Capitaliser Une Experience

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  • 7/27/2019 Capitaliser Une Experience

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    FICHE TECHNIQUE N 10

    CAPITALISER UNE EXPERIENCE :QUELLE METHODE ?

    La Lettre du CEDIP -En lignesn 10 - juin 1999 - page 1

    Capitaliser : dans lair du temps

    Capitalisation, management de la connaissance (certains disent knowledge management),transfert des savoirs... sont des termes de plus en plus frquents dans le monde delentreprise et dans les rflexions sur leurs stratgies dvolution lies lapproche par lescomptences.

    La notion de capitalisation existe depuislongtemps dans les entreprises industriel-

    les, elle se traduit sous la forme de manuelsde production, de check-lists... Mais, aveclaugmentation des activits tertiaires, ap-

    parat la ncessit de capitaliser des savoir-faire plus intellectuels que techniques.

    Cette capitalisation est favorise par : la ncessit damliorer la productivit

    dans les entreprises de service et donc de va-loriser le capital de connaissances ;

    le dpart la retraite, dans les annes venir, dun nombre important dexpertsobligeant capitaliser les savoirs et savoir-faire quils dtiennent ; lapparition des nouvelles technologiesfacilitant lchange et la diffusion desconnaissances.

    Notre ministre et son rseau formation nchappent pas ce mouvement

    La dconcentration de la responsabilit des politiques de formation dans chaque service aconduit une forte production de formations, un foisonnement dides et dexpriences.Mais, linverse, on constate aussi un cloisonnement du rseau, des actions en doubleemploi et une perte dexprience aggrave par la rotation des personnels.

    Cette situation nest pas caractristique du seulrseau formation du ministre et la capitalisa-tion nest pas une solution miracle ou unique ce problme. Toutefois, elle peut permettredamliorer la situation et donner un support

    plus large chacun (notamment aux nou-veaux arrivants) pour conforter et perfection-ner ses pratiques professionnelles.Si chacun capitalise dj de bien des faons(ne serait-ce quen accumulant delexprience), il parat tout de mme

    ncessaire de : prciser quelques notions ; caractriser le travail de capitalisation avecses apports et ses limites ; organiser les circuits de production et dediffusion ; passer rellement lacte en sappuyantsur des mthodes affiner ; produire, diffuser et utiliser.

    Car, ce nest que dans un cadre organis etstructur que la capitalisation pourra avoir un effet au profit de tous, bien entendu, mais aussi (et

    peut-tre surtout dailleurs) au profit de soi-mme.

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    La Lettre du CEDIP - En lignes n 10 - juin 1999 - page 2

    Dans ce systme complexe, nous privilgierons ici uniquement lmergence des savoir-faireindividuels implicites, relatifs lexprience, et leur passage vers lexplicite.

    La connaissance et son management

    La connaissance

    La connaissance (savoirs et savoir-faire) capitaliser possde de multiples facettes, elle se

    rpartit en connaissance implicite (ou tacite) et explicite, individuelle et collective. La capi-talisation consiste faire merger la connaissance individuelle implicite pour la verser dansle collectif explicite, avec pour objectif une appropriation collective (implicite collectif).Le schma ci-aprs, inspir des travaux de Jean-Yves Prax (voir bibliographie), illustre lesdiffrents tats de la connaissance et la capitalisation.

    Extension

    Conscience

    Implicite

    Apprentissage

    Int

    riorisatio

    n

    Boucle

    de la

    capitalisation

    Individuel

    Etats de la connaissanceet capitalisation

    - Connaissance consciente- Connaissance dclarative

    - Connaissance automatique- Connaissance instinctive- Connaissance pratique

    - Connaissance scientifique- Connaissance institutionnelle- Normes, rgles

    - Connivence- Sens commun- Communaut de pratiques

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    La Lettre du CEDIP -En lignesn 10 - juin 1999 - page 3

    Action Rsultat

    CREER

    - Cration de laconnaissance

    - Dcouvrir- Inventer de la connaissance

    - Donne une valeur ajoute aux pro-duits et aux services.

    IDENTIFIER etCAPITALISER

    - Identification dusavoir stratgique

    - Collecter et consigner le savoir stra-tgique de faon le conserver(capitaliser)

    - Cre de la mmoire active(capitalisation)

    DIFFUSER

    - Diffusion du savoirstratgique

    - Transmettre- Partager- Distribuer le savoir en fonction de

    son importance

    sa confidentialit son degr durgence sa fiabilit

    - Met disposition de lensemble delentreprise une base de savoirscommune et stratgique

    EXPLOITER ETCRER DENOUVEAU

    - Utilisation du sa-voir diffus

    - Utiliser et exploiter les acquis- Amliorer et renouveler les savoirsexistants

    - Ajoute de la valeur au fonctionne-ment de lentreprise et ouverture versune nouvelle phase de cration de sa-voirs nouveaux

    La capitalisation apparat ici comme une tape du processus du management desconnaissances.

    Le management des connaissances

    Soumis des influences trs diverses, le management des connaissances, tout comme lacapitalisation, sont encore des notions prciser.On peut considrer, linstar de Franoise Rossion (voir bibliographie), que le managementdes connaissances est un processus itratif qui se renouvelle.

    Le tableau ci-dessous en illustre les tapes principales.

    La capitalisation

    La capitalisation peut tre dfinie partir de ce quelle nest pas (ou nest pas seulement)et de ce quelle est (ou que lon peut admettre comme telle pour les pratiques mettre en

    place dans le domaine de la formation).

    La capitalisation

    ce nest pas seulement :La capitalisation

    cest aussi :

    - rflchir sur les pratiques professionnelles- analyser et dcrire les pratiques utilises dans

    le cadre dune action dfinie- crire ces pratiques- en tirer des lments dcontextualiss etsynthtiss- diffuser- ...

    - accumuler de linformation- indexer les dossiers techniques de base

    - archiver- valuer- crer un outil informatique- utiliser internet ou intranet- ...

    Il faut viter, comme cest encore trop souvent le cas, de confondre ce qui relve des outilset des techniques utilisables en appoint (techniques documentaires, rseaux informatiques,intranets...) de la nature relle et de lobjet mme de la capitalisation.A partir dun travail danalyse des pratiques professionnelles, la capitalisation consisteraaussi dcontextualiser les donnes recueillies, crire le produit de lanalyse et lediffuser.

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    La Lettre du CEDIP - En lignes n 10 - juin 1999 - page 4

    Intrt de la capitalisation

    Dune part, lanalyse des pratiques conduit un enrichissement personnel (regard port sursa faon de faire, en vue de lamliorer), dautre part sa formalisation et lchange autour decelle-ci permettent une appropriation partage ou, pour le moins, suscitent une rflexion des

    personnes confrontes aux mmes questions et problmes.

    Pour qui ?Individu qui produit

    la capitalisation

    Individu et/ou groupequi participent

    sa production

    Service et rseauprofessionnel

    Quel intrt ? - ancrage des mthodeset des pratiques par lex-

    pression orale et crite(changes lors de la pro-duction),

    - leve des blocages parrapport lcrit,

    - perfectionnement lcriture,

    - ...

    - apprentissage sur lesmthodes, les pratiques,etc. par lchange avec leproducteur de la capi-talisation,

    - apprentissage lcoute, la reformulation et

    lcriture,- ...

    - mise en mmoire des ac-tions menes, sous uneforme cohrente et acces-sible,

    - changes optimiss,

    - transfert de connais-

    sances,- ...

    Dvelopper la capitalisation

    Force est de constater que la capitalisation va au-del des pratiques actuelles de la majoritdentre nous et que, mme si parfois elle relve dinitiatives individuelles, elle ne saurait

    reposer pour son dveloppement sur la bonne volont et les pratiques de quelques uns.

    Le dveloppement de la capitalisation au profit de lensemble du rseau repose sur :

    un engagement de service bas sur une analysestratgique initiale ; une prise en compte des besoins ; une organisation du systme ; un accompagnement ;

    une intgration de cet aspect nouveaudans les plans de charge ; une valorisation des personnes et des

    produc tions.

    Nous examinerons successivement une proposition de structure pour une capitalisation sur uneexprience et la mthode mise en oeuvre pour ltablir.

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    La Lettre du CEDIP - En lignesn 10 - juin 1999 - page 5

    Capitaliser : une mthode possible

    La capitalisation se traduit par un document crit de synthse. La ralisation de ce docu-ment doit tre considre comme partie intgrante de laction et doit tre mene par celuiqui conduit laction. Toutefois, il doit tre aid.

    Structure dun document de capitalisation

    Type daction capitalise

    Ce type de structure sapparente aux fiches de cas traditionnelles, mais cest la partie analysedes pratiquesqui constitue la diffrence.

    ves ladhsion des participants et aux rac-tions du commanditaire, ainsi quune r-flexion sur les forces et faiblesses de celuiqui a men laction, en particulier sur les m-thodes mises en uvre.

    La ralisation : des rsistances

    surmontables

    Au-del du problme du temps et du plan de charge trop souvent voqus pour diffrer larflexion sur laction, les obstacles la capitalisation sont de plusieurs ordres :

    Lanalyse des pratiques doit tre intgre. Ilsagit, dans ltablissement du dossier concer-nant la capitalisation sur une exprience, de

    prsenter les problmatiques poses celuiqui a conduit laction et les choix quil a effec-tus. De mme, doivent apparatre une ana-lyse des difficults, notamment celles relati-

    Travailler pour les autres nest pas naturel. Pas de ncessit prouve de capitaliser

    pour soi. Difficults face la rflexion seul surses propres pratiques. Rticences fortes crire et diffuser sescrits, surtout sur ses pratiques. Pas dexigence de la part de la hirarchie

    dans ce domaine. Pas dexistence de systme dappui organis.

    A linverse (et on la vu dans les rsultatsde lenqute sur le RIDF par exemple), ilexiste une trs forte demande sur les actionsmenes par les autres et sur les lments deraction face des situations donnes.

    CommandeContexteObjectifsActeursContraintes, moyens

    HypothsesChoix des mthodesProposition formuleElments de discussion avec le commanditairePlan daction retenu en explicitant le pourquoi de ce plan par rapport aux objectifs

    Droulement de lactionRsultats enregistrsEvaluation effectueRactions du commanditaire

    Analyse des pratiques :Rflexion porte sur laction

    Analyse de ladquation : hypothses/ralit perue, mthodes/rsultats, ...

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    Dans ces conditions, il nous semble quavec peu defforts il sera possible, en sappuyant surune mthode de capitalisation simplifie, encourage, accompagne et dont la productionserait valorise, davancer rapidement dans le dveloppement des changes au sein du r-seau formation.

    La ncessit du choix

    Il ne sagit pas de capitaliser sur tout, bien quela rflexion individuelle et collective sur lac-tion soit une ncessit permanente.

    Un choix est ncessaire. Il doit seffectuerentre un commanditaire de la capitalisa-tion et celui qui mne laction : le mieux mme de capitaliser. Ce choix intgre le

    plus souvent un aspect prospectif et utili-taire pour la structure. Aussi, le comman-ditaire de la capitalisation est gnrale-ment le responsable hirarchique de celuiqui capitalise.Mais cette capitalisation ne peut tre rali-

    se spontanment, il est ncessaire de mettreen place un systme daide pour le produc-teur , par lintervention de diffrents acteurs :un facilitateur de lexpression et une personneou groupe agissant en miroir.En effet, cest dans le cadre dun travail col-lectif que peut le mieux seffectuer lana-lyse de ses pratiques. Il sagit donc de tra-

    vailler sur la capitalisation avec ses pairsprincipalement, et/ou des personnes spcia-lises, afin quau travers de leur question-nement, de leur soutien et de leur apport,la capitalisation puisse tre une ralit.

    Les acteurs et leur rle

    La capitalisation fait appel des acteurs et des rles diffrents de ceux de laction elle-mme. Elle repose sur quatre acteurs et fonctions essentielles :

    Le commanditaire de la capitalisationCest le plus souvent le responsable hirarchi-que du matre duvre de laction. Son rleest dimpulser et faciliter la production de lacapitalisation. Il doit aussi sattacher valori-ser ceux qui produisent. Le producteur de la capitalisationCest le matre duvre de laction car cest

    lui qui possde les savoir-faire mis enuvre, objets de la capitalisation.Il peut difficilement produire seul, surtouten phase de dmarrage. Le facilitateurCest une personne soit choisie par le pro-ducteur (par affinits), soit occupant unefonction en relation avec la capitalisation

    (responsable de centre de ressource, parexemple).Il a pour mission daider lexpression surles pratiques mises en uvre. Cest un ouvreur de parole , comme certainsauteurs le nomme, notamment PierreDelcambre (voir bibliographie) La personne (ou le groupe) miroir

    Elle (ou il) intervient en retour, lorsdchanges organiss, crits ou oraux, enrunion ou par lintermdiaire dun rseau,

    pour apporter une vision externe, se posi-tionner en consommateur futur de lacapitalisation produite, tre un catalyseurconduisant la dcontextualisation .

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    En rsum

    Lobjet de la capitalisation est de permettre la production dun document explicite, descriptifde laction mene et traitant des pratiques mises en uvre, afin de permettre une appro-

    priation par dautres : donc un transfert.Lcrit traduit une ralit un moment donn, dans un contexte donn. La formalisation doitservir de base lchange.

    La mthode de capitalisation propose, relativement simple, met toutefois en jeu plusieursacteurs et les relations au sein du service.

    Elle ne peut tre envisage avec succs sans : une volont forte du management pour dvelopper la capitalisation, une dfinition claire du rle des acteurs,

    une nouvelle approche du travail collectif, une prise en compte du temps ncessaire, une valorisation des productions et des producteurs, une utilisation relle des productions et donc lintroduction, dans le service mme, demthodes de travail sappuyant sur ces productions.

    Comme toute production de capitalisation, cette fiche technique a t labore pour forma-

    liser ltat de notre rflexion aujourdhui. Nous souhaitons et attendons vos ractions pour

    que senrichisse la connaissance collective.

    Charles Bo rdres et Gu y Panis se- CEDIP

    (Avec la participation de Patrick Duigou)

    Pour aller plus loinBibliographie

    Guillaume Bologna (08 et 09 juin 1999) La gestion des connaissances : de la thorie la pratique.Le cas Icare Textes des communications du Salon IDT, 16econgrs, Paris.

    Equipe conseil de lAcadmie de Crteil (1997) Pratiques de consultants (articles et tudes de cas) -CRDP, Acadmie de Crteil .

    Bruno Barjou (1995) Savoir transmettre son expertise et son savoir-faire ESF Editeur.

    Jean-Franois Ballay (1997) Capitaliser et transmettre les savoir-faire de lentreprise EditionsEyrolles.

    Jean-Yves Prax (1997) Manager la connaissance dans lentreprise Insep Editions.

    Pierre Delcambre (1994) Ecrire sur sa pratique en milieu de travail : la recherche dun espacede discussion Education permanente N120.

    Franoise Rossion(mars 1999) Gestionnaire du savoir Revue Archimag.