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Université Paris 1 Panthéon Sorbonne Master 2 Sciences du Management Spécialité Logistique Alexandre DOURIEZ COMMENT LES FMN POURRONT ELLES, GRACE AU SCM, FAIRE FACE AUX EVENEMENTS ECONOMIQUES ISSUS DE LA GLOBALISATION ? Mémoire de fin d’études Maître de mémoire : Patrice Vol 2009

C FMN GRACE AU SCM, · 2011-01-17 · taux de change s’avère révélateur du rôle à jouer par le SCM en temps de crise. L’étude d’autres cas industriels comme Lafarge, Dassault

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Université Paris 1 Panthéon Sorbonne

Master 2 Sciences du Management

Spécialité Logistique

Alexandre DOURIEZ

COMMENT LES FMN POURRONT ELLES, GRACE AU

SCM, FAIRE FACE AUX EVENEMENTS ECONOMIQUES

ISSUS DE LA GLOBALISATION ?

Mémoire de fin d’études

Maître de mémoire : Patrice Vol 2009

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Remerciements

Je tiens tout d’abord à remercier mon maitre de mémoire Patrice Vol pour avoir

accepté de tenir ce rôle et m’avoir permis de faire ce travail avec une méthodologie de

travail claire et précise.

Je remercie ensuite les personnes ayant accepté de répondre à mes questionnaires et

m’ayant apporté des éléments d’analyse pertinents. Je remercie ainsi Steve Belot, First Key

Account Manager Aerospace South West Europe chez Kuehne+Nagel ; Noëlle Svirmickas,

Logistics Project Manager chez Lafarge Granulats ; Manuel Kienlen, responsable

transport route et méthodes chez Danone Eaux France ; et Stéphane Raedersdorf,

planificateur logistique junior chez Bongrain pour leur participation.

Je remercie pour finir l’ensemble des personnes ayant de près ou de loin participées

à ce travail par leur soutien, leurs conseils et leur présence que ce soit mes proches, mes

amis ou mes camarades de promotion. Je remercie ainsi particulièrement Axel Reposeur

pour son rôle dans l’obtention de précieux documents ainsi que mes camarades du Master 2

Logistique de la Sorbonne Jean Baptiste Bourdon et Claire Pasquier pour le temps passé à

échanger sur nos travaux respectifs, Lucia Betz pour son aide sur les travaux préparatoires.

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Introduction

« La mondialisation de l’économie les a sortis de l’ombre ! Aujourd’hui, les directeurs

logistiques influent sur la stratégie de leur entreprise et la performance du plus modeste

manutentionnaire est considérée comme déterminante. Car, dans un contexte de concurrence

internationale féroce, la maîtrise technique et financière de toute la chaîne, depuis les achats de

matières premières jusqu’à la distribution au client, a forcément un impact sur les coûts de

production »1. « Avec la mondialisation des échanges et l’enjeu sous-jacent en termes de coûts,

cette fonction a désormais un rôle d’arbitre entre les directions commerciale et industrielle »2.

C’est en lisant ce genre d’articles de plus en plus présents dans la presse économique que l’idée de

lier mondialisation et Supply Chain est venue. La logistique et donc le Supply Chain Management

deviennent depuis plusieurs années des fonctions indispensables aux entreprises multinationales

afin de mener des stratégies industrielles efficaces.

De plus, dans cette même presse, c’est le terme de « crise économique » qui revient

actuellement le plus fréquemment. Une crise économique provenant tout droit des méfaits de la

mondialisation. Nous n’entendons parler que de fermetures d’usines, de délocalisations, de

relocalisations, de faillite d’entreprises, et ce, même concernant des firmes multinationales (FMN)

paraissant solides extérieurement. Le monde économique mondial a totalement changé et est en

perpétuelle mutation. Le phénomène de mondialisation touche tous les acteurs de la vie

économique, que ce soit les consommateurs ou les FMN. Ces dernières doivent pouvoir réagir à ses

conséquences. En effet que ce soit les fluctuations de taux de change, du cours du pétrole ou comme

actuellement la crise financière, cela les impactes directement. Elles se doivent donc de prendre en

compte à la fois les bénéfices en termes de processus industriels de la mondialisation et les

conséquences de cette dernière.

Ainsi, quand dans le même temps, il est dit que des entreprises sont en grande difficulté, et

qu’une fonction de l’entreprise, la Supply Chain, est en plein essor, il semble pertinent de chercher

si l’utilisation de la seconde ne peut pas aider les premières à améliorer leur situation. En d’autres

termes, il convient de voir comment les FMN, grâce au Supply Chain Management, pourront faire

face aux événements économiques issus de la globalisation, terme qui, nous le verrons, est plus

adéquate que celui de mondialisation.

1 Aubrée C., 2008, «La logistique au cœur de la stratégie de l’entreprise », Le Parisien Economie, 29/09/08 2 Montaigne C., 2008, « La supply chain, une fonction qui s’étoffe », Les Echos, 07/06/08

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Ainsi nous présenterons dans une première partie le concept de mondialisation et les

stratégies industrielles des FMN et le Supply Chain Management dans ce contexte. Dans une

seconde partie nous décrirons et expliquerons des cas d’entreprises dans lesquelles la Supply Chain

joue un rôle essentiel avec notamment le cas d’Airbus. Enfin dans une dernière partie, nous

chercherons les systèmes industriels permettant de faire face à un environnement économique

défavorable et en perpétuel changement, climat inhérent à la globalisation.

.

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Résumé Général

Ce travail à été pensé de manière à ce que le lecteur puisse comprendre les enjeux du SCM

dans notre environnement économique actuel. C’est pourquoi chaque partie aborde un aspect bien

différent afin de poser clairement le contexte dans un premier temps, d’étudier le cas de diverses

entreprises dans un second temps et enfin de tenter de faire ressortir les apports de la Supply Chain

et ses futures évolutions dans un dernier temps.

Ainsi, comprendre ce qu’est la mondialisation qu’il convient plus d’appeler globalisation et

ainsi comprendre l’environnement économique qui nous entoure est vital pour saisir les

comportements industriels des firmes multinationales (FMN). Comprendre que nous sommes dans

un monde dans lequel tout est accéléré à la fois par les politiques menées au plan mondial et local

au niveau financier ou économique et par l’avènement des nouvelles technologies de l’information

et des communications (NTIC) nous permet d’évaluer et de justifier l’apparition de nouvelles

formes d’entreprises. Ainsi le concept d’entreprise étendue consiste dans la répartition à travers le

monde des unités de production d’un point de vue géographique et financier ainsi que dans la

l’augmentation des interactions interentreprises par la multiplication des fournisseurs tout au long

de la chaîne de valeur. Le rôle à jouer de la part des FMN est alors notamment économique et

sociale ainsi que territoriale et leurs relations avec les Etats sont désormais très étroites. Dans cette

idée de recomposition de la chaîne de valeur, c’est le Supply Chain Management (SCM) qui doit

avoir logiquement un rôle à jouer du fait de son développement au sein de chaque entreprise et de

ses caractéristiques semblant apporter des réponses aux problématiques des FMN du fait de la

globalisation.

L’étude de différents cas d’entreprises illustrant les différentes situations des acteurs

industriels au sein de la Supply Chain et les divers acteurs la composant, nous permet d’évaluer la

situation et les réactions des FMN aux aléas économiques issues de la globalisation. Analyser le cas

d’Airbus, FMN et entreprise étendue par excellence, et de son plan de réaction aux fluctuations de

taux de change s’avère révélateur du rôle à jouer par le SCM en temps de crise. L’étude d’autres cas

industriels comme Lafarge, Dassault ou encore des situations plus précises au sein de la Supply

Chain avec des FMN comme Michelin, IBM ou Essilor rend le cadre de l’analyse plus complet et

nous permet de diversifier les contextes de réflexion. S’interroger sur les problématiques précises de

la Supply Chain comme les systèmes d’information ou le transport apporte également un

complément indispensable de compréhension.

Dans ce contexte, vient alors le temps d’étudier les voies de réponses des entreprises, au

travers de la Supply Chain, pour s’adapter à leur environnement sans cesse en modification. C’est

d’abord par la poursuite du processus d’entreprise étendue que la flexibilité des entreprises va

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s’accroître. Avoir la capacité de s’adapter précisément à des produits et à ses marchés devient une

condition quasiment indispensable pour être performant. Dans cet esprit, la voie de l’externalisation

se présente comme très intéressante afin de pouvoir se concentrer sur son cœur de métier, de réduire

les coûts, de pénétrer de nouveaux marchés et de profiter des conditions économiques

internationales. D’autres procédés comme la réinternalisation doivent aussi être pris en compte et

étudiés. Une variante de l’entreprise étendue, mais plus spécifique, comme le développement de la

production modulaire peut également apporter des solutions aux FMN. Les stratégies spécifiques de

« Complex Products Systems » ou de « pur architecte » peuvent ainsi apporter certaines réponses

afin d’adapter leurs systèmes productifs. Sans oublier le rôle alors joué par les systèmes

d’information et par les entreprises spécialisées comme les SSII. L’avenir de la Supply Chain et les

prévisions d’évolution de celle-ci doivent évidemment être attentivement étudiées afin de faire

preuve d’anticipation et de proactivité. La généralisation de l’entreprise virtuelle, le rôle

prépondérant des prestataires logistiques, l’utilisation massive des nouvelles technologies comme la

RFID ou les problématiques liées au développement durable sont autant de points sur lesquelles les

FMN doivent travailler afin de chercher à toujours mieux satisfaire le client et lui permettre de faire

partie entière du processus industriel.

C’est donc finalement par l’instabilité apportée par la conjoncture économique au fil du

temps que va naître l’innovation et le progrès technique ainsi que les évolutions industrielles. La

recherche perpétuelle de l’optimisation amenée par la globalisation oblige les entreprises à

augmenter leurs interdépendances et à réfléchir à de nouveaux systèmes moins coûteux et plus

performants. La Supply Chain et le SCM s’inscrivent donc comme une activité indispensable et

porteuse de nombreux espoirs.

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Abstract

This work was thought in a way that the reader can understand the stakes in the Supply

Chain Management in our current economic environment. That is why every part of this work

approaches a very different aspect to put clearly the context at first, study the case of diverse

companies secondly and finally try to highlight the contributions of Supply Chain and its future

evolutions.

So, to understand what is globalization and so to understand the economic environment

which surrounds us is vital to seize the industrial behavior of multinationals. To understand that we

are in a world in which everything is accelerated at once by the politics led worldwide and premises

to the financial or economic level and by the succession of the new information and communication

technology (NICT) allows us to estimate and to justify the appearance of new forms of companies.

So the concept of “vast company” consists in the distribution worldwide production units of a

geographical and financial point of view as well as in the increase of the interactions inter-

enterprises by the reproduction of the suppliers throughout the value chain. The role to play by the

multinationals is in particular an economic and social one as well as a territorial one and their

relations with States are henceforth very narrow. In this idea of reorganization of the value chain, it

is Supply Chain Management who has to have logically a role to play because of its development

within every company and within its characteristics seeming to bring answers to the problems of the

multinationals because of globalization.

The study of various cases of companies illustrating the various situations of the industrial

actors within Supply Chain and the diverse actors composing it, allows us to estimate the situation

and the reactions of the multinationals at the economic chances stemming from the globalization.

To analyze the case of Airbus, multinational and “vast company”, and of its plan of reaction to the

fluctuations in exchange rate turns out revealing of the role to play by it in a crisis situation. The

study of the other industrial cases as Lafarge, Dassault or still more precise situations within Supply

Chain with Michelin, IBM or Essilor returns the more complete frame of the analysis and allows us

to diversify the contexts of reflection. Wonder about the precise problems of Supply Chain as the

information systems or the transport also brings an indispensable complement to understanding.

In this context, comes then the time to study the ways of answers of companies, through

Supply Chain, to adapt itself to their environment ceaselessly in modification. It is at first by the

continuation of the process of the “vast company” that the flexibility of companies is going to

increase. To have the capacity to adapt itself exactly to products and to his markets becomes an

almost indispensable condition to be successful. In this spirit, the way of the outsourcing appears as

very interesting to be able to concentrate on its heart of profession, reduce the costs, penetrate into

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new markets and take advantage of international economic conditions. Other processes as the

reinternalization must be also taken into account and studied. A variant of the “vast company”, but

more specific, as the development of the modular production can also bring solutions to the

multinationals. The specific strategies of "Complex Products Systems" or " pure architect" can so

bring certain answers to adapt their productive systems. Without forgetting the role then played by

information systems and by companies specialized as SSII. The future of Supply Chain and the

forecasts of evolution of this one must be studied obviously attentively to can anticipate and to be

proactive. The generalization of the virtual company, the dominating role of the logistic lead

providers, the use of the new technologies as the RFID or problems connected to the sustainable

development are so many points on whom multinationals has to work to try to satisfy always better

the customer and to allow him to make whole part of the industrial process.

It is thus finally by the instability brought by the economic situation in the course of the

time which is going to be born the innovation and the technical progress as well as the industrial

evolutions. The perpetual pursuit of the optimization brought by the globalization obliges

companies to increase their interdependences and to think about new less expensive and more

successful systems. Supply Chain and SCM thus joins as an indispensable activity and carriers of

numerous hopes.

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Sommaire

Remerciements ....................................................................................................................... 3

Introduction ............................................................................................................................ 4

Résumé Général ..................................................................................................................... 6

Abstract .................................................................................................................................. 8

Sommaire .............................................................................................................................. 10

Tables des Illustrations ......................................................................................................... 15

Partie I : Mondialisation, Stratégies Industrielles et SCM ................................................... 16

I. Concept de mondialisation .................................................................................................... 16

A. Définitions et Origines .................................................................................................................... 16

1. Mondialisation, Internationalisation et Globalisation ................................................................ 16

2. Des économies intégrées ............................................................................................................. 17

3. Une troisième révolution industrielle .......................................................................................... 19

B. Une nouvelle organisation économique mondiale ........................................................................... 21

1. Un système financier totalement intégré ..................................................................................... 21

2. Une globalisation du travail et des techniques ........................................................................... 22

3. Vers une gouvernance mondiale ? .............................................................................................. 23

C. Les enjeux de demain ...................................................................................................................... 24

1. Jusqu’où pousser la globalisation ? ........................................................................................... 24

2. Réguler les économies et réduire les inégalités .......................................................................... 26

3. Vers une quatrième révolution industrielle ? .............................................................................. 27

II. Conséquences sur les stratégies industrielles des FMN ........................................................ 28

A. Des stratégies internationales .......................................................................................................... 28

1. Par le commerce international.................................................................................................... 28

2. L’investissement direct à l’étranger (IDE) ................................................................................. 28

3. L’entreprise réseau ..................................................................................................................... 29

B. Une organisation productive à l’échelle continentale ou mondiale ................................................. 31

1. Le concept d’entreprise étendue ................................................................................................. 31

2. Les différentes formes de relations entreprises-fournisseurs ...................................................... 33

3. Les défis de la FMN dans ce contexte ......................................................................................... 34

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C. De nouvelles responsabilités pour les FMN .................................................................................... 35

1. Sociale : délocalisations et inégalités ......................................................................................... 35

2. Territoriale : le rôle des réseaux d’entreprises .......................................................................... 36

3. Economique : les relations FMN-Etats ....................................................................................... 38

III. La Supply Chain dans ce contexte ........................................................................................ 39

A. De la logistique à la Supply Chain .................................................................................................. 39

1. Vers une vision large de la logistique ......................................................................................... 39

2. Des Supply Chain internationales ............................................................................................... 41

3. Analyse des processus de la SC : le modèle SCOR ..................................................................... 42

B. La Supply Chain, support de gestion de la complexité ................................................................... 43

1. Le processus d’intelligence logistique ........................................................................................ 43

2. La Supply Chain externe ............................................................................................................. 44

3. Des Supply Chain en mutations .................................................................................................. 45

C. La Supply Chain, une vision managériale ....................................................................................... 47

1. Le SCM à développer en France ................................................................................................. 47

2. Anticiper plutôt que subir ........................................................................................................... 48

3. Trois niveaux de processus dans la Supply Chain ...................................................................... 50

Partie II : Etudes de stratégies logistiques de FMN ............................................................. 51

I. Un modèle illustratif : Airbus ................................................................................................ 51

A. Présentation de la firme ................................................................................................................... 51

1. Historique ................................................................................................................................... 51

2. Contexte ...................................................................................................................................... 52

B. Un exemple d’entreprise étendue .................................................................................................... 53

1. Une organisation productive européenne et le rôle de l’externalisation .................................... 53

2. Une logistique en conséquence ................................................................................................... 55

3. Comparaison avec Boeing .......................................................................................................... 57

C. Le Plan Power 8 .............................................................................................................................. 58

1. Power 8 : le plan de réaction à la montée du taux de change euro/dollar ................................. 58

2. Les effets sur la Supply Chain ..................................................................................................... 59

II. D’autres cas ........................................................................................................................... 60

A. Lafarge ............................................................................................................................................ 60

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1. Une entreprise à fort développement international .................................................................... 60

2. La logistique au cœur d’un processus de réduction des coûts .................................................... 61

B. Le Falcon 7X de Dassault ............................................................................................................... 62

1. Un avion conçu virtuellement ..................................................................................................... 62

2. Des progrès techniques permis par la globalisation ................................................................... 63

C. Autres cas ........................................................................................................................................ 64

1. L’anticipation des effets de la globalisation chez Michelin ........................................................ 64

2. L’externalisation de la logistique comme réponse : IBM et Alcatel ........................................... 65

3. Délocalisations et spécialisation des sites de production : Essilor et Yoplait ............................ 67

III. Des acteurs et secteurs périphériques prenant de plus en plus d’ampleur ............................. 68

A. Les prestataires logistiques .............................................................................................................. 68

1. Leur rôle dans la Supply Chain .................................................................................................. 68

2. L’exemple de Kuehne+Nagel ...................................................................................................... 69

B. Le rôle des systèmes d’information ................................................................................................. 71

1. Un facteur de compétitivité chez Bongrain ................................................................................. 71

2. Une activité en plein essor .......................................................................................................... 73

C. Importance du transport................................................................................................................... 74

1. Enjeu du transport ...................................................................................................................... 74

2. Le transport chez Danone Eaux France et Lafarge Granulats ................................................... 75

Partie III : Différentes modulations possibles de la Supply Chain....................................... 78

I. Accentuation de l’entreprise étendue .................................................................................... 78

A. Nécessité d’optimisation de la Supply Chain .................................................................................. 78

1. Gérer efficacement les différents niveaux de la Supply Chain .................................................... 78

2. Vers le « lean et agile » ............................................................................................................... 79

3. Développement des logiques collaboratives ............................................................................... 80

B. L’externalisation comme axe stratégique et plus seulement opérationnel ....................................... 82

1. Vecteur de succès par une méthodologie stratégique ................................................................. 82

2. Le Global Sourcing comme intégration internationale ............................................................... 83

3. Concentration sur son cœur de métier pour changer de business model .................................... 84

C. Autre option : la réinternalisation .................................................................................................... 86

1. Une réponse à la recomposition de la chaine de valeur : de l’outsourcing au backsourcing .... 86

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2. Plus qu’une externalisation ratée, une voie stratégique ............................................................. 87

3. Quelques faits.............................................................................................................................. 88

II. Développement de la production modulaire.......................................................................... 89

A. La production modulaire comme évolution logique de l’industrie .................................................. 89

1. Les « Complex Products Systems » ............................................................................................. 89

2. La DIPP, élément indissociable de la globalisation ................................................................... 90

3. Entre nécessité de proximité et possibilité d’éloignement .......................................................... 91

B. « Pur architecte », stratégie risquée à adapter mais efficace ........................................................... 92

1. Le « pur architecte » et ses contraintes....................................................................................... 92

2. Un système viable mais à maitriser ............................................................................................ 93

3. Des stratégies complémentaires indispensables ......................................................................... 94

C. Dans ce contexte, externaliser le non physique ............................................................................... 95

1. Le phénomène offshore ............................................................................................................... 95

2. L’avenir passe par le « Global Delivery Model » ....................................................................... 97

3. Utiliser au mieux les SSII ............................................................................................................ 99

III. Quel avenir pour la Supply Chain ? .................................................................................... 100

A. Autour de l’entreprise « virtuelle » ............................................................................................... 100

1. Des Supply Chain éphémères .................................................................................................... 100

2. Les PSL comme futurs pilotes ................................................................................................... 101

3. De la confiance et du contrôle .................................................................................................. 102

B. Développer encore l’utilisation des technologies et de l’innovation ............................................. 104

1. Places de marché, e-sourcing, e-procurement .......................................................................... 104

2. Focus sur la RFID .................................................................................................................... 105

3. Vers une logistique propre ? ..................................................................................................... 107

C. Placer la Supply Chain dans l’amélioration globale de la chaîne de valeur .................................. 108

1. Des évolutions externes inéluctables ........................................................................................ 108

2. Les voies de développement de la chaîne de valeur et les impacts Supply Chain ..................... 109

Conclusion .......................................................................................................................... 112

Bibliographie ...................................................................................................................... 115

Annexes .............................................................................................................................. 121

Fiches de lecture .......................................................................................................................... 121

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Entreprises et contacts ................................................................................................................. 123

Questionnaires ............................................................................................................................. 123

Autres annexes ............................................................................................................................ 131

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Tables des Illustrations

Figure 1: Trilemme politique de l'économie mondiale ..................................................................... 25 Figure 2: Défaillance de l'Etat comme assureur social .................................................................... 27 Figure 3: Quatre stratégies internationales dominantes .................................................................. 30 Figure 4: Les composants du management logistique ...................................................................... 40 Figure 5: Les acteurs de la Supply Chain externe ............................................................................ 44 Figure 6: Les établissements d'Airbus en Europe ............................................................................. 53 Figure 7: La logistique des éléments de l'A380 ................................................................................ 56 Figure 8: Le modèle SCOR ............................................................................................................. 131

Tableau 1: Typologie de Bartlett et Ghoshal .................................................................................... 31 Tableau 2: Nature des interfaces critiques avec le SC Planning ...................................................... 50 Tableau 3: Matrice informationnelle de Porter .............................................................................. 132 Tableau 4: Eléments constitutifs des divers modes de collaboration .............................................. 132

Photo 1: Le Beluga d'Airbus ........................................................................................................... 133

Photo 2: Le Falcon 7X de Dassault ................................................................................................ 133

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Partie I : Mondialisation, Stratégies Industrielles et SCM

I. Concept de mondialisation

A. Définitions et Origines

1. Mondialisation, Internationalisation et Globalisation

Avant de débuter toute explication et analyse des conséquences de la mondialisation, il faut

clairement définir les termes utilisés. Il faut en effet faire la distinction entre les concepts de

mondialisation, internationalisation et globalisation. Ces termes sont généralement utilisés sans

distinction et par conséquent sans définition précise.

Le terme de mondialisation est le plus vague des trois. De très nombreuses définitions

peuvent en être donnée et aucunes d’entre elles ne fait l’unanimité auprès des économistes. Selon le

Larousse, la mondialisation du point de vue économique est « l’élargissement du champ d’activité

des agents économiques (…) du cadre national à la dimension mondial. »3. Une définition plus

précise et pertinente pour comprendre ce concept émane de l’économiste F. Zumer qui définit la

mondialisation comme « un mélange de progrès technique, de développement des échanges, de

mouvements de facteurs de production, de déréglementation et de libéralisation »4. Cette dernière

définition place donc les entreprises et les politiques économiques des Etats comme acteurs clés du

phénomène.

Le seul point commun aux différentes définitions proposées est le lien avec le concept de

globalisation. Toujours selon le Larousse, la globalisation est « la tendance des entreprises

multinationales à concevoir des stratégies à l’échelle planétaire, conduisant à la mise en place d’un

marché mondial unifié »5. Le terme de globalisation est plus précis car il insiste sur l’intégration des

marchés, sur la disparition des frontières et la perte d’autonomie des décisions politiques des Etats.

Ce terme s’est généralisé dans les années 90 sous l’influence de l’idée de « village global » du

philosophe M. McLuhan. Selon l’économiste Jean-Marc Siroën, la globalisation est « un processus

qui tend à rendre accessible les mêmes biens, services et prestations de facteurs aux mêmes

conditions de prix et de qualité dans tous les pays en même temps. L'interdépendance entre les

nations disparaît pour ne laisser la place qu'à l'interdépendance des producteurs et des 3 http://www.larousse.fr/ref/nom-commun-nom/mondialisation_71051.htm, page consultée le 31/01/09 4 Cours de F. Zumer, « Politiques Economiques en Europe », L3, Université Panthéon Assas Paris 2, année 2006-2007 5 http://www.larousse.fr/ref/NOM-COMMUN-NOM/2-globalisation_55610.htm, page consultée le 31/01/09

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consommateurs, répartis sur l'ensemble de la planète. »6. Là encore, ce sont les entreprises et

surtout les multinationales qui deviennent les acteurs principaux de l’économie mondiale. Toute

idée de nationalité disparait. Il vaut mieux donc privilégier le terme de globalisation à celui de

mondialisation du fait de sa plus grande précision et intérêt du point de vue économique et

industriel.

Reste à différencier le terme de globalisation à celui d’internationalisation.

L’internationalisation renvoi à l’intensification des relations économiques entre des États-Nations.

Elle reconnait, au contraire de la globalisation, une autonomie des Etats dans leurs prises de

décisions et l’existence de marchés nationaux identifiables. La phase d’internationalisation a débuté

à la suite des accords de Bretton Woods dans les années 70 et s’est poursuivie depuis. Il est alors

tentant de penser que la globalisation est la suite logique de l’internationalisation. Les deux

phénomènes ne sont de toutes manières pas indépendantes et ne font que s’alimenter l’un l’autre. Il

semble néanmoins que le concept de globalisation marque une rupture par rapport à celui de

l’internationalisation du fait de son caractère beaucoup plus extrême et de ses implications sur

l’économie mondiale plus nombreuses.

2. Des économies intégrées

L’intérêt majeur de cette globalisation réside dans le fait qu’au plan mondial nous avons

assisté à une augmentation très importante du volume des échanges entre les pays. Les relations

économiques entre les pays se sont accrues. Cela suit les théories de David Ricardo sur les

avantages comparatifs en 1815. Cette théorie énonce que les pays ont intérêt à se spécialiser dans

certaines productions en fonction des coûts relatifs que ces productions représentent. Chaque pays

se spécialisant, ils pourront optimiser la production de chaque bien et avoir un intérêt à l’échange

par la suite. Tous les pays participant à l’échange n’auront pas les mêmes gains mais aucun ne

subira de pertes. Cette théorie est à la base des échanges commerciaux internationaux. L’échange

permet au final de produire davantage, il est un réel créateur de richesse. Le fait d’exporter et

d’importer devient comme produire. Ce qui rend le commerce international intéressant est qu’il

permet d’augmenter les richesses à se partager. L’idée, souvent véhiculée avec l’avènement de la

mondialisation que les pays se mènent une guerre, est fausse car il y a un intérêt réciproque à

échanger. Le commerce international n’est pas un jeu à sommes nulles mais bien un jeu à sommes

positives. C’est notamment l’économiste américain Paul Krugman qui réfute cette théorie de la

6 Cours de J-M Siroën, « Définitions, mesures et limites de la globalisation », M2, Université Paris Dauphine, année 2008-2009

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compétition entre pays. Pour lui : « L’idée selon laquelle l’avenir économique d’un pays dépend en

grande partie de sa réussite sur les marchés mondiaux est une hypothèse et non pas une évidence ;

et, dans la pratique, empiriquement, cette hypothèse est tout simplement fausse. »7. La

mondialisation faisant s’accroitre le commerce international permet donc une création de valeur,

bénéfique à la fois aux économies nationales et aux entreprises faisant vivre ces économies

nationales. C’est bien les entreprises qui vont être les premières bénéficiaires de cette ouverture des

économies.

Dans les faits, voyons comment se passe cette ouverture des économies par la

spécialisation. Comme vu précédemment, la spécialisation provient de manière simplifiée de la

théorie des avantages comparatifs de Ricardo, théorie basée sur les dotations factorielles des

nations. Cette théorie fut par la suite enrichie par le théorème HOS8 ou par les travaux de

Leontief9. Mais pour s’approcher du monde réel, il faut se tourner vers les nouvelles théories du

commerce international caractérisées par l’étude des divergences de prix, de l’innovation et des

rendements croissants. La création des avantages comparatifs est désormais dynamique et le rôle

des entreprises est majeur. C’est notamment sur la base des travaux de Schumpeter10 que les

entrepreneurs sont reconnus comme de véritables innovateurs et que cette innovation est génératrice

de baisse de coûts et d’une meilleure réponse à la demande et donc créatrice d’avantages

comparatifs. La théorie du « cycle de vie du produit » de Vernon11 est l’illustration du rôle de

l’innovation dans le commerce international. Les rendements croissants sont également primordiaux

pour comprendre les échanges internationaux et le développement de l’intégration des économies.

Cette théorie énoncée par Krugman en 197912, renvoie au principe d’économies d’échelle.

Krugman, devenu prix Nobel d’économie en 2008, a par la suite associé à cela les « effets

d’agglomération »13. Ces effets introduisent l’apparition de pôles de compétitivité permettant une

synergie entre différents acteurs industriels au sein d’une même région (l’exemple le plus

caractéristique est celui de la Silicon Valley). La globalisation a décuplé tous ces effets à un niveau

mondial. Nombre d’entreprises, suivant la logique de spécialisation, ont désormais une nationalité

« mondiale ». Les économies nationales sont interdépendantes et tout retour en arrière semble

impossible pour deux raisons principales : la première est que les bénéfices obtenus par cette

7 Krugman P., 1996, « La mondialisation n’est pas coupable », Ed. La Découverte, Paris, p.19 8 Samuelson P., 1948, « International Trade and Equalization of Factor Prices, Economic Journal, n°58» 9 Leontief W., 1954, « Production domestique et commerce international : réexamen de la position capitalistique des Etats-Unis », Economia Internazionale, vol. VII,n°1 10 Schumpeter J., 1954, « The Theory of Economics Development », Harvard 11 Vernon R., 1966, « International Investment and International Trade in Product Cycle » 12 Krugman P., 1979, « Increasing Return, Monopolistic Competition and International Trade », Journal of International Economics 13 Krugman P., 1991, « Geography and Trade », MIT Press, Cambridge, Massachussets

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globalisation sont largement supérieurs aux pertes ; et la deuxième énoncée par Krugman, est que

bien que la globalisation soit peut être trop avancée car elle a procurée trop d’instabilité, trop de

crises ou trop de conflits, le risque de tenter de la stopper est d’avoir une récession et non pas une

stabilisation. C’est « la théorie du vélo » : quand on pédale, on avance ; quand on s’arrête, on

tombe. Les faits désormais sont que les économies sont largement intégrées et que toutes décisions

de nos partenaires commerciaux auront des impacts sur notre propre économie.

3. Une troisième révolution industrielle

L’explosion de la globalisation est issue non seulement de l’ouverture des économies mais

aussi de ce que certains appellent la troisième révolution industrielle. Depuis la création de

l’ordinateur et suite à l’important développement des Nouvelles Technologies de l’Information et de

la Communication (NTIC) au début des années 2000, l’idée que nous assistons à une troisième

révolution industrielle est en marche. C’est ce qu’on appelle « la nouvelle économie ». Cette

révolution industrielle serait basée sur une innovation technique : l’informatique au sens large. Cela

consiste donc, comme l’avait provoqué les précédentes révolutions industrielles, en un nouveau

modèle productif depuis les années 90 aux Etats Unis. Cette révolution serait donc source d’une

croissance nouvelle et d’une élévation future des niveaux de vie.

Cette théorie porte évidemment débat. En 1987, Robert Solow, prix Nobel d’économie cette

même année, a formulé ce qui est appelé « le paradoxe de Solow » à savoir que « les ordinateurs

sont partout, sauf dans les statistiques ». Il constate qu’empiriquement il n’y a pas d’augmentation

de la productivité du travail donc qu’il n’y a pas de révolution industrielle. A partir de cette période,

la croissance aux Etats Unis n’a cessé de croître pendant 15 ans de suite. Au début des années 2000,

la question est donc revenue sur l’existence d’une troisième révolution industrielle. Solow lui-même

reconnaissait en 2000 que son paradoxe était résolu. L’informatique explique environ un point de

croissance aux Etats Unis. D’autres économistes ont contredit cette théorie en considérant que

l’augmentation de la productivité aux Etats Unis était une illusion d’optique car elle a effectivement

augmenté mais seulement dans le secteur des NTIC utilisant en masse l’informatique mais elle n’a

pas profité aux autres secteurs de l’économie. C’est le développement du secteur des NTIC qui a

augmenté artificiellement l’augmentation de la productivité aux Etats Unis. Il y a néanmoins un

consensus sur une réelle augmentation de la productivité aux Etats Unis.

Le problème posé est qu’on ne semble pas avoir les mêmes effets en Europe. Le paradoxe

de Solow semble être toujours présent. La révolution industrielle est sensée apporter un nouveau

système productif. Si on compare les systèmes aux Etats Unis et en Europe, on constate des

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différences. Les Etats Unis ont été en avance sur plusieurs points : organisation massive de la sous

traitance, organisation des entreprises en réseau, diminution des normes hiérarchiques ou encore

constitution de l’entreprise en petites unités autonomes ayant un degré de liberté plus important que

dans le passé. Tous ces points semblent être la conséquence de l’utilisation massive des NTIC. En

Europe, les dépenses dans ce secteur ont été faibles. L’argument en faveur de ce comportement était

qu’il valait mieux laissez faire le développement par d’autres et juste apprendre à utiliser. Or les

rentes apportées par les exploitants de ces nouvelles technologies sont énormes, ce sont les

entreprises les plus profitables du monde (Microsoft en est l’exemple). De plus, les pays qui

produisent ces nouvelles technologies possèdent un avantage dans la maitrise de l’utilisation de ces

produits. En Europe, les pays qui ont investis massivement dans les NTIC sont les seuls réussissant

à avoir une productivité élevée, une croissance forte, une réduction du chômage et un niveau de vie

élevé.

Les principales limites portant sur la validité de cette révolution industrielle résident dans le

fait qu’il semble que les bénéfices liés à l’utilisation des nouvelles technologies soient à rendements

décroissants. L’utilité marginale diminue rapidement. Internet par exemple va simplifier et

considérablement accélérer la diffusion de l’information et des nouveaux produits mais ne va pas

permettre d’en créer de nouveaux. De plus les effets pervers de l’utilisation de l’Internet peuvent

être autant de freins à l’augmentation de la productivité. L’ordinateur ne peut être mis au même

niveau que l’électricité ou le moteur à explosion par exemple.

La relation entre mondialisation et développement des NTIC est très étroite. Il semble

indiscutable que si la mondialisation s’est déroulée de manière aussi rapide, c’est en grande partie

par l’utilisation massive des nouvelles technologies. L’information peut désormais circuler

instantanément à travers le monde entier. L’utilisation de ces technologies a également permis de

faire évoluer les systèmes industriels. L’apparition de nouveaux types d’entreprises spécialisées

dans ce secteur a accru les relations entre elles et celles des autres secteurs, les interdépendances se

sont accrues elles aussi. On assiste à un effet de « clubs » c'est-à-dire de réseau. « On considère

qu’il y a un effet de réseau quand l’utilité d’un produit ou d’un service augmente à proportion du

nombre de ses utilisateurs. Plus il y a d’utilisateurs, plus l’utilité est importante »14. On se dirige

donc vers des entreprises devenant dépendantes les unes des autres à des niveaux de plus en plus

importants et impliquant des sommes elles aussi de plus en plus considérables.

14 Cours de F. Zumer, « Politiques Economiques en Europe », L3, Université Panthéon Assas Paris 2, année 2006-2007

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B. Une nouvelle organisation économique mondiale

1. Un système financier totalement intégré

L’une des implications économiques principales de la globalisation réside dans l’une de ses

facettes, la globalisation financière. Ce terme désigne l’apparition d’un marché mondial intégré des

capitaux. Les économistes considèrent généralement que cette globalisation à trois dimensions. Une

dimension géographique liée à la mobilité des capitaux depuis la fin du régime en changes fixes de

Bretton Woods ; une dimension fonctionnelle liée à l’intégration des différents marchés (monétaires

et boursiers par exemple) ; et temporelle liée à la possibilité d’effectuer des actions en temps réel

24h/24h et 7j/7j. Cette globalisation est directement liée au développement des NTIC qui a permis

de relier le monde instantanément. Elle a été possible grâce aux « 3D » : la déréglementation

(abolition des contrôles de changes et des restrictions aux mouvements de capitaux), la

désintermédiation et le décloisonnement des marchés.

Cette globalisation est basée sur deux points clés : un mécanisme de mutualisation des

risques (par la possibilité d’investir sur tous les marchés financiers) et un comportement d’arbitrage

et de spéculation. Avec la mobilité presque totale des capitaux, ce sont désormais les marchés

financiers qui régissent les comportements économiques des pays comme des entreprises. Les

avantages principaux de ce système économique sont des financements à moindre coût, une

meilleure allocation des ressources et un financement de la croissance mondiale.15 Quand aux effets

négatifs, ce sont les pertes d’autonomie des économies nationales (selon le triangle

d’incompatibilité de Mundell16), la volatilité des taux de change et le risque principal, la présence de

crises systémique. Cela a commencé en 1984 avec la crise bancaire au Mexique, puis les épisodes

les plus marquants furent la crise asiatique en 1997, la crise en Argentine du début des années 2000

avant d’arriver à la crise actuelle de 2008, frappant l’ensemble de l’économie mondiale et illustrant

parfaitement l’intégration des économies et l’ampleur de la globalisation financière.

Du point de vue des entreprises, le mode de gouvernance à considérablement changé. Selon

Gérard Lafay, « les évolutions observées depuis la fin du vingtième siècle,(…), font dès lors

apparaître des tendances lourdes : une gouvernance d’entreprise fondée sur la prédominance des

profits,(…) ; un rôle de plus en plus important de divers types de fonds financiers, axés sur des

comportements spéculatifs et une vision à court terme ; une remise en cause graduelle des acquis

sociaux, entraînant un accroissement considérable des inégalités sociales à l’intérieur de la plupart

15

Mercier P., 22 janvier 2007, « La globalisation financière et ses conséquences », Intervention à la Chambre de Commerce et de l’Industrie du Loiret 16 Mundell R., 1961, « A theory of optimum currency area », American Economic Review

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des pays ».17 Cette vision est désormais partagée par de nombreux experts internationaux et place

donc les entreprises au cœur de la globalisation financière. Pour Michel Aglietta, « L'économie de

capital est venue de la restructuration des entreprises qui ont subi à la fois une concurrence plus

dure sur les marchés des produits, une exigence de rendement des fonds propres plus grande et un

coût du capital fortement accru »18. On assiste donc à un cercle mettant en scène les entreprises

cherchant à augmenter leurs valeurs sur les marchés boursiers et les marchés boursiers réagissant

sans cesse, et parfois sans logique, aux comportements des entreprises.

2. Une globalisation du travail et des techniques

Avec la globalisation, c’est aussi le marché du travail qui va être modifié. On constate une

forte mobilité de la main d’œuvre. Les pays en voie de développement (PVD) ont profité de la

globalisation pour augmenter leur taux de production, notamment dans le secteur manufacturier en

raison du coût de leur main d’œuvre relativement plus faible. Ceci rejoint les théories en économie

internationale sur les dotations en facteurs de production des pays et leur place au sein de la

production mondiale. On assiste de plus en plus à des mouvements migratoires d’importances

impliquant généralement des personnes venant de PVD et cherchant à trouver du travail dans des

pays plus développés que le leur. On constate dans le même temps que les Etats cherchent à

contrôler de plus en plus les flux migratoires. Si on étudie les motivations des pays développés,

pays ayant été à l’origine de l’accélération de la globalisation, on remarque que les mesures

principales ayant favorisé la globalisation ont été prises dans des buts de contrôle de l’immigration.

Pour Jean-Marc Siroën, « L'expansion des flux commerciaux et d'investissements directs peut

d'ailleurs être interprétée comme un substitut à la libre circulation du travail. L'ALENA par

exemple avait aussi pour fonction de fixer les travailleurs mexicains au-delà du Rio Grande ».19

Malgré cette globalisation du travail, les marchés restent très segmentés. Si on considère l’effet

Balassa20, à savoir qu’il existe des marchés protégés de la concurrence internationale, et du fait que

le nivellement semble se faire par le bas, les barrières à l’entrée risquent de s’accroître dans la

plupart des pays.

Quand on parle de globalisation, on peut aussi penser à la globalisation des techniques. La

diffusion des innovations et des technologies à été sans aucun doute accélérée. Nous devrions

17 Lafay G., 2007, « France Horizon 2050 », Ed. Economica, Paris, p.47 18

Aglietta M., 1999, « L’économie mondiale », Ed. La Découverte, Paris, p.57 19 Cours de J-M Siroën, « Définitions, mesures et limites de la globalisation », M2, Université Paris Dauphine, année 2008-2009 20 Balassa B., 1964, « The Purchasing Power Parity Doctrine : a Reappraisal », Journal of Political Economy

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normalement assister à un partage total de l’innovation, cette dernière étant considérée comme un

bien public dans les nouvelles théories du commerce international. Dans les faits nous constatons

qu’il reste des obstacles structurels et institutionnels. Tout d’abord l’insuffisance des infrastructures

et du capital pour pouvoir exploiter efficacement les techniques. Ensuite les lois sur la protection de

la propriété intellectuelle et les contrôles effectués par les entreprises sur la diffusion des licences et

brevets. Ce sont également des accords internationaux qui ralentissent cette diffusion des techniques

à travers le monde. On peut penser à l’accord ADPIC sur les aspects des droits de propriété

intellectuelle touchant au commerce. Cet accord de l’OMC, initié par les pays développés, comporte

notamment une clause qui précise que les membres de l’OMC peuvent exclure de la brevetabilité

« les végétaux et les animaux autres que les micro-organismes [...] Cependant, les membres devront

se pourvoir d'une protection sur les variétés végétales par des brevets, par un système sui generis

ou par une combinaison de ces deux moyens »21. Cet accord très controversé place les PVD en

position délicate car selon Geoff Tansey, « Les pays en développement copiaient et empruntaient les

technologies, et amendaient leurs propres lois lorsqu'ils estimaient être en mesure de le faire »22.

Au final, bien que le partage de l’innovation soit de plus en plus facile, les protections sont

de plus en plus présentes, chaque pays voulant protéger les brevets et licences de ses entreprises. Ce

sont une nouvelle fois des décisions politiques qui vont influencer les avancées de la globalisation

dans ce domaine.

3. Vers une gouvernance mondiale ?

Le fait que les économies soient de plus en plus intégrées amène donc les pays à avoir des

politiques plus ou moins communes afin de défendre leurs intérêts désormais communs. C’est ainsi

que parallèlement à la globalisation, le monde a vu se développé les institutions internationales.

Leur premier objectif était de mettre en place des règles de fonctionnement afin d’éviter les

comportements non coopératifs de certains pays, comportements qui avaient conduit à la Seconde

Guerre Mondiale. Les institutions les plus importantes sont le Fond Monétaire International (FMI)

et la Banque Mondiale, toutes deux issues des accords de Bretton Woods en 1944 ; le General

Agreement on Tarrifs and Trade (GATT) en 1947 devenu l’Organisation Mondiale du Commerce

(OMC) en 1994 ; la Banque des Règlements Internationaux (BRI) en 1930 ; le Bureau International

du Travail (BIT) en 1920 ; l’Organisation Mondiale de la Santé en 1948 ; ou des institutions à rôle

plus limité géographiquement, comme l’Organisation de Coopération et de Développement

21 Article 27.3(b) de l’Accord sur les ADPIC 22 http://www.idrc.ca/fr/ev-5409-201-1-DO_TOPIC.html, page consultée le 14/02/09

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Economique (OCDE) créé en 1960, ou politiquement, le G8. Ces institutions sont devenues vitales

dans le cadre de la globalisation car les Etats ne sont plus capables d’assurer seuls une régulation

sur leurs propres activités, ces dernières étant reliées à celles de nombreux autres pays. Le problème

se posant aujourd’hui est que ces institutions n’ont certainement pas les moyens financiers et

juridiques pour assurer efficacement leurs missions. L’autre problème se posant est plus politique.

De plus en plus de voix s’élèvent contre ces organisations internationales car de nombreux pays

considèrent qu’elles servent les intérêts des nations les plus puissantes au détriment des plus faibles.

C’est donc également à un problème de légitimité que doivent faire face ces institutions. C’est

notamment le débat lors des différents cycles de négociation de l’OMC.

Les groupements d’intérêts entre pays et l’intégration de leurs économies s’expliquent en

grande partie par le processus de régionalisation qui est apparu à la fois grâce à la globalisation mais

qui a également alimenté cette dernière. Les objectifs d’une intégration régionale sont d’accroître

les échanges commerciaux entre les pays par la suppression des obstacles à la libre circulation et la

suppression des obstacles tarifaires. L’exemple le plus poussé d’une telle intégration est celui de

l’Union Européenne. Les autres accords régionaux les plus importants sont l’ALENA, le

MERCOSUR ou l’ASEAN. Ces zones ont également des accords de libre échange par exemple

avec d’autres pays du monde ne faisant pas partie de la région. Ainsi, le MERCOSUR a un accord

de libre échange avec l’Inde. Ces régionalisations prennent tout leur sens dans le contexte de

globalisation car les intérêts des pays vont alors être de défendre les pays de leur zone. Ce sont donc

des décisions de plus en plus continentales voir intercontinentales qui vont être prises, légitimant

l’existence d’institutions internationales. Si ce processus tend à se poursuivre, les décisions prises

au plan mondial vont petit à petit se supplanter à celles prises au plan national. L’exemple de

l’Union Européenne est symptomatique de ce processus.

C. Les enjeux de demain

1. Jusqu’où pousser la globalisation ?

Si nous restons sur ces régionalisations, phénomène illustrateur de la globalisation, nous

pouvons nous poser la question de savoir jusqu’où les poursuivre. Faut-il se contenter de la situation

actuelle dans laquelle ce sont des blocs de pays ayant des intérêts communs qui s’affrontent sur le

plan politique et économique ou continuer le processus d’intégration ayant pour finalité une

intégration complète mondiale? Ne serait ce qu’au sein des accords régionaux, la question se pose.

L’accord le plus poussé actuellement est l’Union Européenne. L’intégration est de plus en plus forte

mais la situation actuelle est fortement remise en cause. Le principe même d’union européenne

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soulève de plus en plus d’opposition. Cela est expliqué par l’économiste américain Dany Rodrick

par son « trilemme politique de l’économie mondiale »23. Il représente ce trilemme par le schéma

suivant :

Figure 1: Trilemme politique de l'économie mondiale

Selon lui, l’Union Européenne se situe entre la « camisole dorée » et le fédéralisme global

c'est-à-dire avec des économies nationales intégrées mais une situation intermédiaire entre une

souveraineté nationale et une représentation démocratique. L’évolution actuelle si elle se poursuit

doit mener à un fédéralisme global en Europe. Or les nombreux points de contestations portent sur

la perte d’autonomie nationale. Ce trilemme illustre la situation dans laquelle se trouvent les

économies nationales face à la globalisation. Pour en revenir à la « théorie du vélo », a-t-on le choix

de décider d’arrêter la globalisation ? Il semble que ce soit un processus visant à se poursuivre. Les

pays et les entreprises doivent, plutôt que de chercher à la stopper, chercher à s’adapter et à avoir

une démarche proactive face à elle. Rodrick considère que d’ici un siècle, l’Union Européenne sera

sou forme d’un fédéralisme global mais que d’ici les vingt prochaine années, ce sera plutôt une

stabilisation du fait des crises financières et du protectionnisme des gouvernements. Ce sont les

maux dont souffre la globalisation qui sont encore pointé du doigt par Rodrick : le manque de

régulation et le libre échange à tout prix.

23 Cours de F. Zumer, « Politiques Economiques en Europe », L3, Université Panthéon Assas Paris 2, année 2006-2007

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2. Réguler les économies et réduire les inégalités

On ne peut plus parler de la globalisation sans parler du mouvement altermondialiste. Ce

mouvement porte des valeurs essentiellement sociales visant à changer le mode de fonctionnement

de l’économie mondiale jugée créatrice d’inégalités et non soucieuse de l’environnement. Ce

mouvement est notamment légitimé depuis la parution d’un livre de Joseph Stiglitz, « Globalization

and its discontents », best seller mondial, dans lequel il critique l’action du FMI, sensé représenté la

régulation dans la globalisation, qu’il accuse de servir uniquement les intérêts des Etats Unis.

Stiglitz, prix Nobel d’économie en 2001, est devenu l’une des figures emblématiques des critiques

du fonctionnement de l’économie mondiale dans le contexte de la globalisation. Il a poursuivit ses

critiques dans deux autres ouvrages, « Quand le capitalisme perd la tête » et « Un autre monde :

contre le fanatisme du marché » dans lesquels il porte notamment les critiques suivantes. Il critique

fortement le pouvoir des Etats Unis dans l’économie mondiale et met en lumière certains

« mythes » à rejeter : « La déréglementation et les marchés autorégulés sont à la base de cette

prospérité, et il faut exporter dans le monde entier ; la clef du succès, c’est de se soumettre à la

discipline des marchés financiers ; la mondialisation à l’américaine conduira nécessairement à la

prospérité mondiale, dont bénéficieront les marchés financiers mais aussi les pauvres du monde en

développement »24. Stiglitz propose que les axes d’évolution de la globalisation soient de limiter la

libéralisation, protéger l’environnement et renforcer la gouvernance mondiale. C’est en résumé un

monde plus juste et avec les mêmes règles du jeu pour tous les pays que propose l’économiste

américain.

Dans le même temps, Rodrick avait tenté d’expliquer comment éviter que la globalisation

soit vue comme facteur déclenchant du développement des inégalités à la fois entre les pays mais

aussi à l’intérieur des pays. Il considère que deux phénomènes sont liés : la globalisation et le

développement de l’Etat providence. Il constate qu’après la seconde guerre mondiale et le début de

l’intensification des échanges, les Etats sont devenus de plus en plus protecteurs. Le but était de

réduire les risques inhérents à l’économie de marché. On constate d’ailleurs empiriquement que ce

sont les pays les plus ouverts aux échanges qui ont la plus forte protection sociale. La protection est

donc indispensable afin de limiter les effets néfastes de la globalisation. L’Etat doit jouer le rôle

d’assureur social. La réduction des inégalités passe donc par une réelle prise en charge des Etats et

donc pas par une autorégulation par les marchés. C’est encore une fois cette inspiration libérale qui

est remise en cause. Rodrick voit la globalisation comme un phénomène très positif mais dans

24 Stiglitz J., 2003, « Quand le capitalisme perd la tête », Ed. Fayard, Paris, p.329

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lequel les Etats doivent prendre leurs responsabilités. Nous pouvons d’ailleurs résumer par un

schéma le risque que prennent les pays en ne jouant pas leur rôle de protecteur.

Figure 2: Défaillance de l'Etat comme assureur social

L’avenir de la globalisation est donc de savoir quel visage elle prendra. Il semble clair que

la forme connue actuellement atteint toutes ses limites. Alors qu’elle était créatrice de valeur et de

richesse, les effets néfastes surgissent et laisse l’économie mondiale dans une situation inquiétante,

comme le montre la crise économique actuelle. L’objectif va être de mieux protéger et d’apporter

des solutions de développement aux pays qui en ont besoin, tout en permettant aux pays développés

de garantir des conditions de croissance.

3. Vers une quatrième révolution industrielle ?

Avec la globalisation, tout se passe beaucoup plus vite qu’auparavant. Les apports des

NTIC a été très important et nul doute qu’ils vont continuer à amener du progrès. Mais d’autres

secteurs vont également devenir sans aucun doute générateurs d’un nouveau type d’innovations. On

peut raisonnablement se poser la question de l’évolution des sciences de la nature. Les progrès

risquent d’être prodigieux. De grandes découvertes scientifiques et technologiques risquent d’avoir

lieu. Les biotechnologies, la génétique, l’océanologie ou encore la climatologie risquent d’apporter

des progrès indéniables. De même, les méthodes d’agriculture et d’élevage et la médecine risquent

de changer de formes. On peut penser au regard de l’histoire humaine que l’accélération du progrès

depuis quelques siècles va se poursuivre et que la prochaine révolution industrielle n’est peut être

pas très loin.

Ce sera alors encore une fois un problème de régulation et de contrôle qui risque

d’apparaitre afin d’éviter des problèmes éthiques dépassant les problèmes économiques actuels. La

prochaine révolution risquant de porter sur l’être humain lui-même, ce sont des lois éthiques qui

vont certainement devoir être mises en œuvre.

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II. Conséquences sur les stratégies industrielles des FMN

A. Des stratégies internationales

1. Par le commerce international

Dans le but de répondre à une demande désormais mondiale, on assiste à une diversification

des mouvements d’internationalisation des entreprises. Le commerce international en est la forme la

plus ancienne. Cela consiste pour une entreprise de produire dans un pays A afin de satisfaire une

demande d’un pays B. C’est l’étape la plus simple pour une entreprise visant à vendre des produits

sur un territoire différent de son territoire national. On distingue généralement deux types de

commerce international. Le premier consiste dans la complémentarité des économies nationales par

le jeu des spécialisations. Cela donne des soldes extérieurs excédentaires ou déficitaires selon les

familles de produits. On constate que l’influence des gouvernements et des décisions politiques

jouent un rôle majeur dans les stratégies de production et de vente des entreprises. Le deuxième

type de commerce international consiste dans la similarité des économies nationales renvoyant aux

travaux de Krugman sur les flux intrabranches. Ce sera au sein même d’une famille de produits que

des échanges internationaux se feront. Les entreprises pouvant alors profiter et non pas être

contraintes par le commerce international.

2. L’investissement direct à l’étranger (IDE)

C’est le cas ou l’entreprise devient « multinationale ». Elle le devient en créant ou rachetant

une filiale de production à l’étranger. L’OCDE définit l’IDE par « une activité par laquelle un

investisseur résidant dans un pays obtient un intérêt durable et une influence significative dans la

gestion d’une entité résidant dans un autre pays. Cette opération peut consister à créer une

entreprise entièrement nouvelle (investissement de création) ou, plus généralement, à modifier le

statut de propriété des entreprises existantes (par le biais de fusions et d’acquisitions). Sont

également définis comme des investissements directs étrangers d’autres types de transactions

financières entre des entreprises apparentées, notamment le réinvestissement des bénéfices de

l’entreprise ayant obtenu l’IDE, ou d’autres transferts en capital ». Il faut différencier le

« Greenfield », création d’une société à l’étranger, et la fusion-acquisition, prise de participation ou

prise de contrôle complète d’une société pré existante.

Cet IDE peut répondre à plusieurs types de motivation pour l’entreprise. La première

consiste dans l’impossibilité de produire des quantités suffisantes dans le pays d’origine et donc

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nécessité de trouver des nouveaux lieux de production. Ce cas arrive généralement quand la

production nécessite des besoins en ressources naturelles. La deuxième motivation répond à

l’impossibilité de vendre des quantités suffisantes dans le pays de destination notamment à cause de

barrières tarifaires. Les IDE permettent de contourner ses barrières en étant directement implantés

au plus près du marché. Cette proximité du marché est aussi une motivation à l’IDE car cela permet

de mieux satisfaire la demande dans le pays d’implantation en étant plus proche des besoins des

clients. Enfin une dernière raison majeure est le fait de profiter de conditions macro économiques

intéressantes dans le pays d’implantation. Nous verrons par la suite que cette dernière motivation est

très répandue et qu’elle a de nombreuses influences sur le SCM.

Les deux premières motivations furent les premières invoquées pour justifier les IDE. Les

firmes multinationales (FMN) américaines furent les précurseurs. Leurs extensions résultaient de la

stratégie géopolitique américaine qui visait à s’implanter dans de nombreux pays en développement.

Puis la motivation de rapprochement de la demande et des marchés porteurs fut la raison de

l’implantation de firmes américaines en Europe. La multinationalisation des entreprises s’est accrue

dans les années quatre-vingts notamment par la volonté de profiter de conditions macro

économiques favorables surtout pour les activités nécessitant beaucoup de main d’œuvre. Nous

avons ainsi assisté à des forts mouvements d’implantation de firmes américaines, européennes et

japonaises dans des pays en développement. On commence alors à assisté à une « décomposition

internationale des processus productifs »25. A partir de cette date, le terme de « firme

multinationale » commence à prendre tout son sens.

3. L’entreprise réseau

L’entreprise réseau est la forme la plus récente d’internationalisation des entreprises. C’est

également la forme issue directement de la globalisation. Les activités de l’entreprise sont

désormais régies par des relations contractuelles avec des partenaires. Le système fortement

hiérarchisé et structuré disparait petit à petit.

Cette forme d’entreprise a commencé à voir le jour dans les années quatre vingt dix. Nous

avons assisté à partir de cette période à l’apparition d’entreprises dont la production était éclatée à

l’échelle mondiale. Cette évolution prend différentes formes : partenariats internalisés, partenariats

externes (comme les joint ventures), concessions (franchises par exemple), sous traitance pure,

centres de profits indépendants ou encore « Original Equipment Manufacturing ». Nous étudierons

plus en détails dans la suite de ce dossier les modalités de cette entreprise réseau. 25 Lassudrie-Duchêne B., 1982, « Décomposition internationale des processus productifs et autonomie nationale », Economica, Paris

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Dans ce contexte, c’est quatre stratégies internationales qui dominent.

Figure 3: Quatre stratégies internationales dominantes26

La première est la « stratégie internationale sur base domestique » dans laquelle toutes les

activités industrielles sont menées dans le pays d’origine. La deuxième est la « stratégie multi

domestique » dans laquelle l’entreprise donne une grande autonomie à des entités nationales. La

troisième est la « stratégie globale coordonnée » ou le pilotage des activités internationales est

fortement centralisé. Enfin la quatrième est la « stratégie transnationale mixte » dans laquelle les

business units sont organisés sur une indépendance totale.

26 Baglin G., 2005, « Management industriel et logistique : conception et pilotage de la Supply Chain », Ed. Economica, Paris, p.123

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Le tableau suivant montre quant à lui les différentes structures d’entreprises

multinationales, faisant des distinctions importantes pour comprendre les différents niveaux que va

prendre l’entreprise réseau.

Tableau 1: Typologie de Bartlett et Ghoshal27

B. Une organisation productive à l’échelle continentale ou mondiale

1. Le concept d’entreprise étendue

Alors que le modèle de l’entreprise possédant en interne la totalité des étapes nécessaires à son

activité et donc maîtrisant la totalité de sa chaîne de valeur était largement dominant, on assiste en

parallèle de la globalisation à un phénomène de « désintégration verticale » et à un mouvement

d’externalisation des activités extérieures au cœur de métier de l’entreprise. La désintégration

verticale consiste « à recentrer l’entreprise sur le maillon de la chaîne de valeur qui apporte le

plus de valeur ou sur celui où l’entreprise maîtrise le mieux ses facteurs de succès »28. Cette

désintégration va se faire vers l’aval comme vers l’amont. Par exemple vers l’aval elle va consister

27 Bartlett C., Ghoshal S., 1991, « Matrix management : not a structure, a frame of mind », Harvard Business Review 28 Capraro M., 2003, « L’entreprise étendue et le développement des fournisseurs », Presse Universitaire de Lyon, Paris, p.15

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à se séparer des opérations de distribution tandis que vers l’amont cela peut être de se séparer

d’activités de première transformation qui n’apportent aucune valeur ajoutée à l’entreprise. Le

secteur automobile a été l’un des pionners dans cette extension de la désintégration verticale.

Aujourd’hui, un constructeur automobile externalise environ 75% de la production d’un modèle.

L’externalisation « caractérise le fait de confier à une autre entreprise une activité industrielle et

opérationnelle (ou même une fonction support) en la soumettant à une obligation de résultats

(transfert total de responsabilité) »29.

Ce phénomène va impliquer la présence de nombreux acteurs gravitant autour de

l’entreprise principale. Cette dernière va multiplier les partenariats avec d’autres entreprises. Ces

entreprises sont appelées partenaires de premier ou second rang en fonction de leur lien direct ou

indirect avec l’entreprise principale. Ces partenaires ne travaillent pas exclusivement avec une seule

entreprise (bien que cela puisse être le cas) mais pour plusieurs clients. Ce sont des spécialistes dans

un domaine très précis ce qui leur permet d’avoir le meilleur niveau de performance. Ils peuvent

avoir un savoir faire et des compétences supérieurs à ceux d’un service interne de l’entreprise pour

laquelle ils travaillent.

Dans cette idée d’entreprise étendue, les diverses fonctions sont confiées à des entités qui

détiennent la totalité d’une petite partie du processus global. Par ce biais, le résultat est un meilleur

fonctionnement de l’ensemble. L’entreprise étendue nécessite néanmoins un décideur stratégique

unique qui doit assurer la cohérence de l’ensemble du processus. Ce concept s’inscrit donc

totalement dans le troisième mode d’internationalisation des entreprises à savoir « l’entreprise

réseau ».

L’essor de l’entreprise étendue réside dans le fait que la Supply Chain d’une FMN est de

plus en plus tournée vers la demande. Afin de satisfaire au mieux le client, il faut pour l’entreprise

avoir une connaissance accrue de ses besoins afin de réussir à les anticiper et ainsi pouvoir réduire

les délais d’approvisionnements et avoir une flexibilité importante pour s’adapter à ses changements

de comportement. Finalement on assiste à une « désintégration verticale » et une « réintégration en

réseaux ».

29 Baglin G., 2005, « Management industriel et logistique : conception et pilotage de la Supply Chain », Ed. Economica, Paris, p.119

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2. Les différentes formes de relations entreprises-fournisseurs

Quand on parle d’entreprise étendue, il faut s’intéresser aux relations entreprise-fournisseurs.

Généralement on distingue trois formes différentes de collaboration entre eux.

La première se produit quand l’entreprise ne vise qu’une maîtrise des coûts par l’intermédiaire

du pôle achats. La stratégie de l’entreprise est donc basée sur une internationalisation des achats et

sur une politique fournisseurs basée sur leur mise en concurrence et qui se base sur des systèmes

d’évaluation et de certification. Ce type de partenariat nécessite de la part de l’entreprise des

prévisions fiables et une globalisation des besoins.

La deuxième forme est une évolution de la première. On commence ici à parler

véritablement de partenariat. L’entreprise formule au fournisseur des exigences en terme de qualité

totale et de coût global d’approvisionnement (c'est-à-dire des exigences au niveau des délais ou du

taux de service par exemple). Des systèmes de pilotage des flux sont alors nécessaires et des

démarches d’EDI (Echange de Données Informatisées) voient le jour. Avec cette forme, l’entreprise

voit diminuer son nombre de fournisseurs et adopte des partenariats à long terme afin d’amortir les

investissements de développement et pouvoir optimiser sa relation avec les fournisseurs. Le

« donneur d’ordre » conserve ici tout le pouvoir de conception du produit. C’est avec ce type de

relations que l’on commence à voir apparaitre des normes comme les normes ISO afin d’assurer une

qualité au niveau des processus utilisés. La coordination entre entreprises et fournisseurs nécessite

que le transport, le conditionnement et le pilotage des flux soient planifiés de manière rigoureuse.

C’est un fonctionnement totalement opérationnel de la relation entre entreprises et fournisseurs.

La dernière forme prend des aspects à la fois opérationnels comme pour les deux premières

formes mais aussi commerciaux et techniques. Le fournisseur va avoir une responsabilité dans la

conception et l’évolution des produits. C’est en réalité un système de « co-traitance » qui est mis en

place, les deux parties ayant des responsabilités envers l’autre. Le fournisseur à une entière

responsabilité de son activité. Cette forme provient du fait que certaines entreprises ont des besoins

importants en terme de personnalisation des produits et en terme de « time-to-market ». La relation

entre les parties est évidemment à long terme avec un système de partage de données et

d’information très développé. Ce système semble être celui qui tend à se développer, nous tenterons

de confirmer cette intuition ultérieurement.

Nous pouvons enfin citer un dernier mode de collaboration un peu particulier, le partenariat.

Dans ce cas, les entreprises sont sur un pied d’égalité. Elles gardent leur autonomie et ont un intérêt

stratégique réciproque à collaborer. On assiste alors à une plus grande spécialisation de chaque

membre du partenariat dans son cœur d’activité.

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3. Les défis de la FMN dans ce contexte

Le développement des relations entre entreprises et fournisseurs est l’aspect externe que

doit gérer l’entreprise directrice dans le cadre de l’entreprise étendue. Mais en interne, elle aura

également à faire face à des bouleversements. Les FMN doivent gérer la dispersion de leurs sites au

niveau mondial conjuguée à la délocalisation des sites de production. Cet écart de localisation

oblige les différentes entités de la firme à avoir des interactions, qui génèrent donc une nécessaire

coordination des flux entre des entités qui n’avaient auparavant aucun besoin de communiquer

directement. Or cela a pour effet de ralentir considérablement la performance de l’entreprise et plus

particulièrement de la Supply Chain. Le développement international de l’entreprise met souvent en

avant les lacunes dans l’organisation interne de l’entreprise. Sur cet aspect de logistique amont, les

FMN voient de plus en plus leurs usines devenir des « usines nomades »30 c'est-à-dire que les sites

de production deviennent de plus en plus volatiles et que les FMN modifient au gré des conditions

d’accueil des différents pays l’emplacement de leurs usines. Le fait que ces usines deviennent de

plus en plus des usines spécialisées à vocation internationale rend la tache logistique plus complexe

pour les FMN. Il faut en effet reconstituer les gammes de produits. Il faut donc mettre en place des

structures logistiques (entrepôts pour du stockage ou plate forme pour du cross docking) afin de

reconstituer ces gammes. La difficulté principale réside dans l’équilibrage des flux et des stocks et

dans la minimisation des coûts des flux entre les pays. C’est pourquoi la vision globale apportée par

la Supply Chain que nous verrons plus loin est d’autant plus pertinente dans ce contexte.

D’autres défis se présentent également pour les FMN. Selon les principes de l’ECR, les FMN

plaçant le client au centre de leurs préoccupations et de leurs Supply Chain, les conduit à revoir

leurs processus de distribution et notamment leurs structures. Les forces de vente et de distribution

sont désormais en relation avec l’ensemble des fournisseurs industriels. Il y a donc une complexité

accrue du fait de la multiplication des flux liée au fait que chaque intervenant n’a plus un seul

interlocuteur mais une multitude. Nous développerons ce point un peu plus tard. Les FMN vont

entre autre devoir gérer une segmentation accrue des marchés et de nouvelles attentes de la part des

consommateurs. Les défis pour les FMN sont nombreux du fait de la multiplication du nombre

d’acteurs prenant par à leur chaine de valeur. Que ce soit de l’approvisionnement à la distribution,

l’entreprise doit désormais mener un pilotage précis de ses activités et de ses relations avec ses

partenaires.

30 Dornier P-P., Fender M., 2007, « La logistique globale et le SCM », Ed. Eyrolles, 2e édition, Paris, p.169

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C. De nouvelles responsabilités pour les FMN

1. Sociale : délocalisations et inégalités

L’entreprise étendue à une influence majeure : développer l’externalisation. Cette dernière

est considérée comme la forme la plus récente de délocalisation. Elle induit une ouverture de la

chaine de valeur du produit d’où l’importance accordée aux droits de propriété industrielle.

Auparavant ces dernières étaient comprises dans une logique d’internalisation. Les FMN

cherchaient à exploiter leur avantage spécifique en trouvant le bon lieu de production et en

internalisant le tout. C’est la théorie de Dunning, le modèle OLI (1988) (Ownership advantage,

Localisation, Internalisation). On assistait alors à « une délocalisation horizontale, Nord-Nord,

entre pays développés et une délocalisation verticale, Nord-Sud, vers les économies moins

développées »31. La première est basée sur des investissements industriels par des mouvements de

capitaux. Elle induit des exportations et des importations et permet le transfert de technologie. La

deuxième est basée uniquement sur les coûts et c’est la plus souvent stigmatisée dans les pays

occidentaux. Ces derniers semblent vouloir chercher un bouc émissaire à leurs difficultés en

accusant les FMN de délocaliser en masse sans penser aux retombées sociales dans le pays. La

tendance est de présenter le coût du travail comme le facteur premier de la compétitivité pour une

FMN et de montrer que celles-ci cherchent à tout prix la main d’œuvre la moins coûteuse. Or le

coût du travail n’est qu’un facteur parmi d’autres comme le transport, les matériaux, les

infrastructures ou encore le degré de corruption sans oublier le plus important : la conquête de

nouveaux marchés. Si le coût du travail était le facteur déterminant, toutes les industries devraient

être délocalisées. Le problème repose sur le fait que les FMN ne peuvent maitriser les flux

d’informations de ce genre. Elles doivent donc prendre en compte dans leurs stratégies le fait que

leurs décisions seront analysées de manière systématique.

On constate également un autre point sur lequel les FMN doivent porter leur attention, le

fait que leurs stratégies industrielles provoquent des inégalités de plus en plus importantes. Nous

parlons ici des inégalités au sein même des pays développés. Dans les pays en voie de

développement, l’accroissement des délocalisations est au contraire une voie bénéfique pour la

création de richesse. Dans les pays développés, l’écart de richesse entre les plus riches et les plus

pauvres ne cesse de s’accroître. Certaines thèses soutiennent que seuls les travailleurs qualifiés sont

valorisés en prenant l’exemple de Nike dont 4% du prix de vente d’un produit revient à la

fabrication et 96% pour la conception, le marketing et le design. Mais en s’intéressant de plus près à

la question, on se rend compte d’un phénomène moins connu mais beaucoup plus impressionnant :

31 Michalet C-A., 2007, « Mondialisation, la grande rupture », Ed. La Découverte, Paris, p.36

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l’augmentation des inégalités intragroupes. La segmentation de plus en plus forte de la division du

travail a fait apparaitre le modèle « O-Ring »32 développé par Michael Kremer. Il fait l’analogie

entre l’accident de la fusée spatiale Challenger en 1986 à cause d’un simple joint, le « O-ring » et le

travail en commun de plusieurs millions d’équipes dans la conception de produits aujourd’hui et

dont le moindre dysfonctionnement menace la production du produit fini. Chaque travailleur est

associé à un processus de fabrication dans lequel les autres travailleurs ont une qualité et une

formation très proche. Les unités de travail sont de plus en plus petites. Or on constate que de

faibles écarts de performances individuelles peuvent donner lieu à des écarts de revenus

considérables. A titre d’exemple, celui qui va travailler dans la conception d’une fusée spatiale sera

payé en fonction de l’importance qu’il représente dans la réussite du projet. Le même travailleur

embauché pour le même travail aura un revenu moindre si le projet final est la conception d’un

projet moins important. On assiste donc à des destins de plus en plus individuels des travailleurs.

Le rôle des FMN est donc primordial sur l’emploi et sur les conditions de travail. Etant

présentes sur plusieurs pays voir plusieurs continents, elles doivent assumer un rôle dans

l’amélioration de la situation des travailleurs et doivent avoir une vision internationale de ces

problèmes sociaux.

2. Territoriale : le rôle des réseaux d’entreprises

Les FMN doivent aujourd’hui prendre en compte un nouvel aspect qui tend à devenir de

plus en plus important, l’aspect territorial. L’entreprise étendue comme présentée auparavant

s’inscrit dans cette logique. Les FMN ont désormais, en rapport avec la responsabilité sociale, une

responsabilité dans les politiques d’aménagement du territoire. L’insertion territoriale d’une FMN

doit permettre de stimuler l’innovation technologique en partenariat avec des centres de recherches

et des universités. Elle doit également permettre de créer un tissu d’entreprises partenaires au sein

d’une même région. La FMN doit être le moteur et le pivot de synergies avec des PME locales. Une

FMN comme Inditex a compris cela pour sa chaîne de magasins Zara. L’approvisionnement et la

sous traitance effectuée par Zara est fait dans la région du siège d’Inditex à La Corogne en Espagne.

Tous les fournisseurs sont à proximité géographique ce qui permet à l’enseigne d’avoir un avantage

concurrentiel important par rapport à ses concurrents en pouvant renouveler sa gamme de produits

et la livrer en magasin en quelques semaines là où les concurrents mettent plusieurs mois.

Ces réseaux d’entreprises peuvent prendre plusieurs formes. La première est le cluster

présenté par Porter comme « un groupe géographiquement proche d’entreprises liées entre elles et

32 Kremer M., 1993, « The O-Ring theory of economic development », Quarterly Journal of Economics

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d’institutions associées relevant d’un domaine donné, entre lesquelles existent des éléments

communs et des complémentarités »33. La deuxième est le technopole, « ensemble d’acteurs

hétérogènes (…) qui participent collectivement à la conception, à l’élaboration, à la production et à

la distribution-diffusion de procédés de production, de biens et de services dont certains donnent

lieu à une transaction marchande »34. Vient ensuite l’espace serviciel, « centre de production de

connaissances ayant une inspiration territoriale qui tire partie de nombreuses interrelations (…)

grâce à de nouvelles formes d’apprentissage permises par l’avènement des NTIC »35. C’est en

réalité un technopole basé uniquement sur de l’information. Nous avons aussi le district industriel,

d’origine italienne, défini par « une entité socio-territoriale caractérisée par la présence active

d’une communauté de personnes et d’une population d’entreprises dans un espace géographique et

historique donné »36. Ce sont donc d’importantes agglomérations d’entreprises basées autour d’un

type de production précis. Il y a également la « learning region », « système qui se caractérise (…)

par sa faculté à attirer les compétences les plus recherchées et à capter la rente informationnelle »37.

Enfin la dernière forme de réseau d’entreprise est le milieu innovateur, « ensemble territorialisé

dans lequel des interactions entre agents économiques se développent par l’apprentissage qu’ils font

des transactions multilatérales génératrices d’externalités spécifiques à l’innovation et par la

convergence des apprentissages vers des formes de plus en plus performantes de gestion en

commun des ressources »38. Derrière cet aspect très théorique, l’étude dans les faits de l’existence

de ce type de réseaux montre leur succès. Le plus célèbre est celui de la Silicon Valley, zone intense

d’innovation caractérisé par de nombreuses interactions entre FMN et PME et également avec des

centres de recherche et des universités de renom. On peut également penser à la « learning region »

de Cambridge ou au technopole de Sophia Antipolis.

La présence locale des FMN est désormais véritablement prise en compte dans les stratégies

d’implantation de ces dernières. Elles ont une véritable responsabilité concernant l’économie de leur

pays d’origine car leur activité peut profiter à nombres d’entreprises plus petites et à des régions en

difficulté. Cet aspect territorial est directement lié aux relations que peuvent avoir les FMN avec les

Etats et leur place dans les politiques de ces derniers.

33 Porter M., 2000, “La concurrence selon Porter”, Village mondial, Paris 34 Callon M., 1991, « Réseaux techno-économiques et irréversibilité », dans Boyer R. et al., « Figures de l’irréversibilité en économie », Ed. EHESS, Paris 35 Carluer F., 2006, « Réseaux d’entreprises et dynamiques territoriales : une analyse stratégique », Revue Géographie, économie, société, Volume 8 2006/2, p.198 36 Beccattini G., 1992, « Le district marshallien : une notion socio économique », dans Benko G., Lipietz A., « Les régions qui gagnent, districts et réseaux », PUF, Paris 37 Carluer F., 2006, « Réseaux d’entreprises et dynamiques territoriales : une analyse stratégique », Revue Géographie, économie, société, Volume 8 2006/2, p.198 38 Maillat D., Kebir L., 1993, « Learning région et systèmes territoriaux de production », Revue d’économie régionale et urbaine, 3, 429-448

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38

3. Economique : les relations FMN-Etats

Quand on parle de stratégies industrielles dans un monde globalisé comme le nôtre, on peut

facilement imaginer que les entreprises ont une liberté totale dans leurs décisions et leurs choix.

Dans les faits, et le phénomène est accentué avec l’importance de l’entreprise, l’influence des Etats

et les décisions gouvernementales jouent un rôle majeur dans le développement international des

FMN. Outre les politiques d’aménagement du territoire évoquées précédemment, certaines

entreprises vont, du fait de leur importance et de leur réputation notamment, être une sorte

d’étendard international pour le pays dont l’entreprise est originaire. Pour prendre le cas de la

France, des FMN comme l’Oréal ou des marques de luxe comme Dior, représente l’image de la

France à l’étranger. On retrouve la même similitude à l’étranger avec Coca Cola, Microsoft ou Nike

aux Etats Unis, Mercedes ou BMW en Allemagne ou encore Toyota au Japon. Que dire alors de

l’enseigne française Carrefour prise pour cible en Chine car représentant la France sur le territoire

chinois. Il est impossible de séparer les entreprises multinationales des pays dont elles sont

originaires.

Cette relation est d’abord purement économique. L’intérêt de chaque gouvernement est

d’accroître les exportations de son pays afin d’améliorer la balance commerciale. Le but est donc de

mettre en avant les entreprises capables de vendre ses produits à l’étranger. Pour rester en France,

lorsque le président de la république part en visite d’Etat à l’étranger, viennent avec lui nombre de

représentants d’entreprise afin de vendre leurs biens dans le pays en question. Il y a une relation

d’échanges entre les FMN et les Etats. Ces derniers auront tendance à être parfois plus souples dans

les lois misent en place quand il s’agit d’entreprises multinationales employant des centaines voir

des milliers de personnes dans le pays. Ce dernier point va au delà du seul territoire national. De

nombreux pays pratiquent des politiques d’attractivité, notamment par le biais des politiques

fiscales, afin d’attirer sur le territoire national de grands groupes étrangers. Maintenant que Toyota

est implantée en France, le gouvernement français ne prendra pas de mesures allant contre l’intérêt

de la firme japonaise. Cette situation se retrouve dans chaque pays. On peut aussi penser à des

actions menées en partenariat entre les FMN et les Etats. Quand la France milite à l’étranger pour

qu’Areva vende des centrales nucléaires, cela permet à la fois à l’entreprise de pouvoir avoir des

stratégies internationales intéressantes et à la France d’accroître sa position de leader dans le

domaine nucléaire. C’est donc un gain pour l’entreprise et pour le pays qui assoie sa politique

internationale. L’exemple le plus frappant de cette interaction permanent entre FMN et Etats est

celui de l’entreprise Airbus. Nous verrons ultérieurement que l’influence des décisions politiques

sur les décisions de l’entreprise est grande et que des pays comme la France et l’Allemagne sont

concernés au plus haut point par l’avenir de cette FMN.

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Au final, les économies nationales peuvent profiter des FMN dont l’activité participe à la

croissance économique, permet des flux d’exportations et crée de l’emploi mais peuvent aussi être

pénaliser par des destructions d’emplois par ailleurs et par des importations devant soutenir

l’activité de l’entreprise. Dans le sens inverse, les FMN vont profiter de politiques

gouvernementales attractives dans certains cas mais vont aussi devoir d’autres cas suivre une ligne

directrice imposée par les Etats dans d’autres cas.

III. La Supply Chain dans ce contexte

A. De la logistique à la Supply Chain

1. Vers une vision large de la logistique

La logistique est un terme d’origine militaire qui désignait la logistique militaire nécessaire

pour assurer la mobilité des soldats et leur approvisionnement en vivres. Au début des années

soixante, avec la complexification des systèmes d’armement, fut crée le « Integrated Logistic

Support » par le département de Défense américain, terme traduit par soutien logistique intégré.

Très vite, le terme fut utilisé dans le cadre civil et élargi à tous les secteurs hors défense. En

entreprise justement, c’est le marketing qui a pris en compte, les premiers, les problématiques

logistiques. En effet, le terme « place » des « 4P » désigne la distribution physique des produits. Les

premières définitions de la logistique ne prennent d’abord en compte que des dimensions purement

physiques. Puis les définitions s’affinent avant d’arriver à une définition actuelle énoncée par le

CSCMP39 : « Logistics management is that part of SCM that plans, implements, and controls the

efficient, effective forward and reverse flow and storage of goods, services and related information

between the point of origin and the point of consumption in order to meet customers’

requirements »40.

39 Council of SCM Professionals 40 Selon Médan P.,Gratacap A., 2008, « Logistique et SCM », Ed. Dunod, Paris, p.13

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40

Les éléments rentrant en compte dans le domaine logistique peuvent être visualisés avec le

schéma suivant :

Figure 4: Les composants du management logistique41

L’objectif final étant la satisfaction du client, Coyle à proposé une définition de la logistique

basée sur les « 7R »: « Logistics is to ensure the availability of the right product , in the right

quantity, ans in the right condition, at the right place, at the right time, for the right customer, at the

right cost »42.

A l’époque à laquelle nous vivons, il est dépassé de réduire la logistique à un secteur cloisonné au

sein de l’entreprise car elle est de toute évidence en intéraction permanente avec les autres secteurs

de l’entreprise. C’est pourquoi le terme de logistique laisse peu à peu place à celui de « SCM »

(SCM). Selon la définition du CSCMP, le SCM « englobe la planification et la gestion de toutes les

activités relevant de la recherche de fournisseurs, de l’approvisionnement et de la transformation,

ainsi que toutes les activités logistiques. Cela inclut notamment une coordination et une

collaboration entre les partenaires de la chaîne, qui peuvent être des fournisseurs, des

intermédiaires, des prestataires de services et des clients. Fondamentalement, le SCM intègre donc

la gestion de l’offre et la gestion de la demande dans l’entreprise et entre les entreprises »43. Cette

définition montre que le SCM se place à un niveau stratégique, tactique et opérationnel. L’intérêt

d’avoir défini ce concept réside dans le fait le SCM est l’adaptation de l’entreprise à la

globalisation. Cette définition rejoint d’ailleurs ce qui a été dit sur les stratégies internationales des

FMN. Dans le cadre de l’entreprise étendue, c’est au travers du SCM que les FMN vont pouvoir

bénéficier d’un avantage concurrentiel.

41 Médan P.,Gratacap A., 2008, « Logistique et SCM », Ed. Dunod, Paris, p.14 42 Coyle J., 1992, « The management of business logistics », West Publishing Company 43 Selon Médan P.,Gratacap A., 2008, « Logistique et SCM », Ed. Dunod, Paris, p.31

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41

2. Des Supply Chain internationales

A partir de l’instant où le SCM se place, pour l’entreprise, comme une réponse à l’aspect

international de son activité, cela va nécessiter une réflexion en interne sur la manière de gérer cette

Supply Chain. La FMN va devoir s’interroger sur la conception d’unités spécialisées ou non, sur les

critères d’implantation des usines, sur la gestion en propre ou non de ces usines et sur le système

d’entreposage et de distribution. Si on s’intéresse de plus près aux critères d’implantation des

usines, on en remarque trois principaux44 : l’atteinte d’un coût total mondial minimal, la proximité

des marchés et, dans le cadre d’externalisation, la savoir faire existant dans les lieux d’implantation.

Le SCM vise à obtenir une optimisation de l’ensemble de la chaîne de valeur de l’entreprise. C’est

donc une vision globale qui va être adoptée. On distingue trois types de Supply Chain,

correspondant chacun à un niveau plus poussé de SCM. Un premier dans lequel chaque unité

travaille de façon isolée et peu coordonnée et dans laquelle l’optimisation porte sur la productivité

et l’excellence technologique. C’est l’organisation dite fonctionnelle et dans laquelle la coordination

entre les services se révèle souvent mauvaise. L’organisation est encore très portée amont. Une

deuxième dite intégration interne dans laquelle l’aval prend le dessus sur l’amont. La satisfaction du

client devient alors une préoccupation majeure. Il y a toujours une segmentation des activités de

l’entreprise mais certaines commencent à être regroupées. Une mise en place de processus

transversaux apparaît et la notion de Supply Chain commence à prendre son sens. Enfin la troisième

étape consiste dans une intégration externe (en opposition à l’intégration interne). Les

collaborations commencent à voir le jour avec des entreprises extérieurs et le client devient le point

centrale de la stratégie. Les processus ne se limitent plus à un simple outil de communication avec

fournisseurs et clients mais deviennent le support de partage d’informations. L’idée fondamentale

est que l’entreprise se situe dans un réseau plus large qu’elle et que pour améliorer ses propres

performances, elle se doit de contribuer à l’amélioration du réseau.

Du point de vue des FMN, on constate immédiatement les répercussions. La voie vers la

troisième étape est inévitable. Les relations avec les fournisseurs et les clients se font donc de

manière mondiale et le réseau en lui-même est un réseau d’entreprises devenu très complexe

répartis à travers le monde. Le concept de Supply Chain est donc un concept de dimension

planétaire si on s’intéresse aux FMN. Que ce soit les achats ou la distribution, les acteurs sont

internationaux et le concept de Supply Chain prend alors tout son sens et tout son intérêt.

44 Baglin G., 2005, « Management industriel et logistique : conception et pilotage de la Supply Chain », Ed. Economica, Paris, p.121

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42

3. Analyse des processus de la SC : le modèle SCOR

A partir du moment où le concept de Supply Chain est entré dans les modes de pensées des

entreprises, celles-ci se sont intéressées à la manière dont cette Supply Chain pouvait être optimisée.

C’est ainsi qu’en 1996 fut crée le Supply Chain Council (SCC), organisme ayant pour objectif de

développer des référentiels de processus logistiques et de mettre en place des critères et des

indicateurs de performance. Le travail de cet organisme permet non seulement de comprendre le

fonctionnement d’un Supply Chain mais aussi d’évaluer ses points généraux d’amélioration. C’est

dans ce contexte qui fut crée le modèle SCOR45. Il décompose la Supply Chain en cinq processus :

Plan (planification), Source (approvisionnement), Make (fabrication), Deliver (livraison) et Return

(retour). Il contient également quatre niveaux différents. Le niveau 1 est celui définissant les cinq

processus. Le niveau 2 est un niveau tactique qui permet de définir trente sous processus. Le niveau

3 est celui permettant aux entreprises de préciser de manière opérationnelle les trente sous

processus. Enfin le niveau 4 est propre à chaque entreprise car il leur permet de définir les tâches

relatives à leur activité. Ce modèle SCOR doit permettre l’optimisation des processus logistiques.

Ce modèle permet d’identifier les chemins critiques de la Supply Chain et ainsi donne une

vision globale et précise des potentiels d’amélioration. Grâce à la présence d’indicateurs, il permet

également de suivre et gérer les risques potentiels dans un cadre d’analyse connu. Le fait d’avoir

une vision globale de l’ensemble des processus et ce à différents niveaux permet à la Supply Chain

d’être plus réactive et de pouvoir évoluer rapidement. Il permet aussi d’avoir une capacité

d’adaptation importante concernant tous les événements pouvant intervenir sur la Supply Chain

comme les fusions ou l’implantation de nouveaux systèmes d’information. Il faut également lier ce

modèle aux autres pratiques existantes comme la méthode Six Sigma ou le Lean. D’ailleurs les

entreprises ayant rapidement mis en place le modèle SCOR en leur sein l’on compris : « Les

utilisateurs les plus avancés du modèle SCOR sont actuellement tournés vers cette convergence qui

leur assure une meilleure rentabilité de leur Supply Chain. Les gains issus de cette convergence

sont de 3 à 5 fois supérieurs aux investissements. (…). Globalement, les faiblesses de chaque

méthodologie sont comblées par la mise en œuvre combinée des trois démarches. Sans nul doute, la

Supply Chain tend ainsi vers l’excellence attendue par le marché et les actionnaires ! »46.

Ce modèle constitue donc une base solide pour développer une Supply Chain pertinente. Il

met en tout cas en exergue l’importance de la mise en place d’une Supply Chain pour n’importe

quelle entreprise. Les résultats de celles qui ont franchis le pas ne vient que le confirmer.

45 Voir modèle SCOR en Annexe 46 Paul J., Laville J-J., 2007, « le modèle SCOR, vecteur d’excellence de la Supply Chain », Supply Chain Magazine, n° 13, Mars 2007, p.98

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43

B. La Supply Chain, support de gestion de la complexité

1. Le processus d’intelligence logistique

Désormais, certains auteurs considèrent que la compétition internationale n’est plus entre

entreprises mais entre Supply Chains. Il faut donc plus s’intéresser aux réseaux d’entreprises

constituant les différentes Supply Chains plutôt que de se focaliser sur les entreprises une par une.

Le fait de s’intéresser à l’étude des Supply Chains montre à quel point les approches logistiques

sont dorénavant essentielles dans la compréhension des stratégies d’entreprise. C’est pourquoi le

SCM est un domaine en pleine expansion depuis une dizaine d’années et qu’on assiste à de

nombreuses publications académiques sur le sujet. C’est pourquoi également toutes les FMN

réorganisent petit à petit leurs Supply Chains.

Mais au delà des théories, la difficulté pour les entreprises va être d’adapter de manière

opérationnelle tous les concepts du SCM. C’est dans cette idée qu’est né le concept d’ « intelligence

logistique »47. Dans ce processus, il existe différentes étapes permettant de convertir de manière

opérationnelle les théories en SCM. La première étape consiste dans le fait d’appréhender le

contexte global c'est-à-dire chercher de manière intuitive et créative la traduction dans le contexte

de l’entreprise des théories en SCM. Ce sont alors des pistes de travail qui vont apparaître mettant

en jeu les différents acteurs de la Supply Chain et les interactions, flux, processus et risques

associés. Une fois cette étape accomplie, il faut stabiliser une modélisation globale c'est-à-dire

explorer les pistes de travail en effectuant un travail de recherche et d’approfondissement afin de

définir clairement la Supply Chain de l’entreprise. C’est en réalité la modélisation des processus et

des flux de l’entreprise. Ce sera ensuite choisir le point de focalisation de l’entreprise c'est-à-dire

associer le modèle et les aspirations stratégiques de l’entreprise afin d’identifier les points clés de la

Supply Chain de l’entreprise. Enfin la dernière étape consiste dans une anticipation de l’avenir de la

Supply Chain. Afin que cette dernière puisse s’adapter à son environnement, il est nécessaire

d’avoir une réflexion sur les transformations éventuelles et sur les risques pesant sur la Supply

Chain.

Pour les décideurs logistiques au sein de l’entreprise, ce processus est vital afin de profiter

pleinement des avantages procurés par une Supply Chain efficace.

47Roussat C., Fabbes-Costes N., 2008, « Une démarche d’exploration prospective : le processus d’intelligence logistique », Management et Avenir, n°17 2008/3, p.199

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44

2. La Supply Chain externe

La Supply Chain externe s’inscrit dans le contexte d’entreprise étendue puisqu’ elle consiste

dans une Supply Chain dite « interorganisationnelle ». Le premier but d’une telle Supply Chain est

de « redessiner les frontières commerciales, ingénieriques, industrielles et logistiques entre

plusieurs organisations, juridiquement distinctes mais liées par et sur un même marché en projetant

sur celles-ci un modèle de gestion par flux susceptible d’autoriser un pilotage stratégique et

logistique des flux de l’ensemble des firmes impliquées »48. Comme pour l’entreprise étendue, c’est

une entreprise principale qui va être à l’impulsion de cette Supply Chain externe. Cette entreprise va

se distinguer par sa position dominante sur le marché. Avec une Supply Chain externe, on passe

d’une démarche transactionnelle à une démarche relationnelle c'est-à-dire d’une logique de

compétition à une logique de coopération. Ce concept rejoint ce qui a été dit précédemment : la

Supply Chain externe revient à être une « quasi-firme » et on peut désormais parler de compétition

entre Supply Chains et non plus entre entreprises tant les acteurs vont être liés entre eux et avoir des

objectifs et des aspirations communes. Le schéma suivant permet de montrer les acteurs de cette

Supply Chain externe.

Figure 5: Les acteurs de la Supply Chain externe49

48 Colin J., 2005, « Le SCM existe-t-il réellement ?», Revue française de gestion, n°156 2005/3, p.142 49 Colin J., 2005, « Le SCM existe-t-il réellement ?», Revue française de gestion, n°156 2005/3, p.142

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45

Le premier secteur à avoir mis en place une telle Supply Chain et celui de l’automobile qui

dès les années quatre vingt a commencé à intégrer les fournisseurs dans le cycle de conception, de

production et d’approvisionnement des véhicules. Cela à commencé par des sous traitances puis des

externalisations plus poussées. La mise en place du juste-à-temps à également accélérer la mise en

place de Supply Chain externes. D’un point de vue plus stratégique, la mise en place en 1986 du

standard communautaire EDI-ODETTE accepté par tous les constructeurs et équipementiers

automobiles présents en Europe a permis à des entreprises concurrentes de s’associer afin d’éviter

d’avoir à développer des outils informatiques spécifiques à l’issu de chaque nouveau contrat. Outre

l’automobile, c’est également la grande distribution qui a intégré le concept de Supply Chain

externe dans un démarche de généralisation des flux tendus. Une Supply Chain externe permet de

« diminuer les risques d’échec de nouvelles références introduites sur le marché (…) ; élargir la

gamme de l’offre proposée (…) ; réduire les coûts de mise en marché en partageant des ressources

logistiques et en diminuant les stocks tout au long de la chaîne ; synchroniser les flux de production

(…) ; et améliorer la réactivité de tous les acteurs et la qualité des prévisions. »50. La Supply Chain

externe peut aller jusqu’au client final dans les processus de production de type build-to-order

comme chez Dell par exemple. C’est la commande du client qui va entraîner le fonctionnement de

la Supply Chain.

3. Des Supply Chain en mutations

La globalisation pousse les entreprises à devoir concilier productivité et flexibilité

engendrée par la segmentation de plus en plus forte des marchés. La première incidence repose,

comme vu précédemment, sur une spécialisation des unités de production. Cette spécialisation

permet aux entreprises d’effectuer des économies d’échelle en concentrant la production sur

quelques sites spécialisés et permet également d’avoir des effets d’expérience sur les productions.

Les sites de production deviennent des sites spécialisés dans la production d’un seul produit (Nestlé

par exemple fabrique toutes les barres chocolatées Lion dans une seule usine). Les implications

logistiques d’abord être la nécessité pour les FMN de reconstituer les gammes de produits dans

chaque pays. Il va donc falloir acheminer les produits des usines répartis géographiquement vers

chaque marché local. Cela va engendre des flux d’approvisionnement des produits afin de

reconstituer les gammes puis des flux locaux de distribution une fois les gammes reconstituées. Cela

va nécessiter une précision de la demande locale et une bonne planification de la distribution ainsi

qu’une traçabilité des produits afin de synchroniser les flux. Les systèmes d’information ont donc

un rôle important à jouer. Les problèmes en résultant résident dans le coût de possession des stocks

50 Colin J., 2005, « Le SCM existe-t-il réellement ?», Revue française de gestion, n°156 2005/3, p.145

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46

en cas de demande incorrectement établie et la responsabilité des différentes composantes de la

chaine en cas de problème. La Supply Chain en amont se complexifie par l’apparition de plus

d’acteurs et par leurs interdépendances. Le phénomène de délocalisation engendre également des

modifications dans la Supply Chain car les lieux de production ne correspondent pas aux lieux de

vente des produits. Les coûts de relocalisation des produits doivent donc être mesurés dans toute

stratégie de délocalisation. Il faut également mentionner le « p-manufacturing », « activité de

production réalisée en dehors des sites d’usine, en amont (pré-manufacturing) ou en aval (post-

manufacturing) et au cours de laquelle une valeur ajoutée, (…), est apportée à un produit »51. Cela

peut prendre la forme d’une différenciation retardée des produits, d’un traitement des flux de retour

des produits ou d’une simplification du processus de fabrication.

Sur un point de vue plus aval, le rôle des distributeurs est grandissant. La place étant donnée

maintenant à la satisfaction du client, les distributeurs sont le lien entre industriels et clients finaux.

En terme de logistique, c’est la grande distribution qui est le plus souvent en avance sur les autres

canaux de distribution. On peut évaluer plusieurs tendances de fond quand au rôle de la distribution

sur les Supply Chain. La cadence des réapprovisionnements est un enjeu majeur. Alors qu’autrefois

cette cadence était au mieux de plusieurs livraisons par semaine, la norme aujourd’hui (surtout dans

la grande distribution) est d’avoir une livraison par jour. On se dirige même vers plusieurs

livraisons par jour de taille plus faible. La complexité s’accroît donc pour les industriels. Dans cette

logique de réapprovisionnement, la transmission en temps réel des informations doit permettre de

déclencher des ordres de réapprovisionnement automatique. Il est important également de constater

que les liens entre logistique amont et aval tendent à se développer notamment lors des opérations

de différenciation retardée. Comme vu précédemment, ce type de procédé tend à se développer et

les distributeurs jouent un rôle primordial afin de réduire les coûts de ce type d’opérations pour les

industriels. Ils permettent, par une automatisation des remises en caisse par exemple, d’éviter aux

industriels de développer des conditionnements ou des conditions de vente particulières engendrant

des coûts de production supplémentaires. Les conditions de vente en fonction de la période jouent

également un rôle dans les changements au sein de la Supply Chain. La multiplication des produits

et l’hyper segmentation des marchés poussent les distributeurs et les industriels à s’adresser de

manière de plus en plus individualisée aux consommateurs et à mettre en place des opérations de

vente spécifiques nécessitant des systèmes d’approvisionnement en conséquence. Enfin on

commence à voir se dessiner une relation industriel-distributeur de plus en plus poussée avec des

systèmes de paiements à la vente au client final et plus à la quantité approvisionnée. On constate

que les implications provenant de la volonté de satisfaction du client final sont grandes sur la

Supply Chain. On considère généralement désormais que le pilotage de la Supply Chain s’effectue

51

Dornier P-P., Fender M., 2007, « La logistique globale et le SCM », Ed. Eyrolles, 2e édition, Paris, p.199

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par l’aval et non plus par l’amont comme c’était le cas auparavant. La globalisation est passée par

là.

C. La Supply Chain, une vision managériale

1. Le SCM à développer en France

Après avoir vu que l’avenir du SCM se situe dans la Supply Chain externe, il est intéressant

d’évaluer la place de la Supply Chain dans les entreprises françaises. Une étude52 menée par F. El

Ouardighi, P. de Giovanni et J.C. Tarondeau a soulevé beaucoup de points intéressants quant au

développement du SCM en France. Environ deux tiers des entreprises françaises ont une structure

interne dédiée à la Supply Chain. Si on ne prend en compte que les FMN, la totalité d’entre elles en

dispose. Le premier point important à aborder est le fait que seuls quelques points précis de la

Supply Chain sont réellement pris en compte par les entreprises. En effet, les approvisionnements,

la production et la distribution, c'est-à-dire les fonctions vitales, sont les seules à être intégrées dans

un grand nombre d’entreprises en France. En revanche, les fonctions apportant une réelle valeur à

une Supply Chain, c'est-à-dire la comptabilité, les achats, les services et les systèmes d’information

sont généralement non intégrées à une stratégie d’ensemble. Or la fonction achat et les systèmes

d’information sont devenus aujourd’hui des éléments vitaux pour améliorer le fonctionnement de la

Supply Chain de l’entreprise. Que dire alors du marketing, fonction totalement séparée à l’heure

actuelle et qui pourtant fonctionne en relation étroite avec la Supply Chain. Les entreprises semblent

donc globalement mal préparées pour mettre en place des techniques efficaces de SCM.

Les entreprises différencient aujourd’hui leurs motivations à mettre en place une Supply

Chain par des facteurs internes et externes. Les facteurs internes sont en priorité la réduction des

stocks, les économies d’échelle, la baisse du cycle de production et le partage de l’information. Les

facteurs externes sont l’augmentation de la satisfaction clients, la réduction des délais de livraison et

la recherche de la qualité et de la réactivité par rapport aux marchés. Les entreprises françaises

semblent être restées à un stade uniquement opérationnel dans leur gestion logistique. Dans

beaucoup de cas, une fois que des outils comme le MRP est mis en place, les autres améliorations

ne sont pas vues comme vitales. Les difficultés que semblent rencontrer les entreprises pour être au

niveau des FMN ou des entreprises anglo saxonnes, sont sur des points de vue managériaux,

techniques et financiers. Techniques notamment, par la difficulté de mettre en place des systèmes

d’information efficaces, et financiers par l’inégalité de la répartition de la richesse créée. Mais le

52 El Ouardighi F., de Giovanni P., Tarondeau J-C., 2008, « L’expérience française du SCM», Revue française de gestion, n°186 2008/6, p.89-116

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point fondamental concerne les difficultés managériales. Comme vu précédemment, le SCM

nécessite une forte implication des dirigeants et une prise de conscience collective non seulement au

sein de l’entreprise mais aussi avec les partenaires. Or c’est le point le plus difficile à régler pour les

entreprises car c’est le point de départ de tout succès éventuel. Si les dirigeants ne prennent pas

conscience des enjeux et des bénéfices à faire les efforts nécessaires pour avoir un Supply Chain

performante, bon nombre d’entreprises françaises prendront le risque d’accumuler un retard

préjudiciable par rapport à des concurrents qui, eux, auront compris l’intérêt du SCM.

2. Anticiper plutôt que subir

Il suffit d’étudier le cas de quelques entreprises leader sur leurs marchés pour se rendre

compte que la Supply Chain est un potentiel avantage concurrentiel majeur pour les entreprises et

encore plus pour les FMN. Il suffit de s’intéresser à Dell, Amazon, Wal Mart ou Airbus pour s’en

rendre compte. Ces entreprises sont sans cesse en train d’apporter des modifications et des

innovations à leurs Supply Chains afin de ne pas être sans cesse en phase de rattrapage par rapport

aux concurrents mais pour au contraire créer les conditions leur permettant de disposer de

l’avantage concurrentiel. Le but pour les entreprises à travers leur Supply Chain doit véritablement

être de créer les conditions nécessaires à l’entreprise pour suivre une stratégie de croissance bien

définie. On ne peut donc pas envisager la création ou l’évolution d’une Supply Chain sans avoir une

vision stratégique et surtout managériale. Ce sont en premier lieu des hommes qui vont devoir

mener des réflexions internes afin de développer des axes de développement sur la Supply Chain et

donc des axes de développement pour l’entreprise tout entière.

Les managers doivent maitriser cinq paramètres dans leur gestion de la Supply Chain. Ils

doivent maitriser les stratégies « d’opérations, d’externalisation, de distribution, de service client et

d’actifs »53. Ce sont les stratégies inhérentes à chaque Supply Chain. La stratégie des opérations

consiste dans le mode de fabrication des produits (sur stock, configuration à la commande,

fabrication à la commande ou conception à la demande) ; la stratégie de distribution consiste dans le

circuit de vente du produit final (distributeurs, détaillant, vente en propre physique ou par Internet) ;

la stratégie d’externalisation renvoie à l’appel à des partenaires extérieurs pour améliorer une partie

de la chaine de valeur du produit ; la stratégie de service client consiste dans l’évaluation des

priorités entre les clients (valeur de chaque compte, niveau de service) ; et la stratégie des actifs

renvoie notamment à la gestion des usines, entrepôts et équipement de production et à leurs

emplacements, leur taille et leurs fonctions. La maîtrise et la connaissance des ces cinq stratégies 53 Cohen S., Roussel J., 2005, « Avantage Supply Chain », Editions d’Organisations, Paris, p.36

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sont le premier point fondamental que doivent parfaitement maîtriser les managers en Supply

Chain. Ils doivent en avoir une vision globale car ils ne peuvent être analysé individuellement mais

doivent être considérés comme des éléments interdépendants.

L’autre point fondamental montrant que le pilotage de la Supply Chain se fait de manière

managériale se situe sur le fait que les entreprises doivent adapter leur Supply Chain en premier lieu

à la stratégie globale de l’entreprise. Les managers doivent pouvoir faire fonctionner la Supply

Chaine en fonction de la stratégie globale de l’entreprise. Quand cette stratégie est l’innovation, la

Supply Chain doit pouvoir être performante dans son time-to-market et son time-to-volume. Quand

c’est une stratégie basée sur la baisse des coûts, la Supply Chain doit pouvoir bénéficier

d’infrastructures efficaces et peu coûteuses. S’il s’agit d’une stratégie de service, la Supply Chain

doit être au service du client avec notamment un service client performant. Si enfin c’est stratégie

basé sur la qualité, c’est la fiabilité des processus et la présence de contrôle qualités qui seront au

cœur de la Supply Chain. Les managers vont également devoir prendre en compte les besoins et

aspirations des clients de l’entreprise. Les besoins seront différents si les clients sont d’autres

entreprises ou des clients finaux. La Supply Chain devra s’adapter. L’exemple de Michelin va être

révélateur. La marque vend à la fois des pneumatiques aux constructeurs et aux particuliers. La

logistique sera différente entre les constructeurs et les particuliers du fait des volumes et du mode

d’approvisionnement. La Supply Chain doit pouvoir s’adapter à ces contraintes. Cela peut être

également le cas avec des différences entre les segments de marchés. Dernier point important du

point de vue managérial, la taille de l’entreprise va être primordiale. Le rapport de force avec les

clients ou les fournisseurs sera différent en fonction de la position de l’entreprise sur son marché.

Les exemples frappants d’avantage concurrentiel par la Supply Chain sont des entreprises

importantes voir très importante qui peuvent se permettre d’imposer leurs conditions à leurs

partenaires et ainsi optimiser le fonctionnement de leurs Supply Chains. Le volume d’activité de

l’entreprise va aussi rentrer en ligne de compte car il va déterminer le poids de l’entreprise sur son

marché. C’est ainsi également qu’une Supply Chain efficace va s’articuler autour de clients ou de

fournisseurs clés qui vont être à la base de la stratégie logistique.

Tous ces points montrent à quel point la gestion d’une Supply Chain ne répond pas

uniquement à des points opérationnels et purement économiques mais répond également à

d’importantes réflexions et suit des logiques stratégiques pures.

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50

3. Trois niveaux de processus dans la Supply Chain

Nous pouvons terminer cette partie en synthétisant les trois niveaux qui régissent

l’application et le fonctionnement des processus logistiques : le niveau opérationnel, le niveau

tactique et le niveau stratégique. Le niveau opérationnel correspond aux processus d’exécution des

différents maillons de la chaine logistique. Le niveau tactique correspond à l’adaptation aux

événements se produisant autour de l’activité de l’entreprise. C’est l’utilisation des données récentes

du marché. Le niveau stratégique est celui qui s’avère le plus intéressant lorsqu’on évoque le SCM

puisqu’il « prend en compte les opportunités et les contraintes logistiques aux différentes étapes-

clés du cycle de vie du produit (…) et doit prioritairement s’intéresser aux interfaces critiques en

mettant l’accent sur les compromis conduisant à des solutions optimales plus globales en termes

économiques. C’est l’objectif-clé de ce niveau de planification de la Supply Chain pour lequel la

rentabilité des actifs et totalement partie prenante »54. A ces trois niveaux, il faut rajouter le fait que

chacun s’applique aux différents flux de l’entreprise (physiques, financiers, informationnels). Enfin,

le SCM implique automatiquement la prise en compte des activités des autres secteurs de

l’entreprise notamment la conception des produits et des offres de services, les achats et les

approvisionnements, le marketing et les ventes et le manufacturing. La prise en compte de toutes

ces données peut être synthétisée dans le tableau suivant :

Tableau 2: Nature des interfaces critiques avec le SC Planning55

54 Dornier P-P., Fender M., 2007, « La logistique globale et le SCM », Ed. Eyrolles, 2e édition, Paris, p.334 55 Dornier P-P., Fender M., 2007, « La logistique globale et le SCM », Ed. Eyrolles, 2e édition, Paris, p.335

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51

Partie II : Etudes de stratégies logistiques de FMN

I. Un modèle illustratif : Airbus

A. Présentation de la firme

1. Historique

A l’origine, Airbus provient du consortium Airbus Industrie crée en 1970 sous la forme

d’un GIE (Groupement d’Intérêt Economique). Il regroupait des segments aéronautiques civils de

firmes européennes. Celles-ci, après diverses évolutions et concentrations nationales, allaient

devenir Aérospatiale pour la France, DASA pour la RFA et British Aerospace pour la Grande-

Bretagne, auxquels s’ajouta CASA pour l’Espagne. L’objectif était de développer un type d’avion

de transport civil qui puisse entrer en concurrence avec les avionneurs américains tels que Boeing.

Ce GIE fut le résultat d’une volonté politique franco-allemande et d’évolutions propres au secteur

aéronautique. Cette coopération avait pour avantage de développer une structure autonome qui

répondait à deux éléments : organiser et coordonner le système productif et assurer la

commercialisation. C’est en 1999 que se sont restructurés et concentrés les segments d’activités du

GIE. D’abord, a lieu un mariage entre Aérospatiale et Matra qui a restreint la part de l’État dans la

nouvelle société. S’en est suivi un regroupement européen, lequel a donné lieu à la création

d’EADS (European Aeronautic Defence and Space Company), entreprise de droit privé, cotée en

bourse et dont le siège est fixé à Amsterdam. Cette firme est organisée en quatre divisions. La

première est la division « Espace » (Astrium et Ariane), « Missiles et avions militaires »,

« Hélicoptères » (Eurocopter) et « Airbus », devenu aujourd’hui AIC (Airbus Integrated Company).

AIC a désormais une complète autonomie de gestion. Elle devient petit à petit une firme européenne

intégrée qui hérite d’une organisation industrielle. Aujourd’hui le siège social d’Airbus se situe à

Blagnac près de Toulouse. Le PDG depuis août 2007 est l’allemand Thomas Enders. Airbus compte

plus de 1500 fournisseurs répartis dans 30 pays et compte 47600 employés. C’est l’un des fleurons

de l’économie française et européenne et compte pour principal concurrent l’entreprise américaine

Boeing.

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2. Contexte

La concurrence est aujourd’hui féroce entre les deux géants de l’industrie aéronautique que

sont Airbus et Boeing. Depuis le début des années 60 les deux constructeurs rivalisent pour être

leaders du marché de l’aéronautique. Actuellement afin de devenir leader, chacun mène une

stratégie différente. Airbus s’est engagé dans la voie des très gros porteurs avec le lancement de

l’A380 qui doit permettre d’assurer une crédibilité de la firme. Cet avion a permis de relancer les

commandes de l’avionneur européen même si les prévisions sont que la rentabilité de cet avion sera

faible à long terme. Pour contrer cet avion, Boeing à lancé son 787 pour lequel il a connu de

grandes difficultés de conception et de fabrication avec de nombreux retards chez ses sous traitants.

Boeing vise néanmoins un créneau différent de celui d’Airbus avec des avions intermédiaires entre

les petits avions d’Airbus et les gros porteurs. Avec le 7E 7 pouvant aller jusqu'à 15 400 kilomètres,

Boeing vise les besoins des compagnies aériennes d’avoir des escales plus diversifiées, même à

longue distance et sur des aéroports plus régionaux.

Le fait que les deux constructeurs soient l’enjeu de luttes politiques accroît les tensions

entre eux. Chacun bénéficie de l’aide de l’Etat américain pour l’un à l’aide de subventions

déguisées et de l’Union Européenne pour l’autre. En effet, les constructeurs américains d’avions

bénéficient des recherches militaires pour le compte de la Nasa ou du Pentagone et peuvent profiter

des nouvelles technologies développées et du savoir faire. Airbus lui n’a pas bénéficié des

retombées de recherches militaires. Airbus fait appel à des aides remboursables de la part des Etats

nationaux de la firme (France, Allemagne, Angleterre et Espagne). Le prêt est remboursé en cas de

succès commercial futur. C’est une lutte sans merci qui est engagé sur un marché duopolistique

mais sur lequel une entreprise chinoise, Avic, tente de faire son apparition. Ce troisième acteur

pourrait dans le futur venir concurrencer partiellement les deux géants grâce à une technologie de

pointe et des brevets exclusifs.

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B. Un exemple d’entreprise étendue

1. Une organisation productive européenne et le rôle de l’externalisation

Airbus a développé au cours des années une division des tâches productives entre différents

sites répartis en Europe. Chacun est spécialisé en fonction de certaines compétences qui se sont

perfectionnées au fil des années. Désormais chaque site de production est un véritable spécialiste

dans son domaine et il ne viendrait pas à l’esprit de l’entreprise de modifier des attributions. La

carte suivante montre les différents établissements d’Airbus en Europe :

Figure 6: Les établissements d'Airbus en Europe56

56 Zuliani J-M., Jalabert G., 2005, « L’industrie aéronautique européenne : organisation industrielle et fonctionnement en réseaux », EG, 2005-2, p.121

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Il y a quatre principaux pôles d’activités dans le système d’Airbus : le pôle anglais de

Bristol, le pôle allemand d’Hambourg, le pôle espagnol de Madrid et évidemment le pôle français

de Toulouse. A Bristol sont conçus et construits les voilures des avions. Le pôle anglais est

spécialisé dans la recherche et l’ingénierie et emploi environ 10 000 personnes entre les sites de

Bristol et Chester. Le site allemand est lui le site principal d’Airbus. Plusieurs petites villes

accueillent des établissements Airbus, chacune étant spécialisée dans une fonction très précise. Le

site de production principal est celui de Finkenwerder qui emploi 8000 salariés et qui s’occupe

notamment de l’étude de l’ensemble des structures, de la production des tronçons de fuselage, de

l’hydraulique et de la personnalisation des avions. Ce site à un rang d’ « assembleur » pour une

partie des petits avions et même un rôle de livreur pour l’A380. Ce site prend donc une importance

grandissante. C’est au final près de 15 000 salariés qui sont employés en Allemagne. Le site

espagnol est plus spécialisé dans les avions militaires et a une compétence particulière dans les

matériaux composites. C’est environ 5000 salariés qui travaillent pour le compte d’Airbus dans

cette région. Ce nombre tend à s’accroître avec le site de Séville destiné à l’assemblage de

l’A400M. Enfin le site français de Toulouse-Blagnac a une fonction d’assemblage de tous les

éléments de l’avion. C’est à partir de ce même site que sont livrés les avions. Il existe d’autres sites

en France tels que celui de Méaulte en Picardie qui s’occupe des pointes avant des avions ou celui

de Saint Nazaire qui monte les fuselages. C’est au total pas loin de 20 000 personnes qui sont

salariés de Airbus en France. Une telle organisation est à la fois stratégique et politique du fait que

la direction de l’entreprise est à la fois française et allemande ce qui influe inévitablement sur les

stratégies industrielles de la firme.

L’une des particularités d’Airbus est que la firme cherche à effectuer ses opérations de sous

traitance proche de ses sites de production ou d’assemblage. Ainsi dans la région toulousaine, un

grand nombre d’entreprises sont totalement au service de la FMN. Ces entreprises sont appelées

équipementiers ou « systémiers ». Certains de ces systémiers vont même jusqu'à déplacer leurs

usines pour être au plus proche du site de Blagnac. Ce fut par exemple le cas de Thalès Avionics qui

déplaça en 2001 son usine de Vélizy en région parisienne pour aller à Toulouse. Le terme de

systémier « désigne de véritables partenaires d’Airbus ayant la responsabilité financière et

technique d’un module en « risque partagé », investissant eux-mêmes dans la recherche-

développement, mais s’assurant en contrepartie pour la durée de vie du programme la livraison et

l’entretien des ensembles produits »57. Ce type de fonctionnement permet à Airbus de se séparer de

57 Zuliani J-M., Jalabert G., 2005, « L’industrie aéronautique européenne : organisation industrielle et fonctionnement en réseaux », EG, 2005-2, p.123

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la conception de certaines parties des avions tout en gardant un contrôle très fort sur leur

développement. Nous avons également vu précédemment que les relations entre les Etats et les

FMN sont importantes notamment dans la politique d’aménagement du territoire. Cela s’illustre à

travers Airbus qui permet de par son activité, de créer un véritable pôle d’emploi dans la région

toulousaine, les systémiers ayant eux même recours à la sous traitance vers des PME généralement.

C’est ainsi que dans la région Midi-Pyrénées, c’est plus de 350 entreprises industrielles et 150

entreprises de services qui fonctionnent dans le cadre de l’activité du constructeur aéronautique

européen. Au delà des emplois crées, c’est également un pôle universitaire et de recherche qui s’est

développé. Cette apparition des systémiers dans le plan industriel d’Airbus résulte de la volonté

d’Airbus de s’adapter à la globalisation en mettant en place une production modulaire. Nous verrons

plus loin en quoi consiste plus précisément ce système.

2. Une logistique en conséquence

Afin de relier et coordonner les différents sites de production de l’entreprise, Airbus se doit

de se doter d’une logistique interne efficace. La firme à développé un avion uniquement destiné au

transport des différentes pièces d’un site à l’autre. Cet avion est le « Beluga » (voir photo en

annexe).

Il offre la plus grande capacité d'emport de tous les avions militaires ou civils en service. Il

peut emporter une charge allant jusqu'à plus de 50 tonnes sur une distance maximale de 2 779 km. Il

existe cinq exemplaires du Beluga. Il peut également être utilisé pour transporter des charges

exceptionnelles comme des satellites, des engins spatiaux, des véhicules militaires ou peut être

utilisé pour des opérations humanitaires. Cet avion est un outil indispensable à Airbus pour pouvoir

transporter les pièces construites aux quatre coins de l’Europe vers les sites d’assemblage de

Toulouse et Hambourg. Mais pour la construction de l’A380, cet avion ne suffit pas et Airbus a du

développer d’autres modes de transports et adapter sa logistique en conséquence. C’est ainsi que fut

développer pour acheminer les ensembles et sous ensembles de l’avion, le navire « ro-ro » (roll-

on/roll-off) et l’Itinéraire à Grand Gabarit (IGG).

Le navire « ro-ro » permet de faciliter et d’accélérer le chargement des parties de l’avion. Il

effectue un trajet précis, partant de Hambourg pour aller d’abord en Angleterre à Mostyn. Le navire

va ensuite à Saint Nazaire pour recevoir de nouvelles pièces avant de se diriger vers Pauillac dans

l’estuaire de la Gironde. A ce même endroit les pièces en provenance de Cadix en Espagne arrivent

et le tout est acheminé par barges à Langon en bout d’estuaire de la Gironde. Une difficulté

importante se présente car ces barges de 70m de long ne peuvent naviguer qu’à marée basse afin de

passer sous le Pont de Pierre à Bordeaux. La hauteur du chargement de ces barges peut atteindre

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plus de 11m. La suite du parcours s’effectue grâce à l’IGG. Les différentes parties de l’avion sont

convoyées sur des remorques qui circulent de nuit et une fois par semaine afin de relier Langon et le

site de Blagnac. Cet IGG à nécessité un aménagement du parcours du fait de la taille des

chargements : hauteurs de 14m, largeurs de 8m et longueurs de 50m. C’est par conséquent en

accord avec l’Etat et les collectivités territoriales que des modifications ont été effectuées. C’est

finalement 5 déviations, 4 pistes dédiées d’évitement, 10 aménagements à l’intérieur des villes

traversées et 80 chantiers réalisés en trois ans. C’est un investissement considérable que fut effectué

par l’entreprise afin de pouvoir acheminer ses pièces. C’est une logistique considérable et hors

mesure qui existe donc chez Airbus engendrée par les volumes et poids transportés et distances

parcourues.

Figure 7: La logistique des éléments de l'A38058 58 Zuliani J-M., Jalabert G., 2005, « L’industrie aéronautique européenne : organisation industrielle et fonctionnement en réseaux », EG, 2005-2, p.129

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3. Comparaison avec Boeing

Le constructeur américain et concurrent d’Airbus à décidé d’effectuer une redistribution de

ses activités à l’échelle nord-américaine et nord-pacifique. C’est environ 35 % des sous-ensembles

qui sont fabriqués au Japon, en ciblant les compagnies aériennes clientes comme Japan Airlines et

AllNippon Airways. Le travail est réparti en trois groupes : les divisions aérospatiales de Mitsubishi

pour les caissons de voilures, Fuji pour les caissons centraux et les logements du train d’atterrissage

et Kawasaki pour une partie des tronçons avant et des bords de fuite fixes. Le tout transporté par

porte-conteneurs dans des emballages spécifiques depuis les ports japonais jusqu’au Etats Unis au

port d’Everett et ses 180m de jetée pouvant accueillir des éléments de 43m de long et de 11 m de

hauteur. Des trains spéciaux ont également été développés afin d’acheminer les pièces jusqu’à la

nouvelle usine d’assemblage final. Des tranches horaires réservées ont été accordées à Boeing dans

ce contexte afin de permettre le passage des convois spéciaux. Si Boeing a choisi de créer sa

nouvelle usine à Everett, c’est pour les mêmes raisons qu’Airbus. D’abord la complémentarité des

activités d’assemblage avec les bureaux d’études. Ensuite le fait que deux partenaires majeurs,

Alenia et Vought Aircraft, ont accepté de se localiser à proximité même des usines de montage,

pour y réaliser les tronçons avant et arrière de l’avion. Cette proximité permet de faciliter

l’intégration du travail de ses deux équipementiers sur la base de ce que fait Airbus dans la région

toulousaine. Toujours dans l’esprit de la firme européenne, Boeing a transformé trois de ses

appareils 747-400 en avions cargos sur le modèle du Beluga lui permettant de transporter les autres

ensembles de l’appareil, soit depuis ses propres usines de Winnipeg, de Tulsa et de Wichita.

Néanmoins Boeing se dirige peu à peu vers une rétrocession de plusieurs de ses sites et de ses

installations à d’autres entreprises dans le secteur militaire comme déjà fait à Saint-Louis avec GKN

Aerospace, à Spokane avec Triumph, ou à Corinth avec Labinal. Cette stratégie d’externalisation

vise à ne conserver à terme que les activités de concepteur et d’assembleur final, le tout concentré

dans l’État de Washington car comme pour l’intervention de l’Etat dans l’IGG d’Airbus, cet Etat a

apporté une aide importante à Boeing par la réduction à long terme d’impôts estimés à 3,2 milliards

de dollars. C’est aussi plus de 10 M$ qui ont été avancés pour la construction d’un nouveau bureau

d’études. C’est enfin divers lourds travaux d’infrastructures qui ont été entrepris en matière routière

et aéroportuaire afin que puissent y atterrir les avions cargos747 venant des autres sites de

production.

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C. Le Plan Power 8

1. Power 8 : le plan de réaction à la montée du taux de change euro/dollar

A partir d’avril 2007, le taux de change euro/dollar a subi de très fortes fluctuations. L’euro

s’est considérablement apprécié pendant 15 mois consécutifs entre le 27 avril 2007 et le 15 juillet

2008 passant d’un taux de 1,3682 dollar pour un euro à un taux record de 1,6038 dollar pour un

euro. Cette incroyable appréciation résultait de la montée de l’euro comme devise internationale.

C’est en partie la conséquence de la forte libéralisation des échanges induite de la globalisation

favorisant les fluctuations monétaires internationales. Or cette montée de l’euro à des effets pervers

considérables pour les entreprises produisant dans une zone euro et vendant dans une zone dollar.

De grandes FMN ont vu leurs bénéfices baisser du fait des évolutions. Airbus fut fortement touché

par cette montée de la devise européenne. Le fait que la production se fasse dans une zone euro rend

le coût du travail et de la main d’œuvre plus cher. Dans le même temps, une grande partie de la

vente d’avions se faisant en dollar, les contrats passés perdaient de leur valeur conduisant Airbus à

souffrir des deux cotés de ce taux de change fluctuant.

Cela associé au retard de deux ans de l’A380 et à des erreurs de coordination entre les

systèmes d’information, Airbus a dû mettre en place un plan de restructuration visant à faire des

économies drastiques afin de refonder le business model du constructeur. Ce plan appelé « Power

8 » visait une économie de 2,1 milliard d’euros entre son lancement en février 2007 et 2010. La

première étape de ce plan était la suppression de 10 000 postes dans sa chaîne de fabrication

(incluant les sous traitants). L’objectif est d’atteindre les 650 millions d’euros d’économie grâce à

des implantations dans des zones dollar. C’est donc en partie un large plan de délocalisations et

d’externalisation qui est déployé. Le but est d’augmenter la part des achats hors Europe avec pour

objectif chiffré de passer de 67% à 50%. Cela passe notamment par des implantations dans des pays

à bas coûts comme la Tunisie dans lequel une usine a été construite et qui va accueillir une partie

des activités des sites de Méaulte et Saint Nazaire, ou des pays à forte compétence comme l’Inde et

son centre d’activité de Bangalore. L’un des volets de Power 8 est le projet « Zéphir » qui vise à

externaliser sept usines européennes. C’est pour l’instant le seul véritable échec de Power 8. Pour

Thomas Senders, le PDG d’Airbus, « des mesures supplémentaires pour améliorer notre base de

coûts et notre efficacité sont nécessaires pour assurer la compétitivité à long terme de notre

entreprise. En continuant notre internationalisation nous assurons notre croissance, nous profitons

de structures de coût plus faibles, nous accédons aux talents sur une base mondiale et,

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simultanément, soutenons l'emploi et le cœur de nos compétences en Europe »59. Pour le PDG

d’EADS, Louis Gallois, « chaque fois que le dollar perd 10 centimes, nous perdons à terme plus

d'un milliard d'euros »60.

2. Les effets sur la Supply Chain

Quels effets industriels de ce plan ? Tout d’abord il faut voir quelles sont les modifications

apportées par la FMN. C’est en premier lieu le cycle de développement des nouveaux avions qui

doit passer de 7,5 ans à 6 ans grâce à l’augmentation des activités d’engineering de 15%. C’est

ensuite le lean manufacturing qui est mis en place visant à augmenter la productivité de 16% avant

2010. Les coûts d’approvisionnement doivent aussi être baissés en mettant en place un réseau de

fournisseurs de premier rang au sein d’un plan d’action appelé « smart buying ». Un autre plan

d’action appelé « maximise cash » vise à réduire le fond de roulement de l’entreprise et à contrôler

rigoureusement la trésorerie. Enfin dans une logique de satisfaction clients, le plan « customer

first » doit permettre de respecter les délais de livraison, accroître la réactivité et apporter une

qualité supérieure aux produits. Au niveau de la Supply Chain proprement dite, ce plan à permis de

la développer considérablement en accélérant les processus de réorganisation précédemment mis en

place. Le département Supply Chain d’Airbus ne comptait que deux personnes au début des années

2000 ce qui semble invraisemblable pour une entreprise aussi importante. Aujourd’hui c’est 2000

personnes qui travaillent dans la logistique chez Airbus. La FMN a même créé un « supply chain

function board » en 2008 permettant de piloter et de suivre les résultats opérationnels et

économiques de l’entreprise. La Supply Chain a donc été mise au cœur de l’activité de l’entreprise.

Power 8 a permis également d’harmoniser et de standardiser des processus et des modes de

fonctionnement entre les différents pays car l’approche logistique était locale. Elle est désormais

impulsée à l’ensemble de l’entreprise ce qui la rend hautement stratégique.

Les voies d’amélioration par la Supply Chain ont été nombreuses et au cœur de Power 8. La

première amélioration porte sur la logistique physique par la simplification des flux et le

regroupement des magasins sur des hubs européens afin de concentrer le stockage des lignes de

production. Ces hubs logistiques reçoivent du monde entier les approvisionnements nécessaires à la

production de chaque unité. La deuxième porte sur les stocks et les systèmes d’approvisionnement

par la mise en place de règles de paramétrage des stocks de sécurité et de minimisation des délais

d’approvisionnement. Le rôle des systèmes d’information fut important afin de développer des

outils informatiques assurant la réussite de telles modifications. La troisième amélioration porte sur

59 http://archives.lesechos.fr/archives/2008/lesechos.fr/09/09/300291302.htm?texte=airbus%20+%20euro, page consultée le 06/04/09 60 Philippin Y., 2007, Interview de Louis Gallois, Journal du Dimanche, 24/06/07

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un aspect plus stratégique puisqu’elle concerne les décisions d’externalisation. C’est ainsi qu’en

juin 2008, Airbus a signé un contrat avec Kuehne+Nagel pour la logistique qualifié de « lead

logistic provider » et DHL pour le transport qualifié de « lead transport provider ». Le choix de ces

prestataires fut réalisé du fait de leur capacité à assumer des logistiques de grand envergure et sur un

plan européen et mondial sur certains aspects. Cette externalisation a entrainé de nouvelles

modifications : réduction du nombre de magasins, création de nouveaux hubs européens, définition

d’un « transport management system » ou encore généralisation de l’ERP SAP au plan européen.

Airbus garde tout de même le choix des modes de transports du fait de son aspect stratégique et ne

fait que déléguer aux prestataires l’exécution. Pascal Eymery, vice président Supply Chain

d’Airbus, a réussi à refonder totalement la logistique de l’entreprise sans toucher aux flux

industriels afin de répondre aux contraintes du marché et de l’environnement économique.

Ce Plan Power8 est donc avant tout un plan agissant sur la Supply Chain démontrant que

c’est aujourd’hui un élément indispensable pour toute FMN afin de pouvoir s’adapter à son

environnement. C’est grâce à une flexibilité, une réactivité et une agilité de la Supply Chain que les

entreprises peuvent prendre des décisions stratégiques fortes.

II. D’autres cas

A. Lafarge

1. Une entreprise à fort développement international

Le choix d’étudier la FMN Lafarge vient du fait que c’est un leader mondial dans son

domaine, dans un secteur très particulier, celui de la construction, et que c’est une entreprise dans

laquelle, nous le verrons, la logistique à une place particulière. Lafarge est au niveau mondial le

numéro 1 du ciment, le numéro 2 des granulats et le numéro 3 du béton et du plâtre. Son chiffre

d’affaires en 2008 fut de 19,033 milliards d’euros. L’entreprise a été fondée en 1833. Le groupe est

présent aujourd’hui dans 79 pays à travers le monde. Lafarge compte ainsi plus de 84 000 salariés

dans le monde entier, 166 sites de production de ciment, 621 carrières, 1324 centrales à béton et 76

sites de production de plâtre. L’une des stratégies initiales du groupe fut de se développer à

l’international pour conquérir de nouveaux marchés et s’implanter là où les concurrents n’étaient

pas. Le secteur de la construction est particulièrement actif dans les pays émergents, et c’est

pourquoi cette stratégie a porté ses fruits. L’un des principes majeur énoncé par l’entreprise est le

« Lafarge Way », dont les trois axes sont : « la réussite des collaborateurs : l'objectif de Lafarge est

d'aider chacun à réussir ; l'amélioration permanente de la performance : la priorité de Lafarge est

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d'optimiser continuellement ses produits et services ; et une organisation « multilocale » : les

activités de Lafarge sont locales, mais s'inscrivent dans une logique globale »61. Le développement

international de la firme fut présent dès les premières années de vie avec par exemple la

construction du Canal de Suez en 1864, puis une implantation aux Etats Unis en 1956, au Brésil en

1959, en Afrique en 1985, en Inde et en Corée du Sud en 1998 et dans les pays émergents en 2004.

De plus son action en faveur du développement durable dès 1995 a placé l’entreprise en leader

mondial. Lafarge présente donc les caractéristiques de la FMN par excellence pouvant nous

intéresser dans le cadre de sa logistique.

2. La logistique au cœur d’un processus de réduction des coûts

Pour faire face à la crise économique actuelle, Lafarge au travers de ses plans

« Excellence » a mis en place une stratégie de réduction de coûts massifs. Ainsi le plan Excellence

2009-2010 a défini plusieurs axes prioritaires de réduction de coûts parmi lesquels on trouve la

logistique. Il faut savoir, point très intéressant, que chez Lafarge « on parle encore peu de Supply

Chain, même si on en fait sans le savoir »62. La logistique est, selon Noëlle Svirmickas, Logistics

Projet Manager chez Lafarge Granulats, de plus en plus reconnue au sein de l’entreprise : « la

preuve : des projets mondiaux très visibles qui cherchent à mobiliser toutes les business units

autour de ces thèmes »63. La globalisation a permis à Lafarge d’adopter de nouvelles réflexions sur

le thème de la logistique et ainsi définir de nouvelles organisations au sein de chaque division. Ainsi

la logistique est désormais en relation étroite avec l’ensemble des services de l’entreprise, les achats

et le marketing en priorité ainsi que la finance et le manufacturing ; mais également avec d’autres

secteurs : « on réfléchit aussi à des filières de formation et des modèles d’organisation (RH), et on

cherche de plus en plus à intégrer la dimension logistique dans les projets de développement (soit

par acquisition soit par création). De plus, la communication et la logistique se rencontrent de plus

en plus souvent ».

Si de telles évolutions ont eu lieu, c’est que le secteur de la construction est particulièrement

touché par la conjoncture économique notamment pour Lafarge qui produit entre autre du ciment,

plus touché que le granulat ou le béton, plus destiné à des marché de proximité. C’est aussi

pourquoi le développement international de la firme va se poursuivre. Non pas pour produire où

c’est le moins cher mais pour conquérir de nouveaux marchés (l’expansion internationale va se

poursuivre « mais pas forcément dans le sens « on va produire où ça revient moins cher », mais

plutôt « on va produire là ou se trouvent les marchés ». Et il est clair que les marchés

61 http://www.lafarge.fr/wps/portal/1_2_3-Principes_d_action , consultée le 20/04/09 62 Interview avec Svirmickas N., Logistics Project Manager, Lafarge Granulats 63 Id.

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d’aujourd’hui et de demain se déplacent vers l’Asie). Cela est confirmé par les propos du PDG de

Lafarge, Bruno Lafont, qui soutient que « L'acquisition d'Orascom Cement, leader cimentier du

Moyen-Orient et du Bassin méditerranéen, marque une accélération décisive de notre stratégie de

développement sur les marchés émergents. Elle nous permet de devenir le leader sur ces marchés et

l'acteur le plus performant de notre secteur en termes de croissance, de marges et de résultats.

Ainsi, dès 2010, 65 % des résultats du Groupe seront réalisés sur les marchés émergents. C'est une

transformation majeure ! Dans un contexte économique devenu plus difficile, cette acquisition est

un atout et donne au Groupe une meilleure capacité de résistance »64. La stratégie d’externalisation

de l’entreprise passe par celle de son transport. Lafarge se basait autrefois sur sa flotte propre de

transport et fait aujourd’hui appel à des transporteurs extérieurs. Le transport international de

granulats s’effectue par voie ferroviaire, surtout dans les pays d’Europe de l’Est et par voie

maritime pour le ciment. Pour cette unité, il y a une structure spéciale qui s’occupe du « trading » et

donc de l’approvisionnement. En revanche l’appel à des 4PL est nul. Nous pouvons penser que cela

est du à l’activité même de Lafarge qui ne se prête pas à ce genre de partenariat.

Pour conclure, Noëlle Svirmickas considère que « la SC/log va permettre aux entreprises

qui la maîtrisent de sortir de la crise en meilleur état que les autres. L’enjeu aujourd’hui est de

définir des schémas logistiques souples, agiles capables de réagir par rapport à des changements

économiques brutaux. Se remettre en cause encore et toujours. C’est à la fois le « Lowest cost to

serve » mais aussi la logistique comme service et comme moyen de se différencier et de générer de

nouveaux revenus »65. La Supply Chain se présente donc comme un vecteur majeur de

développement et de réaction des FMN à la conjoncture économique nationale et internationale.

B. Le Falcon 7X de Dassault

1. Un avion conçu virtuellement

Le cas de l’avion d’affaires haut de gamme de Dassault Aviation est révélateur des

évolutions de production qui pourraient se généraliser pour les années à venir. A partir de 2000

Dassault a lancé un très ambitieux projet de construction du Falcon 7X (voir photo en annexe) sur

une base totalement virtuelle. Cet avion fut le premier avion entièrement développé sur une plate-

forme virtuelle, de la conception à la fabrication en passant par la maintenance. Cela signifie qu’il

n’y a pas eu de prototype physique de l’avion avant la mise en production en série. Cette conception

a réuni vingt sept partenaires, parfois concurrents. Cette coopération pu être possible grâce à

l’utilisation de logiciels de gestion du cycle de vie des produits de Dassault Systèmes. Ce système a

64 http://www.lafarge.fr/wps/portal/1_3-Strategie consultée le 20/04/09 65

Interview avec Svirmickas N., Logistics Project Manager, Lafarge Granulats

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permis à Dassault de partager et donc réduire les risques et les frais de développement de

l’industrialisation de l’avion. Chaque partenaire présent dans le projet s’est vu confié la

responsabilité de la conception de l’une des parties du Falcon 7X. La première phase du projet

consistait en 2001 à réunir physiquement les protagonistes afin de réaliser la conception

préliminaire de l’avion. Ceci afin que tous les acteurs soient d’accord sur les méthodes de travail et

de partage de l’information. C’est ensuite à partir de 2003 que Dassault à installer chez les

partenaires les outils informatiques nécessaires et former les personnels à leur utilisation. Les

principales difficultés ont commencé à ce moment là car il fut dans un premier temps difficile pour

Dassault de faire travailler des concurrents ensemble, sur un même plateau virtuel, et leur demander

de partager les savoir faire de chacun. Pour la société Dassault elle-même une difficulté majeure

apparut : prendre en compte les contraintes et les besoins de chacun des partenaires quand

habituellement l’entreprise pilote seule et prend toutes les décisions importantes. Ces problèmes

furent résolus à partir du moment où chaque entreprise a vu que le travail avançait bien et vite. Le

travail s’accéléra alors encore et chaque participant redoubla d’efforts pour finir le travail dans les

meilleurs délais. Petit à petit chaque collaborateur du projet s’est totalement approprié le plateau

virtuel ce qui facilita grandement le travail. La grande force de ce projet est d’avoir pu réunir en

temps réel des personnes situées aux quatre coins du monde et d’avoir pu réunir sur un même projet

plus d’intervenants que lors d’une conception classique d’avion. Au final, les craintes portant sur

l’assemblage de l’avion furent balayées par le résultat : aucun ajustement nécessaire et des délais

globaux d’assemblage divisés par deux. Ce projet fut donc une totale réussite pour Dassault

prouvant que l’innovation et la prise de risques peuvent être un énorme facteur de compétitivité.

2. Des progrès techniques permis par la globalisation

Si la conception de cet avion fut possible, c’est uniquement grâce aux procédés innovants

adoptés par Dassault. Le constructeur aéronautique grâce à sa branche Dassault Systèmes, a

développé des outils informatiques performants notamment par le biais de logiciels de gestion du

cycle de développement des produits, les logiciels Catia v.5, Enovia-VPM et Delmia. Cela nous

renvoit donc au développement des NTIC. Sans le développement de nouvelles technologies, la

conception virtuelle de cet avion n’aurait jamais eu lieu. C’est donc bien la globalisation qui est à

l’origine d’un tel procédé en permettant aux entreprises de s’approprier les technologies présentes

partout dans le monde et de les développer pour leur propre compte. C’est aussi pourquoi des

entreprises aussi importantes que Dassault ont crée Dassault Systèmes afin d’avoir des unités

spécialisés permettant d’apporter un soutien technologique à Dassault Aviation mais aussi capables

de vendre leurs services à d’autres entreprises. La généralisation des NTIC dans l’économie permet

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également à chaque partenaire industriel de profiter d’effets d’entraînement en étant au contact

d’entreprises leaders ce qui peut lui permettre d’apprendre et de développer lui même ces nouvelles

technologies.

L’implication de multiples partenaires dans ce projet démontre également les effets de la

globalisation. L’ouverture des économies associées au NTIC permet de mettre en relation des

collaborateurs dispersés dans le monde et ainsi développer de nouvelles méthodes de travail en

temps réel sans avoir d’interactions physiques. Un progrès technique a d’autant plus de chances

d’apparaître que le nombre de personnes en relation augmente. Plus les ingénieurs par exemple ont

accès au travail et aux pistes de recherche d’autres ingénieurs à travers le monde, plus leur chance

de développer de nouveaux procédés est grande. C’est encore plus le cas dans le cadre de FMN. Le

développement de ce genre d’entreprise du fait de la globalisation met automatiquement en relation

ses différents membres à travers des espaces géographiques très différents et ainsi stimule

l’innovation. Il aurait été invraisemblable il y a encore 20 ans d’imaginer un projet tel que celui du

Falcon 7X. Il a fallu attendre d’avoir une pleine confiance dans les outils informatiques et les

systèmes d’information pour mettre en place ce genre de méthodes de travail. Il a fallu également

prendre conscience qu’un travail collaboratif entre différentes entreprises es synonyme de synergies

et donc est bénéfique à l’ensemble des acteurs. En somme, il a fallu comprendre que les effets de la

globalisation sont des éléments uniques de progrès techniques et de gains de productivité.

C. Autres cas

1. L’anticipation des effets de la globalisation chez Michelin

Michelin est leader mondial des pneumatiques avec une part de marché d’environ 20%. Le

cas de cette entreprise est très intéressant du fait de sa très forte intégration verticale. En effet

l’entreprise française possède ses propres plantations d’hévéas, ses propres usines de fabrication et

son propre réseau de distribution. Voyons comment la firme s’est adaptée à la globalisation et

voyons donc les répercussions de celle-ci sur l’organisation de la Supply Chain de Michelin.

Afin de faire face à la montée de concurrents comme Continental, Dunlop ou Bridgestone,

Michelin à placée la Supply Chain au cœur de ses décisions stratégiques. D’abord par une

spécialisation des unités de production et par la multiplication des échanges entre pays et continents.

Ensuite par la focalisation sur la prestation de service accompagnant la vente de pneumatique.

Michelin a rapidement compris que ce qui fait désormais la valeur ajoutée d’un produit réside dans

l’offre de services gravitant autour. L’entreprise a ainsi mis l’accent sur la disponibilité du produit

et les délais de livraison pour les constructeurs automobiles. Enfin l’accroissement de la gamme de

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produits à permis à Michelin de tenter d’étouffer ses concurrents en proposant des pneumatiques de

tourisme de 20cm et 200 grammes et des équipements pour poids lourds de 4m de diamètre et 5

tonnes. Michelin pour mettre en place ce système a d’abord essayé d’assurer la cohérence et la

coopération entre les différents acteurs présents sur sa chaîne logistique. Ceci s’été accompagné

d’une réorganisation de ses Business Units en neuf lignes de produits afin de séparer les centres de

profits de l’entreprise. Michelin est également un exemple frappant d’entreprise étendue mais

conserve un aspect géographique européen. En 2006, Michelin disposait de 70 sites de production

(39 en Europe, 18 en Amérique du Nord, 2 en Afrique, 7 en Asie et 4 en Amérique du Sud). Nous

avons également assisté à une forte spécialisation des unités de production. Cela engendre

évidemment une nécessaire recomposition de la gamme comme vu précédemment. Ainsi c’est

environ la moitié des quantités vendues dans un pays qui sont issues d’un autre pays.

Michelin a aussi misé sur des canaux de distribution internes afin de bénéficier au

maximum des retombées du rôle de distributeur. Par l’intermédiaire du distributeur Euromaster,

Michelin commercialise ses propres produits. Il faut noter que cela a été possible grâce à la nature

des produits vendus, les pneumatiques ne subissant pas les mêmes contraintes que d’autres types de

produits. Cela répond aussi à la stratégie de Michelin de rester proche du client et de ses attentes. La

globalisation a rendu les consommateurs de plus en plus volatile et pousse donc les entreprises à

connaitre au mieux leurs besoins afin d’avoir des stratégies de vente efficaces.

Michelin a donc tenté de répondre de manière logique aux effets de la globalisation en

s’établissant clairement comme une entreprise étendue et en cherchant à placer sa Supply Chain

dans une démarche de satisfaction du client. L’entreprise a profité de sa position de leader pour

devancer ses concurrents et impulser les tendances de marché du pneumatique. Elle a réussi à

profiter au mieux de la globalisation pour s’asseoir comme le leader incontournable. C’est là aussi

le talent des managers en interne d’avoir su anticiper les conséquences de la globalisation.

2. L’externalisation de la logistique comme réponse : IBM et Alcatel

L’entreprise IBM évoluant sur un marché très concurrentiel et produisant des

biens ayant des cycles de vie très courts, la nécessité d’être flexible et de réduire les coûts

l’a conduite à externaliser certaines de ses activités. C’est au prestataire français Geodis

Logistics que fut confiée cette externalisation. L’objectif était d’organiser la logistique des produits

IBM pour la France, l’Allemagne et l’Italie puis à terme l’Espagne et le Portugal grâce à 32 sites

logistiques du prestataire français répartis un peu partout en Europe. IBM a dans le même temps

confié sa logistique d’approvisionnement au prestataire anglais Tibbett & Britten. IBM a choisi

cette stratégie d’externalisation afin de confier à un spécialiste de la logistique les préoccupations

logistiques de la marque, ces dernières étant très éloignées du cœur de métier de l’entreprise

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américaine. Ce type de partenariat a eu des effets postérieurs pour les deux membres de l’accord.

Pour IBM d’abord, cela lui permis de se concentrer sur sa fonction principale à savoir fournir des

solutions informatiques à ses clients. Pour Geodis ensuite, cela lui a permis de compléter ses

activités en Europe et accroître son chiffre d’affaires en logistique (à cette période, la messagerie

représentait encore 45% du CA de Geodis). Petit à petit l’accord entre l’industriel et le prestataire

s’est accru. En 2002, IBM confia à Geodis la gestion de sa logistique amont et aval en Irlande ce qui

entraina la construction par Geodis d’un entrepôt de 30 000m2 en grande partie dédié aux activités

d’IBM. Geodis commença également à s’occuper d’une partie de la logistique de retour pour

l’entreprise américaine. Cette confiance entre les deux partenaires se conclut en 2004 par un accord

mondial donnant à Geodis la responsabilité de la distribution de la totalité des produits finis d’IBM,

de la logistique de retour et des formalités douanières sur la zone Europe-Middle East-Africa66. Il

s’est concrétisé en 2008 par un contrat énorme quand IBM a confié à Geodis la gestion de la totalité

de sa Supply Chain pour un montant de 1 milliard d’euros par an. Cet exemple est très illustratif des

intérêts à collaborer des différents acteurs de la Supply Chain. Le partenariat fut positif pour les

deux parties. IBM obtint la possibilité de se concentrer sur son activité première afin de faire face à

la féroce concurrence de ses marchés et Geodis réussit à accroître ses activités et à se diversifier. Le

nouveau contrat « agit comme une véritable révolution dans le monde de la logistique où un

prestataire et son client ont su créer un modèle partenarial inédit dans la profession, entièrement

focalisé sur l’innovation et la satisfaction du client »67 selon J-L Demeulenaere, directeur général

délégué chez Geodis. L’externalisation se présente donc comme un moyen efficace de réagir à des

contraintes extérieures comme la pression concurrentielle et la méconnaissance de certaines

activités internes comme la logistique.

Le même type de cas de figure s’est présenté avec Alcatel. L’ancien vice président Supply

Chain Alcatel ESD disait ainsi : « Depuis le début des années 2000, nous avons été confrontés à une

succession de situations qui a conduit à une innovation permanente en matière de solutions Supply

Chain. Externalisation des usines auprès d’EMS (Electronic Manufacturer Services), déplacement

de certaines usines en Europe Centrale puis en Asie, fluctuations très fortes sur les marchés. (…)

Alcatel a mis en œuvre des solutions très originales qui sont passées essentiellement par une

externalisation poussée auprès de prestataires logistiques : les opérations physiques ont été

confiées à un 3PL et le pilotage des flux au quotidien à un 4PL. Cette solution déployée à une

66 Dornier P-P., Fender M., 2007, « La logistique globale et le SCM », Ed. Eyrolles, 2e édition, Paris, p.373 67 Anonyme, 2009, « Geodis signe le plus gros contrat logistique jamais attribué avec IBM », Le journal de la logistique, n°62, Janvier/Février 2009, p.24

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échelle mondiale a été la seule à pouvoir apporter les sources d’adaptation pour rester toujours à

un niveau de performances en matière de services er de coûts concurrentiels »68.

3. Délocalisations et spécialisation des sites de production : Essilor et Yoplait

Autre manière de s’adapter aux changements économiques : accroitre la

spécialisation des unités de production et augmenter les délocalisations. Les exemples de

Yoplait et Essilor sont intéressants dans ce contexte. Essilor est le leader mondial du

verre optique ayant réussi à conquérir de nombreux marchés à travers le monde, notamment le

marché américain. L’entreprise a des sites industriels répartis à travers le monde et sur l’ensemble

des continents, de la Thaïlande au Brésil en passant par l’Irlande. La complexité de sa logistique du

fait du nombre de références à gérer, du fait du type de produits à concevoir (certains étant finis,

d’autres semi finis et nécessitant des laboratoires à proximité) et du fait de l’éclatement de sa

production la logistique et par conséquent la Supply Chain devient un secteur à risque de

l’entreprise. L’avantage de la firme a longtemps été son avance technologique mais aujourd’hui il

repose sur sa stratégie logistique. Essilor à d’abord effectué une vague de délocalisations massives

afin de réduire les coûts de production. L’enjeu par la suite était de pouvoir satisfaire les marchés

porteurs à partir des nouveaux sites logistiques. La massification de la production à partir de sites

asiatiques a contraint Essilor à adapter ses structures logistiques pour pouvoir servir les marchés

européens et américains. La problématique d’Essilor, commune à bon nombre de FMN, était donc

de pouvoir adapter sa Supply Chain à des décisions prises en amont en influençant toute la chaîne.

Dans cette optique, l’entreprise à mise en place des centres logistiques centralisés au niveau

continental et une organisation centralisée au niveau mondial. Le pilotage s’effectue donc à

plusieurs niveaux afin d’être le plus efficient possible. Cependant, le fait que l’amont et l’aval de la

chaîne soient encore assez éloignés au niveau stratégique rend l’intégration complète de la Supply

Chain difficile. C’est là encore le problème commun à de nombreuses FMN. Quand

l’environnement économique pousse l’entreprise à prendre des décisions, l’entreprise et la Supply

Chain doivent subir ces mouvements. C’est pourquoi il est important d’anticiper les événements

afin de concevoir des stratégies logistiques permettant d’intégrer l’ensemble de la chaîne et ainsi

éviter que certains maillons de la chaîne ne deviennent potentiellement des faiblesses.

Yoplait va être également évocateur des influences de la globalisation sur les stratégies des

entreprises en matière logistique. Yoplait a vu en l’espace de 15 ans son nombre de sites de

productions multi références baisser tandis que le nombre des références augmentait

68 Dornier P-P., Fender M., 2007, « La logistique globale et le SCM », Ed. Eyrolles, 2e édition, Paris, p.55

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considérablement. Cela s’explique par le fait que chaque usine devient de plus en plus spécialisée

dans une référence ou une famille de références précises. Le système de distribution est également

affecté par ces décisions. Yoplait est passé de 100 entrepôts en 1975 à 4 plate formes de distribution

ayant pour vocation de réunir les familles de produits et pouvoir préparer les commandes à

destination des clients. Le point le plus intéressant dans le cas de Yoplait est sa relation avec les

distributeurs. L’un des principaux distributeurs à réussi à convaincre Yoplait de partager avec

Danone et Nestlé un même site logistique afin de réaliser des économies d’échelle de volume et de

temps et coûts de préparation des commandes. C’est donc une relation collaborative qui a été mise

en place. L’impulsion du distributeur est énorme car sans son action, des concurrents ne se seraient

jamais associés pour un même site logistique. Or on voit ici l’intérêt de tels accords : permettre par

la mutualisation de certaines ressources de faire de substantielles économies. C’est certainement

l’une des réponses d’avenir à fluctuations de l’économie mondiale et aux déstabilisations de la

Supply Chain.

III. Des acteurs et secteurs périphériques prenant de plus en plus d’ampleur

A. Les prestataires logistiques

1. Leur rôle dans la Supply Chain

Le prestataire logistique est ce qu’on appelle aujourd’hui un 3PL (Third Party Logistics),

4PL (Fourth Party Logistics) ou même 5PL. C’est «une entreprise assurant la réalisation

d’activités logistiques pour le compte d’un industriel ou d’un distributeur. Selon la complexité et le

type d’opérations à valeur ajoutée réalisées par les prestataires logistiques, plusieurs catégories

d’acteurs se dégagent : les prestataires logistiques qui assurent l’exécution des opérations de

logistique physique (…) et dont le système de gestion se limite au suivi de celle-ci pour le compte de

l’entreprise cliente ; les prestataires logistiques à valeur ajoutée qui intègrent à l’offre du

prestataire classique un certain nombre de services allant de la prise en charge d’opérations de

manipulations complexes (…), à la gestion d’opérations administratives (…) et de gestion de

l’information (…) ; les intégrateurs de services logistiques qui se caractérisent par la quasi-

absence de moyens physiques propres et dont la spécificité est d’intégrer les prestations de

différentes entreprises sous traitantes (…) et d’en assurer la cohérence et la gestion par la maîtrise

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des flux d’informations qui s’y rapportent »69. Il se place donc comme une véritable interface entre

client et fournisseur. Son développement s’est accéléré de manière impressionnante avec la

globalisation et la généralisation de l’entreprise étendue. Les prestataires sont considérés comme de

véritables intégrateurs logistiques multi-services et multi-fonctions. Ce sont des entreprises expertes

dont la qualité et les compétences ne peuvent désormais plus être concurrencées en interne par les

entreprises. Ils permettent d’assurer une fluidité dans la circulation des marchandises et des

informations du fournisseur le plus en amont de la chaîne au client final. C’est d’ailleurs cette

expertise qui est avant recherchée par les entreprises plus qu’une simple externalisation permettant

de réduire les coûts. Les principaux critères de choix du prestataire logistique sont la réactivité aux

aléas, la fiabilité des délais, la capacité à honorer les contrats, la stabilité financière et la créativité.

Selon une étude menée il y a plus de dix ans aux Etats Unis, le prix de la prestation n’arrive qu’en

neuvième position. La situation est toujours la même actuellement et s’est sans doute même accrue

du fait de l’élargissement des compétences des prestataires. Leur rôle est désormais de faire

l’interface totale entre le client et le fournisseur. L’objectif des 4PL est de proposer à ses clients des

solutions « clé en main ». Le travail d’une telle entreprise est basé autour de trois axes : l’intégration

et la coordination des flux logistiques et de transport, la gestion et l’amélioration de la Supply Chain

existante et le pilotage des processus. Le 4PL « propose la planification, le design, la mise en

œuvre et l’exploitation de solutions globales de Supply Chain dans un contexte d’optimisation

permanente. Sa vocation est de délivrer de nouvelles valeurs ajoutées dans un cadre de plan de

progrès, en associant les métiers de multiples interlocuteurs d’un schéma de Supply Chain :

développement produits, achats, prévisions/planification, production, administration des ventes,

comptabilité, exploitation réseau, distribution, transport, gestion de stocks, systèmes d’information,

services clients… »70.

2. L’exemple de Kuehne+Nagel

Pour évoquer le cas d’un prestataire logistique, l’exemple de Kuehne+Nagel est révélateur

car c’est une entreprise en plein essor. Kuehne+Nagel est une entreprise suisse spécialisée dans la

logistique et le SCM. Crée en 1890, c’est l’un des leaders mondiaux du transport et de la logistique.

Elle est présente dans plus de 100 pays à travers 850 implantations employant 52 000 personnes. La

division logistique contractuelle représente 500 entrepôts pour environ 7 millions de mètres carrés.

Les point forts de l’entreprise est qu’elle « assure un pilotage « end to end » à un niveau mondial

69 Camman C., Livolsi L., Roussat C., 2008, « Lexipro, le lexique des termes de la logistique », Logistiques Magazine, n° 232, Octobre 2008 70 Frebourg J-C, Enaux L., 2001, « Le 4PL, supermanager de la complexité », Logistiques Magazine, n° 156, Avril 2001

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s’appuyant sur ses quatre pôles métiers : transport maritime, transport aérien, logistique

contractuelle et transport terrestre, rail & route »71. Ce cas est également intéressant par l’immense

contrat signé avec Airbus dans le cadre du plan Power 8 de ce dernier. Selon Logistiques Magazine,

Kuehne+Nagel est actuellement le deuxième prestataire logistique sur le marché français.

La stratégie actuelle du groupe n’est pas son développement international qui est déjà

clairement effectué mais plutôt un renforcement de ses positions au sein de chaque pays afin de

devenir leader partout où l’entreprise est présente. La stratégie est donc basée sur une croissance

externe par l’acquisition d’entreprises comme le groupe ACR en 2005 et Alloin en 2009 et sur une

croissance interne par la recherche de nouveaux clients, le tout basé sur la perspective de devenir

leader sur les marchés nationaux. Kuehne+Nagel se situe plus comme un 3PL qu’un 4PL ou 7PL.

Le groupe a même développé une division LLS (Lead Logistics Solutions) afin, comme le souligne

Steve Belot, First Key Account Manager Aerospace South West Europe, de se placer « comme un

vrai interlocuteur indépendant, c'est-à-dire pouvant même challenger Kuehne+Nagel 3PL, afin de

délivrer des savings et des solutions performantes pour ces clients »72. La croissance d’une telle

entreprise illustre son importance croissante au sein de la Supply Chain des industriels. Cette

croissance est à la fois provoquée par la stratégie même du groupe car « Kuehne+Nagel à su se

rendre indispensable de part son réseau international, son IT totalement intégré dans la globalité

de ses sites et sa croissance externe en réalisant des acquisitions parfaitement ciblée », mais aussi

par l’environnement économique et de ce fait la globalisation : « La croissance mondiale de ces

dernières années, la délocalisation des grands manufacturiers, la dématérialisation des stocks et

l’accélération des besoins des industriels ont également contribués à la croissance naturelle de

Kuehne + Nagel qui avait su se positionner dans les grands axes mondiaux de croissance ». Dans

ce contexte de globalisation, la nature même de l’entreprise lui permet de faire face plus rapidement

que ses concurrents de par son indépendance. Contrairement à ses concurrents appartenant à des

fonds de pensions ou à des structures publiques, Kuehne+Nagel est totalement privé ce qui lui

permet d’avoir des processus décisionnels courts et pouvant être appliqués rapidement. Par exemple

en cas de fluctuation de taux de change dans un pays ou une zone où d’évolution du cours du

pétrole par exemple, Kuehne+Nagel bénéficie d’indicateurs adaptés à la situation de chaque pays,

de chaque marché ou des différents produits. C’est donc une individualisation des actions qui

permet notamment d’offrir une meilleure qualité de service à ses clients.

Quant à la crise économique actuelle, l’entreprise suisse à « toujours suivi une politique de

« non asset based company », permettant d’avoir un bilan financier solide et sans endettement. Le

choix des clients est également important chez Kuehne + Nagel et cette politique nous permet de 71 Anonyme, 2008, « Top 100 des prestataires logistiques », Logistiques Magazine, n°234-235, p.40 72 Interview de Belot S., First Key Account Manager Aerospace South West Europe chez Kuehne+Nagel

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faire face à des situations de crise ». Steve Belot justifie ainsi le contrat passé avec Airbus par le

fait que « le secteur industriel, comme celui de l’aéronautique, est un secteur basé sur des cycles

longs et donc moins impacté directement et rapidement par une crise économique comme nous

pouvons la connaître aujourd’hui (à la différence des secteurs comme l’automobile, le Retail ou le

FMCG). Même si les compagnies aériennes annulent beaucoup de commandes auprès d’Airbus, le

planning de production est plein pour les 7 prochaines années. Les cadences de productions vont

simplement être revues légèrement à la baisse et Kuehne + Nagel ne sera pratiquement pas impacté

et pourra poursuivre sa croissance vers d’autres groupes industriels ».

Cet exemple montre ainsi que le rôle du prestataire logistique est important et que leur

montée en puissance est due à la fois à des besoins du marché mais aussi à des stratégies internes

précises permettant de rendre ce business model rentable.

B. Le rôle des systèmes d’information

1. Un facteur de compétitivité chez Bongrain

Bongrain est le leader mondial de la transformation du lait. Cette entreprise

compte 18500 collaborateurs présents à travers 124 pays. Elle fut créée en 1956 par

Jean Noël Bongrain qui créa le Caprice des Dieux et lança le marché des spécialités

fromagères. L’entreprise avait en 2007 un chiffre d’affaires de 3419,1 millions d’euros.

L’actuel PDG est Pascal Breton depuis 2007.

Chez Bongrain, les systèmes d’information ont pris une place de plus en plus importante car

l’information doit pouvoir circuler au plus vite. Chez la filiale allemande de Bongrain par exemple,

le rôle des systèmes d’information va être le suivant. Quand un besoin est défini après étude des

besoins et connaissance des consommateurs, il est intégré dans le module DP de SAP APO 73 par le

service de planification des ventes. Puis, « dans ce module vont se consolider tous les besoins des

différents marchés avant d’être envoyés dans le module de planification de la production PP. C’est

ici que seront générés les plans de production en tenant compte des ressources nécessaires

(matières premières, besoins emballage, etc.) définies dans le module MRP tout cela associé

également à un étude de faisabilité en fonction des définition de capacité. Les produits résultant de

la production vont par la suite être distribués vers les différents marchés selon les capacités de

transport disponibles (le plan de réapprovisionnement est généré dans le module Distribution

Ressource Planning DRP). En dernier lieu vient l’outil dit ATP (Available To Promise), outil

73 Outil utilisé pour la planification des besoins, production, achats, transports, ainsi que de la prise de décision stratégique

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72

permettant au service client de visualiser les disponibilités des produits pour les sorties clients »74.

Comme le souligne Stéphane Raedersdorf, planificateur logistique junior chez Bongrain, il est

indispensable d’avoir une rapide mais aussi une bonne circulation de l’information. Il faut par

exemple faire attention aux erreurs de traduction entre les langues. On retrouve là l’une des

difficultés des FMN, l’homogénéisation des méthodes de travail dont la langue fait partie. Dans le

cadre de la production, les systèmes d’information permettent d’avoir une transparence des activités

car via des interfaces communes, un utilisateur peut instantanément visualiser divers éléments tels

que les quantités mises en production, les achats d’emballage ou encore les jours de commandes des

clients.

Le fait que Bongrain soit une FMN a nécessité un développement et une uniformisation des

systèmes d’information. L’entreprise étant allemande à son origine, les systèmes d’information ont

d’emblée été un outil majeur de compétitivité et d’optimisation des opérations logistiques. Cela a

naturellement poussé les principaux marchés de l’entreprise, à savoir les marchés français, italiens,

belges, suisses, anglais, slovaques et bientôt tchèques, à passer sous les systèmes d’information

APO et SAP R/375. La tendance actuelle est à l’utilisation de plus en plus massive des systèmes

d’information et l’objectif du groupe est de réduire le nombre d’ERP différents afin de limiter le

nombre d’interfaces différentes pour traduire les données entre les différentes entités de l’entreprise.

Les systèmes d’information sont devenus des outils vitaux et indispensables chez Bongrain.

Comme le raconte S. Raedersdorf, « une panne informatique en décembre 2008 de Kuehne+Nagel

Europe a conduit qu’aucune donnée de stock n’a pu être communiquée, pas de sorties ni entrées en

stock pendant cette période n’ont pu être réalisées, ainsi que l’incapacité du prestataire à retrouver

les produits en stocks ». Les systèmes d’information ont aussi une influence importante sur le taux

de service client et sur le taux de déclassement (taux révélant la part de produits ne pouvant être

vendus à temps compte tenu des garanties de DLUO-Date Limite d’Utilisation Optimale- définies

avec les distributeurs). L’amélioration des ces deux indicateurs conduit inévitablement à une

amélioration de la satisfaction client. Les systèmes d’information ont donc un rôle essentiel à jouer.

Pour finir, preuve que leur utilisation est devenue primordiale, on assiste chez Bongrain à

un spécialisation des effectifs, c'est-à-dire des embauches de personnel plus qualifié et maîtrisant les

outils informatiques. Les appellations des emplois ont également été modifiées avec l’apparition de

pilotes de flux qui par le biais du système d’information réalise les plannings de production. Au

niveau stratégique, le groupe a crée des centres d’expertise regroupant les experts des différentes

filiales afin de gérer des projets de développement et d’optimisation des systèmes d’information.

74 Interview de Raedersdorf S., planificateur logistique junior chez Bongrain 75 Outil de traitement de toutes les informations produit, mouvements de produit, ainsi que les opérations de facturation de ces derniers

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73

2. Une activité en plein essor

Les systèmes d’information sont aujourd’hui vus en entreprise comme une fonction support

qui permet d’assurer le traitement de l’information. Ils sont donc directement influencés par

l’environnement de l’entreprise, ses caractéristiques et par les décisions stratégiques des dirigeants.

Si le développement des systèmes d’information est tel, c’est que les avancées technologiques le

permettent. De même l’environnement économique caractérisé par des marchés mondiaux, des

entreprises étendues et la création de nouveaux services informatiques par exemple implique

automatiquement la nécessité de voir l’information circuler de plus en plus vite et instantanément.

De plus, dans une période économique difficile, les systèmes d’information se révèlent comme étant

des éléments indispensables d’optimisation et donc de réduction de coûts. Comme le pense S.

Raedersdorf de chez Bongrain, « Tout doit aller plus vite. Le flux d’informations est primordial

pour une bonne réalisation des process. La logistique collaborative gagne en importance, la

réalisation de modèles logistiques avec des systèmes d’information qui intègrent tous les acteurs du

fournisseur au besoin du client peut se faire. Des économies d’échelles peuvent se faire par

l’utilisation de systèmes d’information pour le groupe, facteur non négligeable dans cette période

délicate économiquement ». Selon N. Svirmickas de Lafarge Granulats, l’entreprise doit

traiter« souvent des centaines et des milliers d’opérations unitaires sur lesquelles il faut

comprendre les tendances, définir une politique logistique, choisir astucieusement ses prestataires,

définir et suivre des critères de performance…Sans business intelligence, sans data crunching,

autant dire que c’est peine perdue ! »76.

Certains secteurs d’activités peuvent avoir plus de besoins en systèmes d’information que

d’autres. Selon la matrice d’intensité informationnelle de Porter et Millar77 (voir en annexe), des

secteurs comme la banque, les assurances, la téléphonie et l’industrie du loisir vont être en besoin

fort de systèmes d’information. Au contraire, l’agriculture ou la production de ciment seront moins

demandeurs. La taille de l’entreprise reste néanmoins le facteur déterminant dans la nécessité

d’avoir des systèmes d’information performants afin de pouvoir gérer la complexité de

l’organisation. Certaines entreprises utilisent même les systèmes d’information comme source

d’avantage concurrentiel en investissant massivement dans les NTIC (ce fut le cas d’Ebay ou

Amazon par exemple).

Si les systèmes d’information sont en plein développement, c’est avant tout car ils sont

sources de réduction de coûts, de création de valeur ajoutée et d’optimisation des processus. La

76 Interview avec Svirmickas N. , Logistics Project Manager, Lafarge Granulats 77 Porter M., Millar V., 1985, « How information gives you a competitive advantage », Harvard Business Review

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réduction de coûts passe, par exemple, par la mise en place de datamining, d’indicateurs de

benchmarking interne ou du « Business Process Outsourcing » que nous étudierons plus loin. La

création de valeur est présente car les systèmes d’information permettent d’apporter des

innovations produits, de nouveaux services (GPS par exemple), d’avoir une meilleure relation

clients et une plus grande efficacité de services. Certaines entreprises sont même uniquement basées

sur les systèmes d’information (Google ou Amazon par exemple). Enfin au cœur des entreprises, le

développement des ERP a permis aux entreprises de révolutionner leurs fonctionnements.

C. Importance du transport

1. Enjeu du transport

Le transport a longtemps été considéré comme un poste de coût très important pour les

entreprises et un ralentisseur de croissance. La globalisation ayant réduit les cycles de production et

de distribution des produits, la nécessité d’optimiser son transport est devenue vitale. Désormais, les

entreprises ne considèrent plus le transport comme le simple transport des marchandises mais

comme une activité de grand importance car permettant à l’offre de rencontrer la demande. Le

transport apporte un dilemme aux entreprises dans la période actuelle car bien que l’industrie

entière soit demandeuse d’une accélération de la mobilité des produits, le transport est soumis au

risque de fournir de mauvaises prestations et surtout est soumis aux stigmatisations

environnementales, considérant qu’il faut réduire le transport car il est synonyme de pollution. Le

transport est généralement le poste le plus coûteux de la chaine logistique. Son optimisation permet

généralement aux entreprises d’effectuer des économies importantes se répercutant sur l’ensemble

de la chaine logistique comme un facteur non négligeable de compétitivité.

En nous intéressant aux différents types de transport, nous pouvons nous rendre compte que

c’est toujours le transport routier qui est le plus utilisé devant le transport ferroviaire et le transport

maritime. Cela va d’ailleurs à l’encontre du Livre Blanc de la Commission Européenne qui

préconisait un rééquilibrage entre les modes de transport, anticipant les problématiques « vertes »

visant à minimiser le transport routier au profit du transport multimodal notamment. La voie vers le

transport multimodal est surtout valable pour des produits à faible valeur ajoutée et sur de longues

distances. Dans le cas contraire, le transport routier reste le plus efficace grâce à la flexibilité qu’il

apporte, à son coût et sa possibilité d’atteindre pratiquement n’importe quelle zone (ce qui le rend

incontournable dans les zones urbaines). Le transport routier s’est accru également du fait que les

deux autres principaux modes n’ont pas réussis à être performants en répondant aux attentes des

clients. Le transport ferroviaire nécessite des infrastructures de qualité or le réseau européen par

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exemple n’est ni homogène entre les pays, ni complet au niveau de son déploiement. Il commence

tout juste à être adapté aux attentes des clients au niveau de la fiabilité des services, du suivi des

envois, des services logistiques et de l’obligation de résultat. Le transport maritime à suivi lui plus

rapidement la voie du progrès. Les pays nordiques ont été en avance sur les autres pays européens

par exemple en développant massivement ce type de transport qui peut rapidement s’avérer très

complémentaire avec le transport routier notamment. L’exemple de la logistique d’Airbus en est le

parfait exemple avec leur navire « ro-ro ». Le principal frein aux transports alternatifs au transport

routier se situe dans le fait qu’ils nécessitent d’importants investissements que les pays ou les

entreprises ne sont pas toujours prêtes à consentir. Certaines entreprises se sont néanmoins

accommodées au transport multimodal avec succès. Nous pouvons penser à Monoprix qui livre

Paris en train depuis son entrepôt en Seine et Marne ou encore Décathlon qui a mis en place une

véritable coopération dans son transport entre le train, le bateau et le camion.

Enfin, l’apport des NTIC dans le transport devient considérable. Les systèmes de

localisation, de traçabilité, de GPS permettent de relier tout le réseau et ainsi de pouvoir optimiser le

fonctionnement du transport. Chaque véhicule est en constante connexion avec les différents acteurs

de la Supply Chain (clients, fournisseurs, distributeurs). Cette évolution du transport permet

également d’assurer la continuité dans la traçabilité des produits, préoccupation majeure des

prochaines années.

2. Le transport chez Danone Eaux France et Lafarge Granulats

Intéressons nous au cas de deux entreprises françaises et au rôle du transport

dans leurs activités. Chez Danone Eaux France, le transport est un élément vital de la

stratégie logistique pour quatre points précis. D’abord le rôle joué sur les délais de

livraison et sur l’offre logistique ; puis son apport dans le cadre de l’optimisation des coûts ; ensuite

dans les infrastructures à mettre en place en fonction des modes de transport utilisés (ferroviaire ou

routier en fonction du trajet à faire soit entre les usines, les plates formes ou les clients) ; et enfin

l’impact environnemental (avec notamment le « carbon footprint »). Au plan international, le

transport est une fonction vitale pour Manuel Kienlen, responsable transport route et méthodes chez

Danone Eaux France : « sur un plan d’exécution opérationnelle, c’est un contributeur majeur de

notre taux de service, de notre capacité à répondre aux aléas et à-coups de la demande client et des

nouvelles offres clients. Il permet également la maîtrise de nos comptes de résultats (ratio coût

transport/coût total de nos produits élevé) et de notre positionnement tarifaire vis-à-vis de nos

clients et consommateurs. Enfin, c’est un levier fort de notre empreinte environnementale »78. Le

78 Interview de Kienlen M., responsable transport route et méthodes chez Danone Eaux France

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76

transport permet donc de pouvoir rendre en partie la Supply Chain agile et réactive afin de mieux

satisfaire le client. Il faut bien voir que la stratégie de transport va s’adapter à chaque marché et à

chaque pays.

Par rapport aux autres acteurs de la Supply Chain, le service transport occupe une place

stratégique. Comme le souligne M. Kienlen, le transport « étant par définition en aval de toutes nos

opérations, nous sommes le dernier maillon avant livraison chez nos clients. Les problématiques se

cristallisant souvent en bout de ligne droite, nous avons un rôle d’animation transversale avec les

autres composantes de la SC (service client, réseau, flux, déploiement central et local). Nous avons

un rôle fournisseur par l’exécution des flux ; un rôle client par le besoin d’avoir des flux opérables

dans le cadre de nos process définis ; et un rôle animateur par une vigilance court, moyen et long

terme sur notre environnement logistique »79. Le transport se révèle donc être un élément primordial

dans la stratégie logistique d’un grand industriel vendant ses produits à des millions d’exemplaires

chaque année.

Chez Lafarge Granulats, le transport revêt aussi une importance toute particulière. C’est en

effet le moteur de la Supply Chain et donc l’élément primordial autour duquel tournent tous les

services de l’entreprise. L’activité de Lafarge Granulats en France est répartie géographiquement en

quatre régions. Au sein de la région comprenant la région parisienne et le Nord de la France, le

service logistique est porté presque uniquement sur la gestion des problématiques liées au transport.

Le service logistique est composé de 6 personnes dont 3 qui gèrent au jour le jour le pilotage du

transport. Lafarge Granulats livre quotidiennement ses clients qui sont des distributeurs tels que

Point P ou ses propres chantiers Lafarge. L’entreprise fait appel à des transporteurs extérieurs mais

garde le pilotage de leur activité. Il faut réussir à optimiser les tournées des camions afin de livrer de

N à N+1 les clients. Des retards de livraison se traduisent immédiatement par des pénalités pour

Lafarge. Le transport est donc le point névralgique sur lequel sont portées toutes les attentions.

L’essentiel du transport se fait par camion du fait de leur agilité, de leur flexibilité et de leur

capacité à être un transport urbain. Néanmoins Lafarge est un précurseur du transport fluvial. En

effet, c’est l’une des seules entreprises françaises à disposer de ses propres barges afin de naviguer

sur la Seine et ainsi relier ses nombreuses carrières entre Paris et Le Havre. Le transport par barge

est stratégique pour l’entreprise car il permet de transporter d’importantes quantités et d’accéder à

la région parisienne rapidement. Du point de vue des considérations écologiques également le

transport fluvial permet à Lafarge Granulats d’être l’un des leaders. Les coûts de transport sont la

première préoccupation de l’entreprise et c’est pourquoi les contrats avec les transporteurs sont

négociés régulièrement et que ces derniers sont soumis à de fortes pressions. C’est également

79 Interview de Kienlen M., responsable transport route et méthodes chez Danone Eaux France

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77

pourquoi Lafarge choisit de faire appel à une multitude de transporteurs différents et rarement de

très grandes tailles afin de garder la position de force lors des négociations.

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78

Partie III : Différentes modulations possibles de la Supply Chain

I. Accentuation de l’entreprise étendue

A. Nécessité d’optimisation de la Supply Chain

1. Gérer efficacement les différents niveaux de la Supply Chain

La Supply Chain se présente clairement comme le moyen pour les FMN de s’adapter

efficacement à la conjoncture économique. Mais uniquement à condition que son utilisation soit

efficace et préparée. Il ne suffit pas de mettre en place une Supply Chain et appliquer quelques

processus théoriques, une Supply Chain performante demande une grande implication de toutes les

composantes de l’entreprise. L’objectif est donc de pouvoir optimiser cette Supply Chain.

La première phase est d’effectuer une optimisation interne. Cette optimisation est possible

par le développement au sein de l’entreprise d’outils de planification. Le rôle des systèmes

d’information est alors important comme nous le verrons ultérieurement. Cette optimisation interne

va donc consister dans la coordination la plus précise possible de toute la chaîne, des achats à la

distribution sans oublier la gestion de la logistique retour et du service après vente. Une fois cette

optimisation réalisée, il faut commencer à s’intéresser à ses relations avec ses partenaires. C’est ici

que commence à être utiles les procédés tels que l’EDI, la GPA ou encore le CPFR que nous

développerons plus tard. Enfin l’optimisation la plus intéressante est l’optimisation dite

« multiniveaux ». Le but est l’optimisation globale de l’ensemble de la chaîne. L’entreprise pivot de

ce système transmet ses informations qui vont être alors utilisées par les partenaires. Une entreprise

comme Danone Eaux France par exemple se doit d’avoir des relations très intégrées avec ses

partenaires. M. Kienlen, responsable transport route et méthodes chez Danone Eaux France,

considérant que le marché de la boisson en France peut être vu de manière exagérée comme un

oligopole, les amène « à des niveaux d’échanges et d’intégration forts avec [leurs] clients ; les

échanges avec [leurs] concurrents sont également nombreux »80.

L’optimisation de la Supply Chain est le sujet que nous allons traiter dans cette partie dans

le cadre de l’entreprise étendue car il semble que le développement encore plus poussé de ce mode

de fonctionnement industriel soit non seulement inéluctable dans la globalisation mais surtout

porteur de réussite économique pour les entreprises.

80 Interview de Kienlen M., responsable transport route et méthodes chez Danone Eaux France

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2. Vers le « lean et agile »

Généralement les deux termes sont mis en opposition concernant la Supply Chain. Le terme

« lean » renvoi à la notion de réduction des coûts et d’augmentation des niveaux de service par

l’optimisation des processus opérationnels et l’élimination des gaspillages. C’est alors une logique

de juste à temps qui est appliquée avec un pilotage de la production par l’aval en flux tirés. Ce

système est basé sur la synchronisation des activités et la coordination des intervenants. Afin de

mettre en place ce genre de système, il faut avoir une certaine stabilité dans la Supply Chain pour

effectuer au mieux l’intégration des différents acteurs. Cette intégration se fait notamment par

l’automatisation de certains processus, ce qui laisse penser que tout ou partie de la chaîne va se

rigidifier. Le « lean » va pouvoir s’appliquer pour des produits relativement standards dont la marge

est assez faible et avec un cycle de vie long et dont la demande va pouvoir être correctement prévue.

Dans ce contexte, les différents logiques de production vont être basées sur le volume, l’économie,

les systèmes de type Kanban ou encore la conception modulaire que nous étudierons plus loin.

Dans une optique a priori inverse de production « agile », c’est surtout la flexibilité qui est

recherchée par l’adaptabilité des processus et des organisations afin de pouvoir faire face à

l’environnement en constants changements de l’entreprise. Le but premier est d’adapter la

production au plus près de la demande et, comme l’indique Nathalie Fabbe-Costes, « l’agilité, qui

combine donc flexibilité stratégique et opérationnelle, peut amener à modifier l’offre (produit et/ou

service), à changer de partenaires, à transformer les activités (nature et localisation), ainsi que leur

mode de pilotage »81. Cela va s’appliquer surtout aux produits customisés ou de mode à faible cycle

de vie et fortes marges et dont la demande est volatile. Les logiques de production sont alors des

logiques de spécification, de vitesse, d’approvisionnement spécifique et de conception

personnalisée.

Il parait alors simple d’opposer les deux concepts. L’un étant sensé être caractérisé par la

rigidité et l’automatisation et l’autre par la flexibilité et l’adaptation. C’est pourquoi pendant un

certain temps, les auteurs ont exclu la possibilité d’associer les deux. Or désormais il est reconnu

qu’ils peuvent bien être couplés. Une même entreprise peut ainsi gérer plusieurs chaînes de

production, certaines en lean d’autres en agile, ayant des familles de produits différentes ; la

saisonnalité de certains produits peut inciter les entreprises à fonctionner en lean en pleine saison et

en agile en période creuse ; ou encore la gestion de la différenciation retardée qui permet en amont

de la chaîne de fonctionner en lean et en aval en agile. L’optimisation de la Supply Chain passe par

81 Paché G., Spalanzani A., 2007, « La gestion des chaînes logistiques multi-acteurs : perspectives stratégiques », Presses universitaires de Grenoble, Grenoble, p.23

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80

ces arbitrages s’effectuant quasiment produit par produit et chaîne de production par chaîne de

production. Il faut donc mener une véritable réflexion stratégique à la tête de la Supply Chain.

3. Développement des logiques collaboratives

Dans ce contexte, les partenariats entre entreprises devront se baser sur le développement de

concepts et de processus bien identifiés. Déjà présent depuis quelques années, l’EDI (Echange de

Données Informatisé ) est le premier outil devenu indispensable dans toute coopération afin de

profiter des NTIC et transmettre l’information de manière simple et instantanée. D’autres procédés

existent en matière d’approvisionnement notamment avec le développement de la GPA82 et de la

GMA83. Ces deux modes de gestion permettent une première étape vers la collaboration poussée

entre industriel et distributeur. Enfin l’avenir réside sûrement dans le CPFR84, sorte de GPA plus

poussée, ayant pour but un total partage de l’information tout au long de la chaîne permettant à

chaque maillon d’établir ses plans de productions par rapport aux autres et ainsi optimiser toute la

Supply Chain. Dans les faits, ces procédés sont déjà mis en place dans bon nombre d’entreprises,

seul le CPFR n’est pas encore développé. Cela s’explique par la crainte naturelle des entreprises à

divulguer des informations relevant de leur cœur d’activité. Le partage d’informations n’est pas

simple et c’est plus un problème mental qu’un problème technique ou technologique. Or pour

pouvoir profiter au mieux des possibilités offertes par l’entreprise étendue, le partage

d’informations doit être conséquent à tous les maillons de la chaîne. Il faut insister sur le fait que

c’est bien l’ensemble des acteurs qui doivent participer et pas seulement l’entreprise pivot et le

principal prestataire par exemple. Une fois qu’une chaîne complexe est établie, les actions de l’un

des membres agissent en cascade sur l’ensemble de la chaîne. Il faut donc une relation de confiance

entre les acteurs.

Les prestataires logistiques l’ont bien compris. Afin de prouver leur implication dans

l’activité de l’entreprise cliente, ils mettent en place et cherchent des solutions afin d’offrir la

82 GPA : Gestion Partagée des Approvisionnements, « mode de gestion des approvisionnements dans lequel le distributeur s’engage à transmettre en temps réel au producteur les sorties d’entrepôts et les niveaux de stocks afin que celui-ci établisse une proposition de réapprovisionnement ». Camman C., Livolsi L., Roussat C., 2008, « Lexipro, le lexique des termes de la logistique », Logistiques Magazine, n° 232, Octobre 2008 83 GMA : Gestion Mutualisée des Approvisionnements, « mode de gestion des approvisionnements dans lequel plusieurs industriels s’engagent à livrer ensemble, à partir d’un même site logistique, un ou plusieurs distributeurs ». Camman C., Livolsi L., Roussat C., 2008, « Lexipro, le lexique des termes de la logistique », Logistiques Magazine, n° 232, Octobre 2008 84 CPFR : Collaborative Planning and Forecasting Replenishment, « démarche de collaboration et d’intégration des processus de prévision et de planification entre clients et fournisseurs ». Camman C., Livolsi L., Roussat C., 2008, « Lexipro, le lexique des termes de la logistique », Logistiques Magazine, n° 232, Octobre 2008

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81

meilleure qualité de service possible. Ainsi dans le contexte actuel de crise économique, les

prestataires logistiques ont des comportements similaires vis-à-vis de leurs clients. Ainsi chez

Kuehne+Nagel, « on met tout en œuvre pour baisser nos coûts de production et donc diminuer nos

tarifs de prestation » (P.Pépin, président de Kuehne+Nagel France) ; chez ID Logistics, « face à des

clients en difficultés, nous resserrons notre partenariat en établissant ensemble des projets de

réduction de coûts et des plans de progrès adaptés. Pour certains distributeurs, nous limitons le

niveau des stocks et augmentons les opérations en cross docking. On a pu monter facilement un

accord de mutualisation de stocks entre deux parties. Etre capable de trouver une solution

commune aux problématiques de plusieurs clients constitue la valeur ajoutée du prestataire » (E.

Hémar, PDG d’ID Logistics) ; ou encore chez ISS Logistique, « grâce au lean manufacturing que

nous opérons dans les usines, nous pouvons apporter des solutions logistiques d’accompagnement

de la baisse d’activité sans générer de surcoûts et de gaspillage sur les moyens fixes » (F. Plouvier,

directeur général d’ISS Logistique). On constate aisément que la quête de satisfaction du client est

un moyen de renforcer les liens entre les partenaires. C’est évidemment aussi un choix stratégique

afin de garder ses liens en sortie de crise quand de nouveaux contrats seront signés.

Enfin, dernier point, les relations au sein de l’entreprise étendue doivent être fortes et les

liens entre l’entreprise pivot et ses partenaires doivent être resserrés. L’exemple à suivre est celui de

Danone qui vient de lancer un fonds de développement de 100 millions d’euros pour « stimuler le

développement économique et social de l'écosystème de Danone » c’est à dire les fournisseurs, les

sous-traitants et le bassin d'emploi du groupe au niveau mondial, a déclaré le PDG, Franck Riboud.

La crise « a distendu de manière préoccupante les liens de l'entreprise avec ses autres parties

prenante. Il faut faire valoir une solidarité entre les différents acteurs pour la création d'une

richesse commune » car « aucun organisme ne se développe dans un milieu appauvri ou dans un

désert ». Ce fonds financera par exemple des « programmes de développement de

compétences »85chez les fournisseurs ou encore favorisera la création d'activités comme des

microentreprises en relation avec les activités du groupe.

85 http://www.lesechos.fr/info/agro/afp_00141607-le-groupe-danone-cree-un-fonds-de-developpement-de-100-millions-d-euros.htm, consultée le 23/04/09

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82

B. L’externalisation comme axe stratégique et plus seulement opérationnel

1. Vecteur de succès par une méthodologie stratégique

Les FMN ont le plus souvent considéré l’externalisation comme un axe purement

opérationnel à court terme avec la réduction des coûts de production et d’exploitation par exemple.

Or en considérant le processus d’externalisation à un niveau stratégique, ces dernières ont la

possibilité de prendre de véritables mesures d’avenir pouvant leur permettre de disposer d’un

avantage concurrentiel durable. Il faut bien comprendre que l’externalisation ne doit s’inscrire qu’au

sein d’une stratégie bien définie et doit être conçue de manière précise. C’est pourquoi Bertrand

Quélin propose dans son article « L’externalisation : de l’opérationnel au stratégique »86 des pistes

stratégiques à suivre afin que l’externalisation puisse être efficace et utile à l’entreprise. Il évoque

divers éléments à prendre en compte. Le premier consiste à effectuer une analyse interne de

l’entreprise en identifiant « le périmètre des activités concernées par l’externalisation », en

analysant « la coordination organisationnelle et les interfaces à construire entre l’activité

externalisable et celles maintenues en interne », en étudiant les faisabilités d’ordre technique,

juridique ou fiscale de l’opération et en évaluant également la décision « sur une base

multicritère ». Il faut ensuite pour l’entreprise, comme évoqué précédemment, s’interroger

l’appartenance ou non de l’activité à son cœur de métier. Nous verrons que cet indentification du

cœur de métier est un élément ayant de grandes implications sur les résultats d’une entreprise.

L’analyse multicritère proposée par l’auteur s’avère très intéressante du fait qu’elle montre

l’importance d’évaluer l’externalisation du point de vue stratégique. Les différents critères sont

naturellement en premier lieu la structure des coûts et donc les gains économiques que compte

retirer l’entreprise. En second lieu, la contribution de l’activité à l’avantage concurrentiel. Ensuite,

le niveau de pression concurrentielle. Ce critère est très important dans un contexte d’économie

globalisé où la pression concurrentielle est parfois immense. L’avant dernier critère concerne la

contribution à la valeur ajoutée. Ce critère est également fondamental car il suppose une

anticipation de l’entreprise sur son avenir et des évolutions de son environnement interne et externe.

C’est donc un critère qui nécessite une vision hautement stratégique de l’entreprise. Enfin, le

dernier critère concerne l’évaluation des capacités et des performances potentielles de l’entreprise

dans le cas où l’activité à externaliser doit rester en interne. L’entreprise peut choisir de ne pas

externaliser l’activité en question si elle pense qu’elle a des qualités supérieures que les prestataires

pour son exploitation.

86 Quélin B., 2007, « L’externalisation : de l’opérationnel au stratégique », Revue française de gestion 2007/8, n° 177, p.113-128

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Au-delà de ces points, l’aspect humain et managérial est important car ce sont eux qui

doivent placer l’externalisation à un niveau stratégique en plaçant l’externalisation dans le cadre du

développement global de l’entreprise. Selon Quélin, « il s’agit de s’investir dans la mise en œuvre,

puis de communiquer en interne, ensuite de soigner la qualité du processus de sélection du

prestataire, et enfin de s’impliquer dans le management du relationnel avec le prestataire »87. Afin

que les entreprises puissent profiter de leur Supply Chain pour faire face aux évolutions de leur

environnement, elles doivent pouvoir compter sur des externalisations efficaces. Il faut éviter de

considérer les changements comme des restructurations mais plutôt comme des investissements de

développement qui permettront à l’entreprise de gagner en souplesse afin d’être plus réactive aux

diverses évolutions externes.

2. Le Global Sourcing comme intégration internationale

Le concept de Global Sourcing s’inscrit dans l’extension internationale de l’entreprise et

dans sa gestion des flux dans ce contexte. Il concerne donc l’élaboration de Supply Chain

internationales et se pose donc comme un élément d’analyse très intéressant dans le contexte actuel

d’entreprises touchées par la crise et accentuant le mouvement de délocalisation. Le Global

Sourcing a pour objectif de « trouver les points de production ou d’approvisionnements optimums,

à l’échelle de la planète, tout en tenant compte de l’ensemble des paramètres liés aux processus

logistiques, et en considérant des contraintes et des critères économiques, financiers, de services et

de risques »88.Une telle démarche n’est pas anodine et comporte certains freins : coûts logistiques

élevés, fiabilité non garantie des prestataires, sécurité des flux, pilotage global de l’ensemble de la

chaîne ou encore différences culturelles, risques politiques ou encore instabilité économique du

pays d’accueil. L’aspect le plus difficile à gérer pour une FMN voulant se lancer dans ce processus

va être d’évaluer les différents coûts tout au long de la Supply Chain. Entre les coûts

d’acheminement, les coûts logistiques, les coûts de stockage, les opérations de reconditionnement,

les coûts relatifs à la qualité ou les différentes taxes à payer, les coûts de pilotage, les coûts de

rupture potentiels, les coûts relatifs aux systèmes d’information ou encore les coûts de mise en place

du projet, l’entreprise peut rapidement se retrouver face à une montagne qu’elle n’aura pas envie de

gravir. Or les économies pouvant être faites grâce à un Global Sourcing (que même la grande

distribution commence à pratiquer) sont telles qu’il faut cherche le meilleur moyen d’y parvenir.

C’est dans ce contexte que les prestataires logistiques internationaux prennent toute leur 87

Quélin B., 2007, « L’externalisation : de l’opérationnel au stratégique », Revue française de gestion 2007/8, n° 177, p.122 88 Kranioti E., 2008, « Le Global Sourcing, un autre type de délocalisation », Le Journal de la Logistique, n°58, Septembre 2008

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importance. Ils sont les pivots d’une telle organisation que ce soit lors de la phase de projet que dans

la phase d’exploitation. Beaucoup d’entreprises effectuant du Global Sourcing tente de suivre le

même fonctionnement que lors d’un sourcing local, c'est-à-dire fractionner la Supply Chain en

cherchant les meilleurs coûts à chaque étape. Or au plan international cette pratique est trop risquée

et il faut considérer la Supply Chain de manière globale et donc faire appel à un prestataire pouvant

gérer l’ensemble de la chaîne. C’est pourquoi le Global Sourcing est un élément d’avenir pour les

entreprises. Son existence est une conséquence directe de la globalisation ayant permis

l’implantation sur l’ensemble des marchés mondiaux. En parallèle, les entreprises de type 4PL se

développent de plus en plus et prennent désormais une importance majeur dans la gestion des

Supply Chain des FMN. Dans un contexte visant à réduire toujours plus les coûts, la coopération

entre des FMN voulant les meilleurs prix et des prestataires en plein essor se dirigeant vers un rôle

d’intégrateur global de type 5PL est une solution d’avenir. Les FMN peuvent ainsi profiter de

l’expertise grandissante des prestataires et faire face aux difficultés de l’environnement

économique. Ce n’est ainsi pas un hasard si des FMN comme Airbus, lancées dans des stratégies

d’expansion géographique de la production font appel à des intégrateurs comme Kuehne+Nagel

dans des contrats mondiaux visant à réduire les coûts (plan Power 8) et à se placer sur des marchés

porteurs.

3. Concentration sur son cœur de métier pour changer de business model

L’externalisation s’avance donc comme une manière pour les FMN de poursuivre leur

développement, notamment international. L’externalisation peut également permettre de réorienter

sa stratégie globale du fait que le choix d’externaliser porte sur des activités précises. L’intérêt de

considérer l’externalisation dans ce sens prend de l’importance quand l’entreprise connait des

difficultés. Changer d’orientation dans sa stratégie globale est l’une des voies possibles pour sortir

d’une situation difficile. L’externalisation peut permettre de changer de business model notamment

en se concentrant sur son cœur de métier.

La volonté de concentration de l’activité de l’entreprise sur son cœur de métier est bien

souvent un élément déclencheur de la volonté d’externaliser. La principale difficulté est de bien

identifier son cœur de métier. C’est un enjeu majeur car bien des entreprises ont raté leurs

externalisations du fait qu’elles avaient mal jugé leur cœur de métier et ainsi avaient confié des

activités stratégiques à des prestataires. Il y a quatre critères qui permettent d’identifier

convenablement le cœur de métier : « la contribution à la création de valeur ; la rareté ; le

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caractère non imitable ; le caractère non substituable »89. Se recentrer sur son cœur de métier

devient une problématique majeure pour les entreprises car pour garder ses positions de marché, il

faut exceller dans ce qui fait la réussite de l’entreprise. Des exemples simples de cœur de métier

sont la miniaturisation chez Sony, les technologies adhésives chez 3M ou encore le temps de cycle

et la logistique chez Domino’s Pizza. Cet enjeu est bien présent chez les FMN. Pour reprendre

l’exemple d’Airbus, dans son plan Power 8, une grande part est dédiée à l’externalisation (contrats

avec Kuehne+Nagel et DHL) afin de se concentrer sur un nouveau business model basé sur la

réduction du cycle de développement des avions, sur le lean manufacturing et sur la rationnalisation

de l’organisation productive et logistique. Le rôle des prestataires logistiques est alors fondamental

car c’est eux qui peuvent permettre, par leur efficacité dans les activités externalisées, aux FMN de

voir leurs stratégies fonctionner. C’est aussi pourquoi les collaborations entre industriels et

prestataires logistiques ne font que s’accroître et deviennent de plus en plus étroites en temps de

crise économique comme actuellement. Comme le souligne Patrick Pépin, président de

Kuehne+Nagel France, « la grande problématique d’aujourd’hui est l’incertitude et l’absence de

confiance qui pèsent sur l’économie mondiale. Ce bouleversement annoncé ne peut que conforter

les acteurs économiques dans leur choix de se concentrer sur leur cœur de métier et d’externaliser

davantage leurs opérations annexes pour gagner en flexibilité et en réduction de coûts. (…). En

période de crise, cette capacité qui est la nôtre doit simplement être accentuée et se traduit par un

renforcement de notre partenariat avec nos clients en étant en permanence force de proposition »90.

L’externalisation est donc devenu un élément vital dans un contexte actuel marqué par la

globalisation des marchés, par une accentuation de la pression sur les entreprises quelle soit

concurrentielle ou économique, et par une évolution perpétuelle de la Supply Chain. L’aspect

stratégique est nécessaire afin d’inclure l’externalisation dans la stratégie globale de l’entreprise. Si

les entreprises arrivent à voir le processus d’externalisation comme un processus de développement

de l’entreprise plutôt que comme une contrainte de réduction de coûts liée aux difficultés

économiques, alors l’externalisation peut se présenter comme une solution viable de sortie de crise.

C’est l’un des enjeux futurs de l’entreprise étendue.

89

Quélin B., 2007, « L’externalisation : de l’opérationnel au stratégique », Revue française de gestion 2007/8, n° 177, p.118 90 Mouly B., 2009, « Les prestataires logistiques s’expriment face à la crise », Logistiques Magazine, n°237, Mars 2009

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86

C. Autre option : la réinternalisation

1. Une réponse à la recomposition de la chaine de valeur : de l’outsourcing au backsourcing

Alors que l’externalisation est désormais vue comme la marche à suivre presque

systématiquement dans le cadre du développement des FMN et en tant que mode de réponse aux

difficultés procurées par des événements tels que la crise financière par exemple, certains

chercheurs ont exploré les possibilités offertes par la voie inverse, la voie de la réinternalisation.

Généralement considérée comme une stratégie marginale par le monde de l’entreprise ou comme un

constat d’échec à la suite d’une externalisation, la réinternalisation peut en réalité permettre aux

FMN d’avoir plus de flexibilité, condition nécessaire pour faire face à la pression concurrentielle.

En s’intéressant aux théories de la firme, on constate que c’est la théorie des coûts de transaction

qui régit les comportements des managers dans le cadre du choix stratégique d’externaliser ou de

garder en interne. Or cette théorie est appliquée par les FMN de manière statique à un moment

donné dans le temps. Le principe de réinternalisation fonctionne lui de manière dynamique. Le

terme de réinternalisation est défini comme l’intégration au sein d’une entreprise d’une activité

précédemment externalisée. La difficulté est qu’il faut donc se réapproprier les compétences

perdues lors de l’externalisation. Les auteurs ayant étudié la question ont deux visions de ce

processus dont la première est que la réinternalisation est une réponse à une externalisation ratée. La

réinternalisation est alors vue comme « un moyen de réduire les coûts de transaction provoqués par

une utilisation inadéquate de l’externalisation ou par une sous-performance voir une défaillance du

prestataire externe »91. Les inconvénients de la réintégration de certaines activités sont que

l’entreprise va perdre accès à certaines informations concernant les fournisseurs, va voir apparaître

des coûts bureaucratiques et va avoir moins de flexibilité en cas de barrières à la sortie élevée.

L’échec de l’externalisation peut être une réalité pour un certains nombre d’entreprises dans

le cas où l’engagement même dans cette voie n’était pas mûrement réfléchie et que l’entreprise à

faire preuve d’un comportement de suiveuse de ses concurrents qui eux externalisaient. La difficulté

de bien définir son cœur de métier est à l’origine également d’externalisations ratées. La

réinternalisation peut alors se poser en moyen de réparer les dégâts causés par une mauvaise

orientation stratégique. Dans un contexte économique difficile, la réinternalisation peut permettre à

certaines entreprises de repartir sur des bases de travail solides et ne pas être dépendantes de

prestataires ou de sous traitants eux mêmes en difficulté financière. Mais au-delà d’une

externalisation ratée, la réinternalisation peut être vue comme une véritable décision stratégique. 91 Fréry F., Law-Kheng F., 2007, « La réinternalisation, chaînon manquant des théories de la firme », Revue française de gestion 2007/8, n°177, p.165

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2. Plus qu’une externalisation ratée, une voie stratégique

En effet, « une vision positive de la réinternalisation consiste à la considérer comme une

réponse aux besoins de dynamique des frontières de la firme »92. L’avantage majeur de cette vision

est qu’elle considère la réinternalisation dans une version dynamique de l’environnement de la

firme. Elle doit permettre à l’entreprise de faire preuve d’agilité en s’adaptant à son contexte et son

environnement économique. En reprenant les théories de la firme, quand l’une des caractéristiques

de la transaction pour laquelle a eu lieu une externalisation change, il faut se reposer la question de

l’efficience de cette même externalisation. Or avec la globalisation, le monde et les conditions de

transactions sont en perpétuelles évolutions. Il faut donc pour les entreprises sans cesse évaluer la

pertinence de leurs décisions stratégiques. Mais dans la plupart des cas, les décisions

d’externalisation semblent irréversibles dans l’esprit des dirigeants. Or des gains d’efficacité et de

productivité peuvent être apportés par la remise en cause des décisions d’outsourcing. De même,

quand l’environnement change, que par exemple le comportement des consommateurs se modifie,

le cœur de métier de l’entreprise peut changer aussi. La voie de la réinternalisation peut donc être

une solution intéressante afin de récupérer des activités pouvant être devenues entre temps des

activités principales de l’entreprise. Cela va être d’autant plus fort dans les secteurs à très forte

pression concurrentielle et sur lesquels les changements concurrentiels sont rapides. C’est ainsi que

l’on peut tout à fait imaginer voir des entreprises réaliser les mêmes activités à la fois en interne et

en externe suivant les situations et les besoins. Les motivations de la réinternalisation vont être « la

recherche d’efficience, de pouvoir, d’autonomie, de croissance, de développement de compétences

ou de meilleure cohérence en termes d’identité »93. Pour des entreprises visant à respecter les

principes de l’ECR, qui plus est dans un contexte économique comme une crise, la recherche de

satisfaction du client peut passer par la réinternalisation qui peut aider les entreprises à récupérer

des activités leur permettant de mieux connaitre les besoins de leurs clients et ainsi mieux répondre

à leurs besoins. Les décisions de réinternalisation peuvent donc jouer un rôle stratégique évident. Le

problème la plupart du temps est que les entreprises pensent, à tort certainement, que la voie de

l’externalisation est la seule amenant à des améliorations de la Supply Chain. Ce comportement

peut être du mimétisme par rapport à ce que font certaines entreprises ayant du succès ou étant

considérés comme des entreprises leaders en SCM. Or l’activité de chaque entreprise est différente

et répond à des besoins propres nécessitant des décisions totalement individualisées. C’est pourquoi

92 Fréry F., Law-Kheng F., 2007, « La réinternalisation, chaînon manquant des théories de la firme », Revue française de gestion 2007/8, n°177, p.166 93 Santos et Einsenhardt, 2005 dans Fréry F., Law-Kheng F., 2007, « La réinternalisation, chaînon manquant des théories de la firme », Revue française de gestion 2007/8, n°177, p.166

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la voie de la réinternalisation doit être au moins étudiée par les entreprises en difficulté ou visant à

modifier leur Supply Chain.

3. Quelques faits

Dans les faits, certaines entreprises ont fait des démarches de reinternalisation de certaines

de leurs activités. Afin de bien illustrer ce phénomène, nous reprendrons ici en partie les exemples

énoncées par Frédéric Fréry et Florence Law-Kheng dans leur article « La réinternalisation, chaînon

manquant des théories de la firme ». Ils prennent les exemples de cinq entreprises de secteurs

différents et avec des motivations de réinternalisation également différentes. Ils prennent d’abord

une entreprise de commerce de détail à distance qui avait décidée d’externaliser son centre d’appels

de prise de commandes afin d’améliorer la rentabilité et le contrôle de l’activité et accroitre sa

flexibilité. L’externalisation a duré deux ans car les coûts étaient trop élevés et les ventes ne

progressaient pas assez. Ce fut donc un retour en arrière. Ensuite, une entreprise de

télécommunications qui externalisait ses ressources humaines et son service comptabilité clients

dans le cadre de la création de l’entreprise. L’élément déclencheur de la réinternalisation fut

l’absorption d’un concurrent et la nécessité d’intégrer des nouveaux services internes à ceux

externalisés. Troisième cas, celui d’une entreprise de distribution de matériels qui a externalisé

pendant six ans une partie de ses systèmes d’information et qui les a repris cela en interne par

volonté de maîriser les processus stratégiques de la firme. Autre cas, celui d’une entreprise de

médias qui elle aussi externalisait pendant dix ans sa gestion de l’information afin de mettre en

place l’informatisation de l’entreprise et qui a réinternalisé cet aspect une fois cette informatisation

faite. Enfin dernier cas, celui d’une entreprise immobilière qui a laissé la gestion de ses systèmes

d’information à un prestataire extérieur afin de réduire les coûts et d’obtenir une meilleure gestion

des compétences. C’est ici un changement de direction qui a amené à une reinternalisation. Dans

tous ces cas, il y a un facteur commun de réinternalisation à savoir le coût de l’externalisation. On

peut souvent penser qu’externaliser va permettre d’alléger ses coûts mais dans beaucoup de cas les

coûts sont très élevés. On en revient à la raison majeure des entreprises à externaliser qui est d’avoir

de meilleures performances même à un prix élevé.

La réinternalisation permet donc de réduire certains coûts liés à l’externalisation, à

reprendre le contrôle de certaines activités et donc permet dans un contexte économique difficile

d’offrir aux entreprises la possibilité d’apporter des modifications internes et de réorganiser certains

secteurs. Dans le contexte actuel, cette réinternalisation va permettre d’avoir une adaptation

temporaire comme le souligne Eric Hémar d’ID Logistic : « On prévoit également sur les six

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prochains mois de réinternaliser temporairement certaines fonctions jusqu'à présent externalisées

telles que le gardiennage, le nettoyage et la maintenance des équipements »94.

II. Développement de la production modulaire

A. La production modulaire comme évolution logique de l’industrie

1. Les « Complex Products Systems »

Après s’être intéressé au développement de l’entreprise étendue afin de répondre aux défis

de la globalisation, il existe une voie proche mais différente : développer la production modulaire.

Ce principe peut s’inscrire dans celui de l’entreprise étendue mais présente de telles spécificités

qu’il faut clairement le différencier. Selon Baldwin et Clark en 2000, « le principe de modularité

consiste à décomposer un produit complexe en un ensemble de modules indépendants, coordonnés

par la mise en place d’interfaces standardisées, qui permettent une gestion autonome des modules

par les multiples acteurs qui interviennent tout au long du processus »95. Ce système de production

a pour avantage majeur de favoriser l’innovation, élément devenu indispensable avec la

globalisation. L’innovation peut être d’abord locale par la standardisation des interfaces permettant

de faciliter le travail pour tous les acteurs et ainsi de se concentrer sur l’activité même. La

modularité implique une multitude d’acteurs très spécialisés. On constate ici deux nouvelles sources

d’innovations : plus le nombre d’acteurs s’accroît, plus la possibilité de voir l’un d’eux innover est

possible ; et la production modulaire implique ce que nous verrons après, la présence d’un

« architecte » qui va être également source d’innovation.

Les CoPS (Complex Product System) sont des systèmes de productions modulaires mais de

types impurs c'est-à-dire dont les conditions de stabilité des interfaces sont faibles et pour lesquelles

les modules sont peu mono fonctionnels. Dans ces cas, l’architecte doit garder des compétences

concernant chaque module. Nous verrons ce cas ultérieurement. La modularité dans les CoPS

conduit à deux niveaux de contraintes. La première concerne la recherche et développement pour

laquelle les données doivent être partagées et donc pour lesquelles l’interdépendance entre les

partenaires doit être forte. La seconde concerne les activités de production pour lesquelles certaines

d’entre elles doivent bénéficier du travail des autres et donc être dépendantes tandis que d’autres

sont autonomes. Ce point sera explicité dans la suite de cette partie.

94 Mouly B., 2009, « Les prestataires logistiques s’expriment face à la crise », Logistiques Magazine, n° 237, Mars 2009 95 Dans Mouchnino N., Sautel O., « Coordination productive et enjeux concurrentiels au sein d’une industrie modulaire : l’exemple d’Airbus », Innovations 2007/1, n°25, p.136

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90

Les CoPs sont intéressants à développer car ce sont les systèmes présents dans les industries

de pointe que sont l’aéronautique et l’automobile et dans lesquels les grandes avancées logistiques

ont eu lieu. Ils sont souvent précurseurs en terme de processus industriels et nous pouvons donc

nous interroger sur l’avenir des CoPS et de la production modulaire dans son ensemble dans ce

contexte.

2. La DIPP, élément indissociable de la globalisation

La production modulaire s’inscrit totalement dans l’une des évolutions industrielles

majeures issues de la globalisation à savoir la Division Internationale du Processus Productif

(DIPP). Lassudrie Duchêne dès le début des années quatre vingt avait présenté ce phénomène qui

n’a fait que s’accroître depuis et qui caractérise l’industrie de la globalisation. Cette dénomination

est en réalité celle donnée depuis longtemps au principe de modularité bien que ce dernier rentre

dans des détails plus complexes et des niveaux plus fins. Lassudrie Duchêne avait montré qu’il

existe un gain à l’échange international spécifique aux segments des processus productifs. Cette

DIPP favorise néanmoins certaines zones bénéficiant de conditions favorables : coûts salariaux

attractifs, maitrise technologique, position géographique favorable, infrastructures de qualité et

potentiel de marché. Cela rejoint ce que nous avons expliqué concernant les politiques mises en

place par les Etats par exemple ou les motifs d’internationalisations des entreprises pour conquérir

de nouveaux marchés.

La DIPP s’applique aujourd’hui à tous les segments de la chaîne de valeur. On assiste

également à une évolution de son fonctionnement. Auparavant, la fragmentation des processus

productifs consistait dans la délocalisation des phases d’assemblage et la réimportation des produits

finis. Or aujourd’hui, « ce sont souvent (…) les activités de fabrication des biens intermédiaires qui

sont délocalisées tandis que les phases d’assemblage sont centralisées dans les pays où se

concentre la demande »96. Ce processus est donc une cause et une conséquence de la globalisation.

Divers éléments comme la baisse des coûts de transport par exemple ont conduit à l’allégement des

contraintes d’interdépendance. Cela a favorisé la diffusion de la DIPP et inciter les entreprises à

répartir leurs unités productives sur une gamme importante de pays afin d’exploiter la diversité de

leurs avantages. On constate néanmoins une agglomération des unités de production vers les

grandes agglomérations des zones développées de la Triade malgré l’émergence de nombreux PVD.

96 Moati P., Mouhoud E., 2005, « Décomposition internationale des processus productifs, polarisations et division cognitive du travail », Revue d’économie politique, Décembre 2005

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91

Des pays comme l’Inde, en se spécialisant dans les NTIC ont néanmoins une place majeure dans la

DIPP.

Ce processus de DIPP est donc un élément majeur de la globalisation et donc renforce l’idée

de développer la production modulaire au sein des entreprises car le processus est déjà en marche

depuis un moment et que c’est son extension et ses mutations qui pourront permettre aux FMN de

faire face aux contraintes de leur environnement.

3. Entre nécessité de proximité et possibilité d’éloignement

L’accentuation de la DIPP par l’utilisation de la production modulaire et de CoPS est un

moyen efficace pour les entreprises d’avoir plus de réactivité et de flexibilité. Mais deux éléments

pouvant être contradictoires vont se faire face au sein de telles structures. En premier lieu, plus

l’architecture est complexe (ce qui tend fortement à être le cas), plus la nécessité de proximité est

forte car malgré l’utilisation massive des NTIC pour permettre l’échange d’informations, les

rencontres physiques semblent demeurer indispensables notamment quand les phases d’évolution

du produit et celles de définition de l’architecture se présentent : « la proximité géographique reste

un instrument nécessaire et il n’est guère possible de fragmenter les phases de conception des

différents modules »97. On constate d’ailleurs que dans le cas d’Airbus par exemple, les systémiers

de l’entreprise sont à proximité géographique dans le bassin toulousain. Dans le même temps,

certaines activités ne nécessitent absolument pas de proximité et ce sont elles qui vont en partie

faire la force d’un système modulaire. La confiance nécessaire dans les gérants de modules

implique de leur laisser une grande latitude dans les activités de recherche et développement. Les

résultats étant propre à chaque module, ces derniers peuvent être très éloignés de la localisation de

l’architecte. Il existe une autre dualité issue de la modularité qui concernant les activités de

production. En effet, certains segments de production nécessitent une proximité géographique

étroite du fait de la coordination nécessaire de certains flux productifs. Ils s’opposent naturellement

aux modules indépendants qui ne vont pas être contraints par l’interdépendance entre certains

modules. Ce sont d’ailleurs les entreprises s’occupant de ces derniers qui vont pouvoir développer

des sites de productions spécialisés et ainsi permettre les économies d’échelle.

Il faut au final bien différencier le principe de CoPS nécessitant comme nous venons de le

voir une certaine proximité géographique, et le principe de modularité pure que nous allons voir et

qui présente des caractéristiques différentes. Le principe de CoPS implique donc une certaine

97 Frigant V., « L’impact de la production modulaire sur l’approfondissement de la DIPP », Revue d’économie politique 2007/6, Volume 117, p.952

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relocalisation des unités de production allant à l’encontre des principes de la globalisation et de la

tendance générale.

B. « Pur architecte », stratégie risquée à adapter mais efficace

1. Le « pur architecte » et ses contraintes

Dans ce contexte de modularité, deux stratégies peuvent prévaloir. La première consiste à

garder en interne certains modules et gérer l’ensemble. Ce cas se retrouve la plupart du temps et il

n’apporte donc pas d’éléments nouveaux dans un contexte de recherche de nouvelles voies

d’optimisation et d’efficience. La deuxième en revanche s’avère intéressante à étudier. Elle consiste

à avoir une stratégie dit de « pur architecte ». Ce rôle peut être défini comme « l’acteur qui fixe

l’architecture-produit et les interfaces correspondantes, et qui assure en dernier lieu l’assemblage

des modules »98. L’architecture-produit est l’élément caractérisant une production modulaire. Ce

sont les « règles explicites définissant la structure produit, et les différents modules reliés entre eux

par des interfaces standardisées »99. L’architecte doit donc avoir la capacité de déterminer les

différentes interfaces et de maîtriser la conception des différents modules. L’architecte doit par

conséquent être présent en amont et en aval de la chaîne. L’objectif de l’architecte est de faciliter la

coordination des tâches et des compétences associées.

L’architecte doit faire face à deux contraintes majeures. La première réside dans l’aspect

technologique du produit final et des différents modules. Il doit être en mesure de saisir la

complexité du produit pour arriver à construire une architecture adaptée. L’architecte doit assurer la

coordination ce qui va permettre le fonctionnement du produit à court terme et son évolution

technologique à long terme. La deuxième est la préservation de la contrainte concurrentielle.

L’importance de la structure organisationnelle doit être prise en compte. La variable stratégique

également. En effet, chaque acteur va se retrouver en concurrence afin de capter le maximum de la

rente apportée par le produit final. Cet aspect couplé à l’aspect technologique va nous permettre de

voir comment un pur architecte peut y faire face.

Une stratégie de « pur architecte » est celle mise en place notamment par Boeing qui

externalise complètement la production de ses modules et celle que semble vouloir suivre Airbus. A

priori il est simple de penser que la seule qualité dont doit faire preuve l’architecte est d’avoir un

savoir faire important en terme d’assemblage sans avoir à se préoccuper de la gestion interne des

98 Mouchnino N., Sautel O., « Coordination productive et enjeux concurrentiels au sein d’une industrie modulaire : l’exemple d’Airbus », Innovations 2007/1, n°25, p.138 99 Mouchnino N., Sautel O., « Coordination productive et enjeux concurrentiels au sein d’une industrie modulaire : l’exemple d’Airbus », Innovations 2007/1, n°25, p.137

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modules. Or la réalité semble différente et il faut pour l’entreprise voulant être « pur architecte »

réussir à résoudre les deux contraintes évoquées auparavant.

2. Un système viable mais à maitriser

La stratégie de « pur architecte » est intéressante si les deux contraintes sont gérées.

Intéressons nous donc à la manière pour les entreprises de les prendre en compte. Il faut d’abord

faire attention à l’aspect technologique. L’architecte va forcément devoir effectuer des efforts en

terme de recherche et développement, en terme de conception du modèle et d’intégration. Cet

aspect n’est possible que par la connaissance des modules. Il faut aussi noter que c’est l’architecte

qui effectue la production de ses modules, donc il doit automatiquement avoir des connaissances

quant à leurs caractéristiques. Néanmoins, le « pur architecte » ne va peut être pas vouloir la

production de ses modules. Il existe alors un moyen, celui employé par Airbus, pour contourner ce

problème. L’entreprise peut dès la phase de conception du produit final associer un certain nombre

d’entreprises qui vont directement intervenir dans le cycle de vie du produit. C’est ainsi que l’on

assiste à l’apparition de « systémiers » (comme vu dans l’étude du cas d’Airbus précédemment).

Pour exemple, le développement de l’avion A380 à réuni plus de six cents ingénieurs. Airbus s’est

donc délesté de toute la partie recherche et développement concernant la production des différents

modules. La première contrainte concernant la capacité de l’architecte à garder les compétences

technologiques du produit est alors résolu en intégrant les partenaires au processus de recherche et

développement. L’avantage concurrentiel du « pur architecte » va alors être sa capacité à

coordonner les savoirs issus de la recherche et développement.

L’autre contrainte en revanche va poser un réel problème au « pur architecte ». La position

concurrentielle va en effet être menacée de manière horizontale et verticale. Le problème principal

est que le fait de se limiter au seul rôle d’architecte rend son rôle beaucoup plus facilement

substituable. Il prend alors le risque que des partenaires essaient de prendre sa place d’architecte.

C’est une concurrence alors horizontale portant sur l’activité finale de l’entreprise. Les barrières à

l’entrée sont alors plus faibles pour une entreprise souhaitant devenir architecte du fait que les

compétences requises sont uniquement celles de coordinateur et que les coûts de production et

d’exploitation sont essentiellement sur les épaules des partenaires et pas de l’architecte.

Généralement, ce sera un partenaire déjà présent dans un module qui pourra être tenté d’acquérir les

compétences de coordinateur afin d’accroître ses compétences. Pour exemple, certains partenaires

japonais de Boeing ont montré leur intention d’entrer sur le marché des petits avions et donc de

devenir un concurrent de Boeing sur ce segment de marché. L’autre type de concurrence est une

concurrence verticale. Cela concerne le partage de la rente entre les fournisseurs. Le « pur

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architecte » a normalement le contrôle sur ce partage. Or la seule fonction de coordination de ce

dernier donne beaucoup d’importance aux partenaires et leur pouvoir de négociation augmente

considérablement. C’est donc le pouvoir du « pur architecte » qui est remis partiellement en cause.

Il y a également une corrélation entre les deux types de concurrence. Plus la concurrence

horizontale est forte, plus la concurrence verticale risque de l’être aussi.

La pression concurrentielle est donc le principal risque pour le « pur architecte ». Afin d’y

faire face, il doit donc mettre en place des stratégies complémentaires.

3. Des stratégies complémentaires indispensables

La première stratégie vise à réduire en priorité la concurrence horizontale. L’entreprise peut

chercher à prendre le contrôle d’un module « critique » en plus de sa place d’architecte. Un module

critique « peut être défini comme un module dont l’importance productive est particulièrement

forte »100. Cette importance peut être mesurée par la complexité technologique ou par sa centralité

dans l’architecture, centralité qui le rend indispensable. Le contrôle de ce module stratégique permet

alors à l’entreprise architecte de récupérer plus de pouvoir. Ainsi la concurrence horizontale va être

limitée du fait de l’impossibilité pour des nouveaux entrants de prendre à la fois la position

d’architecte et de fournisseur du module critique. Cette stratégie va également limiter la

concurrence verticale car les partenaires vont se retrouver dépendants de la centralité du module

critique, laissant donc un pouvoir de négociation très important à l’architecte. C’est la combinaison

des deux rôles qui le permet. L’entreprise ne doit absolument pas laisser sa place d’architecte c’est

toujours lui au final qui est le leader de la production. Un aspect stratégique très intéressant se cache

derrière. L’architecte est celui qui détermine les complémentarités et les interdépendances des

différents modules. S’il veut prendre le contrôle du module critique, il peut d’abord choisir le

module pour lequel il a des compétences et en faire le module critique par sa position d’architecte.

Il se crée alors lui-même sa position de force au sein du système. De même, l’entreprise peut éviter

qu’un module détenu par un partenaire puissant ne soit un module critique. Cette stratégie est la

stratégie employée par Airbus. Au final, cela permet de remettre des barrières à l’entrée pour le rôle

d’architecte et ainsi permet de protéger sa position.

La deuxième stratégie revient à garder des compétences internes sur les différents modules

afin de réduire la position de forces des partenaires qui peuvent se sentir indispensables. Cela peut

passer par des collaborations au sein de cluster (comme le fait Airbus) avec des industriels, des

PME, des universités ou des centres de recherche, et ce afin de d’accroître son avantage

100

Mouchnino N., Sautel O., « Coordination productive et enjeux concurrentiels au sein d’une industrie modulaire : l’exemple d’Airbus », Innovations 2007/1, n°25, p.146

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technologique. La collaboration pour la recherche et développement évoquée précédemment permet

également d’avoir des informations techniques des partenaires. Cette stratégie se base sur le fait que

l’architecte peut mettre une certaine pression sur ses partenaires en laissant penser qu’en cas de

problème, il aurait les capacités pour assurer lui-même certaines modules. On arrive au final à la

situation d’un système modulaire impur dans lequel l’architecte n’assure pas dans son plan de

production une parfaite modularité du fait de ses capacités techniques et de sa volonté de contrôler

ce qui se passe au sein de chaque module. On est alors totalement écarté de la vision de « pur

architecte ». On arrive à la situation d’Airbus, architecte d’une production modulaire renforcée par

la production d’un module critique et le maintien en interne de certaines compétences.

La position de « pur architecte » semble donc être trop risquée pour être appliquée mais des

systèmes s’en inspirant sont au contraire des systèmes d’avenir pour les FMN. La production

modulaire permet de profiter des compétences d’un grand nombre de fournisseurs spécialisés. Mais

il faut concevoir ce genre de systèmes sur une base stratégique en prenant en compte les rapports de

force inhérents à ce genre de structure. Il faut également bien prendre en compte le fait que les

avancées technologiques pourront à l’avenir venir troubler les architectures car l’évolution plausible

est que certaines entreprises vont dans un premier temps venir s’insérer dans une architecture avant,

grâce à ses compétences technologiques, dans un deuxième temps chercher à prendre la place de

l’architecte. Ce type de comportement risque d’atténuer la confiance entre les différents acteurs,

confiance qui est pourtant à la base de ce système. Dans ce contexte, d’autres acteurs peuvent

s’avérer décisifs : ceux ayant traits aux systèmes d’information. Ces derniers sont désormais

indispensables à n’importe quel système productif et apportent de nouvelles solutions aux FMN en

parallèle à un système modulaire.

C. Dans ce contexte, externaliser le non physique

1. Le phénomène offshore

L’une des voies que certaines entreprises connaissent parfois encore mal ou qu’elles

n’exploitent pas au mieux est l’externalisation des activités non physiques de l’entreprise. Apres

avoir fait ce qu’elles devaient faire en matière d’externalisation de leur logistique physique comme

nous l’avons vu, les FMN peuvent pousser l’expérience vers ce qui prend de plus en plus

d’importance dans le SCM, à savoir les systèmes d’information. L’externalisation offshore signifie

« que la firme confie à un ou plusieurs prestataires informatiques étrangers tout ou partie des

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ressources physiques et/ou humaines de sa fonction systèmes d’information »101. Il faut bien

différencier les différents modes de gestion des systèmes d’information, au nombre de quatre. Il y a

en premier lieu la gestion en interne assurée par des salariés de l’entreprise ; ensuite

l’externalisation des systèmes d’information qui signifie que le prestataire se trouve dans le même

pays que l’entreprise cliente ; puis le cas de prestataires qui ont suffisamment de moyens financiers

pour être présent dans les pays dans lesquels se font les externalisations (on peut penser ici à des

entreprises telles que SAP ou IBM employant des milliers de personnes en Inde par exemple) ; et

enfin l’externalisation offshore des systèmes d’information. Il convient de se poser la question des

raisons qui devraient pousser les FMN à faire appel massivement à l’externalisation offshore. Elles

peuvent retirer quatre bénéfices principaux d’une telle démarche. Le premier est la recherche de

flexibilité car la plupart des FMN sont des entreprises américaines ou européennes et la plupart des

prestataires sont asiatiques donc les projets peuvent être développés en continu 24h/24h. Le

deuxième concerne la recherche de qualité car comme pour les externalisations classiques, l’un des

moteurs est de confier l’activité à des entreprises spécialistes. Ensuite, cela permet de pouvoir

accéder à de nouveaux marchés soit par le fait de passer des contrats avec des entreprises locales et

donc faire connaitre son entreprise sur ce marché ou pour les grands prestataires informatiques tels

que SAP, IBM ou Cap Gemini de s’implanter directement sur les marchés porteurs. Enfin le

bénéfice essentiel réside dans la baisse des coûts induits d’une telle organisation.

En effet, trois types de coûts peuvent être baissés lors d’une externalisation offshore. Les

coûts de production évidemment par la recherche de la baisse du coût horaire du personnel

employé. C’est la baisse vu en priorité par les FMN. A titre d’illustration, le coût horaire d’un

ingénieur informatique indien est seize fois mois élevé que celui d’un ingénieur allemand. C’est

pourquoi les prémices de l’externalisation offshore ont été pour les centres d’appel pour lesquels la

majorité des coûts sont des coûts salariaux. Ce n’est pas un hasard pour que la majorité des FMN

aujourd’hui aient délocalisés les centres d’appel. Le deuxième type de coûts concerne les coûts de

transaction. Là encore, c’est un type de coût qui rentre dans les stratégies classiques

d’externalisation et qui vaut également pour les systèmes d’information. Dans ce cadre spécifique, il

y a d’abord les coûts de recherche du prestataire. On constate que désormais le mimétisme est de

mise chez les FMN afin de minimiser les risques d’erreurs. L’exemple de l’Inde et de la ville de

Bangalore est frappante : bien que les coûts salariaux soient de 20% à 30% supérieurs à d’autres

villes indiennes, Bangalore à acquis une réputation qui lui permet d’attirer les FMN étrangères. Il y

aussi dans ces coûts de transaction les coûts de management du prestataire qui vont être plus élevés

pour les systèmes d’information notamment concernant les coûts de télécommunication et de

101 Geyer D., 2007, « L’externalisation offshore du système d’information », Revue française de gestion, n° 177, p.130

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coordination nécessaires. Enfin les troisièmes types de coûts à prendre en compte sont ceux de

transition qui renvoient au passage d’un mode de gestion à un autre. Ce sont les coûts les plus

difficiles à mesurer mais qui peuvent s’ils sont trop élevés compromettre le succès de l’opération.

Evidemment l’externalisation offshore des systèmes d’information comporte également des

risques comme des risques financiers liés au fonctionnement de la loi de l’offre et de la demande

qui peut faire augmenter les coûts salariaux ou les risques de variation de taux de change. Il y a

également des risques techniques qui concernent le périmètre d’externalisation c'est-à-dire les

activités à externaliser. Certaines par nature ne pourront pas l’être comme le dépannage

informatique ou la modélisation de l’architecture interne de l’entreprise. Il existe aussi des risques

comportementaux liés aux différences de culture entre le pays de la société externalisant et le pays

du prestataire. Enfin il faut aussi prendre en compte les risques légaux concernant la stabilité

politique du pays d’accueil, l’environnement juridique et les protections de la propriété

intellectuelle.

Au final si les risques sont bien pris en compte dans la stratégie de l’entreprise, les

bénéfices peuvent vite devenir immenses. Sur son principe, l’externalisation offshore des systèmes

d’informations vient totalement compléter les systèmes en production modulaire et le concept

d’entreprise étendue. L’entreprise mère accentue par ce biais son pilotage stratégique en se

concentrant de plus en plus sur son cœur de métier et donc sur les décisions les plus vitales de son

activité laissant toutes les opérations non indispensables à des prestataires extérieurs bien plus

spécialisés et donc bien plus efficaces dans leurs tâches. Cela renvoi automatiquement au concept

d’ « entreprise virtuelle » que nous verrons plus loin.

2. L’avenir passe par le « Global Delivery Model »

Si on s’intéresse d’un peu plus près aux acteurs de ce type d’externalisation, on se rend

compte que « l’offshore prend aujourd’hui la forme du Global Delivey Model »102. Afin de

comprendre ce concept, intéressons nous à la définition et aux caractéristiques que donnent eux

même les prestataires. Ainsi selon le site internet de Sogeti France, filiale de Cap Gemini, « La

nécessité d’optimiser les coûts, tant de développement que de production, le besoin d’industrialiser

les processes tout en garantissant une qualité optimale des services, font aujourd’hui partie des

attentes majeures des entreprises désirant externaliser la gestion de leurs ressources, qu’il s’agisse

d’architectures ou de projets applicatifs.(…). Les relations étroites que nous entretenons avec nos

clients sont au cœur de nos offres d’externalisation ; nous sommes à même de concevoir et de

102 Delmond M-H., Petit Y., Gautier J-M., 2007, « Management des systèmes d’information », 2e édition, Dunod, Paris, p. 131

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mettre en œuvre des solutions combinant engagement de proximité et utilisation rationnelle de

ressources offshore, en élaborant pour chaque projet des scénarios personnalisés et des stratégies

optimales »103. On se dirige donc vers non plus seulement des solutions ponctuelles

d’externalisation mais vers des solutions globales de maîtrise de l’ensemble des processus liés aux

systèmes d’information. Le parallèle est frappant avec ce qui a déjà débuté dans les voies

d’externalisations classiques avec le rôle grandissant des 4PL. Les prestataires spécialisés en

systèmes d’information proposent désormais des solutions générales aux FMN afin d’optimiser la

gestion et l’utilisation des systèmes d’information. Leur rôle commence même à atteindre un point

encore plus important car on en vient à envisager chez certaines FMN d’externaliser des fonctions

principales comme les activités de développement de produits ou d’ingénierie. Les processus tels

que le « Business Process Outsourcing » (BPO) c'est-à-dire l’externalisation des processus

d’affaires, sont les premières voies de la possible future externalisation de toutes les activités de

l’entreprise. Selon le « Offshore Software Development », « Global Delivery Model is the most

successful outsourcing model amongst all the other models. It’s a combination of onsite model and

offshore model but unlike the onsite/offshore model wherein the offshore development center of

service provider is located at only one place, in the global delivery model the service provider has

its offshore development centers spread out across the entire globe»104.

Le Global Delivery Model s’impose donc pour les FMN comme un modèle permettant

d’utiliser efficacement les possibilités offertes par la globalisation. Dans un contexte économique

difficile, c’est une voie encore plus poussée de la réduction des coûts par une réorganisation des

systèmes d’information. Les entreprises sont désormais conscientes de leur rôle primordial mais il

faut maintenant pouvoir générer des synergies et optimiser leurs utilisations. En ayant des solutions

globales, ce modèle pousse l’externalisation offshore vers des voies nouvelles permettant

d’atteindre de nouvelles possibilités pour les FMN. Nous avons vu que les innovations et le progrès

technique sont de plus en plus fréquents et l’enjeu pour les FMN est non seulement d’en tirer

bénéfice afin de prendre un avantage concurrentiel mais surtout de ne pas prendre le risque de

passer à coté, ce qui accentuerait les difficultés induites de l’environnement concurrentiel.

103 http://www.fr.sogeti.com/FR/delivery/index.aspx consultée le 09/04/09 104 http://offshore-softwaredevelopment.com/global-delivery-model.asp consultée le 09/04/09

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3. Utiliser au mieux les SSII

Afin de conclure cette partie, il faut s’intéresser aux acteurs de ce phénomène : les

entreprises dites « SSII » et les Etats. Si nous commençons par les Etats, nous nous rendons compte

que c’est par des politiques attractives en matière de coûts salariaux et de politiques fiscales qu’ils

cherchent à attirer les entreprises sur leur territoire. De plus, dans le secteur spécifique des systèmes

d’information, ce sont les talents d’ingénieurs et d’informaticiens qui sont recherchés par les FMN.

De nombreux Etats asiatiques l’ont bien compris et sont spécialisés depuis longtemps dans les

nouvelles technologies. Ces dernières sont devenues culturelles dans certains pays comme la Corée

du Sud dans lequel plus de 90% de la population est utilisatrice d’internet ce qui en fait le pays le

plus connecté au monde. Le pays le plus représentatif de cette spécialisation dans les NTIC est

certainement l’Inde. La majorité de l’externalisation offshore des systèmes d’information se fait

dans ce pays qui à développé des compétences excellentes et reconnues mondialement. Airbus par

exemple envisage d’aller profiter des compétences des ingénieurs indiens pour la conception de ses

futurs avions. Ceci est le fruit de l’investissement du pays dans de prestigieuses universités

spécialisées comme l’IIT (Indian Institute of Technology) ou l’IIM (Indian Institute of

Management). De nombreuses entreprises spécialisées dans les systèmes d’information se sont

développées comme par exemple la société Genpact qui comptait en 2007 26 000 employés, offrait

des services en 28 langues, 24h/24 et 7j/7, ou encore le leader indien des services informatiques,

Tata Consultancy Services qui a vu son chiffre d’affaires augmenter de 140% en 2007. Les leaders

mondiaux possèdent également leurs propres entités en Inde comme IBM qui emploie 52 000

personnes. Ces entreprises sont appelées des « SSII » c'est-à-dire des « sociétés de services en

ingénierie informatique ». En étudiant rapidement le marché sur lequel ces entreprises évoluent, il

représentait en 2005 12 milliards de dollars. Les principaux clients étaient américains (80%) et

européens (surtout anglais). Les prestataires étaient, eux, essentiellement asiatiques.

Dans le contexte de crise économique actuelle, les SSII font partie des seules entreprises

faiblement impactées du fait de leur extraordinaire potentiel de développement. Leur

développement est tel que dans le monde de la logistique, ces entreprises appliquent des grilles de

salaires bien supérieures à celles des entreprises industrielles. Le fait que certaines d’entre elles font

désormais partie des entreprises les plus importantes du monde contribue à stimuler leur activité et

leur offre de nouveaux services. Elles ont parfaitement compris les enjeux induits de la globalisation

et la nécessité pour les FMN d’avoir des solutions globales. Leur secteur d’activité procure de plus

aux entreprises des possibilités d’optimisation de leur Supply Chain devenu vital pour faire face à

l’environnement économique difficile. Leur importance ne va certainement faire que croître dans les

années à venir et conclure des partenariats avec ce type de firmes et les inclure dans leur business

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model permettra sans doute aux FMN de s’adapter aux perpétuelles évolutions de leur

environnement.

III. Quel avenir pour la Supply Chain ?

A. Autour de l’entreprise « virtuelle »

1. Des Supply Chain éphémères

L’entreprise virtuelle se présente comme le développement naturel des évolutions

logistiques et industriel des entreprises et plus spécialement des FMN. Nous pouvons présenter

l’entreprise virtuelle comme « une forme organisationnelle originale regroupant plusieurs

partenaires dont l’objectif est de permettre la mise en œuvre d’effets de synergies ou le

développement de capacités/potentiels supplémentaires »105. Ce concept reprend donc ceux évoqués

au long de ce travail à savoir l’entreprise étendue et la production modulaire. Néanmoins,

l’utilisation de ce terme est plus fort et apporte une vision plus conceptuelle de ce que sera la

Supply Chain du futur. L’idée principale de l’entreprise virtuelle repose sur l’inspiration que l’angle

d’approche de la logistique sera plus une logistique basée sur la coordination des activités que sur

les équipements et les diverses ressources de l’entreprise. La logistique se focalise désormais sur le

pilotage des flux et la gestion de la chaîne de valeur. Il faudra désormais la logistique et le SCM

comme le véritable acteur stratégique des FMN : « l’idée-clé que le management logistique et

stratégique a progressivement élargi son champ d’intervention en passant d’une vision intra-

organisationnelle à une vision inter-organisationnelle »106. Les entreprises fonctionnant autour de la

chaîne de valeur étant reliées entre elles de manière presque automatique, c’est la gestion de leur

fonctionnement parallèle et coordonnée qui fera la réussite des projets. Cette idée de projets et

d’ailleurs l’élément principal à prendre en compte. Selon certains auteurs, les Supply Chain sont et

seront de plus en plus éphémères c'est-à-dire qu’elles changeront avec chaque nouveau projet. Il est

très logique de raisonner ainsi : pour un projet donné, l’entreprise pivot (généralement la plus

importante ayant un rayonnement mondial ou national) cherche les meilleurs partenaires possibles

pour effectuer des opérations bien précises. Le projet changeant, les opérations à mener changent

aussi et donc les partenaires sur toute la longueur de la Supply Chain changent aussi. Les entreprise

virtuelles « correspondent de plus en plus systématiquement à des sortes de « réseaux organiques »

mobilisant des supply chains fondées sur des arrangements de nature temporaire »107 montrant

105 Paché G., 2005, « Logistique et entreprise virtuelle », Revue française de gestion 2005/3, n°156, p.132 106 Paché G., 2005, « Logistique et entreprise virtuelle », Revue française de gestion 2005/3, n°156, p.133 107

Paché G., 2005, « Logistique et entreprise virtuelle », Revue française de gestion 2005/3, n°156, p.133

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ainsi bien que l’avenir de la Supply Chain repose sur des partenariats ponctuels et basés sur la

recherche du couple coûts/qualité. Dans ce contexte, la principale contrainte repose sur les coûts

que risquent d’engendrer ce genre de processus. En effet, assembler et désassembler des Supply

Chain pour chaque projet contraint les FMN à dépenser beaucoup de ressources de tout types afin

d’y parvenir efficacement. C’est pourquoi dès maintenant les entreprises cherchent des partenaires

d’envergure avec lesquels passer des contrats afin de pouvoir les utiliser sur plusieurs projets tout en

s’assurant des qualités de prestation connues. C’est également pourquoi on devrait assister à une

concentration des grands prestataires logistiques par exemple, qui vont par l’effet d’accumulation et

d’expérience prendre sur tous les domaines et toutes les régions du monde des avantages

irrattrapables par des concurrents de moindre envergure. Kuehne+Nagel par exemple par son

contrat avec Airbus peut s’implanter dans le sud ouest de la France, endroit ou il n’était jusqu'à

alors pas présent. La constitution et le management des compétences des futurs réseaux

d’entreprises seront les facteurs clés de succès des FMN. Cela ne fera qu’accentuer le rôle

déterminant du SCM.

2. Les PSL comme futurs pilotes

Dans ce contexte, comme évoqué, les prestataires logistiques vont avoir sans aucun doute

un rôle prépondérant à jouer. Ce seront les acteurs majeurs des stratégies logistiques et de ces

Supply Chain éphémères. L’enjeu majeur de ces dernières sera de pouvoir maîtriser et coordonner

les flux de manière simultanée. Il semble que naturellement ce rôle incombe aux entreprises à

l’origine du projet à mener. Or cette maîtrise demande du savoir faire et des compétences

particulières. L’existence de prestataires spécialisés dans ce domaine peut apporter cette expertise

que les FMN ne possèdent pas forcément. Le développement actuel des prestataires logistiques de

types 3PL ou 4PL tend à laisser penser que leur rôle va s’accroître voir devenir plus spécifique.

L’avenir de ces entreprises passera certainement par l’abandon d’une partie opérationnelle pour une

partie beaucoup plus stratégique. Leurs attributions pourraient devenir celles de pilotes de la chaîne

logistique et des diverses activités de la chaîne de valeur. L’aspect pilote pur est de plus en plus

évoqué dans la presse spécialisée et dans les articles académiques du fait des possibilités offertes

par un tel acteur : réactivité, vision globale de la Supply Chain, création de synergies et optimisation

des coûts et des processus. Aujourd’hui ce genre d’entreprises est appelée 4PL. On évoque

également le terme de 7PL ou LLP (Lead Logistic Provider). Ce sont les entreprises qui font à la

fois des opérations logistiques physiques et opérationnelles mais aussi la fonction de pilotage. C’est

ce genre d’entreprises qui risquent de devenir la règle dans l’univers de l’entreprise.

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102

Cette fonction de pilotage va de paire avec les attentes des FMN. Dans un contexte de plus

en plus concurrentiel, les prestations des 3PL et 4PL sont aujourd’hui reconnues et les FMN sont

demandeuses de ce genre de services. Car il s’agit en réalité pour les 4PL d’une véritable prestation

de services pour les entreprises. Leur fonction est, et se développera, sur des aspects purement

stratégiques et donc intellectuels. Le problème qui se posera alors est le suivant : jusqu'à quel point

accorder sa confiance au prestataire. La perte de contrôle de la part de l’entreprise peut devenir

importante en cas de gestion totale par un PSL (Prestataire de Services Logistiques) de la Supply

Chain. Des prestataires comme Kuehne+Nagel, DHL, Geodis ou encore Norbert Dantressangle

seront à même de maitriser les techniques et technologies pour gérer l’ensemble des flux

d’entreprises venant d’horizons très divers et donc capables de maitriser un certain nombre de

connaissances leur permettant d’avoir un poids dans les négociations très élevé. Aujourd’hui les

FMN gardent une position avantageuse dans ce rapport de force mais ce rapport pourrait changer,

faisant des prestataires logistiques des acteurs devenant complètement indispensables et pouvant

imposer leurs conditions. Nous pourrions nous retrouver avec des intégrateurs ayant un rôle de

passage obligé pour toutes les entreprises et pouvant imposer leurs conditions à l’image du rapport

de force entre les industriels et la grande distribution, cette dernière étant en position de force car

étant le lien indispensable entre l’industriel et le client. En somme, donner trop de pouvoir et

d’importances aux prestataires peut leur donner une importance trop importante à terme pour

certaines FMN.

3. De la confiance et du contrôle

Reste à aborder le sujet de la confiance et du contrôle entre les FMN et leurs partenaires au

sein de l’entreprise virtuelle. Externaliser massivement des fonctions importantes pour l’entreprise

implique obligatoirement qu’il faut accorder une certaine confiance au partenaire. Le fait qu’une

telle implication nécessite également de lui laisser des libertés en terme d’innovation notamment

accroit la dose de confiance à accorder. Dans le même temps, il semble impensable de ne pas garder

un œil sur les activités du partenaire du fait qu’il effectue ses opérations pour le compte de

l’entreprise. Deux visions s’opposent alors. D’un coté le fait que confiance et contrôle ne sont pas

compatibles et de l’autre qu’ils sont complémentaires.

Pour aller dans le sens de l’antagonisme des deux termes, certains auteurs pensent qu’il n’y

a de confiance que pour ce qui ne peut être mis sous contrôle. Ainsi, « les partisans de la thèse de

l’antagonisme entre confiance et contrôle considèrent ainsi que ce sont les intentions et les

dispositions du partenaire qui incitent à lui faire confiance, et non pas les contraintes auxquelles il

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peut éventuellement être soumis »108. Dans le même état d’esprit, on peut penser que confiance et

contrôle sont substituables, que quand l’un diminue, l’autre augmente. Cette vision a le mérite de

poser clairement la question du positionnement de la FMN envers son fournisseur. Néanmoins, on

ne peut pas exclure l’un ou l’autre de l’équation. Il n’existe ni confiance parfaite, ni contrôle total.

Dans le positionnement inverse, d’autres auteurs voient une complémentarité évidente entre les

deux termes. Das et Teng voient ces deux termes sous deux aspects : « trust » et « confidence ».

Cette analyse s’avère primordiale, car pertinente, pour comprendre ce que seront les relations dans

le futur entre les partenaires au sein de la Supply Chain. Ces termes « renvoie à la confiance définie

comme croyance que le partenaire est animé par des motivations positives à notre égard [pour le

« trust »]. La seconde notion, plus large, correspond à la certitude que le partenaire coopérera de

manière satisfaisante»109. La confiance et le contrôle vont par conséquent être présents mais sur des

aspects différents, ce qui va les rendre de ce fait complémentaires. La confiance est relative à des

éléments intangibles, basée sur les motivations du partenaire à accomplir sa mission de manière

optimale et s’adapter par exemple en cas de modifications de l’environnement afin de remplir ses

obligations. Le contrôle lui se base sur des éléments clairs comme l’obligation de résultat par

exemple. Il semble évident que les deux aspects vont de paire et que la complexité pour l’entreprise

va être de déterminer la modulation entre les deux. Donner trop de confiance ou instaurer trop de

contrôle peuvent rapidement déstabiliser la relation et donc la Supply Chain toute entière.

C’est donc sur cet aspect spécifique que l’avenir de la Supply Chain peut aussi évoluer.

L’augmentation des partenariats semblent de prime abord imposer plus de confiance entre les

différents partenaires. Néanmoins il faut garder une certaine dose de contrôle pour s’assurer que les

objectifs suivis par les partenaires sont communs avec ceux de l’entreprise. Ces aspects ont trait aux

relations humaines notamment entre les partenaires. Cet aspect de doit pas être négligé dans le

développement de l’entreprise virtuelle car il ne faut pas oublier que ce sont des être humains qui

font la réussite ou non des stratégies industrielles.

108 Fenneteau H., Naro G., 2005, « Contrôle et confiance dans l’entreprise virtuelle. Illustrations logistiques. », Revue française de gestion 2005/3, n°156, p.205 109

Fenneteau H., Naro G., 2005, « Contrôle et confiance dans l’entreprise virtuelle. Illustrations logistiques. », Revue française de gestion 2005/3, n°156, p.207

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104

B. Développer encore l’utilisation des technologies et de l’innovation

1. Places de marché, e-sourcing, e-procurement

Etudions maintenant quelques outils et processus directement issues du développement des

NTIC et permettant aux entreprises de profiter de ces avancées technologiques sur des aspects

concrets de leurs Supply Chains. Précédemment nous avons vu au travers de la conception du

Falcon 7X de Dassault que les outils informatiques permettent aux entreprises de faire des gains de

temps importants par la conception virtuelle de leurs produits. Ce principe de réunion de tous les

partenaires de la Supply Chain au sein d’un même plateau virtuel va rendre indispensable à toutes

les entreprises l’utilisation de tels procédés du fait de l’avantage concurrentiel certain que cela

procure.

Au delà, il existe une partie de la Supply Chain pour laquelle les NTIC se sont développées

ces dernières années et vont jouer un rôle essentiel à l’avenir, d’autant plus dans des situations de

contexte économique difficile. En effet dans le secteur des achats, les places de marché, l’e-sourcing

et l’e-procurement font désormais partie du paysage. Commençons par voir le rôle des places de

marché car élément le plus ancien et désormais bien connu des FMN. Une place de marché est

« une plate-forme d’échange virtuelle, matérialisée par un site internet, permettant à plusieurs

acheteurs et vendeurs de se rencontrer, de négocier et de conclure des transactions commerciales.

Avec un objectif : réaliser des économies en partageant les coûts informatiques, en accédant à une

communauté de fournisseurs et en massifiant certains achats »110. Ce système connu un énorme

succès à ses débuts au début des années 2000. On en comptait alors des milliers contre seulement

des dizaines aujourd’hui. Le problème est surtout venu du manque de confiance entre les acteurs

venant sur ces lieux. Souvent créées par les acteurs de la grande distribution ou de l’automobile, les

fournisseurs ont vite vu ces places de marché comme un nouveau moyen pour leurs créateurs de

mettre encore un peu plus la pression sur les fournisseurs dans le but de faire baisser les prix. De

plus l’apparition de pratiques malhonnêtes comme des fausses enchères ou des ententes par exemple

ont vite découragé beaucoup de fournisseurs faisant ainsi disparaitre bon nombre de places de

marché.

En parallèle s’est développé l’e-sourcing et l’e-procurement. L’e-sourcing « a pour but

d'optimiser l'amont de l'achat en standardisant et automatisant le plus possible la recherche, la

sélection et la négociation avec les fournisseurs »111. L’e-sourcing et dans sa vision plus large d’e-

achat est vu dans les services achats comme un véritable outil non seulement de compétitivité mais

surtout de rationalisation des processus d’achats. Ce système permet d’avoir des gains de

110 Parisot T., 2009, « L’édifice se fissure », La lettre des achats, n°171, avril 2009, p.43 111 http://www.dicodunet.com/definitions/e-commerce/e-sourcing.htm, consultée le 17/04/09

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105

productivité par la réduction du temps de traitement des dossiers. Mais il sert surtout à améliorer la

qualité du sourcing. Ainsi les motivations pour les entreprises d’adopter du e-sourcing « sont à 68%

de rationaliser le processus de sourcing, à 45% de réduire les coûts, à 30% d’étendre la couverture

des achats, à 28% de gagner en visibilité sur les actions de sourcing, à 27% de centraliser les

processus et à 27% également d’améliorer la gestion des fournisseurs et la collaboration »112. Pour

finir, il faut distinguer l’e-sourcing de l’e-procurement. L’e-procurement est « un échange B2B,

c'est-à-dire une transaction entre deux entreprises, permettant à un acheteur de consulter le

catalogue de produit d'un vendeur en ligne et de passer directement commande selon un workflow

d'achat bien défini »113. Les deux termes sont en réalité complémentaires. L’e-procurement va être

beaucoup plus lourd à mettre en place car il nécessite des investissements techniques importants

ainsi qu’une maintenance lourde et il s’adresse donc en priorité aux entreprises ayant un catalogue

important justifiant la mise en place d’un tel système. L’e-sourcing est lui plus léger et se base

uniquement sur la mise en place de procédures automatiques permettant de faciliter le processus

d’achat.

Ce genre de processus automatisés facilitent le fonctionnement de la Supply Chain et les

exemples tels que ceux présentés tendent à laisser penser que leur utilisation va s’accroître dans les

prochaines années. Néanmoins l’enjeu pour les entreprises sera de déterminer quels procédés

utiliser car une utilisation superflue peut vite alourdir le système entier et rendre la Supply Chain

trop lourde et ainsi réduire les effets positifs de la technologie.

2. Focus sur la RFID

Parmi les technologies en devenir, il en existe une particulièrement intéressante car porteuse

de nombreuses avancées en terme de logistique et de satisfaction client. C’est la technologie RFID.

Ce terme signifie « Radio Frequency Identity » et est « l’appellation usuelle, (…), d’une étiquette

électronique permettant d’identifier un lot de biens ou directement le bien lui-même par captation

et interprétation des ondes radio »114.Cette technologie est composée de marqueurs miniaturisés

appelés « tags » composés d’une antenne et d’une puce électronique et d’un lecteur, c'est-à-dire un

dispositif d’émission et réception qui déclenche les marqueurs à distance. La RFID permet une

traçabilité plus sûre et plus précise en terme de localisation et de contenu d’information.

112 Chanourdie S., 2008, « Un outil métier de plus en plus complet », La lettre des achats, n°158, Février 2008, p.38 113 http://www.commentcamarche.net/contents/entreprise/e-procurement.php3, consultée le 17/04/09 114 Lehu J-M, 2004, « L’encyclopédie du marketing », Editions d’Organisations, Paris, p.701

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106

L’utilisation de la RFID peut être multiple : accès aux transports publics, remplacement des

codes barres dans les supermarchés, postes de péages automatiques sur les autoroutes, accès sans

formalité aux bibliothèques ou encore du coté purement industriel, suivi de l’acheminement des

marchandises. Ce dernier point est d’ailleurs l’un des aspects les plus intéressants de cette

technologie. Comme l’observe Hau Lee, professeur et directeur de formations à Stanford et

spécialiste de la Supply Chain, « la RFID peut créer une Supply Chain sans frontière lorsque les

cargos sont équipés avec des étiquettes indiquant les contenus, afin que le passage en douane

puisse se faire presque automatiquement. La RFID peut également permettre de sécuriser la Supply

Chain lorsque les étiquettes son utilisées pour sceller électroniquement les containers et contrôler

les mouvements de ces containers, afin que toute altération/falsification puisse être suivie »115.

Outre l’apport technologique indéniable, la RFID soulève néanmoins de nombreux points

d’interrogation pour les entreprises. Le premier concerne son coût. En effet cette technologie

s’avère chère. Les étiquettes « haute fréquence » (les plus performantes en terme de tolérance aux

obstacles) coûtent cinquante centimes l’unité par exemple. Au delà du prix, le manque de

standardisation est également préjudiciable à une généralisation de ce type de procédé. Le

deuxième point d’interrogation concerne le respect des libertés individuelles car la RFID permet de

tracer les produits et donc les suivre une fois que ces derniers sont en possession du client. En

France, la CNIL (Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés) classe les étiquettes

RFID comme des données personnelles au sens de la loi « Informatique et Libertés »116.

Au final, la RFID s’avère comme une technologie très innovante et porteuse de nombreux

espoirs de progrès techniques. Les prochaine années seront décisives quant à sa généralisation du

fait du risque que ce procédé soit considéré comme trop dangereux par l’opinion publique ce qui

limiterait sont utilisation aux processus industriels. Certaines entreprises ont déjà commencé à

généraliser son utilisation comme DHL Exel Supply Chain par exemple. D’autres ne tarderont pas à

suivre si son utilisation s’avère rentable.

115 Dans Lehu J-M, 2004, « L’encyclopédie du marketing », Editions d’Organisations, Paris, p.701 116 http://www.rfidfr.org/presentation-rfid.php consultée le 20/04/09

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3. Vers une logistique propre ?

Nous avons vu au long de ce dossier que l’aspect environnemental rentre de plus en plus en

compte dans les stratégies industrielles et par conséquent à tous les échelons de la Supply Chain.

Des achats à la distribution, des efforts sont faits dans certaines FMN pour être le plus éthique

possible dans ce domaine. Divers études sont menées actuellement sur l’impact de la prise en

compte du développement durable sur les stratégies des entreprises. Elles montrent notamment que

les entreprises qui ont été proactives dans ce domaine ont un avantage concurrentiel et ont de

bonnes chances de garder cet avantage, même lorsque toutes les entreprises auront pris en compte

les aspects écologiques.

C’est en effet un processus complexe nécessitant de changer de nombreux processus parfois

présents depuis de très nombreuses années. Afin de réaliser une Supply Chain respectueuse de

l’environnement, les entreprises se doivent de passer par plusieurs étapes indispensables. En

premier lieu, une phase d’évaluation de la situation pour dégager les activités à améliorer. Ensuite

de nombreux points peuvent être impactés. Que ce soit l’approvisionnement en matériaux non ou

faiblement polluants, l’utilisation de techniques de production propres en ayant recours aux justes

quantités de matières pour rationaliser la production ou encore la construction d’infrastructures de

type « éco-conception immobilière », toutes les activités de l’entreprise peuvent potentiellement être

optimisées écologiquement. On peut également pensé aux problématiques de l’emballage et du

packaging en essayant de réduire leur nombre et leur conception. Ensuite évidemment le point sur

lequel l’opinion publique est la plus alertée concerne le transport. La logistique étant impactée par

le transport de manière forte du fait des coûts que celui-ci engendre rend le sujet du transport délicat

à traiter pour les entreprises. Le transport routier étant le mode le plus utilisé car indispensable,

diverses voies parallèles sont, petit à petit, mises en place comme le transport multimodal par

exemple, permettant sur de longs trajets d’utiliser le transport ferroviaire, moins polluant. Les

fluctuations des cours du pétrole vont dans ce sens car ils mettent en difficulté certaines entreprises

quand les cours sont au plus haut. Le point fondamental à développer dans le cadre du transport

n’est certainement pas de supprimer le transport routier mais plutôt de chercher à ce qu’il pollue

moins. De nouvelles technologies apparaissent afin de réduire cette pollution comme les

technologies de Michelin sur les pneumatiques, de PSA sur les filtres à particules et les systèmes de

« Stop & Start » par exemple. Des systèmes de récupération d’énergie sont mis au point par les

grands constructeurs automobiles (système KERS par exemple) afin de faire du transport routier un

transport plus propre. Au-delà de ces aspects, l’éco conception à également pour but d’accroître la

durée de vie des produits. C’est donc dans une démarche allant plus loin que les seuls aspects de

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gestion de la Supply Chain que les entreprises doivent agir. La fin de vie du produit doit également

être prise en compte en faisant en sorte que les produits puissent être traçables et recyclables.

De nombreux aspects peuvent donc permettre aux entreprises de faire un pas important vers

les problématiques écologiques. Mais si elles s’y engagent c’est surtout car elles cherchent à en tirer

profit. C’est pourquoi de larges campagnes de communication sont effectuées afin de mettre en

avant les produits écologiques. L’impact du marketing est donc fort mais ce n’est pas forcément une

mauvaise chose. Même si la mode du développement durable est utilisée pour vendre plus, si de

véritables efforts sont faits pour rendre effectivement les produits et leurs modes de fabrication plus

propres, tout le monde est sensé s’y retrouver. Au point de vue purement logistique, la

problématique du transport reste la plus importante. Le fait que le transport routier n’ait

actuellement trouvé aucune alternative crédible renforce le fait que les entreprises doivent explorer

de nouvelles pistes pour efficacement réduire leur pollution. Le premier enjeu pour elles se trouve

ici.

C. Placer la Supply Chain dans l’amélioration globale de la chaîne de valeur

1. Des évolutions externes inéluctables

En nous plaçant dans un horizon plus lointain et de véritable prospective, intéressons nous à

un rapport publié fin 2006, « 2016 : The Future Value Chain ». Cette étude menée par Cap Gemini

et Intel apporte des voies d’exploration dans la compréhension de notre environnement et dans les

évolutions vers lesquelles vont tendre les chaînes de valeur et donc les Supply Chain.

Un certain nombre de paramètres externes vont influer sur la chaîne de valeur. Ces

paramètres sont des conséquences directes de la globalisation. Ils concernent notamment le

consommateur et son comportement, les méthodes de production, le rôle des systèmes

d’information et l’enjeu du développement durable. Ainsi le fait que le consommateur soit devenu

un « smart shopper » rend indispensable de nouvelles méthodes de vente afin de pouvoir l’attirer et

le fidéliser. Cela nécessite donc un renouvellement marketing de la part des entreprises et de

nouvelles idées afin de satisfaire ce client friand également d’innovations. Toujours dans ce souci

de prendre en compte les attentes du client en priorité, la production doit pouvoir s’adapter en étant

la plus agile et réactive possible. Les idées de minimisation des stocks, de production localisée et de

réduction des cycles de développement sont désormais des passages obligés pour chaque FMN. Du

point de vue interne à l’entreprise, la visibilité en temps réel de toutes les activités de l’entreprise,

les plates formes d’information interne et externe ainsi que la standardisation et l’harmonisation au

niveau mondial des processus sont autant de points devant obligatoirement être intégrés. Les

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éléments tels que les fluctuations du marché de l’énergie et des coûts de carburants, les impacts

environnementaux, et la gestion des toutes les questions relatives au développement durable

s’imposent aussi dans les stratégies d’entreprise et vont avoir des répercussions sur toute la chaîne

de valeur. Enfin du point de vue managérial, la globalisation a pour effet de rapprocher les pays et

des personnes qui n’auraient jamais eu l’occasion de travailler ensemble. La prise en compte des

cultures de chacun est un défi évident mais devant impérativement être efficacement réalisé afin de

profiter des possibilités offertes par les pays en voie de développement entrant peu à peu dans les

mêmes considérations que les pays développés.

2. Les voies de développement de la chaîne de valeur et les impacts Supply Chain

Afin de pouvoir faire face à cet environnement, les entreprises peuvent agir sur quelques

points clés directement relatifs aux contraintes externes évoqués précédemment. Ces points sont la

relation clients, le partage d’information, la synchronisation de la production, la logistique aval, les

aspects environnementaux et la culture d’entreprise117. En s’intéressant à chaque point, nous allons

nous rendre compte à quel point la Supply Chain risque d’être différentes d’ici dix ans.

En commençant par la relation client, le premier effet sera que les produits devront être de

plus en plus rapidement sur leurs marchés afin de satisfaire au plus vite les clients avant que ne

changent leurs besoins. Ce sont d’ailleurs eux qui vont devenir les moteurs de l’innovation. Le

marketing de l’offre va tendre à disparaître totalement au profit du marketing de la demande. Le

client va de plus en plus sentir que l’entreprise cherche à communiquer avec lui pour en savoir

toujours plus afin de mieux le satisfaire. De nouveaux outils marketing seront certainement mis en

place. Nous pouvons peut être nous attendre à un renversement de l’opinion concernant la vision

qu’elle a du marketing direct. Il est possible que ce soit les consommateurs qui donnent de plein gré

des informations les concernant car ils auront compris leur intérêt et se préoccuperont moins de

celui des entreprises. Le marketing aujourd’hui souvent vu comme une activité qui tend à

« manipuler » les consommateurs verra peut être cette image changer. C’est en tout cas l’un des

enjeux de la Supply Chain dans les années à venir. En s’intéressant maintenant au partage de

l’information, son développement va pousser les logiques collaboratives présentées dans le cadre de

l’entreprise étendue à s’accroître. De nouveaux types de relations virtuelles risquent de voir le jour.

L’échange instantané de données deviendra certainement la norme au sein de l’ensemble la Supply

Chain. La gestion des stocks sera considérablement optimisée par la visibilité en temps réel faisant

117 « 2016, The Future Value Chain », 2006, GCI, Cap Gemini, Intel

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encore largement défaut dans la plupart des entreprises. Cela sera favorisé par les technologies

présentées auparavant, notamment la RFID. Cette utilisation de l’information sera utile pour mieux

connaitre les clients en ayant des retours sur leur satisfaction après achat et permettra de se

rapprocher d’un véritable marketing « one-to-one ».

D’un point de vue purement logistique, l’avenir est clairement à l’augmentation de la

différenciation retardée et à une meilleure régulation des normes, labels et packaging. La production

en juste à temps a des chances de devenir le modèle presque unique, même dans des secteurs dans

lesquels les stocks restent indispensables (comme le marché du jouet par exemple). Ainsi la

fréquence des livraisons dans la plupart des secteurs risque de devenir quasi quotidienne voir multi

quotidienne. La GMA est vouée à devenir un modèle de base afin à la fois d’optimiser le transport

et de répondre aux contraintes écologiques. Tous cela toujours dans la recherche de satisfaction

client en produisant des biens de plus en plus individualisés et de moins en moins long à arriver sur

le marché. Les contraintes pesant sur la qualité permettront également aux consommateurs de

bénéficier de produits correspondant à leurs besoins, rapidement et sans défaut de qualité. Dans cet

esprit de qualité et associé aux aspects écologiques, la logistique aval risque de subir de nombreux

changements. En premier lieu au niveau du packaging, des standards quant à la taille et la

composition risquent d’être mis en place, influant directement sur la logistique. Ensuite les centres

de distribution risquent d’être plus nombreux afin de se rapprocher des consommateurs et permettre

ainsi de livrer de manière optimale en fonction des besoins réels. La GMA rentrera donc dans ce

contexte de manière poussée. Une plus grande coopération et collaboration entre les industriels

permettra, si elle est efficacement mise en place, de livrer à domicile les clients et de manière

consolidée c'est-à-dire qu’ils pourront recevoir par exemple dans la même livraison leurs courses de

la semaine, le nouvel équipement hi tech et une nouvelle paire de chaussures, chaque produit

provenant d’un industriel différent. On peut même imaginer des concurrents effectuant des

livraisons en commun. Comme évoqué pour chaque point, l’aspect écologique a de fortes chances

de devenir un sujet incontournable pour n’importe quelle entreprise. Cela se retrouvera donc dans

les packagings, dans les cycles de production, dans l’approvisionnement qui se devra d’être

écologique, dans des modes de transport alternatifs (on peut penser au développement du transport

multimodal mais surtout dans des modes de remplacement au camion totalement indispensable

aujourd’hui) ou encore dans les stratégies marketing et de vente qui seront certainement tournée

vers la mise en avant des qualités écologiques des produits comme ce qui commence à se faire

aujourd’hui. Enfin le dernier point clé concerne la culture d’entreprise. Les modes de pensée se

devront d’être dans une vision de partage et de collaboration. L’entreprise étendue sera devenue la

norme et les relations en son sein seront de natures totalement collaboratives. Le défi réside dans la

prochaine étape de ce concept d’entreprise étendue, c'est-à-dire faire rentrer le consommateur dans

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le modèle en instaurant une relation de confiance avec lui. Ce dernier point rejoint ceux évoqués

précédemment mettant l’accent sur le rôle que jouera le consommateur dans l’avenir.

La Supply Chain sera certainement marquée par deux variables fondamentales à prendre en

compte dans chaque entreprise. Deux variables allant au-delà d’aspects éventuellement stratégiques

car indispensables : faire sentir le consommateur comme faisant partie entière du fonctionnement de

l’entreprise et prendre en compte l’aspect écologique et les problématiques liées au développement

durable.

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Conclusion

Le choix de ce sujet et son champ d’investigation paraît de prime abord comme très large.

En effet chacun des termes et des concepts employés dans ce mémoire aurait pu faire l’objet d’un

mémoire en eux-mêmes. Que ce soit la mondialisation, terme employé dans tous les contextes et

faisant l’objet de nombreuses controverses ; les stratégies internationales des FMN dont la

littérature regorge d’ouvrages ; la Supply Chain et le Supply Chain Management, disciplines en

plein essor et dont tous les ressorts ne sont pas connus ; ou encore l’entreprise étendue, la

production modulaire, le développement et l’utilisation des NTIC, le transport, les prestataires

logistiques sans même parler du développement durable…Mais si ce choix a été fait, c’est que la

compréhension des interactions entre tous ces éléments et leur mise en perspective dans un même

cadre permet d’avoir une vision certes globale, mais apportant des éléments d’analyse et de

compréhension sur les changement industriels. Ce mémoire n’a nullement la prétention de donner

toutes les solutions claires et précises à l’environnement économique car ces solutions n’existent

pas. Par exemple, en cette période crise, il faut rester très prudent sur les stratégies à adopter.

Plusieurs erreurs doivent être évitées, prouvant qu’il n’y a pas de solution miracle. Comme le

souligne Alain Katz, président de Métis Consulting, quatre erreurs doivent être évité : « laisser

baisser le taux de service, perfectionner la Supply Chain sans s’interroger sur un monde qui bouge,

chercher le salut dans le retour de la croissance, et sous traiter à outrance et croire qu’acheter

beaucoup de petites choses pas cher fini par faire une organisation performante »118. Il faut donc

voir la Supply Chain comme un outil et non comme une fin en soi.

Ce mémoire a donc pour objectif de donner au lecteur un aperçu du rôle grandissant du

Supply Chain Management, non pas comme simple développement d’une activité précise de la

chaîne de valeur mais comme une réponse globale à l’environnement. Car c’est la principale

conclusion qui ressort de ce travail : le SCM se développe de manière importante car les entreprises

ont été obligées de trouver de nouvelles solutions à leurs problématiques devenues internationales.

Le SCM apparaît alors comme une évidence que les entreprises ne peuvent désormais plus

contourner. Dans ce contexte, ce sont des éléments comme l’entreprise étendue et la production

modulaire principalement qui ont été retenus du fait que ce sont les systèmes que les entreprises

leaders développent et risquent de développer encore dans les prochaines années.

118 Katz A., 2009, « Tout est possible en 2009, même le meilleur », Le journal de la logistique, n°62, Janvier/Février 2009

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L’entreprise étendue offre en effet toutes les caractéristiques permettant aux entreprises de

s’insérer convenablement dans le marché mondial. Elle offre la possibilité d’optimiser sa Supply

Chain et de se concentrer sur son cœur de métier en faisant appel à des entreprises spécialisées qui

elles-mêmes pourront être sous la forme d’une entreprise étendue. C’est au final un immense réseau

mondial d’entreprises, favorisant les interdépendances et multipliant les partenaires qui risque de

voir le jour. Le terme de « Supply Chain éphémères » est d’ailleurs certainement représentatif des

systèmes industriels du futur : des systèmes dans lesquels toute l’activité de l’entreprise sera centrée

sur la Supply Chain. Le développement de formes industrielles complexes comme les situations de

« pure architecte » ou les CoPS risquent également de se développer au delà des secteurs pionniers

de l’automobile ou de l’aéronautique du fait de leurs apports non négligeables sur la rentabilité et

sur l’efficience des FMN à maîtriser leurs marchés. Nous risquons également de voir se développer

de nouveaux acteurs ultra spécialisés issus de ces nouvelles Supply Chain. Les prestataires

logistiques tels que Kuehne+Nagel, DHL ou Geodis jouent déjà un rôle fondamental et risque de

devenir les véritables pivots de processus industriels du futur. Les SSII également permettent déjà

aux FMN de faire des économies et des gains de productivité immenses par la capacité qu’elles ont

à gérer les systèmes d’information mieux que personne. Les nouveaux acteurs pourraient bien être

dans les secteurs des nouvelles technologies. Des acteurs spécialisés dans la RFID, technologie au

potentiel immense mais mal maitrisé, ou dans une meilleure gestion de la relation client, encore mal

exploitée par la technologie, pourront sans doute apporter une nouvelle dimension aux industriels.

Nous pouvons également légitimement penser que les problématiques autour du développement

durable seront au cœur des Supply Chain du futur. Dans une vision générale, comme le résume

Frédéric Hendrick, président de l’Aslog, « la logistique consiste à déplacer des informations pour

éviter de déplacer de la matière. L’enjeu principal reste bien de livrer le bon produit au bon

moment à la bonne personne. L’important, c’est d’y mettre toujours plus d’intelligence, plus de

coordination, (…). Les logisticiens les plus inventifs et les plus astucieux sont les mieux armés pour

apporter à leur entreprise les solutions qu’elles attendent d’eux »119

En somme, il semble que l’avenir de l’industrie ne soit plus totalement entre les mains des

seuls FMN leaders. Autrefois et encore aujourd’hui au centre de l’ensemble du processus, elles

risquent petit à petit de laisser une partie de la place stratégique à des acteurs, certes moins

puissants, mais ayant acquis un rôle stratégique indispensable au bon fonctionnement des réseaux.

Car l’avenir ne passera que par les réseaux et par la capacité des industriels à se positionner en leur

sein. Il leur faudra garder une place centrale mais également accepter de laisser les commandes de

certains aspects à des entreprises spécialisées et au rôle nouveau de pilotage et d’accompagnement.

119 Fournier C., 2009, « La crise aiguise l’intelligence logistique », Logistiques Magazine, n°237, p.55

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Le problème majeur à ce système risque de résider dans la confiance. Comment faire en sorte que

des industriels acceptent de laisser des informations stratégiques à des entreprises extérieurs qui

elles mêmes pourront travailler avec les concurrents directs. Le partage de l’information et la

confiance sont déjà l’élément critique de nombres de processus et ralentissent le progrès industriel.

Les processus actuels ne pouvant, comme la globalisation, que se poursuivre, c’est ici l’enjeu

majeur des FMN dans le futur.

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http://www.aeronautique.ma/Le-premier-avion-chinois-montre-son-nez_a389.html consultée le 08/04/09

http://www.bongrain.com/fr/accueil.html consultée le 08/04/09

http://www.fr.sogeti.com/FR/delivery/index.aspx consultée le 09/04/09

http://offshore-softwaredevelopment.com/global-delivery-model.asp consultée le 09/04/09

http://www.dicodunet.com/definitions/e-commerce/e-sourcing.htm, consultée le 17/04/09

http://www.commentcamarche.net/contents/entreprise/e-procurement.php3, consultée le 17/04/09

http://www.rfidfr.org/presentation-rfid.php, consultée le 20/04/09

http://www.lafarge.fr/wps/portal/1_3-Strategie, consultée le 20/04/09

http://www.lafarge.fr/wps/portal/1_2_3-Principes_d_action, consultée le 20/04/09

http://www.lesechos.fr/info/agro/afp_00141607-le-groupe-danone-cree-un-fonds-de-developpement-de-100-millions-d-euros.htm, consultée le 23/04/09

Cours Universitaires :

Cours de F. Zumer, « Politiques Economiques en Europe », L3, Université Panthéon Assas Paris 2, année 2006-2007

Cours de J-M Siroën, « Définitions, mesures et limites de la globalisation », M2, Université Paris Dauphine, année 2008-2009

Conférences :

Mercier P., 22 janvier 2007, « La globalisation financière et ses conséquences », Intervention à la Chambre de Commerce et de l’Industrie du Loiret

Etudes :

« 2016, The Future Value Chain », 2006, GCI, Cap Gemini, Intel

« 2018, The Future Value Chain, succeeding in a volatile market », 2008, GCI, Cap Gemini, SAP, HP

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Entretiens:

Belot S., First Key Account Manager Aerospace South West Europe chez Kuehne+Nagel, questionnaire d’Avril 2009

Kienlen M., responsable transport route et méthodes chez Danone Eaux France, questionnaire de Mars 2009

Raedersdorf S., planificateur logistique junior, Bongrain, questionnaire de Mars 2009

Svirmickas N., Logistics Project Manager, Lafarge Granulats, questionnaire de Mars 2009

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Annexes

Fiches de lecture

Ici sont présentés succinctement les principaux articles académiques utilisés dans la rédaction de ce

mémoire.

Colin J., 2005, « Le SCM existe-t-il réellement ?», Revue française de gestion, n°156 2005/3 : Cet

article présente la réalité du SCM actuellement en parcourant les pratiques et les modes de gestion

des flux. Il effectue un historique des pratiques depuis 1960 jusqu'à aujourd’hui et détaille les

différentes phases d’optimisation avant de présenter les concepts de Supply Chain interne, externe

et durable.

Fenneteau H., Naro G., 2005, « Contrôle et confiance dans l’entreprise virtuelle. Illustrations

logistiques. », Revue française de gestion 2005/3, n°156, p.203-219 : Cet article présente l’un des

aspects les plus important au sein de l’entreprise virtuelle à savoir l’arbitrage entre contrôle et

confiance de la part de l’entreprise pivot par rapport à ses partenaires. La confiance permettant à

l’entreprise virtuelle de perdurer et de se développer et le contrôle permettant de s’assurer de

l’atteinte des objectifs. Au travers d’exemples comme la GPA ou le CPFR, l’auteur tente de montrer

le dualisme existant et insiste sur le fait que c’est un thème de réflexion majeur pour les prochaines

années durant lesquelles l’entreprise virtuelle ne va cesser de se développer.

Fréry F., Law-Kheng F., 2007, « La réinternalisation, chaînon manquant des théories de la

firme », Revue française de gestion 2007/8, n°177, p.163-179 : Cet article présente le concept de

réinternalisation se situant à la convergence entre externalisation et intégration verticale. L’auteur

cherche à montrer que la vision généralement négative de ce concept n’est pas fondée et que les

recherches ne se portent assez sur lui. Ses principaux avantages sont qu’elle permet la

recomposition de la chaîne de valeur et l’auteur étudie cinq cas d’entreprises ayant accompli avec

succès ce procédé soulignant l’intérêt stratégique de cette démarche.

Frigant V., « L’impact de la production modulaire sur l’approfondissement de la DIPP », Revue

d’économie politique 2007/6, Volume 117, p.937-96 : Cet article présente le procédé de la

production modulaire comme le moyen, au travers de la décomposition du produit final en somme

de composants élémentaires, de décomposer les processus de production. L’article vise à examiner

les arguments justifiant que la modularité est un facteur essentiel de l’approfondissement de la

division internationale des processus de production. La distinction est alors faite entre modularité

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pure dans laquelle les forces sont centrifuges et la modularité impure caractérisée par les CoPS dans

laquelle les forces sont centripètes. L’article conclut en déterminant que dans les faits les modèles

sont intermédiaires et que des éléments d’instabilité restent.

Mouchnino N., Sautel O., « Coordination productive et enjeux concurrentiels au sein d’une

industrie modulaire : l’exemple d’Airbus », Innovations 2007/1, n°25, p.135-153 : Cet article

présente le principe de production modulaire et l’approche stratégique que doivent adopter les

entreprises dans ce contexte. Le concept de « pur architecte » est présenté ainsi que ses deux

contraintes majeures : l’impératif d’intégrité technologique du produit et la préservation de la

position concurrentielle. Selon l’auteur, la première est, contrairement aux idées reçues, résolue

alors que la seconde pose un véritable problème. Il présente ainsi dans la suite de son article les

possibilités de contournement de ce problème comme la prise en charge d’un module critique

permettant aux entreprises de garder leur position d’architecte tout en organisant l’architecture de

telle façon que sa position soit irremplaçable, évitant ainsi la contrainte de pression concurrentielle.

Tout au long de l’article, il prend pour exemple le cas d’Airbus, cas illustrateur de l’architecte

évitant les contraintes.

Quélin B., 2007, « L’externalisation : de l’opérationnel au stratégique », Revue française de

gestion 2007/8, n° 177, p.113-128 : Cet article présente le concept d’externalisation. L’auteur prend

le parti de se tourner vers l’orientation la plus méconnue de ce concept, à savoir l’orientation

stratégique. L’auteur cherche et présente les phases à ne pas oublier dans un processus

d’externalisation. Il explique ainsi les cinq étapes nécessaires selon lui pour que l’externalisation

soitefficace.

Roussat C., Fabbes-Costes N., 2008, « Une démarche d’exploration prospective : le processus

d’intelligence logistique », Management et Avenir, n°17 2008/3 : Cet article propose une démarche

méthodologique d’anticipation fondée sur une vision centrée sur la(les) supply chain(s), leur

management et leur évolution. Cette démarche, élaborée au cours d’un processus de recherche, est

ensuite confrontée au courant prospectif en vue de dégager des pistes d’enrichissement mutuel pour

saisir les évolutions des univers stratégiques complexes contemporains

Zuliani J-M., Jalabert G., 2005, « L’industrie aéronautique européenne : organisation

industrielle et fonctionnement en réseaux », EG, 2005-2, p. 117-133 : Cet article présente le

fonctionnement des industries dans le secteur aéronautique et plus particulièrement le cas de

l’entreprise Airbus. C’est tout le système de production de l’entreprise européenne qui est présenté

et ainsi l’auteur met en lumière le fonctionnement de l’entreprise étendue et les applications de la

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production modulaire. En détaillant le système Airbus, c’est tout le processus de production issue de

la globalisation qui est mis en lumière.

Entreprises et contacts

BONGRAIN - Stéphane Raedersdorf, planificateur logistique junior

DANONE EAUX FRANCE - Manuel Kienlen, Responsable transport route et méthodes

KUEHNE+NAGEL – Steve Belot, First Key Account Manager Aerospace South West Europe chez Kuehne+Nagel

LAFARGE GRANULATS – Noëlle Svirmickas, Logistics Project Manager

Questionnaires

Questionnaire répondu par Steve Belot - Kuehne+Nagel

-Quelle est la stratégie de développement international de KN ? KN est déjà présent dans plus de 850 sites sur 100 pays avec environ 52.000 personnes. Le renforcement à l’international n’est donc pas un axe majeur de la stratégie. Kuehne + Nagel recherche désormais à se développer dans les pays ou il est présent afin de devenir un leader sur tous les marchés dans lesdits pays

-Quel est le mode de développement de l’entreprise ? Basée sur la recherche perpétuelle de nouveaux contrats et/ou sur le renforcement d’importants contrats existants ?

Les deux. Comme indiqué précédemment être leader dans chaque pays par de la croissance externe (acquisition groupe ACR en 2005 et Alloin en 2009) ou interne (nouveaux clients) est l’axe principal de développement

-4PL ? 7PL ? Ou se situe KN ? Ou veut-elle se situer ? Kuehne + Nagel est un acteur majeur 3PL. Afin de se différencier de la concurrence Kuehne + Nagel a développer une division LLS (Lead Logistics Solutions). Cette division ne cherche pas à se placer comme un acteur 7PL (3PL + 4PL), mais comme un vrai interlocuteur indépendant (c'est-à-dire pouvant même challenger KN 3PL) afin de délivrer des savings et des solutions performantes pour ces clients.

-La croissance de KN est elle du au fait que les intégrateurs logistiques sont devenus indispensable aux entreprises (stratégie réactive) ou parce qu’ils ont su se rendre indispensables (stratégie proactive) ?

Les deux stratégies sont complémentaires. KN à su se rendre indispensable de part son réseau international, son IT totalement intégré dans la globalité de ses sites et sa croissance externe en réalisant des acquisitions parfaitement ciblée. Néanmoins, La croissance mondiale de ces dernières années, la délocalisation des grands manufacturiers,

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la dématerlisation des stocks et l’accélération des besoins des industriels ont également contribués à la croissance naturelle de Kuehne + Nagel qui avait su se positionner dans les grands axes mondiaux de croissance.

-D’un point de vue interne, comment KN fait face à l’environnement économique ? Par exemple à l’évolution des cours du pétrole ou aux évolutions de taux de change.

Kuehne + Nagel étant une société n’appartenant ni à un fond de pension, ni à une poste Européenne ou un acteur ferroviaire, sa réactivité et son indépendance dans ses choix stratégique est très grande. Le processus décisionnel est assez court et est mis en application très rapidement (un suivit d’indicateur permet d’adapté la situation selon les pays, les marchés, les produits, etc.…)

-Comment KN réagit à la crise économique ? Par quels leviers pouvez-vous y faire face ? Comme tous les grands acteurs du transport et de la logistique, Kuehne + Nagel est affecté par la crise économique. Néanmoins, comme précisé précédemment une grande réactivité, une implication du management et un suivit des actions permet a Kuehne + Nagel d’adapter sa structure et ses actions face à la crise. De plus, Kuehne + Nagel ayant toujours suivit une politique de « non asset based company », nous permet d’avoir un bilan financier solide et sans endettement. Le choix des clients est également important chez Kuehne + Nagel et cette politique nous permet de faire face à des situations de crise. Prenons comme exemple le contrat AIRBUS : Le secteur industriel, comme celui de l’aéronautique, est un secteur basé sur des cycles longs et donc moins impacté directement et rapidement par une crise économique comme nous pouvons la connaître aujourd’hui (à la différence des secteurs comme l’automobile, le Retail ou le FMCG). Même si les compagnies aériennes annulent beaucoup de commandes auprès d’AIRBUS, le planning de production est plein pour les 7 prochaines années. Les cadences de productions vont simplement être revues légèrement à la baisse et Kuehne + Nagel ne sera pratiquement pas impacté et pourra poursuivre sa croissance vers d’autres groupes industriels.

Questionnaire répondu par Noëlle Svirmickas - Lafarge Granulats

- Quelles sont les mesures stratégiques prises par Lafarge en réaction à la crise actuelle ? Il est évident qu’un groupe comme Lafarge a une stratégie de crise et ce d’autant plus qu’elle est bien sur très présente dans un secteur particulièrement exposé aujourd’hui, le secteur de la construction. Donc, comme toute entreprise, Lafarge essaye d’avoir la conduite la plus efficace possible en travaillant évidemment beaucoup sur les couts et particuliers sur els couts logistiques.

-Quelles sont les répercutions sur la Supply Chain de la crise ? Comment Lafarge s’adapte à cette situation?

Lafarge a présenté aux analystes financiers en décembre dernier (le rapport est public et tu le trouveras sur Internet) ses perspectives 2009. Parmi elles, le plan Excellence 2009-2010 de contrôle et de réduction des couts qui identifie des axes prioritaires, parmi lequel la logistique (on parle encore peu de SC chez Lafarge, même si on en fait sans le savoir).

-Quelle est la place de la logistique par rapport aux autres secteurs de l’entreprise? Est-elle plus reconnue qu’auparavant ?

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Oui, certainement ! La preuve : des projets mondiaux très visibles qui cherchent à mobiliser toutes les Business Units autour de ces thèmes (J’anime celui de la division Granulats)

-Les relations avec les autres secteurs de l’entreprise se sont elles accrues ? Certainement ; d’abord et avant tout avec les achats et le marketing, la finance, le manufacturing. Mais on réfléchit aussi à des filières de formation et des modèles d’organisation (RH), et on cherche de plus en plus à intégrer la dimension logistique dans les projets de développement (soit par acquisition soit par création). De plus, la communication et la logistique se rencontrent de plus en plus souvent.

-Le secteur de la construction a-t-il des contraintes particulières face à la mondialisation ? Tout dépend de la valeur intrinsèque des matériaux. La mondialisation impacte plus le ciment que le granulat ou le béton qui sont bcp plus des productions de proximité. Mais tout va changer progressivement et la maitrise des moyens logistiques sera clé pour la maitrise des marchés.

-Dans le futur, l’expansion internationale va-t-elle se poursuivre ? Bien sur, mais pas forcément dans le sens « on va produire ou ça revient moins cher », mais plutôt « on va produire la ou se trouvent les marchés ». Et il est clair que les marchés d’aujourd’hui et de demain se déplacent vers l’Asie.

-Pour quelles activités Lafarge a-t-elle décidée d’externaliser ? Lafarge externalise ce qui n’est pas son cœur de métier, c'est-à-dire les activités qui demandent un investissement en capital ou en compétences trop important par rapport au retour attendu.

-Êtes-vous en contrat avec des 4PL ? Non, pas dans le granulat

-Quelle est la place des systèmes d’information ? Essentiel, faire de le SC sans data, c’est impossible

-Quelle est l’évolution de cette place ? Pourquoi ? Souvent des centaines et des milliers d’opérations unitaires sur lesquelles il faut comprendre les tendances, définir une politique logistique, choisir astucieusement ses prestataires, définir et suivre des critères de performance… Sans business intelligence, sans data crunching, autant dire que c’est peine perdue !

-Comment est gérer le transport international avec l’expansion internationale de l’entreprise ? Dans le granulat, pas bcp de transports internationaux si ce n’est dans certains pays d’Europe de l’est ou nous extrayons des cailloux que nous transportons par train dans des pays voisins. Dans le ciment, je sais qu’il y a une structure spéciale qui s’occupe de trading et donc de l’approvisionnement de certains marchés par voie maritime essentiellement

-Considérez vous que l’externalisation et le développement des systèmes d’informations sont les principales avancées logistiques issues de la mondialisation ou existe-t-il d’autres activités clés ?

Je pense que la SC permet effectivement à une entreprise installée dans de nombreux pays de faire le lien entre des implantations souvent assez isolées.

-D’un point de vue personnel, de quels moyens, au niveau de la Supply Chain, pensez vous qu’une entreprise internationale disposent pour faire face à phénomènes économiques extérieurs (crise financière, évolution de taux de change, augmentation tu prix des matières premières) ?

Je considère que la SC/log va permettre aux entreprises qui la maitrisent de sortir de la crise en meilleur état que les autres. L’enjeu aujourd’hui est de définir des schémas

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logistiques souples, agiles capables de réagir par rapport à des changements économiques brutaux. Se remettre en cause encore et toujours. C’est à la fois le « Lowest cost to serve » mais aussi la logistique comme service et comme moyen de se différencier et de générer de nouveaux revenus.

Questionnaire répondu par Manuel Kienlen - Danone Eaux France

-Aujourd’hui, dans le contexte international dans lequel évolue Danone Eaux, quelle est la place du transport dans la stratégie logistique ?

DEF = contexte 100% national, néanmoins : Le transport est un élément entier de la stratégie logistique : Modes utilisés (fer, route) fonction des périmètres concernés (usines, plateformes, clients,…) Délais de livraison et offres logistiques Optimisation des coûts (cost to serve) Impact environnemental (notamment le carbon footprint)

-Le concept d’ « entreprise étendue » à-t-il un sens chez Danone Eaux ? Je me permettrai de dire que oui bien que nous n’ayons pas de démarche identifiée sous ce vocable. Le marché de la boisson en France, en forçant le trait, peut être vue comme un oligopole (peu de fournisseurs, peu de clients) et nous amène donc à des niveaux d’échanges et d’intégration forts avec nos clients ; les échanges avec nos concurrents sont également nombreux. Sur la partie fournisseurs logistiques, notre démarche avec certains d’entre eux est très intégrée également (tu auras l’occasion de le découvrir).

-L’appel à la sous traitance pour le transport est-t-il une conséquence d’événements particuliers ou est ce une suite logique de la stratégie d’entreprise ?

Très clairement pour DEF une suite logique de notre stratégie ainsi que l’état de maturité de ce métier en France (ce qui n’est pas le cas dans d’autres CBU)

-Cette externalisation s’effectue-t-elle de manière directive ou de manière collaborative ? Notre approche est collaborative

- Diriez-vous que le transport est une fonction vitale d’une Supply Chain internationale ? Pourquoi ? Oui. Sur un plan exécution opérationnelle, c’est un contributeur majeur de notre taux de service, de notre capacité à répondre aux aléas et à-coups de la demande client et des nouvelles offres clients Maîtrise de nos comptes de résultats (ratio coût transport/coût total de nos produits élevé) et de notre positionnement tarifaire vis-à-vis de nos clients et consommateurs Levier fort de notre empreinte environnementale

-Livrez vous uniquement la France ou également des pays étrangers à partir des sites de distribution français ?

France + étranger -La stratégie de transport est elle la même dans les autres pays que la France ?

Je pense pouvoir dire que non, sans pour autant connaître la stratégie transport de toutes nos CBU -Comment interagit le service transport avec les autres acteurs de la Supply Chain ?

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Etant par définition en aval de toutes nos opérations, nous sommes le dernier maillon avant livraison chez nos clients. Les problématiques se cristallisant souvent en bout de ligne droite, nous avons un rôle d’animation transversale vs les autres composantes de la SC (service client, réseau, flux, déploiement central et local) : Rôle Fournisseur : exécution des flux Rôle Client : besoin d’avoir de flux opérables dans le cadre de nos process définis Rôle Animateur : vigilance court, moyen et long terme sur notre environnement logistique

Questionnaire répondu par Stéphane Raedersdorf - Bongrain

- Quel est votre poste chez Bongrain ? Actuellement je suis planificateur logistique junior chez Bongrain. Je suis en charge des prévisions de ventes, de la planification des besoins et des réapprovisionnements de ces quantités pour un portefeuille de plus de 100 produits de marques et MDD. Mon poste se divise en quatre activités principales : 1. Prévision des ventes : Avec le responsable commercial définition des prévisions de

ventes futures d’un horizon allant de 2 à 15 semaines (en fonction du temps de réappro des produits) cela pour tous les articles GMS. Définition également des effets commerciaux (pubs TV, actions) par rapport aux capacités de production disponibles.

2. Planification des ventes : En fonction des caractéristiques produits (DLUO, temps de réapprovisionnement, fréquence de réapprovisionnement, etc.) définition des besoins et du planning de réapprovisionnement et des quantités de réapprovisionnement des prochaines semaines avec les usines (fournisseurs). Actuellement je suis en charge de la réalisation de la planification des prévisions de vente pour une usine en Allemagne, une en Espagne et quatre en France (autrement dit pour toutes les tranches pour le marché allemand, les pâtes fraîches Bresso et Milkana, et les gammes complètes de Chavroux, Tartare et Fol Epi.

3. Contrôle des réapprovisionnements (quantités envoyés par les fournisseurs), passation de commandes pour confirmer les envois, et contrôle de disponibilité pour le service client afin que ces derniers puissent organiser la préparation de commande client chez nos prestataires logistiques. Je suis également en charge de l’intégration des mouvements de stocks sur deux de nos plates-formes dans R/3.

4. Animateur projet pour mes usines françaises. Projets visant à améliorer le taux de service usine ainsi que d’optimiser le processus de fabrication et de réapprovisionnement de certains produits complexes.

- Quelle rôle joue les SI dans l’activité de l’entreprise au plan international ? Le rôle des SI dans le groupe Bongrain est primordial, indispensable à un transfert rapide de l’information. L’information chez Bongrain circule selon le schéma suivant :

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La direction du groupe ou alors les responsables des usines et des filiales du groupe entreprennent l planification à long terme. Il peut s’agir de décisions telles que création d’une nouvelle plate-forme logistique, changement de prestataire logistique, investissements nouveaux outils de production, utilisation de nouveaux canaux de distribution, etc. Ces décisions auront un impact non négligeable sur la modélisation des activités actuelles et futures. Actuellement nous nous trouvons dans la situation suivante. Un besoin est définit par la filiale allemande en fonction de sa connaissance des clients et du comportement des consommateurs allemands. Ce besoin va être intégré par le service de planification des ventes dans le module DP de SAP APO. Ces besoins vont remonter dans le module de planification à moyen terme SNP qui est actuellement géré par les pilotes des flux des usines du groupe. Dans ce module vont se consolider tous les besoins des différents marchés avant d’être envoyés dans le module de planification de la production PP. C’est ici que seront générés les plans de production (OF dans le système) en tenant compte des ressources nécessaires (matières premières, besoins emballage, etc.) définies dans le module MRP tout cela associé également à un étude de faisabilité en fonction des définition de capacité. Les produits résultants de la production vont par la suite être distribués vers les différents marchés selon les capacités de transport disponibles (plan de réapprovisionnement est généré dans le module Distribution Ressource Planning DRP). En dernier lieu vient l’outil dit ATP (available to promise) qui est un outil qui permet au service client de visualiser les disponibilités des produits pour les sorties clients. Bref, pour un bon déroulement de satisfaction des besoins client, le groupe Bongrain nécessite une bonne et rapide circulation de l’information (attention aux erreurs d’interprétation et aux erreurs liées à la traduction) mais aussi une transparence de ces activités. Tout cela ne pourrait se faire sans l’aide des SI utilisés. Via des interfaces un utilisateur donné peut de façon instantanée visualiser par exemple les quantités mises en

Supply Network Design (direction du groupe, directoire des filiales,

etc.)

Supply Network Planning (usines du groupe)

Demand

Planning

Distribution

Planning

Production

Planning

Material

Ressource

Planning

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production, les achats d’emballages, à quel jour le client va commander les produits. L’uniformité des SI utilisés permettent de réduire fortement les erreurs d’interprétations et de traductions liées aux différentes langues parlées dans le groupe.

- Depuis quand les SI sont présents dans l’entreprise ? Je ne suis pas encore suffisamment longtemps dans l’entreprise pour avoir vu la mise en place de ces différents outils informatisés, par contre si mes informations sont bonnes les principales étapes de mise en place des SI sont les suivantes :

- Mise en place de SAP R/3 en 2004 -> ERP utilisé par tous les services de la filiale BG Allemagne, comme la logistique dans son ensemble (transport, prévisions vente, service client, etc.), les ressources humaines, certaines services commerciaux, pour aller jusque dans BW (Business Warehouse) qui est utilisé par la suite par le controlling pour les opérations de facturation et de synthèse de l’activité de la filiale.

- APO (APS de SAP) en 2006 Pour mieux pouvoir suivre les activités de l’entreprise des outils de reporting ont été élaborés pour permettre au marketing, direction, commerciaux de pouvoir profiter également d’informations (comme par exemple les ventes, indicateurs logistiques, etc.) pouvant leur être nécessaire. En France dans les usines, Minos fait office d’ERP tandis que FuturMaster incarne le rôle de l’outil de planification. Des projets divers visent actuellement à réduire le nombre de SI utilisés dans tout le groupe.

- La tendance est elle à avoir de plus en plus de SI au sein de l’entreprise ? La tendance vise à utiliser de plus en plus les SI au sein de l’entreprise, par contre la tendance va aussi à l’uniformisation des ces dernières au sein du groupe, c'est-à-dire favoriser l’utilisation d’une voire deux SI principales pour tout le groupe. De cette façon nous aurons plus besoin d’interfaces différentes pour traduire les données. Par ailleurs des doublons en matière de maintenance des systèmes peuvent être évités. Des interfaces vont toutefois encore devoir être utilisées à l’avenir car l’interaction avec les différents prestataires logistiques va nécessiter des outils de traduction.

-Le fait que l’activité de Bongrain soit internationale a-t-elle nécessité de développer de nouveaux SI ?

Oui. L’Allemagne en tant que précurseur en matière d’utilisation de SI pour optimiser ses opérations logistiques a poussé les marchés comme la France, mais aussi l’Italie, la Belgique, la Suisse, la Slovaquie (bientôt la Rep. Tchèque), le Royaume Uni à passer sous APO pour la consolidation des besoins. Il en vaut de même pour SAP R/3. Comme dit auparavant la présence de filiales du groupe dans de nombreux marchés à entraîner le groupe à prendre des décisions visant à l’instauration de SI uniformes pour le groupe.

-Y a-t-il eu des embauches grâce au développement des SI ?

Pas à proprement dit. Par contre l’on peut noter une spécialisation de l’effectif, c’est à dire des embauche de personnel plus qualifié et maitrisant les différents outils informatiques utilisés. Le niveau académique de sélection est passé pour ces fonctions d’experts de Bac+2 à Bac+4/Bac+5. Les appellations des emplois ont été revues, comme la création dans les usines de la fonction de pilote de flux, c’est à dire un spécialiste qui consolide les besoins des différents

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marchés et clients et qui par le biais du SI va réaliser un planning production pour pouvoir répondre aux besoins clients définis par le prévisionniste des ventes. Par ailleurs le siège principal du groupe a décidé de créer des centres d’expertise regroupant les experts des différentes filiales afin de gérer des projets de développement et d’optimisation des SI (quels que soient les domaines d’utilisation).

-Dans la Supply Chain de Bongrain, penses-tu que les SI soient devenus une fonction vitale ? Pourquoi ?

Oui sans SI, le travail se ferait à l’aveugle. Par exemple une panne informatique de Nagel Europe (un de nos prestataire logistique) en décembre a conduit qu’aucune donnée de stock n’a pu être communiquée, pas de sorties ni entrées en stock pendant cette période n’ont pu être réalisées, ainsi que l’incapacité du prestataire à retrouver les produits en stocks. Amélioration considérable sur la flexibilité, ce qui permet aux usines d’avoir plus informations. Tout cela à des répercutions notables sur le taux de service client ainsi que sur le taux de déclassement (dans le domaine du fromage mais aussi pour les secteurs traitant avec des denrées très périssables ce taux révèle la part de produits ne pouvant être vendus à temps compte tenu des garanties de DLUO définies avec les distributeurs). Une amélioration de ces deux indicateurs logistiques va engendrer une amélioration de la satisfaction client par la suite.

-Quels sont les SI utilisés et pourquoi faire? ERP /PGI : R/3 de SAP – traitement de toutes les informations produit, mouvements de produit, ainsi que les opérations de facturation de ces derniers. APS : APO de SAP – outil utilisé pour la planification des besoins, production, achats, transports, ainsi que de la prise de décision stratégique. CRM : outil utilisé pour mieux visualiser les besoins des consommateurs et pour la réalisation de partenariats avec la distribution.

-Quel est ton avis sur le parallèle entre développement des SI et mondialisation ? Tout doit aller plus vite. Le flux d’information est primordial pour une bonne réalisation des process. La logistique collaborative gagne en importance, la réalisation de modèles logistiques dans la SI qui intègre tous les acteurs du fournisseur au besoin du client peut se faire. Des économies d’échelles peuvent se faire par l’utilisation d’une SI pour le groupe, facteur non négligeable dans cette période délicate économiquement.

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Autres annexes

Figure 8: Le modèle SCOR

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Tableau 3: Matrice informationnelle de Porter120

Tableau 4: Eléments constitutifs des divers modes de collaboration121

120 Dans Delmond M-H., Petit Y., Gautier J-M., 2007, « Management des systèmes d’information », 2e édition, Dunod, Paris, p. 116 121

Baglin G., 2005, « Management industriel et logistique : conception et pilotage de la Supply Chain », Ed. Economica, Paris, p. 223

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Photo 1: Le Beluga d'Airbus

Photo 2: Le Falcon 7X de Dassault