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Fastef / UCAD Liens 15 / Décembre 2012 Page 257 RELATIONS REFORMULANTES ET JEU DE POSITIONNEMENT DANS LE SYSTEME DIAPHORIQUE Par IRIE BI GOHY MATHIAS Département de Lettres Modernes Université de Bouaké république de Côte d’Ivoire INTRODUCTION Dans l’énoncé et dans son système, les contraintes grammaticales mobilisent le concept de «métalangage» qui incorpore celui de « domaine de référence.» Dans les faits, ce sont les unités métalinguistiques qui participent à la reformulation des idées exprimées (expressément ou peut-être accidentellement) en vue d’assurer la continuité thématique. A la faveur de cette reprise d’informations, les « désignateurs dépendants» fonctionnent en coréférence avec des vocables initiaux usuellement appelés « reformulés » ou « désignateurs autonomes.» Dans cette relation reformulante, se signale un jeu de positionnement: l’antéposition ou la postposition du désignateur autonome. Ce paradigme positionnalisant construit, respectivement, les images d’anaphore et de cataphore. C’est ce double positionnement que Michel MAILLARD 1 a regroupé sous le terme hyperonymique de «diaphore.» Comment la relation reformulante dans son jeu de positionnement des unités métalinguistiques participe-t-elle à la dynamique énonciative? Le support de cette réflexion sera composé de La Bible et le fusil de Maurice BANDAMAN 2 et Les Soleils des indépendances d’Ahmadou KOUROUMA 3 . Ils sont le lieu d’une véritable interférence codique entre le français et les langues locales ivoiriennes (Akan pour BANDAMAN et Malinké pour KOUROUMA). Par ailleurs, ils témoignent d’un double phorocité (endophorique : on parlera de co-texte ; et exophorique : on parlera de contexte). Cette réflexion empruntera le tracer suivant : Prolégomènes sur la notion de contexte (I), relation 1 MAILLARD (Michel), « Essais de typologie des substituts diaphoriques » in Langue française n°21, Paris, Larousse, pp. 55 - 71 2 BANDAMAN (M.), La Bible et le fusil, Abidjan, CEDA, 1996. 3 KOUROUMA (A.), Les Soleils des indépendances, Paris, Seuil, 1970

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    RELATIONS REFORMULANTES ET JEU DE POSITIONNEMENT DANS LE SYSTEME DIAPHORIQUE

    Par IRIE BI GOHY MATHIAS Dpartement de Lettres Modernes Universit de Bouak rpublique de Cte dIvoire

    INTRODUCTION

    Dans lnonc et dans son systme, les contraintes grammaticales mobilisent le concept de mtalangage qui incorpore celui de domaine de rfrence. Dans les faits, ce sont les units mtalinguistiques qui participent la reformulation des ides exprimes (expressment ou peut-tre accidentellement) en vue dassurer la continuit thmatique. A la faveur de cette reprise dinformations, les dsignateurs dpendants fonctionnent en corfrence avec des vocables initiaux usuellement appels reformuls ou dsignateurs autonomes. Dans cette relation reformulante, se signale un jeu de positionnement: lantposition ou la postposition du dsignateur autonome. Ce paradigme positionnalisant construit, respectivement, les images danaphore et de cataphore. Cest ce double positionnement que Michel MAILLARD1 a regroup sous le terme hyperonymique de diaphore. Comment la relation reformulante dans son jeu de positionnement des units mtalinguistiques participe-t-elle la dynamique nonciative? Le support de cette rflexion sera compos de La Bible et le fusil de Maurice BANDAMAN2 et Les Soleils des indpendances dAhmadou KOUROUMA3. Ils sont le lieu dune vritable interfrence codique entre le franais et les langues locales ivoiriennes (Akan pour BANDAMAN et Malink pour KOUROUMA). Par ailleurs, ils tmoignent dun double phorocit (endophorique : on parlera de co-texte ; et exophorique : on parlera de contexte). Cette rflexion empruntera le tracer suivant : Prolgomnes sur la notion de contexte (I), relation

    1 MAILLARD (Michel), Essais de typologie des substituts diaphoriques in Langue

    franaise n21, Paris, Larousse, pp. 55 - 71 2 BANDAMAN (M.), La Bible et le fusil, Abidjan, CEDA, 1996.

    3 KOUROUMA (A.), Les Soleils des indpendances, Paris, Seuil, 1970

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    reformulante cotextuelle ou endophorique (II) et relation reformulante contextuelle ou exophorique (III). I PROLEGOMENES SUR LA NOTION DE CONTEXTE La notion de contexte renvoie l'entourage linguistique d'un lment et dcrit les units phoniques, les mots ou squences de mots au sein de l'nonc o il apparat. Autrement dit, le contexte est la srie des units qui prcdent lnonc et qui le suivent. Cest aussi, au sein dun discours, le ou les noncs qui prcdent et qui suivent immdiatement lnonc considr comme principal. Se dgagent, alors, le contexte au sens restreint qui est le contexte immdiat et le contexte au sens large qui est celui de lenvironnement. Dans cette acception, le terme contexte est parfois remplac par celui de co-texte et dsigne le contexte verbal la diffrence, lment exophorique, du contexte situationnel , qui dsigne l'ensemble des circonstances dans lesquelles se produit un acte d'nonciation: situation culturelle et psychologique, expriences et connaissances du monde ; reprsentations mutuelles que chacun se fait de son ou de ses interlocuteurs, etc. De l, on en arrive parler de contexte social , d'utilisation de la langue pour renvoyer l'ensemble des conditions sociales quil convient de prendre en compte la manire de la socio-linguistique, pour expliquer les relations entre le comportement social et le compor-tement linguistique des sujets parlants. I-1 La notion de contexte dans les grammaires syntagmatiques La notion de contexte a, dabord, t apprhende dans un sens technique. Les thories linguistiques caractrisaient, ainsi, les proprits des grammaires formelles utilises pour dcrire la syntaxe des langues. En effet, les gnrativistes, ici, avec leur tte Noam CHOMSKY, inaugurent les grammaires dites syntagmatiques ou grammaires de constituants. Il sagit, pour eux, de dcrire la base

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    de la composante syntaxique1. Les rgles des grammaires syntagmatiques caractrisent certaines catgories dans les termes de leurs constituants. Exemple : Il y aurait du parti unique(1), du Sous-prfet (2), de la contre-rvolution(3) dans la sauce(4) ; et Diamourou(5) en oubliait (Les Soleils des indpendances, p. 131) Les groupes nominaux (que nous avons soulign ci-haut) sont tous constitus d'un dterminant (du (1) et (2)1, de la (3)2, la (4), (5)3) et d'un nom (parti unique (1), Sous-prfet (2), contre-rvolution (3), sauce (4), Diamourou (5)). Il faut dire que les rgles syntagmatiques sont des rgles de rcriture de la forme gnrale XAY X XZY, qui signifie que l'lment A se rcrit Z dans le contexte X - Y. L'on en distingue deux types :

    - Premire rgle : X et Y sont nuls. Si X et Y sont nuls, les rgles sont dites indpendantes du

    contexte ; ainsi la rgle P X GN + GV4, qui s'applique sans aucune limitation contextuelle. Cest lhypothse de grammaires indpendantes du contexte.

    Exemple : Le dlgu tranger ignorant des coutumes malink, se rptait, se redressait et rebondissait, inconciliant, toujours indomptable, comme le sexe dun ne enrag. Fama devait ctait les consignes et il ne voulait pas en entendre dautres sagenouiller aux pieds du prsident du comit (Les Soleils des indpendances, p.135) Segmentons cet extrait en propositions indpendantes :

    (1) Le dlgu tranger ignorant des coutumes malink, se rptait. (2) Le dlgu tranger ignorant des coutumes malink, se

    redressait. (3) Le dlgu tranger ignorant des coutumes malink,

    rebondissait.

    1 Ces grammaires sopposent aux Grammaires transformationnelles qui, elles,

    transforment les phrases de base en phrase drives. 1 Le dterminant du est la forme contracte de la prposition de et de larticle dfini le :

    on dit quil y a fusion entre larticle et la prposition. 2 De et la dans cette suite syntaxique, forment un groupe solidaire qui dtermine le

    substantif contre-rvolution : on dit quil y a cohabitation entre la prposition et larticle. 3 Dans le cas despce, le dterminant nest pas matrialis. Lexplication est toute simple :

    Diamourou est un nom propre de personne et en de telles circonstances le dterminant

    est effac. 4 Ici, Phrase se rcrit Groupe nominal + Groupe verbal

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    On voit bien que quel que soit l'environnement linguistique (il ny a qu sen rfrer la taille de la francophonie o Les Soleils des indpendances est lu) ces phrases sont toutes engendres partir de cette rgle.

    - Deuxime rgle: X et Y ne sont pas nuls. Si X et Y ne sont pas nuls, les rgles dont dites dpendantes du

    contexte ; ainsi la rgle V XVtr / - GN1, qui ne s'applique que dans le contexte d'un groupe nominal. Cest lhypothse des grammaire dpendante du contexte. Exemple : Un ancien de la caste forgeron serait descendu du pays avec une petite canne (1), il aurait tap le corps avec la canne (2), lombre aurait rintgr les restes (3), le dfunt se serait lev (4). On aurait remis la canne au dfunt (5) qui aurait embot le pas lancien (6) (Les Soleils des indpendances, p. 10) D'aprs cette deuxime rgle, Un ancien de la caste forgeron serait descendu du pays avec une petite canne (1) , Un ancien de la caste forgeron aurait tap le corps avec la canne (2) / Lombre aurait rintgr les restes (3) / Le dfunt se serait lev (4) / on aurait remis la canne au dfunt (5) , Le dfunt aurait embot le pas lancien (6) sont des phrases possibles au contraire, des phrases du type un ancien de la caste forgeron serait descendu1 , il aurait tap ou lombre aurait rintgr, le dfunt serait lev , on aurait remis , le dfunt aurait embot. I-2 La notion de contexte en logique linguistique et en smantique et pragmatique linguistiques I-21- La notion de contexte en logique linguistique. La logique linguistique a t initie, la fin du XIXme sicle par le logicien allemand Gottlob FREGE2. Ce dernier a montr

    1 Verbe se rcrit verbe transitif s'il est suivi d'un groupe nominal

    1 Cet emploi absolu du verbe descendre nest possible que si le rfrent diaphorique est

    connu. Il va sans dire que son emploi ne peut se faire indpendamment du contexte de

    son nonciation ; procder autrement serait une anormalit grammaticale. 2 Professeur de mathmatiques l'Universit d'Ina, Gottlob Frege est le fondateur de la

    logique moderne ou logique mathmatique, selon l'appellation due Giuseppe Peano et

    universellement admise. Longtemps mconnus, ses travaux furent rvls au public

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    linadquation de lidentit dans certains types de contextes, remettant du coup, en cause la dfinition de lidentit telle qunonce par les logiciens et qui dit que lorsque deux objets sont identiques, tout ce qui est vrai de l'un l'est galement de l'autre. Exemple : Balozo laissa Ahika sur le seuil de la maison et entra dans sa chambre. Le jeune garon passa quelques moments mditer ces penses, attendit que son tuteur ressortit de sa chambre. (La Bible et le fusil, p. 79)

    Dans cette squence, Bolozo et tuteur [de Ahika] dsignent la mme personne. Par consquent, il devrait tre possible de substituer lune de ces units lexicales lautre sans modifier la valeur identificatoire de la personne dsigne. Cest ainsi de Ahika et de le jeune garon. Ainsi, les propositions Bolozo est le tuteur dAhika et Ahika est un jeune garon sont vraies. En effet, pour chacune de ces propositions, les rfrents bolozo et Ahika ne sont pas

    savant par Bertrand Russell, qui consacra l'examen de quelques ides propres Frege

    l'appendice B des Principles of Mathematics (1903). L'uvre ne peut tre classe sous

    aucune des rubriques usuelles, car le gnie de Frege fut de poursuivre selon une analyse

    entirement neuve une seule question, le fondement de l'arithmtique, en toutes ses

    ramifications. Trois domaines, cependant, se partagent son hritage : la mathmatique,

    il donna la premire dfinition satisfaisante du nombre cardinal, celle de la suite ordinale,

    analogue la chane de Dedekind et, paralllement aux travaux de Cantor, une thorie

    non formelle des ensembles que Zermelo a authentifie ; en logique, il cra le calcul

    axiomatique des propositions, la thorie de la quantification et les rudiments de la syntaxe

    logique ; enfin, composant la proposition partir d'un concept (ou fonction) satur par un

    argument, il mit fin l'aristotlisme logique, qui analyse tout nonc en une combinaison

    de termes, et l'ontologie associe une telle analyse. En particulier, il donna les critres

    qui distinguent le concept de l'objet, vidant de son contenu la querelle sur la ralit des

    universaux. Ce regard neuf sur les langues bien faites ainsi que la distinction entre le sens

    et la dnotation d'une expression sont, conjointement d'autres influences, l'origine de

    la philosophie analytique anglo-saxonne et de la philosophie franaise du concept. (Sur

    FREGE lire: DUMMET (M.), Frege : Philosophy of Mathematics, Cambridge (Mass.), Harvard

    Univ. Press, 1991 ; Les Origines de la philosophie analytique, trad. de l'all., Paris, Gallimard,

    1991 / HILL (C.O.), Word and Object in Husserl, Frege and Russel, Athens, Ohio Univ. Press,

    1991 / LARGEAULT (J.), Logique et philosophie chez Frege, Paris, Minuit, 1970 / DE

    ROUILHAN (P.), Frege, les paradoxes de la reprsentation, Paris, Minuit, 1988 / THIEL (C.),

    Sinn und Bedeutung in der Logik Gottlob Freges, Meisenheim am Glan, 1965.

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    diffrents de leur sens respectifs tuteur dAhika et le jeune garon . Ici, le sens nest pas soumis un jeu vertigineux o il apparatrait par marcotte, mais est dune apprhension directe grce lemploi du verbe tre . Ce verbe qui introduit une description, rend compte, en ce contexte, de lessence ou de ltat des tres dsigns. Dans ce type dgalit, FREGE relve que la non-modification de la valeur de vrit de la proposition rsultante nest pas toujours vidente. Pour lui, Napolon tant la fois le vainqueur dAusterlitz et le vaincu de Waterloo lune de ces deux descriptions dfinies peut tre substitue lautre. Cependant, si la proposition Pierre sait que Napolon est le vainqueur dAusterlitz est vraie, il peut se trouver que la proposition Pierre sait que Napolon est le vaincu de Waterloo soit fausse. Tout dpend, en la situation, des connaissances historiques de Pierre. Il y a donc l un paradoxe. FREGE propose pour le rsoudre, de distinguer le rfrent d'une expression (l'entit qu'elle dsigne) et son sens. Dans lexemple de rfrence: Napolon , le vainqueur d'Austerlitz et le vaincu de Waterloo ont le mme rfrent mais des sens diffrents. Or c'est prcisment le sens qui est en jeu dans certains types de contextes, dits contextes opaques , tels les verbes d'attitude propositionnelle comme savoir, dire, penser, etc. La substitution de deux termes rfrent identique, mais de sens diffrent, peut alors donc conduire modifier la valeur de vrit de la proposition comme le vulgarisent nombre dtudes logico-smantiques1. I-2 2 La notion de contexte en smantique et pragmatique linguistiques En smantique et en pragmatique linguistiques1, la notion de contexte joue un rle central. Sa prise en compte permet

    1 DE ROUILHAN (P.), Frege, les paradoxes de la reprsentation, Paris, Minuit, 1988, p.136

    1 Le courant pragmatique s'inscrit, au dpart, dans une mouvance anglo-saxonne, dont les

    pionniers furent, du ct de la smiotique, Charles Sanders Peirce (1839-1914) et Charles

    William Morris, et, du ct de la logique, Rudolph Carnap (1891-1970) ; mais c'est surtout

    en s'inspirant de la philosophie analytique , plus particulirement sur la lance de la

    philosophie du langage ordinaire de l'cole d'Oxford, que s'est dveloppe la

    pragmatique linguistique, dont les reprsentants les plus connus sont John Austin (1911-

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    notamment de prdire le sens d'un terme polysmique, ou de diffrencier les sens, proches mais non totalement identiques, de termes quasi synonymes. Ainsi, on parlera d'une mort hroque , de la mort du loup , de la mort du petit commerce , mais d'un certificat de dcs ou d'un magasin ferm pour cause de dcs ; de tels contextes permettent de voir que mort dsigne la cessation de la vie (d'un humain ou d'un animal) et les circonstances de cette fin, ou par extension la fin d'une activit, alors que dcs renvoie au seul terme de la vie humaine, considr sous l'angle officiel et institutionnel. Nombreux sont les travaux de smantique et de pragmatique linguistique consacrs au rle du contexte dans la construction du sens en discours : dans cette perspective, le sens est apprhend comme le rsultat de l'interaction dynamique de l'ensemble des units linguistiques co-prsentes dans les noncs. II RELATION REFORMULANTE COTEXTUELLE OU ENDOPHORIQUE La diaphore est, par de nombreux grammairiens dont MAILLARD, reconnue comme une entit autonome dmontrant, dans un corpus, loccurrence de lopposition anaphore / cataphore. Selon Le Littr, la diaphore est une figure de rhtorique o lon rpte un mot dj employ en lui donnant une nouvelle nuance de signification.2 On voit bien l lexistence de deux entits, au

    1960) et John Searle (n en 1932), ainsi qu'Oswald Ducrot en France. En observant le

    langage en acte, ces auteurs cherchent retrouver les traces linguistiques de certains

    mcanismes gnraux dont ils construisent la thorie. D'o la thorie des actes de

    langage : profrer une nonciation, c'est accomplir un certain type d'acte illocutoire

    (ordre, promesse...) et perlocutoire (convaincre, intimider...) ; d'o aussi la thorie de la

    prsupposition et de l'implicitation du sens. Les travaux pragmatiques ont t trs

    largement orients, rcemment, vers l'tude des interactions communicatives, c'est--dire

    des principes qui rgissent les changes entre interlocuteurs, par exemple dans les

    dialogues ou les conversations, ce qui a conduit intgrer des considrations d'ordre

    ethnosociologique et psychologique. 2 LITTRE (E.), Dictionnaire de la langue franaise, Paris, Encyclopedia Britannica France,

    2004, p.1711. Ce mot dsigne aussi en zoologie un genre de lpidoptres nocturnes, un

    genre de diptres. Lanalogie est frappante : ces insectes sont caractriss par deux

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    moins, organises pour reprsenter un mme lment: lment de rfrence (anaphore) ou lment dinfrence (cataphore). En effet, si dans le premier rapport de reformulation (anaphore) la relation entre le reprsent-antcdent et le reprsentant-postcdent va de soi, cest--dire le premier lment est rapport au second dans une squence progressive qui part du connu linconnu (do la rfrence) ; dans le second rapport de reformulation (cataphore), la relation entre les lments de cette systmique analogique procde par induction dans la mesure o la dcouverte du reprsentant est la consquence de quelques oprations, de quelques faits en mode squence rgressive o on part de linconnu au connu (do linfrence). Cest au regard de cette double phorocit que Michel MAILLARD parle substituts diaphorique dans le cadre des relations qui stablissent entre un lment antcdent et un lment ultrieur dans la chane crite. 1 Autrement dit, cest le fait de substituer un groupe de segments ou un segment variable dautres segments plus courts et en nombre limit afin de reprendre linformation donne. 2 Cette substitution, comme lintgre le terme de diaphore, inaugure un double positionnement significatif. Le schma ci-dessous en propose une reprsentation. Segment A Segment B ANAPHORE

    Rfr Rfrant

    (represent-antcdent) (Reprsentant-postcdent)

    ailes, derrire lesquelles est un appendice appel cuilleron, et par une bouche organise

    pour la succion seulement, tels sont les mouches, les taons, les cousins. 1 MAILLARD (M.), Essai de typologie des substituts diaphoriques in Langue franaise

    n21, pp.56 57, p.56 2 DUBOIS (J.), Grammaire structurale du franais : nom et pronom, Paris, Larousse, 1973,

    p.91

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    CATAPHORE

    I - 1 - Relation reformulante cotextuelle par antpositionnement ou positionnement avant La reformulation cotextuelle par antposition des constituants de lnonc opre par une substitution, un remplacement rebours, cest--dire par anticipation dune unit linguistique micro ou macro-segmentale par une autre de nature diffrente. Elle inaugure dans la logique de lnonc une dynamique rgressive, cest--dire quon part de linconnu au connu. On procde alors par anticipation pronominale ou par anticipation synonymique conceptuelle ou rsomptive. I 1 1 Anticipation pronominale Cest une construction dsormais classique de la cataphore. Elle consiste annoncer en position avance (parfois initiale) un constituant linguistique qui sera dvelopp plus tard dans lnonc. Le substituant prend alors la forme dun pronom qui intgre intimement les marques de genres et de nombres ainsi que de personne du substitu. Exemples : 1 Il na droit aucune prire, ce chef rebelle qui a t tu par le patriarche. (La Bible et le fusil, p.135) 2 Comment la traduire, cette douleur qui me pourfend ? Ha ! Ha ! Comment la dcrire, cette nuit de mort collective, holocauste ! (La Bible et le fusil, p.169) 3 Lui, Fama, dlirait, rvassait, mourait (Les Soleils des indpendances, p.131) Dans le deuxime exemple, le reprsentant pronominal la fonctionne comme complment dobjet direct. Sa forme rduite dite conjointe ( llment quil reprsente cette douleur qui me pourfend , cette nuit de mort collective, holocauste , en son genre, en son nombre, en sa personne) facilite (ou peut-tre

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    motive) sa position avant le verbe et avant le reprsent quil annonce en terme dnigme. On dira alors que lanticipation pronominale a une fonction ou une valeur nigmatique : le pronom donne des indices (genre, nombre, personne) dun mystre que lon dcouvre plus tard et qui se ralise pleinement dans le reprsent-postcdent. Cette explication peut-tre aussi rserve pour le premier et pour le troisime exemple. Dans cet exemple, le pronom est sujet de verbe. Ainsi, la position de il et de lui montre clairement que ces pronoms, dans leur apparition respective, sinscrivent dans le schma dune cataphore : ils anticipent et annoncent le nom, qui lui est juxtapos (exemple 3) et auquel il est corfr. Cette pratique jouit dune syntaxe particulire dans lui, Fama : la linarit est rompue, disloque. A ce niveau, peut slever le dbat sur lexistence dune distorsion notamment quand la suite de verbes impersonnels ou unipersonnels apparait un lment linguistique dit sujet rel relguant ainsi le pronom en position frontale au rang de sujet apparent. Exemple : Il y aurait du parti unique, du Sous-prfet, de la contre-rvolution dans la sauce ; et Diamourou en oubliait. (Les Soleils des indpendances, p.131) Dans cet nonc, on remarque la prsence de la formule phrastique si chre aux conteurs, il y a (aurait). Cest un tour lexicalis, dsormais complexe unitaire. Cet lment appelle un complment ncessaire au lieu de rappeler un lment antrieur. Et cest en ce sens quil est cataphorique1. O conviendra alors que ce complexe phrastique a une valeur mmorielle. En gnral, les verbes impersonnels ne peuvent tre soumis cette analyse que lorsquon leur applique une dsabsolutisation. En effet, par une hypostase recatgorisante, les verbes impersonnels, naturellement employ absolument, cest--dire 1 RIEGEL (M.), PELLAT (J.-C.), RIOUL (R.), Grammaire mthodique du franais, Paris,

    QUADRIDGE / PUF, 2009, p.287

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    sans dpendance, sont dsormais dans un emploi relatif, non-absolu, laction du verbe tant reporte sur une dpendance en position 3. En cette hypothse, on peut avancer, non sans prudence, que la dpendance (sujet rel ; complment) est en mme temps son leader (sujet apparent ; sujet). I 1 2 - Anticipation synonymique conceptuelle ou rsomptive ou associative Moins courant dans la langue franaise, ce procd de reformulation cataphorique ne procde pas par rduction dun lment linguistique, mais par remplacement par un terme synonyme qui le rsume ou le conceptualise. Dans la pratique, llment danticipation qui conceptualise ou rsume ce qui suit, lui associe une dfinition ou des priphrases synonymiques ou des lments qui le composent. Exemple : Tout cela dans un vacarme arracher les oreilles : klaxons, ptarades des moteurs, battements pneus, cris et appels des passants et des conducteurs. (Les Soleils des indpendances, p.11) Ce type de reformulation a une gomtrie synecdochique. Elle repose sur une relation de tout une partie. Ici, au mot vacarme annonc en premire position est associe une dclinaison paradigmatique du mot bruit en ses diffrentes formes : klaxons , ptarades , battements , cris , appels. I - 2 - Relations reformulantes cotextuelles par postpositionnement ou positionnement aprs. Les reformulations cotextuelles par postposition des constituants de lnonc oprent par une substitution, un remplacement progression, cest--dire par postposition dune unit linguistique micro ou macro-segmentale par une autre de nature diffrente. Elle inaugure dans la logique de lnonc une dynamique progressive, cest--dire quon part du connu linconnu. Ce type de relation reformulante opre par la reprise assure par des lments linguistiques grammaticaux. Dans la macrostucturation

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    du rcit la relation reformulante est nonciatique ou narratologique. I 2 1 La reprise par le jeu sur les units grammaticales Cet aspect de la reformulation sadossera ce qui est dsormais traditionnel, savoir la reformulation nominale, la reformulation pronominale. 1 2 1 1 La reformulation nominale La reformulation nominale, dans cette rflexion, sintressera aux formes nouvelles que prend llment reprsent dans la ralit de leur postpositionnement. En la matire, on sarrtera la reformulation nominale par rduction ou par adjonction Dans la reformulation nominale par rduction, par adjonction ou par caractrisation, on procde soit par retranchement dun lment du groupe nominal, soit par adjonction dun caractrisant ou dun modificateur. Exemples : 1 Mamie Awlabo stait leve. A travers la fentre, le hululement dun hibou un vrai celui l. Awlabo avait paru dans la cour et, devant elle, des brindilles craquaient. (La Bible et le fusil, p.7) La reformulation Awlabo nintgre pas le terme mamie de la premire formulation Mamie Awlabo qui elle est postpose. 2 Fama Doumbouya ! vrai Doumbouya, pre Doumbouya, mre Doumbouya, dernier et lgitime descendant des princes Doumbouya du Horodougou, totem panthre, tait un vautour . Un prince Doumbouya. (Les Soleils des indpendances, p.11) Au dpart de cette description, le nom Fama Doumbouya . Plus tard, dans lnonc le patronyme Doumbouya est retenu pour tre soumis au jeu des modifications, modus operandi des griots, des griots Malink. On constate que la modification est

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    dabord laffaire dun adjectif qualificatif, lment variant de la langue franaise, pour se cristalliser voire se formaliser dans une pratique atypique de la caractrisation du nom par le nom. En fait, dordinaire le modificateur ou le caractrisant nom apparait dans une structure complment de nom ou de dtermination ( princes du Horodougou). La nouveaut, ici, - en tout cas dans la ralit de la langue franaise normative les caractrisants nom sont immdiatement lis au nom caractris et le prcde en termes dindicateurs dsignationnels valeur gnalogique. Ainsi, toutes les reformulations de Fama Doumbouya se situent aprs lui, et apportent chacune son apparition, une information nouvelle sur le dsign initial. I 2 1 2 - Reformulation pronominale Comme ci haut, cette reformulation se construit selon le schma classique de lanaphore : Reprsent reprsentant. Exemple : Salimata avait t heureuse des mois et des mois ; elle avait exult ; elle avait t enceinte, avait eu un ventre et tout ce qui apparat chez la femme qui attend. Elle stait prsent la maternit ; elle avait t examine et reconnue enceinte. (Les Soleils des indpendances, p.59) Dans cet exemple, la reprise anaphorique est assure par le pronom personnel elle. Ce pronom reformulant fait son apparition aprs llment de rfrence Salimata. Lantcdent Salimata est gauche dans la structuration du texte tandis que le reprsentant anaphorique est situ droite dans la suite de lnonc. Peut-tre ces ordonnancements participent-ils de la structuration du texte et permettent de le dterminer ? I 2 2 - Relation reformulante nonciatique ou narratologique La prsente approche inaugurera une grammaire du rcit ou de la narration, ou plus prcisment, une syntaxe du rcit ou de la narration. Elle se fixera pour objectif de dcrire la combinatoire du rcit ou de la narration mais surtout selon lordonnancement des lments combins. Elle inscrira lnonc dans une sorte de

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    dynamique diachronique pour valuer les vnements qui prcdent les autres et tablir ainsi une linarit systmique. I 2 2 1 : La norme : le respect de la linarit de la succession des vnements relats La linarit narratologique postule lexistence dune sorte de degr zro qui serait un tat de parfaite concidence temporelle entre rcit et histoire1. Ce postulat indique que les vnements narrs le sont tels quils se sont drouls et succds dans le rel ou dans limaginaire logique de lauteur de la narration. Les auteurs sy essaient dans leur restitution des vnements vcus ou imagins ou dont lexprience gnrale fournit la logique. Ils sastreignent alors, raliser une relation de reformulation avec le trait caractristique [+ conforme] : le rel crit est alors le rel vcu. Exemple : Il passait des nuits blanches, se levait chaque matin puis. (La Bible et le fusil, p.104) Dans cet nonc narratif, le premier vnement, logiquement et chronologiquement, prcde le second: la linarit est respecte. Ici, se profile une anaphore dans lvnement du second segment, qui reprend idellement et intgrativement lvnement du premier segment : se lever suppose avoir t couch et intgre cette ide dans son procs smantique. On note galement que cet nonc prsente le procs comme se produisant rgulirement. On parlera, ici, dune anaphore procs itratif. Exemple : Oui, Monsieur le prsident, les pluies ont t gnreuses et abondantes (E1), les rcoltes ont t bonnes (E2), notre balance commerciale est largement excdentaire (E3). (La Bible et le fusil, p.85)

    Les propositions qui composent cette phrase-nonc, inscrivent les vnements dans une succession logique progressive : 1er stade : (E1)

    1 GENETTE (Grard), Figures III, Paris, Seuil, 1972, p.79

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    2me stade : (E2) 3me stade : (E3) (E3), dans sa formulation, suppose la reformulation de (E2) et lintgre ; (E2) suppose la reformulation de (E1) et lintgre. Ces trois lments forment alors une sorte danaphore file qui rend compte de ce qui arrive logiquement quand tous les sont runis.

    Exemple : Puis, il dtourna son regard de la jeune femme pour ne revoir dans son esprit que le souvenir de cette nuit o Monika stait glisse dans son lit. (La Bible et le fusil, p. 141) Le verbe revoir , ici, introduit une ide de reprise, de reformulation dune chose dj faite. En effet, lanalyse synchronique du verbe revoir rvle quil est constitu par prfixation. Au verbe voir qui en constitue la base lexicale, il a t adjoint le prfixe significatif re- . Ce prfixe signifie de nouveau. En ce sens, revoir , cest voir de nouveau. De la sorte, lemploi de ce verbe inscrit la suite dpendante (ici, le souvenir de cette nuit o Monika stait glisse dans son lit. ) dans une logique de reprise, de reformulation fidle ou infidle. Il y a une anaphore et llment de reformulation est situ aprs llment reformul. Dans la ralit de cette relation reformulante, le positionnement des reformulants et des reformuls rpond une linarit qui est la rplique de la succession relle ou logique des vnements relats. Dans une autre ralit, la linarit est prouve. I 2 2 2 : La distorsion : le non-respect de lordre initial des vnements Dans les distorsions narratologiques, toute chronologie normale, linaire fait place une chronologie non-linaire, brise. Cette procdure grammaticale sert fixer un vnement qui a lieu dans le pass mais que lon entend faire revivre en le montrant comme sil se passait au moment mme o on le prsente. Grard GENETTE parle ce propos d anachronie narrative 1 quil dfinit comme discordance entre lordre de lhistoire et celui du rcit . 1 GENETTE (Grard), op.cit., p.79

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    Si lon considre, alors, le rcit comme la reformulation (fidle ou infidle), la relation entre le rel vcu et le rel crit devrait normalement tre conforme et oprer le mme ordre. Cela peut se concevoir par exception pour trois raisons qui sont loin dtre contradictoires : - 1re raison : au moment o les vnements sont crits, il sont dj passs. Autrement dit, on ne peut saisir les vnements in vivo , cest--dire dans leur actualit dans le rcit mais plutt in retro . Les units linguistiques qui les reprennent et les (re-) formulent ne rendent pas vritablement compte de la ralit dcrite. - 2me raison : les descriptions subissent linfluence du narrateur qui impactent son rcit de ses subjectivits - 3me raison : lexistence dans les rcits dlments de rappel ou danticipation.

    Exemple : ce camp ne saura jamais tre dit. Dabord, on y perdait la notion de dure. Un matin, on comptait quon y avait vcu depuis des annes ; le soir trouvait quon y tait arriv depuis des semaines seulement. Et cela parce quon dbarquait, toujours presque mourant, lesprit rempli de cauchemars, les yeux clos, les oreilles sourdes. Puis on y passait des jours (Les Soleils des indpendances, p.159) Il y a l une cataphore des vnements, cest--dire que la succession des vnements nest pas progressive mais rgressive : les units linguistiques reformulantes se trouvent en position danticipation par rapport aux lments reformuls. En somme, dans la ralit de lnonc pris en lui-mme comme objet de lanalyse se profile des reformulations dont lapprhension des implications et notamment des implications de positionnements sont la seule structure du texte. Dautres ont leurs justifications hors du texte. III RELATION REFORMULANTE CONTEXTUELLE OU EXOPHORIQUE La relation qui se construit dans les reformulations contextuelles ou exophoriques implique soit une rfrenciation dictique contextuelle ou une reformulation idelle.

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    III 1 - La rfrenciation dictique contextuelle La refrenciation dictique contextuelle prend forme dans lanaphore fidle lorsque dans la composition du substantif reprsent, on remplace le dterminant article par un dterminant adjectif dmonstratif. Ce denier fonctionne encore en ce contexte comme dictique, cest--dire comme unit linguistique dont le sens implique obligatoirement un renvoi la situation dnonciation pour trouver le rfrent vis 1 En effet, on admet que lemploi des dictiques contextuels se trouve fond lorsque le nom rpt se trouve dans lentourage immdiat. Exemple : Jtais l, moi, prsident et doyen du jury, et je vis dans lauditoire un homme secouer sa tte, faire une moue de guenon. Le prsident pronona le mot dmocratique. Cet homme, je me rappelle lavoir vu hier. (La Bible et le fusil, p.6) Dans cet extrait, la premire apparition du personnage travers lexpression un homme rpond au souci de le prsenter au lecteur. Ce nest pas un tre commun (cf. caractrisation). Mais, ds que ce pralable est tabli, on passe lemploi des dictiques contextuels. Le nom rpt se trouvant dans lentourage immdiat, il est logique quon retrouve la formule cet homme. Le dmonstratif est, ici, dans un emploi dictique, car il dsigne un rfrent prsent dans la situation de discours ou accessible partir delle. Il peut alors effectivement tre accompagn dun geste, dune mimique ou dun mouvement qui facilitent lidentification. 1 III 2 La reformulation idelle La comprhension de la reformulation, ici, doit rfrer une ide dduite empiriquement ou par rapprochement idel de

    1 KLEIBER (G.), Problmes de rfrences. Descriptions dfinies et noms propres, Paris,

    klincksieck, 1981, p.12 1 RIEGEL (M.) et alii, p.286

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    linterprtation des informations rapportes par les phrases constituant lnonc.

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    III 2 1 - Lemploi dun synonyme contextuel Ici, le reprsent et le reprsentant ne peuvent tre demble rapproche : leur intimit ntant pas, a priori, fond. Ils dnotent, en fait, tous les deux, de ralits bien diffrentes. Cependant, les circonstances de leur emploi contribuent les renvoyer une mme ralit. Ils deviennent synonymes seulement par leur contexte et par rapprochement dductif. Soit cet extrait : Lui, Fama, n dans lor, le manger, lhonneur et les femmes ! Eduqu pour prfrer lor lor, pour choisir le manger parmi dautres, et coucher sa favorite parmi cent pouses ! Qutait-il devenu ? Un charognard. Ctait une hyne qui se pressait. (Les Soleils des indpendances, p.12) Fama , charognard , hyne ne sont pas synonymes. Mais dans le contexte de leur emploi, ces mots dcrivent une srie de synonymes. On parlera, ici, dune synonymie contextuelle. En fait, dans leur contexte demploi, on dcouvre, pour chacun de ces mots, une nouvelle caractrisation du nom reprsent ou ltablissement de son identit. Ils ont tous pour rfrent le nom Fama qui est dans cet nonc en position avance ou frontale, cest--dire situ avant tous les lments qui le reformule. III 2 - La circonscription idelle ou le rappro-chement empirique Ce type de reformulation met contribution le lecteur, lallocutaire ou lnonciataire. Il fera leffort de rapprocher les reformulations de ce quil connait ou de ce quil a vcu. Exemple : Ils simprovisrent soldats, sortirent qui un fusil, qui un pistolet, qui une hanche pour combattre les envahisseurs. Quoique fragile, cette rsistance dcupla la ferveur des maquisards qui envahirent les marchs (La Bible et le fusil, p.51) Dans cet exemple, les lments numrs en dbut dnonc ( Ils simprovisrent soldats les envahisseurs. ), ne renvoient pas expressment rsistance. On pourrait, ici, cristalliser

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    ces diffrents actes prpositionns dans lnonc dans la guerre ou le conflit . On voit bien l que llment de reformulation idelle rsistance rend compte non dune reformulation cotextuelle mais bien dune reformulation contextuelle, en ce que seule lide ou lexprience de telles vnements peut amener le narrateur associer un mot un ensemble dexpriences. Avant dire, lorsque tous ces lments sont numrs, selon le contexte connu de lauteur ou du rcepteur, remonte en image reprsentation lide, ici, lide de rsistance qui apparait droite : on part du connu linconnu confirmant ainsi la systmique exophorique en ce rcit convoque. Exemple : Ctait un frle adolescent, lanc, noir comme un sourd-muet, mais impoli comme le fondement dune chienne pleine. Il papillonnait nuit et jour au portail, faisait ronfler le moteur et klaxonnait. Mariam sortait. Avec papillon allait se promener et ne se rassasiait jamais de partir en voiture. Ctait une honte ! Une honte aussi paisse que celle qui a conduit le varan de rivire se cacher dans leau. Tout le quartier en parlait. (Les soleils des indpendances, p.177) Cet nonc, eu gard au contexte notamment aux insinuations, que savent rapporter les pratiques orales africaines (proverbes, aphorismes.), rapporte de linfidlit de Mariam, la seconde pouse de Fama. Par ailleurs, toute cette squence ctait un frle leau. est reprise dans la phrase tout le quartier en parlait , par le moyen du pronom en . On dit que en ralise, ici, une anaphore nonciatique et est spatialement situ aprs lnonc quil reprend.

    CONCLUSION La structuration cohrente du texte repose dans une large mesure sur le phnomne linguistique de reformulation-reprise. Ce phnomne convoque sa ralisation divers lments linguistiques : le nom, le pronom, le verne, ladjectif. En fait, ce sont ces lments linguistiques par leur articulation et leur relation qui assument la reprise de linformation vhicule. Cette reprise comme laisse logiquement prsager le signifi de ce terme situe llment de reprise, cest--dire le reformulant

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    aprs llment repris, cest--dire le reformul qui lui est normalement antrieur. Mais il arrive que le reprenant, reformulant ou lment de reprise ait un caractre mmoriel.1 , cest--dire appelle [un] complment ncessaire au lieu de rappeler un lment antrieur et cest en ce sens quil est cataphorique. 2 On en dduit deux positionnements dans le contexte des relations reformulantes dans le texte: si cette relation est anaphorique, llment reformulant est situ aprs llment de rfrence ; si cette relation est cataphorique, llment reformulant est situ avant , gauche de llment de rfrence. On voit bien l que le reformulant jouit dune double phorocit qui est fondamentalement signifiante et impacte la signifiance de lnonc.

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    1 RIEGEL (M.) et alii, op.cit, p.287

    2 Idem. Cest nous qui soulignons dans cette citation.

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