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MAGAZINE D’A PRIORI ÉPICURIENS octobre2012 N°3 MAGAZINE D’A PRIORI ÉPICURIENS N°9 > MATHIEU VIANNAY Au nom de la Mère. printemps2014

Bon Gout 9

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Bon Gout - Printemps 2014

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2 BON GOÛT – Numéro 9 – printemps 20142

AU GOUVERNAILMathieu Viannay : Au nom de la Mère Par BRUNO METZLÉ

Bon Goût a désormais sa place

à la table des média. Davantage,

plébiscité par un lectorat avide de

bon vivre qui dévore ses rubriques,

Bon Goût séduit aussi de plus en

plus d’entrepreneurs de renom qui

“se mettent à table” pour transmettre

leur recette du succès. Il est temps

d’arrêter de mépriser le succès en

l’invitant à notre table ! Bon goût fait

ainsi office de table d’hôtes, autour

de laquelle les talents s’expriment et

se passionnent pour redonner l’envie

en ces temps de disette. Susciter

l’appétit, telle est la vocation de Bon

Goût, au sens propre comme au sens

figuré. Et comme l’appétit vient en

mangeant...

Comme le dit Jacques Brel, “on finit

toujours par se mettre un jour autour

d’une bonne table”.

• Philippe Florentin •

• Quand on reprend une institution aussi reconnue que la Mère Brazier, la légende des mères lyonnaises, quelle est votre liberté d’action ?

Ce fût un super challenge de reprendre cette maison tout en se faisant un nom. En réalité j’ai mis mes pieds dans des chaussons. Je n’ai rien voulu brusquer. La Maison m’a adopté. Maintenant, plus ça va, plus je m’éloigne de la cuisine de la Mère Brazier, mais sans rien trahir. Par exemple, avec le Chou farci, je suis dans l’esprit maison très proche des spécialités tout en apportant ma touche personnelle. En fait je n’ai pas de contrainte. Vous voyez, j’arrête la Poularde de Bresse demi-deuil au printemps car on ne trouve plus de truffe fraîche et je la remplace par la Poularde en vessie. Je fais la cuisine que j’aime, je ne me force pas à rester dans un concept ou dans un devoir de mémoire. Sur ma carte, les spécialités lyonnaises ou d’inspiration sont présentes, comme le Pâté en croûte, ou la Timbale de ris de veau et à côté je peux faire une cuisine tout en fraîcheur. La Mère Brazier est immuable et ça me va bien. C’est vrai que ce serait un rêve que cette maison retrouve 3*.

• Après la sortie de l’édition 2014 du Guide Michelin, en dehors de Paul Bocuse, vous êtes le chef de file de la gastronomie à Lyon ?

Commenter les sorties de guides, qui a une étoile, qui n’en n’a pas, ce n’est pas mon truc, mais je serais très touché s’il m’arrivait d’en perdre une. Il faut relativiser les avis des guides gastronomiques, surtout ceux qui écrivent mais qui ne viennent pas

manger. Pour moi les avis et notes de sites tels que Trip advisor, faits par les clients, et ceux du Guide Michelin sont les plus importants.

• Comment se porte la gastronomie à Lyon ?

Aujourd’hui, je pense qu’on mange mieux à Lyon qu’il y a 20 ans. A Lyon au Michelin 2014, il y a 16 Bib gourmands, 12 restaurants 1*, 2 restaurants 2**, et 1 restaurant 3***, et si on étend Lyon au Beaujolais, à la Bresse et à la région, Rhône Alpes est la plus étoilée après la région Ile de France. C’est un signe de vitalité.

• Que pensez-vous de la revendication de Lyon en tant que Capitale Mondiale de la gastronomie ?

Oui je pense que Lyon est légitime pour revendiquer le titre de Capitale de la Gastronomie. Il faut englober Lyon et sa région, riche d’une histoire et d’une tradition gastronomiques. Quand on pense gastronomie à Lyon, on assimile Point à Vienne, Pic à Valence, Blanc à Vonnas, Troisgros à Roanne… Lyon est au centre de tout cela.

• Y a t-il une tendance actuelle que vous ne partagez pas ?

Je n’ai pas le snobisme de l’origine du produit. Les produits doivent être sélectionnés sur le goût, pas sur leur origine. Une viande maturée peut venir de n’importe où pourvu qu’elle soit bonne ; qu’elle provienne d’un bœuf Wagyu ou non. Il faut arrêter de se plaindre, il faut être fier de notre pays. En France nous avons tout autour de nous des produits fabuleux. Il faut y mettre le prix. Moi je discute toujours la qualité, mais jamais le prix.

• Quelles sont pour vous les qualités pour être un grand chef ?

Une énorme exigence. C’est aussi une qualité essentielle pour être Meilleur Ouvrier de France (MOF). Moi, j’ai besoin de travailler avec des gens qui ont envie, qui aiment ça. Pour entrainer son équipe, il faut avoir des qualités humaines, savoir apprécier l’autre, avoir le sourire, avoir de l’humour. Dans le travail il y a des moments où il faut être sérieux et des moments où on peut être décontracté.

• Les chefs sont réputés pour être des hommes de caractère, à votre avis pour quelle raison ?

Si un rouage ne marche pas, c’est toute la machine qui se grippe et au final, c’est le client qui en fait les frais. Pendant le service, c’est très militaire. Un bon service doit être fluide. Je suis là avec mon chef et mon second pour mettre de l’huile dans les rouages, et je peux prendre n’importe quel poste à tout moment.

• Quel conseil donnez-vous à quelqu’un qui rejoint votre équipe ?

Encore l’exigence. On n’envoie pas quelque chose qui n’est pas parfait. Il faut savoir combien le client paye. Je leur dis souvent, et toi tu serais content de payer pour ça ?

• Mathieu Viannay, quelles sont vos racines culinaires et vos inspirations ?

Mes racines je les ai acquises chez Faugeron et chez Jean Pierre Vigato (Apicius) à Paris. Les deux chefs produisent une cuisine bourgeoise gourmande, portée sur le produit. Chez eux, pas de menu, on y mange exclusivement à la carte. C’est pour moi le signe d’un grand restaurant.Mes inspirations viennent aussi du voyage, des autres restaurants, du marché, des étalages. Si je trouve un nouveau goût à l’étranger, je peux le rapporter dans un plat.

• Vous privilégiez aussi le produit, comme vos Maîtres. De quelle manière ?

D’abord dans le choix de mes fournisseurs : la Boucherie Centrale aux Halles de Lyon, Bordier, Viguier, Lassalle et la Mère Richard pour les fromages, la poissonnerie Vianey (ndlr rien à voir) à la Croix Rousse, le Chapon bressan à Montrevel en Bresse. J’aime les grosses pièces à partager, elles ont un goût différent ; une belle pièce de viande, une volaille comme la Poularde demi deuil, un beau poisson ou un foie gras entier rôti par exemple. Avant il y avait la voiture de tranche avec des foies de veau entier. C’était superbe !

Directeur de la publication : Philippe Florentin

Directeurs de la rédaction : Bruno Metzlé - Pascal Auclair

Directeur artistique : Pierre Berger

Maquette : Agence Créadequat

Photographies : Pascal Auclair - Jean-Pierre Lemoine Frédéric Durantet - Stephane de Bourgies Mathieu Celard - Denys Clément - Amélie Tondu Julie Ansiau - Stéphanie Biteau

Journalistes : Bruno Metzlé - Pascal Auclair

Ce numéro a été tiré à 80 000 exemplaires sur papier offset 60 g qualité supérieure. Imprimé par Roularta printing (Belgique). N° ISSN : 2260-975X

BON GOÛT est édité par Rest’Inov 1 impasse de l’Église, 69400 Limas

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A l’instar de la Côte d’or à Saulieu et de la Pyramide à Vienne, La Mère Brazier renait à Lyon comme le phœnix. Mathieu Viannay qui en a repris les rênes il y a 6 ans est aujourd’hui une des figures de proue de la gastronomie lyonnaise.

Mathieu Viannay

Brazier Wine Bar

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• Quels sont vos plats préférés ?

Les plats de début de saison, avec les premiers produits de saison.

• Un produit détesté ? Le melon.

• Votre vin préféré ? Un Gevrey Chambertin 1er cru Clos St Jacques de chez Rousseau. C’est un vin qui se suffit à lui-même. Avec un tel vin, on s’arrête de manger et on boit ! Dans le vin il y a du partage comme dans la cuisine, c’est aussi pour cela que j’ai ouvert le Brazier Wine Bar. Une table d’hôtes dans une cave à vins qui propose une cuisine de bistro avec de belles bouteilles à prix caviste.

• Vos restaurants préférés ?Ceux des copains, les gens que j’aime. Marguin, Viola, Berthod. Marguerite, la dernière fois que j’y suis allé, Tabata m’a fait deux plats exceptionnels. Bise au bord du lac d’Annecy, ou une bonne fondue dans un restaurant à la Clusaz.

• Sur une île déserte ? J’emmène des pommes de terre et du beurre.

• Votre couleur préférée ?Le gris, c’est la couleur de la vie ; ni blanc ni noir. Je suis optimiste et rêveur de nature.

• Qu’est ce que le bon goût pour vous?

Ni trop, ni trop peu.

• Et Nos Bons Plats Chez Vous, qu’est ce qui vous a convaincu d’être partie prenante dans l’aventure ?

C’est le fait de mettre la bonne cuisine à portée du plus grand nombre et n’importe où.

BRAZIER WINE BAR (BWB) 14 rue Royale - 69001 Lyon

Tél. 04 78 23 24 26Table d’hôtes ouverte du mardi au samedi

CHOU FARCI AU PIGEON ET FOIE GRAS, CONSOMME DE VOLAILLE A LA BETTERAVE ROUGE

1 chou frisé1 pigeon royal2 escalopes de foie gras crues

(60g chacune)1 betterave rouge80g de beurre1 échalote

PROGRESSION

Effeuiller le chou, garder les plus belles feuilles pour le chemisage du pochon. Emincer le reste pour faire l’embeurrée.

Blanchir les belles feuilles puis émincer le chou.

PRÉPARER LE PIGEON

Faire revenir légèrement les cuisses puis mouiller à l’eau (à hauteur puis laisser confire sur le bord de la plaque).

Faire le consommé avec la carcasse, les ailerons et le cou. Faire revenir le tout avec une échalote puis mouiller à l’eau à hauteur. Laisser cuire doucement en remuant régulièrement.

Faire rôtir le coffre bien rosé, puis poêler les escalopes de foie gras.

Faire l’embeurrée avec l’émincé (200g de chou + 80g de beurre). Faire le confit de cuisse, émietter puis lier avec un peu de jus de veau. Saler et poivrer.

MONTAGE DU CHOU

Filmer au contact le pochon, chemiser avec les feuilles de chou (bien enlever la côte centrale) puis rouler en couches successives en mettant bien les filets de pigeon au centre.

CONSOMMÉ

Filtrer avec un linge le bouillon de carcasse, récupérer également la cuisson des cuisses puis lier légèrement avec le jus de la betterave rouge crue centrifugée.

DRESSAGE

Chou au centre de l’assiette, consommé de volaille, chips de betteraves et pluches.

RESTAURANT LA MÈRE BRAZIER

12 rue Royale - 69001 Lyon Tél. 04 78 23 17 20

Restaurant gastronomique ouvert du lundi au vendredi

Mousseline de brochet, homard et

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élisée façon tatin, sablé Diamant et sorbet à la Gueuze.

Mathieu Viannay fait recette

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Par PASCAL AUCLAIR

À CHACUN SES GOÛTSUn verre avec… Emmanuel Imberton, le patron militant

Certains se rasent chaque matin devant leur glace avec des desseins présidentiels. D’autres,

comme Emmanuel Imberton, accèdent à la fonction dans un contexte insolite. “Je ne suis ni un homme d’appareil, ni un carriériste. Je suis un entrepreneur militant au service de la cause commune qui est arrivé à la présidence par un concours de circonstances”, lance d’emblée le nouveau président de la Chambre de Commerce et d’Industrie de Lyon. En l’occurrence, le dirigeant lyonnais fait référence au départ précipité de son prédécesseur Philippe Grillot, début décembre 2013 et à la volonté des organisations patronales de trouver un homme de consensus

susceptible d’apaiser les tensions dans le réseau consulaire. “Rien n’était programmé. Mais être entrepreneur, c’est faire face à l’imprévu. J’ai senti qu’il fallait que je réponde présent, sachant que je connaissais déjà bien la maison et les dossiers en ma qualité de premier vice-président”. Cadre supérieur de grands groupes rhônalpins, le DRH de Valeo, de la Ciapem et de Cofradel a découvert les turpitudes de l’entrepreneuriat sur le tard. “A la différence de nombre de dirigeants que je côtoie, je ne suis pas né entrepreneur, je le suis devenu”, confi e-t-il humblement. “J’ai vécu deux OPA et leurs dommages sur le plan social. J’en avais marre de voir l’Homme exclu des préoccupations lors

de prises de décisions actées à Paris”. Ainsi, à 40 ans, il prend en mains sa destinée en rachetant la Cotonnière Lyonnaise, société experte dans les supports d’impression extérieurs, dont il a doublé depuis le chiffre d’affaires (10 millions d’euros) et les effectifs (30 salariés). Une réussite qu’il attribue en partie à la qualité de l’enseignement du centre des entrepreneurs d’EMLYON, satellite de la CCI de Lyon, dont il fut l’élève avant d’en devenir l’un des animateurs. Militant dans l’âme, cofondateur du CELF - un syndicat étudiant libéral - lors de son cursus universitaire à Lyon III, trésorier de Jazz à Vienne, membre infl uent de la CGPME, Emmanuel Imberton entend mettre

Pierre Fanneau

Depuis décembre dernier, ce grand amateur de Côtes-du-Rhône septentrionales préside aux destinées de la CCI de Lyon. Une institution qu’il entend apaiser pour mieux la défendre face aux velléités de réformes gouvernementales.

Philippe Florentin et Emmanuel Imberton

LES BONNES ADRESSES DE… EMMANUEL IMBERTON

Le président de la CCI de Lyon confi e avoir connu sa plus intense émotion culinaire à la table d’Emmanuel Renaut, au Flocon de Sel, sur les hauteurs de Megève. “Je n’oublierai jamais son omble chevalier juste cuit”. De retour dans la vallée, Emmanuel Imberton salive à l’évocation de deux autres chefs étoilés de grand talent : Mathieu Viannay et Patrick Henriroux. “J’organise chaque année l’assemblée générale de mon entreprise chez la Mère Brazier”. Un rituel conclut par l’inimitable Paris-Brest, alors que dans son fi ef de Vienne, à la Pyramide, le dirigeant rhônalpin fait grand cas du suprême de pigeon “sélection Mr Berger”. Plus modestement, Emmanuel Imberton confi e avoir deux cantines : Le Plaisir Gourmand, à Vaulx-en-Velin, pour la cuisine de Far et le Zinc-Zinc Bourse devenu l’annexe de la CCI à l’heure du déjeuner. Enfi n, il fait un clin d’œil à son frère, Philippe, en citant le Cocon, restaurant du Golden Tulip, à Saint-Priest, dont le conseiller technique n’est autre qu’Alain Alexanian.

aujourd’hui toute son énergie à la défense d’une organisation menacée par une réforme dangereuse à ses yeux. “La CCI est irremplaçable. C’est un concentré de compétences incroyable, une institution qui doit son effi cacité au fait d’être gérée par des chefs d’entreprises élus et non par des politiques”.Pour appuyer son exposé, le président évoque des statistiques éloquentes. “Trois ans après sa création, une entreprise française sur deux disparaît si elle n’est pas accompagnée par la CCI, alors que ce taux de survie atteint 90% avec l’aide de nos services”. Il défend aussi les initiatives favorisant l’éclosion d’une grande métropole soutenue par un tissu économique dense et dynamique. “Une métropole forte dans une région forte permettra, à terme, de rivaliser avec Barcelone, Milan ou Francfort”. Malgré ses activités professionnelles et consulaires, Emmanuel Imberton parvient à se réserver six à sept semaines de congés par an, dont deux dédiées à un séjour de remise en forme à Djerba, ainsi que de nombreux week-ends en montagne, dans le Val d’Arly. “J’ai mis en place un management fondé sur une grande délégation et j’ai constitué un comité de direction qui est maintenant très performant. J’ai besoin de me ressourcer en famille. Cela ne m’empêche pas de rester connecté en permanence. La preuve ? Toutes les grandes décisions de ma vie professionnelle ont été prises durant mes vacances !”. Des moments de détente qu’il consacre aussi aux plaisirs de la table. “La gastronomie fait partie de l’écosystème lyonnais. J’ai appris à connaître les chefs, de vrais

entrepreneurs qui prennent des risques et savent transmettre leur savoir-faire aux générations futures”. Epicurien assumé, Emmanuel Imberton

est aussi admiratif du travail des vignerons, notamment des grands domaines des Côtes-du-Rhône septentrionales, au point d’avoir pris une participation dans un groupement foncier viticole. “Pour que mes fi ls conservent le goût du terroir”, affi rme-t-il.

“Amoureux” de la Côte-Rôtie, le président de la CCI de Lyon avoue notamment une tendresse particulière pour la production de Stéphane Ogier, avec une mention pour la cuvée “Belle Hélène” dont le millésime 2009 a été noté 100/100 par le guide Parker. “Un vin exceptionnel”, s’enthousiasme le dirigeant lyonnais, tout aussi ému à l’évocation d’un Hermitage rouge de chez Jean-Louis Chave ou d’un Condrieu Blanc du domaine Georges Vernay. “Pour moi, un grand vin est souvent associé à un grand événement”, conclut Emmanuel Imberton, se refusant toutefois à dévoiler l’appellation dégustée pour célébrer son accession à la présidence de la CCI...

SA RECETTE DE LA RÉUSSITE • Vivre l’instant présent.

• Voir la vie du bon côté car on ne peut pas être chef d’entreprise sans faire preuve d’optimisme.

• Regarder toujours devant soi.

• Savoir s’engager car on n’a rien sans rien.

• Mettre l’Homme au centre de ses projets.

"La gastronomie fait partie de l’écosystème

lyonnais."

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FEMME DE GOÛTD’une énergie débordante, la directrice générale des sites lyonnais de GL Events se bat pour promouvoir sa ville sur l’échiquier international.Une lutte au quotidien qu’elle mène en vantant la Lyon Welcome Attitude... et l’éminence de sa gastronomie.

Anne-Marie Baezner, cœur de lionne

“Une femme doit réussir ses trois vies : professionnelle, familiale et conjugale. Jusqu’à présent, j’ai eu

la chance de pouvoir tout concilier...”. Mariée, mère de deux grands enfants, Anne-Marie Baezner regrette juste que les journées n’aient que 24 heures ! Originaire de Bizerte, de famille italienne, à Lyon depuis ses premières couches-culottes, cette diplômée de Sciences-Po Paris a fait son apprentissage en tant qu’auditrice chez Arthur Anderson avant de “rouler” sa bosse durant 20 ans au sein du groupe Renault Trucks, du contrôle de gestion à la direction de la communication. A un carrefour de sa vie, Anne-Marie Baezner prend le chemin de GL Events, en 2006. “Un heureux concours de

circonstances. J’avais eu l’occasion de côtoyer Olivier Ginon. Il m’a convaincu de rejoindre son staff. Je ne le regrette pas...”, confi e-t-elle, impressionnée par le personnage “homme de terrain visionnaire doté d’une extraordinaire qualité d’écoute”. Directrice générale des sites lyonnais de GL Events, Anne-Marie Baezner gère aujourd’hui plus de 150 000 mètres carrés répartis entre Eurexpo, le Centre des Congrès de la Cité Inter-nationale, la Sucrière et le Château de Saint-Priest. “On accueille environ 500 manifestations par an et 1,5 million de visiteurs pour un chiffre d’affaires global de l’ordre de 50 millions d’euros”. Parmi ses événements fétiches, le Sirha organisé tous les deux ans au

parc des Expositions de Chassieu. “Le plus beau salon du monde, celui que tout le monde nous envie”, s’enfl amme la directrice. “Le dîner des grands chefs du monde, qui a réuni plus de deux cents étoiles autour de Paul Bocuse à l’Hôtel de Ville, en janvier 2013, a renforcé encore la notoriété de l’événement à l’international”. Cinq jours “merveilleux mais exténuants, stressants, physiques” où tout est mis en œuvre pour faire de Lyon la capitale mondiale de la gastronomie. Un métier fait aussi d’impondérables et, parfois, de grosses sueurs... froides. “En 2010, la neige s’est brusquement mise à tomber, à 16 heures, lors de l’inauguration du salon Pollutec. En l’espace de 3 heures, il est tombé 40 cm. Eurexpo était dans la ouate, les navettes bloquées. Il a fallu improviser pour libérer les milliers de visiteurs et les offi ciels prisonniers des intempéries”.Lors de sa prochaine édition, en 2015, le Sirha étrennera un nouveau hall de 9 000 mètres carrés à Eurexpo. “On va ainsi passer à 130 000 mètres carrés de surface d’exposition, ce qui nous permettra d’intégrer le cercle fermé des 15 plus grands parcs européens”, se réjouit Anne-Marie Baezner, persuadée que Lyon dispose de suffi -samment d’arguments pour concur-rencer d’autres grandes métropoles comme Barcelone, Francfort ou Milan. “Tout comme Olivier Ginon, j’aime ma ville et j’ai de l’ambition pour elle. C’est mon moteur au quotidien”. Dans cette optique la dirigeante de GL Events a participé activement à l’émergence de la Lyon Welcome Attitude, une démarche visant à fédérer institutionnels et professionnels du

tourisme d’affaires autour d’un objectif commun : “faciliter la vie des visiteurs depuis leur arrivée en gare ou à l’aéroport jusqu’à leur départ en optimisant l’acces-

sibilité, l’accueil, la communication et la signalétique des sites”. Un plan d’action ambitieux de nature à améliorer l’image d’une cité jugée trop frileuse à l’étranger. “A Lyon, il manque le côté sexy d’autres

métropoles. Il faut faire savoir que la ville est belle et faire envie avec une vie nocturne active pour s’imposer comme l’une des capitales incontournables des congrès en Europe”. Pour promouvoir la destination, Anne-Marie Baezner compte aussi sur la réputation de sa gastronomie, elle qui fréquente assidument les restaurants lyonnais.

“La semaine, je n’ai pas le temps de faire la cuisine. Lors des repas d’affaires, c’est poisson et jamais de dessert ! Je me rattrape le week-end. J’aime notamment le déjeuner du samedi, en famille, autour d’une blanquette de veau, de briks à l’œuf ou d’un rôti de bœuf/salade accompagné de pommes de terres sautées. Jean-Louis, mon mari d’origine suisse, est quant à lui champion de la fondue savoyarde !”. Un melting-pot culinaire parfaitement en phase avec la vision cosmopolite de la maîtresse de maison...

SA RECETTE DE LA RÉUSSITE • Aime et le reste suivra.• La vie est une remise en cause

permanente, rien n’est jamais acquis ni jamais perdu.

• La chance sourit aux audacieux.• On ne réussit jamais seule, la force

est collective.

"j’aime ma ville et j’ai de l’ambition pour elle. C’est mon

moteur au quotidien."

Anne-Marie Baezner

LES BONNES ADRESSES DE… ANNE-MARIE BAEZNER

Lorsqu’elle accueille des visiteurs, la collaboratrice d’Olivier Ginon réserve souvent un petit salon chez Mathieu Viannay (La Mère Brazier, 69001). “Il sait bien vendre Lyon avec le sourire en prime. Les étrangers adorent...”. Anne-Marie Baezner apprécie aussi l’ambiance feutrée du Passage (rue du Plâtre, 69001), un lieu “confortable et accueillant”, ainsi que les poissons de la Brasserie Georges, à Perrache, les ris de veau du Café Comptoir Abel, à Ainay, la terrasse de l’Argenson aux beaux jours et la “régularité dans la cuisine” de Frédéric Berthod au 33 Cité, proche de son QG de la Cité Internationale. Lorsqu’elle est sur le site d’Eurexpo, madame la directrice va généralement se restaurer à la table du Novotel Lyon-Bron ou au Cocon, le restaurant du Golden Tulip Millénaire, à Saint-Priest. Enfi n, sur les hauteurs de la Croix-Rousse, elle vante l’“exceptionnel rapport qualité-prix” du restaurant Le Canut et les Gones (rue Belfort, 69004), avec mention spéciale pour le gratin de pâtes de son chef, Franck Blanc.

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HOMME DE GOÛTSilvio Iacovino, l’aubergiste de luxePar PASCAL AUCLAIR

Dans Mission Impossible Protocole Fantôme, Tom Cruise joue les équilibristes, accroché à la paroi

de l’hôtel de Burj Khalifa, la plus haute tour du monde. Vertigineux… Dans un autre registre, Silvio Iacovino tourne depuis bientôt quatre ans un remake de Mission Impossible à Lyon, en l’occurrence assurer la succession Eric Obeuf, directeur du Sofi tel-Bellecour durant plus de vingt ans et fi gure de la vie lyonnaise. La barre était haute, le défi osé. Il a su le relever sans ostentation, en jouant naturellement sur son charisme et sur son sens du contact aiguisé au cours de ses multiples périples professionnels aux quatre coins de la planète. Suisse, Angleterre, Irlande, Canada, Allemagne, Luxembourg... Diplômé de l’école hôtelière de Villa Santa Maria, l’enfant des Abruzzes a fait son apprentissage comme simple serveur dans les palaces de Saint-Moritz et Interlaken avant d’accéder après cinq ans d’expérience à des postes à responsabilités, d’abord dans le groupe Four Seasons, puis au sein du groupe Accor qu’il intègre en 1999 au Luxembourg. Dans le Gibraltar du Nord, Silvio Iacovino se voit notamment chargé d’ouvrir le Sofi tel Le Grand Ducal en 2006 qu’il quitte en juillet 2010 pour prendre la direction de Lyon et du cinq étoiles cher à Gérard Pélisson. “De la ville, je ne connaissais que le tunnel de Fourvière

et les cheminées des raffi neries.” Une image d’Epinal peu fl atteuse entretenue par ses virées régulières dans le Sud, en Provence, dans la famille de son épouse, Carine. “Quand je suis arrivé à Lyon, je repartais à zéro, loin de ma famille.”Cornaqué par Eric Obeuf, l’homme ne tarde pas à garnir son répertoire, sa parfaite maîtrise de la langue de Molière, son aisance et son élégance

naturelle favorisant sa rapide intégration dans une “high society” locale pourtant réputée hermétique. “Je suis arrivé avec beaucoup d’ambition, décidé à changer les mentalités en enfi lant l’habit de

l’aubergiste plutôt que de l’hôtelier, pour faire en sorte que le Sofi tel demeure l’hôtel de la ville.”La formule se révèle effi cace. En un an, le taux d’occupation du palace progresse de 14% puis se stabilise sans brader les chambres, dont le prix moyen demeure supérieur à 200 euros malgré une conjoncture peu favorable. “ Que ce soit sur le plan patrimonial, historique, religieux, gastronomique, l’agglomération dispose de merveilleux atouts. Maintenant, il faudrait davan-tage les développer pour devenir une destination à part entière”. Derrière les baies vitrées du bar Le Melhor, le regard de Silvio Iacovino se porte instinctivement sur les eaux du Rhône. “Dans toutes les grandes capitales, les fl euves font l’objet d’un trafi c intense. Quoi de plus beau que de

découvrir une ville en bateau ? C’est un des attraits qu’il faut mettre en avant comme il faut davantage animer la vie nocturne pour séduire les congressistes du monde entier”. Une remarque pleine de bon sens, éprouvée tout au long de l’année auprès d’une clientèle business très présente au Sofi tel-Bellecour. “Aujourd’hui, les principaux challenges sont de faire venir les touristes mais aussi les inciter à séjourner une nuit de plus, donc de les fi déliser”, poursuit l’“aubergiste” des quais du Rhône, qui dispose au huitième étage d’un argument brillant comme une étoile, en l’occurrence Les Trois Dômes. “C’est une vraie fi erté d’être le seul Sofi tel étoilé de France et le seul en Europe à l’avoir conservé depuis dix ans, Christian Lherm ayant parfaitement assuré la succession d’Alain Desvilles”, conclut Silvio Iacovino, dont le prochain défi , à l’horizon 2015, consiste à rénover les 164 chambres de l’établissement.

SA RECETTE DU SUCCÈS La devise de Silvio Iacovino ? Pour progresser, il faut savoir écouter. Un principe chargé d’humilité qu’il a mis en pratique dès son arrivée à Lyon au chevet de sa clientèle du Sofi tel-Bellecour, auprès de ses équipes mais aussi au contact d’une certaine frange de Lyonnais en prise directe avec les visiteurs, qu’il s’agisse du chauffeur de taxi, d’un restaurateur ou de commerçants.

“C’est une vraie fi erté d’être le seul Sofi tel étoilé de France…”

Globe-trotter de l’hôtellerie de prestige, Silvio Iacovino a sillonné le monde avant de prendre en mains les destinées du Sofi tel-Bellecour. De sa vigie des Trois Dômes, phare étoilé des quais du Rhône, il s’extasie de la beauté d’une ville un peu trop discrète à son goût...

Silvio Iacovino

LES BONNES ADRESSES DE… SILVIO IACOVINOEn bon “rital”, le directeur du Sofi tel-Bellecour a vite fait le tour des bons restaurants italiens de la ville. Au palmarès, il place en priorité deux établissements proche de son hôtel, le Tartufo de Marco Asti (37 rue Saint-Hélène, 69002), pour ses spaghettis au citron, et la pizza au gorgonzola de Nicolo et Franco (rue Frankin, 69002). Lors de son arrivée en terre lyonnaise Silvio Iacovino a découvert le concept des bouchons lyonnais dans l’antre d’Abel, le café-comptoir du quartier d’Ainay, autour d’un triptyque gratons-poulet au morilles-baba au rhum. Une révélation… Depuis, il rend aussi régulièrement visite à Joseph Viola (Daniel et Denise) et n’hésite pas à prendre sa voiture pour déguster les grenouilles de Christophe Marguin, aux Echets. Enfi n, l’hôtelier avoue une affection particulière pour Guy Lassausaie (2 étoiles Michelin), le discret et talentueux restaurateur de Chasselay.

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Jacques de Chilly, l’ambassadeur du Grand Lyon

AMBASSADEUR DE GOÛT

L’an dernier, l’Aderly (Agence pour le développement économique de la région lyonnaise) a accompagné

77 entreprises dans leur implantation ou leur développement, dont 60% de projets étrangers (Allemagne, Etats-Unis, Benelux, Italie, Japon...). Ce record historique, qui va générer plus de 1 800 emplois directs sur 3 ans, confi rme l’attractivité grandissante d’une agglomération dans un contexte pourtant peu favorable. Une perfor-mance qui justifi e la stratégie engagée

par Jacques de Chilly et ses équipes, devenus les ambassadeurs du Grand Lyon à l’international. Directeur exécutif de l’Aderly, directeur international de la CCI de Lyon, ce diplômé de Sciences-Po Paris a fait la navette public-privé. Ses postes successifs à l’ANVAR (Agence nationale de valorisation de la recherche) et à la DATAR (Délégation interministérielle à l’aménagement du territoire et à l’attractivité régionale) sont entrecoupés par une longue parenthèse de 14 ans

à la tête de TSD, société créée avec le fondateur de Sophia Antipolis, près de Nice. “Je suis arrivé à la tête de l’Aderly en avril 2008. Un heureux concours de circonstances. Je recherchais un poste avec une dimension métropolitaine. J’aurais pu aller à Lille. Mais le challenge lyonnais me paraissait plus excitant, d’autant que c’était pour moi une sorte de retour aux sources”. Né à Bou-Izkarn, dans le sud marocain, d’un père offi cier des affaires indigènes, Jacques de Chilly a en effet été élève du lycée Ampère de la sixième à la Terminale, à quelques pas du siège de l’Aderly...Dès sa prise de fonction, ce grand voyageur s’est attelé à la tâche en se dotant d’un outil de promotion inédit : OnlyLyon. “C’est une vraie fi erté d’avoir participé au lancement d’un tel outil marketing à l’international, souligne Jacques de Chilly. Partant du constat que Lyon avait des atouts formidables mais manquait de notoriété, nous avons su fédérer tous les acteurs économiques de l’agglomération derrière une même bannière. Au fi l des ans, OnlyLyon est devenu un véritable levier au service de la promotion. Les Lyonnais se sont complètement appropriés cette marque qui regroupe aujourd’hui plus de 15 000 ambassadeurs et 500 000 fans à travers le monde”. Grâce à cette “arme de guerre”, le Grand Lyon a renforcé sa visibilité et fourni des arguments supplémentaires à la quinzaine de salariés de l’Aderly, répartis sur le plan géographique ou sectoriel, qui sillonnent le monde pour séduire des investisseurs étrangers. “L’objectif est à la fois de générer de l’emploi et d’attirer des compétences nouvelles. Dans ce combat économique,

l’Angleterre, l’Allemagne et la France sont aujourd’hui les trois pays les plus attractifs sur le plan européen. Touchée de plein fouet par la crise, l’Espagne revient dans la course en jouant sur la réduction des coûts du travail”, analyse Jacques de Chilly. Pour convaincre les entreprises, l’Aderly mise en priorité sur ses pôles de compétences. “Nous sommes en concurrence avec Munich, Copenhague et Oxford pour

les sciences de la vie, avec Marseille pour la logistique, Lille pour le tertiaire, l’Italie du Nord, l’Allemagne et le Pays Genevois pour l’industriel. Dublin, Amsterdam et Riga sont aussi de sérieux rivaux sur certains

dossiers”, énumère le patron de l’Aderly. Outre la mise en exergue de ses secteurs d’excellence, le Grand Lyon a d’autres atouts dans sa manche pour arracher la décision des investisseurs. “D’abord, la position stratégique de la ville, carrefour incontournable pour irriguer les principaux marchés européens. Ensuite, sa capacité à présenter de grands projets urbains comme la Confl uence ou la Part-Dieu. Enfi n, un potentiel important en termes de ressources humaines, l’agglomération disposant d’un large bassin de population avec un niveau de qualifi cation élevé.” Lorsque la ville se retrouve en short-list, en concurrence directe dans le sprint fi nal avec deux ou trois rivaux, Jacques de Chilly vante alors la qualité de vie “à la lyonnaise”, insistant sur la présence d’un lycée international, le caractère assez peu onéreux de l’immobilier, sa diversité culturelle et les facilités de déplacements dans une agglomération à taille humaine. “Aujourd’hui, dans l’Hexagone, nous

sommes en concurrence directe sur de nombreux dossiers avec Toulouse”. A l’avenir, pour prendre l’ascendant sur la Ville Rose et son pôle aéronautique fl orissant, Jacques de Chilly milite pour la création d’un second lycée international. Il appelle aussi de ses vœux le développement des liaisons aériennes intercontinentales au départ de Saint-Exupéry et l’extension de la gare TGV de la Part-Dieu, nœud ferroviaire stratégique mais saturé. “Cela dit, nous n’avons pas de handicap majeur. A l’étranger, Lyon a l’image d’une ville sérieuse. Mais le sérieux, ça rassure...”, sourit le directeur exécutif de l’Aderly. Toujours prêt à se mettre en cuisine pour concocter un couscous ou une tajine (origines obligent), ce gastronome cosmopolite n’a fi nalement qu’un regret : que Lyon n’offre pas un panel plus étoffé en matière de cuisine du monde. Plusieurs projets d’implantations seraient en gestation pour combler cette lacune, dont l’ouverture d’un restaurant gastronomique cantonnais. A suivre...

SA RECETTE DE LA RÉUSSITE • La curiosité, l’ouverture sur les

autres et sur le monde.

• La prise de risque, goût du risque que j’ai développé lorsque j’étais entrepreneur. Dans ce domaine, le Français est trop frileux, freiné par le principe de précaution.

• Aimer les gens, ses clients, ses fournisseurs, ses partenaires, ses salariés...

"… c’était pour moi une sorte de retour

aux sources.”

Interlocuteur privilégié des entreprises souhaitant s’implanter dans l’agglomération, le directeur exécutif de l’Aderly se réjouit de l’attractivité grandissante du Grand Lyon. Mais la lutte est de plus en plus rude pour rivaliser avec les grandes métropoles européennes...

Par PASCAL AUCLAIR

Jacques de Chilly

LES BONNES ADRESSES DE… JACQUES DE CHILLYPour séduire les investisseurs étrangers et les convaincre de s’implanter à Lyon, Jacques de Chilly n’hésite pas à jouer sur leur fi bre épicurienne. Parmi ses tables de prédilection fi gurent en bonne place Têtedoie (montée du Chemin Neuf, 69005) et sa vue panoramique sur l’agglomération, ainsi que La Mère Brazier (rue Royale, 69001) et le Potiquet (rue de l’Arbre Sec, 69001) pour le sens de l’accueil et l’humilité d’Aurélien. “Idéal pour un repas d’affaires en toute discrétion”. Les visiteurs en provenance du nord et de l’est apprécient la Brasserie Georges “chargée d’histoire et de tradition”, alors que les Parisiens amateurs de bouchons font souvent halte chez Daniel et Denise (rue de Créqui, 69006). Autre coup de cœur de Jacques de Chilly, Balthaz’Art (rue des Pierres Plantées, 69001) vanté pour son pavé d’échine de porc et son gigot d’agneau ibérique, et le Zinc Zinc Bourse (rue de la Bourse, 69001), l’une de ses cantines avec le Bieh mitoyen lorsque lui vient soudain une envie de bagel toasté, cream cheese et saumon fumé. Enfi n, pour démarrer du bon pied, le directeur exécutif de l’Aderly donne souvent rendez-vous à ses interlocuteurs pour un petit déjeuner gourmand aux Trois Dômes (quai Gailleton, 69002), au sommet du Sofi tel Lyon-Bellecour.

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GOÛT DE CŒUR

De New York à Tokyo, de Dubaï à Istanbul, des Seychelles au Cap, sa réussite s’expose en

technicolor dans les endroits les plus emblématiques de la planète. Loin des stéréotypes, Bernard Reybier incarne l’art de vivre à la française, posant ses dossiers dans les allées de Bryant Park, des Jardins du Luxembourg ou de Majorelle, sur le sable de la plage du Festival, sur le bitume de Times Square, derrière les murs du Rijksmuseum ou d’Harvard.En un quart de siècle, l’ancien diplômé de Sup de Co Lyon, initié aux subtilités du marketing chez Black&Decker, a transformé une PME vacillante de l’Ain en fl euron du “made in France”. Lors de son rachat, en 1989, Fermob employait une dizaine de salariés pour moins de 1,5 million d’euros de chiffre d’affaires. Cette année, avec l’acquisition récente de Vlaemynck (spécialiste du mobilier d’extérieur pour l’hôtellerie), ses effectifs devraient dépasser les 250 personnes pour un volume d’affaires d’environ 50 millions d’euros, dont près de la moitié à l’export. “25 ans de croissance et de plaisir ininterrompu !”, s’enthousiasme le patron rhônalpin, qui vante depuis l’origine les vertus de l’innovation pour doper les ventes. “Fermob a inventé la couleur dans le jardin tout en misant sur la valeur ajoutée du design.” Implantée à Saint-Didier-sur-Chalaronne, la marque a ainsi offert une cure de jouvence à l’antique chaise bistro, aussi vieille que la Tour Eiffel. Décliné en 24 couleurs, l’enfant chéri des limonadiers est devenu un objet tendance vendu chaque année à 100 000 exemplaires.

“Le charme de la “french touch” opère toujours à l’international. Cela fait partie de notre ADN, de notre histoire, comme la gastronomie”. Et question gastronomie, Bernard Reybier sait de quoi il cause ! Initié très tôt aux plaisirs de la table dans son Haut-Bugey natal, entre l’entreprise d’affi nage de fromages paternelle et l’inimitable ratatouille maternelle, le san-germinois (originaire de Saint-Germain-de-Joux) évoque encore avec nostalgie le veau de lait, la gelée de framboise et la quenelle de brochet de son enfance. “J’ai réalisé ma chance lorsque j’ai retrouvé ces produits d’exception dans les épiceries fi nes lyonnaises”. Etudiant en prépa au lycée du Parc, il perfectionne sa culture gastronomique dans les bouchons du centre-ville, du plat de cochonnailles de Denise (rue Neuve) au poulet à l’ail de Paulette (rue Chavanne) en passant par le bar de Françoise (rue des Quatre Chapeaux) ou les Lyonnaiseries de Marie-Rose (rue Gaspard André). “A l’époque, beaucoup d’établissements étaient tenus par des prostituées reconverties”, se souvient le PDG de Fermob, dont l’expertise gustative s’inscrira, parallèlement, dans les pages du Petit Paumé. Globe-trotter, le patron de Fermob profi te désormais de ses multiples voyages pour affi ner son palais, de Madagascar à la Namibie, de la Bolivie au Sultanat d’Oman.

“Mon meilleur steak, l’an dernier, je l’ai sans doute mangé en Indonésie. Une souche de bœuf de Kobé élevé en Australie”. Mais fi dèle à certaines traditions culinaires, il se régale aussi d’une belle fricassée de grenouilles ou d’un poulet à la crème, salive en évoquant le ris de veau meunière et le sanglier de six heures concoctés

par son épouse. “Elle sait me régaler avec trois fois rien”, sourit le patron de Fermob, que vous risquez de croiser, le week-end prochain, entre les étals du marché Saint-Antoine, aux Halles de Lyon Paul Bocuse

ou à la poissonnerie Vianey, à la Croix-Rousse. A moins qu’une envie soudaine d’andouillette ne l’incite à rendre visite à l’ami Bobosse, du côté de Saint-Jean-d’Ardières...

SA RECETTE DU SUCCÈS • Aides-toi, le ciel t’aidera.• Le plus dur, c’est toujours le

premier pas.• Pugnacité, cohérence et

anticipation.• Savoir et aimer communiquer.• L’ambition est un mot noble.

Bernard Reybier, le monde à ses pieds

“25 ans de croissance

et de plaisir ininterrompu !”

Avec sa chaise bistro en guise de trône, le roi de l’export a transformé en moins d’un quart de siècle Fermob, PME rhônalpine moribonde, en icône de la réussite “made in France”. Une savoureuse success-story.

Bernard Reybier

Par PASCAL AUCLAIR

LES BONNES ADRESSES DE… BERNARD REYBIERAncien résident du quartier d’Ainay (rue Bourgelat très précisément), le patron de Fermob a longtemps ciré les chaises en bois d’Abel. Il continue de fréquenter le fameux café-comptoir lyonnais, lauréat des Trophées de la Gastronomie 2012, loué pour son foie de veau et sa quenelle de brochet. Autres valeurs sûres au pays de Gnafron, la salade lyonnaise, les pieds de mouton et le boudin aux pommes d’Hugon (rue Pizay, 69001), ainsi que les savoureux petits plats de Chez Albert (place Fernand Rey, 69001). Plus contemporain, le décor de la Rémanence (rue du Bât d’Argent, 69001) a aussi les faveurs de Bernard Reybier. “Sans doute l’une des meilleures tables de Lyon avec une mention pour ses ris de veau”, confi e l’industriel, qui va aussi rendre régulièrement visite au président des Toques Blanches Lyonnaises, Laurent Bouvier, à l’Elleixir (Limonest) ou aux différents établissements de Jols, dont le dernier a ouvert récemment quai Saint-Antoine. Près du siège de Fermob, il se régale de la volaille à la crème de Bruno Maringue (Côté Saône) et des grenouilles du Restaurant du Pont, à Saint-Didier-sur-Chalaronne. A Paris, Bernard Reybier gravite essentiellement autour de son show-room du 11e arrondissement, entre le diptyque tartare/frites-Saint Nectaire du Square Trousseau (rue Antoine Vollon, 75012), et le classique antipasti/pâtes de Swann et Vincent (rue Saint Nicolas, 75012), même s’il descend parfois la Seine pour une généreuse sole meunière de Garnier. Enfi n, outre-Atlantique, le roi de l’export va vérifi er la bonne disposition de ses chaises bistro au Bryant Park Grill et ses séjours à Hong Kong sont toujours ponctués d’un vertigineux brunch au Cafe Gray Deluxe, au 49e étage de l’Upper House, au dessus de Pacifi c Place.

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Autodidacte, figure des Halles Paul Bocuse, le président du groupe Cellerier s’est constitué en vingt-cinq ans un petit empire gourmand dans la région lyonnaise. Loin d’être rassasié, il vient d’ouvrir sa septième franchise Paul à Limonest. Et les projets ne manquent pas...

Pierre-Guy Cellerier, en “Paul” position

Pas besoin d’avoir Bac+5 pour réussir dans la vie. Pierre-Guy Cellerier, comme d’autres belles

réussites de la classe économique lyonnaise, n’aura pas eu le loisir d’apprécier la rudesse des grandes écoles, ni même l’inconfort des bancs de la fac. “Je n’étais pas fait pour les études”, concède-t-il humblement. Plus assidu sur les pistes de danse que sur l’estrade du lycée, Pierre-Guy Cellerier a comme compagnons de jeu les Jérôme Bocuse, Trompette, Markarian et autres fêtards invétérés. Son père, Alain, siffle la fin de la récré en l’incitant à troquer ses pantalons pattes d’eph pour un costume de commercial dans ses usines de fromages familiales de Vaulx-en-Velin et Villeurbanne. “Moi qui n’aime pas le fromage, j’ai été servi...”.En 1988, la famille Cellerier rachète à Michel Reybier l’enseigne Roux-Soignat, vieille institution des Halles de Lyon. “A 21 ans, je suis devenu chef d’entreprise, ce qui m’a dispensé de service militaire”, confie l’autodidacte. Plongé dans le grand bain de l’entrepreneuriat, Pierre-Guy Cellerier apprend vite à nager dans le ventre de Lyon. Avec un paternel en guise de maître-nageur. “Il a toujours été derrière moi. Je lui dois beaucoup”, souffle-t-il.Fromager, charcutier, traiteur, écailler, restaurateur... le petit groupe familial se découvre un appétit d’ogre en rachetant successivement Ciao Ciao (1993) à la barre du tribunal de commerce, la maison Laboury (2000) puis l’enseigne de fruits et légumes

Barioux. Aujourd’hui, le PDG du groupe gère avec son père et son frère, Franck, pas moins de cinq boutiques aux Halles Paul Bocuse, mais aussi deux autres à la Confluence (pôle de commerces) et dans la Presqu’île (La Minaudière).Un petit empire gourmand dont il a doublé le chiffre d’affaires - de l’ordre de 15 millions d’euros/an - depuis qu’il

a croisé la route de... Paul ! “J’ai découvert le concept en voyant les files d’attente devant la boulangerie proche de notre corner, aux Galeries Lafayette Lyon-Bron. J’ai pris contact avec la famille Holder via un ami d’enfance

pour lui proposer de développer le concept dans le Rhône.”Bingo ! En 2005, Pierre-Guy Cellerier signe un contrat d’exclusivité dans le département. Neuf ans plus tard, il vient d’ouvrir sa septième franchise en lieu et place du Puy d’Or, le restaurant de Laurent Bouvier parti en fumée. “C’est un pari compte tenu de l’emplacement et du montant des travaux. On mise sur la présence de plusieurs zones d’activités à proximité pour rentabiliser l’investissement”, confie le dirigeant lyonnais, rassuré par les premiers chiffres de fréquentation. Une confiance renforcée par l’expérience acquise dans les autres Paul au Point du Jour, rue de Brest, à Auchan Dardilly, à la Confluence, rue de la République et dans le métro Bellecour. “La clé du succès ? Des produits de qualité vendus dans un cadre de qualité, sur des emplacements privilégiés, à des prix cohérents”, résume Pierre-Guy Cellerier, insistant sur la provenance de sa marchandise.

“Contrairement à certaines idées reçues, tout le pain sort de nos fournils. Seules les viennoiseries et certaines tartes viennent de l’usine de Lille.”En moyenne, les sept enseignes Paul vendent plus de 4000 baguettes/jour, avec d’impressionnantes files d’attente le dimanche matin. “La baguette tradition et celle aux six céréales figurent parmi nos best-sellers, de même que le Dieppois (sandwich au thon) et les gros macarons.” Avant d’obtenir la franchise, Pierre-Guy Cellerier a été initié à la fabrication du pain et des pâtisseries au centre de formation de Paul, à Marcq-en-Barœul, près de Lille. A bonne école, il avoue toutefois mettre rarement la main à la pâte, même à la maison, au grand regret de son épouse, Aurélie, et de ses trois enfants. “Dans la famille Cellerier, on est très gastronome, beaucoup moins praticien ! Mon plaisir, c’est d’aller faire mes emplettes, en famille, le samedi au marché Saint-Antoine ou aux Halles de Lyon. Le reste du temps, je ne m’occupe pas des courses, même pas du pain...”. Oh l’ingrat !!

SA RECETTE DE LA RÉUSSITE

• De la rigueur, de la rigueur et encore de la rigueur.

• Un gars super intelligent ne vaudra jamais un travailleur pragmatique et intuitif.

• Ne jamais rien lâcher. La ténacité finit toujours par payer.

• Savoir où on veut aller.

• Ne fais jamais aux autres ce que tu ne voudrais pas qu’on te fasse.

“Moi qui n’aime pas le fromage,

j’ai été servi…”

Par PASCAL AUCLAIR

LES BONNES ADRESSES DE… PIERRE-GUY CELLERIER

Père de trois enfants... et d’un labrador, skieur l’hiver à Megève, cycliste dans les Monts d’Or le week-end, Pierre-Guy Cellerier rejoint aussi ses amis sur un ring de boxe, tous les mardis, dans le cadre du JAB (Juris Association Boxing) créé par l’avocat Eric Pelet. Après avoir encaissé les uppercuts de Philippe Liucci (Ivanhoé) ou Jacques Chalvin (Double Mixte), il retrouve de l’énergie en dégustant le bœuf basilic de Xane (quai Saint-Antoine, 69002), la généreuse entrecôte du Zinc Zinc Bourse ou le plat du jour à la table d’hôtes du Passage (rue du Plâtre, 69001). Carnivore, il avoue toutefois un faible pour les Gilardeau numéro 4, les gambas grillées, la sole meunière de l’Ouest, à Vaise, et pour les grenouilles de Christophe Marguin, aux Echets. Parmi ses autres pêchés mignons, la truffe qu’il met à toutes les sauces, dans la pizza de Steph (rue Malesherbes, 69006) ou dans la coquille Saint-Jacques de Mathieu Viannay (La Mère Brazier). Avec son ami Christophe Ansanay-Alex, le chef de l’Auberge de l’Ile Barbe, Pierre-Guy Cellerier a même été jusqu’à lancer cet hiver le Saint-Marcellin aux truffes. Une gourmandise de fin de repas déjà présente sur toutes les bonnes tables lyonnaises... et côté décoration, une jolie adresse : Nathalie Rives, styliste d’intérieur (rue Ferrandière, 69002).

Pierre-Guy Cellerier

Pierre-Guy, Alain et Franck Cellerier

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Par PASCAL AUCLAIR

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Le pâté en croûte, c’est champion !Depuis 2009, le vénérable hors-d’œuvre a son offi ciel Championnat du monde. Initié par Christophe Marguin, Audrey Merle, Gilles Demange et Arnaud Bernollin, le concours a pris une dimension internationale. Ah, la bonne farce !!

“On a réveillé une belle endormie...”. La “belle” en question n’est ni Cendrillon ni Blanche-Neige mais un plat traditionnel de la gastronomie française perdu dans les couloirs du temps, ringardisé à souhait, et réhabilité par la grâce d’une poignée d’épicuriens. “L’histoire du pâté en croûte nous ramène aux origines de la gastronomie. Au Moyen-Âge, cette préparation servait à la fois de mode de conservation et de cuisson pour la viande. Avec le temps, les pâtissiers ont rendu la croûte consommable”, explique Christophe Marguin. Inénarrable sur le sujet, le restaurateur des Echets a rendu ses lettres de noblesse au pâté en croûte en créant le Championnat du Monde de la spécialité avec Audrey Merle, Gilles Demange et Arnaud Bernollin. La première gravite dans le milieu de la communication, le deuxième vend des literies et le troisième est cuisiniste. Leur point commun ?Apprécier les plaisirs de la table. “L’idée du Championnat du monde est née en 2007 lors d’une discussion autour d’une bonne bouteille avec Jean-Claude Caro et Mathieu Viannay”, se souvient Christophe Marguin. Deux ans plus tard, la première édition était organisée dans le parc de la mairie de Sathonay-Village. 43 dossiers déposés,douze candidats retenus et un grand vainqueur, Florian Oriol (Daniel et Denise). “On a fait ça dans les règles de l’art, avec huissier de justice et dégustations à l’aveugle”, précise le restaurateur des Echets, président de cette première édition. “On a fait les

choses sérieusement sans se prendre au sérieux, avec un esprit potache. C’est ce qui a fait le succès de l’événement”, estime Gilles Demange, Grand Maître de l’illustre Confrérie du pâté en croûte.De fait, depuis 2009, le Championnat du monde n’a cessé de prendre de l’ampleur pour devenir, au fi l des ans, un événement gastronomico-people à résonnance nationale, voire internationale. Plus de 500 convives ont ainsi participé à la cinquième édition, en décembre dernier, derrière les murs de la maison Chapoutier, à Tain-L’Hermitage, dont Anthony Bourdain,le célèbre journaliste culinaire de CNN, éminent membre d’un jury présidé par Dominique Loiseau. Rançon du succès, les organisateurs ont dû improviser en amont une sélection sur le Salon du Chocolat, à Paris, pour sélectionner les douze fi nalistes. “Les

candidats sont de plus en plus pointus. Comme pour les Bocuse d’Or, ils s’astreignent à un gros travail préparatoire, six mois avant, avec l’aide d’un coach, pour être prêts le jour J. Malgré tout, il y a toujours une part d’incertitude car le pâté croute exige

une alchimie parfaite, l’environnement extérieur infl ue sur la qualité de la croûte et on ne sait jamais comment va réagir la farce maturée à l’intérieur...”, note Arnaud Bernollin. L’an dernier, Jean-François Malle (Pavillon de la Rotonde) a garni son pâté de volaille de Bresse, foie gras marbré aux trompettes, lard de colonnatta et fi ne gelée infusée aux champignons rôtis. “Un travail d’orfèvre” souligne Audrey Merle. “Les chefs sont de plus

en plus créatifs, à l’image du lauréat 2012, Yohan Lastre (La Tour d’Argent) qui avait fait sculpter un moule spécial pour réaliser une fresque à base de trompettes de la mort.” Une approche artistique reprise depuis par d’autres candidats, le système de notation intégrant l’aspect extérieur du produit. “On constate une véritable évolution depuis cinq ans, tant sur le fond que sur la forme. La présentation est de plus en plus recherchée. Les chefs mettent l’accent sur le côté esthétique. Cela s’assimile à de la marqueterie”, insiste Arnaud Bernollin. Quant à la farce, elle recèle tout type d’ingrédients, de la volaille au cochon, de l’éterlou au poisson. “Certains assemblages ne sont pas toujours très heureux”, concède Gilles Demange. Ce dernier s’attend à un nouveau record de participation, tant au niveau des candidats que de l’assemblée, en décembre prochain. “On va sans doute organiser des demi-fi nales à Paris”, confi e Christophe Marguin qui caresse un rêve : “que le jury soit présidé par Paul Bocuse”. En attendant, le restaurateur des Echets et ses trois compères vont continuer de débattre autour d’une question existentielle : faut-il parler de pâté croûte ou de pâté en croûte ? De quoi alimenter la conversation lors de vos prochains dîners mondains...

LEUR RECETTE DU SUCCÈS • La loyauté et le travail (Gilles Demange)

• La convivialité (Audrey Merle)

• Savoir fédérer autour d’une bonne idée (Arnaud Bernollin)

• Le travail, le travail et encore le travail (Christophe Marguin)

LES BONNES ADRESSES DE… CHRISTOPHE, GILLES, ARNAUD ET AUDREY

Pas facile de citer ses bonnes adresses quand on “grenouille” avec toutes les fi gures de la gastronomie locale. Pour s’éviter quelques mauvais

procès, Christophe Marguin cite La Tour Montléry - Chez Denise, à Paris (rue des Prouvaines, 75001). “Un bistrot à l’esprit maquignon, dans les Halles, ouvert 24/24 heures. J’ai le souvenir d’un onglet de bœuf phénoménal”, précise le chef des Echets. Gilles Demange, lui, met le cap

au Sud et pousse la porte d’Alexandre, le restaurant de Michel Kayser, à Nîmes-Garons, dans la Gard. Un deux étoiles Michelin dont il vante l’inattendu calisson de pieds, langue et ris d’agneau. Beaucoup plus à

l’Est, Arnaud Bernollin fait l’apologie de l’Arnsbourg, en Moselle. “Un trois macarons au rapport qualité-prix imbattable”, assure le cuisiniste lyonnais, évoquant “cet ancien relais de bûcheron perdu au milieu de la forêt où l’on peut déguster un merveilleux capuccino de pomme de terre et truffes”. Enfi n, pour la bonne bouche, Audrey Merle vise le centre

en réservant chez Dominique Loiseau, à Saulieu, en Bourgogne. “Un restaurant masculin avec une âme féminine”, s’enthousiasme la championne des RP, bluffée par le charisme de la maîtresse des lieux et les arômes de sa jambonnette de grenouilles à la purée d’ail.

Un événement gastronomico-

people à résonnance nationale, voire internationale.

Arnaud Bernollin, Audrey Merle, Gilles Demange et Christophe Marguin

Mme Dominique Loiseau remet le prix au lauréat Jean-François Malle

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Par PASCAL AUCLAIR

AFFAIRES DE GOÛTGeorges Devesa, l’homme de goût

La chasse aux kilos superfl us est ouverte. Alors que se profi le la perspective des vacances estivales,

les premières chaleurs printanières ont fait brusquement grimper le mercure chez les épicuriens en “surcharge pondérale”. L’alerte rouge est décrétée pour effacer ces petits bourrelets disgracieux. Un cauchemar pour certain(e)s, une aubaine pour d’autres, à l’instar du groupe Nutrisens, dont l’un des pôles d’expertise tourne autour de la “nutrition bien-être”, et plus précisément du marché de la minceur. “L’une de nos marques, Edel, développe des produits adaptés à la femme active soucieuse de sa ligne (plats minceur, compléments alimentaires...), alors que Nutriprogram.com propose une prise en charge globale des personnes en surpoids avec des programmes minceur prêts à consommer associés à un coaching”, explique Georges Devesa, directeur général d’un groupe né du regroupement des participations du fond d’investissement Evolem dans le secteur de la nutrition santé.Fils de militaire pied-noir, catalan d’origine, né à Toulouse, ce père de deux enfants a grandi sous le soleil des îles, en Martinique et en Nouvelle-Calédonie, avant de rejoindre la métropole. Diplômé de l’ISC (Institut supérieur de commerce) Paris, il gravit les échelons au sein du groupe Elior avant de rallier Limonest, dans la région lyonnaise, pour intégrer Brake France, en 2005. “De la ville, je ne connaissais que le Sirha ! J’ai tout de suite accroché. Les Lyonnais aiment leur ville. Ils en sont fi ers et je les comprends.”Cinq ans plus tard, sa rencontre avec Bruno Rousset, PDG-fondateur du groupe April et du groupe Evolem, l’incite à “une remise en question tout en

restant dans l’univers de l’alimentaire”. Propulsé directeur général de Nutrisens, Georges Devesa gère aujourd’hui 135 salariés sur quatre sites - dont deux unités de production - dans l’Hexagone. En trois ans, le petit groupe rhônalpin s’est imposé comme l’un des acteurs majeurs sur son marché, doublant son chiffre d’affaires (38 millions d’euros en 2013) tout en se développant rapidement à l’export (Royaume-Uni, Benelux, Espagne, Italie..) avec

de belles perspectives en Europe, au Moyen-Orient et en Asie. Une croissance articulée autour de trois grands pôles d’expertise : la nutri-tion médicale, la nutrition spécifi que (sans sel, sans allergène...) et la nutrition

bien-être (minceur & sport). “En France, 9% des enfants ont développé une allergie et 7 millions de personnes souffrent de diabète. Aujourd’hui, nous sommes capables de répondre à la plupart des problématiques de santé en proposant des produits scientifi quement élaborés dans notre centre de R&D de Francheville”. Une gamme complète, à la fois effi cace sur le plan nutritionnel et savoureuse sur le plan gustatif, conçue en collaboration avec de grands chefs, à base d’ingrédients sains et naturels issus du terroir français. “Faire du bien avec du bon, telle est notre vocation”, résume le dirigeant lyonnais, chantre du “made in France”, soucieux de la traçabilité de ses produits. “Je ne prends pas de plaisir à cuisiner. En revanche, j’aime la matière première, le bon produit et bien sûr la table, synonyme de convivialité, d’émotion, de partage”. Parmi ses péchés mignons, les huîtres, le gigot d’agneau et surtout la côte de veau “épaisse, coupée dans la tranche”,

qu’il fait griller au barbecue l’été ou en cocotte l’hiver. “Mais toujours entouré d’amis et de proches car les bons produits sont encore meilleurs à plusieurs !” Des délices carnivores qu’il se procure en déambulant dans les allées du marché de Chaponost lorsqu’il n’est pas en train de suer sur un green de golf, un terrain de rugby ou un parcours de trail...

SA RECETTE DE LA RÉUSSITE • Positiver.

• Savoir saisir les opportunités lorsqu’elles

se présentent.

• La curiosité, l’écoute, le goût du partage.

• Etre conscient de ses forces sans en

présumer.

Georges Devesa

LES BONNES ADRESSES DE… GEORGES DEVESAIl aime la ville de Lyon, sa gastronomie et les talents qui contribuent à perpétuer sa réputation internationale. “Des chefs pleins d’inspiration et soucieux d’excellence”, s’enthousiasme Georges Devesa,faisant référence à la “subtile association des produits de la terre et de la mer” de Mathieu Viannaychez la Mère Brazier (rue Royale, 69001), au bar en croûte de sel de Christophe Marguin aux Echets, au plaisir de se retrouver entre amis pour boire un verre et déguster les ris de veau de son ami Steff (rue Malesherbes, 69006) et à la “farandole de saveurs” de Tsuyoshi Arai au 14 Février (rue Mourguet, 69005). Outre ses cantines de la Halle 9 (Philippe Gauvreau), à Tassin-la-Demi-Lune ou Elleixir (Laurent Bouvier),à Limonest, le directeur général de Nutrisens loue également “la simplicité” d’Olivier Paget à L’Âme Sœur (rue Duguesclin, 69003), l’accueil de Thibaut à L’Ouest (quai du Commerce, 69009) et les spécialités brésiliennes du Sambahia, dans le Vieux-Lyon, avec une pensée pour Olivier Belval (Mon Bistrot à Moi), disparu brutalement cet hiver. Lorsqu’il reçoit des visiteurs parisiens ou étrangers, il hésite généralement entre la quenelle d’Abel (rue Guynemer, 69002) et le rognon de veau rôti de Daniel et Denise (rue de Créqui, 69003), à moins de les emmener au Zinc-Zinc (rue de la Bourse, 69001) déguster une belle côte de bœuf. Ses enfants, eux, plébiscitent le Bieh voisin ou celui de Vaise pour engloutir un burger géant. A Paris, Georges Devesa est fan des antipastis d’Armando à la table de Pasta e Basta (75013) et il ferait la Canebière à genoux pour savourer une pizza d’Etienne Cassaro et de son fi ls, Pascal (Chez Etienne), dans le quartier du Panier. Enfi n, grand amateur de truffe noire, le dirigeant lyonnais va faire ses emplettes à Richerenches, dans le Vaucluse, ponctuées d’une halte prolongée aux Lodges en Provence, récemment ouvert par son ami Richard Cavalezy, après le marché...

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Faire du bien avec du bon, telle est notre

vocation.

Directeur général du groupe Nutrisens, ce Lyonnais d’adoption conçoit, produit et distribue des produits alimentaires de Nutrition-Santé en misant sur le “made in France”. Son credo : faire du bien avec du bon. Et ça marche…

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Par PASCAL AUCLAIR

Directeur général de L’Oréal Professionnel France, ce Grenoblois a fait toute sa carrière dans le giron du leader mondial de la beauté. Interlocuteur privilégié des experts de la coloration et du brushing, il anticipe les tendances de la coiffure.

DES GOÛTS ET DES COULEURS Pascal Giliberti, la culture du résultat

“ L’Oréal, c’est l’école du résultat”. Pascal Gilberti sait de quoi il cause. Originaire de l’Isère, ce fi ls

de restaurateurs – ses parents géraient des brasseries à Grenoble – a gravi une à une les marches qui mènent jusqu’au poste envié de Directeur Général de L’Oréal Professionnel France. Une marque dont Pascal Giliberti connait tous les rouages, lui qui a débuté il y a 25 ans en tant que représentant commercial au sein de la division des Produits Professionnels L’Oréal. Il est vite repéré par sa hiérarchie pour rallier le siège parisien, en charge des grands comptes. A 35 ans, il devient Directeur Commercial en Île-de-France, puis DG de Redken, avant de se voir confi er, il y a un an,

la Direction Générale de L’Oréal Professionnel France, fournisseur attitré de plus de 25 000 salons de coiffure dans l’Hexagone.

Un leadership que la marque doit à sa notoriété internationale mais aussi à sa faculté de savoir anticiper – et lancer – les grandes tendances du marché. “Notre mission consiste à révéler la personnalité qui sommeille en

chaque femme”, résume Pascal Giliberti. Et pour cela, la marque dispose de plus de 700 références (coloration, soin, styling) pour satisfaire toutes les envies, toutes les générations et tous les profi ls. “Le phénomène de mode a toujours été un vecteur fondamental dans l’univers de la coiffure. Or, depuis quelques années,

on constate que les cycles sont de plus en plus courts. On ne raisonne plus en termes de courants mais de looks, lancés essentiellement par les stars et les top models”, explique le dirigeant parisien. Les tendances sont multiples et éphémères, certaines icônes du show-business comme Madonna ou Lady Gaga étant capables de changer “6 à 8 fois de look en 18 mois”. Même le monde de la coiffure masculine n’échappe pas à cette lame de fond, à l’instar de la barbe, qui fait son grand retour depuis plusieurs mois.Dans ce contexte, L’Oréal Professionnel doit faire preuve de réactivité pour asseoir voire renforcer son leadership national. “Le textile donne généralement le tempo. Actuellement, le rose a le vent en poupe, ainsi que les refl ets froids et le “bronde”, subtile alchimie entre le brun et le blond”. Le look Pixie, une coupe très courte

“à la garçonne” va aussi faire fureur cet été, de même que le Splashlight, une technique de coloration qui consiste à illuminer une zone précise de la chevelure, grâce à un refl et coloré. Pionnier en matière de recherche, L’Oréal mise aussi sur l’expertise de ses équipes de R&D pour devancer les tendances, créer de nouveaux looks de plus en plus sophistiqués mais faciles à appliquer. “La femme moderne veut des produits ludiques et pratiques”, résume Pascal Giliberti, faisant référence à Hairchalk, un maquillage pour cheveux lancé fi n 2013. “Le make-up pour cheveux Hairchalk permet d’adopter une couleur fantaisie jusqu’à six semaines.” Autre innovation à venir, le Beach Waves devrait surfer sur l’effet de mode, dès ce printemps, avec son look “retour de plage”… pour les anti-Pixies ! “Ce procédé de forme durable exclusivement réalisé en salon permet de donner du volume et des ondulations sur toute la longueur des cheveux”.Passionné par son métier, Pascal Giliberti ose une comparaison audacieuse avec ces maîtres de la cuisine qu’il aime à côtoyer dans un cadre professionnel ou familial. “Comme eux, nous maîtrisons l’art de la transformation, du dosage, des mélanges, des temps de pause. Il faut le geste juste, un savoir-faire et une dose de créativité pour satisfaire nos clients”. Une recette experte de salon qui, depuis 1909, fait le succès de L’Oréal…

SA RECETTE DE LA RÉUSSITE

• Savoir saisir les opportunités lorsqu’elles se présentent.

• Avoir foi dans son entreprise et dans ses produits.

• Savoir bien s’entourer, faire confi ance aux autres pour les inciter à se surpasser.

• Il n’y a pas de bonne recette sans de bons ingrédients.

"Notre mission consiste à révéler la personnalité

qui sommeille en chaque femme.”

Pascal Giliberti

LES BONNES ADRESSES DE… PASCAL GILIBERTIS’il fréquente et vante les mérites du restaurant d’entreprise de L’Oréal, rue Royale, le dirigeant parisien fréquente aussi d’autres tables proches du siège du groupe, dans le huitième arrondissement et alentours. Pour les petits budgets, il recommande l’atmosphère apaisante d’Indochine (rue du Mont Thabor, 75001). “C’est ma deuxième cantine. On peut y déguster toutes les spécialités asiatiques pour 20 euros, et notamment un fameux bo-bun”. Dans un tout autre style, Pascal Giliberti apprécie l’ambiance de Chez Flottes (rue Cambon, 75001), une brasserie familiale citée pour son foie de veau et son pot-au-feu, ainsi que le 1728 (rue d’Anjou, 75008), dont l’original gravlax de bœuf révèle toute son authenticité dans le décor anachronique de l’ancien hôtel particulier du Marquis Général de La Fayette. Origines napolitaines obligent, le DG de L’Oréal Professionnel France fait régulièrement unpèlerinage à la Farnesina (rue Boissy d’Anglas, 75008) autour d’une belle assiette de spaghetti alle vongole (palourdes) e bottarga (poutargue). Enfi n, Pascal Giliberti regrette de ne pouvoir aller plus souvent rendre visite à Eric Frechon, le chef trois étoiles du Bristol (rue du Faubourg Saint-Honoré, 75008). “Un talent incroyable” qu’il porte aux nues pour ses macaronis au foie gras.

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printemps 2014 – Numéro 9 – BON GOÛT 13

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AU SOMMET DU GOÛTMichael Ellis, l’homme des étoiles Originaire du Colorado, marié à une Française, amateur de golf (index 22) et épicurien dans l’âme, Michael Ellis est le directeur international des guides Michelin depuis deux ans. Un nouveau challenge pour ce fan de cuisine lyonnaise venu dévoiler l’identité des six nouveaux Bib Gourmands locaux à la Table 101 (Lyon 3e). Confidences autour d’un cappuccino de chicons et d’un dos de skreï à la plancha concoctés par le chef, Olivier Delbergues.

Michael Ellis

• Comment un p’tit gars de l’Ouest américain se retrouve-t-il à la tête du guide Michelin, une institution gastronomique typiquement française ?

D’abord, j’ai toujours été passionné par l’univers de la cuisine. Adolescent, dans le Colorado, je travaillais déjà dans un restaurant à débarrasser les tables. Et puis, en 1974, j’ai découvert la France, à l’âge de 15 ans, lors d’un rapide tour d’Europe (Ndlr : dix pays en vingt jours !) avec mon lycée. Je me souviens comme si c’était hier de ce repas pris dans un restaurant à touristes de la place du Tertre, à Paris, derrière le Sacré Cœur. J’ai pris des moules à la provençale, une côte de veau normande et une crème caramel, le tout arrosé d’un verre de vin rouge. Mon premier verre de vin ! Une révélation... C’est ce jour là que j’ai décidé d’être Français, en pensant que j’étais né aux Etats-Unis par erreur !

• Et ensuite ? Un master en relations internationales aux Etats-Unis, un MBA à l’INSEAD à Fontainebleau, après avoir pris des cours de cuisine au Cordon Bleu, à La Varenne, puis effectué un apprentissage de cinq mois comme commis au Bistrot 121, à Paris (15e). C’est aux côtés de Jean Moussié (une étoile Michelin) que j’ai compris que j’étais bien meilleur client que cuisinier ! En fait, le Michelin a été ma bible avant d’être mon job...

• Justement, quand avez-vous intégré le groupe Michelin ?

En 2007. J’ai été embauché comme vice-président marketing et vente de la division pneumatiques motos. Quatre ans et demi plus tard, le guide Michelin cherchait un successeur pour sa direction internationale. J’ai fait part de ma passion pour la gastronomie lors d’un entretien interne. Je ne pensais vraiment pas être l’homme de la situation. Depuis, je vis un rêve. C’est une histoire incroyable !

• En quoi consiste votre fonction ?

Je manage les équipes tout en m’assurant de la qualité de la sélection des 25 éditions que nous publions dans 23 pays à travers le monde, qu’il s’agisse de guides sur une ville, une région, un pays ou avec une approche thématique. Bref, je suis souvent en déplacement, de New York à Tokyo, de Londres à Hong Kong.

• Il existe un certain mystère autour des “inspecteurs Michelin”. Pouvez-vous lever un coin du voile ?

(Sourire)... Je ne peux vous révéler leur nombre, juste vous dire qu’il y a dans leurs rangs une dizaine de femmes. Ils ont entre 30 et 70 ans. La plupart sont diplômés d’une école hôtelière et ont travaillé ensuite dans le milieu de l’hôtellerie-restauration.

Tous sont salariés du groupe, viennent de manière anonyme dans les restaurants et paient toujours leur addition. Bref, comme n’importe quel client. Ah, et puis, ils ne griffonnent jamais de note à table !!

• Drôle de métier...Oui, c’est une vie spéciale, de solitaire, à parcourir la France. En moyenne, un inspecteur prend neuf repas seul par semaine, sauf dans les grandes tables où ils sont deux. Un inspecteur ne vient pas plus de deux fois en sept ans dans le même établissement afin d’éviter d’être reconnu. En ce sens, oui, c’est un “drôle de métier” qui explique que nous avons beaucoup de célibataires ou de divorcés. Pourtant, nous avons très peu de turn-over...

• Appréciez-vous la cuisine lyonnaise ?

Oui, beaucoup, et depuis longtemps. En fait, à 17 ans, je suis venu parfaire mon français en passant une année à Grenoble. C’est ainsi que j’ai fréquenté assidument les établissements lyonnais, goûté à la quenelle, au cervelas, à la cervelle de canut... J’ai découvert ici un monde merveilleux, des saveurs nouvelles, une ville dont le cœur bat au rythme des plaisirs de la table, avec une histoire, des personnages, de Pantagruel à Rabelais. Le Lyonnais aime manger et est connaisseur.

• Mais la cité rhodanienne n’a-t-elle pas perdu son statut de Capitale de la Gastronomie ?

Non, Lyon reste une référence même si d’autres villes ont fait émerger de nouvelles tendances. La force de Lyon tient dans sa concentration exceptionnelle de restaurants de qualité mais aussi dans sa faculté à transmettre son savoir-faire gastronomique de génération en génération. Depuis la tradition familiale des mères lyonnaises, on cultive ici le sens de la convivialité, du goûteux, du généreux, le tout à prix attractifs. Cela dit, cette tradition gastronomique solidement ancrée n’exclut pas un renouvellement permanent du côté des restaurateurs, comme le confirme l’édition 2014 du guide des bonnes petites tables avec quatre nouveaux Bib Gourmands à Lyon(1), soit 16 au total dans l’agglomération et 78 en Rhône-Alpes. Un record !

• Quels sont les critères pour l’attribution des étoiles comme d’un Bib Gourmand ?

La qualité de la cuisine, la fraîcheur des ingrédients, la maîtrise des cuissons, l’équilibre et l’harmonie des saveurs, les assaisonnements, mais aussi la régularité dans l’excellence. Pour le Bib Gourmand, il faut y ajouter le rapport qualité/prix avec un menu entrée, plat, dessert ne dépassant pas 31 euros en province et 35 euros à Paris.

• Avez-vous un pouvoir décisionnaire dans l’attribution des étoiles ?

Non, je visite tous les trois étoiles mais mon opinion n’est pas prise en compte dans la décision finale. Il est vrai que l’attribution des trois étoiles répond à un process très rigoureux. Le restaurant reçoit entre 3 et 5 visites d’inspecteurs anonymes de trois ou quatre nationalités différentes : un Américain, un Espagnol, un Anglais et bien sûr un Français. Il faut que l’établissement fasse l’unanimité pour obtenir la consécration suprême.

• Vous qui voyagez beaucoup à travers le monde, la gastronomie française a-t-elle toujours une grande notoriété à l’étranger?

Oh oui... Si la cuisine est devenue un phénomène mondial, c’est en grande partie grâce à la France. C’est le seul pays, à ma connaissance, où l’on peut trouver un bon petit restaurant dans n’importe quelle commune traversée, même la plus reculée. La plupart des villages italiens ont aussi cette particularité mais avec une cuisine moins élaborée, moins sophistiquée. Effectuer un apprentissage dans un

étoilé français est presque un passage obligé pour tout chef qui veut réaliser une grande carrière à l’étranger. C’est notamment le cas au Japon, pays qui présente beaucoup de similitudes avec la gastronomie française, que ce soit en terme de tradition culinaire, de respect du produit, d’harmonie des saveurs ou de techniques de cuissons.

• La révolution du numérique n’est-elle pas en train de tuer la “poule aux œufs d’or”, en l’occurrence la version papier du guide Michelin ?

Non, ne soyez pas inquiet. Le guide Michelin reste un best-seller sans équivalent. Cela ne nous empêche pas de réfléchir à de nouveaux développements, en France comme à l’étranger. Le guide a 112 ans et il faut en permanence le faire évoluer pour qu’il soit encore là dans 112 ans. Nous avons ainsi lancé une application gratuite pour iPhone.Pour trouver de nouvelles ressources, nous proposons aussi un abonnement premium aux restaurateurs afin que leurs établissements soient mis en avant sur le site internet. Je précise toutefois qu’il y a une totale étanchéité entre notre service commercial et les inspecteurs du guide.

• Tenez-vous compte de l’avis de vos lecteurs ?

Bien sûr. Nous recevons entre 35 000 et 40 000 courriers par an. Tous sont lus mais nous sommes surtout attentifs aux critiques négatives. A charge ensuite aux inspecteurs de vérifier si elles sont fondées.

• Quel conseil donneriez-vous à un chef qui veut décrocher une étoile ?

Ne cuisinez pas pour le guide Michelin mais pour vos clients.

(1) Le Balthaz’Art (Lyon 1er), Le Bistrot des Voraces (Lyon 4e), La Table 101 (Lyon 3e) et Saveurs de Py (Lyon 4e). En revanche, l’Ouest et Léon de Lyon ont perdu leur Bib Gourmand, pénalisés par leurs tarifs jugés excessifs plus que par leur qualité culinaire.

LA RECETTE DU SUCCÈS SELON MICHAEL ELLIS

• Etre flexible, faire confiance aux autres, bien s’entourer, être exigeant avec soi-même et savoir faire partager sa passion.

• Positiver sans occulter le négatif.• Accepter de ne pas pouvoir tout

changer mais savoir changer quand on le peut.

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14 BON GOÛT – Numéro 9 – printemps 201414

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Passé le fameux tourniquet qui inscrit à lui seul l’établissement dans la catégorie Palace, le hall monumental donne sur une

cour à l’élégance classique et sur la salle à manger. Tapis précieux, tentures, colonnes de marbre, vases géants et dorures confèrent à l’endroit une grande solennité. Nous sommes au “Cinq”, le restaurant gastronomique de l’hôtel. A sa tête depuis 2008, un des plus discrets Grands Chefs parisiens, Eric Briffard, doublement étoilé. Bien plus, il est le Chef des cuisines du Georges V ce qui comprend aussi les petits déjeuners, le room service, la brasserie et les banquets. “Je n’ai jamais eu peur de me mettre en risque” avoue-t-il “même si ce n’est pas forcément le lieu idéal pour s’exprimer, dans les palaces il y a l’adrénaline ! Je vis mon métier dans sa globalité”, conclue-t-il avec satisfaction. Il est vrai qu’il a déjà l’expérience d’un autre palace prestigieux, le Plaza Athénée à Paris.

A 52 ans, ce Meilleur Ouvrier de France veut défendre au Cinq une belle table française. Une table qui fasse la synthèse de ses expériences. Depuis son apprentissage du goût dans la ferme bourguignonne de ses grands parents et ses humanités culinaires, jusqu’à Joël Robuchon qui lui a tout réappris et notamment la recherche du geste parfait. Mais aussi le Japon dont il a retenu un certain “éloge de la fadeur”, les cuissons courtes, la délicatesse des végétaux et aussi certains ingrédients dont il fût un des premiers utilisateurs en France (Yuzu, Shiso, Daikon…).

Le résultat est une cuisine contemporaine, aérienne, parfumée, savoureuse. Sur la carte, des plats aux appellations claires : L’araignée de mer au crémeux de laitue écume iodée, le Pithiviers de poule faisanne, Perdreau gris et grouse au genièvre, l’Œuf de poule mollet mousseline de topinambours et truffe noire, l’Huître plate de Cancale à la citronnelle et vin jaune, le Homard de l’île de Chausey cuit sur sel en cocotte aux algues, le Tronçon de turbot sauvage cuit vapeur au citron noir pomme de terre au beurre d’algues, le Curly Kale au gingembre, l’Épaule d’agneau de 17 heures aux aromates, le Citron de Menton moelleux aux amandes, les Fameux caramels à la peau de lait.

Pourtant, malgré sa charge et son impressionnante brigade d’une centaine de cuisiniers, Eric Briffard revendique un travail d’artisan, soucieux de choisir lui-même de vrais, beaux et bons produits. “On revient toujours aux produits” disait Alain Chapel.

Pour cela il parcourt les terroirs et sélectionne des fournisseurs passionnés comme son complice le maraîcher japonais surdoué Yamashita (Yvelines) ou Joel Thiebot, maraîcher de père en fi ls depuis 1873 dans l’Oise, le volailler Jan Dominique Fröding au Coq St Honoré, les poissons en arrivage direct quotidien, la charcuterie corse ou les homards de Chausey… “Locavore” comme on désigne aujourd’hui, Eric Briffard est un adepte des produits cultivés au plus près du lieu de consommation. Cette proximité est un engagement qui donne du sens à son métier. L’enracinement dans le terroir est un acte de défense des savoir-faire paysans, une vraie richesse patrimoniale. “Le Locavore, c’est l’exotisme d’aujourd’hui,” sourit-il. Joignant le geste à la parole, Eric Briffard propose chaque mois à sa clientèle de faire le marché avec lui pour sélectionner les meilleurs produits et participer, après un petit mâchon, à la préparation de quelques recettes ludiques dans les cuisines du palace.Eric Briffard prend du plaisir à en donner. “Il est l’exemple de ce qu’une passion peut donner à la vie” résume la philosophe Anne Deschamps à son sujet.

Rapidement, ce palois jovial et bon vivant prend conscience que pour être un bon restaurateur, il faut faire la cuisine qui vous ressemble. “Au fond de moi, la grande cuisine du Crillon avec tout ce luxe,

cet esprit pompeux ne me ressemblait pas”, reconnait-il.Les coéquipiers de l’époque vont fonder le mouvement culinaire le plus remarquable de ces quinze dernières années, la bistronomie. Mouvement d’une époque, la bistronomie est à la fois un style de cuisine et un style de restauration, alternative à la gastronomie, plus simple, moins formelle, plus accessible.Elle repose sur une cuisine traditionnelle réinterprétée, des plats de cuisiniers travaillés avec des produits exceptionnels (mais pas luxueux), remis au goût du jour. “Les bistros sont des lieux de convivialité et de proximité avec les clients, ils demandent moins de personnel, les bouteilles sont sur table et souvent le menu est unique”, analyse Christian Etchebest. Il se souvient que dans sa première cuisine de 11 m² “Au Troquet” dans le 15e arrondissement, il pouvait servir jusqu’à 150 couverts par jour.Ce qui l’anime c’est de créer un lieu où les gens se mélangent et se sentent bien et aujourd’hui il fait encore bouger le curseur, en reprenant la Cantine du Troquet toujours dans le 15e. Une brasserie ouverte 7jours/7 dès 7h du matin, un lieu de vie qui repose sur 3 fondamentaux : le produit, la gentillesse et le prix. Avec cela Christian Etchebest se fait plaisir.

A la carte, il y a d’abord les permanents : la charcuterie basque exceptionnelle “de mon ami Eric Ospital”, Terrine de pâté, Terrine de boudin, Terrine de fromage de tête, Oreilles de cochon grillées, Planche de charcuterie et jambon, et la Plancha pour les crevettes ou les couteaux. Le reste de la carte change toutes les 6 semaines, Asperges des Landes vinaigrette et parmesan, Légumes grillés huîtres et saucisse, Saint jacques purée de pomme de terre éclats de noisette ( un pêcheur lui livre plus d’une tonne de St Jacques par an !), Saumon râpé de fenouil cru, Mignon de cochon jus aux olives, Parmentier de boudin jus fumé, Riz au lait caramel laitier, Gâteau basque “de mon ami Amatxi”, sans oublier l’excellent Fromage de chèvre frais de Dominique Fabre.Gentillesse, convivialité et partage sont sa ligne de vie. Il souhaite maintenant renvoyer l’ascenseur à ceux qu’il aime. D’abord au “cochon” qu’il adore cuisiner, en lui dédiant le livre “Tout est bon dans le cochon” (First Edition) écrit à 4 mains avec Eric Ospital, grand ami et artisan charcutier basque devenu LA référence de la charcuterie affi née à l’air libre,

et créateur de la fi lière et du label Ibaiona. Livre de recettes qu’il a plaisir à réaliser, au premier rang desquelles fi gure la fameuse côte de cochon Ibaiona. Très altruiste Christian Etchebest souhaite aussi avoir une action

auprès de jeunes cuisiniers qu’il a rencontrés, pour les aider à s’installer, “je veux être une béquille pour eux” dit-il. Belle générosité.

LE CINQ Four Seasons Hôtel Georges V - 31 Avenue Georges Cinq - 75008 Paris

Tél. 01 49 52 71 54

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PARISPar BRUNO METZLÉ

Eric Briffard LE CINQ

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Avenue Georges V à Paris, les chasseurs des grands hôtels s’empressent autour des limousines. Chefs d’état, diplomates, hommes d’affaires, vedettes du show business, tout le gratin mondial descend dans ces lieux d’exception. Ici, au Four Seasons Hôtel Georges V, l’exceptionnel est quotidien.

L’Artisan du palace

apidement, ce palois jovial et bon vivant prend conscience que pour être un bon restaurateur, il faut faire la cuisine qui vous ressemble.

Tout est bon dans le cochon

LA CANTINE DU TROQUET 53 Boulevard de Grenelle - 75015 Paris

Tél. 01 45 75 98 00

Christian Etchebest LA CANTINE DU TROQUET

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Ancien membre de la “dream team” de Christian Constant au Crillon dans les années 90, avec les Fréchon, Camdeborde, Breton et Faucher, Christian Etchebest a été à bonne école. Une expérience complétée ensuite dans d’autres grandes maisons (Martinez, Grand hôtel de St jean de Luz…).

Pithiviers de poule faisanne

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printemps 2014 – Numéro 9 – BON GOÛT 15

Thierry Faucher LE BARBEZINGUE

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Akrame Benallal AKRAME

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La salle du bistro, simple et plutôt chaleureuse, est ouverte sur la cuisine. Pourtant dans un coin un détail vous surprend : un fauteuil de barbier, un grand miroir et tout le nécessaire

au rasage de près. Petit à petit d’autres détails incongrus vous interpellent, une ardoise annonce un os à ronger à 1 €, des bouteilles aux étiquettes signées Siné. Ces découvertes ont le don de réjouir le Maître des lieux Thierry Faucher. Lui aussi apôtre de la bistronomie, le pince sans rire de la bande de Christian Constant au Crillon est venu recréer ici une Auberge, au sens originel du terme. Un lieu qui propose quelque chose à toutes les clientèles et à tout moment et où chacun a ses habitudes. “Chacun doit s’approprier le lieu et la cuisine” explique Thierry Faucher.Au rez de chaussée, la salle du bistro pour repas d’affaires ou d’amis et un bar pour personnes seules ou initiées. A l’étage, une table d’hôtes pour les familles ou les banquets. Un lieu pour les dimanches de printemps sur la terrasse avec le terrain de boules ou pour les soirées d’hiver.A la table d’hôtes, où chacun se sert, il y a toujours deux potages (un chaud et un froid), des terrines à volonté, des tripes, des plats campagnards, navarins d’agneau ou manchons de canard aux mojettes (Thierry Faucher est charentais). Bientôt on pourra aussi manger à la boutique des sandwiches avec du pain pétri et cuit maison ou des omelettes “arrangées”.Quant au bistro, on y retrouve toute la gourmandise des recettes du chef : Soupe d’étrilles à la crème aillée petits croûtons,

copeaux de comté et coriandre, Poireaux vinaigrette huître rôtie et tranche de ris de veau poêlée, Terrine de boudin à la plancha céleri rémoulade, Fricassée d’asperges et ceps œuf mollet et tartine de moelle, Poitrine de cochon à la plancha choucroute de navets au jus…Enfi n, l’os à ronger au bar est une spécialité très recherchée mais moins austère que prévue : un bout du carré de veau rôti, mijoté dans un bouillon de pot au feu, moutardé et pané.Un moment de délicieuse régression.A ne pas rater le p’tit déj du barbier (exclusivité du Barbezingue) avec vos bons amis le vendredi matin : chacun se fait raser à tour de rôle pendant que les autres enchainent terrines, crudités, œufs au plat, os à moelle. En supplément, perdreaux, civelles ou omelette truffée… Et puis à 11h la pétanque arrosée d’un magnum de Beaujolais Marcel Lapierre ! Du savoir vivre quoi !Savoir vivre et qualité de vie deux préoccupations essentielles pour Thierry Faucher. Et pour aller encore plus loin, il construit sur place une cave à vin voutée pour ouvrir un wine bar et un trinquet (fronton caractéristique pour jeu de paume basque) pour recréer un petit coin de pays basque cher à son épouse. Un lieu qui pourra servir aux banquets de plein air. Magnifi que !

LE BARBEZINGUE 14 Boulevard de la liberté - 92320 Châtillon

Tél. 01 49 85 83 50

Saucer l’assiette

Comme un bistro du coin de la rue, minuscule, sans enseigne, le restaurant de Pierre Sang Boyer

ne peut accueillir qu’une quinzaine de convives (en réalité une petite salle au sous sol permet de monter le total à25 personnes). Le principal équipement de la pièce est un grand comptoir de bois massif sur lequel trône une superbe fourme de Cantal entière.Ce bistro est devenu en quelques mois un des points de repère de la planète gastronomique parisienne.Oui Pierre Sang est habité par un génie créatif. Tout lui sourit, comme il sourit à tous, il vous emporte avec son enthousiasme et son propre étonnement. Un enthousiasme qu’il communique d’abord à son équipe qui le transmet à son tour aux clients. Pendant le service, clients, cuisiniers, serveurs ne font qu’un. Servis par l’exigüité des lieux, Pierre Sang et ses cuisiniers préparent à moins d’un mètre les plats que les convives vont déguster et commenter en direct. C’est la cuisine en salle ou la salle en cuisine, comme on voudra ! Pierre Sang plaisante avec les clients et donne ses consignes à Lisa qui mixe une sauce à côté de lui, tout en dressant l’assiette qu’il va servir. Impressionnant.Révélé autant à lui-même qu’au public par l’émission Top chef il y a 3 ans, la cuisine de Pierre Sang est aujourd’hui le fruit d’infl uences multiples, des plats créés par lui ou réinterprétés de Mémé Boyer sa grand mère de Haute Loire, des plats issus de ses voyages ou d’origines coréennes et asiatiques.Pour commencer un plat signature composé d’andouillette en tempura, thon cru, sauce béarnaise et feuille de fi coïde (très douce), pour suivre une huître et calamar mariné au piment (qui claque dans la bouche) crème douce et grain de grenade, ou encore ce mélange de croquant et piquant, re-création du hareng pomme de terre, composé de spaghettis de pomme

de terre juste pochés, hareng sauce choux fl eur, piment coréen et œuf de hareng. Mention spéciale pour l’œuf cuit à basse température (62° pendant 25 minutes) feuille de Nori, nappé d’une sauce au boudin relevée de Kimchi (légume fermenté coréen) et pour l’étonnante glace de petit pois, lamelles d’asperges blondes huile d’olive.Tout cela avant l’entrée en scène du magnifi que morceau de Cantal associé à une compote de coing et des desserts tout aussi goûteux.L’adjoint de Pierre Sang, Damien, se charge d’assortir ces plats avec des vins eux aussi surprenants comme l’Acamilla Basilicata 2011 cépage Malvoisin très peu fi ltré ou ce Saumur Domaine Bobinet. Le service très professionnel est de bon conseil.Au fi nal un grand moment de partage authentique et sincère. Alors bravo à Pierre Sang, Lisa, Rodolphe, Thomas, Damien, Song, Mathieu, David, Sarah, Li.

PIERRE SANG IN OBERKAMPF 55 Rue Oberkampf - 75011 Paris

Nous voici à Châtillon, banlieue sud ouest de Paris. En poussant la porte vous vous dites sans doute, mais quelle idée d’être venu ici et quel drôle de nom ? Nous voici à Châtillon, banlieue sud ouest de Paris. En poussant la porte vous vous dites sans doute, mais quelle idée d’être venu ici et quel drôle de nom ?

Quelle expérience extraordinaire de déjeuner au Comptoir de Pierre Sang Boyer rue Oberkampf à Paris (11e) ! A la manière d’un close up, ces magiciens qui font des tours de cartes invraisemblables, sous vos yeux, Pierre Sang Boyer réalise avec une grande décontraction des plats d’une fulgurance incroyable.

Close up en cuisine

Un petit coin de savoir vivre

Pierre Sang Boyer PIERRE SANG

IN OBERKAMPF• • • • •

Akrame c’est une histoire comme on les aime ; un garçon issu d’une famille modeste qui a appris à se débrouiller

seul, débarqué d’Algérie à 14 ans. Passé entre temps chez Pierre Gagnaire, Alain Soliveres et Ferran Adria entre autres, à 33 ans il défraye la chronique.Malgré l’engouement qu’il suscite, il garde la tête froide, fi dèle à des principes de bon sens. “Quand un client sort de chez moi il faut qu’il ait déjà envie de revenir.” La bonne cuisine c’est celle qui a du goût, celle qui donne envie de saucer son assiette, il ne fait pas une cuisine de mode. Il se sent porteur d’un héritage, d’un savoir faire. Il faut que ça soit bon. Faire bon et respecter la règle des 3 saveurs (3 saveurs maximum dans un plat).Infatigable, Akrame change sa carte tous les quinze jours, voire toutes les semaines… Avec une telle rotation de plats, il fait beaucoup de croquis pour se souvenir de ses recettes.Un travail sur le fi l du rasoir comme il le dit lui-même car à 4 ou 5 cuisiniers dans

une cuisine de 5m², il a déjà gagné le championnat du monde de la plus petite cuisine 2*. De cette exigüité Akrame en fait un atout, “5m² c’est parfait, nous ne pouvons rien stocker, ça nous oblige à nous approvisionner tous les matins en produits frais et à faire toutes nos préparations pour la journée. Rien n’est fait à l’avance.” C’est sans doute aussi cela qui donne de l’âme à ses assiettes.Pour tester une nouvelle carte ou un nouveau menu dégustation, il s’assoit en salle et se fait servir comme un client. “Un nouveau menu c’est comme un bon fi lm, il doit raconter une jolie histoire qui s’enchaine bien” précise Akrame.La première source d’inspiration d’Akrame c’est la saison, ensuite ce sont des moments ou des rencontres qui nourrissent son intuition. “En cuisine il ne faut pas vouloir en faire de trop. Un homard je le cuis à table devant le client dans une infusion. Les lentilles je les fais revenir dans du beurre demi sel avec de la cardamone, un fond blanc et du

parmesan. Une poire je la cuis avec la peau avec du caramel de bière et j’y ajoute une glace à la bière.”Le bon goût pour Akrame, c’est la France, le plus beau pays du monde avec des produits d’une qualité inestimable, et il cite dans le désordre ses fournisseurs : “le miel de Marcel à Cléré les Pins, les légumes du Mont St Michel de Gérard Legruel, les herbes de Stéphane Meyer, les huîtres de Cancale de Pierre Pichot, le vinaigre de Pineau des Charentes de M Fleurier”.Akrame va vite, mais il n’est pas seulement grisé par la vitesse, il est aussi sensible aux valeurs d’élégance du travail bien fait, à l’instar de la Morgan de ses rêves, à la fois “cousue main” et innovante.

Akrame Benallal revient de loin. Pourtant il n’était pas parti avec les mêmes moyens que ses concurrents. Lancé à fond, tel l’outsider, cet amoureux de la vitesse et des sports mécaniques est maintenant présent dans le groupe de tête de la cuisine parisienne, lauréat d’une seconde étoile dans l’édition 2014 du guide Michelin.

AKRAME 19 rue Lauriston - 75016 Paris

Tél. 01 40 67 11 16

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16 BON GOÛT – Numéro 9 – printemps 201416

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Anthony Fusco LA TABLE

DE LACHASSAGNE • • • • •

Installé avec son épouse Maevaà Lachassagne depuis juillet 2009, Anthony Fusco (plus jeune chef étoilé

de France, à 27 ans) est guidé par des principes simples : faire ce qu’on sait faire, ce qu’on aime faire, comme si on recevait chez nous, faire une cuisine de produits choisis avec soins, en quantité limitée (le restaurant ne compte qu’une vingtaine de couverts).

Une recherche de plaisirs qu’il dédie à ses clients. Ne cherchez pas à savoir à l’avance ce que vous allez déguster, le jeune chef lyonnais lui-même ne le sait pas. Imprévisible, il cultive un registre créatif et raffi né, une cuisine d’instinct.Le mieux est de se laisser faire et surtout de le laisser conjuguer ses gammes culinaires avec les vins du Beaujolais dans un subtil accord mets et vins.A défaut vous pourrez choisir l’un des deux menus (47 € ou 65 €) qui changent au gré des saisons et du marché. “Il faut attendre la saison !” dit il avec sagesse. Le gibier à l’automne, les légumes l’été…Vous pourrez déguster ainsi selon la saison : Asperges parmesan et jambon bellota, Risotto Carnaroli truffe noire et vieux parmesan, Lieu jaune choux fl eur coquillage et clémentine, ou Mignon de veau sous la mère variations de choux.“J’aime mettre les abats au goût du jour, les anoblir par des associations inattendues : Tête de veau / langoustines ou foie gras, boudin noir / St Jacques. J’aime aussi travailler les légumes,

betteraves, salsifi s, choux de Bruxelles, petits pois, asperges… J’aime aussi les grosses pièces cuites à basse température comme le carré de cochon.”Anthony Fusco ne confi e à personne le soin de préparer les assiettes. Omniprésent, il est seul en cuisine. “Je cuisine comme j’aime manger. Je fais très peu d’essais, je travaille au feeling.”Une inspiration et un talent étoilés il y a 2 ans. “J’ai été le premier surpris d’avoir été étoilé. Cette récompense, c’est aussi un message fort du Guide Michelin. Chacun a sa chance dans la course à l’étoile.” 80 000 restaurants en France, 5000 restaurants cités dans le guide, 450 étoilés et la Table de Lachassagne en fait partie ! Une étoile ça signifi e “une très bonne cuisine dans sa catégorie” précise-t-il avec humilité. Pour les vins, l’axe Bourgogne, Beaujolais, Vallée du Rhône constitue son credo.“Je suis persuadé qu’on peut tout accommoder avec du Beaujolais”, confi e-t-il. De fait Anthony Fusco sélectionne personnellement sa cave. On y retrouve les fi nes lames de la production beaujolaise : Jean Paul Brun à Charnay pour le blanc, Jean Paul Dubost Domaine de Fracot à Lantigné, le Domaine du Wissous de PM Chermette à St Véran, le Chénas de Paul Henri Tillardon sans oublier son voisin Olivier Bost Platière du Château de Lachassagne… “L’étoile même si elle nous a boosté, ne nous a pas mis de pression supplémentaire. La pression, c’est le client qui la met.”

C’est pourtant ce qui a failli arriver quand l’Auberge a fermé ses portes fi n 2012, si deux grands noms de la cuisine et du vin n’en avaient décidé autrement. Alain Ducasse et

Georges Duboeuf. Excusez du peu ! L’un et l’autre, ne pouvant se résoudre à voir disparaitre une institution de la gastronomie beaujolaise, se sont penchés sur elle à la manière de deux bonnes fées. L’un en rachetant les murs du restaurant et l’autre en recherchant un chef à la hauteur de la reprise. Alain Ducasse a ainsi proposé à l’un de ses poulains, Alain Souliac, resté 10 ans à ses côtés (Moustier Ste Marie, Benoit, Bidarray), de reprendre les rênes de l’Auberge du Cep.Ancien rugbyman, Alain Souliac a foncé. Associé à Laurent Lachize en salle, il relève le challenge en suivant une ligne de conduite claire, assurer la continuité de la maison. Son expérience au St James à Bouliac ou dans le groupe Ducasse lui a appris à s’adapter aux différentes régions et à s’attacher à simplifi er la cuisine autour du produit.Homme de terroir, originaire de Corrèze, il se défi nit lui-même comme un cuisinier de terroir qui prend plaisir à cuisiner les produits locaux. Il était un candidat idéal pour décliner à nouveau le répertoire de la maison : Escargots, Meurette d’œufs pochés au vin, Foie gras de canard rôti et lentilles du Puy, pigeon rôti au jus de Salmis (jus, vin, vinaigre et sauce liée aux abats de pigeons), Sandre au verjus (sauce réalisée avec le jus du

raisin vert, vin blanc, échalote et montée au beurre) ou encore Fricassée de volaille comme un coq au vin de Fleurie, Cassis de Lancié, jus tiède, Sorbet fromage blanc, Île fl ottante aux pralines.Ambassadeur du vin de Fleurie, la carte des vins ne pouvait pas être composée autrement qu’avec du Fleurie et du Beaujolais. 130 références, 130 Beaujolais !Au fi nal, Alain Souliac a retrouvé l’âme de L’auberge du Cep sur des valeurs sûres parfaitement réalisées. Un travail récompensé par une étoile Michelin dans l’édition 2014.

Perchée dans ce village des Pierres Dorées, La Table de Lachassagne offre l’une des plus belles vues sur le Val de Saône. C’est aussi l’une des plus belles découvertes gastronomiques des environs de Lyon.

Ce pourrait être le titre d’un James Bond. C’est surtout la mission de Yohann Chapuis depuis qu’il a repris en 2008 le “phare” gastronomique du mâconnais, le fameux restaurant Greuze à Tournus, dont l’évocation sonne comme une promesse d’agapes.

Fleurie, un vignoble réputé autour du village éponyme. Mais Fleurie ne serait pas tout à fait Fleurie sans l’Auberge du Cep, la table étoilée emblématique du village.

LA TABLE DE LACHASSAGNE 850 route de la colline - 69480 Lachassagne

Tél. 04 74 67 14 99

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Rhône-Alpes

L’AUBERGE DU CEP Place de l’Eglise - 69820 Fleurie

Tél. 04 74 04 10 28

Yohann Chapuis GREUZE

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Alain Souliac L’AUBERGE

DU CEP • • • • •

L’Auberge du Cep refleurie

Il fallait du courage pour redonner vie à cette institution marquée par les 56 années de règne de Jean Ducloux qui en a écrit les “riches heures”. De l’audace aussi pour faire face à la concurrence des 4 restaurants

étoilés de la ville. Avec 7000 habitants, Tournus est la ville la plus étoilée de France proportionnellement au nombre d’habitants.

Un balcon sur le Val de Saône

Par BRUNO METZLÉ

Les Grandes Maisons

ne meurent jamais !

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printemps 2014 – Numéro 9 – BON GOÛT 17

Une fois n’est pas coutume, à l’Alexandrin, il n’y a pas de carte, mais 3 menus thématiques.Menu dégustation “A table”, Menu lyonnais, et Menu “Tendance légumes”. Un parti pris revendiqué par Laurent Rigal qui lui permet de décliner son style.

Le menu Dégustation “A table” met en scène des produits nobles, Foie Gras, Homard, Turbot, Pigeons, agrémentés d’épices ou de chutney. A la saison, ce menu est également proposé avec des truffes noires de la Drôme (y compris sur le dessert).L’amateur de “lyonnaiseries” trouvera son compte avec le menu “L’Esprit de Lyon” ; des classiques revisités comme cette fi ne tartine d’escargots sur tombée de poireaux et pieds de cochon en persillade, la Quenelle de brochet crémeux d’écrevisses, ou encore la Volaille de Bresse au vinaigre pomme de terre et poêlée de champignons.Enfi n le menu “Tendance légumes”, très original inspiré par Alain Alexanian dont il fût le second pendant 10 ans : Velouté de courges, châtaignes caramélisées, noisettes torréfi ées et son émulsion de curry, ou Tagliatelle de céleri aux truffes, œuf poché et son crémeux, ou encore la déclinaison de pommes et panais au curry, coulis d’airelle, fraicheur pomme Granny Smith.Les desserts aussi font l’objet d’une variation thématique, à partir d’un ingrédient central comme le chocolat avec la fameuse Madeleine au chocolat “Guanaja”, l’éclair très en vogue actuellement, mais revisité, mousse café, chocolat blanc et praliné, glace vanille et coulis au café, ou encore la truffe avec le macaron mousse légère au fromage blanc truffé, coulis de pruneau au vin rouge.Au fi nal, une cuisine passionnée dont la précision a sans doute été héritée de Pierre Gagnaire avec qui Laurent Rigal a travaillé à St Etienne et qui lui a conseillé d’aller à Lyon. Une cuisine à déguster dans l’atmosphère feutrée et chaleureuse de la salle ou à la table d’hôte située en cuisine (2 à 4 personnes), une expérience unique, dans le feu de l’action.Ancien boxeur, ce puncheur a retrouvé son étoile en mars dernier. “La perte d’une étoile est un malheur immense, la retrouver est un bonheur immense, nous n’avons rien changé, nous sommes restés nous même”, nous confi e Laurent.

Depuis ses premières armes à l’Hôtel de France à Charolles jusqu’à Lameloise en 2004 où il a participé à la reconquête de la 3e étoile, Yohann Chapuis a acquis une expérience solide dans les grandes maisons : Orsi, l’Auberge des Templiers, la Pyramide. Yohann Chapuis a entrepris de réussir sa reprise grâce à une cuisine créative mélangeant tradition et modernité. L’escar-œuf par exemple, plat signature de la maison (œuf en île fl ottante et bouillon de trompettes de la mort), la poitrine et cuisse de pigeonneau poire de fer au vin rouge et épices douces ou encore la sole de “Petit Bateau” pousse pieds (en tempura) et crumble à l’encre de seiche.Peu d’épices, mais des touches justes (bouillon de truffe fumée, graines torréfi ées, senteurs de sous bois…), et quelques plats issus du terroir en hommage à Jean Ducloux : Quenelles de brochet et viennoise de cèpes secs, Volaille de Bresse pochée et rôtie, Souffl é chaud au Grand Marnier.Yohann Chapuis honore ses fournisseurs en les citant sur la carte en regard de chaque plat. Des fournisseurs sélectionnés au plus près du restaurant. La tendance actuelle est

au produit frais mis en valeur par le tour de main du cuisinier, “même s’il est diffi cile de trouver des petits producteurs,” précise Yohann Chapuis. En voici quelques uns : les pigeons d’Alain Michon, producteur bressan, les volailles de Jacques Morand à Bantanges (71), la viande de la boucherie Trolliet à Lyon, les brochets, sandres (de 600 gr) et cuisses de grenouilles fraîches de Jean Thomas à Vuillard – Bresse Aquaculture à La Chapelle St Sauveur (71). La cuisine de Yohann Chapuis a été récompensée très rapidement par une étoile en 2009, et par le Trophée de la Grande Table de l’année en novembre dernier lors des Trophées de la Gastronomie de Lyon. Le long de la Nationale 6, à mi chemin de Lyon et de Dijon, mais aussi de Paris et de la Méditerranée, Greuze a toujours ses afi cionados. Nombreux sont les clients de passage qui viennent s’attabler au côté des Bourguignons pour perpétuer l’histoire.

De la fi gure poétique du même nom qui défi nit un vers en douze syllabes, l’Alexandrin pourrait retenir l’équilibre. L’équilibre de la cuisine proposée par Laurent Rigal à travers ses menus.

GREUZE 1 rue Thibaudet - 71700 Tournus

Tél. 03 85 51 13 52

Alain Vigneron CAFÉ COMPTOIR

ABEL • • • • •

En poussant la porte, d’Abel vous pénétrez comme téléporté, dans l’univers canaille d’une auberge

du XIXe siècle, où chaque convive arbore une mine joviale et gourmande. Un décor patiné à souhait, “dans son jus”, éclairé par la lumière douce des opalines, chaises et tables bistro, boiseries constellées de réclames de boissons d’autrefois, parquet qui craque. Comme au théâtre, les clients s’exclament au rythme des plats servis.Si les murs pouvaient parler, ils diraient combien de générations de bons vivants se sont succédées d’hier jusqu’à aujourd’hui pour se délecter des plats faits maison tirés d’un répertoire qui magnifi e les abats, tripes, foies, rognons et ris de veau… Les volailles, le saucisson de Lyon, les pièces de bœuf…Abel n’est pas le plus vieux restaurant de Lyon pour rien ! C’est un musée vivant, un conservatoire des savoirs faire de la cuisine des Mères grâce au Chef Alain Vigneron, en cuisine depuis 37 ans, et à sa brigade. Ici chaque plat est un hommage rabelaisien. On croise le fer pieusement ou bruyamment autour d’une poule au riz sauce suprême, d’un poulet à la

crème aux morilles, de rognons de veau sauce madère, d’un gratin d’écrevisses, ou d’une côte de veau fondante et caramélisée. Les artichauts haricots verts justes cuits ont une saveur intacte, les ris de veau dorés à souhait crépitent encore dans leur poêlon en arrivant sur table, comme la quenelle de brochet, aérienne, sortie du four tel un obus allongé dans la sauce et son écrin de fonte. Même le riz pilaf cuit au bouillon de poule laisse un souvenir impérissable.Après un fromage blanc à la crème ou un demi St Marcelin, le rayon sucré n’est pas en reste : le baba gorgé de rhum avec son panache blanc de Chantilly est un péché et le sorbet châtaigne et chocolat chaud franchement diabolique. Question fl acons, il y a de quoi alourdir sa pénitence. Une carte plutôt maline de Côtes du Rhône où l’on dénombre un Syrah d’Yves Cuilleron, un Côte Rôtie des vins de Vienne, un Crozes Hermitage de Chave Père et Fils ou un St Joseph de chez Christophe Curtat.Si le rez de chaussée est bouchon, Abel se mue en bistro bourgeois en accédant aux salons de l’étage. Plafonds et parquets à la française,

tapisserie de velours écarlate aux murs, lustres à facettes et appliques art déco donnent une certaine emphase à la grande salle. Ici, groupes et banquets tiennent leurs agapes.Mais ce n’est pas tout, en saison, la terrasse est l’occasion de goûter les douces soirées de ce quartier d’Ainay rafraîchi par la Saône et aussi de découvrir une carte plus légère.Lieu d’histoire et de tradition, il a séduit de nombreux réalisateurs et acteurs de cinéma. Vous prendrez place peut être à la table de Bertrand Tavernier, Clint Eastwood, Michel Galabru, Philippe Noiret, Nathalie Baye, Gérard Lanvin, Lambert Wilson, Sophie Marceau et tant d’autres, qui ont tourné ici : une semaine de vacances, l’horloger de St Paul, les Lyonnais, Alias Caracalla… et le dernier en date Barbecue qui fait la part belle à cette institution lyonnaise. Il ne tient pourtant qu’à chacun de se muer en acteur en s’attablant dans cette vénérable maison.

“A la Voute d’Ainay” ; une adresse qui sonne comme un rendez vous non loin des quais de Saône, face à l’Abbaye, joyau lyonnais de l’Art Roman. Blottie derrière la voûte qui enjambe une ruelle pavée, la façade à petits carreaux de bonne auberge à l’enseigne Abel, est engageante.

CAFÉ COMPTOIR ABEL A la voûte d’Ainay - 69002 Lyon

Tél. 04 78 37 46 18

Laurent Rigal L’ALEXANDRIN

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L’ALEXANDRIN 83 rue Moncey - 69003 Lyon - Tél. 04 72 61 15 69

“A la Voute d’Ainay” ; une adresse qui sonne comme un rendez vous non loin des quais de Saône, face à l’Abbaye, joyau lyonnais de l’Art Roman. Blottie derrière la voûte qui enjambe une ruelle pavée, la façade à petits carreaux de bonne auberge à l’enseigne Abel, est engageante.

La cuisine à thèmes de l’Alexandrin

Le Conservatoire

du goût lyonnais

Les Grandes Maisons

ne meurent jamais !

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18 BON GOÛT – Numéro 9 – printemps 201418

Par PASCAL AUCLAIR

UN GOÛT DE RÉUSSITEStéphane Bourdonnec, gourmet à la sauce fi nancière

Adepte de la mobilité géographique, Stéphane Bourdonnec a vu du pays depuis ses débuts

à la Société Générale. “J’avais dix-sept ans et demi. Je venais de rater mon Bac. J’ai commencé comme employé aux écritures”, se remémore-t-il. Depuis, ce globe-trotter de la banque est resté fi dèle à ses premiers

amours, que ce soit sur le plan professionnel ou sentimental. Marié

depuis 32 ans à Josiane, “la secrétaire de mon premier patron”, père de trois enfants, déjà deux fois grand-père, Stéphane Bourdonnec agravi progressivement

toutes les marches qui mènent vers les sommets de l’organigramme bancaire.

“J’ai suivi toutes les formations. La Société Générale est une formidable école pour s’épanouir”. A force de persévérance, il va ainsi “recoller au peloton” des diplômés, et bientôt dépasser la plupart en faisant preuve de pugnacité, d’opportunisme et d’une polyvalence à toute épreuve. “J’en suis à ma onzième affectation. Je pense avoir connu la plupart des métiers de la banque, de simple conseiller à directeur d’agence.” Lille, Le Havre, Caen, Rennes... Après avoir sillonné le grand Nord-Ouest de la France, Stéphane Bourdonnec a mis le cap au sud, il y a deux ans, pour prendre en main la délégation régionale Rhône-Alpes, Auvergne et Bourgogne. La plus importante de l’Hexagone - derrière l’Île-de-France - particulièrement active sur les marchés de l’entreprise qui revendique plus d’un million de clients répartis dans 300 agences et gérés par 3 000 salariés. “J’ai découvert Lyon, une ville à taille humaine qui offre tous les avantages d’une grande métropole dans un rayon assez concentré. Une ville dynamique avec une organisation complexe, pas facile à décoder et à pénétrer”, souligne le banquier, comblé par la programmation de l’Opéra de Lyon, la proximité des stations alpines et l’excellence de la gastronomie locale. “Fonctions professionnelles obligent, je suis tous les midis et souvent le soir au restaurant. Pour ne pas prendre trop de poids, je privilégie le poisson, ce qui est souvent frustrant compte tenu de la richesse de la cuisine lyonnaise”. Afi n de conserver la ligne, Stéphane Bourdonnec s’astreint aussi chaque

matin, à 4h50, à une petite heure de cardio-training avant de rejoindre le siège de la Part-Dieu. “La table, ce n’est que du bonheur”, sourit-il, évoquant avec émotion ses petits plaisirs épicuriens partagés en famille autour d’un pain de lotte et d’un “couscous normand” chargé de beurre, l’une des spécialités de son épouse...“La vita e bella !”, s’exclame le Délégué Général de la Société Générale, dont la brillante carrière pourrait le mener à prendre une direction à l’étranger, à moins d’intégrer le staff parisien,

boulevard Haussmann. “En attendant, je savoure chaque jour la vie lyonnaise. Ici, il ne manque que l’océan !”

SA RECETTE DE LA RÉUSSITE • Avoir la chance de faire les bonnes

rencontres et savoir en profi ter.

• Prendre du plaisir dans son travail.

• Rester humble et lucide en toute circonstance.

Délégué Général de la Société Générale sur Rhône-Alpes, Auvergne et Bourgogne, ce Breton voyageur a fait toute sa carrière au sein du grand groupe bancaire. Depuis deux ans, il découvre les agréments de la vie lyonnaise, et notamment l’excellence de sa gastronomie...

"La table, ce n’est que du bonheur"

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Stéphane Bourdonnec

LES BONNES ADRESSES DE… STÉPHANE BOURDONNEC

Amateur de bonnes tables et de grands vins, Stéphane Bourdonnec a connu l’extase en savourant une Romanée-Conti et une sole meunière préparée par Pierre Gagnaire, rue Balzac, à Paris. En terre lyonnaise, le banquier se rend deux à trois fois par semaine aux Halles de Lyon-Paul Bocuse pour déguster une douzaine d’huîtres Gilardeau numéro 2 “avec une pincée de poivre” arrosée d’un pot de Macon. “Je privilégie les établissements proches du siège de la Part-Dieu, ce qui me permet de fumer mon cigarillo au retour”, confi e le Délégué Général de la Société Générale, qui a ainsi ses habitudes au Cazenove, l’annexe de Pierre Orsi, rue Boileau (69006) et à la Brasserie des Brotteaux, place Jules Ferry (69006). “Ma première terrasse lyonnaise. Je me souviens y avoir pris un cabillaud juste cuit”. Il apprécie aussi la cuisine du Comptoir d’Alice (rue Duguesclin, 69006), et la vue de la Villa Florentine (montée Saint-Barthélémy, 69005). Enfi n, Stéphane Bourdonnec invite ses gros clients et fête le départ à la retraite de ses cadres dans un “lieu magique”, en l’occurrence chez Paul Bocuse, à Collonges-au-Mont-d’Or.

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printemps 2014 – Numéro 9 – BON GOÛT 19

LE GOÛT DES AUTRESPierre Villefranque, le meilleur ami des entrepreneurs

Il a l’accent chantant des gens du Sud-Ouest et le contact facile des épicuriens bien dans leur assiette.

Originaire de l’Aude, diplômé deSciences-Eco Toulouse, Pierre Villefranquea beaucoup “ bourlingué ” dans lasphère publique, de Perpignan à Montpellier, avant de poser ses valises à Lyon, il y a bientôt dix ans.“Dix ans de bonheur !”, lance d’emblée le Directeur Régional Grand Rhône deBpifrance. “J’ai découvertici une terre riche en talents, un formidable creusetpour l’entrepreneuriat etu n e n v i r o n n e m e n téconomique idéal pour développer nos activités. En fait, il ne manque que la Méditerranée...”. Mei l leur ami des entrepreneurs, détenu à parts égales par l’Etat et la Caisse des Dépôts, Bpifrance accompagne et fi nance le développement des entreprises à toutes les étapes de leur vie, de l’amorçage à leur transmission, de la création à l’ouverture sur l’export. “On est à la fois l’accompagnateur, le facilitateur et l’amplifi cateur pour l’octroi de crédits. On apporte des solutions lorsque les banques n’y suffi sent pas, que ce soit à travers un fi nancement direct ou en garantie”, explique Pierre Villefranque. Pour mener à bien ces multiples missions, ce dernier dispose d’une “boîte à outils” exploitée par 35 chargés d’affaires qui sillonnent la région entre Lyon, Valence et Saint-Etienne.“En 2013, sur le Grand Rhône, plus de 9 000 entreprises ont bénéfi cié de notre intervention, de la TPE de moins de 20 salariés à l’ETI jusqu’à 5 000 salariés avec des montants variant de 15 000 à 50 millions d’euros, l’essentiel en garanties bancaires”, détaille le directeur régional, dont les

interventions concernent aussi bien un besoin de trésorerie qu’une stratégie d’ouverture sur l’international, une opération de croissance externe ou de développement organique sans oublier le soutien à l’innovation, dans l’ADN de cette banque publique. Dans ce contexte, la crise a-t-elle dopé les activités de Bpifrance sur la région ? “Clairement, oui. Après le choc de 2009, il a fallu imaginer de nouveaux

produits pour aider les entreprises à encaisser le choc et prendre le relais des banques. Cela dit, depuis le début d’année, les banquiers sont moins frileux, ce qui nous permet de retrouver notre rôle de prédilection, à savoir dynamiseur de

l’économie à travers l’entreprise”.Dans quelques semaines, Pierre Villefranque sera amené à quitter son

siège de la Part-Dieu pour piquer au sud. Cap sur Marseille. Même si cette promotion le rapprochera de la Grande Bleue, il aborde aussi cette nouvelle étape professionnelle avec petit pincement au cœur. “Je n’ai pas vu passer ces dix ans à Lyon. J’ai appris à apprécier l’art de vivre à la lyonnaise, et notamment sa gastronomie. Les quenelles et le tablier de sapeur vont me manquer !”, conclut le futur “minot”, avant de nous donner rendez-vous cet été autour d’une bouillabaisse sur le Vieux-Port...

SA RECETTE DE LA RÉUSSITE • La volonté d’agir et l’optimisme

d’y croire.• Donner pour obtenir le meilleur

des autres.• Être clairvoyant pour envisager

l’avenir avec lucidité et réalisme.

Depuis bientôt dix ans, le directeur Grand Rhône de Bpifrance accompagne etfi nance le développement des entreprises. Une mission qui l’amène à fréquenter régulièrement les bonnes tables de la région.

"J’ai découvert ici une terre riche en

talents…"

Par PASCAL AUCLAIR

Pierre Villefranque

LES BONNES ADRESSES DE… PIERRE VILLEFRANQUE

“Après un entretien, j’aime bien partager le couvert avec mon client. On échange mieux, on se révèle aussi parfois, à la faveur d’un déjeuner informel autour d’une bonne table”, estime le Directeur Régional Grand Rhône de Bpi France. Proche de ses bureaux de l’avenue Thiers, Pierre Villefranque rend ainsi souvent visite à la Brasserie des Brotteaux pour savourer le tartare maison, “le meilleur de la ville”, (place Jules Ferry, 69006) ou opter pour la suggestion du jour d’Alex. Boulevard des Brotteaux, il fait aussi de fréquentes haltes gastronomiques au Café du Peintre, loué pour sa tête de veau braisée, mais il peut aussi faire le déplacement jusqu’au centre-ville pour se délecter d’une selle d’agneau à la Rémanence (rue du Bât d’Argent, 69001), voire pousser jusqu’au quartier d’Ainay pour commander une généreuse quenelle de brochet ou un rognon de veau sauce Madère préparé par Alain Vigneron, le chef du Café Comptoir Abel.

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GOÛT DE GÉNIE

“Maman cherchait toujours ses lunettes pour lire la carte du restaurant ou pour signer un

chèque”. Faute de pouvoir lui “prêter ses yeux”, Quentin Couturier a eu l’idée, avec ses deux copains d’enfance, de concevoir une gamme de lunettes pour presbytes en libre-service dans certains lieux publics. Le principe ? Relancer la mode des face-à-main, ces objets incongrus avec leur tige surmontée d’une monture que l’on approche des yeux pour lire un ouvrage ou un simple formulaire. Inspirées d’un accessoire en vogue dans les salons mondains du XVIIe siècle, les lunettes See Up font d’abord de l’œil aux business angels avant de faire leur apparition, en mai 2011, aux guichets d’établissements bancaires et chez certains agents d’assurances lyonnais et parisiens. La start-up passe du stade des prototypes à une large diffusion, d’abord auprès des

professionnels, en décrochant le prix Innover Entreprendre d’ESCP-Europe. A la clé, un chèque de 120 000 euros et un joli coup de projecteur sur une initiative “made in France”, les lunettes étant fabriquées à Oyonnax. “Trois petits jeunes qui montent une entreprise avec un concept original, ça ne pouvait qu’attirer la sympathie !”, sourit Quentin Couturier. Enquelques mois, les face-à-main font lebuzz dans la presseféminine et sur les plateaux de télévision. Une série See Home, dédiée aux particuliers, puis une autre baptisée See Magnet, dotée d’un support magnétique, complètent la gamme. Fort de cet engouement, les trois mousquetaires de l’optique passent à la vitesse supérieure, en septembre 2013, avec le lancement de

LetmeSee, une gamme de 18 lunettes de lecture designs et colorées. “On a fait le constat que les lunettes de vue étaient considérées comme un accessoire de mode, donc vendues chères, alors que les lunettes de lecture étaient cheaps et moches. Il fallait juste

les rendre plus funs !”, confi e Charles Brun. Sur le modèle de Swatch, la start-up a ainsi créé “un accessoire de mode chic et de qualité à prix accessible” dont

la notoriété naissante a été dopée par quelques ambassadeurs de renom, à l’instar d’Arnaud Montebourg sur le plateau du Grand Journal, Michel Field ou Inès de la Fressange devenue une inconditionnelle de la marque. “Pour la remercier, on lui a fait porter toute la gamme”, souffl e Quentin Couturier.

Commercialisées entre 30 et 40 euros la paire, les lunettes See Concept sont désormais distribuées dans plus de 300 points de vente (opticiens, concept stores, musées, librairies, boutiques de décoration...) dont quelques enseignes emblématiques comme Merci ou Le Bon Marché. “On vient même de livrer une série limitée pour Colette”, souligne Xavier Aguera. Depuis sa création, la petite entreprise double chaque année son chiffre d’affaires. Plus de 100 000 paires ont déjà été commandées sur l’exercice2014 et le compteur devrait encore s’affoler avec le lancement, ce printemps, d’une gamme de coloris pastels et surtout de LetmeSee Sun, lunettes solaires pour lire le dernier Goncourt sur les plages. Autre levier de croissance, l’export qui représente plus de 60% des ventes dans une quarantaine de pays.

“On est présent sur beaucoup de salons internationaux”, précise Charles Brun. L’occasion pour les trois anciens élèves des Maristes de s’adonner à une autre de leur passion : la gastronomie. “La (bonne) bouffe est un autre de nos dénominateurs communs”, avoue Quentin Couturier. “Chaque fois que l’on est à l’étranger, on en profi te pour découvrir les spécialités locales”, poursuit Xavier Aguera. Et l’ancien élève des Maristes de saliver en se remémorant un Schnitzel (escalope de viande enveloppée de chapelure) en Allemagne, une assiette de burratta (fromage) et de culatello (charcuterie) en Italie, quelques tranches de pata negra en Espagne ou, plus près de nous, une côte de veau oyonnaxienne servie dans le décor grandiose du lac Genin, dans le Jura. Epicuriens dans l’âme, les trois amis ne dérogent pas à deux autres rituels hebdomadaires, en l’occurrence le petit déjeuner pantagruélique du lundi matin (“on change de boulangerie chaque semaine pour tester les meilleurs viennoiseries”) et l’apéro du jeudi soir, autour d’un diptyque charcuterie/fromage. Un savoureux team building auquel est convié toute l’équipe de See Concept et même parfois les voisins.

LEURS RECETTES DE LA RÉUSSITE • Energie, fraîcheur, jeunesse et

ambition. (Quentin Couturier)

• Bosser en s’amusant. (Xavier Aguera)

• Penser Worldwide. (Charles Brun)

Lyonnais de bonnes familles, Charles, Quentin et Xavier ont fondé See Concept, société spécialisée dans les lunettes de lecture design. Trois ans plus tard, la start-up fait un malheur avec ses montures colorées à petits prix.

See Concept, les trois font la pairePar PASCAL AUCLAIR

Quentin Couturier, Xavier Aguera et Charles Brun

Un accessoire de mode chic et de qualité à prix

accessible.

LES BONNES ADRESSES DE… SEE CONCEPTUnis comme les doigts de la main depuis qu’ils ont ciré les bancs des Maristes, à Lyon, Xavier, Quentin et Charles déjeunent chaque midi ensemble. Tous avouent un faible pour L’Annexe (boulevard des Filles du Calvaire, 75003), sa quiche, ses sandwiches maison, ainsi que son petit plat du jour. “C’est notre cantine”, confi e Xavier Aguera, qui cite aussi Chez Moustache (rue Jean-Pierre Timbaud, 75011). “Un restaurant bistronomique tenu par des jeunes, avec un terrible purée-saucisse de Chavassieux”. Parmi les autres points de chute fréquents du trio, le Marché des Enfants Rouges, rue de Bretagne (“Ah, les sandwiches bio de Chez Alain”) et le Clint (rue de la Roquette, 75011). “Un restaurant dédié à Clint Eastwood, près du Père Lachaise, avec un énorme burger”, précise Quentin Couturier. Les fondateurs de See Concept se souviennent aussi avoir fêté leur première levée de fond Chez Julien (rue du Pont Louis-Philippe, 75004). “On avait réservé un petit salon privatif. Le top en termes de service”. Lorsqu’ils rejoignent le cocon familial, en terres lyonnaises, nos parisiens d’adoption se délectent régulièrement d’une quenelle du Café Comptoir Abel, dans le quartier d’Ainay (69002) et d’une pluma de Pata Negra dans l’ambiance rétro de la Brasserie des Brotteaux (69006). Enfi n, pour la bonne bouche, ils terminent par une escapade en Italie, à la table de La Cantina della Vetra. “Une adresse magique”, près du Duomo, à Milan, inoubliable pour sa plancha de charcuterie aux truffes, son vitello tonnato, son tiramisu et sa grappa. Mamma mia, que bueno !!

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printemps 2014 – Numéro 9 – BON GOÛT 21

Par BRUNO METZLÉ

HISTOIRES DE GOÛT

Bâti au XVIe siècle, le Marais regorge de lieux inconnus et inattendus. Ce petit marché a approvisionné le quartier pendant de longues années. Disparu, il revit depuis 2000 sous sa halle couverte, comme au premier jour. Il a pris le nom des pensionnaires de l’orphelinat voisin et qui étaient entièrement habillés de rouge en signe de charité. Le marché des Enfants Rouges a retrouvé sa vocation première. Les étals de poissonnier, de boucher, de primeur ou fl euriste et les petites échoppes de produits régionaux offrent aux badauds un moment de délicieuse fl ânerie, hors du temps. Une succession de petits comptoirs et

de recoins dressés de tables donnent aux Enfants Rouges des allures de bazar. En faire le tour est un vrai tour du monde. Ici pas d’artifi ce, tout est confectionné sur place, et les prix sont raisonnables. En voici quelques étapes.La maison Corossol de spécialités des caraïbes offre une large palette de rhums “arrangés”, de colombos, de crabes farcis, d’accras ou de croustillants de banane plantin à déguster avec un planteur maison. Plus loin, Alain, bateleur à l’ancienne, donne de la voix et s’active à faire des galettes et des sandwiches bio à la demande. Au rayon marocain, l’attention est retenue par une pyramide de pastillas

juste sorties du four. Le patron est intarissable sur la recette de cette spécialité sucrée-salée (feuilleté de brick, œufs battus, poulet, oignons, amande grillée, cannelle et miel). Pastillas, mais aussi les traditionnels couscous et tajines, les briouates ou bricks à la viande, la chakchouka (plataux poivrons, oignons et olives cuits au four) plus rare et surtout le thé à la menthe à déguster avec une corne de gazelle. Pas de doute, c’est bon comme là-bas !Vient ensuite l’étalage de Daniele et Michele, le traiteur italien de “Mangiamo italiano”, produits d’importation directe,pâtes aux truffes, charcuteries, fromages notamment un excellent Capra al

Marzemino (chèvre). La cuisine est faite maison, des arancini, ces boulettes de riz siciliennes fourrées de viande, jusqu’aux glaces.En face, un choix de Mezzes chauds et froids, tarama, houmous, taboulé (très végétal), kafta (brochette de poulet mariné au citron à l’ail et sauce tomate), et puis les Fatayer ces petits chaussons aux épinards. Ici la spécialité est sans aucun doute la galette Manaich, sorte de pizza libanaise cuite sur une étonnante plaque hémisphérique et recouverte de zaatar (pesto de sésame, origan et thym)…Un marché insolite de village.

Parfum d’enfance et des dimanches en famille, l’éclair est une pâtisserie simple qui se prête à toutes les audaces. Il suffi sait juste d’y penser. C’est ce qu’ont fait deux jeunes entrepreneurs, Gaspard de Malézieux (22 ans) et Pierre Henri Bonnan (26 ans), qui ont ouvert il y a quelques mois, la première pâtisserie haute couture exclusivement dédiée à l’Eclair, dans le quartier Montorgueil à Paris (2e). Un concept de pâtisserie – salon de thé mono produit tout à fait étonnant. L’éclair y est présenté sous toutes ses formes à la manière de bijoux de valeur, classiques, petits pour les cocktails ou géants à partager. Un festival de goûts et de couleurs plutôt appétissant.Une ouverture qui a tout de suite fait le buzz et même si les traditionnels éclairs au chocolat ou au café font bonne fi gure, le best seller est désormais l’éclair au caramel beurre

salé. Les nouveautés remportent aussi un vif succès comme l’éclair compote de pomme façon tatin, l’éclair rose framboise, l’éclair Tiramisu, ou enfi n l’éclair spéculoos. Des créations signées par le chef pâtissier chevronné, Loïc Bret fi naliste du concours de MOF en 2007 (chocolat) qui a rejoint l’aventure.Mais ce n’est pas tout, la barrière de l’éclair salé a été franchie (la pâte à choux est remplacée par une crème fromagère plus douce) avec le melon basilic, le risotto truffe, ou le foie gras confi ture de fi gue. Des éclairs à découvrir à la boutique mais aussi en cocktail et réceptions car l’Atelier de l’éclair a développé un rayon traiteur. Au total ce sont près de 6000 éclairs qui sont produits chaque semaine. Nul doute que l’Atelier de l’Eclair va rapidement ouvrir de nouvelles boutiques. L’avenir appartient aux audacieux.

Un lieu pittoresque et authentique dans le quartier du Marais à Paris 3e à l’écart de l’agitation de la rue, et connu seulement des initiés. C’est le Marché des Enfants Rouges, le plus vieux marché de Paris.

Après l’engouement pour les macarons, ces petites pâtisseries bariolées qui ont déferlé dans les pâtisseries, l’éclair est sur le point de prendre le relais.

Le marché des Enfants Rouges : Délicieuse fl ânerie

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Nouvelles lettres de noblesse pour la pâtisserie préférée des Français

L’ATELIER DE L’ÉCLAIR 16 rue Bachaumont - 75002 Paris

Tél. 01 42 36 40 54

Ouvert 7 jours/7 de 11h30 à 19h30Brunch el dimanche

Le 5 décembre dernier s’est déroulée au Park-Hyatt Paris-Vendôme, la 6e édition du Hyatt Student Prize 2013 – Leaders of tomorrow, qui récompense chaque année les meilleurs managers hôteliers de demain. Nikos Aliagas, Grand Maître de cérémonie présentait cette Star Academy d’un autre genre.Sélectionnés parmi les étudiants présentés par les 19 meilleures écoles du monde, les 8 fi nalistes invités à Paris ont été soumis à une journée d’audition et de confrontation avec un jury présidé par Carlo d’Asaro Biondo, Président des opérations Europe, Moyen Orient et Afrique de Google qui représente une marque d’excellence à la croissance spectaculaire et qui attache une importance particulière à l’univers de l’Hôtellerie – Restauration.Elena Vasquez étudiante du Centro Supérior de Hosteleria de Galicia (Espagne) a remporté le 1er prix, devant Claire Plessier de l’ESSEC-MBA in Hospitality Management, 2e prix et Katharina Scharrer de l’International University of Aplied Sciences Bad Honnef en Allemagne, 3e Prix. Un concours prestigieux qui récompense l’excellence dans un univers très exigeant.

NB : Google parrainait le prix de la meilleure vidéo de présentation qui a également été remporté par Elena Vasquez.

Bonne graine

MARCHÉ DES ENFANTS ROUGE 39 rue de Bretagne

75003 Paris

Horaires d’ouverture Mardi, mercredi, jeudi :

de 8h30 à 13h et de 16h à 19h30 Vendredi, samedi :

de 8h30 à 13h et de 16h à 20h Dimanche : de 8h30 à 14h

John Wallis (Hyatt), Carlo d’Asaro Biondo (Google), Iris Knobloch (Accor), Elena Vasquez (lauréate), Marie Laure Sauty de Chalon (aufeminin.com), Thomas Kunz (Danone), Gérard Petit (Air France).

H Y A T T S T U D E N T P R I Z E 2 0 1 3

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printemps 2014 – Numéro 9 – BON GOÛT 23

Par FABRICE SOMMIER Par BRUNO METZLÉ

HOMMES DE GOÛTFabrice Sommier, retour de voyage

Habanos est une appellation d’origine protégée. Né sur les plus beaux sols des terroirs cubains, avec un climat idéal, un soin et un savoir faire ancestral de tous les moments aussi bien dans les champs de tabac qu’à la manufacture, ce tabac noir cubain deviendra, après un travail méticuleux et une sélection draconienne, un Habano. Cela ressemble beaucoup à nos AOC/AOP.

Les grands accords classiques sont bien sûr les spiritueux avec en tête le Rhum Cubain, sous toutes les formes sec ou en cocktails, puis les spiritueux à base de vin Cognac et Armagnac. Une de mes dernières découvertes s’est faite avec un Marc de Bourgogne des Hospices de Beaune de la Maison JACOULOT à Romaneche Thorins, un accord épicurien.

Des accords de bon goût avec les vins fonctionnent également parfaitement bien. Le Condrieu issu du cépage Viognier offre une rondeur et une élégance rare. Les vins de Sauternes par leur sucrosité titillent les papilles par des notes de fruits secs et confits.Les vins secs en cépage chardonnay ajoutent une note beurrée et toastée. Je vous conseille aussi le Muscat en vin de pays d’Oc de Michel HERMET, un vin qui a capté avec fraîcheur le brin de folie du Muscat.

Vous l’aurez compris, à l’heure où le beau temps revient et où le soleil nous offre ses plus beaux rayons, les amateurs de Habanos peuvent s’installer en extérieur sans déranger pour s’adonner à leur passion. Vous aurez aussi besoin d’eau pour rafraîchir votre palais, je vous propose de déguster une eau minérale goûteuse et savoureuse. L’eau de TREIGNAC permet en plus de se désaltérer un vrai rafraichissement des papilles gustatives.

Pour tous les amateurs de barbecue et de vins d’été, je vous conseille la découverte d’un superbe vin rosédu Lavandou : la cuvée Ana 2013 du domaine de l’Anglade de Bernard VANDOREN.

/ Domaine de l’AngladeAvenue Vincent Auriol83980 Le LavandouTél. 04 94 71 10 89

/ Maison JacoulotLa Gare, 546 rue des Jacques71570 Romanè[email protected]él. +33 (0)3 85 35 51 85

/ Michel Hermet Le Wine Bar 1 place des arènes30000 Nî[email protected]él. 04 66 76 19 59

/ Eau de TREIGNAC Nicolas MAZET [email protected]él. 06 36 80 43 70

De retour d’un voyage Cubain, j’aimerais partager avec vous quelques effluves de ces habanos qui savent satisfaire les palais les plus exigeants.

La scène se passe chez Bocuse au Pont de Collonges. Le chef d’orchestre de l’Opéra de Lyon a réservé en précisant qu’il viendrait accompagné de Paul et Linda Mac Cartney et qu’il souhaitait dîner à une table discrète. Le même jour une dame a réservé une table dans une autre salle pour fêter son anniversaire avec ses petits enfants. A l’arrivée du gâteau d’anniversaire, le limonaire entonne l’hymne d’anniversaire. Intrigué, Paul Mac Cartney s’approche de la table et se tenant derrière l’impétrante, il lui chante à l’oreille Happy Birthday to you… sous les yeux stupéfaits des petits enfants ! Des scènes comme celle-ci, François Pipala en a vu beaucoup. “C’est pour ces moments là que l’on fait ce métier” sourit l’incontournable Maître des cérémonies et Directeur du restaurant depuis près de 25 ans. A l’Auberge, il y a Monsieur Paul, la cuisine et il y a François Pipala, présent mais discret, il veille à tout.Travailleur acharné François Pipala a mis en place une organisation personnelle assez simple : ne rien prévoir en dehors du travail. Un sacerdoce qui lui confère une disponibilité totale. “La disponibilité est la première qualité dans ce métier” énonce François Pipala. La philosophie du restaurant est d’être ouvert quand le client a envie de venir. Il faut donc être ouvert toute l’année. “Nous faisons 3600 à 4000 couverts par mois” précise François Pipala. Pour servir cette clientèle, il dispose d’une équipe de 27 personnes en salle, qu’il organise et gère au millimètre, 3 étoiles obligent.A 58 ans, Meilleur Ouvrier de France (MOF) catégorie “Maitre d’hôtel, du service et des arts de la table ” 1993, il est l’un des principaux piliers de cette grande maison. Il y incarne l’accueil et le service. Les deux compléments de la cuisine indispensables à la qualité d’une table et à la réussite d’un repas. Le service, comme la cuisine sont immuables chez nous. Chez Bocuse on ne vient pas seulement pour manger, on vient y passer un moment heureux. “Nous sommes des marchands de bonheur” glisse-t-il radieux.On vient chez Bocuse pour fêter des évènements marquants de la vie : un anniversaire, la vente d’une maison, d’une entreprise et pour certains plus simplement le départ en vacances. Chaque client est unique. Pour faire un bon service, il faut être à l’écoute du client et savoir détecter ses attentes. Une table d’affaires aura besoin d’un peu plus de distance, à l’inverse un couple de retraités aura plus besoin de parler. “Il n’y a pas de recette, il faut de la sensibilité et du ressenti” précise François Pipala.Chez Bocuse, tout le monde est logé à la même enseigne, y compris les personnalités. Pour en avoir servi un grand nombre, François Pipala reconnait qu’elles ne sont pas les clients les plus compliqués. Pour les politiques il faut simplement un peu de tact et ne pas les placer à côté surtout s’ils ne sont pas du même bord. Avec Paul Bocuse, à qui il voue une réelle admiration, il entretient une relation de grande confiance. Confiance qui lui est renouvelée depuis 25 ans et qui est matérialisée par sa présence sur la “fresque des chefs” dans la cour d’honneur, qui rassemble en forme d’hommage tous les amis, les parents, les confrères et ceux qui ont fait l’Auberge et sa légende.

François Pipala, L’autre pilier de l’Auberge

Fabrice SOMMIER

Autour de ‘Monsieur Paul’, François Pipala et ses deux ‘bras droits’ : Jean-Philippe Merlin et Charles Orbain

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Alfred Hocdée et François Pipala

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Femme de conviction et dame de cœur, Marie-Laure Sauty de Chalon milite en faveur de

l’égalité hommes/femmes dans la société. Même si elle s’en défend, cette fi lle de banquier, ancienne élève de Science-Po, détentrice d’une maîtrise en droit, est militante de la cause féminine. Cette force de caractère n’est sans doute pas étrangère à sa réussite professionnelle dans l’univers de la communication et de la presse. Après un apprentissage dansdiverses régies publicitaires de grands médias (Libération, Le Nouvel Obs, France Télévisions, La Tribune, Le Monde...), elle a notamment fondé Carat Interactive et dirigé Aegis Media en Europe du Sud, avant d’accéder à la présidence du groupe aufeminin.com (Axel Springer), en juin 2010, à la suite

de la démission de Bertrand Stephann. “Plus je vieillis, plus je travaille pour des supports jeunes”, sourit-elle, faisant référence aux multiples sites dont elle a la responsabilité, dont Marmiton, aufeminin, My Little Paris, Joyce et

Santé AZ, fl eurons d’un mastodonte de la communication par internet fondé en 1999, désormais présent dansune vingtaine de pays en Europe, Afrique du Nord et Amérique. “Le groupe recense plus

de 45 millions de visiteurs uniques par mois sur le web et 35 millions sur mobile pour un chiffre d’affaires annuel de 60 millions d’euros”, confi e Marie-Laure Sauty de Chalon, enthousiaste de la réussite de mylittleparis.com, mais aussi bluffée lorsqu’elle évoque l’engouement suscité par marmiton.org, le site de

référence des cordons bleus. Fort de ses 8 millions d’internautes mensuels “dont une pointe à 24 millions de visiteurs en décembre dernier”, Marmiton a fait depuis deux ans son apparition dans les kiosques, couché en 110 000 exemplaires sur papier recyclé. La recette de cette success-story ? Des recettes, des recettes... et encore des recettes. “On enpropose 65 000 sur le site. Les pics de fréquentation sont enregistrés à 17 heures et lors de l’envoi de la recette du jour. Le top 20 des marmitons et les recettes à base de chocolat contribuent aussi à doper le trafi c”. Cette savoureuse base de données, enrichie quotidiennement, génère plus de 500.000 commentaires assurant au site un référencement naturel d’une redoutable effi cacité. “40 % de nos visiteurs sont des hommes”, précise la PDG du groupe, dont l’un des prochains challenges consiste à décliner le concept à travers

le monde. “A la différence du site auféminin.com dont le contenu au départ a été traduit en de multiples langues, chaque Marmiton sera le refl et de l’identité nationale à travers les recettes du pays”, souffl e cette mère de famille, fan de cuisine marocaine et de pâtisserie, qui n’hésite pas à mettre la main à la pâte avec son fi ls aîné pour le bonheur de sa famille et ses amis. “Et quand je suis derrière les fourneaux, marmiton.org est ma bible !”. Evidemment...

A la barre du numéro 1 mondial des éditeurs de sites féminins, la PDG du groupe aufeminin.com met la cuisine à toutes les sauces dans le chaudron de Marmiton. Sa recette ? Des recettes !

Marie-Laure Sauty de Chalon, la réussite aufeminin

GOÛT aufemininPar PASCAL AUCLAIR

Marie-Laure Sauty de Chalon

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“40% de nos visiteurs sont des

hommes.”

LES BONNES ADRESSES DE… MARIE-LAURE SAUTY DE CHALON

Sensible aux plaisirs de la table, Marie-Laure Sauty de Chalon confi e “aimer énormément la formule menu unique et les choix du chef à partir du marché du jour” dans les restaurants qu’elle côtoie, proches de son QG de la rue Saint-Fiacre. Parmi ses tables de prédilection fi gure en bonne place David Toutain (29, rue Surcouf, 75007) recommandé pour “ses petites brioches fumées au foin à l’anguille et au foie gras et ses huîtres Gilardeau au yuzu”. Dans un autre registre, Yam’tcha (4, rue Sauval, 75001) a son estime pour son délicat “bouillon, langoustine, foie gras vapeur et champignons noirs”, alors que le BAT(16 bis, boulevard Montmartre, 75009), à la fois bar à tapas et bar à tartares, est son adresse préférée lorsque lui vient une envie de boeuf de galice. En matière de cuisine sarde, la PDG du groupe aufeminin.com ne jure que par Fulvio (4, rue de Poitou, 75003) et son céleri rapé et san daniele. Elle se délecte également des asperges blanches et parmesan du Châteaubriant (129, avenue Parmentier, 75001). Souvent en déplacement, Marie-Laure Sauty de Chalon profi te de ses multiples voyages pour tester de nouvelles saveurs, comme cette onctueuse “soupe crémeuse de céleri à l’étuvé de coquillages, pomme confi te façon tatin” du Pavé d’Auge, à Beuvron en Auge, en Normandie. Plus au Sud, elle fond pour les tartares de saumon du Cap Horn, à Six-Four-les-Plages, dans le Var. Enfi n, sous d’autres horizons, elle garde un souvenir ému de trois établissements cosmopolites : Elizir, à Essaouira, au Maroc, pour “son tajine d’agneau et poire”, I Latina, à Buenos Aires, pour “son ceviche de saison aux fruits” et Eleven Madison Park, à New York, fréquenté pour la créativité du chef, Daniel Humms, lors de l’élaboration de son menu du jour.

SA RECETTE DE LA RÉUSSITE • L’enthousiasme, l’optimisme• Regarder toujours le côté positif

des choses• Ne pas avoir de complexe• Avoir la capacité de prendre des

coups, de s’en relever et d’en tirer les leçons

• Ne pas avoir peur du changement, ce qui n’exclut pas d’être fi dèle à certaines valeurs