Comment nous sommes tous devenus américains

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  • 7/25/2019 Comment nous sommes tous devenus amricains

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    teledocle petit guide tl pour la classe

    20062007

    ARTEMARDI 5 JUIN, 20h45

    En sappuyant sur des films darchives et sur les

    tmoignages de diverses personnalits, ce documen-

    taire, loccasion des soixante ans du plan Marshall,

    montre comment, en investissant massivement dansla reconstruction de lEurope, les tats-Unis ont

    model notre socit dans bien des domaines. Puis il

    suit lvolution des relations transatlantiques sur six

    dcennies, depuis la guerre froide jusqu linvasion

    de lIrak.

    Comment nous sommes tous devenus amricains

    Un documentaire

    franco-belge de Joachim

    Fritz-Vannahme et Sergio

    Ghizzardi (2007),

    coproduit par

    la RTBF, Seppia, Non

    Rouge et Arte,

    diffus dans

    la soire Thema Tous des

    Amricains?

    56 min

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    Rdaction Mathieu Souyris, professeurdhistoire et de gographie

    Crdit photo Seppia / Non rougedition milie Nicot et Anne PeetersMaquette Annik Gury

    Ce dossier est en ligne sur le sitedeTldoc.www..cndp.fr/tice/teledoc/

    Dualit du plan MarshallAnalyser le double objectif de ce plan en 1947.

    On sappuiera pralablement sur le film darchivesqui entame le film, quon opposera celui qui fustigele rgime stalinien: quels messages ces films cher-chent-ils faire passer? La solidarit atlantique. Le premier aspect du planMarshall est conomique et affiche sa volont desolidarit. De 1947 1951, les tats-Unis injectentlquivalent de 4 5% du PNB europen dans lesseize pays qui acceptent le plan. Parmi eux, la Franceet le Royaume-Uni en sont les principaux bnfi-

    ciaires. Chose comprhensible pour la France qui serelve de ses ruines (un PIB de 54 en 1947 par rap-port un indice 100 en 1938), moins vidente pourle Royaume-Uni (PIB dindice 108) qui utilise lesfonds essentiellement pour rembourser ses dettes.Le 5 juin 1947, le gnral George Marshall, alorssecrtaire dtat, annonce Harvard la mise en placede lEuropean Recovery Program, appellation offi-cielle du plan. Les fonds sont issus de dons, de dblo-cages de sommes du Trsor amricain, mais aussi duproduit de la vente de marchandises en provenancedes tats-Unis et vendues au plus offrant, produit

    rinvesti ensuite dans le plan dont les accords pr-voyaient lachat obligatoire de matriel amricain.Cest nanmoins un formidable coup de pouce l-conomie europenne, et les intervenants allemandsdu documentaire insistent sur la dimension solidairede laide. Ce ntait pourtant pas lide premire: leplan Marshall remplace le plan Morgenthau de 1944qui prvoyait de faire payer lAllemagne, comme en1919. Il fut abandonn, dune part parce quil renou-velait les conditions dun mcontentement germa-nique, dautre part parce quentre 1944 et 1947,lAllemagne tait passe du statut dennemi abat-

    tre celui de pays alli ncessaire la lutte contrelURSS. On fera noter que, tandis que le nom origineldu plan est tomb dans loubli, la dnominationplan Marshall est devenue une faon courante dedsigner les plans daide durgence, comme le rcentplan Marshall pour la Wallonie en Belgique. Une vise politique. La seconde dimension du planMarshall est politique: il faut soutenir leffort dereconstruction de lEurope afin den faire une allie etun partenaire commercial stable, mais aussi un rem-part contre le communisme. Staline ne sy taitdailleurs pas tromp en obligeant les pays de lEst refuser laide amricaine, quil voyait comme un che-val de Troie de limprialisme. Cet aspect est bienvoqu par le documentaire, o laide financire sac-compagne dinjonctions politiques claires: adhsion la socit de consommation, rduction du pouvoir

    Europe/tats-Unis: je taime, moi non plusHistoire et anglais, troisime-lyce

    Comment ont volu lesrapports entre lEurope etles tats-Unis depuis la finde la seconde guerremondiale? En prenantcomme lment fondateurle plan Marshall, les auteursdu film abordent laspectsduisant de la puissanceamricaine tout envoquant la dfiancecroissante quinspire le

    modle amricain enEurope. Car si lEuropedaujourdhui sestlargement construite sousinfluence amricaine dansde nombreux domaines(loisirs, style de vie,politique, arts, sciences),lamerican way of life est,depuis la guerre duVitnam, de plus en plusremise en cause. Rehauss

    par les tmoignages dediffrentes personnalits(Wim Wenders, PhilippeLabro, Daniel Cohn-Bendit,Hubert Vdrine, tienneDavignon), des imagesdarchives et des extraits defilms de fiction, ledocumentaire tente decomprendre pourquoiprvaut en Europe ce doublemouvement

    dantiamricanisme et defascination pour les tats-Unis.

    des syndicats, valorisation des valeurs amricaines travers la propagande mais aussi le cinma (cf.extraits du film One, Two, Three de Bill Wilder). Danscette perspective, les tmoignages de MichaelNauman (directeur du quotidien allemand Die Zeit) etPhilippe Labro sont intressants: ils formeront unenouvelle lite de journalistes, forme aux tats-Unis,apte promouvoir des modes de vie et de penseamricains, allant ainsi dans le sens dune conqutedouce des mentalits (cf. encadr sur lesoft power)qui se traduira ensuite par des votes en faveur desdmocrates chrtiens ou des sociaux-dmocrates

    partisans du libre-change.

    Un antiamricanisme leuropenne? Reconstituer en lexplicitant la chronologie de

    la perte de lgitimit des tats-Unis en Europe. On reprera dans le film les diffrentes tapes dela monte de lantiamricanisme en Europe, ou toutau moins de la dfiance envers les tats-Unis. Onrappellera que, ds linstigation du plan Marshall,des dissonances se firent entendre: les Anglais firentdes pieds et des mains pour rsister lintgrationconomique immdiate quexigeait le plan; les

    Nerlandais rsistrent la pression en faveur dudmantlement de leur Empire au nom du libre-change et les Autrichiens refusrent tout net derformer leur systme bancaire et ferroviaire. Maisce qui est le plus vident, travers les images, cestde voir comment les tats-Unis sont passs du sta-tut de dfenseurs de la libert (on analysera le dis-cours de Kennedy Berlin) celui de promoteursdune hgmonie librale et culturelle mal accepte. On notera ainsi plusieurs vnements majeurs quiinduisent une vision plus critique de la part desEuropens: lintervention au Vitnam, la course aux

    armements dans les annes 1980, lingalit de lasocit amricaine dcouverte travers les combatsdes militants pour les droits civiques et enfin le faitque, partir de 1991 et lcroulement du bloc com-muniste, les tats-Unis se retrouvent sans ennemiidentifiable, ce qui les rduit au statut de grandepuissance unique. Comme le souligne MichaelNauman dans le documentaire, ce qui mne presquenaturellement les populations se dfier de cettepuissance se rsume ainsi: tout pouvoir suscite oppo-sition, surtout sil est omnipotent. On montrera aussicomment, dans les annes 1970, les jeunesAllemands lient la prsence danciens nazis dans lesuniversits la politique trangre amricaine, incar-ne par la doctrine Kirkpatrick, qui lgitime dans lesannes 1980 le soutien de rgimes dextrme droiteau nom du combat contre le communisme. Le foss

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    Joseph Nye et la notiondesoft powerLide de convaincre sansviolenter est ancienne. Ellefaisait partie de lastratgie romaine,rassemblant les lites despays occups autour devaleurs partagessduisantes et fdratrices.Elle a t rcemmentthorise par

    luniversitaire de HarvardJoseph Nye, un desanalystes les plus influentsaux tats-Unis. Dans sonlivreBound to Parties,publi en 1990, Nye,proche des cerclesdmocrates, soutient quilest impossible de revenir lisolationnisme des PresFondateurs aprslcroulement du bloc

    sovitique. Les tats-Unisdoivent assumer leur rlede modle pour le reste dumonde. Son ide est que lapuissance nord-amricainedoit muter, cesser dtre lapuissance dure (hardpower) associe la guerrefroide pour devenir unepuissance douce (softpower) en travaillant sacapacit de sduction afinque les modlesconcurrents seffondrentdeux-mmes (comme lemodle sovitique) etviennent adhrerspontanment aux valeurssociales, culturelles,politiques et conomiquesdes Amricains, sans queceux-ci aient tirer lemoindre coup de feu.

    grandit entre les valeurs thoriques des tats-Unis etleur mise en pratique. On montrera notamment comment la lutte contrele terrorisme est mal comprise en Europe: ce combatse place dans une optique civilisationnelle et nonplus politique. Or lpoque de la guerre froide, lestats-Unis taient sducteurs car leur combat repo-sait sur lidologie et non sur des diffrences cultu-relles majeures, or les Europens prfrent savoirpourquoi ils se battent plutt que contre qui (cf.lintervention de Wim Wenders). cela sajoutelmergence de lEurope unie aprs 1957, elle-mme

    porteuse de ses propres valeurs politiques, cono-miques et sociales. Des valeurs qui ne sont pas pri-ses en compte par les tats-Unis: le belge tienneDavignon (ancien commissaire europen) et le franco-allemand Daniel Cohn-Bendit montrent cette ten-dance amricaine ne croire quen ses propresvaleurs, les imaginer universelles. On pourra cetteoccasion rappeler ce quest le concept de destinemanifeste aux tats-Unis.

    En 2007, sommes-nous tous amricains? Dgager les aspects complexes de la relation

    culturelle des Europens aux tats-Unisjusquaujourdhui en soulignant parfois sescontradictions.

    Cette question, pose directement par le titre dudocumentaire et de la soire Thema dans laquelle ilsinsre, mne sur les terres de lhistoire des cultureset des mentalits. On distinguera ainsi les diffrentsvecteurs damricanisation, cette colonisation delinconscient voque par Wim Wenders et tienneDavignon. On recensera en classe les diffrentsdomaines dans lesquels lamricanisation de lEuropedans les dernires dcennies est plus manifeste. Il y

    a dabord les produits, neufs, originaux, jamais vus etsoutenus par une publicit permanente (cas de Coca-Cola). Ensuite, la mythification des tats-Unis tra-vers les films dHollywood, et notamment leswesterns, qui marqurent les gnrations vivant entre1945 et jusquen 1965, poque o le genre se trans-forme et devient plus critique sur limage des tats-Unis. Il faut insister sur ce dcalage, rapport parHubert Vdrine, entre la perception idalise destats-Unis par les Europens et la ralit du pays.On se souviendra la phrase de John Ford: Si lalgende est plus belle que la ralit, imprimez lalgende. De fait, on avancera que les Europensont t amricaniss de faon profonde, traversleurs modes de vie et de consommation. Ce nest pasforcment li au plan Marshall, puisque des pays quien bnficirent de faon moindre, comme lEspagne

    franquiste, finirent par tre amricaniss alors quedautres qui en bnficirent comme la Turquie res-trent plus impermables cette influence atlan-tiste. On mettra ainsi en avant une sorte dempathieentre les Europens et les Amricains sur le plan cul-turel, qui aboutit des paradoxes comme celui vo-qu dans le documentaire par Serge July: les jeunesantiamricains des annes 1970 portaient des vte-ments amricains, coutaient de la musique amri-caine et regardaient des films amricains; dcalage,une fois de plus, entre limage perue et limagevcue.

    On notera cependant une relle spcificit euro-penne. Une spcificit qui peut tre elle aussi attrac-tive, comme le montre lanalyste amricain JeremyRifkin dans son livre Le Rve europen (voir Pour ensavoir plus). La culture amricaine apparat, lafin de lenqute mene par les auteurs du film, davan-tage comme un vernis que comme une vritableculture. Un parallle est dailleurs tabli avec lesvaleurs de lEmpire romain. Ce vernis permet larsurgence, parfois radicale, de cultures nationales,rgionales ou identitaires, ou alors la formation decultures syncrtiques comme les cultures urbaines

    europennes (cf. les scnes de danse de rue). Onpourra alors mettre en exergue une vison complexedes rapports culturels amricano-europens, faits desduction et de dfiance. On pourra terminer en vo-quant lapparition de contre-modles comme ltaitle modle sovitique durant la guerre froide. Ainsiles Europens pourraient, terme, tre aussi influen-cs par ce qui se passe Shanghai, So Paulo ouBombay.

    Pour en savoir plus KAGAN Robert,La Puissance et la Faiblesse, Plon, 2003. RIFKIN Jeremy,Le Rve europen, Fayard, 2005. COPPOLA Antoine, DUBOIS Rgis,Histoire politiquedu cinma, Sulliver, 2007.

    Deux avis diffrents sur le plan Marshall, sa porteimmdiate et ses consquences:

    lun dans leMonde diplomatique

    www.monde-diplomatique.fr/1997/06/RAMONET/8782

    lautre extrait du site du gouvernement amricain

    http://usinfo.state.gov/journals/itps/0406/ijpf/

    ellwood.htm

    Pour complter la soire Thema, le documentaireWelcome, Mr Marshall (2007, 56min, 21h45) prend

    pour exemple la Grce, premier pays bnficiaire du

    plan Marshall, bien des gards banc dessai pour

    la promotion de lamerican way of life dans le monde.

    http://www.monde-diplomatique.fr/1997/06/RAMONET/8782http://www.monde-diplomatique.fr/1997/06/RAMONET/8782http://www.monde-diplomatique.fr/1997/06/RAMONET/8782http://usinfo.state.gov/journals/itps/0406/ijpf/ellwood.htmhttp://usinfo.state.gov/journals/itps/0406/ijpf/ellwood.htmhttp://usinfo.state.gov/journals/itps/0406/ijpf/ellwood.htmhttp://www.monde-diplomatique.fr/1997/06/RAMONET/8782
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    Billy Wilder est unralisateur amricainconnu pour sescomdies (Certainslaiment chaudouEmbrasse-moi idiot).Le film One, Two, Three,ralis en 1961, justeavant la constructiondu Mur, se droule

    Berlin. Chef-duvrerempli de clichs surles Allemands, lesRusses et lesAmricains un patronamricain essaiedempcher sa filledpouser uncommuniste est-allemand , cest aussi

    une charge contre lesystme communiste.Les trois extraitsdiffuss dans ledocumentaire (15e min)permettent de voircomment, au-del de lacomdie russie, unfilm dHollywood faitpasser les valeursamricaines sans

    agressivit et avechumour.

    Un rve amricain lcranFiche de travail

    Questions1. travers les trois extraits, identifiez la faon dont le ralisateur Billy Wilder met en

    avant les valeurs des tats-Unis comme la dmocratie, la consommation, le libre-changeconqurant, le rve amricain.

    2. En quoi la troisime scne est-elle une caricature politique ?3. Billy Wilder utilise-t-il la contrainte pour faire passer les valeurs amricaines? Commentappelleriez-vous ce type de propagande?

    4. En quoi rside son efficacit? Les Sovitiques avaient-ils les moyens de jouer sur lemme registre?