12
Cardiopathies et grossesse C Almange JM Schleich M Laurent Résumé. La grossesse entraîne d’importantes modifications cardiocirculatoires, en particulier une expansion volémique et une augmentation du débit cardiaque d’environ 50 %. Ces phénomènes, bien supportés par un cœur normal, peuvent retentir de façon importante sur une cardiopathie préexistante. Les malformations congénitales sont maintenant au premier rang des cardiopathies associées à une grossesse. Celle-ci a le plus souvent une évolution favorable mais peut être compliquée en cas de cardiopathie cyanogène, de sténose aortique et plus encore de syndrome d’Eisenmenger où elle est formellement contre- indiquée. Les valvulopathies rhumatismales sont moins fréquentes actuellement et le plus souvent bien supportées ; le rétrécissement mitral peut faire l’objet d’une dilatation percutanée au cours de la grossesse. Les prothèses valvulaires posent le problème délicat des anticoagulants. Les cardiopathies ischémiques sont très rares à l’âge de la procréation. Les cardiomyopathies du péri-partum sont également rares et de pronostic incertain. La contraception mérite d’être sérieusement envisagée chez la femme ayant une cardiopathie, car elle pose des problèmes délicats. Quant aux médicaments cardiovasculaires, si certains peuvent être prescrits sans réticence au cours de la grossesse, d’autres sont susceptibles d’entraîner des complications fœtales et sont contre-indiqués (amiodarone, inhibiteurs de l’enzyme de conversion) alors que d’autres méritent une surveillance particulière (bêtabloquants). À l’heure actuelle, dans la plupart des cas, et grâce à une étroite collaboration obstétrico-cardiologique, la plupart des femmes ayant une cardiopathie peuvent avoir une grossesse dans des conditions satisfaisantes. © 2003 Elsevier SAS. Tous droits réservés. Mots-clés : grossesse, cardiopathies congénitales, valvulopathies rhumatismales, arythmies, cardiomyopathies du péri-partum, contraception, médicaments cardiovasculaires. Introduction La survenue d’une grossesse chez une femme ayant une cardiopathie est relativement rare (1 % des grossesses environ), mais représente une cause importante de morbidité (voire de mortalité) maternelle ; de plus, l’évolution du fœtus peut être considérablement perturbée [96] . En effet, au cours de la grossesse et du péri-partum se produisent d’importantes modifications cardiocirculatoires qui sont susceptibles d’entraîner une détérioration notable de l’état d’une femme ayant une cardiopathie. Modifications cardiovasculaires physiologiques de la grossesse et du péri-partum Le volume sanguin augmente de façon importante durant la grossesse. Cette augmentation commence dès la sixième semaine, s’accentue jusqu’à la moitié de la grossesse, pour se ralentir ensuite. Le degré d’expansion volémique est variable selon les patientes, allant de 20 à 100 % avec une moyenne de 50 %. Cette augmentation est plus importante en cas de grossesse multiple et chez les multipares. L’augmentation du volume plasmatique étant plus importante que celle des globules rouges, le taux d’hémoglobine baisse progressivement jusqu’à la 30 e semaine, entraînant l’anémie « physiologique » de la grossesse. Ces modifications sont pour l’essentiel attribuées à la stimulation du système rénine-aldostérone par l’intermédiaire des œstrogènes ; d’autres facteurs humoraux interviennent également dont les prostaglandines et le facteur natriurétique atrial. Le débit cardiaque est estimé augmenter d’environ 50 % pendant la grossesse [45] . Cette augmentation commence dès la cinquième semaine et s’accentue rapidement jusqu’à la 24 e , à partir de laquelle elle se ralentit. Ce phénomène est lié au début principalement à l’augmentation du volume d’éjection, alors qu’au cours du troisième trimestre, il est dû surtout à l’accélération de la fréquence cardiaque alors que le volume d’éjection reste stable (voire diminue un peu du fait de la compression de la veine cave par l’utérus). La fréquence cardiaque est maximale pendant le troisième trimestre avec une augmentation moyenne de 10 à 20 battements par minute. En cas de grossesses multiples, la fréquence cardiaque s’élève davantage encore [45] , de même que le débit cardiaque. La pression artérielle systémique baisse dès le premier trimestre, atteint son niveau minimal vers le milieu de la grossesse et retrouve son niveau habituel près du terme. Cette diminution de la pression sanguine, prédominant sur la diastolique, est liée à la baisse des résistances vasculaires systémiques, elle-même secondaire d’une Claude Almange : Professeur des Universités. Jean-Marc Schleich : Praticien hospitalier. Marcel Laurent : Praticien hospitalier. Centre cardiopneumologique, centre hospitalier universitaire, 2, rue Henri-Le-Guilloux, 35033 Rennes cedex 09, France. Encyclopédie Médico-Chirurgicale 11-940-K-40 11-940-K-40 Toute référence à cet article doit porter la mention : Almange C, Schleich JM et Laurent M. Cardiopathies et grossesse. Encycl Méd Chir (Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), Cardiologie, 11-940-K-40, 2003, 12 p.

Cardiopathies et grossesse

  • Upload
    drlauri

  • View
    1.058

  • Download
    5

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: Cardiopathies et grossesse

Cardiopathies et grossesseC AlmangeJM SchleichM Laurent

Résumé. – La grossesse entraîne d’importantes modifications cardiocirculatoires, en particulier uneexpansion volémique et une augmentation du débit cardiaque d’environ 50 %. Ces phénomènes, biensupportés par un cœur normal, peuvent retentir de façon importante sur une cardiopathie préexistante.Les malformations congénitales sont maintenant au premier rang des cardiopathies associées à unegrossesse. Celle-ci a le plus souvent une évolution favorable mais peut être compliquée en cas de cardiopathiecyanogène, de sténose aortique et plus encore de syndrome d’Eisenmenger où elle est formellement contre-indiquée. Les valvulopathies rhumatismales sont moins fréquentes actuellement et le plus souvent biensupportées ; le rétrécissement mitral peut faire l’objet d’une dilatation percutanée au cours de la grossesse.Les prothèses valvulaires posent le problème délicat des anticoagulants. Les cardiopathies ischémiques sonttrès rares à l’âge de la procréation. Les cardiomyopathies du péri-partum sont également rares et de pronosticincertain. La contraception mérite d’être sérieusement envisagée chez la femme ayant une cardiopathie, carelle pose des problèmes délicats. Quant aux médicaments cardiovasculaires, si certains peuvent être prescritssans réticence au cours de la grossesse, d’autres sont susceptibles d’entraîner des complications fœtales etsont contre-indiqués (amiodarone, inhibiteurs de l’enzyme de conversion) alors que d’autres méritent unesurveillance particulière (bêtabloquants).À l’heure actuelle, dans la plupart des cas, et grâce à une étroite collaboration obstétrico-cardiologique, laplupart des femmes ayant une cardiopathie peuvent avoir une grossesse dans des conditions satisfaisantes.© 2003 Elsevier SAS. Tous droits réservés.

Mots-clés : grossesse, cardiopathies congénitales, valvulopathies rhumatismales, arythmies,cardiomyopathies du péri-partum, contraception, médicaments cardiovasculaires.

Introduction

La survenue d’une grossesse chez une femme ayant unecardiopathie est relativement rare (1 % des grossesses environ), maisreprésente une cause importante de morbidité (voire de mortalité)maternelle ; de plus, l’évolution du fœtus peut être considérablementperturbée [96].En effet, au cours de la grossesse et du péri-partum se produisentd’importantes modifications cardiocirculatoires qui sont susceptiblesd’entraîner une détérioration notable de l’état d’une femme ayantune cardiopathie.

Modifications cardiovasculairesphysiologiques de la grossesseet du péri-partum

Le volume sanguin augmente de façon importante durant lagrossesse. Cette augmentation commence dès la sixième semaine,s’accentue jusqu’à la moitié de la grossesse, pour se ralentir ensuite.Le degré d’expansion volémique est variable selon les patientes,

allant de 20 à 100 % avec une moyenne de 50 %. Cette augmentationest plus importante en cas de grossesse multiple et chez lesmultipares.L’augmentation du volume plasmatique étant plus importante quecelle des globules rouges, le taux d’hémoglobine baisseprogressivement jusqu’à la 30e semaine, entraînant l’anémie« physiologique » de la grossesse.Ces modifications sont pour l’essentiel attribuées à la stimulationdu système rénine-aldostérone par l’intermédiaire des œstrogènes ;d’autres facteurs humoraux interviennent également dont lesprostaglandines et le facteur natriurétique atrial.Le débit cardiaque est estimé augmenter d’environ 50 % pendant lagrossesse [45]. Cette augmentation commence dès la cinquièmesemaine et s’accentue rapidement jusqu’à la 24e, à partir de laquelleelle se ralentit. Ce phénomène est lié au début principalement àl’augmentation du volume d’éjection, alors qu’au cours du troisièmetrimestre, il est dû surtout à l’accélération de la fréquence cardiaquealors que le volume d’éjection reste stable (voire diminue un peu dufait de la compression de la veine cave par l’utérus).La fréquence cardiaque est maximale pendant le troisième trimestreavec une augmentation moyenne de 10 à 20 battements par minute.En cas de grossesses multiples, la fréquence cardiaque s’élèvedavantage encore [45], de même que le débit cardiaque.La pression artérielle systémique baisse dès le premier trimestre,atteint son niveau minimal vers le milieu de la grossesse et retrouveson niveau habituel près du terme. Cette diminution de la pressionsanguine, prédominant sur la diastolique, est liée à la baisse desrésistances vasculaires systémiques, elle-même secondaire d’une

Claude Almange : Professeur des Universités.Jean-Marc Schleich : Praticien hospitalier.Marcel Laurent : Praticien hospitalier.Centre cardiopneumologique, centre hospitalier universitaire, 2, rue Henri-Le-Guilloux, 35033 Rennes cedex09, France.

Ency

clop

édie

Méd

ico-

Chi

rurg

ical

e1

1-9

40

-K-4

0 11-940-K-40

Toute référence à cet article doit porter la mention : Almange C, Schleich JM et Laurent M. Cardiopathies et grossesse. Encycl Méd Chir (Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), Cardiologie, 11-940-K-40, 2003, 12 p.

Page 2: Cardiopathies et grossesse

part au développement de la circulation placentaire à bassesrésistances et d’autre part à des facteurs hormonaux et humoraux(sécrétion de prostaglandines, facteur natriurétique atrial, oxydenitrique) entraînant une importante augmentation de la complianceartérielle à partir du premier trimestre [76]. Cette baisse desrésistances systémiques a été évaluée à 34 % à la 20e semaine degrossesse.Pendant le travail, le débit cardiaque augmente encore du fait del’accélération de la fréquence cardiaque et de l’augmentation duvolume d’éjection. Lors des contractions, le débit cardiaqueaugmente en moyenne de 34 % [45]. La pression artérielle augmentependant les contractions et la consommation d’oxygène double,voire triple, l’anxiété et la douleur ajoutant leurs effets. Lestechniques anesthésiques ont pour effet de limiter ces modificationshémodynamiques.Immédiatement après la délivrance, la décompression de la veinecave inférieure, surajoutée au transfert du sang de l’utérus dans lacirculation systémique, entraîne une augmentation supplémentairedes pressions de remplissage, du volume d’éjection et du débitcardiaque. La fréquence cardiaque et le débit cardiaque retrouventleurs valeurs habituelles dans les jours suivant la délivrance. Ilsemblerait que les adaptations cardiocirculatoires de la grossessesoient de plus grande amplitude lors de grossesses ultérieures.Un cœur normal s’adapte facilement à ces contraintes ; en revanche,un cœur pathologique pourra supporter difficilement la surchargede travail imposée par la grossesse et l’accouchement. Par ailleurs,la cardiopathie maternelle est toujours susceptible de retentir sur lefœtus, par insuffisance de la circulation placentaire ou insuffisanced’oxygénation.Il faut ajouter à ces modifications hémodynamiques celles del’hémostase qui font de la grossesse un état d’hypercoagulabilité, liéd’une part à l’augmentation de certains facteurs de la coagulation(facteurs VII, VIII, X, fibrinogène, résistance à la protéine C et baissede la protéine S) et d’autre part à une diminution de l’activitéfibrinolytique [37].Les risques thromboemboliques se trouvent ainsi majorés, enparticulier dans la période du post-partum.

Examen physique pendant la grossesse

L’auscultation révèle souvent un premier bruit augmenté etdédoublé, qui peut être interprété à tort comme un B4. Le deuxièmebruit est souvent augmenté et dédoublé en fin de grossesse. Untroisième bruit est parfois entendu.Un souffle systolique innocent est très fréquent au bord gauche dusternum irradiant vers le cou ; de temps mésosystolique et de timbredoux, il est lié à l’hypercinésie circulatoire. Un souffle systolique oucontinu, lié à l’augmentation du flux dans les vaisseaux mammaires,peut être perçu en fin de grossesse ou chez la femme allaitante. Il apour caractéristiques de diminuer, voire de disparaître, avec lapression du stéthoscope ou en position debout.L’examen peut également mettre en évidence une augmentation despulsations jugulaires due à l’augmentation du volume sanguin, desbattements artériels amples et un choc apexien ou un ventriculedroit bien palpables.

Examens complémentaires

La radiographie peut montrer un arc moyen gauche aligné en raisonde la dilatation de l’infundibulum pulmonaire. Le cœur peutsembler élargi en raison de sa position horizontale secondaire à lasurélévation du diaphragme. La vascularisation pulmonaire peutparaître parfois un peu accentuée. Un discret épanchement pleuraln’est pas exceptionnel dans le post-partum précoce.Sur l’électrocardiogramme, l’axe de QRS peut être modifié, mais ilreste généralement dans les limites de la normale. Une petite ondeQ est parfois observée en DIII, de même qu’une onde P négative,

souvent corrigées par l’inspiration. Une tachycardie sinusale est trèsfréquente. Des extrasystoles atriales sont enregistrées dans plus de50 % des cas ; des extrasystoles ventriculaires isolées sont observéesavec la même fréquence. Ces arythmies sont le plus souventasymptomatiques et seulement 10 % des épisodes de palpitations,lipothymies ou syncopes sont contemporains d’anomaliesrythmiques [94].À l’échocardiogramme, il existe une augmentation progressive de lataille des cavités cardiaques, atteignant environ 20 % pour l’oreillettedroite et le ventricule droit, 12 % pour l’oreillette gauche et 6 % pourle ventricule gauche [12]. Le retour aux dimensions antérieuress’effectue progressivement dans le post-partum mais peut demanderplusieurs mois. Les anneaux valvulaires, surtout tricuspidien etpulmonaire, mais aussi mitral, sont également dilatés pouvantentraîner de discrètes régurgitations. La fonction systoliqueventriculaire gauche est en règle inchangée et quelquefoisdiscrètement augmentée. À noter cependant que l’utilisation d’indexindépendants des conditions de charge fait suspecter une légèrebaisse de la contractilité [67]. La fonction diastolique ventriculairegauche n’a été que peu étudiée. La paroi ventriculaire gauche et lamasse ventriculaire sont en général augmentées pendant lesdeuxième et troisième trimestres [45, 67]. Un épanchement péricardiqueminime est assez souvent observé en fin de grossesse [39].L’échographie transœsophagienne peut être pratiquée si nécessaire,car bien tolérée.Un cathétérisme cardiaque peut être réalisé en cas de nécessité(surveillance hémodynamique de l’accouchement ou nécessité d’uneintervention ou d’une valvuloplastie). Il faut alors protéger le fœtusdes radiations, limiter le plus possible le temps d’irradiation etprivilégier l’abord par le membre supérieur. Malgré l’augmentationdu volume circulant, la pression veineuse centrale et les pressionspulmonaires n’augmentent pas au cours de la grossesse, du faitvraisemblablement de la baisse des pressions systémiques etpulmonaires.

Cardiopathies congénitales

Les progrès des thérapeutiques médicales et chirurgicalespermettent maintenant à la plupart des femmes ayant unecardiopathie congénitale d’atteindre l’âge de la procréation.L’importance de ce groupe parmi les cardiopathies observées chezla femme enceinte n’a cessé de croître au cours de ces dernièresdécennies et en constitue actuellement la majorité [97].D’une manière générale, l’évolution maternelle est bonne dans lescardiopathies non cyanogènes. Elle est déterminée par le type decardiopathie, l’état fonctionnel, la fonction ventriculaire gauche, lesrésistances vasculaires pulmonaires, les antécédents d’arythmies oud’autres événements cardiaques. Un score de risque cardiaque aainsi été proposé par Siu [79] retenant comme facteurs prédictifs : lesantécédents d’insuffisance cardiaque ou d’arythmie, le score NewYork Heart Association (NYHA) ou la cyanose, une obstructiongauche, une fraction d’éjection inférieure à 40 %. Il faut cependantégalement prendre en compte le type de la cardiopathie.L’évolution fœtale est également déterminée par l’état fonctionnelmaternel et l’existence ou non d’une cyanose. Les décès fœtauxatteignent 45 % des cas chez les mères cyanosées ; les faibles poidsde naissance et la prématurité sont fréquents chez ces femmes etcorrélés avec leur taux d’hémoglobine et d’hématocrite.Le risque de cardiopathie congénitale est notablement accru chez lesenfants avec une incidence allant de 4 à 14 % [11, 69, 112].

ACCOUCHEMENT

Le déclenchement du travail quand la maturité fœtale est atteintepeut être pratiqué chez les patientes à haut risque pour quel’accouchement ait lieu dans le meilleur environnement médicalpossible.L’accouchement par les voies naturelles doit être la règle et lacésarienne chez des patientes stables n’a que des indicationsobstétricales. Le travail en décubitus latéral gauche atténue les

11-940-K-40 Cardiopathies et grossesse Cardiologie

2

Page 3: Cardiopathies et grossesse

fluctuations hémodynamiques liées aux contractions [97]. L’oxygènedoit être administré aux malades cyanosées ; le monitoring despressions est parfois nécessaire. Les pertes sanguines doivent êtrerapidement compensées. L’utilisation de forceps ou de ventousessera large pour diminuer les efforts expulsifs maternels.L’antibioprophylaxie n’est recommandée « officiellement » pour lesaccouchements non compliqués que chez les patientes ayant uneprothèse valvulaire ou un shunt systémicopulmonaire. Cependant,la difficulté de prévoir les complications de l’accouchement et lesconséquences catastrophiques possibles d’une endocardite rendraisonnable l’antibioprophylaxie chez la plupart des femmes ayantune cardiopathie congénitale.

SHUNTS GAUCHE-DROITE

Les effets de la surcharge volumique du ventricule droit sontcontrebalancés par la baisse des résistances vasculairespériphériques et la grossesse est en général bien tolérée (en l’absenced’hypertension artérielle pulmonaire [HTAP]) si la classefonctionnelle est I ou II et la fonction ventriculaire correcte [114].

¶ Communication interauriculaire

Cardiopathie congénitale la plus fréquemment rencontrée au coursde la grossesse, la communication interauriculaire isolée tolère biencelle-ci en règle générale [ 6 5 ] . Une large communicationinterauriculaire peut cependant se compliquer d’insuffisancecardiaque à l’occasion de troubles du rythme. L’évolution versl’HTAP, habituellement observée seulement après la quatrième oula cinquième décennie, semble cependant dans certains cas êtreaccélérée par la grossesse et un bilan est nécessaire après celle-ci.Une thrombose veineuse peut, en cas de communicationinterauriculaire, se compliquer d’embolie paradoxale et il faut doncapporter une attention particulière à l’état veineux. La récurrence dela cardiopathie est évaluée entre 6 % en cas d’ostium secundum [69]

et 14 % en cas d’ostium primum.

¶ Communication interventriculaire

Rarement observée maintenant chez l’adulte, la communicationinterventriculaire supporte en général bien la grossesse.Whittemore [111] n’a observé aucun décès maternel chez 50 patientesayant 98 grossesses avec 80 % d’enfants vivants. Quelques casd’insuffisance cardiaque ont été observés chez des malades ayant,avant la grossesse, un stade fonctionnel « moyen à médiocre ». Lerisque d’inversion du shunt en cas d’hypotension (hémorragies dela délivrance) paraît exceptionnel. Les patientes ayant été opéréesde leur communication interventriculaire ont des grossesses sansproblème. Cependant, lorsqu’il persiste une HTAP modérée après laréparation chirurgicale, elle peut être aggravée par la grossesse [87] etil faut éviter à ces patientes les facteurs susceptibles d’augmenterles résistances artérielles pulmonaires (hypoxie, acidose, stress). Larécurrence de la cardiopathie est évaluée entre 2 % [114] et 6 % [69].

¶ Canal artériel

Les femmes ayant un petit canal artériel persistant tolèrentparfaitement la grossesse (citons une observation de Perloff [73] avec20 grossesses). Une insuffisance cardiaque peut être observée en casde shunt important. Dans tous les cas, le risque d’endocardite existedurant la délivrance, justifiant l’antibiothérapie. Le risque derécurrence est de l’ordre de 4 %.

¶ Canal atrioventriculaire

Le plus souvent, il a été opéré avant la grossesse et la tolérancedépend du résultat opératoire et notamment de l’importance del’insuffisance mitrale résiduelle éventuelle. À noter que c’est lacardiopathie congénitale ayant le plus fort taux de récurrence (10 %en moyenne).

CARDIOPATHIES PAR OBSTACLES

Dans les obstructions de la voie gauche, l’incapacité du cœur àaugmenter le débit cardiaque peut se traduire par unesymptomatologie fonctionnelle à type de dyspnée ou d’angor.

– La sténose aortique (valvulaire, sous- ou sus-valvulaire) fait courirle risque de syncope, d’insuffisance cardiaque et de mort subite. Untravail d’Arias en 1978 [3] rapportait quatre décès chez 23 patientesau cours de 38 grossesses (et une mortalité fœtale de 36 %). Uneétude plus récente de Lao [51] est moins pessimiste : au cours de 25grossesses, chez 13 patientes (dont sept déjà opérées), il n’y a aucundécès maternel, mais quatre détériorations de l’état cardiaquenécessitant une valvuloplastie et deux interruptions de grossesse.En pratique, il faut tenir compte de l’état fonctionnel et surtout dudegré de sténose, en considérant la surface aortique et non legradient. Si la surface est inférieure ou égale à 1 cm2, il fautenvisager un geste thérapeutique. Celui-ci s’impose en cas demauvaise tolérance au cours de la grossesse. La valvuloplastiesemble préférable à l’intervention chirurgicale.

– Les patientes ayant une cardiomyopathie hypertrophique sontconsidérées comme tolérant médiocrement la grossesse, avecdétérioration clinique et hémodynamique dans environ 20 % descas [25] ; quelques décès ont été rapportés. En cours de grossesse, untraitement bêtabloquant cardiosélectif sera administré aux maladessymptomatiques. En cas d’obstruction, il faut éviter les situationsaugmentant la contractilité ou diminuant la taille du ventriculegauche, c’est-à-dire l’hypovolémie, les vasodilatateurs et lessympathicomimétiques (et notamment les tocolytiques). L’anesthésiepéridurale doit être évitée pour ces mêmes raisons. Un travailcoopératif français est plus optimiste puisque aucune complicationgrave n’a été observée [79], alors qu’une étude italienne récente évaluela mortalité maternelle à 10 pour 1 000 naissances [4].

– La coarctation aortique a classiquement une mauvaise réputation ;dans l’étude de Melcalfe [65] sur 230 patientes ayant une coarctationet 565 grossesses, 13 sont décédées (de dissection ou rupture d’uneaorte fragilisée par les modifications hormonales, ou insuffisancecardiaque). Par ailleurs, la diminution du flux placentaire altère ledéveloppement fœtal. Les complications étant plus fréquentespendant la grossesse que pendant le travail, la correctionchirurgicale est proposée pendant celle-ci si la tension artériellesystolique atteint ou dépasse 200 mmHg, ou en cas d’insuffisancecardiaque. Dans la série lyonnaise [35], 16 patientes non opérées ont31 grossesses avec 25 enfants vivants ; aucun accident maternel n’aété observé mais trois HTA ont compliqué la grossesse. La série dela Mayo Clinic [6] fait état de 118 grossesses chez 50 femmes dont 34ont été opérées ; un décès est survenu par dissection aortique chezune patiente ayant un syndrome de Turner. Une HTA a été souventobservée et rapportée à un gradient de coarctation supérieur à20 mmHg. Son traitement est délicat car le contrôle de la tensionartérielle au membre supérieur peut entraîner une hypotension sous-stricturale compromettant le fœtus. Quatre cardiopathiescongénitales ont été observées chez les enfants. La question resteposée de la grossesse après dilatation par ballonnet, qui ne supprimepas la zone pathologique ; la césarienne est sans doute plus sûrechez ces patientes [24]. Le risque d’endocardite n’existe qu’en cas debicuspidie associée.

– Sténoses pulmonaires : la grossesse est généralement biensupportée malgré la surcharge volumétrique surajoutée à lasurcharge barométrique. Whittemore [111] a rapporté 46 grossesseschez 24 femmes avec 78 % d’enfants vivants ; l’insuffisancecardiaque est très rare. En cas de mauvaise tolérance, une dilatationpercutanée peut être proposée pendant la grossesse [77].

CARDIOPATHIES CYANOGÈNES

La grossesse, abaissant d’une part les résistances périphériques etaugmentant d’autre part le retour veineux, a pour effet d’augmenterle shunt droite-gauche et donc l’hypoxie et la cyanose.

¶ Tétralogie de Fallot

La tolérance maternelle de la grossesse a été totalement modifiéepar la chirurgie. Avant celle-ci, on considérait que 25 % desgrossesses étaient mal tolérées, avec une mortalité maternelle de 4 %.Les anastomoses palliatives avaient très nettement amélioré latolérance, et les interventions correctrices ont amené la mortalitématernelle aux environs de 0 % avec une morbidité très faible [38]. Le

Cardiologie Cardiopathies et grossesse 11-940-K-40

3

Page 4: Cardiopathies et grossesse

retentissement fœtal a également été transformé : il y a 30 ans,seulement 27 % d’enfants naissaient à terme vivants et aucunegrossesse n’aboutissait si l’hématocrite était à 65 %. Il est évidentque dans les rares cas où la tétralogie n’a pas été opérée dansl’enfance, elle doit l’être avant la grossesse. En cas de shunt résiduelavec un rapport débit pulmonaire sur débit systémique supérieur à1,5, ou en cas de sténose pulmonaire résiduelle significative, ouencore en cas d’insuffisance pulmonaire massive, une réinterventiondevrait être envisagée avant la conception [24].

¶ Autres cardiopathies cyanogènesDans les autres cardiopathies cyanogènes avec sténose de la voiepulmonaire (ventricule unique, atrésie tricuspide, doublediscordance), la tolérance maternelle peut être assez bonne si lacardiopathie est équilibrée, mais elle est souvent médiocre : 32 % decomplications cardiovasculaires dans la série de Presbitero [78], dontprès de la moitié d’insuffisance cardiaque. En cas de dilatation del’oreillette droite, il existe un risque accru d’arythmie atriale et dethrombose intra-auriculaire. Le retentissement fœtal est importantavec seulement 43 % de naissances vivantes, dont près de la moitiésont prématurées. Les facteurs principaux à considérer sont le tauxd’hémoglobine et la saturation oxygénée ; une hémoglobineinférieure à 20 g/dL et une saturation du sang artériel en oxygènesupérieure à 85 % sont nécessaires pour permettre d’envisager lanaissance d’un enfant vivant. Les mesures à prendre sont le repos,l’oxygénation lors du travail et 48 heures après, l’antibiothérapie lorsde l’accouchement et l’aide à l’expulsion.Dans les atrésies pulmonaires complexes, c’est-à-dire aveccollatérales systémicopulmonaires, le risque de perte fœtale estimportant ; la mère est exposée aux complicationsthromboemboliques et à la défaillance cardiaque [68].

¶ Syndrome d’EisenmengerC’est une contre-indication formelle à la grossesse. Celle-ci aggraveen effet de façon constante l’état maternel (dyspnée, cyanose).Surtout, la grossesse conduit à la mort dans 30 à 50 % des cas. Lesmécanismes invoqués sont la baisse des résistances systémiques(notamment lors de la délivrance) associée à une augmentation desrésistances pulmonaires du fait de l’hypercoagulabilité et desphénomènes thromboemboliques. La revue de la littérature deGleicher en 1979 [33] faisait état de 70 grossesses chez 44 femmes avecune mortalité de 52 %. Le décès survient surtout lors du travail ouplus encore dans le post-partum. Le pronostic s’est un peu amélioréau fil des années : 36 % de décès dans l’étude rétrospective deWeiss [110] ; 27 % dans l’étude de Daliento [19]. Les décès sont toussurvenus dans le post-partum immédiat et chez des femmespaucisymptomatiques. Toutes les femmes survivantes ont unedétérioration de leur état cardiaque.La conduite à tenir est donc la stérilisation définitive avant lagrossesse, de préférence par voie laparoscopique sous anesthésiegénérale. Si la grossesse est commencée, l’interruption médicale estconseillée. Si elle est poursuivie, le pronostic est impossible. Lesanticoagulants sont discutés, mais le plus souvent conseillés aucours du dernier trimestre et dans le premier mois du post-partum.La césarienne doit être évitée si possible, car elle doublerait lamortalité. Le mode d’anesthésie est discuté. L’accouchement parvoie basse se fera sous surveillance des gaz du sang (de hautesconcentrations d’oxygène peuvent être utiles), de l’hémodynamique(la mise en place d’une sonde de Swan-Ganz dans l’artèrepulmonaire est discutée en raison des risques [86]) et de la volémiedont la chute peut avoir des conséquences catastrophiques.L’administration de NO a été utilisée avec une certaine efficacitépour diminuer les pressions pulmonaires et améliorer l’oxygénationdans de rares cas [57] mais les patientes sont décédées dans le post-partum. La surveillance hospitalière doit être poursuivie environ 2semaines. À noter que si une grossesse s’est déroulée sans problèmeimportant, le risque reste majeur en cas de grossesse ultérieure.

¶ Hypertension artérielle pulmonaireL’HTAP primitive est rarement observée chez la femme enceinte.Elle comporte sensiblement les mêmes risques que le syndrome

d’Eisenmenger avec une mortalité maternelle de 30 à 40 % [108, 110],survenant principalement dans le post-partum. Le décès survient leplus souvent sous forme d’une mort subite, parfois du fait d’unedéfaillance ventriculaire droite. Le risque est imprévisible pouvantconcerner des malades a- ou paucisymptomatiques. La grossesse estdonc formellement contre-indiquée et la stérilisation conseillée. Encas de grossesse, les anticoagulants sont préconisés en raison del’hypercoagulabilité et des risques thromboemboliques. L’utilisationd’antagonistes calciques et de prostaglandines a été tentée dansquelques cas au cours de la grossesse et peut être intéressante [22].L’administration de NO a également été essayée [ 8 5 ] .L’accouchement, de préférence spontané et par voie vaginale, doitavoir lieu sous monitoring et oxygénothérapie ; une analgésieefficace est nécessaire et les pertes sanguines doivent êtreimmédiatement compensées.

CARDIOPATHIES DIVERSES

¶ Anomalie d’Ebstein

La tolérance de la grossesse par une jeune femme ayant uneanomalie d’Ebstein n’a fait l’objet que de rares publications.Donnely, en 1991 [21], a rapporté une série de 12 patientes ayant eu42 grossesses qui ont abouti à la naissance de 36 enfants vivants(dont quatre prématurés). Deux cas de mauvaise tolérancematernelle ont été observés, avec augmentation de la cyanose pourl’un et passage en fibrillation auriculaire pour l’autre qui avait unsyndrome de préexcitation. Presbitero [78], dans une étude consacréeà la grossesse au cours des cardiopathies cyanogènes, a rapportéhuit cas d’anomalie d’Ebstein avec 14 grossesses, aboutissant à lanaissance de 12 enfants vivants ; trois complicationscardiovasculaires ont été observées dont une tachycardiesupraventriculaire. Dans cette série particulière d’Ebstein aveccyanose, la saturation oxygénée artérielle apparaît le facteur essentieldu pronostic fœtal. La série la plus importante est celle deConnolly [16], qui rapporte 44 patientes (dont dix opérées) ayant eu111 grossesses, aboutissant à la naissance de 85 enfants vivants (75 %des cas) ; 23 d’entre eux étaient prématurés, et cinq avaient descardiopathies mais aucune anomalie d’Ebstein. Il est étonnant deconstater qu’il n’y a pas de différence entre les grossesses desmalades non cyanosées et celles des malades cyanosées : 26 maladesnon cyanosées ont eu 59 grossesses avec 44 enfants vivants (75 %) ;18 malades cyanosées ont eu 52 grossesses avec 39 enfants vivants(75 %). Le poids de naissance des enfants diffère cependant : 3,1 kgdans le premier cas contre 2,5 kg dans le deuxième. Il n’y a euaucune complication maternelle sérieuse. Aucune des patientesayant un syndrome de préexcitation n’a eu d’arythmie significativeau cours de sa grossesse.

¶ Double discordance (transposition corrigée)

En cas de double discordance isolée, le pronostic semble bon : 37grossesses chez 18 patientes dans la série de la Mayo Clinic [17]

aboutissant à la naissance de 33 enfants vivants, sans aucun décèsmaternel et une seule insuffisance cardiaque liée à l’insuffisance dela valve auriculoventriculaire systémique. Celle-ci semble le facteurprincipal du pronostic car elle est susceptible de s’aggraver au coursde la grossesse. Dans une autre étude [103], cinq patientes sur 19développent des complications cardiovasculaires pendant lagrossesse.

¶ Intervention de Fontan

Après intervention de type Fontan (dérivation du sang cave vers lesartères pulmonaires), les patientes ont une capacité limitée àaugmenter leur débit cardiaque. Cannobio [13] a colligé 33 grossesseschez 21 femmes, avec 15 naissances vivantes. Il y a eu en effet 39 %de fausses couches au premier trimestre. Aucun décès maternel n’està déplorer et seulement deux cas ont eu des complicationscardiaques. Au total, il apparaît qu’une malade ayant eu uneanastomose de Fontan avec un bon état fonctionnel ethémodynamique, c’est-à-dire avec une fonction ventriculaire gauchecorrecte avant la grossesse, doit bien supporter la charge de celle-ci,avec un risque cependant d’arythmie supraventriculaire.

11-940-K-40 Cardiopathies et grossesse Cardiologie

4

Page 5: Cardiopathies et grossesse

¶ Transposition des gros vaisseaux avec réparationintra-atriale (Mustard ou Senning)

Chez ces malades, le ventricule systémique est le ventricule droit etla question pouvait se poser de la tolérance de la surchargevolumique de la grossesse par celui-ci. En 1994, Clarkson [15] arapporté 15 grossesses chez neuf femmes ayant eu une interventionde Mustard ; aucune n’a eu de détérioration clinique ouhémodynamique, mais toutes étaient asymptomatiques avant lagrossesse. Genoni [32] a rapporté 13 grossesses chez 11 femmes ayanteu une intervention de Senning ; une seule patiente a eu unedétérioration de son état ; c’était la seule qui n’était pas en classefonctionnelle I ou II. En conclusion, les patientes ayant unetransposition des gros vaisseaux opérée à l’étage atrial et unefonction cardiaque (c’est-à-dire ici ventriculaire droite) normalepeuvent mener à bien une grossesse.On ne dispose pas actuellement de série concernant des patientesayant eu une réparation anatomique à l’étage artériel.

¶ Cardiopathies réparées par un tube ventriculedroit-artère pulmonaire (truncus, atrésie pulmonaireà septum ouvert, transposition avec communicationinterventriculaire et sténose pulmonaire)

De rares cas de grossesse se sont déroulés chez des patientes ayanteu ce type d’intervention avec des évolutions favorables, enl’absence d’obstruction du tube. La grossesse semble cependantaccélérer la dégénérescence de celui-ci.

¶ Prothèses valvulaires

Elles posent essentiellement le problème de l’anticoagulation et sontexposées à un risque accru de thrombose au cours de la grossesse [1]

(cf infra : Cardiopathies valvulaires).

¶ Syndrome de Marfan

Il était considéré comme comportant un risque élevé de dissectionaortique et de décès depuis le travail de Pyeritz en 1981 [80] : 16 décèssur 32 femmes, en fin de grossesse, lors du travail ou dans le post-partum, par dissection aortique. Il est apparu que la plupart despatientes avaient une dilatation aortique ou une insuffisancevalvulaire. Une évaluation prospective de 45 grossesses chez21 femmes ayant un syndrome de Marfan a permis de définir unerègle de conduite reposant sur la mesure du diamètre aortique [88].Si celui-ci est supérieur à 40 mm, la grossesse est contre-indiquée ;s’il est inférieur à 40 mm, la grossesse est généralement bien tolérée.Il est recommandé de prescrire un traitement bêtabloquant et unesurveillance échographique toutes les 6 à 10 semaines, car l’absencede complication ne peut être garantie. Une intervention chirurgicalepeut être nécessaire pendant la grossesse en cas d’augmentation dela dilatation aortique et bien entendu de dissection, avec un risquefœtal important. L’accouchement sera effectué de préférence parvoie basse en l’absence de dilatation aortique et par césarienne encas d’anévrisme. Le risque accru de dissection persiste 6 à8 semaines après l’accouchement. Dans tous les cas, la transmissiondu syndrome est de 50 % des cas.

¶ Conclusion

Au total, chez la plupart des femmes ayant une cardiopathiecongénitale, opérée ou non, la grossesse a une évolution favorablepour la mère et pour le fœtus. Les exceptions concernent lessyndromes d’Eisenmenger, les cardiopathies cyanogènes sévères, lessténoses aortiques serrées et les syndromes de Marfan avecdilatation aortique. Dans tous les cas, une évaluation précise de lacardiopathie doit être faite avant la grossesse, concernant enparticulier la fonction du ventricule systémique (échocardiographie,éventuellement épreuve d’effort). Un score de risque cardiaque peutêtre calculé à partir de facteurs prédictifs simples comportant lesantécédents, le stade NYHA, la cyanose, l’obstruction de la voiegauche, la fraction d’éjection.Un suivi rigoureux doit être exercé au cours de la grossesse,associant étroitement cardiologue et obstétricien. L’accouchement

par voie basse doit être privilégié dans l’immense majorité des cas,avec facilitation de l’expulsion. Une antibiothérapie sera le plussouvent conseillée alors que l’anticoagulation dépendra de chaquecas. Un échocardiogramme fœtal vers la 18e semaine permettra leplus souvent de rassurer les futurs parents quant au cœur de leurenfant, le risque moyen de transmission de la cardiopathie étant de5 à 8 % [11, 69, 96].Il se pourrait, indépendamment des antécédents maternels, quel’ingestion de polyvitamines, dans les 3 mois précédant la grossesseet pendant les 3 premiers mois de celle-ci, diminue l’incidence descardiopathies congénitales [8].

Valvulopathies rhumatismales

Même si leur fréquence est en nette diminution dans les paysoccidentaux, les cardiopathies rhumatismales restent trèspréoccupantes dans les pays en voie de développement. La tolérancelors de la grossesse dépend du type de la valvulopathie [41] et de sonstade évolutif.

RHUMATISME ARTICULAIRE AIGU

Très rare en Europe, il constitue un problème de santé publique enAfrique du Nord, Afrique Centrale et Extrême-Orient. Le premierépisode survient en général dans l’enfance, mais des rechutes sontpossibles plus tard et donc éventuellement chez la femme enceinte.La grossesse ne semble pas un facteur favorisant la récidive et il n’ya pas d’indication à instituer, lors de celle-ci, un traitement préventifdes rechutes.

RÉTRÉCISSEMENT MITRAL

C’est la valvulopathie la plus fréquemment en cause pendant lagrossesse et la plus susceptible d’entraîner des complications [41].L’augmentation du volume sanguin et du débit cardiaqueaccentuent le gradient oreillette-ventricule gauche et en moyenne lagrossesse détériore l’état fonctionnel de 1 à 2 classes de la NYHA.La dyspnée survient généralement au deuxième trimestre et peutaboutir rapidement à l’œdème aigu du poumon., notamment àl’occasion d’un passage en fibrillation auriculaire. La valvulopathieest parfois découverte lors de cette décompensation.Les patientes ayant une sténose mitrale serrée devraient faire l’objetd’un geste thérapeutique avant la grossesse. Si celle-ci estcommencée, une surveillance rigoureuse est nécessaire ; les maladespeuvent bénéficier d’un traitement bêtabloquant qui améliorel’hémodynamique et joue un rôle préventif vis-à-vis de la survenued’une fibrillation auriculaire [29] ; l’adjonction de diurétiques estnécessaire si la dyspnée s’accentue.Si le traitement médical est inefficace, il apparaît légitime deproposer un geste thérapeutique : la valvuloplastie mitralepercutanée a aujourd’hui supplanté la commissurotomie à cœurfermé ; si les conditions anatomiques sont bonnes (rétrécissementmitral pur à valves souples), cas le plus fréquent chez les femmesjeunes, cette procédure est efficace, améliorant l’état de la mère etétant bien tolérée par le fœtus. Il faut bien entendu utiliser uneprotection abdominale et pelvienne et raccourcir au maximum laprocédure. Les résultats sont le plus souvent très bons avec ungradient transmitral baissant en moyenne de 21 à 5 mmHg et unesurface mitrale passant de 0,9 à 2,1 cm2 [77] ; la mortalité fœtale estquasi nulle [48]. Le risque de créer une fuite mitrale justifie deréserver la procédure aux patientes qui restent symptomatiquesmalgré le traitement médical. Si la valvuloplastie percutanée n’estpas possible, la commissurotomie à cœur ouvert peut être nécessaire,avec un risque fœtal de 10 à 33 % [77]. Dans tous les cas,l’accouchement par voie basse doit être privilégié, avec recoursfréquent aux forceps ou à la ventouse [41].

INSUFFISANCE MITRALE

Elle est beaucoup plus rare que le rétrécissement mitral et beaucoupmieux tolérée. La surcharge volumétrique consécutive à la grossesseest en effet contrebalancée par la baisse des résistances périphériques

Cardiologie Cardiopathies et grossesse 11-940-K-40

5

Page 6: Cardiopathies et grossesse

qui diminue le volume régurgité [29]. En cas de symptomatologiefonctionnelle, un traitement digitalodiurétique peut être institué ; siun vasodilatateur paraît nécessaire, il vaut mieux utiliserl’hydralazine qu’un inhibiteur de l’enzyme de conversion (IEC) enraison du retentissement fœtal possible de celui-ci. La chirurgie estexceptionnellement nécessaire en cours de grossesse ; elle fait courirun risque de mortalité fœtale de l’ordre de 25 à 30 % [71].Le prolapsus valvulaire mitral est bien toléré et peut mêmedisparaître au cours de la grossesse en raison de l’augmentation devolume du ventricule gauche. L’accouchement ne pose pas deproblème non plus ; si la valve est épaisse ou fuyante,l’antibiothérapie semble souhaitable [24].

INSUFFISANCE AORTIQUE

Elle est également, comme l’insuffisance mitrale, bien tolérée enraison de la baisse des résistances vasculaires qui diminue le volumerégurgité, ainsi qu’en raison de la tachycardie qui raccourcit ladiastole. Un traitement digitalodiurétique peut être prescrit en casde symptomatologie fonctionnelle. L’intérêt d’un traitementvasodilatateur chez la femme enceinte n’a pas été établi [29].

RÉTRÉCISSEMENT AORTIQUE

Il est rarement sévère chez une femme en âge de procréer en raisonde la lenteur d’évolution des formes rhumatismales, et de la plusgrande fréquence des formes congénitales chez l’homme. Lesproblèmes du rétrécissement aortique rhumatismal sont bienentendu les mêmes que ceux des sténoses congénitales (cf supra).En cas de rétrécissement serré (gradient maximal ≥ 100 mmHg [77]),un geste thérapeutique doit être envisagé. En cas de lésionrhumatismale, il existe souvent un certain degré de fuite qui peutêtre aggravé si l’on pratique une valvuloplastie percutanée.Dans toutes ces valvulopathies, l’accouchement par voie basse estpréférable et le traitement antibiotique paraît souhaitable, même sila conférence de consensus de 1992 et les recommandations del’American College of Cardiology/American Heart Association(ACC/AHA) [7] ne le considèrent pas comme nécessaire. L’anesthésiepéridurale est recommandée et l’extraction doit être facilitée parforceps ou ventouse. Les tocolytiques sont contre-indiqués en cas desténose mitrale.

PROTHÈSES VALVULAIRES

La tolérance hémodynamique de la grossesse est en général bonnechez les patientes ayant une prothèse fonctionnant correctement. Leproblème essentiel est celui du traitement anticoagulant en cas deprothèse mécanique. Le risque thromboembolique lié à la prothèseest en effet considérablement augmenté par la grossesse. Hanania [40],dans une étude coopérative française portant sur 155 observationsde grossesse chez 103 patientes ayant une prothèse valvulaire,retrouve 15 % d’accidents thromboemboliques dont 9 % dethromboses de prothèse, avec une mortalité de 4 %. Menschen-gieser [64] observe six accidents thromboemboliques sur 92 grossesses.Plusieurs facteurs interviennent : le type de la prothèse (les prothèsesde première génération type Starr-Edwards ou Bjork-Shiley étantbeaucoup plus thrombogènes) ; le siège de la prothèse (mitral danstrois quarts des cas) ; la nature du traitement antithrombotique. Ilapparaît nettement qu’il y a plus d’accidents thromboemboliquessous héparine que sous antivitamines K [14, 40] ; celles-ci ont pourinconvénient majeur de franchir la barrière placentaire et d’entraînerde ce fait des risques spécifiques pour le fœtus, en particulier celuid’embryopathie coumarinique lorqu’elles ont été administrées de lasixième à la 12e semaine de la grossesse [113] (dans toutes ces études,c’est essentiellement la warfarine qui a été utilisée, alors que laphénindione semblerait dénuée d’effets tératogènes [42]). Il estpossible cependant que les risques des antivitamines K soient dose-dépendants et qu’au-dessous de 5 mg/j de warfarine, lescomplications soient beaucoup plus rares [105].La stratégie thérapeutique est donc délicate et il n’y a pas deconsensus actuellement : pour la Société européenne decardiologie [34] et l’ACC/AHA [7], les antivitamines K doivent êtrepréférées pendant les 35 premières semaines de la grossesse, avecensuite un relais par l’héparine jusqu’à l’accouchement ; pour la

Société française de cardiologie [99], cette attitude est à discuter avecl’administration d’héparine sous-cutanée pendant le premiertrimestre, relayée par les antivitamines K jusqu’à la 36e semaine oùl’héparine est reprise ; Elkayam [23] a proposé une stratégie prenanten compte le niveau de risque estimé des patientes, fonction du typeet du siège de la prothèse. Dans tous les cas, le choix du typed’anticoagulation doit être effectué après information complète dela patiente et de son conjoint sur les risques inhérents aux différentesmodalités thérapeutiques. L’utilisation des héparines de bas poidsmoléculaire (HBPM) permettra peut-être de résoudre prochainementce difficile problème. Cependant, s’il est certain que l’énoxaparineest bien tolérée pendant la grossesse [53, 90], son efficacité pourprévenir la thrombose de valve n’est pas démontrée [55, 90].L’American College of Obstetricians and Gynecologists (AGOG)déconseille l’utilisation des HBPM chez la femme enceinte ayant uneprothèse valvulaire. L’héparine est arrêtée au début du travail etreprise 6 heures après l’accouchement ; la voie basse doit êtreprivilégiée, la césarienne exposant à des difficultés hémodynamiqueset à des complications thromboemboliques.L’antibioprophylaxie de l’endocardite apparaît nécessaire chez cesporteuses de prothèse, bien que les recommandations del’ACC/AHA la considèrent comme facultative [7].

Troubles du rythme

Les troubles du rythme n’ont d’autres caractères particuliers aucours de la grossesse que leurs conséquences éventuelles pourl’enfant.

TACHYCARDIES

¶ Étage atrial

Tachycardie sinusale

La tachycardie sinusale est physiologique et maximale vers lehuitième mois, pouvant atteindre par instants 130, voire 140/min.Elle est sensible aux influences du système nerveux végétatif.

Extrasystoles atriales

Les extrasystoles atriales sont fréquentes au cours de la grossesse,vraisemblablement favorisées par les modifications de pressionintrathoracique et les variations du tonus sympathique. Ellessurviennent le plus souvent sur cœur sain et ne nécessitent untraitement que si elles entraînent des symptômes fonctionnels. On arecours alors préférentiellement aux bêtabloquants.

Tachycardies atriales et flutter

Ils sont rares en l’absence de cardiopathie sous-jacente. Le traitementdépend de la tolérance hémodynamique. La fréquence ventriculairepeut être ralentie par la digoxine, ou, en cas d’inefficacité, par levérapamil ou les bêtabloquants [54]. En cas d’échec de cesmédicaments, une stimulation auriculaire par voie œsophagienne estpréférée à la voie endocavitaire en raison de l’irradiation quenécessite celle-ci. Si l’état hémodynamique est précaire, unecardioversion est possible.

Fibrillation auriculaire

Elle ne s’observe qu’en cas de pathologie préexistante (valvulopathiemitrale, cardiomyopathie, hyperthyroïdie). Le retentissementhémodynamique et les complications thromboemboliquesaugmentent la morbidité, voire la mortalité, maternelle et fœtale. Sil’état hémodynamique est stable, la fréquence cardiaque peut êtreralentie par la digoxine, les bêtabloquants ou le vérapamil, seuls ouen association. Le retour en rythme sinusal peut être favorisé par lesquinidiniques ou l’amiodarone [54]. La cardioversion peut être utiliséeen cas d’hémodynamique précaire, après traitement anticoagulant.Le traitement préventif de la rechute fait appel aux antiarythmiquesde classe IC ou III. Il n’est pas prouvé que la grossesse augmente lerisque thromboembolique de la fibrillation auriculaire isolée et onne sait pas si le traitement anticoagulant est nécessaire dans ce cas.

11-940-K-40 Cardiopathies et grossesse Cardiologie

6

Page 7: Cardiopathies et grossesse

Tachycardies jonctionnelles paroxystiques

Elles sont les troubles du rythme les plus fréquemment observés aucours de la grossesse. Celle-ci favorise en effet ces tachycardies quidébutent parfois à cette occasion ou augmentent de fréquence, sansque le mécanisme de cette aggravation soit bien connu.L’interruption de la crise recourt d’abord aux manœuvres vagaleshabituelles (Valsalva, compression sinocarotidienne). L’adénosineintraveineuse (6-12 mg) est efficace et sans danger [26]. En cas d’échec,on utilise le vérapamil ou la stimulation auriculairetransœsophagienne. Le traitement préventif de ces tachycardiesréciproques chez la femme enceinte dépend de la fréquence et de latolérance des accès ; si nécessaire, les bêtabloquants ou lesquinidiniques pourront être utilisés. En cas de voie accessoire, lesdigitaliques, qui peuvent faciliter la conduction dans cette voie etdonc la dégénérescence d’une éventuelle fibrillation auriculaire enfibrillation ventriculaire, sont à éviter. Chez les patientes trèssymptomatiques, malgré les traitements médicaux, uneradiofréquence du circuit de réentrée peut être réalisée [36] enprotégeant le fœtus de l’irradiation.Les bêtamimétiques (tocolytiques) doivent être évités en cas desyndrome de préexcitation.

¶ Étage ventriculaire

Extrasystoles ventriculaires

Elles sont fréquentes au cours de la grossesse. Elles correspondentle plus souvent à une parasystolie ventriculaire idiopathique,naissant du ventricule droit et survenant souvent dans unefourchette de fréquence définie. Le pronostic est bon et le traitementn’est nécessaire qu’en cas de symptomatologie fonctionnelle ; lesbêtabloquants sont en général efficaces.

Tachycardies ventriculaires

Elles sont rares au cours de la grossesse. Elles sont le plus souventparoxystiques et surviennent chez des jeunes femmes ayant un cœurnormal (22 fois sur 28 tachycardies ventriculaires recensées parLeung [54]). Le traitement curatif repose sur la lidocaïne en cas debonne tolérance hémodynamique ; si la tolérance est médiocre ouen cas d’échec du traitement médicamenteux, un choc électriqueexterne synchronisé peut être effectué. Le traitement préventif, s’ilne peut concerner la cardiopathie sous-jacente, repose sur lesbêtabloquants ou les médicaments de classe IC quand la fonctionventriculaire gauche le permet ou sur l’amiodarone dans le cascontraire, en connaissant le retentissement possible de cemédicament sur la fonction thyroïdienne du fœtus.

Torsades de pointe

Elles sont rarissimes chez la femme enceinte. Elles peuventcompliquer un syndrome du QT long et justifient un traitementbêtabloquant.

SYNDROME DU QT LONGLes patientes ayant un QT long familial ont un risque accrud’événements cardiaques pendant la grossesse et surtout dans lepost-partum et doivent donc avoir un traitement bêtabloquant lorsde ces périodes [81].

BRADYCARDIESLes blocs auriculoventriculaires congénitaux jusqu’alors bien toléréssupportent en général bien la grossesse, mais peuvent parfois êtreaggravés par celle-ci. Ils nécessitent alors un entraînementélectrosystolique [52]. Le choix est alors discuté entre la voieendocavitaire qui entraîne un risque d’irradiation pour le fœtus et lavoie épicardique nécessitant une anesthésie générale. Inversement,les troubles de conduction auriculoventriculaires peuventexceptionnellement être améliorés par la grossesse [44].

CARDIOVERSIONElle est possible au cours de la grossesse. L’énergie recommandéevarie avec l’arythmie allant de 25 à 50 joules pour le flutter, à 200,voire 360 joules, pour la fibrillation auriculaire avec syndrome de

préexcitation ou la fibrillation ventriculaire. Quelques bradycardiesfœtales transitoires ont été observées après choc électrique.

DÉFIBRILLATEUR AUTOMATIQUE IMPLANTABLE

Il n’a pas été rapporté d’implantation de défibrillateur pendant lagrossesse, mais des grossesses se sont déroulées chez des patientesayant un défibrillateur, sans complication particulière [31].

Cardiopathies ischémiques

Elles sont très rares à l’âge de la procréation.

ANGINE DE POITRINE

C’est le symptôme le plus fréquent de l’insuffisance coronariennechez la femme enceinte. Le facteur de risque principal semble être letabagisme ; le diabète, l’hypercholestérolémie (en se rappelant quele cholestérol total, le low density lipoprotein [LDL]-cholestérol et lestriglycérides sont augmentés au cours de la grossesse) ou l’HTA sontmoins souvent en cause.

INFARCTUS DU MYOCARDE

Il est exceptionnel au cours de la grossesse et sa fréquence estimée à1/10 000 accouchements. Elle est susceptible d’augmenter avecl’élévation actuelle de l’âge moyen des femmes enceintes et letabagisme féminin.Roth et Elkayam [89] ont colligé 125 observations qui permettent debrosser le tableau de l’infarctus du myocarde au cours de lagrossesse.Celui-ci survient le plus souvent au cours du troisième trimestrechez des femmes âgées généralement de plus de 33 ans (sauf dansle post-partum où l’âge moyen des patientes est moins élevé) et chezdes multipares.Les facteurs de risque sont : une histoire familiale de coronaropathie,une dyslipidémie, un diabète, un tabagisme et l’utilisation préalablede contraceptifs oraux.L’athérosclérose coronaire est l’étiologie la plus fréquente mais n’estobservée que dans moins de la moitié des cas où les coronaires ontété étudiées (par coronarographie ou examen anatomique). Lesautres mécanismes retrouvés sont : une thrombose dans 21 % descas, une dissection coronaire (16 % des cas) survenantessentiellement dans le post-partum immédiat [83], un anévrismecoronaire plus rarement. Ont été décrits également : les collagénoses,la maladie de Kawasaki, le phéochromocytome, la sténose aortique,un fibroélastome papillaire. Dans 29 % des cas, les coronairesapparaissent normales : un spasme est alors évoqué, favorisant lathrombose (la grossesse réalisant un état d’hypercoagulabilité avecnotamment diminution du tissue plasminogen activator [t-PA] et dela protéine S). Le spasme a parfois été déclenché par l’utilisation debromocriptine ou d’ergonovine.La symptomatologie clinique n’a pas de particularité, en dehors dufait que le diagnostic n’est souvent pas évoqué d’emblée sur ceterrain, et une embolie pulmonaire ou une péricardite sont plussouvent suspectées. L’analyse de l’électrocardiogramme doit tenircompte des modifications induites par la grossesse ou lacésarienne [61]. La localisation la plus fréquente est la paroiantérieure. Le dosage des enzymes musculaires est d’interprétationdifficile pendant le travail ou au décours d’une césarienne. Le tauxde la troponine I est le marqueur de choix pour le diagnostic del’infarctus au cours de la grossesse et il n’est pas modifié par letravail et la délivrance [93]. L’échocardiogramme, montrant un troublede la cinétique segmentaire, peut être utile.Le pronostic de l’infarctus du myocarde au cours de la grossesse estgrave, avec une mortalité augmentant avec les trimestres. Dans lasérie de Roth [89], la mortalité maternelle globale est de 21 %, et estplus élevée en péri- et post-partum qu’avant l’accouchement. Lamortalité fœtale est de 13 % (et le plus souvent associée à la mortmaternelle).Le traitement est délicat mais rejoint celui de l’infarctus dumyocarde habituel.

Cardiologie Cardiopathies et grossesse 11-940-K-40

7

Page 8: Cardiopathies et grossesse

– Les thrombolytiques sont en principe contre-indiqués au cours dela grossesse ; ils ont été utilisés surtout dans la maladiethromboembolique exposant aux hémorragies maternelles et à unaccouchement prématuré. L’évolution fœtale est favorable dans lamajorité des cas (la streptokinase ne franchissant pas la barrièreplacentaire, tout au moins en fin de grossesse).

– Des angioplasties coronaires [18, 107] et des poses de stents [92] ontété effectuées en cours de grossesse en protégeant le fœtus contrel’irradiation.

– L’aspirine a été utilisée à posologie faible à une large échelle chezles femmes enceintes hypertendues et peut donc être prescrite.

– Il en est de même pour les bêtabloquants, de préférencecardiosélectifs.

– L’anticoagulant de choix est bien entendu l’héparine qui nefranchit pas la barrière placentaire ; elle doit être interrompue endébut de travail.

– Les dérivés nitrés peuvent être utilisés.

– Quelques pontages aortocoronaires ont été effectués en cours degrossesse [59].L’accouchement aura lieu, si possible, au moins 3 semaines aprèsl’infarctus du myocarde. La voie basse sera privilégiée (avecfacilitation de l’expulsion), la césarienne n’étant indiquée que pourdes raisons obstétricales ou, peut-être, en cas d’angor instable. Il fautéviter l’utilisation de l’ocytocine et de l’ergonovine en post-partum.On dispose de peu de données concernant la grossesse chez desfemmes ayant des antécédents d’infarctus du myocarde. Elle semblepouvoir être autorisée si la fonction ventriculaire est correcte.

Cardiomyopathies

CARDIOMYOPATHIE DU PÉRI-PARTUM (CMPP)

La CMPP est une défaillance cardiaque de cause inconnue survenantdurant la grossessse ou dans la période du post-partum. Décritepour la première fois avec précision en 1937, elle est devenue uneentité reconnue avec l’étude de Meadows en 1957 [62]. Les critèresrequis pour le diagnostic varient selon les auteurs en ce qui concernela date de survenue : lors du dernier mois de la grossesse ou lorsdes 5 mois suivant l’accouchement pour le National Heart Lung andBlood Institute (Pearson [72]) reprenant les travaux de Demakis [20] ;Meadows retient le dernier trimestre de la grosssesse ou les 3 moisdu post-partum ; Elkayam [24] élargit la période aux 6 derniers moisde la grossesse et aux 6 mois suivant l’acouchement. En pratique, lediagnostic est porté dans deux tiers des cas au cours du premiermois suivant la naissance [104]. Les autres critères nécessaires sontl’absence d’antécédents cardiovasculaires et l’absence d’autre causeidentifiable de défaillance cardiaque. Il n’y a pas de test diagnostiquespécifique et la CMPP est donc un diagnostic d’exclusion [24].L’altération de la fonction systolique ventriculaire gauche est définieà l’échographie par une fraction d’éjection inférieure à 45 % pourHibbard [43] et à 40 % pour Elkayam [24].L’incidence de la CMPP est évaluée à 1/15 000 grossesses aux États-Unis [82] mais peut atteindre 1/1 000 en Afrique [50]. En France, en1990, Ferrière n’avait colligé que 11 cas en 10 ans [30]. Les symptômeshabituels sont la dyspnée, la fatigue, les palpitations, plus rarementdes douleurs thoraciques ou des œdèmes des membres inférieurs.L’examen retrouve un troisième bruit et souvent un soufflesystolique d’insuffisance mitrale et/ou d’insuffisance tricuspide.L’électrocardiogramme montre une tachycardie, des troubles de larepolarisation, plus rarement des troubles de la conduction ou desarythmies. Sur la radiographie, il existe en règle une cardiomégalie.À l’échocardiogramme, on observe une dilatation des quatre cavitéset une dysfonction systolique ventriculaire gauche ; une insuffisancemitrale et une insuffisance tricuspide sont fréquentes ; unépanchement péricardique est parfois noté.Le tableau clinique et hémodynamique est donc identique à celuides autres formes de cardiomyopathies dilatées [24]. Le fait particulierest le terrain : femme jeune enceinte ou venant d’accoucher, avec

assez fréquemment un retour rapide à la normale. À noter certainsfacteurs favorisants : l’âge : femme de plus de 30 ans, la multiparité,la gemellité, un état prééclamptique. La responsabilité d’unemyocardite a été suggérée par certains après biopsie myocardique(78 % d’aspect de myocardite pour Midei [66]), mais non confirméepar d’autres [50].L’évolution de la CMPP se fait vers la guérison complète dans 50 à60 % des cas en 6 mois environ [104]. Dans les autres cas, il persisteune dysfonction ventriculaire gauche ou encore l’évolution se faitvers l’aggravation et la mort ou la transplantation cardiaque.Le traitement repose sur les médicaments habituels de l’insuffisancecardiaque : diurétiques, digitaliques, vasodilatateurs. Les IEC sonten principe contre-indiqués pendant la grossesse et il faut leurpréférer à cette période l’hydralazine. Les anticoagulants sontrecommandés en raison des risques thromboemboliques. Lesinotropes intraveineux (dopamine, dobutamine) sont parfoisnécessaires ; l’assistance circulatoire a été utilisée. L’administrationd’immunoglobulines intraveineuses a été signalée comme pouvantêtre efficace. Le traitement de dernier recours a été dans certains casla transplantation cardiaque, avec une mortalité de 12 à 18 % [66, 104].L’évolution de ces malades ne semble pas différente de celle desfemmes transplantées pour une autre indication.Le problème des grossesses ultérieures a été étudié par Elkayam [28]

chez 44 femmes ayant eu une CMPP et un total de 60 grossessesultérieures ; 28 de ces femmes (groupe I) avaient retrouvé unefonction ventriculaire normale alors que 16 conservaient unedysfonction ventriculaire gauche (groupe II). Des signes dedéfaillance cardiaque sont survenus dans 21 % des cas du groupe Iet dans 42 % du groupe II ; la mortalité fut nulle dans le groupe I etde 19 % dans le groupe II. En conséquence, si une dysfonctionventriculaire persiste après une CMPP, une nouvelle grossesse estdéconseillée ; une rechute de CMPP reste possible, même si lafonction ventriculaire est redevenue normale. Il est vraisemblable,dans cette dernière condition, que la grossesse démasque unealtération non apparente de la réserve contractile.

CARDIOMYOPATHIES DILATÉES

L’association grossesse et cardiomyopathie dilatée est très rare. Lerisque de complications, c’est-à-dire de défaillance cardiaque,dépend du stade évolutif de la cardiomyopathie dilatée. La grossesseest formellement contre-indiquée en cas de stade fonctionnel III ouIV ; au stade II, une surveillance rigoureuse est nécessaire pouroptimiser la thérapeutique. En cas d’insuffisance cardiaque résistantau traitement, une interruption de grossesse doit être envisagée.

CARDIOMYOPATHIES HYPERTROPHIQUES

Cf supra : Cardiopathies congénitales.

Affections du péricarde

PÉRICARDITES AIGUËS

Une péricardite aiguë peut survenir au cours de la grossesse. Ellen’a pas de caractères particuliers et la douleur thoracique est lesymptôme le plus fréquent [63]. La découverte d’un épanchementpéricardique à l’échographie ne signifie pas obligatoirementpéricardite, car il est retrouvé à l’examen systématique dans denombreux cas (40 % en fin de grossesse pour Halphen [39]).Toutes les étiologies habituelles peuvent être rencontrées, mais lapéricardite virale ou idiopathique est la plus fréquente. Il fautrechercher systématiquement, par un bilan immunologique, unlupus érythémateux, celui-ci pouvant être exacerbé par lagrossesse [63].L’évolution de la péricardite virale est en règle générale favorablesous traitement par anti-inflammatoires non stéroïdiens (l’aspirineétant utilisée de préférence en début de grossesse). Les corticoïdesne sont utilisés que dans les formes résistantes. La tamponnade esttrès rare, nécessitant une péricardocentèse.Quelques observations de péricardites à germes figurés ont étérapportées au cours de la grossesse.

11-940-K-40 Cardiopathies et grossesse Cardiologie

8

Page 9: Cardiopathies et grossesse

PÉRICARDITES CONSTRICTIVES [63]

Elles sont très rarement observées au cours de la grossesse ; laplupart sont consécutives à une irradiation ou à des antécédents dechirurgie cardiaque. En général bien tolérées, elles ne nécessitentqu’exceptionnellement la péricardectomie. Quelques cas degrossesse après péricardectomie ont été rapportés.

Transplantations cardiaques

La grossesse après transplantation cardiaque a longtemps étédéconseillée par la plupart des centres, en raison des risquespotentiels pour la mère et de la possible tératogénicité desimmunosuppresseurs [106]. Cependant, la durée et la qualité de viedes patientes ayant eu une transplantation cardiaque augmentantconsidérablement, la grossesse est devenue une question importantechez les jeunes femmes transplantées. Certains problèmes sontparticuliers à cette situation : ainsi le cœur greffé, dénervé, doitrépondre aux modifications hémodynamiques générées par lagrossesse ; de plus, la prévention du rejet nécessite des procéduresinvasives.Les premiers cas de grossesse après transplantation cardiaque ontété rapportés en 1988. La plus importante série est l’étudemulticentrique de Branch en 1998 [9] complétant celle deWagoner [106] ; 47 grossesses ont été colligées chez 35 femmestransplantées : les 35 premières grossesses ont abouti à la naissancede 26 enfants vivants (71 %) dont une paire de jumeaux ; les 12grossesses suivantes ont abouti à 11 naissances (83 %) dontégalement des jumeaux. Un taux élevé de prématurité (43 %) et depoids de naissance bas (17 %) a été observé. Aucune malformationn’a été notée chez les enfants. Les complications maternelles ont étéde 40 %, identiques dans les deux groupes et représentéesprincipalement par une HTA, voire une prééclampsie (20 % des cas).Les rejets ont été traités avec succès par augmentation des dosesthérapeutiques conventionnelles ; il est à noter que 59 % des femmesn’ont pas eu de rejet pendant leur grossesse. Au total, malgré cescomplications dans une population à haut risque, la grossesseapparaît bien tolérée chez les femmes transplantées cardiaques ayantune bonne fonction du greffon. L’allaitement n’est pas recommandéen raison du passage des immunosuppresseurs dans le lait maternel.L’évolution des enfants est en règle très satisfaisante et tous sont enbonne santé à l’âge moyen de 3, 4 ans [106]. Cependant, dans uneobservation, une cardiomyopathie dilatée s’est révélée à l’âge de1 an [56].La grossesse après transplantation cardiopulmonaire est encore plusrare qu’après transplantation cardiaque seule, mais possible, si elleest planifiée au moins 2 ans après la greffe [5].

Dissection aortique

La grossesse semble favoriser la dissection aortique parl’intermédiaire de modifications de la structure de la paroi duvaisseau consécutives aux changements hormonaux ethémodynamiques. Ainsi, chez la femme de moins de 40 ans, ladissection aortique surviendrait presque une fois sur deux au coursde la grossesse ou du post-partum [47] ; cette association estcependant discutée.La dissection survient le plus souvent au cours du troisièmetrimestre ou dans la période du post-partum. Des facteursfavorisants, autres que le syndrome de Marfan, sont parfoisretrouvés (coarctation isthmique, bicuspidie), mais dans 70 % descas, aucune anomalie n’est mise en évidence.Le tableau clinique n’a pas de caractère particulier. L’échographietransœsophagienne est un moyen fiable et sans risque d’affirmer lediagnostic au cours de la grossesse.Sur le plan thérapeutique, le contrôle de la pression artérielle nedoit pas recourir au nitroprussiate (toxicité fœtale) et il faut préférerl’hydralazine. La césarienne permet d’éviter la montée tensionnelleliée au travail. L’intervention chirurgicale doit être, si possible,

réalisée aussitôt après l’accouchement ou dans les 48 heures si l’étatde la patiente le permet ; 32 interventions ont été colligées entre 1984et 1996 par Weiss [109] avec six décès (22 %) et 11 complications (34 %).

Maladie de Takayasu

Cette affection est rare, mais survenant chez des femmes jeunes, peutêtre associée à une grossesse. Une cinquantaine d’observations ontété rapportées [27]. Dans la majorité des cas, l’évolution maternelle aété favorable, mais de rares montées tensionnelles ou des épisodesd’insuffisance cardiaque ont été décrits.L’évolution fœtale a également été le plus souvent bonne, malgréun retard de croissance ou un accouchement prématuré fréquents.L’accouchement a été le plus souvent effectué par voie basse (à noterqu’au niveau vasculaire, la maladie de Takayasu semble plutôtaméliorée qu’aggravée par la grossesse [24]).

Contraception

Il est indispensable d’envisager la contraception chez la jeune femmecardiaque, afin d’éviter les grossesses lorsqu’elles sont contre-indiquées par la gravité de la cardiopathie ou de les programmer enfonction de l’évolution de celle-ci et de la thérapeutique envisagée.On dispose de peu de données objectives sur l’innocuité desdifférentes méthodes chez ces patientes [10] et beaucoup de femmesne reçoivent pas d’information adéquate. Une étroite collaborationentre le gynécologue et le cardiologue est à l’évidence nécessaire. Laméthode contraceptive doit être efficace et sans danger.

– Les méthodes locales ont un taux d’échec trop élevé pour êtrepréconisées si la grossesse est formellement contre-indiquée.

– Le stérilet est efficace mais comporte des risques infectieux lecontre-indiquant en cas de valvulopathie, de prothèse valvulaire oude cardiopathie congénitale (en dehors de la communicationinterauriculaire). Le risque de bactériémie est en réalité faible endehors de l’implantation et du retrait, actes qui justifientl’antibiothérapie [73]. Il ne peut non plus être prescrit en cas detraitement anticoagulant en raison des risques hémorragiques.Risquant d’induire une infertilité, le stérilet est, de plus, contre-indiqué chez la nullipare.

– Les œstroprogestatifs sont très efficaces mais comportent un risquethromboembolique, lié aux modifications de l’hémostaseœstrogénodépendantes. Les données concernant ces produits chezla femme ayant une cardiopathie sont très rares et on ne disposed’aucune étude prospective [49] ; ils sont contre-indiqués en cas decardiopathie décompensée ou à risque thromboembolique élevé(HTAP, cardiopathies cyanogènes, circulation de type Fontan,troubles du rythme, dilatation auriculaire [101]). Il n’est pas établi quel’utilisation simultanée d’anticoagulants ou d’antiagrégantsplaquettaires diminue le risque thromboembolique [101].

– Les progestatifs purs constituent souvent la meilleure solution,soit macrodosés en prise discontinue comme l’acétate dechlormadinone (Lutérant), soit minidosés en prise continue(lynestrénol) ; ces produits apparaissent bien tolérés sur le planhémodynamique, vasculaire et biologique [102]. Le risque de rétentionhydrosodée semble faible. Les formes injectables sont très utiliséesaux États-Unis ; la médroxyprogestérone (Dépo-Provera*) eninjection intramusculaire fournit une couverture pendant 3 mois,mais est inappropriée en cas d’insuffisance cardiaque en raison de latendance à la rétention liquidienne qu’elle induit. Les implantspeuvent être utilisés, sous forme par exemple d’étonogestrel(Implanon*), efficace pendant 3 ans.

– Les patientes anticoagulées pour une prothèse sont une exceptionà la non-utilisation des contraceptifs contenant des œstrogènes, carces femmes risquent de faire des hémorragies ovulatoiresintrapéritonéales et l’inhibition de l’ovulation assure une bonneprévention de celles-ci. [49].

– La « pilule du lendemain » comporte des risques de rétentionliquidienne et de thromboembolie [10].

Cardiologie Cardiopathies et grossesse 11-940-K-40

9

Page 10: Cardiopathies et grossesse

– La stérilisation tubaire sous laparoscopie est une interventioncomportant des risques, notamment chez les patientes hypoxiquesou ayant une HTAP, et ne peut être proposée qu’en cas de contre-indication définitive à la grossesse.Le problème de la contraception devrait être abordé chez toutes lespatientes cardiaques, afin de ne pas être confronté à la nécessitéd’une interruption de grossesse, susceptible d’avoir desconséquences néfastes, médicales et psychologiques.

Chirurgie cardiaque au coursde la grossesse

Les cardiopathies nécessitant un geste chirurgical devraient enprincipe avoir été opérées avant la grossesse ; la chirurgie cardiaqueau cours de celle-ci est cependant nécessaire si la cardiopathie a étésous-estimée ou surtout si des complications surviennent [70].

CHIRURGIE À CŒUR FERMÉ

La chirurgie cardiaque à cœur fermé est maintenant rarementnécessaire ; les complications maternelles de cette technique étaientrares et les décès fœtaux inférieurs à 10 %. En cas de rétrécissementmitral, la valvuloplastie percutanée par ballon d’Inoué a remplacé lacommissurotomie et celle-ci ne s’envisage plus que si on ne disposepas du matériel [70]. Une coarctation aortique peut être opérée aucours de la grossesse, mais la chirurgie n’est pas conseillée, saufcomplication majeure.

CHIRURGIE SOUS CIRCULATION EXTRACORPORELLE

La chirurgie sous CEC au cours de la grossesse augmenterait pourcertains la mortalité maternelle (6 % pour Weiss [109]) alors que pourd’autres, elle serait identique à celle des malades non enceintes,c’est-à-dire 2 à 3 % des cas [70, 71, 75]. Elle est bien sûr plus élevée encas de dissection aortique (22 % des cas [109]), qu’en cas deremplacement valvulaire isolé. Celui-ci doit utiliser de préférenceune valve biologique pour éviter le traitement anticoagulant [58].Tous les auteurs s’accordent sur le fait que le risque fœtal de la CECest majeur : 30 % pour Weiss [109], 20 % pour Pomini [75]. Les effets dela CEC sur la circulation utéroplacentaire ne sont pas très bienconnus ; il apparaît nettement cependant qu’il faut utiliser un débitde CEC élevé (4,5 L/min/m2) et des pressions de perfusion élevées(60 mmHg) alors que l’hypothermie doit être abandonnée (car elleentraîne une vasoconstriction utérine et des contractions [58, 71, 75]).L’intérêt du flux pulsatile est discuté [71]. Au cours de l’intervention,il faut monitorer le cœur fœtal, éventuellement paréchocardiographie, ainsi que les contractions utérines. Ainsi sur les40 dernières patientes de la série de Pomini [75], la mortalitématernelle a été nulle et la mortalité fœtale abaissée à 12,5 % etmême à 0 % en normothermie.En conclusion, la chirurgie sous CEC au cours de la grossesse nedoit être envisagée que chez les patientes ne répondant pas autraitement médical ; il faut éviter si possible le premier trimestrepour minimiser le risque de tératogénicité ; près du terme, si lamaturité fœtale peut être affirmée, il vaut mieux programmer lacésarienne avant l’intervention cardiaque [24, 71].

Médicaments cardiovasculairesau cours de la grossesse

La pharmacocinétique des médicaments pendant la grossesse et lalactation constitue un problème important en raison de l’expositiondu fœtus aux agents pharmacologiques (la plupart des produitsfranchissent en effet la barrière placentaire) et des incertitudesconcernant la réponse et la toxicité des drogues. L’absorption, ladistribution et l’élimination des différents médicaments sont en effetmodifiées pendant la grossesse ; de plus, les risques éventuels pourl’enfant sont variables avec la période de la grossesse à laquelle lemédicament est administré [74]. Les dosages plasmatiques peuventpermettre d’adapter au mieux la posologie.

RÉGIME DÉSODÉ

Il peut être utilisé en prévention ou en traitement curatif del’insuffisance cardiaque ; il n’a en règle pas de conséquence pour lefœtus.

DIURÉTIQUES

Les diurétiques thiazidiques et le furosémide peuvent diminuer laperfusion utéroplacentaire et ne doivent donc être prescrits que s’ilssont indispensables, c’est-à-dire dans l’insuffisance cardiaque. Leseffets secondaires et notamment fœtaux étant plus importants avecles thiazidiques qu’avec le furosémide, celui-ci est le plus souventutilisé. Les antialdostérones pourraient avoir des effetsantiandrogéniques et doivent être évités, au moins pendant lepremier trimestre. Le furosémide et les thiazidiques passent dans lelait maternel ; ces derniers diminuent la lactation.

DIGITALIQUES

Ils ont été utilisés chez la femme enceinte dans de nombreusessituations, sans toxicité pour le fœtus. La digoxine franchitfacilement le placenta et de ce fait a été fréquemment administrée àla mère en cas de tachycardie fœtale. La digoxinémie peut êtresurestimée au cours de la grossesse du fait de la productionendogène de substances digoxine-like par le placenta ou le fœtus [100].La digoxine passe dans le lait, mais il n’y a pas eu d’effet secondairerapporté chez l’enfant.

ANTIARYTHMIQUES

– Les quinidiniques traversent la barrière placentaire mais peuventêtre prescrits sans problème aux doses usuelles. Ils passent dans lelait maternel.

– La flécaïnide peut être utilisée, bien que deux cas de mort fœtaleaient été rapportés après traitement par voie maternelle detachycardies supraventriculaires fœtales. Elle passe dans le laitmaternel à faible concentration, sans effet secondaire.

– La propafénone n’a pas été suffisamment utilisée pour pouvoirêtre recommandée au cours de la grossesse.

– Il en est de même de la mexilétine qui semble pouvoir entraînerune bradycardie fœtale ou un retard de croissance intra-utérin.

– La lidocaïne peut être prescrite, malgré quelques effetsdépresseurs sur le système nerveux central de l’enfant survenusaprès de fortes doses.

– L’amiodarone peut entraîner un retard de croissance intra-utérinet surtout une hypothyroïdie fœtale dans environ 20 % des cas [2] ;elle ne peut donc être utilisée qu’en cas d’absolue nécessité, c’est-à-dire en présence de tachyarythmies résistantes aux autresmédicaments et potentiellement létales. Elle passe dans le laitmaternel et l’allaitement doit être découragé.

BÊTABLOQUANTS

Ils ont été longtemps discutés en raison, d’une part du risque destimulation des contractions utérines et d’autre part et surtout, deleurs effets possibles sur l’enfant (bradycardie fœtale, bas poids denaissance, hypoglycémie néonatale, détresse respiratoire). Ilspeuvent être utilisés sous réserve de respecter certaines règles [46] :éviter, si possible, d’initier un traitement prolongé au cours dupremier trimestre ; utiliser les doses efficaces les plus faibles ; arrêtersi possible le bêtabloquant 2 à 3 jours avant l’accouchement ;surveiller les nouveau-nés pendant 3 à 4 jours ; préférer les produitsbêta-1 sélectifs ; en cas d’allaitement (les bêtabloquants passent dansle lait), il est recommandé de surveiller le rythme cardiaque del’enfant. Le sotalol a les mêmes effets secondaires que lesbêtabloquants « standards » ; le labétalol, qui a également une actionalphabloquante, a été fréquemment utilisé dans l’HTA gravidique.

INHIBITEURS DE L’ENZYME DE CONVERSION

Ils peuvent avoir de nombreux effets néfastes : oligohydramnios,retard de croissance intra-utérin, hypotension néonatale, insuffisancerénale, persistance du canal artériel, hypoplasie pulmonaire, voire

11-940-K-40 Cardiopathies et grossesse Cardiologie

10

Page 11: Cardiopathies et grossesse

mort fœtale [95]. Ils sont en conséquence contre-indiqués tout au longde la grossesse ; les données concernant ces produits sont limitéesau captopril et à l’énalapril mais il semble logique d’étendre lacontre-indication aux autres IEC. En revanche, leur administrationsemble compatible avec l’allaitement.Les antagonistes des récepteurs ATI de l’angiotensine exposent auxmêmes complications [91].

ANTIHYPERTENSEURS

– De nombreux produits peuvent être utilisés au cours de lagrossesse : hydralazine, alphaméthyldopa, clonidine [60].

– Parmi les inhibiteurs calciques, la nifédipine a été utilisée sansconséquence pour le fœtus ; il en a été de même pour la nicardipine.Le vérapamil a été utilisé dans le traitement des tachycardiesmaternelles et fœtales, mais il existe peu de données quant àl’administration prolongée ; il ne semble pas y avoir d’effettératogène [60].

MÉDICAMENTS ANTICOAGULANTS

Ils ont été étudiés ci-dessus au chapitre concernant les prothèsesvalvulaires. L’héparine standard non fractionnée estl’antithrombotique classique de choix au cours de la grossesse [1], caren raison de son poids moléculaire élevé, elle ne franchit pas labarrière placentaire ; il en est de même des HBPM dont l’innocuitéparaît démontrée [53]. Les antivitamines K franchissent le placenta etpeuvent entraîner des complications spécifiques chez le fœtus [113] ;cependant, elles apparaissent plus efficaces chez les porteuses deprothèses valvulaires.

FIBRINOLYTIQUES

Ils sont en principe contre-indiqués au cours de la grossesse. Ils ontcependant pu être administrés en cas de thrombose de prothèsevalvulaire ou d’embolie pulmonaire. Dans environ un tiers desobservations, des complications hémorragiques sont survenues(ayant conduit à des hystérectomies et à des morts fœtales). Lasurveillance biologique doit être très rigoureuse. La streptokinase aété utilisée chez plus de 160 femmes enceintes, essentiellement pourdes embolies pulmonaires, sans complication pour le fœtus [84] carelle ne franchit pas le placenta. On ne dispose pas de donnéessuffisantes concernant les autres fibrinolytiques (urokinase, altéplase,rétéplase, APSAC).

AUTRES MÉDICAMENTS

– Les tocolytiques bêtamimétiques sont théoriquement des bêta-2sélectifs, mais tous ont un certain effet bêta-1. Ils sont donc contre-indiqués en cas de cardiomyopathie hypertrophique, de sténosesaortique, mitrale ou pulmonaire et en cas de syndromed’Eisenmenger, ainsi qu’en cas d’arythmies.

– Le sulfate de magnésie peut être utilisé (sauf en cas de syndromed’Eisenmenger).

– Hypolipémiants : le cholestérol étant un constituant fondamentaldes hormones et des membranes cellulaires, les fibrates et les statinesne doivent pas être prescrits au cours de la grossesse, ni au cours dela lactation. Les mesures diététiques restent recommandées.

– Antiagrégants : les données manquent quant à leur utilisation aucours de la grossesse, en dehors de l’aspirine qui peut être prescriteà faible posologie sans problème [84].

Références[1] Almange C, Schleich JM, Laurent M. Grossesse et traite-

ment anticoagulant. Indications et modalités. Arch MalCœur 2000 : 93 ; 613-618

[2] Anderson MK. Antiarrhythmic drugs. In : Oakley C ed.Heart disease in pregnancy. London : BMJ Publishinggroup, 1997 : 336-365

[3] Arias F, Pineda J. Aortic stenosis and pregnancy. J ReprodMed 1978 ; 20 : 229-232

[4] AutoreC,ConteMR,PiccininnoM,BernaboP,BonfiglioG,Bruzzi P et al. Risk associated with pregnancy in hyper-trophic cardiomyopathy. J Am Coll Cardiol 2002 ; 40 :1864-1869

[5] Baron O, Hubaut JJ, Galetta D et al. Grossesse et transplan-tationcardiopulmonaire. J Chir Thorac Cardiovasc 2002 ;6 :59-62

[6] Beauchesne LM, Connoly HM, Ammash NM, Warnes CA.Coarctation of the aorta : outcome of pregnancy. J Am CollCardiol 2001 ; 38 : 1728-1733

[7] Bonow RO, Carabello B, De Leon AC Jr, Edmunds LH Jr,Fedderly BJ, Freed MD et al. ACC/AHA Guidelines for themanagementofpatientswithvalvularheartdisease:Execu-tive summary. A report of the American collège of Cardiol-ogy / American Heart Association Task Force on PracticeGuidelines (Commitee on management of patients withvalvular heart disease). Circulation 1998 ; 98 : 1949-1984

[8] BottoLD,Mulinare J, Erickson JD.Occurrenceofcongenitalheart defects in relation to maternal multivitamin use. AmJ Epidemiol 2000 ; 151 : 878-884

[9] Branch KR, Wagoner LE, McGrory CH, Mannion JD,Radomski JS, Moritz MJ et al. Risks of subsequent pregnan-cies on mother and newborn in female heart transplantrecipients. J Heart Lung Transplant 1998 ; 17 : 698-702

[10] British Cardiac Society. Grown-up congenital heart(GUCH) disease : current needs and provision of service foradolescents and adults with congenital heart disease in theUK. Heart 2002 ; 88 (suppl 1) : 1-14

[11] Burn J, Brennan P, Little J, Holloway S, Coffey R, SomervilleJ et al. Recurrence risks in offspring of adults with majorheart defects: results from first cohort of British collabora-tive study. Lancet 1998 ; 351 : 311-316

[12] CamposO.Dopplerechocardiographyduringpregnancy:physiological and abnormal findings. Echocardiography1996 ; 13 : 135-146

[13] Canobbio MM, Mair DD, van der Velde M, Koos BJ. Preg-nancy outcomes after the Fontan repair. J Am Coll Cardiol1996 : 28 ; 763-767

[14] Chan WS, Anand S, Ginsberg JS. Anticoagulation of preg-nant women with mechanical heart valves: a systematicreview of the literature. Arch Intern Med 2000 ; 160 :191-196

[15] Clarkson PM, Wilson NJ, Neutze JM, North RA, Calder AL,Barrat-BoyesBG.Outcomeofpregnancyafter theMustardoperation for transposition of the great arteries with intactventricular septum. J Am Coll Cardiol 1994 ; 24 : 190-193

[16] Connolly H, Warnes C. Ebstein’s anomaly: outcome ofpregnancy. J Am Coll Cardiol 1994 ; 23 : 1194-1198

[17] Connolly HM, Grogan M, Warnes CA. Pregnancy amongwomen with congenitally corrected transposition of greatarteries. J Am Coll Cardiol 1999 ; 33 : 1692-1695

[18] Cowan NC, DeBelder MA, Rothman M. Coronary angio-plasty in pregnancy. Br Heart J 1988 ; 59 : 588-592

[19] DalientoL, Somerville J, PresbiteroP,Menti L, Brach-PreverS, Rizzoli G et al. Eisenmenger syndrome. Factors relatingto deterioration and death. Eur Heart J 1998 ; 19 :1845-1855

[20] Demakis JG, Rahimtoola SH. Peripartum cardiomyopathy.Circulation 1971 ; 44 : 964-968

[21] Donnely JE, Brown JM, Radford DJ. Pregnancy outcomeand Ebstein’s anomaly. Br Heart J 1991 ; 66 : 368-371

[22] EasterlingTR,RalphDD,SchmuckerBC.Pulmonaryhyper-tension in pregnancy: treatment with pulmonary vasodila-tor. Obstet Gynecol 1999 ; 93 : 494-498

[23] Elkayam U. Pregnancy through a prostethic heart valve.J Am Coll Caediol 1999 ; 33 : 1642-1645

[24] ElkayamU.Pregnancyandcardiovasculardisease. In :Brau-nwaldE,ZipesDP,LibbyPeds.Heartdisease.Philadelphia :WB Saunders, 2001 : 2172-2190

[25] Elkayam U, Dave R. Hypertrophic cardiomyopathie andpregnancy. In : Elkayam U, Gleicher N eds. Cardiac prob-lems in pregnancy. New York : Wiley-Liss, 1998 : 101-109

[26] ElkayamU,GoodwinTM.Adenosine therapy for supraven-tricular tachycardia during pregnancy. Am J Cardiol 1995 ;75 : 521-523

[27] Elkayam U, Hameed A. Takayasu’s arteritis and pregnancy.In : Elkayam U, Gleicher N eds. Cardiac problems in preg-nancy. New York : Wiley-Liss, 1998 : 237-245

[28] Elkayam U, Tummala PP, Rao K, Akhter MW, Karaalp IS,Wani OR et al. Maternal and fetal outcomes of subsequentpregnancies in women with peripartum cardiomyopathy.N Engl J Med 2001 ; 344 : 1567-1571

[29] Essop MR, Sareli P. Rheumatic valvular disease and preg-nancy. In : Elkayam U, Gleicher N eds. Cardiac problems inpregnancy. New York : Wiley-Liss, 1998 : 55-60

[30] Ferrière M, Sacrez A, Bouhour JB, Cassagnes J, Geslin P,Dubourg O et al. La myocardiopathie du péripartum :aspects actuels. Etude multicentrique : 11 observations.Arch Mal Cœur 1990 ; 83 : 1563-1569

[31] Geiger MJ, Newby KH, Natale A. Impact of implantabledefibrillators on the outcome of pregnancy. Circulation1995 ; 92 (suppl I) : I-782

[32] Genoni M, Jenni R, Hoerstrup SP, Vogt P, Turin AM. Preg-nancy after atrial repair for transposition of the great arter-ies. Heart 1999 ; 81 : 276-277

[33] Gleicher N, Midwall J, Hochberger D, Jaffin H. Eisen-menger’s syndrome and pregnancy. Obstet Gynecol Surv1979 ; 34 : 721-741

[34] Gohlke-Bärwolf C, Acar J, Oakley C, Butchart E, BurckhartD,BodnarEetal.Guidelines forpreventionof thromboem-bolic events in valvular heart disease. Eur Heart J 1995 ; 16 :1320-1330

[35] Gouton M, Bozio A. Coarctation et grossesse. IXes JournéesEuropéennes de la société française de cardiologie, Paris,1999

[36] Gras D, Mabo P, Kermarrec A, Bazin P, Varin C, Daubert C.Interruption de la conduction auriculo-ventriculaire parradiofréquence au 5e mois d’une grossesse. Arch Mal Cœur1992 ; 85 : 1873-1877

[37] Greer IA. Thrombosis in pregnancy: maternal an fetalissues. Lancet 1999 ; 353 : 1258-1265

[38] Guérin F, Corone P, Gaudeau S, Talon P. Tétralogie deFallot et grossesse. Cœur 1977 ; 8 : 587-592

[39] Halphen C, Haiat R. Découverte échocardiographiqued’épanchements péricardiques muets au cours de la gros-sesse normale. Arch Mal Cœur 1983 ; 76 : 71-76

[40] HananiaG,ThomasD,MichelPL,GarbarzE,AgeC,MillaireA et al. Pregnancy and prosthetic heart valves: a Frenchcooperative study of 155 cases. Eur Heart J 1994 ; 15 :1651-1658

[41] Hameed A, Karaalp IS, Tummala PP, Wani OR, Canetti M,Akhter MW et al. The effect of valvular heart disease onmaternal and fetal outcome of pregnancy. J Am Coll Cardiol2001 ; 37 : 893-899

[42] Hassouna A, Allam H. Oral anticoagulation during preg-nancy in patients with mechanical valves: a prospectivestudy. Cardiovasc Surg 2001 ; 9 : 478-481

[43] Hibbard JU, Lindheimer M, Lang RM. A modified definitionfor peripartum cardiomyopathy and prognosis based onechocardiography. Obstet Gynecol 1999 ; 94 : 311-316

[44] Holdright DR, Sutton GC. Restoration of sinus rhythmduring two consecutive pregnancies in a woman with con-genital completeheartblock.Br Heart J1990 ;64 :338-339

[45] Hunter S, Robson SC. Adaptation of the maternal heart inpregnancy. Br Heart J 1992 ; 68 : 540-543

[46] Hurst AK, Hoffman K, Frishman WH, Elkayam U. The use ofbeta-adrenergic blocking agents in pregnancy and lacta-tion. In : Elkayam U, Gleicher N eds. Cardiac problems inpregnancy. New York : Wiley-Liss, 1998 : 357-372

[47] Isselbacher EM. Diseases of the aorta. In : Braunwald E,Zipes DP, Libby P eds. Heart disease. Philadelphia : WBSaunders, 2001 : 1422-1456

Cardiologie Cardiopathies et grossesse 11-940-K-40

11

Page 12: Cardiopathies et grossesse

[48] IungB,CormierB, Elias J,MichelPL,NalletO,Porte JMetal.Usefulness of percutaneous balloon commissurotomy formitral stenosis during pregnancy. Am J Cardiol 1994 ; 73 :398-400

[49] Kjos SL. Fertility control in the cardiac patient. In : ElkayamU, Gleicher N eds. Cardiac problems in pregnancy. NewYork : Wiley-Liss, 1998 : 453-464

[50] Lang RM, Lampert MB, Poppas A, Hameed A, Elkayam U.Peripartal cardiomyopathy. In : Elkayam U, Gleicher N eds.Cardiac problems in pregnancy. New York : Wiley-Liss,1998 : 87-100

[51] Lao TL, Sermer M, Magee L, Farine D, Colman JM. Con-genital aortic stenosis and pregnancy. A reappraisal. AmJ Obstet Gynecol 1993 ; 169 : 540-545

[52] Lau CP, Lee CP, Cheng CH, Leung WH. Rate responsivepacing with a minute ventilation sensing pace-makerduring pregnancy and delivery. PACE 1990 ; 13 : 158-163

[53] Lepercq J, Conard J, Borel-Derlon A, Darmon JY, BoudignatO, Francoual C et al. Venous thromboembolism duringpregnancy: a retrospective study of enoxaparin safety in624 pregnancies. Br J Obstet Gynaecol 2001 ; 108 :1134-1140

[54] Leung CY, Brodsky M. Cardiac arrhythmias and preg-nancy. In : Elkayam U, Gleicher N eds. Cardiac problems inpregnancy. New York : Wiley-Liss, 1998 : 155-174

[55] Leyh RG, Fischer S, Ruhparwar A, Haverich A. Anticoagula-tion for prosthetic heart valves during pregnancy: is low-molecular-weight heparin an alternative? Eur J Cardiotho-rac Surg 2002 ; 21 ; 577-579

[56] Liljestrand J, Lindström B. Childbirth after post-partumcardiac insufficiency treated with cardiac transplant. ActaObstet Gynecol Scand 1993 ; 72 : 406-408

[57] Lust KM, Boots RJ, Dooris M, Wilson J. Management oflabor in Eisenmenger syndrome with inhaled nitric oxide.Am J Obstet Gynecol 1999 ; 181 : 419-423

[58] Mahli A, Izdes S, Coskun D. Cardiac operations duringpregnancy: review of factors influencing fetal outcome.Ann Thorac Surg 2000 ; 69 : 1622-1626

[59] Majdan JF, Walinsky P, Cowchock S, Wapner RJ, Plazk L.Coronary artery bypass surgery during pregnancy. AmJ Cardiol 1983 ; 52 ; 1145-1146

[60] McElhatton PR. Heart and circulatory system drugs. In :Schaefer CH ed. Drugs during pregnancy and lactation.Amsterdam : Elsevier Science, 2001 : 116-131

[61] McLintic AJ, Pringle SD, Lilley S, Houston AB, Thorburn J.Electrocardiographic changes during cesarean sectionunder regional anesthesia. Anesth Analh 1992 ; 74 : 51-56

[62] Meadows WR. Idiopathic myocardial failure in the last tri-mester of pregnancy and the puerperium. Circulation1957 ; 15 : 903-914

[63] MendelsonMA,ElkayamU.Pericardial disorders andpreg-nancy. In : Elkayam U, Gleicher N eds. Cardiac problems inpregnancy. New York : Wiley-Liss, 1998 : 111-120

[64] Menschengieser SS, Fondevila CG, Santarelli MT, LazzariMA. Anticoagulation in pregnant women with mechanicalheart valve prostheses. Heart 1999 ; 82 : 23-26

[65] Metcalfe J, McAnulthy JH, Ueland K. Heart disease andpregnancy. Physiology and management. Boston : LittleBrown, 1986

[66] Midei MG, Dement SH, Feldman AM, Hutchins GM,Baughman KL. Peripartum myocarditis and cardiomyopa-thy. Circulation 1990 ; 81 : 922-928

[67] Mone SM, Sanders SP, Colan SD. Control mechanisms forphysiologicalhypertrophyofpregnancy.Circulation1996;94 : 667-672

[68] Neumayer U, Somerville J. Outcome of pregnancies inpatients with complex pulmonary atresia. Heart 1997 ; 78 :16-21

[69] Nora JJ. From generational studies to a multilevel genetic-environmental interaction. J Am Coll Cardiol 1994 ; 23 :1468-1471

[70] Oakley C. Cardiac intervention and surgery during preg-nancy. In : Oakley C ed. Heart disease in pregnancy. Lon-don : BMJ Publishing group, 1997 : 397-400

[71] ParryAJ,WestabyS.Cardiopulmonarybypassduringpreg-nancy. Ann Thorac Surg 1996 ; 61 : 1865-1869

[72] Pearson GD, Veille JC, Rahimtoola S, Hsia J, Oakley CM,Hosenpud JD et al. Peripartum cardiomyopathy. Nationalheart lung and blood. institute and office of rare diseases(National Institutes of Health) Workshop recommenda-tions and review. JAMA 2000 ; 283 : 1183-1188

[73] Perloff JK, Koos B. Pregnancy and congenital heart disease:the mother and the fetus. In : Perloff JK, Child JS eds. Con-genital heart disease in adults. Philadelphia : WB Saunders,1998 : 144-164

[74] Peters P, Schaefer CH. General commentary to drugtherapy and drug risks in pregnancy. In : Schaefer CH ed.Drugs during pregnancy and lactation. Amsterdam : Else-vier Science, 2001 : 1-13

[75] Pomini F, Mercogliano D, Cavaletti C, Caruso A, Pomini P.Cardiopulmonary bypass in pregnancy. Ann Thorac Surg1996 ; 61 : 259-268

[76] Poppas A, Shroff SG, Korcarz CE, Hibbard JU, Berger DS,Lindheimer MD et al. Serial assessment of the cardiovascu-lar systeminnormalpregnancy.Roleofarterial complianceand pulsatile arterial load. Circulation 1997 ; 95 :2407-2415

[77] Presbitero P, Prever SB, Brusca A. Interventional cardiologyin pregnancy. Eur Heart J 1996 ; 17 : 192-198

[78] Presbitero P, Somerville J, Stone S, Aruta E, Spiegelhalter D,Rabajoli F. Pregnancy in cyanotic congenital heart disease.Outcome of mother and fetus. Circulation 1994 ; 89 :2673-2676

[79] Probst V, Langlard JM, Desnos M, Komajda M, Bouhour JB.Cardiomyopathie hypertrophique familiale. Étude fran-çaise du déroulement des grossesses et des accouche-ments. Arch Mal Cœur 2002 ; 95 : 81-86

[80] Pyeritz RE. Maternal and fetal complications of pregnancyin the Marfan syndrome. Am J Med 1981 ; 71 : 784-790

[81] Rashba EJ, Zareba W, Moss AJ, Hall WJ, Robinson J, LocatiEH et al. Influence of pregnancy on the risk for cardiacevents in patients with hereditary long QT syndrome. Cir-culation 1998 ; 97 : 451-456

[82] Reimold SC, Rutherford JD. Peripartum cardiomyopathy.N Engl J Med 2001 ; 344 : 1629-1630

[83] Rensing BJ, Kofflard M, van den Brand MJ, Foley DP. Spon-taneous dissections of all three coronary arteries in a 33week-pregnantwoman.CathetCardiovasc Intervent1999 ;48 : 207-210

[84] Reuvers M. Anticoagulant and fibrinolytics drugs. In :Schaefer CH ed. Drugs during pregnancy and lactation.Amsterdam : Elsevier Science, 2001 : 85-92

[85] Robinson JN, Banerjee R, Landzberg M, Thiet MP. Inhalednitric oxide therapy in pregnancy complicated by pulmo-nary hypertension. Am J Obstet Gynecol 1999 ; 180 :1045-1046

[86] Rosenthal E, Nelson-Piercy C. Value of inhaled nitric oxidein Eisenmenger syndrome during pregnancy. Am J ObstetGynecol 2000 ; 183 : 781-782

[87] Ross-Ascuitto N, Ascuitto RJ, Darnell J. A pregnant womanwith moderate pulmonary hypertension. Pediatr Cardiol1995 ; 16 : 31-32

[88] Rossiter JP, Repke JT, Morales AJ, Murphy EA, Pyeritz RE. Aprospective longitudinal evaluation of pregnancy in theMarfan syndrome. Am J Obstet Gynecol 1995 ; 173 :1599-1606

[89] Roth A, Elkayam U. Acute myocardial infarction and preg-nancy. In : Elkayam U, Gleicher N eds. Cardiac problems inpregnancy. New York : Wiley-Liss, 1998 : 131-153

[90] Rowan JA, McCowan LM, Raudkivi PJ, North RA. Eno-xaparin treatment in women with mechanical heart valvesduring pregnancy. Am J Obstet Gynecol 2001 ; 185 :633-637

[91] Saji H, Yamanaka M, Hagiwara A, Ijiri R. Losartan and fetaltoxic effects. Lancct 2001 ; 357 : 363

[92] Sanchez-Ramos L. Myocardial infarction during preg-nancy: management with transluminal coronary angio-plasty and metallic intracoronary stents. Am J ObstetGynecol 1994 ; 171 : 1392-1393

[93] Shade GH Jr, Ross G, Bever FN, Uddin Z, Devireddy L,Gardin JM. Troponin I in the diagnosis of acute myocardialinfarction inpregnancy, laborandpostpartum.AmJObstetGynecol 2002 ; 187 : 1719-1720

[94] Shotan A, Ostrzega E, Mehra A, Johnson J, Elkayam U. Inci-dence of arrhythmias in normal pregnancy and relation topalpitations, dizziness, and syncope. Am J Cardiol 1997 ;79 : 1061-1064

[95] Shotan A, Widerhorn J, Hurst A, Elkayam U. Risks ofangiotensin-converting enzyme inhibition during preg-nancy: experimental and clinical evidence, potentialmechanisms, and recommendations for use. Am J Med1994 ; 96 : 451-456

[96] Siu SC, Colman JM, Sorensen S, Smallhorn JF, Farine D,Amankwah KS et al. Adverse neonatal and cardiac out-comesaremorecommoninpregnantwomenwithcardiacdisease. Circulation 2002 ; 105 : 2179-2184

[97] Siu SC, Sermer M, Colman JM, Alvarez AN, Mercier LA,Morton BC et al. Prospective multicenter study of preg-nancy outcomes in women with heart disease. Circulation2001 ; 104 : 515-521

[98] Siu SC, Sermer M, Harrison DA, Grigoriadis E, Liu G, Soren-sen S et al. Risk and predictors for pregnancy - related com-plications in women with heart disease. Circulation 1997 ;96 : 2789-2794

[99] Steg PG, Michel PL, Helft G. Recommandations de lasociété française de cardiologie concernant les indicationset lasurveillancedutraitementanticoagulantoral.ArchMalCœur 1997 ; 90 : 1289-1305

[100] Steinberg I, Mitani GM, Harrison EC, Elkayam U. :.Digtalis glycosides in pregnancy. In : Elkayam U, GleicherN eds. Cardiac problems in pregnancy. New York :Wiley-Liss, 1998 : 419-433

[101] Swan L, Hillis WS, Cameron A. Family planningrequirements of adults with congenital heart disease.Heart 1997 ; 78 : 9-11

[102] Taurelle R, Iraki B. Quelle contraception chez la patientecardiaque ? Arch Mal Cœur Prat 1995 ; 6 : 17-18

[103] Therrien J, Barnes I, Somerville J. Outcome of pregnancyin patients with congenitally corrected transposition ofthe great arteries. Am J Cardiol 1999 ; 84 : 820-824

[104] Tummala PP, Rao KS, Akhter MW, Karaalp IS, HameedAB, Elkayam U. Peripartum cardiomyopathy: clinicalprofile of 100 patients diagnosed in the United States.Circulation 1999 ; 100 (suppl 18) : I-579

[105] Vitale N, De Feo M, De Santo LS, Pollice A, Tedesco N,Cotrufo M. Dose dependent fetal complications ofwarfarin in pregnant women with mechanical heartvalves. J Am Coll Cardiol 1999 ; 33 : 1637-1641

[106] Wagoner LE, Taylor DO, Olsen SL, Price GD Sr,Rasmussen LG, Larsen CB et al. Immunosuppressivetherapy, management, and outcome of heart transplantrecipients during pregnancy. J Heart Lung Transplant1993 ; 12 (6 Pt 1) : 993-1000

[107] Webber D, Halligan RE, Schumacher JA. Acute infarction,intracoronary thrombolysis, and primary PTCA inpregnancy. Cathet Cardiovasc Diagn 1997 ; 42 : 38-43

[108] Weiss BM, Hess OM. Pulmonary vascular disease andpregnancy: current controversies, managementstrategies, and perspectives. Eur Heart J 2000 ; 21 :104-115

[109] Weiss BM, Von Segesser LK, Alon E, Seifert B, Turina MI.Outcome of cardiovascular surgery and pregnancy: asystematic review of the period 1984 -1996. Am J ObstetGynecol 1998 ; 179 : 1643-1653

[110] Weiss BM, Zemp L, Seifert B, Hess OM. Outcome ofpulmonary vascular disease in pregnancy: a systematicoverview from1978 through 1996. J Am Coll Cardiol1998; 31 : 1650-1657

[111] Whittemore R, Hobbins JC, Engle MA. Pregnancy and itsoutcome in women with and without surgical treatmentof congenital heart disease. Am J Cardiol 1982 ; 50 :641-651

[112] Whittemore R, Wells JA, Castellsague X. A second-generation study of 427 probands with congenital heartdefects and their 837 children. J Am Coll Cardiol 1994 ;23 : 1459-1467

[113] Wong V, Cheng CH, Chan KC. Fetal and neonataloutcome of exposure to anticoagulants duringpregnancy. Am J Med Genet 1993 ; 45 : 17-21

[114] Zuber M, Gautschi N, Oechslin E, Widmer V, Kiowski,Jenni R. Outcome of pregnancy in women withcongenital shunt lesions. Heart 1999 ; 81 : 271-275

11-940-K-40 Cardiopathies et grossesse Cardiologie

12