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Cellule gliale fournissant des protéines (en vert) indispensables aux neurones. © CNRS

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Cellule gliale fournissant des protéines (en vert)indispensables aux neurones. © CNRS

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modèles biologiques simples, un point fonda-mental dans le travail des biologistes qui peu-vent ainsi pratiquer leurs recherches sur despetits organismes qui leur servent de modèles.« Vous seriez ainsi peut-être surpris d’ap-prendre que près de la moitié des biologistesqui travaillent à Saclay, travaillent directe-ment ou indirectement avec des donnéesacquises sur un modèle extrêmement simple,la levure de boulangerie, un petit champignondont le fonctionnement cellulaire ressemble defaçon extraordinaire à celui des cellules ani-males et donc aux nôtres », explique PierreThuriaux. C’est une chaîne de transmission lit-téralement ininterrompue qui nous relie à cesorganismes apparemment si primitifs. Leurhistoire est une partie de la nôtre. C’est ce quijustifie, par exemple, que les biologistes quiétudient les effets des rayonnements surl’homme, s’intéressent aux mécanismes dedéfense et d’adaptation que les organismesprimitifs ont développés au cours de l’histoire.

Le 24 novembre 1859 paraît l’oeuvre maîtresse deCharles Darwin «L’Origine des Espèces». Les 1 250exemplaires publiés sont vendus en quelques jours…Cent cinquante ans plus tard, la théorie de l’évolutionest toujours pertinente et continue d’irriguer la biologiecontemporaine.

L’évolutionest (toujours) en marche

DOSSIER Darwin : l’évolution est (toujours) en marche

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édito2009 est une année richepour la communication scientifiquepuisqu’à la fois l’astronomie et Darwin y sontà l’honneur. Dans le précédent numéro, nousavions présenté l’observatoire spatialHerschel dont nous attendons avecimpatience les premiers résultats. Nouspublions dans ce numéro un portrait deCatherine Cesarsky, Haut Commissaire àl’énergie atomique, qui est à l’origine de cetteAnnée mondiale de l’astronomie, et nousrendons hommage à ce grand précurseur dela biologie moderne qu’est Darwin, dont lesdécouvertes imprègnent de nombreuses

thématiques derecherche actuelles,y compris au CEA.Pour finir, je meréjouis que le projetde campus de Saclay*ait été approuvé parle Ministère de larecherche et de

l’enseignement supérieur. Avec les autrespartenaires, nous nous sommes attachés àtraduire dans le concret une ambitionpédagogique, scientifique et académique entenant compte de paramètres complexes :les besoins de financement, les contraintesspatiales, l'impérieuse nécessité de respecternotre environnement, d'insérer le campusdans son territoire, de l'ouvrir à seshabitants. Ce projet, en cohérence avec lesétudes menées par les collectivitésterritoriales (Communauté d’agglomérationdu Plateau de Saclay, Conseil général del’Essonne et Région Île-de-France) s’insèredans celui de la constitution du « clusterscientifique et technologique sur le Plateaude Saclay » dans le cadre d’une opérationd’intérêt national (OIN), actuellement àl’étude au Secrétariat d’État chargé duDéveloppement de la région capitale.* Pour en savoir plus :http://www.campus-paris-saclay.fr/

Yves Caristan,Directeur du centre CEA

de Saclay

TRADUIRECONCRÈTEMENT

UNE AMBITIONTRÈS LARGE

“”

Darwin aux Îles Galapagos

C’est en 1831, alors âgé de 22 ans, queDarwin embarque comme naturaliste à borddu navire d’exploration Beagle. Pendant cinqans, il voyagera en Amérique du Sud etdans le Pacifique, d’où il rapportera unedocumentation considérable.

our qui veut convenablement expliquerDarwin, il suffit parfois de suivre l’ordre

d’exposition qu’il a lui-même emprunté dansses différents ouvrages. En fait, tout commencepar la variation. C’est une idée nouvelle contrel’évidence apparente. L’idée que les espècespossèdent une longue histoire au cours delaquelle elles ont pu se transformer et changers’oppose, à première vue, aux observationsimmédiates : on ne voit jamais un chien donnernaissance à un chat, ou un chêne produire uncerisier ! Pourtant, plusieurs observations ontpermis d’établir l’existence des modificationsdes espèces dans le temps. La question del’évolution des espèces vivantes était déjà dansl’air lorsqu’il publie sa théorie, mais le grandmérite de Darwin est d’avoir été le premier àproposer une explication scientifique duconcept. La théorie de Darwin a depuis montrésa pertinence et résisté aux assauts de sesdétracteurs, à tel point que Pierre Thuriaux,généticien au centre CEA de Saclay, estime que« dans leur pratique quotidienne, tous les cher-cheurs en biologie font du darwinisme ».Pourquoi ? Tout simplement parce que « l’unedes grandes idées que Darwin a introduites,c’est celle de l’unité du vivant ! »

La biodiversité masquel’unité du vivantDécouverte des lois de l’hérédité, découvertede l’ADN, séquençage du génome, biologiemoléculaire, rien n’est venu entamer cettenotion fondamentale ; malgré la diversité desformes de vie observées, il existe une évidenteunité du monde vivant à toutes les échelles :structure cellulaire, ADN, réplication, trans-cription, traduction, code génétique. Tout orga-nisme peut donc être compris à partir de

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Darwin : l’évolution est (toujours) en marche DOSSIER

CENTRE CEA DE SACLAY LE JOURNAL 3

La théorie de l’évolution, unprogramme de recherchesDarwin ne connaissait pas l’existence desgènes. C’est leur découverte et celle de ladouble hélice d’ADN qui a donné une explica-tion physico-chimique précise de la diversitébiologique. Alors, les biologistes ont-ils percétous les mystères du vivant ? Loin s’en faut ! « Leterme de théorie est souvent mal interprété,souligne le généticien. Il ne s’agit pas d’un sys-tème explicatif clos et définitif. En fin decompte, Darwin a lancé un vaste programmede recherche ». L’origine de la vie, l’étendue dela biodiversité, le mécanisme de l’hominisation,les rôles respectifs des gènes et de l’environne-ment restent de grandes questions, désormais

abordées en termes moléculaires par l’étudedes génomes. Reste enfin la question crucialede la définition des espèces. Comment classerles organismes en espèces ? Par leur ressem-blance ? Par leur capacité à se reproduire entreeux ? La réponse n’est pas tranchée aujourd’huiencore. Le problème est particulièrement épi-neux pour l’immense majorité des espèces queconstituent les microbes, bactéries et autresvirus, dont le mode de reproduction est asexué.Et il est loin d’être anecdotique pour cetteespèce qui nous tient particulièrement à cœur :l’homme. Mieux comprendre l’évolution deces micro-organismes nous aide à nous pré-parer à l’émergence de nouvelles maladies.Cette question est loin d’être purement acadé-

mique : sans même parler de la tragédie duSIDA, nos journaux sont aujourd’hui remplis decommentaires sur l’émergence de nouvellesespèces virales, comme les nouveaux virusgrippaux. Le CEA est présent dans cesrecherches, notamment à l’Institut des mala-dies émergentes et des thérapies innovantes(iMETI), à Fontenay-aux-Roses.

Et l’espèce humaine dans tout ça?L’espèce humaine continue certainement àévoluer lentement, mais cette évolution estmoins biologique que culturelle. L’homme estun grand singe très doué pour le langage et laculture, capable d’intervenir sur les autresespèces et de modifier son environnement.Bref, « c’est un animal doué de raison, pour lemeilleur et pour le pire. Depuis Darwin, noussavons que l’espèce humaine a sa propre his-toire biologique. Nous savons aussi qu’elleinfluence de plus en plus le devenir des autresespèces, créant une situation sans précédent

Recherche en génomique environnementale, au centre national de séquençage, à Évry.

© F. RHODES / CEA

Darwin a lancé un vaste programmede recherche. Sa « théorie » n’est pasun système explicatif clos et définitif.“

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DOSSIER Darwin : l’évolution est (toujours) en marche

CENTRE CEA DE SACLAY LE JOURNAL

Qu’appelle-t-on la théorie de Darwin ?Darwin emploie une formule précise pourdésigner sa théorie : « descendance avecmodification ».

Luca, nouvel AdamLa vie sur Terre aurait pour origine une seuleet même forme de vie, désignée sousl'acronyme Luca (Last Universal CommonAncestor), qui serait apparue il y a quelque2,5 milliards d'années.

La classificationphylogénétique du vivant La phylogénétique a pour but decomprendre l’histoire évolutive du vivant.Elle repose sur deux règles fondamentales :tous les êtres vivants ont des relations deparenté entre eux (phylogénie) ;ils possèdent un ancêtre commun dont ilssont tous les descendants (généalogie).

Quelques repères...1735 Carl Von Linné met au point un modèlede classification des espèces.

1839 Théodore Schwann reconnaît dans la cellulel’unité morphologique et fonctionnelle de tous lesorganismes vivants.

1859 Charles Darwin élabore la théorie del’évolution.

1865 Gregor Mendel formule les lois surl’hérédité, sans susciter d’intérêt à l’époque.Ces lois seront redécouvertes au début XXe siècle.

1953 Francis Crick et James Watson découvrentla structure en double hélice de l’ADN, quiexplique comment l’information est codée,copiée, mutée.

dans l’histoire du vivant puisque c’est finale-ment notre propre succès évolutif qui com-promet la biodiversité », précise PierreThuriaux.

De l’observation àl’instrumentationDepuis Darwin, les sciences du vivant ont cesséd'être purement descriptives. Elles se sontdotées de puissants moyens techniques quileur permettent d'intervenir sur leurs objetspour mieux les connaître. La rapidité de l’ac-quisition des connaissances depuis cinquanteans ne s'expliquerait pas sans l'accroissementexponentiel, pendant la même période, descapacités de calcul, de modélisation et de simu-lation des ordinateurs. Reprenons l’exemple dela levure. Comme tout organisme cellulaire,elle est dotée d’un génome, qui a été décryptégrâce à une collaboration européenne àlaquelle ont participé des chercheurs du CEA.

Le résultat a été publié en 1996 : 50 % des pro-téines (provenant directement des gènes) pro-duites par la levure sont comparables à cellestrouvées chez l’homme ; 40 % des gènesconnus responsables de maladies génétiqueshumaines sont aussi présents chez la levure !Il a fallu plus de dix ans pour décrypter pourla première fois le génome d’un organismeeucaryote (cellule avec noyau). Ont suivi lesséquençages de génomes plus complexes, deplantes, d’animaux et évidemment del’homme. C’était à l’époque un défi immense.Aujourd’hui il ne faudrait que quelquessemaines pour y parvenir. C’est une des caractéristiques de la biologiemoderne : les moyens techniques dont dispo-sent les chercheurs sont sans rapport avecceux qu’ils utilisaient il y a seulement vingt ans,sans même parler de ceux dont disposaitDarwin. Pour autant, la démarche scientifiqueest toujours la même. « En ce sens, Darwin estexemplaire parce qu’il était extraordinaire-ment curieux. Quand il voyait quelque chosequ’il ne comprenait pas, il ne se disait pas : jene comprends pas, ça n’a pas d’importance. Ilse disait au contraire : je ne comprends pas,donc c’est important. » En posant les fonda-tions d’une science d’abord théorique puis deplus en plus expérimentale, « Darwin nous apermis de relier un passé à jamais disparu à unprésent toujours en train de se construire ».

Gaëlle Degrez

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Pierre Thuriaux, généticien aucentre CEA de Saclay, estime quetous les chercheurs en biologiesont des héritiers de Darwin.

Analyses de prélèvementssanguins au Service de

pharmacologie etd’immunologie, au centre

CEA de Saclay.

Le saviez-vous?

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5CENTRE CEA DE SACLAY LE JOURNAL

Une bombe d'antimatière?Dans « Anges et démons », Dan Browna imaginé une bombe d'antimatièremenaçant le Vatican, mais rassurez-vous ! Si toute l'antimatière produite auCERN était annihilée au contact de lamatière, l'énergie résultante suffirait toutjuste à allumer une ampoule pendantquelques minutes ! L'antimatière fascineles physiciens car elle semble avoirdisparu de l'Univers alors même que leBig Bang a produit matière et antimatière enquantités égales. En quête d'une dissymétrieténue qui expliquerait que notre Univers soit néd'une infime quantité de matière « survivante »,des physiciens de Saclay préparent une source« intense » d'anti-électrons, qu'ils combineront àdes anti-protons du CERN pour former des anti-atomes d'hydrogène. Ils tenteront d'isoler cesanti-atomes pour découvrir comment la gravitéagit sur l'antimatière, une propriété encoreinconnue de cette curiosité de la nature. Pour en savoir plus sur l’antimatière :http://www.lhc-france.fr/?article332Bar des sciences sur la chaîne Télésavoirs :http://www.telesavoirs.eu/programme.php?ID=77

Des flashes bleus dans le ciel africainInstallé en Namibie, HESS (High EnergyStereoscopic System) est le plus sensible desobservatoires au sol de rayons gamma enprovenance de l'Univers austral, ou plusprécisément des flashes lumineux qu'ilsproduisent en interagissant avec l'atmosphèreterrestre (par effet Cerenkov).Le 24 avril dernier, le porte-parole de cettecollaboration européenne et africaine, leprofesseur Werner Hofmann, du Max-PlanckInstitut de Heidelberg, a visité et échangé avecles équipes de Saclay qui participent à lafourniture de matériel électronique pour HESSet travaillent au développement de télescopes àrayonnement Cerenkov de la prochainegénération (Cerenkov Telescope Array).

Un aimant supraconducteur dans l'espaceEn 2010, le détecteur AMS (Alpha MagneticSpectrometer), équipé d'un aimantsupraconducteur, devrait rejoindre la stationspatiale internationale, d'où il analysera lesparticules cosmiques de très haute énergie.

Le 2 avril 2009, le directeur de cettecollaboration internationale, le professeur SamuelTing, prix Nobel de physique en 1976, aprésenté à Saclay les enjeux physiques ettechnologiques de cette première mondiale.Il a exprimé notamment le souhait que lesingénieurs de Saclay participent à la mise aupoint et à la qualification de l'aimant d'AMS.

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l’instar des plantes et des champignons, lesbactéries secrètent spontanément des sub-

stances dont certaines se révèlent très pré-cieuses, comme les antibiotiques par exemple.Il s’agit de petites molécules fabriquées très sou-vent par des enzymes1. De manière inattendue,l’étude d’une de ces molécules, l’albonoursine,produite par la bactérie Streptomyces noursei, aentraîné des chercheurs de l’iBiTec-S2 sur lapiste d’une enzyme essentielle à la survie d’uneautre bactérie, Mycobacterium tuberculosis,l’agent responsable de la tuberculose.

Une nouvelle cible contrela tuberculoseC’est une enquête de très longue haleine quemènent les biologistes, grâce notamment auxoutils de la biochimie, de la biologie molécu-laire et de la bio-informatique. Quelle est l’en-zyme à l’origine de l’albonoursine ? Il fautquelquefois emprunter des détours pourrésoudre une énigme : identifier par exempleune autre enzyme, capable de modifier lastructure de la petite molécule ; purifier cetteenzyme pour analyser la succession d’acides

VariabilitéLes micro-organismes comme les virus ou les bactéries co-évoluent avec l’espèce humaine, à un rythme accéléré qui esten relation avec leur durée de vie plus éphémère. Contre lesnouveaux agents infectieux qui apparaissent et d’anciennespathologies résistantes aux traitements actuels qui resurgissent,les chercheurs doivent trouver de nouvelles armes.

À

1/ Une enzyme a pour fonction de favoriser une réactionbiochimique particulière.2/ Institut de biologie et de technologies de Saclay. Cestravaux ont été menés en collaboration avec une équipede l’Institut de génétique et microbiologie (UniversitéParis-Sud 11, CNRS).

aminés qui la composent ; une fois ce séquen-çage établi, remonter au gène codant pourcette enzyme ; analyser les gènes voisins de cegène qui ont une forte probabilité d’être impli-qués dans l’histoire de la même petite molé-cule. Et là, il n’est pas interdit d’avoir un peude chance. Les chercheurs ont eu l’heureusesurprise de découvrir le gène codant l’enzymeresponsable de la production de l’albonour-sine ! Ils se sont ensuite intéressés au gèneparent chez Mycobacterium tuberculosis, qui lesa conduits au gène codant une enzyme essen-tielle à la survie de cette bactérie. Avec ladécouverte de LA petite molécule associée àcette enzyme, les biologistes de Saclay ontouvert la voie à l’utilisation d’autres petitesmolécules apparentées pour bloquer le fonc-tionnement de l’enzyme. Une cible entièrementnouvelle pour lutter contre cette redoutablemaladie. Bref, un fabuleux espoir !

et unité du vivant

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Les bactéries ont un potentiel évolutif qui peut menacer l’espèce humaine. Leur étude peut conduiredans le même temps à de nouvelles voies thérapeutiques contre des maladies comme la tuberculose.

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celles-ci constituent une « bibliothèque »,ouverte à tous les scientifiques, régulièrementmise à jour et enrichie par les calculs et lesexpériences des uns et des autres. Grâce à des raisonnements probabilistes, lesphysiciens sont en mesure de garantir des pré-cisions aussi élevées que la sûreté nucléairel'exige, portant sur l'incertitude avec laquelleest connu le résultat final. Cette incertitudepermet de définir rationnellement des marges,en relation avec la situation d'exploitation ouaccidentelle envisagée.

Un « vrai » combustible enlaboratoireOn pourrait se dire que rien ne vaut une expé-rience grandeur nature. Si le niveau d'irradia-tion à l'intérieur de la cuve du réacteur ou surle circuit primaire ne se prête pas à l'installa-tion de capteurs, il est en revanche possibled'instrumenter le circuit secondaire. Un bilanthermique, réalisé juste après l'arrêt du réac-teur, fournit une valeur par défaut de la puis-sance libérée par le combustible car ilméconnaît les fuites thermiques à travers lacuve, les tuyaux du circuit primaire et l'échan-geur de chaleur. Ce mode d'évaluation s'avèreen réalité sans intérêt car trop imprécis. D'oùl'idée de l’expérience MERCI 4 , qui vise à repro-duire la complexité des phénomènes siégeantdans un véritable combustible nucléaire, maisdans un environnement de laboratoire, adaptéaux exigences d’une métrologie de qualité. Ils’agit d’exploiter l’ensemble des données expé-rimentales et les confronter aux résultats desimulation pour affiner les modèles et réduirel’incertitude pesant sur les calculs actuels. Plusconcrètement, MERCI consiste à introduire un

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NUCLÉAIRE Mesurer la puissance résiduelle d’un combustible usagé

ombien de temps faut-il laisser « refroidir »le combustible nucléaire avant de sou-

lever le couvercle de la cuve du réacteur d'unecentrale ? Comment évacuer efficacement lachaleur dégagée par le cœur d'un réacteur ensituation accidentelle ? Évaluer avec précisionla puissance thermique libérée par le combus-tible nucléaire à l’arrêt du réacteur représenteaujourd’hui un enjeu économique. Ainsi parexemple, les exploitants du parc électronu-cléaire français attendent trois ou quatre joursavant d'ouvrir la cuve d'un réacteur pour enextraire1 les assemblages2 de combustibles àrenouveler. Si la puissance thermique rési-duelle pouvait être connue avec une précisionaccrue, ces temps morts pourraient être réduitssans risques et c'est peut-être une journée d'ex-ploitation du réacteur qui pourrait alors êtregagnée. L'impact économique de cette évalua-tion est donc très significatif.

Préciser l'incertitudeComment a-t-on jusqu'à présent évalué cettegrandeur, critique à plus d'un titre ? Demanière étonnante, la meilleure évaluation àce jour repose sur des calculs mettant en jeudes dizaines de milliers de données physiques ! Un combustible neuf est un oxyde « simple »,contenant deux isotopes3 de l'uranium. Enrevanche, le même combustible, après unséjour en réacteur, s'est enrichi de plus d'unmillier d'isotopes d'éléments divers, résultantde fissions, de captures de neutrons, de désin-tégrations radioactives, etc. On comprend sanspeine que la modélisation de ces processusrequière une somme impressionnante de don-nées de base de physique nucléaire. Connuesavec une précision comprise entre 1 et 30 %,

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CENTRE CEA DE SACLAY LE JOURNAL

Ballet bien huilépour un « boa » très chaudEstimer précisément la puissance thermique libérée par un combustiblenucléaire à l'arrêt d'un réacteur est un défi d'une complexité exceptionnelle.C'est aussi un enjeu économique important pour l'exploitation descentrales nucléaires. Dans ce domaine, des équipes des centres CEA deSaclay, Grenoble et Marcoule ont accompli un exploit récompensé parle Grand Prix de la Société française d’énergie nucléaire.

Pour le transfert du crayon de combustible duréacteur au calorimètre, chaque geste a étéoptimisé et répété pendant plus d’une année.

© P. ROSUEL / CEA

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1/ Ces assemblages sont ensuite transférés dans unepiscine d'un bâtiment voisin et stockés là quelques mois.2/ Assemblage : ensemble de crayons de combustibles.3/ Les isotopes d'un même élément chimique ne sedistinguent que par le nombre de neutrons querenferment leurs noyaux atomiques. Si leurs masses sontlégèrement différentes, leurs propriétés chimiques sontidentiques. Deux isotopes de l’uranium sont présentsdans le combustible neuf : 96,3% d'U238 non fissile et3,7% d'U235 fissile.4/ MERCI : Mesure de l’Énergie Résiduelle d’un CrayonIrradié.

Le calorimètre renfermant le crayon est unobjet technologique unique. Mesurer desquantités de chaleur associées à desrayonnements ionisants impose de recourir àdes écrans absorbants massifs, dont l’inertiethermique nuit à la cadence des mesures(toutes les cinq secondes). Il faut par ailleursbannir les fuites thermiques et pour cela,aligner rigoureusement la température ducalorimètre sur celle de son environnement.Et comme l’instrument utilise des phénomènesd’évaporation et de condensation, il faut quel’eau bouille... à 22°C, ce qui se produit quandon abaisse la pression d’un facteur quarante.Plus que les mesures de températures àquelques ‰ près, ce sont celles de débitsd’eau à 1 ‰ près qui représentent unevéritable prouesse. Des performancesabsolument nécessaires pour atteindre laprécision inférieure à 1% sur la mesure de lapuissance thermique résiduelle du crayon !

Un objettechnologique unique

Mesurer la puissance résiduelle d’un combustible usagé NUCLÉAIRE

7CENTRE CEA DE SACLAY LE JOURNAL

combustible analogue à celui d’une centralenucléaire dans un réacteur expérimental et àmesurer la puissance thermique libérée par lecombustible sitôt sorti du réacteur. Une desprincipales difficultés réside dans ce dernierdétail…

Des gestes optimisés pendantplus d’un anReprenons le fil de l’expérience. Un échantillonde crayon de combustible neuf d'EDF est ins-tallé en périphérie du cœur du réacteur expé-rimental Osiris, à Saclay, où il est irradiépendant près de trois mois. D’une longueur dequarante centimètres, il est solidaire d’unflexible d’une douzaine de mètres, équipé dedispositifs de mesure et de contrôle. Dès l’arrêtdu réacteur, ce tuyau, baptisé « boa » par lesexpérimentateurs, doit être transféré le plusvite possible depuis le cœur d’Osiris, à neufmètres sous eau, jusqu’à la cellule blindée dubâtiment attenant au réacteur. Arrivé là, lecrayon doit être introduit à l’intérieur d’un

calorimètre, après avoir été séparé du flexible.Vingt-six minutes : tel est le score réalisé parl’équipe de vingt personnes pour cetteséquence accélérée de manœuvres spéciali-sées. Cette performance résulte d’un travail col-lectif de plus d’une année auquel a collaboré unergonome extérieur à l’installation. Unedizaine de répétitions, dont cinq filmées, apermis de régler à la perfection les enchaîne-ments des gestes de tous les intervenants :prendre le mousqueton sur la rambarde, accro-cher l’élingue, etc.

L’œuvre de nombreuses équipes La genèse du projet remonte à une dizained’années, avec le dimensionnement de l’expé-rience par des physiciens et modélisateurs deSaclay. Les expérimentateurs du réacteur Osirisont ensuite conçu et développé les dispositifsà irradier et l’instrumentation associée. Laconception du calorimètre a été confiée à desingénieurs de Grenoble (voir ci-dessous) tandisque des équipes de Marcoule et de Saclay

étaient mobilisées pour des analyses du crayonaprès les cinquante jours de mesures calorimé-triques : mesurer les rayonnements gammaémis par le crayon (Saclay), dissoudre le com-bustible (Marcoule), réaliser l’analyse chi-mique ultrafine du matériau en solution parspectrométrie de masse spécialisée (Saclay),etc. Dans les mois qui viennent, ce sont au totalplus de dix mille mesures que les modélisateursauront à dépouiller et interpréter pour parfaireleurs outils de simulation !

L’échantillon decombustible a été irradié

dans le réacteur Osirispendant trois cycles

de 25 jours.

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TECHNOLOGIE Évaluer les risques liés à l’usage de l’hydrogène pour l’automobile

CENTRE CEA DE SACLAY LE JOURNAL

1/ Un bar représente une pression très proche de celle del’atmosphère.2/ Ce centre CEA de la Direction des applicationsmilitaires est situé près de Tours.3/ L’hydrogène au sens strict est l’élément H et le di-hydrogène, appelé aussi abusivement hydrogène, est lamolécule H2 , composée de deux atomes liéschimiquement.4/ En réalité, il s’agit de plusieurs programmes, certainsfinancés par l’Agence nationale de la recherche (Pan-H :Drive, puis Dimitrhy) et d’autres par l’Union européenne(Hysafe).5/ Ineris : Institut National de l'EnviRonnementindustriel et des rISques.

a voiture à hydrogène est-elle une utopie ?De nombreux chercheurs, au CEA notam-

ment, s’emploient à répondre par la négativeà cette question. Le réservoir d’hydrogène apparaît aujourd’huicomme un verrou particulièrement difficile àlever. Refroidir à la température de l’hydrogèneliquide ? Trop coûteux. Stocker sous hautepression le gaz nécessaire à une autonomieconvenable ? Délicat : il faut concevoir unconteneur étanche et résistant à des centainesde bars1. Une voie alternative, le stockagesolide, consiste à lier chimiquement l’hydro-gène à un autre élément et à l’extraire parsimple chauffage. Les deux dernières solu-tions sont actuellement explorées par deséquipes CEA des centres de Grenoble et duRipault2.

La plus petite des moléculesL’hydrogène : son nom évoque une bombe, unmoteur de fusée... Cette « redoutable » molé-cule3, qui n’existe pas à l’état naturel car elle

réagit spontanément avec l’oxygène de l’airpour former de l’eau, est en réalité la plus petitedes molécules. Ceci explique qu’elle s’échapped’un conteneur réputé étanche bien plus faci-lement que toutes les autres. Mais attention,au-dessus d’une concentration de 4 % dansl’air, elle induit un risque d’explosion. On com-prend aisément qu’un réservoir d’hydrogène sedoive d’être irréprochable. Imaginons ce problème résolu. Quel impact undéfaut d’entretien du véhicule aurait-il vis-à-visd’un risque de fuite de faible amplitude ? C’estl’objet du programme4 auquel participent desexperts de sûreté nucléaire, qui étudient parailleurs certains scénarios accidentels condui-sant à un relâchement d’hydrogène dans unréacteur.

Un garage instrumentéAinsi un garage tout à fait ordinaire, avec saporte basculante, a-t-il été construit dans le halld’un laboratoire de la Direction de l’énergienucléaire à Saclay. À l’intérieur, l’installation du

même nom, Garage, permet de réaliser desfuites de gaz contrôlées, en présence ou nond’un véhicule prototype, dont l’aménagementintérieur reproduit celui de la future voiture àhydrogène. Les expériences sont conduitesavec de l’hélium, un gaz parfaitement inerte,dont les propriétés physiques sont extrême-ment voisines de celles de l’hydrogène.Le recensement des situations « à risque » a étéétabli par PSA Peugeot Citroën et l’Ineris5 etces événements ont été traduits en termes despécifications techniques pour les expériencesdans Garage. Les équipes du CEA reproduisentces cas tests, mesurent la dispersion du gaz etconfrontent les données expérimentales à leursmodèles numériques. L’objectif visé à plus longterme est d’établir des recommandations deconception, tant pour le véhicule que pour legarage. Quand l’hydrogène ne fera plus peur...

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L’installation Garage peut être exploitée avec ousans voiture. Elle offre en particulier la possibilitéde simuler des fuites d’hydrogène grâce à desrelâchements contrôlés d’hélium. Des capteursenregistrent la dispersion de l’hélium dans le local.En zoom, capteur de mesure de la concentration enhélium de l’air ambiant.

Drôle de garageQuels sont les risques d’explosion liés à l’usage de l’hydrogène pourl’automobile ? Une équipe du CEA, à Saclay, met ses compétences dansle domaine électronucléaire au service de cette question, cruciale pourl’acceptabilité de l’hydrogène par le public.

@ En savoir plusApprofondissez cet article sur le site Internetdu CEA : http://www-anr-panh.cea.fr/

© L. BISENIUS / CEA

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Les métamorphoses des neutrinosÀ Chooz, dans les Ardennes, la centralenucléaire ne se contente pas de délivrer del'électricité, elle fournit aussi les physiciens enneutrinos ! Ces mystérieuses particules, queseule une épaisseur d’une année lumière deplomb pourrait stopper de manière certaine, ontla particularité de se métamorphoser en troisvariétés. Dès 2010, l’expérience Double Choozétudiera ces transformations grâce à deuxdétecteurs géants identiques, l’un placé près ducœur de la centrale et l’autre, à un kilomètre,qui devrait être le témoin de la disparition d’unepartie des particules détectées par le plusproche. Un accord vient d’être signé entre leCEA, le CNRS, EDF et la région Champagne -Ardennes pour ce projet. De 2010 à 2016, une centaine de chercheursva se relayer par groupe de dix sur les deux sitesde « Double Chooz ». Les mesures servirontégalement à démontrer qu'il est possibled'analyser à distance la composition ducombustible nucléaire. Double enjeu donc, dephysique fondamentale et de lutte contre laprolifération nucléaire !

Projet européen Catiemon INTERNATIONAL

9CENTRE CEA DE SACLAY LE JOURNAL

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haque année, de nombreux incidents decaténaires viennent perturber le trafic

ferroviaire. Dans le contexte de la dérégulationde ce secteur, la Commission européenne alancé différents programmes de recherchedont l’objectif est d’améliorer la fiabilité etl'interopérabilité des réseaux ferrés européens.C’est ainsi que le LIST, avec de nombreux par-tenaires industriels et des compagnies ferro-viaires, a participé au projet Catiemon(CATenary InterfacE MONitoring), démarré enavril 2005 sous le pilotage de l’industrielSiemens. L’enjeu : identifier les trains suscep-tibles de dégrader le système d’alimentationélectrique. « L’objectif était de construire unportique fixe d’une centaine de mètres de long,équipé de capteurs capables d’inspecter destrains en exploitation commerciale, et plusprécisément, d’analyser finement l’interactionmécanique entre leurs pantographes3 et lacaténaire », explique Guillaume Laffont, cher-cheur au LIST. Ces instruments mesurent pré-cisément les déformations mécaniques de laligne de contact de la caténaire au passage dutrain. Insensibles aux ondes électromagné-tiques, ces capteurs optiques sont installés surla ligne elle-même, au plus près du contact avecle pantographe.

Des centaines de trains inspectés Un portique expérimental, équipé par le LIST,a d’abord été testé au pied du tunnel duLötschberg, sous les Alpes suisses en 2007 et

2008. Au cours de campagnes s’étalant sur dix-huit mois, plusieurs centaines de convois, dontcertains dédiés à des tests, ont été inspectés endivers lieux jusqu’en janvier 2009. Forts de cesuccès, les partenaires de Catiemon espèrentmaintenant démarrer l’exploitation opération-nelle de ces dispositifs en plusieurs points duréseau européen identifiés comme critiques.« À terme, ce portique pourrait devenir unoutil d'aide à la décision pour les gestionnairesde réseaux. Le but est de détecter les trains sol-licitant à l’excès les caténaires, d’interdire leurcirculation pour protéger l’infrastructure etd’optimiser ainsi la disponibilité des voies fer-rées », résume Guillaume Laffont.

Émilie Gillet

1/ Laboratoire d’Intégration des Systèmes et desTechnologies.2/ Caténaire : ligne aérienne assurant l’alimentationélectrique des locomotives ou des tramways via une lignede contact métallique.3/ Pantographe : dispositif articulé de captage ducourant sur les locomotives électriques, qui agit parfrottement sur les caténaires.

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Le CEA LIST1 a apporté son savoir-faire en matière de capteurspour un projet européen visant à caractériser l’interaction entrele train et la caténaire2 et ainsi à optimiser l’exploitation desinfrastructures ferroviaires.

Catiemon : préserver lesinfrastructures ferroviaires

Le plus grand cadran solaire du mondeSur la paroi monumentale du barrage deCastillon, dans les Alpes de Haute-Provence,il est désormais possible de lire l'heure solaire.Roland Lehoucq, physicien au centre CEA deSaclay, et Denis Savoie, responsable del'astronomie au Palais de la Découverte, ontimaginé ensemble de construire le plus grandcadran solaire du monde sur un barrage d'EDF.

Impossible d'implanter un « mât » de vingtmètres qui aurait attiré la foudre. C'est lacorniche, située en haut de l'édifice, qui faitoffice de « bâton ». Il a fallu réaliser un relevétopographique au laser de la paroi courbe pourcalculer les projections associées aux heures.Un vrai défi mathématique ! Défi relevé puisquele cadran, inauguré le 21 juin 2009, indiquel'heure du lieu à 2 minutes près, de 6 heuresà 18 heures.

1/ Si le pantographe exerce une force excessivesur la ligne de contact, la caténaire est uséeprématurément. Dans le cas inverse, le contactélectrique risque d’être perdu, ce qui génère le plussouvent un arc électrique, également susceptibled’endommager la caténaire. Sur la photo, capteurde déplacement tridimensionnel.

2/ Ligne de capteurs à fibres optiques collée surle fil de contact de la caténaire.

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PORTRAIT Steven Stolte, chaire senior du « Triangle de la Physique »

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idées qui me viennent à l'esprit de manière foi-sonnante, et qui ne sont pas toutes fécondes.Et puis, c'est formidable de pouvoir accéder àdes expériences variées que je serais bien inca-pable de réaliser moi-même. Cela démultiplieles questionnements et accélère la progres-sion de nos connaissances. J'essaie malgré toutde consacrer à peu près 50 % de mon temps àma famille et à mes amis aux Pays-Bas. Cetéquilibre-là est important également. »

scientifique émérite et nomade

CENTRE CEA DE SACLAY LE JOURNAL

Journées portes ouvertesles 21 et 22 novembre 2009À l’occasion de la fête de la science et del’Année mondiale de l’astronomie, lecentre CEA de Saclay ouvrira les portesde son site de l’Orme des Merisiers.Réservez dès à présent votre week-enddes 21 et 22 novembre pour un parcoursdédié à la découverte de l’Univers, desateliers pédagogiques, des rencontresavec des chercheurs, des conférences et

des « vraies » observations diurnes et nocturnes.Le centre CEA de Saclay sera également présentà la ferme du Moulon pour présenter d’autresthématiques, comme la climatologie,le magnétisme, les énergies, etc.

Des prions dans le lait de brebisJusqu’à un passé récent, aucun prion infectieuxn’avait jamais été détecté dans le lait d’ovins oude caprins atteints de tremblante. Aussi aucunerestriction ne pesait sur le lait et ses dérivés.Pour la première fois, une équipe de l’Institut debiologie et de technologies de Saclay, encollaboration avec l’Institut national de rechercheagronomique et une équipe anglaise, a décelé laprésence de prions dans le lait et le colostrum debrebis en phase d’incubation de la maladie, avecun niveau d’infectiosité significatif (mais trèsinférieur à ceux observés dans le cerveau desmêmes animaux), et ce plusieurs mois avantl’apparition des signes cliniques. Ces résultatsindiquent que le lait pourrait contribuer à latransmission de la maladie à l’intérieur d’untroupeau.

L’analyse des images d’IRM de soixante-dix-sept enfants autistes a permis de montrer quedes anomalies cérébrales sont associées àcertaines formes d’autisme.

L’analyse d’images enregistrées par letélescope spatial Fermi a révélél’explosion la plus violente jamaisobservée dans l’Univers. Cetteexplosion, ou sursaut gamma,provient généralement del’effondrement sur elle-même d’uneétoile massive en fin de vie, donnantnaissance à un trou noir.

Des généticiens de Saclay ontdécrypté une partie de l’ADN del’ours des cavernes. Il vivait dansla grotte Chauvet en Ardèche il y a32 000 ans et s'est éteint il y a15 000 ans. L'ours moderne le plusproche de lui est l'ours brun. Leurancêtre commun vivait il y a1,6 million d'années.dé

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1/ « Collisions moléculaires, paquets d'ondesélectroniques et complexes », tel était le thème dusymposium organisé en l'honneur de Steven Stolte àOrsay le 28 avril 2009. 2/ Le « Triangle de la physique » est un réseauthématique de recherche avancée qui fédère deslaboratoires du Plateau de Saclay en nanosciences,physique de l'état condensé, etc. L'équipe de Benoît Soepcollabore dans ce cadre avec Danielle Dowek duLaboratoire de collisions atomiques et moléculaires(CNRS, Université Paris-Sud 11).3/ Complexe : ici, ensemble de deux molécules (ou d'unemolécule et un atome) reliées par une liaison plus faiblequ'une liaison chimique.

Steven Stolte

Sélection d’actualités scientifiquesdes laboratoires de Saclay et deleurs partenaires

Reconnu comme le meilleur chercheur de sa spécialité1,ce chimiste de l’Université Vrije (Pays-Bas) a séjournéde février à avril 2009 à l'Institutrayonnement matière de Saclay(Iramis). Il renouvellera l'expérienceen 2010. Un enrichissementfabuleux, à la fois pour l'hôte etpour le laboratoire d'accueil.

out a commencé avec des questions logis-tiques de produits difficiles à approvi-

sionner. De véritables discussions scientifiquesse sont ensuite engagées entre le professeurSteven Stolte, de l'Université Vrije d'Amsterdamet Benoît Soep, de l'Iramis. Quand ce derniera proposé une collaboration au chimiste néer-landais et obtenu, grâce au soutien du« Triangle de la physique »2, une chaire seniorà Saclay, Steven Stolte n'a pas hésité uneseconde avant d'accepter. « Le dispositif expé-rimental de Benoît est unique au monde,explique-t-il. Il permet de produire des com-plexes3 et de les irradier avec des lasers, touten enregistrant finement les effets de l'absorp-tion des impulsions laser par les complexes. Cetapport d'énergie, qui s'apparente à une colli-sion, peut simplement casser en deux le com-plexe ou bien induire une réaction chimiqueentre ses composants. L'originalité de l'expé-rience de l'Iramis, c'est qu'il est possible d'ob-server, avec une excellente résolution spatialeet temporelle, les directions dans lesquellessont expulsés les fragments ou les produits dela réaction. »

Entre Saclay, Changchun, Oxfordet AmsterdamSteven Stolte a participé à la conception et àla réalisation d'une expérience que BenoîtSoep est en train de dépouiller et d'inter-préter, en relation permanente avec lui, mêmes'il travaille actuellement en Chine pourquelques mois. Steven Stolte partage en effetson temps entre Amsterdam, Oxford, Saclay etChangchun où il occupe, à temps partiel, unechaire de l'Université Jilin. Ce mode de vienomade lui pèse-t-il ? « Non, je ressens unbesoin impérieux de parler de science àd'autres personnes, de confronter avec elles les

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Benoît Soep

© L. BISENIUS / CEA

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En direct des labos ACTUALITÉS

11CENTRE CEA DE SACLAY LE JOURNAL

ifficile d’introduire au bloc opératoire unaccélérateur d’électrons, encombrant et

non stérile ! Les lasers à impulsions ultra-brèves pourraient un jour compléter l’offre enmatière d’accélérateurs, l’objectif étant debanaliser les radiothérapies réalisées au coursd’interventions chirurgicales. Dans le prin-cipe, il suffit d’acheminer le faisceau laser ensalle d’opération jusqu’à un dispositif compactdélivrant un gaz sous vide qui constituera lasource d’électrons rapides. Comment ce dispo-sitif fonctionne-t-il ? Sur son passage, l’impul-sion laser arrache des électrons aux atomes dugaz qui devient un plasma (« nuage » d’ions

Radiothérapie miniature au bloc

Extinction de l’hommede Néandertal : le climatmis hors de cause

1/ Laboratoire des sciences du climat et del’environnement (CEA, CNRS, Université VersaillesSaint-Quentin), laboratoire « De la préhistoire àl’actuel : culture, environnement et anthropologie »(CNRS, Université de Bordeaux 1, ministère de laCulture et de la Communication, Institut national derecherches archéologiques préventives), laboratoire« Environnements et paléo-environnements océaniques »(CNRS, Université de Bordeaux 1, École pratique deshautes études), Université du Kansas.

1/ Iramis : Institut rayonnement et matière de Saclay.

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.Un test simple pour déterminer si un patient est conscient ou non

positivement chargés et d’électrons). Les élec-trons sont chassés tandis que les ions, pluslourds, restent immobiles. Après le passage del’impulsion laser, les électrons reviennent versles ions et oscillent, créant une onde électrosta-tique dans le sillage du laser. Une fraction desélectrons est piégée dans cette onde et accé-lérée dans la direction de propagation du laser.Une équipe de chercheurs de l’Iramis1, en col-laboration avec des physiciens italiens de Pise,a réussi à produire de cette façon un faisceaud’électrons répondant aux besoins de la radio-thérapie « intra-opératoire ».

uand l’homme moderne arrive enEurope, il y a 40 000 ans, l’homme de

Néandertal occupe les lieux depuis longtemps.Ces deux populations vont cohabiter jusqu’à ladisparition de l’homme de Néandertal. Uneéquipe multidisciplinaire franco-américaine1

vient d’apporter un nouvel éclairage sur cetévénement en excluant l’hypothèse selonlaquelle Néandertal n’a pas pu s’adapter à ladétérioration climatique observée à cettepériode.Les chercheurs ont reconstitué le « film » duclimat et analysé la dispersion des sites succes-sivement occupés par chacune des popula-tions. Pour cela, ils ont utilisé un outil de

Q modélisation, développé pour étudier la biodi-versité. En procédant par centaines d’itéra-tions et en apprenant de ses erreurs, le logiciela analysé la relation entre les données géogra-phiques, climatiques et archéologiques pourdéterminer les aires possibles d’occupationpar chacune des populations. Les chercheursont ainsi pu identifier les territoires occupéspar les premiers hommes modernes et par lesderniers néandertaliens. Ils ont pu comprendrele rôle de chaque facteur climatique dans leursdistributions respectives. En particulier, lesnéandertaliens du sud de la péninsule ibé-rique auraient été les derniers à disparaîtreparce qu’ils étaient alors préservés du contact

avec les hommes modernes. Pour les cher-cheurs, la disparition de Néandertal serait dueà la compétition avec l’homme moderne.

Crâne d’un Homme de Néandertal,découvert en 1830 à Engis, Belgique

(collection du Grand Curtius à Liège).

Est-il possible de déterminer si un individu estconscient en observant l’activité de soncerveau ? Une question cruciale pour la difficileprise en charge des malades « noncommunicants ». Une équipe de l’Inserm et duGroupe hospitalier Pitié-Salpêtrière, associantdes chercheurs de NeuroSpin, vient deperfectionner un test fondé sur l’étude de laréponse cérébrale à un stimulus auditif,enregistrée au moyen d’un casque muni

d’électrodes. Le test consiste à rechercher unevariation de cette réponse corrélée à l’émissiond’un son différent, à la suite d’une série de sonsidentiques. Par exemple AAAB après une sérieAAAA. Or, les signaux détectés ne permettentpas de trancher entre une perception conscienteou non consciente. Le nouveau test inversesimplement la règle : AAAA après une sérieAAAB. Grâce à l’imagerie par résonancemagnétique fonctionnelle, les chercheurs ont pu

établir le lien entre une réponse positive à cetest et l’activation de zones cérébrales typiquesd’un état conscient. L’absence de réponse nepermet pas toutefois de conclure, car le patientpeut être par exemple en train de dormir.Cet outil devrait permettre d’identifier au plustôt le retour à la conscience de ces malades« emmurés vivants » afin d’engager unecommunication adaptée avec eux.

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PORTRAIT Catherine Cesarsky, Haut commissaire du CEA

Femme de science, femme d’actionSon « bonjour ! » claque comme un signal.Comme un conseil aussi : aller à l’essentiel. Pasquestion de musarder. Depuis le 22 avril 2009,l’essentiel de Catherine Cesarsky se définit dansla mission que lui a donnée le président de laRépublique en tant que Haut Commissaire àl’Energie Atomique. Elle est la première femme àoccuper ce poste. Surprise ? « Il faut croire que j’enavais le profil », résume, dans un sourire, celle dontle parcours professionnel et scientifique souligneune formation et une compétence internationales.

Née en France, elle grandit à Buenos Aires(Argentine) où son père, ancien résistant, aaccepté un poste diplomatique, avant d’ouvrir unelibrairie. Plus tard, la famille reviendra en France.Entre temps, Catherine Cesarsky débute une car-

rière d’astrophysicienne avant de rejoindre lesÉtats-Unis pour un doctorat à Harvard (1971),puis un passage au Caltech (California Institute ofTechnology). Viennent le CEA, le CNES et ses pro-jets internationaux, l’Observatoire européen aus-tral et ses installations au Chili.

Forger des objectifsDepuis août 2006, elle est aussi la première

femme présidente de l’Union astronomique inter-nationale : « Moi qui envisageais une carrière dethéoricienne avec papier, crayon et ordinateur, jeme suis retrouvée avec la responsabilité deconstruire quelques gros instruments… j’avoueque cela m’a plu et que cela me plaît. »

Deux mois après sa nomination, CatherineCesarsky s’attache « à forger » ses objectifs :« J'apporte à ce poste une couleur internationale,mais mon rôle est de garder un œil très attentif

sur l’activité scientifique du CEA et son dévelop-pement ». Très soucieuse de la qualité de larecherche menée par l'établissement, CatherineCesarsky s'attache aussi à deux pistes de réflexion :la coopération avec le monde de l’entreprise, etune approche concrète en direction du grandpublic qui n’a pas forcément une idée précise durôle et de l’action du CEA, alors que l’écologie etles questions environnementales liées à la consom-mation des énergies et au traitement de leursdéchets se sont installées au cœur du débatpublic : « Je lis, j’écoute, j’apprends les argumentsdes uns et des autres. »

www-centre-saclay.cea.frCentre CEA de Saclay Le Journal / N° 44 / 3ème trimestre 2009 / Editeur CEA (Commissariat à l’énergie atomique) Centre de Saclay 91191 Gif-sur-Yvette Cedex

Directeur Yves Caristan / Directrice de la publication Danièle Imbault / Rédacteur en chef Christophe Perrin / Rédactrice en chef adjointe Sophie AstorgIconographie Véronique Gachet / avec la participation de Gaëlle Degrez et Émilie Gillet.

Conception graphique Efil communication (www.efil.fr) / N° ISSN 1276-2776 Centre CEA de Saclay. / Droits de reproduction, textes et illustrations réservés pour tous pays.Impression Gibert-Clarey, imprimeur labellisé Imprim’vert (charte pour la réduction de l’impact environnemental, la traçabilité et le traitement des déchets).

Papier certifié PEFC / 10-31-1073 (garantie d’une gestion durable des ressources forestières).

Ensemble de grands télescopes (Very Large Telescope)de l’Observatoire européen austral, dans le désertd’Atacama, au Chili.

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© ESO / H.H. HEYER