos plantes en milieu naturel. Les techniques et les méthodes de recherche devront varier tout en acceptant un taux d’erreur de mesure plus élevé qu’en laboratoire. C’est ici que le protocole de recherche vous sera utile afin de diminuer les erreurs de mesure.

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La raison d’être du protocole de recherche est de réduire les erreurs systématiques d’expérimentation

menaçant la validité interne et externe des résultats.

Certes, avant de mener une recherche il est nécessaire de s’assurer de la pertinence des variables que nous voulons étudier : les soubresauts de la bourse de Toronto n’ont pas d’influence sur la croissance de vos plantes, mais la quantité de pluie en a, par contre.

Il faut vous assurer aussi que certaines conditions n’influencent pas de façon systématique vos résultats sans les mesurer. Par exemple, la quantité de pluie influence la croissance de vos plantes. Comme ce facteur ne peut pas être éliminé de votre expérience, il est crucial de le mesurer afin de savoir à quel point il agit sur la croissance de vos plantes.

La nécessité d’utiliser un protocole de recherche efficace doit être bien comprise, car le protocole permet de contrôler mieux les aspects du phénomène ciblé par la recherche. Comme la validité des résultats tient beaucoup

au contrôle exercé tout au long de la recherche, il ne faut pas hésiter à recourir à toute technique ou approche qui renforce le contrôle des variables.

4. Un projet en herbe

Deux étudiants, Virgule et Cédille, planifient de mener une recherche afin de démontrer la supériorité d’une nouvelle méthode d’enseignement des mathématiques. Ils en sont à leurs premières armes en recherche. Leur directeur de projet, le professeur Saitout, les encourage à raffiner leur protocole de recherche. C’est dans ce contexte que nous avons créé un scénario léger qui servira à introduire à la queue leu leu divers protocoles.

Le scénario va comme suit. D’abord, le protocole de recherche des étudiants est présenté sous forme schématique par Architex. Ensuite, les faiblesses du protocole sont soulignées par Cassetout. Enfin, le directeur de projet entre en scène en faisant des suggestions qui pourraient améliorer le protocole. Les étudiants reviendront à la charge avec un nouveau protocole de recherche, une version plus musclée. Le scénario est répété de façon à faire le tour de certaines conditions dans lesquelles se déroule la recherche et qui peuvent influencer l’analyse et l’interprétation des résultats.

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Vous constaterez que Cassetout n’énumère pas toutes les déficiences des protocoles présentés par Virgule et Cédille. Il se contente de présenter les principales.

Architex Virgule et Cédille Cassetout Professeur Saitout Protocole

schématisé Protocole proposé

Faiblesses du protocole

Améliorations au protocole

Un protocole de recherche selon l’approche hypothético-déductive peut comprendre diverses combinaisons des éléments suivants : groupe expérimental/témoin, variable indépendante/dépendante, prétest/post-test, et assignation au hasard des individus aux groupes ou non. Un protocole de recherche est une façon de cueillir et d’organiser des données empiriques. La variable indépendante, celle manipulée, sera identifiée comme VI, tandis que la variable dépendante, celle mesurée, sera représentée par VD.

1 Le groupe unique

VI Posttest VD

Pendant un semestre complet, l’enseignant de 3e année dispense son enseignement des maths selon la nouvelle méthode (VI). À la fin du

semestre, les élèves sont évalués à partir d’un examen (VD) qui couvre la plupart des notions abordées tout au long du semestre

Puisqu’il n’y a pas eu de prétest, il n’est pas possible de savoir à quel point les élèves ont fait du progrès sur les notions enseignées. L’examen

final permettra de mesurer à quel point les élèves comprennent les concepts du programme de maths. Par contre, on ne saura dans quelle

mesure la nouvelle méthode pédagogique a contribué à cet état de connaissance.

Ce protocole comprend d’innombrables faiblesses. Dans ce cas-ci, il faudrait être capable de comparer l’état des connaissances des élèves

avant l’intervention pédagogique (prétest) avec l’état de leurs connaissances une fois l’intervention terminée.

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2 Le protocole prétest/posttest

Prétest VD VI posttest VD

Avant d’enseigner quoique ce soit du programme de maths, les élèves passent le même examen que celui administré à la fin du semestre.

Ainsi, il sera possible de calculer leur progrès. La différence entre les deux sera attribuable à la nouvelle pédagogie.

La nouvelle méthode pédagogique n’est pas à elle seule responsable du score de différence entre les deux évaluations. Les élèves de la classe voisine ont suivi le même programme de maths, mais l’enseignement était dispensé selon une méthode traditionnelle et différente. Pourtant, leurs résultats laissent croire que la méthode traditionnelle est efficace

elle aussi. La nouvelle méthode comporte-t-elle des avantages par rapport à l’autre ?

Puisqu’il n’y a pas de groupe témoin, on ne peut savoir si des élèves apprenant les mêmes notions, mais selon une autre méthode, réussiront moins bien, aussi bien ou mieux qu’eux. Il ne suffit pas de déterminer si la nouvelle méthode est efficace ou non : il importe surtout de savoir si

elle est plus efficace que la méthode régulière.

3 Le protocole groupe expérimental/témoin

Groupe expérimental VI(régulière) posttest VD Groupe témoin VI(nouvelle) posttest VD

Un groupe témoin est ajouté à l’expérience. Ce groupe sera constitué des élèves d’une autre classe de la même école. À la fin du semestre, les deux classes passeront le même examen. Les deux classes suivent aussi

le même programme de maths. Ce qui distingue les deux classes, c’est la méthode d’enseignement.

Le groupe témoin servira d’étalon de comparaison. Cependant, comme le prétest a été éliminé, on ne pourra déterminer si les deux classes étaient égales ou non au début du semestre et à quel point chacune

d’elles a progressé au cours du semestre.

Afin d’améliorer ce protocole, il faudrait pouvoir mesurer si le progrès d’une classe est égal ou différent du progrès de l’autre classe. Comme

les élèves n’ont pas été assignés au hasard aux deux groupes, il est possible que les deux groupes fussent différents

avant même de débuter l’expérience.

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4 Le protocole groupe expérimental/témoin et prétest/posttest

Groupe expérimental Prétest VD VI(régulière) posttest VD Groupe témoin Prétest VD VI(nouvelle) posttest VD

Avant de débuter le semestre, les élèves des deux classes passeront le même examen que celui à la fin du semestre. La classe qui reçoit son enseignement selon la méthode traditionnelle sert, en fait, de groupe

témoin et représente toutes les autres classes de ce niveau.

L’assignation des élèves aux deux classes de ce niveau ne s’est pas faite selon le hasard : il y a plus de filles dans une classe et plus de garçons

dans l’autre. La proportion garçons/filles n’est pas respectée. Les garçons, en général, réussissent mieux que les filles en maths.

Les élèves pourraient être assignés au hasard dans chacune des classes de façon à ce que les facteurs distinctifs soient répartis également dans les deux classes. Ou encore, le sexe pourrait être considéré comme une 2e variable indépendante au même titre que la méthode d’enseignement.

5 Le protocole groupe expérimental/témoin et prétest/posttest avec assignation au hasard

Assi. au has. Gr. exp. Prétest VD VI(régulière) Post-test VD Assi. au has. Gr. con. Prétest VD VI(nouvelle) Post-test VD

Afin de s’assurer, non seulement que les garçons et les filles soient répartis également dans les deux groupes, mais aussi que les autres

facteurs soient répartis équitablement, les étudiants ont décidé d’assigner au hasard les élèves des deux classes

qui participeront à l’expérience.

Ce protocole s’approche du protocole idéal de recherche. Cependant, l’enseignant et les élèves du groupe témoin savent qu’ils sont en

compétition avec ceux du groupe expérimental, ce qui pourrait les inciter à faire des efforts supplémentaires. Ce groupe témoin n’est donc pas vraiment un groupe témoin. De plus, le nombre de classes est réduit, en plus de provenir de la même école. Enfin, nous ne savons rien sur la

capacité d’apprentissage des élèves, une variable qui influence fortement les résultats.

Ce groupe témoin peut être considéré comme un groupe expérimental. Les élèves du groupe témoin, se sentant désavantagés, créent une

variable indépendante supplémentaire en augmentant leur motivation intrinsèque. Il serait indispensable d’obtenir des données auprès

d’élèves qui apprennent les maths selon l’une ou l’autre méthode sans qu’ils sachent que leur rendement sera comparé à celui de groupes qui,

eux, sont conscients de cette éventualité. Aussi, le petit nombre de classes ne permettra pas de généraliser les résultats à tous les élèves de

ce niveau. Enfin, il y aurait un net avantage à considérer la capacité intellectuelle des élèves comme une variable indépendante

ou de contrôle.

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5. Le protocole idéal de recherche

Dans le contexte de l’approche quantitative, le protocole idéal de recherche est celui qui permet de manipuler à volonté quelques variables désirables tout en annulant l’effet de variables indésirables. Une recherche expérimentale en laboratoire se rapproche le plus du protocole idéal de recherche. Ce type de recherche est peu répandu en éducation. Des recherches valables peuvent tout de même être menées en faisant appel à des types de protocoles moins exigeants et dont les conditions d’application s’avèrent moins restrictives.

Certaines variables ne peuvent pas toujours être éliminées, et ce, même si elles ne font pas partie de l’objectif de l’étude : le niveau d’éducation, par exemple. Ainsi, on parle d’une variable indésirable pour cette étude. Cependant, si cette variable ne peut être éliminée, elle peut être distribuée également entre les groupes à l’étude. Si elle ne peut être répartie également entre les groupes, on verra à calculer et à contrôler statistiquement son effet sur la variable dépendante. On prétend alors que l’effet du niveau d’éducation sur la variable dépendante existe, mais qu’il agit de la même façon pour chacun des groupes. Grosso modo, par le biais d’une procédure statistique, la différence indésirable causée par le niveau d’éducation est, pour ainsi dire, corrigée et éliminée de la variable dépendante. La statistique est une science avoisinant la magie !

Les variables dites désirables ne sont pas les bonnes variables, par opposition à mauvaises variables : ce sont les variables qui le chercheur manipule ou qu’il mesure. Les hypothèses de recherche portent, vous l’avez deviné, sur ces variables et leur interaction.

L’approche quantitative est souvent perçue et pratiquée comme une approche qui vise à établir des relations entre des variables. La variable manipulée par le chercheur est connue comme la variable indépendante. Cette variable produit un effet mesurable sur la variable dépendante.

L’approche quantitative plaît aux chercheurs qui veulent mesurer des changements chez des individus : les protocoles de recherche qui font appel à des mesures avant et après un événement quelconque (prétest/posttest) maintiennent leur popularité et leur utilité.

Plusieurs auteurs ont proposé diverses classifications des protocoles de recherche. Nous adopterons celle suggérée par Campbell et Stanley (1963) comprenant les quatre types suivants :

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1. Préexpérimental 2. Expérimental 3. Quasi expérimental 4. Corrélationnel

De nombreux auteurs ont adopté cette classification et, à tour de rôle, ont tout mis en œuvre pour l’enrichir. L’un d’entre eux, Paul D. Leedy (1974), a consacré le chapitre 10 de son livre à cette classification. Nous vous recommandons de consulter au moins l’un de ces deux documents. Nous préférons, dans le présent document, insister sur d’autres aspects des protocoles de recherche.

Jusqu'à présent, nous avons vu qu’il y a diverses façons de recueillir des données de recherche et de les organiser en vue de les analyser. Plusieurs protocoles sont utilisés et certains semblent meilleurs que d’autres. Comment un protocole peut-il être meilleur qu’un autre ? Pour améliorer la validité interne et la validité externe, les chercheurs se sont dotés au fil du temps d’une méthodologie que nous qualifions maintenant de scientifique. Ce n’est pas par caprice ou par tradition que les chercheurs choisissent un protocole de recherche : c’est pour exercer un meilleur contrôle sur les facteurs qui menacent la validité des données d’une recherche.

La valeur d’un protocole dépend du degré de validité interne et externe

qu’il confère aux données.

6. Les facteurs qui menacent la validité interne et externe des résultats

Une expérimentation ou une recherche ne sont considérées scientifiques que si l’on respecte des critères particuliers. Si un seul de ces critères n’a pas été respecté, il est probable que les résultats obtenus auront peu de valeur. Les approches proposées par Kirk (1968) pour mieux contrôler les erreurs portent sur quelques-unes d’entre elles : ces approches sont décrites plus loin dans le présent document. Campbell et Stanley (1963) énumèrent 8 facteurs qui mettent en danger la validité interne des résultats d’une recherche et 4 autres facteurs qui menacent la validité externe.

La validité interne porte sur les conditions minimales et essentielles de toute recherche : instruments fiables, sélection au hasard des cas. La validité externe porte plutôt sur la généralisation des résultats : échantillonnage adéquat.

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Il est important d’être conscient de ces facteurs : en même temps qu’on apprend quoi éviter dans une recherche

on se forge une meilleure idée de ce qui doit être fait.

L’expérience vécue des participants

1 Admettons que vous administrez un prétest, un traitement quelconque et,

finalement, un posttest à un échantillon. Pendant la période que vous appliquez le traitement, une partie de l’échantillon subit un événement intense qui modifie à coup sûr la force et la direction du traitement. Les

conditions d’expérimentation ne sont pas les mêmes pour les participants. Les résultats, pour certains d’entre eux, représenteront l’effet du traitement seulement, tandis que, pour d’autres, ils représenteront l’effet du traitement combiné avec l’effet ajouté de l’événement intense et significatif survenu à

l’impromptu durant l’expérimentation.

Vous menez une étude sur l’attitude des adolescents de votre district scolaire envers la violence. Pendant l’étude, du vandalisme survient à l’une

des écoles, ce qui risque fort d’influencer les participants de l’étude qui proviennent de cette école.

Le passage du temps

2 Ce facteur porte sur les processus biologiques et psychologiques qui varient avec le simple passage du temps, et non en fonction d’un événement précis. Entre le prétest et le posttest, les participants ont pu apprendre des choses qui les ont influencés autant que le traitement. Aussi, plus il s’écoule de

temps entre les deux administrations de tests, plus il est probable que d’autres variables interagissent avec le traitement.

Les individus ont pu perdre leur intérêt initial dans la recherche. C’est devenu un événement banal pour les participants

de se présenter aux sessions.

Le testing

3 D’une session à l’autre, d’une interview à l’autre, les individus deviennent plus habiles, plus alertes et plus informés. Leur rendement au posttest est fonction des habiletés acquises lors du prétest. Si le testing implique une

forme quelconque d’apprentissage, il faut prendre les mesures nécessaires pour s’assurer que les résultats au posttest ne représentent pas une habileté

accrue parce qu’ils font le test pour une deuxième fois. Les résultats peuvent refléter l’effet du prétest autant que celui du traitement.

La variable dépendante est un test d’habileté mentale qui utilise des dessins abstraits comme matériel de base. Les participants ne sont pas familiers

avec ces dessins et encore moins avec les tâches à réaliser. Après le prétest, cependant, ils se sentent plus à l’aise et sont plus habiles à ce genre de

tâche. Au posttest, leurs résultats seront meilleurs probablement à cause de l’intervention expérimentale, mais aussi à cause de leur familiarité avec le

test acquise au cours du prétest.

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Les instruments de mesure

4 Des appareils servent souvent d’instruments de mesure. Ils sont

généralement fiables. La plupart des outils de mesure en sciences humaines ne sont pas des appareils, mais des tests, des questionnaires et

des soi-disant échelles de mesure conçues pour mesurer un comportement, une croyance, une opinion et bien d’autres. Dans ces cas, nous mesurons des concepts abstraits et souvent difficiles à définir. Ces instruments de

mesure n’offrent pas autant de fiabilité que des appareils.

Lorsque des humains servent d’outils d’évaluation, on peut s’attendre à des variations et des erreurs de mesure. Pour certains juges, le simple fait de

savoir qu’ils corrigent le post-test plutôt que le prétest les incite à resserrer ou à relâcher leurs critères d’évaluation.

La sélection et l’équilibre des groupes

5 Si vous n’avez pas équilibré ces groupes au départ, avant l’administration du prétest, comment êtes-vous certain que la différence entre les groupes à

la fin de l’expérience sera due au traitement plutôt qu’à une différence déjà présente au prétest ?

Vous menez auprès des fumeurs une expérience qui consiste à appliquer une nouvelle méthode pour leur permettre de cesser de fumer. Votre groupe expérimental se compose exclusivement de fumeurs qui veulent vraiment

cesser de fumer, des volontaires motivés. Votre groupe témoin, lui, comprend des fumeurs qui veulent cesser de fumer et d’autres qui ne

manifestent pas ce désir. La manière d’assigner les participants aux divers groupes fait en sorte qu’une partie de l’efficacité du traitement sera

attribuable aux caractéristiques du groupe et non seulement au traitement..

Le décrochage expérimental

6 La différence entre les résultats du prétest et ceux du posttest peut être attribuable au décrochage expérimental dans un des groupes. Ce n’est plus

la différence produite chez les participants qui a été mesurée, mais la différence dans la composition des groupes.

Plusieurs participants du groupe témoin ne se sont pas présentés au posttest parce qu’ils participaient à un tournoi sportif à l’extérieur de la région. Par

ailleurs, l’expérience portait sur la modification des attitudes envers les activités parascolaires. Comme ces participants qui se sont absentés ont pu

être justement ceux-là qui ont fait peu de progrès du prétest au posttest parce qu’ils étaient fortement convaincus au départ des bienfaits de ces activités, il s’ensuit que l’effet de l’expérience sera plus grand qu’il ne

devrait l’être en réalité.

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L’interaction ou la combinaison de certains facteurs 7 Il arrive que certains facteurs ci-haut mentionnés se combinent et réduisent la validité interne d’une expérience scientifique.

Lorsque des individus se portent volontaires pour une expérience, ils manifestent déjà un intérêt supérieur à celui des individus choisis au hasard.

Par surcroît, d’une session à l’autre ils montrent plus de progrès que les participants des autres groupes justement parce qu’ils ont un intérêt

particulier envers le traitement. Sans compter qu’ils sont plus persévérants que les autres participants choisis au hasard.

La réaction au testing

8 Le simple fait de subir un prétest rend les participants plus conscients de certains aspects de la problématique étudiée. Ils

réagissent souvent en fonction des attentes du chercheur.

Au prétest, des parents répondent à un questionnaire qui porte sur les méthodes disciplinaires utilisées à la maison. La nature des questions fait en

sorte que bien des parents réalisent qu’il existe d’autres méthodes que les leurs et que d’importants principes sont en jeu. Il est évident que leur

réaction au traitement aurait été fort différente n’eut été de ce prétest qui, à lui seul, a changé leur attitude avant même le traitement. Le prétest les a

alertés à des principes et à des pratiques différentes.

L’interaction sélection/variable indépendante

9 Dans ce cas-ci il s’agit de l’interaction entre la sélection des participants et la variable indépendante (formation des groupes). Votre problématique de recherche fait en sorte que la formation des groupes ne peut être faite en

respectant les lois du hasard. Vos résultats ne seront donc pas généralisables à l’ensemble des autres écoles.

Supposons que vous voulez appliquer une nouvelle méthode d’enseignement des mathématiques. Une seule école de votre région consent à participer à votre projet. Les résultats que vous obtiendrez

peuvent être influencés par les caractéristiques du personnel enseignant. Plus que les autres, ces enseignants aiment tenter de nouvelles expériences

pédagogiques.

La réaction à l’expérience 10 Le simple fait de participer à une expérience amène les individus à réagir de

manière différente qu’en temps normal.

Lorsque quelques élèves sont sortis de leur classe régulière pour se rendre dans un autre local avec des personnes étrangères pour être soumis à des

interviews ou à des questionnaires écrits, on suppose qu’ils feront des efforts supplémentaires et qu’ils se comporteront de manière à répondre à des attentes. Le fait d’être isolés des autres élèves peut les inciter à mieux

performer qu’en temps normal.

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7. Les quatre approches de contrôle selon Kirk

Pour mener une recherche hypothético-déductive, il faut au moins une variable indépendante et une variable dépendante.

1. Vous voulez établir une relation entre le niveau

socioéconomique d’une famille et le rendement scolaire

des enfants.

2. Vous mesurez ces deux variables auprès d’un échantillon

tiré au hasard dans une région considérée comme typique

de votre province. 3. Certes, vos données vous permettent de faire des calculs statistiques. Par contre,

la relation entre la variable dépendante et la variable indépendante peut ne pas être aussi authentique que vous le croyez.

Pourquoi ?

D’autres variables ont pu intervenir et agir sur la variable dépendante (le rendement scolaire des enfants). Il est plutôt rare dans les sciences sociales qu’on réduise une recherche à des éléments aussi simples et rudimentaires. On croit plutôt que les phénomènes sociaux et éducatifs sont influencés par plusieurs facteurs au lieu d’un seul.

Le rendement scolaire des enfants est certainement influencé par le niveau de scolarisation des parents, les méthodes pédagogiques utilisées en classe, le niveau d’intelligence des enfants, la participation des parents aux activités parascolaires, et bien d’autres facteurs. Kirk (1968) propose quatre différentes approches qui permettent de contrôler ces facteurs qui peuvent influencer les résultats à l’insu du chercheur.

Première approche 1 Garder constant le facteur dérangeant pour tous les cas. Même si le facteur influence la variable dépendante, cette influence sera uniforme pour tous les cas. Par exemple, tous les parents de ces enfants devront participer à au moins une activité parascolaire ou tous les enfants proviendront du même niveau scolaire.

Deuxième approche 2 Assigner les participants à chacun des groupes selon le hasard. Par exemple, vous menez une expérience sur la mémoire à court terme chez les adolescentes et les adolescents. Plutôt que de séparer votre échantillon en deux groupes distincts, les garçons et les filles, vous les assignez au hasard à chacun des groupes. Ainsi, l’influence différentielle du sexe sera distribuée également entre les groupes.

Troisième approche 3 Considérer le facteur dérangeant comme une variable

indépendante et mesurer son influence.

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Par exemple, en voulant mesurer la relation entre le niveau socioéconomique de la famille et le rendement scolaire des enfants, vous pourriez mesurer le nombre d’heures que les parents consacrent à la lecture de loisir ou leur niveau de scolarisation. Une fois ces variables quantifiées, vous pouvez connaître leur influence sur le rendement scolaire des enfants.

Quatrième approche 4 Éliminer statistiquement l’effet des facteurs dérangeants. L’analyse de covariance a été conçue pour permettre ce type de contrôle statistique. Si des variables indépendantes, dont les facteurs dérangeants font partie, entretiennent une relation quelconque avec une variable dépendante, il est fort possible qu’elles soient aussi reliées entre elles. Si tel est le cas, avant de calculer l’association entre une variable indépendante et la variable dépendante, l’analyse de covariance permettra de soustraire de cette relation l’influence d’une autre variable indépendante sur la même variable dépendante. En analysant les approches proposées par Kirk, nous pouvons les classer selon qu’elles offrent un contrôle expérimental ou un contrôle statistique. Le tableau qui suit résume cette classification des approches de contrôle.

Classification des approches de contrôle proposées par Kirk.

Contrôle Approche Expérimental Statistique Première X Deuxième X Troisième X Quatrième X

8. Une méthodologie de recherche : pourquoi ?

Qui d’entre nous oserait prendre un médicament qui n’a pas été soumis à des épreuves de laboratoire afin de s’assurer qu’il ne constitue pas un danger pour notre santé ? Peu d’entre nous accepteraient d’avaler un cachet quelconque en s’appuyant sur la simple opinion du chimiste : nous exigeons des preuves solides et scientifiques de la qualité de ce médicament.

Pourtant, en éducation, on se contente souvent de l’opinion d’un individu pour endosser une nouvelle méthode d’enseignement ou du matériel pédagogique dernier cri. Qu’est-ce que la recherche apporte de mieux que l’opinion d’un individu compétent renommé ? Pourquoi l’intuition à ne suffit-elle pas à décortiquer et à comprendre les phénomènes qui nous intriguent ?

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Un protocole de recherche peut viser à mesurer l’effet produit par la manipulation d’une variable dans une situation définie. Par

exemple, la situation avant est comparée avec la situation après afin de calculer la différence entre les deux, s’il en résulte une évidemment. La différence entre les deux sera attribuable à la variable manipulée. Le producteur de lait qui modifie l’alimentation de son bétail selon les directives strictes du vétérinaire pourra constater si les nouveaux aliments introduits augmentent ou non la production laitière. Pour tirer des conclusions valides, le vétérinaire devra s’assurer de contrôler tous les autres facteurs qui peuvent influencer cette production laitière.

1. La recherche permet de mesurer

une différence.

Les phénomènes ne sont pas des ensembles flous et théoriques. Ils peuvent être décortiqués. Chacun des éléments d’un

phénomène peut être considéré ou non, mesuré ou non, dans le cadre d’une expérience. La plupart des recherches ont comme objectif d’identifier ces éléments et de mesurer les relations entre eux.

2. La recherche permet d’isoler les aspects d’un phénomène.

Lorsque toutes les conditions avant sont les mêmes que celles après, à l’exception de la variable manipulée, on peut

prétendre que, si une différence est observée, cette différence est due à la variable expérimentale. Si vous allumez un feu de bois à l’aide d’une allumette, la cause de ce feu est aisément identifiable. Cependant, tous les phénomènes n’ont pas une cause unique aussi évidente. L’opinion que se font les gens de la conservation des formes d’énergies épuisables ne s’explique pas par une cause ou même un ensemble restreint de facteurs.

3. La recherche permet d’établir

des liens cause effet.

Les expériences menées sur des échantillons impliquent que la nature d’un petit groupe ne diffère pas tellement d’un grand groupe.

La façon de sélectionner un échantillon peut rendre les résultats spécifiques à cet échantillon et non généralisables à la population entière. En constituant un échantillon de volontaires plutôt que d’individus choisis au hasard dans la population il y a un risque que les résultats soient différents.

4. Les résultats obtenus auprès d’un échantillon

sont généralisables à la population entière.

La taille de l’échantillon est importante aussi : plus l’échantillon se rapproche en nombre de la population plus il partage ses caractéristiques.

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Le manque de représentativité de l’échantillon peut être en partie responsable des résultats.

En répétant la même expérience, on devrait obtenir toujours les mêmes résultats. Lorsque c’est le cas, l’association

entre les variables gagne en authenticité.

5. Des résultats sont valables s’ils peuvent être reproduits en respectant les conditions

particulières de l’expérience.

Malgré la grande variabilité entre les individus quant à des comportements de toutes sortes, on constate une régularité

surprenante chez eux. Les humains conservent leur identité d’un jour à l’autre. Ils progressent, évoluent. Mais, ces changements se font de manière contrôlée. L’individu apporte des modifications à son système de valeurs fondamentales, mais il ne transforme pas ce système à chaque jour. Par exemple, il peut changer son opinion quant à un député conservateur sans rejeter du même coup ses croyances envers le conservatisme politique. Les autorités municipales peuvent se fier que les conducteurs, en majorité, vont respecter les panneaux de signalisation. La recherche, tout comme les autres activités humaines, est possible grâce à cette constance, à cette capacité que possèdent les humains de rester eux-mêmes malgré leurs nouveaux apprentissages quotidiens.

6. Les phénomènes humains ne se produisent

pas par hasard.

Il n’y a rien de banal à cette constatation. Si vous appliquez un protocole prétest/post-test, vous

indiquez, par le fait même, que vous croyez en la capacité des participants de faire de nouvelles acquisitions et de les conserver au-delà de l’intervention expérimentale. Votre expérience consiste à soumettre des conducteurs expérimentés à des sessions de perfectionnement sur un simulateur de conduite. En fait, vous croyez que ce qu’ils apprendront en simulation va être transféré lorsqu’ils conduiront leur auto dans les rues.

7. Les humains sont capables d’apprendre et de conserver

des apprentissages.

9. Contrôler des variables indépendantes

L’utilisation d’un protocole de recherche vise à contrôler les événements qui font partie d’une expérience. Des mesures sont prises pour que certaines choses se produisent assurément et pour que d’autres choses n’interviennent pas lors de l’expérience. La plupart des protocoles de recherche sont basés sur des conditions d’expérience. Voyons quelques-

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unes de ces conditions afin de comprendre le rôle véritable d’un protocole de recherche.

En guise d’exemple, vous voulez vérifier l’effet d’un médicament

sur des patients atteints d’une maladie quelconque. Autant les sujets du groupe témoin que ceux du groupe expérimental recevront un comprimé d’apparence identique. Cependant, le comprimé du groupe témoin ne contiendra pas la substance médicamenteuse. Tout sera mis en œuvre pour s’assurer que personne ne détecte une différence quelconque entre les comprimés. Voilà un exemple de contrôle lors d’une expérience.

Q Pourquoi est-il nécessaire de contrôler autant de facteurs que possible lors d’une expérience scientifique ?

R Afin de déterminer à quel point chacune des variables indépendantes influence la variable dépendante

Dans cette expérience-ci, une démarche particulière doit être prise pour s’assurer que les sujets ne prennent pas d’autres médicaments ou ne subissent pas un traitement médical quelconque qui pourrait s’ajouter au traitement de l’expérience, le remplacer ou le contrecarrer. Plusieurs variables indépendantes seront faciles à contrôler de façon à ne pas biaiser les relations originales entre les variables. D’autres, cependant, ne sont pas aisées à contrôler, surtout lorsqu’elles ne sont pas clairement identifiées par le chercheur. Par exemple, vous menez une recherche auprès des enseignants sur le stress au travail. Il est facile de mesurer le stress en fonction du niveau d’enseignement. Il est encore plus facile de mesurer le stress en fonction du genre masculin ou féminin. Or, comme les femmes sont plus nombreuses au niveau primaire et que les hommes sont plus nombreux au niveau secondaire, vous allez prendre des mesures pour que votre échantillon respecte la proportion femmes/hommes observée à chaque niveau. Si, dans votre expérience, vous avez trop d’hommes du primaire et trop de femmes du secondaire, vous risquez de contrecarrer l’effet du genre par l’effet du niveau scolaire, et vice-versa. Dans d’autres expériences, il n’est pas possible de prendre des précautions pour que l’échantillon soit représentatif de la population. Vous êtes en droit de vous inquiéter si vous jugez qu’il est important de respecter les proportions de la population.

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Par contre, s’il s’agit de mesurer la relation entre des variables, le manque de représentativité de votre échantillon ne biaise pas, à proprement parler, vos résultats. Reprenons l’expérience portant sur l’effet d’un médicament. Le groupe témoin ne sera pas composé exclusivement de femmes et le groupe expérimental exclusivement d’hommes. Des mesures seront prises pour qu’un nombre équivalent d’hommes et de femmes fassent partie de ces deux groupes. Pourquoi prendre une telle précaution ? Tout simplement pour annuler l’effet que le genre peut avoir sur la prise de médicaments. L’effet du genre n’est pas éliminé : on ne peut pas extraire ou extirper le genre à une personne.

L’effet est plutôt distribué également dans les deux groupes. S’il y a autant d’hommes dans le groupe témoin que dans le groupe expérimental, la différence entre les

deux groupes, si une différence est observée, ne peut être attribuée au genre.

Il existe aussi des situations où il est carrément impossible de répartir des sujets également entre divers groupes avant le début de l’expérience. Par exemple, vous soupçonnez que, dans le groupe témoin, le niveau socio-économique est plus élevé que dans le groupe expérimental. C’est une constatation faite une fois l’expérience en marche. Que faire pour y remédier ? Il s’agira d’obtenir une mesure du niveau socio-économique à la fin de l’expérience. L’influence de cette variable indépendante sera soustraite statistiquement de la variable dépendante avant de procéder aux autres analyses, en autant que les deux groupes se différencient entre eux quant au niveau socio-économique. Encore faut-il démontrer que le niveau socio-économique diffère de façon significative dans les deux groupes avant de corriger, pour ainsi dire, la variable dépendante.

10. Les groupes restreints Un protocole de recherche à lui seul ne garantit pas des résultats libres d’erreurs ou de biais. Des analyses statistiques complexes n’écartent pas plus l’effet biaisant de données non valides ou extrêmes. Un groupe composé d’un nombre limité de sujets peut biaiser des résultats de recherche. Plus le nombre augmente dans un groupe moins important est l’impact de scores extrêmes. Dans tous ces cas, il est impérieux de vérifier et de débarrasser les données de ces valeurs extrêmes.

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Diverses procédures existent à cet effet. J’ai décrit certaines d’entre elles dans un module qui s’intitule

Faire le ménage dans les données à l’adresse suivante :

http://www3.umoncton.ca/cdem/longd2/ Vous y apprendrez vite à reconnaître les scores extrêmes, par exemple, et à corriger la situation.

11. Le hasard fait bien les choses !

Dans la plupart des expériences ou des études dans les sciences sociales, nous sommes confrontés à la nature des participants. Par exemple, vous faites appel à la population générale afin que des gens se portent volontaires pour votre expérience sur l’effet de l’alcool

sur la conduite de véhicules. Votre expérience se déroule entièrement dans un simulateur de conduite. À cause de la spécificité de votre sujet de recherche et des principes moraux concernant la consommation d’alcool, bien des personnes seront même offensées de l’expérience comme telle. Votre bassin de population rapetisse encore plus par le fait que les sujets doivent avoir l’âge légal de conduire et de consommer de l’alcool. Bref, pour un sujet de recherche spécifique vous risquez d’obtenir des sujets de nature homogène et restrictive par rapport à plusieurs caractéristiques, mettant en péril la généralisation de vos résultats à la population générale.

Le scénario idéal consiste à piger au hasard vos sujets parmi la population générale. Si les lois du hasard sont respectées, votre échantillon partagera les mêmes caractéristiques que celles de la population d’où il origine. Il est généralement admis qu’il n’est pas nécessaire de respecter les paramètres de la population en choisissant un échantillon si l’objectif n’est pas de généraliser les résultats à la population. Peut-être, sauf que….

La nature des participants détermine, en partie,

la nature des résultats. Plus l’échantillon est diversifié, plus grande sera la variabilité des scores. Si, dans votre expérience sur l’alcool au volant, votre échantillon est

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composé de participants âgés de 20 à 67 ans, il est fort à parier que les résultats seront différents de ceux que vous obtiendriez si l’âge variait de 26 à 39 ans. Qu’en seraient-ils des résultats si tous les sujets avaient 63 ans, ou 19 ans ?

La variabilité dans la nature de l’échantillon ne peut faire autrement qu’affecter la relation entre des variables indépendantes et dépendantes, car cette relation est mesurée à partir de la variabilité des

scores. En rétrécissant l’âge des sujets, par exemple, on diminue en même temps la variabilité dans la variable dépendante.

Les difficultés de constituer un échantillon sont parfois grandes si bien que nous oublions de jeter un regard critique sur ses caractéristiques. Trop contents de rassembler assez d’individus pour tenir notre expérience, parfois nous n’osons pas regarder de près la nature de cet échantillon constitué par la peau des dents. Pourquoi tant s’en faire pour obtenir le maximum de variabilité possible dans la variable dépendante ? Reprenons une fois de plus l’exemple de la recherche sur les effets d’un nouveau médicament. Une fois l’expérience terminée, tous les sujets des deux groupes expérimental et témoin obtiennent le même résultat ou presque. Pire encore, les résultats obtenus après l’expérience ne diffèrent pas non plus de ceux obtenus avant l’expérience. Comme il n’y a pas eu de changement ou de variation dans la variable dépendante, la variable qui était sensée détecter l’influence du médicament, il ne reste plus qu’à conclure que le médicament n’agit pas comme prévu. L’hypothèse nulle de recherche est acceptée. Si les membres d’un groupe ou d’un échantillon sont homogènes, l’effet d’une variable indépendante risque d’être le même pour l’ensemble du groupe. Tout compte fait, un résultat de recherche est collé à la nature des sujets de l’expérience. Il y a donc plus de chances de détecter l’effet d’une variable indépendante sur un groupe hétérogène qu’un groupe homogène.

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Sources

Campbell, D. T. et Stanley, J. C. (1963). Experimental and quasi-experimental designs for research. Chicago: Rand McNally. Kirk, Roger E. (1969). Experimental Design: Procedures for the behavioral Sciences. Brooks/Cole Publishing Co. Belmont, Californie. Ladouceur, R. et Bégin, G. (1986). Protocoles de recherche en sciences appliquées et fondamentales. Edisem inc. 2475 Sylva Clapin, St. Hyacinthe, Québec.