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BULLETIN OFFICIEL CONCURRENCE, CONSOMMATION, REPRESSION DES FRAUDES N° 1 du 5 février 2009 SOMMAIRE ———— DÉCISION n° 08-MC-01 du conseil de la concurrence en date du 17 décembre 2008 relative à des pratiques mises en œuvre dans la distribution des iPhones DÉCISION n° 08-D-28 du conseil de la concurrence en date du 3 décembre 2008 relative à des pratiques mises en œuvre par des entreprises exploitant des granulats dans le département d’Ille-et-Vilaine DÉCISION n° 08-D-29 du conseil de la concurrence en date du 3 décembre 2008 relative à des pratiques relevées dans le secteur des marchés publics d’entretien de menuiserie métallerie serrurerie DÉCISION n° 08-D-30 du conseil de la concurrence en date du 4 décembre 2008 relative à des pratiques mises en œuvre par les sociétés des Pétroles Shell, Esso SAF, Chevron Global Aviation, Total Outre Mer et Total Réunion DÉCISION n° 08-D-31 du conseil de la concurrence en date du 10 décembre 2008 relative à une saisine de la société Concurrence DÉCISION n° 08-D-32 du conseil de la concurrence en date du 16 décembre 2008 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur du négoce des produits sidérurgiques

BOCCRF n° 1 du 5 février

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  • BULLETIN OFFICIEL CONCURRENCE, CONSOMMATION,

    REPRESSION DES FRAUDES

    N 1 du 5 fvrier 2009

    SOMMAIRE

    DCISION n 08-MC-01 du conseil de la concurrence en date du 17 dcembre 2008 relative des pratiques mises en uvre dans la distribution des iPhones

    DCISION n 08-D-28 du conseil de la concurrence en date du 3 dcembre 2008 relative des pratiques mises en uvre par des entreprises exploitant des granulats dans le dpartement dIlle-et-Vilaine DCISION n 08-D-29 du conseil de la concurrence en date du 3 dcembre 2008 relative des pratiques releves dans le secteur des marchs publics dentretien de menuiserie mtallerie serrurerie DCISION n 08-D-30 du conseil de la concurrence en date du 4 dcembre 2008 relative des pratiques mises en uvre par les socits des Ptroles Shell, Esso SAF, Chevron Global Aviation, Total Outre Mer et Total Runion DCISION n 08-D-31 du conseil de la concurrence en date du 10 dcembre 2008 relative une saisine de la socit Concurrence DCISION n 08-D-32 du conseil de la concurrence en date du 16 dcembre 2008 relative des pratiques mises en uvre dans le secteur du ngoce des produits sidrurgiques

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    DCISION n 08-D-33 du conseil de la concurrence en date du 16 dcembre 2008 relative des pratiques mises en uvre loccasion dappels doffres de la ville dAnnecy et du conseil gnral de Haute-Savoie pour le transport par autocar DCISION n 08-D-34 du conseil de la concurrence en date du 22 dcembre 2008 relative des pratiques mises en uvre par la rgie municipale des pompes funbres de la ville de Marseille DCISION n 09-D-01 du conseil de la concurrence en date du 12 janvier 2009 relative des pratiques mises en uvre par le CESAM dans le secteur de lexpertise des bateaux de plaisance AVIS du 6 novembre 2008 de la Commission de la scurit des consommateurs relatif la scurit des pratiquants de ski sur les pistes enrichies de neige de culture

    AVIS du 13 novembre 2008 de la Commission de la scurit des consommateurs relatif la scurit des piscines en kit hors sol AVIS du 11 dcembre 2008 de la Commission de la scurit des consommateurs relatif la scurit des foyers thanol INDICES des salaires rgionaux de la Fdration franaise du btiment du mois de septembre 2008

    Direction et rdaction, Direction Gnrale de la Concurrence, de la Consommation et de la Rpression des Fraudes

    Tldoc 042 59 bd Vincent Auriol 75703 PARIS CEDEX 13

    Tl. 01 44 87 17 17

    ISSN 0298-511X

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    Dcision n 08-MC-01 du 17 dcembre 2008 relative des pratiques mises en uvre dans la distribution des

    iPhones

    NOR ECEC0901102 S

    Le Conseil de la concurrence (section II),

    Vu la lettre enregistre le 18 septembre 2008, sous les numros 08/0097 F et 08/0098 M, par laquelle la socit Bouygues Telecom a saisi le Conseil de la concurrence de pratiques mises en uvre dans le cadre de la distribution de l'iPhone sur le march franais et a sollicit le prononc de mesures conservatoires sur le fondement de l'article L. 464-1 du code de commerce ;

    Vu les articles 81 et 82 du trait instituant la Communaut europenne ;

    Vu le livre IV du code de commerce relatif la libert des prix et de la concurrence ;

    Vu les observations prsentes par les socits France Telecom, Orange France et Apple Europe Ltd ;

    Vu lavis n 2008-1175 de lAutorit de rgulation des communications lectroniques et des postes (Arcep) en date du 4 novembre 2008 ;

    Vu les dcisions de secret des affaires n 08-DSADEC-70 du 23 octobre 2008 ; n 08-DSADEC-71 du 23 octobre 2008 ; n 08-DSADEC-73 du 24 octobre 2008 ; n 08-DSA-177 du 28 octobre 2008 ; n 08-DSADEC-79 du 28 octobre 2008 ; n 08-DSADEC-84 du 30 octobre 2008 ; n 08-DSADEC-83 du 30 octobre 2008 ; n 08-DSADEC-85 du 30 octobre 2008 ; n 08-DSADEC-87 du 14 novembre 2008 ; n 08-DSADEC-88 du 14 novembre 2008 ; n 08-DEC-14 du 21 novembre 2008 ;

    Vu les autres pices du dossier ;

    La rapporteure, la rapporteure gnrale adjointe, le commissaire du Gouvernement et les reprsentants des socits Bouygues Telecom, France Telecom, Orange France, Apple France, Apple Sales International, Apple Europe, Apple Europe Ltd, et Apple Inc (USA), entendus lors de la sance du 27 novembre 2008 ;

    Adopte la dcision suivante :

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    I. Constatations

    A. Les entreprises concernes

    a) La socit Bouygues Telecom

    La socit Bouygues Telecom est le troisime oprateur rseau de tlphonie mobile en France. Elle dispose de plus de 9 millions dabonns et a ralis en 2007 un chiffre daffaires denviron 4,4 milliards deuros.

    b) La socit France Telecom et la socit Orange France

    Le groupe France Telecom est un oprateur intgr sur lensemble des marchs des communications lectroniques. Prsent dans de nombreux pays, il est en France loprateur historique et le premier oprateur de communications lectroniques. Il est en Europe le troisime oprateur mobile et le premier fournisseur d'accs Internet ADSL. Il figure parmi les leaders mondiaux des services de tlcommunications aux entreprises multinationales. Lentreprise a annonc avoir ralis un chiffre daffaires mondial consolid de 52,9 milliards d'euros en 2007 (39,9 milliards d'euros au 30 septembre 2008), dont prs de 28 milliards deuros en France. Au niveau mondial, les revenus du groupe proviennent pour 55 % des services de communication personnels (tlphonie mobile essentiellement) alors quen France, les services de communication rsidentiels (fixe et Internet) restent prpondrants avec 64 % des revenus, les services de communication personnels en constituant 36 %.

    Orange est depuis 2006 la marque unique du groupe pour l'Internet, la tlvision et le mobile dans la majorit des pays o le groupe est prsent. Les services du fixe sont proposs sous la marque France Telecom.

    La socit France Telecom est la socit holding du groupe. Elle dtient 100 % de la socit Orange France.

    c) Le groupe Apple

    La socit Apple Inc est la maison mre du groupe Apple. Il sagit une socit multinationale amricaine dont le sige se trouve Cupertino en Californie. Elle est historiquement active dans le secteur des produits informatiques. Depuis 2003, Apple a diversifi son activit en commercialisant un lecteur MP3, liPod, et en dveloppant un magasin de vente en ligne de musique numrique, liTunes Store. En 2007, Apple Inc a lanc au tats-Unis liPhone, un terminal mobile.

    Apple Inc. contrle majoritairement Apple Sales International, une socit immatricule Cork en Irlande, ainsi quApple France, immatricule en France et Apple Europe, immatricule au Royaume Uni. La socit Apple Inc est responsable de la politique gnrale du groupe et a ngoci les modalits du lancement de liPhone en Europe. Apple Sales International est lentit responsable pour lEurope de la vente de lensemble des produits Apple, qui a sign les diffrents contrats conclus dans le cadre de la commercialisation de liPhone en Europe. Le rle dApple Europe et Apple France est de faciliter la commercialisation et la distribution des produits. Apple France gre la relation commerciale avec les distributeurs franais.

    Dans les dveloppements qui suivent, la dnomination Apple renverra indistinctement lensemble des socits composant le groupe.

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    B. Les services et produits concerns

    1. Les services de tlphonie mobile

    Trois oprateurs ont t autoriss en France dployer sur le territoire mtropolitain un rseau de tlphonie mobile : Orange, SFR, Bouygues Telecom. Ces oprateurs de rseau hbergent leur tour des oprateurs virtuels (MVNO ou mobile virtual network operator).

    Selon le suivi des indicateurs mobiles publi par lArcep, le parc total de clients slevait au 30 septembre 2008 56,4 millions, en progression nette de 6,4 % par rapport au 30 septembre de lanne prcdente. Plus des 2/3 de ces clients sont abonns un service post-pay, les offres prpayes ne constituant quun peu plus de 32 % du total. De fait, sur les trois premiers trimestres de lanne 2008, la croissance des offres post-payes est reste soutenue (+5,1 %) tandis que le parc de clients prpays diminuait (-4,7 %). Orange a annonc au 30 septembre 2008 avoir 64,8 % de clients abonns un forfait.

    Le parc de clients tait, au 30 septembre 2008, rparti de la faon suivante entre les diffrents oprateurs1 : 17,3 % pour Bouygues Telecom, 33,7 % pour SFR, 43,5 % pour Orange France, 5,5 % pour les MVNO.

    LArcep publie galement, pour la seule mtropole, des indicateurs sur lvolution des ventes brutes. Au troisime trimestre 2008, les ventes doffres post-payes se sont leves 1 911 800 et les ventes prpayes 2 003 141, soit au total 3 914 141 ventes brutes, en progression de 7,2 % par rapport au trimestre prcdent. Le recul des offres prpayes au sein du parc sexplique par limportance des rsiliations : le taux de rsiliation sur les offres prpayes a atteint 13,9 % au troisime trimestre 2008 contre 3,1 % pour les offres post-payes, soit environ 6,6 % en moyenne.

    Le march des services de tlphonie mobile est caractris par une forte saisonnalit. Le suivi des indicateurs de lArcep laisse apparatre quau quatrime trimestre 2007, les ventes brutes en mtropole ont t de 36 % suprieures aux ventes brutes du trimestre prcdent.

    Les rsiliations doivent tre distingues des numros ports, cest--dire des numros que les clients ont demand conserver bien quils aient chang doprateur, pour lesquels des indicateurs sont galement publis par lArcep. Les demandes de portage de numro se sont leves 300 000 au troisime trimestre 2008, contre 3 576 141 rsiliations.

    Le chiffre daffaires total rcurrent des services de tlphonie mobile pour la mtropole publi par lArcep pour le deuxime trimestre 2008 slve 5 555 millions deuros, soit +5,6 % par rapport la mme priode de lanne prcdente. Il exclut notamment les ventes de terminaux. Le revenu moyen par client et par mois est beaucoup plus lev pour les offres post-payes que pour les offres prpayes : 44,2 euros au deuxime trimestre 2008 en post-pay contre 15,4 euros en prpay. Sur le total des offres, post-payes et prpayes, le revenu moyen est de 35,3 euros.

    Cette croissance des revenus est tire notamment par les innovations commerciales et technologiques.

    Dune part, depuis 2004, les offres dites dabondance ou dillimit pour la voix, qui permettent de communiquer de faon illimite pour un prix forfaitaire, se sont fortement dveloppes. Lattractivit de ces offres constituait le premier motif de changement doprateur pour les clients du grand public (cf. avis du Conseil de la concurrence n 08-A-16 du 30 juillet 2008).

    Dautre part, le dploiement des rseaux mobiles en haut dbit et la mise sur le march de nouveaux terminaux permettant den exploiter les possibilits gnrent une forte croissance des usages dchanges de donnes ou multimdias. Selon le suivi des indicateurs mobiles de lArcep, le parc actif multimdia mobile comptait, au troisime trimestre 2008, prs de 17,4 millions

    1 Rpartition en volume du parc de clients mobiles, source Orange, cote 3857.

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    dutilisateurs : un client sur trois avait utilis au moins une fois durant le dernier mois un service multimdia de type Internet mobile (Wap, iPhone-Mode, Vodafone live, Orange World, etc.) ou, en mission, un service de type MMS ou e-mail mobile ( lexclusion donc des SMS) et ce, quelle que soit la technologie support (CSD, GPRS, EDGE, UMTS, etc.). Orange a annonc 7,4 millions de clients haut dbit au 30 septembre 2008, soit plus du double par rapport la fin de lanne 2007.

    Depuis la fin de lanne 2007, sont apparues sur le march des offres dchanges de donnes avec des forfaits illimits, sur le modle des offres voix. SFR propose depuis novembre 2007 une gamme de forfaits appels Illimythics en 3G+, offrant un accs mobile Internet. Orange a lanc la gamme Origami . Fin aot 2008, Bouygues Telecom a pratiqu une refonte de sa gamme de services en abondance, en lanant Neo2 comprenant lenvoi et la rception de donnes de manire illimite (cf. lavis de lArcep 2008-1175).

    2. Les terminaux mobiles

    a) Loffre de terminaux

    Les reprsentants de Samsung ont expliqu que les principaux constructeurs sont Nokia, Samsung, Sony Ericsson, LG, Sagem et Motorola. Il sagit des oprateurs historiques, implants depuis 15 ans. Ils ont pour clients les oprateurs rseaux, et les distributeurs. Leur offre concerne plutt la grande distribution. Ensuite, viennent HTC et RIM Blackberry qui sont des acteurs nouveaux. Leur offre est diffrente. Ils ont des interfaces orientes plus B to B , cest--dire pour une utilisation professionnelle des produits. Leur cible est plutt le march des entreprises. Enfin, Apple est un constructeur particulier. Sa particularit est davoir dvelopp un produit qui est inhabituel par son systme dexploitation, et extrmement convivial. Il bnficie dune trs forte notorit sur le segment des MP3 (iPods) grce au design et linterface. Leur concept de tlphone tait avant-gardiste .

    Pour les reprsentants de LG, il y a deux segments principaux, les mobiles et les smartphones. Linstitut GFK relve les parts de marchs sur ces deux panels. A mon niveau, je nachte que du panel des mobiles. Sur ce segment, il y a 7 acteurs. Le leader est Samsung. Sagissant du march des mobiles, Samsung dtient une part de march denviron 33 %, Nokia dtient une part de march de 20-25 %, Sony Ericsson, une part de march denviron 14-15 %, et LG 12-13 %. Sagem est presque sorti du march, tout comme Motorola, et Alcatel se concentre sur le segment dentre de gamme. Le march des mobiles peut tre segment en tenant compte des diffrents usages attendus par les consommateurs. Nous distinguons plusieurs catgories de mobiles, par exemple : (1) la catgorie des terminaux voix , pour les clients qui ne souhaitent quun mobile leur permettant de tlphoner ; (2) la catgorie des terminaux multimdia, pour les clients qui souhaitent utiliser leur mobile comme baladeur numrique ou vido ; (3) la catgorie design , nous avons par exemple fait un tlphone avec Prada ; (4) la catgorie professionnelle, catgorie pour laquelle internet et le mail sont des fonctionnalits importantes. RIM (Blackberry) et HTC sont trs prsents sur la catgorie professionnelle . Samsung et Nokia sont galement des acteurs prsents dans cette catgorie .

    En tout tat de cause, le secteur des terminaux est caractris par un rythme rapide dinnovations et un cycle de vie relativement court des produits. Les reprsentants de LG ont prcis cet gard que la dure de commercialisation des terminaux tait gnralement comprise entre 9 et 12 mois et que certains produits peuvent tre arrts aprs 3 mois. La dure maximum constate sur un produit LG a t de deux ans. Dans ce secteur, on assiste une course linnovation. Les positions voluent trs rapidement. Il y a trois ans, Sagem tait leader, aujourdhui ils ont presque disparu du march .

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    b) Les smartphones

    Les smartphones sont des terminaux adapts laccs lInternet mobile. Ils fonctionnent avec un systme dexploitation ouvert et sont quips dun clavier et/ou dun cran tactile qui facilite la navigation sur Internet. Les smartphones concentrent galement les fonctionnalits de plusieurs appareils autrefois distincts : le GPS, les consoles de jeux, lappareil photo, etc.

    LArcep a fourni dans son avis la dfinition suivante des smartphones : Les smartphones rsultent de la convergence, depuis le dbut des annes 2000, des tlphones mobiles et des PDA. Ils cumulent ainsi des fonctionnalits (connectivit wifi, GPS, appareil photo, lecteur vido/MP3) que des terminaux plus classiques proposent de manire isole ou sans ergonomie adquate, et les associent par un systme dexploitation ddi. Diverses tudes de march font part des spcificits des smartphones, tenant notamment :

    - leurs caractristiques physiques (ergonomie, cran tactile ou clavier) ;

    - leur systme dexploitation propre ;

    - la diversit dusages en rsultant, centrs, outre la tlphonie, sur linternet mobile (contenus) : coute de musique, visionnage de vidos, navigation par GPS, PDA. .

    LArcep a galement soulign le dynamisme et le caractre stratgique de ce segment de march pour les oprateurs mobiles : Si ces produits ont longtemps t rservs un cercle restreint de consommateurs avertis (professionnels, technophiles), il semblerait que leur clientle slargisse fortement depuis peu, sous la conjonction de plusieurs effets tendant en faire des objets de consommation de masse : lancement doffres data grand public permettant laccs linternet mobile tarif forfaitairement, dveloppement de terminaux ergonomiques, reposant depuis peu sur une technologie tout tactile (iPhone, Blackberry Storm, HTC Touch). Selon les tudes dont dispose lAutorit, les smartphones reprsenteraient entre 10 % et 13 % des ventes mondiales, soit environ 35 millions dappareils couls au premier trimestre 2008, et la croissance de ce segment serait forte (60 % par an) et pourrait reprsenter la moiti du march lhorizon 2010-2011. Selon ltude Canalys, il se serait vendu, au deuxime trimestre 2008, 12,6 millions de smartphones dans la zone Europe, Moyen-Orient et Afrique. Le march des smartphones apparat donc comme un segment stratgique de croissance pour les oprateurs mobiles .

    Le systme dexploitation ouvert dun smartphone permet des tiers de dvelopper des applications pouvant fonctionner sur ce terminal. Cette caractristique est essentielle pour distinguer les smartphones de terminaux esthtiquement proches et pouvant tre dots dune interface tactile, mais fonctionnant sous un systme dexploitation propritaire, non ouvert aux dveloppeurs externes.

    c) LiPhone

    Apple a mis sur le march un premier terminal mobile dnomm iPhone aux tats-Unis en octobre 2007, puis en France en novembre 2007. La version 3G de ce terminal est disponible aux tats-Unis depuis le 11 juillet 2008 et en France depuis le 18 juillet 2008.

    LiPhone est un appareil qui combine les usages dun tlphone mobile, d'un terminal internet mobile, dun assistant personnel, dun baladeur numrique, dun GPS et dune console de jeux portables. Selon Apple, l'appareil intgre des innovations protges par plus de 200 brevets. Parmi les fonctionnalits qui distinguent l'iPhone des produits concurrents figurent une interface constitue d'un cran tactile multipoint, remplaant les boutons ou claviers traditionnels, des dtecteurs de lumire et de proximit pour optimiser la batterie de l'appareil et verrouiller l'utilisation du clavier tactile lorsqu'il est port l'oreille, un cran large dont le visionnement en mode paysage est automatiquement dtect via un dispositif gyroscopique lorsque l'utilisateur fait pivoter l'appareil, la reprsentation graphique de la bote de messagerie vocale et enfin la possibilit de pouvoir interagir directement avec plusieurs doigts sur le terminal ( caractre multitouch ).

    http://fr.wikipedia.org/wiki/T%C3%A9l%C3%A9phone_mobilehttp://fr.wikipedia.org/wiki/Assistant_personnel

  • BOCCRF n 1 du 5 fvrier 2009 page 8 _____________________________________________________________________________________________

    LiPhone est optimis pour la navigation sur Internet. Ainsi, pour justifier leur choix de ne dbrider la 3G que pour les iPhones 3G, les reprsentants dOrange ont dclar au magazine SVM2 : Lergonomie et la facilit dutilisation de liPhone font que ses utilisateurs consomment davantage de bande passante mme sils ne sont pas spcialement technophiles . Le directeur marketing dOrange a prcis que Lergonomie a popularis le multimdia dans la tlphonie mobile. Les autres fabricants ont encore travailler dans ce domaine .

    Orange France a dailleurs lanc paralllement la commercialisation de liPhone une gamme de forfaits adapts ce terminal, Orange pour iPhone , ainsi que des options iPhone associer ventuellement aux forfaits prcdemment commercialiss. Ces forfaits spcifiques ont t crs la demande dApple : il nous semblait galement important qu'Orange puisse proposer un forfait incluant le tlchargement de flux de donnes consquents afin d'viter au consommateur de subir une surfacturation .

    Ces forfaits proposent une navigation internet illimite, la possibilit de recevoir immdiatement des emails sur liPhone et une interface de messagerie visuelle pour les prix suivants :

    source : site Internet dOrange

    Le consommateur reste toutefois libre de choisir un autre forfait dans la gamme des forfaits proposs par Orange. Rciproquement, les forfaits iPhones sont accessibles aux consommateurs ayant opt pour un autre terminal. Selon les dclarations de la socit Orange, 53 % des personnes ayant achet un iPhone 3G ont opt pour ces forfaits adapts liPhone. Les documents communiqus par Orange ses distributeurs recommandent : pour exploiter au mieux les possibilits du terminal, proposer un forfait de la gamme Orange pour iPhones . Seuls 10 459 clients ayant opt pour un autre terminal ont choisi de lui associer un forfait de la gamme iPhone.

    d) Le rle du subventionnement des terminaux

    Dans son avis 2008-1175 du 4 novembre 2008, lArcep dcrit le march de la tlphonie mobile comme un march de terminaux :

    Parmi les diffrents modes de distribution des offres de tlphonie mobile, les offres associant un service mobile et un terminal subventionn occupent une place prminente. Ceci parat rsulter de

    2 Magazine SVM, novembre 2008, cotes 3082-3083.

  • BOCCRF n 1 du 5 fvrier 2009 page 9 _____________________________________________________________________________________________

    la grande importance qu'accordent les consommateurs aux caractristiques de leur terminal, qui est devenu un objet personnel donnant accs un nombre croissant de services (e-mail, navigation Internet, TV mobile, etc.) et pouvant associer de nombreuses fonctionnalits (appareil photo, assistant personnel numrique, lecteur MP3, radio, etc.).

    Au regard du trs faible pourcentage de terminaux achets nus sur le march franais (environ 5 %, selon les estimations de l'Autorit), il semble que le consommateur ne valorise un terminal que subventionn, en association avec une offre de services.

    Le march mobile, mature, est donc trs fortement anim par la vitesse de renouvellement de la gamme des terminaux, et dans une moindre mesure par les innovations de changement de normes (2G/3G/3.5G) et de services (introduction de l'IMS, service de tlchargement de musique...).

    Selon l'tude Use-IT ralise par l'IDATE, en 2006, le march du terminal mobile est caractris par une forte dynamique de renouvellement : ainsi, prs d'un client sur trois indiquait son intention de renouveler son terminal dans les 12 mois (figure 5). La principale raison du renouvellement est le fait d'avoir un terminal "plus moderne" .

    La socit Orange a fourni3 une liste de prix terminaux utiliss pour linternet mobile et prsents comme offrant des caractristiques proches de celles de liPhone, avec et sans subvention. Cette liste montre que les subventions offertes sur ces modles sont trs variables et peuvent atteindre prs de 700 euros (Nokia N95 Silver Black chez Bouygues Telecom).

    3 Cote 5001.

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    Orange a lanc la commercialisation de liPhone 3G le 17 juillet 2008. A cette date, liPhone 3G tait subventionn par Orange selon le type de forfait choisi par le client ; un iPhone 8 Go tait vendu 149 euros pour les forfaits Orange pour iPhone , partir de 149 euros pour les forfaits Origami (149 euros avec First et Jet , 199 euros avec Star et Zen ), 399 euros pour les forfaits bloqus, 509 euros pour les forfaits sans engagement. LiPhone nu tait vendu le 11 novembre 2008 au tarif de 509 euros pour le modle 8G et de 609 euros pour le modle 16G. A lexception des tarifs des terminaux nus , ces prix ont t rviss par Orange lapproche des ftes de fin danne, le premier prix se situant dsormais 99 euros.

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    e) Les ventes diPhone

    Selon les statistiques communiques par lArcep, liPhone 2G dApple tait en juin 2008 le troisime smartphone le plus vendu dans le monde, avec une part de march de 5,3 % contre 13,4 % pour Rim ( Blackberry) et 46,7 % pour Nokia.

    Au troisime trimestre 2008, Apple aurait vendu 7 millions d'iPhones 3G dans le monde, dpassant ainsi RIM, qui commercialise les terminaux de la marque Blackberry4.

    March mondial des smartphones

    Parts de march 3me trimestre 2008, 3me trimestre 2007

    3me trimestre 2008 3me trimestre 2007

    Croissance en %

    3me trimestre 2008/3me

    trimestre 2007

    Fournisseur Livraisons en % Livraisons en %

    Total 39 850 100 100 31 156 240 100 27,9

    Nokia 15 485 690 38,9 16 025 690 51,4 -3,4

    Apple 6 899 010 17,3 1 107 460 3,6 523

    RIM 6 051 730 15,2 3 298 090 10,6 83,5

    Motorola 2 313 930 5,8 2 058 500 6,6 12,4

    HTC 2 308 210 5,8 850 400 2,7 171,4

    Autres 6 791 530 17 7 816 100 25,1 -13,1 Source : Canalys estimates, @canalys.com Itd. 2008

    LiPhone 3G serait par ailleurs devenu au troisime trimestre 2008 le portable le plus vendu aux tats-Unis .5

    En France, 35 000 iPhones ont t vendus dans les quatre jours qui ont suivi sa mise sur le march le 18 juillet 2008. Ds le 20 juillet, les boutiques taient en rupture de stock. Au 28 septembre 20086, Orange dclarait avoir vendu, en moins de trois mois, 215 635 iPhones 3G. En sance, le 25 novembre 2008, les reprsentants de la socit Orange ont dclar avoir vendu 300 000 iPhones 3G et ont prcis que les ventes diPhones 3G reprsentaient 15 % de leurs ventes brutes. Selon les dclarations de la socit Orange, 50 % des ventes diPhones 3G concernent de nouveaux clients. La socit Orange a galement dclar que ses prvisions de vente lhorizon de la fin 2008 taient de 500 000 ventes diPhones 3G. 4 ( Apple reprsente 17,3% du march, contre 38,9% pour le Finlandais, RIM est troisime avec

    15,2% ) : http://www.macplus.net/magplus/depeche-20428-l-iphone-et-mac-os-x-mobile-

    deuxieme , http://www.canalys.com/pr/2008/r2008112.htm)

    5 La Tribune, 10/11/2008, LiPhone devient le portable le plus vendu aux tats-Unis . 6En France, le 28 septembre 2008, Orange avait galement vendu 151 863 iPhones 2G dont 12 000 clients ont un forfait de la gamme entreprise.

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    3. Lenvironnement Apple

    a) LApp Store

    Depuis juin 2008, Apple met la disposition des utilisateurs une plate-forme Internet ddie, dnomme App Store , destine mettre en relation les utilisateurs diPhones et les dveloppeurs de logiciels et dapplications adaptes.

    LUFC-Que-Choisir dcrit ainsi lApp Store : On y trouve par exemple des jeux, des dictionnaires, des applications comme Facebook, des convertisseurs, des applications pour grer son compte en banque, des applications qui permettent de trouver des bornes Velib, etc. Il existe toute une communaut de dveloppeurs qui peuvent, sous le contrle dApple, dvelopper et vendre des applications simples . Les reprsentants dApple ont confirm7 que lApp Store renforait lattractivit de liPhone : LApp Store est trs attractif et rend l'iPhone attractif. D'ailleurs, j'observe que les autres constructeurs sont en train de construire leurs propres plateformes .

    b) Le baladeur numrique iPod

    Entr en 2001 sur le march des baladeurs numriques avec liPod, Apple dtiendrait plus de 70 % de part de march aux tats-Unis au premier trimestre 2008, devant Sandisk (11 % de part de march), Microsoft (4 %) et le singapourien Creative (2 %), selon le cabinet d'tudes NPD Group8.

    En France, selon le magazine Confortique9, le march des baladeurs numriques tait galement caractris en mars 2008 par le leadership dApple : Exception faite de la marque Apple, qui demeure le leader incontestable du baladeur, les acteurs du monde informatique autrefois incontests doivent affronter de nouveaux concurrents. Sur l'ensemble des familles de produits, la rpartition des parts de march franais place en tte Apple (avec 42,2 %), Samsung (7,9 %), Arches (7,8 %), Creative (6,7 %), Mpman (5,1 %), Philips (3,1 %) et Sony (3,2 %). . Les reprsentants de la FNAC10 ont confirm lors de leur audition : () 40-50 % des baladeurs que nous vendons sont des iPods. En valeur, leur part de march est encore plus forte car leurs produits sont plus chers. Il ny a pas de concurrents de poids quivalent liPod. On trouve trs loin derrire, de nombreux constructeurs qui ont une part de march trs faible ( infrieure 10 %) : il sagit de Sony, de Creative, de Samsung, etc. Mais lcart avec Apple est norme .

    c) Le logiciel iTunes et la plateforme iTunes MusicStore

    iTunes est un logiciel propritaire de lecture et de gestion de bibliothque multimdia numrique distribu gratuitement par Apple. Il permet notamment de grer les transferts de musique, photos et vidos sur les diffrents priphriques multimdias d'Apple (iPod, Apple TV, iPhone). Il est disponible sur Mac OS X, et sur Microsoft Windows. Il intgre par ailleurs un accs direct au magasin de vente de musique en ligne dnomm iTunes Music Store .

    iTunes Music Store est un service dachat en ligne de musique et dautres contenus (vidos musicales, livres audio, sries tlvises, films) lanc par Apple en juin 2004. Depuis la mise sur le march de liPhone 3G, Apple y propose galement les applications destines liPhone et liPod Touch disponibles sur lApp Store. La musique achete sur iTunes Music Store est protge par le dispositif de gestion des droits numriques (DRM) propritaire d'Apple, FairPlay. Selon une tude du cabinet IDATE daot 2008 sur les nouveaux marchs de la musique , la plateforme iTunes 7 Procs verbal Apple. 8 Cote 1744. 9 Cotes 1736 et 1737, Confortique magazine, mars 2008. 10 Procs verbal daudition FNAC.

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    Music Store a connu un succs majeur, devenant en quelques annes, le premier dtaillant de musique, tous supports confondus : Que faire aprs iTunes ? La premire phase du dveloppement du march de la musique numrique s'achve. Initie la fin des annes 1990 par l'mergence de plates-formes de tlchargement illgal, elle se solde en 2008 avec le succs quasi monopolistique du couple iPod/iTunes. Au second trimestre 2008, Apple a vendu 150 millions d'iPods depuis les premiers modles fin 2001 et plus de 5 milliards de titres depuis le lancement de son service en ligne iTunes Music Store en 2003. En janvier 2008, la plate-forme de tlchargement opre par Apple est passe en tte des dtaillants de musique aux tats-Unis physique et numrique confondues), ravissant la premire place Wal-Mart. Avec plus de 50 millions de clients travers le monde, la part de march d'iTunes est estime entre 70 et 80 %. En associant une plate-forme de distribution dmatrialise de contenus un lecteur innovant en termes de technologie et de design, Apple a russi rendre solvable une vaste frange de consommateurs de musique en ligne

    Lors de son audition, la FNAC, galement prsente sur le march de la vente de fichiers musicaux dmatrialiss, a confirm que liTunes Music Store jouissait galement en France dune part de march trs significative, cette part de march tant porte par celle de liPod : Sagissant de la musique en ligne (vendue sur ordinateur), iTunes Store a une part de march de 60-70 % environ, Virgin Mega est deuxime avec une part de march denviron 15 %, et FNAC a environ 8-15 % du march. Ces chiffres sont trs approximatifs. Je prcise que le march des fichiers musicaux achets depuis un tlphone est en trs forte croissance : 25 % en 2007 et 35-40 % en 2008. Ces chiffres sont toutefois vrifier. Le poids diTunes est proportionnel au parc diPods. Apple apporte simplicit et confort. Le consommateur na aucun intrt sortir de ce systme intgr .

    d) LiPhone est un iPod

    Or, les seuls baladeurs numriques sur lesquels peuvent tre tlcharges les musiques diTunes Music Store protges par Fairplay sont les iPods ou les iPhones, ces derniers tant les iPods le[s] plus abouti[s] de la gamme dApple , selon le PDG dApple.

    En termes de prix, lArcep a dailleurs observ que liPhone sintgrait pleinement dans le continuum de prix des iPods : la subvention pratique en France par Orange pour un client qui souscrit en parallle un forfait iPhone rend la deuxime version de liPhone particulirement attractive. En effet, elle ramne le prix du terminal un niveau infrieur celui de liPod dot des mmes fonctionnalits (autre que tlphone) et de capacit quivalente : liPhone 3G subventionn est vendu avec le forfait iPhone 149 euros pour le 8 Go et 199 euros pour le 16 Go, contre 229 euros pour liPod Touch 8 Go et 289 euros pour liPod Touch 16 Go. Le consommateur de tlphonie mobile dsirant acqurir un baladeur numrique de type iPod semble donc incit choisir plutt un iPhone .

    Les reprsentants de la FNAC confirment : Les morceaux achets sur iTunes[Music Store] avec DRM ne peuvent pas tre dposs sur un autre lecteur MP3 que liPod ou sur un autre smartphone que iPhone. Plus les clients ont achet des morceaux tlchargs sur iTunes avec DRM, plus ils sont captifs dApple.[]. Aprs 6 mois dutilisation, sur la base dun album achet par mois, le client est de fait captif. Je pense quenviron 1 million diPods sont vendus en France par an .

    e) Lactivation de liPhone sur iTunes

    Apple a prvu dans le contrat conclu avec Orange11 que lactivation de liPhone se ferait sur iTunes, ce qui lui permet un enregistrement direct des nouveaux clients. Cette spcificit a galement t mise en exergue par lArcep : Le partenariat entre lquipementier Apple et loprateur Orange revt un caractre assez peu commun plusieurs points de vue. (). Dans ce schma, lquipementier, et plus seulement loprateur, a dsormais un lien direct avec le client

    11 Cf. contrat cl entre Orange et Apple : key terms agreement .

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    final, Apple ayant rendu son logiciel iTunes incontournable dans les processus dactivation et de dsimlockage (dverrouillage) de liPhone. Par ailleurs, ce terminal bnfice dun accs exclusif la plate-forme de musique en ligne dApple, liTunes Store .

    4. La distribution des terminaux et des services de tlphonie mobile

    Le Conseil a soulign, dans sa dcision n 07-D-37 du 7 novembre 2007, le rle stratgique jou par les canaux de distribution des services de tlphonie mobile. Celle-ci peut soprer soit par lintermdiaire de rseaux de distribution intgrs au sein de chaque oprateur, soit par des rseaux de distribution indpendants qui distribuent tantt les services de plusieurs oprateurs, tantt ceux dun oprateur exclusif : Ainsi, les services de Orange sont distribus, de manire exclusive, dans les agences du groupe France Telecom (environ 700 points de vente) ainsi que par le rseau de boutiques indpendantes Mobistore (environ 150 points de vente). Les services de SFR sont distribus de manire exclusive dans un rseau denviron 700 Espaces SFR exploits par des entreprises indpendantes dont SFR est parfois un actionnaire de rfrence. Les services de Bouygues Telecom sont distribus de manire exclusive par un rseau dun peu moins de 500 boutiques dont la moiti de Clubs Bouygues Telecom possds par loprateur. Ces rseaux de distribution exclusifs, qui constituent lessentiel de la distribution mono-marque, reprsentent presque la moiti des actes de vente du march.

    Par ailleurs, les services des trois principaux oprateurs sont galement distribus par lintermdiaire de distributeurs indpendants multi-marques. Parmi les distributeurs multi-marques, les chanes de la grande distribution alimentaire ou spcialise reprsentent le canal le plus dynamique avec prs dun quart des actes de vente du march des services de tlphonie mobile. Ainsi, plus de 10 % des actes de vente sont raliss dans les seules enseignes de la grande distribution alimentaire. Paralllement, outre des petites boutiques indpendantes, des rseaux de distributeurs indpendants multi-marques, le plus souvent franchiss, ralisent lessentiel du reste de la distribution non exclusive. Ainsi, les 280 boutiques lenseigne The Phone House constituent un acteur important de la distribution indpendante. La distribution multi-marques reprsente encore un peu plus de la moiti des actes de vente du march .

    C. Les contrats dnoncs par la saisine

    La socit Bouygues Telecom fait valoir dans sa saisine quelle a t exclue de la commercialisation de liPhone bien quelle ait demand le distribuer ds le 14 mai 2008, Apple lui ayant oppos le fait que Orange avait t dsign seul oprateur de rseau charg de la distribution de liPhone en France. Elle met galement en cause le caractre anticoncurrentiel du rseau de distribution slective mis en place par Apple en France pour la distribution de liPhone. Selon Bouygues Telecom, le systme de distribution en cause constitue une entente prohibe dans la mesure o il impose des prix de revente minimum aux consommateurs, il restreint la libert de revente des distributeurs agrs et il cloisonne les marchs nationaux. Le saisissant dnonce aussi le caractre injustifi de certains critres de slection et leur application discriminatoire. Il critique la vente lie des iPhones et des services Orange.

    Le systme mis en place par Apple en France pour la distribution de liPhone repose sur plusieurs contrats :

    a. le contrat de partenariat rseau ( key terms agreement ), conclu entre Apple et France Telecom le 12 octobre 2007 et modifi en mai 2008, par lequel Orange est dsign comme oprateur rseau exclusif ;

    b. laccord de distribution, conclu en octobre 2007 entre Apple et Orange et modifi en mai 2008, qui dsigne Orange comme grossiste exclusif pour la France et dfinit les critres respecter par les boutiques Orange pour la distribution de liPhone ;

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    c. les contrats par lesquels Apple agre dautres distributeurs de dtail ;

    d. les contrats de distribution conclus entre Orange et les distributeurs de dtail agrs par Apple.

    Chacun de ces contrats contenant des stipulations mises en cause par la saisine sera prsent successivement.

    1. Laccord exclusif de partenariat rseau

    a) Les conditions dans lesquelles Apple a choisi son rseau partenaire en France

    La socit Apple Inc. a expos les circonstances et les raisons du choix dOrange comme partenaire exclusif dApple pour la distribution de liPhone en France. La socit a ainsi dclar que la socit Apple Inc. avait souhait limiter le nombre de ses partenaires en Europe afin de dployer liPhone le plus rapidement possible. Aprs lchec de ses ngociations avec Vodafone, qui lui aurait permis daccder de nombreux pays europens, la socit Apple a choisi de slectionner un partenaire exclusif dans chacun des trois premiers pays dans lesquels elle souhaitait se dployer, soit la France, le Royaume-Uni et lAllemagne. Dans dautres pays europens, Apple a choisi plusieurs partenaires12.

    Les oprateurs ont t slectionns sur la base de critres qualitatifs et quantitatifs comme : les facteurs technologiques (capacit rseau, couverture EDGE ou rseau 3G), la renomme de la marque. Nous avons examin si la marque tait en adquation avec l'image d'Apple. Nous avons regard leurs boutiques et la taille du rseau de distribution. Nous avons galement regard leurs prsence dans diffrents pays, les revenus moyens par client, l'offre des services propose aux clients, les indices de satisfaction, le taux de churn . Nous avons galement compar le nombre de clients des oprateurs. La qualit du contact avec les quipes des oprateurs rseaux tait galement importante .

    b) Prsentation du premier accord, Key terms agreement , doctobre 2007

    Laccord dsignant Orange comme rseau partenaire pour la France a t sign entre Apple Sales International et France Telecom SA le 12 octobre 2007.

    Aux termes de cet accord13, Orange devient loprateur mobile exclusif pour les produits iPhone dans les plusieurs pays (France, Belgique, Roumanie), et obtient une co-exclusivit en Autriche, Pologne et Slovaquie. Lexclusivit portait sur liPhone 2G et lensemble de ses successeurs. En contrepartie14, Orange sengageait verser Apple 30 % des sommes factures chaque client iPhone Orange. Orange sest galement engag rembourser 50 % des dpenses publicitaires engages par Apple dans le cadre de la promotion de liPhone, montant plafonn 10 millions deuros.

    Laccord prvoit quApple serait dgage de ses obligations dexclusivit ds lors que 40 % du nombre total de clients iPhones auraient dbloqu leur tlphone et auraient chang doprateur. La clause 2.2 de ce contrat interdit Orange de conclure un partenariat similaire avec un autre constructeur de mobiles.

    Le blocage du tlphone est galement prvu contractuellement15 : Dans la mesure autorise par les lois, rglementations et dcrets en vigueur, l'ensemble des Produits iPhone vendus par Orange

    12 Apple, courrier du 24 octobre 2008, cote 1612 et s.. 13 Clause 2.1.a. 14 Article 3 de lAnnexe 3 du contrat key terms agreement . 15 Clause 7.6.a.

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    ou l'une quelconque des Socits Affilies d'Orange en Europe et l'ensemble des Produits iPhone vendus par Apple dans l'un quelconque des pays de l'Annexe 1 seront vendus avec une SIM bloque qui ne permettra une utilisation que sur le rseau d'Orange conformment aux spcifications du rseau et des SM d'Orange. Apple informera les clients que les Produits iPhone sont SIMlocks et, si le droit applicable l'exige, que ceux-ci peuvent en demander le dblocage. . Les modalits de dsimlockage sont exposes larticle 7.6.b : Apple et Orange dbloqueront les Produits iPhone conformment aux lois, rglementations et dcrets en vigueur. Si les lois, rglementations et dcrets en vigueur autorisent l'une ou l'autre des Parties facturer au Client iPhone d'Orange des frais de dblocage de son Produit iPhone, Orange versera Apple, pour chacun des Clients iPhone d'Orange concerns, le plus lev des deux montants suivants : (i) 100 % des frais de dblocage perus par Orange, diminus de la TVA ou (ii) 100 EUR diminu de la TVA.

    c) La dure de lexclusivit

    Le contrat est conclu pour une dure de 5 ans compter de la date du lancement de liPhone 2G, soit le 29 novembre 2007. Apple bnficie dune clause de sortie sans contrepartie lissue dune priode de trois ans. Au cours de son audition, la vice-prsidente de la socit Apple Inc a prcis : Dans notre esprit, il s'agit plutt d'un contrat de trois ans. Ce point a t central dans la ngociation. Apple aurait prfr une priode plus courte que trois ans pour cette facult de sortie. . Apple sengage galement ne pas mettre en uvre, pendant une priode de 2 ans compter de lexpiration du contrat, une action marketing ciblant les clients iPhone dOrange et qui viserait les encourager quitter le service de tlphonie mobile dOrange au profit du service de tlphonie dun autre oprateur .

    Ces dclarations ont t compltes par les observations16 dApple : les droits spciaux accords certains oprateurs, dont celui liant Orange Apple pour liPhone en France, sont donc rsiduels mais ne correspondent pas un modle absolu et ncessaire pour Apple, qui bien au contraire, dsire ne plus en accorder de nouveaux dans la configuration actuelle. () Compte tenu des changements de l'conomie gnrale du contrat avec les oprateurs, Apple a dcid de ne plus accorder d'exclusivit aux oprateurs et n'en a donc pas introduit dans les contrats signs pour le lancement dans d'autres pays de l'Union europenne.

    Toutefois, pour certains pays dont la France, Apple s'tait engag aux termes de son premier accord concernant le 2G maintenir le droit de premire prsentation d'Orange avec l'iPhone 2G et ses successeurs pour la dure du contrat ; Apple n'tait donc pas en mesure de mettre fin l'accord sign avec Orange en France .

    d) Les modifications apportes par lavenant au contrat portant sur les conditions cls

    Le 15 mai 2008, Apple Sales International et France Telecom ont sign un premier avenant au contrat de partenariat conclu en octobre 2007.

    Ce nouvel accord modifie17 lquilibre conomique du partenariat, les parties abandonnant le modle de revenue-sharing au profit dun modle plus classique doctroi de subventions sur les terminaux : En contrepartie de lexclusivit concde, Orange accordera une subvention aux clients qui souscrivent une offre de service spcifique iPhone ou toute offre de services en post paiement dOrange lors de lacquisition [dun iPhone 3G] [] En consquence, Orange ne sera pas tenue de partager les sommes factures .

    A lissue de ce nouveau contrat, Orange obtient de pouvoir distribuer les iPhones 3G en Suisse et au Portugal, mais sans bnficier dexclusivit.

    16 Observations p. 45. 17 Cote 3472.

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    Le contrat prvoit18 galement un niveau minimum de subvention de la part dOrange pour les iPhones 3G, ainsi quun reporting strict de ces niveaux de subventions afin de vrifier le respect de la subvention moyenne :

    Orange octroiera aux clients qui achtent un P3 ou Successeur accompagn d'une Offre de Service Orange en Postpaiement une Subvention Moyenne par rfrence (SKU) d'iPhone dfinie le premier jour de la Priode d'valuation comme suit :

    (i) Si le Prix de Gros d'une rfrence d'iPhone est suprieur ou gal 345 EUR, la Subvention Moyenne pour une telle rfrence d'iPhone sera gale au plus lev des montants suivants : (a) 310 EUR ou (b) un montant au moins 20 % suprieur la subvention la plus leve qu'Orange propose ou fournit sur tout autre tlphone en France.

    (ii) Si le Prix de Gros d'une rfrence d'iPhone est infrieur 345 EUR, la Subvention Moyenne pour une telle rfrence d'iPhone sera gale au plus lev des montants suivants (a) le Prix de Gros de la rfrence d'iPhone concerne moins 50 EUR ou (b) un montant au moins 20 % suprieur la subvention la plus leve qu'Orange propose ou accorde sur tout tlphone en France dont le prix subventionn est compris entre 0 et 150 EUR

    2. Laccord de distribution, conclu entre Apple et Orange en octobre 2007, modifi en mai 2008

    Laccord de distribution sign entre Apple Sales International et France Telecom le 12 octobre 2007 prvoyait quOrange pouvait acheter des iPhones directement auprs dApple et non auprs dautres sources et quOrange ne pouvait les distribuer que dans les points de vente agrs de certains pays (France, Belgique, Roumanie, Autriche, Pologne, Slovaquie). Il est conclu pour une dure de cinq ans.

    Un premier avenant ce contrat a t sign entre Apple Sales International et France Telecom le 15 mai 2008. Il organise la distribution de liPhone au sein dun rseau de distribution slective. Orange est grossiste et livre les distributeurs agrs par Apple. Lannexe 3 de cet avenant prcise, dans la partie Addendum Pays Agr : France , larticle 5.1 qu Apple dsigne Orange en qualit de grossiste titre exclusif habilit acheter des Produits Agrs des fins de distribution aux Points de Vente Agrs dans les Pays Agrs (cote 3526).

    Ce contrat prvoit que seules les socits signataires dun contrat dadhsion avec Apple et Orange seront habilites passer des commandes diPhones auprs dOrange. Les conditions de revente des iPhones par Orange aux distributeurs agrs sont fixes par larticle 5.2 du contrat19. Cette clause prvoit notamment que le prix de vente maximum de liPhone sera le prix dont bnficie Orange, major de 8,5 %20. Orange sengage par ailleurs ne pas avantager ses propres points de ventes, au dtriment de tiers21.

    18 Appendice 1 de lannexe 3 Subventions moyennes en France , cote 3481. 19 Cote 3518. 20 Larticle 5.2 du contrat Orange sera seule responsable de la fixation du prix auquel elle facture ses clients lors de la distribution des Produits Agrs, sous la seule rserve des stipulations du prsent. Dans les limites autorises par les lois et rglementations applicables, pour les Produits Agrs vendus sans offre de Services Orange, le prix de vente maximum de tout Produit Agr sera le Prix de Gros major de 8,5 %. Si Orange estime que le prsent Article 3.10 est contraire aux lois ou rglementations applicables. Orange en informera Apple sans dlai. Aux fins du prsent Article, Prix de Gros dsigne le prix factur par Apple ou une Socit Affilie d'Apple Orange ou une Socit Affilie d'Orange au titre d'un Produit Agr spcifique . 21 Orange vendra les Produits Agrs aux Points de Vente Agrs selon des dispositions et conditions non discriminantes, de manire ne pas avantager injustement les Points de Vente Agrs dtenus par Orange par rapport aux Points de Vente Agrs de tiers. Sans limiter la porte de ce qui prcde. Orange sera seule responsable de l'allocation des Produits Agrs livrs par Apple aux Points de Vente Agrs et devra le faire de manire non discriminante.

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    En revanche, Orange sengage avantager la distribution des iPhones par rapport dautres terminaux : Orange convient que, lors de la vente des Produits Agrs l'un quelconque de ses Points de Vente Agrs des fins de distribution, elle observera des dispositions et conditions qui seront identiques ou plus favorables que celles qu'elle propose aux mmes Points de Vente Agrs au titre de tout autre tlphone mobile, y compris les remises, rabais, droits de retour et incitations la vente. Orange convient en outre de proposer l'ensemble du personnel commercial qui vend ou active des Produits Agrs des commissions sur les ventes ou d'autres incitations la vente qui soient identiques ou plus favorables qu l'ensemble des incitations la vente qu'elle propose au personnel commercial qui vend ou active tout autre tlphone mobile .

    Par ailleurs, Apple entend limiter les exportations : Dans la mesure autorise par le droit applicable, Orange prendra toutes les mesures ncessaires pour veiller ce que ni Orange ni aucun Point de Vente Agr ne vende des Produits Agrs un acheteur qui entend exporter ceux-ci des fins de vente en dehors du Pays Agr 22.

    Cette disposition a t complte par larticle 5.2 du contrat dadhsion qui prvoit que : Compte tenu du fait que le Pays Agr fait partie de l'Espace conomique europen ( EEE ), les parties reconnaissent qu'Orange peut vendre les Produits Agrs aux clients d'un autre pays de l'EEE sauf si Apple s'est rserv ou a rserv un autre distributeur, titre exclusif, l'autre pays de l'EEE concern. Si Apple s'est rserv ou a rserv un autre distributeur, titre exclusif, un autre pays de l'EEE, les restrictions imposes aux ventes de Produits Agrs vers cet autre pays concern : (i) s'appliqueront uniquement concernant les ventes actives (telles que dfinies par les Lignes directrices de la Commission europenne sur les restrictions verticales (2000/C291/01) qui accompagnent le Rglement (CE) de la Commission europenne n 2790/1999 sur l'application de l'article 81(3) du Trait CE aux catgories d'accords verticaux et de pratiques concertes (les Lignes Directrices ) ; et (ii) n'interdiront pas Orange de procder des ventes passives (telles que dfinies dans les Lignes Directrices) de Produits Agrs aux clients du pays concern, y compris en rponse des demandes non sollicites de ces clients .

    3. Les contrats conclus entre Apple et les distributeurs de dtail agrs

    Le premier iPhone (2G) ntait distribu quau sein du rseau monomarque dOrange.

    A loccasion du lancement de liPhone 3G, la distribution a t largie un rseau de distribution slective mis en place par Apple et comprenant, outre les agences France Telecom, les boutiques Orange (Mobistores) et les magasins Photostation et Photoservice, ainsi que des distributeurs multimarques : les magasins FNAC, Darty, The Phone House, Boulanger, Auchan, Carrefour et Tel and Com. Apple a donc sign avec chacun deux un contrat de distribution slective. Ces contrats ont une dure dun an.

    Ces distributeurs se fournissent auprs dOrange, grossiste exclusif dApple en France.

    Ils doivent satisfaire aux critres de distribution slective dfinis par Apple. Ces points de ventes signent avec Apple un contrat de distribution spcifique liPhone. Apple informe Orange des points de vente admis dans son rseau de distribution slective. Les reprsentants de la socit Apple ont dclar que ce choix procdait dune volont de protger la marque Apple et avait t souhait du fait de la technicit du produit . Les critres relatifs la personne morale sont reproduits ci-dessous, dans leur version de mai 2008 annexe au contrat de distribution Orange/Apple23 :

    1.1. La personne morale doit :

    a. tre un Revendeur Agr d'Apple existant ; et 22 Cote 3518. 23 Cotes 3528 et suivantes.

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    b. 70 % de son chiffre d'affaires au cours de chaque exercice trimestriel prcdent d'Apple, tel que rgulirement dclar, doit provenir des ventes de produits Apple et d'accessoires Apple ou ledit Revendeur Agr Apple doit acheter auprs d'Apple des produits Apple hauteur d'au moins 5 millions d'euros au cours de chaque exercice trimestriel d'Apple ; ou

    1.2 La personne morale doit tre un Oprateur de Rseau ou une filiale dtenue 100 % et cette filiale doit porter exclusivement la marque du Partenaire de Rseau concern ; ou

    1.3 La personne morale doit :

    a. avoir gnr au moins 70 % de son chiffre d'affaires au cours de l'exercice trimestriel prcdent, tel que rgulirement dclar, grce des services et produits Telecom ; et

    b. disposer d'une couverture nationale ; et

    c. disposer, en permanence, de la gamme complte des offres de services de l'oprateur de rseau disponible avec l'iPhone ; ou

    1.4 La personne morale doit participer un ou plusieurs Programmes distributeur iPhone ; ou

    1.5 La personne morale doit vendre des iPods, des Macs Apple et des services et produits de tlphonie mobile de l'Oprateur de Rseau en France ; et

    a. au moins 30 % du chiffre d'affaires de la personne morale rgulirement dclar au cours de l'exercice trimestriel prcdent sur des lecteurs MP3 doit provenir de la vente des iPods d'Apple ; et

    b. au moins 30 % du chiffre d'affaires de la personne morale rgulirement dclar au cours de l'exercice trimestriel prcdent sur des services ou produits de tlphonie mobile doit provenir des ventes d'un Oprateur de Rseau ; et

    c. disposer d'une couverture nationale ; et

    d. disposer, en permanence, de la gamme complte de programmes de services de l'Oprateur de Rseau disponible avec l'iPhone.

    Ces critres relatifs la personne morale sont complts par des critres relatifs aux points de vente, au site, lagencement de la boutique, aux lments promotionnels, au personnel, etc.

    Le contrat Authorized iPhone Reseller Agreement , sign entre Apple Sales International et la FNAC le 25 juillet 2008, figure au dossier24. Les critres de slection y sont prsents de faon lgrement diffrente de ceux exposs ci-dessus. Les reprsentants de la FNAC ont t interrogs sur ce contrat : Ce contrat suppose que nous vendions un certain nombre dabonnements Orange et un certain nombre diPods. Ce type de contrat est totalement inhabituel. Aucun autre constructeur na mis en place un tel systme de distribution slective. Les seuils de 30 % qui figurent dans les critres de distribution slective sont trs infrieurs aux poids rels des deux marques dans nos ventes, et ce critre ne nous pose pas de problme et na pas modifi nos comportements, ou nos actions commerciales. () Sagissant dOrange, leur part de march (en volume) est de 40-50 %. Un distributeur qui propose des abonnements Orange et des iPods atteint facilement les seuils de 30 % pour chacune de ces marques .

    4. Les contrats de distribution conclus entre Orange et les distributeurs indpendants agrs par Apple

    Des contrats de distribution ont t signs entre Orange France et les distributeurs indpendants agrs par Apple. Orange a fourni, dans le cadre de linstruction, plusieurs exemplaires de ces

    24 Cotes 1620 et suivantes.

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    contrats ont t verss au dossier par Orange 25. Leur dure de validit stend du jour de leur entre en vigueur jusquau 1er juillet 2009. Ils peuvent tre reconduits avec laccord des parties.

    La clause 3 du contrat de distribution impose au distributeur de ne se fournir qu exclusivement et directement auprs dOrange. Le revendeur ne pourra acheter les Produits autoriss auprs dautres sources dapprovisionnement sans laccord crit et pralable dOrange, et devra les revendre exclusivement dans les points de vente autoriss situs sur le territoire [la France] .

    De plus, larticle 5.4 stipule que: le revendeur ne commercialisera pas les terminaux avec une offre de tlphonie qui nest pas celle dOrange. Nonobstant ce qui vient dtre prcis, le Revendeur pourra vendre les Terminaux nus mais dont la carte SIM sera bloque sur le rseau Orange .

    Les reprsentants de la socit Orange26 ont justifi cette stipulation par des considrations dordre technique : Pour des raisons techniques, le prix comprend une souscription une ligne mobicarte qui est offerte. Pour activer le tlphone il faut sinscrire sur iTunes. Pour des raisons de compatibilit technique, il faut pour activer le tlphone une carte SIM Orange. On connecte le tlphone sur le site dApple. Une fois que cette connexion est faite, on peut demander le dsimlockage. Cest ce qui explique que la mobicarte est obligatoire. Une fois le tlphone activ, il est possible de demander le dsimlockage. 100 euros sont facturs pour le dsimlockage. Le dsimlockage est plus cher en raison de la complexit de la manipulation qui est au surplus ralise par Apple. Ces 100 euros sont reverss Apple. Ce mcanisme est prvu dans le contrat .

    Ces dclarations nont pas t confirmes par Apple, qui a fait observer dans ses critures27 que : dans le nouveau systme, et malgr une erreur de plume dans le contrat, Apple est en mesure de confirmer formellement qu'il ne se voit plus reverser en pratique le montant du dsimlockage effectu par les revendeurs agrs. En effet, dans le nouveau business model mis en place, Apple ne supporte plus de risques justifiant le reversement des frais de dsimlockage .

    Par ailleurs, la sortie de liPhone 3G, les consommateurs qui souhaitaient acheter un terminal sans abonnement aux services Orange ont pu se voir opposer un refus de vente, au motif que le terminal ntait plus disponible et constater que les terminaux taient pourtant distribus aux nouveaux clients Orange. Cet tat de fait na pas t contest par Orange dont les reprsentants ont dclar au cours de leur audition : [n]ous navions pas la volont de rserver les iPhones nos nouveaux clients. Localement, il y a eu malheureusement des exemples de boutiques dont les vendeurs ont pu draper , mais de manire localise. Nous avions pourtant fait circuler des consignes pour empcher ces pratiques . SFR a galement dclar : Nous avons reu, lors du lancement de liPhone 3G, de nombreuses alertes nous informant des refus de ventes caractriss que subissaient des clients lors de leur demande dacquisition dun terminal nu. De mme, il semble que le modle le plus recherch (iPhone 3G 16 Gb) soit galement plus difficile obtenir en vente nue .

    De plus, la socit SFR a transmis au Conseil un change de correspondances intervenues avec la socit Orange, dont il ressort que cette dernire a mis en demeure la socit SFR de mettre fin sa politique de subvention des iPhones vendus sans abonnement Orange pour les consommateurs qui souhaitaient associer liPhone des services de tlphonie proposs par SFR. Sur ce point, la socit Orange a dclar28 : Orange sest tonn auprs de SFR de cette pratique de parasitisme de son exclusivit et de ses investissements, en la sommant de sexpliquer .

    La clause 5.8 complte le dispositif en prvoyant un mcanisme dalerte portant sur les importations diPhones : le revendeur informera promptement Orange de tous Produits Autoriss imports ou supposs imports par un tiers portant les marques de Apple et qui nont pas t

    25 Annexe 3 du courrier du 28 octobre 2008, cotes 2533 et suivantes. 26 Procs-verbal daudition de la socit Orange du 2 octobre 2008, cote 797. 27 Cote 4852. 28 Cote 3862.

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    distribus ou fabriqus par Apple pour la vente sur le Territoire [la France], ds quil aura connaissance de limport 29.

    Enfin, Orange communique ses distributeurs des prix de vente conseills pour liPhone. Aucune stipulation contractuelle nimpose cependant le respect de ces prix conseills. Le contrat prvoit30 que le revendeur reste libre de dterminer le prix de revente des iPhones 3G. Les revendeurs sont uniquement contraints par un prix de revente maximum communiqu par Orange et quils ne peuvent dpasser.

    II. Discussion

    A. Sur la Procdure

    La socit Apple Europe Ltd estime que la demande de mesures conservatoires ne serait pas recevable au motif quelle serait dirige lencontre de la socit Apple Europe Ltd, qui est trangre aux accords relatifs liPhone. Elle considre que le Conseil de la concurrence ne peut tendre, de sa propre initiative, la demande de mesures conservatoires aux autres filiales du groupe Apple ou la maison mre Apple Inc, ces socits nayant pas t rgulirement cites par Bouygues Telecom dans sa saisine initiale.

    Cependant, le moyen de la socit Apple Europe Ltd manque en fait puisque le saisissant, qui ne pouvait pas connatre pralablement linstruction et louverture du contradictoire lidentit prcise des filiales du groupe Apple signataires des accords litigieux, a explicitement demand, dans un courrier du 27 octobre 2008, que linstruction et la demande de mesures conservatoires soient tendues aux socits Apple France, Apple Sales International, Apple Europe et Apple Inc.

    En tout tat de cause, en application des dispositions de larticle L. 464-1 du code de commerce, le Conseil de la concurrence, qui est saisi in rem, peut, aprs avoir mis les parties en cause en mesure de se dfendre dans le cadre du dbat contradictoire, prendre les mesures conservatoires qui lui apparaissent ncessaires. Il sensuit que le Conseil nest pas tenu par la nature des demandes du saisissant, quil sagisse de la qualification des pratiques dnonces, du champ de lanalyse ou de lidentit des parties mises en cause dans la saisine initiale. Le fait que la saisine ne visait initialement que Apple Europe ne fait donc pas obstacle ce que le Conseil, qui a communiqu celle-ci aux socits Apple France, Apple Sales International, Apple Europe et Apple Inc. et les a entendues en sance, puisse examiner les faits dont elles sont les auteurs et, le cas chant, prononcer des mesures conservatoires leur encontre.

    Les socits Apple, France Telecom et Orange France dnoncent encore le calendrier de la procdure et le volume des observations dposes par la saisissante. Elles estiment quelles nont pas dispos du temps ncessaire pour rpondre aux observations crites de Bouygues Telecom du 10 novembre 2008. Elles demandent le retrait de ces critures ainsi que des pices dposes par la saisissante le 19 novembre 2008.

    Il convient cependant de rappeler que, selon une jurisprudence constante du Conseil, confirme par la cour dappel de Paris, notamment dans ses dcisions du 12 fvrier 2004 et du 28 janvier 2005, la procdure mise en uvre pour instruire une demande de mesures conservatoires doit tre adapte lurgence tout en respectant le principe du contradictoire. Linstruction doit permettre, dans un temps ncessairement restreint, de runir le plus dlments possibles afin dexaminer le bien-fond de la demande. De ce fait, le volume des observations dposes par les parties ne saurait lui seul justifier quelles soient cartes, ds lors que les parties ont dispos dun temps suffisant pour y rpondre.

    29 Cote 2651. 30 Clause 5.11 du contrat de distribution entre Orange et les revendeurs indpendants.

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    En lespce, la socit Bouygues Telecom a dpos ses observations le 10 novembre 2008 conformment au calendrier fix par le rapporteur gnral. Orange France, France Telecom et Apple ont dispos dun dlai suffisant pour y rpondre, dans le respect du dlai contradictoire et des droits de la dfense, la date de dpt de leurs propres observations ayant t fixe initialement au 17 novembre, puis reporte, leur demande, par le rapporteur gnral, au 19 novembre 2008. Il ny a donc pas lieu dcarter du dossier les observations dposes par Bouygues Telecom le 10 novembre. Quant aux pices dposes par Bouygues Telecom le 19 novembre, Orange France, France Telecom et Apple ont dispos avant la date de la sance du conseil du 25 novembre dun dlai suffisant pour y rpondre par des observations crites ou orales en sance. Il ny a donc pas lieu dcarter non plus du dossier les pices complmentaires dposes par Bouygues Telecom le 19 novembre.

    B. Lapplicabilit du droit communautaire

    Selon les lignes directrices de la Commission europenne relatives la notion daffectation du commerce figurant aux articles 81 et 82 du trait communication de la Commission (JOCE n C 101 du 27 avril 2004), les articles 81 et 82 du Trait s'appliquent aux accords horizontaux et verticaux et aux pratiques abusives d'entreprises qui sont susceptibles d'affecter le commerce entre tats membres. Pour tre prise en compte, cette affectation doit pouvoir tre sensible.

    Le Conseil a de mme rappel, dans ses dcisions n 06-D-09, n 06-D-37 et n 07-D-27, que trois lments tablissent que des pratiques sont susceptibles daffecter sensiblement le commerce intracommunautaire : lexistence dchanges entre tats membres portant sur les produits faisant lobjet de la pratique, lexistence de pratiques susceptibles daffecter ces changes et le caractre sensible de cette possible affectation.

    Sagissant des accords couvrant un seul tat membre, les lignes directrices prcites rappellent quils ont, par leur nature mme pour effet de consolider des cloisonnements de caractre national, entravant ainsi l'interpntration conomique voulue par le trait. La capacit qu'ont ces accords de cloisonner le march intrieur est due au fait que, normalement, les entreprises qui participent des ententes dans un seul tat membre doivent se protger contre les concurrents d'autres tats membres (). En principe, ces accords peuvent galement, par leur nature mme, affecter sensiblement le commerce entre tats membres, compte tenu de la couverture de march requise pour assurer l'efficacit de ces ententes .

    En lespce, les contrats mis en cause accordent Orange une exclusivit sur lensemble du territoire franais et contiennent des clauses visant viter tout contournement de cette exclusivit par le biais dimportations en provenance dautres pays, parmi lesquels figurent les autres Etats membres de lUnion europenne, et protger, de mme, les exclusivits accordes par Apple dans les autres pays. Ainsi, il est stipul, dans les contrats signs entre Orange et les distributeurs agrs, que ceux-ci achteront les iPhones exclusivement et directement auprs dOrange. Le revendeur ne pourra acheter les Produits autoriss auprs dautres sources dapprovisionnement sans laccord crit et pralable dOrange, et devra les revendre exclusivement dans les points de vente autoriss situs sur le territoire [la France] 31 . Une clause prvoyant un mcanisme dalerte portant sur les importations diPhones complte le dispositif : le revendeur informera promptement Orange de tous Produits Autoriss imports ou supposs imports par un tiers portant les marques de Apple et qui nont pas t distribus ou fabriqus par Apple pour la vente sur le Territoire [la France], ds quil aura connaissance de limport 32.

    En ltat de linstruction, ces contrats paraissent donc susceptibles daffecter sensiblement le commerce intracommunautaire. Ils doivent faire lobjet dune apprciation au regard non seulement du droit national mais aussi du droit communautaire de la concurrence.

    31 Article 2 du contrat entre Orange et les distributeurs. 32 Article 5.8 du contrat entre Orange et les distributeurs.

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    C. Sur les marchs pertinents et la position des socits mises en cause sur ces marchs

    Quatre marchs sont susceptibles davoir t affects par les pratiques dnonces :

    - le march des services de tlphonie mobile ;

    - les marchs amont et aval des terminaux ;

    - le march des baladeurs numriques ;

    - le march du tlchargement payant de musique en ligne.

    1. Sur le march des services de tlphonie mobile

    Le Conseil a dj considr, notamment dans la dcision n 05-D-65 du 30 novembre 2005, que les services de tlphonie mobile constituaient un march pertinent. Cette dlimitation nest pas dbattue par les parties et il ny a pas lieu de la remettre en cause ce stade de linstruction, en dpit des volutions constates rcemment, en particulier limportance prise par les changes de donnes par rapport aux communications vocales et le dveloppement du haut dbit mobile.

    A la fin du mois de septembre 2008, Orange France estime que 43,5 % du parc de clients dun service de tlphonie mobile sont abonns son rseau33 contre 17,3 % pour Bouygues Telecom et 33,7 % pour SFR. Orange France est la filiale de loprateur historique des tlcommunications en France et appartient un groupe denvergure mondiale, prsent non seulement sur le march des services de tlphonie mobile mais galement sur de nombreux marchs connexes des communications lectroniques (accs Internet, tlvision sur Internet, communications fixes, etc.). Il en est toutefois de mme pour SFR. A ce stade de linstruction, il nest dailleurs pas soutenu quOrange France occuperait une position dominante sur ce march.

    2. Sur les marchs des terminaux

    La socit Bouygues Telecom estime que liPhone 3G appartient la catgorie des smartphones et que ceux-ci doivent tre distingus des autres terminaux en raison des particularits matrielles objectives du produit (fonctionnalits multimdia, clavier et/ou cran tactile ; systme dexploitation ouvert), et de ses fonctions spcifiques (utilisation des fonctions mails et internet mobile, tlchargement dapplications). De plus, la saisissante fait valoir quil existe, au sein des smartphones, un cart de prix important entre les produits dentre de gamme et les produits haut de gamme, et que ces derniers pourraient constituer eux seuls un march pertinent. Elle produit une tude conomique selon laquelle Apple dtiendrait sur un march ainsi dlimit une part de march comprise entre 53 et 68 % et y occuperait une position dominante.

    Sagissant ensuite de la dfinition gographique du march, la saisissante expose que le march voqu au paragraphe prcdent est de dimension nationale, dans la mesure o les distributeurs oprent lchelle nationale dans des conditions homognes (prix, publicit, CGV). De plus, elle observe que les terminaux sont majoritairement distribus dans le cadre dune souscription des offres de services des oprateurs, distribus lchelle nationale pour un service couvrant essentiellement le territoire national. Sur le march national des smartphones haut de gamme, la socit Bouygues Telecom estime34 que la part de march dApple est de 53 % au 15 aot 2008 et quelle pourrait atteindre 68 % la fin de lanne 2008.

    33 Rpartition en volume du parc de clients mobiles, source Orange. 34 Etude de march ralise par le cabinet Tera consultants sur la base des donnes transmises par linstitut GFK.

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    Pour Apple, le rapport conomique produit par Bouygues Telecom serait entach de nombreuses erreurs mthodologiques. Elle estime en premier lieu que ltude applique de manire errone le test du monopoleur hypothtique dans la mesure o elle analyse les carts de prix de 10 % de manire statique et non de manire dynamique, alors que cest bien une analyse dynamique, tendant apprhender les ractions des consommateurs une augmentation des prix de 10 % qui serait au centre du test du monopoleur hypothtique. Les socits Apple, France Telecom et Orange France exposent ensuite que les auteurs de ltude se sont fonds sur le prix et les volumes de vente des terminaux nus alors que lessentiel des terminaux sont vendus associs une offre de tlphonie mobile et avec une subvention. Cette critique a galement t formule par lArcep.

    Apple soutient que le march pertinent serait celui de lensemble des terminaux mobiles. Sa dimension serait mondiale ou europenne. Au soutien de son analyse, elle renvoie des dcisions rcentes rendues par la Commission europenne dans le cadre du contrle des concentrations35. France Telecom et Orange France soulignent galement que la Commission na pas distingu, dans sa dcision Nokia/Navteq du 2 juillet 2008, un march des smartphones, mais a au contraire retenu un march global des terminaux de tlphonie mobile. Sur ce march, Apple observe quelle est un nouvel entrant qui ne disposerait que dune part de march infrieure 1 %. Apple prcise encore36 quen tout tat de cause, liPhone ne reprsente que 12 14 % des ventes de terminaux dont il pourrait tre considr quils appartiennent la catgorie des smartphones.

    Le Conseil rappelle rgulirement (cf. notamment les dcisions n 06-D-03 et 07-D-44) que lorsquil est dmontr que le consommateur final a systmatiquement recours des distributeurs intermdiaires, il est pertinent de distinguer le march amont de lapprovisionnement du march aval de la distribution de ces produits.

    En lespce, le premier met en relation les constructeurs avec les distributeurs de terminaux, quil sagisse des distributeurs indpendants ou des oprateurs de tlphonie mobile. Les seconds ont pour offreurs les distributeurs des terminaux sur les diffrents territoires nationaux et pour demandeurs les consommateurs finaux.

    Sur le march amont

    Sur le march amont, les distributeurs, qui reprsentent la demande, doivent tre en mesure de proposer une gamme diversifie de produits aux clients finaux. Il ne peut donc tre exclu, ce stade de linstruction, que de leur point de vue, il existe une catgorie de terminaux qui, du fait des caractristiques techniques objectives qui leur sont spcifiques, doivent ncessairement tre inclus dans leur offre auprs des consommateurs finaux.

    Comme il a t dit au paragraphe 0, les terminaux rsultant de la convergence des tlphones mobiles et des PDA, appels smartphones par le saisissant et dautres acteurs du march, ou PDA communicants par dautres, par exemple par le paneliste GfK, cumulent, ainsi que lArcep lexpose dans son avis du 4 novembre 2008, des fonctionnalits (connectivit wifi, GPS, appareil photo, lecteur vido/MP3) que des terminaux plus classiques proposent de manire isole ou sans ergonomie adquate, et les associent par un systme dexploitation ddi. Diverses tudes de march font part des spcificits de ces smartphones, tenant notamment leurs caractristiques physiques (ergonomie, cran tactile ou clavier), leur systme dexploitation propre, la diversit dusages en rsultant, centrs, outre la tlphonie, sur linternet mobile (contenus), lcoute de musique, le visionnage de vidos, la navigation par GPS, et la gestion PDA. Ces caractristiques, susceptibles dinduire un usage diffrenci, paraissent suffisamment spcifiques pour rendre ce type de terminal non substituable dautres moins perfectionns, mme si un constructeur comme Nokia souligne quil est difficile de segmenter le march et dclare ne pas faire de diffrence entre la catgorie smartphone et les autres tlphones.

    35 Dcisions de la Commission Nokia/Trolltech du 4 juin 2008 et Nokia/Navteq du 2 juillet 2008. 36 p. 37 des observations de la socit Apple.

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    En revanche, une segmentation plus fine en fonction du prix de vente des terminaux sur ce march ne pourrait tre opre quen fonction des prix de gros ngocis par les distributeurs, qui ne sont pas disponibles au dossier. Au demeurant, aucun enjeu nest attach cette question dans la prsente affaire.

    Par ailleurs, il ne peut tre exclu, ce stade de linstruction, que le march amont soit, compte tenu de la nationalit des diffrents constructeurs et du constat selon lequel les terminaux sont indistinctement vendus dans de nombreux pays au monde, au moins de dimension europenne ou mme mondiale. Dans les dcisions prises rcemment dans ce secteur dans le cadre du contrle des concentrations (Nokia/Trolltech du 4 juin 2008 et Nokia/Navteq du 2 juillet 208), la Commission a ainsi considr que le march gographique prendre en compte stendait au moins lEspace conomique europen (EEE).

    LArcep relve que cinq diteurs offrent des logiciels utiliss par les terminaux mobiles : Symbian, Microsoft, Linux, RIM et Apple. Les estimations de la socit Canalys prsentes ci-dessus au paragraphe 0 font apparatre Nokia, Apple, RIM, Motorola, HTC comme les principaux offreurs de smartphones. La part dApple (qui est prsent la fois sur les marchs ddition des logiciels et sur celui des terminaux) sur le march des smartphones serait estime 17,3 % au troisime trimestre 2008, contre 3,6 % un an auparavant. Le leader du march serait Nokia, avec 38,9 % des ventes mondiales de smartphones au troisime trimestre 2008 contre 51,4 % au troisime trimestre 2007.

    Ces estimations soulignent le dynamisme dun march caractris par un rythme rapide dinnovation. Apple ne fabriquait pas de terminaux avant la mise sur le march de liPhone 2G en octobre 2007. LiPhone 3G nest commercialis que depuis cinq mois37. Plusieurs terminaux prsentant des caractristiques similaires, appels iPhone killers , ont t mis en vente plus rcemment encore, et dautres devraient tre mis sur le march au cours des prochains mois. Si Apple a dpass RIM, fabricant du Blackberry, au troisime trimestre 2008, ce dernier a vu sa part sur un march des smartphones, passer de 10,6 % 15,2 % dans le mme temps.

    Dans un contexte aussi volutif, rythm par des innovations sans cesse renouveles, techniques ou commerciales, le Conseil a dj relev quel point la dlimitation de marchs pertinents est dlicate (cf. notamment les dcisions n 04-D-54 et 08-D-10). De mme, la position des acteurs sur de tels marchs est susceptible dvoluer trs rapidement. La Commission europenne, dans les dcisions rcentes cites par les parties, Nokia/Trolltech du 4 juin 2008 et Nokia/Navteq du 2 juillet 2008, constatant lvolution rapide des principales fonctions des terminaux et des positions de march des principaux acteurs a prfr laisser ouverte la dlimitation des marchs pertinents en cause.

    En lespce, il peut cependant tre relev qu ce stade de linstruction, il est peu probable, compte tenu des chiffres exposs ci-dessus, quApple occupe, ce jour, sur un march amont des terminaux mobiles, pertinent de point de vue des pratiques dnonces, une position dominante dont il serait susceptible dabuser.

    Sur le march aval

    Sur le march aval, les terminaux sont vendus au consommateur final quasi-exclusivement en association avec un service de tlphonie mobile. Ce point est relev par la plupart des acteurs du march, en particulier par Orange. LArcep avance dans son avis que la part des terminaux vendus nus serait infrieure 5 %. De ce fait, dans la plupart des cas, les consommateurs sont amens comparer les caractristiques de biens systmes forms du terminal et de loffre de services associe ; ce sont ces ensembles qui sont considrs comme substituables ou non du point de vue des demandeurs. Le march aval des terminaux est ainsi difficilement dissociable du march des services de tlphonie mobile et prsente une dimension nationale, les services de tlphonie tant spcifiques aux diffrents territoires nationaux.

    37 11 juillet 2008 aux Etats-Unis et 18 juillet 2008 en France.

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    La Commission europenne et le ministre de lconomie se sont prononcs dans plusieurs dcisions sur les contours dun march de la distribution de produits et services de tlphonie mobile et ont retenu un march global sans distinguer en fonction du type de produits et services distribus ni en fonction du type de distributeurs (GSA, spcialistes, mono-marque, multimarques)38. Dans sa lettre sur lopration France Telecom / CET en date du 4 janvier 2008, le ministre explique que sil est possible de se procurer sparment des abonnements et des terminaux, une trs grande majorit des actes commerciaux porte sur lacquisition simultane, dans le cadre dun coffret, dun service de communications mobiles (offre prpaye ou forfait) et dun terminal, le terminal tant alors propos des conditions tarifaires beaucoup plus intressantes que sil tait vendu sparment ( terminal nu ) .

    Seule ltude GfK sur le segment smartphones et PDA communicants produite par la saisissante value, sur ce segment des PDA et smartphones, la part des terminaux vendus sans carte SIM prs de 20 %. Cette contradiction pourrait cependant sexpliquer par labsence, dans lchantillon pris en compte par GfK, des rseaux de distribution intgrs des trois oprateurs mobiles.

    Les caractristiques des terminaux eux-mmes sont, certes, un lment du choix des consommateurs. Ces derniers arbitrent, dune part, entre les oprateurs eux-mmes, la gamme de terminaux offerte par chaque oprateur pouvant prsenter certaines diffrences. Ils choisissent dautre part, au sein de loffre dun mme oprateur, la formule qui leur convient le plus. Dans lavis rendu pour la prsente affaire, lArcep cite une tude qui place le choix du terminal la cinquime place des critres de choix des consommateurs. Toutefois, les caractristiques des offres de services de tlphonie mobile des diffrents oprateurs interfrent dans ce choix des terminaux, compte tenu de leurs spcificits. De mme, lexistence de cots de changement doprateur lis aux forfaits avec engagement et aux programmes de fidlisation peut contraindre le choix dun terminal sil nest pas offert par tous les oprateurs. En revanche, au sein des offres dun mme oprateur, la substituabilit dun terminal avec un autre nest pas fonction des offres de services mobiles dans la mesure o celles-ci ne sont pas lies en exclusivit un terminal. Il a par exemple t vu ci-dessus que les forfaits conus spcifiquement pour liPhone 3G taient nanmoins accessibles aux acqureurs dautres marques de terminaux.

    Cependant, les lments relevs ci-dessus sur les smartphones ou PDA communicants suggrent, que du point de vue des consommateurs, il existe une catgorie de terminaux qui prsentent des caractristiques techniques objectives spcifiques telles quils les considrent comme non substituables aux autres terminaux. Il ne peut donc tre exclu, ce stade de linstruction, que le fait quun distributeur serait le seul offrir, sur le march aval, un tlphone prsentant de telles caractristiques, aurait un effet sur son pouvoir de march, mme si celui-ci est galement fonction de la comptitivit de son offre de services de tlphonie mobile. Lapparition sur le march daccords dexclusivit de longue dure entre un fabricant et un oprateur, tel que celui entre Orange et Apple m