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24 testamentaire de Panigel, puis Pierre Bergé, à la tête de la col- lection, qu’il est bien l’hom- me de la situation pour pour- suivre l’œuvre patrimoniale en cours... GARANCE, HUILE, CHARDON CARDÈRE Un ami commun nous a mis en relation. Et le hasard a fait qu’à l’époque je produisais le groupe aptésien Raoul Peti- te dont le manager s’appelait Valay ; or, son arrière-grand- père avait épousé Blanche Mis- tral, lointaine parente du poète, et fut propriétaire de La Fabrique”. Le courant passe, l’affaire est conclue et, à peine arrivés dans les Alpilles (Hervé a de la famille au Para- dou), les Le Guil ouvrent les portes du site à l’occasion des Journées du Patrimoine. Une évidence quand on sait que la bâtisse principale, construite sur les ruines moyenâgeuses d’un moulin à huile, abrita des productions de garance, char- don cardère et diverses semences. Une richesse historique qui dis- simule une précieuse collec- tion. A préserver et à transmettre aux futures générations ; depuis 1999, une convention avec le département de musi- cologie de l’Université d’Aix permet d’ailleurs aux étu- diants de venir à Saint-Rémy découvrir le vinyle et pratiquer l’inventaire en vue, un jour, de mettre toutes ces infos en ligne... Transmettre et rendre la cul- ture accessible à tous, telle était la philosophie de Panigel, aujour- d’hui perpétuée par Le Guil. C’est dans cet état d’esprit qu’Hervé a monté le festival de la BO en 2010, à but cari- tatif (en faveur de l’associa- tion Valétudo qui suit les femmes accidentées de la vie à Saint-Paul de Mausolée), avec ses amis Christian, président du cinéma, et Jean-Marc, psychiatre. Une initiative malheureusement abandonnée après deux éditions, faute de soutiens, alors qu’el- le s’avérait un réel succès ; en voisin, Michel Leeb y avait même joué les maîtres de céré- monie… Proposer des rencontres culturelles à moindre frais, en toute simplicité et pour la bonne cause était l’unique ambition du trio. “D’l’amour, d’la joie, de la bonne humeur…”, aurait suggéré Zaz. La prochaine artis- te que La Fabrique aimerait atti- rer dans ses filets, autour d’un micro et d’une bonne… bou- teille de vin dédicacée. Un livre d’or original, signé par tous (!), pour un lieu qui l’est tout autant. Un autre bistrot préféré… La Fabrique 454, Petite route des jardins 13210 St-Rémy de Provence Tél : +33(0) 432 600 256 [email protected] www.studioslafabrique.com L’hommage de Nick Cave Nick Cave et les Bad Seeds ont enregistré leur dernier opus “Push the sky away” à La Fabrique. Un moment que le chanteur de Brighton n’est pas près d’oublier, comme il l’a récemment confié aux Inrockuptibles. “C’est un album très français : il a été enregistré le ventre plein de nour- riture et de vins locaux dans ce studio, en Provence. Le lieu a vraiment eu une forte influence sur l’ambiance du disque, son atmosphère m’a submergé (…) Nous n’avions aucune intention musicale en arrivant mais, là, claire- ment, le lieu avait décidé pour nous (…) Je m’y suis tel- lement senti chez moi qu’aujourd’hui La Fabrique me manque. J’y ai vécu une expérience très forte, qui a affec- té mon âme. Parler d’epiphanie serait peut-être exagéré, mais il s’est vraiment passé un truc.Un pour tous, tous pour un "Tous les gens qui travaillent à La Fabrique en sont des piliers ; il suffit qu’on en enlè- ve un seul pour que la machine ne fonctionne plus !", assure Hervé le Guil, ingénieur du son de métier et véritable chef d’orchestre. Pêle-mêle, il cite son épouse Isabelle (responsable de l’accueil, des réservations pour les artistes, du travail administratif…), Damien (assistant passionné, formé au studio), Thomas (électronicien "géo-trouve-tout"), Mohamed (jardinier), Fatima (femme de ménage), Anne (cuisinière) et sa sœur Véro- nique, Thibault (un ami et associé, toujours prêt à rendre service), Pauline (la fille, décou- vreuse "officieuse" de jeunes talents), Maxime (le fils, complice, ingénieur du son) et son associé Victor qui ont créé Mix With The Master, ainsi que “plein d’autres per- sonnes qui sont là avec nous…Armand Panigel, le pionnier… et le projet Animateur de la cultissime émission “La tribune des critiques de disques”, sur France Musique de 1946 à 1984, Armand Panigel est également à l’origine de la revue Disques, exclusivement consacrée au classique. Passionné de grand écran, il sera également pro- ducteur, réalisateur et présentateur de “L’histoire du cinéma français par ceux qui l’ont fait” à l’ORTF. Plusieurs fois, il interpellera André Malraux, alors Ministre de la Cultu- re : "On a des bibliothèques pour les livres mais rien pour les disques. Il en faudrait pourtant dans les conservatoires." A la retraite, il missionnera son avocat (M e Bernard Jouanneau) pour lui trouver un lieu de villégiature, en province, afin de créer une fondation à son nom riche d’une gigantesque collection privée d’enregistrements, films, livres jusque-là entreposée à Saint-Cloud… Pour cet officier de l’Ordre des Arts et des Lettres, rien ne vaut la per- formance instantanée, jouée une seule fois. C’est l’âge d’or de l’interprétation : on enregistre et on grave le disque en même temps ! Armand Panigel décédera à 75 ans, en 1995, soit à peine dix ans après son installation à La Fabrique, favorisée par Michel Pezet, alors président du Conseil régional. "Nous allons créer une radio thématique, "Dans le Sillon Panigel", qui ne diffusera que sa collection de 78 et 33 tours. Chaque morceau ne sera proposé qu'une seule fois ! Et on pourra les réécouter en podcast, sur internet", révèle Hervé Le Guil. "Il y a ici de quoi diffuser pendant plus de 50 ans en continu sans jamais reproduire le même disque." ➤➤➤ Suite de la page 22

Armand Panigel, le pionnier… et le projet€¦ · en relation. Et le hasard a fait qu’à l’époque je produisais le groupe aptésien Raoul Peti-te dont le manager s’appelait

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Page 1: Armand Panigel, le pionnier… et le projet€¦ · en relation. Et le hasard a fait qu’à l’époque je produisais le groupe aptésien Raoul Peti-te dont le manager s’appelait

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testamentaire de Panigel, puisPierre Bergé, à la tête de la col-lection, qu’il est bien l’hom-me de la situation pour pour-suivre l’œuvre patrimoniale encours...

GARANCE, HUILE,CHARDON CARDÈRE

“Un ami commun nous a misen relation. Et le hasard a faitqu’à l’époque je produisais legroupe aptésien Raoul Peti-

te dont le manager s’appelaitValay ; or, son arrière-grand-père avait épousé Blanche Mis-tral, lointaine parente dupoète, et fut propriétaire de LaFabrique”. Le courant passe,l’affaire est conclue et, àpeine arrivés dans les Alpilles(Hervé a de la famille au Para-

dou), les Le Guil ouvrent lesportes du site à l’occasion desJournées du Patrimoine. Uneévidence quand on sait que labâtisse principale, construitesur les ruines moyenâgeusesd’un moulin à huile, abrita desproductions de garance, char-don cardère et diversessemences. Une richesse historique qui dis-simule une précieuse collec-tion. A préserver et à transmettreaux futures générations ;depuis 1999, une conventionavec le département de musi-cologie de l’Université d’Aixpermet d’ailleurs aux étu-diants de venir à Saint-Rémydécouvrir le vinyle et pratiquerl’inventaire en vue, un jour, demettre toutes ces infos en ligne...Transmettre et rendre la cul-

ture accessible à tous, telle étaitla philosophie de Panigel, aujour-d’hui perpétuée par Le Guil.C’est dans cet état d’espritqu’Hervé a monté le festivalde la BO en 2010, à but cari-tatif (en faveur de l’associa-tion Valétudo qui suit lesfemmes accidentées de la vieà Saint-Paul de Mausolée), avecses amis Christian, présidentdu cinéma, et Jean-Marc,psychiatre.Une initiative malheureusementabandonnée après deux éditions,faute de soutiens, alors qu’el-le s’avérait un réel succès ; envoisin, Michel Leeb y avaitmême joué les maîtres de céré-monie… Proposer des rencontres

culturelles à moindre frais, entoute simplicité et pour la bonnecause était l’unique ambitiondu trio. “D’l’amour, d’la joie,de la bonne humeur…”, auraitsuggéré Zaz. La prochaine artis-te que La Fabrique aimerait atti-rer dans ses filets, autour d’unmicro et d’une bonne… bou-teille de vin dédicacée. Un livred’or original, signé par tous (!),pour un lieu qui l’est tout autant.Un autre bistrot préféré…

La Fabrique454, Petite route des jardins13210 St-Rémy de ProvenceTél : +33(0) 432 600 [email protected] www.studioslafabrique.com

L’hommage de Nick Cave

Nick Cave et les Bad Seeds ont enregistré leur dernieropus “Push the sky away” à La Fabrique. Un momentque le chanteur de Brighton n’est pas près d’oublier, commeil l’a récemment confié aux Inrockuptibles. “C’est un albumtrès français : il a été enregistré le ventre plein de nour-riture et de vins locaux dans ce studio, en Provence. Lelieu a vraiment eu une forte influence sur l’ambiancedu disque, son atmosphère m’a submergé (…) Nous n’avionsaucune intention musicale en arrivant mais, là, claire-ment, le lieu avait décidé pour nous (…) Je m’y suis tel-lement senti chez moi qu’aujourd’hui La Fabrique memanque. J’y ai vécu une expérience très forte, qui a affec-té mon âme. Parler d’epiphanie serait peut-être exagéré,mais il s’est vraiment passé un truc.”

Un pour tous, tous pour un "Tous les gens qui travaillent à La Fabrique en sont des piliers ; il suffit qu’on en enlè-ve un seul pour que la machine ne fonctionne plus !", assure Hervé le Guil, ingénieurdu son de métier et véritable chef d’orchestre. Pêle-mêle, il cite son épouse Isabelle(responsable de l’accueil, des réservations pour les artistes, du travail administratif…),Damien (assistant passionné, formé au studio), Thomas (électronicien "géo-trouve-tout"),Mohamed (jardinier), Fatima (femme de ménage), Anne (cuisinière) et sa sœur Véro-nique, Thibault (un ami et associé, toujours prêt à rendre service), Pauline (la fille, décou-vreuse "officieuse" de jeunes talents), Maxime (le fils, complice, ingénieur du son) etson associé Victor qui ont créé Mix With The Master, ainsi que “plein d’autres per-sonnes qui sont là avec nous…”

Armand Panigel, le pionnier… et le projet Animateur de la cultissime émission “La tribune des critiques de disques”, sur FranceMusique de 1946 à 1984, Armand Panigel est également à l’origine de la revue Disques,exclusivement consacrée au classique. Passionné de grand écran, il sera également pro-ducteur, réalisateur et présentateur de “L’histoire du cinéma français par ceux qui l’ontfait” à l’ORTF. Plusieurs fois, il interpellera André Malraux, alors Ministre de la Cultu-re : "On a des bibliothèques pour les livres mais rien pour les disques. Il en faudraitpourtant dans les conservatoires."A la retraite, il missionnera son avocat (Me Bernard Jouanneau) pour lui trouver unlieu de villégiature, en province, afin de créer une fondation à son nom riche d’unegigantesque collection privée d’enregistrements, films, livres jusque-là entreposée àSaint-Cloud… Pour cet officier de l’Ordre des Arts et des Lettres, rien ne vaut la per-formance instantanée, jouée une seule fois. C’est l’âge d’or de l’interprétation : onenregistre et on grave le disque en même temps ! Armand Panigel décédera à 75 ans,en 1995, soit à peine dix ans après son installation à La Fabrique, favorisée par MichelPezet, alors président du Conseil régional."Nous allons créer une radio thématique, "Dans le Sillon Panigel", qui ne diffuseraque sa collection de 78 et 33 tours. Chaque morceau ne sera proposé qu'une seulefois ! Et on pourra les réécouter en podcast, sur internet", révèle Hervé Le Guil. "Il ya ici de quoi diffuser pendant plus de 50 ans en continu sans jamais reproduire le mêmedisque."

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